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EÇONS MONDE ARABE LES RÉVOLUTIONS EN 8 LEÇONS
de LE PLUS
de Jeune Afrique
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 51e année • N° 2640-2641 • du 14 au 27 août 2011
SYRIE CÔTE D’IVOIRE BACHAR, SEUL ÉCONOMIE : GÉNÉRATION OUATTARA CONTRE TOUS ?
jeuneafrique.com om
ENQUÊTE FEMMES ET POLITIQUE
CONGO
Poussée sé de croissance Spécial 20 pages
La nouvelle vie
des
ALGÉRIE, MAROC, TUNISIE, SÉNÉGAL, CÔTE D’IVOIRE, CAMEROUN, GABON, RD CONGO… • Avec le vent de la contestation, pour vivre heureux, ils vivent de plus en plus cachés • L’exil doré des Libyens de Djerba • Paris, la guerre des palaces ÉDITION INTERNATIONALE France 6 € • Algérie 320 DA • Allemagne 8 € • Autriche 8 € • Belgique 6 € • Canada 11,90 $ CAN • Danemark 60 DKK • DOM 6 € Espagne 7,20 € • Éthiopie 95 Birr • Finlande 8 € • Grèce 8 € • Italie 7,20 € • Maroc 40 DH • Mauritanie 2000 MRO • Norvège 70 NK • Pays-Bas 7,20 € Portugal cont. 7,20 € • RD Congo 11 $ US • Royaume-Uni 6 £ • Suisse 11,80 FS • Tunisie 6 DT • USA 13 $ US • Zone CFA 3200 F CFA • ISSN 1950-1285
Document :PAGE GE 1.ps;Format :(195.00 x 270.00 mm);Date :19. Oct 2009 - 11:49:59
Destination
GUINÉE ÉQUATORIALE
investir au coeur du Golfe de Guinée Une situation unique en Afrique Centrale. Un potentiel pétrolier et gazier exceptionnel.
© Les Éditions du Jaguar - R. Vandermeeren
Les plus grands projets d’infrastructures de la sous-région. Des marchés en pleine croissance dans les secteurs de l’agro-industrie, de la construction, de l’immobilier, de la finance, des transports et du tourisme.
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Destination GUINÉE ÉQUATORIALE
19/10/09 11:04:21
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Éditorial
Marwane Ben Yahmed
Vous retrouverez rouverez Ce que je crois de Béchir Ben Yahmed dans le n0 2644 du 11 septembre 2011.
(Des)ordre mondial
M
AIS QUE DIABLE SE PASSETIL ? Certes, le toujours fringant diplomate et écrivain engagé français Stéphane Hessel, 93 ans, nous avait exhortés à l’indignation à la fin de 2010. Le succès spectaculaire de son petit pamphlet d’une trentaine de pages (Indignez-vous ! Indigène éditions) aurait dû nous alerter. Il a été pris au mot, dans des proportions que lui-même n’imaginait sans doute pas. Révoltes dans les pays arabes, manifestations en Espagne, en Italie, au Portugal, en Grèce, au Sénégal, au Burkina ou en Israël, émeutes en Grande-Bretagne, étudiants en colère au Chili, grèves à répétition en Algérie… Même l’impassible Chine est périodiquement secouée par de puissants mouvements de contestation, au Tibet, en Mongolie-Intérieure ou au Xinjiang, c’est vous dire ! Le ras-le-bol, quelles qu’en soient les raisons profondes (injustice sociale, sentiment d’exclusion, aspirations démocratiques, minorités opprimées, etc.), se propage comme une traînée de poudre.
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Confidentiel
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L A SEM A IN E D E J EU N E A F RIQ U E
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Royaume-Uni La fin d’un modèle ? Tour du monde Syrie Assad envers et contre (presque) tous Soudan du Sud Bons baisers d’Israël Côte d’Ivoire La fête est terminée JMJ Prière de venir nombreux ! France Guéant expulse en douce Facebook African connection Maroc Fizazi sème la zizanie Mustapha Abdeljalil La bonne réputation Navin Ramgoolam Qui perd gagne
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G RA N D A N G L E
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Enquête La nouvelle vie des riches
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A F RIQ U E SU BSA H A RIEN N E
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Guinée L’armée de tous les dangers Tribune Pourquoi les révolutions au Nord auront un impact au Sud Côte d’Ivoire Augustin Thiam, la politique en héritage Dessins L’œil de Glez Santé au Cameroun La double peine Portraits Ces Africaines qui osent la présidentielle
PHOTOS DE COUVERTURES : PAUL SIMCOCK ; CORBIS
Pendant ce temps, comme si cela ne suffisait pas, les places boursières piquent leur crise d’hystérie. Le monde entier est suspendu à leurs convulsions ou aux avis prétendument éclairés des agences de notation qui, alors qu’elles n’avaient rien vu (ou voulu voir) venir lors de la crise des subprimes née en 2007, Exaspération sont désormais sur tous les fronts, d’un côté, distribuent bons et mauvais points, fuite en avant rassurent ou provoquent de véritade l’autre… On bles mouvements de panique. Oui, le capitalisme est devenu fou. Les n’a pas fini de fondations du système, qui n’est pas « s’indigner » ! en cause intrinsèquement mais dont les ressorts ont été pervertis, vacillent chaque jour un peu plus. La crise financière, dont nous venons à peine d’entrevoir la sortie, n’a pas servi de leçon, malgré les odes à la vertu serinées ici et là et la promesse ferme que cela n’arriverait plus. Le comportement irresponsable de financiers et de spéculateurs sans foi ni loi, prêts à tout pour gagner toujours plus d’argent, quitte à précipiter une grande partie de la planète dans l’abîme, n’a en rien changé. L’attitude des dirigeants de la planète non plus. L’Europe, les États-Unis, mais aussi l’Amérique latine et l’Asie, sont en surchauffe et vivent très largement au-dessus de leurs moyens depuis de trop longues années. Les cigales ont chanté de très nombreux étés, mais la fête est finie. Pendant que nos chefs, par manque de courage politique, naïveté ou incompétence, s’emploient à colmater les brèches – comme si on réparait la proue d’un paquebot en plein naufrage en utilisant les pièces de la poupe –, empruntant toujours plus pour rembourser des dettes colossales (dont nous paierons tous l’addition), le nouvel ordre mondial plus juste qu’ils nous avaient promis s’est mué en mirage. L’exaspération et la colère des citoyens, elles, n’en sont hélas que plus réelles. Et ce n’est pas fini… ● JEUNE AFRIQUE
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Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs
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GUINÉE
L’ARMÉE DE TOUS LES DANGERS
PRINTEMPS ARABE
La réforme du corps militaire re apparaît plus que jamais comme la priorité d’Alpha Condé. Périlleuse mission…
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TUNISIE TUNI TU NISI SIE E LES CERTITUDES DE MESTIRI
Afr
114 CONGO
de Pousséaence croiss Sp é
a ge s cial 20 p
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• Politique Une ligne rajeunie pour le parti • Économie Indicateurs au vert • Reportage à Dolisie
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MAGHREB & M OYE N - O R I E N T
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Tunisie Les certitudes de Mestiri Algérie « F’tour » aux chandelles Palestine Ils ne pensent plus qu’à ça Égypte Des lendemains qui déchantent Panorama Les huit leçons du Printemps arabe
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EUROPE, AM É R I Q U E S, ASIE
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Crise Au secours, le capitalisme est devenu fou ! Turquie L’armée marque le pas Chine Pékin sans pitié Humeur Saupoudrons les Marocains ! Parcours Hisham Oumlil, le maître des costards de stars Venezuela Ce malade qui les gouverne Belgique Espoir et repos forcé États-Unis Métis is beautiful ! Sciences-Po Dans la fabrique des élites
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LE PLUS DE JE U N E A FR I Q U E
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Congo Poussée de croissance
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Au moment où les révolutions égyptienne et tunisienne sont au milieu du gué, plusieurs enseignements peuvent déjà être tirés des bouleversements historiques qu’a connus la région.
Le chef de file de l’opposition démocratique sous Bourguiba fait un come-back remarqué.
LE PLUS ique
de Jeune
LES RÉVOLUTIONS EN 8 LEÇONS
CÔTE D’IVOIRE DES BARONS EN CHASSENT D’AUTRES Administration, entreprises publiques… Ouattara redistribue les cartes en nommant des proches aux postes clés de l’économie.
DOSSIER SANTÉ 10 pages pour faire le point sur le secteur.
ÉCON OMIE Côte d’Ivoire Des barons en chassent d’autres Nigeria Banques: aux grands maux les grands remèdes
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144 ARTS
POUR EN FINIR AVEC L’ORIENTALISME Plus d’un siècle d’échanges et d’influences réciproques entre l’Occident et le monde islamique.
Algérie Tlemcen drague les touristes Liberia Bataille du rail entre miniers Cameroun Les déchets « énergétiques » de Hysacam Eau, énergie, transports Veolia s’en va Interview Yannick Morillon, PDG de Geocoton Maroc Karim Mazouzi double ses capacités Crise boursière Contagion en vue Tunis Placement béton ? Baromètre D O SSIER SA N T É Maghreb Ambitions en laboratoire Formation Docteur ès finances Chirurgie Opération esthétique à Dakar Portraits Des patrons bien portants C U LT U RE & M ÉD IA S Arts plastiques Pour en finir avec l’orientalisme Bonnes feuilles Il était une fois l’Amérique La semaine culturelle de J.A. VOUS & NOUS Le courrier des lecteurs Post-scriptum
JEUNE AFRIQUE
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! LES DOCUMENTS
OFFICIELS LE PROUVENT :
le bâtiment est la propriété de l’État gabonais.
Gabon-France À qui appartient l’hôtel de la rue de l’Université?
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ACQUISITION par le Gabon d’un hôtel particulier sis 49-51, rue de l’Université, à Paris, continue de faire du bruit. Certains médias ont en effet « suggéré » que l’immeuble appartiendrait en réalité à… Ali Bongo Ondimba. Or, selon les statuts de la société civile immobilière (SCI) propriétaire du bien, l’extrait du registre du commerce et des sociétés et l’acte notarié produit lors de la vente (voir fac-similés), c’est bien « l’État de la République gabonaise », représenté par Maixent Accrombessi, directeur de cabinet de la présidence et gérant non associé de la SCI, qui, le 21 avril 2010, a acquis les titres de sociétés civiles immobilières constituées par la famille Pozzo di Borgo, en 1995 et 2002, pour la seule propriété de l’immeuble. Les autorités gabonaises ont par ailleurs demandé l’extraterritorialité dudit immeuble, destiné, entre autres, à abriter des services administratifs et diplomatiques, ce qui serait impossible si le propriétaire était une personne physique. ●
PIERRE ROUSSEAU/CIT’IMAGES
RWANDA-FRANCE MUSHIKIWABO EN ÉCLAIREUSE
Avant la visite historique que le président Paul Kagamé doit faire à Paris, le 12 septembre en principe, les autorités rwandaises ont prévu deux missions de préparation. L’une d’elles sera dirigée par Louise Mushikiwabo, la ministre des Affaires étrangères, qui devrait ainsi fouler le sol français dès le 7 septembre. Lors de sa dernière visite, le 19 juillet, cette dernière avait été reçue par Henri de Raincourt, le ministre français de la Coopération, mais pas par son homologue AlainJuppé,misencauseparle Rwanda pour sa responsabilité lors du génocide de 1994.
LE CHIFFRE QUI FAIT RÂLER
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C’est, en euros, millions le montant du préjudice subi par les entreprises françaises pendant la crise ivoirienne, à en croire les résultats d’une enquête interne menée par la chambre de commerce et d’industrie (française) auprès de 700 sociétés. 77 % de cette somme concernent les pertes d’exploitation. Le reste ? Destruction d’outils de production, de bâtiments administratifs et d’équipements divers.
ALGÉRIE LE FLN AUX ABONNÉS ABSENTS
Le 31 juillet, une réunion du comité central du Front de libération nationale (FLN) est loin d’avoir apaisé les tensions qui agitent le parti. Des contestataires emmenés par des dinosaures de l’ancien parti unique accusent en effet Abdelaziz Belkhadem, le secrétaire général, de N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
JEUNE AFRIQUE
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Politique, économie, culture & société privilégier ses propres intérêts politiques au détriment de ceux de la formation qu’il dirige. Il ne songerait qu’à obtenir l’investiture du FLN pour la présidentielle de 2014, et négligerait d’autres échéances: législatives en mai 2012 et municipalesaumoisd’octobre suivant. Du coup, le parti est largement absent des grands débats du moment : révision de la Constitution ou projet d’ouverture de l’audiovisuel.
Tunisie Les « rebelles » de l’aéroportt étaient des flics d’élite
TROIS DES QUATRE UNITÉS D’ÉLITE de la police tunisienne ont participé à la « rébellion de l’aéroport deTunis-Carthage », le 14 janvier. Ce jour-là, en début d’après-midi, alors que la capitale était le théâtre d’énormes manifestations populaires, le lieutenantcolonel SamirTarhouni, patron de la brigade antiterroriste (BAT), a pris avec douze de ses hommes l’initiative d’arrêter vingt-huit membres des familles Trabelsi et Ben Ali qui tentaient de fuir à l’étranger. Ses patrons au ministère de l’Intérieur l’ayant sommé de les relâcher sur-le-champ, il a refusé et appelé à la rescousse des renforts de la BAT, puis de l’unité spéciale de la garde nationale (USGN), puis du groupe des forces spéciales (GFS). Au total, cent soixante-dix commandos ont ainsi pris le contrôle de l’aéroport. À en croire certaines indiscrétions dans les milieux sécuritaires, Belhassen et Imed, deux des frères de LeïlaTrabelsi, l’épouse du président déchu, ne rêvent aujourd’hui que d’éliminer SamirTarhouni. ●
MALI (1) RETOUR EN GRÂCE POUR MAMI COULIBALY
Le colonel-major Mami Coulibaly n’est pas resté longtemps au chômage. Le 3 mars, il avait été limogé de son poste de directeur général de la sécurité d’État (DGSE) après l’évasion rocambolesque du Tunisien Bachir Simoun, auteur de l’attentat raté contre l’ambassade de France à Bamako, quelques semaines auparavant. La cavale de l’apprenti terroriste avait fait long feu, mais Coulibaly avait quand même subi les foudres du président, Amadou Toumani Touré. Cinq mois plus tard, celui-ci s’est ravisé. Par un décret en date du 3 août, l’ancien chef du renseignement a été nommé consul général à Abidjan. Un poste stratégique dans la perspective de la présidentielle de 2012. Environ un million d’électeurs maliens résident en effet en Côte d’Ivoire…
prochains jours. Et les responsables du projet ont reçu l’instruction de faire vite. Cette deuxième chaîne coûtera un peu moins de 4 milliards de F CFA (environ 6 millions d’euros). ATT souhaite par ailleurs poser au plus vite la première pierre du tramway de Bamako. Le 5 août, à Paris, un protocole d’accord a été signé entre l’État malien, représenté par Hamed Séméga, le ministre de l’Équipement et des Transports,legroupejordanien Al-Taher et le français Lohr, spécialistedestramssurpneus. L’investissement de 100 millions d’euros est apporté par l’entreprise jordanienne, qui
MALI (2) LES ULTIMES PROJETS D’ATT
JEUNE AFRIQUE
TRANSPORT MARITIME CMA CGM DANS LA TOURMENTE ?
En dépit de l’apport, fin 2010 (375 millions d’euros), d’un nouvel actionnaire, le groupe turc Yildirim, des incertitudes planent sur la santé financière de l’armateur français CMA CGM. Citant « un expert britannique », le quotidien économique français Les Échos a annoncé le 11 août que le profit net de la société sera « à peine positif » cette année. Et
BEAC OYIBA ET ANDZEMBE CONTRE-ATTAQUENT L’ancien directeur de cabinet du président Ali Bongo Ondimba, Jean-Pierre Oyiba, envisage d’attaquer en diffamation la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac). Depuis qu’il a démissionné, au lendemain du déclenchement du scandale qui a touché l’établissement, il ronge son frein et ne désespère pas de laver son honneur. Licencié dans le cadre de la même affaire, l’ancien gouverneur Philibert Andzembe pourrait lui aussi attaquer l’institution monétaire pour obtenir des indemnités de licenciement. Les « parachutes dorés » accordés aux commissaires de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac, voir J.A. no 2627) l’auraient incité à sortir de sa retraite.
DES CASERNES AUX CHANCELLERIES
Quel avenir pour Mangou?
OLIVIER
Avant son départ de la présidence du Mali, l’an prochain, AmadouToumaniTouré(ATT) tientàbouclerleprojetdecréation d’une deuxième chaîne de télévision publique. Celle-ci devait commencer d’émettre en mai 2012, ce pourrait être finalement avant la fin de l’année. Les appels d’offres pour l’achat de matériels et la construction de nouveaux locaux seront lancés dans les
s’occupera aussi de l’exploitation du réseau. Lohr prendra en charge la construction et fournira les rames.
que « son résultat opérationnel pourrait s’établir à – 550 millionsdedollars».JointparJeune Afrique, le groupe conteste ce « tableau noir » et jure que le scénario catastrophe de 2009 (1,6 milliard de dollars de pertes) ne se reproduira pas. « Le taux de fret est en augmentation,etiln’yapasd’aggravation de la situation », affirme un porte-parole du groupe.
Ancien chef d’état-major de l’armée ivoirienne, le général Philippe Mangou va-t-il devenir diplomate ? En tout cas, il s’est vu proposer le poste d’ambassadeur au Gabon. Si la demande d’accréditation est agréée, ce qui paraît probable, ce serait un nouveau – et dernier ? – tournant dans sa carrière. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
La semaine de Jeune Afrique
ROYAUME-UNI
La fin
d’un modèle? De graves émeutes ont secoué Londres et plusieurs grandes villes du pays. La politique d’intégration britannique, dont on a longtemps vanté les vertus, vacille, notamment sous l’effet de la crise économique.
«
À
JUSTINE SPIEGEL
cinq minutes de chez moi, un supermarché a brûlé. Des familles sont sans abri car leur immeuble a été incendié. Je n’avais jamais vu ça », témoigne un Londonien d’origine nigériane. Femi, 25 ans, vit à Croydon, un quartier sud de la capitale britannique, là où un homme à peine plus âgé que lui a été tué par balles, devenant la première victime des émeutes qui agitent le royaume depuis le 6 août. Un fait divers a mis le feu aux poudres. Lors d’une opération anticriminalité, des tireurs d’élite de la police londonienne abattent Mark Duggan, un père de famille de 29 ans, d’origine antillaise. Une manifestation à sa mémoire, organisée à Tottenham, un quartier très pauvre du nord de Londres, dégénère le 6 août. « Sa mort, c’est l’étincelle qui a embrasé le pays, analyse Corentin Segalen, diplômé de la London School of Economics en Criminal Justice Policy. Exactement comme pour les deux adolescents électrocutés dans la banlieue française de Clichy-sous-Bois en 2005, ou le marchand ambulant qui s’est immolé par le feu l’an dernier à Sidi Bouzid, en Tunisie. Tout s’enchaîne très vite. » Depuis, les pillages se sont étendus à Manchester, Birmingham, Bristol et à d’autres grandes villes du pays, faisant au moins cinq morts (bilan du 12 août).
MIRAGE. Le britishness, ce sentiment d’appartenance commune aux valeurs du Royaume-Uni, jadis vanté par le gouvernement travailliste de Tony Blair, semble n’avoir été qu’un mirage. David Cameron, le Premier ministre conservateur, a décrété en février dernier que « le multiculturalisme d’État était un échec ». Angela Merkel, la chancelière allemande, et Nicolas Sarkozy, le N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
président français, ont fait des déclarations identiques. « Le modèle britannique avait déjà montré ses limites au début des années 2000, lorsque de grandes émeutes avaient éclaté entre groupes ethniques, notamment antillais et turcs, rappelle Segalen. Les Anglais ont en réalité commencé à le remettre en question après les attentats du 11 septembre 2001. » Lors de sa campagne, Cameron avait pourtant promis de réparer la Broken Britain, cette GrandeBretagne jeune et multiethnique qui vit des aides sociales. Or, le taux de chômage des jeunes de 16 à 24 ans atteint 19 % au niveau national – 22 % à Londres –, alors que celui de l’ensemble de la population n’est que de 7,7 %. En 2009, le nombre d’immigrés entrant au Royaume-Uni – hors ressortissants de l’Union européenne – était estimé à 300 000 personnes. « La crise économique a durement touché le pays, explique Segalen. Pour réduire le déficit public [180 milliards d’euros, l’un des plus élevés de l’UE, NDLR], le gouvernement a imposé de sévères coupes budgétaires, y compris dans la police. » Des mesures telles que la diminution des aides sociales en faveur de la jeunesse ou la suppression de milliers de bourses pour les collégiens ont eu de dures conséquences sur les quartiers pauvres. « Quand on fait des coupes drastiques, ce genre de révolte peut survenir à tout moment », commente Ken Livingstone, l’ancien maire de Londres. Duggan était né à Tottenham, un quartier londonien très défavorisé et frappé de plein fouet par cette politique de rigueur. Le nombre des agressions et le taux de chômage (20 %) y sont parmi les plus élevés de la capitale. La moitié de la population est immigrée – surtout caribéenne – ou d’origine étrangère. Duggan a grandi à Broadwater Farm, une cité du quartier ravagée par la violence qui avait fait les gros titres des journaux en 1985. Après la mort d’une femme noire lors d’une
LEWIS WHYLD/AP
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! APRÈS LE PASSAGE DES ÉMEUTIERS, à Croydon, dans le sud de Londres, le 9 août.
Cameron avait promis de réparer la Broken Britain, jeune, multiethnique, qui vit des aides sociales. JEUNE AFRIQUE
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Les émeutes urbaines dans l’histoire
1985
TOTTENHAM (nord de Londres, Royaume-Uni) Des affrontements éclatent après la mort d’une femme noire lors d’une perquisition. Un policier de 40 ans est tué, 400 personnes sont arrêtées
perquisition à son domicile, un policier de 40 ans avait été sauvagement assassiné par des bandes de jeunes. Commandé en 1981, au lendemain des émeutes de Brixton, qui avaient éclaté après une opération de police jugée discriminatoire par la communauté noire, le rapport Scarman avait préconisé de revoir tout ce qui relève du pouvoir discrétionnaire de la police, et notamment les fouilles corporelles. AUTODÉFENSE. Depuis, la colère des jeunes reste
latente. Si les émeutiers d’août 2011 n’ont ni slogans explicites ni message politique – beaucoup ont agi par opportunisme en pillant les magasins –, ils visaient très clairement les forces de l’ordre, qu’ils accusent toujours de racisme. « Comme en 1985, l’utilisation de la violence par la police n’est toujours pas acceptée par la population », estime Corentin Segalen. De plus, sa crédibilité a été entachée par le scandale des écoutes téléphoniques de News of the World, le tabloïd de Rupert Murdoch. Éclaboussés par l’affaire, sir Paul Stephenson, le chef de la police métropolitaine, et son principal adjoint avaient dû démissionner en juillet dernier. Cheick Aly, un Ivoirien de 39 ans, habite Leytonstone, un quartier de l’Est londonien. JEUNE AFRIQUE
Employé dans une firme pharmaceutique, il confirme l’existence de réels problèmes entre Noirs et policiers. « Je commence à travailler à 5 h 45, confie-t-il. Chaque matin, quand je vais prendre le bus, une voiture de police ralentit à mes côtés. » Comme dans les banlieues françaises en 2005, les différentes communautés ne s’affrontent pas entre elles, mais se liguent contre un ennemi commun : l’État. Pour éviter une propagation des émeutes – en France, plus de 300 villes avaient été touchées –, David Cameron envisage désormais le recours à l’armée. Les policiers s’inquiètent de voir se constituer des groupes d’autodéfense composés d’habitants armés déterminés à protéger leur quartier. Des groupuscules d’extrême droite en profitent également pour refaire surface. « Quelque chose ne tourne vraiment pas rond dans notre société », a déclaré Cameron, après qu’Asyraf Haziq Rosli, un étudiant malaisien, s’est fait agresser par des émeutiers. « Je plains ces types. Mais la Grande-Bretagne est quand même un pays formidable»,a-t-ilassuré.Toutjustediplômé,Femiy croit lui aussi. « Les gens sont plus ouverts à Londres, remarque-t-il.ContrairementàlaFrance,oùj’aivécu un an, la couleur de la peau n’est pas un obstacle pour trouver du travail. Je suis confiant. » ●
1992
LOS ANGELES (États-Unis) Entre 50 et 60 personnes sont tuées et plus de 2 300 blessées, après qu’un jury a acquitté quatre officiers de police, accusés d’avoir passé à tabac un automobiliste africainaméricain
2005
CLICHY-SOUSBOIS (France) Après l’électrocution de deux adolescents, cherchant à se cacher dans un transformateur alors qu’ils étaient poursuivis par la police, de violentes émeutes éclatent dans les banlieues françaises. L’état d’urgence est instauré. Quatre personnes sont tuées, environ 600 sont écrouées et 10 000 voitures sont brûlées N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
La semaine de J.A. Tour du monde BIRMANIE
Un métro en pleine jungle
SHANNON STAPLETON/REUTERS
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AFFAIRE DSK
L’accusation ouvre un deuxième front
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ENNETH THOMPSON, son avocat, en agitait la menace depuis un moment. C’est désormais chose faite. Nafissatou Diallo (photo) a, le 8 août, porté plainte au civil contre Dominique Strauss-Kahn, qu’elle accuse de s’être livré à une « agression violente et sadique » à son encontre dans une suite de l’hôtel Sofitel, à Manhattan, le 14 mai. Totalement indépendante de la procédure pénale qu’instruit actuellement le procureur Cyrus Vance Jr (la prochaine audience aura lieu le 23 août), ce procès ne vise qu’à obtenir de substantiels dommages et intérêts – sans doute plusieurs millions de dollars. L’accusation souhaite qu’il se tienne dans le Bronx, lieu de résidence habituel de la femme de chambre guinéenne, où les jurés ont coutume de punir sévèrement ce type de délit, même si les peines sont souvent sensiblement réduites en appel. DSK n’a pas l’obligation d’y assister et pourra se faire représenter pas ses avocats. Il a aussi la possibilité de négocier préalablement un accord financier avec la plaignante. ● CORÉE DU NORD
Mortelle mousson Dix morts, des centaines d’hectares ravagés, des villages entiers détruits et dix bâtiments administratifs touchés. Le lourd bilan du typhon Muifa, qui vient de balayer la Corée du Nord, s’ajoute à celui des pluies torrentielles qui ont frappé la péninsule en juillet (trente morts et des dizaines de milliers de sans-abri, au Nord ; une vingtaine de morts N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
dans des glissements de terrain, au Sud). Pyongyang a remercié la Chine pour son aide humanitaire mais, en pleines négociations avec Washington pour la reprise du dialogue sur la dénucléarisation de la péninsule, n’a officiellement toujours pas accepté l’offre de 4,7 millions de dollars (3,3 millions d’euros) de la CroixRouge sud-coréenne.
C’EST À UNE SOCIÉTÉ russe que la junte birmane aurait confié la construction du métro de Naypyitaw, la capitale administrative et militaire du pays depuis 2005. La centaine de milliers d’habitants de cette ville édifiée au milieu de la jungle disposera donc, dans quelques années, d’un moyen de transport urbain ultramoderne construit sur le modèle du métro de… Pyongyang. La Birmanie aurait d’ailleurs engagé un programme nucléaire avec l’aide de la Corée du Nord. Le nouveau métro ferait partie d’un projet plus vaste de bunker atomique souterrain… LE CHIFFRE QUI NE FAIT PAS PLEURER
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MILLIARDS
DE DOLLARS : c’est la somme perdue depuis le 29 juillet par le Mexicain Carlos Slim, l’homme le plus riche du monde selon le magazine Forbes. Mais le magnat mexicain des télécoms a de quoi voir venir : il reste à la tête de 64 milliards de dollars. FOOTBALL
Grève des stars?
FAUTE D’UN ACCORD entre joueurs et dirigeants de clubs en vue de l’adoption d’une nouvelle convention collective, le championnat italien de football risque de ne pas reprendre le 27 août. Le différend porte sur deux points. 1. Le fait qu’un club puisse actuellement transférer un joueur sans son accord, surtout s’il est en fin de contrat. 2. L’interdiction faite aux joueurs écartés de l’équipe première de s’entraîner avec le groupe professionnel. Las d’être traités « comme des objets », les footballeurs pros, qui avaient déjà brandi la menace d’une grève en septembre, puis en décembre 2010, jurent qu’ils iront jusqu’au bout. JEUNE AFRIQUE
ARRÊT SUR IMAGE
CHINA DAILY • Reuters
CHINE
Funambule de l’extrême IL EST LE NEVEU D’ADILI WUXOR, QUE LES CHINOIS SURNOMMENT « LE PRINCE DE LA CORDE RAIDE ». À l’évidence, le jeune Saimaiti Aishan (27 ans) a de qui tenir. À Langshan, dans le Hunan, il s’est, le 6 août, baladé à 30 m du sol sur un fil tendu entre deux ballons dirigeables. Une vertigineuse tentative à 100 m d’altitude a, en revanche, échoué. Personne, sans doute, ne lui en fera le reproche.
BRÉSIL
Et de trois!
SUITE à des déclarations peu confraternelles, Nelson Jobim a dû renoncer à son poste de ministre de la Défense, le 4 août. À l’en croire, Ideli Salvatti, sa collègue des Relations avec le Parlement, est « faiblarde », alors que Gleisi Hoffmann, chef de la Maison civile, « connaît à peine » Brasilia. Après Antonio Palocci (enrichissement illicite) et Alfredo Nascimento (corruption), Jobim est le troisième ministre acculé à la démission depuis l’élection de Dilma Rousseff, l’an dernier. CHILI
Bras de fer
DEPUIS PRESQUE trois mois, les étudiants chiliens manifestent pour réclamer une éducation publique
JEUNE AFRIQUE
gratuite et de qualité. Le 18 juillet, pour tenter de les apaiser et d’enrayer la chute vertigineuse de sa popularité, le président, Sebastián Piñera, avait remanié son gouvernement. Sans succès. Le 4 août, 870 trublions présumés ont été arrêtés. Cinq jours plus tard, plus de 70 000 personnes ont défilé dans les rues de Santiago, sur fond de grève dans l’enseignement. Mais le gouvernement reste inflexible. UKRAINE
Ioulia dans le pétrin
VOUS NE ME BRISEREZ PAS , a lancé Ioulia Timochenko à son juge, le 8 août, lors de la réouverture de son procès. L’ancienne Première ministre ukrainienne est accusée d’abus de pouvoir lors de la signature de contrats gaziers avec la Russie, en 2009. Ex-égérie de la Révolution orange, elle est la bête noire du
président Viktor Ianoukovitch et de son clan. Le 5 août, accusée de « violation systématique » des règles judiciaires auxquelles elle est astreinte, elle a été placée en détention provisoire. Elle risque entre cinq et dix ans d’emprisonnement. ÉTATS-UNIS
Tortionnaire libéré
LE SCANDALE d’Abou Ghraib, c’était lui. Charles Graner a été libéré pour bonne conduite le 6 août. En 2005, il avait été condamné à dix ans de prison pour avoir été le leader d’un groupe de six gardiens convaincus de diverses exactions sur la personne de détenus irakiens. Les photos de la sinistre équipe prenant la pose, sourire aux lèvres, devant des prisonniers dénudés avaient fait le tour de monde… Graner ne sera donc resté en prison que six ans et demi. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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La semaine de J.A. Décryptage SYRIE
Assad envers et contre (presque) tous
Cinq mois après le déclenchement de la révolte, le régime syrien commence à faire l’unanimité contre lui. Les Occidentaux durcissent le ton, la Russie et la Turquie se lassent, les pays arabes prennent leurs distances. Pendant ce temps, la répression continue…
«
D
ieu est avec nous. Et vous ? » Le mot d’ordre des contestataires syriens pour le premier vendredi de ramadan, le 5 août, semble avoir enfin éveillé la compassion des dirigeants arabes. Restés silencieux cinq mois durant, ceux-ci prennent désormais leurs distances avec Bachar al-Assad, dont la répression brutale a déjà fait plus de 2 000 morts et 3 000 disparus. Entre le 6 et le 9 août, les secrétaires généraux du Conseil de coopération du Golfe et de la Ligue arabe condamnent les violences. L’Arabie saoudite, Bahreïn et le Koweït rappellent leurs ambassadeurs. Le grand imam d’Al-Azhar, au Caire, et le président du Parlement irakien exigent la fin de l’effusion de sang. Le ministre jordanien des Affaires étrangères exhorte Damas à mettre en œuvre les réformes promises. Les 10 et 11 août, les ministères algérien et marocain des Affaires étrangères leur emboîtent le pas en appelant au dialogue. Seul pays arabe à avoir fait immédiatement preuve de fermeté, le Qatar avait rappelé son ambassadeur dès le 18 juillet, après que des milices prorégime eurent attaqué sa représentation diplomatique. Comment expliquer cette réaction en chaîne des États arabes, qui, jusque-là, évitaient prudemment de s’immiscer dans les affaires syriennes? La déclaration très critique du président du Conseil de sécurité des Nations Unies le 3 août, le ton
plus ferme de la Russie appelant Assad à engager des réformes et l’impatience manifestée par Recep Tayyip Erdogan (avant ces événements, le Premier ministre turc entretenait des relations amicales avec le raïs syrien) ont sans doute enhardi les gouvernants arabes. Pour le politologue libanais Ziad Majed, « le tournant a été les massacres perpétrés à la veille du ramadan dans la ville de Hama, déjà victime de la colère de Hafez al-Assad, le père de Bachar, en 1982 : les opinions arabes se sont révoltées et les autorités ne pouvaient plus rester silencieuses ». En effet, du Maroc au Liban, les manifestations de solidarité se sont multipliées devant les ambassades syriennes, sur internet et dans la presse. LUI OU LE CHAOS ? L’inflexion des posi-
tions arabes et turque conforte les ÉtatsUnis, la France et la Grande-Bretagne dans leur volonté d’adopter des mesures plus sévères à l’égard du régime. La Russie et la Chine pourraient à leur tour perdre patience et ne plus s’opposer à des sanctions onusiennes. Mais si Barack Obama estimedepuispeuque«laSyrieseporterait mieux sans le président Assad », chacun redoute qu’une éventuelle chute du raïs ne déstabilise la région tout entière. L’absence d’une opposition structurée renforce cette crainte. « Même Israël », officiellement en guerre avec la Syrie, mais en état de paix tacite depuis 1973, « préfère avoir sur sa frontière nord un diable au visage
DIPLOMATIE : LE CHAUD ET LE FROID QUALIFIÉE D’« ÉTAT VOYOU » par George W. Bush en 2003, la Syrie perd en 2005 le soutien de la France pour son implication supposée dans l’assassinat de Rafic Hariri, l’ancien Premier ministre libanais. Mais des impératifs économiques incitent Bachar al-Assad à normaliser sa position sur la scène internationale. Les élections de Nicolas Sarkozy en France et de Barack Obama aux États-Unis lui en offrent l’occasion. En 2008, il est invité à Paris, au défilé du 14 Juillet. En janvier 2011, l’envoi du premier ambassadeur américain à Damas depuis 2005 conforte sa diplomatie… L.S.P. fusillée en quelques mois par les tirs de son armée. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
PATRICK BAZ/AFP
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connu plutôt qu’un régime imprévisible », souligne Majed. En réalité, le ton des puissances occidentales n’a commencé à se durcir qu’après les attaques des représentations françaises et américaines à Damas, en représailles à la visite des deux ambassadeurs à Hama le 8 juillet. Jusqu’à cette date, l’alternative proposée au président syrien – diriger la transition ou quitter le pouvoir – reflétait l’inquiétude des Occidentaux, qui, de crainte de voir le pays sombrer dans le chaos, préféraient laisser Assad gérer l’évolution du système ou préparer son départ en douceur. Aujourd’hui, Américains et Français envisagent clairement la perspective d’un changement… en espérant qu’il se déroulera sans grands dégâts. On n’en est pas là. Longtemps prophétisée et encore attendue, l’implosion du régime n’a pas lieu, malgré les défections de nombreux soldats, la fronde de quelques caciques du Baas (au pouvoir) et le désaveu d’une partie JEUNE AFRIQUE
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pas à instrumentaliser sa politique étrangère à des fins de politique intérieure. L’intransigeance occidentale lui permet de brandir la théorie du complot et l’isolement de la Syrie de jouer sur la fibre patriotique. Il peut aussi compter sur quelques pays encore bienveillants, comme la Chine et la Russie, ou inquiets, comme la Turquie, soucieuse de la stabilité de ses frontières. Et, avant tout, sur l’Iran. L’alliance avec Assad est capitale pour les Iraniens, qui considèrent la lutte du régime syrien pour sa survie comme leur propre bataille. Si l’on peut douter de la présence de milices iraniennes en Syrie, Téhéran aide activement son allié en lui fournissant des armes, du matériel de surveillance et un important soutien financier.
! L’EFFIGIE DU CLAN ASSAD brandie par des manifestants, devant l’ambassade de Syrie à Chypre. Au-dessus de Bachar, son père, ses frères, son beau-frère et son cousin.
de l’élite économique. Une intervention militaire extérieure est par ailleurs exclue, d’abord parce que l’Otan a fort à faire en Libye, ensuite parce que la Syrie, pays très peuplé dans un environnement régional explosif, ne se prête pas à ce genre d’opération. Et puis, contrairement au cas libyen, l’opposition syrienne dans son ensemble refuse cette option. THÉORIE DU COMPLOT. Les Occidentaux
préfèrent donc accentuer les pressions économiques. Cette formule laisserait au régime la possibilité de mettre en œuvre des réformes encore espérées par la Russie, la Chine, la Turquie et les pays arabes. Mais elle priverait aussi Assad des moyens de financer la répression et lui aliénerait le soutien de la classe moyenne. Affaibli, le clan au pouvoir n’aurait alors d’autre choix que la négociation. Les premières sanctions décidées par les États-Unis et l’Union européenne JEUNE AFRIQUE
OBJECTIF SURVIE. Mais la meilleure arme de dissuasion d’Assad reste la menace d’une guerre confessionnelle en Syrie et d’une déstabilisation de la région tout entière. La perspective d’une irakisation du pays et d’affrontements fratricides entre les sunnites (72 % de la population) et les minorités religieuses effraie autant ses voisins que les grandes puissances. La propagande officielle a ainsi montré des manifestants scandant : « Les alaouites [minorité religieuse de la famille Assad, NDLR] au tombeau ! Les chrétiens à Beyrouth ! » Pour assurer sa survie, le régime pourrait, comme par le passé, jouer la carte de la déstabilisation régionale. En Irak, Bachar al-Assad a laissé des djihadistes traverser la frontière au gré de ses rapports avec Washington ; la Turquie se
ont d’abord ciblé des hommes d’affaires appartenant au premier cercle du pouvoir, comme Rami Makhlouf, le cousin du président, qui contrôlerait jusqu’à 60 % de l’économie nationale. Avec les récentes mesures amériSon dernier soutien : l’Iran, qui caines visant Syriatel, leader lui fournit de l’argent, des armes des télécommunications, et la Commercial Bank of et du matériel de surveillance. Syria, première banque du pays, les entreprises sont directement souvient qu’il y a peu la Syrie servait de base arrière aux indépendantistes kurdes touchées. Américains et Européens du PKK ; enfin, Damas héberge toujours réfléchissent désormais à un embargo des organisations palestiniennes radicales sur le pétrole et le gaz syriens, source comme le Hamas, tandis qu’au Liban le de près du tiers des revenus étatiques. Hezbollah se mobilise pour la défense Cependant, des voix s’élèvent contre de du régime contesté. telles sanctions qui toucheraient égaleMais cette stratégie pourrait se révéler ment les couches les plus modestes de la population, directement dépendantes suicidaire : le régime syrien n’a plus sa des subsides de l’État. capacité de nuisance d’antan et il est Face à la pression accrue de la commuconfronté à une menace qu’il ne connaisnauté internationale, Bachar al-Assad, sait pas, celle d’une révolution. ● comme son père en son temps, n’hésite LAURENT DE SAINT PÉRIER N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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La semaine de J.A. Décryptage
Soudan du Sud Bons baisers d’Israël
L’État hébreu s’est empressé de reconnaître le gouvernement de Juba et de lui proposer son aide. À l’évidence, il y voit un nouveau partenaire stratégique en Afrique.
«
I
sraël reconnaît le Soudan du Sud, et lui souhaite de réussir. Ce pays aspire à la paix, et nous serons heureux de coopérer avec lui pour contribuer à sa prospérité. » C’est en ces termes que Benyamin Netanyahou, le Premier ministre israélien, a annoncé le 10 juillet l’établissement de relations diplomatiques avec Juba. Ou plutôt leur officialisation, car les premiers contacts entre Israël et le Soudan du Sud remontent à une quarantaine d’années. En 1967, les rebelles du Sud avaient empêché l’armée soudanaise de prendre part à la guerre des Six-Jours. En guise de remerciement, l’État hébreu leur avait distribué des armes confisquées à
ses adversaires arabes. Plus récemment, en 2009, le régime d’Omar el-Béchir a accusé Israël d’avoir offert un appui militaire et logistique aux rebelles du Darfour, notamment au Mouvement pour la justice et l’égalité (MJE). PASSEURS BÉDOUINS. Aujourd’hui, l’une
des questions prioritaires qui pèsent sur les relations bilatérales concerne le sort des 8 700 clandestins soudanais réfugiés en Israël, dont un quart serait originaire du Sud. Nombre d’entre eux ont fui la guerre et les exactions attribuées aux milices Djandjawid, rejoignant la Terre promise grâce aux filières de passeurs bédouins dans le Sinaï. Avec l’indépendance du Sud,
leur exil pourrait prendre fin. Eli Yishai, le ministre israélien de l’Intérieur, s’est maintes fois prononcé pour leur rapatriement rapide. Mais, dans un premier temps, c’est une importante cargaison d’aide humanitaire que l’État hébreu a fait parvenir au Soudan
octobre 2010, avant d’être rappelé à l’ordre par la Ligue arabe.
en Afrique, moins pour ses richesses pétrolières que pour son positionnement stratégique. Au Nord, le régime de Khartoum est devenu une plaque tournante de la contrebande d’armes à destination des islamistes du Hamas, au pouvoir à Gaza. Le 5 avril, à Port-Soudan, une mystérieuse frappe aérienne contre un convoi de véhicules avait été attribuée à l’aviation israélienne. Pour l’État hébreu, une alliance avec le Soudan du Sud signifierait un retour à la « doctrine de la périphérie », prônée en son temps par David Ben Gourion. Celle-ci vise à bâtir des relations privilégiées avec des pays qui encerclent le monde arabe, à l’instar de la Turquie dans les années 1990.MêmesiJuban’apasencoredépêché d’ambassadeur à Tel-Aviv, il ne semble pas hostile à ce principe: « Israël est l’ennemi de la Palestine, pas du Soudan du Sud », avait déclaré le président Salva Kiir en
Israël avance ses pions. Après la visite d’une délégation commerciale, deux hommes d’affaires israéliens, Tamir Gal et Rafi Dayan, sont en passe de décrocher un premier contrat, estimé à 25 millions de dollars. Via la société Yarok 2000, ils proposeraient aux autorités sud-soudanaises d’implanter des cultures irriguées de fruits et de légumes, de créer des élevages de volailles ainsi qu’un abattoir. Des communautés agricoles, inspirées des kibboutz, devraient également voir le jour en 2012. Elles accueilleront les anciens soldats déployés à la frontière avec le Nord. Quant à Bilpam, le premier fournisseur d’accès à internet du pays, il a été mis en place grâce à des experts israéliens des télécommunications. L’hôtel Shalom de Juba, lieu de rendez-vous des hommes d’affaires étrangers, bruisse de conversations en hébreu. ●
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du Sud. Se disant sensible à la détresse de ce pays chrétien, l’ONG IsraAid évoque « un geste de bonne volonté venant du peuple juif ». Derrière cette sollicitude, bien d’autres intérêts sont en jeu. Les Israéliens considèrent le gouvernement de Juba comme un partenaire de choix
! RÉFUGIÉS SUD-SOUDANAIS à Tel-Aviv, le 9 janvier, fêtant l’organisation du référendum d’autodétermination de leur pays.
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MENAHEM KAHANA/AFP
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ISSOUF SANOGO/AFP
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! CE QU’IL RESTAIT DE LA RUE PRINCESSE, haut lieu de la vie nocturne abidjanaise, le 6 août, au lendemain de l’opération « Pays propre ».
Côte d’Ivoire La fête est terminée En rasant les maquis et les boîtes de nuit de la rue Princesse, le gouvernement d’Alassane Ouattara a pris le risque de s’attaquer à un mythe qui a traversé les époques et les régimes.
D
es gravats entassés dans un coin, des tôles froissées, des hommes qui enlèvent des planches jonchant l’entrée du Métropolis… Ce 10 août, la rue Princesse ressemble à un champ de bataille. Seul vestige du passé : l’enseigne lumineuse du night-club. Devant le Cyclone Bar, une ex-serveuse pleure bruyamment son emploi perdu. Cinq jours plus tôt, dans le cadre de l’opération « Pays propre », lancée par le gouvernement et qui vise à démolir toute construction « anarchique » aux abords des routes, un bulldozer furieux a mis brutalement fin à un mythe vieux de deux décennies. L’histoire de la rue Princesse commence en 1990. Doukouré Moustapha,
alors maire de Yopougon, veut créer un lieu de rassemblement pour les noceurs de la « commune de la joie ». Il choisit une vallée de 2 km, située entre les carrefours Keneya et Bel Air, et baptise cette rue… Princesse. Les atours de la belle ? Boissons à gogo, mets locaux en abondance, musiques à déchirer les tympans, ambiance de fête permanente, mais aussi drogue, insalubrité et prostitution dans les maquis, les bars et les night-clubs. « Dans les années 1990, se souvient Serge-Alex Bléhiri, un journaliste culturel, c’était le passage obligé des artistes zouglou, surtout après la sortie, en 1993, du film Rue Princesse, d’Henri Duparc. » Certains maquis (le Pouvoir, la Nouvelle Écriture) deviennent des
lieux de rendez-vous incontournables. Très courtisée à la tombée de la nuit, la Princesse est fréquentée par des milliers d’Abidjanais et de touristes. UN PETIT TOUR. En 2002, en plein conflit
armé, de nouvelles attractions font leur apparition. Disc-jockeys également chanteursdecoupé-décalé,barsVIPavecsalons privés, écrans plasma… la rue acquiert une renommée internationale qui pousse l’ambassadeur des États-Unis en Côte d’Ivoireàyfaireunpetittour.Enmars2008, le président Laurent Gbagbo et Jack Lang, l’ancien ministre français de la Culture, s’offrent une virée nocturne controversée au Queens; la rue Princesse, qui fait pourtant partie du patrimoine culturel ivoirien, tombe alors sous le feu des critiques. Le 5 août, le mythe a volé en éclats. Mais les travaux de réfection de certains bars qui commencent portent déjà à croire que la légende n’est pas terminée. ● ANDRÉ SILVER KONAN, à Abidjan
À SUIVRE AU MOIS D’AOÛT
Second tour de l’élection présidentielle au Cap-Vert, qui doit départager l’opposant libéral Jorge Carlos Fonseca et le socialiste Manuel Inocencio Sousa. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
23 AOÛT
VINCENT FOURNIER/J.A.
21 AOÛT
Référendum constitutionnel au Liberia. Ellen JohnsonSirleaf, au pouvoir depuis 2006, sera candidate à sa succession à la présidentielle d’octobre.
31 AOÛT AU 2 SEPTEMBRE
Conférence annuelle des ambassadeurs de France, à Paris.Thèmes abordés : « La diplomatie dans un monde en mouvement » et le nucléaire civil. JEUNE AFRIQUE
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! DEVANT LA CATHÉDRALE DE COLOGNE, en Allemagne, lors de l’édition de 2005.
Journées mondiales de la jeunesse Prière de venir nombreux! Près de 1 million de pèlerins se sont donné rendez-vous à Madrid, en Espagne, pour cette nouvelle édition des JMJ. Parmi eux, quelque 10 000 jeunes catholiques du continent africain.
I
ls sont environ 9600 jeunes de 49 pays africainsàserendreàMadrid(Espagne) du 16 au 21 août pour célébrer les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ)autourdupapeBenoîtXVI.Quelques joursplustôt,lesorganisateursprévoyaient que cette édition réunirait le plus grand nombre de participants venus d’Afrique depuis la création de cet événement, en 1986. En tout, près de 1 million de pèlerins du monde entier étaient attendus. Le Nigeria, la RD Congo et l’Afrique du Sud comptent plus de 1 000 inscrits chacun, suivis par le Kenya avec plus de 600 pèlerins, par l’Angola et le Cameroun avec 500 fidèles chacun. D’autres pays, dontpeuderessortissantssontcatholiques (Algérie, Libye, Tunisie…), sont également représentés.
d’Africains ont pu participer à cet événement via un fonds de solidarité. Chaque participant avait en effet la possibilité d’ajouter 10 euros à ses frais d’inscription afin de soutenir les pèlerins des pays les plus pauvres. Le Conseil pontifical pour les laïcs a géré cette aide de 1 million d’euros. Chargé de la préparation des JMJ depuis troisans,lepèreJacquinetditespérerqu’elles puissent se tenir un jour en Afrique. « Un pays africain peut-il porter le poids LE DESSIN DE LA SEMAINE
d’une telle organisation en matière de logistique ? » s’interroge-t-il néanmoins. En 1995, le rassemblement avait eu lieu à Manille, aux Philippines, où les infrastructures sont relativement sommaires. « En Afrique, il y aura des difficultés en matière de transports, de santé publique et de sécurité. Mais l’Afrique du Sud a bien organisé la Coupe du monde de football, c’est donc possible ! Pourquoi pas le Cameroun, par exemple ? » ● MARIE VILLACÈQUE
Dilem • Liberté • Algérie
SOLIDARITÉ. Ducôtéduclergé,44évêques
africains(sur800autotal)et750prêtres(sur 14800) étaient annoncés dans la capitale espagnole. « Des évêques de RD Congo, de Madagascar et d’Égypte interviendront dans les catéchèses des 17, 18 et 19 août », expliquelepèreÉricJacquinet,responsable, au Vatican, de la section jeunes du Conseil pontifical pour les laïcs. Le voyage coûtant cher, nombre N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
JEUNE AFRIQUE
ILS ONT DIT
« Quoi qu’il arrive, je
France Guéant expulse en douce au travail, aux études ou au regroupement familial. Certes, à neuf mois de l’élection présidentielle, le discours se veut de plus en plus ferme. Mais pourquoi Claude Guéant se montre-t-il aussi confiant ? Dans la discrétion de la période estivale, les décrets d’application de la loi sur l’immigration votée en mai sont entrés en vigueur le 18 juillet. Dorénavant, l’intervention du juge des libertés et de la détention (JLD) sera repoussée à cinq jours au lieu de deux, et la durée de la rétention sera prolongée de 32 à 45 jours. Enfin, là encore sans faire de bruit, le plus grand centre de rétention administrative de France a ouvert ses portes le 1er août en Seine-et-Marne. Pas de doute, Guéant sait se donner les moyens de ses ambitions. ● JUSTINE SPIEGEL
Facebook African connection AVEC PLUS DE 32 MILLIONS D’UTILISATEURS, l’Afrique – et en particulier l’Égypte, avec 8 millions d’inscrits – est de plus en plus présente sur Facebook*. Mais si le nombre des utilisateurs égyptiens a augmenté de 62 % entre janvier et juillet, c’est dans le bassin du Congo que la croissance de ce dernier semestre est la plus forte. La hausse a atteint 130 % en RD Congo, 124 % au Congo-Brazzaville, 127 % en Guinée Équatoriale et 113 % en Centrafrique. Ces quatre pays comptent aujourd’hui plus de 900 000 inscrits, contre 400 000 il y a six mois. Pour spectaculaire qu’elle soit, cette croissance est à relativiser, lesdits États ayant un retard important à combler. Le taux de pénétration du réseau social y oscille en effet entre 1 % et 2 %, contre plus de 4 % au Sénégal (environ 570 000 utilisateurs) et 10 % en Égypte. Il n’empêche : ce chiffre devrait continuer à grimper. L’effervescence qui a gagné les réseaux sociaux lors des révolutions arabes a suscité un engouement qui a toutes les chances d’être soutenu par l’arrivée de la fibre optique via le Rwanda, à l’est, et le câble sous-marin dans le golfe de Guinée. Cette avancée technique devrait permettre une forte augmentation du taux de connexion de la sous-région, dont les habitants pourront alors à loisir venir grossir le nombre des Africains inscrits sur Facebook, qui a déjà doublé entre janvier et juin. ● MATHIEU OLIVIER * Voir tous les chiffres sur www.socialbakers.com JEUNE AFRIQUE
me présenterai. Je n’imagine pas Nicolas Sarkozy me laisser tomber. Il a trop de sens politique pour cela. »
RACHIDA DATI RAC Députée européenne Dép (qui, en vue des législatives (qu de 2012, convoite la même circonscription parisienne cir que François Fillon, Premier ministre) le Pre
« Regardez ce qui se passe en Libye : l’Otan est devenue une organisation terroriste, puisqu’elle défie le droit international. » ROBERT MUGABE Président du Zimbabwe
« Saakachvili est de toute évidence un cas pathologique. Il a également reçu une très mauvaise éducation. » SERGUEÏ LAVROV Ministre des Affaires étrangères de la Russie (à propos du président de la Géorgie, trois ans après le conflit qui a opposé les deux pays)
« Si quelqu’un veut manger du kebab, qu’il le fasse chez lui ou hors du centre historique de la ville. » MASSIMO BITOCCI Député de la Ligue du Nord (qui a interdit la vente de sandwiches à Cittadella, la ville dont il est le maire, en Italie)
« Je viens d’Afrique, mais je ne fais pas de l’art africain. Je fais de l’art. » DIADJI DIOP Sculpteur sénégalais
GLEZ ; DR
DANS SA LUTTE contre l’immigration, Claude Guéant s’accroche. Le 8 août, le ministre de l’Intérieur a annoncé vouloir atteindre « un nombre record » de reconduites à la frontière d’étrangers en situation irrégulière. Alors qu’en débutd’annéeBriceHortefeux, son prédécesseur, avait fixé ce chiffre à 28 000, Guéant a décidé de le réévaluer à 30000. « Il semble que nous puissions atteindre cet objectif », a-t-il estimé. Le ministre en a profité pour se féliciter du nombre des expulsions réalisées depuis janvier : « Sur les sept premiers mois de l’année, nous avons reconduit 17 500 étrangers, soit 4 % de plus que l’année dernière. » Quant à l’immigration régulière, il a répété vouloir réduire de 200000 à 180000 le nombre d’entrées légales d’étrangers en France, qu’elles soient liées
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La semaine de J.A. Décryptage
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JEUNEAFRIQUE.COM
SONDAGE L’Otan doit-elle continuer ses bombardements en Libye pendant le ramadan ? 1 2
1. Oui, si aucun civil n’est touché 62 % 2. Non, c’est une provocation inutile en terre d’Islam 29 % 3. Non, le régime de Kaddafi s’en sert pour sa propagande 9% (657 votes*)
À LIRE AUSSI :
DR
* SONDAGE RÉALISÉ AUPRÈS DES INTERNAUTES DE JEUNEAFRIQUE.COM ENTRE LE 5 ET LE 11 AOÛT 2011
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• Mali Les autorités traditionnelles face à la menace Aqmi • Les Anonymous lancent leur vendetta contre Facebook • Égypte Les dattes de la révolution
N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
AIC PRESS
Retrouvez le sixième volet de notre Série City (une ville, un chanteur)
! ACCUSÉ D’AVOIR INSPIRÉ les auteurs des attentats de Casablanca du 16 mai 2003, Mohamed Fizazi (ici en 2001) s’est beaucoup assagi depuis son séjour en prison.
Maroc Fizazi sème la zizanie Dans une lettre ouverte à Al Adl Wal Ihsane, le cheikh salafiste, gracié en avril par le roi, s’en prend aux adeptes d’Abdessalam Yassine. Et leur donne des conseils de modération.
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epuis sa résidence tangéroise, Mohamed Fizazi a lancé, le 6 août, une nouvelle pierre dans le jardin d’Al Adl Wal Ihsane, en l’interpellant frontalement sur sa stratégie d’opposition au pouvoir du roi. Libéré de prison en avril après une grâce royale, le cheikh salafiste avait déjà défrayé la chronique en invitant le Mouvement du 20 février à nettoyer ses rangs « des athées et des dépravés ». Appel à la purge qu’il réitère aujourd’hui dans une lettre ouverte de cinq pages adressée aux adeptes d’Al Adl. En persévérant dans ses attaques contre les déjeûneurs et les homosexuels, Fizazi flatte les ultraconservateurs. En s’érigeant en défenseur de la modération en politique, il s’emploie à rassurer le pouvoir qui l’a libéré. « QUE VOULEZ-VOUS ? » Exprimant d’abord sa bienveillance à l’égard du mouvement de contestation, le cheikh s’en affranchit aussitôt en invoquant la réforme constitutionnelle voulue par le roi : « J’étais à deux doigts de vous rejoindre lorsque j’ai lu le discours historique du 9 mars. Il dépassait le seuil des revendications des jeunes manifestants. » Aujourd’hui, ce qui le chiffonne, ce sont les intentions des ouailles de Yassine.
«Quevoulez-vousaujuste?leurdemandet-il. Combattre la corruption, une réforme sérieuse et immédiate? Le peuple entier le veut. » Au-delà des slogans, Fizazi entend sonder les intentions de la force la mieux organisée du Mouvement du 20 février. Et note, au passage, les divergences étouffées au sein d’Al Adl : un cheikh Yassine arc-bouté sur son modèle califal, sa fille, Nadia, favorable à une république, et des cadres de plus en plus ouverts à une monarchie parlementaire. Même cachée sous une question rhétorique, l’attaque est franche : « Vous voulez renverser le régime, la monarchie et le roi ? Je ne crois pas que vous oserez. Car vous vous couperiez alors de la majorité de ce peuple. Vous allumeriez la flamme de la fitna [« discorde »]. Ne jouez pas avec le feu. » Après s’être justifié (« Je ne défends pas le Makhzen, l’État a ses défenseurs »), Fizazi invite les Adlistes à « mettre [leurs] mains dans les mains du roi, qui n’a pas fui ses responsabilités ». « À chacun le droit de s’opposer, mais de l’intérieur des institutions, pas hors d’elles », conclut-il. À l’heure où la nouvelle gauche s’ouvre au dialogue avec Al Adl, ce mouvement s’invite chaque jour un peu plus dans le débat politique. ● YOUSSEF AÏT AKDIM, à Rabat JEUNE AFRIQUE
Compte-rendu de la réunion des Gouverneurs Africains auprès de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, sous le haut patronage de Son Excellence Monsieur Joseph Kabila, Président de la République et sous la Présidence du Ministre des Finances Monsieur Matata Ponyo.
Les gouverneurs africains au Fonds monétaire international et à la Banque mondiale s’engagent à stimuler les pools énergétiques régionaux. Le Caucus africain composé des gouverneurs auprès du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale a tenu ses assises à Kinshasa, le 3 et 4 août 2011. 150 délégués ont participé aux travaux présidés par Monsieur Matata Ponyo, ministre congolais des Finances et président en exercice de ce groupe, ont principalement porté sur les rapports devant exister entre ces deux institutions financières internationales et le continent africain, ainsi que les questions touchant l’avenir économique du continent. À ce sujet, le ministre congolais a dit « apprécier les efforts du FMI visant à aider les pays membres à faible revenu d’une part, à travers une assistance technique pour la mise en œuvre des politiques macroéconomiques et d’autre part, l’assistance financière accordée par le biais de la facilité pour la réduction de la pauvreté et la crois-
Communiqué
L’énergie électrique à la base du progrès La déclaration finale adoptée au terme de travaux contient aussi l’engagement de gouverneurs auprès des institutions de Brettons Woods de stimuler les pools énergétiques régionaux, et de poursuivre l’objectif de mettre en commun les ressources nécessaires afin d’assurer des économies d’échelle dans le développement du secteur de l’énergie. À cet effet, ils recommandent de mettre pleinement en valeur le potentiel d’exportation d’électricité et de poursuivre les échanges régionaux dans ce domaine. Et pour pallier au déficit énergétique, les gouverneurs africains ont sollicité du Groupe de la Banque un appui financier supplémentaire pour quatre projets, à savoir Inga III en RD Congo pour un financement de l’ordre de huit milliards de dollars pour le pool énergétique de l’Afrique australe; le projet d’aménagement hydroélectrique de Lo Pangar au Cameroun, pour le pool énergétique de l’Afrique centrale ; les projets Souapiti et Kaleta en Guinée pour le pool énergétique de l’Afrique de l’Ouest ; et le projet géothermique de la vallée Rift au Kenya pour le pool énergétique de l’Afrique de l’Est. Pour ces trois derniers projets, les études techniques sont en cours afin de déterminer la hauteur des financements. Enfin, les gouverneurs se sont engagés à accroître la représentation de l’Afrique à tous les échelons des institutions de Brettons Woods. Il convient de signaler que les travaux du Caucus ont bénéficié d’une large diffusion dans la presse nationale et internationale grâce au savoir-faire de l’agence de communication et marketing CMCT à qui le ministère des finances avait confié cette charge.
Communiqué rédigé par Jean-Pierre Eale Ikabe, Service de communication de CMCT. Photos D.R.
sance ». Par ailleurs, les gouverneurs des Banques centrales africaines se sont penchés sur les moyens à mettre en œuvre en vue d’impulser le développement économique du continent. Ainsi, concernant la production agricole, ils ont recommandé une série de mesures à mettre en œuvre dans le but de renforcer la résistance aux risques agricoles et d’améliorer la productivité en raison de ses effets multiplicateurs.
La semaine de J.A. Les gens
DANIEL PILAR/LAIF-REA
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Mustapha Abdeljalil La bonne réputation
Mis en cause après l’assassinat du général Abdelfattah Younès, le chef de la rébellion libyenne continue de jouir d’une certaine légitimité, du moins aux yeux des Occidentaux.
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résident du Conseil national de transition (CNT, organe politique de l’insurrection libyenne), Mustapha Abdeljalil, 59 ans, a dissous, le 8 août, le bureau exécutif, qui faisait office de gouvernement provisoire. Conséquence de l’assassinat, le 28 juillet, du général Abdelfattah Younès, chef d’étatmajor de la rébellion – une mystérieuse opération dans laquelle plusieurs cadres du CNT auraient trempé –, le limogeage de l’exécutif confirme les divisions qui minent le CNT, lequel, paradoxalement, accumule les succès diplomatiques: reconnaissance par une trentaine de pays, récupération des sièges de chancelleries libyennes dans les plus grandes capitales occidentales et dégel à son profit de centaines de millions de dollars déposés dans ces mêmes capitales occidentales. Bref, de quoi oublier les déboires militaires des rebelles, qui ont du mal à progresser face à l’armée loyaliste.
Autant de bonnes nouvelles compromises par la mort du général Younès, dont la disparition provoque le courroux de la puissante tribu des Obeïdi, à laquelle appartenait le défunt, et suscite les interrogations des alliés étrangers du CNT quant aux chances de victoire de la rébellion. Au fil des jours, les partisans de Younès ne décolèrentpas,d’autantquelacommission d’enquête diligentée par Abdeljalil tarde à communiquer ses premières conclusions. Les Obeïdi dénoncent des manœuvres dilatoires, d’autres reprochent à Abdeljalil de ne pas tenir ses troupes. Pis : certaines voix à Benghazi accusent ce dernier d’être le commanditaire du meurtre de la seule personnalité capable de rivaliser avec lui pourleleadershipdelaLibyepost-Kaddafi. Mais d’où Abdeljalil tire-t-il justement cette légitimité qui lui assure aujourd’hui d’être le seul patron de la rébellion, du moins aux yeux des alliés occidentaux ?
Si le patron du CNT a vu le jour, en 1952, à El-Beïda, fief de la confrérie des Senoussi, à équidistance de Benghazi et de Tobrouk, il n’est pas pour autant un sympathisant monarchiste. Son cursus – école coranique, études de droit islamique et séjour à Al-Azhar, au Caire – l’incline plutôt vers les thèses des Frères musulmans, mais il se garde bien d’afficher son obédience. Il entame une brillante mais discrète carrière de magistrat. Au milieu des années ! LE PRÉSIDENT 2000, il préside la cour DU CONSEIL NATIONAL DE d’appeldeTripoli,plus TRANSITION a haute juridiction de la dissous, Jamahiriya. C’est à ce le 8 août, le titre qu’il confirme, à gouvernement deux reprises, la peine provisoire. capitale infligée aux cinq infirmières bulgares et au médecin palestinien accusés d’avoir volontairement inoculé le VIH/sida à des centaines d’enfantslibyens.Maiscen’estbiensûrpascette décision qui lui vaut sa notoriété. COUP D’ÉCLAT. Promu ministre de la
Justice en 2007, il proteste auprès de Kaddafi contre la non-exécution des jugements des tribunaux, en particulier les libérations d’islamistes. Plus grave : il accuse les services d’un certain Abdelfattah Younès, alors ministre de la Sécurité publique, de pratiquer la torture sur des détenus dont la justice a ordonné la libération. Le « Guide » fait la sourde oreille. En 2010, profitant d’une cérémonie retransmise en direct à la télévision, il annonce avec fracas sa démission. Bien que celle-ci ait été rejetée par Kaddafi, Abdeljalil a marqué les esprits et apparaît désormais comme l’homme qui a dit non au « Guide ». Cette réputation de cadi (magistrat de droit musulman) sans peur et sans reproche lui vaudra, quelques mois plus tard, de prendre la tête de l’organe politique de l’insurrection. Seulement voilà, la mort suspecte d’un général, fût-il un ancien tortionnaire, pourrait compromettre son avenir politique. ● CHERIF OUAZANI
NOMINATIONS
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KOEN VERVAEKE UNION EUROPÉENNE Le diplomate belge a été nommé directeur auprès du Service européen pour l’action extérieure, chargé de la Corne de l’Afrique, de l’Afrique de l’Est, de l’Afrique du Sud et de la région de l’océan Indien. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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MAMADY TOURÉ GUINÉE Le fonctionnaire international a été nommé, le 9 août, représentant permanent de la Guinée auprès de l’ONU, à NewYork.
JEUNE AFRIQUE
EN HAUSSE
CHEIKHA MOZAH BINT NASSER
Navin Ramgoolam Qui perd gagne
L’influente épouse de l’émir du Qatar, ambassadrice de l’Unesco pour l’éducation, a été élue deuxième femme la mieux habillée du monde par Vanity Fair, derrière Carla Bruni et devant Kate Middleton.
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Le Premier ministre mauricien ne dispose plus que d’une courte majorité, mais conserve des atouts.
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epuis un mois, la bête noire de Navin Ramgoolam a changé de tête. Ce ne sont plus la moustache et la chevelure blanches de son meilleur ennemi, Paul Bérenger, chef de file de l’opposition et leader du Mouvementmilitantmauricien(MMM),quihantentsesnuits, mais la crinière brune de celle qui fut, ces quinze derniers mois, sa ministre de la Santé, Maya Hanoomanjee. Issue des rangs du Mouvement socialiste militant (MSM), Hanoomanjee est au cœur d’un scandale politico-financier – « l’affaire MedPoint » – qui fait la une des journaux depuis le début de l’année. Elle est soupçonnée d’avoir favorisé la surévaluation du prix d’une clinique privée rachetée par l’État. Son arrestation, le 22 juillet, a détruit le fragile château de cartes que le Premier ministre avait méticuleusement mis en place en 2010. En guise de protestation, les six ministres issus du MSM ont en effet démissionné le 26 juillet. Deux semaines plus tard, le 6 août, Ramgoolam officialisait ce que tout le monde pressentait: la fin de l’Alliance de l’avenir. Pravind Jugnauth, leader du MSM, confirmait quant à lui que son parti rejoignait l’opposition.
STEVE JOBS
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Le patron d’Apple a réussi à hisser sa firme, au bord de la faillite il y a quinze ans, au premier rang mondial en termes de capitalisation boursière, à 337,2 milliards de dollars, devant le géant pétrolier ExxonMobil. SAMIR TARHOUNI
HICHEM
Le chef de la Brigade antiterroriste tunisienne a confirmé, le 8 août, qu’il avait pris seul l’initiative d’arrêter les membres du clan Ben AliTrabelsi à l’aéroport deTunisCarthage, le 14 janvier, au moment de leur fuite. FRANCIS WODIÉ Le nouveau président du Conseil constitutionnel ivoirien a prêté serment devant le chef de l’État, Alassane Ouattara, le 4 août. Il va devoir redorer le blason d’une institution mise à mal par une longue crise politique.
JEUNE AFRIQUE
VINCENT FOURNIER
POPULAIRE. A priori, Ramgoolam sort amoindri de cette crise
EN BAISSE
DR
DONALD RUMSFELD L’ex-secrétaire américain à la Défense pourra être poursuivi pour torture par deux Américains qui avaient dénoncé au FBI un trafic d’armes au sein de la société privée de sécurité irakienne pour laquelle ils travaillaient.
EMI
CHEB MAMI
ALLY SOOBYE/REUTERS
politique. « Il a perdu le numéro deux de son gouvernement [le ministre des Finances, Pravind Jugnauth, NDLR], et sa marge de manœuvre est réduite », analyse un diplomate. ConstituéeautourduPartitravailliste(PTr),duPartimauricien social-démocrate (PMSD) et du MSM, l’Alliance de l’avenir bénéficiait depuis les dernières élections, en mai 2010, d’une confortable majorité à l’Assemblée. Mais aujourd’hui, le Premier ministre ne dispose plus que d’une courte majorité (36 sièges, contre 33 pour l’opposition). Ce n’est cependant pas la première tempête qu’il traverse. À 64 ans, le fils du « père de l’indépendance », Seewoosagur Ramgoolam, en a vu d’autres. En 1997 déjà, lors de sa première expérience à la primature, il avait dû faire face à la défection du MMM deux ans après leur victoire commune. Ramgoolam pourrait même tirer profit de cette crise. En refusant d’intervenir auprès de l’instance chargée d’enquêter sur « l’affaire MedPoint », comme l’exigeaient les membres du MSM, il a marqué des points auprès de l’opinion et satisfait les cadres de son parti. ● RÉMI CARAYOL
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Le chanteur algérien a vu sa participation au Festival du monde arabe de Montréal de novembre annulée en raison de la polémique suscitée au Canada par sa condamnation, en 2009, pour tentative d’avortement forcé. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
L’intégration régionale axée sur les peuples
LE MODÈLE DE LA CEDEAO Lorsque naissait, il y a 36 ans, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), peu de gens lui prédisaient le succès. Car elle s’implantait dans une région composée de peuples d’une grande diversité culturelle et de pays à l’histoire coloniale agitée dont ils héritaient en outre des frontières artificielles.
