Ja 2735 du 9 au 15 juin 2013

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Hebdomadaire international indépendant • 53e année • no 2735 • du 9 au 15 juin 2013

jeuneafrique.com

cpi l’ÉPine

GbaGbo dossier télécoms Spécial 14 pages

présidentielle 2013 qui pour sauver le mali ?

le président Teodoro obiang nguema Mbasogo

GUinée éQUAtoriAle

Grosse déprime Croissance négative, gouvernance à bout de souffle, production pétrolière en baisse, climat des affaires délétère… Pour le petit « émirat » du golfe de Guinée, les prévisions n’ont jamais été aussi inquiétantes. enquête exclusive. édition afrique centrale France 3,50 € • Algérie 180 DA • Allemagne 4,50 € • Autriche 4,50 € • Belgique 3,50 € • Canada 5,95 $ CAN • Danemark 35 DKK • DOM 4 € Espagne 4 € • Éthiopie 65 birrs • Finlande 4,50 € • Grèce 4,50 € • Italie 4 € • Maroc 23 DH • Mauritanie 1 100 MRO • Norvège 45 NK • Pays-Bas 4 € Portugal cont. 4 € • RD Congo 5,50 $ US • Royaume-Uni 3,50 £ • Suisse 5,90 FS • Tunisie 3,30 DT • USA 6,50 $ US • Zone CFA 1 700 F CFA • ISSN 1950-1285


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Ce que je crois BÉCHIR BEN YAHMED • bby@jeuneafrique.com

SAMEDI 8 JUIN

« Dix ans, c’est assez… »

S

ELON MOI, juin et juillet devaient être les mois de l’Iran et du Mali. Le premier s’apprête à élire son président, deuxième personnage de l’État, qui succédera à Mahmoud Ahmadinejad ; le second se prépare au scrutin qui doit désigner le président auquel il reviendra de sortir la République malienne de la période trouble, agitée et transitoire dans laquelle l’a fait entrer le coup d’État de mars 2012. Ces deux mois devaient être également ceux de la Syrie : convoquée par un tandem américano-russe reconstitué, une conférence internationale pourrait se réunir à Genève pour tenter de sortir ce malheureux pays des affres de la guerre civile. Ils devaient être enfin des mois d’intense activité pour l’Égypte et la Tunisie. Débarrassées de leurs dictateurs, à la recherche d’un nouveau système de gouvernement, ces deux nations n’ont pas encore trouvé le mode de fonctionnement politique apaisé auquel aspire la majorité de leurs citoyens. Cinq pays en devenir et dont il nous faut suivre l’évolution, semaine après semaine… ■

Mais c’est un sixième, la Turquie, qui vient de faire irruption sur la scène médiatique, à l’étonnement des augures qui le pensaient à l’abri du tumulte, prémuni contre toute agitation politique. Prospère, gouvernée depuis plus de dix ans par un parti conservateur, l’AKP, qui a remporté successivement des élections contradictoires et transparentes, elle est le théâtre, depuis plusieurs jours, de manifestations hostiles au pouvoir en place qui mobilisent une partie de sa jeunesse et secouent les centres de ses grandes villes. Pris de court, déconcertés par cette révolte inattendue, ses dirigeants alternent la carotte et le bâton ; ils donnent, à ce jour, l’impression de ne pas savoir comment faire face à une situation qui rappelle celle de mai 1968 en France, dont le général de Gaulle luimême avait alors dit qu’elle était « insaisissable ». Au premier jour de la contestation, le 31 mai, certains observateurs superficiels ont expliqué qu’on était en train d’assister à une extension du Printemps arabe JEUNE AFRIQUE

à la Turquie. Il s’agit, en fait, d’un juin 2013 turc qu’il convient de comparer plutôt au Mai 68 français. ■

Comme son célèbre précédent, il est né d’un motif anodin, dont personne ne pensait qu’il pouvait déclencher un incendie qui se propagerait d’Istanbul à Ankara et à d’autres grandes cités turques : l’annonce par le gouvernement, avec début d’exécution, de sa décision, jugée arbitraire et choquante, de détruire un espace vert au centre d’Istanbul, à la célèbre place Taksim, pour y ériger un centre commercial. Elle a provoqué un mouvement de protestation d’une ampleur imprévue, dévoyé à son début par quelques anarchistes et casseurs, et (trop) brutalement réprimé par la police. L’opinion turque et internationale a été choquée par la répression, ainsi que par les expressions de mépris du Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, qui a parlé de « pillards et d’anarchistes irresponsables ». Elle a pris fait et cause pour les manifestants, a exigé et obtenu la libération des centaines de personnes interpellées, des excuses que le président de la République lui-même et le vice-Premier ministre ont faites. Mais pas Erdogan ! Les grands journaux internationaux et beaucoup d’intellectuels turcs de renom ont fait chorus. Dont l’écrivain Nedim Gürsel, qui a parlé « d’un mouvement qui s’explique par la dérive autoritaire d’un pouvoir qui veut imposer le mode de vie islamiste… D’un grand tournant, le début du déclin d’Erdogan, dont l’omniprésence et l’omniscience sont devenues insupportables »… « J’espère que le ministre de l’Intérieur va démissionner, a-t-il conclu. Cette révolte, c’est une voix qui monte d’en bas. » Nedim Gürsel résume les griefs accumulés contre le pouvoir de l’AKP et contre les rugosités de Recep Tayyip Erdogan, qui concentre sur sa personne les haines que suscite le régime instauré par le parti islamique. ■

Les succès de ce régime sont pourtant comparables à ceux de la Chine post-Deng Xiaoping : le revenu par tête d’habitant a plus que doublé en dix ans, l’inflation a N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013


Ce que je crois été mieux que contenue, la stabilité politique et sociale, En 1968, le gaullisme était à la fin de la première le crédit international du pays sont à leur zénith (voir décennie de ce qu’on appellera ses trente glorieuses, graphique). personnifiées par Georges Pompidou, Premier ministre Quelle est alors la signification du mouvement de et successeur de Charles de Gaulle, grand vainqueur protestation qui vient de l’ébranler ? Le régime est-il de Mai 68. menacé ? Le rejet de la personnalité de Recep Tayyip Si les Français ont alors dit à de Gaulle « dix ans c’est Erdogan est-il réel, profond, irréversible ? assez », c’est que le général allait sur ses 80 ans : ses Mes réponses à ces questions concitoyens l’ont congédié mais, diffèrent de celles de la plupart des parallèlement, ils ont plébiscité PIB par habitant 2012 observateurs et même de celle de son parti ; ils ont ensuite adoubé (en milliers de dollars) notre spécialiste, Joséphine Dedet. son Premier ministre de mai 1968, Turquie Je vais jusqu’à pronostiquer, pour Georges Pompidou. ma part, que l’AKP, ainsi que Recep ■ Brésil Tayyip Erdogan lui-même, sortiront Dans la Turquie d’aujourd’hui, Indonésie de l’épreuve renforcés. personne ne peut sérieusement disputer le pouvoir à l’AKP. Mais il est absolument nécessaire Philippines Il est donc probable qu’à l’issue qu’ils corrigent les graves erreurs Inde de la secousse de juin 2013 l’AKP nées de l’exercice continu et sans et sans doute Erdogan lui-même, partage du pouvoir pendant plus 0 5 10 15 même s’il est provisoirement de dix ans. affaibli, aborderont, à la tête de Ils ont des kilos en trop et retroula Turquie, une nouvelle décennie de pouvoir. Il leur veront la santé lorsqu’ils les auront éliminés. faudra l’exercer avec moins d’arrogance. ■ Tout aussi probable me paraît la consolidation À mes yeux, la Turquie de juin 2013 ressemble énormément à la France de mai 1968. La crise qu’elle au sein de l’AKP de la position du président de la traverse aujourd’hui est, à l’instar de son précédent République, Abdullah Gül : il est, en effet, la face français, une crise de croissance qui frappe un régime démocratique de la médaille AKP dont Erdogan est fort au terme d’une décennie où il a accumulé les le revers autoritaire (lire pp. 53-55 les informations et l’analyse de Joséphine Dedet). ● succès politiques et économiques. SOURCES : THOMSON REUTERS DATASTREAM IMF

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Humour, saillies et sagesse Pour vous faire sourire, grincer des dents – ou réfléchir –, ici, chaque semaine, une sélection subjective, la mienne, de ce qui a été dit ou écrit au cours des siècles par des hommes et des femmes qui avaient des choses intéressantes ou drôles à nous dire. B.B.Y. Ì Si tu veux voir clair, écoute ceux qui ne t’aiment pas. Elisabeth Kübler-Ross Ì Nous trouvons de très mauvais goût que des individus se vantent de leurs réalisations, mais lorsqu’il s’agit de pays, nous parlons de « fierté nationale ». Nassim Nicholas Taleb Ì Moyen : le pire de ce qui est bon ; le meilleur de ce qui est mauvais. Un euphémisme pour médiocre. Hervé Bazin Ì Comme d’autres le cannabis, on cultive chez nous le vague à l’âme, petite drogue douce et délétère. François Mitterrand N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

Ì La notoriété, c’est lorsqu’on remarque votre présence. La célébrité, c’est lorsqu’on remarque votre absence. Georges Wolinski

Ì On met la femme au singulier quand on a du bien à en dire, et on en parle au pluriel sitôt qu’elle vous a fait quelque méchanceté. Sacha Guitry

Ì L’aboiement des chiens n’inquiète pas les nuages. Proverbe algérien

Ì Un sens interdit, en somme, ce n’est qu’un sens autorisé, mais pris à l’envers. Pierre Dac

Ì Écris tout ce qui te passe par la fenêtre ! Lise Deharme Ì Il vaut mieux être cocu qu’aveugle. Au moins, on voit les confrères. Guillaume Apollinaire Ì Un chirurgien peut plus gagner sa vie rien qu’avec l’appendicite. Brèves de comptoir

Ì Seul le rythme provoque le courtcircuit poétique et transforme le cuivre en or, la parole en verbe. Léopold Sédar Senghor Ì La retraite, qu’est-ce que c’est, sinon la permission officielle de rouiller ? Janine Boissard JEUNE AFRIQUE



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Éditorial François Soudan

PhoToS de CouverTureS : ÉDITION AFRIQUE CENTRALE : AFP PHOTO/ÉRIC FEFERBERG ÉDITION MAGHREB & MOYEN-ORIENT : AP PHOTO/NARCIsO CONTRERAs

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Ligne rouge

«

CPi gbagbo ou Le bÉnÉFiCe du douTe

O

n ne franchit pas le rubicon pourypêcher à la ligne », déclarait andré Malraux. en syrie, c’est pourtant le cas. car si la fameuse « ligne rouge » que représente aux yeux des américains et des européens l’usage d’armes chimiques contre la rébellion semble bien avoir été violée par le régime de Damas, personne n’a encore osé dire ce qui se passera le jour d’après. pour la bonne raison que rien ne devrait bouger, si ce n’est cette même ligne rouge, désormais déplacée au niveau de « l’utilisation massive et systématique » desdites armes. n’en doutons pas : assad le petit a encore quelques beaux jours à s’arc-bouter en son palais glacé. ne s’apprête-t-il pas à faire son grand retour diplomatique à la conférence de « Genève ii », prévue pour juillet ?

Deux ans, trois mois et 100 000 morts après le début de la guerre civile, la vitrification de la syrie est en bonne voie et tous les ingrédients d’un conflit durable sont réunis. les insurgés tiennent le nord et le régime tient le sud. chaque camp contrôle environ la moitié de la population des zones habitées. numériquement, les forces armées s’équivalent (70000 hommes de part et d’autre), et la ligne de front qui sépare en deux la population et la société semble désormais figée. côté assad, les minorités religieuses et ethniques, la bourgeoisie d’affaires, les classes moyennes et supérieures, y compris sunnites. côté rebelles, la masse des classes populaires et des ruraux. chacun a ses soutiens extérieurs, apparemment inamovibles. le Qatar, l’arabie saoudite, la turquie, la france, la Grande-bretagne, les États-unis sont, à des degrés divers, du côté de l’insurrection. la russie et l’iran n’ont pas l’intention de lâcher le pouvoir baasiste. et israël se tient à équidistance, partagé entre son désir d’affaiblir indirectement l’ennemi iranien et son souhait de voir se maintenir au pouvoir, comme un moindre mal, celui qu’un ancien directeur du Mossad appelle « notre homme à Damas ». Dans ce polar tragique où chaque joueur tient l’autre, la guerre civile syrienne a donc atteint une sorte d’équilibre de la terreur. et c’est là que tout se brouille. la violence du conflit, désormais géré de part et d’autre par les éléments les plus extrémistes, a atteint un degré tel que l’identification des bons et des méchants, des bourreaux et des victimes devient chaque jour plus complexe. certes, côté férocité, le clan assad a régulièrement un coup d’avance : l’artillerie et les scud hier, les gaz et les bombes thermobariques aujourd’hui. Mais le fossé de haine est si profond qu’imaginer une seconde la chute du régime comme une sorte de printemps syrien aux couleurs de l’alternative démocratique relève du conte de fées. la tradition despotique imposera un ordre nouveau, le pouvoir sera toujours sans partage et une dictature en remplacera une autre. La France, qui a longtemps dénigré la solution diplomatique prônée par barack obama, a eu tort. il n’y a pas de solution militaire, sauf à perpétuer le carnage. la conférence de Genève ii, si elle se tient, est bien la dernière chance. (Lire aussi pp. 40-44.) l n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

En décidant de ne pas ouvrir – pour l’instant – le procès de l’ancien président ivoirien faute d’éléments de preuve plus solides à son encontre, la CPI a créé la surprise.

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SomaLie Le Prix à Payer Si le pays paraît aujourd’hui en passe d’être sauvé, après vingt ans de chaos, c’est en grande partie grâce aux soldats africains de l’Amisom.

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Ce que je crois Par Béchir Ben Yahmed Confidentiel

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L a Sem a in e d e j eu n e a F riq u e

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Cour pénale internationale Gbagbo ou le bénéfice du doute Susan rice et Samantha Power Deux fortes femmes robert mugabe Président Mordicus Tunisie Hamed Karoui sort du bois afrique-japon Lost in translation Centres commerciaux La carte bleue va chauffer! Égypte-Éthiopie Tempête sur le Nil Sénégal C’est qui le patron ? Tour du monde

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g ra n d a n g L e

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Présidentielle Qui pour sauver le Mali ?

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a F riq u e Su bSa h a rien n e

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Somalie Le prix à payer

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jeune afrique


Dans Jeune Afrique et nulle part ailleurs grand angLe

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préSidenTieLLe

CuLTure doubLe arC-en-CieL

qui pour sauver le Mali ?

Le 28 juillet, les électeurs devront choisir le futur chef de l’État. Enquête sur une élection cruciale pour l’avenir de ce pays meurtri.

Alors que l’homosexualité est largement taboue sur le continent, zoom sur des artistes sud-africains qui abordent cette question dans leur œuvre.

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gouvernanCe CriSe de ConfianCe à MaLabo

Croissance négative, production pétrolière en baisse, climat des affaires délétère… Pour la Guinée équatoriale, les prévisions n’ont jamais été aussi inquiétantes.

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Turquie quand Le CaLife TrébuChe

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En réprimant de pacifiques manifestants, Recep Tayyip Erdogan a provoqué la première grande vague de contestation populaire depuis 1923.

Syrie Le grand MaLaiSe Maghrébin

Face à la guerre civile, l’opinion, de Tunis à Nouakchott, semble totalement déboussolée.

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Tribune Libérez mon père ! Centrafrique Interview d’Anicet Dologuélé, ancien Premier ministre et candidat à la présidentielle Madagascar L’empêcheur de tourner en rond Kenya Londres regrette

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Maghreb & M oy e n - o r i e n T

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Côte d’ivoire Dans le ventre de Sania Mauritania airways Le rapport qui accuse Tunisair Tunisie Aziz Mebarek investit sans frontières bénin Kassim Traoré met Cotonou sur la carte bancarisation Avec Manko, Société générale cible le secteur informel baromètre

Syrie Le grand malaise maghrébin algérie FLN : y a-t-il un pilote dans l’avion ? israël Loué soit l’Éternel de m’avoir faite femme

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d o SSier

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Télécoms

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europe, aMér i q u e S, aS i e

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C u LT u re & Méd ia S

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Turquie Quand le calife trébuche espagne L’eldorado n’est plus ce qu’il était parcours Hélène Jayet, dans le bain révélateur birmanie Wirathu, moine fatal

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Spécial afrique du Sud Double arc-en-ciel Littérature Danse Photographie

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éCon oMie

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gouvernance Crise de confiance à Malabo Les indiscrets algérie Avenir Décoration innove pour grandir

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v o u S & no u S Le courrier des lecteurs post-scriptum n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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vit désormais aux États-Unis, n’a pas assisté à l’enterrement de sa mère à Oran, le 21 mai.

Francois rihouay/reuters

Pnud AFRIQuE À QuI LE touR ?

p Bert Koenders, patron de la mission onusienne, accueilli à l’aéroport de Bamako par Sekouba Cissé, secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, le 4 juin.

mali La minusma bientôt à pied d’œuvre

L

e futur commandant de la force de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) ne sera pas tchadien comme le demandait Idriss Déby Itno. « Il devrait être originaire d’Afrique de l’Est. Et les numéros deux et trois de la mission devraient être eux aussi africains », confie une source onusienne. Comme Bert Koenders, le nouveau patron de la Minusma (il a pris ses fonctions le 5 juin), ces responsables seront basés à Bamako. En revanche, les Casques bleus (11 200 militaires et 1 440 policiers) le seront, pour l’essentiel, à Tombouctou et à Gao, afin d’assurer la sécurité dans le nord du pays. Ils intégreront les 6 200 hommes de la Mission internationale de soutien au Mali (Misma). Plusieurs pays (Burundi, Chine, Bangladesh, Honduras, Suède, Norvège) ont déjà proposé d’envoyer des troupes. Une force parallèle française (1 000 hommes, en principe) devrait compléter le dispositif. L’ensemble devrait être validé par le Conseil de sécurité le 25 juin. Les premiers Casques bleus devraient débarquer au Mali le 1er juillet pour participer à la sécurisation de l’élection. Mais il faudra quatre mois pour que l’ensemble de la Minusma soit opérationnel. l

ALGÉRIE KhELIL bIEntôt dEvAnt un juGE ?

Les résultats des enquêtes préliminaires menées par le Département du renseignement et de la sécurité (DRS) à propos de la gestion

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de l’entreprise publique Sonatrach par Chakib Khelil sont désormais entre les mains du parquet d’Alger. Selon nos informations, l’ancien ministre de l’Énergie devrait être convoqué

début juillet pour une première audition dans le cadre de l’instruction de diverses affaires de corruption présumée en Algérie, en Italie et au Canada. Signe d’une certaine prudence : Khelil, qui

Grosse bataille en perspective pour la succession de l’Éthiopien Tegegnework Gettu à la tête du bureau Afrique du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud). Plusieurs candidatures sont évoquées en coulisse, dont la plus sérieuse paraît être celle du Sénégalais Abdoulaye Mar Dieye, directeur de cabinet de Helen Clark, l’ancienne Première ministre néo-zélandaise aujourd’hui administratrice du Pnud. Nommé en mars secrétaire général adjoint de l’ONU, Gettu avait remplacé en février 2009 Gilbert Fossoun Houngbo lorsque ce dernier avait été nommé Premier ministre du Togo. ÉCoLoGIE nICoLAs huLot Au CAmERoun

Nommé en 2012 par le président François Hollande envoyé spécial pour la protection de la planète, Nicolas Hulot, le célèbre animateur de télévision, globe-trotteur et écologiste, donnera le 12 juin une conférence à Yaoundé au cours de laquelle il parlera notamment du braconnage des éléphants. L’année dernière, plus de 200 pachydermes ont été massacrés dans le parc national de Bouba Ndjida, dans le nord du Cameroun. ALGÉRIE boutEFLIKA, LA mInIstRE Et L’ÉLysÉE Abdelaziz bouteflika ne semble pas aussi mal en point que certains se plaisent à l’affirmer. Il a même de délicates attentions pour ceux qui s’enquièrent de sa santé. En mai, il a fait parvenir un imposant bouquet de jeune afrique


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Politique, économie, culture & société fleurs, puis, deux semaines plus tard, une corbeille de gâteaux algériens à une ministre française. Des cadeaux accompagnés d’une lettre rédigée et signée de sa main. Mais les responsables français sont très peu nombreux à connaître l’exact état de santé du chef de l’État algérien. François Hollande a chargé l’un de ses collaborateurs, dont l’identité est jalousement gardée mais qui n’est pas Faouzi Lamdaoui (pourtant d’origine algérienne), de lui rendre régulièrement visite. L’intéressé est en contact direct et permanent avec Saïd, le frère du président, qui gère et verrouille tout.

FRANCE-AFRIQUE MILItAIRES EN CoNCLAvE

Du 6 au 13 juin, à Paris, à l’initiative de l’Institut des hautes études de défense nationale et du Quai d’Orsay, une soixantaine de responsables politiques et de militaires africains planchent

Qatar Grand chambardement Fatigué et de santé Fragile, l’émir Hamad al thani, désireux de préserver la stabilité politique du Qatar – une révolution de palais est vite arrivée –, s’apprête à laisser les rênes du pouvoir à tamim (33 ans), l’un de ses fils, et à procéder à une complète redistribution des cartes au sommet de l’état. sorte de talleyrand moyen-oriental, Hamad Ben Jassem devrait perdre son poste de Premier ministre, tandis qu’un nouveau gouvernement serait mis en place. la seule incertitude concerne le timing de l’opération. al thani hésite entre passer directement la main à tamim, couvé par Cheikha Mozah, épouse de l’émir, et le nommer, dans un premier temps, Premier ministre. un vaste mouvement diplomatique à la tête des principales ambassades, dans le monde entier, est également au programme. l

avec leurs homologues français sur toute une série de thèmes : les menaces auxquelles le continent est confronté, le concept de sécurité collective, la réponse aux catastrophes naturelles, etc. Parmi les intervenants: Hervé Ladsous (patron des Casques bleus), le général Bruno Clément-Bollée (directeur de la coopération de sécurité et de défense au Quai d’Orsay), Jean-Baptiste Natama (dircab de la présidente de

la commission de l’UA), El Ghassim Wane (directeur paix et sécurité de l’UA), Fidèle Sarassoro (conseiller d’Alassane Ouattara), Pierre Buyoya (envoyé spécial de l’UA pour le Sahel), Francis Béhanzin (inspecteur général de la police béninoise), le général Lamine Cissé (coordonnateur de la réforme de la sécurité en Guinée) et le général de division béninois Fernand Amoussou (expatron de la force de l’Onuci).

CoMoRES-FRANCE toUjoURS MAyottE

La perspective d’une rencontre entre Ikililou Dhoinine et François Hollande, les présidents comorien et français, se précise. Quelques détails restent à régler, mais Dhoinine devrait être reçu à l’Élysée le 21 juin. Les deux hommes devraient d’abord évoquer la question de Mayotte, la quatrième île de l’archipel, administrée par la France et revendiquée par les Comores. Les deux pays travaillent à la rédaction d’une déclaration commune visant à dépasser le différend, tout en précisant les positions des uns et des autres. Il devrait être également question au cours de l’entretien de la tentative de coup d’État déjouée par les autorités comoriennes en avril, dans laquelle plusieurs Français sont impliqués. Moroni en a récemment transmis la liste à Paris. On y trouve un ancien mercenaire de Bob Denard, un homme d’affaires familier de l’Afrique et la sœur de l’un des mercenaires congolais arrêtés le 20 avril et inculpés d’atteinte à la sûreté de l’État.

PRIX HoUPHoUËt PoUR LA PAIX

Le 5 juin, au siège de L’unesco, à Paris, dans le salon ViP où avaient pris place les huit chefs d’État africains invités à la remise du prix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix, le président tchadien idriss déby itno, seul dans un coin, ruminait sa colère. seul le gabonais ali Bongo ondimba est allé le voir pour tenter de le réconforter. Les flots de louanges adressées à François Hollande, le récipiendaire du prix, n’y étaient évidemment pour rien. non, ce que le président tchadien n’a pas digéré, c’est que tout le monde, à commencer par dioncounda jeune afrique

Traoré, le chef de l’État malien par intérim, se soit abstenu du moindre mot de remerciement à l’adresse des militaires tchadiens, pourtant les plus impliqués dans le conflit. de toutes les armées africaines présentes au Mali, la tchadienne était à la fois la plus nombreuse (environ 2 000 hommes), la première arrivée sur le théâtre des opérations et, surtout, la plus lourdement frappée (38 morts). un oubli, ou plutôt une bourde, qui risque de laisser des traces. l u le président tchadien : personne ne lui a dit merci.

Vincent Fournier/J.a.

Déby Itno ulcéré

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la semaine de Jeune afrique

cour pénale InternatIonale

Gbagbo

ou le bénéfice du doute

En décidant de ne pas ouvrir le procès de l’ancien président ivoirien tant que la procureure Bensouda n’aura pas apporté des éléments de preuve plus solides à son encontre, la CPI a créé la surprise. Y compris parmi ses détracteurs. pascal aIrault

I

ls jubilent. « Ils », ce sont les partisans de Laurent Gbagbo, pour qui la décision de la Cour pénale internationale (CPI) de ne pas ouvrir, pour l’instant, de procès à l’encontre de l’ancien président ivoirien constitue une victoire. « Les juges ont estimé que le bureau du procureur n’apportait aucun élément probant pour établir la véracité de ses allégations et n’avait pas mené de véritables enquêtes », se réjouit Me Emmanuel Altit, son avocat français, qui envisage d’introduire une nouvelle demande de mise en liberté pour son client. Ce succès est pourtant loin d’être acquis : la chambre préliminaire I n’a fait qu’ajourner la procédure en demandant à la procureure de revoir sa copie. De plus, l’une des trois juges a émis une opiniondissidente(voir encadré p 12).Iln’empêche: cette décision a suffi à regonfler le moral des troupes. « La procureure Bensouda est invitée à mieux souder son dossier », plaisante Ahoua Don Mello, l’ancien ministre ivoirien de l’Équipement. Pour Bernard Houdin, conseiller de Gbagbo, « c’est un tournant décisif, la victoire est au bout du chemin ». Sur internet, des pro-Gbagbo exhortent les États africains à se retirer de cette CPI qui « réveille le traumatisme de la déportation des esclaves ». Jamais depuis sa création en 2002 la juridiction internationale n’avait subi une telle avalanche de critiques. Au centre de toutes les attaques, la Gambienne Fatou Bensouda, qui défend le droit des victimes à la justice et se bat contre l’impunité. N O 2735 • du 9 Au 15 juIN 2013

L’affaire Gbagbo est devenue le révélateur d’un malaise plus profond à l’égard d’une Cour accusée de ne poursuivre que des Africains. De fait, même si le bureau du procureur examine la situation de l’Afghanistan, de la Colombie, de la Géorgie et du Honduras, aucune affaire n’a été ouverte dans ces pays. Les huit enquêtes en cours (Ouganda, RD Congo, Centrafrique, Soudan, Kenya, Libye, Côte d’Ivoire, Mali) ne concernent que le continent. Et les cinq détenus de la CPI à la prison de Scheveningen sont tous des Africains*. sIlence. Les mandats d’arrêt émis par la Cour

suscitent la même gêne. L’Union africaine s’oppose à celui émis à l’encontre d’Omar el-Béchir, le dirigeant soudanais, poursuivi pour crimes contre l’humanité. Hormis Joyce Banda et Ian Khama, les présidents du Malawi et du Botswana, aucun chef d’État du continent ne soutient officiellement la CPI dans ce dossier. Ils sont même de plus en plus nombreuxàmanifesterleurincompréhension,voire leur indignation. « Ne se passe-t-il rien au Pakistan, en Tchétchénie? » lançait Jean Ping, l’ex-président de la Commission de l’UA, en juin 2012. On reproche à la Cour son silence à l’égard de Hamed Ben Issa Al Khalifa, le roi de Bahreïn, d’Ali Abdallah Saleh, l’ex-président du Yémen, ou de Bachar al-Assad, le raïs syrien. On voudrait qu’elle se penche sur les crimes commis à Gaza durant l’opération Plomb durci. Pour Paul Kagamé, le président rwandais, la CPI incarne « le colonialisme, la servitudeetl’impérialisme».«Nosdirigeantssonttraqués comme des moutons à l’abattoir », renchérit l l l

MICHAEL KOOREN/pOOL/AFp

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u Au tribunal de La Haye, le 19 février.


L’événement

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la semaine de J.a. l’événement

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de guerre, crimes contre l’humanité). « Nous ne sommes pas contre, rétorque Fatou Bensouda. Notre justice ne se substitue pas aux systèmes en vigueur. Elle en est complémentaire. » La CPI est compétente dans les 122 pays qui la reconnaissent, et partout ailleurs si elle est saisie par l’ONU. Reste à savoir si une cour panafricaine oserait, elle, s’attaquer à des chefs d’État du continent. « Aucun juge africain n’osera », prédit l’avocat de l’un des cinq détenus de Scheveningen. dissuasion. Pour nombre d’organisations des

q La procureure gambienne, avec son équipe.

MICHAEL KOOREN/pOOL/AFp

l l l Jerry Rawlings, l’ancien chef de l’État ghanéen. Pour l’Éthiopien Hailemariam Desalegn, « le processus a dégénéré en une sorte de chasse raciale ». Même les plus modérés, comme le Ghanéen John Dramani Mahama, demandent que l’on réexamine le rôle de la Cour en Afrique à la lumière du cas kényan. Uhuru Kenyatta, élu président en mars dernier, et William Ruto, le vice-président, sont tous deux poursuivis pour leur rôle présumé dans la planification des violences postélectorales de 2007-2008. Le 14 mai dernier, Nairobi a demandé au Conseil de sécurité de l’ONU de faire en sorte que la CPI se dessaisisse du dossier et le lui transfère. L’UA estime elle aussi que la justice kényane est désormais capable de le mener à bien. En Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, dont le pays a récemment ratifié le statut de Rome, n’a toujours pas livré Simone Gbagbo, sous le coup d’un mandat d’arrêt émis par La Haye. À travers le continent, des voix s’élèvent pour demander la création d’une cour pénaleafricaineoul’extensiondumandatdelaCour africaine des droits de l’homme et des peuples pour juger les actes les plus graves (génocides, crimes

vers un aPPel de Bensouda

L

e bureau du procureur devrait faire appel de la décision de la chambre préliminaire I. Deux des trois juges estiment que la majorité des incidents rapportés par Fatou Bensouda reposait sur des témoignages anonymes, des rapports d’ONG, de l’ONU, et des articles de presse. Ils demandent à Mme Bensouda des preuves supplémentaires de l’organisation de la chaîne de commandement des forces pro-Gbagbo, ainsi que des attestations médicolégales pour certains incidents. Son document de charges devra être complété avant le 15 novembre. n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

Pour contester cette décision, la procureure s’appuiera sans doute sur l’opinion dissidente de la juge Gurmendi, présidente de la chambre préliminaire. Pour cette dernière, les éléments de preuve sont suffisants à ce stade de la procédure. Parallèlement, Bensouda poursuit ses enquêtes et se tient prête à répondre à toutes demandes d’éclaircissements dans l’hypothèse où son appel serait rejeté. Pendant ce temps, Laurent Gbagbo continue de recevoir des proches: Guy Labertit, son vieil ami socialiste, le Dr Blé, son médecin personnel, et Stéphane Kipré, son gendre. l P.a.

droits de l’homme, la CPI, certes imparfaite et parfois mal inspirée, n’en a pas moins obtenu des résultats. Ces dix dernières années, elle est intervenue dans la plupart des crises et a joué un rôle essentiel en enquêtant sur les atrocités perpétrées en Ouganda, en Centrafrique, en RD Congo, en Côte d’Ivoire, en Libye ou au Kenya. Au fil du temps, elle s’est imposée comme une arme de dissuasion. Ses avertissements ont permis d’éviter le pire lors des dernières élections en Guinée ou en RD Congo. Les mises en garde que la CPI a adressées aux auteurs de putschs (Mali, Guinée-Bissau) ont contribué à faciliter des transitions démocratiques, au même titre que les pressions internationales. Dans l’affaire Gbagbo,ladécisiond’ajournementdesjugessemble attester de son indépendance à l’égard d’une coalition d’intérêts politiques pilotée par les grandes puissances et dont la procureure serait le bras armé. « Beaucoup ont intérêt à nous déstabiliser maintenant. Cela correspond à un objectif politique au Kenya, relayé par Yoweri Museveni auprès de l’UA », confie un proche de Bensouda, qui rappelle que le chef de l’État ougandais a proposé d’accueillir Gbagbo si celui-ci obtenait une liberté provisoire. « En réalité, la plupart des États coopèrent. Même Paul Kagamé nous accueille à bras ouverts lorsqu’il s’agit de parler des FDLR [groupe armé opposé au président rwandais] ». Si les procès intentés à la CPI sont parfois excessifs, ils soulèvent toutefois des questions légitimes. « Sa suppression n’a pas lieu d’être mais elle doit être plus inclusive et plus professionnelle », ajoute l’avocat d’un détenu. En somme, on demande au procureur d’ouvrir des affaires sur d’autres continents, de mieux ficeler ses dossiers d’accusation, de recruter des experts africains afin d’éviter les faux pas. Sur 54 pays africains, 34 reconnaissent actuellement la Cour. S’ils n’exécutent plus les mandats d’arrêt et n’apportent plus leur entraide judiciaire, la CPI deviendra une coquille vide incapable de faire avancer les enquêtes et de juger les présumés coupables. Pour Fatou Bensouda, il est impératif de corriger le tir. Y parviendra-t-elle dans l’affaire Gbagbo? l * Thomas Lubanga, Germain Katanga et Bosco Ntaganda (RD Congo) ; Jean-Pierre Bemba (Centrafrique) ; Laurent Gbagbo (Côte d’Ivoire). jeune afrique


LES ENTREPRISES S’ENGAGENT À FAIRE BOUGER LES POPULATIONS LANCEMENT DE LA COALITION POUR UN STYLE DE VIE ACTIF EN CÔTE D’IVOIRE « Bouger davantage est l’une des clés pour améliorer sa condition physique ». C’est même un impératif pour rester en bonne santé : l’absence d’exercice physique et la sédentarité constituent le 4e facteur de risque de mortalité, selon l’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS). L’Afrique est tout autant concernée. Sous l’effet de l’urbanisation massive, les incidences négatives de l’inactivité physique pèsent chaque jour un peu plus sur la santé des populations et sur l’économie des nations.

Plus de 60 % des adultes ne font pas suffisamment d’exercice En Côte d’Ivoire, de grandes entreprises ont pris le problème en main. Elles ont décidé de se mobiliser en faveur de l’éducation et de la sensibilisation de la population. Ainsi est née la « Coalition pour un style de vie actif », qui regroupe Orange CI, Citibank, Total, DHL, Ernst & Young, GSL, BeLife et Coca-Cola, initiateur du projet. « En Afrique aussi, CocaCola veut encourager les gens à pratiquer une activité physique bénéfique, explique Prosper Tchouambe, Directeur Général de The Coca-Cola Export Corporation. Mais étant donné que c’est un problème sociétal, nous avons pensé qu’une approche collégiale des entreprises serait plus efficace. » La Coalition est officiellement née le 8 mai dernier, Journée nationale

De gauche à droite : Yann Lepetit (Directeur Général de TOTAL C.I.) ; Dr Niamke (Inspecteur Général au Ministère de la santé et de la lutte contre le Sida), Mme Noëlle Gansah (Directrice de la Communication à Citibank C.I.), M. Wayne Camard (Représentant résident du FMI en C.I.), M. Prosper Tchouambe (Directeur Général de The Coca-Cola Export Corporation) tous réunis lors de la cérémonie de lancement de la COALITION POUR UN STYLE DE VIE ACTIF.

de l’exercice physique. À travers des campagnes de sensibilisation et de sponsoring, les entreprises entendent encourager la pratique d’exercice physique régulier et promouvoir la pratique du sport. Un important calendrier se met en place et une vaste campagne de communication permettra de faire connaître les activités en cours ou prévues. « Cette coalition nous offre la possibilité de donner plus de visibilité à nos activités, de leur donner plus d’ampleur, une plus grande efficacité et un meilleur impact auprès du public ivoirien », se félicite Yann Lepetit, Directeur Général de Total Côte d’Ivoire. « Promouvoir un style de vie active est véritablement d’utilité publique et nous sommes enchanté d’y contribuer, ajoute Kevin Murray, Directeur Général de Citibank Côte d’Ivoire. Avoir plus de monde pour porter le message nous semble utile. » En Côte d’Ivoire comme ailleurs sur le continent, les incidences négatives de l’inactivité physique

Les entreprises se mobilisent pour promouvoir la pratique du sport pèsent chaque jour un peu plus sur la santé des populations et sur l’économie des nations. L’OMS estime que la sédentarité a entraîné 1,9 million de morts et 15 % à 20 % des cardiopathies, des diabètes et de certains cancers depuis les années 2000. Le risque de maladies cardio-vasculaires est multiplié par 1,5 chez les personnes qui ne font pas le minimum d’activité physique préconisé. Dans le monde, plus de 60 % des adultes ne font pas suffisamment d’exercice pour leur santé.


La semaine de j.A. Les gens t Le président américain, Susan Rice (au centre) et Samantha Power, à la Maison Blanche, le 5 juin.

Evan vucci/aP/SiPa

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susan Rice et samantha Power deux fortes femmes La nouvelle conseillère à la sécurité nationale d’Obama et sa remplaçante à l’ONU apportent de l’éclat – et une dose de glamour – à une politique étrangère bien terne depuis le départ de Hillary Clinton.

R

ice is back! Quelques mois après l’affaire de Benghazi, qui lui a coûté le poste de secrétaire d’État – finalement attribué à John Kerry –, elle rebondit. Et au plus près de Barack Obama. Susan Rice, 48 ans, jusque-là ambassadrice des États-Unis à l’ONU, devient conseillère à la sécurité nationale. Elle succède à Tom Donilon, un ultraréaliste, partisan d’une grande prudence sur les dossiers iranien et syrien, sujets sur lesquels l’administration américaine paraît baisser de ton. JohnKerryétantfréquemmentendéplacement, Rice aura sans doute plus souvent l’oreille du président. Dans le spectre idéologique de la diplomatie américaine, elle est ce qu’on appelle une « interventionniste libérale ». Cette école professe que la puissance des États-Unis peut et doit servir à défendre les libertés. La nouvelle

conseillère à la sécurité nationale a ainsi ardemment défendu l’intervention occidentale en Libye au nom de la protection des populations civiles. joueR des coudes. La quasi-totalité des portraits que lui consacre la presse américaine reprend la même expression: « She has sharp elbows. » Entendez : elle n’hésite pas à jouer des coudes et à faire preuve d’agressivité pour obtenir ce qu’elle veut. Membre de l’équipe diplomatique d’Obama depuis le lancement de sa première campagne, en 2007, elle a aussi su faire preuve de patience. Hors course pour le poste de secrétaire d’État durant le premier mandat du président, Rice attendait son heure. Le dernier obstacle semblait levé quand la secrétaire d’État Hillary Clinton a rendu son tablier. Ambassadrice à l’ONU, Susan Rice était toute désignée…

jusqu’au fiasco libyen de Benghazi. En septembre dernier, la mort de l’ambassadeur Christopher Stevens et de trois autres Américainsprenddecourtl’administration Obama. Dans tous les grands médias, Rice répète l’argumentaire préparé par les diplomates et la Maison Blanche : ce sont des manifestations contre un film hostile au prophète Mohammed qui, en dégénérant, ont provoqué l’attaque du consulat américain. L’enquête conclura à un attentat terroriste. Rice est piégée. À l’évidence, elle ne disposait pas des bonnes informations. Les républicains s’en donnent à cœur joie. Furieux, le président défend son amie : « Quand ils s’en prennent à elle, c’est en réalité moi qu’ils visent. » Pourtant, il choisit d’éviter le bras de fer avec l’opposition en lui préférant Kerry. Aujourd’hui promue, Susan Rice tient sa revanche. égéRie. La nomination de Samantha

Power au poste qu’elle occupait à l’ONU devrait être confirmée par le Sénat sans difficulté. Appréciée des républicains, Power, 42 ans, est une star à Washington, une égérie des libéraux depuis qu’elle a remporté le prix Pulitzer, en 2003, pour A Problem from Hell. America and the Age of Genocide. Un livre dans lequel elle fustigeait l’impuissance dont les États-Unis avaient fait preuve durant le XXe siècle pour empêcher des massacres de masse. En 2005, Barack Obama, alors sénateur, l’invite à déjeuner pour lui parler de ce livre. La discussion durera quatre heures. Power rejoint le bureau du sénateur. En 2007, elle intègre son équipe de campagne, mais doit démissionner après avoir, dans le feu de la primaire démocrate, qualifié Hillary Clinton de « monstre ». En 2009, elle avait fait son entrée au gouvernement en tant que conseillère chargée des affaires multilatérales et des droits de l’homme. l Youssef Aït Akdim

NomiNAtioNs

AmAdou Hott SénégAl Le 28 mai, cet expert financier a été nommé président du conseil d’administration de la société de gestion de l’aéroport international Blaise-Diagne de Dakar. Il remplace Aminata Niane. n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

PAul IgnAce mellA mInuAd Ce lieutenant général tanzanien de corps d’armée a été nommé commandant de la force de l’Opération hybride de l’Union africaine et des Nations unies au Darfour. jeune afrique


En haussE

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alIko Dangote

À 89 ans, le chef de l’État zimbabwéen ne voit qu’une seule personne capable de lui succéder : lui-même.

Selon le magazine Forbes, le magnat nigérian est l’homme le plus riche d’Afrique: sa fortune a franchi la barre des 20 milliards de dollars. Il devance le diamantaire sud-africain Nicky Oppenheimer et l’industriel indien Lakshmi Mittal.

WORlD ECOnOmIC FORum

robert Mugabe président Mordicus

i

ramI hamDallah

CORBIS

Ce professeur de linguistique, président de l’université An-Najah, a été nommé Premier ministre par Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, le 2 juin. Il remplace Salam Fayyad, qui a démissionné en avril. lyDIa nsekera

DR

La présidente de la Fédération burundaise de football est la première femme de l’Histoire à entrer au comité exécutif de la Fifa – Fédération internationale de football association –, pour un mandat de quatre ans. hourIa maChhour La ministre yéménite des Droits de l’homme a entamé une grève de la faim le 2 juin afin d’obtenir la libération d’une soixantaine de personnes détenues sans procès depuis le soulèvement populaire de 2011 à Sanaa.

AFP

nEWSCOm/SIPA

l est partout. À Addis-Abeba pour le sommet du cinquantenaire de l’Union africaine (UA) fin mai. À Tokyo, pour la Conférence internationale sur le développement de l’Afrique (Ticad, voir p. 17) début juin… Robert Mugabe, le président zimbabwéen, s’est même dit prêt (dans un documentaire sud-africain diffusé le 2 juin) à se présenter à la prochaine élection présidentielle – à 89 ans. « Mon peuple a toujours besoin de moi, a-t-il déclaré, et quand les gens ont besoin de vous, ce n’est pas le moment – quel que soit votre âge – de tirer votre révérence. » En 2008, Morgan Tsvangirai, son principal rival, l’avait devancé au premier tour, avant de se retirer face aux violences et intimidations subies par son camp. Pour éviter qu’un tel scénario ne se reproduise, Tsvangirai, aujourd’hui Premier ministre d’un gouvernement de compromis bancal, réclame une série de réformes de longue haleine avant la tenue du nouveau scrutin présidentiel p Il est au pouvoir depuis (dont la date n’est trente-trois ans. pas encore fixée) : la révision des listes électorales, l’équité d’accès aux médias d’État et la dépolitisation de l’armée. Or Mugabe veut organiser le vote au plus vite, et la Cour constitutionnelle a opportunément tranché en sa faveur le 31 mai, en ordonnant la tenue de l’élection avant fin juillet.

En baissE

WalID al-kurDI

jeune afrique

L’oncle du roi Abdallah II de Jordanie, ex-directeur d’une société minière, a été condamné par contumace pour corruption et détournement de fonds à trente-sept ans de prison et 304 millions d’euros d’amende. IbrahIm CIssé baCongo & anne DésIrée ouloto

DR

camp Tsvangirai, le président espère ainsi empêcher que les réformes aillent à leur terme pour conserver le contrôle de l’appareil d’État pendant le scrutin. Mais quatre ans de cohabitation ont usé le leader de l’opposition. Ses compromis lui ont fait perdre du crédit, et une étude de l’ONG américaine Freedom House a même affirmé, en 2012, que les sympathisants de Mugabe étaient désormais plus nombreux que ceux de Tsvangirai. Le plus vieux chef d’État du continent veut donc saisir au plus vite sa chance d’être réélu, une dernière fois, à la tête du Zimbabwe. D’autant que, si l’on en croit les confidences – dévoilées par WikiLeaks – de l’un de ses proches à des diplomates américains en 2008, il serait atteint d’un cancer de la prostate qui menace de l’emporter avant la fin de l’année. l piErrE boissElEt

DR

prostatE. Pourquoi tant d’empressement ? D’après le

La Cour suprême ivoirienne a confirmé la défaite du ministre de l’Enseignement supérieur et de la ministre de la Famille aux élections locales du 21 avril. Ils contestaient la victoire de leurs adversaires. n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013


La semaine de J.A. Décryptage

Tunisie hamed Karoui sort du bois L’ex-Premier ministre de Ben Ali veut fédérer destouriens et anciens membres du RCD. Problème : ces derniers risquent d’être exclus de la vie politique.

CONTRE-PIED. Hamed Karoui fait ainsi

un retour remarqué sur scène, en prenant à contre-pied certains anciens dirigeants qui préfèrent se prévaloir du mouvement destourien porté par Habib Bourguiba et occulter la parenthèse Ben Ali. À 85 ans, ce pneumologue bat ouvertement le rappel

HiCHem

D

epuis la révolution, Hamed Karoui faisait profil bas, comme ses anciens camarades du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), au pouvoir pendant vingt-trois ans. On le disait à distance des circuits politiques, se contentant de prodiguer parfois des conseils à un autre natif de Sousse, Hamadi Jebali, ex-chef du gouvernement, dont il est parent et ami. Aussi l’ancien Premier ministre de Ben Ali (1989-1999) a-t-il pris au dépourvu la classe politique en revendiquant sans complexe au micro de Shems FM, le 30 mai, « avoir servi la patrie » à travers un « parti qui a offert au pays son indépendance et qui a construit l’État moderne ». Tout juste a-t-il reconnu quelques manquements, dont « la nonmise en place d’une démocratie ».

 En novembre 2010.

des troupes du RCD au moment où un projet de loi les excluant de la vie politique est soumis à l’Assemblée nationale constituante. Il affirme que ceux contre lesquels rien n’a été retenu « ont le droit de vivre et d’être actifs au grand jour ». Et il entend lancer un mouvement qui « unirait tous les anciens du parti destourien et de son successeur, le RCD ». Son initiative pourrait concurrencer Nida Tounes,la formation fondée par Béji Caïd Essebsi, un ami de soixante ans. Mais en soutenant que « Nida Tounes

rejette les anciens de Ben Ali », il rend paradoxalement service à ce parti parfois accusé d’être noyauté par des RCDistes. S’il est certain que Hamed Karoui multiplie les contacts – avec Abderrahmane Limam, ancien gouverneur de Sousse, ou Abderrahim Zouari, ex-ministre des Transports –, son projet n’est pas encore précis. Néanmoins, l’émoi qu’il a suscité souligne la bipolarisation d’un paysage politique qui ne s’est pas émancipé de l’ancien régime. l

LE DEssIN DE La sEmaINE LEs TaLIbaNs PaKIsTaNaIs ChOIsIssENT uN NOuvEau ChEF NON ! Pas mOI !

the New York times sYNdicatioN

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n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

FRIDa DahmaNI, à Tunis

Tom • Trouw • Pays-Bas PAKISTAN SUIVANT !

