Le barrage de Tamri, qui alimente la ville d’Agadir, a rarement été autant asséché.
Dossier Eau et assainissement
VA LENTINO BELL ONIEn Afrique du Nord, ce n’est pas la mer à boire
Confrontés à un intense stress hydrique, le Maroc, l’Algérie et l’Égypte se tournent vers cette technique pour assurer à leur population un approvisionnement en eau potable fiable.
BILAL MOUSJIDDepuis 2018, le Maroc traverse l’une des périodes les plus sèches de son histoire. C’est le constat alarmant dressé début décembre 2022 par le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, qui s’est exprimé devant le Parlement : « Le volume global des précipitations ne dépasse pas 17 milliards de m3 , soit le volume le plus faible enregistré au cours des cinq dernières années dans le pays », a-t-il lancé. Conséquence : la quantité moyenne d’eau disponible par habitant n’est plus que de 620 m3 aujourd’hui, contre 2560 m3 dans les années 1960, ce qui met le royaume dans une situation de « stress hydrique structurel », selon une note de la Banque mondiale publiée en juillet 2022.
Une station dès 1977
Comme de nombreux pays africains, tout aussi confrontés à une pénurie d’eau, amplifiée par l’accroissement de la demande, le Maroc cherche des solutions pour sécuriser l’approvisionnement auprès de sa population. Et pas seulement en poursuivant sa politique des barrages, une stratégie qui ne coule plus de source tant le déficit pluviométrique a fini par assécher les immenses réservoirs du royaume. Si bien que la centaine de grands barrages du pays ne contenait, au 1er décembre, qu’à peine 4 milliards de m3 , soit un taux de remplissage d’un peu moins de 24 %.
« L’état actuel des ressources hydriques nous interpelle tous, gouvernement, institutions et citoyens. Il exige de nous un devoir de vérité et de responsabilité dans notre action pour remédier aux faiblesses et aux carences qu’elle révèle », avait d’ailleurs souligné le roi Mohammed VI dans un discours prononcé le 14 octobre, donnant ses instructions pour mettre à exécution un nouveau « programme national prioritaire de l’eau ». Vaisseau amiral du programme : la construction de stations de dessalement d’eau de mer, une opération qui consiste à isoler les sels dissous de l’eau pour obtenir de l’eau douce
Le procédé n’est pas nouveau au Maroc, pays qui revendique la
position de pionnier dans la région pour avoir construit sa première usine de dessalement en 1977, dans la ville de Boujdour. Aujourd’hui, il en compte neuf, dans plusieurs localités. Seulement, elles ne représentent que 3 % du volume de production nationale. Une part pour ainsi dire dérisoire au vu des défis actuels.
« Il y a en ce moment une mobilisation générale pour accélérer la réalisation de stations de dessalement. On a pris beaucoup de retard », déclare à Jeune Afrique Charafat Afilal, ancienne ministre déléguée chargée du secteur de l’eau. C’est sous son mandat qu’un projet de station de dessalement àCasablanca, présentée comme la plus grande d’Afrique, a été lancé en 2018.
D’une capacité de 300 millions de mètres cubes par an, la station doit assurer, à terme, l’alimentation en eau potable de près de 7 millions d’habitants du Grand Casablanca et des zones voisines d’El Jadida-Azemmour et SettatBerrechid. Un projet dont les travaux sont prévus pour juin 2023 et qui suscite, depuis son lancement, l’intérêt de plusieurs grands groupes nationaux et internationaux, comme les français Engie et Veolia, les espagnols Acciona et Abengoa, le japonais Itochu ou encore les marocains Somagec, SGTM et Nareva – filiale du holding royal Al Mada.
« L’objectif est d’arriver à une vingtaine de stations de dessalement d’eau de mer à l’horizon 2030 », a promis, en mai 2022, le ministre de l’Équipement et de l’Eau, Nizar Baraka, lors d’une rencontre organisée par le patronat. Certaines usines devraient même entrer en service dès2025,commelastationdeDakhla (90000 m³ par jour), dont la réalisation a été confiée en 2019 à Nareva, en consortium avec Engie, pour un
budget de 2 milliards de dirhams (près de 180 millions d’euros).
