côte d’ivoire la machine Ouattara
Hebdomadaire international indépendant • 56e année • no 2857 • du 11 au 17 octobre 2015
jeuneafrique.com
Mali SanOgO, Sa vie en priSOn
NiGER
Entre deux fronts
Malgré la menace terroriste qui plane au nord comme au sud, le pays semble en paix. Spécial 26 pages, à quatre mois de la présidentielle et des législatives.
édition Niger
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AREVA et le Niger : Un partenariat durable
Premier employeur privé du pays, les activités minières génèrent plus de 4 000 emplois directs et indirects dont plus de 98% sont assurés par des nigériens. Les sociétés minières SOMAIR et COMINAK exploitent des gisements situés dans le nord du Niger, avec une production de plus de 3 800 tonnes d’uranium en 2014. Concernant le gisement d’IMOURAREN, son exploitation sera lancée au moment le plus opportun en fonction de l’évolution du marché. Engagés dans une démarche de performance, de sécurité et d’amélioration continue, AREVA et les sociétés minières exercent leurs activités dans le respect de l’environnement et des hommes tout en contribuant au développement des territoires d’implantation. Des actions de développement sont ainsi menées notamment dans les domaines de la santé, l’enseignement, du développement agricole avec le projet Irhazer ou des infrastructures routières avec la réhabilitation d’un tronçon de la route Tahoua- Arlit.
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Présents au Niger depuis plus de 50 ans, AREVA met en valeur le potentiel uranifère grâce aux sociétés nigériennes SOMAIR, COMINAK et IMOURAREN, dont le Groupe est l’opérateur et l’actionnaire principal.
LE pLus
de Jeune Afrique
Politique C’est l’heure des comptes
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Portraits Ceux qui vont faire 2016 interview Alma Oumarou, ministre du Commerce société Les fous rires du cousinage à plaisanterie
NigEr
Entre deux fronts jeune afrique
© Mediacolors/andia.fr
Malgré les turbulences qui affectent la région et les menaces terroristes qui planent au nord comme au sud, le pays est en paix. Et Mahamadou Issoufou a eu les coudées franches pour tenter de répondre aux attentes de ses concitoyens. À quatre mois de la présidentielle et des législatives, bilan du quinquennat socialiste.
n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
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LE pLus
Le Plus de Jeune Afrique
de Jeune Afrique
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Prélude François Soudan
NigEr
Entre deux fronts
Calmer le jeu
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ous ceux qui ont du niger l’image, désespérante, d’un pays abonné à la queue de classement des indices de développement humain seraient avisés de prendre connaissance du dernier et très sérieux indice de la gouvernance africaine, publié le 5 octobre par la Fondation mo ibrahim.
François Hollande, habitué du débat (et du combat) public depuis ses années d’étudiant et dont les camarades dans la région ont pour nom alpha condé et ibrahim Boubacar Keïta, sait qu’il lui faudra décrisper l’atmosphère politique nigérienne s’il veut être réélu dans les conditions qu’il appelle lui-même de ses vœux, à savoir « propres et qui ne jettent pas le discrédit sur la classe politique ».
Côté gouvernance globale – soit la moyenne des quatre critères de jugement définis par la fondation –, le niger Or, depuis la crise ouverte par le retrait figure à la 33e place sur 54, mieux que la en 2013 de l’ex-président de l’assemblée côte d’ivoire, le cameroun, la libye ou nationale Hama amadou – devenu, en l’angola. dans le détail, si le pays a perdu son exil parisien, le plus déterminé des des places précieuses dans le secteur de adversaires du chef de l’État –, l’heure la sécurité du fait des agressions, il est n’est pas à la sérénité et le climat entre les vrai localisées dans le sudest, de la secte terroriste Le chef de l’État sait qu’il lui faudra Boko Haram, il ne cesse d’en gagner depuis 2011 décrisper l’atmosphère politique dans les domaines de la s’il veut être réélu proprement. participation des citoyens, du respect des droits humains et des deux camps est fortement teinté de paraconditions d’un développement éco- noïa. même si, au niger, l’échauffement préélectoral fait partie des habitudes, nomique durable. avant qu’au dernier moment s’ouvre À moins de cinq mois de la fin de la porte du compromis, il ne serait pas son quinquennat, le président (et futur souhaitable que le tour de vis sécuritaire candidat) mahamadou issoufou peut rendu nécessaire par la menace terroriste donc se rassurer: son bilan est honorable s’étende au terrain politique et soit utiet ceux qui, à l’instar de son rival et ex- lisé par le pouvoir pour restreindre les président mahamane ousmane, jurent activités de l’opposition. qu’ils n’y voient « rien de positif » se trompent. les périodes de précampagne MahamadouIssoufou,dontnulnemet électorale, il est vrai (les premiers tours sérieusement en doute les convictions de la présidentielle et des législatives démocratiques, doit y veiller – histoire sont prévus pour le 21 février 2016), ne justement de ne pas laisser occulter les sont pas de celles qui prédisposent aux indéniables réussites de son quinquennat : santé, éducation, infrastructures, jugements les plus équilibrés. agriculture, retour du niger sur la scène Reste qu’un bon bilan n’est synonyme internationale, etc. Histoire, surtout, de ni de perfection, ni de réélection assurée. laisser aux électeurs le soin de juger, en À 63 ans, cet ingénieur des mines formé toute sérénité, s’il mérite de prolonger en France, le cœur à gauche, proche de son cdd à la tête de ce grand pays… ● jeune Afrique
n o 2857 • du 11 Au 17 ocTobre 2015
politique C’est l’heure des comptes p. 60 séCurité la tactique du moindre mal
p. 62
opposition en rangs serrés contre issoufou
p. 64
portraits Ceux qui vont faire 2016
p. 69
Migrants Chasse aux passeurs
p. 76
interview alma oumarou, ministre du Commerce et de la Promotion du secteur privé p. 80 business affaires de femmes
p. 85
tendanCe
dans les coulisses de la mode
p. 91
soCiété les fous rires du cousinage à plaisanterie p. 82 Musique tal national, succès mondial
p. 98
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Le plus de Jeune Afrique
NIGER
C’est l’heure des À quatre mois de la présidentielle, le chef de l’État défend son bilan… contesté par les leaders de l’opposition. Mais c’est sur le terrain social que les uns et les autres vont devoir convaincre et muscler leurs programmes.
ChRIstophE BoIsBoUVIER
C
omment gérer un pays dont le taux de natalité – 7,6 enfants par femme – est le plus élevé au monde et « mange » tous les ans quatre points de croissance ? Comment défendre un bon bilan économique quand l’uranium et le pétrole, deux des principales sources de revenus du pays, sont frappés par une baisse historique de leurs cours sur le marché mondial ? Ce sont deux des défis que tente de relever le chef de l’État nigérien, Mahamadou Issoufou, quelques mois avant la présidentielle, dont le premier tour est fixé au 21 février 2016. n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
Dans l’opposition, l’ancien président Mahamane Ousmane (lire p. 71) assène : « J’ai beau chercher, me montrer indulgent, je ne vois rien de positif. » Tandis que l’ex-Premier ministre Hama Amadou (lire p. 72), qui vit en exil en France depuis plus d’un an, dénonce « la corruption généralisée » et « la gestion sectaire » du pays. « Si vous n’êtes pas du parti au pouvoir, vous n’avez aucun droit, dit-il. Le Niger est une poudrière sociale. » Réplique du président sortant : « C’est l’inverse de la réalité ! Lorsque je suis arrivé aux affaires, le Niger était 134e du classement de Transparency International. Nous avons gagné 31 places depuis. Et nous allons continuer. Mon objectif, c’est la corruption zéro. » Pour Mahamadou Issoufou, l’une des étapes les plus importantes de son quinquennat a été ce jeune afrique
Entre deux fronts géant d’Imouraren est renvoyée aux calendes grecques. Autre aspect de son bilan que le président nigérien aime à défendre : la réalisation de nouvelles infrastructures. « J’ai un programme, je le mets en œuvre. Ceux qui me critiquent aujourd’hui n’en ont aucun, lance-t-il. J’ai promis aux Nigériens de faire des routes, le chemin de fer… Ils sont en cours », martelait-il dans une interview à Jeune Afrique il y a quelques semaines (J.A. no 2852, du 6 au 12 septembre 2015, pp. 34-37). Commentaire acerbe de l’opposant Hama Amadou : « J’aurais compris que le tronçon entre Parakou [au Bénin] et Niamey soit construit en priorité parce que ça rapprochait les marchandises transportées depuis le port de Cotonou. Mais le tronçon entre l’aéroport de Niamey et Dosso, ce n’est pas un train, c’est une mystification, une duperie. » En fait, le pouvoir et l’opposition sont d’accord sur la nécessité de construire une voie ferrée Niger-Bénin, mais pas sur le bout par lequel commencer…
comptes jour de mai 2014 où son gouvernement a signé un nouvel accord avec Areva sur l’uranium. Depuis la catastrophe de Fukushima, au Japon, et la chute des cours de la précieuse poudre jaune, le groupe nucléaire français songeait à se désengager du Niger au profit du Canada et du Kazakhstan. Fort de sa vielle camaraderie socialiste avec son homologue français François Hollande, le chef de l’État nigérien, qui a été ingénieur des Mines dans une « autre vie », s’est alors appuyé sur l’Élysée pour tordre le bras à Areva. Résultat : le groupe français reste à Arlit, au Nord-Niger, et accepte enfin de se soumettre – à certaines conditions, il est vrai – aux dispositions fiscales du code minier de 2006. Un sérieux bémol tout de même : la mise en exploitation du site jeune afrique
l’une des étapes les plus importantes de son mandat ? le nouvel accord signé avec areva.