À peine Wali Ur-Rehman, leur numéro deux, avait-il été transformé en chaleur et lumière par un drone américain, le 29 mai, que les talibans pakistanais choisissaient son successeur : Khan Saïd, 38 ans. Ces attaques, qui se sont intensifiées sous la présidence Obama, déciment un à un les chefs jihadistes des zones tribales du Nord-Ouest. Elles font aussi des centaines de victimes civiles collatérales. Dès sa prise de fonctions, le 5 juin, Nawaz Sharif, le nouveau Premier ministre, a exigé l’arrêt de ces frappes. Un vœu pieux, sans doute… jeune afrique


ils ont dit

« Au Gabon, l’opposition n’existe pas,

Afrique-Japon lost in translation

donc parfait… à un détail près : la langue. car si, sur quelques rares stands, les organisateurs avaient prévu la présence de Japonais ayant vécu en Afrique, sur les autres, il fallait faire preuve d’inventivité pour communiquer. la majorité des Japonais ne parle pas l’anglais – encore moins le français – et les exposants africains, pas un mot de japonais. Ambiance surréaliste garantie, avec forces mimiques et onomatopées pour les plus courageux, regards d’incompréhension pour d’autres… et grand silence pour la majorité. l HAby niAkAte, envoyée spéciale au Japon

Sur le continent, la classe moyenne explose. D’après le cabinet McKinsey, 130 millions de ménages africains devraient disposer de revenus annuels supérieurs à 5000 dollars (3800 euros) en 2020, contre 85 millions l’an dernier. Mais les épiceries de quartier et les échoppes des marchés risquent de ne pas en profiter. D’ici à quatre ans, 129 nouveaux centres commerciaux devraient voir le jour en plus des 211 déjà en activité (hors Afrique du Sud), selon un rapport publié début juin par la société d’analyse Sagaci research. la surface commerciale de ces temples de la consommation aura alors doublé, pour atteindre 8 millions de mètres carrés en 2017. Dix-sept projets ont été recensés en Égypte, 12 au Maroc, 15 au Ghana ou encore 12 au nigeria. Si l’Afrique du nord accueillera des complexes aux normes internationales comme le Morocco Mall de casablanca (200 000 m2), la bataille dans les pays subsahariens se déroulera dans de petits centres tirés par des locomotives alimentaires, des supermarchés de 2 500 m2. Pour le moment, casino a une longueur d’avance sur carrefour en Afrique francophone. Mais les groupes français devront sans doute compter rapidement avec leurs homologues sud-africains Shoprite et Massmart, bien décidés à sortir de leur pré carré austral. l Julien Clémençot

JANIS OTSIEMI Écrivain gabonais

« Le Maroc n’est pas un paradis des droits de l’homme. Ce n’est pas un enfer non plus. » MUSTAFA RAMID Ministre marocain de la Justice et des Libertés

« Il n’y a pas de White feminism, il y a des droits universels. Pourquoi les droits des femmes au Maghreb seraient-ils différents de ceux des Américaines ou des Européennes ? » INNA CHEVTCHENKO Cofondatrice du mouvement Femen (Ukrainienne, elle est installée à Paris)

« Trop de dictateurs ont perdu leur job. Révolution orange en Ukraine, Printemps arabe… Poutine retarde la chute de Bachar al-Assad pour ne pas donner d’idées aux Russes. » GARRY KASPAROV Ancien champion d’échecs et opposant russe

« Il est plus difficile pour moi de parler français après le match que de le gagner ! » SERENA WILLIAMS Championne américaine de tennis (lors du tournoi de Roland-Garros)

Tang Shi/nEWSCOM/SiPa

mimiques. tout semblait

Centres commerciaux la carte bleue va chauffer!

jeune afrique

il ne s’agit que de déçus qui auraient voulu prendre la relève de Bongo père et qui ne font qu’essayer de négocier leur retour à l’étable. »

nippones étaient également présentes pour montrer comment leurs savoir-faire pouvaient être utiles sur le continent: filtrage d’eau, fabrication de fibres pour cheveux synthétiques ou de machines à coudre high-tech. dr

FAire DÉcouvrir l’Afrique aux Japonais à travers ses cultures et ses terroirs : telle était l’ambition de la Foire africaine 2013, qui s’est déroulée du 30 mai au 2 juin à Yokohama. l’événement était organisé en marge de la 5e conférence de tokyo sur le développement de l’Afrique (ticad v), où le Japon a annoncé, entre autres, une aide de 24,4 milliards d’euros sur cinq ans pour le continent. Pendant quatre jours, les Japonais se sont déplacés en masse pour visiter les stands des 49 pays africains représentés. ils ont pu découvrir le beurre de karité du Mali, le sel de Djibouti, goûter au chocolat chaud ivoirien, au café éthiopien, ou admirer les tisseuses rwandaises. certains ont même croisé des présidents africains comme Alassane ouattara, Paul Kagamé ou Blaise compaoré qui, venus pour la ticad, en ont profité pour serrer quelques mains. Soixante-dix entreprises

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n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013


La semaine de J.A. Décryptage

égypte-éthiopie tempête sur le nil

jeuneafrique.Com

jacques Torregano/fédéphoTo pour j.a.

VIDÉO

L’action des Femen en Tunisie, les Y’a Bon Awards… L’actualité commentée par Aya Cissoko, ex-championne franco-malienne de boxe

?

SONDAGE ALGÉrIE

Ali Benflis est en tête de notre sondage sur la personnalité politique que vous souhaitez voir succéder un jour à Abdelaziz Bouteflika. Continuez de voter sur notre site!

FOCUS

Sabotage, corruption, intimidation : inquiet de la construction d’un barrage par Addis-Abeba, Le Caire a envisagé toutes les options lors d’une réunion de crise… retransmise à la télévision.

C

rise à haute tension entre l’Égypte et l’Éthiopie. En engageant, le 28 mai, la déviation des eaux du Nil pour construire le gigantesque barrage hydroélectrique de la Renaissance, Addis-Abeba a déclenché les foudres du Caire, qui voit dans le projet une menace sur ses approvisionnements en eau. Le 3 juin, une réunion de personnalités politiques égyptiennes convoquée par le président, Mohamed Morsi, a tourné au conseil de guerre, certains suggérant de détruire le barrage quand d’autres imaginaient corrompre des hauts fonctionnaires éthiopiens ou soutenir des groupes séparatistes. Retransmis en direct à la télévision – à l’insu, semble-t-il, de la plupart de ses participants –, le conciliabule a déclenché une cascade de réactions hostiles en Éthiopie,leministredesAffairesétrangères déclarant sur son compte Twitter que son pays ne se laisserait pas intimider. Morsi a dûassurerquel’Égypteneselanceraitdans aucune action agressive contre l’Éthiopie, tandis que l’une de ses conseillères s’excusait de n’avoir pas prévenu les participants à la réunion de sa retransmission. Annoncée en 2011, la construction du barrage de la Renaissance (dont le coût

est évalué à 3,2 milliards d’euros) s’inscrit dans un vaste programme de valorisation des ressources hydrauliques éthiopiennes, d’un montant total de 9 milliards d’euros. D’unecapacitéde6000MW,l’ouvragesera le plus large du continent, et Addis-Abeba souligne qu’il permettra de fournir ses voisins, dont l’Égypte, en électricité bon marché. Situé près de la frontière soudanaise, sur le Nil Bleu – dont les eaux rejoignent à Khartoum celles du Nil Blanc pour former le fleuve qui traverse l’Égypte –, il devrait être inauguré en 2016. Partage. Selon l’Éthiopie, le barrage ne

devrait pas affecter significativement les approvisionnements des deux pays situés en aval, mais les experts estiment que l’Égypte pourrait voir les siens baisser de 20 % durant le remplissage du réservoir, qui débutera en 2014 pour trois à cinq ans. Le partage des eaux du Nil est régi par un traité de 1929, révisé en 1959, selon lequel tout projet devrait recevoir l’aval du Caire. Traité qu’Addis-Abeba et plusieurs autres riverains considèrent désormais comme nul. Car si l’Égypte est un don du Nil, les eaux qui lui parviennent sont à 85 % un cadeau des montagnes éthiopiennes. l Laurent de Saint Périer

Le chantier de la discorde Mer Méditerranée

CHIFFRES CLÉS

LIBYE

Le Caire

Bassin du Nil

ÉGYPTE

Barrage d’Assouan

Nil

La poésie africaine à la conquête du monde. Portrait en images d’un Congolais et d’un Gabonais présents à la Coupe du monde de slam, à Paris

À LIrE AUSSI roller au Sénégal : l’asphalte a de l’avenir n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

Longueur totale du Nil

6 700 km

Nil Blanc SOUDAN SOUD Khartoum

Barrage Renaissance CENTRAF.

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pays sont riverains du fleuve

OUG. RW. RD BUR. CONGO

160 millions de personnes vivent dans le bassin du Nil

SOUDAN SOUD DU SUD

Océan Atlantique

ÉRYTHRÉE Nil Bleu Addis-Abeba ÉTHIOPIE KENYA

Lac Victoria

TANZANIE

Océan Indien

500 km

ZAMB. MOZ.

jeune afrique

source : jeune afrique

18


Plus de développement à l’échelle locale génère des avantages considérables. Chez ExxonMobil, nous nous engageons à favoriser le développement et le progrès économique partout où nous opérons. Au Tchad, par exemple, nous avons réalisé des formations dans plus de 300 petites et moyennes entreprises pour les aider à améliorer leurs performances commerciales et opérationnelles. En Angola, depuis 2008, nous avons conclu des transactions avec des entreprises locales pour un montant total de plus de 2 milliards de dollars. Que nous travaillions avec des fournisseurs locaux ou que nous formions les populations africaines à travailler sur nos installations, ExxonMobil fait plus qu’exploiter du pétrole et du gaz. Nous soutenons le développement et l’avenir de l’Afrique. Pour en savoir plus sur notre travail, rendez-vous sur exxonmobil.com


La semaine de J.A. Décryptage

Sénégal C’est qui le patron? Officiellement, DP World Dakar appartient à Dubaï Ports World, troisième groupe portuaire mondial. Mais, pour les magistrats de la Crei, son véritable propriétaire est Karim Wade. Ils ont donc placé la société sous administration judiciaire. comptes de la société ». En mars, c’est sur la base de ce raisonnement qu’Alioune Ndao, le procureur spécial de la Crei, avait comptabilisé dans le patrimoine de Karim Wade la somme de 596 millions d’euros correspondant, selon lui, au « poids financier disponible » de la société. FÉBRILITÉ. Officiellement, comme en

SEYLLOU/AFP

20

Le fils de l’ancien président, à Dakar, le 15 mars.

Q

ui est le véritable propriétaire de la société DP World Dakar SA, qui a obtenu en 2007 la concession du terminal à conteneurs du Port autonome de Dakar? La question, lancinante, se pose avec plus d’acuité que jamais depuis que la commission d’instruction de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) a placé sous administration judiciaire, le 31 mai, la filiale sénégalaise de Dubai Ports World, le troisième groupe portuaire mondial. Aux termes de cette mesure conservatoire, notifiée le 3 juin à la défense de Karim Wade et dont Jeune Afrique a pu prendre connaissance, un cabinet d’expertise

comptable a été désigné pour « accomplir les actes courants de gestion et d’administration » et assumer « les obligations légales des organes de gestion dessaisis ». Les magistrats sénégalais fondent leur décision sur les résultats de l’enquête préliminaire pour enrichissement illicite visant Karim Wade (placé en détention depuis le 17 avril), dont « il ressort » que le fils de l’ancien président « s’est comporté comme le véritable dirigeant de DP World Dakar, notamment en choisissant le cabinet de notaire qui a procédé à la constitution du capital de la société et en désignant [un] cabinet d’experts-comptables aux fonctions de commissaire aux

témoignent les comptes consolidés du holding ainsi que les actes constitutifs de sa filiale sénégalaise, DP World Dakar SA est pourtant la propriété à 90 % du groupe DP World – via des structures intermédiaires, dont l’une est domiciliée dans une zone offshore. Les avocats de la filiale sénégalaise ont d’ailleurs aussitôt déposé devant la Crei une requête visant à obtenir l’annulation de la mise sous administration judiciaire. Le 6 juin, après que la décision des magistrats a fuité dans la presse, une certaine fébrilité semblait régner aussi bien à Dubaï (où un responsable de DP World apportait un démenti à J.A.) qu’au ministère sénégalais de la Justice, où l’on prétendait ne pas être au courant. Il est vrai que le président Macky Sall, alors en visite à Paris, rencontrait le même jour le sultan Ahmed Bin Sulayem, président du groupe DP World. Selon le communiqué conjoint publié par l’entreprise et par la présidence de la République sénégalaise, Macky Sall « a assuré à M. Bin Sulayem qu’il salue l’investissement de DP World » et lui a « garanti que l’investissement de la société à Dakar est toujours bienvenu et protégé ». Une déclaration qui peut se lire comme un désaveu implicite par le chef de l’État de la thèse de la Crei. ● MEHDI BA, à Dakar

À SUIVRE LA SEMAINE PROCHAINE

17-18 JUIN Créé en 2005, le Women’s Forum, qui se tient chaque année à Deauville (France), se déplace au Brésil (São Paulo) pour la deuxième fois. Prochain pays d’accueil: la Birmanie, en décembre. N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

18-29

JUIN Première édition du Tour cycliste de l’unité, en RD Congo. Au total, 9 étapes sur près de 900 km, dans les provinces de Kinshasa, Bas-Congo et Bandundu.

21-23

JUIN 7e Labo Ethnik Fashion Week, à Paris. Au menu, des défilés et un concours « coup de pouce » pour les jeunes stylistes. Parmi les créateurs confirmés, Aisha Obuobi, Christine Mhando, Korlekie, Jacob Kimmie… JEUNE AFRIQUE



La semaine de J.A. Tour du monde ont été brutalement dispersées et plus de 170 personnes arrêtées. Les habitants réclament la nationalisation de cette mine exploitée depuis 1997 par le groupe canadien Centerra Gold, qu’ils soupçonnent de corruption. Dans le passé, les Kirghizes ont déjà renversé à deux reprises (2005 et 2010) leur chef de l’État. Chaque fois pour de sombres histoires de corruption liées (notamment) à la mine de Kumtor.

FRANCE

NKM et le Buisson ardent

S

on succès est moins net que ne l’annonçaient les sondages mais néanmoins indiscutable. Avec 58,16 % des suffrages, Nathalie Kosciusko-Morizet a, le 3 juin, remporté la primaire organisée par l’UMP à Paris aux dépens d’une brochette de seconds couteaux vindicatifs et vétilleux. C’est donc elle qui affrontera la socialiste Anne Hidalgo lors des municipales de l’an prochain. En raison (notamment) de son abstention lors du vote de la loi sur le mariage homosexuel, NKM a été pendant toute la campagne la cible des coupe-jarrets de la « droite forte », le courant de l’UMP qu’inspire le politologue maurrassien Patrick Buisson, historien de l’OAS, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy et grand responsable de la droitisation de sa campagne présidentielle de 2012. Dans une interview à l’hebdomadaire L’Express du 4 juin, celui-ci juge la candidate de son parti « trop bling-bling et clivante », raison pour laquelle elle n’a, selon lui, « strictement aucune chance de reconquérir Paris ». Avec des amis comme ça, la pauvre NKM a sans doute du souci à se faire. ●

DÉMOGRAPHIE

Les Allemands s’évaporent ILS SE CROYAIENT 82 millions. Erreur, les chiffres du dernier recensement établissent que les Allemands ne sont pas plus de 80,2 millions. Dans un souci de saine économie (le coût de l’opération avoisine 700 millions d’euros), ils ne s’étaient pas comptés depuis les années 1980, avant la réunification. Depuis, sur cette base, les démographes s’efforçaient d’évaluer la population au moyen de projections manifestement irréalistes. Une confirmation, en revanche, les Allemands continuent de vieillir: un sur cinq a désormais plus de 65 ans. LE CHIFFRE

5%

MEIGNEUX/SIPA

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Nathalie Kosciusko-Morizet, candidate UMP à la mairie de Paris en 2014.

COLOMBIE-VENEZUELA

Camouflet

ALORS QU’IL JOUE UN RÔLE de premier plan dans les négociations engagées il y a plusieurs mois à Cuba entre le gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), le Venezuela envisage de se retirer du processus de paix. Le 29 mai, à Bogotá, Juan Manuel Santos, le président colombien, a en effet réservé à Henrique N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

Capriles, le chef de l’opposition vénézuélienne, un accueil chaleureux que Caracas a ressenti comme un camouflet. KIRGHIZISTAN

État d’urgence

APRÈS DES MOIS DE TENSION, les violences se sont soudain aggravées le 31 mai près de la mine d’or de Kumtor, au Kirghizistan. Après la proclamation de l’état d’urgence, plusieurs manifestations

LE TAUX DE CROISSANCE de l’économie indienne en 20122013. C’est le plus faible depuis dix ans – il a, plusieurs années durant, flirté avec les 9 %. Principales causes de ce ralentissement : la baisse de la demande dans les pays occidentaux, l’insuffisance des infrastructures et le maintien de l’inflation à un niveau qui plombe la consommation intérieure. ARTS

Picasso, Matisse, on brade BERCEAU DE L’INDUSTRIE automobile américaine, la ville de Detroit est depuis le mois de mars sous la tutelle de l’État. Un emergency manager a donc été nommé. Sa mission ? Réduire par tous les moyens une dette avoisinant 15 milliards de dollars (11,5 milliards JEUNE AFRIQUE


ARRÊT SUR IMAGE

Gary Cameron • Reuters

ÉTATS-UNIS

Bradley Manning, traître ou héros? AVEC SON VISAGE DE postadolescent idéaliste et acnéique, on a du mal à l’imaginer dans le rôle du traître. Pourtant, l’ex-soldat Bradley Manning, dont le procès en cour martiale s’est ouvert le 3 juin à Fort Meade (Maryland), a bel et bien téléchargé illégalement et communiqué au site WikiLeaks des milliers de rapports classés secret-défense et de dépêches du département d’État. Il affirme avoir voulu « susciter un débat public » sur les guerres en Irak et en Afghanistan. Le gouvernement l’accuse de collusion avec Al-Qaïda. Il risque la réclusion criminelle à perpétuité.

d’euros). Après avoir sauvagement coupé dans les dépenses sociales, celui-ci a eu une idée originale : vendre les très riches collections du Detroit Institute of Arts. Quelque 66 000 pièces parmi lesquelles des œuvres de Picasso, Matisse, Renoir, Van Gogh, Van Eyck et Bruegel – pour ne citer que les plus illustres. La proposition suscite l’indignation des milieux de l’art. Son application pose heureusement de redoutables problèmes juridiques. CHINE

Objectif Lune

LA CHINE LANCERA dans le courant de ce mois de juin un vol spatial habité appelé à rejoindre Tiangong-1, sa station orbitale expérimentale. Il y a exactement un an, elle avait réussi son premier rendez-vous en orbite avec un vol habité. Cette fois, le vaisseau Shenzhou 10 est censé s’arrimer automatiquement JEUNE AFRIQUE

au laboratoire spatial. C’est une étape capitale de la construction d’une station orbitale permanente capable d’accueillir des astronautes pendant des périodes de plusieurs mois. But ultime de l’ambitieux programme chinois : envoyer un homme sur la Lune avant 2020. ROYAUME-UNI

Oh my lords!

LE 2 JUIN, LA PRESSE britannique a révélé que des journalistes déguisés en lobbyistes avaient proposé à trois membres de la Chambre des lords (deux travaillistes, un membre de l’Ulster Unionist Party) une rémunération pour les convaincre de faciliter la réintégration des îles Fidji au sein du Commonwealth – perspective à laquelle les honorables parlementaires ne se sont pas montrés hostiles. Quelque temps auparavant, Patrick Mercer, un élu conservateur à

la Chambre des communes, s’était lui aussi fait piéger. Mais lui a bel et bien touché 4 000 livres (près de 4 700 euros) en échange de plusieurs interventions à la Chambre en faveur des Fidji. CORÉE DU SUD

Menace de pénurie

PARCE QUE LES CERTIFICATS de conformité de milliers de composants ont été falsifiés par des fonctionnaires corrompus, dix des vingt-trois réacteurs nucléaires que compte la Corée du Sud sont à l’arrêt. L’enquête et le remplacement des pièces défectueuses pourraient prendre plus de quatre mois. Or l’été s’annonce particulièrement chaud… Trente-cinq pour cent de la demande nationale d’électricité étant d’origine nucléaire, la pénurie menace. La présidente Park Geun-hye juge la situation « très préoccupante ». N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

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24

Grand angle

PRÉSIDENTIELLE

Qui pour sauver


Grand angle MEHDI BA,

envoyé spécial à Bamako

A

«

u Mali, les partis politiquessontnésdemême père et de même mère. Seuls leurs prénoms diffèrent. » Derrière la boutade de Kassoum Tapo, le député de Mopti, une évidence admise d’un bout à l’autre de l’échiquier politique : les principaux candidats qui brigueront les suffrages du peuple malien le 28 juillet sont tous liés, d’une manière ou d’une autre, à l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (Adema-PASJ). Majoritaire à l’Assemblée nationale, cette formation a conquis ses lettres de noblesse en regroupant, à partir de 1990, les opposants à la dictature militaire de Moussa Traoré. Directement ou indirectement, les trois présidents qui se sont succédé à la tête du pays depuis l’alternance démocratique de 1992 (Alpha Oumar Konaré, Amadou Toumani Touré, dit ATT, et Dioncounda Traoré) sont issus de cette matrice. Curieux spécimen que l’Adema, ce parti qui a lui-même enfanté ses futurs opposants faute de pouvoir satisfaire les ambitions présidentielles de ses cadres. Certains challengeurs (lire pp. 28-29) de son candidat officiel pour l’élection de juillet, le quadragénaire Dramane Dembélé, y ont fait leurs armes. De l’ancien Premier ministre Ibrahim Boubacar Keïta à l’ex-ministre des Affaires étrangères Soumeylou Boubèye Maïga, en passant par le candidat malheureux du second tour de la présidentielle de 2002, Soumaïla Cissé, la plupart des ténors de la vie politique malienne ont un jour ou l’autre appartenu à l’Adema avant de s’en détacher.

Le 28 juillet, les électeurs devront choisir le futur chef de l’État. Enquête sur une élection cruciale pour l’avenir de ce pays meurtri.

le Mali?

EMMANUEL DAOU BAKARY POUR J.A.

VITRINE. À la veille d’une élection sensible et

conformément à ce qu’un proche conseiller d’Ibrahim Boubacar Keïta appelle « l’unanimisme à la malienne », les principaux concurrents s’accordent sur le diagnostic. Depuis vingt ans, derrière la vitrine d’un pays ayant conquis de haute lutte son accession à la démocratie se cache une réalité plus sombre : pillage des deniers publics, corruption généralisée, fortunes jaillies du néant, services publics déliquescents, souveraineté bradée… Un pays où, de l’aveu d’un candidat à la présidentielle, « tout peut s’acheter, comme sur un marché, des diplômes aux recrutements dans l’armée ». Un État démissionnaire, où la gestion du Nord a été soustraitée avec complaisance à des groupes armés dont les revendications identitaires se mêlent aux trafics et aux sympathies jihadistes. « Comme on dit en bambara, ambè no don : c’est de notre faute à tous », résume Farouk Camara, secrétaire général des Forces alternatives pour le renouveau et l’émergence (Fare), le parti de Modibo Sidibé. ● ● ● ð Le palais présidentiel de Koulouba, à Bamako. N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

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emmanuel daou bakary pour j.a.

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Ce Mali-là s’est réveillé avec la gueule de bois le 22 mars 2012, lorsqu’un modeste capitaine a déboulonné la statue du commandeur, éconduisant ATT tel un vulgaire squatteur avant de le chasser du pays. Deux mois plus tôt, une rébellion touarègue fraîchement créée avait conquis sans effort une large portion du territoire national. Même si de nombreux leaders politiques ont officiellement désavoué un putsch qui ramenait le pays quarante années en arrière, le coup de force du capitaine Amadou Haya Sanogo fut secrètement accueilli par bon nombre d’entre eux comme un électrochoc salutaire. Pourtant, la crise n’est toujours pas dépassée, comme le montre la situation de plus en plus tendue qui prévaut à Kidal (lire p. 27), berceau de toutes les rébellions touarègues. Le 7 juin, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et le Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) régnaient toujours sur cette enclave dont ils interdisaient l’entrée à l’administration et à l’armée lll

Dates

64

milliards de F CFA (97,6 millions €)

2e tour (éventuel) :

dont 25 milliards à la charge du gouvernement

11 août

n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

maliennes, compromettant la bonne tenue du scrutin sur l’ensemble du territoire et ravivant les tensions intercommunautaires. De Bamako à Gao, la libération de Kidal est devenue un enjeu national, énième point de consensus entre les différents prétendants. riz gras. Car les clivages entre candidats sont

plus ou moins artificiels. Les mêmes responsables politiques qui jugent sans concessions les dérives d’une gouvernance dévoyée ont, pendant dix à vingt ans, plongé la main dans le même plat de riz gras, occupant les plus hautes fonctions sous les présidences Konaré ou ATT. Face à ce « jeu de rôle », comme l’appelle le candidat Madani Tall – lui-même conseiller économique d’ATT durant son second mandat –, l’électorat semble démobilisé. En dehors d’une poignée de militants, difficile de dénicher dans la capitale un électeur prêt à s’enthousiasmer pour l’un des candidats. « La jeunesse a été déçue par les l l l (Suite p. 28)

Budget élections

1er tour :

28 juillet

p Formation majoritaire à l’Assemblée, l’AdemaPASJ présente un illustre inconnu, Dramane Dembélé.

Nombre de candidats

24

en 2002

8

en 2007

18

en 2013

(7 juin)

jeune afrique


Qui pour sauver le Mali ?

kidal, enjeu symbolique L’armée veut la reconquérir, le gouvernement négocie pour pouvoir y tenir les élections. Mais la grande ville du Nord, peu peuplée, n’aura pas de réel impact sur le vote.

U

ne situation incertaine règne à Kidal, l’une des huit capitales régionales du pays. Malgré la libération du Nord-Mali des jihadistesenjanvier2013parles troupes françaises de l’opérationServal,épauléesparlessoldats tchadiens, Kidal est resté sous le contrôle de la rébellion armée du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Pressée d’obtenir une victoire militaire depuis sa débâcle face aux assauts conjugués des insurgés et des jihadistes, l’armée n’a jamais caché son intention de reconquérir la ville. Le 5 juin, les troupes maliennes ont ainsi repris Anefis, dernier village avant Kidal.

la tenue du scrutin présidentiel dans la ville du Nord. Un enjeu plus symbolique qu’arithmétique. La région de Kidal, où à peine plus de 35000 électeurs ont été recensés (sur un total de 6,9 millions), est en effet la moins peuplée du Mali.

Sachant que plusieurs milliers de personnes l’ont quittée pour se réfugier dans les États limitrophes ou dans le sud du pays, la participation à l’élection des Kidalois demeurés sur place a peu de chances d’influencer le scrutin.Maisderrièrelebrasde fer qui se déroule au Burkina Faso se profile l’un des principaux défis qui attendent le futur président: le statut administratif du Nord-Mali et les revendicationsavancéesparles deux principales organisations touarègues.

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Au cours des dernières semaines,toutlepaysspéculait sur les véritables intentions de Paris sur cette question sensible, soupçonnant l’ancienne puissance coloniale de complaisance envers le MNLA. Mais le 5 juin, le président François Hollande a clarifié la position française : « Les élections se tiendront à la date prévue dans tout le Mali, dans touteslesvillesduMali,etdonc à Kidal. Il n’y aura pas deux armées au Mali. » l M.B.

q Quelque 35 000 électeurs sont recensés dans la région, sur 6,9 millions à l’échelle nationale.

Bras De fer. Cette offen-

PAtrick robert

sive est survenue alors que des négociations se tiennent à Ouagadougou entre le régime intérimaire malien et des représentants du MNLA et duHautConseilpourl’unitéde l’Azawad (HCUA) afin de parvenir à un accord garantissant

DraMe shakespearien à l’aDeMa

A

u sein de l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (Adema-PASJ), parti phare de la galaxie politique malienne, chaque présidentielle s’apparente à un drame shakespearien. En 2002, l’état-major du parti avait intronisé Soumaïla Cissé candidat officiel, alors qu’Ibrahim Boubacar Keïta avait reçu des garanties du président sortant, Alpha Oumar Konaré. Blessé, jeune afrique

l’ancien Premier ministre s’en était allé fonder le Rassemblement pour le Mali (RPM). Et le même sort attendait Cissé : l’AdemaPASJ avait finalement fait élire Amadou Toumani Touré (ATT, candidat indépendant) au détriment de son propre représentant. En 2007, la formation avait soutenu dès le premier tour la réélection d’ATT. Soumeylou Boubèye Maïga, qui s’était présenté en franc-tireur, avait alors été

écarté du parti – puis réintégré. Cette fois, la « commission des bons offices » chargée de choisir le candidat de l’Adema-PASJ parmi 19 prétendants a sorti de son chapeau, en avril, un illustre inconnu, Dramane Dembélé. La désignation de cet ingénieur, qui n’a jamais été ni député ni élu communal et dont le CV se résume à une fonction de directeur national de la

géologie et des mines entre 2005 et 2010, suscite moult conjectures. Ce coup de Jarnac pourrait-il sonner le glas du parti ? « Je ne pense pas, assure Dembélé, fort de son succès. L’Adema a survécu au départ d’Ibrahim Boubacar Keïta et de Soumaïla Cissé. Il survivra à celui de Soumeylou Boubèye Maïga [qui, évincé de cette « primaire », a claqué la porte pour créer sa propre M.B. formation]. » l n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013


Grand angle Mali l l l politiciens, résume le slameur Aziz Siten’k, 27 ans. Mais si on reste à la maison le jour du vote, c’est qu’on accepte le mal. » Faute d’une véritable alternative, les électeurs opteront-ils pour un renouvellement générationnel ? Une brochette de quadras entendent bien détrôner leurs augustes aînés, pariant sur le rejet de l’ancienne classe dirigeante. Ou bien les Maliens s’efforceront-ils de distinguer entre les très proches et les plus ou moins proches d’ATT, devenu la figure expiatoire des errements du passé ? À moins qu’ils ne se prononcent en fonction du degré de soutien – réel ou présumé – des différents candidats aux putschistes du capitaine Sanogo. Une gageure, à en croire un journaliste du Républicain : « Il est tout aussi difficile de trouver un candidat qui ne se soit pas mouillé avec ATT que d’en trouver un qui n’ait pas défilé à Kati [le quartier général des putschistes, à 15 km de la capitale] », glisse ce bon connaisseur du paysage politique malien. « Pour la plupart, ils ont participé au festival des brigands », assène Soumana Sako, réputé intransigeant en matière de corruption et qui entend bien incarner la rupture de gouvernance tant attendue.

seL et sucre. À la veille d’une élection où les candidats déclarés sont légion (18 pour l’heure), il est à craindre qu’une majorité d’électeurs se résoudra, plus prosaïquement, à voter pour un visage familier ou pour un candidat communautaire (régional ou ethnique), voire à monnayer son suffrage. « Depuis longtemps, les élections se jouent en distribuant du sel, du sucre, du thé ou des billets de 1 000 F CFA pendant la campagne », commente un chef de parti. En attendant le 13 juin, date limite de dépôt des candidatures, les tractations vont bon train entre favoris et outsiders. Sur le papier, Dramane Dembélé peut compter sur le parti majoritaire à l’Assemblée. Mais l’amertume ressentie par les principaux ténors de l’Adema-PASJ après sa désignation controversée (lire p. 27) laisse à penser qu’ils ne ménageront aucun effort pour négocier en sous-main avec ses principaux concurrents. Fort de sa stature, de son bon score en 2002 et de sa popularité parmi les « corps habillés » (armée, police, gendarmerie), Ibrahim Boubacar Keïta, le candidat du Rassemblement pour le Mali (RPM), a de bonnes raisons de croire en ses chances. Mais Soumaïla Cissé (Union pour la République et la démocratie, URD) et Modibo Sidibé (Fare), qui se prévalent tous deux d’une longue expérience dans les rouages de l’État, peuvent, s’ils atteignent le second tour, espérer faire la différence en ralliant à leur cause certains battus du premier tour. C’est donc un scrutin émietté qui s’annonce, où l’ambition d’accéder au pouvoir suprême tiendra lieu de programme et où les imperfections de l’organisation,déjàprévisibles(lire p. 31),laissentcraindre une pluie de contestations postélectorales. l n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

Portraits

Les revoilà Ils étaient candidats à l’élection qui devait se tenir en 2012. Le coup d’État a interrompu le processus. Aujourd’hui, ils se relancent dans la course.

emmanuel daou bakary pour j.a.

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Ibrahim Boubacar Keïta

Le francophile assumé En 2002, l’AnnUlATIOn de plus de 541 000 bulletins par la Cour constitutionnelle l’avait écarté du deuxième tour à moins de 4400 voix près. En 2007, il était arrivé deuxième derrière Amadou Toumani Touré, réélu au premier tour. Six ans plus tard, les sondages laissent espérer à son équipe de campagne qu’il sera le prochain président du Mali. Mais ses concurrents entendent bien utiliser contre lui la réputation de « proputschiste » qui lui colle à la peau – et qu’il conteste. Il est en effet l’un des rares ténors politiques à n’avoir pas subi de brimades au lendemain du coup d’État de mars 2012 et apparaît comme le favori des militaires (lire p. 30).

À 68 ans, cette figure respectée a exercé les plus hautes fonctions : depuis la transition de 1992, il a notamment été ambassadeur, Premier ministre (1994-2000), puis président de l’Assemblée nationale (2002-2007). Francophile assumé, au langage châtié, il fut dans sa jeunesse un admirateur du général de Gaulle. Depuis, il s’est lié avec le président français François Hollande et son ministre de l’Intérieur Manuel Valls (à l’époque où il était vice-président de l’Internationale socialiste). Il entretient par ailleurs d’excellentes relations avec les présidents Alpha Condé, Mahamadou Issoufou ou Faure Gnassingbé. l M.B. jeune afrique


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soumaïla cissé

L’économiste

crédibilité en matière économique ainsi qu’un réseau de solides amitiés dans la sous-région (lire p. 30). Réputé compétent, il dispose d’un parti structuré et mobilisé autour de sa candidature (l’union pour la République et la démocratie, deuxième force à l’assemblée nationale). natif des environs de tombouctou, Soumaïla Cissé, 63 ans, espère faire le plein de voix dans le nord, comme en 2002, et parmi les Maliens de l’étranger. Pour lui, le scrutin se jouera donc dans le sud du pays, où l’électorat est plus dense et sa popularité moins affirmée. l M.B.

emmanuel daou bakary Pour j.a.

Battu en 2002, il avait fait les frais, comme Ibrahim Boubacar Keïta, des luttes d’appareil au sein de l’adema – dont il était le héraut officiel –, alpha Oumar Konaré (aOK) ayant sacrifié sa candidature pour faire élire amadou toumani touré. au lendemain du scrutin, Soumaïla Cissé avait créé son propre parti, avant de rejoindre l’union économique et monétaire ouest-africaine (ueMOa), dont il a présidé la commission de 2004 à 2011. ajoutée à son parcours ministériel aux Finances, au Commerce et à l’Équipement pendant les deux mandats d’aOK, cette expérience lui a apporté une

Modibo sidibé

Le superdiplômé

emmanuel daou bakary Pour j.a.

À en CROIRe l’entOuRage de l’un de ses concurrents, le principal atout de Modibo Sidibé est aussi son principal handicap. À 60 ans, cet ancien fonctionnaire de police bardé de diplômes est un serviteur de l’État expérimenté, qui a exercé de hautes fonctions au cours des deux dernières décennies. Directeur de cabinet d’amadou toumani touré (att) durant la transition de 1991, il devient ministre de la Santé (1993-1997) puis des affaires étrangères (1997-2002) d’alpha Oumar Konaré. au lendemain de l’élection d’att, il est nommé secrétaire général de la présidence (2002-2007) puis Premier ministre (2007-2011). Contrairement à ses deux principaux rivaux, il a réalisé son parcours politique à l’écart des partis. les Forces alternatives pour le renouveau et l’émergence (Fare), qui soutiennent sa candidature, n’ont été créées qu’en avril 2013. Mettant en avant le triptyque « intégrité, expérience, compétence », il est, selon un proche, « l’un des rares candidats à ne pas traîner de casseroles ». Reste à savoir s’il parviendra à convaincre les Maliens qu’il incarne la rupture tant attendue, après avoir œuvré pendant vingt ans au cœur du système Konaré-att. l M.B.

ils chercheront à peser sur le second tour

P

armi la petite vingtaine de candidats déclarés, peu peuvent espérer jouer un véritable rôle. Mais l’expertcomptable Moussa Mara, qui, à 38 ans, se présente sous la bannière deYelema (« le changement », en bambara), ne veut pas faire de la figuration, même s’il s’agit de sa première participation. Lors des législatives de 2007, il avait mis en ballottage Ibrahim Boubacar Keïta dans la commune IV de Bamako, avant d’y remporter les

jeune afrique

municipales deux ans plus tard avec une liste indépendante. Une belle victoire, mais un scrutin local n’est pas une élection présidentielle, et Tiébilé Dramé, candidat du Parti pour la renaissance nationale (Parena), ne le sait que trop. En 2007, le gendre d’Alpha Oumar Konaré est arrivé en troisième position derrière AmadouToumaniTouré et Ibrahim Boubacar Keïta, avec 3 % des voix. Son agenda pourrait l’empêcher de faire

mieux cette fois-ci: le 13 mai, il a été nommé conseiller spécial du président de la transition, chargé des pourparlers avec les groupes armés dans le Nord. Des discussions qui se tiennent à Ouagadougou (Burkina Faso), où il passera désormais une grande partie de son temps. Cette situation pourrait donner des ailes à Housseini Amion Guindo, 43 ans. Natif de Bandiagara (région de Mopti), « Poulo » s’est fait un nom à Sikasso, dans la région

qui compte le plus d’électeurs (1178102 avant révision des listes). Il s’y est fait élire député lors des législatives partielles de 2005, puis réélire en 2007. Son parti, la Convergence pour le développement du Mali (Codem), s’est progressivement imposé comme la quatrième force politique du pays. Il reste à Housseini Amion Guindo à transformer l’essai pour sa première présidentielle. l Malika GroGa-Bada n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013


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Grand angle Mali Diplomatie

et les voisins votent pour… Sall, Ouattara, Compaoré… Les chefs d’État de la sous-région adressent des signes subtils à leurs favoris.

S

oumaïla Cissé est sans doute le candidat préféré du président sénégalais, Macky Sall. En avril 2012, après la violente attaque de son domicile par les putschistes de Bamako, le Malien s’était réfugié à Dakar. Surtout, lors de la bataille pour sa succession à la présidence de la Commission de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), Cissé a manœuvré en faveur du candidat du Sénégal. Un choix finalement payant. De Wade à Macky, tous les Sénégalais lui en savent gré. Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), lui, a probablement le soutien d’Alpha Condé. « Ce n’est pas seulement à cause de l’Internationale socialiste. Ils ont des liens quasi familiaux », confie un proche du président guinéen. Autre camarade très lié à IBK : Mahamadou Issoufou. Le président nigérien et l’ex-Premier ministre malien partagent la même fermeté face aux rebelles touaregs. Lors de sa dernière visite à Niamey, IBK a dîné à la résidence du président Issoufou. Qui a la faveur d’Alassane Ouattara ? À première vue, le président ivoirien préfère Cissé à IBK. Le 9 octobre 2010, ce dernier a assisté à Abidjan à l’investiture du candidat Gbagbo. A contrario, en janvier 2011, Cissé a mis tout le poids de la Commission de l’UEMOA dans la politique d’asphyxie financière du régime Gbagbo. Ce sont des choses qui ne s’oublient pas. Mais il y a quelques jours, IBK a marqué un

point en signant un contrat avec Voodoo Communication. En 2010, c’est cette agence, bien implantée en Afrique francophone, qui avait accompagné Ouattara jusqu’à la victoire. Cissé, qui était aussi en négociation avec Voodoo, a accusé le coup. Est-ce le signe qu’Abidjan l’a lâché pour IBK?Leprésidentivoirienvientderecevoir longuement l’ex-Premier ministre malien à Abidjan. Pour le moins, il réfléchit… le cœur et la raiSon. Autre attentiste,

Blaise Compaoré. « Soumaïla Cissé, c’est un bon économiste et quelqu’un d’accommodant », souffle un proche du président burkinabè. De fait, le 7 juillet 2012, quand six chefs d’État de la sous-région ont réuni àOuagadougouleGroupedecontactsurle Mali, Cissé, lui-même sur un lit d’hôpital, a envoyé un délégué. IBK, lui, a boycotté ce sommet. « IBK se fait passer pour le candidat de la sous-région. Mais beaucoup de chefs d’État le soupçonnent d’être l’homme des putschistes de Bamako », ajoute l’observateur de Ouagadougou. Pour Compaoré, le cœur est avec Cissé, mais la raison sera avec le vainqueur. D’autres candidats – déclarés ou non – ont des contacts à l’étranger. L’ex-Premier ministre Modibo Sidibé ne cesse de sillonner la sous-région. Soumeylou Boubèye Maïga, l’expert en sécurité, a de solides appuis à Abidjan, Niamey et même Alger. Et Tiébilé Dramé, le conseiller spécial à la présidence pour les affaires du Nord, possède l’un des meilleurs carnets d’adresses

diScretS ancienS Alpha Oumar Konaré pourrait-il choisir le candidat de l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (AdemaPASJ), Dramane Dembélé, par fidélité au parti? Ou bien son gendre,Tiébilé Dramé, par solidarité familiale? Après deux années de silence, l’homme est indéchiffrable. L’un de ses fils, Birama Konaré, est communiquant.Trois candidats l’ont sollicité pour approcher le père. Peine perdue. Depuis son exil de Dakar, AmadouToumani Touré, lui, préfère Soumaïla Cissé, qui lui rend visite de temps en temps, à Ibrahim Boubacar Keïta, qui ne lui a pas téléphoné depuis mars 2012. Quant à MoussaTraoré, selon le mot d’un Bamakois, « il reste au bord du fleuve en regardant ch.B. passer les cadavres ». l

du continent, jusqu’à Brazzaville. A priori, plus un candidat voyage, plus il récolte de fonds pour sa campagne. « Le problème, c’est que les chefs d’État d’aujourd’hui sont moins généreux que l’étaient Omar Bongo ou Kaddafi, glisse un familier des Palais africains. Voyager ne veut plus dire ramasser le jackpot. Cela dit, ça reste bon pour le moral des militants. » l chriStophe BoiSBouvier

le chouchou deS caSerneS

a

u camp militaire de Kati, fief des soldats qui ont renversé AmadouToumani Touré (ATT) en mars 2012, on se garde bien de s’immiscer dans la campagne. « Le capitaine [Amadou Haya] Sanogo n’a pas envie d’être au cœur d’une nouvelle polémique », explique un homme d’affaires proche du chef des putschistes, investi en février à la tête du Comité militaire de suivi de la

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réforme des forces de défense et de sécurité. Est-il pour autant impossible de savoir à qui va la préférence de l’armée ? Au lendemain du coup d’État, les putschistes ont interpellé nombre de politiciens : l’ex-Premier ministre Modibo Sidibé a été arrêté trois fois ; le candidat de l’Union pour la République et la démocratie (URD), Soumaïla Cissé, a été

violenté ; même Dramane Dembélé, qui n’était pas encore le candidat de l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adema), a été mis aux arrêts. Ce ne fut pas le cas d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). Non seulement le leader du Rassemblement pour le Mali (RPM) a échappé aux pillages et aux intimidations, mais il a aussi été reçu avec tous les honneurs par le capitaine Sanogo.

Au sein de la troupe, on garde en mémoire la loi de programmation militaire que l’ex-président de l’Assemblée nationale avait défendue sans succès. « Il nous a toujours témoigné du respect », expliquait, quelques jours après le coup d’État, un sous-lieutenant de l’armée de l’air. De quoi expliquer les bons scores d’IBK dans les casernes en M.G.-B. 2002 et en 2007. l jeune afrique


emmanuel daou bakary pour j.a.

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OrganisatiOn

Saison des pluies et système D Calendrier serré, fichier électoral à actualiser, populations déplacées : il sera difficile de garantir l’exemplarité du scrutin. Source de futures contestations ?

C

andidat de la Convergence pour le développement du Mali (Codem) à la présidentielle, Housseini Amion Guindo se veut pragmatique : « Je préfère un peu de légitimité à pas de légitimité du tout. » Là réside toute l’ambivalence du scrutin prévu le 28 juillet. Quatorze mois après la désignation d’un président et d’un gouvernement intérimaires, la classe politique malienneetlacommunautéinternationale n’ont qu’une hâte : tourner la page de ce système boiteux, contraint d’expédier les affaires courantes sans pouvoir se projeter dans l’avenir, faute de légitimité démocratique. « L’enveloppe [de 3,2 milliards d’euros] accordée au Mali par les donateurs réunis à Bruxelles le 15 mai ne saurait être gérée par un président issu d’un coup d’État militaire », ajoute le député de Sikasso. ramaDan. Pour autant, le calendrier

fixé au forceps pour sortir de l’impasse institutionnelle ne semble pas de nature à garantir un scrutin immaculé. « Quand un pays se trouve en situation de déconfiture etdeguerre,ildoitsortirdutunnelavantde songer à organiser une élection présidentielle, tempère Assarid Ag Imbarcaouane, jeune afrique

deuxième vice-président de l’Assemblée nationale (et élu de l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice, Adema-PASJ). La priorité est de sécuriser le territoire et de rapatrier les personnes déplacées. » Les obstacles qui se dressent sur la route du retour à la légalité ne manquent pas. La campagne électorale, qui doit s’ouvrir le 7 juillet, se déroulera au plus fort de la saison des pluies, mais aussi en plein ramadan. « On ne pouvait choisir pire période pour tenir l’élection, ça frise l’irresponsabilité », déplore Djiguiba Keïta, secrétaire général du Parti pour

p Au début du mois, les responsables des différentes formations (ici Soumaïla Cissé) se sont réunis à Bamako pour signer un code de bonne conduite.

générale aux élections (DGE), le général Siaka Sangaré se dit confiant : « Sur le plan technique, les deux mois qui nous séparent du premier tour sont suffisants. » Mais au sein de la classe politique, tous ne partagent pas cet optimisme. « Tant que je n’aurai pas pu comparer la nouvelle liste électorale avec l’ancienne, je ne serai pas rassuré », affirme Assarid Ag Imbarcaouane.

nina. Dans un pays qui compte plus de 400 000 déplacés et réfugiés, où le recensement minimaliste des Maliens de l’étranger suscite la perplexité et où la fabrication et la distribution des cartes biométriques « Je préfère un peu de légitimité Nina(pour«numérod’idenà pas de légitimité du tout. » tification national ») se font HouSSeini amion GuinDo, candidat de la Codem à la dernière minute, c’est doncuneélectionforcément la renaissance nationale (Parena), qui imparfaite qui se prépare pour le 28 juillet. entend tout de même « jouer le jeu », « En période de crise, l’essentiel est de par « réalisme ». Au nombre des improsavoir en sortir, résume, pragmatique, visations logistiques qui portent en Soumaïla Cissé, candidat de l’Union pour germe les contestations électorales à la République et la démocratie (URD). En venir, la question du fichier biométrique. Côte d’Ivoire, on s’était contentés d’un Recensant 6,9 millions d’électeurs, celuicollège électoral de 5,7 millions d’électeurs ci doit encore être révisé et purgé de ses sur une population de plus de 20 millions anomalies. Président de la Délégation d’habitants. » l m.B. n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013


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Afrique subsaharienne

soMALie

Le prix à payer Vingt ans que le pays était plongé dans le chaos, et s’il paraît aujourd’hui en passe d’être sauvé, c’est en grande partie grâce aux soldats africains de l’Amisom. Un début de victoire qui a coûté cher. Pas sûr que les troupes engagées au Mali soient prêtes aux mêmes sacrifices. Pierre BoisseLet, avec LAurent touChArd

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C

était il y a bientôt vingt ans. Le 3 octobre 1993, d’épaisses colonnes de fumée noire s’élevaient au-dessus du quartier de Hawlwadaag, dans le centre de Mogadiscio. Deux hélicoptères américains, partis à l’assaut du bastion du chef de guerre Mohamed Farrah Aidid, venaient d’être abattus. En deux jours, 18 soldats américains étaient tués dans la capitale somalienne, jeune afrique


Afrique subsaharienne

STuarT PriCe/afP

Mogadiscio est encore régulièrement frappé par des attentats des Shebab, les islamistes somaliens affiliés à Al-Qaïda, mais ceux-ci ne tiennent plus aucun de ses quartiers. Le 10 septembre 2012, un nouveau président, Hassan Cheikh Mohamoud, a été élu par le Parlement somalien (lire encadré p 34). La situation économique s’améliore (le gouvernement prévoit 10 % de croissance pour 2013), la diaspora commence à venir repeupler les ministères, et le nombre de vols atterrissant quotidiennement à l’aéroport de Mogadiscio est passé de 3 à 12 en à peine plus de un an. Le 25 avril, la Grande-Bretagne est même devenue le premier pays européen à rouvrir son ambassade, fermée en 1991 au lendemain de la chute du président Siad Barré. Aujourd’hui, et même si la situation reste précaire à Mogadiscio, l’espoir semble de nouveau permis, et la ville, libérée en août 2011, le doit en grande partie aux soldats de la Mission de l’Union africaine en Somalie (Amisom) et de l’Éthiopie, qui contrôlent les principales villes du centre et du sud du pays, reprises aux islamistes en septembre 2012.

et certains de leurs corps traînés dans les rues poussiéreuses de la ville. Cet épisode, dépeint par Hollywood dans le film La Chute du Faucon noir, allait choquer l’opinion publique américaine et avoir rapidement raison de l’opération « Restore Hope » et de ses 25 000 GI. Autrefois symbole de l’échec de Washington, Hawlwadaag est aujourd’hui celui de la renaissance de Mogadiscio. L’éclairage public y est progressivement réinstallé. Dans cette ville qui s’était habituée à vivre calfeutrée sitôt la nuit tombée, on voit reprendre, sur les quelques avenues éclairées, un semblant de vie nocturne. Les boutiques sont ouvertes, les vieux prennent le frais et les gamins improvisent des matchs de football. En deux ans, la situation sécuritaire de la capitale somalienne s’est sensiblement améliorée. jeune afrique

p À Buur-Hakba, près de Baidoa, en février. Déployés en Somalie depuis 2007, les hommes de l’Union africaine ont fini par gagner la confiance de la population.

fanatisés. À la création de l’Amisom, début 2007, peu de monde était prêt à parier sur son succès. Celle-ci venait à la rescousse d’un État fantôme et corrompu, face à des adversaires fanatisés, dans une société profondément divisée et une région sahélienne rongée par la pauvreté et les famines… Un terrain difficile, et qui n’est pas sans rappeler, par certains aspects, le Mali d’avant l’intervention franco-africaine en janvier dernier. Lorsque les premières troupes ougandaises ont débarqué à Mogadiscio, en mars 2007, elles étaient bombardées quotidiennement. Au départ cantonnées à la défense de l’aéroport, les troupes de l’Amisom ont progressivement mis en place la riposte. À l’artillerie lourde tout d’abord, et avec une efficacité relative tant cette pratique était coûteuse en vies humaines et en ressentiment dans la population. « Le début a été un peu brutal, concède le colonel djiboutien Ali Houmed, porte-parole de la mission. Il a fallu nous imposer. Mais aujourd’hui, notre travail est reconnu par les habitants de Mogadiscio. » Car entre-temps les tactiques se sont affinées : les sorties à pied se sont multipliées pour ratisser les quartiers et en chasser les combattants ennemis, au risque aussi de tomber dans des guets-apens – 70 hommes du détachement burundais ont été tués dans la seule journée du 20 octobre 2011. C’est un fait : les progrès de l’Amisom se sont faits au prix de pertes considérables. Début mai, un responsable onusien a estimé à plus de 3 000 le nombre de soldats morts depuis 2007, soit autant que le nombre total de Casques bleus tués depuis 1948. « C’est aussi ce qui a permis le succès militaire à moyen terme, analyse Roland Marchal, chercheur au Centre national de la recherche scientifique l l l n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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Afrique subsaharienne Somalie

OMAR FARUK/REUTERS

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(CNRS) et spécialiste de la Corne de l’Afrique. Pendant les premières années, l’Amisom a eu le temps de nouer des contacts avec la population, de construire des réseaux de renseignements. Et il est certain qu’avec ce niveau de perte aucune mission de l’ONU, aucune armée occidentale ne serait restée aussi longtemps. Si cela a été possible avec l’Union africaine (UA), c’est aussi parce que certains régimes sont soucieux de se faire bien voir de la communauté internationale pour se prémunir contre les critiques sur leur gestion interne. » Du côté des troupes, la motivation est autre. Les soldes versées aux soldats de l’Amisom dépassent les 1 000 dollars par mois – une somme très supérieure à ce qu’ils toucheraient au pays, mais aussi bien inférieure aux salaires versés à un soldat occidental en opération extérieure. La facture, principalement réglée par les États-Unis et l’Union européenne, reste donc peu élevée comparée à une mission des Nations unies. En 2012, l’Amisom a coûté entre 450 et 500 millions de dollars, pour près de 18 000 hommes déployés. Soit autant que le budget initial de la Mission internationale de soutien au Mali (Misma), dont les effectifs avaient dans un premier temps été fixés à 3 300 hommes, et beaucoup moins que le 1,3 milliard de dollars de la mission des Nations unies en RD Congo. ●●●

Hassan Cheikh Mohamoud, le 16 septembre 2012, jour de son entrée en fonction à la tête de l’État.