Dans la ville de Safi, dans l’ouest du pays, une autre station doit également sortir de terre pour produire annuellement quelque 30 millions de m3 . Ainsi qu’une station de dessalement dans la région de l’Oriental, d’une capacité initiale de production de 100 millions de m3 . « Un appel à manifestation d’intérêt doit être lancé prochainement pour ce projet », nous confie une source au fait du dossier À terme, l’objectif du gouvernement est d’assurer au moins 50 % de l’approvisionnement en eau potable à partir de la technique du dessalement.
La politique des barrages, une stratégie qui ne coule plus de source tant le déficit pluviométrique a asséché les réservoirs.
Le Maroc n’est pas le seul pays dans la région à se tourner vers cette ressource alternative. Touchée par le phénomène de raréfaction de l’eau dès les années 1990, l’Algérie a très tôt misé sur l’utilisation des ressources non conventionnelles, au premier rang desquelles le dessalement d’eau de mer, afin de desservir en eau potable ses zones côtières. « L’Algérie a très bien avancé depuis trente ans, même s’il y a peu de données publiques actualisées sur le volume de production de ses stations de dessalement », estime un spécialiste qui a accompagné de nombreuses stratégies hydriques en Afrique du Nord.
Les autorités algériennes ont élaboré un plan, dès 2023, visant la construction de treize stations de dessalement dotées d’une capacité totale de 2,31 millions de m³ par jour, soit 850 millions de m³ par an. De quoi approvisionner quelque 8 millions d’habitants. Selon les données du ministère algérien de l’Énergie, 11 stations desservaient, à la fin de l’année 2018, quelque 8 millions d’habitants dans les villes d’Alger, Oran, Skikda, Tlemcen, Boumerdès, Tipaza, Mostaganem, Ain Temouchent et Chlef.
Des capacités qui se sont renforcées depuis, à en croire le président Abdelmadjid Tebboune, qui
a assuré, en novembre, lors d’un Conseil des ministres, que l’Algérie produit plus de 2,7 millions de m³ par jour. En mai dernier, le gouvernement a décidé de passer à la vitesse supérieure en confiant à l’Algerian Energy Company (AEC) la réalisation de cinq nouvelles stations dotées chacune d’une capacité de 300000 m³ par jour. « L’Algérie a adopté une stratégie pour la réalisation des stations de dessalement d’eau de mer en vue de garantir la production d’eau et d’assurer son autonomie grâce aux eaux des barrages », a déclaré en mai 2022 le ministre algérien de l’Énergie, Mohamed Arkab, affirmant que
THIERRY MONASSE/GETTY IMA GESla mise en exploitation des cinq nouvelles unités, prévue en 2024, porterait la capacité globale de productiond’eaudessaléeà42 %–contre 17 % actuellement. En 2030, promet-il, l’Algérie comptera 25 stations de dessalement, contre 14 en mai 2022.
À l’image de ses voisins, la Tunisie dispose d’unemyriadedepetitesstations de dessalement et d’ouvrages plus importants situés à Djerba (50 000 m³ par jour, extensibles à 75000 m³), à Skhira (12 000 m³ par jour), en plus d’une unité de désalinisation d’eau saumâtre [une eau non potable dont la salinité est inférieure à celle de l’eau de mer], à Gabès, dotée d’une capacité de 30000 m³. En tout, l’ensemble des stations génère une production de 200 000 m³. Tout aussi affecté par le stress hydrique, le Pays du jasmin multiplie les partenariats pour doubler sa capacité de production.
Des programmes pharaoniques
Dernier projet en date : une station de dessalement d’eau de mer dans le Sud, qui nécessitera un investissement de 600 millions de dollars (près de 567 millions d’euros). Dotée d’une capacité de 200 000 m³, elle sera réalisée par la société britannique Solar Water PLC, dont les responsables ont été reçus le 1er décembre par le ministre de l’Économie et de la Planification,
L’usine de dessalement d’eau de mer d’Agadir est en service depuis fin janvier 2022.