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Pourtant, grâce à la sagesse et à la vision de ses pères fondateurs, à la ferme détermination et à l’engagement de ceux qui croyaient en ce projet, la Cedeao continue d’enregistrer des résultats remarquables. Elle s’est fait une place de choix dans le monde en tant qu’organe viable et dynamique d’intégration régionale et elle est devenue un modèle pour l’Afrique. À l’international, elle ne cesse de gagner l’estime et le soutien d’un nombre croissant de partenaires au développement. Autant de pays et d’organisations internationales qui se font un point d’honneur de coopérer et de collaborer avec la Cedeao dans la poursuite d’intérêts stratégiques mutuellement bénéfiques et dans le but de tirer parti des potentialités de la région : ses innombrables ressources naturelles et humaines et, surtout, son marché attractif de quelque 300 millions de consommateurs.
COMMUNIQUÉ
Dans cet environnement très compétitif et globalisé, la Cedeao appuie sa stratégie de développement intégré de la Communauté sur cinq piliers majeurs : la paix et la sécurité, l’harmonisation des politiques, la promotion du commerce et de l’investissement, le développement des infrastructures, la démocratie et la bonne gouvernance. Son objectif ultime est ainsi défini par l’ambassadeur James Gbeho, président de la Commission de la Cedeao : « Transformer la Cedeao des États en une Cedeao de peuples vivant dans un environnement pacifique et sécurisé et jouissant des potentialités et des abondantes ressources dont regorge notre région. »
Démocratie et bonne gouvernance L’adoption, en 1999, du Mécanisme de la Cedeao et celle du Protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance (2001), ont permis à l’organisation de promouvoir la gouvernance démocratique et de stabiliser progressivement la région. Le respect scrupuleux des principes de convergence constitutionnelle a permis d’aboutir à des résultats relativement transparents et crédibles, acceptés de façon pacifique au cours des récentes élections présidentielles en Guinée, au Niger, au Bénin et au Nigeria. Au cours des trois dernières années, la Cedeao a officiellement suspendu trois États membres – la Guinée, le Niger et la Côte d’Ivoire – et ensuite restauré l’ordre constitutionnel et la légalité dans ces pays, avec la collaboration de la communauté internationale. En réponse aux guerres civiles ou aux conflits internes dans certains pays au cours des années 1980 et 1990, l’organisation a créé un groupe de contrôle de la paix (Ecomog) dont les succès dans la résolution des conflits libérien et sierraléonais ont été salués par la communauté internationale et sont souvent cités en référence africaine. Dans le cadre d’un mécanisme régional de prévention et de gestion des conflits, une nouvelle Force est en cours d’élaboration. La contribution des États membres en troupes et les questions de financement demeurent les principaux défis à relever. Malgré les remarquables progrès réalisés, la situation sécuritaire de la région continue d’être « fragile et imprévisible » – la Commission de la Cedeao est la première à le reconnaître. Elle n’oublie pas, non plus, que le succès de l’Ecomog a été obtenu au prix de lourdes pertes en matériels et en vies humaines, et que la trop grande concentration qu’elle a dû observer sur la paix et la sécurité l’a amené à négliger l’un de ses objectifs
Du traité de 1975 à la Vision 2020
cardinaux, le développement et l’intégration économiques. Développement et intégration économiques Une des principales réalisations de la Cedeao est son protocole relatif à la libre circulation des personnes et des biens, au droit d’établissement et de résidence qui vise à faciliter l’intégration des économies nationales et des personnes. La mise en œuvre de ce protocole a abouti à la création du « Passeport Cedeao » dans le but ultime de créer un espace communautaire unique où les citoyens peuvent circuler, s’établir et faire des affaires en toute liberté. La zone Cedeao est la seule région en Afrique dotée d’un régime sans visa pour traverser les frontières des États membres et reconnaître à chaque citoyen le droit de s’établir dans l’un ou l’autre des pays. Au chapitre économique, l’objectif de l’Union monétaire a été fixé dès 1978 dans le Programme de coopération monétaire de la Cedeao. Sa réalisation reste liée à l’accomplissement de la convergence des politiques économiques nationales, sans cesse retardé. Largement dominées par l’agriculture ou la production de matières premières, les économies des États membres de la Cedeao restent vulnérables aux chocs extérieurs. En 2010, par exemple, la région a enregistré un taux de croissance de 6,2 %, mais ce chiffre masque des disparités significatives entre les États et se situe encore en-deçà des 7 % requis pour la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD).
Les experts économiques recommandent fortement la mise en œuvre de politiques macro-économiques prudentes, l’accroissement des investissements dans le secteur social, la formulation de politiques économiques dans le cadre d’un programme régional de développement et la diversification, par les États membres, de la base de leurs exportations en vue d’assurer la durabilité de leurs économies et d’atténuer l’impact des chocs exogènes futurs. La très grande majorité de ses partenaires conviennent que la Cedeao agit dans la bonne direction. Mais une organisation internationale n’est forte que des États qui la constituent, du plus faible au plus fort. La Commission appelle donc tous les acteurs – gouvernements, institutions, société civile, médias, partenaires et citoyens ordinaires – à jouer leur partition afin de faire de la Cedeao une communauté vraiment tournée vers les peuples.
* Bénin, Burkina, Cap-Vert, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Liberia, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone, Togo
DIFCOM - Creapub / photos D.R.
M. James Victor Gbeho, Président de la CEDEAO
Le Traité de Lagos, signé le 28 mai 1975 et adopté par 15 États*, définissait la Cedeao en tant que plateforme pour un développement socioéconomique accéléré de la région de l’Afrique de l’Ouest. À partir de 2006, la Cedeao et les institutions communautaires ont connu des changements structurels et stratégiques qui visent à relever les défis de la mondialisation. La transformation, en 2007, du Secrétariat de la Cedeao en Commission et le recentrage du Parlement, de la Cour de Justice et des autres organismes spécialisés sur leurs objectifs de base constituent quelques-uns des changements institutionnels qui permettront d’accélérer le processus d’intégration régionale conformément à la Vision 2020 de la Cedeao.
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Grand angle
La nouvelle vie des
Riches Changement d’époque pour les grandes fortunes du continent. Leurs comptes en banque ne sont pas affectés par la crise, mais le vent de la contestation les pousse à un peu plus de discrétion.
I
MARWANE BEN YAHMED
ls suscitent admiration ou jalousie et sont l’objet de nombreux fantasmes. En Afrique, terre de contrastes par excellence, balayée depuis le début de l’année par un vent de contestation autant sociale que politique, les riches s’adaptent à un contexte nouveau, parfois tendu, et cultivent de plus en plus la discrétion. Surtout ceux qu’on pourrait soupçonner d’être des affidés des pouvoirs en place et d’avoir construit leur fortune sur le dos des petites gens, qui, eux, tirent toujours le diable par la queue. Les riches n’ont jamais été de grands adeptes de la transparence, à de rares exceptions près, dont ces capitaines d’industrie qui se sont imposés dans des secteurs comme les télécommunications, les mines, la banque, l’immobilier, la construction, l’automobile ou l’énergie. Leurs entreprises ont pignon sur rue, certaines sont cotées en Bourse, et leurs comptes rendus publics. Ainsi, entre autres, des 14 milliardaires recensés sur le continent (classement Forbes), tous égyptiens, nigérians ou sud-africains. Dangote, Motsepe, Oppenheimer, les frères Mansour ou Sawiris : ils font rêver leurs compatriotes qui s’imaginent hâtivement des destins similaires ou entretiennent l’illusion N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
d’une rencontre avec eux qui les propulserait au firmament. Les autres, l’écrasante majorité de nos amis millionnaires (100 000 selon une étude de Capgemini et Merrill Lynch), nagent en eaux plus troubles. Si on laisse toujours de côté les « vrais » patrons, millionnaires certifiés grâce à leurs actifs plus facilement identifiables (participations, biens immobiliers, etc.), il reste toute une tribu aussi secrète que des francs-maçons mutiques : les rois de l’informel. Ils sont les hommes de toutes les affaires, commerçants ou trafiquants – la frontière est des plus floues –, vivent de juteuses commissions, ont acquis grâce à leur entregent des terrains pour une bouchée de pain, prodiguent de très onéreux « conseils » ou ont mis la main sur certains marchés exclusifs, la plupart du temps dans l’import-export et en payant des frais de douanes très minorés… La plupart de ces fortunes échappent donc, en totalité ou en partie, aux écrans radars. On devine, on imagine. On se fonde sur le train de vie, le plus souvent, et on se trompe fréquemment. Être riche à Conakry ne requiert certes pas les mêmes montants sur son compte en banque que l’être à Los Angeles. Mais ce n’est pas non plus parce que l’on a un beau 4x4, un costume de sapeur et que l’on flambe en boîtes de nuit auprès de demoiselles subitement enamourées que l’on fait partie du club le plus sélect d’Afrique. Pas facile d’enquêter sur nos nantis, leurs habitudes, leurs lubies et leurs lieux favoris. Surtout depuis le début de cette année 2011… ●
! L’ENTRÉE DANS LE CLUB DES MILLIONAIRES reste très sélecte. Et surtout très secrète. JEUNE AFRIQUE
RONNIE KAUFMAN/GETTY IMAGES
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JEUNE AFRIQUE
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Enquête En
ONS ABID POUR J.A.
Grand angle e
! À GAMMARTH, LA MAISON DE BELHASSEN TRABELSI, beau-frère de Ben Ali, a été pillée…
Tunisie La fête est finie EFFET SECONDAIRE et immédiat de la révolution tunisienne : la bulle des « m’as-tu-vu » a volé en éclats. La nébuleuse de parvenus qui gravitaient autour des maîtres de l’ancien régime fait profil bas et cherche, après des années d’ostentation et de privilèges, à se fondre dans le paysage. Les grosses cylindrées ne défilent plus entre La Marsa et Sidi Bou Saïd. On remise sa Porsche Cayenne au garage au profit de petites cylindrées ou de voitures de location. On range ses bijoux au coffre. Aux vêtements de grande marque on préfère le jean passe-partout, et on ne s’affiche plus dans les lieux sélects où il était de bon ton de parader. Alya Hamza ou Saida Chtioui, comme les autres membres du pseudo-chic club Elyssa, géré par Samira Trabelsi, la belle-sœur de Ben Ali, n’apparaissent même plus aux vernissages dont elles raffolaient, tandis que Sami Fehri, patron de Cactus Productions, ne s’offre plus de week-end au Hasdrubal
Prestige de Djerba, le must des palaces tunisiens. CURE D’AUSTÉRITÉ. La surenchère bling-
bling n’est plus de mise. « Cette année, mes patrons ne passeront pas leurs vacances à Hammamet. Ils ne sont pas rassurés et préfèrent louer leur maison. Ils partiront sans doute à l’étranger », confie l’homme à tout faire d’une famille connue. Une
cuisinière, employée de maison, jubile pour sa part de n’avoir pas eu un seul grand dîner à organiser depuis des mois. « Ils sont devenus moins cassants avec le personnel, ils font moins de caprices. Les temps changent », s’enthousiasme-t-elle. Cure d’austérité également pour les jeunes « branchés ». Ils ont adopté un mode de vie moins voyant et ne réservent plus de tablées à 500 euros la place dans les
ONS ABID POUR J.A.
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" … et des jeunes ont investi les lieux. LA PLUPART DES RÉSIDENCES DU CLAN ONT ÉTÉ SACCAGÉES. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
JEUNE AFRIQUE
La nouvelle vie des discothèques. « Trois vendredis de suite, nous n’avons eu personne. Les gens ont peur et font attention à leurs dépenses », reconnaît Tarak, le patron de l’Odéon, à Gammarth. Côté mariages, on préfère à présent les cérémonies familiales aux banquets tape-à-l’œil. SE FAIRE OUBLIER. La raison de cette soudaine discrétion des fortunes voyantes et rapidement acquises est à chercher dans la crainte d’avoir à rendre des comptes quant aux liens avec le clan Ben Ali. Celles-là préfèrent se faire oublier. Les clients du restaurant Sindbad, à Tunis, se souviennent encore des fêtes arrosées au champagne offertes par Sakhr el-Materi, gendre de l’ancien raïs. Il est aujourd’hui entre Dubaï et le Qatar. Quant à Sofiène et Kaïs Ben Ali, les trublions des nuits de Hammam-Sousse, ils passent, eux, un été à l’ombre, derrière les barreaux. ●
Danscemilieuoùtousseconnaissent,et se fréquentent évidemment, peu de place pour les rencontres imprévues. Camélia évoque une « routine ». La sélection se fait d’abord par le porte-monnaie. Côté boîtes, la bouteille démarre à 1800 dirhams (environ 150 euros), soit le salaire mensuel des serveurs qui saluent pourtant ces happy
Riches
few avec déférence. Mais derrière l’ennui des uns et l’obséquiosité des autres, la colère gronde. DÉPRIME. Les scandales récents qui ont
secoué le landerneau français ont éclaboussé Marrakech (affaire DSK, accusations de Luc Ferry contre un ancien ● ● ●
AFRIQUE DU SUD
Kenny Kunene « J’A ADOR REE LES SUS SHI HIS IS »
FRIDA DAHMANI, à Tunis
LA TORPEUR ESTIVALE s’estabattued’un coup sur la Ville ocre, après un mois de mai pluvieux. Conséquence de la canicule, Marrakchisetvisiteurssefontraresdansles rues. Les passants devisent de la chaleur et lancent des pronostics: 49 °C, 53 °C? Les noceurs, eux, investissent les villas avecpiscineoùl’onpeutcontinuerlasoirée
Fréquentation touristique en baisse dans les hôtels, moins
de fêtes folles…
entamée la veille. « C’est plus convivial, plus intime. On peut poursuivre la fête à l’ombre, avec le confort du service domestique », détaille Camélia, jeune bourgeoise marrakchie. Chaleur, sieste, farniente, il n’est question que de température pour cette faune noctambule qui vit à rebours du rythme solaire. La nuit tombée, vers 23heures,précisenotrefêtarde,c’estl’heure de l’apéro. Direction le quartier chic de L’Hivernage, où se concentrent les lieux à la mode comme le So ou le Lotus Club. JEUNE AFRIQUE
STRINGER/AFP
Maroc Marrakech, l’été en pente douce ! PROVOCATEUR, LE BUSINESSMAN s’offre une jeune femme comme plateau à sushis pour le lancement du Zar, en janvier dernier.
E
n janvier 2011, pour son 41e anniversaire, l’homme d’affaires sud-africain Kenny Kunene gobe des sushis à même le corps de jeunes mannequins. Dès le lendemain, la polémique prend des allures de lynchage. Mais il vient d’asseoir à jamais sa réputation de « sushi king » et de roi des nuits sud-africaines. Ex-détenu (il a été emprisonné sept ans pour escroquerie), ancien professeur d’anglais, il est devenu un homme prospère. Sa fortune, il l’a bâtie « à la force du poignet », aime-t-il raconter en évoquant les 3 000 rands (300 euros) qu’il lui restait sur son compte bancaire en sortant de prison, en 2003. Aujourd’hui, il est à la tête d’une maison d’édition, X-Concepts, et d’une entreprise minière, Central Rand Gold. Mais sa plus grande fierté, ce sont ses boîtes de nuit, dont le Zar de Cape Town. Ses soirées sont fréquentées par une jet-set multiraciale. Et le jeune quadragénaire peut se targuer d’avoir de solides appuis au sein de l’ANC. Au nombre de ses amis, Julius Malema, président de la Ligue des jeunes de l’ANC, mais aussi Duduzile et Duduzane, respectivement fille et fils du président Jacob Zuma. ● MALIKA GROGA-BADA N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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ministre). Et l’attentat du 28 avril, qui a tué 17 personnes, a atteint le moral des jeunes Marrakchis. Résultat: fréquentation touristique en baisse, moins de fêtes folles. « Les gens de la haute restent chez eux », constate, amer, un jet-setteur qui aime jouer au blasé. Côté professionnels, le constat est alarmant. « Les mois de mai et juin ont connu des baisses de fréquentation des hôtels, restaurants, boîtes et cabarets de l’ordre de 40 % à 60 % », livre un fonctionnaire de la wilaya, qui déplore l’absence de communication de crise. ● YOUSSEF AÏT AKDIM, à Marrakech
Égypte La fin des intouchables
STRINGER EGYPT/REUTERS
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! AUTREFOIS TOUT-PUISSANT, L’ÉGYPTIEN AHMED EZZ est aujourd’hui incarcéré et accusé de détournement de fonds publics et d’enrichissement illégal.
AUJOURD’HUI,UNTIERSDESHOMMES D’AFFAIRESESTENPRISON,undeuxième tiers est en fuite, et le troisième est interdit de voyage », ironisait le businessman égyptien Naguib Sawiris lors d’un passage à Paris, le 16 mai. Dans le premier tiers, le casleplusemblématiqueestsansnuldoute celuid’AhmedEzz.Cedéputéàl’Assemblée nationale qui détenait entre autres 70 % du marché de l’acier et une bonne part de l’économie nationale est aujourd’hui derrière les barreaux. Sa proximité avec la familleMoubarak–notammentsonamitié avec le fils cadet, Gamal – a précipité sa chute. Le 17 février, six jours seulement après la démission du raïs, Ezz était placé en détention préventive, ses avoirs gelés… Et sa femme demandait le divorce.
Accusé de détournement de fonds publics et d’enrichissement illégal, il fait sa première apparition au tribunal, le 23 février, l’air résigné, les traits tirés, son traditionnel costume noir taillé sur mesure remplacé par l’uniforme blanc du détenu. POLÉMIQUES. Sentant le vent tourner,
Naguib Sawiris a, lui, démissionné de son poste de directeur exécutif d’Orascom Telecom le 16 mai, pour se consacrer au Parti des Égyptiens libres, fondé en avril. Depuis, Sawiris multiplie les apparitions publiques, les interviews et les conférences. Il se montre détendu, veste en lin sur col ouvert, regarde le journaliste par-
Champagne Les 5 premiers pays consommateurs en Afrique Nombre de bouteilles importées en 2010 Nigeria
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dessus ses lunettes, répond en gesticulant. Il n’hésite jamais à afficher publiquement ses opinions, conscient que certaines peuvent déplaire. C’est ainsi qu’il appelle aujourd’hui à gracier le président déchu, à l’heure où la majoritéréclamesonjugement.Pasencore rompu à l’exercice de la langue de bois, le milliardaire a l’habitude de susciter les polémiques. Dernière en date: la publication sur son compte Twitter d’une photo d’un Mickey salafiste et d’une Minnie en voile intégral. Le « pharaon des télécoms » a reconnu sa maladresse. ● TONY GAMAL GABRIEL
Algérie Sidi-Yahia a la baraka SIDIYAHIA A BIEN CHANGÉ. L’oued asséché transformé en grand boulevard est devenu le quartier le plus branché d’Alger. Le plus cher surtout, avec ses boutiques de vêtements, ses bijouteries de luxe et ses restaurants. En l’espace de quelques années, le prix de l’immobilier, a connu une hausse vertigineuse. Comptez 800 000 dinars (environ 7 500 euros) le mètre carré non bâti ! « À Alger, pour se mè montrer, il faut impérativement venir à mo Sidi-Yahia. Si tu as une nouvelle voiture, elle ne vaudra rien si tu ne remontes pas ce boulevard », explique Sofiane, JEUNE AFRIQUE
La nouvelle vie des 35 ans, en faisant machinalement tourner une grosse chevalière en or autour de son annulaire gauche. Ce jeune entrepreneur a fait fortune dans l’installation de centrales de climatisation. Depuis quelques mois, il passe l’essentiel de son temps au Cappuccino, un café branché idéal pour les affaires et la drague. Sur sa table, il expose l’attirail du parfait « Yahiaoui » : des clés de voiture (une Audi Q7), deux iPhone, une paire de Ray-Ban, un paquet de cigarettes et un Zippo. Il n’existe pas encore de véritable jetset dans la capitale algérienne, mais, à l’instar de Sofiane, ceux qui ont de l’argent ne ratent aucune occasion d’afficher leur réussite. Cela va de la voiture (une grosse berline allemande de préférence) à la maison (dans un ensemble immobilier sur les hauteurs de la ville), et même à l’école privée où étudient les enfants. Quant aux cérémonies de mariage, elles tournent souvent aux séances de m’as-tu-vu avec leurs lots de bijoux en or. « La génération de riches qui est apparue ces dernières années n’a aucun complexe. Peu importe
Une Audi Q7, deux iPhone, une paire de Ray-Ban, un Zippo : l ’attirail du
parfait « Yahiaoui ».
l’origine de l’argent, le plus important est de montrer qu’on en a suffisamment », souligne Sofiane. En cette période de tensions sociales, cette richesse ostentatoire ne semble pas du tout déranger les catégories les plus démunies de la population, envieuses sans doute, mais pas vindicatives. Bien au contraire. Lors du dernier Salon de l’automobile, les Algérois ont même boudé l’une des marches de protestation afin d’assister au show-case de la marque Porsche ! ● AHMED BEY, à Alger
Côte d’Ivoire Profil bas pour les « barons » À COMPTER DE CE JOUR, tous les producteurs de café et de cacao sont derrière Alassane Ouattara », déclarait JEUNE AFRIQUE
CÔTE D’IVOIRE
Jean-Claude Kouyo « MOI, JE LOUE DES JETTS »
L
a mise de départ? Dix années d’expérience de pilotage aux États-Unis et en France, 30 millions de F CFA (environ 46000 euros) d’économies et une bonne dose d’optimisme. Quatre ans plus tard, le chiffre d’affaires de Corporate Elite Group, l’entreprise créée, à Abidjan, en 2006 par Jean-Claude Kouyo et dont il est le PDG, culmine à 3 milliards de F CFA. La marge bénéficiaire oscille entre 5 % et 10 %. L’entrepreneur ivoirien a donc gagné son pari: démontrer que la location de jets privés a un bel avenir en Afrique subsaharienne francophone. « Au Ghana ou au Nigeria, c’est entré dans les mœurs. Il y a huit heures de route entre Abuja [la capitale du Nigeria, NDLR] et Lagos, une heure trente seulement en avion. Mais chez nous, on pense encore que c’est une folie de riche… » Pour l’instant, l’essentiel de sa clientèle est composé de grosses entreprises ivoiriennes ou étrangères. Mais il ne désespère pas d’attirer quelques compatriotes nantis. Pour cela, il a fait l’acquisition du premier avion de sa flotte qu’il loue 1,5 million de F CFA l’heure de vol. À bord: neuf places en cabine luxe, avec champagne et petits fours servis par une ravissante hôtesse. ● M.G.-B.
Riches
Georges Bléhoué Aka, le président du Conseil national des sages de la filière café-cacao, en sortant d’une audience avec le ministre de l’Intérieur, Hamed Bakayoko, le 17 juin. Après avoir fui au Ghana, le planteur le plus riche du pays est donc revenu. EXCENTRICITÉS. Autre fortune du cacao,
Sansan Kouao, est, lui, toujours dans un village de l’ouest du Ghana. Début juin, il a fait allégeance à Ouattara mais demande, pour retourner sur ses terres, que les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) « libèrent auparavant sa maison » à Niablé (est du pays). Le vieux planteur était connu pour ses excentricités. En octobre 2009, il est arrivé au complexe sportif de Yopougon, lors d’une fête en l’honneur de Gbagbo, à la tête d’une forte délégation de planteurs arborant de longues chaînes en or massif et se faisant conduire dans des 4x4 flambant neufs. Gbagbo lui avait alors rendu un hommage public : « Regardez Sansan Kouao, il n’a pas le cepe [certificat d’études primaires et élémentaires, NDLR], mais il a plein d’argent. » Les autres anciens barons de la filière café-cacao, Henri Kassi Amouzou, Lucien Tapé Do, Angéline Kili, Placide Zoungrana… sont pour la plupart à Abidjan. Leur rêve : se faire oublier, en attendant la fin de leur procès, qui traîne depuis trois ans. Les seigneurs des années Gbagbo se comptent aussi parmi ceux qu’on appelait les barons de la Refondation (voir p.117). En tête, Marcel Gossio. L’ex-directeur général du Port autonome d’Abidjan (PAA) s’est « mis à l’abri », selon sa propre expression, hors du pays. Il en est de même pour Paul-Antoine Bohoun Bouabré, l’ex-argentier de l’État. Bouabré avait construit une résidence au luxe insolent au milieu d’habitations en terre battue, à Nakia, son village natal, dans le centre-ouest du pays. Il vit désormais à Cotonou, au Bénin, où il s’était retiré avec sa famille, avant la chute de Gbagbo. Quant à Charles Kader Gooré, surnommé le golden boy de la Refondation, il a acquis deux résidences, l’une à Accra, l’autre à Lomé, et vit entre ces deux capitales, selon ses envies. Sans être un refondateur, l’homme d’affaires Bernard Koné Dossongui, patron du Groupe Atlantique, s’était rallié à Gbagbo avant le premier tour. « S’il y a un épisode de sa vie qu’il voudrait N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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effacer, c’est bien celui-là », confie l’un de ses proches. Koné est toujours entre deux avions. Et s’est rapproché de Ouattara. Quant à Victor Ekra, le riche homme d’affaires et ancien émissaire spécial de Gbagbo sur certains dossiers, il vaque à ses occupations à Abidjan tout en restant le plus discret possible. Sa nouvelle philosophie : l’argent n’aime pas le bruit. Une expression chère à l’ex-chef de l’État. ● ANDRÉ SILVER KONAN, à Abidjan
Burkina Tenue de camouflage pour les officiers À OUAGADOUGOU, le treillis n’est plus à la mode. Depuis les mutineries de mars et d’avril dans plusieurs villes du Burkina, les soldats, auparavant fiers de sortir en tenue, se montrent très discrets. « On a honte de ce qu’il s’est passé. Alors on
reste un peu plus dans les casernes ou chez nous, le temps que la colère des civils passe », témoigne un mutin. Cela vaut aussi pour les gradés. Ils ont beau boire du champagne dans des maquis chics, eux aussi se terrent. IMAGE DÉGRADÉE. Bien qu’ils n’aient
pas cautionné les dérives des troufions, les officiers se savent regardés d’un mauvais œil. Accusés par les mutins de privilégier leur « business » aux dépens de leur tâche, soupçonnés, pour certains, de profiter de leur position au sein de l’armée pour faire des affaires, ils reconnaissent que leur image s’est considérablement dégradée. Ceux qui ont fait fortune ces dernières années et qui se sont installés dans les beaux quartiers de la capitale ont aujourd’hui disparu de la circulation. « Avant, on les voyait parader dans les bars et les boîtes de nuit, en habit de militaire, arborant fièrement leurs galons. Lors des cérémonies, ils étaient omniprésents. Aujourd’hui, on ne les aperçoit plus », constate un journaliste. Un habitué des clubs de Ouaga 2000, le quartier où se côtoient responsables politiques,
diplomates et hommes d’affaires – mais aussi des officiers –, a lui aussi noté un changement de comportement. « Avant, ils n’hésitaient pas à montrer qu’ils étaient pleins aux as. Aujourd’hui, s’ils sortent, ce n’est plus pour flamber. Et plus aucun ne porte de treillis. » ● RÉMI CARAYOL
Cameroun La richesse se fait discrète LA VIE N’EST PLUS UN LONG FLEUVE TRANQUILLE pour les riches du Cameroun, en particulier ceux qui ont accédé à cette prestigieuse catégorie par le hasard d’une nomination à un poste stratégique, ou pour avoir préempté une bonne part des marchés publics. Le déclenchement de l’opération Épervier, en 2005, a eu raison de leur tendance à s’afficher ostensiblement. Ainsi, des lieux huppés de Yaoundé où il faisait bon être
NIGERIA
David Oyedepo
LEE PASTEUR MILLLIO ONN NAIR RE
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l prêche chaque dimanche devant 50 000 fidèles dans son immense église, le Tabernacle de la foi, à Lagos. Son revenu net s’élève à 104 millions d’euros par an. David Oyedepo, président de l’Église de la foi vivante mondiale, est, selon le magazine américain Forbes, le pasteur le plus riche du Nigeria. En mars dernier, il a acquis un jet Gulfstream V à 21 millions d’euros. À la ! AU PAYS DE L’OR NOIR… et des Églises évangéliques, les gros revenus ne sont pas toujours là où l’on croit. tête de sa propre maison d’édition, Dominion Publishing House – qui publie les quelque 70 ouvrages qu’il a officiellement écrits –, pentecôtiste, la Chapelle des gagnants, qu’il a Oyedepo est aussi propriétaire de l’université de fondé en 1981. Ses fidèles, invités à faire des dons, Covenant à Lagos, créée en 2004. Toujours sous sa consacrent au moins 30 % de leurs revenus à l’Église. houlette, un établissement secondaire a été créé De quoi alimenter les caisses des « gagnants », qui sur le même campus. Le pasteur affirme investir n’ont jamais aussi bien porté leur nom. ● MARIE VILLACÈQUE 15 millions de dollars par an dans son courant N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
HENNER FRANKENFELD/PICTURENET AFRICA
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Très riches Record battu 10,9 millions. C’est le nombre de millionnaires dans le monde en 2010, rapporte la 15e édition du World Wealth Report publiée par Ca Capgemini Capg pgemin pg ini et Merrill in Mer Lynch. L’Afrique connaît une forte croissance.
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qu se risquent encore à ériger ces demeuqui res dignes de Hollywood et dont le coût minimal de construction est estimé à 300 millions de F CFA. Le nombre de jeunes femmes au volant de grosses cylindrées tend lui aussi à diminuer. L’une d’elles, maîtresse d’un « riche » directeur général d’entreprise publique, affirme que les cadeaux sont plus étalés dans le temps, et les voyages à l’étranger plus rares. Même si, à Paris, elle descend toujours à l’hôtel Plaza Athénée… ● CLARISSE JUOMPAN-YAKAM
RD Congo Mobutisme cherche repreneur DES GRANDES FAMILLES qui ont fait fortune à l’époque de Mobutu, il ne reste plus grand monde. Les troubles sociopolitiques du début des années 1990 et la crise économique qui s’est ensuivie, la chute du maréchal puis l’arrivée au pouvoir, en mai 1997, de Laurent-Désiré Kabila
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SOURCE : FINANCIAL TIMES
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vu, comme la Salsa, le Plaza ou le Y Yao ao Bà, à, ont été désertés. Le « farotage » non plus n’est plus ce qu’il était. Au bon vieux temps, l’unité choisie était le million de francs CFA (environ 1 500 euros) pour rémunérer l’une de ces séances d’acclamation publique qui n’avaient rien de spontané. Les habitants de la capitale se souviennent encore de l’ex-directeur général de la Société camerounaise des dépôts pétroliers, Jean-Baptiste Nguini Effa, qui se faisait annoncer à l’entrée des boîtes de nuit, donnant ainsi le coup d’envoi de tournées générales qu’il offrait jusqu’au bout de la nuit. Certains regrettent aussi le « faroteur » patenté Emmanuel Gérard Ondo Ndong, ex-directeur général du Feicom (Fonds spécial d’équipement et d’intervention intercommunale), qui, lors de ses missions à l’intérieur du pays, recommandait à ses collaborateurs de « mettre les journalistes en mouvement ». Toujours à Yaoundé, les chantiers de construction de minipalais se raréfient dans les quartiers Santa Barbara et Koweit City. Certains Yaoundéens pensent que le président Paul Biya en personne fait le tour de la ville pour identifier les imprudents
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ont eu raison d’elles. Sous Mobutu, des familles ont réussi grâce à la zaïrianisation, qui leur a permis d’hériter de biens d’entrepreneurs étrangers. La proximité avec le régime était également un atout. Tel fut le cas de Jeannot Bemba Saolona, le père de Jean-Pierre Bemba, d’Ignace Moleka, de Litho Moboti, « l’oncle » de Mobutu, de Kisombe Kiaku Muisi, dit Amasco, ou de Henry-Désiré Takizala. D’autres ont réussi sans l’appui du maréchal, comme le banquier Augustin Dokolo ou Victor Ngezayo, qui, dans les années 1970-1980, possédait entre autres une chaîne hôtelière. L’arrivée au pouvoir des Kabila a redistribué les cartes. De rares descendants de ces ex-capitaines d’industrie ont tant bien que mal remonté des activités au pays. Mais Sindika Dokolo, l’un des fils du banquier, opère, lui, en Angola, et Jean-Pierre Bemba, dont les affaires ont périclité, se trouve dans une cellule de la Cour pénale internationale, à La Haye. En revanche, de nouveaux « boss » ont émergé. On peut citer par exemple, Jean Lengo, à la tête du groupe Ledya, Albert Yuma, président du conseil d’administration de la Gécamines et patron des patrons, et Raymond Mokeni Ekopi ● ● ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Kane, le président de la Fédération des entreprises du Congo (FEC) dans la Province-Orientale. Moïse Katumbi, le gouverneur du Katanga, est un cas à part. Avec son frère Raphaël Katebe Katoto, il a hérité de la bosse des affaires de son père, Nissim Soriano, un entrepreneur originaire de l’îlegrecquedeRhodes,émigréauKatanga avant l’indépendance. Depuis son retour d’exil en Afrique du Sud, Katumbi doit sa fortune à des investissements dans le secteur minier et les transports. Sa nièce, Leila Katebe, a pris le relais de son père, qui s’est également lancé en politique. Et puis, il y a toutes les fortunes qui se bâtissent dans l’ombre. Pour l’heure, la photographie des « nouveaux riches » reste floue. ● MURIEL DEVEY ●●●
Libye Djerba: une planque en or UNE LONGUE JUPE, des chaussures fermées et la tête couverte d’un voile, cette jeune mère de famille qui joue avec N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
! EN EXIL À L’HÔTEL SIDI MANSOUR. Les riches Libyens ont investi la vingtaine de complexes de luxe de l’île tunisienne.
ses enfants au bord de la piscine déserte « Ceux qui logent dans les suites à d’un cinq étoiles n’est pas une touriste. 800 euros la nuit, et qui ne lésinent pas « Il nous a fallu plus de douze heures sur les pourboires, sont en général des pour arriver de Tripoli, nous pensions hommes d’affaires qui ne quittent leur chambre que le soir pour traîner dans ne jamais franchir la frontière. Avant, on venait à Djerba en vacances ou pour se soigner, mais aujourd’hui nous sommes Après des réfugiés dans l’attente tout, leur pays est en guerre. » d’un vol pour Montréal », UN GUIDE TOURISTIQUE raconte Aïcha avec un peu d’amertume. Son élégante les bars », explique un employé. Parfois montre en or et ses vêtements coûteux proches du régime, ce sont des patrons de la classent d’emblée parmi ces Libyens sociétés pétrolières, de hauts responsables aisés qui ont investi l’île touristique. de banque, des importateurs dont les activités sont paralysées par les frappes de SAISON SAUVÉE. Sirotant une bière, l’Otan. D’autres soutiennent les rebelles Hafiz, lui, affirme être « en vacances lonet se servent de Djerba comme arrièregue durée au Royal Garden ». À la table base logistique. Mais dans la vingtaine voisine, six femmes de sa famille, toutes d’établissements de luxe que compte rigoureusement voilées, bavardent en l’île, ce petit monde ne dépasse pas les jetant des regards en coin. Malgré le déni 200 personnes. de certains hôteliers, qui trouvent cette clientèle pas assez flatteuse et pouvant RUBIS SUR L’ONGLE. Les familles préfèfaire fuir les vacanciers occidentaux, le rent les locations richement meublées et tourisme à Djerba risque, cette saison, d’être sauvé par la manne inattendue des loin des regards des curieux et, éventuelriches Libyens. lement, des partisans de l’autre camp. ● ● ●
« La fortune n’empêche ni l ’ennui ni la peur.
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Conso Quand on aime, on ne compte pas L’union royale de William et Kate vous a fait rêver. La petite larme de Charlène au bras du prince Albert de Monaco vous a ému. Voici une liste de mariage digne des plus grandes noces du gotha. LE WHISKY GLENLIVET GENERATIONS 70 ANS Gordon & Macphail NO MORE WAR, par Mabunda Gonçalo Daum Le temps d’une collection d’exception, la maison Daum a fait appel aux meilleurs artistes africains. La sculpture en verre de Mabunda Gonçalo n’existe qu’en huit exemplaires. Raison de plus pour l’offrir aux heureux mariés. Prix non disponible.
Un cadeau idéal pour l’homme d’affaires angoissé par ses nouvelles fonctions de chef de famille. Prix : 16 000 euros.
R E PALMIE LA TABL arles h C Maison écorce duisent l’ à l’or ro p re s Les pied ier, le tout doré le aussi d’un palm ts. Avec une tab ison a ra a fin 24 c , signée de La M tinent –, n e o s c u le ie c r pré t su débute – un mus Charles que ce mariage nul doute ons auspices. b sous de e. demand Prix sur
LA MONTRE CRAZY MA JOLIE Boucheron En offrant ce petit bijou horloger à la mariée, pas de doute, les invités contribueront à faire du jour J le moment le plus merveilleux de sa vie. Ils vont devoir se cotiser à hauteur de 49 000 euros. LE SEAU À GLACE Lalique Il s’appelle Ganymède, du nom de l’échanson des dieux de l’Olympe qui fut aussi, selon la mythologie grecque, l’amant de Zeus. Espérons que la nouvelle mariée ne s’offusquera pas du présent et aura tout de même plaisir à y placer sa bouteille de champagne. Prix : 2 200 euros.
LA PARURE DE LIT BOSPHORE Hermès S’il existe une façon de bien commencer une vie à deux, c’est évidemment de posséder cette parure de lit. Un simple jacquard de coton bleu et blanc, certes, mais sorti des ateliers de la célèbre marque de luxe parisienne. Comptez au moins 5 000 euros. JEUNE AFRIQUE
L’IPHONE 4 Gresso Histoire de pouvoir se joindre n’importe quand depuis n’importe où, quoi de mieux qu’un téléphone portable ? Sur cet iPhone d’exception, les pommes sont dorées à l’or fin, les coques ont été réalisées dans un bois massif d’Afrique vieux de 200 ans, et quelques cristaux Swarovski viennent agrémenter le téléphone de Madame à 5 000 dollars (environ 3 400 euros). N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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RIC CHE ET SAN NS COM MPLEX XE
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’ est un riche sympathique. Ahmed Khalifa Niasse répond toujours lui-même au téléphone. Mieux, il n’hésite pas à faire étalage de sa fortune, qui s’élève selon lui à 100 millions de dollars (68 millions d’euros). L’une des plus grosses richesses du Sénégal… Niasse possède plusieurs sociétés implantées à Dubaï et spécialisées dans l’immobilier, le tourisme, l’aviation. Il siège au conseil d’administration de la Foras International Investment Company (filiale de l’Organisation de la conférence islamique) et détient de nombreux titres fonciers. Mais il est surtout un lobbyiste hors pair. « J’introduis des sociétés et des hommes d’affaires dans les pays africains et arabes, et je touche des commissions », lance-t-il sans autre précision. « Dans mon métier, la clé du succès est la discrétion! » ajoute celui qui dit avoir ouvert les portes des palais des Émirats arabes unis au président Abdoulaye Wade. Actuellement, son plus grand projet est la construction, pour un montant de 30 millions de dollars, d’un complexe immobilier de luxe à Conakry (Guinée). « Il y a quelques années, j’ai emménagé dans l’une de mes villas aux Almadies [quartier huppé, NDLR], mais je n’y suis pas resté car je m’y sentais seul », explique ce sexagénaire polygame, père d’une vingtaine d’enfants dont plusieurs font d’« excellentes études dans de grandes universités étrangères, car c’est aussi à cela que sert l’argent ». À l’heure où la rue gronde, il ne se sent nullement menacé. « En tant qu’Africain, cela m’enchante de montrer qu’on peut devenir riche en étant honnête, s’enthousiasme-t-il. Je n’ai pas profité du régime », précise-t-il bien que son parti, le Front des alliances patriotiques, a fait partie de la mouvance présidentielle et qu’il fut un temps conseiller du chef de l’État. Niasse, qui est issu d’une famille de marabouts respectée (confrérie des Niassènes), affirme « côtoyer l’argent, mais ne pas le porter dans son cœur ». Il n’en apprécie pas moins les objets de valeur tel son téléphone en or Vertu, mis en vente à 30 000 euros par le joaillier Boucheron. Niasse l’a expédié récemment à Paris pour un nettoyage en profondeur. ● CÉCILE SOW, à Dakar
! SA PLUS
GRANDE FIERTÉ :
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« Ils règlent rubis sur l’ongle deux à trois mois de caution », explique un réceptionniste. Le directeur d’un palace refuse, pour sa part, de confirmer la présence de personnalités en provenance de Tripoli, malgré les nombreuses grosses berlines de marques nippones arborant des plaques officielles de la Jamahirya sur le parking de son établissement. « Nous devons être extrêmement discrets. Il y a eu des heurts la semaine dernière, à Houmt Souk, entre des rebelles et des pro-Kaddafi. Certains clients ne quittent pas l’hôtel, d’autres en changent fréquemment pour ne pas être reconnus, quand ils ne vont pas vers Sousse, Hammamet, voire l’Europe et le Moyen-Orient », explique-t-il. Même si les tiroirs-caisses de Djerba fonctionnent, les insulaires commencent à grogner. « On craint la moindre étincelle, la vigilance est maximale, l’entrée des hôtels est contrôlée. Ils se baladent avec des valises pleines de billets, mais l’argent n’empêche ni l’ennui ni la peur. Après tout, leur pays est en guerre », commente avec agacement un guide touristique guère tendre avec cette clientèle d’un nouveau genre. « Les vrais réfugiés sont dans les camps des postes-frontières de Ras el-Jdir et Dhiba. Ici, c’est une planque de luxe », conclut-il. ● ●●●
Ahmed Khalifa Niasse
MARC DEVILLE POUR J.A.
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l’achat de son jet privé, un Gulfstream ayant appartenu au prince Al-Walid d’Arabie saoudite.
FRIDA DAHMANI, envoyée spéciale
Sénégal Chic, cher et en vitrine! IL SUFFIT DE FLÂNER dans le tout nouveau mall de Dakar, le Sea Plaza, pour remarquer la tendance : loisirs, habillement, cosmétiques… Les grandes marques ont désormais leurs boutiques sur le continent. « L’Oréal a, par exemple, ouvert un bureau au Sénégal avec un représentant », confirme un consultant dakarois. Si les prestigieuses maisons, comme Louis Vuitton, sont encore absentes des vitrines, lesmarquesintermédiairestellesqueHugo Boss ou Guess trouvent, elles, un public. À leurs côtés, le luxe made in Dubai est bien présent, favorisé par les dessertes aériennes régulières. Idem pour les parfums haut de gamme, qui, peu à peu, quittent les duty free pour remplir les rayons des magasins de Dakar. Un phénomène que l’on retrouve dans toutes les capitales africaines. Autre secteur bénéficiaire, JEUNE AFRIQUE
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VINCENT FOURNIER/J.A.
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l’automobile. BMW, Mercedes… « Les ventes progressent car le pouvoir d’achat croît », assure Edward Gonfray, responsable de la marque Mercedes-Benz pour le Sénégal, le Mali et la Guinée. Mais le luxe, ce n’est pas seulement acheter, c’est aussi se montrer. Les champs de courses hippiques en Afrique de l’Ouest deviennent prisés par la haute société. À tel point que le président sénégalais, Abdoulaye Wade, a annoncé en juin la construction d’un hippodrome national non loin de Dakar. Les courses hippiques sont l’occasion de parader, paré de ses plus beaux habits griffés. Le vin à bulles a également la cote. Moët & Chandon, Laurent Perrier… les grandes marques françaises deviennent indissociables des cocktails, des mariages guindés et autres apéritifs d’une classe supérieure en quête de produits d’exception. Autres événements où s’afficher : les concours de poker. La 3e édition du Dakar Poker Tour, organisé à l’hôtel Terrou-Bi en janvier, a réuni quelque 130 joueurs, qui ont payé la bagatelle de 1 million de F CFA (1 500 euros) pour y participer. À quelques pas du Terrou-Bi, hommes d’affaires et Sénégalaises aisées aiment également venir profiter de la plus belle JEUNE AFRIQUE
! 16 000 EUROS LA NUIT pour cette suite du Shangri-La, la nouvelle adresse parisienne prisée des Gabonais.
piscine de Dakar le temps d’un weekend, dans l’hôtel 5 étoiles Radisson Blue, construit par le millionnaire Yérim Sow. Les berlines de luxe garnissent le parking, le temps de discrètes soirées VIP. Non loin, le projet immobilier haut de gamme Water Front, autre œuvre du businessman, achèvera de faire de la Corniche un lieu prisé des classes supérieures. ● MICHAEL PAURON
Gabon Mais où dépenser tranquille? ILS APPRÉCIAIENT le soleil de Nice, d’Antibes, de Beaulieu-sur-Mer, sur la Côte d’Azur. Pendant de longues années, cette région fut le lieu de villégiature préféré des grandes familles gabonaises à l’instar des Bongo, qui y possédaient plusieurs villas, ou des Rawiri… Cet attrait du littoral méditerranéen a constitué
le fonds de commerce d’une poignée d’agences immobilières. Mais les temps changent, l’élite s’est choisie d’autres destinations, dont les États-Unis, surtout depuis l’éclatement de l’affaire des biens mal acquis.
La France (un peu) délaissée au profit des
États-Unis, de l’Asie ou du Moyen-Orient. Les barons ont néanmoins conservé leurs appartements de Paris, Neuillysur-Seine ou Levallois. Quant aux jeunes loups qui montent aux affaires, ils aiment voyager en Asie et au Moyen-Orient : Singapour, Hong Kong, Dubaï… De passage en France, ils préfèrent le Paris des palaces et des hôtels haut de gamme tels que le George V, où le chef de l’État, Ali Bongo Ondimba, aime séjourner, ou le Shangri-La, dont le bar de style Empire est prisé des jeunes cadres. Surtout, se tenir à l’écart des hôtels de la porte Maillot, fourmillant de fonctionnaires en mission… ● GEORGES DOUGUELI N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Enquête En
Palaces parisiens Le rendez-vous des nababs D’AFRIQUE, D’ORIENT OU D’ARABIE, les riches aiment Paris. On ne saurait être un millionnaire moderne sans faire escale dans la capitale du luxe, de la mode et de la gastronomie. Après l’avoir boudée pendant la crise, jet-setteurs, businessmen et globe-trotters fortunés reviennent, depuis l’été 2010, y mener la vie de palace. Dans les beaux quartiers, les hôtels les plus prestigieux – et les plus chers – atteignent cette année des taux d’occupation confortables : la plupart ont connu un mois de juillet exceptionnel, affichant presque complet, comme le Bristol et le N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Plaza Athénée avec des taux d’occupation respectifs de 90 % et 96 %. COMPÉTITION FÉROCE. Pour capter la
clientèle de plus en plus importante, et exigeante, des millionnaires nomades, les palaces se livrent une compétition féroce attisée par l’arrivée de nouvelles
Une altesse arabe débarque à la tête
d’une caravane de 47 Mercedes.
enseignes : le Park Hyatt Vendôme en 2002, le Fouquet’s Barrière en 2006, le Shangri-La en 2010, le Mandarin Oriental en 2011, en attendant le Peninsula en 2013 et le Cheval Blanc en 2014. Face à ces challengeurs, les enseignes historiques comme le George V, le Meurice ou le Royal Monceau ont été rénovées, voire entièrement refaites. En mai dernier, la nouvelle distinction officielle « Palace », qui n’a honoré que quatre établissements sur la trentaine de cinq étoiles que compte Paris, a fixé très haut les critères d’excellence. Ni le Ritz, ni le Crillon, ni le George V, bijoux de l’hôtellerie française, n’ont eu droit au précieux poinçon accordé au Park Hyatt, au Plaza, au Bristol et au Meurice. JEUNE AFRIQUE
Riches
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VINCENT FOURNIER/J.A.
La nouvelle vie des
VINCENT FOURNIER/J.A.
"! Ouvert en 2010, LE SHANGRI-LA a rejoint les grands palaces parisiens dans la course pour séduire la clientèle du continent.
Du Royal Monceau, qualifié de « palace intellectuel », au Mandarin affichant un design branché en passant par le Shangri-La au charme discret, chaque adresse cherche à développer un esprit particulier pour attirer le magnat bobo, la smalah du Golfe ou le nabab amoureux.
Mais toutes ces maisons ont en commun d’offrir le meilleur de l’hospitalité française et pour règle d’or de satisfaire les moindres désirs comme les exigences les plus extravagantes de leurs hôtes. Celles-ci dépassent souvent la mesure du caprice de star, mais « ce qui apparaît comme une folie pour le commun des mortels sont des demandes tout à fait normales pour cette clientèle », précise Vincent Le Gorrec, directeur marketing du Shangri-La, avant de confier qu’une altesse arabe est récemment arrivée à la tête d’une caravane de 47 Mercedes. VISITEURS ET PROPRIOS. Bien qu’ils
ne représentent que 15 % à 20 % de la clientèle des palaces, les hôtes du MoyenOrient y sont particulièrement choyés. Et pour cause ! Ils y occupent des étages entiers avec famille, courtisans et domestiques, et le room service, sollicité à des heures improbables, peut se facturer en milliers d’euros. Si les Arabes se sentent aussi bien dans les palaces de Paris, c’est peut-être que beaucoup de ces maisons
Coût de la vie Ces capitales hors de prix pour les expat Le top 5 africain dans le classement de 300 villes mondiales (Mercer, mars 2011)
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LUANDA Angola
N'DJAMENA Tchad
LIBREVILLE Gabon
NIAMEY Niger
VICTORIA Seychelles
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appartiennentàdesfortunesouàdesfonds du Moyen-Orient : l’Égyptien Mohamed al-Fayed possède ainsi le Ritz, le prince saoudien Al Walid Ibn Talal s’est offert le George V, le fonds Qatari Diar a fait main basse sur le Royal Monceau ainsi que sur le futur Peninsula, et le Crillon vient d’être acquis par un membre de la famille Al Saoud.
Ali Bongo Ondimba a opéré une révolution de palace en délaissant
le Meurice pour le George V.
Les Subsahariens apprécient également le luxe des grands hôtels parisiens. Les nouveaux millionnaires du continent s’y rendent en nombre croissant, mais, traditionnellement, c’est surtout la caste politique qui vient y tenir salon. Ainsi, en 2009, le président gabonais Ali Bongo Ondimba avait-il opéré une véritable révolution de palace en délaissant le Meurice, ancien quartier général de son père, Omar, pour le George V : un symbole de rupture ! Longtemps à la traîne de Londres ou de New York en matière d’hospitalité cinq étoiles, la Ville lumière a rattrapé son retard et redevient un phare mondial du savoir-vivre pour millionnaires itinérants. Seule ombre au tableau en cette fin d’été, le ramadan a fait déserter les palaces par les riches cheikhs du Moyen-Orient. ● LAURENT DE SAINT-PÉRIER N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Afrique subsaharienne
GUINÉE
L’armée de tous Après l’attaque contre le domicile du chef de l’État, le 19 juillet, la réforme en profondeur du corps militaire apparaît plus que jamais comme la priorité d’Alpha Condé. Périlleuse mission…
ANDRÉ SILVER KONAN,
À
envoyé spécial
l’entrée du camp Samory-Touré, à Kaloum (commune administrative de Conakry), non loin de la fière statue du mythique chef de guerre malinké, un 4x4 militaire se tient à l’arrêt. Au volant, un jeune lieutenant, béret rouge vissé sur la tête, joue les chauffeurs pour un colonel. Impensable sous d’autres cieux, mais banal en Guinée, où l’armée fait, au mieux, figure de « désordre organisé », selon les mots d’un proche du président, Alpha Condé. TENTATIVE AVORTÉE MAIS INQUIÉTANTE. Lundi
20 juin 2011, Palais du peuple de Conakry. Le chef de l’État installe le Comité national de pilotage de la réforme du secteur de la défense et de la sécurité – question délicate s’il en est. Un mois plus tard, le 19 juillet, son domicile est attaqué au
Clivages ethniques, corruption, criminalité… La liste des dysfonctionnements est longue. lance-roquettes par un commando armé. « On peut imaginer que la nécessaire réorganisation de l’armée suscite des mécontentements », réagit après coup le ministre français de la Coopération, Henri de Raincourt (voir J.A. no 2638). Tout l’enjeu, pour Alpha Condé, est de réussir à faire une omelette sans casser d’œufs. En clair, il lui faut contenter la population et rassurer les investisseurs, tout en ménageant les susceptibilités des militaires. La nouvelle République, née en décembre dernier, a hérité d’une armée à problèmes. Activités criminelles, clivages ethniques, conflits de générations, corruption des gradés, effectifs pléthoriques, impunité, indiscipline, N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
IS/MC
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insubordination, manque d’instruction et de formation, recrutements non réglementaires, promotions fantaisistes, violations des droits de l’homme… La liste des dysfonctionnements, dressée par International Crisis Group (ICG) dans un rapport publié en septembre 2010, n’en finit pas de s’allonger. À l’époque déjà, l’ONG prévenait que « le [nouveau] président ser[ait] confronté à une série de dilemmes qui l’entraîneront dans des directions contradictoires ». Le premier de ces dilemmes, après la tentative d’assassinat de la mi-juillet, sera de décider de poursuivre ou de renvoyer aux calendes grecques la réforme de l’armée. Des actes ont été déjà
! ENTRE 35 000 ET 45 000 HOMMES : personne ne sait vraiment combien de soldats forment les troupes.
JEUNE AFRIQUE
Afrique subsaharienne
les
dangers
La nécessaire démilitarisation de l’administration (pendant plus d’un quart de siècle, des hommes en treillis ont occupé des postes clés) a elle aussi commencé, mais au moins trois généraux (Mamadou Korka Diallo, Mamadouba Toto Camara et Mathurin Bangoura) sont toujours membres du gouvernement. Quant à Alpha Condé, qui s’est attribué le portefeuille de la Défense, il a pris, comme directeur de cabinet, le général Aboubacar Sidiki Camara, dit Idi Amin, un temps membre du Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD) de Dadis Camara. L’audit des marchés publics a permis de mettre en lumière des « contrats surréalistes », à en croire le secrétaire général de la présidence, François Lonsény Fall. Mais, à ce jour, le président n’a pas encore demandé de comptes à « tous ceux qui ont pillé la Guinée », comme il l’avait promis. RECENSEMENT. Pour l’instant, ces mesures sont une goutte d’eau de solution superficielle dans l’océan d’une réforme profonde. Le premier défi sera de connaître les effectifs exacts de l’armée. Sont-ils 35 000 ? 45 000 ? Personne ne le sait, pas même les membres du cabinet
« Des gradés ont détourné des armes. Il n’y avait aucun contrôle sur les achats. » UN OFFICIER À LA RETRAITE
posés. La démilitarisation de la capitale a permis de délocaliser des armes lourdes à l’intérieur du pays, notamment à Kindia (135 km de Conakry), première région militaire de Guinée d’où sont d’ailleurs venus les renforts, le 19 juillet. Mais des lance-roquettes antichars (LRAC) se trouvent encore au camp Alpha-Yaya-Diallo, où le putschiste Moussa Dadis Camara avait installé le siège de son régime. « Il est évident que des officiers supérieurs ont détourné des armes, fait remarquer un officier à la retraite. Il n’y avait aucun contrôle sur les achats, qui empruntaient des circuits douteux et qui ne relevaient de la prérogative que de quelques hauts gradés. » JEUNE AFRIQUE
présidentiel contactés par Jeune Afrique. Sont-ils faciles à recenser ? « Loin de là, explique encore l’officier à la retraite. Des chefs d’unité, comme celui de la distribution de carburant, un poste qui, soit dit en passant, a fait la fortune de Dadis Camara, des officiers de la Direction générale de l’intendance militaire [DGIM, chargée de la paie de la solde, NDLR] et des commandants de camp feront tout pour bloquer ce recensement. » En jeu : des « commissions » prélevées sur les soldes, le détournement du salaire de militaires fictifs, la fraude sur la distribution des vivres et du carburant… Certaines rentes de situation – bien qu’illégitimes – sont dangereuses à remettre en cause. Pourtant, « il n’y a pas de raison que l’armée guinéenne dépasse les 12000 hommes », conseille le général sénégalais Lamine Cissé, qui a conduit la mission conjointe d’évaluation de la réforme du secteur de la sécurité pour la Communauté ● ● ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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subs su bsah bs ah Afrique subsaharienne Parmi les officiers arrêtés et déférés pour leur participation à « la tentative d’assassinat » du 19 juillet, on compte: le colonel Sambadougou Damakan • commandant du camp Alpha-Yaya-Diallo le général Nouhou Thiam • ex-chef d’état-major
SEYLLOU DIALLO/AFP; PANAPRESS/MAXPPP
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le commandant Alpha Oumar Boffa Diallo, dit AOB • ex-aide de camp de Lansana Conté le commandant Sidiki Camara, dit de Gaulle • ex-aide de camp de Sékouba Konaté
économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), l’Union africaine et l’ONU au premier trimestre 2010. À cette date, l’organisation avait estimé les effectifs à 32 000 hommes. ●●●
RÉDUIRE LES EFFECTIFS. Certes, Alpha Condé
compte profiter de l’assainissement de la fonction publique pour envoyer 4 200 militaires à la retraite. De même, 4 000 soldats doivent se reconvertir en agents des eaux et forêts et 7 000 autres en gardes pénitentiaires ou en sapeurspompiers. Mais que faire des 3 000 jeunes recrutés sous Moussa Dadis Camara et qui n’ont pas
UN DEMI-SIÈCLE D’IMPUNITÉ « LE PROBLÈME DE L’ARMÉE GUINÉENNE est simple, explique un journaliste de Conakry. Chaque fois qu’un président est arrivé au pouvoir, il a promu des gens qui profitaient des situations pour régler des comptes, en toute impunité. » Ainsi SékouTouré profitait-il des complots – réels ou supposés – pour envoyer mourir ses adversaires au camp Boiro. Lansana Conté, son successeur, n’a pas fait mieux. La répression qui a suivi le coup d’État manqué du colonel DiarraTraoré, le 4 juin 1985, a été l’occasion de dizaines d’assassinats. Moussa Dadis Camara n’a pas dérogé à la règle. Les responsables du massacre de plus de 150 opposants, le 28 septembre 2009, dans un stade de Conakry, n’ont pas été inquiétés. En février 2010, Human Rights Watch s’offusquait de la promotion accordée par Sékouba Konaté (successeur de Dadis Camara) à certains responsables impliqués dans les massacres, citant le commandant Claude Pivi et le lieutenant-colonel MoussaTiegboro Camara, qui figuraient sur la liste d’interdiction d’entrée sur le territoire établie par l’Union européenne. Ils ont été confirmés par Condé, au poste de ministre chargé de la Sécurité présidentielle pour le premier, et de directeur de l’Agence nationale chargée de lutte contre la drogue, le grand banditisme, les crimes organisés et le terrorisme pour le second. Deux hommes influents avec lesquels le président doit A.S.K. composer. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
rejoint les casernes ? « Leur intégration n’est pas à l’ordre du jour », tranche un cadre du ministère de la Défense. Mais il fait peu de doute que ces mesures ne suffiront pas pour inverser la structure d’une armée qui compte, selon les dires du président Condé, « plus de gradés que d’hommes de troupe » – deux officiers pour un soldat, pour être précis. Le ministère de la Défense n’exclut pas d’encourager à des départs volontaires à la retraite. UN PROBLÈME D’ARGENT ? Autre défi, le finan-
cement de la réforme, estimée par l’État à près de 30 millions d’euros. Où trouver l’argent dans un pays à l’économie exsangue qui attend encore de renouer avec les institutions de Breton Woods ? La France, dont le « soutien massif » a été demandé par le chef de l’État, compte appuyer cette initiative sur la base de l’accord de coopération militaire bilatéral signé en 1984. Nicolas Sarkozy a dépêché à Conakry le général Bruno ClémentBollée, le patron de la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD). Un vétéran de la force Licorne en Côte d’Ivoire, qui connaît bien le terrain africain. Le soutien financier des ÉtatsUnis est aussi attendu. En visite à Washington, le 29 juillet, Alpha Condé a de nouveau sollicité le soutien de Barack Obama, qui a promis un « partenariat inconditionnel » aux quatre pays dont les présidents ont été reçus aux États-Unis (Bénin, Côte d’Ivoire, Niger et Guinée). Mais l’argent ne réglera pas tout. La volonté et, surtout, le courage politique du président… feront peut-être le reste. Alpha Condé dit ne pas souhaiter « aller à la confrontation avec les militaires », mais l’attaque dont il a été victime sonne comme une déclaration de guerre de certains d’entre eux… et lui donne aussi l’opportunité de passer à son tour à l’offensive. ● JEUNE AFRIQUE
Afrique subsaharienne
TRIBUNE
DR
Éd Mamadou Diouf Professeur d’histoire et d’études africaines à l’Université Columbia (New York)
Pourquoi les révolutions au Nord auront un impact au Sud
S
ANS PARLER D’UNE CONTAGION des « révolutions arabes », il se trouve que la Tunisie, l’Égypte et la Libye se situent en Afrique. Il se trouve également que les dynamiques à l’œuvre reposent sur des éléments communs : une population très jeune et l’émergence de ce que l’on peut appeler une classe moyenne – de plus en plus ambitieuse dans ses aspirations et ses revendications matérielles et démocratiques. De ce point de vue, il y a une communauté de situations. Les questions essentielles relatives à la démocratisation de la sphère publique, à la dévolution du pouvoir et aux modalités de son exercice sont partagées. De ce fait, les trajectoires au nord du Sahara vont forcément avoir des conséquences sur la façon dont les Subsahariens vont engager et structurer leur débat politique : les modes et les capacités de mobilisation, la présentation des doléances…
Le principal défi des sociétés subsahariennes n’est pas tant dans l’acceptation de la confrontation électorale : il repose sur l’incapacité à fonctionner sur la base du pluralisme. Le pouvoir est au centre, tout le monde se bat pour y accéder. Conséquences : quand on le perd, on met le feu au pays. Quand on le gagne, on ne cherche qu’à le conserver. Cette crispation au centre – lieu de possession de la richesse et de la redistribution clientéliste – conduit à un comportement clanique au sommet de l’État : vous êtes avec moi, je vous rétribue. Vous êtes contre moi, je vous punis. Mais face aux tactiques des gouvernants, qui jouent sans cesse sur les antagonismes et les rivalités pour fragiliser les éventuelles contestations populaires, les Africains – jeunes, diplômés, connectés au monde grâce à internet et aux migrations – sont en train de comprendre que leur unité peut et doit reposer sur la définition d’un destin partagé, d’un contrat de confiance et d’une reconnaissance des différences. Et non sur le postulat d’une unité culturelle assénée et imposée par la force répressive et les idéologies « nativistes ». La recomposition des sociétés africaines est en marche. Elle conduira à des manifestations plurielles de la citoyenneté et à la confrontation d’orientations politiques,
économiques et culturelles variées. L’époque du parti unique est révolue. Cette évolution ne se fera pas sans conflits ni crises – comme on l’a constaté en Côte d’Ivoire –, car elle implique la construction de communautés plus larges que la simple appartenance à un groupe. Il convient toutefois de relever qu’en Côte d’Ivoire personne ne veut faire sécession. L’État et ses frontières ne sont pas remis en question. Ce qui est en jeu est un dépassement de la seule compétition partisane pour ouvrir la représentation politique : délégations de pouvoir, relégitimation des notables locaux, processus de décentralisation… Si vous avez dans le même pays des légitimités différentes, vous ouvrez le jeu. L’ethnicité n’est alors plus une menace, ni une force de destruction qui divise, oppose et enferme. Le communautarisme devient inclusif. Il aide à la mise en délibération des blocages générationnels, religieux, régionaux et de genre dans les lieux où ils s’expriment : la famille, la parenté, le clan, l’ethnie, la région et la nation. De la même manière, le fétichisme des frontières se dissipe. Il est possible, par exemple, d’envisager un espace partagé entre la Côte d’Ivoire et le Burkina. Ces régions sont culturellement et socialement homogènes. Je ne remets
Les gouvernants jouent sans cesse sur les antagonismes et les rivalités pour fragiliser les éventuels mouvements de contestation.
JEUNE AFRIQUE
pas en question des frontières et des souverainetés mises à mal depuis les indépendances. Je remets ensemble des richesses, des hommes, des produits, des idées et des solidarités réfractaires aux directives de l’État-nation. C’est l’intégration par les pieds. Il faut être créatif. Près de 70 % de la population africaine a moins de 25 ans. Une grande majorité de cette jeunesse n’est ni nationaliste ni souverainiste. Elle propage une vision cosmopolite d’un monde ouvert. Durant la colonisation et encore après, on a dit aux Africains d’arrêter de penser et d’appliquer les recettes venues d’ailleurs. C’est à présent aux Africains de revoir leur logiciel politique. À nous de faire le boulot. Enraciner la démocratie en Afrique revient précisément à réimaginer l’entreprise démocratique sur la terre africaine. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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XAVIER SCHWEBEL POUR J.A.
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! C’EST GRÂCE À LUI QUE LA CAPITALE POLITIQUE a majoritairement voté Ouattara le 28 novembre 2010. CÔTE D’IVOIRE
Augustin Thiam, la politique en héritage Rallié au début des années 2000 à l’actuel chef de l’État, le petit-neveu de Félix Houphouët-Boigny vient d’être nommé gouverneur de Yamoussoukro.
L
es ronds de jambe, très peu pour lui. Augustin Thiam a la poignée de main franche et la réplique acerbe. Entier, fier d’avoir du
sang bleu dans les veines (il est un proche parent d’Houphouët-Boigny), il s’est battu pendant sept ans pour installer Alassane Ouattara au pouvoir, et
SUCCESS-STORY FAMILIALE AUGUSTINTHIAM EST LETROISIÈME d’une fratrie de sept enfants (cinq garçons et deux filles), issue du mariage de Marietou Sow, nièce d’Houphouët-Boigny, et d’AmadouThiam. Ce dernier est né à Dakar, mais arrive en 1945 à Abidjan. Il dirige Radio Côte d’Ivoire, avant d’être nommé ministre de l’Information, puis ambassadeur au Maroc. Ses enfants ont tous réussi leur parcours universitaire.Trois des cinq garçons ont été ministres :Tidjane (au Plan et au Développement), Daouda (Mines et Énergie) et Aziz (Transports). Passé dans le privé,Tidjane a été le premier Africain à diriger une entreprise cotée à la Bourse de Londres (Prudential, géant des assurances en Grande-Bretagne). Aziz est le vice-président du groupe NCT Necotrans à Paris. Décédé en 1995, Papa Ababakar était docteur en histoire. Aujourd’hui à la retraite, N’deye Anna est une ancienne cadre de la Banque internationale pour l’Afrique occidentale (BIAO). Quant à sa sœur cadette,YamoussoThiam, elle était, jusqu’aux dernières élections, conseillère spéciale chargée des musées P.A. présidentiels… sous Laurent Gbagbo. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
vient d’être récompensé. Le président ivoirien l’a fait, fin avril, gouverneur de Yamoussoukro avec rang de ministre. « Je n’attendais rien, assure Augustin Thiam, mais le chef de l’État m’a remercié pour le travail abattu durant la campagne électorale. Il m’a demandé d’œuvrer pour le rassemblement des Ivoiriens. » Le nouveau gouverneur voit son rôle comme celui d’un chef d’orchestre. Flanqué de cinq vice-gouverneurs, d’un cabinetde27membresetde112employés, il gère les bâtiments publics, les établissements scolaires, les décharges publiques et la circulation des taxis dans la capitale. Il sera aussi l’un des acteurs du transfert des institutions à Yamoussoukro (200000 habitants). Petit-neveu du premier président ivoirien, Augustin Thiam naît en août 1952 à la cour royale de la chefferie akouè, dirigée par son oncle. Il a moins de 1 an quand il est victime d’un tétanos néonatal, maladie mortelle dans la grande majorité des cas. Il ne doit sa survie qu’à l’intervention décisive d’un chirurgien de Bouaké. Le miraculé est élevé dans la plus pure tradition baoulée par Mamie Faitai, sœur aînée du chef de l’État. JEUNE AFRIQUE
Afrique subsaharienne À Paris, il fait ses armes de journaliste aux côtés de Sennen Andriamirado, Hamid Barrada, Albert Bourgi et François Soudan. En 1992, il s’essaie aux sujets politiques et s’attire les foudres de son grand-oncle lorsque, dans un article intitulé « Les trois tentations d’Houphouët », il évoque un possible limogeage du Premier ministre, Médecin d’abord, journaliste ensuite… Alassane Ouattara. Il finit par rentrer à Abidjan, en 2003, « Je t’interdis d’écrire sur la Côte d’Ivoire! » et se met au service de Ouattara. gronde le chef de l’État. Message reçu. On ne l’y reprenRoyal Air Maroc, ou Malika Oufkir, fille dra pas. Un an plus tard, il couvre une du général qui voulut renverser Hassan manifestation au Sénat français, lorsque II. À plusieurs reprises, il rencontre le roi, son président annonce, en direct, la mort qui apprécie son père. C’est l’époque des premiers voyages: « J’ai pris les transports en commun, fait du stop et dormi à la belle étoile,sesouvient-il,ému.LeMarocestl’un des plus beaux pays au monde. » Augustin Thiam compte d’ailleurs bien rénover la mosquée de Yamoussoukro, dont la construction a été financée par Hassan II et Houphouët-Boigny, très amis. À15ans,ilsuitsonpère,AmadouThiam, nommé ambassadeur au Maroc (voir encadré). Débute alors une nouvelle vie. Augustin fréquente le lycée Descartes, à Rabat, et côtoie les rejetons des grandes familles du pays : Driss Benhima, aujourd’hui à la tête de la compagnie
PARI RISQUÉ. Nous sommes en 2003.
JOANA CHOUMALI
CÉLÈBRE TUTEUR. De retour à Abidjan en 1972, l’adolescent obtient un bac littéraire (mentionassezbien)etintègrelafacultéde médecine de Cocody – comme son grandoncle, médecin avant d’entrer en politique. Il passe du temps avec le chef de l’État, qui l’a pris en affection. « Houphouët, confie Augustin Thiam, a été mon tuteur. Lorsque nous étions tous les deux, il m’expliquait la famille, l’histoire de la Côte d’Ivoire, me racontait ses voyages, son expérience de médecin à Guiglo. Il me conviait aux rencontres avec les chefs d’État. J’ai été un témoinprivilégiédelacomédiehumaine.» Un jour, il doit pourtant attendre trois jours avant d’être autorisé à voir « le Vieux ». Il s’en plaint à l’intéressé, qui lui répond, malicieusement: « Je forge ta patience. » Thiam va travailler dans les hôpitaux publics jusqu’en 1989. On est en pleine crise économique, et le secteur de la santé manquedemoyens.Sonavenir,décide-t-il, est ailleurs. Il écrit à Béchir Ben Yahmed, fondateur de Jeune Afrique, pour lui proposer de tenir une rubrique scientifique.
responsabilités, lui qui passe pour être un jouisseur impénitent. « J’ai été un enfant gâté de l’houphouétisme, avec ses bons et ses mauvais côtés, reconnaît-il. J’ai mené la belle vie et je l’assume. » Quatre ans plus tard, il rejoint à nouveau Jeune Afrique, puis décide de rentrer définitivement à Yamoussoukro. Il rompt avec ses anciennes habitudes de fêtard et ne boit plus que de l’eau.