En 2013, les effectifs de l’Amisom s’élèvent à près de

18 000 hommes

dont : • 7 000 Ougandais • 5 000 Burundais • 4 000 Kényans • 950 Djiboutiens • 850 Sierra-Léonais … auxquels s’ajoutent près de 250 policiers ougandais et nigérians

« Le fait que nous soyons africains a été important, ajoute le colonel Ali Houmed. Les Somaliens sont fiers et conservateurs. Ils auraient moins bien accepté la présence d’Occidentaux. » De la même manière, « compte tenu de la rivalité historique entre Mogadiscio et Addis-Abeba, c’est une bonne chose que les Éthiopiens [présents en Somalie de fin 2006 à début 2009 et à nouveau depuis 2011] soient restés en dehors de l’Amisom à proprement parler », explique un membre du Conseil de paix et de sécurité de l’UA. Toutefois, « les Africains ne sont pas seuls sur le terrain, assure Roland Marchal. Il y a des conseillers américains de la société Bancroft et une présence très militarisée de la CIA ». BASE ARRIÈRE. Contrairement à ce qui s’est passé

au Mali, où l’Algérie ou le Burkina Faso ont longtemps privilégié le dialogue, la nécessité d’éradiquer les Shebab fait consensus chez tous les riverains de la Somalie. Tous ont d’ailleurs des troupes engagées dans le pays (voire infographie), et les apports de l’Éthiopie et du Kenya (qui est d’abord intervenu unilatéralement fin 2011, avant de renforcer l’Amisom de 4000 hommes en 2012) ont été décisifs. Ces deux pays, dotés d’armées puissantes, ont fourni l’essentiel des moyens blindés et aériens utilisés contre les insurgés, et ils l’ont fait avant tout pour défendre leurs intérêts: Addis-Abeba empêche ses rebelles somalis de disposer de bases arrière, et le Kenya, frappé à plusieurs reprises par des attentats, espère sécuriser ses frontières et se débarrasser, à terme, des centaines de milliers de Somaliens qui se sont réfugiés sur son territoire. Y a-t-il une détermination comparable en Afrique de l’Ouest ? « Les plus déterminés semblent être le Niger et le Nigeria, estime Roland Marchal. Mais Niamey n’a pas des moyens comparables aux puissances est-africaines, et le Nigeria a déjà beaucoup à faire avec les islamistes de Boko Haram. » Alors que la France a entamé son retrait du Mali, les troupes africaines de la Minusma, la force onusienne qui doit prendre le relais de la Misma le 1er juillet, risquent de se retrouver de plus en plus souvent en première ligne. Pas sûr qu’elles soient prêtes à en payer le prix. ●

UN PRÉSIDENT ATYPIQUE MAIS CONSENSUEL « C’EST LA PREMIÈRE ÉLECTION transparente à Mogadiscio depuis quarante-deux ans. » Le commentaire ne vient pas de Hassan Cheikh Mohamoud, le vainqueur du scrutin du 10 septembre 2012 avec 70 % des suffrages, mais de son grand rival, le sortant Sharif Cheikh Ahmed, qui vient pourtant d’être défait. Universitaire de 57 ans, Hassan Cheikh N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

Mohamoud a un profil atypique dans le paysage politique somalien. Ni chef de guerre ni homme politique de carrière – il a débuté dans ce domaine en fondant le Parti Paix et Développement, en 2011 –, il était à Mogadiscio pendant la guerre civile, où il travaillait pour l’ONU et différentes ONG, avant de cofonder une université, en 1999. Proche de la branche somalienne des

Frères musulmans, hostiles aux Shebab, il a constitué un gouvernement de technocrates resserré de dix ministres. Il entend mettre l’accent sur le renforcement de la sécurité (il a lui-même été visé par un attentat-suicide deux jours après son élection), la lutte contre la corruption et la réconciliation nationale. ●

P.B.

JEUNE AFRIQUE


Afrique subsaharienne

tribune

CCL Libération

Opinions & éditoriaux

Éric AtAngAnA Fils aîné de Michel Thierry Atangana

Libérez mon père! *

C

e 14 juin, mon père aura 49 ans. Je ne serai pas à ses côtés pour pouvoir faire ce que beaucoup trouvent si simple et même si banal: une fête d’anniversaire. Mon père nous a quittés, ma mère, mon frère cadet et moi, pour aller travailler dans son pays d’origine, le Cameroun. La dernière fois que je l’ai vu en chair et en os, j’étais âgé de 5 ans et mon frère n’avait que quelques mois.

Ce n’est qu’à l’âge de 17 ans que j’ai pu rencontrer un avocat qui m’a expliqué la situation dans laquelle mon père était plongé. C’est à ce moment-là que j’ai compris que j’avais l’occasion de l’aider pour qu’un jour nous puissions enfin être réunis. J’ai commencé, à la même époque, à pouvoir échanger avec lui, d’abord via des courriers puis, plus récemment, par téléphone. Mais n’importe quel fils comprendra que cela ne suffit pas. Et pourtant, cela fait seize ans que je dois me contenter de cette relation. Alors, à quel saint doit-on se vouer ? Pourquoi m’avoir arraché mon père alors que nous avions besoin de lui ? Avec ma mère et mon frère, nous nous sommes retrouvés seuls. J’ai dû prendre trop tôt des responsabilités pour aider ma famille, protéger mon petit frère et assurer certaines dépenses avec des petits boulots empiétant parfois sur mes activités scolaires.

français dans une telle situation ? Assez de ces fausses promesses et de ces faux espoirs qui s’apparentent à une forme de torture psychologique indigne ! Assez de paroles ! Rendez enfin la justice ! Si cette dernière n’a pas été rendue plus rapidement, c’est aussi parce que la France a fait preuve d’une incroyable inertie pendant de nombreuses années, et précisément jusqu’à l’arrivée d’un nouvel ambassadeur de France au Cameroun, Bruno Gain. Grâce à ce dernier, l’assistance consulaire de la France – à laquelle mon père avait droit en tant que citoyen français – a été rétablie. L’« affaire Atangana » est devenue un sujet pour les autorités françaises, ce qui a conduit François Zimeray, l’ambassadeur de France aux droits de l’homme, à rendre une visite à mon père en novembre 2012 et cela a facilité l’implication du président français, François Hollande, dans ce dossier. Je sais que de nombreuses personnes que j’interpelle sont sensibles aux cas d’injustice. Alors faites en sorte que le cas de mon père soit connu du grand public. Ne pas le faire, c’est laisser un homme aller vers une mort programmée, car, après toutes ces années, j’ai la certitude que tel était le but recherché par ses geôliers. Bien sûr, mon père tiendra bon grâce à sa foi, qui lui permet de rester debout, et grâce à ses enfants, pour

Que lui reproche-t-on ? Il a été la victime collatérale d’un règlement de comptes à la tête de l’État.

Que reproche-t-on à mon père ? Officiellement, d’avoir détourné des fonds publics. Une fable que nul n’ose aujourd’hui continuer de défendre tant elle a été battue en brèche pour faire place à la vérité: mon père a été la victime collatérale d’un règlement de comptes politique à la tête de l’État camerounais. La justice a été piétinée depuis de nombreuses années. Elle doit être enfin rendue ! La justice doit désormais guider les actions du pouvoir camerounais dans ce dossier. Comment les officiels camerounais peuvent-ils à ce point détruire moralement et physiquement un homme dont ils savent l’innocence ? Comment peuventils, eux qui se plaisent à présenter leur pays comme un allié de la France, maintenir un citoyen

lesquels il tient bon. Mais quand bien même il ne se laisserait pas abattre, chaque fils comprendra qu’il n’est pas neutre pour moi et pour mon frère de pouvoir passer avec un père libre le temps que la vie nous accordera. Lors de sa dernière visite en France, le président Paul Biya avait annoncé que mon père devait attendre le verdict de la Cour suprême. Cette dernière avait six mois pour juger le recours de mon père. Le délai expirait le 4 avril et, à ce jour, le recours n’a toujours pas été enregistré. Mais une chose est sûre : nous n’abandonnerons pas, car nous sommes persuadés que mon père nous reviendra libre, heureux et debout. l

*En 1997, Michel Thierry Atangana a été condamné à quinze ans de prison pour détournement de fonds au Cameroun. Alors même qu’il avait purgé sa peine, il a de nouveau été jugé en 2012 et condamné à vingt ans de réclusion supplémentaires. jeune afrique

n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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Afrique subsaharienne Centrafrique

anicet Dologuélé « Pourquoi je serai candidat » Parce que le pays a touché le fond et que les autorités ne lui semblent pas à la hauteur, l’ancien Premier ministre annonce qu’il briguera la magistrature suprême à la fin de la transition.

M

enacé par un régime aux abois, il a quitté Bangui deux jours seulement avant que la ville tombe entre les mains de la coalition Séléka, fin mars, et que le président François Bozizé prenne la fuite. Depuis, Anicet Dologuélé, ancien Premier ministre de 1999 à 2001 (sous Ange-Félix Patassé), et ancien président de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC), suit de près la situation sécuritaire dans son pays, où il promet de rentrer bientôt, et ne mâche pas ses mots à l’égard de ces autorités de transition « incapables de prendre leurs responsabilités et de protéger les Centrafricains ». À 56 ans, il n’a pas renoncé à jouer un rôle. Et annonce qu’il sera candidat à l’élection présidentielle qui sera organisée au bout des dix-huit mois de transition. jeune afrique : La justice centrafricaine a émis, fin mai, un mandat d’arrêt international contre l’ancien président françois Bozizé. Les crimes qui lui sont reprochés – crimes contre l’humanité et incitation au génocide – sont très graves. qu’en pensez-vous ? anicet DoLoguéLé : Quand on gère

l’État, il faut s’attendre à devoir rendre des comptes. Le président Bokassa a eu, en son temps, à répondre de crimes de cette nature. Il a accepté de revenir à Bangui et de comparaître devant la justice. Il a été condamné et il a payé sa dette. Si François Bozizé s’estime innocent, il aura l’occasion d’en faire la preuve. n’y a-t-il pas aussi des responsabilités à chercher du côté de la coalition Séléka ?

Bien sûr ! Jamais encore notre pays n’avait vécu une situation aussi grave : il n’y a plus d’État ; les femmes sont violées et les enfants terrorisés ; n’importe qui peut sortir de nulle part et agir en toute impunité… Les Centrafricains se lèvent le matin en se demandant quand leur tour viendra. C’est un cauchemar ! n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

Vous dites qu’il n’y a pas d’état, mais il y a tout de même un président, un Premier ministre…

Il y a un président et un gouvernement, mais cela veut-il dire qu’il y a un État ? La Centrafrique a touché le fond et s’enfonce dans les tréfonds. La situation sécuritaire est catastrophique, je l’ai dit. L’économie est détruite, les arriérés de salaire s’accumulent… Cette année, l’État n’engrangera pas la moitié des recettes sur lesquelles il aurait dû pouvoir compter. Prenez l’exemple de Total, qui est le plus important contribuable en Centrafrique: la plupart de ses stations ont été détruites. Même la Cemac [Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale], dont le siège est installé depuis quarante ans à Bangui, envisage de se délocaliser. qu’attendez-vous du président Michel Djotodia ?

Il a conquis le pouvoir par les armes et porte une responsabilité dans la situation actuelle. Il a gagné presque sans combattre, et l’on pourrait imaginer que la situation est plus facile à gérer. Pourtant, tout se passe comme si les membres de

plaindre ! Il est le seul qui soit reconnu par la communauté internationale. Il a la légitimité des accords de Libreville, confirmés par la réunion de N’Djamena [qui s’est tenue mi-avril] et par le Conseil de sécurité de l’ONU. Le peuple attend qu’il prenne ses responsabilités. Qu’il ait l’autorité nécessaire pour ramener l’ordre. que devrait-il faire qu’il ne fait pas ?

Il a longtemps été un défenseur des droits de l’homme, à un moment où ces mêmes droits étaient d’ailleurs loin d’être aussi bafoués qu’ils le sont aujourd’hui. Nous attendons qu’il se comporte comme un homme de loi et de justice. Certes, la tâche n’est pas facile et les hommes qui lui font face ont des armes. Mais je ne crois pas que sa vie soit menacée… Il doit faire plus et mieux. Les autorités ont-elles la légitimité suffisante pour mener à bien la transition ?

Quand on fait un coup d’État, on n’a pas de légitimité. Cela étant dit, il faut faire avec. Ces autorités ont dit qu’elles allaient gérer la transition de manière transparente, organiser des élections auxquelles elles ne se présenteraient pas d’ici à dix-huit mois et rendre le pouvoir aux civils… Eh bien qu’elles commencent !

Bozizé doit avoir le courage de venir s’expliquer devant la justice à Bangui. la Séléka étaient frustrés de ne pas s’être battus et considéraient les cinq millions de Centrafricains comme leurs ennemis. Il faut que les autorités entendent le cri de la population et fassent cesser le chaos. Elles ont eu de l’autorité sur les hommes lorsqu’ils étaient en brousse, il n’y a pas de raison que cela ne soit plus le cas. Le Premier ministre nicolas tiangaye n’est-il pas dans une situation délicate ? Se démarque-t-il suffisamment de la Séléka ?

C’est lui le chef du gouvernement, c’est lui le patron du pays. Il ne peut pas se

il y a un énorme travail à faire avant de pouvoir organiser un scrutin…

Oui. La Séléka a détruit les fiches d’état civil dans les villes qu’elle a prises. Il va donc falloir faire un recensement électoral, être sûr que ceux qui vont vouloir voter sont bien des Centrafricains… Et pour que les agents du recensement circulent, il faut la sécurité. Ensuite, il faudra que les candidats puissent faire campagne sans avoir peur d’être mitraillés… Mais je veux faire confiance au gouvernement : Nicolas Tiangaye a lui-même vécu une injustice électorale aux législatives de 2011, il sait ce que c’est. jeune afrique


Afrique subsaharienne t Pour Anicet Dologuélé, la chute du régime Bozizé, « autiste et impopulaire, était inévitable ».

était impopulaire, paranoïaque, autiste, convaincu de son bon droit. On savait aussi qu’il se préparait à modifier la Constitution pour permettre à François Bozizé de se présenter et qu’en son sein on se disputait le pouvoir. Plusieurs de ses ténors avaient d’ailleurs été récemment écartés de manière brutale. La France aurait-elle dû intervenir, ainsi que le lui demandait François Bozizé ?

Ce que nous souhaitons, c’est qu’elle intervienne maintenant, aux côtés des forces des pays amis, non pas pour sauver un régime, mais pour sauver une population. Il faut nous aider à faire partir les combattants non centrafricains et à ramener la paix.

Vincent Fournier/J.A.

C’est le cinquième coup d’État depuis l’indépendance, le deuxième en dix ans… Ne craignez-vous pas que la communauté internationale ne se soit lassée ?

Faut-il que les législatives aient lieu en même temps que la présidentielle ?

à des manœuvres qui auraient pu faire couler le sang. Je suis resté éloigné de toutes ces tueries dont la Centrafrique est coutumière. Je suis convaincu que l’on peut faire de la politique avec efficacité, mais sans brutalité.

Briguerez-vous la magistrature suprême?

Vous avez dit, il y a quelques semaines, que le coup d’État de mars était prévisible. Pourquoi ?

Cela coûterait sans doute moins cher, mais il appartient au gouvernement d’en discuter avec les partenaires qui financeront les élections.

Oui. J’en ai les capacités, l’expérience, la légitimité et la motivation.

Comment comptez-vous faire la différence ?

J’ai beaucoup observé – sans jamais y participer – la vie politique centrafricaine ces douze dernières années. J’en ai tiré les leçons. Surtout, j’ai évité de participer jeune afrique

Tout le monde savait que le régime de François Bozizé connaissait une fin de règne, mais l’on pensait qu’il tomberait à cause de dissensions internes. En octobre 2012, on n’imaginait pas qu’une coalition appelée Séléka marcherait sur Bangui. Mais on savait que le régime

Il est vrai que nous vivons un drame humanitaire presque dans l’indifférence et que l’on se sent abandonnés. Mais comment expliquer cette instabilité dont vous parlez ? Les groupes armés actifs depuis plusieurs années ne cherchaient pas vraiment le pouvoir politique. Ils voulaient défendre leurs propres intérêts dans des régions qu’ils estimaient délaissées, et ce mécontentement a été instrumentalisé par des gens qui voulaient le pouvoir. Que souhaiteriez-vous dire aujourd’hui à François Bozizé ?

Que j’apprends çà et là qu’il se prépare militairement à revenir. Mais il a été au pouvoir dix ans, il avait tous les moyens de l’État à sa disposition, et il n’a pas su défendre le territoire centrafricain. Ce n’est pas maintenant qu’il est hors du pays qu’il pourra le faire. On a souvent tendance à penser que l’on peut être le sauveur… Mais François Bozizé doit avoir l’humilité de faire le bilan de ses deux mandats à la tête du pays. Il doit aussi avoir le courage de venir s’expliquer devant la justice. Encore une fois, l’ex-empereur Bokassa l’a fait. Il a été traité avec respect et il a pu se défendre. Pourquoi pas Bozizé ? l Propos recueillis par ANNe KAPPès-GrANGÉ n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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RIJASOLO/RIVA PRESS

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MADAGASCAR

Le 18 avril, à Antananarivo. Rien ne va plus entre Jean Omer Beriziky (à g.) et Andry Rajoelina.

L’empêcheur de tourner en rond des trois « indésirables ». Volte-face ? Non, affirme-t-il à son entourage. C’est l’armée et la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) qui lui lui imposait à compter du 27 mai. Selon auraient demandé de gagner du temps. cette loi, tout candidat occupant un poste « Sa position n’a pas changé d’un iota », au sein de la Transition doit démissionner assure un ami. soixante jours avant le scrutin. En prenant la tête du front du refus, le Premier ministre a surpris jusqu’à ses MENACÉ. Le même jour, Beriziky invite proches. « Il y a six mois, je ne l’en aurais les forces armées et les chefs des instipas cru capable, dit l’un d’eux. À l’époque, tutions de la Transition dans son palais. c’était un piètre politique. Mais la foncObjectif: trouver une solution pour sortir tion l’a changé. » Historien reconverti de l’impasse. Comme la communauté à la diplomatie dans les années 1990 internationale, il s’oppose à la candidature après avoir lutté aux côtés d’Albert Zafy de Rajoelina, ainsi qu’à celles de Lalao pour faire tomber le président Ratsiraka, Ravalomanana et de Didier Ratsiraka. Le Beriziky n’avait jamais eu d’ambition poli3 juin, à l’issue d’un conclave réunissant tique avant que Rajoelina ne l’extirpe de Bruxelles, où il représentait son pays depuisseizeans,etnelenommeàla « Il y a six mois, je ne l’en primature en octobre 2011. Délicate aurais pas cru capable. cohabitation entre un président La fonction l’a changé. » soucieux de tout contrôler et un UN PROCHE DU CHEF DU GOUVERNEMENT Premier ministre ne cessant de clamer que son seul patron, c’est la tout ce qui compte dans l’île (les forces feuille de route de sortie de crise. « Cette armées, les chefs d’institutions et les confrontation permanente lui a donné des entités politiques), sa position l’emporte. ailes, indique un ami. Il a des ambitions Il apparaît comme le nouvel homme aujourd’hui. Maisil a toujoursététrèsclair: fort, tandis que Rajoelina se sent plus tant que la feuille de route est respectée, que jamais menacé : il n’a plus aucun il ne sera pas candidat. » soutien à l’extérieur (même la France en Ces derniers temps, Beriziky aurait a assez de son entêtement), et l’armée reçu des menaces. Mais il dispose d’une pourrait lui échapper. Mais trois jours double assurance-vie : le soutien de la plus tard, Beriziky fait marche arrière. communauté internationale et le batailSon gouvernement annonce le report du lon de sécurité de la primature, l’un des premier tour. La veille, la cour électorale mieux armés du pays. ● spéciale avait maintenu les candidatures RÉMI CARAYOL

Contre toute attente, le Premier ministre Beriziky a pris la tête du front opposé à une candidature du président de la Transition.

C

est l’homme à abattre pour les partisans d’Andry Rajoelina. L’empêcheur de tourner en rond. « C’est Iznogoud, celui qui veut être calife à la place du calife », s’irrite un proche du président de la Transition, candidat contesté à l’élection présidentielle dont le premier tour vient d’être repoussé au 23 août. Qui l’eût cru ? Le Premier ministre, Jean Omer Beriziky (62 ans), qui était encore un inconnu pour la majorité des Malgaches il y a deux ans, est aujourd’hui le principal obstacle aux ambitions de Rajoelina. « C’est lui qui a déclenché la révolte, estime Alain Tehindrazanarivelo, l’un des 41 candidats à l’élection. Son refus de participer au Conseil des ministres a précipité les choses. » C’était le 29 mai. Un mercredi, jour traditionnellement réservé au Conseil des ministres que préside Rajoelina. Mais ce jour-là, quand la réunion débute à 15 heures, la salle du palais d’Iavoloha est à moitié vide. Au même moment, Beriziky préside au palais de Mahazoarivo un Conseil de gouvernement improvisé. D’habitude, c’est le mardi qu’il se tient. « Insubordination! » dénonce l’entourage de Rajoelina. Le lendemain, Beriziky explique qu’il ne reconnaît plus l’autorité de Rajoelina depuis que ce dernier a refusé de quitter la présidence, comme la loi électorale le N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

JEUNE AFRIQUE


Coulisses

Afrique subsaharienne

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Kenya

Londres regrette

L

ondres a tardé à reconnaître ses torts, mais c’est maintenant chose faite. « Le gouvernement reconnaît que des Kényans ont été soumis à des tortures et à d’autres formes de mauvais traitements entre les mains de l’administration coloniale […] et regrette sincèrement que ces abus aient eu lieu », a déclaré le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, le 6 juin. Soixante ans que les Kényans attendaient ! En 1952, les indépendantistes Mau Mau se sont violemment soulevés contre les colons blancs – un soulèvement brutalement réprimé par l’administration britannique. Entre 1952 et 1956, selon la Commission kényane des droits de l’homme, près de 90 000 personnes ont été exécutées ou torturées. souffranCes. Il aura fallu la pugnacité

d’une poignée de survivants des camps de détention, venus raconter devant la Haute Cour de justice de Londres les coups, les viols et les mutilations, pour que les juges estiment le dossier recevable en octobre 2012. Plutôt qu’un procès, les autorités britanniques et les avocats des victimes et de leurs familles ont opté pour des négociations: Londres a reconnu ses torts,s’estengagéàfinancerlaconstruction d’un mémorial à Nairobi et versera, selon ce que vient d’annoncer William Hague, 23,5 millions d’euros à 5 228 personnes. Ces 4 500 euros par personne n’effaceront pas les années de privations et de souffrances (un des survivants, Mwai Wanughigi, a déjà dit que ce chiffre n’était « pas acceptable »), mais la décision ouvre une brèche pour tous ceux qui espèrent voir un jour indemnisés les crimes commis par les anciens colons. À Chypre, par exemple, où des indépendantistes d’Eoka ont été emprisonnés et maltraités. Ou encore en ex-Guyane britannique, où les autorités songent à obtenir réparation pour les arrestations et les emprisonnements arbitraires qui ont émaillé la décolonisation. l MaLika GroGa-Bada jeune afrique

JUNIOR D. KANNAH/AFP

Plus de 23 millions d’euros seront versés aux victimes de la révolte Mau Mau.

p Bertrand Bisimwa (au centre), le président de l’aile politique du M23, le 1er juin, non loin de Goma.

rd coNgo même Pas Peur Cela n’a aucun rapport, insistent les chefs du M23. Ce n’est pas parce qu’une brigade d’intervention de l’ONU, forte de 3000 hommes (des Sud-Africains, desTanzaniens et des Malawites), est en cours de déploiement à Goma, dans le Nord-Kivu (Est), que les rebelles se sont finalement décidés à retourner à la table des négociations. Non, poursuit Bertrand Bisimwa, le président de l’aile politique du M23, dans un communiqué daté du 5 juin : si son mouvement accepte de revenir à Kampala (Ouganda), c’est parce que Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’ONU, a fait un geste en insistant pour qu’une solution politique soit trouvée lors d’une tournée dans l’est de la RD Congo. Le dialogue était pourtant suspendu depuis le 2 mai, la rébellion exigeant la signature d’un cessez-le-feu avec le gouvernement congolais. l

Nigeria aux graNds maux… Vingt ans de prison pour toute personne qui, directement ou non, apportera un soutien logistique ou financier à Boko Haram et Ansaru. Ainsi en a décidé le président Goodluck Jonathan le 5 juin. Deux jours plus tôt, les États-Unis avaient fait savoir qu’ils offraient 7 millions de dollars (5,3 millions d’euros) en échange de toute information permettant de localiser Abubakar Shekau, le chef de Boko Haram. Les insurgés islamistes sont accusés d’avoir tué près de 2000 personnes depuis 2009.

BuruNdi PatieNce! La loi a été promulguée le 4 juin. Jugée « liberticide » par plusieurs ONG et par des pays occidentaux, elle restreint la protection des

sources des journalistes et interdit notamment la diffusion d’informations ou de documents en rapport « avec le secret de défense nationale » ou « susceptibles de porter atteinte au crédit de l’État ». « Si vous n’êtes pas contents […], a conclu le président Pierre Nkurunziza en s’adressant à la presse, il faut patienter. »

guiNée équatoriale saNs surPrise Pas de pourcentages ni de taux de participation. Le 1er juin, un communiqué de la présidence s’est contenté d’annoncer que le Parti démocratique de Guinée équatoriale (PDGE) deTeodoro Obiang Nguema, au pouvoir depuis trente-trois ans, avait remporté « la majorité absolue dans toutes les circonscriptions » lors des élections parlementaires et locales du 26 mai. n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013


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Maghreb & Moyen-Orient

syrie

Le grand malaise

maghrébin Face à l’horreur et à l’extrême complexité d’une interminable guerre civile, l’opinion, de Tunis à Nouakchott, semble totalement déboussolée. Enquête sur un cruel dilemme. LaurenT De sainT Périer

D

e l’Orient à l’Occident, le cauchemar syrien, monstrueux avatar d’un rêve de liberté, déchire les consciences et déchaîne les passions. La fragile unanimité des sociétés arabes, révélée par la magie des révolutions de 2011, est en train de voler en éclats sur la dernière d’entre elles. En Afrique du Nord, la question confronte les anciens régimes toujours en place (Soudan, Algérie et Mauritanie) aux gouvernements issus des révolutions (Égypte, Tunisie, Libye), dresse les défenseurs de la laïcité contre les partisans de l’islam politique, divise les gauches et radicalise les engagements, les uns dénonçant un fantasmatique complot impérialiste pendant que d’autres prennent les armes pour aller défendre la foi en danger… La Ligue arabe, hier club atone pour autocrates vermoulus, s’est soudain muée en terrain de lutte entre anciens et modernes. « Arrêtez de défendre la Syrie, parce que votre tour viendra », lançait, menaçant, le Premier ministre qatari, Hamad Ibn Jassem, au représentant de l’Algérie, qui refuse de reconnaître l’opposition syrienne comme représentante légitime du peuple. Mais comment l’immuable État-FLN pourrait-il soutenir une révolution sans se condamner lui-même ? Pour Alger, le Damas des Assad reste le phare de la résistance arabe au sionisme et à l’impérialisme occidental, et le dernier bastion séculier du Moyen-Orient contre la contagion islamiste. « Complot ! » a répliqué l’Algérien au parrain qatari du Printemps arabe. Car beaucoup, au Maghreb, ne voient plus dans la crise syrienne une révolution nationale, mais une guerre sale pour les autres, où Turcs, Iraniens, Saoudiens, n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

Américains, Russes se disputeraient à l’arme lourde le contrôle du Moyen-Orient. Victime d’un « axe wahhabo-takfiro-occidentalo-sioniste » pour les gauches panarabes anti-impérialistes, Assad est pour leurs adversaires islamistes le chien de garde de l’alliance chiite qui s’étend de Téhéran aux fiefs libanais du Hezbollah. Du Caire à Nouakchott, les adversaires les plus farouches de l’islam politique ont fini par faire leur le combat d’Assad contre une insurrection aux teintes jihadistes de plus en plus prononcées. l

Tunisie

un problème national

révélée par la magie des révolutions de 2011, la fragile unanimité des sociétés arabes a volé en éclats.

« Comment la gauche tunisienne, qui assure être révolutionnaire, peut-elle soutenir un dictateur? Pourquoi des jeunes s’engagent-ils aux côtés de Jabhat al-Nosra ? » maugrée Wael Noumair, Damascène réfugié, comme une centaine de ses compatriotes, à Tunis. La position tunisienne laisse perplexes les Tunisiens eux-mêmes. Certains groupuscules nationalistes arabes soutiennent le régime syrien, comme l’a montré l’importante manifestation pro-Bachar qui s’est déroulée en marge du Forum social mondial, en mars. L’extrême gauche, incarnée par le Front populaire, souhaite « le départ de Bachar » mais appelle de ses vœux « l’établissement d’un régime national capable de faire face à Israël et de libérer le plateau du Golan ». Une grande partie de la classe politique a en tout cas fustigé la réaction précipitée et tranchée de l’actuel exécutif, qui, à peine entré en fonction, s’était empressé, devançant tous les pays arabes, de rompre les relations avec Damas dès février 2012, allant jusqu’à proposer l’asile à Bachar pour qu’il quitte le pouvoir. Initiatrice, avec le Qatar, de la première rencontre des Amis de la Syrie, la Tunisie a soutenu la création d’une force armée au sein de la Ligue arabe, voté la l l l u Manifestation de soutien au régime de Bachar al-Assad, le 20 avril, à Tunis. jeune afrique


Chokri Mahjoub/ZuMa/rEa


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maghreb moyen-orient Syrie suspension de la Syrie de cette instance ainsi que de l’Organisation de la coopération islamique (OCI). « C’est une dérive complète par rapport aux traditions de la diplomatie tunisienne, connue pour sa modération, son indépendance et son respect des principes et valeurs qui fondent les relations internationales », estime Ahmed Manaï, membre de l’Instance des observateurs arabes pour la Syrie. En outre, le bourbier syrien est devenu un problème national avec la présence aux côtés des rebelles de quelque 3 000 jeunes Tunisiens enrôlés par des réseaux islamistes pour mener le jihad contre Assad « l’impie ». Selon Ahmed Manaï, l’envoi de ces derniers aurait été avalisé, en décembre 2011, à Tripoli, par Rached Ghannouchi, président d’Ennahdha, Youssef al‑Qaradawi, président de l’Union internationale des savants musulmans, Borhane Ghalioune, numéro deux des Frères musulmans syriens, Hamad Ibn Jassem, le Premier ministre qatari, et Abdelhakim Belhaj, ancien d’Afghanistan et fondateur du Parti national libyen (PNL). Mais la colère des familles a contraint l’exécutif à démanteler les filières de recrutement. Le président Moncef Marzouki s’est même alarmé, redoutant que « ces Tunisiens ne constituent une menace pour leur propre pays ». Peut‑être à raison, Abou Iyadh, chef des salafistes d’Ansar el‑Charia, attendant le retour des combattants pour porter le jihad dans le pays. Aujourd’hui, une délégation tunisienne se trouve à Damas pour tenter d’obtenir de Bachar qu’il étende aux Tunisiens l’amnistie qu’il a proposée aux rebelles faits prisonniers. Reçue par le président syrien, cette délégation se compose de représentants de plusieurs partis, dont Al‑Joumhouri, Nida Tounes, Al‑Thawabet (nationalistes arabes), les Unionistes libres, le Mouvement du peuple, et d’une kyrielle d’associations pro‑Bachar, ainsi que de militants de la société civile comme Dalila Mbarek du mouvement Doustourna. l Frida dahmani lll

maroc

antichiisme

L’euphorie révolutionnaire qui avait saisi l’en‑ semble du monde arabe inclinait à prendre la défense des peuples contre les dictatures. Au Maroc aussi, il semblait naturel de défendre les civils contre le régime. Dans les cortèges du Mouvement du 20‑Février, la solidarité était de mise. Faux nez du mouvement de contestation local, la cause syrienne bénéficiait de la même « compréhension » de la part de la police. Parfois tolérés, les sit‑in pouvaient être dispersés sans ménagement. En accueillant à Marrakech en décembre 2012 la 4e conférence du groupe des Amis de la Syrie, le royaume, qui siège actuellement au Conseil de sécurité en tant que membre non permanent, n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

À rabat, l’hostilité à Bachar se nourrit de la méfiance à l’égard du hezbollah et de l’iran.

prenait clairement position en faveur de l’oppo‑ sition syrienne. Faire endosser par le royaume les positions des puissances occidentales – l’axe Washington‑Londres‑Berlin – est bien commode. En 2011, le premier projet de condamnation pré‑ senté par Washington n’avait pas été soutenu par le Liban, qui siégeait alors au Conseil. Atlantiste par choix et membre revendiqué du club des monarchies antirévolutionnaires, le Maroc officiel ne s’est jamais embarrassé de « solidarité panarabe », ni de « front du refus ». Bien sûr, le ministre islamiste des Affaires étran‑ gères, Saadeddine El Othmani, n’a pas hésité à mouiller le costume, s’attirant les critiques acerbes de l’ambassadeur syrien à l’ONU. Parmi les islamistes marocains, l’hostilité au régime de Bachar se nourrit depuis peu de la méfiance vis‑à‑vis du Hezbollah et de l’Iran. L’idéologue en chef du Mouvement Unicité et Réforme, Ahmed Raïssouni, exprime ce schisme en termes clairs : « La position de l’Iran et du Hezbollah – qui fait partie du système iranien – les isole de plus en plus et donne des arguments à leurs adversaires : même s’ils refaisaient leurs calculs et changeaient de politique, je crois qu’il leur faudrait plusieurs générations pour retrouver crédibilité et prestige. » Mais au‑delà du contentieux opposant sunnites et jeune afrique


le grand malaise maghrébin t L’Algérie a accueilli des milliers de Syriens fuyant la guerre civile. Ici au square Port-Saïd, dans le centre d’Alger.

est vrai, le baasisme a eu moins d’influence que dans d’autres pays arabes. Même l’avocat Khalid Sefiani, un ancien socialiste devenu néobaasiste, ne défend pas l’option éradicatrice du régime syrien. Cet homme de réseaux, chef d’orchestre des grandes mobilisations pour la Palestine des dix dernières années, se fait discret. Son Groupe d’action national de soutien à l’Irak et à la Palestine s’est récemment mué en Observatoire marocain de lutte contre la normalisation avec Israël. Tout un programme. l Youssef Aït Akdim

Algérie

terre d’asile Fuyant par vagues successives la guerre civile, des milliers de Syriens ont trouvé refuge en Algérie dès le début de l’été 2012. L’opposition syrienne et la presse avaient alors avancé le chiffre de 25000 personnes,avantqueleministèrealgériendel’Intérieur n’indique officiellement en juillet de la même année que le nombre de réfugiés était de 12 000. Installées provisoirement square Port-Saïd et place des Martyrs, dans le centre d’Alger, ainsi qu’à Bab Ezzouar, à l’est de la capitale, des centaines de familles ont été ensuite Le nombre de réfugiés évacuées par les pouvoirs publics vers un syriens accueillis par Alger, selon les chiffres du centre d’accueil aménagé à leur intention à Sidi Fredj, à 25 km à l’ouest d’Alger. Les ministère de l’Intérieur enfants en âge d’être scolarisés ont été publiés en admis dans les établissements de la région, juillet 2012 tandis que d’autres structures similaires étaient ouvertes dans plusieurs autres wilayas du pays. Sans doute marqués par les années de guerre et de terreur qu’ils ont vécues au cours de la décennie 1990, des Algériens ont lancé des opérations de solidarité en faveur des exilés, leur distribuant vêtements, nourriture, argent, leur offrant même parfois le gîte. Cet élan de sympathie s’explique d’abord par la position des autorités algériennes, qui soutiennent résolument le président Bachar al-Assad, dont le père, Hafez, fut un fidèle allié du président Boumédiène puis de son successeur, l l l

Samir Sid

12000

chiites, la confessionnalisation du conflit inquiète aussi bien les islamistes que les libéraux. La Syrie, une cause consensuelle ? Pas autant que la Palestine ou l’Irak, deux sujets qui ont longtemps réuni sous la même bannière militants d’extrême gauche, islamistes et nostalgiques du nationalisme arabe. Certes, peu de voix s’élèvent pour soutenir sans réserve le pouvoir syrien, resté, malgré sa rhétorique de la résistance (à Israël), un mauvais élève du Moyen-Orient. Au Maroc, il

mAuritAnie Realpolitik

d

ans la droite ligne d’Alger et de Khartoum, dernières capitales arabes à soutenir Bachar, le président mauritanien avait superbement ignoré l’opposition syrienne lors du 24e sommet de la Ligue arabe, les 26 et 27 mars à Doha, avant d’assouplir sa position et de prôner une solution politique au conflit. Fer de lance de la lutte contre Al-Qaïda au Maghreb jeune afrique

islamique (Aqmi) dans la région, le numéro un mauritanien ne voit naturellement pas d’un bon œil la tournure jihadiste prise par la rébellion syrienne. Mais il ne peut s’offrir le luxe ni de se mettre à dos le Qatar, principal soutien des insurgés syriens, ni de froisser ses alliés occidentaux, résolument anti-Bachar. En outre, il doit tenir compte d’une opinion partagée, qui

au départ nourrissait de la sympathie pour la rébellion syrienne avant de se raviser face à ce qu’elle considère de plus en plus comme une fitna (« guerre fratricide entre musulmans ») dont elle redoute qu’elle ne s’étende à leur pays. Surtout depuis la mort, fin mai, de quatre Mauritaniens partis faire le jihad en Syrie. Même les islamistes locaux se font discrets, de peur qu’on ne

leur oppose un jour l’échec des gouvernements islamistes nés du Printemps arabe. « Une majorité non politisée est neutre, analyse un journaliste mauritanien, tandis qu’une partie de l’opposition appuie les rebelles en réaction au soutien des partis laïques à Bachar et à la neutralité de circonstance d’Ould Abdelaziz. » l michAel PAuron n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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maghreb moyen-orient syrie

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GIANLUIGI GUERCIA/AFP

l l l Chadli Bendjedid. Depuis le début de la révolution syrienne, Alger est l’une des rares capitales du monde arabe à ne pas appeler au départ ou au renversement de Bachar. En retour, ce dernier n’a pas manqué d’envoyer, en mai, un message officiel au président Abdelaziz Bouteflika, hospitalisé à Paris, pour lui souhaiter un prompt rétablissement. L’afflux de réfugiés est également facilité par un accord algéro-syrien permettant la circulation entre les deux pays sans visa et par le maintien des liaisons aériennes Alger-Damas assurées par Air Algérie en dépit de la guerre. Pour tenter de freiner cet exode,

les autorités syriennes ont réduit de trois à un les vols hebdomadaires de la compagnie algérienne. En outre, les Syriens qui souhaitent rallier l’Algérie sont désormais tenus de présenter un certificat d’hébergement, ainsi qu’un billet retour. Enfin, en leur offrant l’asile, les Algériens s’acquittent d’une sorte de dette historique à l’égard des Syriens. Car c’est à Damas que l’émir Abdelkader, grande figure de la résistance contre l’occupation française, a choisi de s’installer en 1852 après avoir été incarcéré au château d’Amboise. Il y a été rejoint par sa famille, sa suite et quelque 12 000 fidèles algériens. Personnage charismatique auréolé de prestige, l’émir a dû intervenir avec ses hommes pouréviterlemassacredeschrétiensparlessunnites lors des conflits confessionnels qui embrasèrent Damas en juillet 1860. l Farid alilat

libye

Catéchisme révolutionnaire Sur Facebook, la page des Martyrs libyens en Syrie compte plus de 26 000 fans. Les réseaux sociaux regorgent de vidéos de combattants n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

p Une Libyenne à côté du drapeau de l’Armée syrienne libre, le 1er juin 2012, à Tripoli.

libyens, pour la plupart engagés au sein de brigades révolutionnaires à forte connotation islamiste. L’arbre qui cache la forêt est Mehdi Harati, ancien chef des révolutionnaires de Tripoli, qui a vite écourté sa carrière de chef de milice. Après avoir joué un rôle déterminant dans la prise de la capitale libyenne, en août 2011, il accède au rôle de vice-commandant militaire de Tripoli. Ses désaccords avec son « chef », Abdelhakim Belhaj, le poussent rapidement à changer d’employeur. Il s’envole pour la Syrie, où les forces rebelles veulent tirer parti de son expérience. En entrepreneur du jihad, ce binational libyen et irlandais prospecte. Fin 2011, il finit par créer son propre groupe, Liwa’ el-Umma (la « brigade de la Oumma »). Sous ses ordres, quelques milliers d’hommes, dont une écrasante majorité de Syriens. Le financement vient d’abord de riches donateurs du Golfe, dont les très influents cheikhs koweïtiens Hajaj Al Ajmi et Irshid Al Hajri. Auréolé du prestige d’avoir contribué à la chute de Kaddafi, Harati semble en mesure de mobiliser des réseaux internationaux. Lors des combats féroces autour de la ville d’Idlib, en 2012, Harati est apparu comme un meneur d’unité, capable de monter au front, prêtant le flanc à la critique du pouvoir syrien, lequel a toujours dénoncé le rôle des bandes criminelles étrangères. Mehdi Harati a dû, en tout cas, quitter la Syrie, officiellement pour des raisons médicales, en septembre 2012. Dans une interview datant de cette époque au journal Acharq al-Awsat, le combattant reconnaît que la guerre syrienne est plus dure que la guerre en Libye, où les rebelles ont rapidement bénéficié du soutien aérien de l’Otan. Entre-temps, il apprend que les autorités turques l’ont placé sur liste noire. Beaucoup d’encre a coulé pour savoir si Harati et ses compagnons d’armes étaient de dangereux jihadistes. Revendiquant une piété à toute épreuve, le Libyen n’a jamais été suspecté de liens avec des terroristes. Même en Irlande, son deuxième pays, il intéresse plus les journalistes que les services de police. En Libye, l’ancien professeur d’arabe à Dublin s’apprête à convertir sa notoriété en capital politique. Il vient ainsi d’annoncer la création d’un parti, après avoir laissé entendre que le Premier ministre, Ali Zeidan, l’avait approché pour le poste de ministre de l’Intérieur. Même les anciens d’Afghanistan les plus carriéristes n’avaient pas réussi une conversion aussi rapide. l yousseF aït akdim jeune afrique


Maghreb Moyen-Orient

SAMIR SID

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ALGÉRIE

La désignation du successeur d’Abdelaziz Belkhadem a été reportée sine die.

FLN: y a-t-il un pilote dans l’avion? Un secrétaire général destitué, un président de la République en convalescence prolongée, une base désemparée. La première force politique du pays traverse depuis trois mois une crise sans précédent.

D

epuis la destitution, en février, de son secrétaire général, Abdelaziz Belkhadem, par un vote de défiance du comité central, le Front de libération nationale (FLN, ex-parti unique) traverse une crise institutionnelle sans précédent. Jamais, au cours de ses six décennies d’existence, la première force politique du pays n’était restée aussi longtemps « sans véritable patron ». Miné par des courants aux intérêts divergents, le comité central s’est montré incapable de s’entendre pour désigner une nouvelle direction. En attendant des jours meilleurs, les clés de la maison FLN ont été confiées au doyen des membres du bureau politique (BP) : Abderrahmane Belayat, 74 ans. Pour ajouter à la confusion née de la vacance du poste de secrétaire général, voilà que le président d’honneur du parti, Abdelaziz Bouteflika, par ailleurs chef de l’État, est, depuis le 27 avril, en convalescence prolongée dans un centre de repos parisien. Résultat des courses : après de multiples reports, la réunion du comité central devant désigner le successeur de JEUNE AFRIQUE

Belkhadem, prévue initialement en mai, a été renvoyée sine die.