© ÉRIC DESSONS/JDD/SIPA
t Le président Mahamadou Issoufou lors d’une conférence de presse, à Niamey, le 7 avril.
déCalage. Y a-t-il un paradoxe Mahamadou Issoufou ? Un décalage entre son image à l’étranger – celle d’un vrai démocrate et d’un rempart contre les jihadistes – et son image à l’intérieur du pays ? C’est ce que veut croire l’opposition. Ainsi Hama Amadou, qui est poursuivi depuis un an par la justice nigérienne dans une sombre affaire de trafic de bébés nés au Nigeria, tente-t-il de mobiliser l’opinion en se posant comme la victime d’un complot ourdi par le « dictateur » Issoufou. Auprès de ses partisans, le calcul est payant. La preuve : le 13 septembre, à Zinder, il y avait foule au congrès du Mouvement démocratique nigérien pour une fédération africaine (Moden-Lumana), lorsque, malgré son absence du pays, « Hama » a été investi par son parti pour la prochaine élection. Mais sur le terrain de la mobilisation populaire, le socialiste Mahamadou Issoufou n’est pas en reste. Le 17 février, son Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya) a fait descendre dans la rue des milliers de manifestants contre Boko Haram (lire pp. 62-63). Dans les prochaines semaines, le parti au pouvoir prépare une nouvelle démonstration de force pour lancer la campagne de son champion. Depuis quatre ans, le président sortant laboure le terrain social. Il affirme avoir créé de nombreuses écoles à travers le pays et avoir pu financer la formation de 3 000 enseignants par an, afin que les jeunes, en particulier les filles, puissent étudier jusqu’à l’âge de 16 ans. Cet effort sera-t-il suffisant pour lutter contre les mariages précoces et faire tomber le taux de natalité ? Mahamadou Issoufou, Mahamane Ousmane, Seini Oumarou, Hama Amadou… En cette fin d’année 2015, tous savent que la question sociale – l’emploi, l’école, la santé – sera la clé de la présidentielle de 2016. ● n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
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Le Plus de J.A. Niger Sécurité
la tactique du moindre mal Le chef de l’État sortant considère que c’est l’une de ses plus belles réussites : malgré la situation au Mali et en Libye, malgré les agressions de Boko Haram, le Niger est en paix. À quel prix ?
Stringer/reuterS
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e chaos libyen au nord-est, le conflit malien au nord-ouest, le monstre Boko Haram au sud… Ce qui saute aux yeux, c’est que le Niger est un îlot de stabilité au milieu d’une vaste zone de guerre et d’anarchie. « Parce que nous avons fait le nécessaire pour mettre les forces de défense et de sécurité en situation de remplir leur mission de protection, explique le président, Mahamadou Issoufou (lire son interview dans Jeune Afrique no 2852, du 6 au 12 septembre 2015). Nous avons la meilleure armée d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique francophone, la deuxième de la Cedeao. Ce n’est pas un hasard. » Pourtant, Hama Amadou considère que le bilan du chef de l’État sortant est « un échec total » sur le plan de la sécurité. « Comment peut-on affronter Boko Haram, qui est surarmé et suréquipé, n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
p Manifestation de soutien à l’armée face à la secte islamiste, le 17 février, à Niamey.
avec une armée mal nourrie et qui ne dispose pas de la formation et de la logistique nécessaires pour mener une guerre asymétrique ? » lançait le 18 septembre, dans un entretien au monde.fr, l’ancien Premier ministre, devenu aujourd’hui l’un des principaux leaders de l’opposition (lire p. 72).
nécessitent naturellement des réponses mondiales », martèle-t-il lors de son discours d’investiture. L’effort est porté notamment sur le renforcement des services de renseignements. Le calcul est payant. Dès le 8 janvier 2013, Niamey est en mesure de prévenir Bamako et Paris que les jihadistes du Nord-Mali l’effort a été porté notamment sur concentrent des troupes en vue d’une offensive sur le renforcement des services de Mopti. Deux jours plus tard, ce sera la prise de Konna, renseignements. Un calcul payant. puis la contre-offensive En avril 2011, quand l’ancien ingédes Français de l’opération Serval. Le nieur Mahamadou Issoufou arrive aux 29 octobre 2013, ce sont les services plus hautes responsabilités, le défi est secrets du général Lawal Chékou Koré et immense. Il est le premier civil à présider le conseiller spécial Mohamed Akotey, un le Niger depuis 1996. Mais, d’entrée de Ifogha, qui, aux côtés de l’ancien espion jeu, il montre sa détermination. « Les français Pierre-Antoine Lorenzi, mènent menaces sont devenues mondiales et à bien, au Nord-Mali, la libération des jeune afrique
entre deux fronts quatre otages français enlevés trois ans plus tôt à Arlit. Pour sécuriser le territoire nigérien et ses 5 700 km de frontières, le président Issoufou joue aussi la carte occidentale. Dès 2013, Niamey devient la base d’avions de chasse français et de drones français et américains. En 2014, dans le nord-est du pays, aux confins de la Libye, le vieux fort colonial de Madama est réoccupé par des soldats français qui en font la pointe extrême de Barkhane, le dispositif militaire français déployé dans cinq pays du Sahel. Ces soldats et ces drones portent-ils atteinte à la souveraineté du Niger ? « Entre deux maux, il faut choisir le moindre, rétorque Mahamadou Issoufou. Le moindre, c’est d’avoir des alliés qui puissent nous permettre d’assurer notre sécurité. » Sur ce point, Hama Amadou et les autres leaders de l’opposition sont d’accord avec lui. vague de violence. Le 16 janvier 2015,
les Nigériens découvrent de leur pays une autre réalité, beaucoup plus inquiétante.
Ce jour-là, une semaine à peine après la grande manifestation antiterroriste de Paris à laquelle a pris part le président du Niger sous le slogan « Je suis Charlie », une vague de violence s’abat sur les chrétiens de Niamey et, le lendemain, sur ceux de Zinder. Dix d’entre eux sont tués et plusieurs églises incendiées. Au moment où Boko Haram mène des attaques dans la région de Diffa, dans l’extrême sud-est du pays, la menace jihadiste se fait de plus en précise. Un
Au Niger, plus de 1 000 suspects de complicité avec Boko Haram sont actuellement en prison, mais chacun sait que le combat contre le terrorisme est aussi une affaire politique. Pour ne pas exposer les minorités à la propagande islamiste, le régime s’efforce de les intégrer dans l’appareil d’État. Ainsi la primature est-elle confiée, depuis le début du quinquennat, à Brigi Rafini, une figure de la communauté touarègue d’Agadez. Au carrefour de toutes les routes jihadistes de l’Afrique de l’Ouest, le Niger est un pays clé dans les soldats français et les drones le dispositif des Occidentaux américains portent-ils atteinte contre le terrorisme. D’où les visites à Niamey du Français à la souveraineté du pays ? François Hollande, en juilmois plus tard, le 17 février, le régime let 2014, et de l’Américain Antony Blinken, mobilise quelque 100000 personnes dans numéro deux duConseil de sécurité natioles rues de Niamey pour dire « non » à nale, en juillet 2015. En février prochain, Boko Haram et aux extrémistes. « Le Niger la présidentielle ne sera pas seulement un enjeu national. Pour tous les voisins sera le tombeau de Boko Haram », lance alors le président Issoufou. Les leaders de ce pays pivot et pour les Occidentaux, de l’opposition refusent de participer à ce sera aussi un test de stabilité. ● cette marche. christophe BoisBouvier
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Le Plus de J.A. Niger OppOsitiOn
En rangs serrés contre issoufou Réunis depuis la mi-août au sein du front patriotique républicain, les détracteurs du chef de l’État visent l’alternance en 2016. Et semblent prêts à oublier leurs différends.
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lle a entrepris de livrer bataille avant l’heure. Après avoir sillonné les différentes communes de Niamey, depuis quelques semaines, la coalition de l’opposition parcourt le Niger profond afin d’informer les populations des « conditions déplorables », dit-elle, dans lesquelles se préparent les élections présidentielle, législatives et communales de 2016. Il s’agit aussi pour les détracteurs du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya, au pouvoir) de faire étalage de leurs forces. Créé le 17 août dernier, le Front patriotique républicain (FPR) réunit en effet une trentaine de partis politiques, des formations syndicales et des organisations de la société civile. Son arme fatale: le consensus. Tous ces partis iront à la bataille ensemble ; ils présenteront trois ou quatre candidats à l’élection présidentielle et se réuniront au second tour autour de la candidature du qualifié. Pour les communales et les législatives, des listes communes sont envisagées dans certaines régions.
écrasante dans la prochaine Assemblée nationale. Et ils ne manquent pas de rappeler les bons résultats qu’ils ont obtenus aux législatives de 2011, à l’issue desquelles le MNSD-Nassara a obtenu 26 sièges sur 113 et le Moden-Lumana 25, contre 37 pour le PNDS-Tarayya. Ils rappellent aussi que, malgré le ralliement de Hama Amadou (qui avait récolté 19,8 % des suffrages au q Soumana Sanda, patron du parti Moden-Lumana de la région de Niamey, lors d’un meeting de la coalition, le 29 août, dans le quartier Goudel.