! UN JOUR, « LE VIEUX » LE FAIT ATTENDRE TROIS JOURS avant de le recevoir. « Je forge ta patience », finit-il par lui expliquer.
d’Houphouët.Thiams’effondre,enlarmes, et prend le premier avion. En 1995, Henri Konan Bédié le nomme secrétaire général du Comité interministériel de lutte antidrogue (Cilad). Un piège tendu par le nouveau président, qui souhaite le mettre face à ses
Augustin Thiam s’engage en politique. Hasard de l’histoire, c’est au Golf Hôtel qu’Alassane Ouattara, entre-temps passé à l’opposition, accepte de le recevoir. « J’ai choisi de vous servir, lui explique Thiam. Vous ne pouvez être élu sans la chefferie baoulée; je vous propose de vous l’amener. Faites de moi ce que vous voulez! » Ouattara voit vite son intérêt et le nomme conseiller. Augustin Thiam le tient informé de ce qui se passe dans la région, lui organise des rencontres et travaille avec le Rassemblement des républicains (RDR). « Beaucoup de mes compatriotes me prenaientpourunfoudemisersurlui,préciset-il. Je ne l’ai jamais regretté. » Ouattara l’emmène en tournée à travers la Côte d’Ivoire et lui confie des missions discrètes auprès des communautés baoulées de l’Ouest, quand lui-même ne peut pas s’y rendre.Nommédirecteurdecampagnedu départementdeYamoussoukro,ildistribue des vivres et du petit matériel agricole. Son caractère parfois difficile ne facilite pas ses relations avec les autres cadres du parti. Finalement, il quitte son poste, début 2010, pour devenir chef du canton Akouè. Entre les deux tours, Laurent Gbagbo multiplie les déplacements en pays baoulé pours’attirerlesfaveursdeschefstraditionnels qui ont su conserver une influence sur les électeurs. Thiam envoie ses espions et annihile tous les efforts de celui qui était encore président. Le 28 novembre 2010, la capitale politique vote à 83,4 % pour Alassane Ouattara… Une victoire, Augustin Thiam en est convaincu, qui est aussi la sienne. ● PASCAL AIRAULT, envoyé spécial
TOU T E S L E S M U S IQU E S D’A F R IQU E
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Afrique subsaharienne L’œil de Glez
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PER-ANDERS PETTERSSON/GETTY IMAGES
Afrique subsaharienne
SANTÉ AU CAMEROUN
La double peine
Dans les hôpitaux, les patients les plus démunis sont retenus en attendant le règlement de leur facture, quand on ne leur refuse pas l’accès aux soins. Un projet de loi pour la création d’un système de sécurité sociale est à l’étude depuis… avril 2009.
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n ne peut pas les rater. Aux entrées de presque chaque pavillon de l’Hôpital central de Yaoundé, toujours les mêmes uniformes marron. Les gardiens surveillent les allers et venues des visiteurs et gardent des portes de métal munies de barreaux et de chaînes. À la maternité, ils sont chargés de faire respecter les horaires de visite, de repousser rôdeurs et voleurs et… d’empêcher la sortie des femmes qui n’auraient pas réglé leur accouchement (de 30 000 à 200 000 F CFA – pour une intervention avec complications et césarienne –, soit de 45 à 300 euros). Une situation banale au Cameroun – et dans bien d’autres pays d’Afrique subsaharienne – puisque chacun doit payer ses soins. Résultat : dans certains hôpitaux, il faut verser une caution pour être soigné. Faute de moyens, des malades JEUNE AFRIQUE
sont parfois retenus pendant plusieurs mois. Certains sont abandonnés par leur famille. ENQUÊTE SUR LES IMPAYÉS. « Il y a
! UNE FEMME ET SON ENFANT à la maternité de Douala. Pour un accouchement compliqué, comptez jusqu’à 200 000 F CFA.
Le malade doit payer de sa poche jusqu’aux gants utilisés par les médecins et les infirmières (100 F CFA la paire). Après la crise économique des années 1980-1990 et à l’initiative de Bamako – lors d’une session du comité régional de l’OMS qui avait réuni les ministres de la Santé du continent en 1987 et qui mettait l’accent sur le financement communautaire –, la gratuité des soins a disparu. Le Cameroun manque aujourd’hui de matériel et surtout de médecins, d’infirmiers ou de pharmaciens. Les infrastructures sont vétustes, en particulier dans les régions rurales. Alors que la région Centre concentre près du tiers du
beaucoup de mauvaise foi de la part de certains Camerounais, il faut donc mener desenquêtessociales,carnousn’avonspas le budget pour accueillir tout le monde », assure un infirmier. Mais il n’est pas évident de définir qui est « indigent » dans un pays où près de 40 % de la population vit sous le seuil Le malade doit payer de sa poche de pauvreté national. Dans jusqu’aux gants utilisés par les les hôpitaux, chaque service social enquête donc sur les infirmières et les médecins. « impayés ». Après étude de son dossier, le patient peut être autorisé personnel médical, l’Adamaoua, le Nord ou l’Est font figure de parents pauvres à quitter l’établissement en ayant réglé de la santé. seulement une partie de ses soins (frais d’hospitalisation ou kit de césarienne qui Bien qu’en légère hausse depuis 2006, s’élève à 65 000 F CFA). l’enveloppeallouéeàlasanténereprésente N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Afrique subsaharienne du bord, les bénévoles achètent de la Le salut passerait-il alors par les mutuelque 4,81 % du budget national. Un pournourriture et financent radio des poucentage bien loin des 15 % préconisés par les ? Pour favoriser l’accès aux soins, la mons et autres examens médicaux. Pour les chefs d’État réunis à Abuja (Nigeria) Plate-Forme des promoteurs de mutuelles de santé a vu le jour en 2005. À l’origine, ce s’en sortir, c’est souvent le système D. en 2000. Conséquence : depuis 1998, la réseau regroupait 60 mutuelles, des ONG, Certains se rendent dans les cenmortalité maternelle a plus Certai des organismes étrangers et internatiode santé de quartiers où que doublé. tres Depuis 2006, naux (GIZ, Coopération française, Unicef, À chaque malade de se le coût des soins est moins l’enveloppe débrouiller avec l’aide de sa élevé que dans les hôpitaux. OMS…) et des institutions (le ministère de allouée à la santé n’atteint pas les famille. Sidonie, 53 ans, dort Dans la rue, au pied de ces la Santé publique et celui de la Sécurité dans l’une des cages d’escentres, il n’est pas rare de sociale). L’objectif était de couvrir 40 % de calier de l’Hôpital gynécola population en 2015. Or, six ans après son trouver des vendeurs de du budget de obstétrique et pédiatrique lancement, le projet piétine: le Cameroun « remèdes » à la sauvette qui l’État de Yaoundé (HGOPY). Sa fille proposent des médicaments compte aujourd’hui 150 mutuelles, mais le prop enceinte a été hospitalisée il y a plus lu deux à trois fois moins chers que seulement 2 % de la population est concerde de deux mois à la suite d’un AVC. Elle est dans les pharmacies. Ces produits illicites née… « Cet énorme retard est lié au manen réanimation après avoir mis au monde viennent d’Inde, du Nigeria ou d’Europe. que de volonté politique pour élaborer un cadre juridique alors que le Gabon, le un enfant prématuré. Sidonie arpente les D’autres personnes se tournent vers les Rwanda ou le Ghana possèdent déjà un couloirs et lit en attendant les nouvelles établissements clandestins, où infirmiers système d’assurance maladie, tranche etlaborantinssereconvertissentenspéciaordonnances. Mais la grand-mère craint listes… Ce qui parfois donne de ne bientôt plus avoir d’argent. Elle a lieuàdesopérationsouàdes déjà versé une caution de 25 000 F CFA « Si tu ne vas pas bien et que accouchements pratiqués à l’HGOPY et a dépensé les 80 000 F CFA tu n’as pas d’argent, tu meurs. » récoltés auprès de son entourage… Elle ne dans des conditions peu MOUHAMADOU, atteint de tuberculose sait pas comment elle pourra régler une orthodoxes. ardoise qui pourrait s’élever à 1 million Un vrai problème de de F CFA. société qui s’explique en partie par le Hozier Nana Chimi, président de cette plafait que le pays ne dispose pas de système te-forme. Les ONG prennent du recul par SYSTÈME D. « Au Cameroun, si tu es d’assurance maladie. La Caisse nationale rapport au projet, car elles voient bien qu’il malade et que tu n’as pas l’argent, tu de prévoyance sociale (CNPS), créée n’y a pas de réelle implication de l’État. » Il meurs»,résumeMouhamadou,unmalade en 1967, ne couvre que les prestations estime qu’avec 100 milliards de F CFA sur tuberculeux de l’hôpital Jamot. Cet étafamiliales, les pensions vieillesse et les cinq ans, les résultats pourraient être au blissement spécialisé dans les maladies risques professionnels des travailleurs du rendez-vous. Reste aussi à faire changer les pulmonaires et psychiatriques reçoit chasecteur privé. Un avant-projet de loi sur mentalités, car, selon Hozier Nana Chimi, que semaine la visite de Pourquoi pas, une la couverture du risque maladie est dans « l’idée du “je paie pour d’éventuels soins association camerounaise qui prend en les tuyaux depuis 2009, mais le texte n’est donc j’appelle la maladie” est encore très charge les plus démunis dans différents toujours pas passé devant l’Assemblée présente dans les esprits ». ● hôpitaux de Yaoundé. Avec les moyens nationale. MATTHIEU COTINAT, à Yaoundé
5%
Coulisses SÃO TOMÉ E PRÍNCIPE PINTO DA COSTA ÉLU PRÉSIDENT Avec 52,88 % des voix, Manuel Pinto da Costa l’a emporté le 7 août face à Evaristo Carvalho, président de l’Assemblée. L’ancien dirigeant de l’ère communiste (1975-1990) se veut garant de la stabilité de l’archipel qui a, depuis, connu dix-huit Premiers ministres, et promet de lutter contre la corruption. Le rôle du président est cependant N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Afrique subsaharienne symbolique, le pouvoir étant exercé par le chef du gouvernement. Pinto da Costa, 74 ans, sera investi le 3 septembre. MALI CONTRE AQMI, L’ARME DU DÉVELOPPEMENT La riposte malienne à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ? Le programme spécial pour la paix, la sécurité et le développement au Nord-Mali (PSPSDN). Lancé le 9 août par le
président Amadou ToumaniTouré, il repose sur une présence accrue de l’État et sur la lutte contre la pauvreté, terreau favorable au groupuscule djihadiste. Ce plan coûtera 32 milliards de F CFA (48,8 millions d’euros) mobilisés par l’État et les bailleurs de fonds. SÉNÉGAL FESMAN : L’ART EN OTAGE Huit mois après le Festival mondial des arts nègres (Fesman) de Dakar, une
centaine d’artistes attendent la restitution de leurs œuvres. La société de transport Lp Art, qui n’a pas été payée par le comité d’organisation, en retient plus de quatre cents en otages, à Dakar et à La Courneuve (France). Une pétition appelant le président Wade à intervenir, mise en ligne par le plasticien sudafricain Johan Van Der Schijff, a recueilli près de 300 signatures en 6 jours, et quelques artistes songent à saisir la justice. JEUNE AFRIQUE
! EMBLÉMATIQUE, LA LIBÉRIENNE ELLEN JOHNSON-SIRLEAF (ici, en mai 2011) a été la première femme à accéder à la magistrature suprême sur le continent.
PORTRAITS
Ces Africaines qui osent la présidentielle Militantes, compétentes, obstinées… Elles sont de plus en plus nombreuses à partir à l’assaut de la scène politique et à viser le sommet de l’État. Mais, pour s’imposer, la lutte est féroce.
CLARISSE JUOMPAN-YAKAM
E
lle était toujours aussi remontée,MariamaBayard Gamatié, lorsque nous l’avons contactée pour un entretien.PremièreNigérienneàbriguer la magistrature suprême, cette fonctionnaire des Nations unies attribue en partie à l’indifférence desmédiassacontre-performanceà JEUNE AFRIQUE
la présidentielle de janvier dernier: 0,38 % des voix au premier tour, le pire score du scrutin. Comme elle, de plus en plus d’Africaines osent pourtant se porter candidates, sans doute décomplexées par l’élection d’Ellen Johnson-Sirleaf à la tête du Liberia. Mais, pour une seule élue, elles sont des dizaines dans
l’antichambre, à jouer des coudes pour exister politiquement. Et être prises au sérieux. Surdiplômées (hormis la Ghanéenne Akua Donkor, chef d’entreprise analphabète qui se présenteenindépendanteauscrutinde décembre 2012), justifiant de carrières nationales et internationales réussies, les candidates africaines au fauteuil de chef d’État peinent à s’imposer. Première à s’être placée dans les starting-blocks en cette année électorale sur le continent, Mariama Bayard Gamatié en sait quelque chose, elle qui s’est illustrée dansdescombatspourlesdroits ● ● ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
BRIAN SNYDER/REUTERS
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Afrique subsaharienne Portraits
PETER DICAMPO/VII MENTOR PROGRAM
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de ses concitoyennes. Le public la découvre lorsqu’elle dirige lamarche du 13 mai 1991 pour réclamer la prise en compte des femmes lors de la Conférence nationale souveraine. Si les Nigériennes – 52 % de l’électorat – lui doivent leur journée nationale (le 13 mai, férié), on comprend, au vu des résultats obtenus, qu’ellen’acertainementpasrecueilli toutesleursvoix.Maiselleafaitdece combatunvéritablesacerdoce,eton l’a aperçue, début mars, à Cotonou, où elle s’était rendue pour soutenir la Béninoise Marie-Élise Akouavi Gbèdo, candidate à la présidentielle pour la troisième fois. ●●●
SEXISME. Désormais ministre de
la Justice du gouvernement de Boni Yayi, cette dernière, une avocate de 56 ans, a œuvré dur pour une révision du code de la famille, impliquantnotammentlasuppressionde la polygamie et du lévirat (coutume selon laquelle on considère que la femme fait partie du patrimoine de l’homme), sans que cela se traduise par un gain de voix: 0,36 % en 2001, 0,31 % en 2006, 0,4 % en 2011. Cela ne l’a pas découragée (elle sera là, affirme-t-elle, pour la N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
présidentielle de 2016), mais elle regrette ce « côté activiste » qui lui colle à la peau. « Mon projet de société prévoyait pourtant de lutter contre les inondations dans le pays, véritableentraveaudéveloppement économique, soupire-t-elle. C’est ne parler qu’aux femmes, ça? » Elle dénonce également le sexisme de certains hommes qui, tout au long de la campagne, n’ont cessé de lui répéter lourdement qu’ils auraient voulu l’avoir pour épouse. Les camarades militantes lui ont
! Nouvelle venue sur la scène politique ghanéenne, SAMIA NKRUMAH compte bien porter les couleurs de son parti, le CPP, à l’élection de décembre 2012.
Au Niger, Mariama Bayard Gamatié n’a pas eu les moyens de faire campagne plus de dix jours. aussi tourné le dos. « Nous étions censées être sur le terrain pour la promotion de la femme, mais aucunenem’asoutenue.Ellespréfèrent le tout-cuit, c’est lamentable », accuse-t-elle. Ses seuls véritables soutiens, elle les trouve dans la jeunesse et auprès des femmes des classes moyennes, qui la voient comme un modèle. À en croire Édith Kah Walla, la plusmédiatiquedestroiscandidates
à la présidentielle d’octobre au Cameroun, les oppositions aux candidatures féminines ne sont pas forcément là où on les attend. « Les plus dubitatifs sont les cadres qui ont fait des études et dont on est pourtant en droit d’attendre une certaine ouverture d’esprit », souligne-t-elle. Quand on lui reproche de n’avoir que son activisme à présenter, en lieu et place d’un véritable programme, elle oppose ses compétences et son expérience dans les domaines économique, social, voire des relations internationales. Elle met en avant ses actions au sein d’organisations comme le Parlement panafricain, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) ou la Communauté de l’Afriquedel’Est(EAC).«Entantque chef d’entreprise, j’ai créé une structure intégralement camerounaise qui réalise aujourd’hui 80 % de son chiffre d’affaires à l’international, en compétition avec des consultants du monde entier. Partant de là, je peux légitimement prétendre tirer le JEUNE AFRIQUE
Ces Africaines qui osent la présidentielle Camerounverslehaut,sachantqu’il dispose des ressources et des compétences nécessaires pour concourir au niveau international. »
JEUNE AFRIQUE
" AMSATOU SOW SIDIBÉ, seule femme candidate à la succession d’Abdoulaye Wade, vient des milieux universitaires.
! KAH WALLAH est sans doute la plus médiatique des trois femmes en lice pour la présidentielle d’octobre, au Cameroun.
au Parlement le Parti de la convention du peuple (CPP, parti dont elle espère bien porter les couleurs à la présidentielle). Candidate malheureuse à l’investiture du Congrès national démocratique (NDC, au pouvoir), la Ghanéenne Nana Konadu Agyeman-Rawlings avait choisi de composer avec le parti et croyait pouvoir compter sur de solides soutiens, dont ceux des amis de son mari, l’ex-chef de l’État Jerry Rawlings. La déception a été cuisante (3,1 % de voix, contre 96,9 % pour son adversaire). Reste qu’au bout du compte les candidates qui ont le plus de mal sont tout de même celles qui persistent à évoluer en dehors des appareils politiques. C’est probablement pour élargir son réseau de supporters que la Sénégalaise
PASCAL FAYOLLE/SIPA
Angèle Makombo-Eboum, présidente et candidate de la Ligue des démocrates congolais (Lidec) pour l’élection du 28 novembre, examine les raisons pour lesquelles une candidate comme Mariama Bayard Gamatié n’a pas pu s’imposer, le manque de moyens financiers lui semble être la première d’entre elles. Ainsi, la Nigérienne n’avait pu effectuer que dix jours de campagne, uniquement à Niamey. La Congolaise s’est donc donné les moyens de trouver des fonds. Après avoir fonctionné grâce à ses propres apports, cette originaire du Kasaï occidental, qui vit depuis vingt-quatre ans entre New York et Kinshasa, affirme avoir lancé une vaste opération de collecte auprès de la diaspora, en particulier aux États-Unis,enFranceetenBelgique. Elle mise sur les médias pour toucherlespopulationslesplusretirées. AnciennefonctionnairedesNations unies, elle revendique également des soutiens à l’intérieur du pays (soutiens dont elle dit respecter les vœux de discrétion). Même chose pour Kah Walla, qui revendique un réseau international important, aussi bien dans le privé qu’au sein des organismes internationaux, qui favorise la visibilité de sa candidature à l’international. Si elle a pu être présente auprès des médiasoccidentaux,c’estbiengrâce à ses relations. Si Angèle Makombo-Eboum reconnaît qu’un scrutin à un tour complique la donne en RD Congo, elle se console avec le nombre de partis regroupés au sein de la coalition qu’elle dirige (40 partis, contre 400 au total). Car il est évident que l’absence de relais politiques fragilise ces postulantes à la présidentielle. Samia Nkrumah l’a très bien compris. Récemment encore inconnue sur la scène politique ghanéenne, elle est élue députée de Jomoro (dans l’ouest du Ghana) six mois seulement après son retour au pays, en 2008, et réussit à ramener
MARC DEVILLE POUR J.A.
VISIBILITÉ. En RD Congo, lorsque
Amsatou Sow Sidibé (seule femme officiellement candidate à la présidentielle de 2012) est en passe de transformer son mouvement en parti. Peu connue des milieux politiques, pour n’y avoir jamais milité, cette juriste professeure d’université, quise présentecomme une « politicienne du développement » et une militante des droits humains, revendique aussi des soutiens auprès des générations de cadres qu’elle a formés. Et affine sacommunication,rappelantàceux qui la soupçonnent de concourir pour mieux négocier un éventuel ralliement au second tour qu’elle a décliné tous les postes ministériels qui lui ont été proposés jusqu’ici, dont celui de Premier ministre. Marie-Élise Akouavi Gbèdo, elle, s’interdit d’adhérer à un parti créé par d’autres, de peur qu’ils ne lui imposent leur vision des choses. Certains ont d’ailleurs tenté de l’enrôler en tant que militante de base. Elle s’y est refusée, estimant que son potentiel aurait dû lui permettre de faire partie de l’équipe dirigeante. Et elle trouve injuste qu’on exige d’elle un mandat électif. « Aucun de nos chefs d’État n’a jamais été ni maire, ni député, ni conseiller. Quand il s’agit de femmes, on exige qu’elles commencent comme maire ou conseiller. Mais lorsqu’un homme débute sa carrière par le haut, on trouve cela normal. » Pas de doute, sur le continent, il y a bien deux poids deux mesures. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Maghreb & Moyen-Orient
Les
TUNISIE
certitudes
Retiré de la vie politique depuis les premières dérives du régime Ben Ali, le chef de file de l’opposition démocratique sous Bourguiba fait un come-back remarqué. Et assène ses vérités sur l’après-révolution.
ABDELAZIZ BARROUHI, à Tunis
I
ntègre, lucide, respecté de ses amis comme de ses anciens adversaires, le chef de file de l’opposition démocratique sous Bourguiba est de retour sur la scène politique, qu’il avait quittée il y a plus de vingt ans. Le 22 juillet, Ahmed Mestiri a tiré un véritable coup de semonce en livrant son sentiment sur une situation postrévolutionnaire qui ne manque pas de zones d’ombre et où règne la confusion. Dans une déclaration écrite qui a fait l’effet d’une bombe, Mestiri dénonce une « contrerévolution de l’intérieur et de l’extérieur qui se manifeste ouvertement » et évoque de l’argent – provenant de Ben Ali ou d’autres sources – « qui coule à flots » pour la financer ou alimenter les caisses de certains partis ou associations. À trois mois de l’élection de l’Assemblée constituante, le 23 octobre, il exprime, en outre, son « opposition » à la démarche du gouvernement provisoire du président, Fouad Mebazaa, et du Premier ministre, Béji Caïd Essebsi, qui, dit-il, « est de nature à compromettre l’avènement de l’État de droit et du régime démocratique à court et à long terme ». Mais nombreux sont ceux qui sont restés sur leur faim à la lecture de cette déclaration. « J’y ai pesé mes mots pour ne pas être trop explicite dans certaines accusations, même si j’ai l’intime conviction que ce que je disais correspond à la réalité que nous vivons », nous a-t-il déclaré au cours d’un long entretien dans lequel il va plus loin et dévoile ses propositions. « Ma déclaration était un cri du cœur pour exprimer une véritable inquiétude, pour ne pas dire une angoisse, sur le sort de la révolution », explique-t-il. Mestiri s’est rangé du côté de la révolution dès le 16 janvier. Juriste, il considère que la légitimité constitutionnelle a été balayée par la fuite de Ben Ali et qu’elle doit céder la place à la légitimité N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
de Mestiri
DATES CLÉS 2 juillet 1925
Naissance à La Marsa (Tunis)
1942
Adhère au Néo-Destour
1944-1948
Études de droit et de sciences politiques à Alger et à Paris
1948
Avocat à Tunis
1956
Ministre de la Justice du premier gouvernement de l’indépendance, il est le maître d’œuvre du code du statut personnel
1958
Ministre des Finances et du Commerce
1960-1966
Ambassadeur en URSS, en Pologne, en Tchécoslovaquie, en RAU (Égypte et Syrie) et en Algérie
1966-1968
Ministre de la Défense
Janvier 1968
Présente sa démission à Bourguiba pour protester contre la politique de collectivisation forcée dans l’agriculture. Il est exclu du Parti socialiste destourien (PSD, ex-Néo-Destour)
révolutionnaire. Il propose donc à Mebazaa la constitution d’un « Haut Comité national de salut public », une sorte d’autorité morale chargée de coiffer le gouvernement provisoire et qui serait composée de trois sages reconnus : lui-même, Ahmed Ben Salah et Mustapha Filali, tous trois anciens ministres de Bourguiba, les deux premiers étant passés dans l’opposition. La proposition est ignorée. QUESTIONS SANS RÉPONSE. Mohamed
Ghannouchi, Premier ministre de Ben Ali, est à son tour « dégagé » par les jeunes révolutionnaires. Il est remplacé, le 27 février, par Béji Caïd Essebsi, président de la Chambre des députés il y a vingt ans, sous Ben Ali, et député jusqu’en 1994. « Des jeunes de la révolution sont venus me consulter à son propos, raconte Mestiri. L’un d’eux, un juriste, m’a demandé s’il était bon. J’ai répondu que je lui accordais un préjugé favorable, jusqu’à preuve du contraire. » Mais Caïd Essebsi, censé expédier les affaires courantes pour assurer le fonctionnement des rouages de l’État jusqu’aux élections, flirte, selon Mestiri, avec l’autoritarisme. Il « s’octroie » la plupart des pouvoirs exécutif et législatif, et « prend des engagements financiers extérieurs à long terme ». Pendant ce temps, des bandes de
Il reproche aux autorités provisoires de s’être octroyé tous les pouvoirs. criminels de droit commun, déguisés parfois en militants politiques, s’attaquent aux biens et aux personnes. Les questions de Mestiri fusent : 95 % des mouvements sociaux ne sont pas décidés par l’UGTT, la centrale syndicale. Qui donc les suscite ? Qui sont les personnes infiltrées dans les manifestations pacifiques ? Et ces sit-in sur les routes, qui les organise ? Qui est à l’origine de tout cela ? Pourquoi la police ne fait-elle pas son travail ? Pourquoi Samir Feriani, un officier de police qui a fait publiquement des révélations gênantes ● ● ● JEUNE AFRIQUE
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ONS ABID
! AHMED MESTIRI à son domicile, à La Marsa, le 9 août.
JEUNE AFRIQUE
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Maghreb Moyen-Orient pour certains responsables du ministère de l’Intérieur, est-il poursuivi en justice ? Et puis où est l’assainissement [anticorruption, NDLR] ? Que fait la magistrature ? Allons-nous vraiment vers une Constituante ? Qu’allons-nous faire si nous n’obtenons pas au moins 50 % d’inscrits ? Jeter l’éponge ? Caïd Essebsi a-t-il le pouvoir réel ? Ou y a-t-il d’autres personnes qui prennent les décisions ? Et si ce que disait à ce propos Farhat Rajhi, ministre de l’Intérieur au lendemain de la révolution, était vrai ? Caïd Essebsi a toujours nié l’existence d’un gouvernement de l’ombre, mais l’opinion n’en continue pas moins de se poser la question. Pour Mestiri, il y a désormais une absence de confiance dans le gouvernement provisoire. « Pendant vingt-trois ans, Ben Ali nous a roulés. Cette fois, avec Béji Caïd Essebsi, j’ai vraiment cru au changement. Mais, finalement, c’est comme si rien ne s’était passé. Je ne suis pas le seul à penser cela. J’ai donc repris ma liberté et je me présente comme une opposition légale. »
●●●
FAUX DÉBAT. « Je suis un homme libre », clame-t-il.
Il l’a toujours été. La première fois sous Bourguiba, en prenant la tête, à partir de 1971, du premier courant démocrate au sein même du parti unique, le Parti socialiste destourien (PSD). Exclu une première fois de celui-ci pour avoir dénoncé l’autoritarisme du Combattant suprême, il fonde, en 1978, le premier parti d’opposition démocratique, le Mouvement des démocrates socialistes (MDS). En 1987, il approuve le principe de l’éviction de Bourguiba par Ben Ali et le discours du 7 novembre, mais il va rapidement déchanter. Après les premières dérives antidémocratiques et les élections truquées de 1989, au cours desquelles
La Constituante doit prendre des dispositions claires pour déraciner le système dictatorial. le MDS est laminé, il démissionne du parti qu’il a fondé et cesse toute activité politique. Après la révolution du 14 janvier 2011, il sort de sa réserve, fait confiance à Caïd Essebsi, son ancien compagnon de route, avant de déchanter à nouveau. Pour lui, le changement démocratique ne se conçoit pas sans la fin du système autoritaire. Aujourd’hui, Mestiri se tient informé en recevant chez lui des hommes politiques, des syndicalistes, des intellectuels, et surtout des jeunes qui ont participé à la révolution. Il a une affection particulière pour les familles des martyrs, en majorité modestes et originaires du fin fond de la Tunisie. « J’étais vraiment choqué en écoutant leurs récits », confie-t-il après avoir participé à l’une de leurs conférences, au cours de laquelle elles ont reproché aux autorités de les N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
1970
Réconciliation avec Bourguiba
Juin 1970octobre 1971
Ministre de l’Intérieur
Octobre 1971
L’aile démocratique du PSD conquiert la majorité au congrès dit de « Monastir I ». Mestiri est suspendu de toute activité au sein du parti, avant d’en être exclu en janvier 1972
Novembre 1972
Avec dix personnalités, il adresse une lettre ouverte à Bourguiba réclamant la démocratie
1973-1978
Son mandat de député révoqué, il continue d’animer un groupe de démocrates qui publie deux journaux, Errai (« l’opinion ») et Démocratie
Juin 1978
Fonde le Mouvement des démocrates socialistes (MDS), qui le porte à sa tête
Novembre 1981
Les premières élections législatives pluralistes sont entachées d’irrégularités au détriment du MDS
1986
Pour avoir participé à une manifestation, il est emprisonné, puis mis en résidence surveillée. Ben Ali est alors ministre de l’Intérieur
1989
Tirant les leçons des premières dérives autoritaires de Ben Ali et des élections truquées de 1989, il démissionne du MDS et cesse toute activité politique
16 janvier 2011
Sort de son silence et soutient la révolution
avoir abandonnées. Et il en a tiré une leçon. « Le sentiment que j’ai eu, raconte Mestiri, c’est qu’il existe un fossé énorme entre le monde urbain et intellectuel, qui se perd dans de faux débats, et les gens du pays profond. Ces derniers me disent que ce sont les mêmes qui continuent à gouverner et qu’il ne faut pas attendre d’eux qu’ils fassent le changement… » Le faux débat qui inquiète ce démocrate intransigeant est celui qui tourne autour du mouvement islamiste Ennahdha et de la laïcité. « Ben Ali avait conclu qu’il fallait éradiquer les islamistes, et on connaît le résultat, rappelle-t-il. Est-ce que la solution serait aujourd’hui de les exclure de la communauté nationale et de les confiner dans un ghetto ? Je suis absolument opposé à cette campagne obsessionnelle. Si quelqu’un n’aime pas Ennahdha, qu’il ne vote pas pour ce parti. » PLACE AUX JEUNES. Il en est de même pour
l’ex-parti au pouvoir, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD). Mestiri est contre toute chasse aux sorcières touchant la masse des ex-adhérents, qu’il ne faut pas confondre avec les ex-responsables, qui sont entre 3 000 et 5 000. « Cela dit, ajoute-t-il, si on est pour la révolution, on ne peut pas élire des gens qui sont contre. » Mestiri, qui met par ailleurs la dernière main à ses Mémoires, achevés en 1996, mais dont la publication était prévue après le départ de Ben Ali, se concentre actuellement sur l’élection de la Constituante, prévue le 23 octobre. Selon lui, il ne faut pas limiter les prérogatives de la future Assemblée, comme le réclament plusieurs partis aux tendances peu démocratiques. « Une Assemblée constituante est souveraine pour fixer son ordre du jour et légiférer en attendant que la Constitution soit prête. Dès qu’elle débute ses travaux, la légitimité révolutionnaire s’arrête et c’est elle qui représente la souveraineté du peuple. La prochaine Constituante doit prendre des dispositions claires pour déraciner le système dictatorial, de sorte qu’on n’y retombe pas dans quatre ou cinq ans. Il n’est pas question d’un régime présidentiel qui remettrait tous les pouvoirs entre les mains d’un seul homme. Il doit y avoir une séparation des pouvoirs et un équilibre entre les deux systèmes, présidentiel et parlementaire. » « Je ne vais pas me présenter à l’Assemblée constituante », déclare Mestiri en réponse à une question sur ses projets. Briguera-t-il le poste de président transitoire de la République, lequel doit être désigné par la Constituante à la fin du mois d’octobre ? « Je ne suis candidat à rien du tout, rétorque-t-il. Je ne me présenterai pas à la Constituante, c’est tout ce que je peux vous dire. Je ne demande rien du tout. Attendons que l’Assemblée se réunisse. Désormais, c’est aux jeunes qui ont fait la révolution de prendre les choses en main. » ● JEUNE AFRIQUE
Maghreb Moyen-Orient
TACO VAN DER EB/HH-REA
! TERRASSE D’UN CAFÉ rue DidoucheMourad, dans le centre d’Alger.
ALGÉRIE
« F’tour » aux chandelles Dus à des pics de consommation, des délestages à répétition empoisonnent la vie des usagers. Qui sont à bout de patience.
D
epuisunmois,toutel’Algérieest soumise à de réguliers délestages de courant électrique dus, selon les services de communication du groupe public Sonelgaz, à des pics de consommation provoqués par une forte demande, consécutive à des températures caniculaires. « La puissance maximale appelée (PMA) a battu, le 11 juillet, un nouveau record, avec 8259 mégawatts (MW), soit 541 MW de plus que celui enregistré en août 2010, avec 7718 MW », explique Manel Aït Mekideche, directrice de la communication de Sonelgaz, qui met cette brusque montée de la consommation sur le compte de la « démocratisation des climatiseurs ». Voire ! D’autant que le fameux record de PMA était battu un mois plus tard, le 8 août, alors que les températures étaient plus clémentes. La consommation énergétique atteint alors un pic de 8 746 MW. Les délestages touchent toutes les régions du pays. Des émeutes éclatent dans plusieurs villes et villages, le siège de Sonelgaz est incendié, et des commerçants entament marches et sit-in pour obtenir des indemnisations. Précision : les délestages ne sont pas toujours de brèves coupures censées éviter le black-out et durent souvent plusieurs heures. Résultats : la chaleur aidant, le contenu des réfrigérateurs et
du gouvernement d’Ahmed Ouyahia, les capacités de production nationales se situent au-dessus de 10 000 MW, soit à un niveau supérieur au pic de consommation du 8 août. « Nos capacités ont été réduites par l’entrée en maintenance de quatre centrales électriques, minimise Salim Mebarak, directeur d’une agence Sonelgaz à Alger. Cette opération était programmée de longue date. En revanche, l’arrêt de l’unité de Skikda, dont la capacité de production est de 400 MW, a perturbé la distribution au niveau national. » PIRATAGE. Sonelgaz n’est pas la seule à
subir le courroux des usagers. Parfois, la colère vise la population des bidonvilles, accusée de pirater le réseau de distribution jusqu’à saturation. Le 5 août, des habitants deMostaganemontorganiséunedescente musclée dans les habitations précaires de leur cité pour y détruire les connexions pirates. Selon des témoins, les affrontements ont été très violents et l’absence de victime relève du miracle. Alors que les délestages n’épargnent aucune région, notamment celles du Sud, où l’on enregistre des températures supérieures à 50 °C, le président, Abdelaziz Bouteflika, a annoncé, le 3 août, à l’issue d’une séance d’évaluation du secteur de l’énergie, une Les autorités misent sur l’apport augmentation des capacités du solaire pour augmenter les de production de l’ordre de capacités de production nationale. 4000 MW d’ici à 2015. Cela suppose la réalisation, chapétrins à l’arrêt – donc pas de production que année, de centrales d’une puissance de pain – et ascenseurs immobilisés (un cumulée de 1 000 MW. Pour atteindre gros souci puisqu’on construit de plus en cet objectif, le gouvernement mise sur l’apport du solaire. Inaugurée le 15 juillet, plus de tours d’habitation dépassant les la centrale hybride (solaire-gaz naturel) de vingt étages). Le courant ne sera rétabli que le lendemain. « Du coup, avoue sans Hassi R’mel, d’une capacité de 150 MW, honte Mounir, quadragénaire, cadre dans devrait très vite avoir des petites sœurs. un grand groupe étranger, je me suis senti En attendant le solaire, certains Algériens dans le même état d’esprit qu’un jeune romprontlejeûneens’éclairantàlabougie. Mais, comme un malheur n’arrive jamais qui sort dans la rue pour tout casser. » Les justifications de Sonelgaz semblent seul, on signale un début de pénurie de bougies… ● CHERIF OUAZANI peu crédibles, car, selon les chiffres officiels
congélateurs devient très vite impropre à la consommation. Le 7 août, quelques minutes après le f’tour (rupture du jeûne), les 450000 habitants de Blida, à 50 km à l’ouest d’Alger, sont brusquement plongés dans le noir. Manque de chance, ce soir-là, le thermomètre affiche 42 °C. La population manque de suffoquer. Les commerçants, qui réalisent 60 % de leur chiffre d’affaires en soirée, baissent le rideau. Les vendeurs de glaces en sont réduits à jeter dans le caniveau leur marchandise. Qui dit coupure de courant dit robinets à sec,
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Maghreb Moyen-Orient PALESTINE
Ils ne pensent plus qu’à ça
Tout semble fin prêt pour la proclamation d’un État souverain en septembre, à l’ONU. Mais l’absence d’un accord politique avec Israël n’est pas pour faciliter les choses. Reportage.
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ansunnoman’slandaupaysage lunaire, au pied des montagnes arides de Judée, se dresse un vaste complexe bétonné et ultramoderne. Le périmètre est ceinturé par un épais grillage, des caméras de surveillance et une route de sécurité réservée aux patrouilles de Tsahal. Un panneau blanc, à l’entrée du site, souhaite néanmoins la bienvenue aux visiteurs. En borduredelaLigneverte,empiétantmême légèrement dessus, Tarkumiya est l’ultime obstacle israélien avant la Cisjordanie. Ce terminal est placé sous le contrôle du ministère de la Défense, qui y a affecté des gardes appartenant à un groupe de sécurité privé. Tarkumiya, opérationnel depuis 2007, est l’une des six plateformes de transbordement construites à la frontière entre Israël et le futur État palestinien. Arrivant des deux sens, plusieurs centaines de camions viennent chaque jour y déposer leurs marchandises. Ils ne sont pas autorisés à aller plus loin. Appelés par la voix féminine d’un haut-parleur, les poids lourds passent à tour de rôle sous un bras électronique censé détecter la moindre trace d’explosif. À l’écart du dispositif, des camions attendent la fin des inspections pour charger leurs nouvelles palettes et repartir du côté israélien ou palestinien. L’opération dure en moyenne une quarantaine de minutes. « Ces contraintes sécuritaires posent problème, s’énerve
Mohye Ahmad, un vieil homme d’affaires palestinien venu spécialement d’Hébron, 20 km plus loin, pour tenter d’accélérer la procédure. À cause de ces fouilles, mes produits mettent plus de temps à arriver jusqu’à Tel-Aviv. Il me faut aussi payer deux chauffeurs. Si ça continue, j’enverrai mes marchandises à Amman. » L’EFFET FAYYAD. Tarkumiya illustre de façon concrète la manière dont transitent les importations et les exportations palestiniennes. Et aussi la main-d’œuvre: chaque matin, 3500 ouvriers palestiniens munis d’un permis de travail empruntent ce point de passage pour se rendre en Israël. Reste qu’avec des taxes imposées à l’entrée et à la sortie, le terminal ne constitue pas encore une zone de libreéchange. Mais il est indispensable pour les paysans palestiniens, qui écoulent 60 % de leurs récoltes sur le marché israélien. « Même en période de tensions, Tarkumiya fonctionne normalement », se réjouit le lieutenant-colonel Avi Shalev, chargé de la coordination humanitaire et civile dans les territoires palestiniens. Ce type de plateforme sert aussi à mener des projets de coopération agricole et des échanges de savoir-faire. « Ici, on expérimente des mesures destinées à établir progressivement une confiance mutuelle », explique Shalev. En cas d’accord de paix, un tunnel partant de Tarkumiya pourrait d’ailleurs relier la Cisjordanie à la bande de Gaza, à
TSAHAL MOBILISE LES RÉSERVISTES « IL EST ÉVIDENT que l’Autorité palestinienne est en train de préparer une effusion de sang et des violences sans précédent. » Comme à son habitude, le chef de la diplomatie israélienne, Avigdor Lieberman, se plaît à jeter de l’huile sur le feu. Si ses propos n’ont pas réellement été pris au sérieux, ils reflètent l’inquiétude grandissante de l’État hébreu à l’approche de septembre. L’initiative de reconnaissance unilatérale palestinienne plonge les Israéliens dans l’embarras. Ils craignent à la fois un isolement international et une escalade aux frontières du pays. Pour parer à toute éventualité, l’armée israélienne a entamé une discrète mobilisation de ses troupes de réserve. Celles-ci pourraient être opérationnelles dès la fin du mois d’août. À plusieurs reprises, des responsables israéliens ont menacé d’annexer la Cisjordanie si les Palestiniens proclamaient leur État avant la M.P. signature d’un accord de paix. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
une trentaine de kilomètres au sud-ouest. Ambitieux, le projet a été jeté aux oubliettes après que l’enclave palestinienne est tombée aux mains des islamistes. Les responsables israéliens sont unanimes. Depuis que Salam Fayyad est le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, la situation s’est radicalement transforméesurleterrain.«LesPalestiniens sontengagésdanslaconstructiond’unÉtat et considèrent que la sécurité fait partie intégrante de ce processus, reconnaît un officier militaire de haut rang. Le coup de force du Hamas à Gaza a abouti à une véritable prise de conscience. » Même si Tsahal poursuit sporadiquement ses opérations d’arrestation, la baisse drastique des attentats semble aussi liée à l’attitude exemplaire des forces de sécurité palestiniennes. En gage de reconnaissance, l’État hébreu a nettement réduit son dispositif en Cisjordanie, comme le nombre de check-points, passé de 35 à 16. Hawara, à l’entrée de Naplouse, est l’un d’entre eux. Si les blocs de béton et les guérites sont restés en l’état, plus aucun soldat israélien n’y est posté. Il y a quelques années, cette localité était encore considérée comme l’un des bastions de la seconde Intifada. Le repaire, aussi, des Brigades des martyrs d’Al-Aqsa et d’autres groupes armés. Pour pacifier Naplouse, les JEUNE AFRIQUE
OFG-RAF
Maghreb Moyen-Orient
! Dans les rues de Ramallah, ici aux abords de la présidence, LES ATTENTES SONT GRANDES, à la mesure de l’espoir d’une reconnaissance internationale.
autorités ont dû convaincre de nombreux activistes de rejoindre la police palestinienne en échange d’une amnistie. Ce qui a mis un terme à l’anarchie et permis la confiscation d’importantes quantités d’armes et de munitions. Aujourd’hui, 7 000 policiers sont affectés au district de Naplouse, le plus important de Cisjordanie après celui d’Hébron. FÉBRILITÉ. Ce renouveau est en grande
partie l’œuvre du commandant Omar alBzour. Le matin, cet homme au physique patibulaire ne rate jamais une occasion d’aller inspecter ses troupes sur le terrain. Au passage du commandant moustachu, entouré de trois gardes du corps le doigt sur la gâchette, les regards se tournent. Certains badauds s’arrêtent pour le saluer, tandis que des policiers font mine de régler la circulation. « À cause du ramadan, on renforce notre présence à chaque coin de rue, explique Bzour, plutôt satisfait du comportementdeseshommes.Lapopulationnousrespecte,çan’apastoujoursétéle cas. » À l’approche de la casbah et du souk, qui grouillent de monde, l’effervescence est à son comble. Seuls quelques posters de martyrs usés par le temps réveillent les fantômes du passé. JEUNE AFRIQUE
moment choisi est plus qu’opportun », affirme Nabil Chaath, figure historique de l’OLP, de retour d’une tournée en Russie, en Bosnie-Herzégovine et au Portugal visant à rallier de nouveaux soutiens. « Les négociations sont interrompues avec le gouvernement Netanyahou, et le président américain Barack Obama n’a pas tenu ses engagements, poursuit-il. Notre stratégie, c’est d’abord de rendre illégale la présence d’Israël à l’intérieur des frontières de 1967. » À Ramallah, symbole d’une prospérité retrouvée en Cisjordanie, quelques préparatifs sont visibles. Les travaux de rénovation de la Mouqataa – siège de l’Autorité palestinienne – sont presque achevés. D’autres bâtiments officiels sont en cours de construction. « Dans la rue, il y a de grandes attentes pour septembre, car nos dirigeants entretiennent l’espoir, reconnaîtlejournalisteMohamedal-Saadi, proche du pouvoir palestinien. Mais tout cela peut aussi aboutir à une énorme déception. » Autour des grandes artères parfaitement goudronnées, le déploiement des bérets rouges de Mahmoud Abbas trahit la fébrilité ambiante. Pour autant, la ville ne donne pas l’impression de préparer une insurrection. Les forces de sécurité palestiniennes ont reçu pour consigne d’empêcher tout débordement à l’approche de l’échéance. Alors que la Ligue arabe vient de présenter le dossier palestinien au secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, plusieurs responsables du Fatah appellent la population à entamer de grandes marches pacifiques le jour du vote. « Ni pierres ni
De retour au commissariat de Naplouse, Bzour se montre plus vindicatif : « Mes officiers sont parfaitement entraînés pour gérer le futur État. Les Israéliens n’ont plus d’excuses. Ils ont un partenaire capable de maintenir la paix et la sécurité. Notre problème, c’est l’occupation, la fragmentation de la Cisjordanie en trois zones. À cause des colonies, certains villages restent sous contrôle sécuritaire israélien. Pour intervenir là-bas, il nous « Notre stratégie, c’est de rendre faut d’abord une autorisation illégale la présence d’Israël dans del’armée.Onnel’obtientpas les frontières de 1967. » toujours. » Dans les environs de Naplouse, cette situation NABIL CHAATH, figure historique de l’OLP favorise la criminalité, permettant à des suspects de passer d’une fleurs », aurait ainsi lancé à ses collabojuridiction territoriale à une autre pour rateurs Yasser Abed Rabbo, qui n’exclut ne pas être inquiétés. Idem pour certains pas de possibles accrochages avec l’armée colons radicaux qui se livrent régulièreisraélienne à l’entrée des check-points ou ment à des actes de vandalisme contre des des colonies juives. Son initiative, baptisée mosquées ou contre des champs d’oliviers « Palestine 194 », fait à la fois référence à la résolution sur le droit au retour des appartenant à des Palestiniens. réfugiés et au fait que l’État palestinien devrait être le 194e membre de l’ONU. NI PIERRES NI FLEURS. Ces problèmes Avec le probable veto américain au Conseil attendront. Dans l’immédiat, la priorité de sécurité, la Palestine n’obtiendra tout est de se tenir prêt pour le 20 septembre, au plus qu’un statut d’État observateur. date à laquelle les Palestiniens espèrent La partie est encore loin d’être gagnée. ● obtenir la reconnaissance de leur État MAXIME PEREZ, envoyé spécial à Ramallah par l’Assemblée générale de l’ONU. « Le N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Maghreb Moyen-Orient ÉGYPTE
Des lendemains qui déchantent
Le 25 janvier, le peuple descendait dans la rue pour réclamer « du pain, de la liberté et de la dignité ». Mais six mois plus tard, ceux qui ont chassé Moubarak du pouvoir ne parlent plus du tout d’une seule voix.
NOTIMEX/FOTO/XINHUA/COR/WAR/AFP
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«
J
e ne regrette rien. Sauf une chose. Nous n’aurions pas dû quitter la place, le 11 février, avant que toutes nos demandes aient été satisfaites », explique Lina Megahed, jeune manifestante de la place Al-Tahrir. Six mois après la chute de Hosni Moubarak, la révolution égyptienne laisse à certains de ses héros un goût d’inachevé. De nouvelles revendications ont fait leur apparition. Les manifestants exigent désormais, entre autres, la prise en charge des victimes de la répression et la mise en place de salaires minimum et maximum. Tout comme ils réclament la démission d’un grand nombre de responsables compromis par leurs liens avec l’ancien régime. Surtout, ils désapprouvent la manière dont le Conseil suprême des forces armées gère la transition démocratique. Et le font savoir haut et fort. Il y a eu le scandale des tests de virginité. Puis le jugement de civils par des N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
! L’armée et les jeunes activistes sont désormais À COUTEAUX TIRÉS.
des jeunes activistes. À preuve, la brutalité tribunaux militaires (plus de 10000, selon Human Rights Watch). Mais l’armée est avec laquelle les manifestants de la place Al-Tahrir ont été dispersés le 1er août. passée à la vitesse supérieure en s’en Si vingt-six associations ont accepté de prenant directement au mouvement mettre fin au sit-in le temps du mois de Kefaya et au Mouvement du 6 avril. Déjà très actives sur le plan politique avant la ramadan, des militants et des familles révolution, les deux associations ont été accusées La majorité silencieuse rejette par un général du Conseil les exigences exorbitantes et suprême de recevoir des financements de l’étranger. souhaite la fin des manifestations. Dans son décret no 69, promulgué le 23 juillet, l’institution militaire de « martyrs » ont décidé au contraire de reproche également au Mouvement du poursuivre l’occupation de la place. C’est 6 avril de vouloir « diviser le peuple et sous les hourras et les encouragements des habitants du quartier du centre-ville l’armée ». qu’ils ont été délogés par les militaires, DURCISSEMENT. « Ils ont commencé par qui tiraient en l’air et arrêtaient ceux qui jouer les protecteurs de la révolution, mais leur tombaient sous la main. « Certains le ton s’est durci. Aujourd’hui, ils n’hésimilitants ont des exigences exorbitantes, tent plus à nous attaquer et se justifient en très éloignées de celles de la majorité disant que nous sommes des criminels », silencieuse », explique Rana Farouk, s’insurge Lina Megahed. De fait, l’armée porte-parole de l’une des nombreuses semble s’être définitivement désolidarisée associations de jeunes de la révolution JEUNE AFRIQUE
Coulisses
QUID DES ÉLECTIONS? Dans ce contexte,
personne ne semble se préoccuper des législatives, dont les préparatifs commenceront à la fin du mois de septembre. Mais la loi électorale, rendue publique le 20 juillet, a été unanimement rejetée par les partis. En cause : la possibilité donnée aux indépendants de briguer 50 % des sièges de l’Assemblée. « Ce mode de scrutin encourage l’achat des voix et le recours aux baltagias [voyous payés par le pouvoir] », explique Imad Gad, l’un des fondateurs du Parti social-démocrate égyptien. Là encore, un seul responsable, le Conseil suprême, qui n’a absolument pas pris en compte le projet de loi rédigé par les partis, déplore Imad Gad : « Il ne voit pas la révolution comme un changement en profondeur, mais comme une simple réforme de surface. » Le 3 août, cependant, l’ouverture du procès de Hosni Moubarak, de ses deux fils, Alaa et Gamal, et de son ministre de l’Intérieur a fait retomber la tension. Et si quelques manifestants ont protesté contre le jugement de l’ancien raïs, l’écrasante majorité de la population a regardé avec stupeur et émotion le dictateur déchu et sa progéniture pénétrer dans le box des accusés. Le temps de quelques heures, le peuple a retrouvé son unité, cellelà même qu’il avait découverte place Al-Tahrir, quand il exigeait d’une seule voix la chute du régime. ● TONY GAMAL GABRIEL JEUNE AFRIQUE
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TUNISIE AU NOM DES BERBÈRES Le 30 juillet, l’Association tunisienne de la culture amazighe (Atca), fondée en avril à Matmata, dans le Sud, a annoncé qu’elle avait obtenu son visa légal. C’est la première fois dans l’histoire de la Tunisie indépendante que la minorité berbère obtient le droit d’être officiellement représentée. L’Atca entend défendre une langue parlée seulement par environ 1 % de la population – principalement sur l’île de Djerba et dans les gouvernorats du Sud – et qui n’est presque plus écrite ni enseignée. L’association compte aussi protéger le patrimoine berbère et lutter contre les préjugés. En effet, beaucoup deTunisiens, éduqués dans l’idée d’une nation reposant sur les seules identités carthaginoise et arabe, peinent à reconnaître la culture berbère. Actuellement, la page Facebook « Amazigh tunisien » compte plus de 2 500 fans. ●
AGE FOTOSTOCK
qui ont vu le jour après la chute de l’ancien régime. Cette même majorité silencieuse semble donc souhaiter la fin des manifestations, qu’elle juge responsables de l’instabilité économique et politique du pays. La division mine aussi les partis politiques. Tous essaient de s’approprier la révolution en prétendant s’exprimer au nom des Égyptiens. Les accusations de trahison et de manipulation fusent de toutes parts. Le vendredi 29 juillet avait été décrété « vendredi de la volonté du peuple ». Ce jour-là, les différentes formations politiques devaient se rassembler et porter les mêmes revendications, laissant de côté leurs divergences. Mais les salafistes se sont rétractés, préférant investir la place pour dénoncer un projet de norme supraconstitutionnelle (garantissant la liberté de conscience) et appeler à l’instauration d’un État islamique, obligeant une trentaine de formations séculières à se retirer en signe de protestation.
Maghreb & Moyen-Orient
! Le village de MATMATA et ses célèbres habitations troglodytes.
HAMAS-FATAH AMNISTIE RÉCIPROQUE Malgré des dissensions persistantes, le Hamas et le Fatah s’efforcent de progresser sur la voie de l’unité depuis l’accord de réconciliation conclu le 4 mai au Caire. Le 7 août, les deux partis se sont réunis pour la quatrième fois dans la capitale égyptienne afin de discuter des questions restées en suspens. Ils sont ainsi convenus de libérer, d’ici à la fin du ramadan, les prisonniers des deux mouvements, qui ne seraient plus que quelques dizaines.
ISLAM NOS AMIS LES BÊTES Si les enfants sont exemptés du jeûne rituel, le mois de ramadan est l’occasion de raffermir leur connaissance de la religion. Depuis le 1er août, la chaîne égyptienne Al-Hayat diffuse tous les jours un dessin animé intitulé Les Histoires d’animaux dans le Coran, afin d’éveiller les plus jeunes à la beauté, et à la sacralité, du monde animal. Les concepteurs de la série espèrent ainsi faire évoluer les comportements envers les animaux,
souvent victimes de mauvais traitements en terre d’Islam. KOWEÏT RECRUTE AFRICAINS Depuis que des affaires de mauvais traitements infligés au personnel de maison ont éclaté dans le Golfe, plusieurs pays asiatiques réclament de meilleures garanties aux pays recruteurs. Le Koweït, qui compte 660 000 domestiques, envisage de faire désormais appel à des pays subsahariens, qu’il suppose moins regardants. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Maghreb Moyen-Orient
PANORAMA
Les huit leçons du
Au moment où les révolutions égyptienne et tunisienne sont au milieu du gué, plusieurs enseignements peuvent déjà être tirés des bouleversements historiques qu’a connus la région. ROULA KHALAF
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nterrogé sur une possible intensification du Printemps arabe pendant le ramadan, un expert syrien répond sans détour : « Chaque jour sera un vendredi. » Les jeunes manifestants, qui ont pris l’habitude de descendre dans la ruetouslesvendredis,onteneffetaccentué la pression durant le mois de jeûne. Avec le même objectif : faire plier les régimes qui résistent à l’esprit révolutionnaire. Près de six mois après la fuite de Zine el-Abidine Ben Ali en Arabie saoudite, élément déclencheur du Printemps arabe, la région a indéniablement changé. Le plus grand pays du monde arabe, l’Égypte, a ainsi réussi à balayer en un temps record Hosni Moubarak, au pouvoir depuis trente ans. Chassé en février, il a vu son procès s’ouvrir le 3 août et devra répondre, entre autres, du meurtre de quelque 850 manifestants. LE PRIX DE LA LIBERTÉ. Des dizaines de
millions d’individus se sont émancipés en quelques mois, explique Abdelkhaleq Abdallah, professeur à l’Université des Émirats,àDubaï.«C’estunacquisessentiel pour les Arabes, ajoute-t-il, et l’énergie positive qui a été libérée est incroyable. » Mais, comme le déplorent les analystes, le Printemps arabe s’est transformé en un été long et chaud, et le prix à payer pour se libérer de plusieurs décennies d’autoritarisme se révèle très élevé. D’autres jeunes qui ont voulu imiter leurs frères d’Afrique du Nord se sont retrouvés engagés dans des conflits plus longs et plus violents avec les pouvoirs en place. La révolte de Bahreïn a ainsi été réprimée dans le sang, la Libye et le Yémen sont dans une impasse. Le régime syrien, quant à lui, mène une guerre sans pitié contre le mouvement de contestation. Des milliers de vies ont déjà été perdues et davantage encore pourraient être sacrifiées avant la fin de l’année. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Les transitions politiques en Égypte et en Tunisie sont chaotiques, les revendications des populations, notamment sur le plan économique, ne pouvant être satisfaites par des gouvernements dont les pouvoirs restent très limités. Mais le réveil de la jeunesse arabe, expression plus à propos pour décrire les bouleversements que connaît la région, sera assurément un atout majeur dans la construction de futurs régimes démocratiques. Du Caire à Manama, les jeunes ont décidé que le temps où ils étaient gouvernés par des dirigeants qu’ils n’avaient pas choisis et qui ne prenaient pas en compte leurs aspirations était révolu. Ils évoquent désormais leur volonté de sacrifice, l’importance de la contestation pacifique, plus efficace que la confrontation violente, et le recours aux médias, notamment aux réseaux sociaux, pour faire entendre leur message. Mais cette lutte risque bien de durer plusieurs années. Elle progressera de manière inégale, sera ponctuée de hauts et de bas, de moments d’euphorie et de périodes de frustrations. Les manifestants libyens ont très rapidement pris les armes pour se muer en rebelles. Le même scénario pourrait se reproduire en Syrie. Une issue positive est-elle garantie ? Rien n’est moins sûr. De même, les tentatives de réformes n’aboutiront pas toujours à ce qui était prévu : de nouvelles démocraties verront le jour, certains États s’écrouleront, d’autres devront gérer des guerres civiles sur le long chemin de leur transition démocratique. « Les Arabes sont en train de payer le prix fort pour leur liberté, explique le professeur Abdallah. Mais, comme le montre l’Histoire, la conquête de la liberté a toujours un prix. » Au moment où l’on assiste à l’ébauche d’un nouvel ordre régional, plusieurs enseignements peuvent d’ores et déjà être tirés des mobilisations successives. En voici huit, qui recoupent des aspects caractéristiques du Printemps arabe. ●
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Jeunes et sans peur
TOUTES LES RÉVOLU TIONS de la région ont deux points communs : elles ont été conduites par des mouvements de jeunes, souvent spontanés et désorganisés, et font l’objet de tentatives de récupération de la part des différentes forces politiques, qu’elles soient laïques ou islamistes. Si, dans certains cas, les frustrations économiques ont largement contribué au déclenchement de la révolte, notamment en Tunisie, où le chômage des jeunes était la première cause de la colère JEUNE AFRIQUE
Maghreb Moyen-Orient
Printemps arabe ! LA VICTOIRE DE LA JEUNESSE, au Caire, le 11 février, jour de la démission de Hosni Moubarak.
de décision entre leurs mains et celles de leur famille. Les soulèvements ont directement visé ces clans qui monopolisaient le pouvoir,aupointdevouloirletransmettreà leur progéniture. En étendant leur emprise au domaine économique, ces familles se sont aliéné les classes moyennes mais aussi les élites. De hauts fonctionnaires de l’ancien régime égyptien affirment aujourd’hui que Gamal Moubarak et sa mère, Suzanne, sont directement responsables de la chute d’Hosni Moubarak. Ce sont eux qui voulaient à tout prix voir le « dauphin » jouer un rôle plus important dans la vie politique, n’hésitant pas à truquer les dernières législatives, marginalisant ainsi d’autres forces politiques. Ironie de l’histoire, l’ex-raïs lui-même, explique un autre haut responsable égyptien, se montrait récalcitrant face à l’éventualité d’une succession héréditaire. ●
Le poids de l’armée
des manifestants, et en Syrie, où des provinces longtemps ignorées par le régime cherchent à prendre leur revanche, les soulèvements ont cependant été dominés par l’exigence de liberté, de démocratie et de représentativité politique. Les mouvements de jeunes disposent de plusieurs atouts : ils rassemblent en leur sein des « novices » en politique, compliquant ainsi la tâche des services de sécurité, qui ne peuvent les pister. Ils maîtrisent les technologies de l’information et les médias. Mais ils sont également moins enclins aux compromis que les hommes politiques. Une fois JEUNE AFRIQUE
qu’ils sont lancés dans une révolution, il devient difficile de les amadouer avec des promesses de réformes économiques ou de remaniements ministériels. Bien au contraire, leurs demandes se font généralement de plus en plus pressantes. ●
Exit les dynasties républicaines
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LES DIRIGEANTS ARABES les plus contestés sont ceux qui se sont le plus cramponnés à leur fauteuil, concentrant le pouvoir
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QUELLES QUE SOIENT LEUR FERVEUR et leur détermination, les jeunes révolutionnaires n’auraient pas réussi à renverser les régimes autocratiques sans le coup de pouce de l’armée. Le refus de cette dernière de tirer sur la foule a scellé le destin des présidents tunisien et égyptien. À l’inverse, les divisions apparues au sein des institutions militaires, certains secteurs de l’armée demeurant fidèles au régime en place, comme c’est le cas au Yémen et en Libye, ont permis de prolonger la durée de vie des dictatures au pouvoir. En Syrie, les institutions sécuritaires sont dirigées par des membres de la communauté alaouite, à laquelle appartient la famille Assad. À ce jour, ils sont demeurés loyaux au régime, réprimant sans états d’âme le mouvement de contestation né il y a cinq mois. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Maghreb Moyen-Orient Panorama Mais l’implication des militaires dans ces révolutions est à double tranchant. Si l’arméeestunegarantedestabilitépendant la transition, empêchant ainsi l’État en tant qu’institution de s’effondrer, ses dirigeants restent bien souvent partie intégrante de l’ancien régime. Et le risque de les voir céder aux sirènes du pouvoir est toujours présent.Si,parexemple,leConseilsuprême des forces armées égyptiennes souligne sa volonté de transmettre les rênes aux civils le plus rapidement possible, la manière dont il conduit la transition a provoqué l’incompréhension et la colère des jeunes, qui se sont retournés contre lui. ●
Gare au sectarisme!
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L’ÉVOLUTION LA PLUS DANGEREUSE sur laquelle ont débouché les révolutions arabes est l’exacerbation des tensions confessionnelles. La chute des régimes tunisien et égyptien a été accélérée par l’homogénéité de ces deux sociétés. À l’inverse,lesrégimesdirigéspardesminorités, les alaouites en Syrie ou les sunnites à Bahreïn, ont réussi à exploiter la peur du sectarisme, conduisant des pans entiers de la population à soutenir la répression par crainte d’une guerre civile. Pour les militants démocrates, parler de sectarisme est exagéré. Pourtant, il ne fait aucun doute que la minorité sunnite de Bahreïn affiche clairementsonhostilitéàl’égarddelamajoritéchiitequis’estsoulevéecontrelafamille régnante.Etsembleencoremoinsdisposée qu’avant à prêter une oreille attentive aux chiites qui se disent victimes de discriminations. En Syrie, l’armée est dominée par des officiers alaouites qui ont étroitement lié leur destin à celui de la famille Assad, toutcommelacommunautéchrétienne,qui craint une réaction violente de la majorité sunnite, dont une large partie reste très conservatrice. ●
Le temps des islamistes
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FORCEPOLITIQUELAMIEUX ORGANISÉEdutempsdesrégimesautocratiques,lesislamistes sont les premiers bénéficiaires de l’ouverture politique. Même s’ils ne N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
! Les islamistes sont les premiers bénéficiaires de l’ouverture politique. Ici, le congrès du parti tunisien ENNAHDHA, le 17 avril, à Tunis.
représententpaslamajoritédel’électorat,ils ont l’avantage de polariser l’attention dans des sociétés où ils ont longtemps été considérés comme une menace. Aussi bien le partitunisienlongtempsinterditEnnahdha que celui des Frères musulmans égyptiens envisagentlesélectionsavecbeaucoupplus desérénitéqueleursconcurrentslaïcs,dont les formations viennent tout juste de voir le jour.Pourcertainshommespolitiqueslaïcs etdiplomatesdelarégion,ilfaudraattendre aumoinscinqansavantdepouvoirévaluer la transition démocratique des deux pays. Il ne faut donc pas porter de jugements hâtifs après les premières élections. Ils estiment également que plus le processus de démocratisation progressera, plus les islamistes seront confrontés à des forces concurrentes. Les partis islamistes sont eux-mêmes traversés par de graves crises – divisions internes, remise en question du leadership par la jeune garde. Au Caire,
Abdulmoneim Abdoulfoutouh, ancien cadre réformiste des Frères musulmans, est persuadé que l’intégration de la confrérie dans le jeu politique va la conduire à modérer son discours et à adopter des positions plus progressistes. ●
Les monarchies résistent
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LES MONARCHIES ne sont pas immunisées contre la révolte de la jeunesse, comme le montrent les mouvements de protestation à Oman et à Bahreïn. Mais, de manière générale, les familles royales se sont révélées plus résistantes que les régimes républicains, en partie parce qu’elles jouissent d’un niveau de légitimité plus élevé. Dans les monarchies pétrolières du Golfe, de gros moyens financiers ont été JEUNE AFRIQUE
Les huit leçons du Printemps arabe
Bouleversement de l’ordre régional
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AUDE OSNOWYCZ
À L’HEURE OÙ LES LEA DERS ARABES affrontent des défis sans précédent, les forces contre-révolutionnaires sont à pied d’œuvre, avec à leur tête l’Arabie saoudite, l’un des pays les plus déterminés à préserver l’ancien ordre régional. Exaspérés par l’humiliant départ de Moubarak, les Saoudiens se sont empressés de voler au secours de la famille royale bahreïnie, envoyant ses troupes à Manama dans le cadre des accords de sécurité du Conseil de coopération du Golfe (CCG). Riyad a également déployé de gros efforts pour élaborer un plan de transition qui aurait permis à Abdallah Saleh de démissionner dignement. Pour le dirigeant yéménite, l’objectif était d’organiser un transfert des pouvoirs plus acceptable et moins brutal qu’en Égypte. Même si l’autocratie saoudienne entretient des relations cordiales avec des voi-
mobiliséspouraméliorerlesconditionsde vie des populations, exorcisant le désenchantement général. L’Arabie saoudite a ainsi consacré une enveloppe de plus de 100 milliards de dollars (69,8 milliards d’euros) à des dépenses sociales. L’avantage non négligeable des monarchies est que le pouvoir y est diffus, analyse Robert Danin, du Conseil [américain] des relations internationales, qui fait aussi remarquer que le roi de Jordanie a limogé son Premier ministre et que le sultan Qabous d’Oman a procédé à un remaniement ministériel dès le début de la contestation. « À l’inverse, le pouvoir est tellement centralisé dans certains régimes républicains que l’État et son chef ne forment plus qu’un », explique-t-il. Au Maroc, ce morcellement du pouvoir a permis au roi Mohammed VI de lancer des réformes pour renforcer le Parlement élu. Si l’initiative a été jugée insuffisante par les mouvements de jeunes, les hommes politiques estiment que c’est là un premier pas vers une transition démocratique pacifique. ● JEUNE AFRIQUE
De toutes les crises qui secouent la région, celle qui se déroule en Syrie, alliée stratégique de l’Iran, pourrait être celle qui aura le plus de conséquences sur le rapport des forces au Moyen-Orient. L’effondrement du régime de Bachar alAssadseraitundésastrepourlesambitions régionales de Téhéran. Et si une alternative au régime des Assad devait émerger, elle profiterait certainement à l’Arabie saoudite, ennemie principale de l’Iran. ●
L’Occident doit patienter
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AVEC LE REGAIN D’INS TABILITÉauMoyen-Orient et l’ébauche d’un nouvel ordre arabe, les puissances occidentalessontdésorientées et essaient tant bien que mal de revoir les lignes directrices de leur politique étrangère pour conserver un équilibreentrelesoutienapportéauxmouvements démocratiques et la préservation de leurs alliances traditionnelles avec les régimes encore en place. L’indignation suscitée par Les forces contre-révolutionnaires les attaques de Mouammar sont à pied d’œuvre, avec pour Kaddafi contre les villes chef de file l’Arabie saoudite. libyennes rebelles a conduit la communauté internatiosins plus démocratiques – le Koweït en nale à former une coalition et à lancer, bon est le meilleur exemple –, elle voit génégré mal gré, une intervention militaire. ralement d’un mauvais œil le moindre Mais celle-ci se trouvant aujourd’hui dans signe d’instabilité. Elle redoute l’impact l’impasse, il est peu probable qu’un tel des révolutions arabes sur sa propre scénario se reproduise ailleurs. Et si les population et sur le rapport des forces militants démocrates demandent aux au Moyen-Orient. Car, avec le départ de États-Unis et aux pays occidentaux de se Moubarak, l’Égypte pourrait s’affirmer sur montrer plus fermes à l’égard des régimes la scène internationale avec une politique de la région et à accentuer leurs pressions, étrangère plus indépendante, moins en personne n’appelle à une intervention sur phase donc avec la ligne dure de l’Arabie le terrain, car c’est aux Arabes eux-mêmes, saoudite à l’égard de l’Iran. Pour tenter et non aux Occidentaux, qu’il incombe de de juguler le soulèvement arabe et de conduire le changement qu’ils attendent. renforcer ses alliés les plus résistants, Si l’Occident se dit disposé à aider l’Égypte Riyad a soutenu le projet d’intégration de et la Tunisie pendant leur transition polila Jordanie et du Maroc au sein du CCG, tique en leur apportant une assistance en passe de devenir un club protégeant économique, le monde extérieur n’a eu les monarchies arabes. qu’une influence très limitée sur le tour Les révolutions arabes ont également qu’ont pris les événements dans le monde perturbé Israël, conduisant les pourarabe. Comme un responsable américain parlers de paix avec les Palestiniens en l’a bien résumé : « Nous pouvons aider terre inconnue et obligeant l’État juif à ceux qui veulent aller vers la démocratie. prendre en compte les sentiments des Mais nous ne pouvons pas prendre de masses arabes plutôt que de continuer décisions à leur place. » ● de s’appuyer sur l’attitude conciliante de © Financial Times et Jeune Afrique 2011 leurs dirigeants. Tous droits réservés N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Europe, Amériques, Asie
CRISE
Au secours, le capitalisme est devenu fou! Comment expliquer la crise d’hystérie collective qui frappe les marchés financiers et boursiers ? Avant tout par la peur, largement irrationnelle, des spéculateurs.