Premier ministre de Chadli Bendjedid et rival malheureux de Bouteflika en 1999. « La composante hétéroclite est plus un atout qu’une faiblesse, assure Lakhdar Dorbani, ex-ministre du Tourisme. Ce ne sont pas des individus qui ont grandi le FLN, mais plutôt le FLN qui les a fait grandir. » Un bel exercice de langue d’ébène. D’autant que, la veille de notre entrevue, Belayat a pris une décision importante

COURANTS. Cette crise survient au pire moment, puisque l’Algérie est à moins de un an de la présidentielle cruciale d’avril 2014. « Cela ne signifie pas pour autant que la machine est en panne », rassure Belayat, qui, pour recevoir J.A. au siège du FLN, à Hydra, sur les hauteurs d’Alger, a cru bon de réunir autour de lui la moitié du BP. En attendant des jours meilleurs, « Ce n’est pas un manque les clés du parti ont été confiées d’assurance ou la nécesà Abderrahmane Belayat. sité impérieuse d’avoir des témoins, nous explique-t-il, mais pour vous prouver notre cohésion et concernant le fonctionnement interne la sérénité qui caractérise notre fonctiondu parti. Le 6 juin devaient se tenir des nement. » Parmi les présents, des repréélections au sein du groupe parlementaire sentants des différents courants – même du FLN pour désigner ses représentants au si Belayat récuse ce terme – qui animent bureau de l’Assemblée populaire nationale la vie du parti : un partisan du retour (APN). Belayat a tout simplement annulé d’Ali Benflis, ancien secrétaire général la consultation et décidé que le choix du limogé en 2004 pour s’être présenté à la vice-président de l’APN et des membres présidentielle contre Bouteflika, un fidèle des différentes commissions du Parlement d’Abdelaziz Belkhadem et un incondireviendrait à la direction du parti, autretionnel de Mouloud Hamrouche, ancien ment dit à lui-même et aux membres du N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013


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Maghreb Moyen-Orient BP. Recul démocratique ? « Pas du tout, rétorque Belayat. Hormis le titulaire du perchoir, le bureau de l’APN est renouvelé chaque année. Les membres FLN de l’équipe sortante ont toujours été désignés par la direction. Ceux qui achèvent aujourd’huileurmandatontétéchoisispar Belkhadem. Nous avons voulu innover en optant pour un processus électoral, mais, très vite, nous avons relevé des dérives et l’intervention des puissances de l’argent dans le choix de nos représentants. » « CHKARA ». Cette décision n’a pas été sans aggraver les clivages au sein du FLN. Carquiditdérivesditdysfonctionnements. « Je ne suis pas un enfant de chœur, mais je récuse le terme de dysfonctionnement, lequel aurait convenu si nous avions laissé se poursuivre un processus biaisé par l’achat de voix et le recours abusif au vote par procuration. » En cause : la chkara (« le sac », c’est-à-dire le pot-de-vin). « Ce mal ronge notre parti depuis l’entrée en fonction de la direction sortante », déplore Abdelkader Cherar, ex-député de Boufarik, membreduBP.IlestimmédiatementinterpelléparunpartisandeBelkhadem:«Cette pratique est antérieure à l’avènement du secrétairegénéraldestitué.»L’incidentn’ira pas plus loin. Wahid Bouabdallah, ancien PDG d’Air Algérie, aujourd’hui député FLN et candidat au poste de vice-président de l’APN,regrettel’annulationduscrutin,mais reconnaît le bien-fondé de cette décision « dictée par un souci de moralisation de la vie interne du parti. Confier le choix au bureau politique est un garde-fou pour prévenir l’arrivée de gens incompétents à des postes stratégiques ». Le phénomène de la chkara concerne aussi le choix du futur patron du parti. Le nom d’Amar Saïdani, ancien président de l’APN (2004-2007), qui a circulé avec

insistance, a aussi été cité par la presse… général, la convalescence prolongée de dans plusieurs affaires de détournement son président d’honneur et les convulde deniers publics. Pis: cette candidature sions qui secouent ses instances, le FLN controversée aurait été imposée « d’en demeure une redoutable machine électohaut ». Un membre du comité central rale (il a largement remporté les derniers scrutins législatif et local), ose un « à quelque chose malheur est bon » à prodont le rôle sera détermiLes secrétaires nant lors de la prochaine pos de l’accident de santé généraux du FLN de Bouteflika. « Si le préprésidentielle. Optimiste, 1962-1963 sident n’avait pas eu cette Belayat, du haut de son Mohamed Khider demi-siècle d’engagement, attaque cérébrale, nous aurions ce triste personest persuadé que le parti 1963-1965 nage à la tête du parti. » conservera son statut de Ahmed Ben Bella Belayat tempère quelque locomotive du courant 1965-1967 peu le propos. « Bouteflika nationaliste, « seul rempart ne s’est jamais immiscé contre la montée du péril Cherif Belkacem dans le fonctionnement islamiste ». « Notre candi1967-1972 du parti ; en revanche, son dat naturel pour 2014 est Kaïd Ahmed entourage… » Plus de préAbdelaziz Bouteflika, pourcisions ? « Je ne donnerai suit Belayat. S’il décide de 1973-1980 aucun nom », tranche-t-il. ne pas se présenter, nous Mohamed Salah Yahiaoui D’autres responsables du aviserons. » Qui nous? « Le FLN se font plus explibureau politique. » Mais 1980-1988 cites, mais sous le sceau Mohamed Cherif Messadia l’absence de Bouteflika de l’anonymat: « C’est Saïd a placé l’article 88 de la 1988-1996 Constitution (empêcheBouteflika, frère et conseilAbdelhamid Mehri ment du président pour ler spécial du président, qui est derrière la candidature raisons médicales) au 1996-2001 de Saïdani. » L’argument centre du débat. « Si par Boualem Benhamouda de l’influent frère cadet du malheur cela devait arriver, je peux vous garantir, chef de l’État est d’ordre 2001-2004 régional : Saïdani est oriaffirmeBelayat,queceparti Ali Benflis ginaire du Sud, une région est capable de se doter, 2004-2013 qui n’a pas de représentant en quarante-huit heures, dans les institutions du d’une nouvelle direction Abdelaziz Belkhadem (destitué) pays. « Ce raisonnement ne pour participer activement tient pas la route, analyse à l’élection d’un nouveau président de la République. » Le FLN auraun membre du BP, car le Sud regorge de t-il un candidat en cas de présidentielle militants compétents et intègres, autant de critères que ne remplit pas le candidat anticipée ? « Au moment opportun, nous de Saïd. » Toujours est-il que l’état de santé aviserons. » En clair, le parti est d’abord de Bouteflika a bloqué le processus qui à l’écoute des instructions venues « d’en devait conduire Saïdani à la tête du parti. haut ». ● Malgré la destitution de son secrétaire CHERIF OUAZANI, envoyé spécial à Alger

Jeudi 20 juin 2013 de 17h à 20h

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Maghreb Moyen-Orient

Nir AloN/Demotix/Corbis

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p Une Israélienne portant le châle de prière et les phylactères à la manière des hommes. Israël

Loué soit l’Éternel de m’avoir faite femme Estimant leur démarche légale, la justice autorise un groupe de juives réformistes à prier librement au mur des lamentations. À la grande fureur des ultraorthodoxes.

C

e 10 mai 2013 devait être un jour de fête pour quelque deux cents activistes juives, membres de l’organisation Nashot HaKotel (« les Femmes du Mur »). Après vingt ans de combat judiciaire acharné, un tribunal de Jérusalem leur permettait enfin de tenir un office religieux à tue-tête au Mur des lamentations, lieu le plus sacré du judaïsme. Cette décision, historique, a été unanimement saluée par les courants réformistes, très en vogue aux États-Unis. En revanche, elle a été perçue comme un blasphème par les adeptes de l’ultraorthodoxie. Il faut dire que ces féministes chevronnées ne revendiquent pas un simple droit à la prière collective. Elles aspirent, comme les hommes, à lire la Torah et à sonner le chofar (sorte de cor), allant même jusqu’à s’accaparer les attributs masculins, puisqu’elles portent la kippa, jeune afrique

méthodiquement caillassés. Jamais le Mur des lamentations n’avait été le théâtre d’une telle foire d’empoigne.

sexisme. L’égalité hommes-femmes ne semble pas du goût des haredim (« craignant-Dieu »), qui, à l’évidence, ne respectent que la « justice divine ». Reste que pour se dédouaner de tout sexisme, deux des plus grandes figures du judaïsme orthodoxe, le rabbin séfarade Ovadia Yossef et le rabbin ashkénaze Aharon Steinman, avaient appelé les étudiantes religieuses à se mobiliser en nombre devant le Kotel afind’empêcherles Femmes À l’entame des chants liturgiques, du Mur de s’en approcher. des chaises, des œufs et autres « Dans ce lieu saint, il y a une détritus volent dans leur direction. place pour chaque juif mais pas pour chaque opinion, l’entame des premiers chants liturgiques, se défend le rabbin Shmuel Rabinowitz, des chaises, des œufs et autres détritus maître des lieux depuis 1995. Ces femmes n’ont qu’un but : attiser les flammes de la volent dans leur direction, obligeant les haine et de la discorde entre les juifs. » forces de l’ordre à intervenir. Dans une Dans les faits, la loi juive (Halakha) pagaille inouïe, le groupe doit rebrousse montre beaucoup plus nuancée. Si ser chemin. Les autobus qui les attenles femmes ne sont pas tenues de prier, daient à l’extérieur du site sont à leur tour

se recouvrent du traditionnel châle de prière (le talit) et de phylactères (les téfilines), deux petits boîtiers noirs renfermant des versets bibliques qui s’attachent sur le front et autour de l’avant-bras. Bien qu’escortées par un imposant cordon policier, ces étranges visiteuses arrivent sous les crachats et les huées d’une foule d’« hommes en noir ». À

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Maghreb Moyen-Orient comme les hommes, plusieurs fois par jour, c’est pour qu’elles n’aient pas à se détourner un instant de leur rôle d’épouse et de l’éducation de leurs enfants. Par ailleurs, bien qu’aucune interdiction formelle ne soit clairement énoncée, les femmes doivent prier silencieusement, à l’écart des hommes, pour ne pas les perturber dans leurs actes ou gêner ceux qui ne savent pas lire. Cette séparation n’a pas toujours prévalu au Mur des lamentations, comme en témoignent les nombreuses photographies prises au début du siècle dernier. Mais, en 1967, après la conquête militaire de la vieille ville de Jérusalem, ce lieu saint est passé sous le contrôle du Grand Rabbinat d’Israël, lequel y a imposé une réglementation stricte. Aujourd’hui, toute tentative d’enfreindre le bon ordre orthodoxe se paie cher. Les réfractaires encourent jusqu’à un an de prison et se voient infliger une amende de 3 000 shekels (un peu plus de 600 euros). pressions. Anat Hoffman, fondatrice

de l’association des Femmes du Mur en 1988, a déjà été interpellée une demidouzaine de fois par la police. Seul son statut de membre du conseil municipal de Jérusalem lui a permis d’échapper à des sanctions trop lourdes. « Il n’y a pas de liberté, car pour les ultras les femmes n’existent pas [en référence à la prière juive du matin : “Loué soit l’Éternel de ne pas m’avoir fait femme”], s’indignet-elle. Nous ne cherchons pas à créer la polémique, mais il est grand temps

réforMisMe trioMphant AlorS Que lA QueSTIon de la future souveraineté sur le Mur des lamentations reste l’une des principales pierres d’achoppement entre Israéliens et Palestiniens, ce haut lieu du judaïsme apparaît avant tout comme un enjeu symbolique pour les juifs libéraux. Car, dans

les faits, la ville de Jérusalem compte déjà plusieurs synagogues issues du mouvement réformiste (180 000 membres en Israël), qui tend à offrir une plus grande représentativité aux femmes dans la vie sociale et religieuse. Bien qu’ils reprennent certaines pratiques du

judaïsme orthodoxe, les réformistes permettent aux juives de participer à la lecture de laTorah et aux prières de façon égalitaire. Par ailleurs, depuis la pionnière américaine Amy eilberg, en 1985, près de 187 femmes ont accédé au statut de M.p. rabbin. l

de nous laisser prier comme bon nous semble. Après tout, la moitié du peuple juif est composé de femmes. » Anat Hoffman et ses comparses ont obtenu une première fois gain de cause en mai 2002, bénéficiant d’une décision favorable de la Cour suprême israélienne.

payant –, pour permettre à ces militantes libérales de pratiquer leurs rites… à l’abri des regards. Dix ans plus tard, les Femmes du Mur sont loin de se satisfaire de ce statu quo. Dernièrement, elles ont reçu le soutien de la jeune députée travailliste Stav Shaffir, ou encore de Tamar Zandberg, du parti d’extrême gauche Meretz. « Je au début du siècle dernier, suis une femme laïque, mais je hommes et femmes priaient m’identifie à cette lutte. Les femmes ensemble devant le Mur. doivent pouvoir prier normalement », s’exclame-t-elle. Pour Mais face à la pression des partis religieux, apaiser les tensions, le Premier ministre, qui menaçaient de porter la bataille à Benyamin Netanyahou, vient de charger Nathan Sharansky, actuel directeur de la Knesset, la plus haute instance judil’Agence juive, d’une délicate mission : ciaire de l’État hébreu fit machine arrière. aménager un nouvel espace mixte de Elle demanda néanmoins l’ouverture de prières. l l’Arche de Robinson, un site archéoloMaxiMe perez, à Jérusalem gique adjacent au Kotel – dont l’accès est

Coulisses Égypte plainte contre X Très légèrement vêtus devant une caméra, dix Géorgiens soupçonnés d’être en train de tourner un film porno ont été conduits manu militari, le 1er juin, au commissariat de Hurghada, station balnéaire du Sinaï. Ils ont été relâchés quelques heures plus tard, après que les autorités eurent visionné quelques belles séquences de plongée sur leur caméra. Avec les n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

excuses de la police, qui a regretté « l’inexpérience » d’un agent trop zélé.

arabie saoudite Jeu de main, Jeu de vilain Inhabituel verdict au royaume du machisme : le 4 juin, à Qatif, dans l’est du pays, un homme a été condamné à recevoir trente coups de fouet sous les yeux de sa femme, qui avait porté plainte après avoir reçu une gifle.

Il devra également suivre des « cours de formation sur la vie de couple ». Cette condamnation survient deux mois après le lancement d’une campagne contre les violences domestiques.

iran en vert et contre le guide À dix jours de l’élection présidentielle iranienne, dont ont été exclus tous les candidats proches des réformateurs, les

funérailles d’un religieux qui leur était favorable ont tourné à la manifestation contre le régime. Des milliers de personnes qui formaient le cortège funèbre de l’ayatollah Taheri, à Ispahan, se sont mises à scander des slogans hostiles au Guide, Ali Khamenei, autorité suprême du pays. Pareille manifestation n’avait pas eu lieu depuis la répression, en 2009, du Mouvement vert, qui contestait la réélection de Mahmoud Ahmadinejad. jeune afrique


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La RDC sur le chemin de l’émergence

Son Excellence Joseph Kabila Kabange, Président de la République démocratique du Congo, pose la première pierre de l’hôpital du Cinquantenaire, à Kinshasa.

Depuis cinq ans, Kinshasa et Pékin mettent en œuvre un Projet de coopération exceptionnel qui doit contribuer à l’émergence de la République démocratique du Congo. Exceptionnel, ce projet, qui concerne la réalisation d’infrastructures et l’exploitation de mines congolaises, via la Sicomines, jointventure minière de droit congolais, l’est à plusieurs titres. Par son niveau, qui dépasse six milliards de dollars d’investissements chinois, c’est le plus important partenariat jamais réalisé en RDC. Par sa nature, celle d’un accord d’échange investissements contre exploitation commune des matières premières, il peut être un nouveau modèle pour l’Afrique, à même de dépasser les conditionnalités imposées par les bailleurs de fonds traditionnels et qui ont ralenti le développement du continent.

PUBLI-INFORMATION

Construction de l’axe Lubumbashi-Kasomeno sur la RN4 dans le cadre du Projet Infrastructures.


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La RDC sur le chemin de l’émergence

PUBLI-INFORMATION

R

econstruire la République démocratique du Congo. C’était l’un des trois objectifs fixés par Son Excellence Joseph Kabila Kabange, Président de la République, lors de son discours d’investiture du 26 janvier 2001. Les deux premiers – ramener la paix et organiser des élections – ayant été réalisés, le Chef de l’État, double vainqueur de la présidentielle de 2006 et celle de novembre 2011, s’est lancé dans la réalisation de sa vision : « La Révolution de la Modernité » dont le programme dit des « 5 Chantiers de la République » avait été la préconfiguration.

Moïse Ekanga, Secrétaire Exécutif du BCPSC devant la presse lors de la présentation du bilan du Projet de Coopération Sino-Congolais.

Un objectif : « l’émergence à l’horizon 2030 » Cette nouvelle promesse électorale consiste à reconstruire son pays et à l’inscrire au rang des pays émergents à l’horizon 2030. Pour cela, la RDC doit concentrer ses maigres ressources sur quelques secteurs vitaux : les infrastructures et les voies de communication, l’éducation, la santé, la desserte en eau et en électricité, le logement et l’emploi. Elle doit également chercher l’appui de partenaires extérieurs dans le cadre de partenariats gagnant-gagnant. C’est pourquoi plusieurs équipes d’experts se sont lancées, dès 2007, à travers le monde, à la recherche de partenaires à même d’accompagner la RDC dans sa quête d’émergence. L’une d’elles, en juin 2007, débute des discussions avec la China Development Bank (CDB) et l’Export Import Bank of China (Exim Bank), ainsi qu’avec les entreprises CREC (China Railway Engeneering Corporation) et Sinohydro. Celles-ci débouchent en septembre sur la signature d’un protocole d’accord considéré comme l’ancêtre de la Convention de collaboration du 22 avril 2008, signée entre la RDC et le Groupement d’entreprises chinoises, et qui consacre le Projet sino-congolais. Conformément aux principes chinois de non-ingérence, ce projet n’est assorti d’aucune conditionnalité de gouvernance. Il prévoit l’embauche de 10 000 travailleurs, dont 7 000 Congolais, et d’importants programmes de formation. L’accord prévoyait également la mise en place d’une structure multisectorielle investie d’un rôle d’interface entre les différentes parties et entités intéressées par le Projet en vue d’en garantir le suivi de la mise en œuvre et l’évaluation : c’est le BCPSC, Bureau de Coordination et de Suivi du Programme Sino-Congolais. Le BCPSC sert, en même temps, de guichet unique pour toutes les questions et formalités relatives à l’exécution de tâches définies dans la Convention. Son

rôle consiste aussi à assurer les négociations avec les banques ou institutions financières pour obtenir tout appui supplémentaire en vue de réussir la mise en œuvre de différents projets. Depuis sa création, le BCPSC est dirigé avec beaucoup de professionnalisme et de doigté par M. Moïse Ekanga Lushyma, Secrétaire Exécutif.

DEUX PARTENAIRES, DEUX OBJECTIFS Intervenant au cours du déjeuner de presse qu’il a animé fin mai à l’occasion des 5 ans de la Convention, M. Moise Ekanga est revenu sur le caractère gagnant-gagnant de cet accord. « Chaque partie contractante y trouve son intérêt », a souligné le Secrétaire Exécutif du BCPSC. Le Gouvernement de la RDC bénéficie, à travers ce Projet, des ressources financières nécessaires à la réalisation de ses projets d’infrastructures jugés prioritaires, alors que le Groupement d’entreprises chinoises investit dans le domaine des métaux non ferreux sur le territoire de son partenaire.» CREC et Sinohydro se sont ainsi engagées à construire 3 000 kilomètres de routes, autant de voies de chemin de fer, 31 hôpitaux de 150 lits, 145 centres de santé ou encore 4 universités. Les contreparties congolaises concernent l’exploitation de 10 millions de tonnes de cuivre (soit 6,5 millions de tonnes de cuivre raffiné), 200 000 tonnes de cobalt et 372 tonnes d’or. La valeur de ces biens exportés, au prix actuel, est estimée à 3 milliards de dollars. Dans une première étape, la totalité de l’exploitation minière servira à rembourser le coût des travaux. Par la suite, les bénéfices seront répartis entre les partenaires.

DES OBLIGATIONS RESPECTIVES Pour traduire ces exigences sur le terrain, la RDC s’est engagée à : • céder les droits et titres miniers couvrant les gisements miniers de Dikuluwe et


Les travaux de réhabilitation et de modernisation de l’Hôpital du Cinquantenaire de l’Indépendance ont été effectués dans le cadre du Projet de Coopération Sino-Congolais.

Mashamba à la joint-venture créée en 2008, la Sino-Congolaise des mines SARL (Sicomines), avec comme actionnaires le Groupe Gécamines, détenant 32 % des parts, et le Groupement d’entreprises chinoises, détenteur de 68 % des parts; • obtenir l’adoption par l’Assemblée Nationale d’une loi devant sécuriser le régime fiscal, douanier et de change du Projet de coopération. Le Groupement d’entreprises chinoises s’est engagé à : • mobiliser et mettre en place le financement nécessaire à la réalisation du Projet de coopération dans ses volets Infrastructures et Mines.

Naissance d’un partenariat win-win Dans le cadre du projet, la Sicomines SARL, entreprise de droit congolais, joue un rôle pivot de plateforme financière. Elle emprunte, finance le Projet d’Infrastructures et le Projet Minier et assure le remboursement des revenus d’exploitation minière. De quoi permettre d’éviter un accroissement de la pression sur la dette de l’État Congolais. Les fonds levés par les entreprises chinoises sont garantis par ces dernières, ainsi que par la Sicomines, détentrice des droits et titres miniers. La Sicomines a entre autres pour obligations de commercialiser les produits qui seront issus du traitement métallurgique des minerais aux prix les plus rémunérateurs du marché international, et selon les stratégies les plus performantes, dans l’intérêt des parties. Le remboursement des financements du Projet d’Infrastructures et du Projet Minier est assuré par 66 % du bénéfice d’exploitation de la Sicomines. Le solde, soit 34 %, est distribué aux actionnaires au titre de dividendes.

DES ENGAGEMENTS FINANCIERS RECORDS Au plan financier, les engagements des entreprises chinoises consistent à mobiliser : • 3 milliards de dollars pour le Projet d’infrastructures, et non plus six milliards, à la demande du Gouvernement de la RDC, pour intégrer les préoccupations soulevées par le Fonds Monétaire International et d’autres bailleurs de fonds traditionnels ; • 3,2 milliards de dollars pour le développement du Projet minier, dont 30 % au titre de prêt d’associés sans intérêt ; • 350 millions de dollars au titre de « pas de porte » ; • 32 millions de dollars au titre de prêt d’associés en faveur de la Gécamines pour sa participation au capital social de la Sicomines Sarl ; • 50 millions de dollars de prêt à la Gécamines en vue de la réhabilitation de ses ateliers de Panda.

Le Projet sino-congolais : ça marche déjà LE PROJET D’INFRASTRUCTURES Dès le mois de janvier 2009, un prêt de 350 millions de dollars de l’Exim Bank of China a été accordé à la Sicomines pour financer la première tranche des travaux d’infrastructures. Cela a permis de donner les premiers coups de pioche, notamment sur le Boulevard du 30 juin de Kinshasa, l’Avenue du tourisme, la Bretelle de Lutendele, le tronçon routier

Les secteurs vitaux de la RDC : les infrastructures, l’éducation, la santé, la desserte en eau et électricité, le logement et l’emploi. Lubumbashi–Kasomeno sur la Route nationale 5 ou encore sur le chantier de l’Hôpital du Cinquantenaire, dont les travaux ont déjà été achevés et dont le personnel est en cours de recrutement. Ce prêt a été suivi en juin 2010 par un second, d’une valeur de 118 millions de dollars, pour financer la seconde tranche des travaux d’infrastructures. Outre les travaux proprement dits, il concerne également l’acquisition d’une unité de production de préfabriqués pour le volet habitat et l’acquisition de groupes électrogènes pour accroître le taux de desserte en électricité de certains chefslieux de provinces. La partie congolaise a de son côté respecté ses engagements financiers en débloquant 328 millions de dollars en août 2012, consacrés au projet de centrale hydroélectrique à Busanga.

LE PROJET MINIER En janvier 2009, le Groupement d’entreprises chinoises à décaissé 518 millions de dollars en faveur du Projet

STRUCTURE, À LA CONSTITUTION, DE LA SINO-CONGOLAISE DES MINES, UNE ENTREPRISE DE DROIT CONGOLAIS

• CONSORTIUM D’ENTREPRISES CHINOISES - China Railway Group : 27 % - China Railway Resources Development : 6 % - Sinhydro International : 26 % - Sinhydro Harbour : 4 % - Huayou : 5 % • GROUPE GÉCAMINES - Gécamines : 20 % - Simco : 12 %


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minieretautitre de la dépensepréliminaire. En 2012, un autre financement, de l’ordre de 370 millions de dollars, a été accordé à la Sicomines. Les entreprises chinoises ont libéré la totalité du « pas de porte », à raison de 50 % en 2009 et le solde en 2012. Elles ont également versé à la Sicomines 32 millions de dollars destinés à la Gécamines, tandis que les formalités de paiement des 50 millions de dollars restants sont en cours. Les travaux sur terrain ont été officiellement lancés le 16 avril dernier et suivant les prévisions, la première production est attendue à la fin de l’année 2015.

le domaine minier, prenant l’exemple du partenariat entre entreprises chinoises et congolaises dans la Sicomines, les entreprises minières nationales améliorent leurs positions dans les différents partenariats signés avec les entreprises étrangères. Enfin, dans le domaine de la reconstruction, le Projet de Coopération a inauguré une nouvelle ère avec l’afflux de matériels et d’équipements de génie civil favorisant la concurrence, la formation d’une main d’œuvre nationale qualifiée et la réduction du prix des matériaux de construction.

CONFIANCE ET COLLABORATION SAINE

DES LENDEMAINS QUI CHANTENT

Au vu de son importance, l’exécution de la Convention de collaboration était subordonnée à la réalisation de l’étude de faisabilité du Projet minier et à son approbation par la RDC et la République Populaire de Chine. Or, les décaissements en faveur des projets d’infrastructures et les premiers travaux ont été donnés avant ces approbations, tombées au second semestre de l’année 2010 en RDC et au deuxième semestre de l’année 2011 en Chine. De quoi prouver la confiance et la bonne collaboration entre les deux parties.

Moïse Ekanga illustre la pertinence du Projet de coopération en citant une série de projets qui bénéficient des effets induits de cet accord via des contrats d’études ou des travaux négociés par le Gouvernement de la RDC ou par les entreprises publiques d’un côté avec les entreprises chinoises comme CREC et Sinohydro, de l’autre.… C’est le cas des projets de construction de la centrale hydroélectrique de Zongo II (en exécution), de nouvelles aérogares de Ndjili et de la Luano ou des lignes de transport d’électricité et autres (5 lots). C’est aussi le cas des projets de modernisation de la piste de l’aéroport international de Ndjili (en exécution), de l’aérogare de Bangboka (Kisangani), du chemin de fer Kinshasa – Matadi et du port de Matadi. Il y a aussi les projets d’implantation d’une unité de montage et de fabrication de compteurs BT à prépaiement et un autre concernant

DES EFFETS D’ENTRAÎNEMENT POSITIFS DÉJÀ VISIBLES

PUBLI-INFORMATION

Sur le plan international, le projet de coopération sino-congolais montre à l’opinion que la RDC est un partenaire crédible avec lequel on peut négocier. Dans

350 millions de dollars de l’Exim Bank of China ont permis de financer la première tranche des travaux d’infrastructures.

Vue du Boulevard du 30 Juin à Kinshasa modernisé grâce à l’apport financier du Projet de Coopération Sino-Congolais.

le déploiement de la fibre optique (Phase 2) Kinshasa – Kasumbalesa. Tous ces projets sont financés ou à financer par Exim Bank of China. Moïse Ekanga reste également convaincu qu’en ce qui concerne le développement des infrastructures et l’exploitation commune des mines, le meilleur, pour les deux parties et surtout pour l’économie congolaise, est à venir. « Contrairement aux contrats de partenariat conclus entre les entreprises publiques du secteur minier et certaines sociétés étrangères, note-t-il, les ressources du pays, dans le cadre de la Convention d’avril 2008, sont mises en exploitation afin de réaliser les infrastructures qui sont mises au service de tous les secteurs d’activités et améliorent la vie de la population.» Notons qu’après le redimensionnement du Projet minier, à l’initiative des parties, la première tonne de cuivre de Sicomines Sarl est attendue en 2015 et non, comme initialement prévu en 2017. Le Projet de Coopération pourra alors atteindre sa vitesse de croisière en termes d’investissements, en infrastructures et éventuellement ouvrir la voie à l’obtention d’une nouvelle ligne de crédit, en fonction des résultats du Projet minier. En se plaçant dans la perspective de la démarche novatrice et pragmatique du Président Joseph Kabila Kabange qui tend, grâce à la Révolution de la Modernité, à conduire le Congo vers le rendez-vous de l’émergence en 2030 et des pays développés à l’horizon 2050, il va sans dire que ce Projet de coopération avec le Groupement des entreprises chinoises reste une des meilleures garanties de réussite que le Gouvernement de la RDC s’est données.

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La RDC sur le chemin de l’émergence


Europe, Amériques, Asie

TURQUIE

Quand le calife trébuche En réprimant brutalement de pacifiques manifestants, le 31 mai à Istanbul, Recep Tayyip Erdogan a provoqué la première grande vague de contestation populaire depuis la fondation de la République, en 1923. « Printemps turc » ou remake de Mai 68 ? JOSÉPHINE DEDET

LOUAFI LARBI/REUTERS

Ì Le Premier ministre turc au cours de sa visite à Alger, le 4 juin.

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Europe, Amériques, Asie

L

a reconstruction d’une caserne ottomane (à la gloire du passé), l’érection d’un centre commercial (à la gloire du business), l’édification d’une mosquée (à la gloire de Dieu). C’est par ce triple hommage aux valeurs de la petite bourgeoisie dévote et affairiste qui forme le noyau de son électorat que Recep Tayyip Erdogan envisageait de remodeler la place Taksim, cœur battant d’Istanbul. En projetant d’y détruire un espace vert attenant (le parc Gezi) et un centre culturel consacré à Mustafa Kemal Atatürk, le père de la nation, le Premier ministre islamo-conservateur aurait du même coup nargué le camp laïque et pris une revanche sur l’Histoire. Mais celui que ses détracteurs surnomment le calife en raison de sa conception autoritaire du pouvoir a trébuché. La brutalité avec laquelle la police s’en est prise à un groupe de défenseurs du parc Gezi a provoqué l’indignation de la population. Partie de la place Taksim le 31 mai, la révolte s’est étendue à Ankara et à 77 villes. Tirs tendus de grenades lacrymogènes, matraquages, usage de canons à eau et de véhicules blindés… Totalement infiltrée par Erdogan, qui, en quelques années, en a triplé les effectifs, la police a déployé un arsenal de guerre face à des manifestants pacifiques. Bilan provisoire: 3 morts et plus de 4000 blessés, selon les syndicats de médecins. Et 1700 personnes arrêtées, parfois pour avoir simplement envoyé des messages sur Twitter – réseau social dans lequel le Premier ministre croit discerner une « menace pour la société ». LÉGITIMITÉ. Mettant à profit son absence – il était

en tournée au Maghreb –, Abdullah Gül, le président, et Bülent Arinç, le vice-Premier ministre, ont regretté l’usage disproportionné de la force, présenté des excuses aux blessés et reçu une délégation d’opposants au projet immobilier. Avant son départ, Erdogan avait au contraire multiplié les provocations à l’égard des manifestants et, réfutant le terme de « printemps turc », insisté sur la légitimité qu’il tient des urnes. Certes, depuis 2002, il a mené à sept reprises le Parti de la justice et du développement (AKP) à la victoire, améliorant sans cesse son score jusqu’à frôler les 50 % aux législatives de 2011. Pourtant, en déniant à l’autre moitié du pays le droit de s’exprimer, en traitant les manifestants de « pillards » à la solde de « puissances étrangères » et en menaçant de lancer contre eux 200000 de ses partisans, il a tenu des propos que n’auraient pas reniés les despotes renversés par le Printemps arabe. Son absence flagrante de culture démocratique lui a été renvoyée tel un boomerang par son « frère » Gül, issu lui aussi de l’AKP mais qui se positionne désormais comme un rival dans la perspective de la présidentielle de 2014. « La démocratie ne se traduit pas seulement par le vote, mais aussi par N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

l’acceptation de points de vue différents », a estimé le président. À Rabat, quand on lui a rapporté ces propos, Erdogan a blêmi de rage. Il ne sera pas facile à cet homme colérique et « rancunier comme un chameau » « Comme la France en (dixit Rusen Çakir, son biographe) 1968, la Turquie s’ennuie. de calmer le jeu. Un temps banni de la vie publique et jeté en prison, Mais elle se réveille. » puis menacé par une armée putschiste qu’il est peu à peu parvenu à affaiblir, ce battant de la politique succombe depuis deux ans à l’ivresse des cimes, au point que ses propres conseillers s’en inquiètent en privé. Il ferait bien pourtant de cesser de mépriser des manifestants jusqu’ici ni politisés ni organisés (lire encadré). Cette fronde pourrait coûter à l’AKP la municipalité d’Istanbul en 2014. Et à Erdogan, le fauteuil présidentiel qu’il convoite. Car ce mouvement n’a rien à voir avec les démonstrations Depuis 2002, de force du camp laïque, en 2007-2008. Ni avec l’AKP un conflit circonscrit à une catégorie sociale (les a remporté ouvriers, en 1971) ou à une minorité ethnique (la rébellion kurde, depuis trente ans). Il s’agit de la 7 élections première révolte populaire depuis la fondation de la d’affilée. République, en 1923. Une révolte citoyenne, spon3 législatives tanée, certes uniquement citadine mais englobant (2002, 2007, 2011) toutes les catégories sociales, toutes les classes d’âge 2 municipales et, désormais, deux syndicats. Elle traduit l’immense (2004, 2009) ras-le-bol d’une moitié de la société qui étouffe dans le corset de l’islamisme, fût-il « modéré ». 2 référendums (2007, 2010) « Erdogan décrète tout ce qu’il faut qu’on fasse, JEUNE AFRIQUE


BURHAN OZBILICI/AP/SIPA

Quand le calife trébuche

on en a marre », s’exclame un groupe de jeunes, parmi lesquels deux filles voilées. « C’est une sorte de Mai 68, commente un étudiant francophile. À l’époque, Pierre Viansson-Ponté avait écrit dans Le Monde un article prémonitoire intitulé “La France s’ennuie”. Eh bien, la Turquie s’ennuie. Et elle se réveille. Elle veut une vraie démocratie, un vrai pluralisme. » « C’est la révolte de “l’autre” : le Kurde, l’alévi, l’opposant, le laïque, l’homosexuel, la féministe, l’artiste… Tous ceux qui refusent que le pouvoir supprime nos libertés individuelles et s’attaque à notre mode de vie », résume un autre.

Affrontements entre jeunes manifestants et forces de sécurité, à Ankara, le 2 juin.

INFÉODÉS. Les libertés individuelles ? Elles ont

régressé depuis deux ans : élus et cadres du Parti pour la paix et la démocratie (BDP, pro-Kurdes) emprisonnés, universitaires censurés, artistes de renommée internationale (comme le pianiste Fazil Say) harcelés par la justice et condamnés… Avec 72 professionnels des médias incarcérés à la fin de 2012, la Turquie est la première prison au monde pour les journalistes, selon Reporters sans frontières. Muselés ou inféodés au gouvernement, les médias ont d’abord fait silence sur les événements de la place Taksim, avant d’être contraints de réagir sous la pression d’une population furieuse d’être laissée dans l’ignorance et qui s’informait grâce aux réseaux sociaux. Le mode de vie ? Depuis des mois, le gouvernement a engagé une islamisation rampante de l’enseignement et multiplié les interdictions : défense JEUNE AFRIQUE

de s’embrasser dans la rue, de se farder les lèvres pour les hôtesses de Turkish Airlines, de vendre de l’alcool à proximité des mosquées et des écoles… Pour justifier cette prohibition, le Premier ministre a fustigé « l’alcoolique » (entendez : Atatürk) qui avait autorisé cette vente, provoquant l’ire des milieux kémalistes. Il a décrété l’ayran [sorte de yaourt salé] « boisson nationale » et déconseillé de regarder Le Siècle magnifique, série télévisée exportée dans le monde entier qui évoque la vie, à ses yeux trop dissipée, du sultan Soliman. Il somme les femmes de faire au moins quatre enfants, compare chaque avortement à un « Uludere », du nom de ce village où, fin 2011, l’armée tua 34 Kurdes en les prenant pour des guérilleros du PKK sans que nul ne daigne expliquer l’origine de cette « bavure ». Ce manque de respect à l’égard des victimes s’exerce aussi quotidiennement à l’encontre des alévis, une minorité chiite progressiste qui compte 20 millions de fidèles. Un exemple ? Le troisième pont sur le Bosphore dont Erdogan a décidé la construction sera baptisé Yavuz Sélim, du nom du sultan qui, au XVIe siècle, massacra plus de 40 000 alévis. Ce pont fait partie des projets pharaoniques d’Erdogan, dans lesquels Çalik Holding, le groupe de BTP que dirige son gendre, n’est pas oublié. Le Premier ministre les a conçus en vue de la présidentielle de 2014 et de la célébration du centenaire de la République, en… 2023. C’est dire son ambition de s’éterniser au pouvoir et de supplanter Atatürk dans les mémoires. Il conserve pour cela trois atouts. D’abord, ses très bonsrésultatséconomiques.Ensuite,lesoutiendela bourgeoisie provinciale, qui s’enrichit, et de couches défavorisées qu’il fidélise par sa politique sociale. Enfin, le discrédit et les divisions de l’opposition, bienincapabledecontesterlaprééminencedel’AKP. Le pire ennemi d’Erdogan est donc… lui-même. Car c’est moins son parti qui est sous le feu de la critique que sa personne et son style de gouvernement. Dans son propre camp, certains, comme le vice-Premier ministre, le chef de la diplomatie ou le maire d’Istanbul, s’en alarment. De quoi inciter cet impatient à la réflexion? ●

QUI SONT-ILS ? UN SONDAGE RÉALISÉ par l’université Bilgi d’Istanbul auprès de 3 000 manifestants stambouliotes montre qu’Erdogan a réussi à s’aliéner une partie de la population qui ne lui était a priori pas hostile : 54 % des sondés ont entre 19 ans et 30 ans, 54 % n’avaient jamais participé à une manifestation auparavant, 70 % ne revendiquent aucune appartenance partisane et 82 %

se déclarent « libéraux ». Seuls 8 % sont des électeurs de l’AKP et 9 % des ultranationalistes laïques partisans d’un coup d’État contre le gouvernement. Pourquoi sont-ils place Taksim ? À 92 % parce qu’ils sont « indignés par le mépris du Premier ministre et la violence de la répression ». Enfin, 37 % souhaitent la création d’un nouveau parti. ● J.D. N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

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Europe, Amériques, Asie ESPAGNE

L’eldorado n’est plus ce qu’il était Premières victimes du chômage, les Africains subissent de plein fouet la crise économique. Mais plutôt que de rentrer au pays, la plupart préfèrent tenter leur chance ailleurs en Europe. Reportage.

C

laudio est angolais. Fuyant la guerre civile dans son pays, il est arrivé en Espagne il y a quinze ans. Avec Roque, son frère, et Maria Custodia, sa sœur. Avec cette dernière, il s’est installé au sud de Madrid, à Parla, bourgade jadis assoupie qui a vu sa population exploser dans les années 1990 avec l’arrivée massive d’immigrés. Parla compte aujourd’hui 130 000 habitants. Les commerces traditionnels y côtoient les salons de coiffure africains et les boucheries halal. Tout y est plus simple que dans la capitale, à trente minutes de train. Claudio se rend d’ailleurs régulièrement à Madrid, où il poursuit des études de relations internationales à l’université Complutense. Jusqu’en 2011, il travaillait au Banco Popular Español, après être passé par IBM et Nokia. Mais avec la crise économique, le paradis espagnol a tourné au cauchemar. Les conditions salariales se sont tellement dégradées que Claudio a fini par démissionner. « On a cessé de me verser la bourse d’étudiant alors que je la touchais depuis deux ans, explique-t-il. Heureusement que j’avais un peu d’argent de côté. Mais je ne sais pas si je pourrai continuer mon cursus l’année prochaine. » Roque, son frère, s’était installé avec femme et enfants à León (Castille-et-León) et travaillait sur des chantiers de construction pour l’entreprise Isolux Corsán. Au chômage depuis deux ans, il s’est résolu à repartir en Angola. « S’il a pu y retrouver un emploi, commente le jeune Angolais, c’est grâce à sa parfaite maîtrise de l’espagnol. Mais après tant d’années passées ici il se sent comme un immigré dans son propre pays. » Sa famille, qui est restée en Espagne, a perdu son titre de séjour et les avantages qui y sont liés, notamment en matière de soins médicaux (lire encadré). Bien entendu, il ne s’agit nullement d’un cas isolé. Tous les immigrés subissent de plein fouet les effets de la crise. Le taux de chômage de la population étrangère N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

atteint 36 %, soit presque dix points de plus que celui, déjà considérable, des nationaux (27,7 %). Et c’est encore pire pour les Marocains, communauté étrangère la plus importante après les Roumains : plus de 55 % d’entre eux sont sans emploi. La grande majorité travaillait dans le bâtiment, l’un des secteurs les plus sinistrés, avec l’hôtellerie et le commerce, depuis l’éclatement de la bulle immobilière, il y a cinq ans. DÉLINQUANCE. Logiquement, le taux de

pauvreté s’accroît lui aussi : 31 %, contre 19 % chez les Espagnols. Quand les fins de mois sont aussi difficiles, comment envoyer de l’argent à sa famille restée au pays? « Avant, nous venions en aide à des sans-papiers en quête de régularisation ou s’efforçant d’apprendre l’espagnol, raconte le père Antonio Díaz de Freijo, directeur de l’association Karibu, spécialisée dans l’accueil des Subsahariens, à Madrid. Aujourd’hui, ceux qui sollicitent une aide sont souvent établis ici depuis des années et ont généralement un travail. Ils demandent juste de la nourriture et/ou un logement. » Les standards téléphoniques d’associations comme Cáritas ou la Cruz Roja (la Croix-Rouge espagnole) sont en permanence au bord de l’explosion. Et les paroisses doivent multiplier les « soupes populaires » – comme on ne dit plus. « En plus de cela, on observe une forte augmentation de la délinquance chez

EMILIO MORENATTI/AP/SIPA

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les jeunes immigrés », explique Maria Custodia, la sœur de Claudio, dans un espagnol parsemé de mots portugais. À Parla, l’église évangélique de la communauté congolaise a fermé. En Espagne, seuls les lieux de culte catholiques reçoivent des subventions d’État. Les autres ne peuvent compter que sur la générosité des fidèles. « Dans un premier temps, nous avons partagé notre église avec les Nigérians. Mais aujourd’hui, sans ressources, nous nous réunissons chez l’un ou chez l’autre », se lamente Claudio, dont l’épouse est congolaise.

MALADES S’ABSTENIR DEPUIS LE 10 AOÛT 2012, les immigrés sans papiers – à l’exception des femmes enceintes et des mineurs – n’ont plus accès gratuitement au système de santé publique. Les familles de ceux qui sont partis tenter leur chance

ailleurs en Europe se retrouvent ainsi sans titre de séjour, donc sans carte de santé. « Beaucoup de médecins ont décidé de ne pas appliquer ce décret, explique Concha Jimeno, coordinatrice de la Coopération

internationale et interculturelle de la ville de Parla. Mais la situation est chaotique. Tous les immigrés ne savent pas qu’ils peuvent continuer à se faire soigner au centre de santé municipal. » ● M.V. JEUNE AFRIQUE


Europe, Amériques, Asie

11,7 %

Le pourcentage de la population d’origine étrangère

36 %

Le pourcentage des étrangers au chômage

783 000

Le nombre de Marocains établis en Espagne à la date du 1er janvier 2012

40 447

La diminution du nombre de résidents de nationalité étrangère en 2011 par rapport à 2010. C’est la première fois depuis 1996 que le solde migratoire est négatif.

ð Salt, province de Gérone, octobre 2011 : manifestation contre l’expulsion d’un ressortissant marocain.

Alpha, leur pasteur, était conducteur de grue. Il a perdu son travail il y a deux ans et risque d’être expulsé de son logement. Il songe à présent à partir en Belgique avec son épouse et ses trois filles. En 2008, le gouvernement socialiste de José Luis Rodríguez Zapatero avait mis en place un plan de retour volontaire. Les immigrés au chômage pouvaient regagner leur pays d’origine nantis d’une bourse, à la condition de s’engager à ne pas revenir en Espagne avant trois ans. La mesure a été un succès relatif chez les Sud-Américains : 10 000 d’entre eux en ont bénéficié entre 2009 et 2012. Elle a fait un bide chez les Africains: seulement 192 demandeurs, selon le ministère de l’Emploi et de l’Immigration. « Beaucoup sont venus en Espagne dans le but d’aider leur famille restée au pays. Comment pourraient-ils rentrer, aujourd’hui qu’ils n’ont plus rien ? » s’interroge le père Antonio Díaz de Freijo. Ils savent que leurs chances de trouver un travail sont bien moindres que celles des Latinos, dont les pays sont en pleine croissance. Un départ d’Espagne n’implique donc pas automatiquement un retour au pays. JEUNE AFRIQUE

SOURCES : MINISTÈRE ESPAGNOL DE L’EMPLOI ET DE L’IMMIGRATION – CCME – INSTITUT NATIONAL DE LA STATISTIQUE

« Nombre d’entre eux tentent leur chance en France, en Belgique ou en Suisse, où beaucoup ont des proches susceptibles de les aider, explique Mohamed Haidour, membre du Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME). Ils laissent en Espagne femmes et enfants,

et interculturelle, ne ménage pas ses efforts pour aider les immigrés. Les cours d’espagnol sont désormais gratuits, et la mise en place de Banco del Tiempo, une association spécialisée dans l’échange de services entre personnes (cours de sport, de cuisine, tâches ménagères, travaux) est un succès. « Beaucoup d’étrangers, notamment L’aide au retour ? Un succès africains, y participent, relatif chez les Sud-Américains. affirme-t-elle. On observe Et un flop chez les Africains. d’ailleurs qu’une espèce de solidarité s’est mise en dans l’espoir de revenir dès que la situaplace entre natifs d’un même pays. » Mais tion s’améliorera. » le plus dur est de garder l’espoir d’un avenir meilleur. Malgré l’annonce d’une ALLERS-RETOURS. Compte tenu de prochaine reprise économique, les spéla proximité géographique, le cas des cialistes affirment que les immigrés non Marocains doit être disjoint de celui des qualifiés auront bien du mal à retrouver autres Africains : ils rentrent plus volonun emploi. Récemment, le gouvernement tiers au pays. « Souvent, ils multiplient a annoncé qu’il allait consacrer entre les allers-retours entre les deux pays 2,4 millions et 6,9 millions d’euros à la pour continuer de toucher le chômage et réintégration des populations étrangères conserver des liens en Espagne », nuance dans leur pays d’origine. « On ressent Salah Eddin, responsable de l’association tout de même une espèce d’ingratitude de l’Espagne à notre égard », soupire Espacio de la Solidaridad. Claudio. ● À Parla, Concha Jimeno, coordinaMARIE VILLACÈQUE, à Madrid trice de la Coopération internationale N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

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parcours | D’ici et d’ailleurs

Hélène Jayet Dans le bain révélateur cette photographe née sous X, de père malien, recueille depuis quatre ans des portraits et des paroles d’adoptés.

À

l’origine de l’histoire? Un vieux nounours amoché, une brosse à cheveux, une poupée noire qu’elle portait dans le dos… Premières reliques de son enfance, premiers cadeaux de ses parents adoptifs. et un objet banal, qui va devenir le sésame pour ébranler la porte du passé : une simple carte de groupe sanguin, sur laquelle sont inscrits trois prénoms, « Claude, ghislaine, Michèle ». « Ces informations ont fonctionné comme un code qui m’a permis d’accéder aux archives et d’en savoir plus sur mes origines », raconte hélène Jayet. tête ronde illuminée par un large sourire et de gigantesques boucles d’oreilles aux couleurs irisées, la photographe de 35 ans qui s’est lancée dans une passionnante enquête sur les enfants nés sous X a toujours su qu’elle avait elle-même été adoptée. difficile de le lui cacher. dans sa fratrie « Benetton », ses deux frères (l’un d’origine antillaise, l’autre sans doute gitane) et ses deux sœurs (trouvées ensemble dans une rue en Corée du sud) sont tous de couleurs différentes. « si on ne nous l’avait pas révélé, les gamins de l’école nous l’auraient rappelé. on a eu droit à tous les surnoms: “rouleau de printemps”, “nem”, “la noiraude”… » sa famille arc-en-ciel ne passe pas inaperçue àAndrein, minuscule village des PyrénéesAtlantiques (sud-ouest de la France), « à équidistance de la montagne et de l’océan », précise-t-elle, un détail qui a son importance quand il s’agit d’occuper tant d’enfants. Pourquoi cinq adoptions quand une seule s’avère déjà compliquée? « Mon père faisait le séminaire quand il a rencontré ma mère, qui ne pouvait pas avoir d’enfants », précise hélène. l’adoption leur semble une solution humaine, généreuse, l’occasion d’aider des gamins abandonnés à se construire. Mais créer une fratrie « de papier », avec des enfants recueillis parfois sur le tard, ne se fait pas sans mal. ses deux frères n’ont pas

n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

p « Quand je pose une question à un adopté, cela m’oblige à me la poser à moi-même », confie l’artiste.

vraiment suivi d’études. l’un des deux est même passé par la case prison. ellemême a toujours ressenti un manque, mais qui n’a pas troublé sa scolarité. et c’est assez naturellement, après les BeauxArts de Montpellier, qu’elle s’est dirigée vers une école de photographie. Car c’est dans la photo qu’hélène a grandi. littéralement. sa chambre d’enfant servait parfois de laboratoire à son père pour développer ses clichés. « Quand il nous demandait, le week-end, qui voulait l’aider, j’étais toujours la première devant le bac de révélateur… J’étais fascinée de voir les images apparaître. » et aujourd’hui, c’est appareil au poing qu’elle cherche à

répondre aux questions liées à son identité. Via l’association les nids de Paris, qui avait joué le rôle d’intermédiaire pour son adoption, elle retrouve quelques pièces du puzzle. sur des feuilles cartonnées, dactylographiées, une description de sa mère biologique, blanche, française, brune, un peu ronde. et de son père, malien. en septembre 2005, hélène retourne avec ses parents adoptifs sur la terre d’où elle vient « à moitié ». elle en tire une série de photos incandescentes*: terre brûlée, nuits lumineuses, ciels aveuglants… ses premières impressions se superposent dans de longues bandes jeune afrique


Europe, Amériques, Asie

De tous ses projets liés à l’identité, c’est celui-ci qui lui a le mieux permis de creuser la sienne. « J’ai toujours été contre l’idée de faire une psychanalyse, mais ce boulot est un peu ma thérapie. Quand je pose une question à un adopté, cela m’oblige à me la poser à moi-même. J’en apprends autant sur eux que sur moi. Au fond, je ne veux pas savoir qui sont mes vrais parents, mais je veux savoir ce que d’autres ressentent. » Pour la première fois, pour son exposition à SaintBertrand-de-Comminges, dans le sud-ouest de la France, elle s’apprête à mêler son portrait à ceux des adoptés qu’elle a rencontrés. Et les photos d’un nounours amoché, d’une brosse et d’une poupée noire qui racontent l’origine, enfin révélée, de son histoire. l Léo pajon Photo : nanda GonzaGue/TransiT

* 1pose-t.net/indexhibit/ « L’Origine de l’histoire », à Saint-Bertrand-de-Comminges, du 1 er juin au 15 septembre. jeune Afrique

BIRMANIE

Wirathu, moine fatal Avec son crâne rasé et sa robe safran, on lui donnerait le bon Dieu sans confession. Il multiplie pourtant les appels – hélas suivis d’effet – à la haine contre les musulmans.