premier tour) à Mahamadou Issoufou au second tour de la présidentielle, Seini Oumarou était tout de même parvenu à réunir près de 42 % des suffrages sur son nom. Alors, selon eux, les calculs sont simples : si cette fois-ci leurs partis font alliance, cela devrait signifier la victoire pour l’un deux en 2016. étiquEttE. Mais les membres de la coali-
tion savent aussi qu’il leur faut reconquérir les conseils communaux et régionaux au sein desquels ils avaient la majorité et qui leur ont échappé, soit parce que
fiEfs. Quand il évalue ses forces, le FPR
estime que seule une région sur huit échappe à son contrôle, celle de Tahoua. À l’entendre, les fiefs de Tillabéri-Niamey, Maradi et Zinder seraient acquis respectivement au Mouvement démocratique nigérien pour une fédération africaine (Moden-Lumana) de Hama Amadou (lire p. 72), au Mouvement national pour la société de développement (MNSDNassara, l’ancien parti unique) de Seini Oumarou (lire p. 70) et à la Convention démocratique et sociale (CDS-Rahama) de Mahamane Ousmane (lire p. 71), tous membres de la coalition. « Les électeurs votent pour une personnalité, pas pour un parti », tient à souligner Hama Amadou, le président du Moden-Lumana, qui promet une alliance des trois principaux partis de la coalition à Agadez pour affronter le candidat du PNDS-Tarayya. Au regard des circonscriptions dominées par les grandes formations du FPR, ses leaders sont convaincus d’obtenir une majorité n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
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entre deux fronts certains maires et conseillers élus sous avec des partis plus importants aux législ’étiquette d’un parti de l’opposition ont latives et, à défaut de présenter des canfinalement rejoint le parti présidentiel (la didats à la présidentielle faute de moyens, moitié des maires élus sous la bannière de elles savent que leur soutien à l’un ou à l’opposition, notamment MNSD et CDS, l’autre des prétendants à la magistrature sont passés sous celle du PNDS-Tarayya suprême comptera. entre 2011 et 2015), soit parce qu’ils ont Pour la présidentielle, les leaders du été révoqués par le ministre de l’IntéFPR conviennent que ce serait une erreur rieur pour divers motifs, soit, enfin, en raison de « au second tour, nous nous la nouvelle loi électorale. rassemblerons autour du candidat Les formations polile plus susceptible de gagner. » tiques plus petites, en particulier celles qui ne MahaMane oUsMane, fondateur de la CDS-Rahama sont pas représentées au Parlement, parient davantage sur les de croire qu’il suffit de constituer une communales (pour le moment programcoalition dès le début de la campagne mées le 9 mai 2016) afin de gagner du pour battre un candidat, en l’occurrence terrain. Elles entendent réunir le plus le président sortant. « Ce serait faciliter grand nombre possible de conseillers la fraude que tente d’organiser le régime. aux locales, former des listes communes Nous ne tomberons pas dans ce piège », confie Mahamane Ousmane, à la tête de la coalition. Pour mobiliser pleinement ses partisans dans ce système à deux tours, l’ancien chef de l’État explique la stratégie envisagée : « Les grands partis ont besoin de présenter des candidats au premier tour. Il est clair qu’aucun d’entre nous ne l’emportera dès ce premier tour, mais, au second, nous nous rassemblerons autour du candidat de l’opposition le plus susceptible de l’emporter face au président sortant. »
TAGAZA Djibo
partition. Le Moden-Lumana veut bien
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suivre cette partition, à condition que tous les protagonistes jouent pleinement le jeu. Un cadre du parti de Hama Amadou rappelle qu’en 2011 les militaires et partisans de Mahamadou Issoufou poussaient les autres grands partis à boycotter les législatives et avaient organisé leur défaite dans les localités où se présentaient de petites formations, dont une quarantaine firent alliance pour soutenir le candidat Issoufou à la présidentielle. Le ModenLumana avait alors constitué un premier front anti-Issoufou en créant l’Alliance pour la réconciliation nationale (ARN), qui réunissait l’ensemble des partis s’opposant au PNDS-Tarayya. Mais, à la dernière minute, le refus de Seini Oumarou d’appeler à voter pour les candidats du Moden-Lumana aux législatives avait mis fin à l’accord. « Il n’était plus question que Hama Amadou demande à ses partisans de voter pour Seini Oumarou au second tour de la présidentielle. C’est ce qui a sauvé Issoufou. » ● Clarisse JUoMpan-YaKaM, envoyée spéciale
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Le Plus de J.A. Niger
Tribune
Arrêtons le Niger bashing ! MahaMan TiDJani aLOu Professeur de sciences politiques, doyen de la faculté des sciences économiques et juridiques de l’université Abdou-Moumouni de Niamey
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n développe des discours très critiques sur la construction démocratique au Niger compte tenu des errements qui ont parfois conduit à des coups d’État, notamment dans les années 1996, 1999 et 2010, négligeant ainsi les avancées pourtant nombreuses qu’elle a enregistrées. Si cette construction reste extrêmement laborieuse, nul ne peut nier qu’elle s’affirme, car aujourd’hui les régimes en place, quels qu’ils soient, ont en face d’eux de réelles oppositions, qu’ils prennent – heureusement! – au sérieux. Une plongée dans l’histoire aide à mesurer le chemin parcouru dans la quête d’un régime démocratique. Au moment du référendum gaulliste de septembre 1958, Djibo Bakary, leader du parti Sawaba, préside le gouvernement « autonome ». Comme le Guinéen Sékou Touré, il appelle à voter « non » [au maintien dans le giron colonial]. Mais il n’a pas la mainmise sur l’Administration et, échaudées par la situation algérienne, les autorités coloniales font triompher le « oui », le Niger devenant le seul pays où le parti au pouvoir perd le référendum. Le gouvernement de Djibo Bakary en tire les conséquences et démissionne. Le Rassemblement démocratique africain (RDA) de Hamani Diori arrive au pouvoir mais doit faire face jusqu’en 1974 à l’opposition, pourtant désormais interdite, du Sawaba, dont les militants sont soit en prison au Niger, soit en exil. Ce qui traduit un certain dynamisme du champ politique dès la Ire République. Même sous le régime militaire de Seyni Kountché, réputé autoritaire et répressif, opposé autant à la liberté de la presse qu’à la liberté d’opinion, la quête de liberté n’est jamais assoupie, comme le montre l’activisme de l’Union des scolaires nigériens. Et plusieurs partis aujourd’hui présents sur la scène politique sont nés dans la clandestinité au cours de cette même période.
C’est grâce à la Conférence nationale que le processus de démocratisation gagne en puissance. Mais il reste marqué par une instabilité constitutionnelle, comme en témoigne la multiplication des coups d’État. Paradoxalement, ces putschs ont toujours débouché sur des régimes de transition, qui n’avaient pas vocation à s’installer mais à n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
favoriser le retour de la démocratie par des élections libres. On le voit bien, ils ont eu pour vertu de remettre les pendules à l’heure. Ainsi, l’idée démocratique au Niger n’a jamais cessé de prendre de l’ampleur. Ce qui s’est révélé compliqué, en revanche, c’est la mise en place d’institutions démocratiques fiables et durables. Les coups d’État ont à chaque fois débouché sur une nouvelle Constitution (le Niger en a expérimenté cinq depuis 1993). Malgré tout, on relève un fort attachement à la liberté d’expression, à la quête d’une justice sociale et d’une justice indépendante, et, de manière générale, aux libertés fondamentales. Évidemment, dans nos pays, la mise en place de la démocratie génère des espaces de négociation, de marchandage et parfois de clientélisme. Depuis que le processus démocratique s’est enclenché au Niger, aucun parti ne peut se vanter d’avoir obtenu seul une majorité au Parlement, provoquant ainsi des alliances de gouvernement. C’est assez édifiant: des franges importantes de l’opinion se retrouvent au pouvoir, ce qui donne naissance à un camp adverse tout aussi important, qui milite, lui, pour l’alternance au pouvoir dans un Niger où les oppositions ne sont jamais des oppositions de façade. Celles-ci réunissent des personnalités fortes, aguerries, qui aspirent légitimement à l’exercice du pouvoir. Le Niger bénéficie ainsi d’une vie politique dynamique, où le militantisme est au cœur de l’ascension politique. Une culture politique démocratique s’installe incontestablement. Elle tient à la fois au nombre d’élections compétitives organisées, au statut de l’opposition, à sa société civile active et à des organismes comme la Commission électorale nationale indépendante et le Conseil national de dialogue politique (CNDP), qui réunissent tous les partis, y compris ceux qui n’ont pas de siège au Parlement. Il y a donc bien une démarche inclusive dans la construction démocratique, qui devrait être soutenue. Le Niger est un cas singulier de démocratie, comme en témoignent par exemple la virulence des débats politiques, la liberté d’expression, le recours régulier à la justice pour régler les litiges au sein des partis. ● jeune afrique
PUBLI-INFORMATION
SONIDEP
La culture de l’excellence
Depuis plus d’une décennie, la SONIDEP a déployé au sein de son organisation un Système de management qualité (SMQ) basé sur « La satisfaction de ses clients ». Cet engagement s’est traduit dès 2008 par la première certification internationale COFRAC avec le certificateur AFAQ AFNOR. Depuis lors, cette accréditation a toujours été maintenue et renouvelée.
Dès lors, s’est imposée la nécessité urgente de définir et appliquer de nouvelles orientations stratégiques, capables de permettre à la SONIDEP de s’adapter à cette nouvelle situation et de s’imposer sur les marchés visés. En quatre ans d’exercice, l’équipe dirigeante est parvenue aux résultats suivants : • chiffre d’affaires en hausse de 89,71 % –il a progressé de 203 milliards de F CFA en 2011 à 386 milliards de F CFA en 2014, année où le résultat net après imposition atteint 6,176 milliards de F CFA ; • les effectifs ont progressé de 62 % entre 2011 et 2014, passant de 176 à 285 agents ; • la réalisation d’un audit organisationnel a permis d’ériger les dépôts intérieurs en agences ; • la qualification de quatorze cadres aux normes d’auditeurs internationaux (International Register Certificated Auditors, IRCA) renforce le management de la société ; • la société a obtenu la triple certification ISO 9001-2008, ISO 14001-2004 et OHSAS 18001-2007 avec AB Certification.
De plus, l’informatisation de la SONIDEP a été menée à bien. Un Système de gestion intégré participe à l’amélioration des performances. L’implémentation d’une solution d’aide à la décision et un logiciel de suivi des opérations de trésorerie facilite le suivi en temps réel des résultats d’exploitation. Enfin, la construction d’une nouvelle agence à Tahoua, pour un investissement sur fonds propre de 17 milliards de F CFA permet de réduire les couts d’approvisionnement des produits pétroliers de la région. Elle sera aussi en mesure de satisfaire les besoins des industries futures. D’autres projets sont en court de réalisation, comme : • le lancement prochain de la construction du dépôt de Maradi, pour un coût de 15 milliards de F CFA ; • l’implémentation d’une solution de gestion électronique de documents (GED) pour un meilleur archivage de la documentation ; • l’obtention de la certification ISO 50001, qui traduira une meilleure maîtrise des coûts et une utilisation plus rationnelle de l’énergie utilisée dans l’exploitation ; • la certification des systèmes de sécurité incendie de toutes les installations.
Forte de ces engagements, la SONIDEP est en mesure de relever un nouveau challenge : la fidélisation de ses clients à l’export.
SONIDEP SOCIÉTÉ NIGÉRIENNE DES PRODUITS PÉTROLIERS Avenue Abdoulaye Fadiga - BP : 11702, Niamey, Niger Tél. : (+227) 20 73 33 34/35 - Fax : (+227) 20 73 43 28 Email : sonidep@intnet.ne
www.sonidep.net
DIFCOM/FC - Photos : DR
S
oucieuse de son rôle de leader dans l’innovation et la performance économique au Niger, la SONIDEP a décidé de se tourner résolument vers l’avenir. L’entrée en production de la Société de raffinage de Zinder, en novembre 2011, a engendré de nouveaux enjeux. La SONIDEP s’est vue confier par l’État, en plus de sa mission traditionnelle de ravitailler le pays en produits pétroliers, la vente de l’excédent vers les pays de la sous-région.