ALAIN FAUJAS
B
La seconde terreur de ceux qu’il faut bien appeler des spéculateurs concerne la médiocrité de la conjoncture mondiale, qu’ils contribuent euxmêmes à déprimer en anticipant le retour de la crise. Pour eux, l’Europe ne repartira pas de sitôt, plombée qu’elle est par la nécessité de redresser ses déficits et de réduire ses dettes. Ceinture ! Et les États-Unis ne sont pas en meilleure posture. Ceinture encore ! Quand ils se tournent vers les pays émergents (l’Inde et la Chine progressent pourtant à des cadences effrénées : entre 8 % et 10 %), ils constatent qu’on y augmente les taux d’intérêt et qu’on y adopte des mesures pour calmer la surchauffe de l’économie et l’inflation qui gronde. Le monde entier se met donc au régime. Et les investisseurs anticipent une rechute dans la récession, appelée double dip. Ils vendent à tout-va pour « rester liquides » et achètent des métaux précieux.
ien malin qui pourrait prédire l’issue de la crise d’hystérie collective – boursière et financière – qui, depuis plusieurs semaines, déclenche un jour un krach des cours, le lendemain leur remontée en flèche, et le surlendemain un nouvel effondrement. Tout y passe, au gré des rumeurs et des humeurs. Tantôt, les obligations grecques et le colza sont accusés de tous les maux. Tantôt, ce sont la Société générale et le dollar. Seul l’or poursuit sa marche triomphale : 1 600, 1 800 dollars l’once, EFFET DOMINO. Le même scénario catastrophe, bientôt 2 000, peut-être. Les marchés ne savent conséquence de la bêtise de ce capitalisme patholoplus à quelle valeur se fier et où placer leurs sous. gique, s’est répété deux fois en deux mois, des deux côtés de l’Atlantique. En juillet, les chamailleries Retour à la crise des subprimes ? entre Européens à propos du Pour comprendre ce phénomène qui promet de durer, Au gré des rumeurs, secours financier à apporter à il faut savoir que les invesla Grèce ont tellement effrayé tisseurs oscillent entre deux les cours plongent, les investisseurs qu’ils se sont remontent, replongent… souvenus que l’Italie était, terreurs. elle aussi, endettée jusqu’au La première concerne les cou. Ils ont donc demandé à Rome de payer de plus dettes, il est vrai colossales, des États. Les maren plus cher pour continuer à emprunter. chés se sont d’abord effrayés de celles des petits Pour éviter un effet domino, les chefs d’État et pays périphériques de la zone euro : la Grèce, puis l’Irlande, puis le Portugal, avec l’Espagne en de gouvernement de la zone euro ont cru sortir le ligne de mire. Doutant de la capacité de ces pays à grand jeu en rendant public, le 22 juillet, un nourembourser leurs emprunts, ils se sont débarrassés veau plan de 109 milliards d’euros pour soutenir la des obligations correspondantes, faisant du même Grèce, auquel les banques privées apporteront un coup monter la prime de risque demandée aux surcroît de 54 milliards pour alléger sa dette. Provisoirement rassurés, les marchés ont à nougouvernements en difficulté. Pour rassurer les veau paniqué jusqu’à ce que la Banque centrale financiers apeurés, ceux-ci ont empilé les plans européenne promette qu’elle achèterait aussi de d’austérité qui asphyxient leur croissance – et la dette italienne et espagnole. donc leur capacité de remboursement.
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Le calme qui a suivi ces interventions a été de courte durée. Il a suffi que Nicolas Sarkozy interrompe ses vacances durant une journée pour finaliser les mesures d’économies budgétaires qui seront arrêtées fin août pour que les rumeurs sur une possible dégradation de la note de la dette française (AAA) fassent replonger les marchés dans l’hystérie, le 10 août. Deuxième zone névrotique: les États-Unis. Les investisseurs ont focalisé leur angoisse sur l’incapacité des congressistes démocrates et républicains à s’entendre sur la manière de contenir le déficit budgétaire abyssal et sur le relèvement du plafond légal de la dette (14294 milliards de dollars). In extremis, le 31 juillet, Barack Obama a annoncé un accord d bancal qui éloigne le spectre de la faillite (dans dans da ns llee ca cass contraire, l’État fédéral aurait été dans l’incapacité capa ca paci cité té ic de payer ses fonctionnaires et d’assurer le service emon em onté tés. té s. de sa dette). Les marchés sont alors remontés. Hélas, le 5 août, l’agence Standard & Poor’s ’s a pris pri riss la décision historique de dégrader la note de la l de dett dette ttee américaine: de AAA (soit 20/20) à AA+ (soit it 18/20). 18/ 8/20 20). 20 ). Parce qu’elle doute de l’efficacité du plan. Résultat immédiat : une nouvelle plongée ngée ng ée des des marchés. Cette rétrogradation n’a pourtant nt aucune conséquence pratique et n’a pas été suivie ie p par ar lles es deux autres agences de notation, Fitch et Moody’s, qui ont jugé prudent de laisser S&P affronter seule l’indignation des politiques. Le 9 août, tout le monde est suspendu aux décisions de la Réserve fédérale américaine. Celle-ci JEUNE AFRIQUE
! L’INDICE DAX À LA BOURSE DE FRANCFORT (Allemagne), le 5 août.
0 %
Le taux pratiqué par la Réserve fédérale américaine jusqu’à la mi-2013. Objectif : soutenir la croissance
promet de maintenir des taux à, quasiment, 0 % jusqu’à la mi-2013 afin de soutenir une conjoncture flageolante. Elle révèle aussi qu’elle étudie des moyens de relance moins classiques, pour le cas où. Mais sans dire lesquels. Les marchés remontent pendant quelques heures, puis s’effondrent de nouveau, le 10 août. Les investisseurs espéraient de la FED un troisième plan de plusieurs centaines de milliards de dollars pour soutenir la consommation, l’investissement, et donc l’emploi. Deux leçons se dégagent de ces trois semaines de folie. PAIEMENT PAIEME PAI EMENT NT CASH. La première est que les hommes
politi politiques poli tiqu ques es ne n peuvent plus ruser avec les marchés, quii le qu leur ur font fon payer cash leurs atermoiements: tout retard rd dans d l’application d’une promesse engendre unee co un coût coûteuse ûteu eu défiance. Le temps de la finance est immé im immédiat. médi mé diat at Celui des gouvernants est soumis aux proc pr prochaines ochaines oc haines échéances électorales. ha La seconde sec econ on est que les spéculateurs ne reculent quee devant qu deva de vant nt une solidarité clairement assumée. Autrement dit, les extrémistes du Tea Party et les Au républ ré public icai ains ns américains qui refusent tout relèrépublicains veme ve ment nt des des impôts sur les hauts revenus, aussi vement bien que les Allemands qui rechignent à aider les Grecs, donnent aux prédateurs le signal de la curée. Paradoxalement, l’apaisement des marchés passe, d’un côté de l’Atlantique, par davantage de justice fiscale. Et de l’autre, par davantage d’Europe. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Europe, Amériques, Asie TURQUIE
L’armée marque le pas Et si la haute hiérarchie militaire était en train de perdre l’interminable bras de fer qui l’oppose au gouvernement islamo-conservateur ?
T
ous les jours, ils en prennent un peu plus pour leur grade. Arrestations, inculpations, révélations dans la presse… Rien ne leur est épargné, pas même les critiques visantleurscompétencesprofessionnelles. Depuis les années 2007-2008, les militaires turcs sont tombés de leur piédestal. Aujourd’hui, deux cent cinquante officiers, dont quarante et un généraux d’active, croupissent derrière les barreaux en attendant d’être jugés pour complot contre le gouvernement. On a d’abord découvert l’existence d’Ergenekon, un gang dans lequel une partie de l’establishment militaire frayait avec des notables laïcs, des hommes de main et des mafieux. On a ensuite éventé toute une série de machinations qui visaient à déstabiliser le pays afin de créer les conditions propices à un coup d’État. On a enfin découvert les sinistres activités du Jitem, une unité de gendarmerie spécialisée dans l’assassinat de militants prokurdes. Pas de quoi parader… Et pourtant, il n’y a pas si longtemps, l’armée était l’institution la plus respectée du pays. Qu’elle donne publiquement son avis sur tous les sujets de politique intérieure, ou même étrangère, n’étonnait (presque) personne. C’était une si vieille habitude… Auteure de quatre coups d’État (1960, 1971, 1980 et 1997) et d’une Constitution lui permettant de régenter les gouvernements civils, elle inspirait la crainte. Mais son rôle de garante de l’unité et de la laïcité de la République lui valait aussi une certaine reconnaissance. Bref, tout se passait comme si le pays ne s’estimait pas assez mûr pour
s’offrir le luxe d’une vie démocratique à part entière. Le décor change en 2002 avec la victoire du Parti de la justice et du développement (AKP)auxlégislatives.Finilesfragilescoalitions!L’AKPgouverneseuletseheurteaussitôt au camp laïc, qui l’accuse d’islamisme rampantetnelésinesuraucunmoyenpour l’abattre. Mais l’AKP tient bon. Il s’enracine dansunélectoratpieuxetconservateurqui fait des affaires et s’embourgeoise d’autant plusvitequel’économieestenpleinboom. Les crises politiques orchestrées par l’étatmajor tournent à l’avantage d’un parti qui tient sa légitimité des urnes et se renforce à chaque scrutin: 34,2 % aux législatives de 2002, 46,5 % à celles de 2007 et 49,9 % à celles de juin dernier. FLOP. Parallèlement, dans le Sud-Est, la recrudescence de la guérilla indépendantiste kurde démontre que l’armée est impuissante à venir militairement à bout d’un problème dont elle bloque aussi l’issue politique. Pis, la hiérarchie est plusieurs fois accusée d’exposer la vie de jeunes recrues en les envoyant dans des zones à risques. Discréditée et exaspérée de l’être, l’armée joue son va-tout le 29 juillet. L’avantveille de la réunion du Conseil militaire suprême (YAS) – l’institution qui se réunit chaque année pour décider de la promotion des cadres –, le chef d’état-major et les patrons de l’armée de terre, de l’aviation et de la marine démissionnent en bloc. Pour exprimer leur indignation face au traitement, à leurs yeux injuste, que l’on réserve à leurs camarades inculpés – mais pas encore jugés et condamnés.
BIG BUSINESS EN UNIFORME GRÂCE À OYAK, premier fonds de pension privé du pays, les forces armées disposent d’un véritable pactole. Fondé en 1961, ce gigantesque conglomérat industriel et financier emploie 28 500 personnes dans 60 sociétés (sidérurgie, ciment, énergie, banque, assurance, etc.), pour un chiffre d’affaires de 14,763 milliards de dollars en 2010 (10,372 milliards d’euros, + 19,8 % par rapport à 2009). Fleuron du groupe, le joint-venture Oyak-Renault, premier exportateur de voitures du pays l’an dernier, peut J.D. produire jusqu’à 360 000 véhicules par an. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Peu avant, le président, Abdullah Gül – issu des rangs de l’AKP –, avait averti qu’il ne signerait « aucun décret les yeux fermés ». Autrement dit, qu’il s’opposerait àl’avancementdesprésuméscomploteurs. Mais cette démission collective, censée provoquer un électrochoc dans le pays, fait un flop. Le gouvernement réagit avec calme, nomme chef d’état-major le commandant de la gendarmerie, Necdet Özel, qui ne s’était pas joint au mouvement, et maintient la réunion du YAS à la date prévue, le 1er août. Dans les journaux et à la télévision, l’image passe en boucle. Pour la première fois, l’institution est présidée par Recep Tayyip Erdogan, seul. Tout un symbole : jusqu’ici, le Premier ministre siégeait à côté du chef d’état-major, coincé dans une forêt d’épaulettes et de képis… Et puis, grâce aux procédures judiciaires en cours, le mouvement esquissé lors de la session 2010 du YAS se poursuit. Le gouvernement était alors parvenu à bloquer la nomination du général Igsiz à la tête de l’armée de terre – celui-ci a depuis été arrêté. Cette année, ses pairs qui auraient dû prendre la tête des armées de terre, de JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie Ý RECEP TAYYIP ERDOGAN ET L’ÉTAT-MAJOR, au Mausolée de Mustafa Kemal Atatürk, le 1er août à Ankara.
l’air et de la marine ont été contraints de passer leur tour. On les soupçonne eux aussi d’avoir trempé dans les projets de putsch. Avec un dixième des effectifs sur la sellette, les rangs sont tellement clairsemés qu’il ne s’est trouvé qu’un lieutenantgénéral pour hériter du commandement de l’aviation ! ENTURBANNÉES. La nouvelle structure n’est pourtant pas, on s’en doute, favorable à l’AKP, à l’instar du général Kivrikoglu, désormais chef de l’armée de terre, qui s’était distingué en refusant d’accueillir Abdullah Gül et son épouse voilée lors d’une visite en République turque de Chypre du Nord. Simplement, certains des récents promus pourraient se montrer moins hostiles. Pour symbolique qu’il soit, ce nouveau point marqué par l’AKP n’en est pas moins décisif.Leprocessusdedémilitarisationdu système politique progresse. Lentement mais sûrement. Qu’on en juge. En 2002, par exemple, l’état-major avait sommé le gouvernement d’exclure les personnels « non laïcs » de la fonction publique. En JEUNE AFRIQUE
présidence. Abdullah Gül s’y risque à sa place. Le 27 avril, l’armée publie un communiqué sur son site internet menaçant d’intervenir pour « protéger la République ». L’épreuve de force tourne au profit de l’AKP, qui provoque et remporte des législatives anticipées, puis fait adopter par référendum le principe de l’élection du président au suffrage universel direct. En 2008, le parti évite de justesse d’être dissous pour activités antilaïques. Alors que l’affaire Ergenekon bat son plein, le généralBasbug,nouveauchefd’état-major, multiplie conférences de presse et menaces. Rien n’y fait. Ultime camouflet, l’une des dispositions du référendum constitutionnel de septembre 2010 prévoit que les militaires pourront être jugés par des tribunaux civils en temps de paix. Malgré cette incontestable érosion, l’armée conserve de solides réseaux et deux instruments de contrôle. D’abord, le Conseil de sécurité nationale (MGK), devenu consultatif mais où les militaires continuent de siéger aux côtés du gouvernement. Ensuite, et surtout, le secrétariat du MGK, qui emploie 1 200 personnes et où se détermine la politique de l’armée. Aucun chef de gouvernement, ministre ou journaliste n’a jamais pu y pénétrer. Restent, enfin, les réunions hebdomadai2003, il s’était opposé frontalement aux res du chef d’état-major avec le Premier réformes proeuropéennes et, de concert ministre et une puissance financière avec le président de la République (un intacte. L’armée garde un contrôle dislaïc, à l’époque), boycottait les réceptions auxquelles participaient les épouses enturcrétionnaire sur Oyak, son gigantesque bannées des chefs de l’AKP. fonds de pension, et sur le budget de la Un pic avait été atteint en mai 2006, défense, dont une partie commence à être lorsqu’un extrémiste (prétendument évaluée, avec d’infinies précautions, par islamiste, mais qui était en réalité un une nouvelle Cour des comptes. homme de main du gang Ergenekon) Réclamée par l’Union européenne, la avait fait irruption au Conseil d’État, normalisation de son rôle danslavie publibastion laïc par excellence, et abattu un que est loin d’être achevée. Mais, si ce processus semble bien engagé, c’est aujourd’hui l’absence Deux cent cinquante officiers, criante d’une opposition dont quarante et un généraux politique crédible et efficace d’active, en prison pour complot. qui devient préoccupante. Sanscontre-pouvoirshormis juge. Des manifestations géantes avaient celui de l’armée, l’AKP, qui a infiltré un été organisées « pour la défense de la certain nombre d’institutions (université, laïcité ». Les hauts gradés et l’establishpolice, justice, etc.), donne de plus en plus ment kémaliste avaient pris la tête des libre cours à sa tentation hégémonique et cortèges, tandis que le chef d’état-major à un affairisme effréné. Pas sûr, dans ces appelait les citoyens à rester « mobilisés conditions, que la démocratisation dont en permanence ». il promet l’avènement depuis près de neuf Même scénario, au printemps 2007, ans soit au bout du chemin. ● pour empêcher Erdogan de briguer la JOSÉPHINE DEDET N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Ý POLICIERS EN ARMES KACHGAR, LE 2 AOÛT. Les affrontements ethniques dans le Xinjiang ont fait une quarantaine de morts depuis la mi-juillet. CHINE
Pékin sans pitié
Tibet, Mongolie-Intérieure, Xinjiang… Aux mouvements de contestation violente qui agitent périodiquement les marches de la République populaire, ses dirigeants opposent une implacable fermeté. Et la liste des victimes s’allonge…
L
a tension est palpable à Kachgar, toujours sous contrôle des forces de l’ordre chinoises intervenues pour rétablir le calme au lendemain de la série d’attentats qui a endeuillé la province du Xinjiang, fin juillet. Bilan : plus de quarante victimes au total, depuis les premiers incidents de Hotan, le 18 juillet. Selon les militants des droits de l’homme, c’est la police qui a tout déclenché en ouvrant le feu sur une manifestation pacifiste. À l’inverse, les autorités mettent en cause une attaque terroriste contre un commissariat, œuvre de musulmans séparatistes entraînés au Pakistan. Quoi qu’il en soit, il s’agit de la plus importante vague d’affrontements ethniques entre la minorité ouïgoure et les Hans, majoritaires, depuis les émeutes de 2009 (deux cents morts). Presque une routine pour Pékin, habitué à mater les débordements de ses minorités… Le 16 mars, trois ans exactement après les émeutes antichinoises de Lhassa (deux cents morts), un jeune moine du monastère de Kirti, dans la préfecture autonome tibétaine d’Aba, au Sichuan, s’était immolé par le feu, provoquant de violents combats N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
2010 », le département d’État américain s’est borné à condamner les « limitations à la liberté d’expression » en Chine et les « graves répressions » au Tibet et dans la région du Xinjiang. Pékin a répliqué en dénonçant les « atteintes aux droits des citoyens aux États-Unis », pays « gangrené par la criminalité et la discrimination raciale et sexuelle ». Une passe d’armes désormais habituelle entre les deux grandes puissances.
entre la population tibétaine et les policiers chinois. Le monastère, aujourd’hui coupé du monde par un cordon policier, TOLÉRANCE ZÉRO. Pourtant, depuis est interdit aux journalistes. le déclenchement des mouvements En Mongolie-Intérieure, le 11 mai, c’est démocratiques dans le monde arabe, la mort d’un berger mongol qui participait à une manifestation d’éleveurs contre les les autorités sont sur le qui-vive. Car, si toutes-puissantes compagnies minières les cinquante-cinq minorités que compte qui a mis le feu aux poudres. De quoi attile pays ne représentent que 8 % de la ser le nationalisme mongol et inquiéter population totale, leurs territoires sont les autorités, bien conscientes que, dans riches et jouxtent toutes les frontières du l’hypothèse où les manifestants parvienpays, ce qui évidemment leur confère une draient à paralyser les mines et les voies d’acheminement Terrorisme, séparatisme, du charbon, l’impact écoextrémisme : les trois « forces nomique de cette grogne sociale serait décuplé. Mais diaboliques » qui minent la région. jusqu’ici, en dépit du violent sentiment d’injustice éprouvé par les grande importance stratégique. Tolérance zéro est désormais le maître mot dans Mongols, jamais les troubles n’ont pris cette Chine qui a célébré cette année avec l’ampleur des événements du Tibet ou faste le 90e anniversaire de la fondation du Xinjiang. Poursapart,lacommunautéinternatiode son Parti communiste. nale reste impuissante. Périodiquement, Toute contestation doit être étouffée elle dénonce les écarts autoritaires de dans l’œuf. Notamment dans le Xinjiang, Pékin… et c’est à peu près tout. Dans son zone tampon entre l’Asie centrale et le rapport rendu public le 8 avril consacré monde chinois. Très riche en matières à « la pratique des droits de l’homme en premières (or, uranium, gaz, charbon, JEUNE AFRIQUE
REUTERS
À
Europe, Amériques, Asie pétrole), cette région autonome abrite en outre le plus grand centre de recherche nucléaire du pays. Depuis quinze ans, sous prétexte de favoriser le développement, les autorités y ont massivement encouragé l’immigration chinoise han, marginalisant ainsi les Ouïgours musulmans et turcophones, qui ne représentent plus que 45 % de la population. La liste des doléances est longue: interdiction de l’enseignement de la langue ouïgoure, inégalité des chances, impossibilité de devenir fonctionnaire sans renoncer à l’islam, restrictions de l’accès à l’eau potable… BOUC ÉMISSAIRE. Selon l’agence
chinoise de lutte contre le terrorisme, qui organise régulièrement des exercices conjoints entre les armées chinoise, tadjik et kirghize, il faut éradiquer les « trois forces diaboliques » qui minent la région. À savoir : « le terrorisme, le séparatisme et l’extrémisme ». Car si les revendications ouïgoures sont avant tout socioéconomiques, Pékin préfère y voir la signature de la dissidente Rebiya Kadeer (64 ans), aujourd’hui exilée aux États-Unis et accusée de tous les maux. Un bouc émissaire commode pour le gouvernement, qui brandit le spectre d’un complot séparatiste ourdi depuis l’étranger (notamment le Pakistan) par des fondamentalistes musulmans nostalgiques d’une République islamique du Turkestan oriental. Au lendemain des attentats du 11 Septembre, l’inscription par les États-Unis du Mouvement islamique du Turkestan oriental (Mito) sur la liste noire des organisations terroristes avait en effet permis de stigmatiser la dissidence ouïgoure, soupçonnée de liens avec le terrorisme et Al-Qaïda, et de justifier aux yeux de l’opinion internationale une répression systématique et musclée. D’autant que, sans l’attrait du bouddhismeetl’imaged’undalaï-lamasymbole de paix, le monde occidental a bien du mal à s’émouvoir du sort de ces musulmans, bien moins charismatiques que le peuple tibétain ou les éleveurs mongols. Pékin a donc le champ libre et ne tolérera aucune turbulence. Le 6 août, Meng Jianzhu, le ministre de la Sécurité publique, s’est montré sans ambiguïté : « Nous n’aurons ni pitié ni tolérance envers ces criminels. Nous extirperons la violence à sa racine et par tous les moyens. » ● JULIETTE MORILLOT JEUNE AFRIQUE
HUMEUR
Opiniions & édito oriiauxx Fouad Laroui
Saupoudrons les Marocains!
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L EXISTE AUX PAYS-BAS un journal (du genre « presse de caniveau ») dont les Marocains constituent la seule raison d’être: c’est le Telegraaf. Il ne se passe pas de jour sans que des pseudorévélations s’étalent en première page de ce torchon : les Marocains veulent s’emparer du pays… Le Maroc espionne les Pays-Bas… La burqa est l’arme préférée des criminels marocains…
Quand tous les journaux du pays se contentent de rapporter des faits ou d’exprimer les opinions de leurs éditorialistes, le Telegraaf, lui, reproduit verbatim les élucubrations d’un Geert Wilders, ce politicien d’extrême droite qui a bâti toute sa carrière sur l’islamophobie et la marocanophobie. Or, c’est justement là que le bât blesse. Pendant la dernière guerre, ce
plupart de ses abonnés, dans les banlieues cossues ou les villages paisibles, ne voient jamais un Marocain. À cause duTelegraaf, un stéréotype s’est installé, du Marocain violent, voleur, fanatique religieux. Bref, inassimilable. Le fait que les Marocains, dans leur immense majorité, se lèvent tôt pour aller au travail et reviennent le soir dans leur famille, qu’ils n’ont d’autre ambition qu’une vie tranquille et une bonne éducation pour leurs enfants, ce fait-là n’est jamais rapporté par le Telegraaf. Cela dit, quelque chose commence à perturber la propagande de ces imposteurs. Il y a quelques semaines, l’équipe nationale des Pays-Bas jouait un match amical contre le Brésil. Or, dans cette équipe, deux joueurs d’origine marocaine se sont de nouveau distingués : Afellay, le talentueux attaquant de Barcelone, et Boulahrouz, surnommé affectueusement « le cannibale » par ses coéquipiers tant il met du cœur à défendre les couleurs de son pays d’adoption. Les Néerlandais qui voient ces deux-là « mouiller le maillot » deviennent en quelque sorte immunes à la propagande du Telegraaf et des racistes en général. Ne serait-ce que pour cela, ce n’est pas une mauvaise chose qu’Afellay et Boulahrouz aient choisi de défendre le maillot orange plutôt que le maillot vert. Saupoudrons les Marocains talentueux entre l’Europe et le Maroc : c’est la meilleure arme contre le racisme et la bêtise. ●
La burqa ? C’est l’arme préférée des criminels, jure le Telegraaf. même Telegraaf avait honteusement collaboré avec l’occupant allemand. Quand c’était le Juif qui était le bouc émissaire de l’Europe, quand on le blâmait pour tout ce qui allait mal, quand on le déportait, le Telegraaf paradait avec les nazis. Aujourd’hui, le bouc émissaire, c’est le Marocain. En attendant la déportation ? La déontologie, ce drôle de canard ne sait pas ce que c’est. Si un Marocain réclame un droit de réponse, il ne reçoit… aucune réponse. Hélas, le Telegraaf est le journal le plus diffusé dans le pays. Ce qui signifie d’ailleurs que la
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PARCOURS | D’ici et d’ailleurs
LE STYLISTE MAROCAIN envisage désormais de partir à la conquête de Paris.
Hisham Oumlil Le maître des costards de stars Installé à New York, ce natif de Casablanca officie dans le rôle de tailleur à temps complet pour le gotha américain.
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L A LE REGARD BRUN ÉLECTRIQUE, un corps taillé en un V parfait et une tête-sculpture en ovale idéal. N’était sa carrure d’athlète, Hisham Oumlil aurait tout d’un Hedi Slimane bis. Les deux hommes ont à peu près le même âge (38 et 43 ans), un pied au Maghreb (Maroc pour l’un,Tunisie pour l’autre), une vision de la mode assez proche – des vêtements qui subliment, près du corps – et une clientèle aussi huppée que cosmopolite. La comparaison s’arrête là. Contrairement à l’homme allumette, ex-gourou du slim chez Dior et Yves Saint Laurent, Hisham Oumlil cavale en solo loin des grandes marques, mais avec un talent comparable. En témoigne la liste de ses clients (lui récuse le mot et préfère dire « mes hommes ») : des banquiers, des diplomates et des marchands d’art. Le tableau de
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chasse ne cesse de s’allonger. On y trouve André Balazs, hôtelier en vogue, etAndrew Malloy, héritier des magasins Bergdorf Goodman. Ou encore Jorge Nemr, star du barreau brésilien. À l’occasion, Oumlil donne quelques coups de ciseaux pour les acteurs Jon Hamm (Mad Men) et Ed Westwick (Gossip Girl). Dernièrement, c’est Oliver Stone qui a eu droit à son triple essayage. « Il m’a demandé si je pouvais faire aussi bien que Dior… » Résultat? « Il était très satisfait. » Dans ses bureaux de Manhattan, entre Chelsea et Madison Square, Oumlil vit tel un poisson dans l’eau. Le salon d’essayage (rangées de costumes, large table et miroirs en veux-tu, en voilà) donne sur son salon, à lui. Décoration ultradesign et piles de livres – on y trouve
une biographie du couturier Ralph Rucci et une monographie du photographe Eugène Atget. Oumlil aurait donc tout de l’intellectuel au sens manuel, et inversement. Car, loin de coller à l’image du tailleur œuvrant sur commande, il ne travaille qu’à l’instinct. «Avant de prendre des mesures, je discute. J’en apprends plus sur la personne qui se trouve en face de moi. » Récemment, un client venu se faire tailler un costumeTom Ford est reparti comblé avec un autre, signé Oumlil. « J’ai rallumé en lui quelque chose qui était éteint. » Parfaite synthèse entre un psychanalyste branché et un physionomiste de haute voltige? Mehdi Qotbi, le peintre marocain, confirme : « C’est un perfectionniste. Ses vêtements ressemblent à ceux qui les portent. » Né à Casablanca en 1972, débarqué bac en poche à San Francisco à l’âge de 21 ans, Oumlil s’est colleté avec la réalité du métier en apprenant sur le tas. Jusqu’à devenir directeur du sur-mesure dans la maison de l’Italien Loro Piana, en 2003. JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie
Régulièrement présent à la Fashion Week de NewYork – il y sera en septembre –, l’homme, qui compte une dizaine de collections à son actif, lorgne désormais du côté de Paris, « un passage obligé pour acquérir une notoriété ». Et le Maroc? Entre les deux, presque vingt ans se sont écoulés. Oumlil y revient souvent. Garde, misouvenir mi-totem, une photo de son père en complet gris sur son bureau de Manhattan. « Ses costumes passaient tous chez le tailleur. Ça lui donnait du charisme et de la dignité.Autant de qualités qui me poussent à continuer dans cette voie: révéler ce que les hommes ont de plus beau. » ● ALEXANDRE AUBLANC, envoyé spécial Photo : LINA PALLOTA JEUNE AFRIQUE
VENEZUELA
Ce malade qui les gouverne Atteint d’un cancer, Hugo Chávez s’accroche au pouvoir et entend même briguer un troisième mandat présidentiel en 2012 !
HO NEW/REUTERS
Une trajectoire de météore couronnée deux ans plus tard par le lancement de sa marque, Oumlil, pour laquelle il s’est associé avec le tailleur de légende Rocco Ciccarelli. Rapidement, la presse s’est intéressée à ce profil atypique – un trentenaire marocain, tailleur et styliste à la fois. La reconnaissance des pairs a suivi. En 2008, le livre American Beauty le classe parmi les plus grands créateurs américains depuis 1930. Il dit: « C’était un honneur. » Ajoute aussitôt : « J’étais surpris. » Se rappelle en souriant son enfance et les mercredis passés dans la médina de Casa pour échanger des vêtements venus d’Europe. La mode, Oumlil en parle comme d’un aimant, explique y avoir songé dès l’âge de 11 ans, après que ses parents lui ont offert un complet en sirsacas (une étoffe de coton indien) et des sandales. « C’était horrible. J’ai exigé qu’on les échange contre un veston et des bottines. » Son style? Des vêtements souples, comme une seconde peau. Mélange de classique et de moderne taillé à coups de faux tons, gris bleu ou blanc cassé. Une touche qui n’est pas sans rappeler la période American Gigolo d’Armani, l’arrogance en moins. « La mode doit être un moyen pour être libre et respecté plutôt que craint et redouté. Il s’agit de révéler qui l’on est, pas d’écraser les autres. » Formé à l’américaine, Oumlil revendique néanmoins l’influence des Européens : Lanvin pour « sa ligne parfaite » et Balenciaga pour la structure de ses créations.
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a popularité d’Hugo Chávez ne faiblit pas – 50 % des Vénézuéliens le soutiennent –, mais sa santé ne cesse de se dégrader. Atteint d’un cancer, le chef de l’État est rentré à l’impromptu à Caracas, le 23 juillet, après une semaine de chimiothérapie à La Havane. Il en a profité pour annoncer qu’il briguerait un troisième mandat en 2012. On se souvient que, le 5 juin, il avait été contraint d’être hospitalisé d’urgence à Cuba, où il avait été opéré d’un abcès pelvien, puis d’une tumeur cancéreuse. Un mois durant, les Vénézuéliens étaient restés sans nouvelles de lui. Le 5 juillet, Chávezavaitfiniparrentreraupays,fatigué et amaigri. Pour tordre le cou aux rumeurs de vacance à la tête de l’État et aux spéculations sur la nature de son mal – cancer du côlon, selon certains, ce qu’il nie. L’hyperprésident s’était alors résolu à déléguer certains de ses pouvoirs au viceprésident, Elías Jaua, et à Jorge Giordani, son ministre des Finances, avant de regagner Cuba. Mais pas à lâcher les rênes. Sa dernière trouvaille? Apposer sa « signature électronique » sur les décrets promulgués depuis La Havane. Or la Constitution dispose que, lorsque le président quitte le pays, le Parlement doit décréter son absence temporaire (si elle est inférieure à quatre-vingt-dix jours) et le vice-président assurer la direction de l’exécutif. Mais Chávez n’en a cure :
LE NOUVEAU
LOOK D’EL
il ne veut en aucun cas revivre l’expérience du coup d’État d’avril 2002. Tandis qu’il était retenu par des putschistes, Pedro Carmona, le chef de la confédération patronale Fedecamaras, s’était en effet autoproclamé président en invoquant une « vacance du pouvoir »… COMANDANTE, ici, au palais de Miraflores, à Caracas, le 1er août.
CHIMIOTHÉRAPIE. S’il s’est hâté de
regagner Caracas, le 23 juillet, c’est par crainte que le vent tourne, à nouveau. Arborant un crâne rasé – conséquence de son traitement –, il a donc confirmé sa candidature à la présidentielle, avant de procéder, le 1er août, à un remaniement ministériel. Mais Hugo Chávez est-il vraiment en état de gouverner ? Le 6 août, il a repris le chemin de La Havane pour une deuxième phase de soins. Pour l’instant, aucune personnalité n’émerge des rangs du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) pour assurer la relève et maintenir l’unité de la formation. Forte de trois dirigeants régionaux à vocation nationale, l’opposition compte bien l’emporter dans les urnes si Chávez venait à disparaître du paysage politique. Mais Adán, le frère aîné du président, n’a pas dit son dernier mot : pour conserver le pouvoir, il n’exclut pas l’hypothèse de la lutte armée. ● MARIE VILLACÈQUE N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
REUTERS
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BELGIQUE
Espoir et repos forcé Des pourparlers ont été engagés entre huit partis – à l’exclusion des extrémistes flamands du N-VA – en vue de former un gouvernement. Enfin ! Après quinze jours de vacances sans doute méritées, les négociateurs sont désormais à pied d’œuvre.
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n décret royal qui envoie tout le monde en vacances ? On résiste à la tentation d’en faire une histoire belge. En l’occurrence, c’est même une initiative très raisonnable qu’a prise, il y a une semaine, le roi Albert II en indiquant dans un communiqué officiel qu’il « constate la fatigue des négociateurs et de leurs collaborateurs » et qu’il propose donc « une trêve jusqu’à la mi-août ». Fatigué, on le serait à moins : cela fait maintenant plus d’une année que les partis politiques belges essaient de trouver une solution au casse-tête né des élections législatives du 13 juin… 2010 – ce qui constitue un record mondial pour la formation d’un gouvernement. Le communiqué royal ne laisse cependant pas d’étonner puisqu’il intervient à un moment crucial : on voit enfin apparaître une lueur d’espoir dans ce feuilleton interminable qui a amené plus d’un Belge à désespérer de l’avenir de son pays. Prenant acte du fait qu’il est quasi impossible de former une coalition au niveau fédéral avec Bert De Wever, le leader du parti flamand N-VA (Alliance néoflamande) qui a gagné les élections du côté néerlandophone, Elio Di Rupo, le chef N o 2640-41 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
du Parti socialiste (PS, francophone), a réussi à convaincre huit partis de négocier en vue de former un gouvernement sans le N-VA. Un pari risqué mais jouable. QUADRATURE DU CERCLE. Gouverner
sans le grand vainqueur des élections peut sembler contraire à l’esprit de la démocratie, mais on voit mal comment faire autrement : le programme du N-VA, si on le prend à la lettre, revient à faire éclater la Belgique. Comment trouver des partenaires pour une tâche qui s’apparente plus à un enterrement qu’à une volonté de gérer ensemble le pays ? Un compromis proposé malgré tout par Di Rupo a été rejeté, début juillet, par le N-VA et les chrétiens-démocrates du CD&V : il faisait, selon eux, la part belle aux francophones. Ce qui est nouveau et permettrait enfin de sortir de l’impasse, c’est que ce même CD&V semble maintenant prêt à entrer dans une grande coalition qui exclurait le N-VA. Le chef du CD&V, Wouter Beke, a toutefois exigé que certaines mesures préconisées par Di Rupo et qui sont à ses yeux trop favorables aux francophones soient tout de suite retirées de la table des négociations.
LE ROI ALBERT II ET LA REINE FABIOLA, à Bruxelles, le 21 juillet, jour de la fête nationale.
Le chef du PS a quant à lui indiqué que les tractations commenceraient par le dossier le plus épineux, celui de la scission de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde. On comprend que les négociateurs aient besoin de repos avant de s’attaquer à ce qui ressemble à la quadrature d’un cercle bilingue : les dix-neuf communes de Bruxelles forment, avec trente-cinq communes flamandes environnantes, l’arrondissement judiciaire (et la circonscription électorale) de Bruxelles-Hal-Vilvorde, ou BHV. Bruxelles, officiellement bilingue, est à la fois la capitale de la Belgique et de la Flandre, mais non celle de la Wallonie (dont la capitale est Namur). Elle est donc enchâssée dans ce BHV en dépit de toute logique. Mais comment extirper Bruxelles de BHV sans remettre en cause de très délicats équilibres budgétaires, démographiques et institutionnels ? Faudra-t-il établir un « couloir » entre elle et la Wallonie, après la scission ? Et qui paiera pour tout cela ? Au regard des marchandages ardus qui se profilent à l’horizon, il était peut-être nécessaire d’obliger chacun à reprendre son souffle, quitte à ne pas profiter de la dynamique créée par l’annonce sensationnelle d’une éventuelle coalition à huit sans le N-VA. La Belgique va-t-elle enfin sortir de l’ornière où elle s’est embourbée le 13 juin 2010 ? En tout cas, les négociateurs rentrent de vacances, bronzés et reposés… ● FOUAD LAROUI JEUNE AFRIQUE
Europe, Amériques, Asie
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ÉTATS-UNIS
Métis is beautiful!
Hier, ils passaient pour des traîtres. Ils sont aujourd’hui les hérauts d’une Amérique postraciale. Et leur nombre croît de manière spectaculaire. Surtout chez les jeunes.
est la minorité arc-en-ciel de l’Amérique. Dans un pays où franchir la color line a longtemps été presque impossible – un véritable tabou –, beaucoup n’hésitent plus désormais à afficher leur origine multiethnique. Avec un président à leur image, le nombre et la jeunesse pour eux, les métis ont le vent en poupe. Quelques chiffres. Aux États-Unis, un mariage sur sept unit aujourd’hui des conjoints de races différentes. Un record. Certes, les Américains ne sont encore que 9 millions – soit 2,9 % de la population – à se déclarer « multiraciaux », selon la terminologie en vigueur ici, mais ils croissent et se multiplient à vitesse grand V : + 32 % depuis 2000, selon les chiffres du dernier recensement (2010). Encoreplusremarquable,laprogression de cette minorité dans les États jusqu’ici les plus réfractaires, ceux du Deep South notamment. Dans le Mississippi, le nombre des mariages mixtes a littéralement explosé. La plupart unissent un Noir et un Blanc, alors que ce type d’union était illégal jusqu’en 1967. À Hawaii, État dont Barack Obama est originaire, les métis
IMAGE SOURCE/HEMIS.FR
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DANS UN CAR SCOLAIRE. Hérités d’un passé douloureux, les vieux repères raciaux se brouillent…
ambiguë. Logiquement, des superstars métisses ont émergé, comme Mariah Carey, Tiger Woods ou Soledad O’Brien, présentatrice vedette à la télévision. Avec naturellement, en point d’orgue, l’élection de Barack Obama, qui est de père kényan et de mère blanche américaine, même si lui-même se définit comme noir. STATISTIQUES. Comme le dit cette
enseignante de l’Université Stanford, « l’imaginaire national a radicalement changé ces dernières années. Autrefois perçus comme des traîtres, les métis sont désormais célébrés comme des hérauts. La solution du Mariah Carey, Tiger Woods ou problème racial aux ÉtatsSoledad O’Brien… C’est le temps Unis passe par eux ». En un mot comme en cent, « métis des superstars « multiraciales ». is beautiful » ! représentent 23,6 % de la population. Même si beaucoup reste à faire, les Et le pourcentage est à peine inférieur catégories statistiques elles-mêmes comen Californie. Une minilame de fond mencent à évoluer pour tenir compte du démographique. phénomène. Depuis 2000, il est enfin Les métis bénéficient en outre d’une possible pour un Américain de cocher visibilité accrue. Ils ont désormais leurs plusieurs cases lors du recensement. Par produits de beauté, leurs sites de renexemple: Noir et Asiatique. Ou bien: Blanc et Latino. Les candidats à l’entrée dans les contre et leurs « cercles de sociabilité » dans les universités. Bref, ils sont très à très chères et très sélectives universités la mode. Les publicités, les films et les américaines ont aussi, depuis l’an dernier, séries télé mettent systématiquement davantage de latitude pour s’identifier en scène des acteurs à l’origine ethnique ethniquement. L’enjeu n’est pas mince. JEUNE AFRIQUE
En raison des politiques de discrimination positive mises en place pour faciliter l’accès des minorités aux établissements universitaires, être d’origine multiethnique est un plus. Alors, pour un candidat, la tentation peut être grande d’invoquer une origine ethnique imaginaire. En tout cas très lointaine. Avec pour conséquence un risque d’éviction des candidats issus d’autres minorités, africaine-américaine en particulier, alors que ces dernières sont censées être les premières bénéficiaires des politiques d’affirmative action.Ce n’est évidemmentpasunhasardsiàl’Université Rice, au Texas, le nombre des candidats se présentant comme multiraciaux est passé l’an dernier de 8 à 564… Cette Amérique métisse a aussi ses détracteurs. Certains lui reprochent de diluer l’influence des minorités – notamment africaine-américaine – et d’empêcher tout rattrapage économique. « C’est moins au dépassement de la notion de race auquel nous assistons qu’à sa balkanisation, avec l’émergence d’une nouvelle tribu, celle des métis », commente un politologue. Il n’empêche: de plus en plus de jeunes Américains choisissent de s’identifier comme bon leur semble. Brouillant les repères raciaux hérités d’une histoire douloureuse, ils préparent en douceur l’Amérique postraciale de demain. Ou plutôt d’après-demain. ● JEAN-ÉRIC BOULIN, à New York N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Europe, Amériques, Asie Reportage
Dans la fabrique des élites
SCIENCES-PO
Depuis 1945, quelque quatre cents Africains ont obtenu leur diplôme du prestigieux Institut d’études politiques, à Paris. De Paul Biya à Alpha Condé, beaucoup ont par la suite brillamment réussi. Aujourd’hui, l’histoire continue. Autrement.
ANAÏS ANGELO, avec CLARISSE JUOMPAN-YAKAM
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de communication de Yaoundé, ce qui tendrait à accréditer la thèse selon laquelle seule une minoritéde privilégiés accèdent à Sciences-Po – même si on assiste depuis peu à l’arrivée d’étudiants d’origine plus modeste.
représentés) étudiant en deuxième année de master, « avec le verrouillage de nombreuses scènes politiques en Afrique et le rôle grandissant des organisations interna-
PRAGMATISME. Beaucoup évo-
quent de prestigieux précédents. Pas moins de cinq présidents africains y ont en effet fait leurs classes: du Tunisien Habib Bourguiba, diplômé en 1927 (l’établissement s’appelait à l’époque l’École libre des sciences politiques), au Tchadien Hissène Habré (1970), en passant par le Camerounais Paul Biya (1961) ou le Guinéen Alpha Condé (1963). Pourtant, à en croire Rodrigue Noundja Nkwegni, un autre Camerounais (ces derniers sont, avec les Sénégalais, les mieux
Pour les nouvelles générations, les filières politiques ont perdu de leur attrait. tionales, les carrières politiques ont perdu de leur attrait aux yeux des nouvelles générations ». Contrairement aux années 1960 et 1970, les raisons d’intégrer Sciences-Po sont moins idéologiques que pragmatiques. Les jeunes
HABIB BOURGUIBA diplômé en 1927
PAUL BIYA diplômé en 1961
ALPHA CONDÉ diplômé en 1963
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VINCENT FOURNIER/J.A.
L’IEP mène à tout…
VINCENT FOURNIER/J.A.
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eux fois, il a été contraint de repor ter notre rendez-vous. Et pour la même raison : emploi du temps surchargé. Le SénégaloGuinéen Abdourahmane Diallo, 35ans,chargédecommunicationau bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations unies à Haïti, ne compte pas son temps : cinquante heures de travail hebdomadaire, du lundi au samedi. Et parfois même le dimanche. Un peu plus que dans son ancien poste de chargé des questions politiques à la Mission des Nations unies pour le Liberia (Minul). Titulaire depuis 2006 d’un master affaires internationales, option conflits et sécurité, cet ancien journaliste est l’un des quatrecentsAfricainsqui,entre1960 et 2010, ont suivi les cours de l’Institut d’études politiques. Autrement dit, de Sciences-Po. Lorsqu’on les interroge sur leur première rencontre avec la vénérable « fabrique à élites » française fondée il y a presque un siècle et demi, mais pas aussi connue sur le continent que la Sorbonne, la plupart mentionnent la lecture d’essais politiques. C’est le cas du Camerounais Martial Ongono, promotion 2004, directeur associé d’Inter’ActivConsulting,uneagence
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HISSÈNE HABRÉ diplômé en 1970 JEUNE AFRIQUE
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BRUNO LEVY POUR J.A.
conseil d’administration de l’entreprise Cimencam, soutient qu’il existe une « griffe Sciences-Po » : « Toutes les disciplines enseignées visent à former le citoyen à l’action, à le préparer à prendre des responsabilités dans l’entreprise ou l’appareil d’État. Cela suppose une certaine façon de structurer sa pensée, puis de la restituer. » Même diagnostic pour Abdourahmane Diallo: « L’étudiant doit acquérir un esprit de synthèse qui lui permette, quel que soit le sujet, d’en extraire la quintessence et de le présenter en termes clairs et compréhensibles, en un laps de temps limité. Quand on négocie avec des entrepreneurs ou des diplomates, on n’a pas forcément une heure pour développer ses idées. »
Africains veulent acquérir une formation de premier plan, puis mettre leurs compétences au service du développement. Ils rêvent de finance, de banque, d’organisations internationales.Etprennentd’assaut les filières qui y conduisent. « La cause est entendue, confirme Brice Akanati, diplômé en 1993 et consultantdansplusieursfirmesafricaines. Mieux vaut miser sur un poste en entreprise ou aux Nations unies que dans un gouvernement. » L’établissement a été à la hauteur desattentesd’AbdourahmaneDiallo, qui l’a intégré après une licence et une première expérience dans le journalisme. Il reconnaît avoir d’abord été attiré par le caractère « professionnalisant » du cursus et par la qualité du corps enseignant. Celui-ci comprend des universitaires spécialistes des relations internationales, mais aussi des acteurs politiques.«Àl’université,ontombe presquetoujourssurdesenseignants qui n’ont jamais mis les pieds dans une institution internationale ou dans un ministère. À Sciences-Po, c’est l’inverse. Nous avons eu par JEUNE AFRIQUE
SIX AFRICAINS RUE SAINT-GUILLAUME, dans le jardin de Sciences-Po Paris. De g. à dr. : Joël Assoko Te-Lessia et Lagassane Ouattara (Côte d’Ivoire) ; Tahirou Gourouza (Niger) ; Gaëlle Nouss, Rodrigue Noundja Nkwegni et Hervé Lado (Cameroun).
exemple Hubert Védrine, l’ancien ministre des Affaires étrangères de François Mitterrand… » Diplômé de la promotion 1983 (la mêmequ’Ingrid Betancourt), Pierre Moukoko Mbonjo, ancien ministre camerounais et actuel président du
EUROPE-AFRIQUE. Ces exercices sont mis en place dès le collège universitaire de Sciences-Po, qui accueille les bacheliers et est résolument tourné vers l’international. Chacundesescampusetdesesprogrammes est consacré à une région du monde. Le campus de Nancy est par exemple consacré aux relations franco-allemandes et à l’Europe. Celui de Menton, au Moyen-Orient et à la Méditerranée. Sciences-Po souhaite accorder une plus grande place à l’Afrique subsaharienne dans ses offres de cours et ses programmes d’échanges. Un nouveau programme Europe-Afrique sera donc lancé à la prochaine rentrée, en septembre. Il réunira une quarantaine de ● ● ●
L’INSTITUT D’ÉTUDES POLITIQUES, MODE D’EMPLOI Comment y entre-t-on? Il existe à Sciences-Po Paris plusieurs procédures d’admission. Certains élèves bénéficient des conventions d’éducation prioritaire, d’autres intègrent l’école parce qu’ils ont obtenu la mention « très bien » au baccalauréat. Mais le must reste la procédure internationale, qui consiste à aller chercher hors de France les meilleurs étudiants. Qu’est-ce qu’on y apprend? Les trois premières années constituent le collège universitaire de Sciences-Po et débouchent sur un Bachelor. C’est un parcours généraliste, dont la troisième année se déroule obligatoirement hors de France, généralement dans une université partenaire. Après ce premier cycle, les étudiants suivent un programme de deux ans, plus spécialisé et plus professionnalisé, le master, dont les cours ne sont dispensés que dans un certain nombre d’écoles de l’institution: droit, journalisme, communication, affaires internationales, affaires publiques, etc. Sciences-Po propose enfin des filières doctorales en sciences sociales (économie, droit, sociologie, histoire contemporaine, sciences politiques). ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
BRUNO LEVY POUR J.A.
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RODRIGUE NOUNDJA NKWEGNI (deuxième année de master) : les Camerounais sont, avec les Sénégalais, les étudiants africains les mieux représentés au sein de l’établissement. ● ● ● bacheliers étrangers, dont vingt africains. L’objectif est de réunir des étudiants originaires de cette zone géographique (Afrique anglophone comprise)etceuxdurestedumonde pour un programme fondamental identique à celui desautres campus, mais avec des spécificités africaines (sansqu’onpuisseparlerdevéritable spécialisation). Sciences-Po espère ainsiséduiredenouveauxétudiants. Après une baisse des effectifs dans les années 1980 et 1990, on assiste de nouveau à une progression, qu’il s’agit donc de confirmer et d’amplifier. Sur un marché international de l’emploi très tendu, sortir de Sciences-Po peut ouvrir bien des portes. Nombre d’anciens élèves occupent aujourd’hui des postes stratégiques, et la cooptation
fonctionne. En règle générale, les diplômés de l’établissement s’insèrent professionnellement mieux que les autres. Bien que Martial Ongono affirme ne pas avoir cherché à bénéficier d’un réseau, il s’est vu proposer un poste d’attaché à la présidence de la
Le temps des carrières toutes tracées est révolu. Désormais, il faut se battre pour réussir. Républiqueavantmêmelafindeses études. Une offre qu’il a rejetée, privilégiant une première expérience professionnellehorsdu continent. Il est loin d’être le seul. Contrairement à leurs condisciples britanniques, brésiliensouespagnols,lesAfricains ne sont pas « attendus » chez eux à
Visa: l’éternel casse-tête Même pour les élèves d’établissements français de premier plan, décrocher le précieux sésame relève du parcours du combattant.
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es étudiants africains sont les plus « mobiles » au monde (le taux de mobilitéestde5,8 %ausudduSahara, contre 2,8 % dans le monde arabe, selon les chiffres 2009 de l’Unesco). Pourtant, obtenir un visa pour la France tient du parcours du combattant : allers-retours dans les consulats, interminables files d’attente devant Campus France, l’organisme chargé de gérer, depuis l’étranger, N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
l’établissement des étudiants en France… On parle désormais de « frontière institutionnelle » pour désigner ce transfert informel des contrôles aux frontières au sein même des administrations. Mais cela n’explique pas tout. Carlesétudiantsafricainssouffrentaussi d’un manque d’orientation scolaire et professionnelle dans leurs pays d’origine: les vraies politiques d’éducation y sont rares,
leur sortie de l’école: ils doivent se battre pour s’insérer professionnellement.PourBriceAkanati,letemps est révolu où des carrières toutes tracées attendaient les anciens de Sciences-Po : « Les premières générations après l’indépendance étaient bombardées directeurs de cabinetoureprésentantsàl’étranger. Àl’époque,onneréfléchissaitmême pas, les carrières étaient fulgurantes. Avec les plans d’ajustement structurel et l’alternance politique, ce schéma a été battu en brèche. On se ditaujourd’huiquemieuxvautavoir un point de chute à l’étranger. » Pourtant,60 %desétudiantsfinissentparretournerenAfrique.Cequi met à mal le mythe du diplômé qui préfère rester en France à l’issue de ses études. Pour Francis Vérillaud, vice-président et directeur des affaires internationales et des échanges, « le défi consiste à faire que l’offre de formation de Sciences-Po corresponde à leurs attentes, et qu’ils contribuent par la suite au développement du continent, qu’ils y retournent ou restentàl’étranger.Ilyaunemobilité etunefluiditédanslesdeuxsens.Les étudiants africains sont à la fois très volontaires, très demandeurs, mais aussi très maîtres de leur destin. Ils construisent un parcours qui, in fine, est bien en relation avec leur pays d’origine ». Au fond, un ancien de Sciences-Po qui a réussi, c’est un citoyen du monde capable de travailler dans n’importe quel pays et n’oublie pas de se mettre au service du sien. ●
les conseillers aussi. Et ne parlons même pas des falsifications de diplômes… Un divorce entre formations et débouchés qui grossit inéluctablement les rangs des diplômés-chômeurs. LanouvellepolitiquedeCampusFrance, quiobligelesétudiantsàfairedespré-choix d’orientation,tentedecomblercemanque. Et de crédibiliser leurs candidatures. Une chose est sûre : tant les Français que les Africains ont des efforts à faire. Les visas sont une des clés de la coopération. Mais ils induisent un risque de « fuite » des étudiants vers des destinations jugées par eux plus avantageuses, Canada ou ÉtatsUnis par exemple. ● A.A. JEUNE AFRIQUE
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POLITIQUE Une ligne rajeunie pour le parti présidentiel
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ÉCONOMIE BTP, mines, bois… Les indicateurs sont au vert REPORTAGE Dolisie en quête d’avenir RAP De Passi à Abd Al Malik, la french connection
Æ PARC NATIONAL de Conkouati-Douli.
CONGO
Poussée de croissance JEUNE AFRIQUE
ANTONIN BORGEAUD POUR J.A.
Cure de jouvence au sein de l’état-major politique, évolution du PIB deux fois supérieure à la moyenne régionale… Le pays est paré au décollage. Reste à embarquer l’ensemble de la population.
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en plein cœur de la capitale Congolaise...
Le Plus de Jeune Afrique
d LE PLUS
Prélude François Soudan
CONGO
Révolution culturelle
C’
EST DÉSORMAIS plus risque du privé ? Les Congolais jugeront qu’une apparence : après peut-être ces lignes excessives, mais il deux décennies de stafaut qu’ils le sachent : qu’ils cessent de gnation, le Congo décolle tout attendre du chef et de l’État provienfin. Taux de croissance flirtant avec dence, qu’ils sortent de leur mentalité les deux chiffres, nouveaux champs d’assistés, séquelle d’une époque révopétroliers offshore, bétonnage à tout-va, lue où la fonction publique recrutait à liaisons quotidiennes surbookées avec tour de bras, et ils participeront enfin à l’Europe, et jusqu’à ce bon vieux Parti la maîtrise de leur propre avenir. congolais du travail (PCT) qui vire du rouge sectaire au rose accueillant. Reste L’esprit d’initiative et de responsabique le risque de voir ce pays de 4 millité, la culture d’entreprise, l’existence lions d’habitants contracter le syndrome d’un vrai secteur privé qui ne vive pas de la croissance sans développement en parasite sur les marchés de l’État, – ce mal qui frappe nombre de pétroliers la volonté de prendre des risques pour émergents, avec PIB par tête en hausse réussir, tout cela manque encore terriet indice de développement humain blement au Congo – et ce clivage est bien (IDH) à la traîne – est loin d’être écarté. plus fondamental que celui qui sépare On peut être sur la voie de la semiceux qui ont accès à la table du pouvoir prospérité comme l’est le Congo et de ceux qui rêvent d’y parvenir. D’autant demeurer fragile parce que l’éducation, l’emQue les Congolais cessent de tout ploi, le social ne suivent attendre du chef et ils participeront pas. Comment faire ?
enfin à la maîtrise de leur avenir.
Il en va, bien sûr, de la responsabilité primordiale de l’État, du gouvernement, et du commandant de bord – Denis Sassou Nguesso en l’occurrence. C’est en effet une évidence que la gouvernance doit chaque jour être améliorée. Mais cette exigence est aussi, dans une certaine mesure, l’arbre qui cache la forêt. Car c’est à une véritable introspection culturelle que tous les Congolais doivent se livrer s’ils veulent véritablement entrer dans la modernité et la mondialisation. À quoi servent, par exemple, les dispositifs très avantageux d’aide à la création d’entreprise adoptés en Conseil des ministres il y a trois mois, s’il n’y a personne ou presque pour prendre le
JEUNE AFRIQUE
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de Jeune Afrique
que, conséquence perverse de sociétés traditionnelles égalitaristes et d’une éducation qui prône la méfiance aux enfants pour se protéger, les Congolais jalousent les réussites individuelles et ne s’aiment guère entre eux. Tant que l’on préférera tirer vers le bas ceux qui montent plutôt que de les appuyer afin qu’ils aident leurs compatriotes, plus tard, à sortir du trou ; tant que la vertu de solidarité, l’une des bases essentielles du développement, sera noyée sous les jérémiades de l’envie et de la défiance mutuelle, la croissance reposera sur des sables mouvants. Il faut que tout change. On appelle cela une révolution culturelle. ●
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Poussée é de croissance
POLITIQUE Des cadres et une ligne rajeunis p. 80 MACROÉCONOMIE Les indicateurs passent au vert p. 83 TRANSPORTS Enfin des routes
p. 85
INDUSTRIE Une stratégie plus proche du terrain p. 88 MINES Le pays mise gros, les opérateurs aussi
p. 90
ÉCONOMIE FORESTIÈRE Merci l’Asie p. 92 ITINÉRAIRE URBAIN Dolisie en quête d’avenir p. 95 TRIBUNE La langue au cœur de la crise de l’enseignement par Mukala Kadima-Nzuji p. 107 MUSIQUE De Passi à Abd Al Malik, la french connection du rap p. 108 MODE Au temps du « made in Congo » p. 110
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Le Plus de Jeune Afrique
POLITIQUE
Des cadres et une Lors de son 6e congrès extraordinaire, le Parti congolais du travail a ouvert ses portes aux autres composantes de la majorité présidentielle et entamé une cure de jouvence. L’objectif : reprendre des forces avant les législatives de 2012. TSHITENGE LUBABU M.K.,
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envoyé spécial
oulard rouge autour du cou. Insigne rouge sur la poitrine. Drapeaux rouges. Le tout frappé d’un marteau, d’une houe et de deux palmes, symboles du Parti congolais du travail (PCT, au pouvoir) : l’écarlate était de mise, du 21 au 25 juillet, dans la salle de conférences du Palais des congrès de Brazzaville, à l’occasion du sixième congrès extraordinaire du parti présidentiel. Rouges aussi les invités spéciaux : les représentants du Parti du travail de Corée du Nord, du Parti communiste cubain, du Parti communiste chinois, du Mouvement populaire de libération de l’Angola (MPLA), de la South West Africa People’s Organization (Swapo, parti namibien)… Aucun représentant d’un parti social-démocrate, comme si, à l’heure où il entame sa mue, le PCT était encore marqué par « la nostalgie des origines », pour reprendre l’expression de Charles Zacharie Bowao, ministre de la Défense. NOUVEAUX ARRIVANTS. Les 1350 délégués venus
des douze départements du pays et de l’étranger ont claironné à l’envi, peut-être pour la dernière fois, le fameux : « Tout pour le peuple, rien que pour le peuple », devise de l’ex-parti unique, qui aurait dû être abandonnée depuis le renoncement au marxisme-léninisme… en décembre 1990. De quoi effrayer les ralliés de fraîche date. Mais la consigne du chef de l’État, Denis Sassou Nguesso, reconduit à la présidence du comité central du parti, a été scrupuleusement respectée: ne pas aborder la question des symboles (armoiries, devise…). Donc, bien que ce sixième congrès ait été, selon sa dénomination officielle, celui de « l’ouverture », la formation conserve son nom, son logo et sa devise, vraisemblablement jusqu’au prochain congrès. Le choixdelasocial-démocratien’apas,luinonplus,été remis en question. Le changement est ailleurs. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Du 21 au 25 juillet, 1 350 DÉLÉGUÉS venus des douze départements du pays et de l’étranger se sont réunis à Brazzaville.
La volonté d’ouverture et de rajeunissement de ses cadres affichée par le PCT n’est plus un vœu pieu. Elle s’est concrétisée. Dans un paysage politique où les différences idéologiques ne sont pas évidentes, les alliés du Rassemblement de la majorité présidentielle (RMP) ont accepté de se fondre corps et biens dans son moule. Un geste essentiel pour l’ancien parti unique, qui ne s’est pas encore totalement remis de son déclin, amorcé au début des années 1990 : il compte seulement 47 députés sur 137 à l’Assemblée nationale, même s’il pèse près des deux tiers des sièges avec ses alliés. JEUNE AFRIQUE
Poussée de croissance
ligne rajeunis
de la revitalisation de l’ex-parti marxiste-léniniste. « Mais cela ne veut pas dire que tout sera rose, s’empresse-t-il d’ajouter. Il y aura certainement des problèmes de cohabitation entre les anciens du parti et les nouveaux arrivants, entre les anciens et leurs camarades qui reviennent. » La route sera longue pour atteindre la cohésion entre les différentes composantes. Charles Zacharie Bowao, refondateur et membre influent du PCT, estime que « la large ouverture veut dire ne plus rechercher l’avenir dans le passé ». Pour lui, il faut « des esprits ouverts, novateurs, qui comprennent les enjeux
La devise date encore de l’ère marxiste-léniniste, révolue depuis… 1990. de demain, une harmonie entre les générations, un brassage des âges et des expériences afin de débattre sans a priori. Il faut surtout faire le deuil du passé révolutionnaire ». D’où la question de savoir si, en fin de compte, des courants tout à fait officiels vont, ou non, se créer au sein de ce nouvel ensemble, à la place des chapelles officieuses, souvent à connotation tribale ou clanique. « C’est une évidence, une exigence, répond un membre de l’ancienne direction intérimaire. Sinon, ce sera encore le règne du centralisme démocratique. »
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RUPTURE EN DOUCEUR. L’ouverture aux femmes
De nouveaux arrivants ont été nommés au sein du comité central et dans d’autres instances du parti. Intronisés acteurs à part entière de la majorité présidentielle, ils peuvent permettre au PCT de devenir, comme il l’escompte, une grande machine électorale. Les nouvelles adhésions s’étendent à des associations, des intellectuels, des personnalités de la société civile. C’est le cas de l’égyptologue Théophile Obenga. Même des dissidents, comme Grégoire Lefouoba et Camille Bongou, sont revenus au bercail. Selon un responsable de l’ancienne direction intérimaire du PCT, tout va dans le sens JEUNE AFRIQUE
Repères Fondé en 1969 par Marien Ngouabi, le PCT, parti unique jusqu’en 1990, compte 47 députés sur 137 à l’Assemblée nationale. Son précédent congrès extraordinaire date d’octobre 2006.
s’est faite, mais elle reste largement insuffisante. Même si ces dames sont présentes au comité central et au bureau politique, elles ne constituent pas une vraie force. Ce qui conforte l’idée selon laquelle le monde politique congolais est encore profondément machiste. Ainsi, sur les douze membres du secrétariat permanent, on trouve seulement trois femmes. On attendait par ailleurs une entrée fracassante detrentenaires,quadragénairesetquinquagénaires. Ils sont bien là, même si la rupture avec le passé se fait en douceur. S’il y a certainement eu le souci de préparerunesortiehonorableauxcaciquesprésents depuis la fondation du PCT, force est de constater qu’au sein du secrétariat permanent seul Michel Ngakala, chargé de l’organisation de la vie du parti, a survécu à la rénovation. Il a en outre fallu beaucoup de subtilité pour caser les nouveaux venus sans avoir l’air de bousculer les « vieux », notamment en dégraissant le N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Le Plus de J.A. Congo comité central, dont la composition a été ramenée de plus de 500 à 471 membres. Mais pour atteindre ses objectifs électoraux, le PCT est condamné à sortir de la culture du statu quo et de la peur de trancher. Le nouveau secrétaire général, Pierre Ngolo (lire ci-dessous) –, qui, pour la première fois dans l’histoire du PCT, se voit attribuer un adjoint, André Massamba –, n’a d’autre choix que de mettre les bouchées doubles: le renouvellement d’une partie du Sénat est prévu en octobre prochain. « Plus tôt les changements se feront, plus nous aurons de chances de gagner les élections, commente l’un de ses camarades. Il faut commencer par la doctrine et la remise en question des anciens symboles. »
Le choix de la socialdémocratie n’a pas été remis en question.
OPPOSITION ATONE. En face, les opposants,
rassemblés au sein du Front des partis de l’opposition congolaise (FPOC), ne semblent pas encore en mesure de provoquer l’alternance.
Apparemment sans moyens, ils ont du mal à convaincre. À l’approche des législatives de 2012, où ils ont décidé de présenter un front uni, ils réclament sans cesse au gouvernement l’arrêt du recensement administratif, l’organisation d’une concertation en vue de créer les conditions d’un scrutin crédible, ainsi que la mise en place d’une commission indépendante et paritaire chargée d’organiser les élections. Ils se plaignent par ailleurs de n’avoir pas accès aux médias officiels pour faire entendre leurs voix. Autant de revendications qui n’ont pour l’heure obtenu aucun écho de la part du pouvoir. C’est dans ce contexte que le principal parti de l’opposition, l’Union panafricaine pour la démocratie sociale (Upads) – qui compte seulement 11 députés à l’Assemblée nationale –, montre une fois de plus au grand jour ses profondes divisions internes, après avoir annoncé la tenue prochaine d’un « congrès unitaire ». Ces dissensions ne manqueront pas de profiter au PCT, qui s’en réjouit déjà. ●
La surprise Pierre Ngolo Presque inconnu du grand public, le nouveau secrétaire général a bénéficié de son image de « conservateur ouvert », à même d’unifier et de dynamiser sa formation.
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ersonne n’attendait Pierre Ngolo à la tête du secrétariat permanent du Parti congolais du travail (PCT). Jusqu’au matin du 25 juillet, sur toutes les lèvres circulaient plusieurs noms de « poids lourds » susceptibles de prendre la succession d’Ambroise Édouard Noumazalaye, décédé en 2007, pour fermer, enfin, la parenthèse de l’intérim assuré par Isidore Mvouba, ministre d’État, ministre des Transports et coordonnateur du Pôle des infrastructures de base. On parlait surtout de membres du gouvernement, à commencer par Isidore Mvouba lui-même, mais aussi Firmin Ayessa (ministre d’État, directeur de cabinetduprésident),RodolpheAdada(ministre d’État, ministre du Développement industriel) ou Henri Djombo (ministre du Développement durable). HOMME DU SÉRAIL. Mais ces succes-
seurs potentiels ont fait les frais de ce qu’un ministre congolais qualifie de « nuit des longs couteaux et des morts politiques ». Le 25 juillet, tous les pronostics avaient été déjoués. Selon certains membres du parti, le nouveau secrétaire N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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CE DÉPUTÉ DE 57 ANS succède à Ambroise Édouard Noumazalaye.
général était le joker du président du comité central et chef de l’État, Denis Sassou Nguesso. À 57 ans, Pierre Ngolo, professeur de philosophie de formation et premier secrétaire de l’Assemblée nationale, n’est pas un nouveau venu, même s’il est un quasi-inconnu pour le militant lambda. Homme du sérail, il a fourbi ses premières armes dans les rangs de
l’Union de la jeunesse socialiste congolaise (UJSC), l’organisation des jeunes du PCT. « En réalité, c’était le choix du président depuis longtemps, explique un membre du gouvernement. Il a dû déceler en lui des qualités d’organisateur. Ngolo connaît bien le parti. Il n’était pas dans les polémiques qui l’ont secoué. Avec Ngolo, personne ne pourra dire que c’est le triomphe d’un camp sur l’autre. » Le nouveau secrétaire général est présenté comme « un conservateur ouvert, soucieux de préserver l’identité du parti, tout en comprenant la nécessité du changement », affirme un refondateur. Homme du compromis entre les « anciens » et les « modernes », Ngolo a du pain sur la planche. Ses camarades attendent de lui qu’il gagne en charisme, en punch, afin de mener à bien la redynamisation du PCT. Son principal challenge sera le passage de la logique postcommuniste à celle de la social-démocratie. Il devra aussi tenir compte de tous les partis qui se sont fondus dans le PCT et avaient leur propre mode de fonctionnement, très éloigné du centralisme démocratique. À un an des élections législatives, Pierre Ngolo réussira-t-il à transformer le PCT en « machine à gagner » ? Et à atteindre l’objectif fixé : voir 115 à 120 députés PCT siéger dans une Assemblée nationale qui en compte 137? Ses camarades le jugeront sur son aptitude à ne pas se contenter de gérer le statu quo. ● T.L.M.K. JEUNE AFRIQUE
Poussée de croissance MACROÉCONOMIE
Les indicateurs passent au vert
Une gestion des finances plus stricte et l’allègement, l’an dernier, de plus de la moitié de sa dette extérieure ont donné au pays les moyens de s’engager sur la voie d’un développement durable. La tendance se confirme pour 2011.
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JEUNE AFRIQUE
VINCENT FOURNIER/J.A.
Banque mondiale, a permis de réduire de moitié l’encours de la dette multilatérale. Quant au Club de Paris, il a annulé plus de 95 % de la créance du pays (qui s’élevait à 1 258 milliards de F CFA). Conséquence d’une gestion plus rigoureuse des finances publiques, le solde budgétaire s’est nettement amélioré. De 5,4 % en 2009, il est passé à 13,9 % du PIB en 2010 et devrait s’afficher à 16,5 % en 2011. Malgré ces bons résultats, les fragilités persistent. La croissance du pays et son solde budgétaire sont encore trop dépendants des activités pétrolières et minières, dont la part dans le PIB est de plus de 56 %. La prévision de croissance pour 2011 a ainsi été révisée de 9,1 % à 6,7 % par la Beac du seul fait de la baisse projetée de la production pétrolière (liée à des aléas techniques et au déclin de la production du champ de Moho Bilondo). En outre, le pays continue d’accuser un retard important DENIS SASSOU NGUESSO, le chef de l’État congolais, HYPERACTIVITÉ. Plusieurs facpar rapport aux Objectifs du président en exercice de la Cemac depuis janvier 2010. teurs expliquent ces bons résulmillénaire pour le développetats. À commencer par une production ment (OMD), notamment en matière ils ont contribué à hauteur de 2,9 % à la record de près de 115 millions de barils sanitaire, avec des niveaux élevés de croissance en 2010. Enfin, l’inflation a de pétrole en 2010. Premier poste d’exmortalité maternelle et infantile et un poursuivi sa décélération pour s’établir portation du pays, l’exploitation pétroaccès encore faible à l’électricité et à en moyenne annuelle à 1,2 % en 2010 lière assure 85 % des recettes de l’État. (contre 2,8 % en 2009), une évolution qui, l’eau potable. Le taux de chômage est Dans son sillage, la production de gaz selon la Beac, est « essena augmenté de 47 %. Les hydrocarbutiellement liée à la relative La croissance est encore trop res partagent donc désormais le rôle de amélioration du trafic ferdépendante des activités minières locomotive de l’économie avec le secteur roviaire et de la fourniture et pétrolières. du BTP. Dopé par les chantiers d’infrasen énergie ». tructures, ce dernier a enregistré un taux BOUFFÉE D’OXYGÈNE. Alors que sa important, surtout parmi les jeunes de croissance de 12,5 % en 2010 (contre dette extérieure représentait plus de la (35 % selon les dernières statistiques près de 10 % en 2009). Les autres secteurs affichent également moitié du PIB, l’atteinte par le Congo, fin de l’Office national de l’emploi et de la une hausse de leurs activités, notamjanvier 2010, du point d’achèvement de main-d’œuvre). La diversification de ment celui du bois (lire pp. 92-94) et des l’Initiative en faveur des pays pauvres très l’économie reste un enjeu crucial pour élever le niveau de vie de la population industries manufacturières (+ 11,5 % endettés (PPTE), assortie d’un allègeet installer une croissance durable. ● en 2009). Quant aux investissements ment de près de 100 milliards de F CFA MURIEL DEVEY publics et privés, en hausse de 4,9 %, (152,5 millions d’euros) octroyé par la
e rapport publié en juin par le Comité monétaire et financier national du Congo auprès de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac) souligne que l’effort engagé par le pays pour consolider la situation macroéconomique commence à porter ses fruits et est « susceptible d’impulser une croissance vigoureuse et durable qui pourrait faire reculer la pauvreté ». Avec un taux de croissance de 6,7 % en 2009, de 9,5 % en 2010 et, selon les projections, de 6,7 % en 2011, le Congo se démarque en effet de l’ensemble de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), dont le taux de croissance moyen s’est établi à 4,2 % en 2010 (contre 1,8 % en 2009) et est attendu à 5,2 % en 2011. Une belle performance également comparée à la croissance moyenne de l’Afrique subsaharienne (4,9 % en 2010 et 5,5 %, selon les prévisions, en 2011).