«

Q

uand vous mangez, quand vous vous déplacez, quand vous vaquez à vos affaires, le nationalisme doit devenir votre routine. Ce n’est pas ce que font les musulmans. Quand ils rejoignent le gouvernement, c’est pour s’y installer et défendre les leurs. Bons commerçants, ils contrôlent déjà le transport et la construction. À présent, ils s’attaquent à nos partis politiques. Si ça continue, nous finirons comme l’Afghanistan ou l’Indonésie ! » L’homme parle d’une voix douce, posée, presque extatique. Il se nomme Ashin Wirathu – le sayadaw (« révérend ») Wirathu pour ses partisans – et est âgé de 45 ans. Tête rasée et robe safran, il dirige le monastère de Masoeyein, à Mandalay, l’une des plus anciennes écoles bouddhiques de Birmanie, et, le plus tranquillement du monde, appelle ses coreligionnaires à la haine. Exemple ? « Vous pouvez côtoyer un musulman, jamais devenir son ami. » Ou mieux : « Les musulmans sont des violeurs, nos femmes ne sont plus en sécurité face à cette horde sauvage et cruelle. »

de partisans. Pour les 4 % de Birmans musulmans (30 % dans certaines régions), ces trois chiffres 9, 6 et 9 sont devenus les symboles d’une terreur aveugle. À mille lieues de l’image d’Épinal d’un bouddhisme cool et zen colportée par l’Occident, c’est bien à la haine et au massacre qu’appelle Wirathu. Sans être le moins du monde inquiété par les autorités. Ni le président Thein Sein ni la Prix Nobel Aung San Suu Kyi, l’icône des droits de l’homme, n’ont eu un mot de désapprobation à son endroit. Au mois de mars, à Meiktila, une petite ville du centre du pays, une vingtaine de garçons ont été massacrés par une foule de bouddhistes rendus hystériques par les sermons du moine fatal. Deux mois après,

Gemunu AmArAsinGhe/AP/siPA

horizontales. Comme si elle raccrochait les uns aux autres les wagons du passé. Le retour aux sources est « euphorisant », et un peu perturbant. « Pas mariée, sans enfants, j’ai vite senti que j’étais en décalage avec les femmes du pays… Je ressentirai toujours le manque de ne pas parler wolof, de ne pas savoir de quelle tribu je viens. » Pas vraiment de là-bas mais pas seulement d’ici, elle se pose des questions métisses, des questions d’Africaine avec un bagage artistique d’Occidentale. Une série photo sur les coiffeurs afros du métro Château-d’Eau, à Paris, se change en collection de profils évoquant les portraits de la Renaissance italienne. Un reportage dans la forge du foyer Bara de Montreuil (SeineSaint-Denis) qui est celui d’un Zola qui aurait troqué la plume contre un appareil numérique. Surtout, son travail sur l’adoption « L’Origine de l’histoire », qui a donné lieu à des publications dans la presse française – Le Monde, Néon, Pèlerin – et à de nombreuses expositions, prend la forme d’une série rigoureuse. Ce sont de simples portraits d’adoptés et d’objets sur fond neutre, qui font écho aux clichés de l’Américain Richard Avedon ou de la Néerlandaise Rineke Dijkstra.

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coLère. Longtemps,

il fit partie de ces p Le sayadaw (révérend) Ashin Wirathu, leader de l’association antimusulmane 969. moines qui luttaient contre la junte en boycottant les aumônes des militaires. les rues ressemblent encore à un champ Condamné en 2003 à vingt-trois années de ruines. Seules taches de couleur sur de prison pour incitation à la haine contre les poutres calcinées de l’ancienne école les musulmans, il a été libéré en 2010, islamique du quartier de Maingalar Zay mais reste très, très en colère. Jamais 969 Yone : des stickers ou figurent les trois (9 pour les attributs de Bouddha, 6 pour inévitables chiffres (9, 6 et 9) et l’image ses enseignements, 9 pour les attributs du bonze à la voix suave. Pour qui « le de l’ordre), l’association antimusulmane chemin de la non-violence passe par le qu’il fonda en 2001, n’a compté autant combat ». l juLieTTe MoriLLoT n o 2735 • du 9 Au 15 juin 2013


économie

algérie

Avenir Décoration innove pour grandir

côte d’ivoire

Dans le ventre de Sania

GouvernAnce

Crise de confiance

Croissance négative, gouvernance à bout de souffle, production pétrolière en baisse, climat des affaires délétère… pour la Guinée équatoriale, les prévisions n’ont jamais été aussi inquiétantes.

stéphAne BAllonG

A

lerte ! Au moment où tout porte à croire que le président équato-guinéen, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo (71 ans), prépare son fils « Teodorín » à sa succession (lire encadré p. 63), l’environnement des affaires n’a jamais été aussi hostile, ni les entreprises étrangères autant dans l’expectative. Début février, le français Société générale, contraint par des fuites médiatiques, a confirmé à Jeune Afrique qu’il cherchait à vendre ses actifs équatoguinéens et à se retirer du pays. L’annonce surprend : la Société générale de banques en Guinée équatoriale (SGBGE) est bénéficiaire. La filiale est même le numéro deux sur son marché où elle a collecté, en 2011, près du quart des dépôts et réalisé un total de bilan de plus de 442 millions d’euros. « prAtiques douteuses ». Qu’est-ce

qui peut donc pousser une entreprise qui cherche à se développer sur le continent (lire pp. 72-73) à quitter un État pétrolier où le revenu par habitant (17 500 euros en 2012) est l’un des plus élevés d’Afrique et où le secteur du BTP est en plein essor ? À cette question, la banque n’a jusqu’ici pas apporté de réponse claire. En interne, elle a invoqué auprès de ses collaborateurs des problèmes de corruption, sans plus de détails. « Une raison valable mais pas suffisante pour quitter le pays », estime un cadre du groupe. « Des pratiques douteuses provenant de personnalités haut placées sont l l l n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

VINCENT FOURNIER/J.A.

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jeune afrique


mauritania airways

Le rapport qui accuse Tunisair

décideurs

Aziz Mebarek

DG d’Africinvest-Tuninvest

bancarisation

Avec Manko, Société générale cible le secteur informel

à Malabo

t Le groupe bancaire français Société générale cherche à vendre sa filiale locale.

jeune afrique

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Entreprises marchés

« biens mal acquis ». Dans le microcosme

économique équato-guinéen, on n’a pas manqué de faire un lien entre les difficultés des sociétés hexagonales et les poursuites judiciaires dont la famille présidentielle fait l’objet en France dans le cadre de l’affaire des « biens mal acquis ». Reste que dans le même temps d’autres groupes français comme Bouygues (BTP) ou Accor (hôtellerie) parviennent à décrocher des contrats. En outre, ces derniers mois, des procédures judiciaires ont été engagées par plusieurs entreprises étrangères contre Malabo. Dans le secteur du bâtiment, l’espagnol Grupo Francisco Hernando Contreras, et dans les hydrocarbures, Hess et Tullow Oil, ont ainsi porté plainte contre la Guinée équatoriale devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi, la cour d’arbitrage de la Banque mondiale) pour des contrats non respectés. Les entreprises africaines ne sont pas épargnées. Le camerounais Fotso en a fait l’amère expérience. Après avoir investi plusieurs millions d’euros pour implanter Commercial Bank en Guinée équatoriale, le groupe familial s’est vu retirer l’autorisation d’exercer toute activité bancaire dans le pays. Fin 2011, la cour d’arbitrage de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada) a condamné Malabo à verser 64 millions d’euros de dommages et intérêts au groupe Fotso. n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

« Les difficultés que rencontrent certaines entreprises dans ce pays sont symptomatiques, explique un fonctionnaire international. Elles traduisent un climat des affaires caractérisé par une forte présence de l’État, avec à la tête des grandes entreprises des proches ou des membres de la famille du président. » l’opérateur Orange C’est notamment pour cette raison que songe sérieusement la Société financière internationale (SFI, à quitter le pays. filiale de la Banque mondiale dévolue au secteur privé) n’a jusqu’à présent effectué aucune opération dans le pays. « Nous n’investissons pas dans les entreprises qui ont à leur tour de table des personnalités ou des institutions pouvant être des risques potentiels », explique un haut cadre de l’organisation.

Une production pétrolière en baisse (en milliers de barils/jour)

350 347

307

274 252 Source : bp

l l l courantes, confie un banquier en poste à Malabo. Au sein de cette filiale, elles avaient pris une telle ampleur qu’il y a deux ans Société générale a nommé un nouveau directeur général pour y mettre un terme. Mais celui-ci n’y est visiblement pas parvenu. » Même s’il en est l’actionnaire majoritaire (52 %), le groupe n’a pas le contrôle total de cette filiale dont l’État possède environ 30 % du capital. De fait, le directeur général français est secondé par un adjoint équato-guinéen. « Compte tenu des exigences [sur les transferts de fonds et sur la lutte contre le blanchiment] auxquelles Société générale doit répondre au niveau international, on peut comprendre que la banque choisisse de partir pour préserver son image », explique un avocat d’affaires installé dans le pays depuis plusieurs années. Le cas de Société générale est loin d’être isolé. Le groupe Orange vit lui aussi un difficile coactionnariat avec l’État dans l’opérateur Guinea Ecuatorial de Telecomunicaciones (Getesa), qu’il détient à 40 %. Entre le manque de compétences de la direction équato-guinéenne et des malversations en tous genres (prestations fictives, surfacturation, etc.), le groupe français peine à contrôler l’activité. Et réfléchit sérieusement, lui aussi, à quitter le pays.

2007 2008 2009

2010 2011

De la croissance à la récession (évolution du PIB, en %) 5 4 3 2

4,5 2

1 0 -1 -2

-0,8

-2 2011

2012

2013

2014

PIB par habitant 17 500 euros (2012) Classement « Doing Business » 162e sur 185 Classement Transparency International 163e sur 174

Source : FMI

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Visas, quOTas… Certes, le climat des affaires n’a jamais été facile en Guinée équatoriale. « Mais le plus inquiétant, c’est qu’on ne voit pas réellement d’amélioration à l’horizon », note le représentant local d’un cabinet de conseil. L’édition 2013 du rapport « Doing Business » de la Banque mondiale classe le pays au 162e rang sur 185 (155e place en 2012). Et il est toujours plus difficile de créer une entreprise en Guinée équatoriale que sur le reste du continent. « Toutes les demandes doivent passer par la primature, et l’obtention d’un agrément peut prendre de un mois à un an [la moyenne en Afrique subsaharienne est de deux jours à un mois] », souligne un cadre d’une institution internationale qui connaît bien la sous-région. Autre handicap, la politique des visas. Depuis que ceux-ci sont signés par Teodorín en personne, « elle est devenue encore plus restrictive aussi bien pour les ressortissants de la Cemac [Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale] que pour les investisseurs étrangers », témoigne un avocat d’affaires sur place. Quant à l’emploi, « les entreprises opérant dans le pays sont tenues de limiter le personnel expatrié à 10 % des employés », poursuit-il. Un quota très difficilement applicable dans un pays qui ne dispose pas de main-d’œuvre qualifiée suffisante, notamment pour des secteurs comme la banque, les hydrocarbures ou les télécoms. La Guinée équatoriale, pourtant, arrive à un tournant de son développement économique. Le pays conserve le soutien sans faille de plusieurs groupes pétroliers, mais la production d’or noir est passée de 358 000 à 252 000 barils par jour entre 2005 et 2011. Les investissements massifs dans le BTP, qui ont porté la croissance du pays ces dernières années, sont en recul. Résultat : les dernières prévisions du Fonds monétaire international (FMI) tablent sur une récession, à – 2 % cette année. Pour diversifier l’économie et relancer la machine, rétablir la confiance est indispensable. Mais le chemin sera long. l jeune afrique


Entreprises marchés

En panne d’influence Faute d’un secteur privé local digne de ce nom, Malabo pèse encore peu en Afrique centrale.

p Le fils du chef de l’État a été nommé deuxième viceprésident en mai 2012.

« teodorín » en sursis ? C’est le prinCipal sujet de discussion dans le milieu des affaires à Malabo: la succession deteodoro nguema Obiang Mangue, aliasteodorín, à son président de père. Âgé de 42 ans, il a été nommé deuxième vice-président du pays en mai 2012. « au-delà des questions de légitimité et de compétence, on se demande comment il pourra exercer correctement cette fonction alors qu’il est poursuivi par les justices espagnole, américaine et française », s’interroge un avocat d’affaires. selon la presse brésilienne,teodorín a échappé de justesse à une arrestation, en début d’année, dans l’État de Bahia, à la suite d’un mandat d’arrêt émis par la France dans l’affaire des « biens mal acquis ». si ses avocats arguent que son statut de vice-président le protège contre toute procédure judiciaire, des sources proches du pouvoir suggèrent que cette situation pourrait ne pas durer. sa place semble en effet menacée par un remaniement gouvernemental imminent. Bien que soutenu par sa mère, Constançia Mangue de Obiang, une première dame assez discrète mais très puissante,teodorín avait déjà vu sa fulgurante ascension stoppée net une première fois entre 2003 et 2004, alors que, fraîchement nommé ministre des infrastructures et patron de Ge proyectos, la puissante agence nationale qui supervise tous les projets de construction menés dans le pays, il s’était illustré par son autoritarisme et ses pressions économiques répétées sur les opérateurs internationaux présents en Guinée équatoriale, conduisant ces derniers à menacer de se retirer du pays. il avait alors « quitté » ses fonctions pour retrouver le ministère s.b. de l’agriculture, dont il avait la charge depuis 1997. l jeune afrique

ABDELHAK SENNA/Afp

C

inquième producteur de pétrole d’Afrique subsaharienne, la Guinée équatoriale a affiché un taux de croissance à deux chiffres pendant plus d’une décennie (en moyenne 39 % par an entre 1996 et 2006) et un PIB par habitant de 17 500 euros en 2012. Pourtant, le pays reste un nain en termes d’influence économique au sein de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Alors que des entreprises gabonaises comme BGFI Bank ou camerounaises comme Afriland ou Bocom (traitement de déchets) ont réussi à s’imposer au niveau régional, la Guinée équatoriale ne compte aucune société à dimension africaine. Le secteur privé est dominé pas des groupes étrangers, seules quelques PME parviennent – difficilement – à émerger sur le marché domestique. « Je ne connais aucun patron équatoguinéen qui se soit fait tout seul », souligne un banquier d’affaires qui va souvent dans le pays. prise de ConsCienCe. D’après

Gregor Binkert, directeur des opérations de la Banque mondiale au Cameroun, au Gabon, en Centrafrique et en Guinée équatoriale, il y a tout de même au niveau gouvernemental une prise de conscience, et un certain nombre de mesures ont été mises en place pour favoriser le développement d’un tissu d’entreprises locales. Dernière initiative en date, grâce à un partenariat entre le gouvernement et la Banque nationale de Guinée équatoriale : un Fonds de garantie pour la création de PME. La seule satisfaction que le pays puisse éprouver au niveau régional, c’est d’avoir réussi à placer ses ressortissants à la tête de la Banque des États de l’Afrique centrale et de la Cosumaf, l’autorité de régulation de la Cemac. l stéphane ballong n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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Entreprises marchés

Les indiscrets

Côte d’Ivoire Manœuvres

préélectorales à la CCI

Barrage de Kandadji Les russes recaLés

Tunisie TéLécom erdogan pousse TurKceLL

Il n’y a plus d’espoir pour Zaroubegevodstroï(ZBS), le spécialiste russe de l’hydraulique qui avait été sélectionné contre toute attente en février 2010 pour construire le barrage de Kandadji (photo), une

digue de 8,5 km de long sur le fleuve Niger. Après des mois d’atermoiements et alors qu’on ne trouve sur place aucune trace du gros œuvre, le gouvernement nigérien, encouragé par ses partenaires financiers, veut résilier le contrat qui le liait à ZBS. « La décision est imminente », assure une source gouvernementale. n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

Souleymane Meite, président fondateur de la Société nouvelle d’assurance et de réassurance en Côte d’Ivoire (Sonar-CI), qui compte d’importants soutiens dans le milieu des opérateurs économiques. Mais pour Parfait Kouassi, le danger pourrait venir de NicolasDjibo.Leprésident par intérim de la CCI-CI assure ne pas être candidat. Mais il plaiderait pour l’adoption d’un règlement prévoyant l’élection du nouveau président par les 155 membres de l’actuelle assemblée générale, sans renouvellement de ce collège électoral – ce qui défavoriserait Parfait Kouassi. l

Emirates International Telecommunications (EIT) a bien lancé le processus de cession des 35 % qu’il détient dans Tunisie Télécom. La banque Credit suisse, mandatée sur l’opération, vient d’ouvrir ses livres de comptes aux acquéreurs potentiels. L’émirati Etisalat (également en lice pour le rachat de Maroc Télécom) est sur les rangs, tout comme Turkcell, dont la candidature a été défendue par le Premier ministre turc, RecepTayyipErdogan,lors de son passage à Tunis les 5 et 6 juin. En parallèle, la vente de Mattel, filiale mauritanienne de Tunisie Télécom, se poursuit. Orange, qui est le mieux placé pour l’emporter, sera-t-il doublé in extremis par le nouveau propriétaire des parts d’EIT? Tout est encore possible.

DR

L

es manœuvres ont commencé pour la succession de JeanLouis Billon à la présidence de la Chambre de commerce et d’industrie de Côte d’Ivoire (CCI-CI). Parfait Kouassi (photo), patrondugroupepharmaceutique Gompci-DPCI, mène un lobbying intense auprès des chefs d’entreprise. Il attend un retour d’ascenseur de ses parrains politiques comme le député du Plateau, Zoumana Bakayoko (frère du ministre Hamed Bakayoko), et surtout du maire de la même commune, Noël Akossi Bendjo. Pour l’heure, son seul concurrent est

TAGAZA Djibo

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BoLLoré BiLLon avaiT averTi ouaTTara

Après sa sortie contre Bolloré dans Le Nouvel Observateur du 6 juin, Jean-LouisBillon,ministre depuis fin 2012, peut-il rester au sein d’un gouvernement qui a attribué dans des conditions contestées le deuxième terminal à conteneurs du port d’Abidjan à un consortium mené par le groupe français ? L’avenir le dira, mais Billon n’a en tout cas pas agi totalement en solo. Le 15 mai, au retour d’un déplacement présidentiel auQatar,Jean-LouisBillon a en effet exprimé auprès d’Alassane Ouattara son désaccord sur la procédure et son résultat. Réponse du chef de l’État: s’il existe des preuves que la bonne gouvernance n’a pas été respectée dans cette affaire, il faudra revenirsurl’opération.Un«feu vert » qui a libéré la parole publique de Billon.

PolymedIC Un noUveaU toUr de table Marocinvest avance ses pions dans la pharmacie. La filiale marocaine du capitalinvestisseur Tuninvest est entrée en novembre à hauteur de 49 % au capital du laboratoire Polymedic à l’occasion de la revente des parts de Philippe Bellegarde (ancien directeur général de la société, actuellement président du laboratoire suisse Frilab) et de celles de son associé Serge Teurlai. Cette évolution du tour de table du quatrième laboratoire marocain permet à Mohamed Houbachi, son PDG, d’augmenter sa participation de 33 % à 51 %.

veolIa FoUad el omarI attend de voIr De passage à Paris le 5 juin, le maire de Tanger, Fouad El Omari, a prévenu qu’il ne consentirait pas à la cession des activités de distribution d’eau de Veolia au Maroc sans contrepartie sur les tarifs: « Notre contrat avec Veolia court sur vingt-cinq ans, onze seulement se sont écoulés. Si Veolia veut se retirer ou vendre, cela n’est pas possible sans notre accord », explique-t-il. Le 8 mars, le capital-investisseur Actis avait offert 370 millions d’euros à Veolia. « J’ai reçu des cadres d’Actis pour connaître leurs projets en avril dernier, précise le maire de Tanger. Je leur ai posé une question: “Quelle sera votre valeur ajoutée pour Tanger, ses habitants?” Ils ne nous ont toujours pas répondu. »

reCtIFICatIF Contrairement à ce que nous indiquions dans J.A. no 2734 (p. 108), Mourad Ben Chaabane est directeur général, et non directeur général adjoint, de Mac SA. jeune afrique


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DE L’AFRIQUE Etant la première Institution en matière #! 01,&,%!-!,$ #" commerce en Afrique, Afreximbank offre les programmes suivants:

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Entreprises marchés

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ALGÉRIE

Avenir Décoration innove pour grandir Leader de l’affichage publicitaire et du mobilier urbain, l’entreprise familiale défend sa place face à ses rivales internationales. Elle compte même se développer au sud du Sahara.

A

u-dessus du tunnel des Facultés, en plein centre-ville d’Alger : c’est un endroit stratégique qu’a choisi Avenir Décoration pour se lancer dans la diffusion d’images publicitaires sur un écran

Lawhat, filiale locale du libanais Pikasso, ou la régie publicitaire Best Affichage, du groupe tunisien Chabchoub, sont également actifs. Malgré cette féroce concurrence, Avenir Décoration reste leader, avec un chiffre d’affaires modeste (1 mil-

(25 km à l’est de la capitale). Cela a permis à la société, auparavant simple importatrice de mobilier urbain, d’évoluer vers le montage puis la production : « Nous avons atteint 90 % d’intégration locale et même 100 % sur certains produits comme les Abribus ou les corbeilles de ville », se réjouit Mourad Hadj Saïd. Dans l’industrie publicitaire, l’entreprise est également présente à tous les niveaux de la chaîne de production. Les affiches et les panneaux sont réalisés dans l’usine de Rouiba et dans l’imprimerie de Chéraga, dont les machines dernier cri ont nécessité un investissement supérieur à 200 millions de dinars.

SAMIR SID POUR J.A.

RECHERCHE. Après plusieurs

LED de 50 m2. « Ce format sera une première en Afrique du Nord. Cela nécessite des compétences de pointe », assure Mourad Hadj Saïd, qui a reçu Jeune Afrique au siège de la société qu’il dirige, dans la banlieue sud d’Alger. Créée en 2001, l’entreprise familiale, qui compte 500 salariés, est spécialisée dans l’affichage et la location d’espaces publicitaires ainsi que dans la fourniture de mobilier urbain à destination des communes. Un marché encore naissant en Algérie – en 2012, il y était dix fois moinsimportantqu’auMaroc,selon le cabinet tunisien Sigma Conseil – mais qui attire les convoitises d’acteurs étrangers. Le géant français JCDecaux a ainsi obtenu en 2008 le contrat de concession publicitaire pourl’aéroportinternationald’Alger. N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

liard de dinars, soit 9,5 millions d’euros, l’année dernière) mais plus de 80 % de part de marché dans la capitale et ses environs. Consciente du potentiel de développement, la direction travaille à une cotation en Bourse : « Nous avons adopté le statut de société par actions au premier trimestre car nous envisageons une introduction en 2014 », affirme Mourad Hadj Saïd. Derrière cette place de numéro un,uncontratenor:en2006,l’entreprise a remporté un appel d’offres pour équiper 32 communes de l’Algérois en mobilier urbain. D’une durée initiale de trois ans, le contrat a par la suite été prolongé de dix ans. Entre-temps, en 2007, Avenir Décoration a investi, en partenariat aveclegroupeespagnolPrimur,dans une unité de production à Rouiba

années de croissance, la société est présente dans 44 wilayas (équivalents des départements) sur les 48 que compte l’Algérie et dispose de quatre agences régionales, à Alger, Annaba, Oran et Sétif. « Nous projetons d’en ouvrir une cinquième dans le Sud avant la fin de l’année », précise Mourad Hadj Saïd. Pour conforter son positionnementdanslesnouvellestechnologies, la société consacre 30 % de ses dividendes à la recherche Place et développement. Elle envisage Ben-Aknoun, un partenariat à long terme avec dans la Samsung pour lancer en Algérie le capitale. LFD, la dernière innovation utilisée dans les grands écrans en Occident. L’objectif est également de travailler à l’étranger. Les ambitions d’Avenir Décoration en Espagne ont certes été balayées par En Algérie, la crise européenne, et les l’affichage situations libyenneet tunireprésente moins sienne ne sont pas prode 20 % du marché picesàundéveloppement publicitaire, contre à l’export, mais le sud du près de 40 % au Sahara regorgerait d’opMaroc portunités, selon Mourad Hadj Saïd : « Nous travaillons sur l’Afrique depuis six mois. Nous sommes sur deux projets que nous comptons concrétiser avant la fin de l’année. » ● RYADH BENLAHRECH, envoyé spécial à Alger JEUNE AFRIQUE


NABIL ZORkOt

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p Chaque jour, entre 600 et 700 tonnes d’huile sont mises en bouteilles. CÔTE D’IVOIRE

Dans le ventre de Sania Alors qu’Abidjan accueille le premier Congrès africain de l’huile de palme, le groupe Sifca a ouvert à Jeune Afrique les portes de sa raffinerie, la plus grande du continent. Visite guidée.

C

omme chaque matin, Vridi fourmille d’activité. C’est ici, dans cette immense zone industrielle où se croisent patrons, travailleurs et transporteurs, que bat le cœur économique d’Abidjan – et d’une grosse partie de la Côte d’Ivoire. Le Port autonome d’Abidjan, l’un des plus actifs en Afrique de l’Ouest, n’est qu’à quelques centaines de mètres. L’endroit résume à lui seul le riche passé industriel de la première économie francophone d’Afrique de l’Ouest. Mais des nombreux joyaux de Vridi, il en est un qui brille plus que d’autres : l’usine Sania. Installé de part et d’autre d’une route, le site est géré par le groupe privé ivoirien Sifca. Surplombant de plusieurs têtes les hauts murs d’enceinte, la plus grande usine d’huile de palme d’Afrique fonctionne jour et nuit, sept jours sur sept. Coulibaly Tiegbe, le directeur de l’usine, et Hervé Koukou, un jeune cadre, connaissent le site comme leurpoche.Lepremierestunancien de Cosmivoire (l’ancêtre de Sania), comme plusieurs de ses collaborateurs. Le second, un ingénieur agronome parti se former pendant jeune afrique

six mois en Malaisie chez PGEO Group, l’un des plus grands producteurs asiatiques d’huile de palme, filiale de Wilmar. Tous deux figurent aussi parmi les rares techniciens africains spécialistes de l’huile la plus consommée de Kinshasa à Conakry.Discrets,chaleureux,mais

depuis la salle des commandes, une poignée de techniciens poussent les machines. au final pas peu fiers. « Wilmar a construit deux usines, au Nigeria et auGhana,raconteCoulibalyTiegbe. Ils y ont connu quelques difficultés et ont fait appel à une équipe de chez nous pour les aider. » Les émissaires viennent de rentrer, heureux d’avoir pu aider un groupe qui est in à la fois riCa

e s af grè de palm jan, elle n o d 1 C l’huile in, à Abirofessionen(AIPH), de au 13 jution interôpte d’ivoira t er

C ia 0 ac ifc Du 1ar l’assocà huile enent par s t son impt (santé

e p n m r lière âche nisé lmie otam orga lière pa orisé n ître la fi ts qui f a s je fi spon ire conn r les su ion) de la fa at ifie tifs : démyst éforest c e j ob ique, et d om écon

actionnaire de Sania mais aussi l’un des tout premiers producteurs d’huile de palme au monde. À Vridi, il faut quatre heures pour transformer l’huile, déjà raffinée une première fois par d’autres entreprises, en véritables produits alimentaires: l’huile de table, bien sûr, mais aussi la margarine. Le rejet blanc et presque solide qui coule des machines, la stéarine, est vendu à Unilever pour être transformé en savon. Depuis la salle des commandesflanquéed’ordinateurs et d’instruments de mesure, une poignée de techniciens contrôlent les principaux indicateurs de production et poussent les machines. La saison bat son plein. En avril et en mai, 1500 tonnes sont produites chaque jour, avec des pointes à 1 900 t. BIOMASSE. L’usine, qui a été

construite par le singapourien Lipico, a été inaugurée en juin 2010, quelques mois avant le déclenchement de la crise postélectorale. Dur démarrage, marqué par un arrêt total des activités pendant un mois et la perte de quantités importantes d’huile. Deux ans plus tard, il n’est plus d’autre trace de ces événements que les récits des employés, même si remettre en marche un tel monstre ne fut pas simple. Vêtu d’une tenue de protection et de chaussures spéciales, le visiteur profite aujourd’hui d’une usine parmi les plus modernes. Sania est dotée d’une station de traitement des eaux usées et même d’une chaudière à biomasse alimentée par du bois de caoutchouc venu des plantations de Sifca. Le système est certes capricieux, mais aujourd’hui il marche. Chaque jour, entre 600 et 700 t d’huile sont conditionnées ici, dans des bouteilles en plastique que Sania doit produire elle-même. Personne en Côte d’Ivoire n’avait la capacité de fabriquer les 20 000 bidons dont l’usine a besoin quotidiennement. Preuve supplémentaire de la prouesse réalisée par Sifca et ses partenaires asiatiques. l FrédérIC MAury, envoyé spécial n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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Entreprises marchés

exclusif

Mauritania airways

Le rapport qui accuse Tunisair Plus de un an après la mise en liquidation judiciaire de la compagnie aérienne, les anciens actionnaires se déchirent. Le groupe Bouamatou SA met lourdement en cause l’ancienne direction tunisienne.

À

peine sorti de prison, le 9 mai dernier, Mohamed Debagh, vice-président du groupe Bouamatou SA (BSA), a contre-attaqué. Incarcéré pendant trois mois dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de Mauritania Airways, le dernier président du conseil d’administration de la défunte compagnie met en cause Tunisair avec de nouveaux éléments. Un rapport d’audit du cabinet français Gaudino, commandéparBSAetdontJeuneAfrique a obtenu copie, révèle des éléments plus que troublants sur l’ancienne direction missionnée par la compagnietunisienne,propriétairede51% du capital de Mauritania Airways aux côtés de BSA (39 %) et de l’État mauritanien (10 %). prête-noms. Un document déjà

ancien – il date d’octobre 2011 –, mais qui porte de lourdes accusations. Selon lui, le loueur d’avions JetClub AG aurait ainsi empoché indûment 8,3 millions d’euros. En 2008, la petite société suisse, ne détenant aucun appareil en propre, aurait sous-loué à Tunisair un Airbus A320 refacturé ensuite à Mauritania Airways (voir ci-contre). Cela pour 11,6 millions d’euros, alors qu’elle le louait elle-même 3,4 millions d’euros – maintenance, assurance et personnel compris. Une somme jugée bien plus élevée qu’il est d’usage.Selonlesexpertsinterrogés par J.A., le tarif normal aurait dû se situer entre 2 et 3,5 millions d’euros. euros. Dissous peu de temps après cette opération, fin 2009, JetClub AG était administré par des prête-noms, et son actionnariat réel reste encore inconnu. Le cabinet Gaudino estimequelasociétésuisse(qui n’a rien à voir avec le loueur n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

q En 2008, JetClub AG aurait empoché indûment 8,3 millions d’euros pour un Airbus A320 refacturé à la société mauritanienne.

anglaisJetClubInternational)aurait en réalité servi de société écran au profit de dirigeants de Tunisair de l’époque. Gaudino dénonce également la signature d’autres contrats d’affrètement défavorables à Mauritania Airways, à l’insu des actionnaires minoritaires, le paiement de per diem non dus au personnel navigant et dirigeant issu de Tunisair et la dissimulation de 5,4 millions d’euros de pertes pour l’exercice 2009. Interrogée par J.A., la nouvelle équipe dirigeante de la compagnie tunisienne (la direction générale a été renouvelée deux fois depuis la révolution), menée depuis mars 2012 par Rabah Jerad, fait profil bas. « Dans cette affaire, Tunisair est le premier perdant en tant que premier actionnaire », rétorque Néjia Gharbi, secrétaire générale du groupe, chargée du dossier. Elle rappelle « le

contexte économique difficile de l’époque, aggravé par l’inscription de l’aviation civile mauritanienne sur la liste noire de l’Union européenne en 2010 », entraînant l’arrêt des vols vers l’Europe. Sans entrer danslesdétailsdurapportGaudino, Néjia Gharbi affirme que l’analyse serait fausse : « Ces accusations ont été infirmées par une contreexpertise du cabinet français Fidal, engagé par nos soins. Ce dernier a notamment montré qu’il n’y avait aucune preuve comptable de malversations », affirme-t-elle. Malgré les demandes répétées de J.A., Tunisair s’est refusé à communiquer le rapport de Fidal, arguant de sa confidentialité dans le cadre de la procédure judiciaire en cours en Mauritanie. Parti rejoindre Mohamed Ould Bouamatou à Marrakech à sa sortie de prison, Mohamed Debagh est revenule30mai2013àNouakchott. Le numéro deux du groupe privé le plus important de Mauritanie espère cette fois obtenir gain de cause, le contexte politique étant à présent plus favorable.

ur iot Patr ick flo

q Le document qui pointe les responsabilités tunisiennes (à g.). Le premier contrat de location (à dr.).


coulisses

Entreprises & marchés

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Retrouvez toute l’actualité économique et financière du continent sur economie.jeuneafrique.com

menace. L’ancien président du

conseil d’administration demande aujourd’huipourquoiMoncefBadis et Redha Jemaiel, respectivement premier et second directeurs généraux de Mauritania Airways, ne sont toujours pas inquiétés: le premier est à la retraite en Tunisie, le second représente Tunisair à Alger. Quant à Nabil Chettaoui, le PDG de Tunisair à l’époque, il a été limogé après la révolution, mais coule des jours sereins à Tunis. « La fuite de la direction de Mauritania Airways issue de Tunisair est due à la menace d’actions violentes du personnel à son encontre, elle n’avait pas d’autre choix », fait valoir Néjia Gharbi. À ce jour, malgré les éléments contenus dans le rapport Gaudino, BSA n’a entaméaucuneprocédurejudiciaire contre Tunisair. Mohamed Debagh n’entend pas en rester là : « Nous comptons dénoncer les abus des gestionnaires de l’époque, récupérer les commissions perçues sur le contrat JetClub, passé en toute opacité, et amener Tunisair à combler le passif de Mauritania Airways. » l christophe Le Bec jeune afrique

Pétrole le Gabon veut rePrendre la main Selon le miniStre gabonaiS du Pétrole, étienne ngoubou, interviewé par le Financial Times, le gabon prévoit de reprendre les actifs de trois sociétés pétrolières, parmi lesquels le champ detsiengui, opéré par le chinois Sinopec, présent dans le pays à travers sa filiale addax Petroleum. les noms des deux autres sociétés concernées n’ont pas été divulgués, mais Shell et total, les deux principaux opérateurs pétroliers au gabon, ne semblent pas être impliqués. l’an dernier, le gabon avait déjà retiré à addax le champ d’obangue pour de prétendues violations de contrat. la filiale du groupe chinois, qui a depuis lancé une action judiciaire, n’a aucune intention de quitter le pays. les tensions entre les opérateurs et le ministère gabonais du Pétrole se manifestent alors qu’un certain nombre de pays africains tentent d’obtenir de meilleures conditions de la part des multinationales étrangères en combattant les prix de transfert et l’évasion fiscale. l

S

m

Daniel RiFFeT/GaMMa

À ce jour, Mohamed Debagh est en effet la seule personne incriminée dans cette affaire. Pourtant, « c’est Tunisair qui dirigeait de fait la société, avec quatre administrateurs sur sept, un directeur général, etdeschefsdeservicetousmembres de son personnel », souligne-t-il. Avant d’expliquer ses difficultés pourdesraisonspolitiques:premier patron du pays, président de l’opérateur téléphonique Mattel et de la Générale de banque, Mohamed Ould Bouamatou a financé la campagne électorale de Mohamed Ould Abdelaziz, l’actuel président mauritanien, en juillet 2009. Avant de se brouiller avec lui par la suite, s’exilant en 2010 au Maroc. « Mon emprisonnement, le 5 février 2013, près de un an après la mise en liquidation, le 8 mars 2012, est concomitant avec l’offensive des services de l’État à l’encontre du groupe Bouamatou, dont je suis le vice-président », indique Debagh. Qui s’interroge aussi sur la fuite des dirigeants (tunisiens) de Mauritania Airways en janvier 2011.

• Énergie Le nigeria annonce la privatisation de dix centrales électriques publiques pour 2014 • ressources natureLLes Le président centrafricain, michel Djotodia, décrète un moratoire sur l’exploitation et la vente des diamants • technoLogie L’afrique du sud a choisi le géant néerlandais

S•

de la sécurité numérique gemalto pour ses cartes d’identité électroniques agricuLture Le leader mondial du chocolat, mondelez international,

va investir 100 millions de dollars dans la culture de cacao en côte d’ivoire

alGérie Cevital raChète le français oxxo Le premier groupe privé algérien va reprendre Oxxo, le numéro un français des portes et fenêtres en PVC, placé en redressement judiciaire depuis le 5 février. Cevital investira 12 millions d’euros et gardera 288 des 406 emplois de cette ancienne filiale de Lapeyre, basée en Bourgogne. Cette reprise serait la première pierre d’un plan plus large visant à bâtir un géant français puis européen de la menuiserie.

international le JaPon Promet 24 milliards d’euros Le Japon veut concurrencer la Chine en Afrique. Shinzo Abe, son Premier ministre, a annoncé 24 milliards d’euros d’investissements publics

et privés pour soutenir la croissance africaine sur cinq ans. Pris lors de la 5e Conférence internationale deTokyo sur le développement de l’Afrique (Ticad), cet engagement comprend 10 milliards d’euros d’aide publique au développement et 5 milliards pour le développement des infrastructures.

maroC bmCe bank veut lever 500 millions de dollars BMCE Bank va lancer son premier emprunt obligataire sur les marchés internationaux. D’un montant de 500 millions de dollars, cet emprunt à taux fixe, d’une durée de cinq ans, sera coté à la Bourse de Luxembourg. Barclays, BNP Paribas et Citibank conseillent la transaction, qui vise à financer le développement futur de l’établissement en Afrique. n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013


Décideurs TUNISIE

Aziz Mebarek investit sans frontières Ingénieur de formation, le cofondateur d’Africinvest-Tuninvest est aujourd’hui l’un des principaux financiers du continent.

P

ourcethommequin’aime pas se mettre en avant, l’idée même d’un portrait n’est pas franchement agréable… Hors de question de reprendre à son compte les réalisations de Tuninvest. Pourtant, il fait bel et bien partie des artisans du succès du fonds d’investissement panafricain. Né en 1963, ce Tunisien, ingénieur de l’École nationale des ponts et chaussées, à Paris, a connu un début de carrière rapide. Dès 1988, il prend la direction industrielle du groupe sidérurgique tunisien Tunisacier. Un poste qu’il occupe jusqu’en 1991, date à laquelle il s’installe à la tête et intègre le conseil d’administration de cette filiale du groupe italien Ilva. En 1994, il décide, avec trois associés, dont certains sont des amis de longue date, de fonder Africinvest-Tuninvest. ÉQUIPE. À l’époque, trois brillants

trentenaires – Ziad Oueslati, Karim Trad et Aziz Mebarek – œuvrent dans l’ombre d’Ahmed Abdelkefi, fondateur de Tunisie Leasing mais aussi de Tunisie Valeurs, premier intermédiaire en Bourse de la place tunisienne. Cette personnalité de l’administration puis de la finance du pays, née en 1941, fait figure de parrain.«Notreéquipeprésentaitun mixd’expériencescomplémentaires, que ce soit en matière financière, comptable, juridique ou industrielle », explique Aziz Mebarek. C’est le début d’une « vraie et belle aventure collective », qui n’a connu que peu de périodes d’instabilité. « Ils étaient tous très jeunes et, au début, ne connaissaient pas grandchose au métier de capital-investisseur, se rappelle un financier qui les a rencontrés à cette époque. Ils ont pourtant connu le succès tout de suite, gagnant de l’argent dès leurs premières opérations. » Aziz Mebarek apparaît déjà comme une N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

figure centrale. « Cet homme de sang-froid, doué d’une grande puissance d’analyse mais d’un naturel plutôttaiseux,étaittoujoursderrière Ahmed Abdelkefi, comme un successeur naturel », estime un autre financier.Uneimpressionconfirmée par un avocat d’affaires tunisien : « Même s’il jouit d’une grande notoriété dans la communauté des affaires, personne ne sait comment il a réalisé son ascension. »

« Un homme de sang-froid, doué d’une grande puissance d’analyse mais d’un naturel plutôt taiseux. » UN FINANCIER

INITIATIVES. Vingt ans plus tard, le

paridesquatrefondateursestréussi. Au mois de mai, le groupe a conclu un investissement de 10 millions d’euros dans Inpackt, une industrie familiale tunisienne spécialisée dans l’emballage plastique. Dernière opération d’une longue série. Depuis sa création, Tuninvest a multiplié les initiatives, tant au nord qu’au sud du Sahara. Premier capital-investisseur àrayonnerdans tout le Maghreb, il s’est aventuré en Afrique subsaharienne dès 2004, et reste aujourd’hui encore le seul acteur maghrébin du secteur à investir du Kenya à la Côte d’Ivoire.

En Algérie, Tuninvest a surpris en introduisant à la Bourse d’Alger au début du mois de juin NCA Rouiba, une PME productrice de jus de fruit. « Certaines institutions internationalesdisaientqu’introduiredesPME sur la Place d’Alger n’était pas possible », se rappelle Aziz Mebarek. Mais cet homme affable n’est pas seulement impliqué dans la

Ü Cet ancien cadre industriel a lancé, à 31 ans, avec trois associés, sa société de capitalinvestissement.

gestion de son groupe. Il a aussi cofondé l’Association des Tunisiens des grandes écoles (Atuge), dont il a été le premier président. Ce qui l’a amené à devenir membre du premier conseil scientifique de l’École polytechnique de Tunisie. Sans parler de son autre engagement auprès de deux think tanks tunisiens indépendants – Tounes 2020, Action et développement solidaire –, constitués dans la foulée de la révolution tunisienne. Pour Aziz Mebarek, il s’agit de « participer au développement de la Tunisie et de concourir à son rayonnement ». ● NICOLAS TEISSERENC

AFRICINVEST

70

JEUNE AFRIQUE


Décideurs Bénin

Kassim Traoré met Cotonou sur la carte

Avec un trafic en augmentation de 9,3 % en 2012, le directeur général du port autonome ne craint plus la concurrence de Lomé.

Performances. Entré dès 1996

au service du port béninois, Kassim Traoré, juriste de 52 ans formé en droit des affaires maritimes à Rennes, en France, a gravi peu à peu les échelons de cette organisation cruciale pour le pays : 12 000 emplois en dépendent. « Ce sont la simplification des procédures et leur informatisation

dr

L

e directeur général du port de Cotonou affiche sa satisfaction : « Après la mise en place d’un programme d’investissement de 90 milliards de F CFA [137,2 millions d’euros] en deux ans, financé par le fonds public américain Millenium Challenge Account, le délai de sortie des conteneurs du port est passé de cinquante-deux jours début 2012 à six jours aujourd’hui. Les formalités d’enlèvement de marchandises ne prennent pas plus de trois heures désormais », se félicite Kassim Traoré. Avec ces changements, le trafic à destination de la capitale béninoise, en légère baisse en 2011, a connu une hausse de 9,33 % en 2012, dépassant 7,4 millions de tonnes – un palier jamais atteint jusqu’alors.

p Âgé de 52 ans, le juriste a été formé en droit des affaires à Rennes (France).

qui nous ont permis ces performances », explique celui qui a été responsable de la qualité du port de 2008 à 2009. Des innovations (mises en place avec le concours de Veritas) qui ont valu à la structure la médaille d’or de l’Association internationale des ports et havres, le 9 mai dernier. Pour doper son trafic, le port de Cotonou, principale porte d’entrée des véhicules d’occasion en Afrique de l’Ouest, devra accélérer sa diversification. Le directeur général a pour cela d’autres travaux en tête :

Le délai de sortie des conteneurs est passé entre début 2012 et début 2013 de

52 jours à 6 jours 12000

emplois dépendent de la structure

« Nous avons obtenu de la Banque ouest-africaine de développement un prêt de 20 milliards de F CFA. Il nous permettra d’élargir la passe d’entrée, donc d’accueillir des navires plus importants », annonce-t-il. Le patron du port affirme pouvoir dépasser un trafic de 15 millions de tonnes d’ici à dix ans grâce à la construction d’un second port en eau profonde. « Trois sociétés, dont Bouygues, ont été présélectionnées pour sa réalisation », indique-t-il, assuré du soutien du président béninois Boni Yayi. concurrence. Pour parvenir

à ses fins, le pilote du port renforce ses liens avec l’hinterland. « Nous prévoyons d’augmenter les rotations de convois à destination du Niger, du Burkina et même du Mali », indique-t-il. Traoré ne craint plus la concurrence des voisins : « Lomé a pris une bonne partie du trafic d’Abidjan pendant la crise ivoirienne, mais il l’a reperdue. Aujourd’hui, les tracasseries administratives, l’insécurité et l’état des routes au nord du Togo dissuadent les armateurs, malgré les baisses des prix. Quant aux ports d’Accra et de Lagos, ils sont déjà engorgés. Il y a de la place pour nous », analyse Traoré. l christoPhe Le Bec

dr

on en ParLe

BenmouhouB Yazid Bourse d’alger Diplômé en droit fiscal, ce haut cadre financier est le nouveau directeur général de la Bourse d’Alger. Auparavant, il a notamment été chargé de la gestion du portefeuille au Trésor public. jeune afrique

aYaan adam CdC Avant d’être nommée directrice générale des fonds d’investissement consacrés à l’Afrique de CDC Group Plc, l’institution financière de développement du Royaume-Uni, elle a travaillé à la SFI.

Khalid misellati BCB Ce Libyen est le nouveau directeur général de la Banque commerciale du Burkina. Il a occupé le poste de directeur de la zone Afrique subsaharienne de l’Union de banques arabes et françaises. n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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Finance Bancarisation

Avec Manko, Société générale cible le secteur informel Dans la banlieue de Dakar, la nouvelle filiale du groupe français offre désormais des services financiers à des milliers de petits entrepreneurs sans compte bancaire.

D

epuis quelques années, les banques sénégalaises rivalisent d’ardeur et d’imagination afin de mettre la main sur l’énorme gisement des microentrepreneurs du secteur informel. Ces derniers se tournaient jusqu’ici vers les institutions de microfinance (IMF) pour bénéficier de produits et services financiers. En lançant la Société d’appui à l’inclusion financière (Saif) – également appelée Manko (« union » en wolof ) –, Société générale, propriétaire à 100 % de cette filiale, a décidé de frapper un grand coup. Objectif ? Conquérir les quincailliers, petits tailleurs, mécaniciens, ferrailleurs, boulangers, marchands qui opèrent au cœur de la grande et populeuse banlieue dakaroise… La première agence Manko implantée à Pikine, opérationnelle depuis le 29 avril et officiellement inaugurée un mois plus tard, ne désemplit plus. Les femmes sont visiblement les plus assidues. « Tous les secteurs sont représentés : poissonnières, vendeuses de légumes, transformatrices de céréales », observe Gaëtan Debuchy, directeur général de Manko et qui a notamment été directeur d’agence en France par le passé. CréDits. Même s’il ressemble en

partie à ce qui peut se passer dans d’autres contrées du continent, comme au Kenya ou en Afrique du Sud, le concept de Manko sonne comme une révolution en Afrique n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

Sylvain Cherkaoui pour J.a.

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occidentale. « Nous sommes un IOB [intermédiaire en opération de banque], précise Déthié Ndiaye, directeur de l’agence de Pikine. Le premier en Afrique de l’Ouest. Cela nous permet de distribuer des produits bancaires à une cible de la microfinance. » Simple vendeur de produits bancaires, Manko a passé une convention commerciale avec l’autre filiale sénégalaise du groupe Société générale, la Société générale de banques au Sénégal (SGBS), qui conçoit pour Manko les produits adaptés à sa cible de clientèle. « Ce statut nous permet d’avoir des structures beaucoup plus légères et donc de baisser les coûts, de faire bénéficier nos clients de frais de tenue de compte moins élevés que dans une banque traditionnelle », souligne Gaëtan Debuchy. Manko offre des crédits – de 100 000 F CFA à 10 millions de F CFA (de 150 à 15 000 euros), pour des durées allant de six à vingtquatre mois – à un coût inférieur à celui pratiqué par les IMF, ses concurrentes. « Avec les mêmes types de clientèle et de garantie, nous sommes à un niveau inférieur,

p La première agence ouverte, à Pikine, ne désemplit plus.