Samir Saïed. L’Égypte n’est pas en reste. Dépendant essentiellement des eaux fluviales du Nil, le pays aux 104 millions d’habitants entend diversifier ses ressources. Début décembre, le patron du Fonds souverain égyptien, Ayman Soliman, a annoncé un gigantesque programme de 21 stations de dessalement d’eau de mer appelé, dès 2025, à produire 3,3 millions de m³ (contre 800000 actuellement). Le tout pour un budget de 3 milliards de dollars. Un marché qui intéresserait, selon
VERS UNE DÉMOCRATISATION DE LA TECHNOLOGIE
De nouvelles techniques promettent de révolutionner le dessalement de l’eau de mer C’est le cas de la membrane nanoscopique mise au point par Patrick Senet et Adrien Nicolaï, deux chercheurs de l’Université de Bourgogne, décrite comme plus résistante et moins énergivore, un atout majeur quand on sait que l’électricité constitue entre 40 % et
45 % du coût de production de l’eau dessalée.
« La membrane que nous avons étudiée est ultra-fine, de l’épaisseur de quelques atomes, et hypersélective car percée de pores extrêmement petits (nanomètre ou en dessous du nanomètre) permettant de laisser passer les molécules d’eau mais pas les ions du sel, qui sont plus gros. C’est donc le nano-filtre
le PDG du fonds, 200 groupes de 35 pays.
« Le dessalement est maintenant une solution incontournable. D’autant que la technologie devient de plus en plus accessible pour les pays du continent », juge Charafat Afilal. L’expérience marocaine en témoigne : dans la première station de Boujdour, construite il y a quarante-cinq ans, le coût du mètre cube est de 50 dirhams, contre moins de 7 dirhams pour les nouvelles stations, comme celle d’Agadir.
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parfait. Mais dans sa conception actuelle, c’est un prototype de laboratoire. Des recherches doivent encore être menées pour appliquer de telles membranes au dessalement », expliquent à Jeune Afrique les deux chercheurs du laboratoire interdisciplinaire Carnot de Bourgogne. Selon l’ancienne ministre marocaine chargée de
l’eau, le dessalement de l’eau devrait peu à peu se généraliser sous l’effet de l’abaissement du coût de production. « En 2025, le mètre cube devrait coûter 0,16 dollar [0,15 euro] », dit-elle, citant une étude présentée en Arabie saoudite en septembre 2022, lors d’une conférence sur l’avenir de l’industrie du dessalement.
B.Mo
SÉNÉGAL DOSSIER EAU ET ASSAINISSEMENT
Mass Thiam
La Société nationale de gestion intégrée des déchets (Sonaged) a vu le jour en mai 2022.
Son directeur général en détaille pour Jeune Afrique la feuille de route.
THÉO DU COUËDIC
En cette matiné e de décembre, Mass Thiam, 51 ans, reçoit Jeune Afrique dans son bureau dakarois, à côté du rond-point de la Cité Keur Gorgui, au huitième étage de l’immeuble qui abrite le siège de l’Unité de coordination de la gestion des déchets solides (UCG) – comme l’indiquent les trois immenses lettres sur le toit. « On va bientôt changer le sigle », annonce-t-il En mai dernier, l’UCG a été absorbée par la Société nationale de gestion intégrée des déchets (Sonaged). La création de cette société anonyme – dont l’État est le seul actionnaire – a été adoptée lors d’une séance à l’Assemblée nationale. Mass Thiam en occupe le poste de directeur général.
Ces trois dernières années, l’expert en management au parcours atypique – du pétrole (Mobil Oil) à l’immobilier (Teyliom Properties), en passant par les télécoms (Tigo) –s’est échiné à valoriser l’image de la filière, en multipliant les actions de terrain et en relayant le tout sur les réseaux sociaux. L’occasion de faire un bilan alors que la gestion des déchets dans le pays devrait passer un nouveau palier.
Jeune Afrique : Pourquoi avoir créé une nouvelle société de gestion des déchets?