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ANTONIN BORGEAUD POUR J.A.
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TRANSPORTS
Enfin des routes Longtemps stockés dans des cartons, les projets de construction et de rénovation des réseaux de communication prennent enfin corps. Le pays retrouvera-t-il pour autant sa vocation de transit ?
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edevenir la voie de transit privilégiée entre ses voisins enclavés d’Afrique centrale et le golfe de Guinée… Ce vieux rêve devrait enfin se concrétiser avec les chantiers d’infrastructures en cours. Avec, d’abord, sur l’océan, des infrastructures portuaires de qualité. À cet égard, le parc à conteneurs du port en eau profonde de Pointe-Noire, porte d’entrée du pays par la mer, est en cours d’extension et de modernisation. En revanche, malgré des travaux de rénovation de son matériel roulant et de quelques-unes de ses voies, le Chemin de fer Congo-Océan (CFCO) ne sera pas performant de sitôt. Les 510 km de rail qui relient Brazzaville, la capitale, à Pointe-Noire, poumon économique du pays, sur l’Atlantique, sont pourtant la seule voie terrestre existante, pour le moment, entre les deux plus grandes villes du Congo. Faute d’avoir trouvé un acquéreur pour reprendre la concession, l’État s’est
JEUNE AFRIQUE
résolu, en attendant, à engager lui-même le programme de modernisation. Depuis 2007, il a investi quelque 40 milliards de F CFA (près de 61 millions d’euros) dans l’entreprise pour sa réhabilitation et son équipement. TRAIN D’ENFER. Actuellement, la ligne
LE CHEMIN DE FER CONGO-OCÉAN est actuellement la seule voie terrestre entre Brazzaville et Pointe-Noire.
compte tenu de la demande croissante des industriels et du développement des projets miniers, table sur un trafic de 1,65 million de tonnes de marchandises l’an prochain. Chemin de fer ou pas, le Congo a aussi besoin d’un bon réseau routier. L’accent a donc été mis sur ce dossier. « L’objectif est de relier le sud et le nord du pays par deux grands axes, l’un situé à l’est et l’autre à l’ouest, explique Michel Niama, conseiller du ministre du Plan et de l’Aménagement du territoire. De part et d’autre de ces axes, des transversales feront la jonction avec les pays voisins. C’est ce que prévoit le plan national des transports. » Les chantiers (bitumage et aménagement de routes) mobilisent divers acteurs.
n’est plus desservie que par un seul train, qui fait le trajet aller, puis retour. Aussi, le CFCO a privilégié le trafic de marchandises et réduit celui des passagers. Il a cependant commandé vingt-trois voitures de Faute de repreneur, l’État a voyageurs à la Corée du engagé lui-même la réhabilitation Sud, afin de rééquiper des infrastructures ferroviaires. deux rames, qui seront mises en exploitation À commencer par les entreprises de BTP, avant la fin de l’année. Par ailleurs, des de toutes nationalités, dont la China trains spéciaux vont être mis en circulaNational Machinery and Equipment tion : l’un entre Brazzaville et la région Import and Export Corporation (CMEC), du Pool, l’autre entre Pointe-Noire et le la China Road and Bridge Corporation Mayombe. Le CFCO prévoit d’assurer le transport (CRBC), ou encore, le brésilien Andrade de 1,3 million de voyageurs en 2012 et, Gutierrez. Ils impliquent également ● ● ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Le Plus de J.A. Congo ● ● ● des forestiers et des miniers, qui y participent en termes de financements mais aussi, pour certains, de conception et de réalisation, ces voies de communication étant indispensables à leurs activités. Formée des routes nationales 1 et 2, la dorsale est, la plus avancée, reliera Pointe-Noire à Ouesso (chef-lieu du département de la Sangha) via Brazzaville. Pour l’heure, seule la RN 2, qui va de la capitale à Ouesso, en passant par Oyo et Owando, est praticable. Ou presque. La réhabilitation, en cours, des tronçons dégradés, en particulier Ouesso-Yengo et Gamboma-Ollombo, et la construction du pont sur la rivière Mambili permettront de fluidifier le trafic le long de cette nationale qui s’étend sur plus de plus de 1 000 km. Vecteur de l’intégration sous-régionale, la jonction d’Ouesso avec la ville camerounaise de Sangmélima, un projet du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad), n’est plus
qu’une question de mois, la rénovation de la route Ketta-Sembé-Souanké ayant été lancée. Un soulagement pour les forestiers et les miniers qui opèrent dans ces zones. Et l’opportunité pour Ouesso, porte d’entrée vers le Cameroun et la Centrafrique, de redynamiser ses activités.
soit environ 300 km, devraient, pour leur part, être bouclés en 2013. FAR WEST. L’axe ouest est beaucoup
moins avancé. Son tracé passe par Pointe-Noire, Dolisie, Loudima, Sibiti, Zanaga, Lékana, Oboyo, Ewo, Kéllé et Mbomo pour atteindre Sembé, dans la Sangha. Un Les forestiers et les miniers axe d’autant plus important participent aux chantiers routiers, qu’il traverse des départements enclavés, dont la indispensables à leurs activités. Cuvette-Ouest, où d’imporLa jonction nord-sud via la dorsale tants projets miniers sont en développeest ne sera quant à elle effective que ment. Sa réalisation assurera la jonction entre le nord et le sud du pays, jamais lorsque la RN 1, entre Pointe-Noire et réalisée dans la partie ouest du Congo. Brazzaville, sera réalisée. Un pari en voie d’être gagné puisque le tronçon Au passage, il favorisera la connexion avec le Gabon. de 190 km entre Pointe-Noire et Dolisie (lire p. 97), confié à la CMEC, devrait être Le premier jalon de cette jonction est achevé fin 2011. C’est le plus complexe déjà posé. « Le bitumage du tronçon à réaliser, puisqu’il traverse le massif Loudima-Sibiti est achevé et celui de la du Mayombe. Tout juste engagés, les route Sibiti-Zanaga est en cours », inditravaux du tronçon Dolisie-Brazzaville, que Michel Niama. Également lancés, les
QUESTIONS À
JEAN-JACQUES BOUYA Ministre délégué, Délégué général aux Grands Travaux
DGGT
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« L’appel d’offres est devenu systématique » JEUNE AFRIQUE : La municipalisation accélérée n’est-elle pas un échec, quand on constate que nombre de chantiers engagés depuis plusieurs années restent inachevés ? JEAN-JACQUES BOUYA: Le phénomène que vous évoquez a été observé lors des premières expériences de municipalisation, même si c’était sous une forme bien différente. L’achèvement de quelques projets avait connu des lenteurs, car ces processus [de municipalisation et de modernisation des infrastructures, NDLR] ont été lancés presque simultanément. La mise en œuvre de certains chantiers a été confrontée, au début, à l’insuffisance des crédits. Quant aux travaux inachevés du fait de l’entrepreneur, toutes les sociétés qui se sont retrouvées dans cette situation ont vu leurs contrats annulés. Les modalités de passation des marchés publics, à l’époque, profitaient à des opérateurs N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
économiques peu fiables. Depuis, le code des marchés publics a été réformé avec l’appui de nos partenaires pour le développement, comme la Banque mondiale. Il y a plus de rigueur, l’appel d’offres est devenu systématique. Et, par exemple, aucun marché ne peut désormais être attribué à un adjudicataire sans qu’il ait versé une caution en guise de garantie. Heureusement, dans l’ensemble, plus de 80 % de l’investissement consenti a produit les effets escomptés. Les entrepreneurs indélicats ont-ils été poursuivis en justice ? La première sanction a été le retrait systématique des marchés aux opérateurs dont la défaillance a été dûment constatée. Ensuite, quand tous les éléments du dossier sont réunis et renseignent sur les facteurs qui ont généré les faits décriés, l’affaire est soumise aux services compétents.
Pourquoi avoir décidé de construire une route nationale entre Brazzaville et Pointe-Noire plutôt qu’une autoroute ? Dans le cas de la route Pointe-NoireBrazzaville, il s’agit d’une route lourde de quatre voies, c’est-à-dire deux fois deux voies. Ces quatre voies sont calibrées pour supporter un trafic de 3 000 véhicules par jour. Cette route nationale est classée dans la catégorie des voies rapides et ses dimensions peuvent être agrandies en fonction du trafic. Cela pourrait aller jusqu’à six voies. Il faut aussi souligner que le premier tronçon, entre Pointe-Noire et Dolisie, sera achevé fin 2011-début 2012. Le deuxième tronçon, Dolisie-Brazzaville, a déjà démarré, au grand bonheur des Congolais, qui voient ce vieux projet passer enfin du rêve à la réalité. ● Propos recueillis par TSHITENGE LUBABU M.K JEUNE AFRIQUE
Poussée de croissance travaux de l’axe Zanaga-Kébara-Lékana se poursuivront jusqu’à Okoyo. Si la liaison Okoyo-Sembé n’est pas pour demain, en revanche, le bitumage, bien avancé, de la route Obouya-BoundjiOkoyo-Léketi, permettra de connecter la RN 2 à la frontière du Gabon et, de là, de gagner Franceville. De même, la réhabilitation des tronçons Boundji-Ewo et Makoua-Etoumbi dans la Cuvette-Ouest mettra le pays voisin à portée de main. Divers autres chantiers ont été réalisés ou lancés. Notamment dans la Likouala, une région en partie occupée par la forêt inondée, mais traversée par la rivière Oubangui, qui se jette plus au sud dans le fleuve Congo : une voie royale pour les échanges avec l’hinterland congolais et les pays voisins, à condition de réhabiliter les ports fluviaux, en mauvais état. UN PONT SUR LE FLEUVE. Pour mériter
son titre de pays de transit, il reste au Congo à réaliser une connexion digne de ce nom avec le grand voisin qu’est la RD Congo. Les choses sont en bonne voie avec le projet de « route-pont-rail », dont Brazzaville assure la direction. Le volet routier est acquis avec la RN 1. Assuré par la Banque africaine de développement (BAD), le financement du pont sur le fleuve Congo est bouclé. Où sera-t-il situé ? « Le lieu n’est pas encore défini avec précision, mais ce sera en aval de la capitale, à environ 30 km au sud de l’île du Diable, précise Michel Niama. Ce pont sera relié à la RN 1 par une bretelle. Un port sec de 1 000 à 2 000 ha,
Des jonctions avec le Cameroun, le Gabon et la RD Congo devraient favoriser l’intégration régionale. destiné à stocker des marchandises, sera construit à l’intersection de la RN 1 et du CFCO. De là on pourra se rendre à Pointe-Noire, Brazzaville ou directement à Ouesso. » Car, cerise sur le gâteau, un périphérique est prévu ; contournant la capitale par le nord, il rattrapera la RN 2 à hauteur de Kintélé. Des chantiers prometteurs, et à réaliser au plus vite. Car les projets de hub portuaire (à Malabo, en Guinée équatoriale, à Kribi, au Cameroun, à Moanda-Banana, en RD Congo) et de plateformes routières et intermodales ne manquent pas dans la sous-région. ● MURIEL DEVEY JEUNE AFRIQUE
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Le Plus de J.A. Congo
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Ý L’AGROALIMENTAIRE (ici les Brasseries du Congo, Brasco) est l’une des filières prioritaires.
d’appui à la diversification économique (Pade). Des programmes qui devraient aider le Congo à rectifier le tir.
PATRICK ROBERT
ZONES SPÉCIALES. En appui à cette
REDÉPLOIEMENT INDUSTRIEL
Une stratégie plus proche du terrain
Les résultats du plan de relance des activités manufacturières seront déterminants pour diversifier l’économie du pays.
L
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industrie manufacturière, qui ne représente que 4,7 % du produit intérieur brut (PIB), est le parent pauvre de l’économie congolaise. Principalement localisé à Brazzaville et dans la ville portuaire de Pointe-Noire, le tissu industriel, qui a été très endommagé lors des conflits armés des années 1997-1998, se limite à l’agroalimentaire, à la première transformation du bois, à l’industrie chimique et pharmaceutique, à la petite métallurgie, à la mécanique et à l’électronique. Un plan de relance de l’industrie a donc été défini dans le cadre de la politique de diversification. Il mise sur la densification du tissu des PMI et sur une plus grande transformation des ressources naturelles du pays. Deux axes sont privilégiés : le renforcement des capacités productives dans les filières prioritaires (agroalimentaire, bois et dérivés, sidérurgie, pétrochimie, chimie, matériaux de construction, métallurgie, mécanique et électronique) et celui des capacités d’appui, de gestion et de promotion du secteur. La réussite de cette politique suppose toutefois la levée d’une série d’entraves au développement du secteur privé. Outre le manque d’infrastructures énergétiques, de transport et de télécommunications, ce dernier bute sur la question du financement et sur un environnement encore N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
peu propice aux affaires. Malgré quelques efforts, comme la réforme du code des marchés publics, le Congo reste, en 2011, 177e sur 183 pays classés dans le dernier rapport « Doing Business » de la Banque mondiale. Deux conventions ont été signées avec cette dernière : l’une, d’un montant de 11 milliards de F CFA (16,8 millions d’euros), s’insère dans le Projet d’appui institutionnel pour l’amélioration du climat des affaires et la diversification de l’économie congolaise (Pacadec), et l’autre, de 2,5 milliards de F CFA, conclue conjointement avec la Banque africaine de développement (BAD), dans le Projet
stratégie, l’accent est mis sur la création de zones économiques spéciales, dont les activités seront orientées vers l’exportation. Un avantage pour les entreprises qui s’y installeront puisque leurs coûts d’investissement, de financement et d’exploitation devraient être notablement réduits. Quatre zones ont été ciblées : la sortie nord de Brazzaville, Pointe-Noire et ses environs, Oyo-Ollombo (sur les départements des Plateaux et de la Cuvette), et Ouesso-Pokola (dans la Sangha). Le projet est appuyé par un accord de financement de 10 millions de dollars (7 millions d’euros), signé en février entre le gouvernement et la Banque mondiale. En octobre 2010, un avis d’appel à manifestation d’intérêt avait déjà été lancé pour recruter un cabinet afin de réaliser l’étude de faisabilité du projet: les français Sofred Consultants et Egis International, ainsi que le russe Gazprombank Invest, ont soumissionné. Déjà, des hommes d’affaires de l’océan Indien s’intéressent à ce projet. Des accords ont été conclus par les autorités congolaises avec le gouvernement mauricien ainsi qu’avec Singapore Cooperation Enterprise (agence gouvernementale), lors de la visite officielle du président Denis Sassou Nguesso dans les deux pays, en juillet. ● MURIEL DEVEY
ALÉAS CIMENTIERS IMPLANTÉE DANS LA BOUENZA (Sud), la Société nouvelle des ciments du Congo (Sonocc, ex-Cimenterie de Loutété), dont le capital est détenu à 56 % par la Société nationale chinoise des travaux de ponts et chaussées et à 44 % par l’État, est la seule productrice de ciment du pays. Aussi, alors que la demande nationale dépasse 700 000 tonnes par an, la décision de porter sa production annuelle à 300 000 t d’ici à 2014 (contre 100 000 t actuellement) n’est pas anodine. La Sonocc prévoit un doublement de ses ventes pour 2011, après une année 2010 décevante : 57 382 t de ciment ont été vendues, moitié moins qu’en 2009. Une baisse surtout liée à des difficultés d’acheminement. Malgré ces aléas, l’entreprise affiche un revenu d’exploitation de plus de 6 milliards de F CFA (9,15 millions d’euros) en 2010, et une marge nette de plus de 263 millions de F CFA. De quoi faire face à la construction d’une nouvelle chaîne de fabrication. ● M.D. JEUNE AFRIQUE
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Le Plus de J.A. Congo INDUSTRIES EXTRACTIVES
Le pays mise gros, les opérateurs aussi Les autorités ont mis le paquet sur le potentiel minier, en particulier ferreux, encore fort peu exploité. L’entrée en production des premiers grands sites est prévue d’ici à deux ans.
L
a stratégie de développement du secteur minier commence à donner des résultats. Hormis quelque 16 000 tonnes de cuivre, extraites dans la Bouenza (Sud) par la Société de recherche et d’exploitation minière, filiale de l’américain Gerald Metals, la production n’a pas encore démarré à grande échelle sur ces nouveaux projets. Quelques-uns devraient cependant entrer en phase d’exploitation d’ici à trois ans. Sur une cinquantaine de permis de recherche attribués au cours des cinq dernières années, 19 portent sur des explorations aurifères, dont 1 octroyé à la société chinoise Zhong Jin Hui Da Beijing Investment Co., dans la CuvetteOuest, et 9 sur les minerais de fer. Lesautresprogrammesminiersmajeurs portent sur la potasse et l’uranium. Dans le Kouilou, près de Pointe-Noire, MagMinerals Potasses Congo (MPC), une filiale du canadien MagIndustries – dont le rachat par le groupe chinois Evergreen Industries, annoncé en avril, a été finalisé fin juillet –, développe le projet Mengo, dont le coût est estimé à 1 milliard de dollars (près de 700 millions d’euros). L’usine devrait voir le jour en 2012. Elle
RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE CAMEROUN
Avima
Impfondo Sembé
Voies ferrées Aéroports principaux Limites des départements
Ouésso Sangha
Badondo CuvetteOuest
GABON
Cuvette
200 km
Ewo
Owando RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
Mayoko-Lékoumou Mayoko-Moussondji
Zanaga
Plateaux Djambala
Niari
Océan Atlantique
Lékoumou Sibiti
Dolisie Kouilou Madingou
Pool
Kinkala Brazzaville
Pointe-Noire
ANGOLA
produira 1,2 million de tonnes de potasse par an. Cominco SA, filiale du canadien Cominco Resources, a pour sa part lancé des travaux d’exploration sur les sites du permis Kolatchikanou (uranium) et du
RECHERCHE, FORMATION, ET PLUS SI AFFINITÉS UN VASTE PROGRAMME de cartographie géologique et d’inventaire des ressources minérales va prochainement être lancé par le ministère congolais des Mines, avec l’appui technique du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) français et le soutien deTotal E&P Congo pour la logistique. Un projet qui durera cinq ans et utilisera les méthodes les plus modernes d’évaluation. L’occasion de former des étudiants congolais à ces techniques de pointe pour répondre aux objectifs de professionnalisation du nouveau système licence-master-doctorat (LMD), et ce « sur le terrain comme dans les laboratoires qui seront mis en place ou relancés dans le cadre de ce programme », explique Louis Marie Djama, le directeur général des mines. Pour l’heure, la faculté des sciences de la terre de l’université Marien-Ngouabi de Brazzaville forme une M.D. centaine d’étudiants en licence. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Likouala
Nabemba
Principaux projets d’exploration et d’exploitation de minerais de fer
Co ng o
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permis Hinda (phosphate et uranium), à Mboukou, à 50 km de Pointe-Noire. AUSTRALIENS EN TÊTE. La prospection est désormais active dans la plupart des départements. Pour l’heure, seules quelques sociétés ont mis en place de véritables projets, en particulier dans la filière fer, l’une des plus prometteuses, où dominent les investisseurs australiens. Les cours mondiaux de ce minerai sont en hausse, dopés par la demande chinoise. « Les gisements de fer les plus importants sont situés dans la Sangha, le Niari et la Lékoumou », précise Louis Marie Djama, le directeur général des mines. Dans la Sangha (Nord), Congo Iron, filiale de l’australien Sundance Resources (présent au Cameroun dans le projet de Mbalam), opère près du mont Nabemba, au sud de Souanké. La société a finalisé JEUNE AFRIQUE
Poussée de croissance les travaux d’exploration et prévoit d’investir 600 millions de dollars dans le développement du projet. La mine à ciel ouvert, dont les réserves sont estimées à 210 millions de tonnes de fer à haute teneur, produira environ 21 millions de tonnes par an à partir de 2014. FRONTIÈRE GABONAISE . Dans le
Dans le Niari, Equatorial Resources Ltd opère sur le projet de MayokoMoussondji, voisin du permis d’exploration de DMC Iron Congo (filiale de l’australien African Iron), baptisé Mayoko-Lékoumou. DMC Iron, qui entame la construction d’une base logistique à Léhala et la réhabilitation de la piste d’atterrissage de Simba-Léhala, prévoit de démarrer la production en 2013. Au total, 1,5 milliard de tonnes de minerai devraient être extraites du gisement, dont la durée de vie est estimée à plus de cent ans.
Nord-Ouest, près de la frontière avec le Gabon, le projet Avima est conduit par Core Mining Congo, filiale de l’australien Core Mining (dont le sidérurgiste russe Severstal est actionnaire ZANAGA, MÉGAPROJET. Un troisième à hauteur de 16,5 % du capital depuis grand projet est en développement à mai 2010), qui opère aussi au Gabon Zanaga,danslaLékoumou.Ilestconduit (projet fer Kango). Après avoir investi 40 millions de dollars dans l’exploration, Core « Les gisements de fer les plus Mining Congo compte importants sont situés dans la injecter quelque Sangha, le Niari et la Lékoumou. » 100 millions de dollars dans un programme de LOUIS MARIE DJAMA, directeur général des mines forage. L’exploitation devrait démarrer en 2015, avec une par Mining Projects Development production attendue de 20 millions Congo (MPD-Congo), une coentreprise de tonnes par an. associant Zanaga Iron Ore Company Toujours dans le Nord-Ouest, au (immatriculée aux Îles vierges britansud d’Avima, le projet Badondo est niques) et le suisse Xstrata. développé par l’australien Equatorial MPD-Congo entamera dès 2012 la Resources Ltd. Dans la Cuvette-Ouest, construction des infrastructures nécesdes prospections ont été engagées par saires (mines, chemin de fer et port près l’australien Waratah Resources Ltd de Pointe-Noire), dont le coût est évalué (permis Youkou) et par Equamineral à 6 milliards de dollars. L’exploitation (permis Oyabi et Kéllé). pourrait démarrer en 2016, avec une L’autre grande zone ferrugineuse se production annuelle de 45 millions trouve danslapartiesuddupays,oùplude tonnes de minerais concentrés. ● sieurs projets sont en développement. MURIEL DEVEY
Quand les compagnies croisent le fer Construction d’infrastructures ferroviaires, partenariats : pour desservir leurs concessions, les sociétés se démènent.
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évacuation des futures productions minières est un vrai casse-tête. Pas d’autres moyens que de réhabiliter les voies ferrées existantes ou d’en créer de nouvelles. MPD-Congo planche sur le projet de construction d’une nouvelle voie ferrée de 350 km depuis Zanaga jusqu’à un port proche de Pointe-Noire. Pour acheminer les minerais de fer depuis Mayoko jusqu’au port de Pointe-Noire, DMC Iron et Equatorial Resources négocient quant à eux avec le Chemin de fer Congo-Océan (CFCO) JEUNE AFRIQUE
pour obtenir l’autorisation d’utiliser ses voies. En contrepartie, ils s’engagent à adapter les structures ferroviaires du CFCO entre Dolisie et Pointe-Noire et à réhabiliter l’ancienne voie de la Comilog entre Mbinda et Dolisie. Dans le nord du pays, l’évacuation du minerai de fer passera par le Cameroun. Congo Iron prévoit en effet de construire une voie ferrée entre son site de Nabemba et celui de Mbalam, situé au Cameroun, à quelques kilomètres, où opère Cam Iron, autre filiale de Sundance Resources. ● M.D. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
PATRICK ROBERT
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Pour amortir la crise, les exploitants peuvent exporter 30 % DE LEUR PRODUCTION EN GRUMES, CONTRE 15 % EN TEMPS NORMAL.
BOIS
Merci l’Asie
Après deux années dans la tourmente, la filière se redresse. Avec, désormais, une très nette prédominance d’opérateurs et de clients singapouriens, chinois et malaisiens.
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économie forestière congolaise revient de loin. Elle a subi de plein fouet la crise financière internationale de 2008, qui s’est traduite par une baisse des cours mondiaux des grumes et du bois transformé, et par une chute de 40 % des commandes. Après la débâcle de 2009, la reprise est lente mais bien réelle. En 2010, la production de grumes s’est redressée de 23 % pour atteindre 1 165 429 m3. En 2009, la baisse avait affecté aussi bien la production de grumes, qui avait chuté de 25 %, à 945 750 m3 par rapport à 1 275 900 m3 en 2008, que celle de la première transformation, qui avait décliné de 41,3 % pour s’établir à 179 300 m3 en 2009. Les sociétés installées dans le nord du pays avaient été les plus touchées, avec une baisse de production de plus de 65 %. Dans la foulée, les exportations de grumes avaient chuté (462 342 m3 en 2009 contre 528 688 m3 en 2008) et le chiffre d’affaires du secteur – qui représente 5 % du produit intérieur brut (PIB) et constitue le deuxième poste d’exportation du pays, loin derrière le N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
pétrole – avait bien évidemment souffert, passant de 272 à 250 millions d’euros entre 2006 et 2010. Et, sur les huit mille emplois directs de la filière en 2008, plus d’un millier de travailleurs ont été licenciés, et 20 % à 30 % du personnel restant mis au chômage technique. SOUTIEN DE L’ÉTAT. Deux fac-
112 RD CONGO
teurs ont contribué à la remontée de la production en 2010 : la demande
accrue des pays asiatiques, en particulier de la Chine, et la prolongation des mesures prises dès la fin 2008 par le gouvernement pour atténuer les effets négatifs de la crise sur le secteur. Notamment la possibilité donnée aux exploitants forestiers d’exporter jusqu’à 30 % de grumes, alors que la loi limite en temps normal les exportations à 15 % de la production, et l’octroi de facilités pour le paiement de la taxe à l’abattage. Des mesures que le patronat souhaiterait voir maintenues pendant encore au moins deux ans. L’heure est toutefois à l’optimisme, même si on est encore loin des records de production enregistrés en 2004 (1 694 600 m3) et en 2007 (1 679 400 m3), et du potentiel annuel exploitable (sans
Surface forestière du bassin du Congo (en millions d’hectares) CAMEROUN
CENTRAFRIQUE
22,7
19,7
CONGO
22,4
GABON
21,8
JEUNE AFRIQUE
Poussée de croissance compromettre la survie de la forêt), évalué à 2 millions de m3. Pour stimuler le secteur et créer plus de valeur ajoutée, les autorités misent, bien évidemment, sur le développement de la transformation locale. Une stratégie qui doit s’accompagner d’un effort de formation de la main-d’œuvre. À court et moyen termes, outre quelques nouveaux marchés locaux et continentaux, c’est surtout la demande en grumes des pays asiatiques, notamment de la Chine, qui devrait soutenir le secteur. Ce sont désormais les principaux clients du Congo : leurs achats représentaient 46 % des exportations congolaises de bois en 2008, 62 % en 2009 et, en 2010, la Chine est devenu le principal acheteur de bois congolais, avec 70 % des grumes exportés, devant l’Espagne et le Portugal. LEADERSHIP D’OLAM. Si le poids des pays asiatiques en tant que clients est en hausse, leurs sociétés sont également de plus en plus visibles sur le terrain. Au fil des années, elles se sont vu attribuer des Unités forestières d’aménagement (UFA) ou d’exploitation (UFE). Bien implantées dans la partie méridionale du pays, elles restaient toutefois minoritaires dans le nord, où près de 45 % des entreprises actives étaient d’origine européenne (contre 13 % dans le sud). Ce n’est plus le cas depuis que le groupe agro-industriel singapourien Olam a racheté, en février derLe chiffre d’affaires nier, les actifs de la du secteur est passé de Congolaise indus272 à 250 millions d’euros trielle du bois (CIB), ex-filiale entre 2006 et 2010. du danois Dalhoff Larsen & Horneman (DLH Group), qui avait été très affectée par l’effondrement de la demande mondiale. Avec quatre UFA – trois dans la Sangha et une dans la Likouala – qui totalisent 1,3 million d’hectares de forêt, Olam devient donc le leader de la filière au Congo. Une acquisition qui renforce le poids des Asiatiques dans le secteur et leur présence dans toutes les zones forestières du pays. Ainsi, excepté les entreprises à capitaux européens, parmi lesquelles Industrie forestière de Ouesso (IFO), filiale du groupe germano-suisse Danzer, Mokabi, filiale du groupe français Rougier, ou encore l’italienne Likouala Timber, ainsi que quelques intérêts libanais (Sifco, Bois et Placage de Lopola) ● ● ● JEUNE AFRIQUE
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CHEMIN DE FER CONGO-OCEAN • Epine dorsale de l’économie congolaise • Outil d’intégration de la sous région
Nous œuvrons pour vous ffaire aimer lle train Siège social Pointe-Noire 7, Boulevard Général de Gaulle B.P.: 651 / République du Congo Tél./Fax : (+242) 294 00 40 Gare Centrale : 30, Avenue Félix EBOUE Place de la Gare / Pointe-Noire
Délégation CFCO Dolisie B.P.: 105 Tél./Fax: (+242) 291 00 16 Délégation CFCO Brazzaville Place de la Gare - B.P.: 81 Tél./Fax (+242) 281 25 23
Le Plus de J.A. Congo
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● ● ● et congolais, les sociétés à capitaux singapouriens et chinois dominent désormais dans le nord du pays. Dans la partie sud, où les Asiatiques sont omniprésents, les Européens ne sont plus représentés que par la Forestière agricole industrielle et commerciale en Afrique équatoriale (Foralac) et la Nouvelle Transformation des bois exotiques au Congo (Nouvelle Trabec). Quant aux Congolais, installés majoritairement dans cette zone, ils opèrent le plus souvent via des petites unités – excepté la Compagnie industrielle des bois du Niari, qui dispose de quatre UFE. Les intérêts chinois sont dominés par la Sino-Congo Forêt (Sicofor), née
de la fusion du malaisien Man Fai Tai et de China Overseas, qui détient cinq UFE réparties dans la Lékoumou, le Kouilou et le Niari. Ils comptent également la Société d’exploitation forestière Yuang Dong (Sefyd), la Congo Deija Wood Industry, Thanry Congo (filiale du groupe Vicwood), ainsi que Wang Sam Resources and Trading Congo, la dernière arrivée, qui vient d’obtenir l’UFA de Makoua, dans la Cuvette. É C O C E R T I F I C AT I O N . Parmi les
Malaisiens, on trouve Asia Congo Industrie (ACI) – qui opère dans cinq UFE et a essaimé en créant la Société forestière et industrielle de Léboulou
Premier partenariat public-privé dans l’écotourisme La protection sera allégée sur huit zones du Parc national d’OdzalaKokoua et du sanctuaire de Lossi pour favoriser l’accueil de visiteurs.
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MURIEL DEVEY
Le sanctuaire de Lossi, dans la CuvetteOuest, est connu, lui, pour sa population de gorilles de plaine. Dans le cadre de l’accord, Congo Conservation Company investira à hauteur de 2,5 millions d’euros pour le développement et l’exploitation commerciale des infrastructures de tourisme et d’écotourisme. La nature, la quantité et la qualité des ouvrages à réaliser seront
de concessions d’exploitation écotouristique et de gestion cynégétique situées dans les zones d’écodéveloppement du Pnok (plus de 1,35 million d’ha) et du sanctuaire de Congo Conservation Company Lossi (35 000 ha). s’engage à investir 2,5 millions À cheval sur les départed’euros dans ce projet. ments de la Sangha et de la Cuvette-Ouest (nord-ouest du pays), le Pnok, créé en 1935 puis transdéterminées d’un commun accord par les formé en parc national, est réputé pour trois principaux partenaires concernés : sa biodiversité, la plus riche du pays. Il le ministère du Développement durable, est accessible par la route et par avion. de l’Économie forestière et de l’Environnement, celui du Tourisme et des Loisirs, Æ Les sites ciblés sont connus notamment pour LEUR POPULATION DE GORILLES DE PLAINE. et Congo Conservation Company. Cette dernière s’est engagée à respecter la loi forestière, à préserver l’environnement et à investir 5 % de son chiffre d’affaires dans un fonds destiné au développement des populations locales. Congo Conservation Company disposera de cinq ans pour entreprendre la construction d’infrastructures touristiques jusqu’à la phase d’exploitation commerciale. Huit sites seront mis en valeur en marge de la protection intégrale. Un plan d’action a en effet été adopté, qui définit des zones de protection intégrale (60 % de la superficie du Pnok), des zones d’écodéveloppement (40 %), et précise les conditions d’exercice d’activités à caractère économique et commercial, dont l’écotourisme. ● M.D.
nfin une nouvelle qui pourrait donner un coup de pouce à l’essor de l’écotourisme au Congo. Après la signature, fin avril, d’une convention d’une durée de vingt-cinq ans avec le ministère du Développement durable, de l’Économie forestière et de l’Environnement, la société américaine Congo Conservation Company a conclu, le 29 juillet, un accord relatif au Parc national d’Odzala-Kokoua (Pnok) et à sa périphérie avec le ministère du Tourisme et des Loisirs. Objectif : la mise en valeur
JACQUES RENAUD/BIOSPHOTO
(Sofil) –, ainsi que Taman Industrie, filiale du groupe Rimbunan Hidjo, qui détient deux UFE. Reste à savoir si les opérateurs asiatiques tiendront leurs engagements en matière d’aménagement. Jusqu’à présent, sur les 13 434 200 ha de forêts de production concédés, 4 150 888 ha ont été aménagés et 6 436 376 ha sont en cours d’aménagement. En outre, quelque 2 millions d’hectares sont écocertifiés, ce qui fait du Congo le premier pays au monde en termes de surface d’exploitation écocertifiée en forêt naturelle. Un capital à ne pas brader. ●
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JEUNE AFRIQUE
BAUDOUIN MOUANDA POUR J.A.
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ITINÉRAIRE URBAIN
Dolisie en quête d’avenir Passage obligé entre Brazzaville et Pointe-Noire, la troisième agglomération du pays tangue entre la nostalgie d’un passé euphorique et l’espoir suscité par de nouveaux équipements, tandis que les activités reprennent, timidement. Reportage.
P
lace de la Gare, à Dolisie, un soir de saison sèche. Sur des étals disposés de part et d’autre, toutes sortes de produits attirent la curiosité des clients. Une table et de longs bancs attendent ceux qui ont faim. Un homme s’approche et commande une mesure de pastis. Le marchand la verse dans un petit doseur, puis la reverse dans un sachet en plastique. C’est 100 F CFA (0,15 euro) la mesure. Pour du whisky, le client aurait payé 150 F CFA. Un passage taillé dans le mur d’enceinte conduit aux rails. La broussaille et le sable ont investi les lieux. Les passants traversent sans cesse ce qui ressemble vaguement à une voie de chemin de fer. D’autres sont assis sur des bancs en pierre. Sur un mur, une horloge indique l’heure. Mais elle s’est arrêtée, on ne sait plus à quelle époque, à 12 h 25 ou 0 h 25. À quai, un train de marchandises à la locomotive antédiluvienne, en provenance de Brazzaville et à destination de Pointe-Noire, marque
JEUNE AFRIQUE
une pause. Entre deux wagons, à l’air libre, plusieurs passagers clandestins. Ils ont payé 3 000 F CFA aux convoyeurs (des militaires). Et ils affirment que le voyage est sans péril. D’autres clandestins montent. Le train, poussif, s’enfonce dans la nuit. Un agent du Chemin de fer Congo-Océan (CFCO) jure, la main sur le cœur : « S’ils meurent, cela ne nous regarde pas : ils n’existent pas en tant que passagers. » CITÉ ROUGE ET VERTE. Dolisie est un véritable carrefour. Chef-lieu du Niari, à 350 km de la capitale et à 180 km du poumon économique du pays, Pointe-Noire, la ville de 100 000 habitants est aussi toute proche de la frontière gabonaise et de l’enclave de Cabinda (Angola), ainsi que de la RD Congo. Son maire, Paul Adam Dibouilou, 54 ans, élu en 2008, en donne une définition très personnelle : « C’est une circonscription urbano-rurale qu’il faut urbaniser. Elle souffre d’un manque criant d’infrastructures modernes. »
Quatre-vingts boutiques et plus de mille tables attendent les clients du NOUVEAU MARCHÉ CENTRAL.
Ici, la terre est rouge. Rouge comme un soleil qui se couche. Cette terre colle aux pieds, s’engouffre dans les narines, s’installe sur les cheveux dès qu’un véhicule passe en trombe. Dolisie, c’est « la ville rouge », même si ses habitants l’appellent (encore) « la capitale de l’or vert ». « Tout peut pousser à Dolisie, de la tomate à la vigne, souligne un ancien ministre originaire de la région. Cette terre peut être exploitée des décennies durant sans aucun recours aux engrais. » Mais, ici, l’âge d’or est révolu. Les anciens regrettent la Dolisie des années 1960, « une petite ville occidentale » florissante, vivant au rythme de ses quelque trois mille Européens (Français et Portugais pour l’essentiel). Ils pleurent ce qui fut le passage obligé des stars de la musique, qui venaient, de Brazzaville ou de Kinshasa, égayer des nuits mémorables dans des bars de légende. C’était l’époque où le bois était roi, où la Société congolaise de bois (Socobois) était le principal employeur de la région. Aujourd’hui, c’est l’État. Et d’aucuns pensent que la filière bois a éclipsé l’agriculture, la vraie vocation de Dolisie. Et puis, il y a eu la guerre de la fin des années 1990. En 1997-1998, les Ninjas ralliés à l’ancien président Pascal ● ● ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Le Plus de J.A. Congo
AUX BONS SOINS DE L’HÔPITAL GÉNÉRAL S’IL EST UNE CHOSE dont les Dolisiens sont unanimement fiers, c’est de leur hôpital général, situé au quartier Mont-Fleuri. Inauguré en 2009, après des travaux de rénovation, cet établissement ultramoderne bien équipé est, sans doute, le plus propre du Congo. La propreté permanente, c’est en tout cas le pari que s’était lancé Mathias Gassay, son directeur général. Bâti sur 5 ha, l’hôpital pavillonnaire est constitué de 14 bâtiments et compte 208 lits.Toutefois, il n’a pas encore de statut officiel. L’État ne lui a envoyé que trois médecins, auxquels s’ajoutent deux vacataires (recrutés par le directeur général et payés grâce aux recettes propres), ainsi que huit coopérants cubains. Pour un bon fonctionnement, il lui manque 200 agents. ● T.L.M.K. ● ● ● Lissouba (dont Dolisie était le fief ) et les Cobras de son rival Denis Sassou Nguesso se sont affrontés sans faire de quartier. La ville en porte encore les stigmates. Beaucoup d’entrepreneurs ont tout perdu.
AU RALENTI. Pire, la Socobois a fermé.
Les Dolisiens ne s’en sont pas encore remis. « Environ sept mille personnes dépendaient directement de la Socobois. Sa fermeture a laissé des dizaines de milliers de familles sans ressources. La vie est chère, la paupérisation galopante. Entre 50 % et 60 % de la population est au chômage », affirme Pierre-Michel Nguimbi, député de Dolisie.
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INAUGURÉ EN 2009 APRÈS SA RÉNOVATION, cet établissement ultramoderne de 208 lits manque cruellement de personnel.
Maigre consolation : selon Paul Adam voirie…) n’ont pas bougé, ou presque. Dibouilou, mille Dolisiens travaillent « Des opérateurs économiques s’étaient sur le chantier de la route nationale engagés sur ces chantiers, fulmine Brazzaville-Pointe-Noire (lire pp. 85-87). Pierre-Michel Nguimbi. Il faut que l’État Les investissements ou les réinvestissements manTélé-Dol, la chaîne de proximité, quent cruellement. La retransmet le conseil municipal « municipalisation accélérée » engagée en 2006 et les critiques des habitants. n’a pour l’instant pas tenu ses promesses. trouve les moyens pour relancer les En dehors de la rénovation de l’aétravaux. On ne peut pas sanctionner roport Ngot-Nzoungou, dont l’activité toute une ville à cause de la gabegie commerciale se limite à une cafétéria de certains. » Dolisie n’a que 25 km de ouverte uniquement les jours où les réseau routier bitumé. avions arrivent, et du nouveau marché Pour Paul Adam Dibouilou, la solution central, les chantiers (mairie, préfecture, passe par la décentralisation, qui doit
MINISTÈRE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE, DE L’ÉCONOMIE FORESTIÈRE ET DE L’ENVIRONNEMENT
SERVICE DE CONTRÔLE DES PRODUITS FORESTIERS À L’EXPORTATION
Service de Contrôle des Produits Forestiers à l’Exportation
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M. le Ministre Henri Djombo
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M. le directeur du SCPFE Frédéric Massalo
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Missions : Contrôle des exportations de bois, des produits de la !ore et de la faune sauvages, Suivi de la conjoncture du marché international des produits forestiers, Mise en place d’une banque de données sur les exportations des produits forestiers, Publication des statistiques des exportations des produits forestiers, Publication de la note de conjoncture, Contrôle des quotas et déclarations des exportations.
Cubage des sciages et des grumes
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Poussée de croissance
ATOUTS CITOYENS. Tout compte fait, Dolisie a des atouts en mains, et non des moindres, pour retrouver la prospérité perdue. Ici, contrairement à Brazzaville et à Pointe-Noire, point de groupes électrogènes ronronnant de jour comme de nuit : l’électricité est disponible en permanence, sauf rarissime accident. L’eau aussi. Seul problème : tout le monde n’est pas connecté aux réseaux électrique et hydraulique. À Dolisie, les administrés suivent de près les activités du maire, qui a pris l’habitude de diffuser, en différé, les travaux du conseil municipal sur Télé-Dol, la chaîne de proximité. Leurs critiques sur ce qui ne marche pas passent également à la télévision, tout comme les remarques des autorités quand leurs concitoyens ne prennent pas soin des infrastructures. « Il y a aussi un suivi des recommandations du conseil municipal dans leur application sur le terrain », souligne Barbe Ouemou-Moukala, élue municipale et directrice de Télé-Dol. Enfin, Dolisie attend beaucoup de la route nationale 1, entre Brazzaville et Pointe-Noire, en cours d’achèvement, car elle ne sera plus qu’à environ deux heures de la ville océane. Il pourrait en résulter un afflux des pétroliers ponténégrins en quête d’air pur. Et la ville n’en manque pas. ● TSHITENGE LUBABU M.K. JEUNE AFRIQUE
CLIN D’ŒIL
Opiniions & édito oriiauxx Tshitenge Lubabu M.K.
Zéro de conduite
A
PRÈS AVOIR attendu deux jours, en vain, un avion à destination de Brazzaville, je décide de quitter Dolisie pour Pointe-Noire par la nouvelle route nationale 1. Il n’y a que 190 km. Et c’est la seule possibilité qui me reste si je veux regagner Brazzaville depuis l’aéroport de Pointe-Noire. À la gare routière, les voyageurs ont le choix entre le taxi individuel, le taxi collectif et les minicars. La course Dolisie-Pointe-Noire en taxi individuel coûte entre 50 000 et 60000 F CFA (entre 76,2 et 91,5 euros),
Construction and Equipment Corporation, qui construit ce premier tronçon Dolisie-Pointe-Noire, est à l’œuvre. Ici et là, on aperçoit quelques ouvriers congolais, épuisés, couchés à même le sol. Les portions de la route déjà achevées n’ont encore aucun marquage au sol et ses courbes exigent une grande vigilance. D’autant que les panneaux de signalisation sont rarissimes. De toute façon, ceux qui existent sont ignorés des conducteurs, à l’instar de mon chauffeur de taxi, qui roule à 80 km/h alors qu’un panneau recommande 30 km/h. Plus d’une fois, ledit chauffeur s’est arrêté à ce qui ressemble à un péage ou à un poste de police, matérialisé par une longue ficelle. Chaque fois, il répète la même chose : « J’ai déjà payé. » Et il passe. Dans chaque sens de circulation, tout le monde doit s’arrêter aux huit barrages du parcours et est censé payer, à chaque fois, 2000 F CFA aux agents. À l’entrée de Pointe-Noire, après quatre heures et demie de trajet, nous frôlons la catastrophe : des chauffards excités n’hésitent pas à s’engager, à vive allure, sur la voie opposée. Pourtant, si j’en crois les Dolisiens, les Chinois les ont avertis: « Quand la route finie, tous les Congolais morts ! » ●
Aucun marquage au sol et des panneaux de signalisation rarissimes. plus un supplément pour les bagages. Dans un taxi collectif (six passagers), le tarif est de 7 000 F CFA par personne, avec toujours une taxe pour les bagages. Soyons fou, je choisis un taxi individuel. Le véhicule suit une voie poussiéreuse avant de s’engager sur la nationale 1. La toute nouvelle route, à deux voies, taillée en partie dans le massif du Mayombe, est une alternance de tronçons bitumés et non asphaltés. Le personnel de la China State
Ð LA ROUTE 1, en cours de construction, reliera Brazzaville à Pointe-Noire, via Dolisie. NATIONALE
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devenir effective afin que le développement des villes soit enfin l’affaire des collectivités locales et une priorité nationale. Chaque année, Dolisie reçoit de l’État 700 millions de F CFA de subventions (la masse salariale mensuelle s’élève à 50 millions). Auxquels s’ajoutent 30 millions de F CFA destinés à l’assainissement. Cependant, insiste l’édile, cette somme est toujours allouée en retard. Quant aux recettes propres, elles ne dépassent pas 200 millions de F CFA. D’où l’amélioration de certaines structures destinées à renflouer les caisses : la gare routière, la menuiserie municipale, les pompes funèbres, l’abattoir (tous étant sous le monopole de la mairie), ainsi que le nouveau marché central, avec ses quelque mille deux cents tables et quatre-vingts boutiques. Voilà pour aujourd’hui. Quant à l’avenir, le maire le voit à travers le développement de l’agriculture, et il « conseille aux jeunes de s’intéresser aux métiers agricoles ».
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Le Plus de J.A. Congo
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MESS GAPS est l’une des meilleures tables de la ville.
COULEUR LOCALE
Gérard Athané, touche-àtout et Africain avant tout Installé depuis plus de soixante ans sur le continent, l’entrepreneur a posé ses valises à Dolisie. Après avoir dirigé une scierie, il s’est reconverti dans la restauration. Portait.
I
l est arrivé en Afrique à l’âge de 5 ans. C’était au Gabon, où il a grandi et fondé une famille avec une femme du pays. Vingt-cinq ans plus tard, le cœur en bandoulière, il quitte le Gabon après un « divorce douloureux », direction Dolisie.
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Æ Fuyant le Gabon voisin après un divorce, il avait eu « LE COUP DE FOUDRE » POUR LE CHEF-LIEU DU NIARI.
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Aujourd’hui, son restaurant, Mess Gaps, est l’une des meilleures tables de la ville, même si les moins aisés trouvent ses repas hors de prix. TOURISME. Gérard Athané estime que sa ville est « plus propre que Brazzaville et Pointe-Noire », regrettant quand même la prolifération des sacs en plastique, le manque de planification et d’aménagements. Il souhaite voir Dolisie développer l’écotourisme et ses infrastructures hôtelières. Il n’oubliera pas de sitôt ce long week-end de laPentecôteoù,grâceàunearrivéemassive
Pourquoi cette ville? « Parce que c’est près du Gabon et ce sont les mêmes peuples. Dolisie m’a plu immédiatement, c’était le coup de foudre », répond Gérard Athané, aujourd’hui âgé de 66 ans. Trente-cinq ans après, il est Ce collectionneur est à la tête toujours à Dolisie, a épousé de 600 pièces d’« arts premiers », une Congolaise qui lui a qu’il veut offrir à la mairie. donné deux enfants. Mais toutn’apasétéunlongfleuve tranquille. de pétroliers ponténégrins, il a pu servir À son arrivée à Dolisie, Gérard Athané trois cents couverts en deux jours et vendre crée une scierie. Les affaires marchent 180 kilos de tomates. « Nous devons vite bien… jusqu’à la guerre civile qui prend sa accroître notre production agricole. Sinon, ville en otage en 1998. Comme beaucoup, il y aura une forte inflation », prévient-il. il doit fuir. Et c’est à Pointe-Noire qu’il se Gérard Athané est par ailleurs propriéréfugie. « J’ai dû faire des petits boulots taire du seul musée de Dolisie, qui compte pour survivre », dit-il. Une fois la guerre six cents pièces « d’arts premiers ». Il veut offrircepatrimoineàlamairie.Àuneconditerminée, il regagne Dolisie. Le constat tion: qu’elle s’engage à construire un lieu est terrible: sa scierie a été détruite. C’est d’exposition. ● la ruine. Pour ne pas sombrer, il se reconTSHITENGE LUBABU M.K. vertit dans la restauration et l’hôtellerie. JEUNE AFRIQUE
S TRAVAUX D N A R G S E D E ÉNÉRAL DÉLÉGATION G
Je crois qu’il ne faut pas seulement se contenter des rapports qu’on lit dans les bureaux. Cela est valable pour moi et l’est aussi pour les membres du gouvernement, et en réalité pour tous les dirigeants. Nous voulons relier Pointe-Noire à Ouesso et nous voulons aussi relier le Congo aux pays voisins par les routes, les télécommunications, les transports d’électricité. Dans nos estimations, cette année, nous aurons vaincu le Mayombe, l’autoroute aura atteint Dolisie et nous démarrerons les travaux du tronçon Brazzaville-Dolisie. Tronçon par tronçon, nous sommes aussi en train de réhabiliter la route BrazzavilleObouya. Nous réhabilitons cette route pour lui donner aussi la largeur de 9 mètres et l’uniformiser à la bretelle Owando-Ouesso. Je crois qu’au mois de juin ou de juillet, nous pourrons terminer la route Obouya-Okoyo (la promesse du Chef de l’État a été tenue. Cette route est fonctionnelle depuis mai 2011), et nous démarrerons celle d’Okoyo vers la frontière avec le Gabon. Les discussions que j’ai eues avec les experts montrent que nous n’aurons pas de difficultés, car les ponts avaient déjà été construits. Le financement est monté pour que la route atteigne la frontière du Gabon afin de renforcer l’intégration économique sous-régionale. De plus, avec le président Biya, nous avons décidé de construire la route Sangmelima vers Ouesso avec un financement de la Banque africaine de développement (BAD). Nous parlons des projets de construction des infrastructures de base pour le Congo, mais vous savez qu’au niveau africain, dans le cadre du NEPAD (Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique), nous avons la mission de superviser l’important projet de pont-route-rails Brazzaville-KinshasaIlebo. Ce sont des projets qui nous préoccupent. Denis Sassou N’Guesso Extrait de l’interview accordée au pont sur la Mambili, le 16 février 2011
Communiqué
I
DÉLÉGATION GÉNÉRALE DES GRANDS TRAVAUX
Avenue principale d’EWO bitumée.
« S’astreindre à une discipline de fer. Toujours s’efforcer de mener à bien la partie et gagner l’étape adulte, pour voir bien ce que la vie va vous réserver. »
Il est de tradition que les nations survivent souvent en oubliant leur passé. Mais il est aussi essentiel pour une communauté de se rappeler chacun des pas de sa marche, parce que du succès des expériences antérieures peuvent dépendre des réussites ultérieures. C’est là, dans la conquête meublée de mille et une idées, qu’un peuple découvre son défi, forge son ego, son idéal et son ambition, s’invente des destins et se rêve maître de lui-même, s’oriente sur les valeurs à prôner et les vertus à cultiver, capitalise ses espérances et renonce au désespoir, qui forcément condamne au repliement. La municipalisation accélérée, dont le département de la Cuvette-Ouest bénéficie des effets en cette année 2011, a démarré en 2004. La première expérience s’est déroulée dans les départements de Pointe-Noire et du Kouilou. L’idéal pour le président de la République, Denis Sassou N’Guesso, en lançant ce programme de modernisation, était de doter l’arrière-pays et les cités urbaines des services sociaux de base dont ils manquaient crûment. Depuis, sept années ont passé pendant lesquelles, tour à tour, les habitants de l’hinterland et des grandes agglomérations jouissent progressivement des infrastructures viables. De l’avis de tous, la noble idée valait bien la peine d’être matérialisée. L’ampleur de l’entreprise est telle que le président Denis Sassou N’Guesso en surveille lui-même, en permanence et lors de chaque étapes, la mise en œuvre dans ses plus infinis détails, dans la complexité et la rigueur de son accomplissement. Devant les épreuves imposées par l’immensité des travaux, il demeure imperturbable, convaincu de cette vérité selon laquelle la nature n’impose à l’homme que les difficultés qu’il peut vaincre. Les interrogations et les impatiences qui précèdent souvent le succès de chaque édition nous ont rappelé que le temps de l’action est long et que l’évolution d’une société est une patiente et constante sédimentation.
Jean-Jacques Bouya, Ministre délégué, Délégué général aux grands travaux.
Hier à Pointe-Noire, Impfondo, Dolisie, Owando, Brazzaville et aujourd’hui, à Ewo, la modernité s’installe lentement mais sûrement. Ces villes connaissent une métamorphose qui nous reparle de l’odyssée du processus. Son parcours aussi a fini par le confirmer. Il suit son chemin, les réalisations ne vont que croitre. Le travail, la rigueur, la patience qui ont marqué ces moments structurants nous font comprendre que l’assiduité a ses règles, et qu’il ne faut pas, surtout dans les premières minutes, quand elle prend son envol, en interrompre le cours. Elle risquerait de partir en vrille. Il faut la laisser venir. Même lorsque le plus difficile monte crescendo. Il y aura forcément des moments où l’on se relèvera pour accroître l’engagement et la persévérance par des approches, des exemples, des analyses, des propositions, des initiatives qui génèrent des solutions qui vous aident à bien présager de la suite, à retourner la situation, à vous redonner de l’entrain.
Communiqué
II
Les deux pistes de l’aéroport Maya-Maya.
Le premier grand test à l’arrivée d’un gros porteur a été celui de l’Airbus A 330 de la compagnie Air France. Les passagers de ce vol ont été émerveillés par l’architecture de l’ouvrage, le 2 juin dernier, en présence du Ministre délégué, Délégué général aux grands travaux, Jean-Jacques Bouya. Inaugurée le 11 août 2010 par le président de la République, Denis Sassou N’Guesso cette aérogare moderne est construite en ossature métallique vitrée. Elle est dotée de trois passerelles télescopiques.
La pérennisation de la nouvelle aérogare nécessite une rigueur dans l’entretien et la maintenance des installations. Ce qui a conduit le gouvernement à confier la gestion de l’édifice à un privé, Aéroports du Congo (AERCO), qui a aussi la charge des aéroports de Pointe-Noire et d’Ollombo. La présence de la société AERCO est un gage d’efficacité. L’entreprise offre les garanties de pérennisation de l’ouvrage, le maintien des lieux et l’emploi des jeunes. La modernisation de l’aéroport Maya-Maya résume la grande ambition qu’a le Chef de l’État, Denis Sassou N’Guesso, pour ce secteur. Elle consiste en la construction d’un complexe aéroportuaire intégrant une deuxième piste, d’une aérogare, d’un hôtel de haut standing, d’un aéroclub, d’autres commodités dignes d’un ouvrage moderne. L’ensemble de ses composantes pourrait coûter à l’État plus de 350 milliards de F CFA.
Premier module de l’aérogare Maya-Maya.
Nouvelle aérogare de Maya-Maya (côté piste).
Effectuant la visite de l’édifice le 2 juin 2011, après la mise en service de l’ouvrage, le Délégué général aux grands travaux, Jean-Jacques Bouya, a estimé que les services travaillaient désormais en toute quiétude et sérénité. Il a indiqué qu’il fallait laisser le temps à la synchronisation des services, à l’apprentissage et à l’accommodation aux équipements avant d’ouvrir cet édifice à l’exploitation. Et de préciser sur la suite du projet : « Après le déménagement complet, l’ancienne aérogare sera détruite pour l’érection du deuxième module. »
L’objectif de cet investissement est de faire de Maya-Maya un hub aéroportuaire pour un trafic escompté de 3 millions de passagers par an, contre 700 000 pour l’ancien terminal. Afin de rendre compétitive la plate forme et de l’arrimer aux exigences de modernité, une deuxième piste d’atterrissage a été construite en référence de l’Airbus A 380. Elle a coûté à l’État, la bagatelle de 73,6 milliards de F CFA. Le tarmac a quant à lui été rénové et élargi.
Les tracasseries liées à la précarité des conditions d’embarquement et de débarquement à l’aéroport international Maya-Maya ne seront désormais plus que de tristes souvenirs, le premier module de l’aérogare est totalement fonctionnel depuis le 1e juin 2011.
III
Communiqué
DÉLÉGATION GÉNÉRALE DES GRANDS TRAVAUX
Deuxième piste de l’aéroport international de Maya-Maya.
Le bâtiment de l’aérogare de type R+1 dispose d’un sous-sol et d’une mezzanine. Cette dernière abrite des bureaux administratifs, des compagnies aériennes, des restaurants, ainsi qu’une salle de conférence, pour une surface au sol d’environ 800 m². La construction des installations de Maya-Maya (modules I et II, aérogare, pavillon présidentiel, aéroclub, hôtel de grand standing, parking auto) est réalisée par la société anonyme de coopération technique et économique internationale chinoise WIETC, pour un montant de 85 milliards de F CFA. Selon le Ministre délégué, Délégué général aux grands travaux, Jean-Jacques BOUYA, cet ouvrage hissera Maya-Maya « L’idéal est de à un niveau de service très faire de Maya-Maya compétitif. Il augmentera les capacités de la plate-forme un aéroport en prévision du trafic et asd’éclatement du surera une harmonie entre la qualité matérielle et les trafic, un hub pour prestations et favorisera l’émergence d’un pôle éconotre sous-région. » nomique.
Par ailleurs, la modernisation de Maya-Maya se déroule en trois phases. La première a pris fin avec la mise en service du premier module de l’aéroport, la deuxième concernera le second module de l’aérogare, le pavillon présidentiel, la réhabilitation de l’ancienne piste, la construction d’un hôtel, de l’aéroclub, l’extension de l’aire de stationnement des avions et autos. Quant à la troisième phase, elle est essentiellement consacrée à la réalisation d’un village aéroportuaire constitué d’une zone administrative, d’un pôle technologique axé sur le développement durable, d’un centre d’exposition culturelle et artisanale, ainsi que d’un centre international des affaires dont les études sont en cours de finalisation par le cabinet conseil Lufthansa Consulting. L’ancienne piste de l’aéroport international Maya-Maya avait été construite en 1949 et mesurait 3 300 m de long et 45 m de large pour un trafic de 45 000 passagers par an. L’aéroport était ouvert au trafic des avions longs courriers à réaction, sans que n’aient été renforcées les chaussées en béton hydraulique. Au fil du temps, l’aérogare a montré des signes d’essoufflement en termes de capacité, d’espace, de confort et de sécurité. ■
Pour donner à chaque institution républicaine toute la solennité, des sièges modernes et décents ont été construits. Il s’agit du ministère des Affaires étrangères, de la Cour constitutionnelle, du Conseil économique et social, de la Délégation générale des grands travaux, du ministère de la Défense nationale, du ministère de la Justice, et des conseils départementaux, des sièges de la Société nationale des pétroles du Congo à Brazzaville et à Pointe-Noire. Le Centre national de radio et de télévision (CNRTV), qui incarne le quatrième pouvoir, domine les quartiers nord de Brazzaville. Plus d’une centaine de sièges de structures décentralisées et déconcentrées participent de la beauté architecturale de l’administration. Avec sa bibliothèque moderne en phase de finition ainsi que la construction imminente d’une deuxième université à Kintélé (nord de Brazzaville), l’alma mater du Congo ne sera pas le moins bien servi.
Bibliothèque universitaire.
Le gouvernement de la République s’est lancé, depuis 2002, dans une campagne de modernisation des infrastructures de base dans le secteur du bâtiment. De « La Nouvelle Espérance » au Chemin d’avenir, le Congo se modernise, et s’industrialise. Ce changement tant rêvé s’illustre bien à travers les transformations survenues dans plusieurs domaines de la vie. Communiqué
IV
Grand hôtel de l’Alima.
Les grands hôtels de Dolisie, dans le département du Niari, et de l’Alima, à la charnière des départements des Plateaux et de la Cuvette, font également la fierté de ce secteur. Tout comme les marchés modernes à Owando, Dolisie, Oyo et bientôt Brazzaville et Pointe-Noire. À la démographie exponentielle et à l’inflation immobilière avec leur corollaire la désurbanisation, le gouvernement a opposé la construction de logements modernes à Brazzaville, Pointe-Noire et Oyo. Une thérapie de choc au regard de l’expansion des villes. Ainsi, en complément des logements modernes déjà bâtis au quartier Bacongo, 400 autres appartements sont en construction au camp 15 Août (Poto-Poto) et à Mpila (Talangaï). À Kintélé (30 km au nord de Brazzaville), le gouvernement s’atelle à construire 1000 autres logements modernes sur une
surface de 750 m² pour un coût correspondant de 55 milliards de F CFA. Afin de faciliter et d’améliorer la situation socio-sanitaire, le Chef de l’État s’est activé à construire les écoles, les hôpitaux de référence et des centres de santé intégrés à travers le pays. Il s’agit, notamment de Loandjili, à Pointe-Noire, d’une capacité d’accueil de 216 lits, de l’hôpital général de Dolisie, de l’hôpital général d’Impfondo, de l’hôpital général d’Oyo ,en construction, de l’hôpital de référence de Mpissa à Bacongo (Brazzaville). Des structures équipées de plateaux techniques ultramodernes. Le secteur de l’éducation n’est pas en reste. La carte scolaire a été considérablement densifiée, avec la construction entre autres de structures spécialisées comme le Lycée d’Excellence de Mbounda, à Dolisie (Niari) et à Oyo (Cuvette). ■
Route Pointe-Noire/Dolisie.
Siège du ministère de Affaires étrangères.
Précieuse initiative que cette décision du président de la République, Denis Sassou N’Guesso, de construire la route PointeNoire/Brazzaville. La RN1, dont les travaux évoluent selon les termes contractuels, n’a pas encore révélé toute son importance à la communauté nationale et sous-régionale.
C’est alors que Mme Augagneur lança les travaux du CFCO. Depuis l’accession du Congo à l’indépendance, tous les chefs d’État l’ont inscrit dans leurs plans et stratégies de développement, en caressant tous la noble ambition de relier Brazzaville à Pointe-Noire. Mais la bravoure, l’ambition, la volonté de vaincre et surtout l’audace de réussir du président Denis Sassou N’Guesso ont été hors pair. Le lancement des travaux par le président, en octobre 2007, avait, en son temps, suscité moult interprétations, parfois erronées, de quelques politiques qui voyaient dans ce projet des relents politiciens. La route Pointe-Noire/Brazzaville est en réalité un vrai challenge de développement dans la sous-région. Sa jonction avec la route nationale n°2, à hauteur du PK 45, son prolongement vers Maloukou, au nord-est de Brazzaville, où sera construit un port, ajou-
Nombreux sont ces citoyens de tout bord qui rêvent de l’achèvement de la route nationale n° 1. Mais sa réalisation n’aura pas été si aisée au regard des difficultés à franchir. Déjà, au pire moment de la colonisation, le gouverneur Victor Augagneur avait été sérieusement combattu à l’idée de la construction d’un moyen de communication entre Brazzaville et Pointe-Noire. Le dilemme d’alors était de trancher entre la route et le chemin de fer. L’option du rail l’emporta finalement sur le bitume en 1921. V
Communiqué
DÉLÉGATION GÉNÉRALE DES GRANDS TRAVAUX
Vue d’un tronçon de la route Pointe-Noire/Dolisie.
teront une plus-value à l’économie nationale. À partir de sa jonction avec la route nationale Dans sa vocation d’épine dorsale, la route n° 3 Dolisie-Ngongo (247 km), les localités À tout point de vue, Pointe-Noire/Brazzaville est à la fois un « trait gabonaises de Ndendé et de Mouila seront d’union » et une solution de rechange entre les il s’agit d’un des projets desservies. différents maillons de la chaîne de transports Dans le septentrion du Congo, le Cameroun du siècle qu’aucun au Congo. Elle désengorgera le CFCO et donet la République centrafricaine bénéficieront nera une nouvelle moelle énergétique au Port de ses effets induits. La RCA, dont l’essentiel dirigeant n’avait réalisé des importations passe par le Port autonoautonome de Brazzaville et aux ports secondaires dont la productivité s’améliorera forcément. me de Pointe-Noire, réduira sa dépendance à ce jour. Avec la construction du pont route-rail entre historique. Le commerce qui se développe Brazzaville et Kinshasa sur financement de la timidement sur l’axe Pointe-Noire/BrazzaBanque africaine de développement (BAD) et dont les études sont ville/Ouesso/Douala connaîtra assurément un essor exponentiel. en cours, cette route permettra aux deux pays de faire fructifier D’autres métiers de la route naîtront. ■ les échanges commerciaux.
Rigueur et transparence dans la passation des marchés publics Une révolution s’est opérée dans le domaine des marchés publics au Congo. Le Chef de l’État, Denis Sassou N’Guesso, s’est engagé dans un sérieux effort de restructuration de son économie, mettant ainsi l’accent sur la promotion de la transparence et de la bonne gouvernance dans la gestion des grands travaux de l’État. Renforcé par l’adoption en 2009 du Code des marchés publics, arsenal juridique regroupant les procédures exigées dans la passation de la commande publique, cet élan a été conjugué avec la restructuration de la Délégation générale des grands travaux (DGGT), organisme administratif et technique compétent pour la négociation et la passation des marchés publics d’un certain seuil. Rigueur : En pratique, le principe fondamental est la mise en concurrence systématique et équitable dans le cadre d’appels d’offres publics. Dans cet esprit, le contrôle a priori et a posteriori établit un compromis raisonnable entre transparence, efficacité et rigueur dans un climat de lutte contre l’arbitraire et la corruption. L’article 12 du Code des marchés publics institue la Cellule dite de gestion des marchés publics au sein de la DGGT. Cet organe est doté d’une compétence exclusive dans la préparation des dossiers d’appel d’offres, la publication des avis d’appel d’offres et à Manifestation d’intérêt, à l’issue de laquelle les entreprises postulent. Une ouverture publique des plis s’ensuit. Les dossiers sont examinés par une Sous-commission d’analyse des offres qui produit un rapport qui permet à la Commission d’attribution de désigner l’adjudicataire. Transparence : Dans l’absolu, l’existence du double contrôle garantit l’exercice des voies de recours par les soumissionnaires non retenus. Cette procédure leur permet d’une part de vérifier qu’ils ont été traités de façon équitable, conformément aux prescriptions et critères au demeurant objectifs énoncés dans les dossiers d’appel d’offres et d’autre part de s’assurer que les règles édictées dans le Code des marchés publics ont été scrupuleusement respectées. Une transparence accrue permet donc à la fois une plus grande compétition entre les candidats et une meilleure responsabilisation. Dans ce sens, l’enregistrement des soumissionnaires lors des ouvertures des plis scellés dans l’anonymat et en séance publique garantit l’impartialité et renforce de manière non équivoque la rigueur des méthodes de qualification allant du moins offrant au mieux-disant. Fort de ces us, la transparence devient la pierre angulaire du processus de passation des marchés publics dès lors qu’elle conjugue liberté de soumission, respect de l’anonymat, impartialité, contrôle, qualification selon des critères objectifs et exercice de voies de recours.
Communiqué
VI
Avenue principale d’Ewo en construction.
Dans le cadre de la politique gouvernementale de modernisation de l’arrière-pays dite municipalisation accélérée, la CuvetteOuest bénéficie de l’expérience de 2011, couplée à l’organisation des festivités de la fête tournante de l’indépendance nationale, le 15 août 2011, à Ewo. Il est prévu la mobilisation de plus de 300 milliards de F CFA destinés à la construction des hôtels de la préfecture et des souspréfectures, des bâtiments administratifs, des écoles, des centres de santé, des ponts, des routes, des marchés modernes, des aires sportives, du système d’adduction d’eau potable et d’électricité. À cela s’ajoute la réalisation des projets d’assainissement et d’aménagement des routes à Ewo, Kellé, Mbama, Mbomo, Okoyo et Etoumbi, les six districts de la Cuvette-Ouest. Plus de cent projets ont été listés. Il est question d’embellir l’image du département aussi bien sur le plan architectural qu’infrastructurel et de faciliter les conditions de développement de cette région frontalière du Gabon. Il est aussi prévu la réalisation et le bitumage de routes d’intérêt national et sous-régional et la construction d’aéroports pour rapprocher le département des autres et l’ouvrir aux provinces du Gabon.
La municipalisation étant un processus, en cette année, quelque 70 milliards de F CFA ont été investis pour la réalisation des projets prioritaires liés à la célébration de la fête de l’indépendance. Parmi ces projets figurent la construction du boulevard devant abriter le défilé civil et militaire, de l’aéroport d’Ewo, des voiries (27 km), des réseaux d’adduction d’eau potable et d’électricité. En dehors des projets de la municipalisation, le gouvernement a engagé des travaux de désenclavement du département, à travers les chantiers des routes Obouya-Boundji-Okoyo-LékétyFrontière Gabon, Boundji-Ewo et Makoua-Etoumbi. Ces travaux, dont la plupart sont en voie de finition, favorisent d’ores et déjà la mobilité des populations, qui n’éprouvent plus de difficultés comme par le passé pour rallier Brazzaville et d’autres villes du pays. Le désenclavement et la modernisation de la Cuvette-Ouest est un challenge pour le gouvernement, qui doit relever le défi afin de favoriser la mise en valeur des ressources économiques dont regorge ce département. Par le volume des investissements consentis dans la modernisation et le développement de la Cuvette-Ouest, le gouvernement fait le choix de rentabiliser le potentiel économique que représente ce département dont les productions sont difficilement écoulées vers les grands centres urbains. L’attention des opérateurs économiques adjudicataires des marchés a été attirée par la Délégation générale des grands travaux, afin que ceux-ci entreprennent les travaux jusqu’à leur terme en respectant l’art et les délais. ■
Chantier en cours de finalisation de la sous-préfecture d’Ewo, juin 2011.