Niamey Hôtel Gawèye
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Hôtel de référence Place Kennedy BP : 11.008 - Niamey, Niger Tél.: (+227) 23 90 0019 /21/24 (+227) 90 18 84 25 Fax : (+227) 20 72 33 47 Email : gaweye@intnet.ne www.hotel-gaweyeniger.com Réservations en ligne : reservations@hotel-gaweyeniger.com
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Á Une piscine entretenue et contrôlée périodiquement, gratuite pour les résidents ; Á Deux cours de tennis ;
Á Trois naveaes gratuites dont une VIP (4, 17 et 32 places) Á Wifi en fibre optique Sonitel de 2 mégas ; Á Un guichet Ecobank ; Á Une galerie commerciale avec : un Business Center, une boutique « tabacs-journaux », un salon de coiffure, une boutique florale et de décoration, des étales de souvenirs artisanaux. Le plus grand casino de Niamey est à l’Hôtel Gawèye. L’Hôtel Gawèye est désormais équipé de 3 générateurs neufs pour renforcer la climatisation centrale et la rendre autonome en cas de coupures d’électricité par la Nigelec !
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Majestueux sur les rives du fleuve Niger, au cœur de Niamey, l’ Hôtel Gawèye ex- Sofitel, offre plus que jamais à ses clients et partenaires son charme et un cadre de rêve inoubliable pour un séjour des plus agréables !!!
Niger Le Plus de J.A.
Portraits
Ceux qui vont compter en 2016 Dans la majorité, dans l’opposition comme dans la société civile, qu’elles soient ou non candidates aux législatives ou à la présidentielle, certaines personnalités s’imposent. Leurs avis et leurs choix seront déterminants pour l’issue des prochains scrutins.
Mohamed Bazoum 55 ans, ministre d’État, président du PNDS-Tarayya
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© Vincent Fournier/J.A.
atif de N’Guigmi, sur les rives du lac Tchad, professeur de philosophie de formation, Mohamed Bazoum est l’une des pièces maîtresses de la campagne présidentielle de Mahamadou Issoufou. Le 25 février 2015, le président du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS-Tarayya, au pouvoir) a quitté le portefeuille des Affaires étrangères, qu’il dirigeait depuis avril 2011 (et avait déjà occupé en 19951996), après avoir été promu ministre d’État auprès de la présidence de la République. En le nommant à ses côtés, le chef de l’État a souhaité lui confier la préparation de sa campagne pour la présidentielle, et lui permettre de consacrer plus de temps à l’organisation des
ibrahim Yacouba 44 ans, directeur de cabinet adjoint du président Issoufou riginaire de Marabi (Sud), contrôleur des douanes formé à l’École nationale d’administration (ENA) du Niger, puis au Centre de formation douanière (CFD) de Casablanca, au Maroc, Ibrahim Yacouba est l’une des personnalités de la scène syndicale les plus connues du pays. Militant altermondialiste, il a participé à la création de la Confédération démocratique des travailleurs du Niger (CDTN) et de la Coordination démocratique de la société civile nigérienne (CDSCN, qui s’est illustrée dans la lutte contre la vie chère au milieu des années 2000). Il a dirigé le Réseau national dette et développement (RNDD) et fut secrétaire général du Syndicat national des agents des douanes du Niger (Snad) de 2003 jusqu’à sa nomination en tant que ministre des Transports, en avril 2012. Entre 2009 et 2012, Ibrahim Yacouba a par ailleurs dirigé la Fédération nigérienne de basket-ball, puis fut viceprésident de celle de football. Depuis le remaniement d’août 2013, il est devenu directeur adjoint du cabinet du président de la République. Considéré comme l’une des figures montante du PNDS-Tarayya, en délicatesse avec certains cadres du mouvement qui l’estiment trop impulsif et pas assez discipliné, il a cependant été exclu du parti présidentiel par son comité exécutif national le 23 août dernier. Pas sûr que cela parvienne à freiner l’ascension de cet énergique et très médiatique quadra, ni son influence, au sein du cabinet présidentiel comme de la société civile. ● M.O. Jeune AFrique
© tAgAzA DJibo pour J.A.
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troupes du PNDS-Tarayya (qu’il dirige depuis l’accession au pouvoir de Mahamadou Issoufou) avant les élections couplées de 2016. Mohamed Bazoum passe en effet plus de temps au Niger qu’auparavant, « à la rencontre des populations », comme il le dit lui-même. Toutefois, s’il a été remplacé à la tête de la diplomatie nigérienne par Aïchatou Kané Boulama (qui était directrice de cabinet du Premier ministre Brigi Rafini et gouverneure de Niamey de 2011 à février 2015), il suit toujours de très près les questions internationales, notamment en rencontrant les chefs d’État et de gouvernement étrangers en visite à Niamey, ainsi que leurs ambassadeurs. ● Mathieu OLiVieR, envoyé spécial
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Le Plus de J.A. Niger
Marou Amadou 43 ans, ministre de la Justice, porte-parole du gouvernement
J
«
e ne suis pas le griot du gouvernement », dit-il. Sa liberté de parole a fait la réputation de ce militant des droits de l’homme, devenu l’une des personnalités les plus en vue du régime. Et, après quatre années aux côtés du président Issoufou en tant que ministre de la Justice et porte-parole du gouvernement, il ne pense pas l’avoir perdue. Marou Amadou a sa doctrine : il n’est pas le porte-parole de chacun des ministres. Quand les décisions du gouvernement nécessitent des explications supplémentaires, il les donne ; quand il faut informer les populations de situations particulières, il est là. À quatre mois des scrutins présidentiel et législatif, ce juriste qui se veut apolitique mais se sent solidaire du
bilan du président sortant devra, plus que d’ordinaire, répondre aux attaques contre le régime. À ceux qui dénoncent, par exemple, les atteintes récurrentes aux libertés individuelles,
il répond : « Ce n’est pas parce que je suis un militant des droits de l’homme que je suis obligé de couvrir ceux qui, sous prétexte de défendre cette cause, commettent des actes
© Tagaza djibo pour j.a.
délictueux. » Fallait-il laisser l’opposition descendre dans la rue début 2015 alors que, moins de vingt-quatre heures auparavant, des citoyens nigériens et étrangers étaient victimes de la folie meurtrière des antiCharlie ? L’ancien président fondateur du Front uni pour la sauvegarde des acquis démocratique (Fusad), condamné en son temps pour « propagande régionaliste », estime que non. Une conviction qui peut agacer. Tout comme son armure de justicier. Pour traquer la corruption et le trafic d’influence, moins d’un mois après sa nomination en tant que garde des Sceaux, en mai 2011, il a créé un numéro vert pour que les citoyens puissent signaler les dérapages. ● ClArisse JUOMPAN-YAKAM
seini Oumarou 65 ans, président du MNSD-Nassara
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rrivé deuxième à l’issue de la présidentielle de 2011, avec 41,96 % au second tour, le président du Mouvement national pour la société de développement (MNSDNassara, l’ancien parti-État créé par Mamadou Tandja) et chef de file de l’opposition compte bien contrecarrer la volonté de Mahamadou Issoufou d'accéder à un deuxième mandat, malgré la crise traversée par son parti depuis août 2013, où il avait finalement renoncé à la fusion avec le Mouvement démocratique nigérien (Moden-Lumana), de Hama Amadou. Seini Oumarou est l’un des principaux signataires de la déclaration du 17 août, par laquelle une trentaine de partis, syndicats et ONG demandent au président Issoufou « l’organisation d’élections inclusives, libres, transparentes, équitables », et l’un des leaders de la coalition d’opposition, le Front patriotique républicain (FPR), créée le même jour avec Mahamane Ousmane et n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
Hama Amadou. Seini Oumarou fit d’ailleurs son entrée en politique comme conseiller spécial de ce dernier, en 1995, après une dizaine d’années en tant que cadre à la Nigelec, la compagnie nationale d’électricité, puis en tant que directeur général de sa propre société, l’Entreprise nigérienne de transformation de papier (Enitrap). Ministre du Commerce, de l’Industrie et de la Promotion du secteur privé (1999-2004), puis de l’Équipement (2004-2007), il sera à son tour Premier ministre, de juin 2007 à septembre 2009, avant de démissionner pour se présenter aux législatives. En janvier dernier, il a publié un Livre blanc sur les institutions de la République, dans lequel il dénonce notamment la partialité de la Cour constitutionnelle au profit de l’actuel président – ce qui lui a valu une brève interpellation, à la mi-février. ● MAthieU OliVier
© Tagaza djibo
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jeune afrique
Entre deux fronts
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Mahamane Ousmane 65 ans, ancien chef de l’État (1993-1996), fondateur de la CDS-Rahama ans ses bastions historiques de Zinder, de Maradi et de Diffa, Mahamane Ousmane conserve une grande influence auprès des militants de la Convention démocratique et sociale (CDS-Rahama), le parti qu’il a créé en 1991 et qui l’a porté à la magistrature suprême en 1993. Pourtant, l’ancien chef d’État (1993-1996) et ex-président de l’Assemblée nationale (1999-2009) a perdu le contrôle de la CDS-Rahama au profit de son vice-président dissident, Abdou Labo, ex-ministre d’État de Mahamadou Issoufou (à l’Intérieur, de 2011 à 2013, puis à l’Agriculture, en 2013-2014). Par ailleurs, Mahamane Ousmane est sous le coup d’une levée d’immunité parlementaire et pourrait ne pas être autorisé à se présenter à la présidentielle de 2016. D’autant qu’une autre affaire ressurgit, celle des 10 millions de dollars
© Tagaza Djibo pour j.a.
d
du prêt taïwanais qu’il a contracté à l’époque où il présidait aux destinées du Niger. Bien résolu à ne pas baisser les bras, Mahamane Ousmane dénonce « des combats d’arrière-garde, une façon de créer des crises inutiles », et compte se faire entendre suffisamment fort pour couvrir le bruit
des casseroles qu’on lui prête. Arrivé quatrième à la présidentielle de 2011 (8,33 % des suffrages exprimés au premier tour), l’économiste formé en France et aux ÉtatsUnis promet notamment de dénoncer le bilan économique « désastreux » de Mahamadou Issoufou.