Mass Thiam : La Sonaged a une fonction beaucoup plus étendue que
l’UCG, dont la mission principale est dévolue à la collecte des déchets ménagers. À présent, nous nous projetons vers l’économie circulaire et l’industrialisation des déchets, en plus de l’extension de nos missions sur les déchets industriels et biomédicaux, y compris les déchets pétroliers et gaziers. Nous travaillons depuis mai – avec un cabinet international – sur un business plan de cinq ans. L’objectif est d’améliorer l’arsenal institutionnel et juridique pour une gestion plus vertueuse des déchets. On commence déjà à discuter avec des investisseurs.
Comment éveiller les consciences dans le pays?
Il faut « rééduquer » nos enfants depuis le plus bas âge pour changer les mentalités. Il y a des entrepreneurs qui se développent autour du recyclage, de la revalorisation des déchets; à nous de les accompagner. Nous réfléchissons aussi à la création d’une école de formation aux métiers du nettoiement, en collaboration avec les universités publiques et privées. Les gens ont tendance à réduire la gestion des déchets aux balayeurs et aux collecteurs; derrière, il y a de l’informatique, de la technique…
De plus, la gestion des déchets est un préalable absolu au développement. Et tout cela devra se faire en jonction parfaite avec les secteurs privés international, local et
industriel. Le tout avec l’appui des collectivités territoriales qui sont compétentes en la matière.
Vous étiez à la tête de l’UCG depuis janvier 2020, avant la création de la Sonaged. Quel bilan tirer de ces deux dernières années?
Entre 2019 et 2021, nous sommes passés de 2 800 à 14 000 agents – dont 10 000 viennent du programme présidentiel pour l’emploi des jeunes. On a aussi travaillé à la mise en place du mobilier urbain pour limiter la prolifération de dépôts sauvages, implanté 150 points de regroupements normalisés qui servent aujourd’hui de points de collecte, commencé à tester le tri sélectif au niveau de trois d’entre eux…
Combien de tonnes de déchets ont été ramassées à Dakar l’an dernier?
À Dakar, 1,5 million de tonnes de déchets ont été collectées en 2021, pour un taux de collecte de quasi 100 %. Mais, dans les régions, on tombe à 36 %. Les gens ont tendance à se focaliser sur la décharge de Mbeubeuss, mais il faudrait beaucoup plus s’inquiéter des déchets qui sont produits, enfouis, brûlés dans les régions. La couverture nationale s’améliore toutefois
Tous les déchets de la région de Dakar sont-ils destinés à la décharge de Mbeubeuss?
Oui. Notre challenge est de couper ce lien et de nous assurer que la chaîne de tri prévue à Mbeubeuss soit utilisée à bon effet (lireencadré)
En allant personnellement sur le terrain et en renforçant votre présence sur les réseaux sociaux, vous avez participé à changer l’image du secteur…
Les gens qui travaillaient dans les déchets n’étaient pas mis en valeur, on ne distinguait pas un agent d’entretien d’un passant dans la rue. Nous avons fait du leadership par l’exemple, en montant avec eux dans les camions la nuit… Aujourd’hui, nous recevons des milliers de demandes de jeunes diplômés qui
veulent travailler dans la gestion des déchets.
Nous leur avons fait comprendre qu’il n’y avait pas de sous-métier, qu’il était possible de commencer dans des métiers de balayage et de terminer à des postes à responsabilité. Mais la grande difficulté, c’est le budget. Pour cette raison, nous avons commercialisé certains services. L’UCG récolte 2 millions d’euros par an via la collecte privée de déchets auprès d’hôtels, de restaurants et de stations-service. C’est une manière de limiter notre dépendance au budget de l’État.
Vous avez également prévu des plans de communication auprès des télévisions locales…
Nous pensons à une succession de spots télévisés d’une quinzaine de secondes, à raison d’un par jour Le 1er janvier, par exemple, nous allons montrer le président de la République en train de dire à un charretier qu’il ne faut pas jeter les gravats sur la chaussée. Le lendemain, un éducateur dans une école islamique à Touba va demander à une dame de ne pas répandre les eaux de ménage sur la chaussée…
La télévision nationale est prête à nous laisser passer les spots gratuitement; maintenant, notre mission,
c’est de convaincre les différentes télévisions privées et d’en faire une initiative nationale. Ensuite, nous relayerons le tout sur les réseaux sociaux.