% 17,9 %

Le taux maximum pratiqué par Manko, contre

27,5 %

dans les institutions de microfinance

à 17,9 % maximum taux effectif global [TEG]. Tandis que le taux d’usure des SFD [structures financières décentralisées, le nom juridique des IMF] est à 27,5 %. Nous tirons donc les tarifs vers le bas », détaille le directeur général. C’est plus cher qu’une banque, certes, mais les garanties demandées sont bien moindres. Manko n’exige en effet aucune caution physique, mais un simple « garant moral », ce qui permet à un grand nombre de travailleurs de l’informel d’obtenir un crédit qu’ils ne pourraient pas avoir auprès d’une banque traditionnelle. Pour limiter les risques, les dix-huit employés de l’agence effectuent également une enquête de réputation et se rendent sur le lieu de travail du client, jaugeant l’activité et observant les factures comptables. sans frais. La filiale de Société

générale, qui espère atteindre l’équilibre dans trois ou quatre ans, ne donne pas d’objectifs commerciaux détaillés, mais le démarrage n’est pas mauvais. « Plus de 150 comptes courants ont été jeune afrique


Baromètre

SUSpenS. Pour Société générale, qui réfléchit au projet depuis près de cinq ans, le risque est élevé. Mais dans un pays qui ne compte que 300 000 salariés formels, il fallait développer une véritable stratégie de bancarisation massive. Mansour Ndiaye, expert en microfinance pour la Banque mondiale et le Bureau international du travail (BIT), estime l’initiative fort louable. « D’abord, elle matérialise la mission de responsabilité sociale vis-à-vis des populations démunies d’une banque qui a la réputation d’être assez éloignée des préoccupations des Sénégalais. Ensuite, elle contribue à rendre le système financier davantage intégré, varié et équilibré en matière d’offres de services et de produits financiers. » Avant d’ouvrir de nouvelles agences, voire de dupliquer le modèle ailleurs en Afrique, la jeune équipe de Manko attend de pouvoir tirer un premier bilan d’activité dans un domaine où des questions essentielles restent en suspens : combien de clients vont venir ? pourront-ils rembourser leurs crédits? quand l’agence serat-elle rentable ?, etc. Il est certain que la concurrence surveillera le sujet de près. l

L’Afrique s’envole valeur

Bourse

Cours au 5 juin (en euros)

Évolution depuis le début de l'année (en %)

nestlé nigeria

L agos

5,16

+ 55,4

Dangote Cement

L agos

1,01

+ 46,4

0,14 17,9 0,86 0,11 0,09 28,5 9,12 28,02

+ 30,4 + 23,8 + 21,1 + 17 + 16,3 +1 – 3,3 – 7,6

Guaranty trust Bank L agos BMCe Bank C asabLanCa nigerian Breweries L agos Zenith Bank L agos L agos First Bank of nigeria attijariwafa Bank C asabLanCa Maroc télécom C asabLanCa orascom Construction industries L e C aire Bon déBut d’année pour les Bourses africaines. À l’exception des Places tunisienne, égyptienne – qui stagnent – et, surtout, marocaine – qui reculait fin mai de près de 6 % en monnaie locale –, les marchés financiers du continent engrangent les bonnes performances. Le Ghana s’envole de 55 %, le nigeria, le Kenya et même la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) ouest-africaine

de plus de 30 %. de spectaculaires développements portés en grande partie par les plus importantes capitalisations du continent (voir ci-dessus, hors Afrique du Sud). À Lagos, les trente premiers titres du marché sont dans le vert avec, pour certains, des progressions stratosphériques : le groupe bancaire united Bank for africa (uBa) a ainsi vu son titre presque doubler en cinq mois. l

Valeur en vue DAngote CeMent La force du réseau Dangote est le principal cimentier entièrement intégré au nigeria, avec trois sites principaux situés à proximité des grands centres de consommation du pays. À l’échelle nationale, le groupe affiche actuellement une part de marché de 68 % en termes de capacité de production, avec plus de 19,25 millions de tonnes par an. Une base installée bien supérieure aux 8 millions de tonnes par an dont il disposait en 2010, et qui pourrait passer à 29,3 millions d’ici à la fin de 2015. l’expansion africaine suit de près : Roy Mutooni Dangote cement a annoncé son intention de développer Analyste chez jusqu’à 13,2 millions de tonnes par an de capacité Renaissance Capital intégrée en dehors du nigeria, dont 10,5 millions sont déjà en construction. l’entreprise possède deux avantages concurrentiels : la production à grande échelle et à faible coût et un réseau de distribution important qui lui permet d’intervenir à l’échelle nationale et pourra soutenir le développement d’une stratégie d’exportation viable dans les pays voisins. » l dr

ouverts », assure Déthié Ndiaye. Les crédits restent cependant encore rares : « Il y a un effort à faire pour expliquer comment fonctionne Manko, comment utiliser son mobile qui est relié au compte », précise le directeur d’agence. Car Manko repose totalement sur Yoban’tel, l’outil de paiement par mobile de la SGBS. Le client, qui n’a ni carte ni chéquier, utilise en effet son téléphone portable pour effectuer des opérations courantes. Une quinzaine de commerçants partenaires font office de relais, y compris les dimanches, pour ouvrir un compte ou opérer des dépôts et des retraits. Une quinzaine d’agents de crédit munis de deux-roues, tous de jeunes locaux, sillonnent le périmètre dont ils ont chacun la charge, afin de proposer aux éventuels adhérents l’ouverture de comptes à domicile et sans frais !

Finance

BoURSe

CA 2012

CoURS (5.6.2013)

oBJeCtIF

Lagos

1,4 milliard d’euros (+ 23,6 %)

210 nairas

195 nairas

BIntoU BAthILy, à Dakar jeune afrique

n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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74

Dossier

Télécoms

IntervIew

George Ferreira Vice-président de Samsung Electronics Africa

Stratégie

L’argent mobile,une

n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

jeune afrique


Huawei

Un géant en pleine ascension

3G

La RD Congo bientôt câblée

etisalat

À l’heure des grandes manœuvres

infrastructures

Le business florissant des tours

valeur en hausse D’abord adoptés par les opérateurs pour se différencier, les services financiers sur téléphone sont désormais considérés comme une source de revenus à fort potentiel. Julien clémençot

s

«

’il y a un endroit au monde où l’argent mobile rivalise presque avec le cash, c’est au Somaliland », s’enthousiasme Seema Desai, directrice du programme Mobile Money for the UnbankeddulobbyindustrielGSMAssociation (GSMA). Dans cette petite République autoproclamée située à l’extrémité de la Corne de l’Afrique, 40 % des abonnés de l’opérateur public Telesom utilisent leur téléphone pour procéder à des transactions financières. Mieux : chaque mois, ils en effectuent environ 34, contre une à deux en moyenne dans la plupart des autres pays subsahariens. Si cette situation demeure exceptionnelle, elle illustre la montée en puissance de l’usage de l’argent mobile. « L’an dernier, Orange Money [le service de paiement mobile d’Orange] a connu une vraie accélération à l’échelle du continent : le nombre d’utilisateurs a été multiplié par 2,5, le nombre de transactions par 3, et les volumes financiers échangés par 4 », confirme Frédéric Bléhaut, responsable de ce service. Même constat pour MTN en Côte d’Ivoire, avec au premier trimestre 2013 un quasi-doublement du montant mensuel des transactions – environ 10 millions d’euros – par rapport à la même période l’an passé.

t En Afrique subsaharienne, 56,9 millions de personnes utilisaient leur portable comme moyen de paiement en juin 2012.

jeune Afrique

PhoTo12/AlAmy

Relais De cRoissance. Le phénomène

impressionne jusqu’aux opérateurs. Au point que, dans les états-majors, le discours a largement évolué. Il y a cinq ans environ, les leaders du secteur se lançaient pour se différencier et cultiver une image innovante. Puis ils se sont rapidement rendu compte que ces services financiers permettaient de diviser par deux la perte d’abonnés. Désormais, beaucoup reconnaissent leur potentiel commercial.

« Cela devient une véritable source de revenus », relève ainsi Hassanein Hiridjee, président de l’opérateur malgache Telma. Au Kenya, près de 20 % du chiffre d’affaires 2012 de Safaricom provenaient de sa plateforme de services financiers, connue sous le nom de M-Pesa. Et plusieurs autres opérateurs génèrent une partie importante de leurs revenus grâce au mobile banking. « À Madagascar, notre offre Orange Money rapporte plus que l’internet mobile. C’est un véritable relais de croissance », illustre Frédéric Bléhaut. Sans compter les bénéfices indirects induits par son utilisation. Au Kenya, 32 % des crédits téléphoniques sont achetés avec M-Pesa – autant de commissions que l’opérateur ne verse pas à son réseau de distribution. Au Somaliland, ce chiffre atteint même 60 %. HabituDes sociales. Le transfert d’argent,

souvent des villes vers les campagnes, demeure l’usage principal du paiement mobile. Un certain nombre d’opérateurs offrent même la possibilité d’envoyer des fonds depuis l’étranger, concurrençant directement Western Union ou MoneyGram. Mais d’autres utilisations, comme le paiement de factures, se généralisent. « Au Niger, plus de 15 % des factures de la compagnie d’électricité Nigelec sont payées avec Orange Money », indique Frédéric Bléhaut. De plus en plus d’entreprises et d’administrations versent les salaires ou les retraites de leurs employés sur des comptes mobiles. « On note que les bénéficiaires qui échangeaient la quasi-intégralité de l’argent reçu contre des espèces en conservent désormais une petite partie sous forme de crédit », constate pour Madagascar Hassanein Hiridjee. Au Ghana, l’opérateur Tigo a innové dans le domaine de la prévoyance. Un million de ses abonnés ont souscrit une microassurance via leur compte mobile, faisant plus que doubler le nombre de personnes protégées par ce type de contrat dans le pays. L’attribution de microcrédits, même si elle reste encore limitée, se développe également. Après Safaricom, qui depuis fin 2012 permet aux fidèles utilisateurs de M-Pesa d’emprunter une centaine d’euros remboursables dans les trente jours, Orange pourrait se lancer dans les mois à venir. n o 2735 • du 9 Au 15 juin 2013

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Dossier Dans son « Étude mondiale 2012 sur l’adoption Ì Publicité de Telesom des services d’argent mobile », publiée en février, à El-Sheikh, GSMA a identifié les principaux critères expliau Somaliland. quant la réussite du mobile banking en partant de l’expérience de quatorze acteurs, dont la majorité opère en Afrique. « L’implication de la direction générale est un élément essentiel pour impulser la dynamique », explique Seema Desai. Autre élément clé : la promotion. Dans la plupart des cas, les campagnes de communication sont d’autant plus efficaces qu’elles sont didactiques et mettent en avant des usages simples et concrets comme le transfert d’argent. Passer de l’utilisation de cash à celle de crédits électroniques représente une véritable évolution des mentalités pour la plupart des économies africaines. Plusieurs études montrent que les habitudes sociales liées à la gestion de l’argent peuvent, si on ne les prend pas en compte, ralentir l’adoption des comptes mobiles. « Pour augmenter la base d’utilisateurs du paiement mobile, nous allons automatiquement Il existe ouvrir un compte à nos nouveaux clients désormais plus de et les inciter à faire immédiatement une comptes téléphoniques transaction », explique Marie Bitty, que de comptes bancaires responsable du mobile banking pour au Kenya, en Ouganda, MTN Côte d’Ivoire. L’adoption d’une à Madagascar et organisation interne spécifique est aussi en Tanzanie un facteur de succès, notamment pour la mise en place du réseau de distribution, dont le niveau qualitatif est déterminant. Si l’étude de GSMA n’établit pas de corrélation évidente, certains opérateurs estiment également que la réussite de ce service est liée à la place occupée sur le marché, les leaders bénéficiant d’un avantage lié à la taille de leur base de clients. CONTRAINTES RÉGLEMENTAIRES. Parmi les facteurs extérieurs aux opérateurs, les contraintes réglementaires sont celles qui pèsent le plus sur le développement de l’argent mobile. C’est le cas au Nigeria, où la Banque centrale a refusé en 2012 d’agréer les compagnies de télécoms pour privilégier les banques. Sans qu’il soit possible d’évaluer

DES INVESTISSEMENTS MODÉRÉS LE MODÈLE ÉCONOMIQUE est en général le même dans tous les pays. L’opérateur met sur un compte bancaire l’équivalent des crédits électroniques en circulation. L’argent profite à la banque et l’opérateur ne touche pas (ou rarement) d’intérêts. Il se rémunère sur les commissions encaissées dans son réseau à chaque transaction sur la base d’une clé de répartition définie avec N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

ses distributeurs. Les services d’argent mobile ne demandent pas d’investissements très lourds. Le gros du budget est consacré aux salaires et au marketing. Selon le lobby GSM Association (GSMA), les dépenses engagées représentent rarement plus de 1 million de dollars. De fait, même avec un nombre d’utilisateurs restreints, le point d’équilibre est vite atteint. ● J.C.

l’impact de cette décision, force est de constater que le pays végète en queue de peloton dans ce domaine. D’après une étude menée l’an dernier par Enhancing Financial Innovation & Access, une organisation financée par la Fondation Bill & Melinda Gates, le pays compte seulement 400000 abonnés à ces services, sur une population totale de 167 millions d’habitants. Selon Karim Koundi, ancien cadre dirigeant de Tunisie Télécom et tout nouveau directeur associé responsable des technologies, des médias et des télécoms pour l’Afrique francophone au sein du cabinet Deloitte, l’absence de réglementation claire en matière de paiement mobile expliquerait également le retard de ces services au Maghreb. « Les besoins sont certes différents par rapport aux pays subsahariens car la bancarisation est plus forte, mais la demande est là », assure-t-il. Ces situations de blocage demeurent néanmoins exceptionnelles. « De plus en plus de décideurs politiques et de banques centrales reconnaissent l’opportunité d’utiliser les technologies de la téléphonie mobile pour promouvoir l’inclusion financière », précise Seema Desai. Selon GSMA, 72 % des services de mobile banking dans le monde seraient exploités par des opérateurs. Et même si certains possèdent les autorisations pour gérer seuls ces services, presque tous travaillent avec un ou plusieurs partenaires bancaires qui garantissent le respect des règles financières. « Nous n’avons pas la volonté de changer de métier et de devenir une banque », assure à ce sujet Frédéric Bléhaut. Parce qu’il offre de plus en plus de services, aux populations qui ne sont pas bancarisées comme à celles qui le sont, l’argent mobile fait l’objet d’un JEUNE AFRIQUE


Télécoms

Comviva au service du « mobile banking » africain La société indienne s’est imposée comme un leader sur le continent dans la conception de plateformes informatiques dévolues aux transferts de fonds.

ÉRIC LAFFORGUE/RAPHO

D

Nombre de solutions de mobile money actives dans le monde 2007-2012

Afrique subsaharienne Asie de l’Est et Pacifique Asie du Sud Amérique latine et Caraïbes Moyen-Orient et Afrique du Nord Europe et Asie centrale

150

109

65 36 10

15

2007

2008

2009

2010

2011

2012

engouement qui devrait se poursuivre dans les années à venir. Mais pour qu’il s’impose comme une alternative quotidienne à l’argent liquide, il manque encore un véritable écosystème marchand. Franchir ce cap exigera notamment une interconnexion des différentes offres – opérateurs, banques, etc. Ce sujet provoque d’ailleurs déjà des discussions au sein de GSMA et de certaines banques centrales. « Les opérateurs télécoms n’y arriveront pas seuls », estime Karim Koundi. Selon lui, seuls de nouveaux intermédiaires sauront créer les services répondant au mieux aux attentes des consommateurs, en tirant notamment parti du géomarketing pour offrir grâce au téléphone le bon produit, au bon endroit, au bon moment. ● JEUNE AFRIQUE

epuisquelquesmois,lasociété transfert de fonds. Puis nous avons Mahindra Comviva mise sur développé un produit spécifique le développement des ser- appelé Mobiquity qui répond aux vices musicaux pour téléphones exigences des banques centrales, portables. L’entreprise indienne a notamment en matière de sécurité », constitué pour l’Afrique un catalogue explique Salah Rich, responsable du de35000morceaux–dontelleanégo- compte Orange au sein de Comviva. cié les droits auprès de partenaires locaux et internationaux – qu’elle FLEXIBILITÉ. Mobiquity assure associe à un logiciel capable de pro- chaque mois sur le continent plus poser un choix de chansons adapté de 14 millions de transactions. Une aux goûts de chaque utilisateur. solution qui peut aussi être proposée Si le potentiel de ce service est aux banques. Contrôlé à 51 % par prometteur, la réussite de Comviva le conglomérat indien Mahindra repose pour le moment sur son depuis octobre 2012 (pour 48 milsavoir-faire dans les domaines de lions de dollars), Comviva, initiala gestion des crédits téléphoniques lement détenu par Bharti Airtel, et des services financiers. À eux seuls, pourrait voir prochainement l’opéils représentent 50 % d’un chiffre rateur sortir de son capital. « Sa d’affaires de plus de 100 millions de présence comme actionnaire était dollars (76 millions d’euros), dont la sans doute devenue un frein pour moitiéprovientducontinentafricain. la signature de certains contrats. Et leur développement alimente une A contrario, l’appui du consortium croissance insolente. L’entreprise, Mahindra va sans doute l’aider à se basée à Gurgaon, au sud-ouest de développer sur les marchés euroNew Delhi, a vu ses revenus bondir péens et américains », estime un de près de 20 % en 2011 et à nouveau de 25 % l’an dernier. Chaque mois, Mobiquity Dans les pays émergents, sa assure plus de 14 millions plateformenomméePretups de transactions en Afrique. a déjà assuré plus de 18 milliards de téléchargements de crédits téléphoniques pour 650 mil- expert. Pour autant, les relations lions de clients. Dans le monde, un avec Bharti Airtel demeurent bonnes utilisateur de mobile sur huit achète puisque Comviva vient d’obtenir la sesminutesdecommunicationgrâce gestion de ses services financiers à Comviva. C’est cette expertise qui en Afrique. a permis à la société de s’imposer L’attrait des opérateurs pour comme un partenaire incontour- Comviva tient au contenu technique nable – avec notamment Orange, de ses offres mais également à la Econet, Tigo ou Maroc Telecom – flexibilité de ses propositions compour la mise en place de services merciales. « Pour limiter le montant financiers. « Actuellement, nous à investir lors du déploiement des procédons à l’installation des plate- plateformes, nous leur proposons formes de l’opérateur marocain au d’enpayerunepartiesouslaformede Gabon et au Mali », indique Arnaud frais de licence et de maintenance », Azilinon, directeur commercial pour indique Salah Rich. Avec Orange et l’Afrique francophone de l’Ouest et Bharti Airtel, Comviva s’est même du Centre. « Quand les opérateurs engagé à financer la mise en place africains ont lancé leurs offres, ils de plateformes informatiques en ont détourné la solution dévolue au échange d’une partie des revenus marché des recharges pour faire du générés. ● JULIEN CLÉMENÇOT N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

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Dossier INTERVIEW

George Ferreira

Vice-président & directeur général de Samsung Electronics Africa

«Un smartphone à moins de 50 dollars, ce n’est pas pour demain» Le géant sud-coréen compte capitaliser sur le lancement du Galaxy S4, son modèle haut de gamme, pour conforter son avance sur le marché très convoité des téléphones connectés à internet.

A

u fur et à mesure que la 3G se déploie et que le prix des appareils baisse, les smartphones gagnent du terrain. Une tendance particulièrement sensible en Afrique de l’Ouest, où le nombre de téléphones vendus a été multiplié par trois ces derniers mois. Le leader mondial de la téléphonie mobile compte bien profiter de cette demande. Signe des temps : depuis 2010, au Cap, le Samsung Africa Forum lui permet, entre autres, de présenter ses produits spécifiquement africains. État de la concurrence, guerre des prix, relations avec les opérateurs… George Ferreira détaille les perspectives du groupe sur le continent, qui mise plus que jamais sur le potentiel de ce marché, alors que le taux de pénétration des smartphones demeure inférieur à 20 %. JEUNE AFRIQUE : Le Galaxy S4 a été lancé fin avril en Afrique du Sud puis en Afrique de l’Ouest. Comment a-t-il été accueilli ? GEORGE FERREIRA : Les smart-

phones haut de gamme font vraiment rêver tout le monde. La demande émanant des distributeurs, du grand public et de nos partenaires a été phénoménale. Si je la compare à celle qui a suivi le lancement du Galaxy S3 en juin 2012, elle apparaît trois fois plus importante à travers le continent pour le S4. Quel est le modèle le moins cher que vous vendez actuellement sur le continent ?

Notre modèle le plus abordable est le Galaxy Pocket. En Afrique du N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

Apple, Nokia, BlackBerry, HTC ou Sony. Du côté des fabricants asiatiques, il se peut que leurs prix descendent à 50 dollars, mais je ne peux juger de la qualité, de l’expérience ou des services qu’ils pourraient offrir sur de tels produits. Les taxes sur les smartphones représentent-elles encore un obstacle pour vous ?

SAMSUNG

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Sud, on peut déjà se le procurer pour 100 dollars [77 euros]. Ailleurs sur le continent, il coûte plutôt entre 110 et 120 dollars. Mais il est certain que tout au long de l’année, le prix des smartphones d’entrée de gamme va baisser. Les successeurs du Galaxy Pocket – le Galaxy Neo et le Galaxy Star, qui sont commercialisés depuis le mois d’avril – vont bénéficier d’un positionnement plus agressif sur le marché, et leur prix avoisinera les 100 dollars. Un smartphone à moins de 50 dollars, est-ce utopique ?

Cette perspective n’est pas pour demain, que ce soit chez Samsung,

Selon le dirigeant, le S4 a connu trois fois plus de succès que le S3 à sa sortie en Afrique.

La taxation des appareils intelligents tels que smartphones et tablettes, mais aussi mobiles de base, varie d’un pays à l’autre. Elle a bel et bien un effet négatif sur les ventes et encourage le marché gris [canauxdedistributionlégaux,mais pas autorisés par le distributeur original] et la contrebande, en invitant à contourner les autorités locales. Ce qui freine la création d’emplois et tout ce qui l’accompagne. Les taxes sur les smartphones devraient être allégées, comme nous l’avons vu au Ghana, où elles sont minimes et où le marché a réellement décollé. Mais celles qui portent sur les tablettes sont toujours très élevées, et leur marché a tendance à stagner. Quelles sont vos ambitions continentales ?

Notre objectif est de réaliser un chiffre d’affaires de 10 milliards de dollars d’ici à 2015 et nous sommes en bonne voie pour y parvenir. Nos activités télécoms, au niveau du continent comme au niveau mondial, représentent plus de la moitié de nos résultats. En Afrique, vos activités télécoms vont-elles supplanter vos autres secteurs ? JEUNE AFRIQUE


Télécoms

Si les ordinateurs portables et les tablettes pouvaient également coûter 100 ou 150 dollars, leurs ventes exploseraientaussi.Maiscen’estpas le cas. Aujourd’hui, le seul appareil qui permette à une large clientèle de se connecter à internet, c’est le smartphone, qui demeure l’outil préféré du grand public. Nokia, Huawei ou HTC sont-ils des concurrents plus directs, du fait d’une moindre présence d’Apple sur le continent ?

Sur le segment haut de gamme, avec le lancement du S4, je pense que nous avons pour concurrents touslessmartphonesdemêmerang déjà commercialisés : l’iPhone 5 d’Apple, le Nokia Lumia 920, les BlackBerry Z10 ou Q10, le HTC One, le Sony Experia 1. Pour l’entrée de gamme, les choses sont différentes. Tout dépend du caractère

abordable du produit, et non du produit lui-même. Sur ce créneau, nous avons lancé le Neo et le Star. Ils sont concurrencés par des smartphones de marques chinoises comme ZTE, Huawei, Lenovo et Techno. Tout se joue ici clairement

Si je considère le lancement du S4, elles sont extrêmement bonnes. Lorsque nous avons lancé le S3, peu d’opérateurs sur le continent souhaitaient être livrés directement par Samsung pour vendre ce modèle. Les choses ont changé depuis. Dans

Notre objectif est de réaliser 10 milliards de dollars de chiffre d’affaires d’ici à 2015. sur le prix. Nous avons des concurrents sur tout notre portefeuille de produits, mais aucune société ne se détache comme étant notre principal concurrent en Afrique. Toutes celles qui opèrent dans la téléphonie mobile sur le continent se livrent une concurrence féroce. Quelles sont vos relations avec les opérateurs ?

chaque pays ou presque, l’opérateur dominant – voire l’ensemble des opérateurs présents – nous a contacté afin de recevoir un exemplaire du S4 lors de son lancement. En Afrique, le succès des précédents modèlesGalaxyaétételquelesopérateurs ont fini par proposer directement ces produits à leurs clients. ● Propos recueillis par GEMMA WARE – The Africa Report

AMOS-5, MAINTENANT EN AFRIQUE Brillamment lancé à la position orbitale 17°E, le satellite AMOS-5 fournit une large gamme de services de télécommunication par satellite grâce à des faisceaux panafricains en bande C et bande Ku ultra puissants. Avec les satellites AMOS-2 et AMOS-3 qui desservent l’Europe et le Moyen-Orient, AMOS-4 et AMOS-6 opérationnels en 2013 et 2015, Spacecom met sa vaste expérience au service des opérateurs de radiodiffusion directe, des télédiffuseurs, des fournisseurs d’accès à Internet, des fournisseurs de bande passante VSAT et des opérateurs de télécommunications sur l’ensemble de l’Afrique. Des capacités satellitaires de premier choix sont désormais disponibles pour l’Afrique. Contactez-nous pour en savoir plus.

E-mail: amos-info@amos-spacecom.com • Site Internet: www.amos-spacecom.com

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Dossier DÉVELOPPEMENT

Huawei, un géant en pleine ascension

Essentiellement présent dans le domaine des équipements, le groupe chinois nourrit aussi de grandes ambitions africaines sur le marché des tablettes et smartphones.

ou encore un centre d’exploitation réseau au Caire, en novembre 2012, pour mieux surveiller les infrastructures mises en place. « Même s’il travaille à bas coûts, il se rattrape sur lamaintenance»,relèveJean-Michel Huet, analyste à BearingPoint. SUCCÈS. Sur le continent, Huawei

ð Au Nigeria, le constructeur a signé en avril un contrat de 750 millions de dollars.

R

ien ne semble pouvoir arrêter son expansion africaine. Présent sur la quasi-totalité du continent, où il a installé des réseaux 2G, 3G – et même 4G en Namibie et en Angola –, Huawei y a réalisé 3,42 milliards de dollars (2,6 milliards d’euros) de chiffre d’affaires en 2011. Au Nigeria, où le constructeur a signé en avril un contrat de 750 millions de dollars pour mettre à niveau le réseau de Globacom, il pourrait devenir opérateur en investissant 627 millions de dollars dans Nitel, en faillite. Il vise aujourd’hui l’Éthiopie et la Libye, où il a installé en janvier le câble sous-marin Silphium. Sa qualité

d’exécution, ses tarifs et les lignes de crédit dont il bénéficie (30 milliards de dollars de la Banque de développement de Chine l’an passé) en font un adversaire redoutable pour ses concurrents, dont le chinois ZTE, le franco-américain AlcatelLucent, ou le suédois Ericsson. Les critiques concernant son service après-vente, notamment à la fin des années 2000, au Kenya, n’ont pas empêché les opérateurs de ce pays de continuer de travailler avec lui. Pour prouver son attachement à un continent où il s’est implanté en 1999, Huawei a ouvert des centres de formation dans sept pays (lire l’encadré), un centre de recherche et développement à Johannesburg

3e

constructeur mondial de smartphones

6e

constructeur mondial tous téléphones confondus CA 2012

35 Md$

SONG FAN

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compte aussi profiter de l’essor de la demande de smartphones qui accompagne la hausse générale du débit : il a ouvert son premier centre d’appels (hot-line) en mars, à Johannesburg. « Nous avons évolué d’un profil B2B à B2C (d’entreprise à consommateur), et il est important de mettre en place les canaux de soutien nécessaires à la clientèle », explique Li Dafeng, président de Huawei pour l’Afrique australe et l’Afrique orientale. L’entreprise a lancé en 2011 le smartphone d’entrée de gamme Ideos et, avec Microsoft, au début de l’année, Huawei4Afrika, conçu par des Africains pour des Africains. Les deux modèles ont « rencontré un succès incroyable sur le marché kényan, alors qu’en Afrique du Sud les consommateurs ont préféré nos tablettes et smartphones de niveau intermédiaire », poursuit Li Dafeng, qui précise que son groupe a fourni plus de 6 millions de téléphones et 500000smartphonesdansseszones l’an dernier. « Avec ses appareils à faible coût, résume Daryl Schoolar, analyste chez Ovum, Huawei garantitàsespartenairesqueleursréseaux seront bien utilisés. » La boucle est bouclée. ● SAÏD AÏT-HATRIT

SEPT CENTRES DE FORMATION ET UN CENTRE DE R&D HUAWEI A OUVERT depuis 2008 sept centres de formation, en Afrique du Sud, en Égypte, au Kenya, au Nigeria, en Angola, au Maroc et en RD Congo – le dernier en mai 2012. Objectif: promouvoir les N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

talents au sein du personnel de Huawei – plus de 6000 salariés sur le continent, dont 60 % à 70 % de locaux –, mais aussi donner accès à ces centres aux étudiants et aux clients. Cela afin d’appuyer les

technologies de l’information et de la communication. Son unique centre de recherche et développement africain, un secteur dans lequel l’entreprise indique avoir

investi 4 milliards de dollars (3 milliards d’euros) au niveau mondial en 2012, doit répondre aux besoins spécifiques du continent, notamment en termes de logiciels. ● S.A.H. JEUNE AFRIQUE


Télécoms 3G

La RD Congo bientôt câblée Bonnechère, le directeur général d’Orange RDC. Parmi les nouveaux services offerts figure aussi le mobile banking. En matière de services innovants à créer, Airtel compte sur son expérience et son vaste réseau pour capter une nouvelle clientèle. Fort de ses 2,5 millions d’abonnés, Orange mise lui sur le lancement d’un produit phare de mobile banking. Vodacom, le numéro deux (environ 7 millions d’abonnés) et Tigo (2,5 millions), dont le marché est limité au Bas-Congo et à Kinshasa, entendent également innover pour progresser sur le marché.

Nouvelles applications, mobile banking, plan de conquête de la population rurale… À la veille du raccordement du pays à la fibre optique, les opérateurs sont dans les starting-blocks.

JEUNE AFRIQUE

VINCENT FOURNIER/J.A.

L

e coup d’envoi de la connexion de la RD Congo au câble sous-marin à fibre optique du consortium West Africa Cable System (Wacs) ne saurait tarder. Bientôt, Kinshasa et Matadi pourront profiter du haut débit, grâce au backbone souterrain construit par la China International Telecommunication Construction Corporation entre Muanda (Bas-Congo) et la capitale congolaise. Lubumbashi, le cheflieu du Katanga, devrait également bénéficier à court terme du haut débit, avec sa connexion au réseau sous-marin ultrarapide du consortium Liquid Telecom, qui irrigue une partie de l’Afrique australe et de l’Afrique de l’Est. « Le ministère, via l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes de RD Congo, a autorisé Liquid Telecom à déployer ce réseau au Katanga à partir de Kasumbalesa, ville-frontière avec la Zambie, où il est déjà arrivé », précise Tryphon Kin Kiey Mulumba, le ministre des Postes, des Télécommunications et des Technologies de l’information et de la communication. Autant dire que les opérateurs de téléphonie mobile – l’indien Bharti, le sud-africain Vodacom, le français Orange RDC, la filiale du groupe luxembourgeois Millicom, Tigo, et le libanais Africell – attendent avec impatience que ces connexions soient effectives et que soit choisie l’entité qui assurera la gestion de la fibre optique et sa composition. Si les opérateurs penchent pour la création d’une coentreprise avec la Société

congolaise des postes et des télécommunications, cette dernière entend occuper le terrain seule.

Vodacom est numéro deux du marché, derrière Airtel.

VALEUR AJOUTÉE. Outre une plus

grande rapidité d’accès à internet et des prix plus compétitifs – le coût des communications en RD Congo figure parmi les plus élevés d’Afrique –, la fibre optique permettra d’étendre et de rendre plus performants les services à valeur ajoutée de troisième génération (ou 3G – haut débit). Notamment à Matadi, Kinshasa, Lubumbashi et Goma. Lancés entre août 2012 et mai 2013 par Vodacom et Orange, suivis par Bharti Airtel et Tigo, ces services connaissent un énorme succès. La demande émane autant des entreprises que des jeunes, « grands consommateurs de réseaux sociaux, qui veulent de plus en plus envoyer des photos et accéder à leurs e-mails et à internet », souligne Jean-Léon

20 millions

d’abonnés à l’échelle nationale

35 millions de prospects dans les campagnes

POTENTIEL. La RD Congo ne compte que 20 millions d’abonnés, pour une population estimée à quelque 70 millions d’habitants, et ils se concentrent « sur les grands axes commerciaux que sont Kinshasa-Matadi, KinshasaLubumbashi, et LubumbashiGoma-Kisangani », précise Dandy Yela, chargé des relations publiques et de la communication d’Airtel. Pour gagner des parts de marché, au-delà de la commercialisation de produits innovants, il reste aux opérateurs la possibilité de s’attaquer au milieu rural, un public rarement visé. Si son potentiel est estimé à 35 millions de clients environ, il est difficile d’accès et le coût des investissements y est d’autant plus élevé que la densité de population y est faible et l’énergie peu disponible. Un marché auquel s’intéresse néanmoins Airtel depuis 2012, le numéro un en termes d’abonnés, avec 8 millions de clients en RD Congo. « Nous allons développer le réseau en zone rurale dans les trois années à venir et recourir de plus en plus au solaire, y compris en milieu urbain, pour diminuer nos coûts », conclut Dandy Yela. ● MURIEL DEVEY N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

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Dossier Expansion

Etisalat à l’heure des grandes manœuvres Déjà bien implanté sur le continent, l’opérateur d’Abou Dhabi pourrait bien devenir un compétiteur sérieux s’il parvenait à mettre la main sur Maroc télécom.

O

range, MTN, Bharti Airtel… Les opérateurs de téléphonie les plus influents en Afrique vont-ils devoir faire de la place à un nouveau challengeur? C’est fort probable. Jusqu’alors assez discret sur le continent, Etisalat, l’opérateur émirati présent dans quinze pays, abat ses cartes. Et n’hésite pas à se lancer dans d’importantes acquisitions pour servir ses ambitions. En témoigne le sérieux bras de fer qui l’oppose au qatari Ooredoo pour remporter la participation de 53 % de Vivendi dans Maroc Télécom. L’émirati est perçu comme le favori depuis qu’il s’est dit prêt à proposer le meilleur prix, sans pour autant le dévoiler ni atteindre les 5 milliards d’euros espérés par le groupe français. Le 29 mai, il a annoncé avoir obtenu l’accord de ses actionnaires sur le montage financier nécessaire au rachat. POtentiel. Etisalat sait qu’il a

beaucoup à y gagner. Confronté à la maturité de son marché domestique, l’opérateur ne peut rester insensible au potentiel du continent. En 2012, son chiffre d’affaires africain (hors Égypte et Nigeria) a crû de 9 % par rapport à 2011, à 756 millions de dollars (571,94 millions d’euros) pour un bénéfice net de7,4millionsdedollarssuruntotal mondial de 1,84 milliard de dollars. « L’Afrique est la région qui a le plus contribué à la croissance du groupe l’an dernier. Ce devrait être encore le cas en 2013, puisque l’Égypte – qui subit une forte décroissance de ses revenus en dirhams en raison de la dévaluation de la livre face au n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

Sunday alamba/aP/SIPa

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dollar – n’est pas comptabilisée dans cette région », explique Omar Maher, analyste chez EFG-Hermes. Selon la banque d’investissement, Etisalat détiendrait plus de 20 % du marché ivoirien de la téléphonie, 35,8 % de celui du Bénin, 32,3 % du Togo, 16,7 % du Gabon, 39 % de la République centrafricaine, 15,3 % du Niger et enfin 13,6 % du Nigeria. Il est aussi implanté en Tanzanie et au Soudan.

p Au Nigeria, sa filiale vient d’obtenir un prêt pour étendre son réseau de téléphonie mobile.

exPansiOn. Nul doute que si l’opé-

rateur émirati remportait la part de VivendidansMarocTélécom,ilopérerait un changement de taille stratégique. « Etisalat pourrait se servir de Maroc Télécom comme d’un véhicule d’expansion en Afrique », poursuit Omar Maher. Rien de plus naturel en effet puisque l’opérateur marocain s’est beaucoup impliqué à l’international depuis 2001, en prenant des participations majoritaires dans des opérateurs historiques tels que Mauritel en Mauritanie, Onatel au Burkina Faso, Gabon Télécom et, enfin, Sotelma au Mali. Parmi tous les acteurs présents en Afrique, Etisalat présente le bilan le plus solide. « C’est le groupe le mieux noté de la région, confirme Patrice Cochelin, responsable des télécoms chez Standard & Poor’s. Même en cas d’acquisition des parts

compte

141 millions de clients dans 15 pays (dont 7 africains)

de Vivendi dans Maroc Télécom et d’uneoffresurlesminoritaires(30% de l’État marocain), ce qu’Etisalat s’est refusé à faire, sa note ne serait abaissée que d’un cran compte tenu del’impactsursatrésorerie.Parrapport à Qatar Telecom, comparable à Etisalat en termes d’actionnariat gouvernemental(60%pourEtisalat) et d’ambition, l’émirati a montré plus de prudence dans ses acquisitions. » En 2010, Etisalat a acheté l’opérateur Atlantique Télécom, dont il détenait 50 % du capital depuis 2005. Présent dans six pays d’Afrique de l’Ouest, ce dernier a constitué la tête de pont de l’émirati en Afrique francophone. Et celle-ci n’est pas la seule dans son viseur. Au Nigeria, sa filiale vient d’obtenir un prêt de 1,2 milliard de dollars auprès de plusieurs banques pour financer l’expansion de son réseau de téléphonie mobile. « Le Nigeria est un marché difficile. L’opérateur sud-africain Telkom s’y est cassé les dents et a dû partir, rappelle Patrice Cochelin. Etisalat est mieux placé et a les moyens d’augmenter ses parts de marché et sa couverture de réseau. » Dans ce pays, où il compte déjà 15 millions d’abonnés, l’émirati envisage d’en gagner 4 millions de plus cette année. l MarjOrie CessaC jeune afrique


Télécoms TUNISIE

Orange bichonne les développeurs L’innovation, tel est le credo de la filiale du groupe français, qui multiplie les initiatives pour promouvoir l’ingénierie tunisienne.

«

O

range se doit aujourd’hui de répondre à des problématiques qui concernent la société tunisienne dans son ensemble », affirmait en avril dernier le directeur général d’Orange Tunisie, Didier Charvet. À son niveau, l’opérateur entend s’attaquer au problème de l’emploi. Cela a commencé par le lancement en octobre 2010 de l’Orange Developer Center, un centre gratuit de formation et de pratique pour permettre aux développeurs de créer des applications mobiles avec l’expertise

de la maison. Un outil d’initiation – le centre a accueilli 3 000 jeunes, venus principalement des régions intérieures, en ateliers de découverte –, mais également de perfectionnement – des ingénieurs qualifiés dont les carrières ont été freinées par le chômage ont bénéficié de remises à niveau. Au-delà de la formation, la filiale du groupe français mise aussi sur le management. Si la compétition Orange Summer Challenge lui permet depuis 2012 de dénicher de jeunes talents, elle est aussi partenaire d’universités et d’écoles d’ingénieurs (Enis, Insat, Enit…) pour préparer les étudiants aux

exigences du marché, voire les recruter. Asma Ennaifer, directrice des relations extérieures d’Orange Tunisie, assure que dans tous les cas « il s’agit d’aider au développement du pays par l’innovation ». De fait, c’est avec sa communauté de geeks que l’entreprise travaille à faire évoluer la Tunisie. SOCIAL. En bout de chaîne de

cette démarche inclusive, l’App Shop, une boutique d’applications 100 % tunisienne où une multitude de programmes sont disponibles, permet depuis deux ans à des développeurs de promouvoir leur production et de percevoir 70 % des revenus qu’elle génère. Et fait office de vitrine pour les marchés internationaux. ● FRIDA DAHMANI, à Tunis

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Leader africain de l’accès internet par satellite

IG Telecom poursuit son expansion et innove avec son offre TripleNet Créée en 1996 par Alain Ba Oumar,

Leader au Gabon, IGTelecom est aussi le premier opérateur VSAT dans la zone CEMAC.

son actuel Président-Directeur Général, IG Telecom est aujourd’hui leader en Afrique francophone de la fourniture d’équipements et de services de télécommunications par satellite (liens et réseaux privés, accès Internet partagés ou dédiés) pour les entreprises privées et administrations publiques. IG Telecom étend aujourd’hui sa base de clientèle au grand public et aux administrations de l’ensemble de la sous région en lançant au cours du 2e trimestre 2013 sa nouvelle offre TripleNet, une solution simple et rapide à déployer (une parabole de 1,20 m de diamètre), peu coûteuse (à partir de 100 dollars de redevance mensuelle par site) qui répond parfaitement aux besoins de service universel des populations rurales mal desservies en leur permettant d’accéder à Internet à haut débit de manière individuelle ou communautaire (cybercentres ou télécentres).

Internet par satellite : sans obstacles IG Telecom a lancé la première offre d’accès à Internet haut débit au Gabon grâce à la solution VSAT (Very Small Aperture Terminal). Cette technologie fait toute la différence entre IG Telecom et ses concurrents. Pas besoin de réseau terrestre, une parabole suffit. Le Web est disponible sur l’ensemble du territoire, par-delà les obstacles géographiques, et avec une indépendance totale vis-à-vis des opérateurs locaux. IG Telecom met à disposition des institutions qui le nécessitent une infrastructure privée de communications par satellite entre tous leurs sites géographiques, de même qu’un accès Internet à débit garanti.

Indépendance garantie Pour renforcer son indépendance, IG Telecom est devenu propriétaire en 2006 de sa propre plateforme de transmission/réception par satellite iDirect Technology aux ÉtatsUnis. Exploitant d’importantes capacités satellitaires grâce à son partenariat avec Intelsat, cette plateforme permet depuis lors de servir ses clients où qu’ils soient en Afrique Centrale et de l’Ouest. Plus récemment, en juillet 2012, IG Telecom a signé avec HUGHES et SES des partenariat d’une valeur de près de 15 millions de dollars pour implanter un hub VSAT bande Ku au Gabon afin de proposer au public et aux États de


elecom

IGTelecom

toute l’Afrique Francophone une solution intégrée de service universel couvrant toute la sous région. IG Telecom est aujourd’hui le premier opérateur VSAT de la zone CEMAC avec plus de 500 sites installés.

TripleNet : la solution idéale pour le grand public et le service universel en Afrique francophone Avec sa nouvelle offre TripleNet qui va être lancé au 2e trimestre 2013, IG Telecom va permettre grâce à une parabole unique de surfer sur Internet à haut débit (jusqu’à 2Mbps), de regarder de multiples chaînes de télévision en qualité numérique (bouquet CANALSAT), et de passer des appels téléphoniques en VOIP vers le monde entier. D’abord proposé au Gabon, ce service sera rapidement étendu à toute l’Afrique francophone avec une couverture intégrale aussi bien en zone urbaine que rurale.

À la conquête de l’Afrique

IG Telecom s’appuie financièrement sur plus de 200 contrats commerciaux stables de moyen et long terme. Ses partenaires incluent des institutions financières internationales telles que BICIG (BNP Paribas), BGFIBANK, OPIC (US Overseas Private Investment Corporation) ou encore la banque d’investissement Barclays Monaco. Pour mener à bien ses objectifs, IG Telecom s ’ a l l i e à d e s p a r t e n a i re s q u i p a r t a g e n t s e s ambitions d’expansion régionale et sa stratégie d e d é v e l o p p e m e n t , p a r m i l e s q u e l s i D i re c t Technologies, Hugues Network Systems (HNS), INTELSAT, la Société Européenne de Satellite (SES), le Global VSAT Forum (GVF).

IGTelecom B.P. 826 – Libreville Tél. : (241) 01 72 97 97 B.P. 745 – Port-Gentil Tél. : (241) 01 56 01 75 info@igtelecom.net

Publi-information - DIFCOM/FC - photos : DR

Des partenaires solides

Bien que principalement implanté au Gabon, IG Telecom a une présence commerciale au Congo et à São-Tomé, et prévoit d’intensifier cette présence à l’ensemble de l’Afrique Francophone grâce à sa nouvelle offre TripleNet. Dans cet objectif, le groupe a obtenu la certification ISO 9001, version 2008, en juin 2010, et élargi sa gamme de services de télécommunications à valeur ajoutée.


Dossier INFRASTRUCTURES

Le business florissant des tours télécoms Soutenues par des fonds d’investissement, des sociétés spécialisées rachètent ces équipements aux opérateurs de téléphonie mobile pour les aider à être plus performants.

D

éjàmatureauxÉtats-Unis, en Europe ou en Inde, le tower sharing (« partage de tours ») désigne le partage par plusieurs opérateurs de leurs tours de télécommunications, le plus souvent sans frais, ou leur cession (vente ou location) à des entreprises spécialisées, les towercos (tower companies), chargées de louer les capacités ainsi acquises. Leur but : réduire leurs coûts et améliorer leurs services, notamment dans les zones rurales. Concurrence grandissante, coût de l’énergie ou besoins en infrastructures coûteuses et polluantes : divers facteurs poussent les opérateurs africains à accélérer un mouvement amorcé à la fin des années 2000. Rien qu’en 2013, ces ventes pourraient peser près de 2 milliards de dollars (1,5 milliard d’euros), selon l’institut de recherchebritanniqueTMTFinance and Investment, qui table sur la cession de 15 000 à 20 000 tours au prix unitaire de 100 000 dollars. Le nigérian IHS, le plus grand gestionnaire de réseaux d’Afrique, estime à 10 milliards de dollars le potentiel du marché continental sur les trois prochaines années. La seule vente des tours de l’opérateur Bharti Airtel, annoncée depuis son arrivée en Afrique en 2010, pourrait lui rapporter 2 milliards de dollars.

NÉGOCIATIONS. Les opérateurs de téléphonie mobile présents en Afrique disposent d’environ 75 000 tours, dont la moitié est détenue par MTN, Airtel, Orange, Vodafone et Etisalat. Il faudrait doubler leur nombre, à moyen terme, pour répondre à la demande. En avril dernier, Orange s’est illustré avec une importante transaction, dont le coût n’a pas été révélé. L’opérateur français a cédé pour quinze ans à IHS la gestion de plus de 2 000 tours en Côte N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

VINCENT FOURNIER/J.A.

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La moitié des 75000 pylônes du continent est détenue par MTN, Airtel, Orange,Vodafone et Etisalat.

d’Ivoire et au Cameroun. Alors qu’il avait vendu 300 tours en Ouganda à Eaton Towers début 2012, il a préféré cette fois rester propriétaire de ses infrastructures. « Nous travaillons sur plusieurs appels d’offres de partage d’infrastructures passives [les équipements non électroniques, dont les plus importants sont les tours], notamment au Kenya, où nous sommes en négociations contractuelles, indique Fabrice André, directeur de la qualité et de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) pour la zone Afrique, Moyen-Orient et Asie (Amea) chez Orange. Dans la plupart de ces opérations, nous ne vendons pas notre parc de tours. » Orange évite ainsi des démarches administratives complexes, et préfère bénéficier à long terme d’un loyer réduit plutôt que des ressources liées à la vente immédiate de ses tours. « Des ventes pourront toutefois se faire dans des cas spécifiques », précise Fabrice André. L’activité de towerco est gourmande en capital, et chacun des grands acteurs (lire l’encadré) est soutenu par de puissants fonds d’investissement. D’après le quotidien britannique Financial Times, l’entreprise nigériane, qui avait levé 500 millions de dollars (capitaux et dette) en novembre dernier, serait en pourparlers pour obtenir 430 millions supplémentaires. La seule transaction avec Orange a permis à IHS d’augmenter de 30 %

QUATRE LEADERS SUR LE CONTINENT • Le nigérian IHS gère près de 8 250 tours (dont 3 000 construites) au Nigeria, en Côte d’Ivoire, au Cameroun, au Soudan et au Soudan du Sud. • L’américain American Tower gère près de 4 500 tours au Ghana, en Ouganda et en Afrique du Sud. • Le britannique Helios Towers Africa gère près de 3 500 tours en Tanzanie, au Ghana et en RD Congo (sa société sœur HeliosTowers Nigeria gère 1000 tours). • Le britannique Eaton Towers gère plus de 1 500 tours au Ghana, en Ouganda et en Afrique du Sud. JEUNE AFRIQUE


Télécoms son portefeuille de tours exploitées. Celle-ci compte par ailleurs investir entre 130 millions et 150 millions de dollars en Côte d’Ivoire et au Cameroun. La concurrence, de son côté, pourra toujours racheter le réseau d’opérateurs secondaires. RENTABILITÉ. « D’une manière générale, les marchés d’Afrique subsaharienne peuvent supporter deux towercos, estime Charles Green, le PDG d’Helios Towers Africa. Or, au Ghana, en Ouganda ou en Afrique du Sud, il y en a déjà trois, voire quatre. Cela complique la structure concurrentielle, mais les towercos présents sur ces marchés ont de bons résultats grâce à la forte dynamique de croissance du secteur. » Sans communiquer les revenus de sa société, Charles Green, qui ambitionne de dépasser 5 000 tours en gestion avant la fin de l’année, contre 3 500 aujourd’hui, affirme que les

activités de l’entreprise sont globalement rentables. Dans son rapport annuel, IHS indique que la marge brute d’exploitation a augmenté à un taux de croissance annuel moyen de 70 % ces cinq dernières années. « Notre chiffre d’affaires a franchi la barre des 100 millions de dollars en 2012 », ajoute William Saad, son directeur général.

« Les towercos ont la capacité de réduire la facture énergétique et l’empreinte écologique. » FABRICE ANDRÉ, Orange

Pour continuer de l’être, les gestionnairesd’infrastructurespassives doivent particulièrement améliorer la consommation énergétique des sites. « Le fonctionnement des compagnies publiques d’électricité n’est pas stable et le coût de l’énergie fossile (diesel), utilisée aux pieds des tours pour produire l’énergie,

est en forte augmentation, ce qui a un impact sur la disponibilité de nos réseaux, indique Fabrice André. Les towercos ont la capacité de mettre en place des dispositifs performants qui réduisent la facture énergétique et l’empreinte écologique. » D’après Orange, 80 % de la consommation de carburant du groupe en Afrique sont imputables aux tours, lesquelles ne contribuent qu’à hauteur de 10 % à ses revenus. IHS s’est engagé auprès de l’opérateur à réduire cette consommation de 70 % en utilisant des systèmes énergétiques hybrides (solaire, éolien, diesel). Helios Towers Africa a, de son côté, investi près de 40 millions dedollarsdanslamiseenœuvrel’an dernier d’un tel système. L’initiative, primée aux AfricaCom Awards en novembre 2012, inclut également unsystèmedesurveillancedestours à distance, une activité dont le coût pèse également sur les towercos en Afrique. ● SAÏD AÏT-HATRIT

FRANCOPHONIE SOLIDAIRE Quand les anciens et les amis de l’Organisation internationale de la Francophonie se mobilisent. Marie-Louise Akondjia, vous êtes présidente du CADO. De quoi s’agit-il ? Le Cercle des anciens et des amis de l’Organisation internationale de la Francophonie (CADO) est une association sans but lucratif qui regroupe les anciens fonctionnaires, les collaborateurs et des amis de l’Organisation internationale de la Francophonie. Le CADO est né de l’initiative d’une ancienne fonctionnaire, Régine Lefèvre, qui souhaitait créer un espace de convivialité, mais aussi de mobilisation pour les anciens collaborateurs de la Francophonie. Justement, qu’entend faire le CADO ? Le CADO dispose d’un vrai potentiel humain en raison de la richesse du vivier de ses anciens et de ses amis. Nous voulons donc, à travers le CADO, participer à notre manière, à l’idéal de solidarité sur lequel la francophonie a été construite.