Chantier de la préfecture de la Cuvette-Ouest.
Département le plus enclavé du pays, la Cuvette-Ouest est à construire et mérite une attention particulière. Pour ce faire, le chef de l’État a pris la courageuse décision de poser les jalons de son développement en l’arrimant à la modernité. La traduction d’une telle ambition implique la volonté politique, la mobilisation d’importantes ressources et la rigueur dans l’attribution, le contrôle et le suivi des marchés.
VII
Communiqué
DÉLÉGATION GÉNÉRALE DES GRANDS TRAVAUX
« Faire de l’ambition de modernisation une réalité. »
Créée par Décret n°2002-371 du 3 décembre 2002, réorganisée par Décret n°2009-158 du 20 mai 2009, la Délégation générale des grands travaux est l’organe administratif et technique chargé de la passation et de l’exécution des contrats de marchés publics et de la délégation de services publics de l’État et de toute personne morale de droit public ou de droit privé soumise au Décret portant code des marchés publics. MISSION Entité à qui un maître d’ouvrage confie la mission d’exercer en son nom et pour son compte tout ou partie de ses responsabilités et prérogatives de maître d’ouvrage, la Délégation générale des grands travaux, maître d’ouvrage délégué, se substitue au ministère bénéficiaire pour la passation et l’exécution des marchés dont le seuil est supérieur ou égal à 250 millions de F CFA (Décret n°2009-162 du 20 mai 2009).
ORGANISATION La réorganisation de la DGGT en 2009 a structuré l’organigramme autour du Ministre délégué, délégué général aux grands travaux.
DÉLÉGATION GÉNÉRALE DES GRANDS TRAVAUX
Boulevard Denis Sassou N’Guesso BP 1127 Brazzaville République du Congo Tél./Fax : (242) 22 81 53 05 E-mail : contact@grandstravaux.org
www.grandstravaux.org
Pour l’exécution de sa fonction de personne responsable des marchés publics, le Délégué général s’appui sur le Comité technique, organe tripartite dont la vocation est de gérer la Délégation générale des grands travaux en ce qu’il est chargé de l’exécution des missions confiées à celle-ci et de la définition de la politique générale de la DGGT. Cet organe, placé sous l’autorité du Ministre délégué, comprend : l’Assistant du Délégué général, le Coordonnateur technique et le Secrétaire général. Pour réaliser sa mission de passation des marchés, la DGGT recourt à la Cellule de gestion des marchés publics, créée en son sein, en application de l’article 12 du Décret n°2009-156 du 20 mai 2009 portant code des marchés publics. Cette Cellule de gestion planifie les marchés, détermine la procédure et le type de marché à conclure, lance les appels à la concurrence, reçoit les offres, les enregistre et procède à leur évaluation. VIII
Communiqué
JA 2640-41 du 14 août 2011 - Réalisation DIFCOM Paris, Creapub / © D.R.
À ce titre, la DGGT procède à l’appel public à la concurrence, organisme le dépouillement, évalue les offres, rédige les contrats, apprécie les devis et les décomptes relatifs à leur exécution, et assure aussi la gestion et le suivi technique et financier des grands contrats de l’État (cf. Décret n°2009-371 du 3 décembre 2002). En amont, et aux termes du Décret n°2009-158 du 20 mai 2009 portant réorganisation de la DGGT, sa compétence a été étendue non seulement à la mise au point des programmes de passation de marchés, et ce, en concertation avec le ministère bénéficiaire, mais aussi à la réception des ouvrages et au contrôle de la bonne exécution du service public par le délégataire.
Poussée de croissance
TRIBUNE
BAUDOUIN MOUANDA
Éd MUKALA KADIMA-NZUJI Professeur de littérature à l’université Marien-Ngouabi de Brazzaville, directeur des éditions Hemar
La langue au cœur de la crise de l’enseignement
L’
ÉDUCATION EN AFRIQUE est en crise. Personne ne l’ignore. Cet état de fait se manifeste notamment par l’incapacité du système éducatif à former des citoyens à même de répondre aux besoins de la société. D’aucuns estiment que la cause principale en est l’inadéquation des programmes d’enseignement avec les aspirations de celle-ci. D’où les réformes scolaires qui se succèdent sans vraiment apporter de solutions durables. En revanche, plus le temps passe, plus le système se détériore : les effectifs des classes sont de plus en plus pléthoriques, les conditions de travail éprouvantes, le niveau des enseignants d’autant plus discutable qu’ils n’enseignent pas toujours les matières pour lesquelles ils ont été formés. Le niveau des élèves est souvent médiocre, et la plupart d’entre eux obtiennent leurs diplômes d’État de façon frauduleuse. À cela s’ajoute la non-maîtrise de la langue de transmission et de réception des connaissances, en l’occurrence le français.
Faut-il continuer de se voiler la face en maintenant le français comme unique véhicule des connaissances ?
Cet usage obligé de la langue française comme véhicule de l’enseignement est une incongruité dans un contexte culturellement dominé par les langues africaines. Pourquoi ne pas faire de la langue du plus grand nombre le véhicule des connaissances ? Plus d’un demi-siècle après l’accession du continent africain à l’indépendance, est-il vraiment sérieux de continuer de parler d’héritage colonial pour justifier nos propres limites, nos propres misères intellectuelles, politiques et morales ? Certes, on ne peut ignorer les efforts sans cesse renouvelés des anciennes métropoles pour dominer linguistiquement et, par conséquent, culturellement le monde. Mais faut-il pour autant que les peuples anciennement dominés plient l’échine et se soumettent à leur diktat ? Ne devraient-ils pas se libérer du poids de cet héritage pour, enfin, se frayer leur propre chemin en adaptant leur mode de transmission des connaissances aux exigences du contexte dans lequel ils évoluent ? Une autre incongruité est le fait que le français du maître et de l’élève n’est pas toujours celui du manuel. Lorsque les livres de français en usage dans nos écoles sont élaborés sous JEUNE AFRIQUE
d’autres cieux, ils s’efforcent de proposer un choix de textes dans une langue standard, voire soutenue. En revanche, lorsqu’ils sont rédigés et produits « localement », ils tendent à gommer la ligne de démarcation entre le français tel qu’il devrait se parler et un dialecte mâtiné d’africanismes. Il en résulte que l’élève se trouve confronté à une double difficulté : il doit apprendre une matière nouvelle dans une langue approximative. Une fois qu’il aura assimilé les maladresses de ce langage, il va les reproduire et les transmettre à son tour. Mais ces maladresses, loin de refléter le génie de la langue française, traduisent plutôt le malaise de vouloir à tout prix se construire à
travers un idiome, et, par conséquent, à travers des schèmes et un prisme culturel qui ne sont pas les siens. Il suffit de prêter attention au parler des élèves et des étudiants pour se rendre compte de la distance qui se creuse entre le français de France et celui des tropiques. Faut-il continuer d’instruire nos enfants dans une langue abâtardie ou faut-il le faire dans leur langue première, maternelle ou véhiculaire ? Une dernière incongruité à signaler est qu’aujourd’hui les étudiants ont tendance, entre eux, à s’expliquer dans une langue africaine les cours pourtant reçus en français. Il m’arrivait, à l’époque où j’y enseignais, de surprendre des étudiants de la faculté de lettres de l’Université de Kinshasa (en RD Congo) en train de commenter un cours de philosophie en lingala. Pourquoi préféraient-ils réviser leurs leçons en lingala plutôt qu’en français ? Ils estimaient qu’ils comprenaient mieux ainsi. Ce phénomène a gagné divers établissements d’enseignement supérieur et universitaire de Kinshasa et peutêtre aussi ceux de l’intérieur du pays. Devant un tel phénomène, qui me paraît irréversible, faut-il continuer de se voiler la face en s’obstinant à maintenir le français comme unique vecteur d’enseignement ? La langue détermine le destin des peuples. Repenser le système éducatif sans avoir résolu la question linguistique ne sera qu’un leurre ! ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Y.L. ; KYNDT/ALAMO ; VINCENT FOURNIER/J.A.
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MUSIQUE
La french connection du rap Depuis le début des années 1990, la diaspora congolaise s’est imposée sur la scène hip-hop francophone. Un son, et des mots, qui résonnent en Europe comme en Afrique.
A
uCongo,commedansd’autres pays africains, le rap n’est pas né dans le ghetto. Il a vu le jour dans les banlieues des grandes villes où les gamins recevaient dès le début des années 1990 les cassettes envoyées par les « cousins » de France. Mais en dépit de l’apparition, dès cette époque, des premiers groupes (dont Warriors for the Peace), la scène rap demeure longtemps underground. Elle est ostracisée en raison de sa réputation de « musique de voyou », mais pâtit aussi du manque de structures. Ce n’est qu’après la guerre civile que la situation se détend: les concerts se multiplient à Brazzaville et à Pointe-Noire et, chaque année, les rappeurs congolais montent sur la scène du Festival panafricain de musique (Fespam), qui se déroule à Brazzaville. VIRTUOSES DE LA PAROLE. Émigrés en France depuis leur petite enfance, des Congolais comme Passi (Ministère A.M.E.R.) ou encore les duos Ärsenik et Nèg’Marrons, qui mènent de brillantes carrières dans l’Hexagone, créent alors N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
PASSI (à g.), Lino et Calbo, les deux frères d’ÄRSENIK (en bas), et ABD AL MALIK (en haut) revendiquent leurs racines.
scène locale, qui dénonce sans détours corruption politique et inefficacité des services publics, contraste parfois avec le climat de fête qui habite les réunions du Bisso Na Bisso, le rap français demeure un stimulant. Abd Al Malik, star du slam français qui a passé une partie de son enfance à Brazzaville, multiplie lui aussi les concerts en terre congolaise, tandis que le Français d’origine marocaine DJ Cut Killer repère et enregistre quelques artistes locaux sur ses mixtapes. Le Franco-Sénégalais Booba ne cache plus son bonheur de venir jouer à Brazzaville, et l’on croise régulièrement les deux frangins d’Ärsenik,
l’événement en fondant, en 1998, le collectif Bisso Na Bisso (« entre nous » en lingala). Mettant en avant leurs racines congolaises, mêlant la musique traditionnelle de leur enfance à leur vécu urbain, les membres du collectif réinventent le son d’une diaspora moderne. Un rap à l’africaine en forme de réunion de famille qui fait mouche dans leur pays natal : via les radios et les chaînes musicales, le rap débarque en grande pompe, passant du rang de genre confidentiel au succès Alliant mélodies traditionnelles et populaire. Reçu dans toutes vécu urbain, Bisso Na Bisso (« entre les capitales, récompensé en 1999 lors des African Kora nous » en lingala) fait mouche. Music Awards, Bisso Na Bisso organise des concerts à travers le Lino et Calbo, dans les boîtes de nuit de continent et stimule la scène locale en invila capitale. Tout autour se développe une tant des rappeurs congolais en première scène congolaise solide, dans le sillage partie de ses prestations. De son côté, le de Scotty Mavula, Secta 15, Westaff ou CentreculturelfrançaisdeBrazzavillemulencore Butène, tandis que des pionniers tiplie les événements dédiés à la musique comme Rosh Bantu (aujourd’hui installé urbaine: le rap est définitivement installé en France) soutiennent la production locale en publiant mixtapes et albums. dans le paysage local. Cette montée en puissance ne s’arrêtera La dynamique est installée. ● plus. Et même si l’attitude féroce de la THOMAS BLONDEAU JEUNE AFRIQUE
Mensuel anglophone publié par le Groupe Jeune Afrique, The Africa Report propose chaque mois une analyse pertinente et incisive des enjeux économiques, politiques et sociaux de l’Afrique. Lancé en 2005, internationalement primé à plusieurs reprises, The Africa Report est aujourd’hui le mensuel de référence sur l’Afrique.
The essential reference to African affairs
www.theafricareport.com
BAUDOUIN MOUANDA POUR J.A.
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MODE
Au temps du «made in Congo»
Au pays des sapeurs, les stylistes locaux ont encore bien du mal à s’imposer. Face aux marques internationales, ils mettent en avant des créations originales inspirées de leur culture.
L
eurs noms résonnent comme des mots de passe. Ils hantent les garde-robes de Brazzaville ou de Pointe-Noire. Ils sont stylistes, modélistes, designers, couturiers… Certains ont déjà pignon sur rue, d’autres se cherchent encore. Qu’ils s’appellent Hippolyte Diayoka, Marie-Nella Siassia, Tatiana Kombo, Bernard Tchibinda Djimbi, Motse Akanati, Maître Calva, Pamela Malonga, Peho Lynne Omba, Malise Couture, Gérard Sita – la liste est longue –, ils sont les dignes continuateurs d’une démarche initiée par de respectables anciens comme Hugues Malonga, 68 ans aujourd’hui. Ils utilisent les mêmes matériaux: coton, soie, raphia… Des enseignes sont visibles : Sianel, Ndabitchi, So Fashion, Lynne2mode… Au Congo, l’élégance, masculine ou féminine, est un art de vivre. Chacun, selon son rang social et ses moyens, tient à prouver qu’il n’est pas le dernier de la classe en matière de mode. Le bien-paraître est souvent synonyme de bien-être. « Les Congolais aiment bien s’habiller. Les N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
hommes s’en tirent honorablement. Côté femmes, il reste beaucoup à faire », estime Pamela Malonga, jeune styliste-modéliste de 27 ans qui a grandi en Côte d’Ivoire, où elle a été formée à l’École internationale de formation Michèle-Yakice d’Abidjan, avant de revenir au Congo au début de l’année. LE RETOUR DU WAX. Dans une étude
réalisée en 2009, Nadège Bibila écrit que, « selon une enquête menée en 2003, le chiffre d’affaires généré par la couture féminine au Congo s’élève à plus de 1 milliard de F CFA [plus de 1,5 million d’euros, NDLR] par an ». Sur le marché, les grandes marques occidentales, vantées par les sapeurs, sont très prisées. Le rêve des stylistes congolais est d’inverser la tendance en proposant des créations originales, techniquement irréprochables et inspirées de leur culture. Fait notoire : le wax, qui sert à confectionner le pagne, revient en force. Mais y a-t-il réellement un marché pour le made in Congo? « Le marché existe bien », répond Franck-Étienne Diawara,
Prise de vue de modèles d’ESPÉRANCE MALONGA près du site des Cataractes, à Brazzaville.
directeur général de l’Agence nationale de l’artisanat (ANA), qui dépend du ministère des Petites et Moyennes Entreprises et de l’Artisanat. Selon lui, les modélistes ne sont pas attentifs à la demande. « Certains font du haut de gamme, qui coûte très cher, pendant que d’autres sont dans le très bas de gamme », poursuit-il. Entre les deux, « il n’y a rien pour la classe moyenne ».
« Les jeunes font souvent du sur-mesure », peu lucratif. SOLANGE SAMBA-TOYO, organisatrice du Festival du pagne et du tissu africain
Hippolyte Diayoka, 39 ans, est l’un des créateurs les plus en vue. Ancien d’Air Afrique, il a aujourd’hui une clientèle composée pour l’essentiel de nantis qui ne regardent pas à la dépense. Les prix de ses modèles de prêt-à-porter, sous l’enseigne Fashion, tournent autour de 50000 F CFA la chemise, ou 150 000 F CFA la robe de soirée. Il travaille aussi sur mesure. Mais, insiste-t-il, « tout le monde peut venir ». Marie-Nella Siassia, 50 ans, a déjà une longue expérience. C’est en 2000 que son enseigne, Sianel, a vu le jour. Dans son atelier, elle emploie trois personnes et forme JEUNE AFRIQUE
Poussée de croissance desapprentis.Elle travaillesur commande, pour une clientèle essentiellement féminine.Elleespèrepouvoirouvrirunjourune galerie, créer une ligne de vêtements, avoir une boutique ou une école de formation. Cette année, Marie-Nella Siassia a reçu les Ciseaux d’or à la deuxième édition du Festival du pagne et du tissu africain, à Brazzaville. Mieux qu’une reconnaissance, c’est une valorisation de son travail.
PROFIL | Tatiana Kombo
La ténacité récompensée Ð Après avoir travaillé comme assistante de direction, cette fille de couturière a ouvert son atelier à Brazzaville, en 2009
Ð Elle utilise tous les tissus, mais tient à ajouter une touche africaine
PRÉJUGÉS. Autre personnage, Peho Lynne
TSHITENGE LUBABU M.K. JEUNE AFRIQUE
secrétariat à Pointe-Noire, elle sera assistante de direction dans plusieurs entreprises jusqu’en 2004.
DR
Omba,quisignesescréationsLynne2mode. À 29 ans, elle a suivi des études de droit, de marketing et de management au Sénégal, avantderéaliserquetoutcelanelamenaità rien. Revenue au Congo en 2005, elle passe par l’école de peinture de Poto-Poto, puis entre à l’Académie des beaux-arts. Dans ses créations, elle insiste sur la couleur, peignantlesvêtementscommes’ils’agissait de tableaux. Après la fermeture de sa boutique – faute de rentabilité –, elle compte lancer un commerce de vêtements en ligne. Quant au jeune Gérard Sita, 22 ans, designer, il se plaint des préjugés dont souffre le milieu de la mode au Congo. « Beaucoup pensent que nous sommes tous des homosexuels, des gens pervers. Cela nous bloque », relève-t-il. Dire que les stylistes congolais ne roulent pas (encore) sur l’or n’est pas exagéré. SolangeSamba-Toyo,directricedel’agence AfriContacts et organisatrice du Festival du pagne et du tissu africain, en convient: « Les jeunes créent souvent du sur-mesure. Par conséquent, ils ne gagnent pas grandchose. Ils doivent arriver à faire du prêtà-porter pour que leur travail devienne rentable. L’État devrait les soutenir. » Pour Franck-Étienne Diawara, il faut nuancer. « L’ANA dispose d’un budget de 80millionsdeFCFApourlapromotiondes activités des artisans, dont les modélistes et les stylistes. Mais ils sont très individualistes et ne s’entendent pas. Ils devraient s’organiser en fédération », commente-t-il. Il soutient que l’État ne peut pas offrir de garanties aux banques afin que les stylistes accèdentaucrédit.«Parcontre,nousavons négocié avec les Mutuelles congolaises d’épargne et de crédit [Mucodec] pour la mise à disposition d’un fonds qui avoisine le milliard [de F CFA], avec des taux d’intérêt très bas. Les stylistes et modélistes peuvent contacter cet organisme pour connaître toutes les modalités de prêt », renchérit Diawara. Une ultime bouée de sauvetage pour certains. ●
TENIR COMPTE DE LA MORPHOLOGIE c’est la règle de base de la « chirurgie du vêtement ». DE CHACUN :
E
LLE EST NÉE dans un univers marqué par la cadence d’une machine à coudre, la complainte d’un vêtement neuf qu’entaillent des ciseaux, le dé porté à l’index, des bouts de tissus qui jonchent le sol. La mère de Tatiana Kombo était couturière et, toute petite, la fillette a senti naître en elle la même vocation. En 1994, son bac en poche, elle veut entrer dans une école de stylisme. Refus des parents, qui lui conseillent un parcours universitaire. Elle s’inscrit donc à l’université Marien-Ngouabi de Brazzaville pour étudier la psychologie. Mais, au bout de deux ans, elle lâche prise. Entretemps, en 1995, elle participe à son premier défilé de mode, à Kinshasa. Formée ensuite dans une école de
Son séjour en Afrique de l’Ouest, notamment au Bénin, où elle rencontre différents créateurs, ravive sa passion pour la mode. Le travail qu’elle réalise à cette époque sera exposé en 2006 à la Foire de Lyon. C’est alors qu’elle décide, en 2007, d’aller étudier le stylisme à l’École internationale de formation MichèleYakice, à Abidjan. Quand elle revient à Brazzaville, en 2009,Tatiana Kombo ouvre un atelier de couture et une boutique d’exposition. Remarquée, elle est sollicitée pour créer des tenues destinées aux cadres de l’administration territoriale. En août 2010, elle participe, à Pointe-Noire, à un défilé de mode lors du cinquantenaire de l’indépendance du Congo. « J’ai eu l’occasion de présenter, pour la première fois, mon travail au grand public congolais. Pour moi, c’est inoubliable », confie-t-elle. À 38 ans, Tatiana Kombo continue de se battre pour pénétrer le marché de la mode. Adepte de ce qu’elle appelle « la chirurgie du vêtement »,
Je ne veux pas voir disparaître ce que nos ancêtres nous ont laissé. elle insiste sur le fait que la règle de base de tout styliste est simple : toujours créer en tenant compte de la morphologie de chacun. Utilisant tous les tissus, elle a à cœur d’y ajouter sa touche personnelle, africaine. « Je ne veux pas voir disparaître ce que nos ancêtres nous ont laissé », confie-t-elle. ● T.L.M.K. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Port autonome de Pointe-Noire
En route vers la modernisation
S
itué au cœur du Golfe de Guinée, principal port en eaux profondes d’Afrique Centrale, le Port de Pointe-Noire se trouve à la croisée des principales routes maritimes reliant l’Afrique à l’Asie, l’Europe, l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud. Les plus grandes compagnies maritimes internationales, notamment Maersk Sealand, CMA CGM, NDS, PIL, Safmarine, Asiatic Shipping touchent ce port qui bénéficie d’atouts nautiques exceptionnels. Afin d’accroître ses performances et répondre à la demande croissante des armateurs, le Port autonome de Pointe-Noire (PAPN) a lancé depuis décembre 2010, un ambitieux programme de réhabilitation, d’extension et de modernisation des infrastructures lourdes. L’investissement global, y compris l’acquisition des équipements et matériels portuaires, s’élève à plus de 450 milliards de F CFA, dont 370 milliards de F CFA à la charge de Congo Terminal, société concessionnaire. Le reste a été réuni sur fonds propres du PAPN et auprès de l’Agence française de développement, la Banque européenne d’investissement et la Banque de développement des États de l’Afrique centrale. L’organisation et la planification des chantiers permettent au PAPN de maintenir son activité pendant les travaux.
2. Allongement de la digue extérieure et construction d’un cavalier de protection. Pour protéger le port et le terminal à conteneurs des fortes houles, la digue sera allongée de 300 m au large sur une profondeur de 12 à 13 mètres. En même temps est créé un piège à sable permettant de diminuer la fréquence des campagnes de dragage d’entretien du port. Enfin, un cavalier anti-franchissement en enrochement sera construit sur les 300 derniers mètres de l’actuelle digue. Au total, 240 000 tonnes d’enrochement (pour le noyau) et 9 000 m3 de blocs en béton (X-blocs pour la carapace) seront mis en oeuvre. Réalisés par l’entreprise Boskalis International, ces travaux prendront fin en mai 2012.
Huit domaines-clés sont concernés : 1. Reconstruction et extension des quais G du terminal à conteneurs. Le chantier prévoit la construction d’un quai en rideau mixte (pieux/ palplanches) de 800 m de long et de 15 m de profondeur. Pour ne pas interrompre l’exploitation du terminal à conteneurs, les travaux se dérouleront en trois phases : construction du quai G4, long de
PUBLI-INFORMATION
270 m, puis du quai G1 (250 m) et, enfin, du quai G2G3 (280 m). Au total, 9 300 tonnes de structure métallique et de 12 700 tonnes de béton seront utilisées pour ces travaux d’une durée de 34 mois. Ils sont exécutés par le groupement Saipem Socofran. Le premier quai (G4) sera livré en avril 2012.
3. Aménagement et extension du terre-plein du terminal à conteneurs. Ces travaux permettront d’aménager un terre-plein de 32 ha, dont 6,5 ha gagnés sur la mer grâce à un remblai de 285 000 m3 de sable issu du dragage. Ils comprennent également la réalisation de deux digues (cavaliers) de protection et de retenue longues de 300 m au Nord et à l’Est du terminal, ce qui représente
le Port autonome de Pointe-Noire (PAPN) a lancé depuis décembre 2010, un ambitieux programme de réhabilitation, d’extension et de modernisation des infrastructures lourdes.
4. Aménagement de la zone logistique et construction de la voie dédiée. La zone logistique sera installée sur un terre-plein de 4,5 ha situé à l’extérieur des emprises du terminal à conteneurs, auquel elle sera reliée par une route dédiée de 1 km. Un atelier sera construit pour la réparation des engins opérant sur le terminal. La durée de réalisation de cette opération est de 42 mois. La première tranche des travaux, concernant l’aménagement de 2,5 ha de terre-plein, a déjà été réalisée par la société Socofran.
5. Dragage d’approfondissement des accès portuaires. Afin d’accueillir des navires de type Aframax pouvant transporter jusqu’à 7 000 conteneurs, le chenal d’accès du Port de Pointe-Noire, ainsi que le cercle d’évitage, seront dragués à une profondeur de 16 mètres, ce qui leur permettra d’être en adéquation avec le quai G4. Les travaux commenceront au tout début de 2012, pour une durée de 4 mois.
6. Réhabilitation et extension du réseau de distribution d’eau. Pour améliorer l’avitaillement en eau potable des navires et la sécurité contre l’incendie, l’entreprise China Geo Engineering Corporation posera au total plus de 10 km de conduites de divers diamètres (15 à 25 cm), 20 poteaux et 41 bouches d’incendie. En parallèle, un château d’eau d’une hauteur de 50 m est en construction. D’une capacité 1 000 m3, couplé à un réservoir enterré de 1 300 m3, il permettra d’assurer un débit de 1 050 m3 par jour et de garantir une pression minimum d’eau de 3 bars sur les sites du port les plus éloignés. La durée de réalisation est estimée à 21 mois.
7. Réhabilitation et extension du réseau d’électricité. Pour améliorer la qualité de fourniture de l’électricité dans le port, l’entreprise ETDE Congo doit installer 5,5 km de câbles enterrés, 4 postes de transformation, 71 poteaux d’éclairage, 81 projecteurs et 8 groupes électrogènes de 400 KVA. La durée de réalisation est de 12 mois.
8. Réhabilitation du terre-plein bord à quai D. Ces travaux, qui couvrent une superficie de 21 950 m2 ont déjà été réalisés à plus de 90 % par la société Socotrans. La fin des travaux est prévue pour décembre 2011. Couplée à la mise en service prochaine de la route Pointe-Noire/ Brazzaville, au renforcement des capacités de transport du chemin de fer Congo Océan, ainsi qu’à l’amélioration de l’offre de transport sur le réseau fluvial navigable, la réalisation effective de son programme d’investissements permettra au Port de Pointe-Noire de conforter son rôle de principal port de transit et de transbordement d’Afrique centrale.
Port Autonome de Pointe-Noire
Avenue de Bordeaux - B.P. 711 - Pointe-Noire, RÉPUBLIQUE DU CONGO Tél : +242 22 294 00 52 - Fax : +242 22 294 20 42 - E-mail : papn2006@yahoo.fr
DIFCOM/FC - PHOTOS : DR
190 000 tonnes d’enrochement. En outre, le revêtement existant sera démoli, 10 km de longrines de portiques de parc seront construits, ainsi que 1,9 km de caniveaux et 3 bassins antipollution, sans oublier plusieurs réseaux d’eau. Le terminal sera équipé de 8 portiques de quai pour le chargement et déchargement des conteneurs et de 32 portiques de parc de type RTG pour les opérations de manutention. Les travaux sont réalisés par les entreprises Socofran, Boskalis et Socotrans sur une durée 42 mois. La première tranche de terre-plein sera livrée en juin 2012, parallèlement avec le quai G4.
Économie
NIGERIA
Banques : aux grands maux les grands remèdes
ALGÉRIE
Tlemcen drague les touristes
Des barons en CÔTE D’IVOIRE
Administration, entreprises publiques et parapubliques… Le président Alassane Ouattara redistribue les cartes en nommant des proches aux postes clés. Pendant ce temps, les groupes étrangers placent leurs pions. Revue de détail.
PASCAL AIRAULT
Q
uatre mois après la chute de Laurent Gbagbo, la valse des directeurs généraux et présidents de conseil d’administration se poursuit en Côte d’Ivoire. Le nouveau chef de l’État, Alassane Dramane Ouattara (ADO), nomme à tour de bras dans l’administration et dans les entreprises publiques et parapubliques. Cette recomposition du paysage mécontente l’opposition, qui dénonce la mise en coupe réglée de l’économie par les Nordistes. « Le président nous invite à rentrer pour participer à la réconciliation et à la reconstruction, après nous avoir limogés et coupélesvivres,s’emporteunpatronpro-Gbagboen exil au Ghana. Mais nous n’avons aucune garantie sécuritaire pour reprendre une activité. » En fait, ADO a d’abord verrouillé les régies financières de l’État, en nommant des proches aux postes à responsabilité. Il a notamment promu son frère, Ibrahim Ouattara, surnommé « Photocopie » pour sa ressemblance avec le chef de l’État, comme nouveau directeur administratif et financier de la présidence, et mis ses hommes à l’Inspection généraled’État(quicontrôlenotammentlessociétés publiques) et aux directions du Trésor, des impôts et des douanes. Il a aussi installé Hilaire Marcel Lamizana à la tête du port de San Pedro, Lacina Coulibaly à la Banque pour le financement de l’agriculture, Mamah Diabagaté à la Caisse nationale des caisses d’épargne, Bouaké Méité à la Société des transports abidjanais, Mamadou Konaté à la Poste, Lamine Coulibaly à l’Agence de gestion foncière, Issiaka Bamba à la Société de gestion du patrimoine immobilier de l’État… D’autres,auprofilhybridedepoliticiens(membres du Rassemblement des républicains, de Ouattara) et de chefs d’entreprises, se sont vu remercier de leur soutien politique et financier par des maroquins ministériels. Adama Bictogo (négoce et services) N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Hien Sié Nouveau directeur du Port autonome d’Abidjan
a hérité du ministère de l’Intégration africaine, Gaoussou Touré (agroalimentaire) des Transports, Hamed Bakayoko (médias) de l’Intérieur. On prête aussi des intentions économiques à la première dame, Dominique Ouattara, bien qu’elle affirme s’êtredésengagéedesesaffaires(immobilier,médias, franchises) pour se consacrer à sa fondation. Elle rencontre en tout cas très régulièrement les grands patrons, à Abidjan comme à l’étranger. CONFLITS D’INTÉRÊTS ? Déjà, on craint des
conflits d’intérêts dans un pays où l’affairisme est très répandu. Cette pratique s’est perpétuée
JEUNE AFRIQUE
LIBERIA
Bataille du rail entre miniers
CAMEROUN
Les déchets « énergétiques » de Hysacam
INTERVIEW
Yannick Morillon PDG de Geocoton
CRISE BOURSIÈRE
Contagion en vue
chassent d’autres
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décisif à ADO au second tour. Comme Guy Koizan, son beau-frère, qui a obtenu la direction générale de Versus Bank, et Hien Sié, un allié historique, qui prend la direction du Port autonome d’Abidjan. Son ancien ministre délégué au Budget à la fin des années 1990, Jean-Baptiste Aman Ayayé, s’est vu confier les clés de l’antenne nationale de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Daniel Gnangni, frère de ! Ports Pierre Gnangni, un cacique d’Abidjan du parti, prend le contrôle de (ci-contre) et la Société nationale des opéde San Pedro, rations pétrolières (Petroci). directions du Trésor, des Noël Akossi Bendjo, maire douanes et des de la commune du Plateau, impôts… JEU DE à Abidjan, remplace Laurent CHAISES MUSICALES Ottro Zirignon à la tête du à la tête des conseil d’administration de institutions. la Société ivoirienne de raffinage, dont il avait déjà été directeur général sous Bédié. ADO a encore nommé un autre cadre du PDCI, Marcel Zadi Kessy (président de la Compagnie ivoirienne d’électricité et de la Société de distribution de l’eau), à la tête du Conseil économique et social. Et promu Kassi N’da, proche de l’ancien Premier ministre Seydou Diarra, directeur général de la Banque nationale d’investissement. En mai, il a confié le poste de gouverneur de la BCEAO à Dakar à Meyliet Tiémoko Koné, directeur de cabinet de Guillaume Soro. Dans le camp présidentiel, on se défend, bien sûr, de fonctionner sur une base partisane, assurant privilégier « la compétence à tous les postes ». « Je ne suis pas inquiet, confie Jean-Louis Billon, président de Sifca (agroalimentaire). Le nouveau chef de l’État va favoriser la libre entreprise. » S i f c a , p re m i e r groupe ivoirien, « Je ne suis pas inquiet. poursuit d’ailleurs Le nouveau chef de l’État va son implantation favoriser la libre entreprise. » dans les pays limiJEAN-LOUIS BILLON, président du groupe Sifca trophes, en rachetant des plantations d’hévéas et de palmiers à huile, et cherche toujours un partenaire d’envergure dans l’industrie sucrière. Le groupe NSIA, de Jean Kacou Diagou, continue également son expansion régionale : il vient
sous Houphouët-Boigny (1960-1993) et Henri Konan Bédié (1993-1999) : il fallait être coopté par le pouvoir pour rentrer dans les activités économiques. Laurent Gbagbo (2000-2010) n’a fait que pérenniser le système, en confiant les rênes des sociétés publiques à ses compagnons de lutte et en favorisant l’émergence d’entrepreneurs proches. On s’attend aujourd’hui à une nouvelle donne dans les domaines de la distribution, des stationsservice, de l’immobilier… Parmi les promus, on trouve aussi les hommes de Henri Konan Bédié, patron du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), qui a apporté un soutien JEUNE AFRIQUE
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Entreprises marchés
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d’acquérir l’assureur nigérian Adic Insurance. Enfin, les opérateurs libanais, qui possèdent environ un tiers de l’économie ivoirienne, souhaitent aussi poursuivre leurs investissements. À l’image de NasserSeklaoui(distributionetnégoce),quiprévoit de monter prochainement une usine d’assemblage d’équipements hifi-vidéo, après avoir récupéré la commercialisation des produits Samsung. PRIVATISATIONS. « Très bientôt, c’est toute la
ADO a manifesté sa volonté de renforcer la coopération avec des sociétés françaises.
Côte d’Ivoire qui sera en chantier… Vous aurez des emplois et vous aurez aussi les financements promis pour vos projets », a déclaré ADO, le 7 août, à l’occasion du 51e anniversaire de l’accession à l’indépendance du pays. Son programme pour les cinq prochaines années est basé sur l’investissement de 12 000 milliards de F CFA (18,3 milliards d’euros) dans l’énergie, les infrastructures et le social. Mais le lancement des grands chantiers pourvoyeurs d’emplois, comme le terminal à conteneurs de l’île Boulay, le troisième pont d’Abidjan, l’aéroport international de San Pedro, l’extension du réseau routier ou encore le transfert des institutions à Yamoussoukro, connaît des retards. Les autorités peinent actuellement à trouver 103 milliards de F CFA pour boucler leur budget 2011. Pour l’instant, ADO pare au plus pressé. Il a mis en place un programme présidentiel d’urgence de 45 milliards de F CFA pour réhabiliter les secteurs de la santé, de l’eau, de l’électricité, de l’école et de la salubrité urbaine. Les travaux sont confiés à des entreprises locales, notamment pour la réfection des bâtiments administratifs, du réseau routier, de la prison d’Abidjan… L’ancien directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI), rompu aux méthodes américaines, prépare néanmoins l’avenir. Sont associés à la réflexion Amadou Gon Goulibaly, secrétaire général de la présidence, et le Français Philippe Serey-Eiffel, son puissant conseiller économique, deux anciens dirigeants de la Direction centrale des grands travaux. Et des ministres comme Adama Toungara (Mines, Pétrole et Énergie).
Adama Toungara
• Ministre des Mines, du Pétrole et de l’Énergie.
SIA KAMBOU/AFP PHOTO
Originaire de Duékoué, dans l’Ouest du pays, Adama Toungara, 68 ans, est le père de l’industrie pétrolière ivoirienne. Il a présidé les conseils d’administration ou assuré la direction générale de presque toutes les entreprises publiques, dont la Société ivoirienne de raffinage et la Petroci. Et conseillé le président Houphouët-Boigny dans le domaine de l’énergie. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
ADO a sollicité les cinq grands cabinets d’audit et de conseil de la place (KPMG, Deloitte, Ernst & Young, Auditeurs associés, PricewaterhouseCoopers) pour réaliser le diagnostic des 43 sociétés publiques, dont certaines sont promises à une privatisation dans les douze prochains mois. Il a annoncé en juillet qu’il voulait réduire de 25 % le portefeuille de l’État. Pétrole, services, banques… Les capitaux de plusieurs fleurons de l’industrie devraient être ouverts. « Il y a une volonté manifeste de faire l’inventaire de l’existant et de se projeter vers le futur en faisant appel à des groupes répondant aux normes internationales », explique Jean-Luc Ruelle, de KPMG. « WORLD COMPANY ». Dans les milieux d’affai-
res, on ironise déjà à propos du débarquement prochain de la « world company » sur la lagune. En réalité, les présidents successifs du pays ont toujours invité les groupes étrangers à opérer en Côte d’Ivoire. Mais ADO, lorsqu’il était Premier ministre de 1990 à 1993, a accéléré le mouvement de libéralisation, en confiant notamment la concession de l’eau et de l’électricité au français Bouygues. Depuis sa prise effective du pouvoir en avril, il a manifesté sa volonté de renforcer la coopération avec les entreprises françaises. Total et Bouygues ont prévu d’intensifier leurs prospections dans les hydrocarbures d’ici à la fin de l’année. Vincent Bolloré, malgré son soutien à Gbagbo lors de la campagne, a sauvé sa concession portuaire et lorgne celle de l’île Boulay avec appétit. Carrefour est en pourparlers avec les nouvelles autorités pour une entrée dans la distribution. Auchan s’intéresse aussi aux potentialités du marché ivoirien. Dans le BTP, SogeaSatom va installer prochainement un bureau à Abidjan. Un secteur très concurrentiel où opèrent d’autres sociétés françaises, comme Sibagec et Sud Constructions, ainsi que Pierre Fakhoury Operator, au capital belgo-ivoirien. Le Premier ministre français, François Fillon, en visite à Abidjan en juillet, a annoncé l’annulation prochaine de 1 milliard d’euros de dette bilatérale et la reconversion de 2 milliards en contrat de désendettement et de développement. De quoi favoriser un retour en force des entreprises hexagonales – il y a déjà 140 filiales de grands groupes et 500 PMI-PME en Côte d’Ivoire –, qui comptent se positionner sur les projets de reconstruction et les secteurs les plus dynamiques. Mais ADO souhaite aussi diversifier ses partenariats, jouant de son carnet d’adresses international. Il a déjà effectué des déplacements aux États-Unis, au Ghana et au Nigeria – premier partenaire commercial devant la France –, puis reçu son ami Stanley Fischer, gouverneur de la Banque centrale d’Israël. Les Marocains, qui mènent une politique agressive en Afrique subsaharienne, étudient aussi JEUNE AFRIQUE
Entreprises marchés Daniel Gnangni SERVICE COMMUNICATION PETROCI
• Directeur général de la Petroci. Né en 1950 à Grand-Lahou, dans le sud du pays, Daniel Gnangni a fait une grande partie de sa carrière à la Petroci, où il a notamment occupé les postes de directeur exploration et de conseiller du directeur. Il a également été directeur de cabinet du ministre des Mines et de l’Énergie Yed Esaïe Angoran de 1987 à 1993. les potentialités du marché ivoirien. Attijariwafa Bank a racheté en 2009 la Société ivoirienne de banque, et Addoha prévoit d’investir 20 milliards de F CFA dans une cimenterie. Le déficit en habitations est tel, en Côte d’Ivoire, que les autorités vont prochainement lancer un programme de 300 000 logements sociaux, autre secteur où le groupe marocain intervient. Dans le négoce du café-cacao, les américains CargilletArcherDanielsMidlands,lesuisseBarry Callebaut et l’anglais Armajaro devraient garder la mainmise sur les exportations. Le singapourien
Olam, déjà présent dans l’anacarde, l’huile de palme, le coton et le cacao, cherche à se positionner sur des nouveaux marchés et à racheter des sociétés locales. Son PDG, Sunny Verghese, sera à Abidjan début septembre. Dans le domaine des franchises, les choses devraient également bouger. La chaîne Hippopotamus a ouvert récemment un restaurant dans le quartier du Plateau, et l’arrivée de McDonald’s est annoncée. Dans l’énergie, le ministre Adama Toungara finalise actuellement sa stratégie de valorisation des ressources nationales. Il devrait mettre aux enchères de nouvelles concessions pétrolières. Il étudie aussi le secteur des mines, où le sud-africain Randgold et l’indien Tata Steel ont récemment fait leur entrée. Des avantages fiscaux sont proposés aux entrepreneurs voulant investir dans le nord du pays. Mais, pour l’instant, les ex-seigneurs de guerre, intégrés progressivement dans la nouvelle armée, ont toujours le contrôle des ressources. Au Nord comme au Sud, la plupart des investisseurs restent prudents en raison de l’insécurité et des tensions politiques. Le réel décollage de l’économie ne devrait avoir lieu qu’après la tenue des législatives, promises avant la fin de l’année. ●
Que deviennent les amis de Gbagbo? Certains ont été limogés sans ménagement. D’autres veulent se faire oublier. Et quelques-uns tentent un retour en grâce.
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résidentd’ungroupedelobbying au nom explicite – Les amis de Laurent –, Simplice Zinsou paie cher sa proximité avec le chef d’État déchu : le président de l’Aéroport international d’Abidjan a été démis de ses fonctions sans ménagement, puis remplacé par le général d’aviation Abdoulaye Coulibaly, un proche d’Alassane Ouattara. Après la chute de Gbagbo, le 11 avril, les patrons qui le soutenaient ouvertement ont soigneusement été écartés. C’est sans surprise, par exemple, que Bernard Koné Dossongui, patron du Groupe Atlantique et proche de Laurent Gbagbo durant la campagne, a perdu sa majorité dans le capital de la compagnie nationale Air Ivoire, en passe d’être relancée par Air France. En outre, le groupe français BCP s’intéresse à son réseau bancaire, présent dans huit pays africains. Victor Silué Nembelessini n’a pas non plus été épargné : sa proximité avec Simone Gbagbo et son refus d’entrer au gouvernement d’Aké N’Gbo lui ont coûté JEUNE AFRIQUE
Enfin, certains jouent des coudes pour se faire une place ou se mettre sous la protection de ministres influents et de chefs des Forces républicaines de Côte d’Ivoire, avec qui ils pourraient monter des affaires. Kassoum Fadika, ex-patron de la Société nationale des opérations pétrolières(Petroci),envisagedefonderun cabinet de consultants dans le domaine du
la direction de la Banque nationale d’investissement. Lot de consolation : il a été nommé administrateur pour la Côte d’Ivoire d’Afreximbank. Martin Djedjes, lui, a évité le revers présidentiel, mais la foudre est venue d’ailleurs : Charles Kader Gooré évite le directeur général de la Banque internationale Abidjan et laisse ses proches pour l’Afrique de l’Ouest gérer ses affaires ivoiriennes. a été sanctionné par son patron, Jean Kacou Diagou, pour n’avoir pas respecté ses consignes pétrole. Roland Dagher, fidèle de Gbagbo durant la crise. extrait de la liste nationale des sanctions, est rentré en Côte d’Ivoire et poursuit SOUS PROTECTION. D’autres tentent de ses activités dans l’imprimerie. Quant à se faire oublier hors du territoire. Charles l’hommed’affairesivoiro-libanaisIbrahim Kader Gooré, patron du groupe CKG Ezzedine,prochedel’ex-premièredameet qui contrôle l’importation du riz, ils’est mis Holding, laisse ainsi ses proches gérer ses affaires ivoiriennes. L’ancien directeur de sous la protection du commandant Issiaka campagne de Gbagbo dans l’Ouest prend Ouattara, alias Wattao, numéro deux de la le soin d’éviter Abidjan. Revenir, Marcel Garde républicaine. Il a même rencontré Gossio, lui, lewvoudrait bien. Mais l’anl’ancien président Henri Konan Bédié, lui cien directeur général du Port autonome promettant la création de 500 emplois d’Abidjan, qui s’est réfugié hors du pays, pour la jeunesse. ● craint pour sa sécurité. BAUDELAIRE MIEU, à Abidjan N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Entreprises marchés NIGERIA
Banques: aux grands maux les grands remèdes Avec l’annonce surprise de la nationalisation de trois établissements, la réforme du secteur touche à sa fin. À la clé, l’arrivée de fonds de capital-investissement et l’émergence de nouveaux leaders.
A
u bord du précipice il y a encore deux ans, le secteur bancaire nigérian s’apprête à entrer dans une nouvelle ère, avec des établissements financièrement plus solides. La réforme initiée par Lamido Sanusi, gouverneur de la Banque centrale du Nigeria (lire encadré), a permis à ce secteur, désormais débarrassé de l’essentiel de ses créances douteuses (3,4 milliards d’euros), de repartir sur des bases plus saines. Alors que l’actualité de ces dernières semaines a été marquée par des annonces de fusions et acquisitions dans le secteur, la Banque centrale a surpris le microcosme financier africain : elle a annoncé le 7 août la nationalisation d’Afribank, de Bank PHB et de Springbank, toutes trois secourues en 2009 et toujours en quête de potentiels investisseurs. En fait, elle a confié leur gestion à un organisme public dénommé Nigeria Deposit Insurance Corporation (NDIC), qui va y injecter 2,8 milliards d’euros et tâcher de les rendre rentables. « En procédant ainsi, les autorités nigérianes ont voulu limiter tout impact négatif qu’aurait pu avoir un échec de la recapitalisation de ces trois banques sur l’ensemble du système bancaire », estime Razia Khan, analyste chez Standard Chartered, à Londres. Juin 2009. L’économie mondiale peine encore à se remettre de la sévère crise financière qui l’a ébranlée un an plus tôt. Au Nigeria, la Banque centrale décide de tester la capacité de résistance des 24 établissements de son système bancaire et découvre avec stupeur N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
que neuf d’entre eux sont au bord de la faillite. Quelque 3 milliards d’euros sont alors injectés dans ces banques, leurs dirigeants sont limogés et traduits en justice pour mauvaise gestion et pratiques frauduleuses. Ainsi renfloués et réorganisés, ces établissements se sont vu imposer la date du 30 septembre 2011 comme échéance pour trouver des repreneurs.
L’État nationalise
À LA TRAÎNE. Les trois éta-
Afribank devient blissements nationalisés, Mainstreet Bank dont les clients avaient d’ailleurs déjà commencé Bank PHB devient Keystone Bank à effectuer d’importants retraits d’espèces, étaient à Springbank devient la traîne dans leur processus Enterprise Bank de recapitalisation. Afribank était certes en discussion avec une autre banque locale, Fidelity Bank, mais l’issue de cette négociation Mais, là non plus, rien de concluant était incertaine. Un premier protone se dessinait. Quant à Bank PHB, cole d’accord avec le fonds de capielle non plus n’était pas parvenue tal-investissement Vine Capital à convaincre la Banque centrale Partners (VCP) avait été rejeté, avec son plan de sauvetage, qui en juillet, par la Banque centrale. devait lui permettre de recouvrer environ 280 milliards d’euros de créances douteuses avant la fin Ce processus a conduit au de septembre. rachat de quatre institutions Désormais gérées par la NDIC, par des concurrents. Afribank devient Mainstreet Bank, Bank PHB Keystone Bank Celle-ci avait estimé que VCP, basé et Springbank Enterprise Bank. aux États-Unis et qui intervient « L’État n’ayant pas vocation à gérer notamment en Afrique avec des des banques, ces établissements investissements allant de 3,5 mildevront être cédés à des investislions à 17,5 millions d’euros, n’avait seurs privés dès qu’ils deviendront pas suffisamment de moyens pour rentables », indique Paul-Harry reprendre Afribank. Aithnard, directeur de la recherche Pour sa part, Springbank du groupe Ecobank. négociait avec l’indien Icici Bank (numéro deux en Inde, CARTES REDISTRIBUÉES. Mais la réforme initiée par la Banque avec 64 milliards d’euros d’actifs gérés) et le fonds d’investissement centrale a également conduit à américain Cloudleap Partners. la reprise par recapitalisation de JEUNE AFRIQUE
Entreprises marchés deuxième groupe bancaire nigérian (et le cinquième en terme de dépôts). « Nous sommes dans la droite ligne de notre ambition, qui consiste à compter parmi les trois premiers établissements sur chacun des marchés où nous sommes présents », indique Paul-Harry Aithnard. Ecobank, implantée dans 32 pays du continent, réalise près de 25 % de ses revenus au Nigeria.
GEORGE OSODI/PANOS-REA
ENTRE NIGÉRIANS. Autre gagnante
quatre autres banques en difficulté. Ce faisant, elle a permis de redistribuer les cartes et favorisé l’émergence de nouveaux leaders. Ainsi, Access Bank (jusque-là septième par le total de bilan) a réalisé une bonne opération en rachetant Intercontinental Bank (neuvième) pour 270 millions d’euros, devenant ainsi un groupe qui pèse, avec un total de bilan de 6,3 milliards d’euros.
De même, le groupe panafricain Ecobank (douzième) a signé, le 31 juillet, au nez et à la barbe de Diamond Bank, autre ténor du secteur, un protocole d’accord pour l’acquisition et la recapitalisation d’Oceanic Bank (sixième). La transaction, qui doit être bouclée en décembre 2011, prendra la forme d’un échange d’actions et permettra de créer un réseau de 620 agences, soit le
! En juin 2009, LA BANQUE CENTRALE DU
NIGERIA (à Abuja) avait découvert que neuf établissements étaient au bord de la faillite.
de la reconfiguration du secteur : First City Monument Bank (FCMB), qui a racheté FinBank. L’opération permet à FCMB, jusque-là spécialisée dans le corporate et la banque d’investissement, de développer son activité de banque de détail sur un marché de 155 millions d’habitants. Enfin, Union Bank of Nigeria a quant à elle réussi à attirer au sein de son capital un consortium d’investisseurs institutionnels dirigé par la société d’investissement African Capital Alliance. La banque devrait ainsi bénéficier d’un nouvel apport de fonds de 525 millions d’euros. Alors qu’au début de la réforme de nombreux analystes ont tablé sur l’arrivée de banques étrangères, il n’en a finalement rien été. Les établissements nigérians ont surtout fusionné entre eux. D’après Cyrille Nkontchou, cofondateur de la société de gestion d’actifs Enko Capital, basée en Afrique du Sud, « cela peut être bénéfique pour l’économie du pays, qui va voir émerger de nouveaux opérateurs de taille encore plus importante, capables de rivaliser avec des acteurs internationaux ». ● STÉPHANE BALLONG
LAMIDO SANUSI, L’INTRANSIGEANT QUI MIEUX QUE Lamido Sanusi, gouverneur de la Banque centrale depuis juin 2009, pourrait incarner le nouveau visage du système bancaire nigérian ? Lui-même ancien haut cadre du secteur, il n’a pas hésité à s’attaquer, quelques semaines seulement après sa nomination, aux fraudes et à la corruption qui ont terni l’image des banques de Lagos. « Je ne nettoie pas que le secteur bancaire, mais tout le Nigeria », aime-t-il à dire. Il est sur point d’atteindre son objectif : doter le pays d’un secteur bancaire plus performant et constitué JEUNE AFRIQUE
d’une vingtaine d’établissements (contre plus de 90 en 2005), mieux gérés et capables de jouer pleinement leur rôle. Formé au Nigeria puis au Soudan, Lamido Sanusi est sans doute la personnalité qui a le plus marqué l’histoire récente de l’industrie bancaire nigériane, voire de son pays. Le magazine américain Time l’a classé, cette année, parmi les 100 personnes les plus influentes du monde.Tandis que le journal britannique The Banker (propriété du FinancialTimes), S.B. l’a désigné « gouverneur de l’année ». ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Entreprises marchés
HOTEL RENAISSANCE TLEMCEN
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! 12 suites, 192 chambres… LE RENAISSANCE marque l’arrivée dans le pays du groupe américain Marriott. ALGÉRIE
Tlemcen drague les touristes Capitale de la culture islamique 2011, la « perle du Maghreb » a vu plusieurs hôtels ouvrir récemment leurs portes. La ville d’art et d’histoire profite de l’événement pour promouvoir la région.
U
n nouveau pôle touristique algérien ? Sacrée Capitale de la culture islamique 2011 par l’Organisation islamique pour l’éducation, les sciences et la culture (Isesco), Tlemcen est, pendant un an, sous les projecteurs du monde musulman. Premier effet, et pas des moindres: cette distinction a dopé les projets hôteliers. Nombreux sont les établissements qui ont ouvert leurs portes depuis avril, début des festivités. C’est le cas du Renaissance, un 5 étoiles géré par le groupe américain Marriott (dont c’est le premier contrat en Algérie). Avec 12 suites et 192 chambres à 9 000 dinars la nuit (environ 85 euros) en offre de lancement (12000 dinars ensuite), l’établissementcible,àlongterme,la clientèleapportéeparl’universitéde Tlemcen, mais aussi par les compagnies pharmaceutiques et gazières qui se réunissent fréquemment en symposium dans la région. L’hôtelLesZianidessurfe luiaussi surlebuzz.Construitparl’architecte Fernand Pouillon et inauguré en 1975, cet établissement de l’Entreprise de gestion touristique de Tlemcen a été rénové avant de rouvrir ses portes, le 31 mars. Sept suites, 142 chambres, 400 couverts… Il N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
afficheuntaux d’occupation de 75 % à 80 %, notamment grâce aux délégations venues de nombreux pays musulmans, mais aussi des ÉtatsUnis, de Pologne, d’Espagne… Livré à la même date, le Pomaria, d’inspiration arabo-andalouse, s’est quant à lui orienté vers une clientèle familiale, avec une cinquantaine de chambres (entre 6 000 et 7000 dinars la nuit) et un restaurant de 250 couverts. La « perle du Maghreb » saurat-elle pérenniser sa fréquentation? « J’espère que cette affluence n’est passeulementconjoncturelleetque cela s’inscrira dans la durée », confie un hôtelier. Le directeur du nouvel hôtel Renaissance, André Saadé, se montre, de son côté, optimiste. Notamment parce que l’établissement peut espérer attirer la clientèle
Bien située • À 170 km d’Oran (au nord-est), ville d’affaires • À 60 km d’Oujda (à l’ouest, au Maroc), ville de tourisme
d’affaires qui afflue à Oran (située à 170 km), deuxième ville du pays, et à Arzew, pôle pétrochimique de la Sonatrach. PROXIMITÉ DU MAROC. Pour Saïd
Boukhelifa, conseiller au ministère du Tourisme, l’Ouest algérien est de mieux en mieux équipé pour satisfaire une clientèle souhaitant prolonger son séjour dans des établissement hôteliers haut de gamme. « Les hommes d’affaires disposent, à Oran, du Méridien et de son centre des congrès d’une capacité de 3000 places, mais aussi du Sheraton, de la chaîne hôtelière Eden et, à Tlemcen désormais, du Renaissance Marriott. » Enfin, Tlemcen veut profiter de sa proximité avec le Maroc (qui a accueilli près de 10 millions de touristes en 2010) et notamment avec Oujda, ville située à 60 km. Si d’aventure l’ouverture des frontières entre les deux pays était entérinée, il serait alors loisible de combiner les deux destinations pour relancer le tourisme dans la région. ● VÉRONIQUE NARAME, à Tlemcen
DES PROJETS TOUS AZIMUTS L’EXTENSION ET LA RÉHABILITATION du parc hôtelier algérien s’accélèrent sur l’ensemble du territoire: hôtel El-Aurassi à Alger, centre touristique Les Andalouses à Oran, hôtel Gourara àTimimoun… Le groupe Accor est engagé dans la construction d’un programme de 36 hôtels Ibis, Novotel et Etap, en partenariat avec la Société immobilière et d’exploitation hôtelière algérienne. En juin, deux Ibis ont été inaugurés, à Oran et àTlemcen. À Constantine, la réalisation d’un autre établissement est en cours. Le groupe Dahli (Hilton d’Alger), d’Abdelouahab Rahim, se lance pour sa part dans la réalisation d’Alger Medina, un complexe de 75 ha comprenant un centre d’affaires, un espace commercial, un port de plaisance et des équipements hôteliers. Les travaux avancent, dit-on, lentement. ● V.N. JEUNE AFRIQUE
Entreprises marchés LIBERIA
Bataille du rail entre miniers En rénovant la ligne Yekepa-Buchanan, ArcelorMittal s’est doté d’un outil logistique qui fait des envieux. BHP Billiton et Vale, qui exploitent des gisements dans la région, espèrent pouvoir en profiter eux aussi. GUINÉE GUINÉE
SIERRA LEONE Gisements de fer : ArcelorMittal (en exploitation)
Zogota
Vale-BSGR (en développement)
Yekepa
BHP Billiton (en développement) Zones d’exploration de BHP Billiton
Toto
CÔTE D'IVOIRE
Kitoma
ÉCHEC DES NÉGOCIATIONS.
SOURCE : BHP BILLITON
Chemin de fer exploité par ArcelorMittal
MONROVIA Océan Atlantique
F
Goe Fantro SJRS Port minéralier de Buchanan
in juin, le premier convoi de minerais d’ArcelorMittal a rallié par chemin de fer la mine de Yekepa au port de Buchanan. Pour la première fois depuis la fin de la guerre civile, les riverains de cette voie ferrée de 240 km ont à nouveau entendu siffler le train, exploité des années 1950 jusqu’en 1990 par la Liberian-American-Swedish Minerals Company (Lamco). Tout un symbole pour un secteur minier libérien en plein redémarrage. Pour ArcelorMittal, qui a investi 800 millions de dollars (560 millions d’euros) pour réhabiliter mine et voie ferrée, ce convoi est une belle réussite. Dès 2012, le sidérurgiste indienvapouvoirapprovisionnerses aciéries de 15 millions de tonnes de ferchaqueannée,aulieudel’acheter à des prix élevés et fluctuants sur les marchés. Mais surtout, étant le premier à réexporter du fer libérien depuis 2003, il s’est assuré la maîtrise de la seule voie ferrée existante, damant le pion à BHP Billiton et Vale, qui développent eux aussi des projets miniers dans la région. JEUNE AFRIQUE
LIBERIA
Dans un arrière-pays difficile d’accès, ArcelorMittal pourra bénéficier d’une flexibilité logistique essentielle, alors que ses rivaux vont devoir soit composer avec lui pour utiliser la voie YekepaBuchanan, soit construire leurs propres infrastructures, ce qui est nettement plus coûteux qu’une réhabilitation. « Notre accord avec Monrovia nous donne le management de la voie ferrée pendant toute la durée ée d’exploitation. Une clause laisse la possibilité d’une utilisation par une compagnie tierce, mais uniquement si elle n’interfère pas avec les activités d’ArcelorMittal », précise Lynn Robbroeckx, responsable de la communication du groupe au Liberia. L’australien BHP Billiton, qui développe six projets miniers dans la région – quatre au Liberia et deux en Guinée –, tous situés idéalement autour de la ligne (voir carte), comptait parvenir à un accord avec ArcelorMittal. Son ambition était de créer un mégacomplexe ferroviaire et minier, à l’image de
celui qu’il exploite aux côtés de Rio Tinto dans la région du Pilbara, en Australie. Mais les discussions, lancées début 2010, ont pour le moment été infructueuses. Fin septembre 2010, les deux compagnies annonçaient même officiellement mettre fin à leurs échanges sur le sujet. « La quantité de minerais d’ArcelorMittal qui empruntera la ligne Yekepa-Buchanan excède ce que transportait jadis Lamco. Nous ne prévoyons pas une surcapacité permettant d’y faire transiter un surplus conséquent », justifie Lynn Robbroeckx.
560
millions d’euros Coût de la réhabilitation de la mine deYekepa et de la voie ferrée
« Nous avons le temps, nous sommes encore en phase de développement et d’exploration », relativise DeirdraMcCracken,responsablede développement chez BHP Billiton Liberia, les mines du groupe australien ne devant pas démarrer avant 2018. Malgré l’échec des premières négociations, la compagnie n’a pas jeté complètement l’éponge. Une fois ses projets miniers plus avancés, elle espère que le gouvernement libérien mettra la pression sur ArcelorMittal pour lui laisser un peu de place malgré tout. Le brésilien Vale est lui aussi en embuscade. Allié à l’israélien em BSGR, il développe le gisement BS de Zogota, en Guinée, situé à quelques kilomètres de Yekepa, etescompteluiaussiemprunter l’anciennevoieferréedeLamco. Va Valedevracependantsurmonter un autre obstacle. À Conakry, le président Alpha Condé semble en prés effet remettre en cause l’accord, signé sous Sékouba Konaté, qui autorisait le groupe à traverser la
Cette voie approvisionnera le sidérurgiste indien de 15 millions de tonnes de fer chaque année. frontière libérienne avec du minerai guinéen. Vale, qui s’était engagé à construire une ligne pour le transport de passagers entre Conakry et Kérouané en échange, ne désespère pas de parvenir à un accord. ● CHRISTOPHE LE BEC N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Entreprises marchés CAMEROUN
Les déchets « énergétiques » de Hysacam La société de traitement des ordures ménagères a inauguré une centrale de captage de biogaz sur une décharge de Yaoundé. Objectifs : limiter les émissions de gaz à effet de serre et, à terme, produire de l’électricité.
I
l est loin le temps où les lourdes pertes d’Hygiène et salubrité du Cameroun (Hysacam) avaient poussé son ex-propriétaire, le groupe français Grandjouan, associé de Sita France (filiale de Suez Environnement), à se désengager de la société. Un groupe de salariés avait alors entrepris de racheter 80 % des parts mises en vente et, en 1994, avait entamé avec succès le redressement de l’entreprise née en 1969. Aujourd’hui, avec une dizaine de clients au Cameroun, qui sont exclusivement des collectivités territoriales, Hysacam réalise un chiffre d’affaires annuel de 20 milliards de F CFA (30,5 millions d’euros) et emploie 5 000 salariés. « Nos performances en matière de propreté urbaine sont visibles dans les villes où nous opérons », se félicite Michel Ngapanoun, un ancien cadre de 50 ans, passé directeur général en 1995. Les dirigeants de Hysacam croient en l’avenir et n’ont pas peur d’investir. La preuve ? Hysacam accroît ses capacités. L’entreprise vient de mettre 14 milliards de F CFA dans le renforcement de sa flotte de bennes destinées à la collecte des ordures ménagères. Livré par le constructeur français Renault Trucks, le lot de 125 camions a été réceptionné le 10 août au siège de Douala. La mise en service de ce nouveau matériel de ramassage va conforter la bonne réputation de cette entreprise, qui brille dans la filière très complexe de la gestion des déchets N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
MABOUP
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ménagers, où peu d’entrepreneurs africains osent s’aventurer. Mais Hysacam se diversifie aussi. Le 29 juin, la société a inauguré sa première centrale de captage de biogaz à la décharge de Nkolfoulou, près de Yaoundé. Cette infrastructure lui permettra d’éviter de rejeter dans l’atmosphère le méthane produit par le compactage des ordures ménagères, mais aussi, à terme, de le transformer en énergie électrique. « Mais pour cela, il faudra d’une part attendre d’avoir du gaz en quantité suffisante, et d’autre part adapter la législation camerounaise qui régit la production d’énergie », précise Michel Ngapanoun. ALÉAS. Après la centrale de Nkolfoulou, financée sur emprunt bancaire à hauteur de 3 milliards de F CFA, direction Douala. En construction sur la décharge de Bassa, dans la périphérie de la ville, cette deuxième centrale permettra d’éviter l’émission de 1 million de tonnes de gaz carbonique au cours des dix prochaines années. Mais si l’entreprise se préoccupe des gaz à effet de serre et n’exclut pas de se diversifier dans
! AVEC 5 000 SALARIÉS, l’entreprise est chargée de la propreté d’une dizaine de collectivités territoriales.
La construction d’une deuxième centrale, à Douala, empêchera l’émission de
1 million de tonnes de CO2 en dix ans
la production d’énergie, elle n’entend pas pour autant délaisser son premier métier: la collecte, le transport, le stockage et le traitement des ordures ménagères. Fort de ce savoir-faire et de sa bonne santé financière,Hysacamatentédes’implanter dans d’autres pays africains. En novembre 2008, l’entreprise a signé avec la Communauté urbaine de Niamey, au Niger, un contrat de cinq ans pour le ramassage des ordures dans cette agglomération d’1,5 million d’habitants. La crise politique a eu raison de l’accord, mais Hysacam projette de revenir sur ce marché prometteur. Partie remise également au Tchad, s’agissant du partenariat avec la ville de N’Djamena, où Hysacam a signé en août 2009 un contrat pour nettoyer la ville, en prélude à la célébration de la fête nationale. S’est ensuivi un accord sur cinq ans portant sur 17 milliards de F CFA, qui a été interrompu à la suite des ennuis judiciaires de Mahamat Zene Bada, l’ex-maire de la capitale tchadienne. En dépit des aléas de l’environnement des affaires, Hysacam veut poursuivre sur sa lancée. ● GEORGES DOUGUELI JEUNE AFRIQUE
Coulisses
Entreprises
EAU, ÉNERGIE, TRANSPORTS
Veolia s’en va
R
ien ne va plus chez Veolia Environnement.Legéant français de l’eau, de la propreté, de l’énergie et des transports a annoncé le 4 août une perte nette semestrielle de 67,2 millions d’euros, plombée par des dépréciations d’actifs de 800 millions d’euros. Ces résultats décevants – malgré un chiffre d’affaires en hausse de 15,5 % – sont dus aux piètres performances de ses filiales en Europe du Sud et en Afrique du Nord. Du coup, le groupe va réduire sa présence internationale de 77 pays à 40. L’Afrique, où il a réalisé 617 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2010 (5 % du total mondial), ne devrait pas être épargnée. Veolia a déjà annoncé sa sortie de deux contrats à Rabat (gestion des bus) et à Alexandrie (assainissement). SPÉCULATIONS. Mais la stratégie
de recentrage géographique et sectorielle n’étant pas encore connue, les spéculations vont bon train. Au Maroc, où Veolia est critiqué pour ses tarifs élevés, une négociation difficile a commencé avec les autorités pour le renouvellement des contrats d’eau et d’électricité à Rabat et à Tanger. Va-t-il persévérer ? Au Niger, le chiffre d’affaires annuel du groupe est inférieur au seuil de 30 millions d’euros évoqué par le PDG, Antoine Frérot, pour distinguer un contrat prioritaire. Le pays sera-t-il conservé dans le portefeuille ? Enfin, la Société gabonaise d’eau et d’électricité est enlisée dans un conflit avec Libreville sur la responsabilité des investissements. Le groupe pourrait vouloir ôter cette épine de son pied. Verdict de la direction à la fin de l’année. ● CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE
WONG MAYE-E/SIPA
Le groupe français veut se désengager de 37 pays, notamment en Afrique.
CAPITAL-INVESTISSEMENT OPPENHEIMER ET SINGAPOUR UNIS POUR L’AFRIQUE Le holding sud-africain E. Oppenheimer & Son (actionnaire de De Beers et fondateur d’Anglo American) et Sennett Investments, filiale du singapourienTemasek
• IDE Au 1
S
M
S
er
marchés
(actionnaire de Standard Chartered, Bank of China, Airtel, Olam…), s’apprêtent à lancer un fonds de capital-investissement destiné au continent. Il s’appelleraTana Africa Capital, sera doté d’une enveloppe de 300 millions de dollars (210 millions d’euros), et ciblera des prises de participation ou l’acquisition d’entreprises africaines spécialisées dans les biens de consommation, l’agriculture, les médias, la santé et l’éducation. Les montants de ses investissements (cinq à six par an) se situeront entre 40 millions et 50 millions de dollars, avec la possibilité de lever des capitaux supplémentaires pour des investissements plus importants. ●
semestre, l’Algérie a enregistré 20,1 G€ d’investissements,
dont 4,8 G€ venus de l’étranger • BIÈRE Le sud-africain SAB Miller s’apprête à renouveler une offre de 8 G€ pour le rachat de l’australien Foster’s • MINES L’indien Vedanta va prendre le contrôle de l’israélien
Western Cluster (présent au Liberia), pour 63 M€ • ARMES L’État
ghanéen a annoncé la commande de 5 avions, pour une valeur totale de 140 M€, dont 1 Embraer 190 et 2 Airbus C-295 • TÉLÉCOMS Brymedia West Africa a proposé 630 M€ pour acquérir l’opérateur public nigérian Nitel
FIRST QUANTUM EN PETITE FORME Le groupe canadien a revu ses prévisions de production de cuivre à la baisse, en raison de difficultés dans ses mines africaines. En 2011, il ne produira que 139475 tonnes de métal rouge, soit 18 % de moins qu’escompté. Les projets de Guelb Moghrein (Mauritanie) et de Kansanshi (Zambie) ont dû faire face à des difficultés opérationnelles ainsi qu’à une teneur en minerai inférieure à ce qui était attendu. ● STB AFFECTÉE PAR LA RÉVOLUTION La Société tunisienne de banque accuse le coup. Lors de la présentation de ses résultats semestriels, le 10 août
àTunis, elle a indiqué un produit net bancaire en baisse de 4,3 millions d’euros par rapport à 2010 (– 7,6 %). En cause, la baisse du tourisme, qui a affecté ses recettes liées au change et à la monétique, ainsi que l’augmentation du taux d’impayés. ● MAUREL & PROM DOPÉ PAR LE GABON La junior française vient d’annoncer un chiffre d’affaires de 292,5 millions d’euros au premier semestre 2011 (dont 70,8 millions au Nigeria), soit une hausse de 123 %. Il s’agit là, selon le pétrolier, du résultat de la montée en puissance de la production sur le champ d’Onal, au Gabon, qui a atteint près de 13000 barils par jour, contre 9500 sur la même période de 2010. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Décideurs INTERVIEW
Yannick Morillon
PDG
DE
G EOCOTON
« À la demande d’Alpha Condé, nous allons relancer la filière cotonnière » L’accord signé le 24 juin avec Conakry doit faire repartir un secteur sinistré. Et marque, pour la filiale d’Advens que dirige le Franco-Sénégalais Abbas Jaber, le début d’une nouvelle expansion en Afrique de l’Ouest. parvenons à des rendements de 1 t par hectare.
JEUNE AFRIQUE : Pourquoi revenir en Guinée, un pays que votre entreprise avait quitté en 1998 à la suite de conflits avec vos partenaires de l’époque ? YANNICK MORILLON : Parce
qu’il existe une forte volonté politique des autorités guinéennes pour que nous y retournions ! Le président Alpha Condé est venu nous voir à Paris en avril, pour nous demander de l’aider à redémarrer la filière. Originaire de la région cotonnière de Kankan, il savait que la Compagnie française pour le développement des fibres textiles [CFDT, ancêtre de Geocoton, NDLR] avait laissé un bon souvenir chez les agriculteurs guinéens. Présents de 1985 à 1998, nous avions poussé la production annuelle jusqu’à 46 000 tonnes de coton graine [contre moins de 1 000 t aujourd’hui]. Et cela même si nous étions en désaccord avec certains partenaires non agricoles et le gouvernement de l’époque. Quelle est votre stratégie pour relancer la filière ?