Dans cet écosystème, quel est le rôle du Projet de promotion de la gestion intégrée et de l’économie des déchets solides (Promoged), lancé en juin 2021?
Le Promoged est une ligne de financement destinée à apporter des infrastructures au Sénégal pour une meilleure gestion des déchets, et la Sonaged se présente comme la société de patrimoine qui va créer les partenariats avec des entreprises privées afin d’exploiter ces infrastructures.
Ce dernier programme vise, à terme, à créer 150 infrastructures de traitement des déchets dans 138 communes, pour un coût total estimé à 206 milliards de F CFA (314 millions d’euros).
Où en est-on?
La phase d’étude est relativement longue. Quelques infrastructures de proximité ont commencé à voir le jour. Pour les grosses infrastructures, il faudra plus de temps, le processus de passation et d’attribution de marché peut être assez contraignant.
VERS UNE RÉHABILITATION DE LA DÉCHARGE DE MBEUBEUSS
Ouverte en 1968, Mbeubeuss est une immense décharge à ciel ouvert, située dans la commune de Malika (dans la banlieue de Dakar), qui inquiète de longue date en raison ldes dégâts écologiques et sanitaires qu’elle engendre.
Dans le cadre du Projet de promotion de la gestion intégrée et de l’économie des déchets solides (Promoged), le lieu va être progressivement assaini et réhabilité. Une unité de tri et de compostage y sera installée.
« La chose la plus importante, c’est la protection sociale des quelque 2000 récupérateurs qui y travaillent. Le Promoged conduit une étude de maintien des moyens de subsistance des récupérateurs, c’est une condition sine qua non, car nous ne voulons pas détruire de métiers », explique Mass Thiam, directeur général de la Société nationale de gestion intégrée des déchets (Sonaged).
À la suite d’un appel d’offres, les travaux de réhabilitation devraient être attribués courant 2023.« Le futur centre de tri sera ensuite installé et accompagnera le redéploiement de la décharge de Mbeubeuss », indique Mass Thiam.
Th. du C.
Le programme sera lié à la stratégie de la Sonaged, selon la formule des partenariats public-privé, et en collaboration avec les bailleurs de fonds [La Banque mondiale, la coopération espagnole, la Banque européenne d’investissement et l’Agence française de développement financent le Promoged à hauteur de 175 milliards de F CFA, NDLR], les collectivités territoriales et le secteur privé. En tout cas, ce ne sera pas pour 2023.
SYL VA IN CHERKA OUI POUR JAL’innovation à chaque goutte
Le Groupe international Mitrelli et ses filiales font de la créativité et l’innovation leurs meilleurs atouts pour répondreaux besoins en eau, améliorant la vie et la santé des populations et contribuantàlasécurité alimentairedel’Afrique.
L’accès àl’eau est encore un rêve lointain pour beaucoup. Un tiers des Africains sont confrontés àlapénurie d’eau et 400 millions de personnes sur le continent n’ont pas accès àl’eau potable. Pour améliorer la gestion des ressources, l’accès àl’eau, et renforcer la résilience climatique, il est essentiel de comprendre les facteurs locaux.
Owini, la filiale eau et assainissement de Mitrelli, apporte des technologies de pointe et des solutions sur mesure aux secteurs agricole, municipal (urbain et rural) et industriel. Chaque projet est adapté aux besoins locaux, et prévoit un transfert de connaissances pour renforcer l’autonomie des communautés et assurer de la durabilité des solutions développées.
L’eau pour tous
Danslecadre du projet «Water forAll », dont la premièrephase aété lancée en 2013, Owini aconçu et mis en œuvre dessolutionsdurables pour fournir de l’eau aux zonesreculées. 430000 personnes ont désormais accèsà l’eau potable,améliorant leur santé et leurs conditions de vie. Descentaines d’employéslocaux ont étéformésgarantissantainsi la viabilité du
projet et créant desopportunitésd’emploi pourlapopulationlocale.