Et il est à la tête du Front patriotique et républicain (FPR), la coalition de l’opposition créée le 17 août dernier et qui comprend notamment le chef de file de l’opposition, Seini Oumarou, et l’ancien président du Parlement, Hama Amadou (lire leurs portraits). ● C.J.-Y.
le Plus de J.A. Niger
Hama Amadou 65 ans, président du Moden-Lumana
ux yeux de ses partisans, Hama Amadou est le symbole des turpitudes caractérisant le mandat du chef de l’État, Mahamadou Issoufou, qu’il a largement contribué à faire élire en 2011 et dont il apparaît aujourd’hui comme le plus farouche adversaire. En cause, l’exil forcé en France, depuis août 2014, de l’ex-président de l’Assemblée nationale, poursuivi pour son rôle présumé dans un trafic de bébés, là où les siens ne veulent voir qu’un complot politique. Battre Issoufou « à plate couture », ainsi qu’il le dit lui-même, Amadou en a fait une question d’honneur, une obsession. Qu’il concoure libre ou en prison (il pourrait
être arrêté dès son retour au Niger), ce routard de la politique, ex-directeur de cabinet de Seyni Kountché (1985-1986), deux fois Premier ministre (en 1995-1996, sous Mahamane Ousmane, puis de 2000 à 2007, sous Mamadou Tandja), n’entend pas faire de cadeau au président sortant et se targue déjà d’une première victoire : « malgré les manœuvres d’intimidation du régime », comme il n’a pas manqué de le souligner, il a été investi candidat à la présidentielle de 2016 lors du congrès de son parti, le Mouvement démocratique nigérien pour une fédération africaine (Moden-Lumana), qui, le 13 septembre, a réuni plus de 5 000 militants près de Zinder. ●
© Tagaza Djibo pour j.a.
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Ousseini Salatou
50 ans, président du RDN-Labizé et porte-parole du FPR, la coalition de l’opposition
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ClAriSSe JUOMPAN-YAKAM
© vincenT Fournier/j.a.
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n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
our les communales et les législatives, le président du Rassemblement des démocrates nigériens (RDN-Labizé) étudie la possibilité de listes communes avec d’autres formations de l’opposition, comme il l’avait fait en 2011 avec le MNSD dans deux régions. Il ne sera en revanche pas candidat à la présidentielle – il n’en a pas les moyens –, mais compte bien participer à la chute du président sortant, Mahamadou Issoufou. À 50 ans, Ousseini Salatou, que ses détracteurs surnomment « Tabar-Tabar Salatou » (« celui qui parle à tort et à travers »), « Salatou pied nickelé » ou « Salatou le pyromane », sait qu’il dérange. Porte-parole du Front patriotique républicain, la coalition formée par l’opposition à la veille des scrutins de 2016 (comme il l’a été pour toutes les coalitions d’opposition depuis dix ans), cet enseignant en philosophie a la critique virulente, et il assume. Rien de ce qu’il dit n’est faux, affirmet-il, et il n’est donc pas prêt à s’embarrasser de diplomatie. Ses trois arrestations ? « Injustifiées », plaide-t-il, en particulier la troisième et dernière en date, en début d’année, pour sa participation supposée à une manifestation contre Charlie Hebdo (il était en cours). Ce père de huit enfants se vante presque de recevoir des insultes anonymes sur son téléphone portable, dit craindre pour sa sécurité, mais refuse toute protection. À ses détracteurs, qui raillent sa microscopique formation politique (dont « l’ensemble des militants tient très aisément dans une fourgonnette »), il oppose son audace. Il a créé son parti en 2010, quatre mois avant la présidentielle (à laquelle il s’est d’ailleurs présenté) et ne manque pas de rappeler que le président Issoufou a essayé de le débaucher. ● C.J.-Y. jeune afrique
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Le Plus de J.A. Niger
ali idrissa
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irecteur général du groupe de presse privé Radio et Télévision Labari (RTL Niger), créé en 2012, Ali Idrissa est surtout connu pour être la bête noire des industriels des secteurs minier et pétrolier au Niger, à commencer par le groupe français Areva. Cofondateur et vice-président de l’une des plus importantes organisations de défense des droits de l’homme et de promotion de la démocratie du pays, Croisade Niger (le Comité de réflexion et d’orientation indépendante pour la sauvegarde des acquis démocratiques), qu’il a créée en 1999 avec d’anciens camarades de l’Union des scolaires nigériens et de l’université de Niamey, Ali Idrissa représente la société civile en tant que membre du comité national de l’Initiative pour la transparence dans
les industries extractives (Itie) Niger. À la tête du Réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire (Rotab) au Niger et membre du conseil d’administration de l’ONG Publiez ce que vous payez (PCQVP), il a été plusieurs fois interpellé pour manifestation illégale par les autorités (notamment le jour de la visite du président français François Hollande à Niamey, le 18 juillet dernier), et ne cesse de réclamer une meilleure répartition des revenus issus des industries extractives entre l’État nigérien et les groupes étrangers. Un thème qu’il est bien décidé à imposer au cœur des élections de 2016. Il se dit « déçu par Mahamadou Issoufou », dont le programme de lutte contre la corruption n’a, selon lui, pas été mis en place. Le 19 août,
© Tagaza Djibo pour j.a.
44 ans, coordonnateur national du Rotab et de PCQVP
lors d’une conférence de presse organisée avec l’ONG Alternative Espace Citoyens, dirigée par Moussa Tchangari, et d’autres organisations de la société civile, il a appelé à l’organisation d’élections libres et crédibles et à l’ouverture d’un « dialogue national » pour les préparer au mieux. Il demande notamment que le nombre
de députés ne passe pas de 113 à 171, comme le prévoit la loi adoptée fin octobre 2014 par l’Assemblée nationale sur proposition du gouvernement, estimant qu’ils sont déjà bien assez nombreux et que ces 58 sièges supplémentaires ne feraient que créer encore plus d’emplois fictifs au sein des institutions. ● MathieU OliVier
Mariama Gamatié Bayard 53 ans, présidente du Racinn Hadin’Kay
© Tagaza Djibo pour j.a.
le sujet qu’elle développe, Q lesu’importe prises de parole de la sociologue
sont souvent précédées d’une longue ovation. L’une des raisons de l’accueil réservé à cette ex-proche du président Issoufou ? Son statut de pionnière et son engagement de longue date au sein de la société civile. Mariama Gamatié Bayard a des convictions et le fait savoir. On lui doit la marche historique, en 1993, de près de 20 000 femmes qui revendiquaient leur participation aux travaux du Comité préparatoire de la Conférence nationale souveraine. Mariama Gamatié Bayard surfe aussi sur le capital sympathie qu’elle s’est attiré pendant la rébellion touarègue, lorsque, seule femme à sillonner le Niger profond aux côtés de chefs
traditionnels, de syndicalistes et d’hommes politiques, elle apaisait les tensions. Membre fondateur du PNDS d’Issoufou et à l’origine du Conseil national de dialogue politique (CNDP), cette quinquagénaire peule mariée à un Touareg a été, en 2011, la première Nigérienne à être candidate à une présidentielle et la première personnalité à oser se présenter en tant qu’indépendante. Titulaire d’un doctorat en relations internationales obtenu à l’institut des relations internationales du Cameroun, cette ex-basketteuse du Yaoundé Université Club (YUC) a longtemps travaillé pour les Nations unies. Elle jure de s’investir jusqu’à la fin de sa vie pour que le Niger fasse de la politique autrement, même si elle n’est pas sur le devant de la scène. Mais l’ancienne ministre de la Communication et de la Culture (1997-1999) se verrait bien porter les couleurs du Rassemblement des citoyens pour un Niger nouveau (Racinn Hadin’Kay) en 2016. ● Clarisse JUOMPaN-YaKaM jeune afrique
PUBLI-INFORMATION
Mines et carrières
« La SOPAMIN investit dans des projets créateurs de richesses et d’emplois. » Créée en octobre 2007 dans le sillage de la disparition de l’Office national de recherches minières (ONAREM), la SOPAMIN-SA (Société du patrimoine des mines du Niger) est l’acteur public chargé de gérer les richesses minières du Niger. Par son implication dans l’exploration et la production, elle tient un rôle de premier plan dans l’économie, comme l’explique son Directeur général, Mahamadou Zada.
Siège social de la SOPAMIN
■ MISSIONS PRINCIPALES : - gérer les participations du Niger dans les sociétés exploitant des mines ou carrières ; - mener, pour le compte de la République, toute opération minière ou de carrière, seule ou en association avec des tiers ; - commercialiser les substances minières et de carrières ; - exercer le contrôle opérationnel des sociétés minières ou tout autre contrôle dévolu aux actionnaires par la réglementation. ■ PORTEFEUILLE DE PARTICIPATIONS DE LA SOPAMIN Part dans le capital social COMINAK-SA
Uranium 31 %
SOMAÏR-SA
Uranium 36,60 %
Comment définissez le rôle de la SOPAMIN dans l’économie nigérienne ? M.Z. : Notre ambition est de faire de la SOPAMIN le vecteur du développement économique et social du pays, en favorisant l’impact des activités minières et l’augmentation de la création de valeur. Pour augmenter ses ressources tirées des activités de commercialisation, la SOPAMIN a pris ou racheté des participations dans des sociétés nouvelles ou existantes. De plus, la société investit dans des projets créateurs de richesses et d’emplois. Ainsi, nous avons obtenu 18 permis de recherche d’or dans le nord du pays, où des prospections sont en cours. Parallèlement, nous avons installé deux comptoirs d’or pour capter la production des orpailleurs, la valoriser et la vendre sur le marché international.
70,13 %
Prenez-vous des mesures spécifiques concernant la sécurité des populations nigériennes ? M.Z. : Nous sommes au conseil d’administration de toutes les sociétés dans lesquelles nous détenons des participations et nous participons à la définition de leurs politiques de santé et de sécurité, aussi bien pour le personnel que pour la population alentour. Il en va de même pour les questions environnementales. Nous nous assurons que toutes les normes internationales en matière de santé, de sécurité et de respect de l’environnement soient quotidiennement respectées par les sociétés qui exploitent les mines au Niger.