L’accord signé fin juin concerne la campagne cotonnière 20112012 : il s’agit de relancer les plantations et d’auditer l’outil industriel. Quatre experts de Geocoton ont été dépêchés sur place avec 300 t de semences. Cela représente 1 million d’euros d’investissement. Aujourd’hui, 6 000 hectares ont déjà été ensemencés. Nous travaillons dans la région de Kankan, mais aussi dans le nord du Fouta-Djalon. Nous répondons ainsi à la demande d’Alpha Condé, qui souhaite montrer qu’il ne privilégie pas sa région N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Êtes-vous dans une logique d’expansion en Afrique de l’Ouest ?
D.R.
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! Également directeur général administrateur du holding ADVENS, il est en poste depuis janvier 2011.
d’origine au détriment des autres. Mais au-delà des plantations, deux défis majeurs attendent le coton guinéen : l’alimentation en énergie des usines et la logistique. Deux chantiers que nous allons étudier en profondeur avant de faire des propositions. Une fois la première campagne passée, quels sont vos objectifs à plus long terme ?
Si le gouvernement est d’accord, nous souhaitons créer, en association avec l’État, une société cotonnière où nous serions majoritaires. Nous pensons pouvoir produire 50 000 t par an, en nous inspirant de ce que nous faisons au sein de notre filiale burkinabè, la Société cotonnière du Gourma, où nous
Geocoton en bref • Anciennement CFDT, devenue Dagris, puis Geocoton en 2008 • 3 039 salariés, à 95,5 % africains • 11 filiales en Afrique, présent aussi en Asie centrale
Nous terminons une phase de réorganisation. Nous cherchons à nous recentrer sur l’Afrique, où nous réalisons 90 % de notre chiffre d’affaires et pouvons mutualiser nos moyens. Nous restructurons aussi notre dette avec des partenaires bancaires présents sur le continent. Les effets de cette démarche se font déjà sentir, même si nous avons aussi été aidés par la bonne tenue des cours. En 2010, nous avions un chiffre d’affaires de 301 millions d’euros, qui devrait croître de 9 % en 2011. Notre plan stratégique en quatre ans doit nous amener à 460 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2014. Nous sommes donc prêts à saisir les opportunités africaines… Justement, la Compagnie malienne des textiles [CMDT] est engagée dans un processus de privatisation, qui semble enlisé pour le moment… Êtes-vous intéressé ?
La CMDT est l’une des plus belles sociétés cotonnières ouest-africaines. Nous sommes intéressés, bien sûr, mais à condition d’avoir toutes les informations sur chacun des quatre lots mis en vente, ce qui n’était pas le cas lors du premier appel d’offres, en janvier. Nous avions alors renoncé à présenter une offre. Si la donne change, nous pourrions revoir notre position. ● Propos recueillis par CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE
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MAROC
Karim Mazouzi double ses capacités
I
nstallée depuis 2000 dans la zone industrielle de Mohammedia, Accent, la PME de Karim Mazouzi, emploie une centaine de personnes et fabrique le « premier ordinateur 100 % marocain ». C’est la grande fierté de ce fils d’émigrés arrivé dans l’informatique sur le tard, après desétudesdegéomètre-topographe au Conservatoire national des arts et métiers, à Paris. Après avoir roulé sa bosse en France dans le bâtiment puis l’automobile, il est parti à l’assaut de ce secteur en créant, en 1994, DBM France. L’année suivante, il s’est installé à Casablanca pour y fonder DBM Maroc, « un vieux projet ». Il y vend du matériel informatique, des consommables, des services de réparation… Avec la croissance du marché de l’ordinateur personnel, Karim Mazouzi flaire l’opportunité de créer sa propre marque. Ce sera Accent, née en 2000. Son usine continue d’assembler pour des grandes marques (Toshiba, Dell) mais, aujourd’hui, la marque maisonécoule20000unitésparan,dont
près de 80 % de portables. Le premier semestre 2011, marqué par un doubleralentissementimputableau Printemps arabe – report des achats de biens d’équipement et arrivée sur le marché marocain des stocks constitués par les constructeurs en Tunisie, en Égypte et en Libye –, a été « blanc ». Mais les carnets de commandes pour la rentrée de septembre sont pleins. « NETBOOK » ROSE. Accent réalise
un gros tiers de ses ventes dans le cadre des grands appels d’offres, notamment ceux du ministère de l’Éducation nationale, qui reconduira en 2011-2012 le programme Injaz: pour équiper les étudiants en matériel informatique, les netbooks (11 pouces) d’Accent font fureur. Cette année, afin d’attirer de nouveaux clients, la marque a innové: elleproposedésormaisdesnetbooks de couleur rose, fins et ultralégers. Un must pour working girl… Des idées, Karim Mazouzi en regorge. Président de l’Association des entreprises de la zone industrielle de Mohammedia, il dénonce
DR
Le fondateur d’Accent croit au marché de l’ordinateur personnel. La preuve ? Il construit une deuxième usine.
! À 51 ANS, il s’apprête à recruter 100 nouveaux salariés.
les freins à l’investissement, surtout en ce qui concerne la disponibilité et le prix du foncier. « L’État ne fait rien pour encourager la création d’entreprise. Or, la seule réponse à la grogne des jeunes, c’est l’emploi.» Lui-même va recruteràterme 100 nouveaux salariés, car, à quelques centaines de mètres du siège d’Accent,lestravauxdeconstruction d’une nouvelle usine vont bon train. Coût de l’investissement : 30 millions de dirhams (2,6 millions d’euros). Pour financer toutes ses ambitions, Accent pourrait recourir au marché. Introduction à la Bourse de Casablanca envisagée fin 2012. ● YOUSSEF AÏT AKDIM, à Casablanca
ON EN PARLE
ANAS SEFRIOUI ADDOHA Le patron du leader marocain de l’immobilier monte au créneau pour défendre ses résultats. En Bourse, le titre a perdu 11,65 % du 1er au 10 août, en raison de rumeurs sur la mauvaise santé financière de l’entreprise.
NOMAXABISO MAJOKWENI SACCI L’ancienne patronne du Sandton Convention Center devient DG de l’unité business de la Chambre de commerce et d’industrie sud-africaine. Elle sera l’interlocutrice privilégiée des investisseurs publics et privés. DR
JANINE DIAGOU WODIÉ NSIA BANQUE Fille de Jean Kacou Diagou, président de NSIA, elle vient d’être nommée DG de la filiale bancaire (43 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2010). Elle était jusque-là à la tête de la direction stratégie et finances de NSIA. JEUNE AFRIQUE
N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Marchés financiers
Bourse du Caire (indice EGX 30) 5 007,50 points ! LE NIGERIAN STOCK EXCHANGE, où les volumes d’investissements extérieurs sont importants, est une place sensible.
monétaire ?
La volatilité du dollar et de l’euro peut à son tour influer sur l’économie réelle et, à terme, sur les marchés financiers. « Au Maroc, nous pourrions tirer avantage d’un dollar faible, en important moins cher. Mais a contrario, celapourrait pénaliser nos exportations, d’autant plus si l’euro est, lui, trop élevé », note Khalid Nasr. Certaines monnaies africaines sont susceptibles aussi d’en pâtir. « À la suite de la crise de 2008, on a vu le naira [au Nigeria, NDLR] perdre 20 % », rappelle PaulHarry Aithnard. Une fois de plus, les investisseurs joueraient la sûreté, en se dirigeant vers des monnaies refuges telles que le franc suisse.
CRISE BOURSIÈRE
Contagion en vue
L’affolement des marchés occidentaux, à la suite de la dégradation de la note américaine, peut-il toucher l’Afrique ? Décryptage.
S
elonPaul-HarryAithnard, directeur de la recherche à Ecobank, « il ne faut pas sous-estimer l’impact de la crise de la dette occidentale sur les marchés africains ». Difficile d’en prévoir l’ampleur, mais les mouvements erratiques des cours mondiaux s’inscrivent dans un contexte déjà morose : depuis le début de l’année, la Bourse de Nairobi a cédé 16,04 %, la Bourse régionale des valeurs mobilières d’Abidjan 4,98 %, celle de Lagos 5,5 %… Et de Casablanca au Caire, les places nord-africaines accusent le coup du Printemps arabe. À présent, quels sont les canaux de transmission de l’angoisse venue du Nord? Et quels sont les risques si la crise devait durer ou se répéter ?
1. Quelle réaction des
gestionnaires de fonds ?
« Les fonds étrangers qui ont des intérêts sur le continent pourraient revendreleursparticipations»,explique CyrilleNkontchou, cofondateur de la société de gestion d’actifs Enko Capital. À Casablanca, la prudence est de mise : « Le marché marquait déjà le pas depuis février, à cause N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
du Printemps arabe », explique Khalid Nasr, président du directoire de BMCE Capital. Avec de faibles volumes échangés, ajoute-t-il, le départ de 3 % à 5 % des investisseurs étrangers suffirait cependant à faire tanguerlaplacemarocaine.Nairobi, Le Caire, Lagos et Johannesburg, dont les volumes d’investissements extérieurssontplusimportants,sont davantage sensibles. Gabriel Fal, PDG de CGF Bourse, est quant à lui plus optimiste: « Les gestionnaires de fonds pourraient au contraire se retirer un peu de la dette américaine, et mettre une partie de ces investissements en Afrique. »
2. Et si les cours des matières premières chutent ?
Une reprise molle ou une récession américaine, puis mondiale, conduirait mécaniquement à une baisse de la consommation. La diminution de la demande en matières premières (pétrole, minerais…) conduirait inévitablement à la chute des cours. Les pays dont les revenus en dépendent (Nigeria, Algérie, Afrique du Sud…) pourraient voir leur économie se fissurer. Pour d’autres États, dépendants
au contraire des importations de produits agricoles ou énergétiques (Kenya, Sénégal…), l’impact serait positif, notamment en ralentissant l’inflation. Seule exception à la tendance baissière : l’once d’or, valeur refuge par excellence, ne cesse de progresser, atteignant le 9 août son record historique, à plus de 1 770 dollars (environ 1 258 euros).
3. Vers une instabilité
JACOB SILBERBERG/PANOS-REA
126
-6,9
%
entre le 4 et le 10 août
4 661,66 points
4. Quel impact sur les États ?
Les États africains qui souhaitent avoir recours aux marchés pour se financer (emprunts obligataires) pourraient être soumis à la pression des investisseurs. Ces derniers, fragilisés sur les marchés en crise, pourraientdemanderunrendement supérieur et augmenter leurs taux. Même si, selon Gabriel Fal, « les taux appliqués sont déjà très élevés ». Enfin, d’aucuns pourraient avoir des difficultés à se séparer des dettes
Le départ de 3 % à 5 % des investisseurs étrangers suffirait à faire tanguer la Bourse de Casa. acquises auprès d’États africains, et les revendre moins chères qu’ils ne les ont acquises. Sont concernés les États qui ont une politique active dans ce domaine, comme le Kenya, l’Ouganda, la Tanzanie et la Zambie. ● MICHAEL PAURON JEUNE AFRIQUE
Baromètre TUNIS
Placement béton? Malgré des doutes sur la viabilité de ses projets, Carthage Cement se maintient au plus haut.
L
e 18 août, les actionnaires de Carthage Cement sont invités à approuver les résultats financiers 2010. Encore une occasion pour Hatem Garbouj, administrateur judiciaire, d’insister sur la solidité de son projet de cimenterie dernier cri. Un discours rassurant reçu cinq sur cinq par les 7 000 petits porteurs qui, ensemble, possèdent 49 % du capital. La preuve? Bien que détenu à hauteur de 35 % par Belhassen Trabelsi (en fuite au Canada) avant le 14 janvier, Carthage Cement est resté une valeur sûre de la Bourse de Tunis. Depuis janvier, son cours a même enregistré une hausse de 11,5 %, pendant que celui d’Ennakl, autre société liée au clan Ben Ali, chutait de 31,6 %. SCEPTICISME. En dépit d’un business plan prévoyant une marge Ebitda (ration proche de la marge brute d’exploitation) de 53 %, le projet de Carthage Cement laisse sceptique. En effet, un tel niveau de rentabilité est très difficile à atteindre, à moins d’avoir accès, comme dans le Golfe, au pétrole le moins cher au monde. De plus, l’activitécommercialedelanouvelle cimenterie démarrera, avec retard, probablement au premier trimestre de 2013, ce qui est problématique pour une société qui devra payer ses dettes à partir de juin 2012. Pas certain que des banques acceptent de soutenirungroupedontlescréances atteignent déjà plus de 250 millions d’euros… à moins que des investisseurs décident de participer à une augmentation de capital. Pour cela, les talents de persuasion d’Hatem Garbouj ne seront pas de trop. ●
Marchés financiers
Télécoms : la situation s’aggrave VALEUR
Vodacom Onatel MTN Maroc Télécom Sonatel Telkom Telecom Egypt Orascom Telecom Safaricom Mobinil
BOURSE
COURS au 10 août (en dollars)
ÉVOLUTION depuis le début de l'année (en %)
JOHANNESBURG
1 110,93
+ 5,2
ABIDJAN
96,96 1 780,24 17,20 298,46 466,32 2,50
0 – 3,4 – 8,7 – 9,4 – 10,6 – 16,8
0,55 0,03 15,53
– 22,5 – 29,8 – 43,7
JOHANNESBURG CASABLANCA ABIDJAN JOHANNESBURG LE CAIRE LE CAIRE NAIROBI LE CAIRE
DÉJÀ EN PETITE forme au premier trimestre, les principales valeurs télécoms du continent ont vu leur situation se dégrader ces derniers mois. En Bourse, à l’exception des suds-africains MTN et Vodacom, leurs cours ont continué à baisser. En matière de résultats, les inquiétudes se sont confirmées. Les leaders MarocTélécom et Safaricom subissent la forte pression concurrentielle des nouveaux venus Wana et Airtel Keny.
Même situation du côté de Mobinil (FranceTélécom) en Égypte, qui devrait connaître en 2010 une forte baisse de ses résultats financiers. Ces situations préfigurent une évolution générale sur le continent: une tendance à la baisse des tarifs qui ne pourra être compensée que par la hausse des temps de communication et le déploiement de services à valeur ajoutée, notamment l’internet mobile. ●
Valeur en vue MAROC TÉLÉCOM Une rupture historique BOURSE Casa • CA 2011 (1er semestre) 1 361 millions d’euros (– 0,8 %) COURS 137 dirhams (10.8.2011) • OBJECTIF 160 dirhams
LE PREMIER SEMESTRE a mis un terme à la tendance haussière des revenus de Maroc Télécom, une première depuis sa cotation en Bourse en 2004. Les revenus consolidés baissent de 0,8 % fin juin 2011. Le revenu moyen par utilisateur recule de 7,8 %, à 86 dirhams (7,40 euros). Compte tenu du maintien du rythme des investissements au Maroc et à l’étranger, le résultat opérationnel et le résultat net part du groupe se replient respectivement de 8,3 % et de 10,3 %. Sous la pression agressive de la concurrence, particulièrement de Wana, les tarifs ont baissé de 24 % Taha Jaidi Analyste chez sur le segment mobile. Face à cette baisse structurelle Attijari Intermédiation des tarifs, seule une forte progression de l’usage devrait permettre de limiter, voire de neutraliser une destruction de valeur pour Maroc Télécom. Au final, nous considérons que les filiales africaines, en particulier la Sotelma (Mali), constituent un véritable relais de croissance à moyen et long termes. Leur contribution à l’horizon 2013 s’établirait, selon nos estimations, à 30 % des revenus et 20 % des bénéfices. » ●
JULIEN CLÉMENÇOT JEUNE AFRIQUE
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127
Dossier
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INTERVIEW
Santé
Kiyoshi Adachi Chef de l’unité
de la propriété intellectuelle à la Cnuced
FORMATION
Docteur ès finances
Ambitions
MAGHREB
en laboratoire À Casablanca, Alger et Tunis, de véritables fleurons de l’industrie pharmaceutique ont émergé en une dizaine d’années. Certains, pour qui le marché national devient trop étroit, regardent déjà au-delà de leurs frontières. MICHAEL PAURON
A SOURCE : J.A., CLASSEMENT DES 500 PREMIÈRES ENTREPRISES
vec un marché d’environ 3 milliards d’euros en 2010 et estimé à 3,5 milliards à l’horizon 2015, le Maghreb s’impose comme l’une des zones les plus dynamiques du continent. L’Algérie arrive même à la troisième place, derrière l’Afrique du Sud et l’Égypte, avec plus de 1,7 milliard d’euros en 2010. Pas étonnant que la plupart des multinationales du secteur soient déjà implantées dans la région : Sanofi-Aventis (Maroc, Tunisie, Algérie), GlaxoSmithKline (Maroc, Algérie), Actavis (Algérie), Pierre Fabre (Tunisie, Algérie), Pfizer (Tunisie, Maroc, Algérie)… La liste est longue et comprend aussi des groupes saoudien (El Kendi), cubain (Heber Biotic) et jordanien (Hikma). Mais l’industrie « maghrébo-maghrébine » a aussi su se faire une place, et de véritables fleurons sont nés. Leader en Algérie en termes de chiffre d’affaires, Biopharm était d’abord un distributeur, avant de se lancer dans la production en 2005 pour suivre l’évolution du marché tout en répondant à une politique nationale: avec l’interdiction d’importer des
TOP 10 RÉGIONAL DES PRODUCTEURS DE MÉDICAMENTS RANG EN AFRIQUE
9 13 14 17 18 23 28 30 32 34
SOCIÉTÉ
BIOPHARM LAPROPHAN SAÏDAL SANOFI-AVENTIS MAROC MAPHAR SOTHEMA PROMOPHARM ADWYA WINTHROP PHARMA SIPHAT
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CHIFFRE D’AFFAIRES 2009 (en millions d’euros)
233 157 134 128 127 92 45 38 33 32
médicaments déjà produits localement, l’industrie algérienne a été considérablement favorisée. Derrière Biopharm, Saïdal s’est imposé comme le premier producteur algérien de génériques et de médicaments sous licence, dans le cadre de coentreprises avec de grands groupes mondiaux – Pfizer, Sanofi et Dar Eddawa. Avec 4 200 salariés et un chiffre d’affaires de 115 millions d’euros en 2010, le groupe, coté à la Bourse d’Alger et détenu à 80 % par l’État, possède 20 % de part de marché en volume. Pour son patron, Boumediène Derkaoui, le pays a le potentiel pour accueillir de nouveaux investisseurs, nationaux ou étrangers: « Le marché algérien ne produit que 35 % de ses besoins, et l’objectif du pays est d’atteindre 70 %. » INCURSION TUNISIENNE. Saïdal multiplie donc
les investissements, à travers un plan 2010-2014 de 160 millions d’euros. « Les appels d’offres pour deux nouvelles usines, à Alger et Constantine, devraient être lancés à la fin de l’année », précise le PDG. En outre, le groupe possède 44 %, aux côtés d’un fonds d’investissement saoudien, du capital de Tassili Arab Pharmaceutical Company, dont l’usine, située dans la zone industrielle de Rouïba, « démarrera dans douze mois », selon le dirigeant. Objectif : détenir 25 % du marché en chiffre d’affaires et 40 % en volume d’ici à 2014. Et si le groupe a remporté des appels d’offres au Niger, en Guinée et en Mauritanie, « pour l’heure, nous nous concentrons sur le marché local », assure Boumediène Derkaoui. Dans le sillage de Saïdal, Laboratoire pharmaceutique algérien et Pharmaghreb sont autant de challengeurs. Le second a d’ailleurs signé un partenariat avec le numéro un tunisien Adwya (28 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2010 et 8 % du marché national). L’accord commercial de dix ans prévoit la production et le marketing de leurs produits génériques respectifs. Car contrairement à leurs voisins algériens, les opérateurs tunisiens ambitionnent de s’étendre hors de leurs frontières, trop étroites pour la vingtaine d’entreprises qui se partagent un marché de 500 millions d’euros. « Nous satisfaisons aujourd’hui JEUNE AFRIQUE
TUNISIE
ÉQUIPEMENT
CHIRURGIE
La maintenance Opération esthétique souffre de carences à Dakar
PORTRAITS
Des patrons bien portants
129
OUSSAMA AYOUB/TOROMORO/MAXPPP
Amen, du col blanc à la blouse blanche
entre 50 % et 55 % des besoins du pays, et on ne pourra guère faire mieux », estime le docteur Nabil Saïd, PDG d’Industrie pharmaceutique Saïd. Pour le directeur général d’Adwya, Atef Zehani, « le salut passe par l’exportation ». Il ambitionne ainsi de réaliser 5 % de son chiffre d’affaires à l’étranger d’ici à trois ans : « Aujourd’hui, nous exportons peu, principalement vers la Libye et l’Algérie, mais l’Afrique subsaharienne nous intéresse. » Sur le territoire national, trop atomisé, il prévoit « des fusions et des acquisitions, à moyen terme ». LUCRATIFS GÉNÉRIQUES. Pour conquérir de nou-
veaux territoires, le marocain Sothema a quant à lui opté pour une filiale à Dakar: West Afric Pharma a démarré en avril. Le groupe part du même constat que ses homologues tunisiens. « Avec 35 entreprises, le Maroc est devenu très concurrentiel, et de plus en plusdemultinationalesviennentnousconcurrencer sur le générique », explique Mohamed Qrayim, porte-parole du numéro un marocain (80 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2010). La production de génériques est l’activité la plus lucrative, la plus prometteuse (seulement 27 % du marché chérifien), et la plus ouverte à l’export, contrairement aux médicaments sous licence. Et l’introduction prochaine de tests obligatoires de bioéquivalence dans la réglementation marocaine, afin d’atteindre l’objectif fixé par les autorités de 60 % de génériques d’ici à 2015, « devrait profiter aux fabricants locaux », selon le cabinet d’analyse financière BMCE Capital. Une décision bienvenue JEUNE AFRIQUE
car, pour Mohamed Qrayim, l’État n’incite pas assez l’industrie locale. « Nous sommes passés d’un taux de satisfaction de la demande intérieure de 80 % en 2006 à 70 % aujourd’hui », relève-t-il, pointant du doigt les importations massives des multinationales et la forte concurrence des génériques asiatiques. Quel avenir pour les industries de ces trois pays? « Certaines entendent s’implanter via des filiales en Afrique subsaharienne. D’autres vont privilégier des partenariats transnationaux avec les industries des pays développés », relève Kiyoshi Adachi, chef de l’unité de la propriété intellectuelle à la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced, lire interview pp. 131-132). Une chose est sûre : l’intérêt des géants internationaux pour les opérateurs d’Afrique du Nord renforce un peu plus leur capacité à devenir, un jour, des champions mondiaux. ●
! LE GROUPE SAÏDAL s’est imposé comme le premier fabricant algérien de génériques et de médicaments sous licence.
LA RÉVOLUTION ÉGYPTIENNE NE REFROIDIT PAS GSK AU CAIRE, LE PRINTEMPS ARABE n’aura pas apaisé les appétits des multinationales de l’industrie pharmaceutique. Ainsi, le géant américain GlaxoSmithKline (GSK) n’a pas remis en cause ses 60 millions d’euros d’investissements prévus sur les cinq prochaines années. Le groupe construira deux usines de production, augmentant un peu plus son hégémonie : à ce jour, il demeure le plus gros fabricant du pays, avec 23,1 % du marché égyptien. Celui-ci est estimé à 3,5 milliards d’euros à l’horizon M.P. 2014, selon le cabinet Business Monitor International. ●
SOURCE : JEUNE AFRIQUE, CLASSEMENT DES 500 PREMIÈRES ENTREPRISES AFRICAINES
N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Vers une politique sanitaire commune aux 6 États membres INITIATIVE POUR LA PROMOTION DE LA RECHERCHE ET DES RESSOURCES HUMAINES EN SANTÉ EN AFRIQUE CENTRALE, IPREHSAC, 2011-2015
Le site du CIESPAC à Brazzaville.
Promouvoir une amélioration qualitative et quantitative des ressources humaines et la recherche en santé en vue du développement sanitaire de l’Afrique centrale. VISION 2015 1. Faire du CIESPAC un centre régional d’excellence pour la formation et la recherche ; 2. Mettre en place un système de surveillance épidémiologique des maladies ; 3. Renforcer les capacités des pays d’Afrique centrale à la maitrise de la gestion des ressources humaines en santé.
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CIESPAC Centre Inter États d’Enseignement supérieur en Santé Publique d’Afrique Centrale
PROGRAMME DES FORMATIONS 2011 - 2012
Un atelier de formation.
I- Atelier de formation sur « les statistiques à l’usage des médecins et biologistes ». Période : 14 – 26 novembre 2011 Public cible : Médecins et biologistes Partenaire : École de Santé Publique de Nancy II- Initiation à la surveillance des vecteurs du paludisme et des maladies re-émergentes (ISV-Palu). Période : 6 février – 2 mars 2012 Public cible : Agents techniques de santé des programmes / projets et institutions de recherche Partenaire : OMS
Vision 2015 du CIESPAC
ORGANISATION DE COORDINATION POUR LA LUTTE CONTRE LES ENDÉMIES EN AFRIQUE CENTRALE
III - Cours d’Epidémiologie d’intervention et d’Informatique en Afrique Centrale (CEPIAC-2). Période : 7 mai – 9 juin 2012 Public cible : Acteurs de la lutte contre le Paludisme et chercheurs Partenaire : Agence de Médecine Préventive IV - Atelier de formation des personnels de santé des foyers aux techniques de diagnostic et de lutte contre la Trypanosomiase Humaine Africaine. Période : 18 – 27 juin 2012 Public cible : Personnes impliquées dans la lutte contre la THA Partenaire : Union Africaine (PATTEC)
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Dossier INTERVIEW
Kiyoshi Adachi
C HEF
DE L ’ UNITÉ DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE À LA
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C NUCED
« Certaines entreprises sont prêtes à devenir des acteurs mondiaux »
JEUNE AFRIQUE : Quels sont les principaux obstacles pour développer l’industrie africaine, en particulier dans les pays subsahariens ? KIYOSHI ADACHI : L’industrie phar-
maceutique en Afrique est principalement impliquée dans la formulation de médicaments génériques et dans le conditionnement. Le principal obstacle à son développement est le manque de ressources humaines qualifiées dans les domaines pertinents de la production, tels que des chimistes, des pharmaciens et des techniciens, qui ont de l’expérience dans la formulation et la fabrication de médicaments. Mais il y a d’autres freins : l’absence d’infrastructures de base (énergie fiable,
eau potable, routes…) ; la nécessité de mettre à niveau les autorités de réglementation des médicaments ; et la nécessité de donner un accès rapide et rentable aux principaux intrants, comme les ingrédients pharmaceutiques actifs – la plupart sont importés de Chine et d’Inde. En matière d’investissements, quelle est la tendance ?
Il n’existe pas de données fiables et complètes pour mesurer précisément si l’investissement dans le secteur a connu ou non une croissance. Néanmoins, les divers événements auxquels nous assistons suggèrent certaines tendances. Tout d’abord, les ! « Les investissements producteurs transfrontaliers dans africains de nombreux pays souhaitent a f r i c a i n s s u i v e nt PRENDRE PIED SUR majoritairement un TOUT LE CONTINENT. » axe sud-sud – surtout en provenance de Chine et d’Inde, qui sont aujourd’hui les principaux investisseurs –, par opposition à un axe nord-sud. Ensuite, le fait que certaines entreprises africaines se plaignent de ne pas parvenir à satisfaire la demande de leurs marchés à travers le continent suggère que le mouvement d’expansion
DR
Au sein de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced), il est le spécialiste de l’industrie pharmaceutique africaine. Investissements étrangers, rôle des États… Pour J.A., il aborde aussi bien les tendances que les perspectives d’un secteur en pleine mutation.
est lancé : les producteurs africains souhaitent prendre pied sur tout le continent. En troisième lieu, un certain nombre de coentreprises créées sont le fait d’un fabricant étranger et d’un distributeur local, même sans expérience. Les multinationales considèrent donc qu’il est ● ● ●
À LA RECHERCHE DE MATIÈRES PREMIÈRES PAS CHÈRES PARACÉTAMOL, QUININE, IBUPROFÈNE… « Pour un même produit, les tarifs peuvent aller du simple au triple! » relate Mohamed Qrayim, porte-parole de Sothema, au Maroc. Les matières premières représentent entre 10 % et 70 % des prix de fabrication, d’où l’importance de trouver un fournisseur compétitif. Les grossistes eux-mêmes, comme Quimdis en France, Marchesini en Belgique, Groninger en Allemagne ou Bram en Italie, se tournent quant à eux de plus en plus vers l’Asie. Premiers producteurs au monde, la Chine et l’Inde sont devenus l’objet d’acquisitions de la part de JEUNE AFRIQUE
multinationales qui veulent sécuriser leurs approvisionnements. D’autres laboratoires plus modestes cassent leurs coûts en passant par leurs partenaires, dont les commandes en grandes quantités permettent des économies d’échelle. C’est le cas d’Industrie pharmaceutique Saïd, enTunisie, qui se fournit exclusivement chez l’américain Bristol-Myers Squibb, pour qui il fabrique la marque Upsa. Rien que pour l’Algérie, laTunisie et le Maroc, le marché des matières premières pharmaceutiques est estimé à plus de M.P. 700 millions d’euros. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Dossier Santé rentable de s’installer et de former des employés.
●●●
Pourquoi certaines entreprises asiatiques, qui produisent à bas coût chez elles et exportent déjà leurs produits sur le continent, viennent y ouvrir des usines ?
Comme les entreprises en Inde et en Chine commencent à exporter une plus grande proportion de leur production vers les pays développés au détriment de l’Afrique, investir directement dans la production locale des pays africains leur semble le moyen le plus sûr de conserver la mainmise sur l’approvisionnement du continent, et d’en tirer les bénéfices. Un certain nombre de changements dans l’environnement mondial sont également à l’origine de ces flux. Par
1,7 %
C’est la part de l’Afrique (soit 14 milliards de dollars) dans le marché mondial de l’industrie pharmaceutique
pour les fabricants africains, en vue de réduire le risque de détérioration lors du transport des capsules fabriquées en Chine. Ces mouvements opportunistes n’ontils d’intérêt que les bénéfices ?
L’approvisionnement mondial en médicaments repose principalement sur le secteur privé. Il n’est donc pas surprenant que les entreprises soient d’abord motivées par le profit. Mais la production locale augmente aussi la disponibilité et la diversité des médicaments de bonne qualité, ce qui est bénéfique pour la population. Comment cohabitent secteur privé et secteur public ?
De nombreux pays maintiennent des entreprises publiques, mais beaucoup
La production locale augmente la disponibilité et la diversité des médicaments. exemple, le régime international de la propriété intellectuelle, modifié en 2005, a interdit à des pays tels que l’Inde de produire légalement des génériques de médicaments brevetés ailleurs. Les grandes entreprises indiennes cherchent donc une base dans les pays les moins développés, qui sont dispensés de l’application de cet accord. La coentreprise entre l’indien Cipla et Quality Chemicals Industries, en Ouganda, pour produire des antirétroviraux génériques est un bon exemple. Un autre facteur important est la réduction des risques : dans le cas de l’Éthiopie, une entreprise chinoise a opté pour la fabrication locale de gélules
de fabricants de médicaments en Afrique sont des entreprises à capitaux publics et privés ou des joint-ventures entre entreprises nationales et étrangères. En général, le secteur public est surtout impliqué dans la production de vaccins. Compte tenu des taux de pauvreté en Afrique, les États ont tendance à être des acheteurs importants des productions d’entreprises locales où les normes de qualité ont été respectées. En définitive, quel doit être le rôle des États pour permettre à la production locale de se développer ?
Renforcer la capacité locale de production est une tâche collective. Le
gouvernement a un rôle central à jouer en rassemblant tous les organismes, les ministères et les acteurs du secteur privé, pour agir de manière coordonnée et cohérente. Le gouvernement a aussi le devoir de s’assurer que les politiques d’aide publique au développement, en vertu desquelles les médicaments sont souvent donnés, et les politiques qui soutiennent la production locale de médicaments soient mises en œuvre de manière concertée. Le gouvernement – et en particulier l’autorité de réglementation pharmaceutique – est chargé de s’assurer que les médicaments produits par le secteur pharmaceutique répondent à une certaine efficacité et aux normes de sécurité. En exigeant que certaines normes soient respectées, il peut aider à ce que l’industrie locale joue un rôle dans la satisfaction de la demande intérieure, avec des médicaments abordables et de bonne qualité. Pensez-vous que certaines sociétés africaines soient en mesure de devenir des leaders mondiaux ?
Il existe d’abord un besoin d’augmenter la disponibilité des médicaments au sud du Sahara. Cette demande offre donc des opportunités de croissance et d’expansion pour les firmes pharmaceutiques en Afrique. Les multinationales occidentales cherchent en outre des fabricants de génériques de qualité, dans les pays en développement, pour baisser leurs coûts et maintenir leur rentabilité. L’achat par GlaxoSmithKline en 2009 d’une participation dans le sudafricain Aspen montre que certaines entreprises sont prêtes à devenir des acteurs mondiaux. ● Propos recueillis par MICHAEL PAURON
FLOXAL’MED, un nouveau complément dans l’oxygène médical
L’oxygène médical est un produit vital dans les milieux sanitaires. Sa disponibilité permanente est une nécessité pour le soin des patients. Air Liquide offre une solution complémentaire aux modes d’approvisionnement liquide et gazeux qui, parmi d’autres avantages, rend l’oxygène disponible à toute heure répondant aux besoins des hôpitaux.
Entretien avec le professeur Idrissou Abdoulaye, Directeur du Centre national hospitalier et universitaire Hubert M. Maga à Cotonou.
La solution Floxal’Med d’Air Liquide répond aux attentes du CNHU de Cotonou en trois perspectives importantes. En premier lieu, la qualité du produit : en l’absence de disponibilité locale d’oxygène médical sous forme cryogénique, la solution Floxal’Med conçue autour de la technologie PSA produit de l’oxygène à usage médical 93 % conforme à la pharmacopée européenne garantissant une qualité pharmaceutique contrôlée en continu. En second lieu, la continuité de fourniture : le CNHU confronté aux problèmes de consommation sans cesse accrue d’oxygène avec des coûts de plus en plus importants, a sollicité Air Liquide Bénin pour des solutions appropriées à la situation. C’est alors que, dans le cadre d’un contrat, la société Air Liquide a proposé à l’hôpital
une solution complète mieux adaptée que la fourniture en bouteilles, en passant par l’analyse des besoins croissants du CHNU en Oxygène médical, le dimensionnement des équipements, l’installation et la mise en place des secours appropriés, l’exploitation et la maintenance préventive suivant un programme préétablit. Ainsi, Air Liquide assure la fiabilité et la continuité de la fourniture totale permettant à l’hôpital de se concentrer sur les soins aux patients. Les équipements de production et leur back up restent la propriété d’Air Liquide qui s’engage à fournir les services tels que décrits ci-dessus. En troisième lieu, l’économie : comparée à la solution précédente de fourniture en bouteille la solution Floxal’Med apporte une économie substantielle au sens large du terme. Economie financière, en offrant une réduction importante des dépenses permettant à l’hôpital de mieux gérer les budgets et d’investir dans l’acquisition d’appareils médicaux sophistiqués. Une utilisation rationnelle des ressources techniques permettant aux services de maintenance et la pharmacie de se consacrer à d’autres tâches au service des patients.
Avec FLOXAL’MED, plus qu’un prestataire, mieux qu’un fournisseur, AIR LIQUIDE est un véritable partenaire. ●
Assistance pour analyser les risques et choisir une solution sûre et économique,
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Gamme de générateurs modulaire adaptée à votre consommation,
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Fourniture d’oxygène à une pureté de 93±3 % pour usage médical conforme a la pharmacopée européenne,
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Secours en Oxygène 99,5 %, prêt à utilisation pour garantir fiabilité et continuité de fourniture,
●
Contrôle qualité et maîtrise des procédés,
●
Télésurveillance et assistance technique 24/24h,
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Maintenance préventive des installations.
Air L Liquide-Sobegi (Bénin), Route de Porto-Novo, Pk3, 06 B.P, 674 Cotonou (Bénin) Tél. : +229 21 33 10 75 - +229 21 33 06 30 Fax : +229 21 33 10 54
Communiqué
Air A Liquide Pty, Healthcare department - Cnr. Vereeninging & Andre Marais Road, PO Box 124200, Alrode 1451 - Tél. : +27 (0)11 389 7000 - Fax : +27 (0) 11 617 7534
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Dossier Santé HÔPITAL
Sous-traités dans l’urgence Le français Denos Health Management gère deux structures à Benghazi, fief des insurgés libyens.
S
i Denos Health Management entend bouleverser le milieu de la gestion hospitalière dans les pays à développement intermédiaire, pour l’instant c’est davantage le Printemps arabe qui bouscule la société, basée en France. Il faut dire que celle-ci a démarré ses activités en septembre 2009, dans la Libye de Kaddafi, en signant un contrat de cinq ans pour la gestion du grand hôpital de… Benghazi. Alors que la ville est devenue le fief des opposants au « Guide », l’établissement s’est transformé en hôpital de guerre,
accueillant dans un premier temps les victimes de l’offensive de l’armée libyenne, puis les blessés venant du front, plus à l’ouest. « Il y avait 2 000 personnes qui y travaillaient, aujourd’hui il y en a 400, dont une dizaine de médemillions d’euros Chiffre cins », explique Pierre Vincent, d’affaires fondateur de Denos.
20
en 2010
PARTAGE DE SAVOIR-FAIRE.
La mission de Denos au sein du Benghazi Medical Center ? Gérer l’hôpital de manière opérationnelle et administrative, mais aussi partager son savoir-faire et former les équipes, avec l’aide de médecins
et d’infirmiers venus de l’étranger. Le Benghazi Medical Center regroupe aujourd’hui neuf nationalités. Denos gère aussi un hôpital privé à Benghazi et deux autres à Oman. « Notre vocation est de répondre aux besoins croissants des structures de santé dans ces pays et de transmettre le savoir, précise Pierre Vincent. On met à disposition des équipes d’experts, de consultants, de personnels de sa santé et de praticiens hospitaliers co confirmés. » La concurrence existe. « Nous étions quatre sur l’appel d’offres de Benghazi, il y avait notamment des Britanniques et des Sud-Africains », raconte Pierre Vi Vincent, avant de nuancer : « Mais l’hôpital, peu de monde s’y intéresse, car c’est compliqué. » Premier opérateur francophone, Denos espère à terme pénétrer les marchés d’Afrique de l’Ouest. ● MICHAEL PAURON
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C’est le nombre de médecins pour 100 000 habitants en Afrique (contre plus de 300 en France)
Dossier
FORMATION
Docteur ès finances Pour diriger un établissement, mieux vaut être un bon administrateur plutôt qu’un médecin chevronné… Cela s’apprend notamment à l’Institut supérieur du management de la santé, à Dakar.
D
’
après les chiffres publiés par la revue Academic Medicine en octobre 2009, sur les 6 500 hôpitaux américains, seuls 235 étaient dirigés par des médecins (soit 3,6 %, alors que ce taux était de 35 % en 1935). En France, la proportion serait plus faible, et quasiment nulle dans le secteur public. Dans la plupart des pays africains, en l’absence de plan de carrière pour les médecins, ces derniers bataillent dur pour conserver la gestion des structures de santé, souvent financées par les États. La crise économique est passée par là: les pouvoirs publics ont décidé que les établissements seraient gérés comme des entreprises privées. Une personne prend en charge cette délicate mission : il s’agit du
des solutions permettant de mobiliser et de diversifier les sources de financement. Entermesd’évolutiondecarrière, le gestionnaire d’hôpital débutant se voit d’abord confier une structure départementale, puis régionale, et peut envisager, au bout de dix ans, de rejoindre une entité plus Le patron de l’hôpital est chargé importante, des ressources humaines, du comme un budget, de la logistique… centre universitaire hospitalier gestionnaire d’hôpital, qui est soit (CHU). Dans les établissements un médecin ayant suivi un curdes grandes villes, il peut d’abord sus de gestion, soit un gestiongérer une unité ou un service, et naire qui découvre l’univers de la avoir sous sa responsabilité une santé. Compétences attendues : quinzaine de personnes. être capable d’anticiper les enjeux de l’économie de la santé, savoir DÉBUTANTS BIENVENUS. En porter de gros projets, être apte à Afrique, des formations de gestionnaires d’hôpital se mettent progresla concertation, à la négociation, au management… Le gestionnaire sivement en place. Ainsi à Dakar, d’hôpital est chargé des ressources l’Institut supérieur de management de la santé (ISMS, une entité du humaines, du budget et de la logistique. Il doit par ailleurs imaginer Centre africain d’études supérieures JEUNE AFRIQUE
Entre 250 000 et 400 000 F CFA C’est le salaire mensuel de départ d’un gestionnaire d’hôpital
en gestion) recrute sur concours des étudiants à bac + 4, issus non seulement de l’Union économique et monétaireouest-africaine(UEMOA), mais aussi de toute l’Afrique francophone,jusqu’àMadagascar.Outrele niveau, c’est le projet professionnel du candidat qui fait la différence. Les personnes retenues ont souvent une première expérience du management de structures de santé, mais les débutants sont aussi les bienvenus. Le programme prévoit des cours relatifs à la santé: épidémiologie, économie, management… Pour un coût de quelque 3 millions de F CFA (environ4575euros),lecursussedéroulesurdouze mois, dont quatre sont consacrés à un stage. L’institut accueille parfois des groupes, dont la formation est prise en charge par des organismes tels que la Banque africaine de développement (BAD, 26 Maliens formés en 2003) ou l’Organisation mondiale de la santé (OMS, 16 Mauritaniens). Mais ses effectifs restent faibles, certaines promotions comportant moins de cinq élèves. L’ISMS envisage en outre la création de deux nouveaux programmes, l’un en alternance, l’autre à distance, en partenariat avec l’Université du Québec à TroisRivières (Canada). Généralement, les gestionnaires d’hôpitaux formés à l’ISMS s’insèrent plutôt bien. Cadres supérieurs rémunérés entre 250 000 et 400 000 F CFA par mois suivant les pays, ils intègrent généralement le secteur public, mais sont aussi demandés dans les ONG. Dans les pays où il n’existe pas de formation spécifique, lorsqu’ils sont nommés comme gestionnaires, certains médecins suivent des programmes courts dans des écoles nationales d’administration ou des écoles normales. ● CLARISSE JUOMPAN-YAKAM N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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30 %
C’est la part du tourisme médical dans le chiffre d’affaires du secteur de la santé en Tunisie
Dossier
NICOLAS FAUQUÉ
doute pas de la fiabilité du concept: « Les hôpitaux privés ont un avenir certain, car le secteur public n’a pas tous les moyens. Il assure déjà la formation des médecins ainsi que la prise en charge des indigents et des assurés de la Caisse nationale d’assurance maladie. Le principe de l’hôpital privé, c’est de proposer des forfaits de soins aux patients et de servir de relais au secteur public. Avec les clients Comar, nous appliquerons aussi le principe du ticket modérateur. Par ailleurs, l’organisation et la formation continue du personnel médical et paramédical, ainsi que les équipements de pointe, garantiront la qualité des prestations. » ! UN ÉTABLISSEMENT EL AMEN, section cardiologie, à Mutuelleville (nord de Tunis). TUNISIE
Amen, du col blanc à la blouse blanche Le groupe de la famille Ben Yedder s’étend de la finance… aux services de santé. Déjà à la tête d’un réseau de cliniques, sa filiale spécialisée a fait sien le concept d’hôpital privé. Explications.
P
résent dans plus de deux cents entreprises de promotion immobilière, actif dans le crédit-bail avec une filiale en Libye et une stratégie d’expansion au sud du Sahara, le groupe Amen, fondé par la famille Ben Yedder, est aussi le premier opérateur privé en matière de services de santé. Il a développé, via sa filiale Amen Santé, le seul réseau de cliniques en Tunisie (les cliniques El Amen à Mutuelleville, La Marsa, Béja et Gafsa). Détenu majoritairement par la Compagnie méditerranéenne d’assurances et de réassurances (Comar, autre filiale d’Amen) et Amen Bank, la division santé gère actuellement trois cents lits – l’équivalent d’une importante unité hôtelière. Le tourisme médical, qui assure 30 % du chiffre d’affaires du secteur en Tunisie, a donné de l’ambition à Amen Santé. En créant en novembre 2010 l’Hôpital privé El Amen, doté d’un capital d’environ 6 millions d’euros, la filiale ouvre de JEUNE AFRIQUE
nouvelles perspectives au groupe. Objectifs : la réalisation, la gestion et l’exploitation d’établissements sanitaires et hospitaliers. « À la différence d’une clinique, le concept d’hôpital privé permet d’avoir des médecins à plein temps, afin d’assurer la continuité des soins et de proposer des prestations de qualité, du fait que toutes les spécialités sont toujours opérationnelles. Et il n’y a pas à attendre que les spécialistes arrivent : ils sont déjà là », précise Mohamed Ben Hmida, directeur général d’Amen Santé. Implantésurl’emplacement stratégique de l’ancienne ambassade des États-Unis, dans le centre de Tunis, l’Hôpital privé El Amen, qui ouvrira en 2013, représente un investissement de 22,5 millions d’euros, dont 20 % sont financés par la Société financière internationale (SFI, filiale de la Banque mondiale). Malgré les perturbations dues à la révolution tunisienne, les études techniques sont largement entamées, et Mohamed Ben Hmida ne
Ouverture en 2013 L’Hôpital privé El Amen disposera de 350 lits et de 60 médecins à temps plein, dans le centre de la capitale
PÔLE DE RECHERCHE. Au-delà du
volet soins, l’Hôpital privé El Amen projette d’être le premier centre hospitalier universitaire (CHU) privé en Tunisie, en développant l’enseignement de la médecine et de diverses spécialités in situ. « Les compétences ne sont plus à prouver, et nous mettrons à profit la notoriété de la médecine tunisienne pour former des étudiants tunisiens, africains et arabes », poursuit Mohamed Ben Hmida. Moins onéreuse qu’en Europe, cette plateforme d’enseignement offshore table sur la qualité de l’encadrement et la proximité géographique pour être attrayante. « Cela nous permettra aussi de lancer, à long terme, un pôle de recherche scientifique pour compléter l’ensemble des prestations du label Amen, déjà perçu comme un gage de sécurité par les patients, les médecinsetlesinstitutionsétrangères en Tunisie », conclut le directeur général. Enfin, Amen Santé compte
Comme dans le public, la continuité des soins sera assurée dans toutes les spécialités. mettre à profit son savoir-faire pour s’implanter en Mauritanie et en Libye. À terme, la filiale envisage une introduction en Bourse. Une première pour un groupe de services de santé en Tunisie. ● FRIDA DAHMANI, à Tunis N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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Dossier Santé
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Et quand malgré tout la machine tombe en panne ? Tout dépend des aptitudes des techniciens, qui varient d’un pays à l’autre et, dans le même État, de la capitale aux régions.
MASHID MOHADJERIN/REDUX-REA
ABSENCE DE FORMATION. Entre
! SALLE D’OPÉRATION dans un établissement de Lomé (Togo). ÉQUIPEMENT
La maintenance souffre de carences Toujours plus sophistiqués, les appareils médicaux sont aussi de plus en plus difficiles à entretenir. Et le manque de moyens et de personnel qualifié n’arrange rien aux affaires des établissements de santé.
«
J
e voudrais savoir quel est le cursus à suivre pour faire de la maintenance de matériel médical et quels sont les pays qui offrent cette formation. » Cette demande, postée en février sur un forum d’étudiants africains et restée à ce jour sans réponse, est symptomatique du flou qui règne dans le secteur. La maintenance du matériel médical est un sérieux dilemme pour de nombreux établissements de santé sur le continent. Un dilemme qui ne se posait pas autant avec les appareils d’avant les indépendances, moins sophistiqués. « Les machines étaient robustes et résistaient aux conditions climatiques extrêmes », explique le docteur Jean Théophile Banzouzi, coordonnateur Europe de l’ONG Médecins d’Afrique. Aujourd’hui, plusieurs d’entre elles fonctionnent toujours, et seul le manque de consommables, qui ne sont parfois plus fabriqués, pousse N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
les établissements à les mettre au rebut. « En biochimie, vous n’avez plus les mêmes réactifs. Certaines radios ne sont pas compatibles avec les scanners anciens. Et le papier thermique utilisé pour le monitoring des femmes enceintes n’existe plus, tout comme certains fusibles », énumère le chercheur en pharmacologie, chimiethérapeutique et biologie.
Les nouvelles machines sont plus sensibles à la chaleur, à l’humidité et à la poussière. Quand les appareils sont remplacés, ce sont des équipements électromécaniques, plus sensibles à la chaleur, à l’humidité et à la poussière – un cocktail qui favorise des micro-courts-circuits –, qui les supplantent… Pour limiter la casse, les établissements doivent donc trouver des solutions de fortune : par exemple, limiter l’usage des appareils lors des fortes chaleurs.
1972 et 1989, à Lomé, le Centre de formation en santé publique de l’Organisation mondiale de la santé enseignait, parmi d’autres apprentissages, l’entretien et la réparation du matériel électro-médical. Les personnels venaient s’y recycler, améliorer leurs connaissances. Au total, deux cent quarante-deux apprentis d’Afrique de l’Ouest, d’Afrique centrale et d’Afrique australe y ont reçu une formation diplômante, indique le professeur François Gado Napo-Koura, coordonnateur adjoint du centre de formation, chargé des activités pédagogiques et scientifiques. Reste que ces modules d’enseignement ne sont plus dispensés depuis des années. Pénurie d’élèves ou manque de fonds ? La réponse fait encore débat. Et quelle alternative ? Plusieurs pays, dont le Togo, disposent désormais d’un pôle « maintenance » dans leur ministère de la Santé. Et certains, comme la Côte d’Ivoire, organisent par exemple la remise à niveau de leurs techniciens en France. Dans le cadre des acquisitions d’appareils, lors des appels d’offres, l’aspect formation du personnel est certes bien présent, et, parfois, pour emporter le matériel, certaines entreprises proposent la maintenance gratuite pendant les deux premiers mois, ou la formation gratuite du personnel. Mais, dans le cas contraire, ces deux volets optionnels du contrat sont évités, car ils ont un coût important: entre 3 % et 5 % du prix de la machine, selon sa taille et sa complexité, pour le volet formation ; et en moyenne 10 % – voire jusqu’à 20 % ou 30 % quand il y a des consommables – pour la maintenance. Résultat : faute de moyens, les établissements se débrouillent en interne pour réparer – au risque d’aggraver la situation. ● HABIBOU BANGRÉ JEUNE AFRIQUE
Quel est le meilleur traitement? La vie écrit les questions. Nous cherchons les réponses. Nos innovations permettent de traiter des millions de personnes qui souffrent, tout en améliorant leur qualité de vie. Nous leur donnons de l’espoir.
Nous innovons la santé
Dossier Santé ! Ouverte en mars 2010, LA CLINIQUE ÉLYSÉE-DAKAR souhaite attirer des patients issus de toute la sous-région.
MARC DEVILLE POUR J.A.
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CHIRURGIE
Opération esthétique à Dakar
Prothèses mammaires, liposuccions, liftings… Pour ces interventions, plus besoin d’aller en Europe. L’offre s’étoffe dans la capitale sénégalaise, qui abrite même la première clinique spécialisée d’Afrique de l’Ouest.
C
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est une villa cossue, cachée derrière de hauts murs blancs, à quelques pas de l’Assemblée nationale. Ouverte en mars 2010, la clinique ÉlyséeDakar est, en Afrique de l’Ouest, la première structure privée exclusivement spécialisée dans la chirurgie et la médecine esthétiques. Un marché porteur dans la sousrégion, alors que, jusqu’à présent, la demande ouest-africaine peinait à être satisfaite localement. JeanJacques Caraco, anesthésiste et
patron de la clinique, explique : « 80 % de notre clientèle a déjà eu recours à la chirurgie esthétique dans les pays occidentaux. Les 20 % restants n’auraient pas fait le pas d’aller à l’étranger mais, puisque l’offre est là, ils essaient. » Avec une trentaine de patients chaque mois, la clinique n’a pas encore atteint l’équilibre financier. « Mais le bouche à oreille fonctionne », ajoute Jean-Jacques Caraco. Même constat à l’Ordre national des médecins du Sénégal (ONMS). « Beaucoup de praticiens
commencent à s’y intéresser. Et la demande existe, les gens veulent s’occuper de leur bien-être », confirme Cheikh Ahmadou Bamba Diop, son président. Dans la capitale sénégalaise, les deux cliniques privées les plus huppées font déjà venir, plusieurs fois par an, des spécialistes français pour opérer les patients. Partout, les demandes sont les mêmes : prothèse mammaire, liposuccion du ventre, lifting… Avec des tarifs de 20 % à 30 % moins élevés qu’en France, « et des prestations équivalentes » selon les praticiens français, le marché est amené à se développer. Fini les billets d’avion et l’hébergement à financer pour aller à Londres, à Paris ou à New York. « DIAYE FONDÉ ». À la clinique Élysée-Dakar,80%despatientssont sénégalais – dont la moitié d’origine libanaise –, et les autres sont des expatriés, notamment des Français. L’objectif est d’attirer également
Les deux établissements les plus huppés font venir, plusieurs fois par an, des spécialistes français. une clientèle ouest-africaine. Pour le moment, parmi les visiteurs issus du reste du continent, l’équipe de la clinique Élysée-Dakar a opéré des personnes venant de Mauritanie, de Côte d’Ivoire, de RD Congo et d’Afrique du Sud.
MARC DEVILLE POUR J.A.
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Plus de 90 % des clients sont des femmes. Leurs demandes de chirurgie et de médecine esthétiques sont les mêmes que celles ayant cours en Occident, avec tout de même quelques particularités. « Pour les Africaines de 50 à 60 ans, les opérations ne se font pas vraiment sur la poitrine, car les seins ne sont pas considérés comme un symbole de féminité. En fait, nous opérons surtout les fessiers », précise Jean-Jacques Caraco. Car le diaye fondé, à savoir des fesses rebondies, a davantage la cote. Quant aux patients hommes, ce sont essentiellement des chefs d’entreprise, des artistes ou des
professionnels de l’audiovisuel, âgés d’une cinquantaine d’années. Ils viennent principalement pour se faire enlever les poches sous les yeux et relever les paupières. ET L’HÔPITAL PUBLIC? Le secteur
public s’intéresse également à la chirurgie esthétique. Le centre hospitalier Aristide-Le Dantec, à Dakar, a ainsi pour projet d’ouvrir un service spécialisé. « Ici et dans la sous-région, la demande est là, car le niveau de vie augmente. De plus en plus de femmes me demandent des ventroplasties ou des opérations mammaires. Le problème, c’est que nous avons besoin de
! Avec des tarifs entre 20 % et 30 % moins élevés qu’en France et DES PRESTATIONS
ÉQUIVALENTES,
le marché est amené à se développer.
formateurs au Sénégal », relève le docteur Cheikh Tidiane Touré, spécialiste en chirurgie générale. La direction de la clinique Élysée-Dakar souhaite de son côté faire de la capitale sénégalaise le haut lieu du tourisme médical en Afrique de l’Ouest, avec « un package hébergement-avionopération et activités pour les accompagnateurs», énumère JeanJacques Caraco. Reste la question de la légalité. À l’ONMS, on regrette de ne pas avoir été consulté pour l’ouverture de la clinique. Un avis pourtant obligatoire, selon son président. ● AURÉLIE FONTAINE, à Dakar
Dossier Santé
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PORTRAITS
Des patrons bien portants
À Durban, Douala et Dakar, ils dirigent des laboratoires de référence – ou en passe de le devenir.
Célestin Tawamba Cinpharm (Cameroun)
DR
Stephen Bradley Saad Aspen Pharmacare (Afrique du Sud)
À
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En rachetant en 2006, grâce à un prêt de 8 milliards de F CFA, les laboratoires locaux du français Rhône-Poulenc, il devient le premier producteur de médicaments d’Afrique centrale. Il s’associe avec l’indien Cipla (déjà présent en Ouganda, au Kenya et au Ghana) pour le transfert de technologie. Un partenariat « gagnant-gagnant » pour Cinpharm, selon son patron, qui espère à terme être complètement indépendant. ● M.P.
Amadou Ouattara West Afric Pharma (Sénégal)
L
eaderauMaroc,Sothemaaconcrétisé ses ambitions d’expansion en devenant actionnaire majoritaire de West Afric Pharma, à Dakar. D’un investissement de 5 millions d’euros, l’usine mettra ses premières boîtes sur le marché d’ici à septembre. La
DR
47ans,StephenBradleySaadestà la tête du plus grand groupe pharmaceutique africain. Ce comptable de formation n’en est pas à son galop d’essai. Stagiaire au début des années 1990 chez PricewaterhouseCoopers, c’est au chevet d’une petite entreprise du secteur qu’il sent aussitôt le potentiel du marché. Il jette son dévolu sur Quickmed, dont il devient copropriétaire avec Gus Attridge. Accusant un déficit de 24 millions de rands (2,4 millions d’euros actuels), la société est fusionnée avec Covan, qui fabrique du sérum pour les yeux. La nouvelle entité est baptisée Zurich, et revendue 75 millions de rands en 1993 à Adcock Ingram. À l’âge de 29 ans, Saad se retrouve alors à la tête d’un pactole de 20 millions de rands. Dans la foulée, les deux partenaires rachètent l’université privée Varsity College (1,5 million de rands), qu’ils cèdent en 1997 pour 100 millions de rands… La même année, ils créent Aspen. Coté à la Bourse de Johannesburg, le groupe affiche aujourd’hui une capitalisation de 5 milliards de rands (500 millions d’euros) et produit 40,6 % des médicaments antiVIH du pays. ● MICHAEL PAURON
VINCENT FOURNIER/J.A.
P
atron du holding Cadyst-Invest, Célestin Tawamba, 45 ans, veut faire de l’Afrique centrale un pôle de production de médicaments génériques. Superviseur d’audit chez Ernst & Young dans les années 1990 en France, il revient au Cameroun en tant que directeur financier de la société forestière Hazim. C’est le patron de cette dernière qui, en se portant garant auprès des banques locales, lui permet d’obtenir son premier prêt, en 2001, pour se lancer dans l’agroalimentaire. Production de farine, de pâtes alimentaires, franchise Panzani… Célestin Tawamba atteint en quelques années un chiffre d’affaires de 35 milliards de F CFA (53 millions d’euros).
direction a été confiée à Amadou Ouattara. Ce Malien de 49 ans est un habitué du secteur. Après trois années d’études, il quitte les bancs de la faculté de médecine de Bamako pour devenir délégué médical puis directeur régional (Guinée, Mali, Burkina, Sénégal) chez l’américain Bristol-Myers Squibb. En 2003, il intègre le français Innotech International en tant que responsable Afrique, jusqu’à fin 2010. « Les besoins de la région sont énormes, confie-t-il. Il suffit de regarder les appelsd’offresdesÉtats,descentainesde milliards de francs CFA chaque année! » Aujourd’hui à la tête d’une usine capable d’alimenterengénériques(antiparasitaires, antidiarrhéiques…) les huit pays de l’Unionéconomiqueetmonétaireouestafricaine (UEMOA), Amadou Ouattara espère bien prendre quelques parts de marché aux multinationales. ● M.P. JEUNE AFRIQUE
Culture & médias
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ARTS PLASTIQUES
Pour en finir avec
l’orientalisme Dans Islamania, Véronique Rieffel montre en quoi le monde musulman a été une source d’inspiration artistique pour les Occidentaux, alors que les arts dits « islamiques » restent méconnus. Retour sur plus d’un siècle d’échanges et d’influences réciproques.
Propos recueillis par
L
NICOLAS MICHEL
e regard que porte l’Occident sur la civilisation islamique est trop souvent voilé par la bruissante multitude des préjugés et des a priori. De la représentation des femmes alanguies dans le harem à celle des terroristes kamikazes prêts à se faire exploser en souvenir de Ben Laden, l’orientalisme s’est considérablement métamorphosé sans pour autant disparaître. Pourtant, le monde des arts apporte aujourd’hui des réponses subtiles, souvent ambiIslamania. valentes, aux questions de société nées de la confrontation De l’Alhambra à la burqa, histoire entre des mondes qui ont parfois du mal à se comprendre. d’une fascination Avec Islamania. De l’Alhambra à la burqa, histoire d’une artistique, fascination artistique, Véronique Rieffel propose une Beaux Arts Éditions, réflexion différente sur la rencontre, les échanges et le 224 pages, 19 euros dialogue entre les arts dits « islamiques » et l’Occident. Inspirations, influences, enrichissement, la directrice de l’Institut des cultures d’islam décortique une passion mutuelle bien plus fécondante qu’on ne le dit. Rencontre. ● ! LA DIRECTRICE de l’Institut des cultures d’Islam, à Paris.
JEUNE AFRIQUE : Vous avez donné à votre ouvrage le titre « Islamania », pourquoi? VÉRONIQUE RIEFFEL : En utilisant ce
mot, j’ai voulu montrer à la fois l’engouement très fort qui existe pour l’islam et la manie actuelle, parfois abusive, d’en parler à tout bout de champ. Cette religion est considérée comme la cause de nombreux phénomènes politiques et sociaux qui n’ont souvent rien – ou bien peu – à voir avec la foi. J’ai souhaité transformer une espèce d’obsession négative et stigmatisante en obsession positive. Je pense qu’il faut être « islamaniaque » pour de bonnes raisons, tenter de voir en quoi l’islam a été une source d’inspiration artistique et comment il a influencé les artistes occidentaux avant de faire, enfin, son entrée dans les beaux-arts. L’idée de montrer toutes les facettes de cette obsession ambivalente est venue d’un paradoxe : lorsque l’on ouvre un livre d’histoire de l’art, censé être généraliste, on y trouve exclusivement de l’art occidental. Il y a un grand absent ! Si les attentats du 11 septembre 2001 ont provoqué un afflux de bouquins dans les librairies, ces derniers sont bien souvent des livres kleenex qu’on prend, qu’on jette, et qui se caractérisent par un angle identique et une unité de point de vue. C’est, selon vous, dû à une méconnaissance du grand public vis-à-vis de l’islam?
VINCENT FOURNIER/J.A.
Il y a une méconnaissance de l’islam qui se retrouve à tous les niveaux. Elle n’oppose pas un peuple ignorant à une élite instruite – et c’est peut-être ça qui est le plus inquiétant. Même parmi des personnes très cultivées, il y a une ● ● ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
JEUNE AFRIQUE
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RMN/GÉRARD BLOT
Culture médias
L’Esclave blanche de Jean Lecomte du Noüy (1888) VÉRONIQUE RIEFFEL : « Ce célèbre tableau peint par l’élève de Gérôme quelques années après avoir effectué l’incontournable
“voyage en Orient” est un parfait condensé des fantasmes que l’Occident assouvit à travers la représentation du mode de vie oriental, ou du moins ce qu’il en perçoit : luxure, gourmandise, consommation de haschich… Ces péchés capitaux trouvent une place de choix dans la peinture orientaliste du XIXe siècle. » ●
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SUCCESSION H.MATISSE/PHOTO : CNAC/MNAM DIST. RMN
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L’Odalisque à la culotte rouge de Matisse (1924-1925) V.R.: « Matisse, qui n’hésite pas à proclamer: “L’Orient nous a sauvés”, propose une interprétation très personnelle du topos de l’odalisque: ici
à demi nue dans un costume turc servant à travestir ses modèles occidentaux en femmes orientales offertes. Le fond ornemental inspiré par les motifs vus en Orient marque son intérêt pour l’art développé en terre d’Islam, tout particulièrement celui des tapis. » ●
véritable ignorance. J’ai fait des études de philosophie jusqu’à l’agrégation et je me suis rendu compte que les enseignants connaissaient très mal la philosophie islamique. C’est valable aussi dans le domaine des beaux-arts. Des professeurs qui enseignent l’histoire de l’art ne connaissent souvent pas l’art contemporain produit dans le monde musulman. En outre, chez les rares personnes qui s’intéressent au sujet, il faut dépoussiérer la connaissance! Elle concerne trop souvent l’âge d’or de l’islam.Nombreuxsontceuxquimaîtrisent parfaitement l’histoire de l’art produit dans le monde musulman… jusqu’à la fin du XIXe siècle! Après, on ne s’y intéresse plus guère.C’estlàl’objetprincipald’Islamania: aller contre l’idée qu’après cet âge d’or il ne se serait plus rien passé, voire qu’il y aurait eu une dégénérescence. Je veux prouver qu’il y a des intellectuels et des artistes vivants et actifs. Certes, on ne les entend pas beaucoup, parce que leur discours est moins saisissant que celui des intégristes, maisilssontlà.Etjevousassureque,même au sein de l’élite occidentale, il y a encore une forme d’orientalisme qui consiste à ●●●
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réduire l’islam à son âge d’or, à la violence ou à l’oppression des femmes… Cela n’évolue pas?
Si. Pour prendre l’exemple du champ artistique, j’ai pu profiter du mois de juillet pour aller voir « Le Génie de l’Orient » au musée des Beaux-Arts de Lyon, une exposition magnifique, à la fois pointue et grand public, qui montre l’influence que
structurées par cette vision ancienne, qui date de la première confrontation avec l’islam lors des croisades, et qui s’est structurée en un mouvement pictural et intellectuel au XIXe siècle. Notamment après l’expédition de Bonaparte en Égypte. Si cet orientalisme évolue et se métamorphose, il est encore très présent et très influent. Je prendrai l’exemple de Majida Khattari, cette artiste d’origine marocaine qui a suivi
Une forme d’orientalisme réduit encore l’islam à son âge d’or ou à la violence. l’islam a eu sur les artistes au XIXe siècle et au début du XXe siècle : dans les arts décoratifs puis dans la peinture abstraite, deux courants révolutionnaires qui se sont appuyés dans leur élaboration sur les arts d’Islam. L’orientalisme « à sens unique » dont vous parlez est-il mort?
Je pense que l’orientalisme n’a pas disparu. Nos représentations sont encore très
à la fois les Beaux-Arts de Casablanca et les Beaux-Arts de Paris. Elle a appris l’histoire de l’art occidental et, en tant que femme marocaine, elle est elle-même le sujet des représentations orientalistes. Après le 11 Septembre, elle a réalisé des photos qui reproduisent les tableaux anciens, dans lesquels elle remplace certains objets traditionnels par des éléments perturbateurs, comme par exemple celui où une femme porte un sac en forme de grenade JEUNE AFRIQUE
Pour en finir avec l’orientalisme à la place d’une cruche à eau. L’idée, c’est de prouver que l’orientalisme est passé de la représentation de l’odalisque alanguie à celle de la femme kamikaze. L’image de la femme persiste, associée à une notion de violence qui a pris le pas sur la douceur d’antan. Le marché de l’art n’est-il pas en partie responsable de cette survie de l’orientalisme?
Oui. Aujourd’hui, utiliser les expressions « art arabe » ou « art musulman », même si l’on hésite un peu, ça fait vendre. Ces catégories sont portées par le marché, même si elles ne veulent pas dire grand-chose. Il y a bien des artistes vivants qui sontdeculturearabeoumusulmane, mais ce n’est pas ça qui détermineleurtravail.Iln’existe aucun critère permettant de regrouper des artistes sous un même qualificatif. Ces catégoriessontinopérantesd’unpoint de vue esthétique.
le Moyen-Orient jouent un rôle important. Des artistes de toutes origines participent à ArtDubaietàdiversesbiennalesdumonde arabe. Même s’il y a beaucoup d’enjeux de prestige qui dépassent la simple question artistique. Pour certains pays, être capable d’organiser une biennale ou de faire venir des galeristes, c’est une façon de se positionner sur le plan économique.
le fait de porter un patronyme arabe. Personnellement, cela me pose problème. Je trouve que c’est une exposition orientaliste parce que fourre-tout, accueillant des artistes libanais, marocains… juste parce qu’ils sont arabes. Aucune thématique ne s’en dégage. Au nom du Printemps arabe, il faudrait faire des expositions de ce genre? C’est une réaction paniquée qui n’a guère de sens! En quoi l’art islamique a-t-il influencé l’abstraction?
DAN LECCA
Je suis toujours très méfiante quand il s’agit d’attribuer une causalité unique à un phénomène. Au début du XXe siècle, l’Occident arrive à l’abstraction pour différentes raisons. Ce qui m’a intéressée, en lisant les nombreux écrits des artistes, c’est que l’art islamique est alors une référence. Frantisek Kupka, Vassily Kandinsky ou Paul Klee ne se sont pas contentés d’aller en Orient pour y puiser l’inspiration, ils ont vraiment Pour autant, les artistes ne s’y découvert l’art islamique. La période de la fin du XIXe et opposent pas vraiment… du début du XXe, qui voit Il existe chez certains d’entre naître l’abstraction, marque eux une forme d’orientalisme d’une certaine manière la intériorisé. Pour être reconnu, y compris dans leur pays d’orifin de l’orientalisme – même si je vous répondais tout à gine, les artistes doivent encore l’heure de façon provocapasserparlespaysoccidentaux. trice qu’il n’était pas mort. Ils ont tellement souffert du Avant, l’Orient représente une manque de visibilité ! Moi, je source d’inspiration ; après, ne vais pas les juger s’ils déciil y a une véritable rencontre dent de participer à telle ou Men in Skirts entre deux arts. Pour expliquer telle biennale, même sous de Jean-Paul Gaultier (2003) la naissance de l’abstraction, l’étiquette « artiste arabe ». on peut parler des théories C’est un premier pas vers une V.R.: « Dans son exposition “Men in Skirts”, présentée à Londres et reconnaissance qui manquait développées par Hegel dans à New York en 2003, Jean-Paul Gaultier montrait l’inspiration jusqu’à présent. Tant mieux si L’Esthétique ou d’une forme puisée par les grands couturiers occidentaux dans les costumes l’on s’y intéresse, même si c’est d’épuisement de l’art occiportés par les hommes en terre d’Islam. Il est assez réjouissant de pour de mauvaises raisons. dental qui avait tout exploré… voir que l’attraction pour le monde oriental n’est plus aujourd’hui Mounir Fatmi est un artiste Mais la rencontre avec l’art incarnée exclusivement par la figure féminine. Le corps masculin contemporain, point barre. islamique a sans doute été un oriental à la virilité exacerbée devient aussi un objet de désir, hautement érotisé. » ● Pour le marché américain, il déclencheur qui a permis de était un artiste français. Pour franchir le pas. On s’est dit que N’a-t-on pas tendance à mettre les artistes l’abstraction n’était pas si aberrante… les Français, il est un artiste arabe. Après dits « arabes » dans un même sac? le 11 Septembre, il est devenu un artiste musulman. Il a une identité flottante… On Dans le cas de la biennale de Venise, Comment expliquez-vous ce moment retiendra les meilleurs. cette année, il y a eu beaucoup d’artistes bien particulier? venant de pays arabes ou d’origine arabe. À cette époque, qui suit la révolution Au-delà des pavillons de l’Arabie saoudite L’Occident domine-t-il encore le marché industrielle, les beaux-arts ne sont plus et des Émirats arabes unis, une exposide l’art? une entité séparée du reste. On arrive à tion d’art « panarabe » a réuni des artistes L’idée d’un centre de l’art unique n’est imaginer que le beau et l’utile peuvent plusvalable.LaChine,l’Indeetmaintenant ayant pour seul dénominateur commun aller ensemble. C’est pourquoi les artistes JEUNE AFRIQUE
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Culture médias Arts plastiques
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s’intéressent à cet art islamique qui est partout présent, même dans les objets du quotidien. Les expositions universelles montrentlesplusbellesréalisationsàlafois techniques, mais aussi esthétiques, de l’art islamique. Une exposition en particulier marque l’Occident: celle de Munich, en 1910, qui pour la première fois présente des objets issus du monde musulman en tant qu’œuvres d’art, sous une forme scientifique et en même temps grand public, loin des mises en scène spectaculaires des expositions universelles. Cette expo a énormément marqué des artistes comme Kandinsky, Matisse, Le Corbusier, qui en sont partis bouleversés. Le bouleversement qui suit, c’est le choc du 11 Septembre?