L’approvisionnement en eaudecertaines régions peut être particulièrement difficile. Prenons l’exemple de Cunene, province au suddel’Angola, frappéepar une sécheresse prolongéequi aaffecté 80%dela populationlocale et décimé le bétail.Le gouvernement angolais asollicité desentreprises internationales pour apporter une réponseurgenteàlacrise de l’eaudansla région.
Lesingénieurs d’Owini ont effectué une analyse approfondie et des études sur le terrain pour évaluer les meilleures solutions.
«C’était un véritablechallenge :iln’y avait pas d’eau potabledanslarégion,les eaux souterraines étaient salées,leréseau électriquelocal était insuffisant pour alimenter les systèmes d’eau, et l’approvisionnement en carburantpour lesgénérateursétait extrêmement limité en raison de l’éloignement du village » aexpliquéZafrir Vaknin, directeur général actif d’Owini.
L’équipe aconçuunsystème innovant de dessalementdel’eau entièrementbasé surl’énergie solaire, qui conserve l’énergieproduite pendant la journéeetpermet la fourniture en eau24h/24. Pour atténuer le risquededysfonctionnement prolongé, un systèmedestockage d’eauaété ajouté pourgarantir l’approvisionnement en eau pendantquelques jours jusqu’àl’arrivée d’uneéquipe technique arrivepour résoudreles problèmes.
Le gouvernement achoisi de faireconfiance àOwini et uneeau saine coule désormais dans les villagesauprofitdes habitants et de leur bétail.
«Ceprojetaeuunfortimpact sur la viedes habitants» explique ZafrirVaknin. « Avant, lesfemmesetlesenfantsdevaientparcourirplusieurskilomètreschaque jour pour chercher de l’eauà la rivière. Désormais les enfantspeuvent allerà l’école et les
femmesseconsacreràdesactivitésgénérantdesrevenuspourleurfamille».
Le Groupe Mitrelli travaille surdes projets similaires dans d’autres pays pourfournir dessolutionsinnovantes pour l’approvisionnement en eauetenénergie. Owini promeut notamment desprojets de dessalementsur les longues plages d’Afrique de l’Ouest pourune eaupotable durable.
L’eau pour l’alimentation
90%delapopulation rurale de l’Afrique subsaharienne dépend de l’agriculture pour vivre et plus de 95%del’agriculture de la zone dépend des précipitations.
Owini collabore avec Agricultiva, également filiale de la division infrastructure de Mitrelli, sur des grands projets agricoles qui renforcent la sécurité alimentaire des pays, autonomisent les agriculteurs locaux, créent des emplois et améliorent le bien-être de la population.
Pour le projet de l’Agropole de Samba Caju (Angola), Owini aconstruit un barrage en terre pour alimenter en eau l’exploitation agricole, même durant la saison sèche, et les villages voisins. Avec ce modèle de grandes fermes irriguées par leur propre barrage et dotées d’un système d’irrigation de pointe, Owini et Agricultiva ont construit l’une des exploitations les plus avancées du pays. Lesrésultats sont impressionnants puisque la production annuelle de la ferme adoublé.
La technologie, les méthodologies et le modèle innovant utilisés àSamba Caju peuvent être facilement reproduits et mis en œuvre dans de futurs projets d’Agropole dans d’autres pays. Owini, dispose de technologies de cartographie des aquifères et de construction de barrages ayant fait leurs preuves en matière d’extraction optimale des sources d’eau pour la consommation et l’irrigation.
Les projetsde Mitrelli changent la viedetous ceux qu’ils touchent :femmes, hommes, enfants et villages entiers. Plus qu’une conduite d’eau, une ferme ou un câble électrique,ces projets donnent la possibilité aux individus de se concentrer sur ce qui compte vraiment:sedévelopper, développer leur territoire,et leur pays.