SOCIÉTÉ DE PATRIMOINE DES MINES DU NIGER Siège social Niamey Quartie Goudel, Avenue des Ambassades, République du Niger - B.P. 11500 Tél. /Fax : +227 20 73 51 54/20 73 28 03
Quelles sont vos perspectives à l’horizon 2021 ? M.Z. : Notre objectif à moyen terme est de devenir un acteur majeur à l’international dans l’uranium et aussi dans l’or. Au plan national, notre ambition est aussi la production du charbon qui va booster la capacité de production de l’énergie et au-delà favoriser l’émergence économique du pays. À court terme, nous avons des projets à forte valeur ajoutée et à faible intensité capitalistique que nous ambitionnons de développer sur fonds propres. Il s’agit, entre autres, de la production de sel, de calcaire et de bentonite. ■
IMOURAREN-SA
Uranium 33,35 %
SOMINA-SA
Uranium 33 %
SML-SA
Or
100 %
CMEN-SA (ex SNCA-SA) Charbon 31,65 % CNTPS-SA
Transport 55 %
NCK-SA
Ciment
DIFCOM/FC - Photos : DR
Missions et participations
Dans un marché mondial très tendu, l’uranium nigérien est il toujours compétitif ? Mahamadou Zada : Il est vrai que depuis la création de la SOPAMIN, les cours de l’uranium ont chuté de 100 dollars, de 135 dollars la livre en 2008 à 37 dollars en septembre 2015. Cela dit, demander si l’uranium nigérien est « toujours » compétitif, c’est un peu tendancieux. Comme si l’uranium nigérien ne valait plus rien. Il est d’une qualité tout à fait comparable à n’importe quel autre. L’avantage comparatif réside dans le coût de production et la capacité de négociation du vendeur. Si nous voulons être compétitifs, il faut que nous produisions à moindre coût et que nous négociions les meilleurs prix avec nos clients.
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Le Plus de J.A. Niger migrants
Halte! On ne passe plus! Dans le Nord, Agadez est l’un des principaux points de transit pour les Ouest-Africains cherchant à rallier la Libye. De nombreux habitants tirent profit de cet afflux… pas toujours légalement.
C
h a q u e a n n é e, q u e l q u e Un vrai dilemme pour le gouverne60 000 migrants empruntement nigérien. « On ne peut pas abanraient les routes nigériennes donner la lutte contre le phénomène du dans leur périple pour rallier trafic illicite de migrants sous prétexte l’Afrique du Nord, puis, pour beaucoup que les habitants seraient contre et que d’entre eux, l’Europe. Venus principalec’est impopulaire », décrète Hassoumi Massaoudou, le ministre de l’Intérieur, ment de Gambie, du Nigeria, du Sénégal et du Ghana, ils profitent de la libre cirqui, à défaut de pouvoir efficacement faire culation en vigueur au sein de la Cedeao démanteler les maisons d’hôtes par les pour parvenir à la frontière libyenne en forces de police, exhorte les Agadéziens toute légalité. Car, à moins qu’ils soient à trouver des activités de substitution. sans papiers, l’État nigérien ne peut pas RANÇONS. Le 11 mai, le Parlement a leur refuser l’entrée sur son territoire. Depuis le début de la guerre au Mali, en adopté une loi criminalisant l’activité des 2012, et le renforcement des contrôles à la passeurs en la qualifiant de trafic d’être frontière algéro-malienne, le phénomène humains. Depuis son entrée en applicaa pris une telle ampleur qu’Agadez, la tion, fin mai, transporter des migrants métropole du Nord nigérien, est devepour leur faire passer la frontière de la nue le point de départ quasi officiel des Cedeao est donc considéré comme un convois de migrants en partance pour la crime et passible de dix ans de prison au Libye. La ville a même rebâti son économinimum. Pourtant, si plusieurs vagues mie, jadis principalement irriguée par le négoce, Désormais, ceux qui s’improvisent l’artisanat et le tourisme, passeurs peuvent être poursuivis sur les besoins de ces voyageurs d’un genre particulier. pour trafic d’êtres humains. « Presque tous les jeunes qui disposent d’un véhicule se sont lancés d’arrestations ont été orchestrées, aucune dans cette activité », explique Mohamed condamnation n’a encore été prononcée Anacko, président du conseil régional par la justice nigérienne. d’Agadez et ancien leader touareg. Entre le « Tout le monde est impliqué », fait business des passages et celui des « mairemarquer Mohamed Anacko. La populasons d’hôtes » (aussi appelées « ghettos »), tion de la région, bien sûr, qui y trouve une où les habitants accueillent en nombre activité rémunératrice, mais également les les aspirants au départ, l’immigration forces de sécurité, dont certains membres, est devenue, en quatre ans, le principal selon plusieurs témoignages, n’hésitent fonds de commerce de la ville. pas à rançonner les convois, qui repartent
ensuite libres dans le désert. « Certains viennent à Agadez exclusivement pour s’enrichir, puis, quand cela devient trop voyant, on les renvoie à Niamey », déplore Mohamed Anacko. Selon le ministère de l’Intérieur, qui espère réduire ce flux de migrants de manière significative, il est urgent de mettre en place une force consacrée à la seule lutte contre les passeurs. « La
ACCueilliR Ou Ne pAS ACCueilliR…
a
gadez et d’autres localités du Nord pourraient bientôt disposer de centres d’accueil de migrants. L’idée, évoquée par plusieurs ministres européens en visite au Niger, est débattue depuis plus d’un an entre l’État nigérien et l’Union européenne (UE). Toutefois, n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
aucun accord n’a été signé. Et aucun projet n’a encore vu le jour. « Aujourd’hui, on essaie de démanteler les “maisons d’hôtes”, mais l’on est aussi obligé de fermer les yeux, car on ne peut pas arrêter ni mettre en prison des migrants qui n’ont commis aucun délit. Il nous faut donc des centres où les
héberger dignement et les sensibiliser pour les inciter à retourner chez eux », explique Hassoumi Massaoudou, le ministre de l’Intérieur nigérien. Or la construction de centres d’accueil pourrait être vue d’un mauvais œil par les populations locales. « C’est dans les pays d’origine que
des actions doivent être menées, que la sensibilisation des jeunes doit être mise en place, estime Mohamed Anacko, le président du conseil régional d’Agadez. Si l’on met un centre à Agadez, tout le monde va y venir pour profiter de l’argent M.O. de l’UE… » ● jeune afrique
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© Akintunde Akinleye/ReuteRs
t Agadez, le 25 mai. Les migrants viennent principalement de Gambie, du Nigeria, du Sénégal et du Ghana.
LIBYE ALGÉRIE
police qui s’en charge est la même que celle qui patrouille ou s’occupe des vols, déplore Hassoumi Massaoudou. Mais créer une force spéciale suppose un coût important… Et nous avons déjà beaucoup à faire face au terrorisme et au trafic de drogue. » Les autorités nigériennes ont donc appelé l’Union européenne à participer à la formation et au financement d’une telle brigade. convois. Pour le moment, faute de
moyens, les quelques contrôles mis en place contre les convois illégaux n’ont le plus souvent qu’un effet pervers. « Les
passeurs les contournent, ils empruntent des voies plus difficiles. Et c’est comme cela que l’on retrouve des convois de migrants perdus ou morts dans le désert », explique Mohamed Anacko. « Nous ne voulons pas que l’économie criminelle prenne le pouvoir à Agadez comme elle a pris le pouvoir dans le Nord-Mali », martèle pourtant Hassoumi Massaoudou, bien résolu à reprendre le contrôle de la situation. Reste que, compte tenu de l’immensité de la région d’Agadez (qui couvre plus de la moitié de la superficie du pays) et de la porosité de sa frontière avec une
Ténéré MALI
AgadezNIGER Tahoua
Tillabéri Niamey B.F.*
Maradi Zinder
Diffa TCHAD
Dosso
BÉNIN
NIGERIA * Burkina Faso
300 km
Libye déstabilisée, le combat de l’État nigérien contre les passeurs semble loin d’être fini. ● Mathieu olivier, envoyé spécial
La NIGELEC à l’heure des grands chantiers
À
leur arrivée au pouvoir en avril 2011, les autorités nigériennes ont dû faire face à une situation des plus critiques dans le secteur de l’électricité, comme d’ailleurs dans la plupart des secteurs socio-économiques du pays. À Niamey, la capitale, la situation était caractérisée par un rationnement assumé de la fourniture de courant à travers des programmes de délestages quotidiens, sans aucune perspective. De fait, les deux dernières centrales électriques construites à Niamey l’avaient été en 1982 et 1985 et la ligne d’interconnexion de 132 kV reliant le Nigeria au Niger avait été installée en 1976, avec une capacité limitée à 40 MW.
Pour accélérer le développement économique et améliorer la qualité de vie des Nigériens, le président de la République, Mahamadou Issoufou, a lancé l’ambitieux programme de « La Renaissance du Niger ». Dans son volet Infrastructures et Énergie, ce programme prévoit l’extension et le renforcement des infrastructures énergétiques en vue de diversifier et de sécuriser les sources d’approvisionnement ainsi que d’améliorer la desserte et l’accès à l’électricité des populations nigériennes (urbaines et rurales) à moindre coût.
Améliorer l’accès à l’électricité, notamment en zones rurales Sur la période 2011-2016, il a été prévu l’électrification de 500 villages afin de relever le taux d’accès à l’électricité, qui stagne autour de 10 % depuis plusieurs années (et seulement 1 % en zone rurale). L’exécution de cet important programme a permis de raccorder une moyenne de 50 localités par an entre 2012 et 2014. La cadence est accélérée en 2015 à travers :
1. le projet de renforcement et d’extension des réseaux électriques à Niamey et dans de nouvelles localités rurales, financé par l’Agence française de développement (AFD) à hauteur de 27 milliards de F CFA, qui porte notamment sur l’électrification de 118 localités ;
Visite du Président de la République sur le chantier de construction de la Centrale 100 MW de Gorou Banda.