On ne connaît guère d’artistes d’origine arabe influents à cette époque…
Ce sont plutôt des artistes occidentaux comme Pablo Picasso puis François Morellet qui ont porté un regard différent sur cette terre décolonisée. Encore une fois, il a fallu attendre le XXIe siècle pour que les artistes de ces pays acquièrent une véritable visibilité. Pendant la décolonisation, ce sont surtout la littérature, la poésie et le théâtre qui sont à la pointe de la contestation.
On y revient : les attentats du 11 septembre 2001 apportent un vrai changement?
Très clairement. Avant, il pouvait y avoir un effet de mode autour d’un artiste portant un nom arabe, mais cela restait assez confidentiel. Une exposition comme « Les Magiciens de la terre », en 1989, n’a pas été suivie de beaucoup d’effets. Avec le 11 Septembre, le grand public est touché: il veut voir des artistes musulmans et même retrouver dans les arts une espèce de fascination pour la violence. Beaucoup d’artistes portant un patronyme arabe jouent le jeu en présentant des œuvres très spectaculaires et deviennent des artistes « musulmans ». La réaction à chaud est tout de même ambivalente. Pour vous donner un exemple, en septembre 2001, le Musée de la ville de New York avait prévu une exposition rétrospective sur les artistes arabes américains, qui a été annulée, vu les circonstances. Elle a été reportée
COURTESY GALERIE D’ART L’ATELIER 21
Non!Vousalleztropvite!L’étapequisuit, c’est celle de la décolonisation. Beaucoup d’artistes d’origine immigrée arrivent en Europe et contribuent à bouleverser les
codesesthétiques.C’estunmomentimportant aussi. Juste avant les indépendances, Picasso reprend les Femmes d’Alger dans leur appartement d’Eugène Delacroix et en fait des femmes guerrières qui portent la lutte… Aujourd’hui, on évoque le rôle des femmes dans la révolution, mais à l’époque aussi, avec Picasso, on est loin de l’orientalisme et des femmes alanguies dans leur appartement!
La Parure de la mariée de Majida Khattari (2009-2010) V.R.: « Dans cette photographie inspirée d’un tableau orientaliste de Pierre-Marie Beyle, l’artiste, tout en reconstituant
la scène initiale, s’amuse à remplacer un personnage assis par une petite poupée aux traits asiatiques : clin d’œil à cette tendance propre à l’orientalisme de mélanger plusieurs orients dans un imaginaire commun… Clin d’œil aussi au fait qu’elle-même, en sa qualité “d’artiste arabe”, situe son Orient personnel plus à l’est encore que celui de ses maîtres anciens. » ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
JEUNE AFRIQUE
Pour en finir avec l’orientalisme
Ils ont parfois versé dans une certaine caricature d’eux-mêmes!
Plein d’artistes y ont vu une sorte de plan : « Cela plaît aux Occidentaux, il y a un engouement, alors allons-y ! » C’est une autoexotisation qui montre une forme d’orientalisme intériorisé. C’est aussi une démarche mercantile : il y a un créneau, une demande, un marché. Nous, les Occidentaux, avons accordé aux artistes qui versaient dans ce travers une attention démesurée. Au cinéma, pour obtenir des financements européens, il fallait montrer des scènes de hammam ou des scènes de violence, de femmes soumises… qui plaisaient beaucoup aux producteurs occidentaux.
Qu’est-ce que cela change pour eux?
ROMAIN LOPEZ/COURTESY GLADSTONE GALLERY ; NEW YORK AND BRUSSELS
à janvier 2002, sous une forme beaucoup plus réduite. Certaines œuvres n’ont pas été exposées… Il y a une espèce de prudence et de paranoïa autour de la question. En outre, les artistes ont parfois été exposés comme des prophètes : ils devaient détenir la vérité, donner les clés du 11 Septembre, et l’on attendait d’eux plus qu’ils ne pouvaient apporter. On leur demandait de se transformer en sociologues !
Cela donne une visibilité à des choses qui étaient là et qu’on ne voyait pas. Cela ouvre le regard! Des artistes peuvent enfin présenter des choses qui sortent du pittoresque. Au cinéma, lors du dernier Festival de Cannes, le film Plus jamais peur, du réalisateur tunisien Mourad Ben Cheikh, montrait des femmes avocates, blogueusesetautres.Finilafemme dans le hammam! Fini la femme soumise! On arrive enfin à « désorientaliser » les œuvres! L’Occident continue néanmoins de dicter son goût au monde entier…
Aujourd’hui, le goût occidental domine encore. Même dans la constitution d’institutions muséales au Moyen-Orient, on a recours à des architectes et à des artistes qui sont passés par l’Occident, y vivent ou y ont fait leurs études. Leschosesévoluenttoutdemême Crystal of Resistance de Thomas et le goût de ces artistes vient Hirschhorn (2011) colorer l’art occidental. Mounir Fatmi me disait qu’il avait des V.R.: « Un vent de Printemps arabe souffle acheteurs au Maroc, dans les pays sur la biennale qui se déroule actuellement à Venise du Golfe; Majida Khattari, qu’un et s’invite dans l’ensemble des pavillons, y compris Qatari venait d’acheter une de ses celui de la Suisse, où l’artiste Thomas Hirschhorn a imaginé d’impressionnantes Marianne tunisiennes grandes photos… Les Saoudiens affublées de longues robes portant les images commencent à collectionner l’art de la révolution en cours, forme contemporaine Quel type de réactions le arabe.Auniveauétatique,àtravers de La Liberté guidant le peuple. » ● 11 Septembre a-t-il provoqué chez les musées, comme au niveau des les artistes? collections privées, il y a de plus en Certains se sont engouffrés dans une aussi stimulé des artistes occidentaux. plus d’artistes arabes qui entrent dans les espèce de néo-orientalisme, d’autres ont Je pense notamment au Suisse Thomas collections.Cen’estpasqu’unengouement été obligés de se positionner et de se poser Hirschhorn, qui travaille beaucoup sur occidental. la question de leur identité – Suis-je un la notion de musée éphémère. Interloqué artiste musulman? Certains en ont fait un face au Printemps arabe, il a réuni plein de Existe-t-il une critique et des écoles questionnement au cœur de leur œuvre. photosethabillédesMariannetunisiennes influentes en terre d’Islam? Je pense à Kader Attia, à Mounir Fatmi, derobesgigantesquescomposéesd’images C’est là que le bât blesse. Il y a encore à Majida Khattari. Depuis le Printemps de la révolution. Il montre bien l’homme très peu de journaux traitant de l’histoire arabe, c’est encore plus visible: on s’intéoccidental conduit à s’interroger sur sa de l’art. Souvent, la critique vient de l’Ocresse à ces artistes parce qu’ils apportent propre(mé)connaissancedumondearabe, cident. Bidoun est édité aux États-Unis, un souffle d’air frais ! Il y a un discours, sur ses préjugés, sur cet effet de sidération avec des articles écrits par des critiques d’origine arabe, mais vivant aux Étatsun positionnement, une réflexion, une suscité par le Printemps arabe dont on a nécessité, des enjeux forts qu’on ne trouve tant parlé. Unis. La revue marocaine Dyptik vient d’apparaître : c’est un début ! Quant aux peut-être plus dans l’art occidental. écoles, l’Occident reste la référence. Les Les artistes ont-ils participé aux révoLe Printemps arabe apparaît-il déjà dans lutions? artistes qui émergent ont en général suivi les œuvres des artistes? une double formation. Les pays arabes ne Beaucoup ne les ont pas vues venir, À la biennale de Venise, les œuvres mais nombre d’entre eux étaient engagés disposent pas d’institutions permettant de les plus intéressantes sur la révolution depuis longtemps dans des mouvements rivaliser avec leurs pendants européens ou ne venaient pas forcément des pavillons confidentiels. Ils essayaient de diffuser américains. Les écoles d’art, comme les « arabes ». Le mouvement politique a leurs idées à travers leur art. musées, ont souvent peu de moyens. ● JEUNE AFRIQUE
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Culture médias BONNES FEUILLES
Il était une fois l’Amérique
Avant la rentrée littéraire, J.A. vous propose chaque semaine, en exclusivité, l’extrait d’un ouvrage à paraître. Quatrième livraison avec le dernier roman de Dinaw Mengestu.
D
ans Ce qu’on peut lire dans l’air, son second roman, l’écrivain américain d’origine éthiopienne raconte la lente désagrégation de deux couples. Celui d’un réfugié éthiopienrejointparsafemmeauxÉtats-Unis,etceluide leur fils, jeune professeur d’anglais rêveur qui cherche, par l’usage
delafiction,àredonnercorpsàlaréalité.Lelivreopposeainsideux époques, l’une où l’on ne se quittait pas même quand les coups pleuvaient, et l’autre où l’on se quitte même lorsque l’amour n’est pas tout à fait mort. Subtil, le livre évite la caricature et donne une image pertinente de la vie des immigrés en Amérique. ●
« Pardon, monsieur, vous êtes de quel pays ? » TU N’AS AUCUNE IDÉE de qui tu es, hein, Jonas ? » Ce n’était pas la violente attaque frontale que j’avais attendue. À la place, Angela tentait de calmer la frustration et la déception que je lui causais en nommant leurs origines. Si je ne savais pas vraiment qui j’étais, on ne pouvait guère me tenir responsable de ne pas affronter la vie en face, comme elle l’aurait espéré. Si, derrière la façade, il n’y avait personne à accuser, j’étais innocent. Peut-être aurions-nous pu parvenir à une sorte d’accord si je m’étais défendu sur le coup. J’aurais peut-être pu expliquer à Angela que son affirmation était en partie correcte, en fait, mais pas dans le sens qu’elle présumait. Si je ne savais pas trop qui j’étais, ce qui était possible, c’était seulement parce qu’il y avait très longtemps que je m’appliquais à paraître n’être presque rien – pas anonyme ni invisible, juste assez insignifiant pour me fondre dans le paysage et me faire rapidement oublier. Ça avait commencé avec mon père dont, depuis toujours, j’espérais ne pas me faire remarquer. C’est avec lui que j’avais d’abord appris l’art d’occuper une pièce sans déranger. Quand il revenait du travail, je m’asseyais à divers endroits du salon – au milieu du canapé, par terre ou à côté de la table basse – pour voir comment il réagissait à ma présence. À plusieurs reprises, je m’approchai trop et fus prié de ne pas me coller dans ses jambes, d’autres fois j’eus droit soit à un grognement soit à un interrogatoire sur ce que j’avais appris en classe ce jour-là. Un soir, finalement, N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
lui lancer : « Pardon, monsieur, vous êtes de quel pays ? » Elle avait souvent affirmé détester que les gens posent cette question aux chauffeurs de taxi. Ils en avaient bruyamment discuté, Bill et il rentra à la maison et ne fit pas du tout elle, un jour, dans la salle de conférences attention à moi. J’avais volontairement du centre, peu avant qu’elle ne s’en aille éteint la lampe à côté de moi et m’étais pour entamer sa carrière d’avocate. assis au bout du divan, les genoux repliés « Fiche-leur la paix, avait-elle déclaré. contre le buste, et je compris alors qu’il Pourquoi seraient-ils obligés de raconter suffisait, pour l’éviter, que je me fonde d’où ils viennent ou pourquoi ils ont quitté leur pays ? Pour qu’on leur file un dans le décor. Je n’avais jamais oublié dollar de pourboire en plus ? Personne ne cette découverte, de sorte que j’avais fini par considérer mon opacité comme demande au vieux chauffeur noir d’où il essentielle à ma survie. Rien de mal ne est ni ce qu’il a vécu, parce que les gens peut vous arriver si on ne vous voit pas. trouveraient ça grossier et dingue. Sauf C’était ma philosophie à l’époque. s’il a un accent. Là, tout est permis. Là, Il est néanmoins difficile de se défaire c’est “dites-nous pourquoi vous êtes venu d’instincts acquis, et donc je ne me ici et combien ce doit être dur !” » défendis pas sérieusement face à Angela. Elle détestait ça, mais, comme la pluJe lançai juste une réplique sournoise, part d’entre nous, il lui arrivait de céder à la curiosité et elle ne pouvait s’empêhostile. cher de s’interroger sur des trucs sur« Je suis désolé que tu aies cette impression. Ce doit être prenants. J’ai souvent pensé très dur pour toi. » qu’elle posait cette question Par la suite, savoir qui à tous les chauffeurs de taxi j’étais vraiment devint un lorsqu’elle était seule. « Mon mari est africain perpétuel sujet de discussion entre nous. aussi », ajouta-t-elle. « Tu es un étranger en À ce stade, j’espérais situation irrégulière, Jonas ? encore une tentative d’huSi c’est ça, tu peux me le mour, une remarque du style : « Mon mari aussi est africain. dire, tu sais. N’oublie pas Vous vous connaissez peutque j’adore les réfugiés. » être. » On était dans un taxi sur Ce qu’on peut lire Le chauffeur de taxi, First Avenue et on roulait dans l’air, qui avait déjà pratiqué ce vers le nord pour aller assisAlbin Michel, ter à une fête de Noël orgajeu-là, eut le bon sens de 384 pages, 22 euros, nisée par sa boîte quand elle feindre un véritable intérêt à paraître le 17 août me dit ça. Notre chauffeur en demandant : était originaire de Gambie « Ah bon, il vient d’où ? – Angela le lui avait demandé, histoire – On ne sait pas trop. De quelque part sur la côte Est. Il n’aime pas en d’engager la conversation. Elle avait collé la tête contre la vitre de séparation pour parler. » JEUNE AFRIQUE
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RICHARD B. LEVINE/NEWSCOM/SIPA
Culture médias
C’est à ce moment-là qu’elle reporta son attention sur moi et me décocha une flèche classique, un brin moqueuse, à laquelle, en toute autre circonstance ou presque, j’aurais répondu facilement, sur un ton enjoué. C’était notre façon d’éviter de dire le fond de notre pensée, statu quo que j’avais volontiers respecté jusque-là. « Alors, Jonas, c’est quoi ? Étranger en situation irrégulière ou pas ? – Désolé. Né et élevé ici. » Angela garda le silence l’espace de cinq puis de dix rues. Nous étions presque arrivés à la soirée quand, les yeux fixés droit devant elle sur ce qui aurait pu être son reflet, elle me dit dans un quasi-murmure : « Alors pourquoi tu ne le montres pas ? – Et comment on le montre alors ? – Parler, ça aiderait. – Je n’arrête pas de parler. – Pas de choses importantes. Tu rentres du boulot et tu restes tellement silencieux que des fois je me dis que, si ça se trouve, tu ne parles pas du tout anglais. – J’ai un diplôme d’anglais. JEUNE AFRIQUE
– C’est ce que tu dis, mais comment puis-je le savoir si tu ne le montres pas ! » Plus tard, pendant cette fête de Noël organisée par sa boîte, après trois verres de vin et une centaine de mots environ à mon actif – chiffre impressionnant –, Angela se mit à me présenter comme son mari qui venait d’arriver de… « Il a débarqué de Sierra Leone, il y a quelques mois. Il est encore traumatisé par la guerre, c’est pour ça qu’il ne parle pas beaucoup. » Je l’attirai à l’écart pour lui dire que ce n’était pas drôle. Elle me pria de l’excuser et déclara qu’ellenerecommenceraitpas.Lorsqu’on nous présenta à une nouvelle personne, Angela déclara : « Jonas, mon mari. Il n’en a pas l’air, mais il est du Japon. » Elle seule goûta la plaisanterie. Quand on regagna l’appartement, tous deux ivres après avoir passé des heures debout côte à côte sans quasiment nous être adressé la parole, Angela essaya de m’expliquer ses intentions. « Je te vois planté là souriant et acquiesçant à tout ce que les gens disent et
au début, je pense “Peut-être qu’il ne comprend pas ce qu’ils racontent. Peutêtre qu’il devient sourd et que je devrais demander à quelqu’un de le traiter de sale type pour voir s’il réagit”, mais après je te vois rire, ou faire semblant de rire, d’une blague parmi les plus stupides que j’aie jamais entendues, et je pense “Non, il n’est pas sourd, il s’en fiche, c’est tout. Il n’est pas vraiment ici à écouter quoi que ce soit ou qui que ce soit, il est ailleurs.” J’arrive à la conclusion que tu es un étranger, ni en situation régulière ni en situation irrégulière, mais un authentique étranger qui a décidé que, dans la vie, le meilleur moyen de se démerder c’était de ne rien dire ni faire qui risquerait de griller sa couverture. » J’aurais aimé lui dire que je n’étais pas d’accord avec elle, mais j’aurais eu du mal. Je cherchais la paix partout où j’étais et c’était souvent grâce à mon silence que je la trouvais. Angela, en revanche, donnait presque l’impression de s’épanouir quand elle avait la possibilité d’exprimer un avis contraire, et ses huit mots préférés étaient : « Je ne pense pas que ce soit vrai. » ● © Albin Michel, 2011. N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Culture médias En vue
■ ■ ■ Décevant
ROMAN
Un juteux business Yasmina Khadra retrace l’épopée d’otages en Afrique. L’occasion de dénoncer les clichés que les Occidentaux se font du continent. terre, « quelque part dans l’enfer des hommes. Somalie, Éthiopie, Djibouti, Soudan ». S’ensuivent d’interminables semaines de captivité, de brimades, de privations et d’humiliations qu’ils partagent avec Bruno, un Français tombé aux mains de Joma et de ses sbires, de jeunes hommes que la vie a égarés parmi le ressentiment et l’amertume. À chaque aube, il faut trouver la force d’affronter ce combat quotidien où l’espoir tente de terrasser le découragement. Tapie dans l’ombre de la solitude et de la peur, la folie guette et la mort rôde. HUIS CLOS. Pour raconter cet enfer,
l’écrivain algérien Yasmina Khadra a choisi de donner la parole à l’un des otages. Véritable huis clos psychologique, L’Équation africaine (voir J.A. no 2637) plonge le lecteur dans les abîmes de l’incompréhension, de la rage et de la haine qui envahissent Kurt. Cet Allemand de Francfort, qui n’avait jamais foulé le sol ! L’ÉCRIVAIN ALGÉRIEN Yasmina Khadra. africain auparavant, n’a du continent qu’une compréhension déformée par a traite des otages est les images que les journaux télévisés devenue une industrie occidentaux, écoutés « d’une oreille en Afrique. […] Depuis distraite entre une gorgée de bière et les premiers dollars verune sonnerie de téléphone », ont pu sés aux kidnappeurs, les cordonniers lui fournir. Empli de préjugés, Kurt se ont rangé leurs clous et leur glu, […] forge de l’Afrique une vision pessimiste n’importe quel crève-la-dalle s’imagine à la tête d’un pactole dès lors qu’il qui affronte celle, tout aussi déformée croise un étranger sur son chemin… », et fausse, de Bruno. Loin de considérer constate, amer, Kurt Krausman, un le continent comme le « cœur des ténèmédecin allemand kidnappé au large bres », le Français y voit au contraire des côtes somaliennes en compagnie une terre de richesse et de générosité. Sa de Hans Makkenroth. Fuyant une réaperception, certes positive, est tout aussi lité qu’il ne parvenait pas à affronter, éculée car idéaliste et « chimérique ». Kurt avait décidé d’accompagner son Dans un style alerte et puissant, ami aux Comores, où ce dernier devait l’écrivain algérien démonte les images équiper un hôpital au profit d’une orgaque l’un et les autres peuvent se faire nisation caritative. Mais, au-delà du du continent. Et rappelle que l’Afrique, comme toute réalité complexe, golfe d’Aden, la « région est un espace de non-droit » et « il n’y est multiple et ne a qu’une loi : celle saurait se laisser des armes », celle enfermer dans des L’É ’Équation des pirates. clichés, quels qu’ils africaine, afr Capturésenpleine soient. ● Julliard, 336 pages, Jul 19 euros, mer, les deux otages SÉVERINE àp paraître le sont emmenés sur KODJO-GRANDVAUX
«
L
22 août
N 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011 o
■ ■ ■ Pourquoi pas
■ ■ ■ Réussi
■ ■ ■ Excellent
ROMAN
E ROBERT ESPALIEU/ÉDITIONS JULLIARD
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■■■
Histoires de Petit Blanc LES SEPT MAISONS en France sont celles que le capitaine Lalande Biran, à la tête du petit poste militaire de Yangambi, veut offrir à son épouse. Ou plutôt celles que Christine exige, parce sept maisons en cinq ans, c’est un bon chiffre et qu’il n’y a qu’à trafiquer un peu plus d’ivoire et d’acajou pour y parvenir. Nous sommes en 1903. Léopold II songe à se rendre au Congo belge, « son jardin de trois millions de mètres carrés », et Yangambi suinte la désillusion. Pour chaque balle tirée, le roi exige une main ou un doigt coupé en guise de preuve. Chaque semaine, une ordonnance fait le tour des villages pour trouver à Biran une gamine épargnée par la syphilis. Déjà lu, déjà vu, mais toujours grotesque et terrifiant. ● ANNE KAPPÈS-GRANGÉ Sept Maisons en France, par Bernardo Atxaga, Christian Bourgois éditeur, 280 pages, 20 euros ■■■ RÉCIT
Rock’n’taule AU DÉPART, il y a le film – Les Chats persants – du Kurde Bahman Ghabadi, primé à Cannes en 2009. Il retrace la rencontre d’Ashkan et de Negar, deux musiciens iraniens de rock. Le livre, lui, revient essentiellement sur les débuts d’Ashkan. Pendant son adolescence, lui et son frère Pooya sont livrés à eux-mêmes. Leur quête de liberté les conduira en Turquie avec de faux passeports, mais aussi dans les geôles iraniennes après un concert clandestin. Un bel hommage à la scène underground iranienne et aux jeunes bâillonnés par le régime islamique. ● JUSTINE SPIEGEL
Les Chats persans, d’Ashkan Kooshanejad et Negar Shaghaghi, Florent Massot, 286 pages, 19,90 euros ■■■ JEUNE AFRIQUE
ANNONCES CLASSÉES
Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre -Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email. : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France
CORRIGENDA Section I : LETTRE D’INVITATION N° 001 MPTIC/SG/011 La République du Tchad a réalisé un réseau de transmission numérique à fibre optique. Pour exploiter ce réseau une société d’infrastructure de transmission des communications électroniques en abrégé SITCOM-TCHAD a été créée par ordonnance en date du 1ER mars 2011. Cette société est une société d’économie mixte dont le capital sera ouvert à d’autres partenaires dans le cadre d’un Partenariat Public Privé (PPP). 1- Afin de constituer ce partenariat, le Ministre des Postes et des Technologies de l’Information et de la Communication invite par la présente les candidats intéressés et remplissant les conditions requises à présenter une offre sous pli cacheté pour la participation au capital de SITCOM TCHAD. 2- Le processus se déroulera conformément aux procédures d’appel d’offres décrites dans l’article 7 alinéa 2 Décret n° 503/PR/PM/SGG/2004 portant Code des Marchés Publics dans la République du Tchad. Tous les candidats satisfaisant aux critères d'éligibilité énoncés dans ledit Code sont admis à soumissionner. 3- Les candidats intéressés peuvent acheter le jeu complet du document d’appel d’offres moyennant le paiement d’un montant non remboursable de deux cent mille (200.000) FCFA auprès du Comité chargé de la finalisation du partenariat logé au sein du Ministère des Postes et des Technologies de l’Information et de la Communication. Les candidats remplissant les conditions requises peuvent obtenir un complément d’informations auprès du Comité chargé de la finalisation du partenariat et peuvent examiner le dossier d’appel d’offres à l’adresse indiquée ci-après :
4- Les offres doivent parvenir à l’adresse indiquée ci-après : au plus tard le 06 Septembre 2011 à 10 heures. Les offres reçues après le délai fixé seront rejetées. Les offres ne seront considérées comme effectivement reçues que lorsqu'elles sont physiquement présentes au bureau du comité. 5- Les plis seront ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui souhaitent assister à la séance d’ouverture le même jour à 11 heures à l’adresse indiquée ci-après : Comité chargé de la finalisation du partenariat, Ministère des Postes et des Technologies de l’Information et de la Communication B.P 154 Tél. 00235 22 52 15.38 / 15 21 Courriel : hamaba2000@gmail.com et nndjerabe@yahoo.fr Le Ministre des Postes et des Technologies de l’Information et de la Communication Jean BAWOYEU ALINGUE
JEUNE AFRIQUE
N° 2640-2641 • DU 14 AU 27 août 2011
Appel d’offres
Ministère des Postes et des Technologies de la Communication B.P 154 Tél. : 00235 22 52 15.38/ 15 21. Courriel : hamaba2000@gmail.com et nndjerabe@yahoo.fr
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Annonces classées REQUEST FOR PROPOSALS INTERNATIONAL COMPETITIVE BID FOR THE SUPPLY, DELIVERY AND COMMISSIONING OF WIND TURBINES, AND RELATED EQUIPMENT TO THE
PARC EOLIEN TAIBA NDIAYE SA - SENEGAL
Parc Eolien Taiba Ndiaye SA, (hereinafter referred to as the “Project) hereby invites sealed bids from eligible and “qualified” bidders (as defined below) for the supply, delivery, installation, commissioning and construction management of fifty (50) wind turbines together with a contract to provide on-site long-term operations and maintenance. Project Background The Project is located approximately 75 kilometers northeast of Dakar in the commune of Taiba NDiaye, Senegal. The Project has been sited and permitted for fifty (50) wind turbines. The Project will interconnect to the grid at the existing Tobene substation which is approximately 1.5 kilometers from the site. Electricity will be sold under a long-term power purchase agreement to the local utility, Senelec. Description of the procurement package: 1) A contract for the supply, delivery, commissioning of fifty (50) wind turbines and related equipment (i.e. tubular towers, blades, control systems and transformers) associated with the Taiba NDiaye Wind Park together with the construction management of the project in accordance with an Engineering, Procurement, Construction and Construction Management Contract (the “EPCM”); 2) A contract for the long term Operations and Maintenance of the project. All Proposals shall be submitted in the English Language. Tender Evaluation Criteria Proposals will be evaluated from both a technical and financial perspective. Each proposal will be examined by means of a numerical scoring system. Details on the numerical scoring system can be found in the bidding documentation.
Divers - Appel d’offres
Definition of Qualified Bidders All firms which: 1) Are manufacturers of wind turbines and have an annual turnover of at least
€500,000,000 (five hundred million euros) and a capital base of at least €50,000,000 (fifty million euros); 2) Have a track record in executing contracts of this type. “Track record” shall be defined as having executed at least one contract to supply, transport and install wind turbines in an emerging market; 3) Have ready access and/or ownership of the necessary construction equipment required to execute a contract of this type; 4) Have qualified personnel on staff to execute projects of this type are pre-qualified and are invited to participate in the tender. Request for Bidding Documents All interested and “qualified” bidders should contact the project company for further information and bidding documents concerning the Project at the following address with a copy to the Project’s Financial Advisor: Project Company : Financial Advisor : Parc Eolien Taiba NDiaye S.A. Chapin International LLC c/o Sarreole Sarl 30, boulevard James Wyllie 1, rue de Vignes Batiment E 57870 Troisfontaines 06160 Antibes FRANCE FRANCE Attn: Bruno Vigneron Attn : Eric McCartney Principal Executive Director e-mail: bruno.vigneron0737@orange.fr e-mail: eric.mccartney@chapininternational.com Submission of Bids and Timing An original signed copy of bids together with a CD of all bid documents in the format of an Adobe Acrobat File (pdf) must be submitted in a sealed envelope to the project company by registered mail or hand delivery at the following address on or before Thursday, October 13, 2011 at 5 o’clock pm European Central Time at the above noted address of the Project Company.
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JEUNE AFRIQUE
Annonces classées RÉPUBLIQUE DU NIGER CABINET DU PREMIER MINISTRE AUTORITÉ DE RÉGULATION MULTISECTORIELLE
AVIS D’APPEL D’OFFRES
AFRICAN UNION
UNION AFRICAINE UNIÃO AFRICANA
REQUEST FOR PROPOSALS
L’Autorité de Régulation Multisectorielle (ARM) lance le présent appel d’offres pour le recrutement d’un cabinet chargé d’effectuer concomitamment : • un contrôle de la qualité de service des réseaux mobiles de norme GSM (900/1800Mhz) et • une formation d’appropriation d’une plateforme de mesure de type TEMS investigation version 12.1
PRODUCTION OF PRESS KITS ON THE ACHIEVEMENTS
L’appel d’offres s’adresse aux cabinets dont la compétence est internationalement reconnue dans le cadre du contrôle de la QoS, disposant dune expertise en matière de contrôle de la qualité de services des réseaux mobiles des opérateurs du secteur des télécommunications et ayant une parfaite maîtrise des plateformes type TEMS.
For detailed bid document please refer to
Les consultants intéressés peuvent retirer la demande de propositions auprès du secrétariat de l’Autorité de Régulation Multisectorielle, 64 Rue des bâtisseurs, BP 13 179 Niamey. Téléphone : 00227 20 73 90 08/11 ; Fax : 00 227 20 73 85 91. Les candidats répondant aux critères de soumission et d’éligibilité précisés dans les termes de référence devront déposer leurs offres au secrétariat de l’ARM au plus tard le 30 septembre 2011 à 10 heures. L’ouverture des plis se fera le même jour à 10 heures 30 minutes dans la salle de réunion de l’ARM en présence des représentants des soumissionnaires qui souhaitent y prendre part.
UNITED NATIONS United Nations Organization stabilization Mission in the Democratic Republic of the Congo
OF THE AFRICAN UNION COMMISSION
Procurement No: 40/CID/11
http://www.au.int/en/bids
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Les soumissionnaires restent engagés par leurs offres pour un délai de 90 jours, à compter de la date de remise des offres. Par décision motivée, l’ARM se réserve le droit de ne donner aucune suite au présent appel d’offres.
NATIONS UNIES Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République Démocratique du Congo
MONUSCO
REF. PROC/EOI/2011/031/MPS DEMANDE DE MANIFESTATION D’INTERET
Manifestation d’intérêt pour la provision de l’équipement satellitaire pour la connectivité d’Intelsat
1. La Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République Démocratique du Congo (MONUSCO) sollicite des manifestations d’intérêt de la part des compagnies ayant une licence pour la provision de l’équipement satellitaire pour la connectivité d’Intelsat. 2. C’est pour cette raison que la MONUSCO mettra en place un appel d’offres compétitif bientôt et a aussi l’intention d’émettre une invitation à soumissionner (Invitation to Bid -ITB) pour ces sociétés qui voudraient soumissionner leur intérêt et fournir des informations pertinentes initiales pour démontrer leur capacité à satisfaire les exigences demandées par la MONUSCO. En outre, on demandera aux Sociétés intéressées de remplir le formulaire d’enregistrement des fournisseurs (seulement pour les nouveaux fournisseurs). Un Cahier des Charges détaillé sera fourni aux sociétés sélectionnées sur réception des documents ITB. 3. Les Sociétés intéressées à être présélectionnées pour recevoir le dossier d’appel d’offres de la MONUSCO, sont invitées à soumettre par écrit une manifestation d’intérêt indiquant leur capacité, expérience, et à y joindre le profile de la société, les copies de leur agrément, registre de commerce, ainsi que leurs références relatives à des contrats similaires entrepris durant les douze derniers mois (les cas échéant). 4. Veuillez s’il vous plait noter que cette demande n’est pas un appel d’offres. 5. MONUSCO garde le droit de sélectionner ceux qui devront prendre part à l’appel d’offres compétitif sur la base d’évaluations considérables et avérées sur le sujet des activités. La seule soumission de la demande de manifestation d’intérêt ne garantir pas automatiquement la bonne réception des documents de l’Invitation au Mise (ITB). 6. Les manifestations d’intérêt peuvent être soumises par courrier, télécopie ou sous plis fermés portant l’inscription “Manifestation d’intérêt pour la provision de l’équipement satellitaire pour la connectivité d’Intelsat en République démocratique du Congo (réf. no. KCM12-100013)” et délivrées à l’adresse suivante et reçue au plus tard le 02 septembre 2011, à 17.00 heures de Kinshasa (GMT +1). 7. LaMONUSCOsegardeledroitderejeterlesdemandesdemanifestationd’intérêtreçuesaprèsladatelimite. Chief Procurement Officer - MONSUCO Headquarters - 12 avenue des aviateurs Gombe, Kinshasa, RDC - Fax : + 1 212 963 0205 or + 39 0831 44 669 E-mail : MONUSCO-procurement@un.org/shingenge@un.org JEUNE AFRIQUE
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Annonces classées RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO MINISTÈRE DE LA SANTÉ
Unité de Coordination du Projet d’Appui à la Réhabilitation du Secteur de la Santé UCP / PARSS
AVIS À MANIFESTATION D’INTÉRÊT Projet d’Appui à la Réhabilitation du Secteur de la Santé (PARSS) Recrutement d’un Consultant d’Agence Externe d’Evaluation (AEE)
Source de financement : Projet d’Appui à la Réhabilitation du Secteur de la Santé N° Avis à manifestation d’intérêt : AMI n°001/UCP-PARSS/2011
1. Contexte général Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC) a obtenu un don de l’Association Internationale de Développement (IDA) pour financer le Projet d’Appui à la Réhabilitation du Secteur de la Santé (PARSS), et se propose d’utiliser une partie de ce don pour effectuer des paiements autorisés au titre du contrat avec un Consultant (firme, cabinet ou bureau d’études) chargé de la mission d’Agence Externe d’Evaluation du Projet PARSS. 2. Objectifs de la mission du consultant L’objectif de la mission est de conduire des activités intégrées, à travers les études, les enquêtes et la mise en place d’un système de suivi-évaluation dans le cadre de la lutte contre le Paludisme, de la lutte contre la Poliomyélite et de l’appui aux services de zones de santé ciblées par le projet. 3. Etendue des prestations Le consultant devra se baser sur les indicateurs et méthodes proposés dans le Tableau repris dans les termes de référence, en concertation avec l’Unité de Coordination du Projet PARSS (UCP-PARSS), le Ministère de la Santé et les Agences d’Exécution Partenaires du projet, en fonction de l’expérience acquise lors de la collecte des données au cours de l’établissement de l’état des lieux initial.
Manifestation d’intérêt
4. Profil du Consultant Le Consultant sera une firme/cabinet/bureau d’études ou une institution spécialisée qui doit : - avoir des compétences avérées en organisation des enquêtes et au soutien au système de suivi et évaluation ; - avoir réalisé au moins trois (3) enquêtes similaires ; - disposer en qualité d’un personnel clé hautement qualifié composé (i) d’un chef de projet, expert en suivi et évaluation ; (ii) d’un spécialiste en organisation d’enquêtes et traitement statistiques des données. Le Chef de projet devra être de formation universitaire (bac + 5 au moins), spécialiste en santé publique ou science sociale ayant au moins 10 ans d’expérience en suivi et évaluation des sec-
Date de publication (UNDB) : le 12 août 2011 Date de clôture : le 29 août 2011
teurs sociaux dans un pays similaire en voie de développement. Le Spécialiste en organisation d’enquêtes et traitement statistique sera de formation universitaire (Bac + 5 au moins), spécialiste en organisation d’enquêtes ayant au moins 8 ans d’expérience dans un poste similaire dans un pays en voie de développement. Cette composition est donnée à titre indicatif, le consultant aura la latitude de proposer d’autres experts ou personnel nécessaire. L’équipe du consultant aura à travailler en partenariat avec des institutions nationales (Ecole de santé ou Universités), mais reste seul responsable des prestations. 5. Durée et Déroulement de la mission La mission est prévue pour une durée de vingt (20) mois, allant d’octobre 2011 à juin 2013. Le consultant sélectionné maintiendra une présence à Kinshasa et dans les provinces concernées par le projet. Les consultants intéressés peuvent obtenir des informations supplémentaires relatives aux termes de référence de la mission en contactant l’UCP-PARSS aux emails : parss@hotmail.fr, parss@ic.cd ou à l’adresse ci-dessous, de 9 h00 à 15h00, heures locales (GMT+1) du lundi au vendredi. Les manifestations d’intérêt, rédigées en langue française, doivent être adressées au Coordonnateur de l’UCP-PARSS, sous enveloppe fermée ou par voie électronique, en mentionnant le nom du projet, le service de consultant requis, et le numéro du présent avis, à l’adresse ci-dessous, au plus tard le 29 août 2011 à 15 h00 (heure locale, GMT+1) précises. Unité de Coordination du Projet PARSS A l’Attention de Dr Jacques WANGATA, Coordonnateur Concession de l’INRB, Croisement des Avenues des Huileries et Tombalbaye Kinshasa / Gombe - Téléphone : 0990016069 - Email : parss@hotmail.fr ou parss@ic.cd Dr Jacques WANGATA Coordonnateur
Partenaire de Création de Valeur Crédit IDA N° 4424-BJ
SOLLICITATION DE MANIFESTATION D’INTÉRÊT POUR LE RECRUTEMENT DE CONSULTANTS INDIVIDUELS, CABINETS OU BUREAUX D’ÉTUDES Le Gouvernement du Benin a obtenu le 12 juin 2008 de l’Association International de Développement (IDA) un crédit - 4424-BJ – dans le cadre de la mise en œuvre d’un programme d’amélioration de l’environnement des affaires à travers le Projet de Compétitivité et de Croissance Intégrée (ProCCI). La Coordination Nationale du ProCCI envisage d'utiliser une partie du montant de ce crédit pour effectuer les paiements au titre des missions ci-après : 1. Conception technique, suivi et contrôle de la mise en œuvre du Système Proactif d’Information Commerciale (SPIC) ; 2. Elaboration d’un cadre d’intermédiation financière adapté aux PME/PMI ; 3. Mise en place d’une base de données informatisée et proactive pour les Services Non Financiers (SNF) aux Entreprises ; 4. Elaboration du plan d’affaires de l’Agence pour la Promotion des Investissements et des Exportations (APIEX) ; 5. Conception de la stratégie intégrée de promotion des échanges commerciaux par le biais de programmes adaptés de promotion des investissements de L’APIEX. 6. Mise en place des ateliers de renforcement de capacité des spécialistes en développement d’affaires (dits SNF ou BDS) Les avis à manifestations d’intérêt et les Termes de Référence relatifs aux différentes missions sont disponibles sur le site internet du projet www.proccibenin.org. Ils sont également mis à disposition : au siège du Projet au lot G11, quartier « les Cocotiers » route de l’aéroport, Cotonou, République du Bénin, Tél. : (229) 21 30 12 39 tous les jours ouvrables de 8 h 30 mn à 12 h 30 mn et de 15 h 30 mn à 18 h 30 mn (heure locale) ; ou sur requête par e-mail à envoyé à procci@proccibenin.org Dieudonné B. DAHOUN, Coordonnateur National du ProCCI N° 2640-2641 • DU 14 AU 27 août 2011
JEUNE AFRIQUE
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EXCITING CAREER OPPORTUNITY IN REGIONAL INTEGRATION IN BURUNDI TradeMark East Africa (TMEA) is an initiative funded by a range of development agencies to promote regional trade and economic integration in East Africa by working closely with East Africa Community (EAC) institutions, national governments, business and civil society organisations. TMEA seeks to support East African integration by unlocking the economic potential through: • increasing efficiency of transport corridors and trade facilitation; • improving efficiency and effectiveness of EAC institutions; • strengthening national capacities for policymaking and implementation; • increasing participation of private sector and civil society; • improving monitoring and evaluation systems; • focusing on cross cutting issues. In order to ensure that TMEA delivers on these strategic objectives, we now seek to recruit a high calibre, results oriented and self driven professional to assist in implementing our programme in Burundi in the position detailed below. Programme Manager (Ref: TMEA/Burundi/PM/02) Reporting to the Country Director, the Programme Manager will support the Country Director in managing the country programme. This will include developing and maintaining work plans and budgets; rolling out programmes and developing appropriate project planning and implementation mechanisms and systems for all projects; preparing analytical reports on developments by Ministries, Departments and Agencies (MDAs), Private Sector and Civil Society Organisations in response to regional integration; supporting key stakeholders in critically examining capacity needs and developing proposals in line with TMEA’s strategic objectives; liaising with the Regional Trade and Integration Director to analyse national strategies for regional integration, developments at the East African Community (EAC), Common Market for Eastern and Southern Africa (COMESA) and Southern African Development Community (SADC) and their implications and advising accordingly; liaising with the Knowledge and Results Director to monitor and evaluate TMEA activities; and supporting media and
communications activities to ensure visibility of TMEA at the national level. The ideal candidate will possess a first degree in Business Administration, Economics, Development Studies, International Trade, Planning, Finance or related field and a minimum of 5 years management experience in regional integration, trade facilitation, development or advocacy. A relevant masters degree and qualifications in project planning and management will be an added advantage. The Programme Manager should preferably be a national of one of the 5 East African Partner States. Application details Bi-lingual language skills (English and French) are essential for this position. This is a demanding environment and requires a candidate who has strong organisational and interpersonal skills with the ability to multi-task, prioritise and work under pressure amidst competing demands. The position is available on an initial 3-year contract with an attractive salary and benefit package, and is based in Bujumbura with occasional travel around East Africa. Applications in English including a detailed curriculum vitae detailing your qualifications, experience, present position, current remuneration, names and addresses of three referees, a working e-mail address, daytime telephone contacts and clearly indicating the reference number on the subject line should be sent electronically in PDF file format to: recruitment@trademarkea.com by Friday, 26 August 2011 by 5.00pm East African time. Interviews will be conducted in English and will be held in the TMEA Office in Bujumbura. Applications received after the deadline time and date will not be accepted. We reserve the right to accept or reject any application. Only short-listed candidates will be contacted. Candidates who applied before need not re-apply.
AVIS DE RECRUTEMENT
Il est chargé de l’administration et de la gestion du système informatique de la société. A ce titre, il est garant du fonctionnement régulier du système informatique ainsi que de l'application stricte des procédures informatiques et technologiques, des règles de sécurité, de sauvegarde des données et de protection des équipements. Principales tâches - Organiser et superviser l’ensemble des activités informatiques de la société - Assurer le fonctionnement régulier des logiciels et des équipements - Organiser et superviser la maintenance et la gestion du parc informatique - Organiser et superviser la maintenance des systèmes de télécommunication - Assurer la formation et l’appui aux utilisateurs - Coordonner les relations avec les prestataires de services informatiques - Assurer la mise en place des systèmes de sécurité - Organiser et gérer le système de sauvegarde des données - Administrer les bases de données - Gérer l’évolution des différents logiciels et systèmes de télécommunication - Coordonner et suivre les projets informatiques - Définir et mettre en œuvre le plan stratégique informatique - Rédiger et mettre à jour les procédures informatiques et technologiques. - Administrer le site web Profil : - Titulaire d’un diplôme d’ingénieur en informatique avec option : administration des systèmes et réseaux informatiques, développement d’applications, gestion et implémentation de bases de données - Expérience de 3 à 5 ans en réalisation ou en suivi de projets informatiques - Expérience minimum de 2 ans en administration et gestion de système informatique - Connaissance approfondie des bases de données ORACLE, MySQL, MS Access - Connaissance approfondie des systèmes Linux, Windows - Connaissance des outils et plate forme modernes de développement (NET, Java,...) Merci d’indiquer en plus de votre n° de téléphone, votre adresse mail. Merci d’adresser votre dossier complet (CV, photocopie du diplôme, justificatifs expérience) à : Cabinet RESHUFORM Immeuble FIDAF 01 BP 3802 Cotonou BENIN ; Email : reshuform@intnet.bj au plus tard le 31 août 2011 ; Tél. : (229) 21 31 77 56 /21 31 82 30 JEUNE AFRIQUE
NOUS RECHERCHONS Un (1) Ingénieur en Automatisme (avec ou sans expérience professionnelle) Un (1) Ingénieur Electromécanicien (avec ou sans expérience professionnelle) Ces postes évolutifs et nécessitant de bonnes capacités techniques, managériales et relationnelles sont ouverts aux jeunes cadres Congolais de niveau BAC + 5, diplômés des Ecoles d’Ingénieurs désirant mettre leurs compétences au service des Brasseries du Congo (filiale des groupes Heineken et CFAO) offrant de réelles opportunités de carrière. Les candidatures doivent être adressées aux Brasseries du Congo BP 1147 Pointe-Noire, Congo - Brazzaville, Tél.: +242 22 294 02 44/45 ; + 242 06 673 80 80 ; BrascoDRH@Heineken.com N° 2640-2641 • DU 14 AU 27 août 2011
Recrutement
UNE SOCIETE SPECIALISEE DANS LES IMPORTATIONS Recrute un CHEF DIVISION INFORMATIQUE ET TECHNOLOGIE Poste à pourvoir au BÉNIN (Cotonou)
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INSTITUT SUPERIEUR DES SCIENCES DE LA POPULATION « Centre d'Excellence Régional » de l'Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA) en Population et Santé. L’Institut Supérieur des Sciences de la Population (ISSP) de l’Université de Ouagadougou a été créé en 2005 en remplacement de l'Unité d'Enseignement et de Recherche en Démographie (UERD) existant depuis 1991.
- Master en Population et Santé en Afrique
En collaboration avec l’Université de Montréal, au Canada. Objectif : former des hommes et des femmes capables de conceptualiser, planifier, mettre en œuvre et évaluer des politiques, programmes et projets innovateurs pour améliorer les conditions de santé des populations. Près de 80 apprenants d’une douzaine de pays de l'Afrique subsaharienne francophone déjà formés depuis 2005-2006. Recrutement : une vingtaine d’étudiants chaque année Niveau minimum requis : Licence. Durée des études : Deux (2) années académiques.
- Licence Professionnelle en Statistiques Sociales
Depuis 2008-2009, ce programme recrute chaque année une trentaine d’apprenants niveau Bac+2 à former en 12 mois.
RENSEIGNEMENTS
Formation - Recrutement
Institut Supérieur des Sciences de la Population (ISSP) 03 BP 7118 Ouagadougou 03 - BURKINA FASO Tél. : (+226) 50 30 25 58 / 50 30 25 59 - Fax : (+226) 50 30 25 60 E-mail : direction@issp.bf - Site Internet : http://www.issp.bf
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Formation
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Vous & nous
Le courrier des lecteurs Gazelle aux attaches célestes, les perles sont étoiles sur la nuit de ta peau […] Femme nue, femme noire Je chante ta beauté qui passe, forme que je fixe dans l’Éternel Avant que le Destin jaloux ne te réduise en cendres pour nourrir les racines de la vie. » * Cette triste affaire n’a aujourd’hui qu’un seul enjeu : l’honneur de la femme africaine et, partant, celui de tout un continent. En me remémorant Les Animaux malades de la peste, de Jean de La Fontaine, je suis persuadé que ce procès – ou cette farce – ne donnera rien, car : « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. » Nafissatou Diallo, ton nom sonne comme un grêlon sur un balafon africain. « Tu n’es pas jolie, mais tu es pire. » Nafissatou Diallo, mène ton combat jusqu’au bout, car « tu n’es que l’étincelle, demain tu seras le Soleil ». ●
J.A., la Libye et le Tunisien Il y a longtemps que je lis et apprécie la rubrique « Ce que je crois ». Mais, depuis le début de l’année, la haine y a remplacé le talent. Tant et si bien que vous, le Tunisien, confondez – ou semblez confondre – le soulèvement populaire et spontané des Tunisiens – qui, par leur courage et leur volonté, ont chassé le dictateur voleur– et la guerre civile en Libye, fomentée par des gens sans vergogne, dont la seule ambition est d’accaparer les richesses du pays. Le Conseil national de transition libyen est essentiellement constitué de dignitaires et de notables ayant fait leurs classes à l’école de Kaddafi. Ils y ont appris les pires turpitudes. Il n’y a que les Français, les Britanniques et l’Otan pour leur faire confiance et les aider militairement dans leur tentative de hold-up. Vous, le journaliste indépendant et chevronné, ne pouvez ignorer les intrigues et les manœuvres du monde occidental, qui espère la fin d’un régime trop indépendant et bien gênant. C’est aussi une façon d’anéantir le panafricanisme et de saboter le Printemps arabe en favorisant l’élection d’un « Ben Ali bis », tout aussi corrompu. ●
ALBERT NGUENE, Yaoundé, Cameroun
MARC JAUBERT, Tresses, France
Envoyez-nous vos réactions, vos réflexions, vos coups de gueule ou de cœur à redaction@jeuneafrique.com ou au 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris.
Nafissatou, femme noire C’est avec beaucoup de désolation que j’ai lu votre article sur l’affaire DSK (J.A. no 2638). Ainsi : « Nafissatou Diallo n’a rien pour déchaîner d’irrépressibles passions. Grande (1,78 m) et fortement charpentée, elle a un visage grêlé et les cheveux imparfaitement défrisés. » Je pense que Dominique Strauss-Kahn, qui n’est pas aveugle, doit se moquer de vous. La femme Est-il nécessaire de fatale vous rappeler que les critères de beauté en Occident ne sont pas les mêmes que ! J.A. N° 2638, chez nous, en du 31 juillet au Afrique ? 6 août 2011. Nafissatou Diallo est exactement la femme dont parlait Léopold Sédar Senghor dans son poème mythique : Femme noire. * « [...] Et ta beauté me foudroie en plein cœur, comme l’éclair d’un aigle [...] ENQUÊTE À QUOI SERT LE BAC (ET QUE VAUT-IL) ?
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 51e année • N° 2638 • du 31 juillet au 6 août 2011
TERRORISME ALGER FACE AUX KAMIKAZES
jeuneafrique.com
FRANCE-AFRIQUE « LES TEMPS ONT CHANGÉ »
Une interview du ministre de la Coopération, Henri de Raincourt
AFFAIRE DSK
Enquête sur Nafissatou Diallo, l’immigrée guinéenne qui a scellé le sort politique de l’un des hommes les plus puissants de la planète.
ÉDITION GÉNÉRALE
France 3,50 € • Algérie 170 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 € Espagne 4 € • Éthiopie 65 Birr • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1100 MRO • Norvège 41 NK • Pays-Bas 4 €
Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1700 F CFA • ISSN 1950-1285
PEUT-ON FAIRE LA GUERRE PENDANT LE RAMADAN ? UNE AUTRE RÉPONSE EN VOUS APPUYANT SUR LA SOURATE 2, verset 217 du Coran, vous semblez affirmer que seule la guerre défensive est permise pendant le mois de ramadan (J.A. no 2637). Je voudrais rappeler que le ramadan n’est que le 9e mois lunaire du calendrier arabe, qui en comporte douze. Il est interdit de faire la guerre durant les quatre mois suivants : dhu-l-qi’dah (11e mois), dhu-l-hijjah (12e mois), muharram (1er mois) – qui sont des mois consécutifs – et rajab (7e mois). Cette pratique, les peuples anciens, et même ceux de la Bible, la connaissaient. Il y a pendant l’année un « temps où les rois se mettent en campagne » (IIe livre de Samuel, chapitre XI, verset 1, traduction œcuménique de la Bible) et un temps de trêve. Le ramadan, bien qu’il soit un mois béni ou sacré, ne fait pas partie des mois où il est interdit de faire la guerre. Qu’il s’agisse donc de guerre défensive ou de guerre offensive, la sainteté de ce mois ne s’oppose pas à la pratique de la guerre. De quel mois s’agit-il donc dans ce verset ? Il s’agit du 7e mois de l’année lunaire N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
arabe : rajab (cf. C. S. H. Boubakeur, Le Coran, tome I, Paris, Fayard, 1979, p. 133). On a traduit « mois sacré » mais, littéralement, il s’agit de « mois de l’illicéité », c’est-à-dire que, pendant ce mois, il était illicite de faire la guerre. Il s’agit des quatre mois cités plus haut. Le ramadan n’est pas un mois de trêve. On peut donc faire la guerre. Néanmoins, l’article soulève la question du « sacré » et de « la guerre ». Si le verset cité fait de la guerre durant le mois sacré « un grand péché », ou « un péché grave », ce n’est pas à cause de la sainteté de ce mois. Ce verset 217 fait référence au fait qu’un petit groupe de musulmans a mené une attaque contre une caravane de Qurayshites en l’an II de l’Hégire, pendant le mois de rajab. Ils avaient donc ainsi violé la loi de la trêve. Le Coran désapprouve cette violation en en faisant « un grand péché », mais explique et justifie la valeur suprême religieuse de leur acte. C’est un péché grave du point de vue légal, mais il en va autrement sur le plan spirituel. ● SERGE MOUSSA TRAORÉ, Nouakchott, Mauritanie JEUNE AFRIQUE
BBY, restez vous-même Je vous lis depuis vingt ans, et vos propos ne m’ont jamais semblé aussi confus que lorsque vous parlez de Mouammar Kaddafi. Indéniablement, c’est un dictateur qui doit partir. Mais votre analyse laisse transparaître un parti pris. Car en parler en occultant les bombardements qui font des morts dans une zone dite d’exclusion aérienne me semble très grave. Je vous prie de rester Béchir Ben Yahmed, l’homme des analyses comparatives objectives et logiques, pour le bonheur des lecteurs de Jeune Afrique et pour l’instruction et l’éducation des jeunes Africains. ● AMADOU CISSÉ , Paris, France
Avis aux lecteurs Deux individus, Abdul Rosand et Dandine Puruence, qui se présentent comme « responsables de la rédaction de Jeune Afrique en Afrique centrale » [sic], ont contacté certaines personnes auxquelles ils ont promis desarticlesdansnotrehebdomadaire moyennant d’importantes sommes d’argent. Jeune Afrique attire l’attention de tous sur le fait que ces deux escrocs n’ont évidemment aucun lien avec notre rédaction.
duraient quelques jours, ou des années, mais leurs membres pouvaient être secrétaires d’État, ministres, président L’interview de Raincourt à J.A. du Conseil, et même président de Blaise Pascal disait: « Vérité en la République, alternativement ou deçà des Pyrénées, erreur successivement, pendant cinquante au-delà. » Plein de sagesse et de bon ans, comme ce fut le cas pour François sens, il voulait dire que la perception de Mitterrand! certaines vérités dépend de multiples Alors, avons-nous vraiment des facteurs: géographique, culturel, leçons à donner, nous Européens, sur le sociologique, historique, etc. renouvellement du personnel politique Henri de Raincourt, le ministre qui, à droite comme à gauche, est quasi français de la Coopération, a bien inchangé depuis quarante ans? raison… « Les temps ont changé »! Le Avons-nous des leçons à donner à roi des Belges n’est plus propriétaire un chef d’État, Blaise Compaoré en personnel du Congo, le poste de l’occurrence, qui a instauré dans son ministre des Colonies a été aboli, les pays, ravagé par des décennies de coups indigènes (comme on disait) sont d’État, une réelle démocratie, qui a devenus des citoyens libres, même de stabilisé la région ouest-africaine, qui déterminer leur devenir a pacifié la Côte d’Ivoire, politique! qui a rétabli la démocratie Henri de Raincourt À cette époque-là, dans en Guinée, entre autres « Les temps ont changé » notre vieille Europe, des choses, et qui s’est encore monarchies régnaient, et récemment « engagé à règnent encore en toute respecter la Constitution » I impunité malgré leurs comme il l’a toujours fait! erreurs politiques ou Faut-il le rappeler? humaines passées. La France a commencé, je Des idéologues, tout dis bien a commencé, à aussi communistes que s’affranchir de siècles de libéraux, massacraient servitudes il y a près de ! J.A. N 2638, des millions d’êtres deux cent cinquante ans… du 31 juillet au 6 août humains, dans des camps L’Afrique tente 2011. ou chimiquement, avec courageusement de le soutien de certains intellectuels s’affranchir de siècles de servitudes occidentaux toujours en cour seulement depuis cinquante ans! aujourd’hui… Des ministres assistaient Alors, Monsieur le ministre, même si je au sacre de l’empereur Bokassa, que de suis persuadé que nous partageons les Gaulle considérait déjà, en son temps, mêmes valeurs, avons-nous des leçons comme « un cinglé » à donner? ● JEAN R. GUION, (cf. Jacques Foccart). Académie française des sciences d’outre-mer, En ce temps-là, les gouvernements Paris, France Afrique subsaharienne
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La France n’a pas de leçons à donner, le ministre de la Coopération en est convaincu. Sauf que, si les États africains sont libres, ils ne font plus ce qu’ils veulent… À n’en pas douter, les révolutions arabes sont passées par là. Interview.
PHILIPPE PERDRIX ANNE KAPPÈS-GRANGÉ
l le reconnaît volontiers. Sénateur de 1986 à 2009 et président du conseil général dans le département de l’Yonne de 1992 à 2008, Henri de Raincourt n’a pas un « passé africain avéré ». Alors pourquoi lui? « Je m’exprime bien, je suis loyal, je ne fais pas de gaffes et je me comporte convenablement », répond-il avec gourmandise, en allusion peut-être aux embardées de quelques-uns de ses prédécesseurs. Propriétaire terrien et exploitant agricole, lointain descendant du Marquis de Sade, il est un coutumier des arcanes de la Ve République. « Avant d’entrer au gouvernement, sa voix comptait déjà, et ce n’est pas un hasard s’il a été aux Relations avec le Parlement avant la Coopération », explique un ancien collègue parlementaire. Sous un air bonhomme et toujours avec une bonne dose d’humour, Raincourt a le sens de la manœuvre. Depuis novembre 2010, ce « notable de province » passe bien, semble-t-il, auprès des « barons du continent ». Avec lui, il n’est plus question de déclarer urbi et orbi la « mort de la Françafrique » – Jean-Marie Bockel s’y est grillé les ailes en 2008. Mais d’oser envisager avec délicatesse que les mandats à rallonge, « c’est terminé ». Avant de conclure, « c’est aussi valable pour moi ». Alors après la Coopération, la retraite ?
VINCENT FOURNIER/J.A.
Propos recueillis par et
! NOMMÉ EN NOVEMBRE, il admet ne pas avoir de « passé africain avéré ». JEUNE AFRIQUE : La résidence privée du président guinéen, Alpha Condé, a été attaquée le 19 juillet. Est-ce le signe d’une fragilité de ce nouveau pouvoir ?
HENRI DE RAINCOURT : Nous condamnons fermement cette attaque. Alpha Condé a été démocratiquement élu et doit être respecté. Des militaires ont été arrêtés… On peut imaginer que la
JEUNE AFRIQUE
La « méthode Condé » n’est-elle pas en cause ? Certains parlent de pouvoir solitaire…
Ce sont en effet des commentaires que l’on entend. Si certains considèrent que les méthodes du président guinéen sont un peu vives, et si tel est le cas, c’est à lui N o 2638 • DU 31 JUILLET AU 6 AOÛT 2011
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JEUNE AFRIQUE
nécessaire réorganisation de l’armée suscite des mécontentements.
DIAGNOSTIC
Jean-Philippe Chippaux Directeur de recherches, Institut pour le développement, Cotonou (Bénin)
Serpents et scorpions
C
HAQUE ANNÉE, l’Afrique enregistre quelque 1,5 million de morsures de serpents et 500 000 piqûres de scorpions, avec respectivement 25 000 et 600 décès. Deux espèces de serpents sont particulièrement dangereuses : les élapidés (cobra et mamba), dont le venin provoque une paralysie respiratoire mortelle en quelques heures, et les vipéridés, dont le venin engendre des œdèmes, des nécroses musculaires et des hémorragies qui peuvent être fatals en quelques jours. Le venin de scorpion entraîne des troubles cardio-pulmonaires parfois mortels, en particulier chez l’enfant. La prise en charge doit être précoce. La sérothérapie a été très contestée en raison de son efficacité douteuse, de ses effets secondaires et de son coût prohibitif (plusieurs mois de revenus paysans). Le seul traitement efficace actuel est l’injection intraveineuse d’antivenins, qui neutralisent la substance toxique. Ils sont très bien tolérés, leurs substances actives étant purifiées. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) vient de publier des recommandations pour en standardiser la fabrication et en contrôler la qualité. Certains antivenins sont polyvalents et couvrent efficacement toutes les espèces dangereuses d’une région. Mais leur prix très élevé les rend inaccessibles, aussi une forte participation des gouvernements et des organisations internationales est-elle indispensable pour assurer un traitement correct des envenimations en Afrique. ● N o 2640-2641 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
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AMELIE DEBRAY / IRD
Vous nous
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL POLITIQUE, ÉCONOMIE, CULTURE
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Post-scriptum Fawzia Zouari
Édité par SIFIJA Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS Tél. : 01 44 30 19 60 ; Télécopieurs : rédaction 01 45 20 09 69 ; ventes : 01 45 20 09 67 ; Courriel : redaction@jeuneafrique.com DIRECTION
L’homme est l’avenir de la femme
L
ES COPINES, je ne sais pas si vous éprouvez la même chose que moi, mais j’ai comme une inquiétude sur notre sort, à nous les femmes. Je ne cherche pas à gâcher vos vacances, ni à vous embêter chaque semaine avec mes angoisses féministes. Mais je me fais un devoir de tirer la sonnette d’alarme, à la lumière d’une actualité qui nous menace d’un retour en arrière d’autant plus insidieux qu’il s’exprime au nom de l’égalité en Occident et sous couvert de révolutions en Orient. Pour illustrer mon propos, voici deux exemples : 1 - L’affaire Strauss-Kahn a libéré la parole masculine et nous a valu une avalanche d’idées arrêtées sur le sexe dit faible : Nafissatou Diallo et Tristane Banon ont beau être de présumées victimes, elles ont été traitées de menteuses, de vénales, de salopes, de manipulatrices ou d’anorexique – pour Banon –, autant de travers supposés féminins. Qu’importe le viol présumé, les deux plaignantes ont encaissé insultes et quolibets, comme si l’égalité devait interdire aux femmes d’invoquer leur intégrité physique, comme si l’obtention d’un dédommagement équivalent pouvait acheter leur silence après la souffrance psychique. 2 - Les révoltes arabes, qui se sont faites avec les femmes, risquent d’accoucher… d’hommes. À preuve, la révolution tunisienne, qui n’est pas loin d’instaurer une République des mecs ! Que de barbes et de moustaches dans la rue, sur les plages, les affiches électorales ou les tribunes ! Les Tunisiennes sont en train d’être « dégagées » en douceur des instances du pouvoir, le gouvernement provisoire ne comporte que deux ministres en jupe, et les « hautes autorités » qui ont essaimé depuis le 14 janvier sont exclusivement chapeautées par des messieurs. Le scénario risque d’être le même au Maghreb comme au Machrek. Et personne ne dit rien. Pas de voix qui s’élève en Occident pour tancer : « Vous, les Arabes, on soutient vos luttes pour la démocratie, mais n’oubliez pas l’émancipation de vos femmes, seul label d’authenticité d’une vraie révolution. » Au lieu de quoi l’Europe applaudit les revendications de la rue arabe sans s’étonner qu’elles ne mentionnent pas le droit des femmes, refuse d’entendre que l’argument « révolutionnaire » risque de réinstaller les épouses derrière les murs, appelle de ses vœux l’avènement de la citoyenneté en terre d’Islam pendant qu’on s’apprête probablement à enterrer de nouveau les descendantes de Mohammed. Après tout, qu’est-ce que l’Occident a à y perdre ? Kaddafi peut s’allier avec les rebelles islamistes, les Frères musulmans d’Égypte prendre le pouvoir, les salafistes tunisiens piétiner le code du statut personnel, si cela peut faire l’affaire des Américains et consorts, en quoi le sort des Fatma gênerait-il la marche du monde ? Alors, réveillez-vous les filles, l’heure est au sursaut, dénoncez les procès et les révoltes qui avancent sur le corps et l’être des femmes. Sinon, le risque est grand de voir s’inverser la célèbre formule du poète pour clamer que l’homme est notre seul avenir ! ● N o 2640-41 • DU 14 AU 27 AOÛT 2011
Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (51e année)
JEUNE AFRIQUE
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AVIS D’APPEL A MANIFESTATION D’INTERET N° S19/2011 - 1106
Pour le recrutement d’un Maître d’œuvre pour un projet de Réseau Haut Débit 1. Contexte général L’Etat de Côte d’Ivoire dans sa politique de reconstruction post crise, envisage de construire un Réseau National de Transmission Haut Débit à base de Fibre Optique. Ce Réseau National Haut Débit, d’une longueur de 5022 km, reliera toutes les préfectures du pays. Le Coût du projet est évalué à 67 milliards de francs CFA. Le Ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication, avec l’intervention du Fonds National des Télécommunications, envisage la mise en œuvre de la phase 1 de ce projet. Cette Phase 1 du projet consiste en la construction d’une Infrastructure de Transmission à Haut Débit de fibre optique, partant d’Abidjan à Bondoukou, d’une longueur de 549 Km. Cette phase 1, dénommée « Backbone de l’Est », comportera des points de coupure ou de terminaison tous les 35 km sur le parcours de la fibre. Ces points de coupure constitueront une plateforme de services bâtis sur une superficie de 1000 m2, abritant les éléments suivants : • des shelters pour le départ et la terminaison des fibres ; • des pylônes servant de point haut pour la desserte des zones rurales ; • des équipements d’énergies ; • des abris… Le présent appel à manifestation d’intérêt vise à arrêter une liste restreinte de cabinets d’études et d’entreprises spécialisés qui seront autorisés à soumissionner ultérieurement sur la base d’un appel d’offres retreint, dans le strict respect des dispositions du « décret n° 2009-259 du 06 Août 2009, portant Code des Marchés Publics de la République de Côte d’Ivoire ». 2. Objectif de la mission Le cabinet d’études ou l’entreprise assurera des prestations de maîtrise d’œuvre dont les missions principales, dans le cadre de ce projet, sont les suivantes : • L’assistance au FNT pour la définition des caractéristiques de l’Infrastructure Nationale de Transmission à Haut Débit en Fibre Optique à construire. Cette assistance consistera à : - Identifier les sites pour les points de coupures et le site principal d’Abidjan du Réseau ; - Définir le parcours théorique de la fibre optique ; - Elaborer les spécifications techniques de la fibre optique (tranchée, type de fourreaux, capacité optique, etc.) ; - Elaborer les spécifications techniques des points de coupure (Pylônes, abris, énergie, environnement, etc.) ; - Identifier les prestations complémentaires et définir leurs conditions de fourniture ; • Assistance au FNT pour la sélection d’un opérateur en charge de la construction, de la gestion et de l’exploitation du réseau de Haut Débit en Fibre Optique - Identifier les différents intervenants au projet et assister le FNT pour leur sélection ; - Identifier le type et la durée de la délégation de service public pour la gestion du réseau ; - Identifier le profil de l’entreprise chargée de l’établissement et de l’exploitation du Réseau National Haut Débit ; - Elaborer un Cahier des charges définissant les conditions et modalités d’exploitation ; - Préparer les Dossiers d’Appel d’Offres pour la sélection de l’entreprise chargée de l’établissement et de l’exploitation du Réseau National Haut Débit et assister le FNT pour le lancement et le suivi de cet Appel d’Offres ; - Assister le FNT dans le dépouillement et l’analyse des offres et le choix de l’ex-
ploitant ; - Assister le FNT dans la négociation d’un Accord de délégation de service public et dans la rédaction des conventions et cahier des charges ; • Le suivi, le contrôle et la réception des travaux de construction des infrastructures. Le suivi des travaux consistera à : - Assurer le suivi de l'exécution (planning, ordonnancement et pilotage) et le contrôle des travaux. - Evaluer périodiquement les chantiers et faire le suivi financier de l'opération (situation, décompte des paiements et réception). - Procéder à toutes les réceptions provisoires et définitives. - Elaborer le rapport d’achèvement des travaux. 3. Profil du Consultant L’exécution des prestations nécessite les compétences d’une équipe de spécialistes dans les domaines suivants : • Télécommunications (transmission, fibres optiques, pylônes) ; • Technologies de l’Information et de la Communication ; • Droit des télécommunications. • Gestion financière et exécution de projet Les soumissionnaires peuvent s’associer pour renforcer leurs capacités techniques et leurs aptitudes à exercer les prestations attendues. Les soumissionnaires intéressés devront joindre à leurs dossiers les pièces ci-après : - une déclaration de manifestation d’intérêt du soumissionnaire faisant apparaître ses noms, prénoms, qualités, domicile, nationalité et les pouvoirs délégués aux signataires ; - pour les groupements, produire un projet de contrat de groupement ; - les informations indiquant leurs capacités techniques à exécuter les services décrits ci-dessus notamment : brochures et références concernant l’exécution des contrats analogues, expériences antérieures pertinentes dans les conditions semblables, disponibilité des ressources humaines qualifiées dans les domaines de la mission (CV du personnel clé) et moyens logistiques et matériels. Pour ce faire, ils devront indiquer, pour chaque contrat similaire exécuté dans les mêmes conditions au cours des cinq (5) dernières années : • la désignation de la mission et le lieu de l’exécution ; • le nom et l’adresse du client ; • la durée de la mission (date de démarrage et date de fin) ; • la valeur financière du contrat en FCFA TTC ; • les noms des éventuels consultants associés ou partenaires. 4. Conditions de participation Sont admis à concourir, toutes les entreprises et tous les cabinets d’études qui ne sont pas concernés par les mesures d’exclusion prévues par le Code des Marchés Publics en République de Côte d’Ivoire. Les manifestations d’intérêt ne doivent comprendre aucune proposition financière. Les manifestations d’intérêt rédigées en français doivent être déposées, au plus tard le 15 septembre 2011 à 11H00, heure locale, à l’adresse mentionnée cidessous : Président du Comité de Gestion du Fonds National des Télécommunications Abidjan-Plateau, Rue Thomasset, Cours RASCOM, Immeuble Ex-Intelci, 2ème étage Tél : (225) 20.25.77.00 / 01 « dans une enveloppe cachetée portant la mention : « Manifestation d’Intérêt pour le recrutement d’un maître d’œuvre pour le Projet de Réseau National Haut-Débit, phase 1 ».
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