Le groupe Mitrelli est une société suisse qui conçoit et implémente des projets d’infrastructure avec une approche holistiques dans les domaines de l’eau et l’énergie, l’agriculture, la santé, l’éducationetla protection de l’environnement En collaboration avec des institutions publiques et des entreprisesprivées, le groupe s’engage àassurer un impact positif durable sur la prospérité économique et la qualité de vie en Afrique, en soutien aux Objectifs de développement durable(ODD) des Nations Unies.
Groupe Mitrelli
Siège social Zürcherstrasse 239 8500 Frauenfeld Switzerland
www.mitrelli.com
JAMG -©D roits réservés MITRELLIDISTRIBUTION
La Mé, source d’espoir des Abidjanais
BAUDELAIRE MIEU, À ABIDJANLancés en 2018, les travaux de construction de l’usine de traitement d’eau potable de la Mé ne se sont jamais arrêtés, et ce même au plus fort de la pandémie de Covid-19 Ce projet d’ampleur, installé sur 9 hectares et situé à 35 kilomètres d’Abidjan, sur les rives du fleuve Mé, fait partie de la stratégie du gouvernement pour résoudre les problèmes d’approvisionnement en eau potable de la capitale économique et de son
agglomération, dont l’urbanisation accélérée au cours de ces dernières années a, en effet, créé de nouveaux besoins.
Malgré la croissance économique soutenue du pays (7 % en 2021 et 6,4 % environ à moyen terme), Abidjan connaît des périodes de pénurie en eau potable Selon les prévisions du gouvernement, la production de la ville devrait atteindre les 800 000 m³ par jour à l’horizon 2025 – contre 640 000 m³ par jour
actuellement. Un chiffre qui ne cessera de croître, pour atteindre 1 million de m³ en 2030
Pour l’heure, on constate une différence entre production et besoins de l’ordre de 220 000 à 460 000 m³ par jour. Un écart qui pourrait se creuser davantage étant donné la démographie galopante de l’agglomération. En effet, sur plus de 29 millions d’habitants en Côte d’Ivoire, 15 millions vivent en ville, et Abidjan concentre, à elle seule,
36 % de la population urbaine du pays.
Ainsi, le projet de l’usine de la Mé, fruit d’un partenariat publicprivé conçu et développé par PFO Construction, filiale du conglomérat ivoirien PFO Africa, doit permettre d’alimenter en eau potable 1,5 million de personnes. Les résidents des cités-dortoirs de Yopougon et d’Abobo, qui représentent plus de 50 % des 5 millions d’habitants de la capitale économique, seront en partie approvisionnés par l’infrastructure. Tout comme la population de la commune huppée de Cocody.
PFO, Besix, Veolia… et la Sodeci
Le calvaire des populations du nord d’Abidjan en ce qui concerne l’eau devrait donc devenir un vieux souvenir.
La capacité de traitement de l’unité de production de la Mé est estimée à 240 000 m³ par jour. Par conséquent, même si ce projet ne résorbe pas entièrement le déficit en
eau potable, il devrait contribuer à le réduire considérablement
Au-delà du fait de répondre à un besoin des plus urgents, ce projet comporte également un enjeu technique. Il s’agit en effet de la première usinedetraitementquiutilisedel’eau de surface, contrairement à celles qui sont déjà actives dans le pays et qui puisent dans les nappes phréatiques.
L’infrastructureestcomposéed’ouvrages de prise d’eau, d’une usine de potabilisation, de canalisations et de deux châteaux d’eau d’une capacité de 5000 m³ chacun L’usine de traitement est adossée à un réseau de plus de 68 kilomètres de canalisations.
Ces deux derniers, qui s’inscrivent sur le long terme dans ce domaine, ont créé une entreprise commune, la Société ivoirienne des eaux et de l’environnement (SIEE), qui
DR
Représentant un investissement de 45 millions d’euros, la station de production de la Mé mobilise plusieurs entreprises Ainsi, le groupe belge Besix a réalisé les travaux de génie civil, notamment la construction des sites de l’usine et de la prise d’eau. PFO Construction développe également ce projet en partenariat avec le français Veolia.
sera chargée de l’exploitation, de la production et de la livraison à la société de distribution des eaux en Côte d’Ivoire (Sodeci), une filiale du groupe industriel français Eranove, qui a une concession de l’État ivoirien pour l’approvisionnement en eau des foyers.