2. le programme d’urgence d’électrification rurale 2015-2016,
d’un montant de 21 milliards de F CFA financé conjointement par la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), l’État du Niger et la NIGELEC, qui concerne l’électrification de 211 localités en deux ans ;
3. d’autres projets sont en cours de développement sur
financement de la Banque d’investissement et de développement de la CEDEAO (BIDC) et d’EXIMBANK-Inde ; ils portent sur l’électrification par énergie solaire de 100 localités.
Renforcer l’offre en énergie électrique et améliorer la desserte Pour remédier au déficit de production et améliorer la fourniture de l’électricité aux populations nigériennes, la première préoccupation a été d’entreprendre, à court terme, le renforcement de l’offre en énergie électrique et la réduction des coûts par :
COMMUNIQUÉ
Vue du chantier de construction de la Centrale Thermique de 100 MW de Gorou banda.
1.
le recours à la location de groupes électrogènes auprès de la firme franco-britannique Aggreko (20 MW en 2012 et 10 MW supplémentaires en 2013) ;
2. à l’intérieur du pays, la construction d’un réseau national
3. la réduction de 25 % du prix du KWh pour les couches les plus vulnérables et la réduction de 80 % du coût de raccordement pour les populations rurales.
De nouvelles centrales électriques complèteront bientôt la fourniture • Centrale thermique 100 MW de Gorou Banda (Niamey) Financée conjointement par la BOAD, la Banque islamique de développement (BID) et l’État du Niger, la première tranche, d’une puissance de 80 MW, permettra de renforcer et sécuriser l’offre énergétique de la capitale. Elle est en cours de finition et sa mise en service interviendra fin 2015. • Renforcement des centrales régionales de Malbaza, Diffa et Maradi Afin de couvrir la demande, la NIGELEC a prévu l’installation sur fonds propres dans les centrales régionales où cela est requis, de capacités additionnelles pour renforcer la réserve de puissance disponible. Ainsi, des centrales modulaires de 6 MW ont été installées et mises en service en juin 2015 à la centrale de Malbaza, d’autres de 3 MW et 6 MW sont en cours d’installation respectivement à Diffa et Maradi.
HALID ALHASSANE Directeur général de la NIGELEC depuis 2011, Monsieur Halid Alhassane est diplômé de l’École supérieure interafricaine d’électricité (ESIE, Côte d’Ivoire). Il est également titulaire d’un DESS en Stratégie et gestion d’entreprises du Centre d’études financières, économiques et bancaires (CEFEB, France), d’un diplôme supérieur en management (DESUP) de l’Institut d’administration des entreprises (IAE, Paris Sorbonne) et d’un diplôme supérieur en économie et politique de l’énergie, obtenu à l’Université Pierre Mendès-France (Grenoble). Il est déterminé à faire du Niger un exportateur net d’électricité, s’appuyant sur toutes les ressources concourant à la production de l’électricité dont le pays est richement doté (uranium, charbon, pétrole, potentiel hydraulique, soleil).
Vue de la réunion des bailleurs de fonds lors de la 9ème session de l’Assemblée Générale du WAPP. À moyen terme, l’offre en énergie électrique au Niger sera significativement confortée pour couvrir la demande. Le pays deviendra même exportateur d’électricité grâce à la centrale hydroélectrique de 130 MW prévue dans le cadre du programme Kandadji, en construction, ainsi qu’à la centrale thermique à charbon de Salkadamna d’une puissance cible de 600 MW extensible, ainsi qu’à la réalisation du réseau HT 330 kV vers Niamey et 132 kV vers le Niger-Centre-Est. • Renforcement des interconnexions nationales et régionales Dans le cadre de l’intégration régionale, dont le Niger est l’un des pionniers, la NIGELEC œuvre activement pour l’obtention du financement du projet de ligne d’interconnexion 330 kV West Africa Power Pool (WAPP) Dorsale Nord, reliant Birnin Kebbi-Niamey-Ouagadougou et Zabori-Malanville. Cette infrastructure majeure permettra de mutualiser les sources de production au niveau de la région ouestafricaine. Il servira de passerelle à l’exportation de la production de Salkadamna et constituera l’ossature d’un véritable réseau national raccordé au réseau du WAPP. • Amélioration du réseau de distribution D’importants travaux de mise à niveau du réseau de répartition d’énergie autour de Niamey, ainsi que le renforcement et l’extension de plusieurs postes sources HTB/HTA sont actuellement en cours d’exécution. En plus des investissements sur fonds propres de la NIGELEC, les réalisations entreprises dans le domaine de la distribution bénéficient de l’appui de partenaires techniques et financiers que sont l’AFD et la Banque mondiale. Ils concernent notamment l’extension des réseaux électriques de 14 quartiers périphériques de Niamey et de 7 centres urbains. En plus de l’amélioration de la qualité de service et de l’accroissement des réseaux électriques qu’ils vont engendrer, ces projets vont permettre de raccorder plus de 120 000 foyers en 3 ans (2016-2018). Par ailleurs, les programmes d’investissement et de croissance lancés par NIGELEC vont lui permettre de recruter 1 100 nouveaux agents à l’horizon 2020. Avec le Programme de la Renaissance du Niger, le secteur de l’électricité va connaître de profondes mutations qui, à moyen terme, doteront le Niger d’une offre suffisante pour couvrir la demande et le feront passer à un statut d’exportateur d’énergie électrique. ■
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DIFCOM/FC - Photos : DR
interconnecté grâce à des projets de construction de lignes HT, notamment la réalisation (en cours) des lignes 132 kV Soraz-Zinder (56 km) et Maradi-Malbaza (200 km), ce qui va permettre d’améliorer et de renforcer l’offre énergétique dans le centre-est du pays (régions de Maradi, Zinder et Tahoua) ; les travaux sont en cours et s’achèveront en 2016 ;
80
Le Plus de J.A. Niger interview
Alma Oumarou « nous avons choisi le libéralisme, pas l’anarchie » Grands chantiers, climat des affaires, lutte contre la vie chère… Le ministre du Commerce et de la Promotion du secteur privé expose la stratégie de l’État pour stimuler l’économie.
L
’
opposition le considère comme l’une des prises de guerre de Mahamadou Issoufou. Alma Oumarou a en effet été exclu en février 2014 du Mouvement national pour la société de développement (MNSD-Nassara, ancien parti unique) de Seini Oumarou, dont il était l’un des vice-présidents,pouravoiracceptéd’entrer au gouvernement, malgré la désapprobation de son parti, lors du remaniement d’août 2013. Depuis, le ministre du Commerce et de la Promotion du secteur privé a fait sien le programmeéconomique du chef de l’État, qu’il défend bec et ongles. jeune Afrique : L’économie nigérienne est en train de décoller. La baisse du cours de l’uranium et le début de la production pétrolière ont-ils déjà modifié sa structure ?
ALMA OuMArOu : Depuis 2011, le Niger est devenu un pays producteur de pétrole, ce qui a compensé le ralentissement du marché de l’uranium après la catastrophe de Fukushima. Mais il n’y a pas eu de renversement structurel, le pétrole n’a pas tout « révolutionné ». Nous produisons actuellement 20 000 barils par jour, dont 13 000 vont à l’exportation. Ce n’est pas énorme, mais suffisant pour compenser la tendance baissière du secteur minier. Dans le domaine du commerce, nous avons enregistré une hausse du pouvoir d’achat des ménages et de leur consommation, les salaires ayant plus que doublé entre 2011 et 2015, avec un taux d’inflation inférieur à la consommation [lire encadré]. Entre 2013 et 2015, le pays a également connu des pluies abondantes, ce qui a boosté l’agriculture, deuxième
BOnnes nOuveLLes du fOnds
M
algré la vulnérabilité du pays aux catastrophes naturelles et la détérioration de la situation sécuritaire dans la région sahélosaharienne, les résultats macroéconomiques du Niger sont plutôt bons, et ses perspectives pour les deux prochaines années également. C’est ce qui ressort des conclusions de la mission du FMI en séjour à Niamey du 14 au 28 septembre. Le taux de croissance du PIB est passé de 4,6 % en 2013 à 6,9 % en 2014, soutenu principalement par la progression des secteurs
n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
de l’agriculture et des services. Il devrait se maintenir à 4,4 % en 2015 (quelque peu ralenti par une croissance moins forte de l’agriculture et un affaiblissement de la production dans le secteur extractif) et s’établir en moyenne à 6,5 % de 2016 à 2018. L’inflation est sous contrôle, bien au-dessous du critère de convergence de 3 % de l’UEMOA : elle était négative en 2014 (– 0,9 %) et présente un taux annuel moyen de 0,1 % à la fin août (au lieu de 1,4 % prévu), grâce à une bonne campagne
agricole et à l’amélioration de l’approvisionnement en nourriture, auquel a contribué le programme d’aide alimentaire de l’État (qui freine notamment la hausse des prix des céréales). En revanche, les dépenses de sécurité imprévues ces deux dernières années et le faible montant des recettes recouvrées ont compliqué l’exécution du budget 2015 et eu des effets négatifs sur la situation financière du pays. ● CéCiLe MAnCiAuX
mamelle de notre économie après les industries extractives. quelles sont les priorités en matière d’infrastructures ?
L’État a mis en place sa politique de grands chantiers, avec des investissements structurants dans de nombreux domaines, qui vont doper la croissance du pays. Je pense notamment aux ouvrages hydrauliques. La centrale de Gorou Banda est en construction à Niamey, elle aura une capacité de 100 mégawatts. Le grand projet du barrage de Kandadji [à 180 km au nord-ouest de Niamey] avance rapidement et sera mis en eau au plus tard en 2017 [puissance installée : 130 MW]. Par ailleurs, le Niger est l’un des rares pays à n’être pas encore relié à ses voisins par le chemin de fer. L’État va y remédier en faisant converger sur le territoire les lignes existant dans la sous-région. Les conventions pour la construction et la concession d’exploitation des infrastructures du chemin de fer Niamey-Cotonou ont été signées mi-août [avec le groupe français Bolloré]. quels sont les secteurs porteurs ?