Quel bilan tirez-vous de 18 mois d’existence du CADO ? Je crois que les fondateurs du CADO peuvent être ^ers du travail accompli. L’association compte plus de 150 membres. Nous disposons d’un site internet qui nous permet de faire connaitre notre action, de faire savoir ceux qui nous aident et de donner des nouvelles de nos activités et des anciens de la Francophonie. Nous avons aussi commencé à recenser les anciens collaborateurs de la Francophonie. C’est un travail long et fastidieux car l’OIF n’a pas gardé trace de tous ses anciens collaborateurs. Sur le plan de la solidarité, nous avons pratiquement mené à terme notre premier projet de terrain, au Burundi. Nous avons en effet ^nancé la réhabilitation d’un centre communautaire socioculturel à Rutana dont la mission sera de former et d’informer les femmes de la communauté. Si tout se déroule comme prévu, le centre sera inauguré en juillet prochain ! Grâce à la générosité de nos membres et de nos donateurs, nous avons pu investir dans ce projet autour de 30 000 €. Dans quelques jours, le CADO tiendra son deuxième dîner de gala, avec pour objectif de récolter des fonds au béné^ce d’une vingtaine

Cercle des anciens et des amis de l’OIF, Email : info@cado-int.org Site Web : www.cado-int.org

d’enfants défavorisés, au Cambodge. Nous espérons réunir la même somme que l’an dernier et ainsi offrir à ces enfants des conditions de vie, de santé et de scolarité décentes. Et pour l’avenir ? Vous le constatez, les projets ne manquent pas. Comme partout, il nous faut trouver les forces et les moyens pour les réaliser ! Nous béné^cions du soutien de l’OIF. Le Président Abdou Diouf et l’Administrateur sont très attentifs à nos activités et nous les en remercions. Mais nous sommes une association autonome et nous ne devons compter que sur nos propres forces. Au fur et à mesure que l’implication de nos membres se développera, nous pourrons multiplier les occasions de rencontre entre nous, favoriser la participation des membres à des manifestations culturelles francophones, organiser des voyages de découverte de nos projets de terrain, aider ceux de nos anciens qui seraient en dif^culté. Je suis con^ante...

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Dossier Télécoms

ESPACE

Intelsat mène la contre-offensive Le leader mondial des services par satellite veut renforcer sa présence dans l’ouest et le nord du continent.

L

a vente de services de télécommunications satellitaires a le vent en poupe en Afrique. Selon le cabinet d’analyseEuroconsult,lenombrede VSAT (very small aperture terminals, paraboles permettant d’émettre et de recevoir) devrait passer de 65000 à plus de 230000 d’ici à 2021. Quant au nombre de foyers recevant la télévision par ce biais, il devrait au moins doubler dans les deux prochaines décennies. Des évolutions dont entend bien profiter Intelsat, leader du secteur avec 2,61 milliards de dollars (1,97 milliard d’euros) de chiffre d’affaires l’an dernier, d’autant que ses perspectives sont moins alléchantes en Europe et aux États-Unis. Le groupe, dont le siège social est à Luxembourg mais le centre opérationnel à Washington, aux États-Unis, peut s’appuyer pour cela sur un réseau de 23 satellites N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

L’Afrique et le MoyenOrient ont représenté

15 %

du chiffre d’affaires du 1er trimestre 2013 (655 millions de dollars)

consacrés au continent, le plus dense du marché. « Les services d’Intelsatsontaccessiblespartouten Afrique.Contrairementàcequel’on pense,noussommesavantagéparle développement de la fibre optique dans ses zones côtières et urbaines. Au lieu de nous faire concurrence, il augmente la demande: les clients souhaitentbénéficierdumêmetype de services à l’intérieur des pays. Et loin des côtes, les opérateurs satellitaires sont les seuls à pouvoir offrircettepossibilité.Parailleurs,de plus en plus d’entreprises (banques, sociétés d’assurances, compagnies minières et pétrolières) réclament un service continu garanti à 100 % pour leur informatique; là encore, les satellites sont les seuls à pouvoir l’apporter en cas de problème sur le réseau filaire », explique Grant Marais, vice-président régional du département des ventes en Afrique d’Intelsat. Le groupe luxembourgeois entend notamment percer dans le nord et l’ouest du continent. Pour cela, il a ouvert le 1er juin à Dakar un bureau commercial consacré à ces deux régions, dirigé par le Togolais Lare Atcha-Oubou. Cette implantation au Sénégal ne doit rien au hasard. « Les opportunités

de croissance sont nombreuses dans cette région, avec les nouveaux projets miniers, la mise en place de la télévision numérique terrestre, sans oublier le passage à la 3G – et demain à la 4G – en téléphonie mobile », fait valoir le nouveau directeur. Le choix de Dakar est mûrement réfléchi aussi. « La capitale sénégalaise est un hub aérien bien relié à Washington et à Johannesburg, où se trouvent notre siège opérationnel et la direction Afrique, mais aussi à tous les pays de la côte occidentale, de l’Algérie jusqu’au Congo. Le choix d’un pays francophone n’est pas anodin non plus, puisque 70 % des pays de cette zone parlent cette langue », poursuit Lare Atcha-Oubou. Ce dernier dénombre parmi ses clients les grandes sociétés de téléphonie comme Sonatel, Maroc Telecom, Bharti Airtel ou MTN Nigeria, qui représentent sa première source de revenus. Viennent ensuite les services d’accès satellitaire à internet aux entreprises comme Ecobank ou l’assureur NSIA; puis les services de télévision par satellite, avec les organismes de diffusion radiophonique et télévisuelle du Sénégal (RTS), de Côte d’Ivoire (RTI), du Mali (ORTM) et du Burkina Faso (RTB). NOUVEAUX ENTRANTS. Mais cette

offensive d’Intelsat sur l’Afrique occidentale est également pour l’entreprise une réponse à la forte concurrence qui sévit dorénavant dans le secteur des télécommunicationssatellitairesdanslarégion.«En plus de nos concurrents traditionnels, les européens Eutelsat (dont la capacité doit doubler d’ici à 2015) et SES (qui a ouvert une antenne au Ghana), nous nous heurtons aussi à de nouveaux entrants sur le marché africain comme l’israélien Amos et Arabsat », indique Lare Atcha-Oubou, chargé de mener la contre-offensive. Intelsat entend concentrer ses efforts dans les pays à forte population, en particulier auprès des opérateurs mobiles : « La RD Congo, en Afrique centrale, et le Nigeria, en Afrique de l’Ouest, constituent des cibles prioritaires », prévient Grant Marais. ● CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE



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Dossier Télécoms

TRIBUNE

Opinions & éditoriiaux

Le marché de la pub en ligne, prochaine frontière stratégique

F JEANCHRISTOPHE SAUNIÈRE Associé PwC (PricewaterhouseCoopers) chargé des télécoms pour l’Afrique francophone

ORT DE SA CROISSANCE EXPONENTIELLE, le marché de l’internet mobile retient désormais l’attention des opérateurs de téléphonie dans les pays en développement. De fait, le taux de pénétration des abonnements mobiles au Moyen-Orient et en Afrique du Nord a bondi de 5 % à 99 % entre 2001 et 2011, d’après la Banque mondiale. Et en Afrique subsaharienne, sur la même période, ce type d’abonnement est passé de 2 % à 53 %. Or, du téléphone à l’internet mobile, il n’y a qu’un pas, les connexions se faisant essentiellement par smartphone. Sur le continent, les mobiles sont certes encore utilisés essentiellement pour des communications vocales et l’envoi de SMS, mais la consommation de contenus et l’usage d’applications devraient gagner du terrain avec la démocratisation des smartphones. Et la baisse de leur prix, parfois inférieur à 100 dollars [77,50 euros], influence fortement cette tendance. De surcroît, d’ici à 2016, le haut débit mobile devrait concentrer 84 % des connexions internet dans les régions émergentes et en développement, d’après un rapport 2012 du Forum économique mondial. L’enjeu semble d’autant plus capital que, selon la Banque mondiale, lorsque internet pénètre un marché de 10 % supplémentaires, le PIB par habitant augmente de 1,4 %. Dans ce contexte particulièrement porteur, les opérateurs de téléphonie mobile cherchent à améliorer leur position dans la chaîne de valeur et à répondre à la demande de transfert de données, en forte hausse dans les pays émergents. Il s’agit pour eux de saisir toutes les opportunités de business offertes par le marché du haut débit. Car au-delà, c’est la fourniture de contenu qu’ils considèrent avec attention. Générer de la croissance avec des stratégies ciblées sur le haut débit et la publicité semble le meilleur moyen pour eux de tirer leur épingle du jeu.Tout en assurant leur pérennité sur ce marché, leur objectif étant clairement de ne pas être dépassés par les fabricants d’appareils mobiles et autres acteurs du software, comme ce fut le cas il y a cinq ans aux États-Unis et en Europe occidentale. Ce

sont pourtant ces derniers qui paraissent aujourd’hui les mieux placés pour profiter de ce nouvel eldorado. Lorsque la voix et les SMS laisseront la place à d’autres usages dominants grâce au haut débit, la publication et l’agrégation de contenus deviendront le segment le plus concurrentiel. Ainsi, au Royaume-Uni, les possesseurs de smartphones les emploient à 16 % seulement pour envoyer des SMS, contre 84 % pour surfer sur internet, naviguer sur les réseaux sociaux, jouer ou écouter de la musique. Les consommateurs des pays émergents font déjà preuve d’une appétence particulière pour des contenus novateurs comme le mobile banking et des applications consacrées à la santé. Dans ce contexte, il est essentiel pour les opérateurs de repenser leur modèle économique en se positionnant sur des marchés de niche orientés sur le contenu (par exemple local, voire géolocalisé, ou musical) et la publicité. Plus que la connectivité ou l’intelligence du réseau, c’est la capacité à prendre une place sur le marché de la publicité en ligne qui constitue le premier des challenges – en le créant, en l’achetant ou en le coconstruisant avec des partenaires. Avec une croissance de la publicité en ligne qui

D’ici à 2016, 84 % des connexions internet passeront par les mobiles à haut débit dans les pays émergents.

N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

atteint 23 % par an au Moyen-Orient et en Afrique, et 9 % en Amérique latine, les revenus générés devraient continuer de croître de 65 % à 70 % par an jusqu’en 2015. C’est sans doute en fournissant les plateformes techniques nécessaires au développement et à l’édition de contenus publicitaires par SMS que les opérateurs de téléphonie mobile peuvent se tailler la part du lion de ce marché en croissance. La monétisation de leurs bases clients, qui permettent aux annonceurs de cibler leurs consommateurs, est également une solution d’avenir, comme l’a démontré Vodacom en Afrique du Sud en proposant aux annonceurs d’utiliser sa base de données pour viser des profils de clients spécifiques. ● JEUNE AFRIQUE



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Dossier Conso

Tablettes vedettes

Lire, consulter ses e-mails, travailler ou encore regarder un film… En moins de trois ans, iPad, Galaxy Tab ou encore Nexus 7 sont quasiment devenus indispensables. Et ce n’est qu’un début. Par BriCe Tahouk

C

étaitdéjàlaguerredes smartphones, voici maintenant celle des tablettes. Depuis l’arrivée fracassante de l’iPad, en 2010, tous les constructeurs ont emboîté le pas à Apple, et les ventes ont été multipliées par 6,6 en deux ans. D’après les prévisions de l’International Data Corporation (IDC), un institut d’étude spécialisé dans les hautes technologies, le marché devrait connaître une nouvelle progression de 49 % en 2013 et avoisiner les 200 millions d’exemplaires vendus à la fin de l’année. Et cette tendance va se poursuivre, avec une augmentation annuelle moyenne de 11 % d’ici à 2017. Si, au premier trimestre En Afrique 2013, Apple reste le et au Moyenleader du secteur, sa part Orient aussi, de marché (environ 39,6 %) est la demande progressivement grignotée par ses explose, avec concurrents Samsung (17,9 %) et une progresAmazon (3,7 %). Sur le continent, sion de 90 % Apple détenait 78,1 % de part de en 2012. Rien marché en juillet 2012. q u ’a u d e r SOURCE : IDC nier trimestre de l’année, il s’est vendu 1,36 million de tablettes dans la zone. Signe des temps, la première tablette made in Africa, la Way-C de la marque VMK, lancée début 2012 au Congo, est désormais également commercialisée au Sénégal et en RD Congo, pour quelque 230 euros. Cette année, pour la première fois, il se vendra plus de tablettes tactiles que d’ordinateurs de bureau et, dès 2014, que d’ordinateurs portables. Une évolution confortée par la baisse des prix, favorisée notamment par l’arrivée des tablettes mini et par la perspective du développement de la 4G (le très haut débit). Aperçu des stars du marché. l

n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

Apple ipAd 4 AveC éCrAn retinA

Star incontestée

L’

iPad 4 diffère peu de son aîné. La coque en aluminium est la même, ainsi que l’écran Retina de 9,7 pouces à la résolution extrêmement élevée de 2048 x 1536 pixels, pour une autonomie annoncée de 10 heures. Sa principale innovation ? Le processeur A6X, deux fois plus puissant que l’A5X, selon la firme américaine. Cette quatrième génération de tablette tactile Apple est disponible avec trois capacités de stockage (16, 32 ou 64 Go), deux coloris (blanc ou noir) et deux modèles (simple wifi ou wifi avec connexion cellulaire 4G/3G). L’iPad 4 propose aussi le choix d’applications mobiles le plus complet du marché. l À partir de 459 euros pour la version 16 Go

Asus trAnsformer pAd infinity tf700

Hybride

V

ous êtes allergique à Apple ? Cette tablette est faite pour vous. La finesse de l’affichage Full HD en texte et en vidéo permet au système d’exploitation Android de rattraper l’iPad 4 Retina. L’Infinity se félicite ainsi d’une définition

d’écran de 1920 x 1200 pixels pour un format de 10,1 pouces. Le dernier-né d’Asus possède aussi une mémoire vive de 1 Go, une capacité de stockage de 32 Go à 64 Go et un capteur photo-vidéo de 8 mégapixels avec flash LED au dos et webcam de 2 mégapixels en façade. La puissance du processeur Tegra 3 et les finitions désormais reconnues d’Asus en font définitivement un bel objet polyvalent. D’autant qu’avec un dock (clavier) qui peut être branché sur la tablette, l’Infinity gagne en autonomie et adopte un look de netbook de luxe, fin et assez léger de 1,1 kg au total. l Tarif conseillé: 599 euros (32 Go)

jeune afrique


télécoms sAMsunG GAlAxy note 10.1

Originale

A

vec son Galaxy Note 10.1 pourvu d’un stylet, la firme coréenne avance en terrain conquis. Elle cible les étudiants pour la prise de notes, et les designers, graphistes ou artistes en herbe. Le produit est exploité sous la version Android 4.2 Jelly Bean, et les interactions avec le stylet sont très précises. Samsung propose une ardoise de 10,1 pouces avec une définition de 1280 x 800 pixels. La mémoire vive est de 2 Go. La capacité de stockage, de 16 ou 32 Go, peut être étendue grâce à une carte mémoire microSD de 64 Go. À noter que la tablette se transforme en télécommande universelle tactile. l

Compter environ 450 euros pour la version 16 Go

AInol novo7 AurorA 2

Low cost

e

n proposant un modèle à 150 euros, le constructeur chinois Ainol parie sur un prix bas. Sa tablette, qui fonctionne sous Android 4.0.4, n’a rien de très original. L’écran IPS à cristaux liquides de 7 pouces affiche 1024 x 600 pixels. Elle intègre 8 Go de mémoire flash qui peuvent être complétés par une carte microSD (jusqu’à 16 Go). Un port mini HDMI permet de la relier à une télévision en haute définition et propose en sus une large panoplie de connecteurs. L’ensemble est alimenté par une batterie offrant une autonomie de moins de 7 heures. Et il n’y a pas de Bluetooth. Mais à ce prix-là, pourquoi se priver ? l Dès 150 euros sAMsunG GAlAxy tAb 2

Sans fioritures

U

ne nouvelle génération de tablettes Android est arrivée. Elle se décline en 7 et 10,1 pouces. L’écran présente un bon rendu, surtout en termes de contraste et de luminosité. Malgré un processeur qui date un peu, le Galaxy Tab 2 conserve une bonne fluidité. En 7 pouces, l’appareil est aussi compact qu’un livre de poche et offre une bonne autonomie. Principaux bémols : le design n’est pas assez travaillé et il n’est pas possible de recharger la batterie sur ordinateur via un port USB. À noter que Samsung vient d’annoncer la commercialisation de la Galaxy Tab 3 pour concurrencer l’iPad Mini & le Nexus 7. l 7 pouces : 170 euros – 10,1 pouces : 269 euros

Les CoMpaCts Apple IpAd MInI

Design et confort

f

ace au Nexus 7 de Google et au Kindle Fire HD, Apple se devait de réagir. Le résultat ? Un iPad2 version mini, même s’il est doté du dernier système d’exploitation mobile d’Apple, iOS 6. L’écran fait 7,9 pouces avec une définition de 1024 x 768 pixels, pour une autonomie de 10 heures. Les capacités de stockage sont déclinées en 16, 32 et 64 Go. Un capteur photovidéo de 5 mégapixels est logé au dos de la tablette, tandis qu’une webcam de 2 mégapixels orne la façade. Mais ce sont le design et l’ergonomie qui constituent ses points forts. l À partir de 339 euros en version 16 Go

jeune afrique

GooGle nexus 7

Bonne affaire

D’

apparence modeste, la Nexus 7 est équipée de l’OS Android 4.2 Jelly Bean, ce qui lui confère une très bonne réactivité. Elle possède en outre une saisie prédictive très efficace et un rendu global de l’écran tout à fait convenable. Ce dernier, d’un format de 7 pouces, est doté d’une définition de 1280 x 800 pixels, avec un zoom rapide et précis. Disponible en versions 8 et 16 Go, cette tablette ne dispose pas d’extension de mémoire, ni de capteur photo au verso. Côté autonomie, la Nexus 7 peut atteindre une dizaine d’heures

d’utilisation. Accessible à moins de 200 euros pour la version 8 Go, c’est l’un des meilleurs rapports qualité/prix du marché. l Moins de 200 euros n o 2735 • du 9 au 15 juin 2013

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Communiqué

Orange-Côte d’Ivoire Telecom

pour un monde de développement économique en Côte d’Ivoire Orange-Côte d’Ivoire Telecom s’engage à agir en faveur d’un monde de développement économique, en soutenant les initiatives innovantes adaptées aux besoins de la Côte d’Ivoire. À cet effet, un dialogue actif et régulier avec ses parties prenantes a permis au groupe de mesurer combien le soutien à « l’emploi jeunes » est une attente forte. Orange-Côte d’Ivoire Telecom propose plusieurs contributions et actions en faveur de l’entreprenariat, de la formation et de l’emploi des jeunes : • 200 diplômés ont été accueillis dans le cadre du programme d’aide à l’emploi jeune de l’AGEPE, pour bénéficier d’une première expérience professionnelle et d’une formation dans les métiers des télécommunications. • 140 stagiaires issus du programme PEJEDEC lancé avec la Banque Mondiale suivent une formation adaptée aux besoins du marché du travail. • 3 édition du Prix Orange de l’Entrepreneur Social ont été lancées, offrant des opportunités de financements de projets aux jeunes entreprises. • La dernière innovation, est le lancement du « concours jeunes architectes » du 18 mars au 17 avril dernier. Avec le soutien du Conseil National de l’Ordre des Architectes de Côte d’Ivoire (CNOA), Orange-Côte d’Ivoire Telecom a ouvert un concours d’idées pour la construction de la nouvelle agence commerciale de la ville de Korhogo. • deux objectifs majeurs visés : - permettre aux jeunes architectes diplômés de se challenger, partager leur savoir-faire, se faire connaître et remporter des subventions en guise de frais d’installation ; - réaliser une belle et confortable agence commerciale, économe en énergie dans laquelle les clients se sentiront chez eux.

16 PROJETS REÇUS ET 5 PRIMÉS Le jury composé, en partie, d’émérites architectes a désigné les lauréats : • 1er prix « de la tradition au modernisme » de Diabagaté Bazoumana : 10 000 000 FCFA. • 2ème prix « les ondes sculpturales de Korhogo » d’Assy Rita Gladys Pola : 3 000 000 FCFA. • 3ème prix « le cube Orange » de Karamoko Djima Jean Daniel : 2 000 000 FCFA. • 4ème prix de l’originalité Orange-Côte d’Ivoire Telecom « se plugger au futur » de Ruzibiza Huguette. • 5ème prix de l’originalité CNOA « participez au scénario » de Kacoutié Mélissa Jeannette.

M. Coulibaly Diakité, représentant le Ministre de la Culture et de la Francophonie a remis le 1er prix.


Partenariat PEJEDEC pour l’emploi jeune

Les stagiaires recrutés ont participé à une session d’accueil et d’intégration.

Rencontre avec le Président de la Banque Mondiale M. Madani Tall.

Forum sur l’entrepreunariat

Visite du stand d’Orange-Côte d’Ivoire Telecom par le M Daniel Kablan Duncan, 1er ministre de Côte d’Ivoire lors du Forum CGECI Academy en mai dernier. Animation sur le stand.

À ses côtés, MM. Dosso Moussa Ministre d’État, Ministre de l`Emploi, des Affaires Sociales et de la Formation Professionnelle et Jean Kacou Diagou Président de la CGECI.

Orange-Côte d’Ivoire Telecom, Immeuble « Le Quartz », Boulevard V. Giscrad d’Estaing 11 BP 202 Abidjan 11, Côte d’Ivoire

www.orange.ci

www.citelcom.ci

www.aviso.ci


Culture & médias

AFRIQUE DU SUD

Double arc-en-ciel

À l’occasion de la saison de l’Afrique du Sud en France, et alors que l’homosexualité est encore largement taboue sur le continent, coup de projecteur sur des artistes sud-africains qui abordent cette question dans leur œuvre. SÉVERINE KODJO-GRANDVAUX

ne histoire d’amour comme tant d’autres : ils sont jeunes, ils s’aiment et ils se sont dit « oui » dans la plus pure tradition zouloue. Pourtant, leur idylle n’est pas passée inaperçue. Fin avril, Tshepo Modisane et Thoba Sithole, deux jeunes hommes de 27 ans, ont convolé en justes noces. dans un petit village du KwaZulu-Natal. « Le premier mariage gay zoulou », titre un site d’information français, alors qu’au même moment déferle sur l’Hexagone une vague conservatrice et homophobe à l’occasion des débats parlementaires sur le mariage pour tous. Promulguée le 8 mai 1996, la Constitution postapartheid est l’une des plus progressistes au monde, inscrivant au cœur de la nation sud-africaine la lutte contre toutes les discriminations et établissant l’égalité des citoyens, quels que soient notamment leur origine raciale, leur sexe ou leur orientation sexuelle. Dix ans plus tard, en 2006, la nation Arc-en-Ciel tant voulue par Nelson Mandela autorise le mariage et l’adoption pour les couples de même sexe. Une révolution sur un continent où une majorité de pays prohibe encore l’homosexualité, passible de la peine de mort en Mauritanie, au Nigeria, en Somalie, et dans les deux Soudans. Et où il est fréquemment avancé, même au plus haut sommet de l’État, que l’homosexualité ne ferait pas partie de la culture africaine. LIBERTÉ. Pour autant, tout n’est pas rose en Afrique du Sud. Les agressions

d’homosexuels, les « viols correctifs » de lesbiennes, les meurtres de personnes non hétérosexuelles sont fréquents. Une situation extrêmement préoccupante que révèlent les œuvres des artistes, écrivains, plasticiens, photographes, chorégraphes, danseurs… sud-africains gays. Et qu’il convient de dénoncer avec eux en réaffirmant le droit pour tout adulte de disposer librement de son corps. Tout comme le sexisme et les violences faites aux femmes, l’homophobie est une forme de racisme qui assombrit le ciel de la démocratie. ●

N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

COURTESY OF THE WHATIFTHEWORLD GALLERY

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Ì The Future White Women of Azania, d’Athi-Patra Ruga.



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Culture médias

SPÉCIAL

AFRIQUE

DU SUD

LITTÉRATURE

Moi, Mark Behr, blanc, traître et gay…

Ancien espion à la solde du gouvernement raciste, puis de l’ANC, l’écrivain évoque dans un roman magistral l’histoire récente de l’Afrique du Sud à travers les non-dits d’une famille de fermiers afrikaners. peu près au milieu de son nouveau roman, plus précisément aux pages 219 et 220, l’écrivain sud-africain Mark Behr revient sur un épisode peu connu de la lutte contre l’apartheid. Il raconte une conférence, à Londres en 1987, visant à promouvoir la Charte de la liberté pour une nouvelle Afrique du Sud. Les intervenants fustigent la violence de la ségrégation raciale et présentent le programme du Congrès national africain (ANC). Puis vient la traditionnelle séance de questions. « Quelle est la position de l’ANC concernant les droits des homosexuels, hommes comme femmes?»demandeunmilitantaustralien. La réponse? « Dans une Afrique du Sud libérée, les gens seront normaux. Jusqu’à preuve du contraire, les homosexuels ne le sont pas. Si tout le monde était comme eux, ce serait la fin de l’espèce humaine. » De passage à Paris, l’auteur célébré de L’Odeur des pommes confirme que cette scène, relatée dans Les Rois du Paradis, est bien réelle. « Quelques semaines après l’interventiondumilitantaustralien,Thabo Mbeki a dû faire une déclaration publique condamnant cette position réactionnaire », rappelle-t-il. On connaît la suite: la Constitution sud-africaine de 1996 sera

l’une des plus progressistes au monde en matière d’orientation sexuelle, et les mariages entre couples du même sexe seront autorisés dix ans plus tard. BOUÉE. Racontant le retour au pays d’un

homme, Michiel, qui vient de perdre sa mère, Les Rois du Paradis est un roman magistral qui embrasse l’histoire récente de l’Afrique du Sud à travers les non-dits et les déchirements d’une famille de fermiers blancs. L’écriture est subtile, la construction mêlant les époques habile et discrète, et l’intrigue progresse de révélation en révélation sans céder ni à la facilité ni, ce qui serait pire, à la caricature. Avec l’œil d’un entomologiste, Mark Behr décortique l’humaininvivo,modeléparsontemps,les années qui passent et le paysage. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si, en exergue, il a choisi de placer cette phrase de James Baldwin: « Et l’amour n’aura d’autre choix sinon de combattre le temps et l’espace, avec l’obligation d’être victorieux. » Mal traduit, le titre original du livre est en réalité Kings of the Waters (« Rois des eaux »), et l’élément liquide joue un rôle majeur dans le roman, en particulier au cours des scènes clés. Sans trop en dire, il est possible d’évoquer ce bain que le fils, rejetéàcausedesonhomosexualité,donne à son père, aigre vieillard dont le corps renonce progressivement à la vie. Ou bien

L’EXIL EN LA DEMEURE

L

e titre original, Lost Ground, a été traduit par Un passé en noir et blanc. Un choix bien malencontreux, car le livre de Michiel Heyns évite assez soigneusement le piège des idées reçues. Comme Mark Behr, il raconte le retour au pays d’un homme blanc et gay à l’occasion d’un décès, en l’occurrence celui de sa cousine. Journaliste indépendant, il compte profiter du meurtre d’une femme blanche par un homme noir pour écrire un article sur la problématique N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

raciale contemporaine dans un petit village d’Afrique du Sud. Mais au gré de ses rencontres et de ses discussions, il finit par perdre pied et presque se noyer dans la complexité d’un pays dont la violence finit toujours par rattraper ses enfants, même exilés. Et ce qui était presque une enquête policière se mue en cruelle introspection… ● N.M.

Un passé en noir et blanc, de Michiel Heyns, Philippe Rey, 320 pages, 20 euros

les éclaboussures de ces jeux d’enfants qui viennentclorelerécitsurunenoted’espoir. « L’eau est bien entendu un élément d’extrême fluidité qui ne cesse de se transformer, soutient l’auteur, un élément qui ne peutpasêtrecontenu.Métaphoriquement parlant, c’est à l’opposé de l’autoritarisme, du colonialisme, de l’apartheid, qui reposent sur une volonté de contrôle rigide et des idées binaires, bien/mal, noir/blanc, mâle/femelle… Dans le livre,lesscènesd’eauxsontaussides scènesdetransformationentermes de pouvoir. » En donnant le bain à son père, le fils prend le travail de la domestique noire, et le baas (« maître ») autoritaire et raciste se retrouve à la merci de son fils. En renversant les garçons qui, dans le lac, s’étaient accaparés une bouée confectionnée avec une chambre à air, les femmes et les filles défient la domination masculine. CONFESSION. Barbe poivre

et sel, yeux d’un bleu limpide, l’homme qui fêtera ses 50 ans en octobre sait de quoi il parle. Son existence est un matériau riche et complexe qui, sans nul doute, innerve son œuvre en profondeur. Né au Tanganyika (actuelle Tanzanie), il a grandi dans le KwaZuluNatal (Afrique du Sud), que ses parents avaient rejoint au moment de la politique de nationalisation (Ujamaa) menée par le président Julius Nyerere. « Ma famille ne s’intéressait ni à la politique ni à la littérature, mais il y avait chez nous un vrai plaisir de raconter, se souvient-il. Notre départ dramatique du Tanganyika revenait souvent, comme l’histoire d’une perte à lafoisdenotreterreetdenotre identité. » Et après un silence, ilcomplète:«J’aisutrèstôtque mon identité sexuelle était différente – et dans ces cas-là, on apprend vite à Ì L’auteur célébré de L’Odeur des pommes, le 17 mai. JEUNE AFRIQUE


Culture médias raconter des histoires… » La vraie révélation littéraire est venue à l’adolescence, avec les poèmes qu’Antjie Krog publia à l’âge de 17 ans : « Je me suis dit alors que si quelqu’un pouvait écrire sur l’insoutenable et le rendre soutenable, alors l’écriture valait la peine. » Mais passer à l’acte est presque impensable: il a honte d’écrire, c’est une activité « trop féminine » dans la société d’alors. Étudiant, Mark Behr bascule dans le mauvais camp : espion à la solde du gouvernement, il récolte des informations sur ses camarades de gauche. Lentement pourtant, ses rencontres et ses lectures – Gramsci, Marx, Sontag… – viennent éroder ses convictions conservatrices. La peur d’être exposé en tant qu’homosexuel le paralyse. Il finit par se confier à l’ANC poursavoirquefaire, et reçoit l’ordre de continuer… tout en manipulant les informations. Ses activités prendront fin en 1991, année au cours de laquelle il rejoint l’International Peace Research Institute d’Oslo, en Norvège. Sa confession publique aura lieu en 1996, après son coming out et le succès de son premier roman. « Avouer mon homosexualité m’a donné beaucoup de pouvoir, dit-il. Je me suis réconcilié avec moi-même et j’ai réalisé que dire la vérité libérait

beaucoup d’énergie, beaucoup plus que la honte du silence. » Évidemment, il s’attendait à la violence des réactions: la trahison est difficile à pardonner. « La réponse publique est logique et prévisible, et je dois la respecter, aussi douloureux que cela soit, insiste-t-il. Si je n’avais pas été une personne publique, je n’aurais jamais été obligé d’en parler, je l’aurais fait avec les personnes une à une…J’ai,depuis,reconstituéunepartiedemesamitiésavecceuxque j’ai trahis. » Doté d’une conscience aiguë des enjeux de pouvoir, il précise: « Mais même se livrer à ce type de confession est un privilège de Blanc. Ce n’est pas possible pour un Noir de révéler qu’il a été un agent, il risquerait la mort. »

VINCENT FOURNIER/J.A.

« La haine des femmes, c’est ce que nous devons combattre. »

JEUNE AFRIQUE

ALTERNATIVE. Si le regard de Mark Behr

sur la société sud-africaine est d’une troublante lucidité, il n’en est pas pour autant aveuglé par le pessimisme. Le salut ? Il pourrait venir des femmes. « Je pense que j’ai un penchant pour les idéaux féminins, dit-il. La manière dont les hommes sont éduqués pour être compétitifs, dépourvus d’empathie, efficaces plutôt que sociables, explique pour partie la violence des relations interpersonnelles et politiques. Cela ne signifie pas pour autant que les femmes sontentièrementinnocentes,maisjepense que les principes conventionnellement associés à la féminité sont plus propices à la pacification des rapports humains. » Seréjouissantdurejetpublicdel’homophobie en Afrique du Sud comme du fait que cette cause soit désormais défendue par des militants noirs – « leur légitimité n’est pas remise en question » –, il ajoute: « La peur que les hommes éprouvent face à l’homosexualité vient de l’idée que les gays sont des hommes qui cèdent le contrôle aux femmes. Dans l’hétérosexualité et le patriarcat, le boulot de l’homme, c’est de garder le contrôle de la femme. La haine des femmes, c’est ce que nous devons combattre.»DansLesRoisduParadis,Behr propose, à travers le personnage de Kamil, une « masculinité alternative ». Intellectuel intransigeant, Kamil est homosexuel, fils d’une juive et d’un musulman et lui-même bouddhiste… Tout un symbole. ● NICOLAS MICHEL

Les Rois du Paradis, de Mark Behr, JC Lattès, 300 pages, 20,90 euros N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

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Culture médias

SPÉCIAL

AFRIQUE

DU SUD

DANSE

Éclats de vies

Ancien plasticien, le chorégraphe Steven Cohen affirme haut et fort son identité juive et son homosexualité dans des créations queer provocatrices et anticonformistes. ne infinie douceur se dégage de son visage aux traits durcis par une vie qui ne l’a pas épargné et une sensibilité extrême s’échappe de son corps régulièrement mis à rude épreuve par des chorégraphies et des costumes exigeant une santé de fer. Steven Cohen cultive les paradoxes. Alors qu’il semble brisé par un passé douloureux et un présent amer, le performeur sud-africain est capable de soulever des

montagnes. Il a l’endurance et la résilience de ceux qui ont choisi de combattre les inégalités et qui ont fait de cet engagement une ligne de conduite. L’art lui a sauvé la vie et il entend bien s’en servir pour interroger dans des créations provocatrices et anticonformistes son identité de « monstre homosexuel juif et blanc » et sa place dans une société postapartheid. « Tout ce que je suis, j’ai décidé de le montrer de manière hypervisible », explique-t-il. Dans ses performances, ce petit-fils de Juifs lettons ayant fui une Europe fasciste et trouvé refuge, par défaut,

LE CYGNE NOIR

JOHN HOGG

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S

on Swan Lake se moque des codes de la danse classique, longtemps réservée à l’élite blanche, et aborde la question de l’homosexualité, « un thème universel ». La jeune chorégraphe sud-africaine noire Dada Masilo (28 ans) revisite

avec humour et gravité Le Lac des cygnes en compagnie d’une dizaine de danseurs (tous excellents) et « fusionne la danse africaine et le ballet ». Les hommes sont en tutu et Siegfried refuse d’épouser sa promise, révélant alors son amour pour un autre

homme. Dans cette création, Dada Masilo a choisi « une approche ludique » pour évoquer le rejet dont peut être victime la communauté gay (conduisant encore trop souvent à la torture et au meurtre) et la pandémie du sida. Une S.K.-G. réussite. ●

Swan Lake, de Dada Masilo, du 10 septembre au 6 octobre, auThéâtre du Rond-Point à Paris, puis en tournée en France jusqu’au 20 décembre N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

en Afrique du Sud joue avec les traits physiques prêtés aux Juifs (un nez proéminent, des oreilles décollées) et il arbore une étoile jaune, sur son front ou sur son sexe. Il pourrait tout aussi bien arborer le triangle rose que l’on faisait porter aux homosexuels déportés dans les camps d’extermination, mais il n’en a pas trouvé. Pas question de reconstitution. Steven Cohen ne travaille qu’avec des objets authentiques pour mieux les détourner ensuite. Sa création Title Withheld. For Legal and Ethical Reasons (« Sans titre. Pour raisons légales et éthiques »), présentée lors du Festival d’Avignon (sud de la France) en 2012, lui a été inspirée par la découverte sur un marché aux puces de La Rochelle d’un journal écrit, entre 1939 et 1942, par un jeune homme juif de 17 ans. Steven Cohen a un rapport fétichiste aux objets. Son atelier est un joyeux bric-à-brac où s’accumule un trésor d’objets chinés : des gramophones – qui constitueront bientôt un nouveau tutu –, des carnets de soldats nazis, quelques-uns de ses tableaux baroques, une chasuble détournée, sans oublier ses improbables chaussures façonnées à partir de crânes, de cornes d’oryx ou de pieds d’éléphants. ÉGALITÉ. À 50 ans, le plasticien-chorégraphe-performeur partage sa vie entre l’Europe, où il se produit régulièrement et où il réside à Lille (nord de la France) avec le soutien de Latitudes Prod, et sa ville natale, Johannesburg. « Mon corps est en France mais mon cœur est en Afrique du Sud », souligne celui qui depuis 2009 n’est plus enseigné dans les écoles d’art de son pays. « Mon travail a été déclaré immoral. Je pensais que l’Afrique du Sud avait changé. J’ai été naïf. J’ai cru que nous, les queers, pourrions enfin être acceptés. Mais quoi que nous fassions, nous ne le serons pas. Nous sommes toujours victimes de discriminations, d’insultes, de meurtres. Nous ne demandons pas à être considérés comme des gens “normaux”. Nous ne serons jamais comme les autres. Nous ne voulons qu’une chose: l’égalité », précise-t-il. JEUNE AFRIQUE


Culture médias de la Résistance et de la déportation à Lyon. « Je fais peur, analyse l’artiste, Mon arme, c’est ma nudité. Je représente la liberté et la liberté est dangereuse. » Avant d’ajouter: « Même les homosexuels sud-africains estiment que je nuis à leur image. Mais ils ne comprennent pas qu’il s’agit d’art. Dans la vie privée, je suis tout le contraire ! Je suis extrêmement timide, je ne suis pas un travesti, je ne pratique pas le BDSM… », confesse un homme effectivement on ne peut plus discret. THÉRAPIE. Si Steven Cohen a choisi

pas pour autant arrêté ; contrairement à la police française qui a peu apprécié de le voir nu, une loupe sur son pénis circoncis, devant le Centre d’histoire

À l’occasion du Festival d’automne, Steven Cohen présentera Sphincterography : The Tour – Johannesburg (The Politics of an Arsehole), du 13 au 21 septembre à la Maison rouge (Paris).

JOHN HOGG/COURTESY OF THE STEVENSON GALLERY

« Mon arme, c’est ma nudité. Je représente la liberté, et la liberté est dangereuse. »

de jouer avec les codes gays et dragqueens, c’est pour affirmer ce que les bien-pensants, les conservateurs et autres « esprits étroits » refusent de voir, à l’instar de ses parents qui ont nié l’homosexualité de son frère aîné, lequel a alors développé « une haine de soi » le poussant il y a sept ans au suicide. « Mes parents étaient l’opposé de tout ce que je voulais devenir. C’est terrible à dire. Ils attendaient de moi ce que je ne pourrai jamais leur donner », confie l’ancien enfant « élevé comme un raciste blanc ». C’est à l’âge de 13 ans que Steven Cohen prend conscience de la dure réalité du régime d’apartheid. En accompagnant sa nourrice, Momsa Dhlamini, hors de la maison familiale, il découvre que celle qui est traitée comme une esclave par sa famille est une reine chez elle. Steven Cohen lui rendra hommage en 2011 dans The Cradle of Humankind en la faisant monter sur scène à ses côtés. Le Sud-Africain a fait de l’art une thérapie, qui lui permet de panser les blessures de l’apartheid et qui lui a évité de sombrer dans la folie lors de son service militaire. « Je refusais de toucher une arme, et j’étais effrayé de voir tous ces jeunes Blancs qui voulaient aller tuer “du Noir”. Je me suis vu perdre la raison et j’ai été placé en isolement psychiatrique pendant six mois. Le dessin et la sérigraphie m’ont évité de basculer totalement. » Aujourd’hui, ce rescapé affirme que seul l’engagement artistique des lesbiennes noires, comme Zanele Muholi (lire pp. 102-103), dont il apprécie le travail, permettra à la société sud-africaine de s’accepter telle qu’elle est. Doublement arc-en-ciel. ●

Lors de la performance Chandelier, à Johannesburg (2001).

Steven Cohen ne s’impose aucune limite et a choisi de descendre dans la rue à la rencontre de ses compatriotes. « Les galeries étaient réservées aux Blancs. Les Noirs n’y vont toujours pas. » En 2001, revêtu d’un simple lustre transformé en tutu, il arpente un bidonville de Newtown (Johannesburg) que doivent démolir les autorités. Les réactions des habitants sont tantôt hostiles tantôt enjouées, telle celle de cette jeune femme qui compare son apparition à celle d’un ange. « Bien souvent, les femmes sont plus réceptives à mon art que les hommes, explique-t-il. Car JEUNE AFRIQUE

j’utilise des codes, comme la beauté, qui leur parlent plus facilement. » Si les autorités sud-africaines ont parfois mis fin à ses performances, elles ne l’ont

SÉVERINE KODJO-GRANDVAUX

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Culture médias

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SPÉCIAL

AFRIQUE

DU SUD

PHOTOGRAPHIE

Femmes, je vous aime Le quotidien des lesbiennes est souvent difficile. Zanele Muholi leur rend hommage à travers des images tendres et délicates. vant d’admirer les photos de Zanele Muholi (40 ans), il est vivement conseillé d’aller faire un tour sur le site qu’elle a créé en 2009 et qui s’intitule Inkanyiso (« lumière » en zoulou). Là se trouvent consignés les témoignages de femmes qui, s’ajoutant les uns aux autres, racontent le quotidien des lesbiennes sud-africaines. Un quotidien souvent cruel où il est question de « viols correctifs », de VIH, de discrimination, mais aussi d’amour, de tendresse, de train-train. Sans doute la ministredelaCultureLulamaXingwana – aujourd’hui ministre chargée des Femmes, des Enfants et des Personnes

handicapées – ne s’était-elle pas bien renseignée avant de visiter l’exposition « Innovative Women », financée par son ministère, en 2010. Elle en était en effet sortie au bout de quelques minutes choquée par des œuvres « immorales et offensantes ». Plus tard, elle avait tenu à préciser: « Je ne suis pas homophobe. Mais je trouvais que ces photos n’étaient pas adaptées à un public familial. De jeunes enfants ne devraient pas être exposés à la pornographie. » DOCUMENTAIRE. Pornographique, le

travail de Zanele Muholi? « La ministre qui a employé ce terme ne comprenait strictement rien au contexte de mon travail, que son ministère contribuait pourtant à financer », raconte l’artiste, qui se définit comme « militante

visuelle » (visual activist). « Mes photographies sont avant tout éducatives. En employant le mot de “pornographie” dans un espace public, la ministre mettait en danger la vie même des personnes photographiées. » Entre la Biennale d’art contemporain de Venise et une conférence à Salzbourg (« LGBT and human rights : new challenges, next steps »), la militante remontée contre les discriminations dont sont victimes lesbiennes, gays, bisexuels et transsexuels porte à travers le monde un message clair : « Nous existons et nous résistons. » Pour elle, « la photographie est un art, le militantisme un travail ». Avec ses Being Series de 2007, elle explorait l’intimité de couples de lesbiennes tout en s’interrogeant sur l’échec des campagnes de prévention contre le sida qui leur étaient destinées. Avec le projet de Thokozani Football Club – la footballeuse Thokozani Qwabe fut assassinée en 2007 en raison de son homosexualité –, elle militait directement pour une meilleure intégration des femmes dans le monde du sport. Zanele Muholi considère néanmoins

ZANELE MUHOLI/COURTESY OF STEVENSON, CAPE TOWN AND JOHANNESBURG

Ü Apinda Mpako and Ayanda Magudulela, Parktown, Johannesburg 2007.

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JEUNE AFRIQUE


Culture médias que ses clichés sont avant tout d’ordre documentaire. « Je photographie des gens que je connais, avec qui j’ai une relation de long terme, dit-elle. Je ne travaille pas sur commande, je produis des archives. Je souhaite évoquer ceux qui font l’Histoire dans le monde où nous vivons, j’essaie d’une certaine manière d’humaniser ma communauté. » Avec son projet Faces and Phases, réalisé notamment dans les townshipsduGautengcommeAlexandra, Soweto, Katlehong, Kagiso ou Vosloorus, elleexpliquevouloir«prendredesimages de [sa] communauté pour apporter une contribution plus démocratique et représentative à l’histoire homosexuelle en Afrique du Sud ». Elle souhaite aussi mettre en avant « une image plus positive des lesbiennes noires ».

NICOLAS MICHEL

Le travail de Zanele Muholi sera présenté à la Maison rouge (Paris) dans le cadre de la saison croisée France-Afrique du Sud, pour l’exposition collective « My Joburg, la scène artistique de Johannesburg », du 20 juin au 22 septembre 2013. JEUNE AFRIQUE

L

oin du « spectacle de la gay pride », les clichés noir et blanc de Sabelo Mlangeni, né en 1980 à Driefontein, près de Wakkerstroom, dans le Mpumalanga, montrent des hommes qui s’aiment, s’amusent, pique-niquent, se promènent… Une manière de dire que, contrairement au coriace préjugé selon lequel l’homosexualité ne serait pas africaine, elle s’inscrit dans un quotidien finalement banal. Sa série consacrée aux mariages dans les townships, mais aussi au Lesotho, au Mozambique et au Swaziland (Isivumelwano : An Agreement), est présentée jusqu’au 15 juin au Goethe Institute de Johannesburg. Sabelo Mlangeni participe également à l’exposition « My Joburg » du 20 juin au 22 septembre à la Maison rouge (Paris).

P

COURTESY DE JOHANNESBURG ART GALLERY

EN ROGNE. Bien sûr, elle attaque avec la fougue des opprimés l’idée que l’homosexualité ne serait pas africaine, si commune quoique démentie tous les jours par les faits. Mais que personne ne s’avise par ailleurs à ne voir les lesbiennes que comme des victimes: « Chaque fois que des étrangers parlent de nous, c’est pour nous décrire comme des victimes du viol ou de l’homophobie. Nos vies sont toujours dramatisées, rarement comprises. » Pas question non plus de circonscrire le problème à l’Afrique, Zanele Muholi se mettrait en rogne. Pour elle, la France, qui vient tout juste d’adopter le mariage pour tous et a connu une vague de manifestations homophobes, est aussi un pays où le combat éducatif doit être poursuivi. Quant à son propre pays, s’il a la chance d’avoir « la meilleure Constitution au monde », ne lui dites pas qu’il permet à beaucoup d’homosexuels de s’exprimer. « Beaucoup ? Il y a peut-être 50 lesbiennes et 50 gays qui ont voix au chapitre. Ce n’est pas beaucoup! » Alors, pornographiques, les photos de Zanele Muholi ? Il y a beaucoup d’autres épithètes à disposition : tendres,belles,respectueuses,honnêtes, franches, délicates, directes, douces, équilibrées, lumineuses… ●

AGENDA

lasticien xhosa installé à Johannesburg, Nicholas Hlobo (38 ans) explore les questions d’identité, de genre et de race à partir de sa propre expérience homosexuelle en Afrique du Sud. Ses sculptures sont façonnées à partir de rubans de satin ou de caoutchouc noir cousu avec de gros fils de couleurs vives. Ses toiles, présentées dans le cadre de l’exposition « Tyaphaka and Other Words » jusqu’au 14 juin à la galerie Stevenson de Johannesburg, reprennent ces éléments matériels. Certaines de ses œuvres sont à (re)découvrir dans les expositions Ì Igqirha Lendlela, de Nicholas Hlobo (2005).

« My Joburg » du 21 juin au 22 septembre à la Maison rouge (Paris), « PresentTense » du 21 juin au 1er septembre à la Fondation Gulbenkian (Lisbonne), « Out of Fashion : Textiles in International Contemporary Art » jusqu’au 30 juin au Gammel Holtegaard (Copenhague).

C

réateur de mode, performeur et plasticien, AthiPatra Ruga, né en 1984 à Umtata, se penche sur les lectures politiques et idéologiques du corps dans la société sud-africaine et la culture xhosa en particulier. Il propose actuellement The Future White Woman of Azania, une série de performances à la 55e édition de la Biennale de Venise, qui se tient jusqu’au 24 novembre.