Il s’agit de la première usine de traitement du pays qui utilise de l’eau de surface, et non celle issue des nappes phréatiques.
Tribune PatriceFonlladosa
Présidentduthink tank (Re)sourcesetancien président Afrique du Medef International
Du coût de l’eau et des priorités publiques
AuXXIe siècle,30%de la population mondiale n’atoujourspas accèsà une eausaine.Vingtsept COP plus tard, le constat estsévère: il faudrait multiplier par quatreles financements pour espéreratteindre, en 2050, l’objectif d’un accèsuniversel et équitable àl’eau potable.
Pluspersonnen’ignoreniles chiffres–aumoins 115milliards de dollars(109 milliards d’euros) d’investissementspar an sont nécessaires (horscoûtsdefonctionnement) –niles menaces, accentuées par l’impact du changement climatique, en particulier pour lespaysduSud.
Soyons réalistes, l’ODD 6 [objectif de développement durable 6des Nations unies: garantir l’accèsdetous àdes servicesd’alimentation en eauet d’assainissement gérésdefaçon durable,NDLR]nesera pas atteint. Et le nombredeconflitsliésà l’eauexplose,d’après le Pacific Institute:une centained’incidents ont étérecensés de 1960 à2010, et plus de 800,deplusenplus violents,de2010 à2021… Afrique et Asie en tête.
«Sile«coût de l’eau»est très souvent considérécommeun obstacle àl’accèsdecette ressource au plus grand nombredans les pays émergents, ce n’estpas pour desraisons liées auxtechniquesemployées.Les méthodes ancestralesont étéremplacées
par de plus modernes,régulièrement améliorées. »Enréalité, cet accèsetlecoût du service qui yest associé dépendent de la disponibilité(eaux de surface ou souterraines), delagéographie climatique et desfinancements. Et en premier lieu deschoix politiquesetdelaprioritéqui lui estaccordéeauplushaut niveau de l’État.
Optimiser
tarif facturémonterdeplusde 25 %endix ans,Johannesburg a connuune augmentationde9,75% en juillet 2022…
Miser sur l’innovation
Face àcedéfi planétaire–rareté croissantedelaressource en eau et mollessedecertaines politiques publiques –, plusieurssolutions se dessinent et mobilisent industriels, secteur privé et pouvoirspublics.
Si la ressourceest naturelle,son coût se construit autour desmodes de traitement et de distribution choisis. Quant au prix facturé, il dépend despolitiquesetdes subventions publiques.
Selon le rapportdes Nations unies2021sur l’eau, au niveau mondial,70% de la ressource estprélevée parlafilière agricole àdes tarifs très bas. Toutefois, lescontrastesdemeurent forts entreRabat, Paris,Delhi et Johannesburg,selon leniveau de service –lacontributionàl’assainissement ou non–,les taxes, lestranchesquantitatives… Tous lespays, enrevanche,connaissent desaugmentations. Paris avule
Dessalement àgrandeéchelle, dont lescoûtsont été divisés par dix en quinzeans,avecdes programmes nationaux comme en Algérie ou au Maroc; réutilisation deseaux uséesà vocation potablecomme enNamibie,à Singapour et bientôt en France; et, de façon systématique, des campagnesderecherche de fuites sur réseaux et de renouvellement desinfrastructures de distribution plus économesenénergie…
LesservicesdeR&D innovent chaque jour,avecpour objectif l’optimisation du couple coût-efficacitéafin de conserveraumieux unprix «abordable ». En mars, la Conférence internationale de l’eau se tiendra àNew York sous l’égide desNationsunies.Unrendez-vous très attendu pour évaluer concrètement la tenue desengagements pris par lesÉtats. Il ysera moins question de promesses que de constats… pour une nouvelle session de prises de conscience ou pour,enfin, rendre sa place à l’action concrète?