E

ngagée dans la défense des droits des femmes, la danseuse et chorégraphe Mamela Nyamza (dont la mère a été violée avant d’être assassinée) dénonçait en 2011 les viols correctifs dont sont régulièrement victimes les lesbiennes dans Abangxolayo. Née à Gugulethu, un township du Cap, en 1976, « l’année des émeutes de Soweto, qui sont devenues pour les artistes sud-africains non seulement une cause de combat, mais aussi un substrat créatif », elle s’interrogera sur l’engagement artistique dans 19-Born – 76-Rebel, du 8 au 14 juillet à Avignon, et sous l’œil de son fils de 13 ans sur les conditions de la féminité dans Hatched, du 17 au 20 juillet auThéâtre 13 (Paris). ● N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

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ANNONCES CLASSÉES

Concernant cette rubrique, adressez-vous à Fabienne Lefebvre -Tél. : 01 44 30 18 76 - Fax : 01 44 30 18 77 - Email. : f.lefebvre@jeuneafrique.com DIFCOM Régie publicitaire centrale du Groupe Jeune Afrique - 57 bis, rue d’Auteuil 75016 Paris - France

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Recrutement - Bourses

Bourses Ibrahim de Leadership


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Annonces classées CENTRE AFRICAIN D'ETUDES SUPERIEURES EN GESTION

AVIS DE RECRUTEMENT CESAG/PMBF 02/ 2013 Le Centre Africain d’Etudes Supérieures en Gestion (CESAG), établissement Qualités requises : Maîtrise du français et de l’outil informatique, aptitudes pédagogiques et de recherche avérées, capacité à développublic international appartenant aux Etats membres de l’Union Economique per la recherche appliquée, excellentes qualités relationet Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), abrite le programme Master en nelles, capacité à travailler en équipe et dans un environBanque et Finance (MBF) créé sur financement de la Fondation pour le nement multiculturel, capacité de travailler en anglais. Renforcement des Capacités en Afrique (ACBF), la Banque de France, la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC), la Commission de l’UEMOA, l’Agence Nationalité : Etre ressortissant d’un pays de l’Afrique sub-saharienne. Française de Développement (AFD) et la Banque Centrale Allemande. PIÈCES À FOURNIR Le CESAG recrute un Coordonnateur pour le programme Master en Le dossier de candidature mentionnant la référence du poste doit comprendre les pièces ci-après : Banque et Finance. MISSION PRINCIPALE Assurer la coordination pédagogique et administrative des activités, de même que l’organisation de séminaires et la recherche de financements en veillant à la qualité des enseignements, à l’encadrement adéquat des étudiants et à l’équilibre financier du programme. PROFIL DU CANDIDAT Diplôme : DESS, MBA, Doctorat ou diplômes équivalents en Gestion, Finance, Banque, Economie.

1. Une lettre de motivation ; 2. Un curriculum vitae (CV) ; 3. Un extrait d’acte de naissance ; 4. Un certificat de nationalité ; 5. Les copies certifiées conformes des diplômes ; 6. Les attestations ou certificats de travail.

Ce dossier complet doit être déposé au plus tard le 25 juin 2013 à l’attention du Chef du Service des Ressources Humaines. B.P. 3802 Dakar (Sénégal) Expérience : 5 ans dans l’enseignement supérieur et la recherche. Une Tél. : +221 33 839 73 60 / Fax : +221 33 821 32 15 expérience supplémentaire dans l’administration de la forma- Courriel : courrier@cesag.sn tion et/ou dans l’utilisation d’une salle de marché serait un Le détail de l’offre peut être consulté sur le site internet du CESAG : www.cesag.sn atout.

carrières

Recrutement

Nations Unies

Programme Jeunes administrateurs

Avez-vous la motivation de faire une différence dans le monde ? Êtes-vous altruiste et désireux de participer à une cause plus ambitieuse au service de l’humanité ? Le Programme Jeunes administrateurs est une initiative qui permet de recruter de nouveaux talents par le biais d’un concours d’entrée annuel aux Nations Unies. Le concours est ouvert aux ressortissants de pays insuffisamment représentés parmi le personnel de l'Organisation. Le Programme sert de tremplin aux jeunes professionnels hautement qualifiés à travers le monde qui veulent entamer une carrière aux Nations Unies. Le concours 2013 est ouvert aux candidats justifiant d’un parcours universitaire dans le domaine de l’administration, de la gestion financière, des affaires juridiques, de l’information ou de la statistique. Si cela est votre cas, il se peut que vous remplissiez les conditions pour participer au Programme Jeunes administrateurs, tenu le 3 décembre 2013 en différents lieux à travers le monde. La période de dépôt des candidatures court du : 3 juin au 1 août 2013 pour les concours de l’administration, de la gestion financière et de l’information ; 8 juillet au 5 septembre 2013 pour les concours des affaires juridiques et de la statistique. Les candidatures des femmes sont fortement encouragées.

Pour plus d’informations sur les pays participants, les conditions d’admissibilité et la procédure de candidature, rendez-vous à l’adresse : http://careers.un.org/YPPfr N° 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

JEUNE AFRIQUE


Annonces classées

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Expert (m/f) Support to the Operationalization of the African Union Disability Architecture (AUDA) - Ethiopia, Addis Abeba Field of activity / The 3rd AU Conference of Ministers in charge of Social Development adopted the Continental Plan of Action on the African Decade of Persons with Disabilities (2010-2019). The Ministers also approved the African Union Disability Architecture (AUDA), which is based on a tripod of legal, programmatic and institutional components. The legal component is being developed, consisting of a Protocol on the Rights of Persons with Disabilities, an additional protocol to the African Charter on Human and People`s Rights. The Continental Plan of Action represents the programmatic component with the African Union Commission beeing responsible for the coordination and follow-up of its implementation by the Member States. The institutional component is being developed and is expected to be functional towards the end of 2014. Your tasks / The expert will be recruited for a two year period to work in the Department of Social Affairs (DSA) based in the African Union Com-

mission in Addis Abeba, Ethiopia. The tasks of the Expert will include: 1) Support the Department of Social Affairs, African Union Commission, in operationalising the African Union Disability Architecture, and in particular, facilitate the implementation of the Continental Plan of Action on the African Decade for Persons with Disabilities (CPoA) by Member States and Regional Economic Communities (RECs); 2) Facilitate Regional Economic Communities to form memberships, planning new work programmes and organising first meetings of the Regional Disability Technical Experty Committees (RDTAC) as provided for by the CPoA; 3) Draft statutes for the African Union Disability Institute (AUDI); 4) Assist in the establishment of the institutional component of the African Union Disability Architecture, i.e. the African Union Disability Institute (AUDI) and the Disability Consultative Committee (DCC); 5) Assist in preparing documentation regarding disability for the 4th AU Conference of Ministers of Social Development, scheduled for May 2014; 6) Assist in organising the first meeting of the Disability Consultative Committee in September 2014; 7) Assist the DSA in preparing a capacity building plan for disability issues, also mainstreaming disability inclusive development within relevant AUC Departments and AU Organs and RECs, including the conceptualization, implementation and monitoring of training on disability issues for Member States. The expert will report to the Director of Social Affairs, AU Commission through the continuous supervision of the Head of Division for Social Welfare, Vulnerable Groups, Drug Control and Crime Prevention.

Your qualification / As a well-experienced expert you have a university degree in a relevant field (Social Science, Public Administration, Law, Education or equivalent) and a minimum of five years of professional experience. Fluent written and oral command of English language, working level command of French language and one of the other AU languages would be an added value. You have demonstrated knowledge with regard to organizational development and strategic planning. You are experienced in project cycle management, including drafting project proposals, budgeting, financial management and monitoring and evaluation. We are expecting thorough conceptual and practical knowledge with regard to the inclusion of persons with disabilities and the UN Convention on Rights of Persons with Disabilities (UNCRPD). Experience in mainstreaming processes will be an asset. You have excellent written and oral communication and interpersonal skills. Your application / Please note that we can only receive and process applications sent via our e-recruiting system under www.giz.de/en. Under “Jobs and careers“, “GIZ job opportunities”, enter Job ID 14392. Application deadline: July 15th, 2013. Period of assignment: September 2013 – September 2015. We support applications from cititizens of one of the African Union Member States. We highly welcome applications of Persons with Disabilities.

www.giz.de/en

Dans le cadre de la mise en oeuvre des activités complémentaires du « Programme de Renforcement des Capacités Commerciales et Entrepreneuriales du Congo Brazzaville (PRCCE-CB)», dans ses composantes 2 et 3, le CDE recrute une équipe pour l’Unité de gestion de projet (UGP). L’UGP assurera la gestion courante de l’action. Elle sera basée à Pointe Noire et sera financée par le CDE. L’équipe comprendra : un chef de projet expert, un responsable administratif et financier et un personnel administratif recrutés localement (un (e) assistante et un chauffeur/logisticien). Le budget opérationnel des composantes 2 et 3 du PRCCE-CB s’élève à 4.300.000 euros sur une période de 36 mois. Le budget maximum total de l’UGP est de 1.100.000 euros sur 36 mois, couvrant la location et l’aménagement des bureaux ; l’achat des équipements de transport, informatiques et bureautiques, les services extérieurs et les charges du personnel. Le budget total destiné au poste d’expert, chef de l’UGP, est de 360.000 euros sur 36 mois, tous frais et charges compris. Date-butoir pour l'envoi des candidatures : le 4 juillet 2013, à 20h (heure de Bruxelles). Les sites où cet avis complet est publié officiellement sont : - www.devex.com - www.developmentaid.org - www.dgmarket.com - www.cde.int L’avis de marché de services complet peut être téléchargé via le lien suivant : - http://www.cde.int/documents/201363POO7PXCAPO.pdf Le CDE n’est pas tenu comme responsable si d’autres sites publient cette annonce et changent les dates de clôture de cet avis. JEUNE AFRIQUE

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Recrutement - Avis de Marché

AVIS DE MARCHÉ DE SERVICES

Recrutement de l’équipe de l’Unité de Gestion pour la mise en œuvre du Programme de Renforcement des Capacités Commerciales et Entrepreneuriales du Congo Brazzaville. (CRIS : 2008/019-689) Composante 2 et 3 de l’avenant à la convention de financement (COB/005/08) du Projet de Renforcement des Capacités Commerciales et Entrepreneuriales (PRCCE) CG/FED/2008/021-012.


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Annonces classées MINISTÈRE DE L’ÉCONOMIE, DES FINANCES, DU PLAN, DU PORTEFEUILLE PUBLIC ET DE L’INTÉGRATION PROJET DE RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DE TRANSPARENCE ET DE GOUVERNANCE Crédit n° 5063-CG- Financement IDA - Unité d’Exécution du Projet B.P 2116 Brazzaville, République du Congo, Tel : 05 551 96 11, Courriel: prctg@yahoo.fr

AVIS DE SOLLICITATION À MANIFESTATION D’INTÉRÊT N° 10/MEFPPPI-CAB/PRCTG II/13 « Recrutement d’un Consultant individuel international pour l’identification des besoins et l’élaboration d’un programme de formation de la Cour des Comptes et de Discipline Budgétaire y compris le Parquet Général » représentant du client) ; 1. Le Gouvernement de la République du Congo a obtenu auprès de l’Association • l’adresse complète du consultant (localisation, personne à contacter, BP, Téléphone, Internationale de Développement (IDA) un crédit (Crédit n° 5063-CG) du Projet de Fax, Courriel). Renforcement des Capacités de Transparence et de Gouvernance (PRCTG), et a l’intention d’utiliser une partie du montant dudit crédit pour financer les services de consultants Profil du Consultant : - être titulaire d’un diplôme BAC +5 en ressources humaines, ayant une expérience d’au ci-après : Recrutement d’un Consultant individuel international pour l’identification moins dix (10) ans dans le domaine de la planification des besoins en ressources des besoins et l’élaboration d’un programme de formation de la Cour des Comptes humaines, en développement des capacités techniques et professionnelles et de gestion et de Discipline Budgétaire y compris le Parquet Général. des programmes et des plans de formation ; 2. L’objectif général de la mission est d’élaborer un programme de formation de la CCDB y - avoir une expérience dans les domaines de la reddition des comptes, de la vérification compris le Parquet Général en matière de conduite efficiente des missions de reddition des des états financiers, d’audit et de contrôle des institutions publiques et la connaissance comptes et de certification des états financiers de l’Etat. des procédures de l’INTOSAI serait un atout. Plus particulièrement, il s’agira : (i) d’établir un état des lieux des compétences actuelles ; (ii) de définir, au regard du périmètre d’intervention de la CCDB y compris le Parquet 4. Sur cette base, un Consultant individuel sera sélectionné conformément aux Directives de la Banque « Sélection et Emploi des Consultants par les Emprunteurs de la Banque Mondiale Général, les quantités et les qualifications requises pour la conduite efficiente des missions de janvier 2011». Le Consultant sera sélectionné sur la base de la comparaison des CV. décrites ci-dessus ; (iii) de déterminer les écarts entre les compétences actuelles et celles requises ; (iv) de proposer des modules spécifiques de formations destinés à accroitre pro5. Les intéressés doivent s’adresser à l’Unité d’Exécution du PRCTG pour obtenir des informagressivement, les capacités professionnelles des Magistrats et autres personnels administratifs tions supplémentaires, à l’adresse ci-dessous, les jours ouvrables, de 8 h 00 à 16 h 00. et techniques évoluant auprès de l’Institution ; (v) de déterminer les coûts estimatifs des 6. Les manifestations d’intérêt doivent être déposées sous pli fermé ou en version électronique modules spécifiques de formations. à l’adresse ci-dessous, au plus tard, le mardi 25 juin 2013 : La durée de la mission est estimée à cent (100) jours.

Manifestation d’intérêt

3. L’Unité d’Exécution du PRCTG invite les candidats intéressés à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. Les Consultants intéressés doivent fournir des informations pertinentes indiquant leurs capacités techniques à exécuter lesdits services. Le dossier de candidature devra comporter les renseignements suivants : • les copies des diplômes ; • les compétences du candidat pour la mission, notamment l’indication de références techniques vérifiables en matière de missions similaires (liste des précédents clients pour ce type de mission : année, coût de la mission, nom et adresse complète du

PROJET DE RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DE TRANSPARENCE ET DE GOUVERNANCE UNITÉ D’EXÉCUTION DU PROJET - SECTION PASSATION DES MARCHÉS B.P 2116 Brazzaville, République du Congo - Derrière le Commissariat Central Courriel : prctg@yahoo.fr Brazzaville, le 05 Juin 2013 Le Coordonnateur Marie Alphonse ITOUA

MINISTÈRE DE L’ÉCONOMIE, DES FINANCES, DU PLAN, DU PORTEFEUILLE PUBLIC ET DE L’INTÉGRATION PROJET DE RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DE TRANSPARENCE ET DE GOUVERNANCE Crédit n° 5063-CG- Financement IDA - Unité d’Exécution du Projet B.P 2116 Brazzaville, République du Congo, Tel : 05 551 96 11, Courriel: prctg@yahoo.fr

AVIS DE SOLLICITATION À MANIFESTATION D’INTÉRÊT N° 11/MEFPPPI-CAB/PRCTG II/13 « Recrutement d’un Consultant individuel international chargé de l’appui à la Direction des Systèmes d’Information(DSI) du Ministère de l’Economie, des Finances, du Plan, du Portefeuille Public et de l’Intégration pour le développement du Système Intégré des Dépenses et des Recettes de l’Etat (SIDERE) »

1. Le Gouvernement de la République du Congo a obtenu auprès de l’Association Internationale de Développement (IDA) un crédit (Crédit n° 5063-CG) du Projet de Renforcement des Capacités de Transparence et de Gouvernance (PRCTG), et a l’intention d’utiliser une partie du montant dudit crédit pour financer les services de consultants ci-après : Recrutement d’un Consultant individuel international chargé de l’appui la DSI du MEFPPPI pour le développement de SIDERE.

le domaine des systèmes d’informations : informatique, télécom, bases de données, réseaux... ; - avoir une expérience professionnelle d’au moins dix (10) ans dans la mise en place de solutions informatiques ; - la connaissance des systèmes de gestion des finances publiques en la République du Congo serait atout.

2. L’objectif de la mission est d’apporter une assistance technique à la DSI du MEFPPPI dans la réalisation des différentes phases du processus de mise en œuvre de la solution informatique La durée de la mission est de soixante quinze (75) jours.

4. Sur cette base, un Consultant individuel sera sélectionné conformément aux Directives de la Banque « Sélection et Emploi des Consultants par les Emprunteurs de la Banque Mondiale de janvier 2011 ». Le Consultant sera sélectionné sur la base de la comparaison des CV.

3. L’Unité d’Exécution du PRCTG invite les candidats intéressés à manifester leur intérêt à fournir les services décrits ci-dessus. Les Consultants intéressés doivent fournir des informations pertinentes indiquant leurs capacités techniques à exécuter lesdits services. Le dossier de candidature devra comporter les renseignements suivants : • les copies des diplômes ; • les compétences du candidat pour la mission, notamment l’indication de références techniques vérifiables en matière de missions similaires (liste des précédents clients pour ce type de mission : année, coût de la mission, nom et adresse complète du représentant du client) ; • l’adresse complète du consultant (localisation, personne à contacter, BP, Téléphone, Fax, Courriel). Profil du Consultant : - être titulaire d’un diplôme d’enseignement supérieur (BAC + 5 au moins) dans

N° 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

5. Les intéressés doivent s’adresser à l’Unité d’Exécution du PRCTG pour obtenir des informations supplémentaires, à l’adresse ci-dessous, les jours ouvrables, de 8 h 00 à 16 h 00. 6. Les manifestations d’intérêt doivent être déposées sous pli fermé ou en version électronique à l’adresse ci-dessous, au plus tard, mardi 25 juin 2013 : PROJET DE RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DE TRANSPARENCE ET DE GOUVERNANCE UNITÉ D’EXÉCUTION DU PROJET - SECTION PASSATION DES MARCHÉS B.P 2116 Brazzaville, République du Congo - Derrière le Commissariat Central Courriel : prctg@yahoo.fr Brazzaville, le 06 juin 2013 Le Coordonnateur Marie Alphonse ITOUA JEUNE AFRIQUE


Annonces classées

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Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires Organization for the Harmonization of Business Law in Africa Organizacion para la Armonizacion en Africa de la Legislacion Empresarial Organização para a Harmonização em Africa do Direito dos Negocios

Retrouvez

SECRETARIAT PERMANENT

AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL Date : 10 juin 2013 Financement : OHADA Objet : Sélection d’un cabinet de recrutement du personnel de l’OHADA

toutes

Le Secrétariat Permanent de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) lance un appel d’offres international en vue de la sélection d’un cabinet chargé de conduire le processus de recrutement du Secrétaire Général du Centre d’arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) qui sera basé à Abidjan (Côte d’Ivoire).

nos

Contre le versement d’une somme non remboursable de deux cent mille (200 000) francs CFA, payable par chèque certifié, transfert bancaire ou, contre récépissé, en espèces entre les mains du Directeur Financier et Comptable du Secrétariat Permanent, le dossier d’appel d’offres (DAO) pourra être retiré à l’adresse suivante :

annonces

Secrétariat Permanent de l’OHADA, Immeuble OHADA, quartier Hippodrome, face MINREX, B.P 10071 Yaoundé – Cameroun Tél. : (+237) 22 21 09 05 / fax: (+237) 22 21 67 45, courriel : secretariat@ohada.org

sur le site :

A leur demande, le Secrétariat Permanent pourra expédier, par courrier express contre paiement d’une somme forfaitaire de cent mille (100.000) francs CFA, pour les frais d’envoi, le DAO aux cabinets soumissionnaires intéressés. La date limite de remise des offres au Secrétariat Permanent de l’OHADA à Yaoundé (Cameroun), est fixée au 10 juillet 2013 à 12 heures, heure de Yaoundé (Cameroun). L’ouverture des offres, devant les soumissionnaires qui le désirent ou leurs représentants, aura lieu en séance publique le même jour à 13 heures, heure de Yaoundé (Cameroun).

www.jeuneafrique.com

Le Secrétaire Permanent

UNION AFRICAINE

AFRICAN UNION

UNIÃO AFRICANA

18/PSD/13 1. The African Union has allocated funds for the procurement of the above mentioned goods and ancillary services, and now invites sealed bids from eligible bidders for the supply of 10 (ten) Motor Vehicles 2. Bidding is open to all eligible bidders who can demonstrate at least 5 years’ experience in supplying similar goods, have a manufacturer’s authorisation in the case of dealers, and are duly incorporated as firms. 3. Interested bidders may obtain the detailed bid document on the African Union website: http://www.au.int/en/bids. Clarifications and additional details can be obtained from the address given below. 4. Bids must be delivered to the address below on or before 1500 hours on Friday 12 July 2013. Bids will be opened on the 12th of July 2013, immediately after deadline for submission of bids, in the presence of bidders or bidders’ representatives who choose to attend, at the address below. Late bids will be rejected and returned unopened to bidders. 5. Bids CLEARLY marked “18/PSD/13: SUPPLY AND DELIVERY OF MOTOR VEHICLES” should be addressed to: The Chairperson, AUC Tender Board - The African Union Headquarters 3rd Floor, Building C, TENDER BOX - Roosevelt Street, Addis Ababa Ethiopia - P. O. Box 3243 Tel: +251 11 551 7700 ext. 4341, Fax:+251 11 551 0442 Email: tender@africa-union.org

JEUNE AFRIQUE

N° 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

Appel d’offres

SUPPLY AND DELIVERY OF MOTOR VEHICLES


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Annonces classées

Avis d’Appel d’Offres International

Divers - Appel d’offres

Date : 03 juin 2013 - AAOI N° : 0003

1. Le Ministère du Logement, des Affaires Foncières et de l’Urbanisme de la République du Mali invite par le présent appel d’offres les soumissionnaires éligibles selon les dispositions de la clause 1.7 des Directives pour la passation des marchés financés par la Banque Islamique de Développement à présenter leurs offres sous pli fermé pour les travaux de construction de 250 logements sociaux de type F3 A DALLE et de 250 logements sociaux de type F3 B DALLE à Bamako. Les travaux sont repartis en 10 lots : Lot 1 : 50 logements de type F3 A DALLE Lot 6 : 50 logements de type F3 B DALLE Lot 2 : 50 logements de type F3 A DALLE Lot 7 : 50 logements de type F3 B DALLE Lot 3 : 50 logements de type F3 A DALLE Lot 8 : 50 logements de type F3 B DALLE Lot 4 : 50 logements de type F3 A DALLE Lot 9 : 50 logements de type F3 B DALLE Lot 5 : 50 logements de type F3 A DALLE Lot 10 : 50 logements de type F3 B DALLE 2. Le Ministère du Logement, des Affaires Foncières et de l’Urbanisme de la République du Mali a obtenu un prêt de la Banque Islamique de Développement (BID) pour le financement des Travaux de construction de 500 logements sociaux de type F3 A DALLE et F 3 B DALLE à Bamako. Une partie de ces sommes accordées au titre de ce projet sera utilisée pour effectuer les paiements prévus dans le cadre de l’exécution du marché des travaux de construction de 500 logements sociaux de type F3 A DALLE et F3 B DALLE. 3. Les travaux prévus dans le cadre de ce marché sont à réaliser dans un délai maximum de 240 jours. 4. Les soumissionnaires intéressés à concourir peuvent obtenir des informations supplémentaires et examiner les Dossiers d’Appel d’Offres dans les bureaux de : L’Office Malien de l’Habitat situé dans la cour du Ministère de l’Equipement et des Transports du Mali sis à Darsalam, BP : E24, Tél. : 20 23 24 81 – Bamako. 5. Le Dossier d’Appel d’Offres pourra être acheté par les candidats aux adresses mentionnées ci-dessus et moyennant paiement d’un montant non remboursable de 150 000 F CFA. 6. Les clauses des Instructions aux Soumissionnaires et celles du Cahier des Clauses Administratives Générales sont les clauses du Dossier Type d’Appel d’Offres pour Passation des Marchés de Travaux,Août 2009 publié par la Direction Générale des Marchés Publics, adapté aux procédures des Directives de la Banque Islamique de Développement. 7. Toutes les offres doivent être déposées aux adresses indiquées ci-dessus au plus tard le 8 août 2013 à 10 h 00 et être accompagnées d’une garantie d’offre d’un montant au moins égal à dix millions (10 000 000) de F CFA pour l’ensemble des Lots. Toutefois, les offres peuvent être reçues en salle, juste avant le début proprement dit de l’ouverture des plis. 8. Les offres demeureront valides pour une durée de 120 jours à partir de la date d’ouverture des plis fixée au 8 août 2013 à 10 h 00. 9. Les plis seront ouverts en présence des représentants des soumissionnaires qui souhaitent être présents à l’ouverture, le 8 août 2013 à 10h 00, dans la Salle de Conférence de l’Office malien de l’Habitat, sis dans la cour du Ministère de l’Equipement et des Transports, Darsalam BP : E24, Tél. : 20 23 24 81 – Bamako. 10. Les offres présentées par des entreprises locales et des groupements d’entreprises locales peuvent bénéficier d’une marge de préférence de dix pour cent (10%) lors de l'évaluation des offres. P/ Le Ministre /P.O Le Secrétaire Général Madame SAMAKE Mariame SANGARE Administrateur Civil

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JEUNE AFRIQUE


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AVIS D’APPEL D’OFFRES INTERNATIONAL OUVERT Secrétariat Exécutif Permanent du CNLS Programme d’Intensification et de Décentralisation de la Lutte contre le SIDA au Burundi « PRIDE BURUNDI » AOI N°PRIDE/C/AN4/1/2013 Le Gouvernement de la République du Burundi a obtenu un Don du Fonds 4. Les soumissionnaires éligibles et intéressés peuvent obtenir le dossier d’Appel d’Offres complet en français et/ou des compléments d’informaMondial de Lutte contre le SIDA, la Tuberculose et le Paludisme pour finantions auprès du Secrétariat Exécutif Permanent du CNLS, Programme cer le coût des activités du Programme d’Intensification et de décentralisation d’Intensification et de Décentralisation de la Lutte contre le SIDA au de la Lutte contre le SIDA au Burundi « PRIDE BURUNDI ». Il est prévu Burundi «PRIDE BURUNDI», sis 1er étage, Immeuble «Banque de la ZEP, qu’une partie des sommes accordées au titre de ce Don soit utilisée pour Chaussée Prince Louis RWAGASORE, B.P. 836, Bujumbura, Tél.: 22 24 53 00, l’acquisition de kits scolaires. 22 24 52 96 ; e-mail: rirangira@yahoo.fr ; mbonihadam@yahoo.fr ou 1. Le Secrétariat Exécutif Permanent du CNLS sollicite des offres sous plis feralbertmbesherubusa@yahoo.fr et prendre connaissance des documents més de la part de soumissionnaires éligibles et répondant aux qualificad’Appel d’offres à l’adresse ci-haut mentionnée. tions requises pour fournir des kits scolaires ci-après: 5. Les exigences en matière de qualifications sont: Lot 1 : Cahiers scolaires • Avoir des fonds propres ou une ligne de crédit suffisante pour exécuter 1. Cahiers quadrillés de 100 feuilles : .............................. 246 201 pièces le marché, 2. Cahiers lignés de 100 feuilles : .................................... 246 201 pièces • Avoir exécuté avec satisfaction au moins trois (3) marchés similaires au 3. Cahiers quadrillés de 60 feuilles : ................................ 176 957 pièces courant des trois (3) dernières années et dont le montant est supérieur 4. Cahiers lignés de 60 feuilles : ........................................ 38 469 pièces ou égal au montant de la soumission, 5. Cahiers quadrillés de 48 feuilles : ................................ 271 844 pièces • Ne jamais avoir eu de mauvais antécédents ou litiges avec l’Acheteur, 6. Cahiers lignés de 48 feuilles : ...................................... 143 616 pièces • Etre en possession d’un Numéro d’Identification Fiscal (NIF) pour les 7. Cahiers de calligraphie : ............................................... 117 970 pièces soumissionnaires locaux, 8. Cahiers de dessin : ........................................................ 128 229 pièces • Avoir une attestation de non redevabilité aux Impôts délivrée par l’Office burundais des Recettes « OBR » pour les soumissionnaires locaux, Lot 2 : matériels d’écriture et de dessin 1. Stylos bleus : ................................................................. 435 979 pièces 6. Les offres doivent comprendre une caution de soumission d’un montant 2. Crayons noirs : .............................................................. 141 052 pièces égal à deux pour cent (2%) du montant de la soumission. Celle-ci devra 3. Gomme : ........................................................................ 141 052 pièces rester valide pendant nonante (90) jours comptés à partir du lendemain de 4. Taille crayon : ............................................................... 141 052 pièces l’ouverture des offres 5. Latte : ............................................................................. 108 995 pièces 7. Les offres seront déposées à l’adresse ci-dessus au plus tard le 22 juillet 2003 à neuf (9) heures du matin. Les offres remises hors délais ne Lot 3 : uniformes scolaires seront pas acceptées. 1. Uniformes scolaires pour l’école primaire : ................ 128 229 pièces 2. Uniformes scolaires pour l’école secondaire : .............. 12 823 pièces 8. L’ouverture des offres aura lieu, dans la salle de réunions du SEP/CNLS, le même jour en présence des représentants des soumissionnaires qui le 3. La passation du Marché sera conduite par Appel d’Offres International souhaitent à partir de 9 heures 15 minutes. Ouvert (AOI), et ouvert à tous les soumissionnaires éligibles tels que définis dans le présent dossier d’appel d’offres. Le Secrétaire Exécutif Permanent du CNLS, Docteur Jean RIRANGIRA

AVIS PUBLIC D’APPEL D’OFFRES POUR LA PRÉSÉLECTION DES FOURNISSEURS

JEUNE AFRIQUE

Le dossier d’appel à la présélection des fournisseurs pourra également être consulté sur le site de la CAMEG à l’adresse : www.cameg.com. Toutefois, seuls les candidats qui auront effectivement payé les frais de retrait du Dossier de Présélection verront leurs offres examinées et évaluées par la Commission de présélection des fournisseurs de la CAMEG. Les dossiers de présélection seront adressés à la Direction Générale de la CAMEG, et l’adresse ci-dessus indiquée. Il est porté à la connaissance des candidats que la CAMEG procède dorénavant a l’évaluation technique en continue des offres sur une année. Cela permettra aux fournisseurs de déposer continuellement leurs offres pour obtenir des agréments, mettre à jour leurs dossiers ou élargir leur gamme de produits à longueur d’année. Des tranches de sessions d’analyse et de validation des dossiers des soumissionnaires à la présélection des fournisseurs N° 14/2013 seront organisées selon le chronogramme suivant : Numéro de session 1re session

Date limite de dépôt des dossiers

Période de tenue Période de tenue des travaux des sessions d’analyse de validation

3 septembre 2013 5 septembre au à 17h30 mn TU 15 novembre 2013

25 au 30 novembre 2013

2e session

31 janvier 2014 à 17h30 mn TU

3 février au 29 mars 2014

7 au 12 avril 2014

3e session

30 juin 2014 à 17h30 mn TU

7 juillet au 29 août 2014

8 au 13 septembre 2014

Les agréments obtenus lors de l’appel d’offres N° 13/2011 resteront valides sous réserve de la mise à jour des documents qualité réglementaires listés dans le dossier d’appel d’offres. Le Directeur Général de la CAMEG Moussa SANFO Chevalier de l’Ordre National N° 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

Appel d’offres

La Centrale d’Achat des Médicaments Essentiels Génériques et des Consommables Médicaux (CAMEG) du Burkina Faso, lance un appel d’offres international ouvert de présélection des fournisseurs pour la fourniture de Médicaments Essentiels Génériques (MEG) sous Dénomination Commune Internationale (DCI), d’antirétroviraux, de produits contraceptifs, de consommables médicaux, de matériel médical, de produits dentaires, de réactifs et matériels de laboratoire, de consommables de radiologie et de produits de diagnostic, de médicaments issus de la médecine et pharmacopée traditionnelles du Burkina Faso, de produits nutritionnels spéciaux. Cette procédure a pour objet de dresser une liste validée de couples “produits/fabricants”, après avoir évalué les aptitudes des fournisseurs et la qualité des produits. L’agrément prononcé sera valable pour une période de 4 ans et permettra aux fournisseurs présélectionnés de participer aux consultations restreintes pour les couples produits/fabricants validés durant cette période. Le dossier d’appel à la présélection des fournisseurs, référencé sous le numéro 14/2013, peut être retiré auprès du Secrétariat du Directeur Général de la CAMEG à partir du lundi 03 juin 2013, à l’adresse suivante : Secrétariat du Directeur Général de la CAMEG 01 BP 4877 Ouagadougou 01 BURKINA FASO Tél. : (226) 50 37 37 50/51/52/53/54 - Fax : (226) 50 37 37 57 E-mail : cameg@cameg.bf contre le versement d’une somme non remboursable de 300 000 FCFA, à payer par chèque certifié ou en espèces déposés à la caisse de la CAMEG, contre reçu. Les fournisseurs présélectionnés lors de l’appel d’offres N° 13/2011 et qui désirent élargir leur gamme de produits pour la période de validité de leur agrément pourront se procurer le dossier d’appel à la présélection à l’adresse ci-dessus mentionnée contre le versement d’une somme non remboursable de 150 000 FCFA. Les fournisseurs de médicaments issus de la médecine et pharmacopée traditionnelles du Burkina Faso pourront se procurer le dossier d’appel à la présélection à la même adresse ci-dessus mentionnée contre le versement d’une somme non remboursable de 50 000 FCFA.


Vous & nous

Le courrier des lecteurs Envoyez-nous vos réactions, vos réflexions, vos coups de gueule ou de cœur à redaction@jeuneafrique.com ou au 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris.

Défaillances Ceux qui nous gouvernent… J’OSE ESPÉRER pour nous, peuples, que le Maghreb n’a pas les dirigeants qu’il mérite. À Tunis, un (ex ?) socialiste et militant des droits de l’homme ne fait rien pour imposer ses (ex ?) valeurs à ceux qui, au mieux amateurs, au pire obscurantistes, ont mis deux ans à présenter la plus décevante des Constitutions. Le souverain chérifien semble, lui, préférer les douceurs parisiennes à la chaleur de ses sujets, négligeant même d’accueillir le Premier ministre de la puissante Turquie, l’économie la plus dynamique de la

Méditerranée. Quant à notre président algérien, il a tout simplement disparu : Paris ou Alger ? Mort ou vif ? Vaillant ou défaillant ? Nul ne sait. ● ABDELLATIF MRAD, Alger, Algérie

Gabegie Au nom des miens PRÉSIDENT DES KinoCongolais (Congolais de Kinshasa), Joseph Kabila Kabange vient de nommer un nouveau gouverneur à la Banque centrale du Congo. Une réception a été organisée en l’honneur de l’heureux élu par des représentants de sa province d’origine, le

Katanga – la même d’ailleurs que celle de son prédécesseur. Cela n’a rien d’original. Seulement, nos leaders s’interrogent-ils une seconde sur le message véhiculé auprès du public par la retransmission télévisée de ce genre de réception? Est-ce raisonnable de célébrer la nomination de l’un des nôtres appelé à une mission de service public juste par « affinités provinciales » ? ● KAKEL MBUMB, Lubumbashi, RD Congo

Guinée Dialogue de sourds ELLE A ÉTÉ L’UNE des premières nations à obtenir son indépendance,

Troubles Il faut sauver Bangui NICOLAS SARKOZY a sauvé la démocratie en Côte d’Ivoire, François Hollande a préservé le Mali de la radicalité islamique. Faut-il attendre le prochain président de la République française pour voir Paris engager une action forte de sauvetage du peuple centrafricain, laquelle sera, de toute façon, trop tardive ? Depuis plusieurs semaines, la Centrafrique, par la voix de son Premier ministre Nicolas Tiangaye, appelle son « amie » la France à intervenir, d’une part pour assurer la sécurité

VINCENT FOURNIER/J.A.

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du pays, notamment dans Bangui, d’autre part pour apporter son expertise et des moyens financiers en vue de la reconstruction de l’État. La République centrafricaine connaît peu ou prou les mêmes problèmes que la RD Congo voisine: absence de l’État dans les provinces, installation de bandes armées plus ou moins financées par des pays étrangers, insécurité sur l’ensemble du territoire, pauvreté des populations exsangues, indifférence des voisins et « amis ». En RD Congo au moins, des milliers de Casques bleus tentent tant bien que mal de rétablir la paix, condition du développement. Sous prétexte que son sous-sol est plus pauvre que celui de la RD Congo, doit-on laisser mourir le peuple centrafricain? L’appel de Nicolas Tiangaye en direction de la France mérite une réponse positive, et des plus rapides. ● LIONEL PASCAL,

Soldats de la Fomac près de Sibut, le 9 mars 2013.

N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

Périgueux, France

en 1958. Mais depuis, elle n’est plus qu’embûches, dictatures, manipulation et désordre, orchestrés par les régimes successifs et par l’armée. Résultat, la Guinée d’aujourd’hui témoigne d’une gestion calamiteuse des affaires dans un pays pourtant doté d’un énorme potentiel. Et, après une élection présidentielle réussie, Conakry n’a toujours pas amorcé son décollage économique en raison des retards accumulés ces derniers mois sur le plan politique. Alors que le président Alpha Condé a largement tardé à organiser les élections législatives, les opposants, eux, s’obstinent à mettre leurs partisans dans la rue pour contester leur tenue. Les uns et les autres veulent-ils vraiment le développement de la Guinée? Une fois de plus, le peuple guinéen fait les frais d’une absence de dialogue entre pouvoir et opposition. J’en appelle au sens des responsabilités dans les deux camps. Les morts et les blessés de ces derniers jours, le peuple guinéen n’en veut pas. ● LATIF CAMARA, Neuchâtel, Suisse

Optimisme Pour une Afrique plus poétique INTERPELLÉ par les événements qui bouleversent le sud et l’est de la Méditerranée depuis 2011, je me suis récemment mis à lire Jeune Afrique pour tenter de comprendre de manière plus complète et approfondie l’histoire qui s’y écrit en ce moment. Excellent choix ! Mais j’avoue que, prenant aussi contact avec une région que je connaissais peu, l’image qu’on en retient après lecture du magazine est assez apocalyptique : intégrismes, désordres, crises et guerres… JEUNE AFRIQUE


Vous nous

chiite et les gouvernants occidentalisés. ● PH. KHALID VIGNEAUD, Poissy, France AP/SIPA

Vos lecteurs les plus novices seraient ravis d’y voir aussi, parfois, quelques « invitations au voyage », des reportages convaincants sur la beauté et les richesses de ces pays, du positif, en somme ! ●

Ì Mokhtar Belmokhtar. La tête du jihadiste algérien est mise à prix par les États-Unis.

FRANÇOIS CASTELLO, Dijon, France

Al-Qaïda Une autre forme de résistance ? EN RÉACTION à l’emprise croissante d’un super pouvoir chiite au Proche-Orient et au Moyen-Orient se confirment chaque mois davantage l’émergence et la consolidation d’une double résistance sunnite : résistance politique et résistance religieuse qui se traduisent très rapidement par une résistance armée devant l’intensité de la

répression. Cette résistance armée porte pour nom jihad dans l’islam sunnite et c’est sous cette appellation qu’elle est unanimement reconnue dans l’intégralité du monde musulman. On comprend donc que la tentation des Occidentaux et de leurs médias de décrire la lutte armée de ces groupes comme relevant de l’islam radical ne peut être perçue par les masses arabes et musulmanes que comme une rhétorique purement

européenne. C’est à l’ombre de ces révolutions, et à l’exact opposé des calculs occidentaux, que l’organisation Al-Qaïda semble de plus en plus se muer en symbole de ralliement pour ces groupes sunnites entrés en résistance. Que ce soit au Pakistan, dans les camps palestiniens au Liban, dans les zones frontalières de l’Iran ou bien sûr en Irak et en Syrie, Al-Qaïda s’impose comme point de ralliement des jeunes sunnites en révolte contre le pouvoir

Armée Questions autour d’une force africaine LA MISE EN PLACE d’une force africaine d’intervention rapide m’inquiète. Ma crainte, c’est de la voir se transformer en organisation au service de dictateurs africains déterminés à se maintenir au pouvoir. Car il est évident que, en cas de troubles dans un pays, cette force penchera à 90 % du côté du pouvoir en place. À preuve, l’inertie des présidents africains lors de la crise postélectorale en Côte d’Ivoire. ● MAMADOU SECK, Brazzaville, Congo

Société en commandite par actions au capital de 15 000 000 € Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS R.C.S. Paris B 784 683 484

Avis de convocation Les actionnaires de la société susvisée sont informés qu’ils sont convoqués au siège social, 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris, Le mercredi 26 juin 2013 à 9 heures 30 en Assemblée Générale Ordinaire à l’effet de délibérer sur l’ordre du jour suivant : • Lecture du rapport de gestion de la Gérance. • Lecture du rapport du Conseil de Surveillance. • Lecture du rapport du Commissaire aux Comptes sur les comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2012. • Lecture du rapport du Commissaire aux Comptes sur les comptes consolidés de l’exercice clos le 31 décembre 2012 • Lecture du rapport spécial du Commissaire aux Comptes sur les conventions visées à l’article L 226-10 du Code de commerce. • Approbation des dites conventions ainsi que des comptes et opérations de l’exercice. • Quitus au Gérant, aux membres du Conseil de surveillance et au Commissaire aux comptes. • Approbation des comptes annuels de l’exercice 2012. • Approbation des comptes consolidés dudit exercice. • Affectation du résultat de l’exercice de la société mère. • Autorisation d’achat d’actions de la société en vue de JEUNE AFRIQUE

l’attribution d’actions gratuites aux membres du personnel et aux mandataires sociaux. Tout actionnaire a le droit d’assister à l’Assemblée et de prendre part aux délibérations avec autant de voix qu’il possède ou représente d’actions, sans limitation. Au cas où un actionnaire ne pourrait assister personnellement à cette Assemblée, il peut s’y faire représenter par un autre actionnaire ou par un conjoint, en lui remettant un pouvoir. S’il désire voter par correspondance, il peut se procurer le formulaire de vote et ses annexes au siège social. La demande doit être effectuée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, et parvenir à la société six jours au moins avant la date prévue de cette Assemblée. Les votes par correspondance ne seront pris en compte que si les formulaires dûment remplis parviennent à la société trois jours au moins avant la réunion de l’Assemblée. LA GÉRANCE N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

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HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL POLITIQUE, ÉCONOMIE, CULTURE

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Post-scriptum Tshitenge Lubabu M.K.

Fondé à Tunis le 17 oct. 1960 par Béchir Ben Yahmed (53e année) Édité par SIFIJA Siège social : 57 bis, rue d’Auteuil – 75016 PARIS Tél. : 01 44 30 19 60 ; Télécopieurs : rédaction : 01 45 20 09 69 ; ventes : 01 45 20 09 67 ; Courriel : redaction@jeuneafrique.com DIRECTION

Mon discours d’Addis

M

ESDAMES, MESSIEURS les chefs des États membres de l’Union africaine (UA), comme vous, j’ai entendu les propos tenus le 27 mai à Addis-Abeba par Hailemariam Desalegn, président en exercice de notre organisation. Parlant de la Cour pénale internationale (CPI), le Premier ministre éthiopien a affirmé que cette institution mène une sorte de « chasse raciale » en poursuivant uniquement des Africains. Routinier, vous en conviendrez, même si vous pensez comme lui. Après le Soudanais Omar el-Béchir, c’est au tour du nouveau président du Kenya, Uhuru Kenyatta, et de son vice-président, William Ruto, d’être harcelés par la CPI. Si j’ai bien compris Hailemariam, et tous ceux qui soutiennent cette thèse, nous, pauvres Africains, sommes, une fois de plus, victimes d’un complot international. La chasse au nègre a donc repris ? À d’autres ! Car même un nourrisson vous répondra, les yeux dans les yeux : « Areu ! » Traduction : « Votre disque est rayé, changez de logiciel. »

Mesdames, messieurs les chefs d’État, en certaines circonstances, il vaut mieux vous taire. Vous aurez noté que Hailemariam n’a pas rappelé aux Africains que quarante-trois pays du continent ont signé le statut de Rome, dont la CPI est issue. Que trente-quatre d’entre eux en ont ratifié l’acte fondateur. Je vous le concède : c’est un oubli. Soutenir Kenyatta et Ruto ? Soit. Mais est-ce à dire que le Kenya n’a pas connu l’enfer après la présidentielle de décembre 2007 ? Que les politiques n’y ont pas attisé la haine entre communautés, qu’il n’y a pas eu plus de 1 000 morts et des milliers de déplacés ? Prendre le parti des bourreaux ou des tireurs de ficelles, c’est cracher sur les morts, les veufs et les veuves, les orphelins, les éplorés du Kenya. C’est cracher sur les femmes violées du Kivu. C’est insulter les estropiés de Sierra Leone. C’est salir la mémoire des femmes de Conakry violées un 28 septembre 2009 et de tous ceux que la soldatesque a abattus de sang-froid. Certains parmi vous portent une très lourde responsabilité dans ces tragédies. Doivent-ils continuer de tuer, de narguer le continent en affichant un nationalisme factice, un panafricanisme cannibale, sans avoir de comptes à rendre ? L’honneur d’un homme, me disait ma grand-mère, ne consiste pas à recourir à des artifices pour fuir ses responsabilités. L’homme, le vrai, assume. Accusé à tort, il doit prouver son innocence. Reconnu coupable, il expie ses fautes. Rongé par la honte et le remords, il se pend au lieu de pavaner. Il y a parmi vous des dirigeants à la conscience et aux mains souillées par le sang des innocents. Quelle cour avez-vous créée pour les juger ? L’Afrique est maltraitée, humiliée, discriminée ? Et vous voulez qu’on lui fiche la paix ? Ah, la vieille antienne de la victime permanente qui se regarde dans un miroir déformant ! Chers leaders africains, je croirai en votre volonté d’indépendance, en votre soif de dignité le jour où vous ne vivrez plus de dons de l’étranger. Vous ne serez crédibles que lorsque nous pourrons juger ceux qui embrasent l’Afrique. Alors ce sera la fin de l’imposture et le début de notre vraie indépendance. ●

Directeur de la publication : BÉCHIR BEN YAHMED (bby@jeuneafrique.com) Directeur général : Danielle Ben Yahmed Vice-présidents: Aldo de Silva, Danielle Ben Yahmed, François Soudan, Amir Ben Yahmed Actionnaire principal : Béchir Ben Yahmed RÉDACTION Directeur de la rédaction : François Soudan (f.soudan@jeuneafrique.com) Directeurs exécutifs : Marwane Ben Yahmed (mby@jeuneafrique.com), Amir Ben Yahmed (aby@jeuneafrique.com) Rédaction en chef : Élise Colette (éditions électroniques, e.colette@jeuneafrique.com), Laurent Giraud-Coudière (technique, lgc@jeuneafrique.com) Conseillers de la direction de la rédaction : Hamid Barrada, Aldo de Silva, Dominique Mataillet, Renaud de Rochebrune Secrétariat : Chantal Lossou, Joëlle Bouzignac Chefs de section : Joséphine Dedet (La semaine de J.A.), Michael Pauron (Grand angle), Anne Kappès-Grangé (Afrique subsaharienne), Tarek Moussa (Maghreb & Moyen-Orient), Frédéric Maury (Économie), Jean-Michel Aubriet (Europe, Amériques, Asie), Cécile Manciaux (Le Plus de J.A.), Séverine Kodjo-Grandvaux (Culture & médias), Clarisse Juompan-Yakam (Vous & nous) Secrétaires de rédaction : Sabine Clerc, Fabien Mollon, Ophélie Négros Rédaction : Pascal Airault, Youssef Aït Akdim, Farid Alilat, Mehdi Ba (à Dakar), Stéphane Ballong, Ryadh Benlahrech, Pierre Boisselet, Rémi Carayol, Julien Clémençot, Frida Dahmani (à Tunis), Georges Dougueli, Malika Groga-Bada, Trésor Kibangula, Christophe Le Bec, Nicolas Michel, Haby Niakate, Cherif Ouazani, Abdel Pitroipa, Fanny Rey, Laurent de Saint Périer, Tshitenge Lubabu M.K.; collaborateurs : Edmond Bertrand, Christophe Boisbouvier, Patrick Seale ; accords spéciaux : Financial Times Responsable de la communication : Vanessa Ralli (v.ralli@jeuneafrique.com) RÉALISATION Maquette : Marc Trenson (directeur artistique), Christophe Chauvin, Stéphanie Creuzé, Julie Eneau, Jean-Philippe Gauthier, Éric Le Mière, Valérie Olivier ; révision : Nathalie Bedjoudjou (chef de service), Vladimir Pol ; fabrication : Philippe Martin (chef de service), Christian Kasongo ; service photo : Dan Torres (directrice photo), Nathalie Clavé, Vincent Fournier, Claire Vattebled ; documentation : Anita Corthier (chef de service), Sylvie Fournier, Florence Turenne, Angéline Veyret JEUNEAFRIQUE.COM Direction éditoriale : Élise Colette ; chefs d’édition : Pierre-François Naudé, Frédéric Maury (économie) ; rédaction : Vincent Duhem, Jean-Sébastien Josset, Trésor Kibangula, Mathieu Olivier, Benjamin Roger et Nicolas Teisserenc Responsable web : Jean-Marie Miny ; studio : Cristina Bautista, Jun Feng et Maxime Pierdet VENTES ET ABONNEMENTS Directeur marketing et diffusion : Philippe Saül ; responsable des ventes adjointe : Sandra Drouet ; chef de produit : Dhouha Boistuaud, Maty N’Dome ; abonnements : Laetitia Banelle avec: COM&COM, Groupe Jeune Afrique 18-20, avenue Édouard-Herriot, 92350 Le Plessis-Robinson. Tél. : 33 1 40 94 22 22 ; Fax : 33 1 40 94 22 32. E-mail : jeuneafrique@ cometcom.fr ●

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N O 2735 • DU 9 AU 15 JUIN 2013

JEUNE AFRIQUE



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