Nous sommes un pays en construction, qui offre donc des opportunités d’investissement dans tous les domaines, en particulier celui de l’industrie minière, où nos attentes sont importantes – nous accordons des permis de recherche et d’exploration presque chaque jour ! –, mais aussi dans le BTP, où nous avons noué de nombreux partenariats publicprivé, et dans les services, notamment la filière hôtellerie. Le Niger a également d’énormes besoins pour développer son agriculture. Nous souhaitons notamment pouvoir transformer sur place nos produits d’élevage ou les exporter. Pour cela, il nous faut des abattoirs aux normes internationales. Nous comptons également mettre sur pied des usines de transformation de produits agroalimentaires tels que la tomate, l’oignon, etc. Dans tous ces secteurs, les investisseurs peuvent prétendre à de nombreux avantages, qui vont de l’exonération des droits de douane et de la TVA à des avantages en nature – par exemple la cession de terrains aux entreprises qui construisent des logements sociaux. quelles sont les missions assignées à votre département ? jeune afrique
entre deux fronts t L’ancien cadre du MNSDNassara (opposition) défend désormais bec et ongles le programme économique du président Issoufou.
auparavant. Pour créer une SARL, plus besoin de passer par un notaire, etc. Toutes ces mesures visent à encourager les petits commerçants à sortir du secteur informel. Dans le contexte sécuritaire actuel, comment développer le commerce transfrontalier ?
Il est prévu des postes de contrôle sécuritaires dans l’ensemble de l’UEMOA. Il ne s’agit d’entraver ni la liberté de circulation des populations ni la liberté de commerce. Les forces de l’ordre qui y sont affectées ont pour mission prioritaire de vérifier que les biens transportés sont conformes. La partie sud du pays, notamment la région de Maradi, où s’effectue le gros de nos échanges commerciaux, est relativement épargnée, mais nous restons vigilants.
© TAGAZA Djibo pour j.A.
Le Niger a connu des émeutes de la faim, notamment en 2005 et en 2008. Quelles mesures ont été prises pour lutter contre la vie chère ?
Mon ministère a pour vocation d’attirer les investissements privés. Entre 2011 et 2014, 156 dossiers de demande d’agrément au code des investissements ont été examinés et acceptés : cela représente 529,7 milliards de F CFA [807,5 millions d’euros] d’investissement, 1209,5 milliards de F CFA de valeur ajoutée et 6977 emplois créés.Etnouscomptonsbiencontinuersur notre lancée. Nous avons déjà renforcé nos relations commerciales avec les pays partenaires. Par exemple, nous avons obtenu de Washington un accroissement de la couverture de l’Agoa [African Growth and Opportunity Act] en matière de produits. De nombreuses mesures ont par ailleurs été prises pour améliorer le climat jeune afrique
des affaires, surtout en ce qui concerne le commerce transfrontalier. Nous avons allégé les procédures. Par exemple, le
Nous avons opté pour le libéralisme, donc nous n’avons pas une grande marge de manœuvre sur le contrôle des prix – sauf dans le secteur des hydrocarbures, où nous avons pu consentir une baisse du prix de l’essence. Cela dit, liberté des prix ne veut pas dire anarchie. Une loi pour la protection du consommateur et contre la vie chère a été promulguée. Une commission comprenant des représentants du gouvernement, des commerçants, des consommateurs et des ONG se réunit régulièrement pour examiner les problèmes. Par exemple, lors des départs pour le pèlerinage à La Mecque, nous
Mon ministère a pour vocation d’attirer les investisseurs privés, qui peuvent prétendre à de nombreux avantages. nombre de documents requis a été réduit de huit à quatre pour les importations et de dix à six pour les exportations. Le délai maximal pour créer une entreprise est désormais de cinq jours, et cela ne coûte plus que 10000 F CFA, contre 59000 F CFA
avons exigé de toutes les agences une transparence sur les prix, avec obligation de les afficher et de les justifier. Nous nous employons à stopper les dérives. ● Propos recueillis par CLarisse JUOMPaN-YaKaM n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
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Le Plus de J.A. Niger Télécoms & TIc
Fini le désert numérique! Avec l’installation de 2 275 km de fibre optique et de 136 bornes GSM, internet et la téléphonie mobile devraient passer à la vitesse supérieure dès 2016.
L
es travaux d’installation du réseau national de fibre optique ont été lancés à la mi-juin à Tillabéri, chef-lieu de la région du même nom, à 120 km au nord-ouest de Niamey. Une fois encore, le financement est venu de Chine (lire encadré p. 83) : l’Eximbank a accordé au Niger un prêt préférentiel de 58 milliards de F CFA (plus de 88 millions d’euros) à un taux d’intérêt de 1 % sur vingt ans. Ce qui ne manque pas de faire grincer des dents dans l’opposition, du côté des défenseurs de l’indépendance économique nigérienne. Au-delà de la polémique, le chantier mené par China International Telecommunication Construction Corporation va considérablement réduire la fracture numérique dont souffre le Niger, où les utilisateurs d’internet représentaient à peine 2 % de la population l’an dernier, soit le plus faible taux de la zone UEMOA. Le projet comprend en effet l’installation d’un réseau de 2 275 km de fibre optique (complété par un réseau ADSL pour 51 000 abonnés) et de 136 bornes émettrices GSM, qui vont doper la connectivité aux services internet et de téléphonie mobile. Géré
par la Société nigérienne des télécommunications (Sonitel), l’opérateur historique des télécoms, le projet fait partie du Plan de développement économique et social (PDES) 2012-2015 et de la politique sectorielle des télécommunications et technologies de l’information et de la communication (TIC), adopté en avril 2013 par le gouvernement. câbLe. Enclavé, le Niger n’a pas de rivage
pour tirer son propre câble sous-marin. Plusieurs chantiers lui ont déjà permis de se raccorder aux réseaux de la plupart de ses voisins, à commencer par celui de l’interconnexion avec le Burkina Faso, réalisée en 2012 avec l’aide de l’opérateur burkinabè Onatel, qui l’a relié à SAT-3/WASC (câble sous-marin irriguant la côte atlantique du continent en haut débit, depuis l’Europe jusqu’en Afrique du Sud). Mais grâce aux travaux en cours, le pays va disposer de sa propre dorsale nationale en fibre optique, tout en améliorant la couverture et les performances des réseaux ADSL et GSM. Les pouvoirs publics espèrent porter le taux de couverture nationale à 72 % dès 2016 (contre 54 % en 2010) et celui de
© Tagaza Djibo pour j.a.
pénétration des TIC à 50 % (contre 25 % en 2010). L’objectif est évidemment de donner aux particuliers, aux entreprises et à l’Administration l’accès à un service haut débit de qualité, indispensable au développement de l’économie comme à celui de la société. Et l’État pourra aussi intégrer de nouvelles applications – téléprésence, VoIP (téléphone par internet), etc. – à son programme d’e-gouvernance. ● Mathieu OLiVieR
construire ET RÉUSSIR ENSEMBLE © Maurice Ascani
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entre deux fronts PékiN AiMe NiAMey
L
p Centre de transmission terrestre de Niamey.
e village chinois de Niamey, près du stade SeyniKountché, n’est pas près d’être déserté. Pékin est devenu le premier fournisseur du Niger (22,6 % de ses importations en 2014, loin devant la France, 14,6 %) et son deuxième partenaire commercial, avec un volume d’échanges de 184 milliards de F CFA (280 millions d’euros) en 2014, en hausse de 59,38 % par rapport à 2013. Selon Hu Shi, l’ambassadeur de Chine à Niamey, le volume des investissements chinois au Niger aurait quant à lui atteint 4,7 milliards de dollars à la fin de 2014, et est soutenu par la présence d’une trentaine d’entreprises chinoises qui emploient 6 000 Nigériens. Elles sont actives dans le
secteur minier, notamment via la Société des mines d’Azelik (Somina), coentreprise entre la China National Nuclear Corporation (CNNC) et l’État nigérien, opérateur d’un gisement d’uranium près de Diffa. De son côté, la China National Petroleum Corporation (CNPC) exploite les champs pétrolifères et la raffinerie d’Agadem, près de Zinder, depuis la fin de 2011. Ce qui a permis au Niger de devenir producteur de pétrole et de ne plus avoir besoin d’en importer (avec un volume de traitement d’environ 815 000 tonnes par an). Les entreprises chinoises sont aussi très présentes dans l’hôtellerie et dans le BTP, où elles interviennent sur de nombreux chantiers routiers et
d’infrastructures, comme celui du nouvel hôpital de Niamey, d’une capacité de 500 lits, qui doit être livré d’ici à la fin de l’année. Le 26 août, Hu Shi a signé avec Aïchatou Boulama, la ministre nigérienne des Affaires étrangères et de la Coopération, deux accords portant sur une aide non remboursable de 13,5 milliards de F CFA et un prêt sans intérêt de 9 milliards. Une généreuse manne qui doit permettre au pays d’engager de nouveaux chantiers, en particulier celui du troisième pont de Niamey. La Chine avait déjà financé (25 milliards de F CFA) et livré en 2011 le deuxième pont de la capitale, baptisé « pont de l’Amitié sino-nigérienne ». ● CéCile MANCiAUX
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Les femmes expliquent l’importance de leur banque céréalière (en haut). > Les enfants apprennent les mesures d’hygiène (ci-contre). >
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L
e Niger met en œuvre a ve c l ’a p p u i d e l a Banque Mondiale depuis 2011, un Projet Filets Sociaux dans les régions de Dosso, Maradi, Tahoua, Tillabéri et Zinder. Il suscite beaucoupd’espoir au regard de ses résultats. Le Projet Filets Sociaux a distribué 7980 600 000 FCFA à 44 888 ménages vulnérables de 945 villages soit 10 000 FCFA par mois et pendant 24 mois ; pour l’achat des vivres et renforcer leur résilience. 1.803 groupements féminins ont été créées et en leur sein les femmes mènent des activités génératrices de revenu dont les banques céréalières, les moulins à grains et l’embouche du bétail. Enfin, 28 746 personnes dont 29 % de femmes ont récupéré 207 750 ha de terres dégradées, réalisé 23 infrastructures communautaires pour un salaire global de 2 122 414 200 FCFA.
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Ministère de l’Urbanisme et du Logement
NIGER
Rehausser le niveau d’équipement des régions construction d’infrastructures socioculturelles, sportives, administratives, sanitaires… sont mis en œuvre. Mon département ministériel a pour mission d’assurer la supervision générale des travaux de superstructure et de veiller à leur bonne exécution dans les délais et les règles de l’art, en ce qui concerne le volet « construction et aménagement urbain ». Notons que ce programme est réalisé parallèlement aux actions de modernisation de Niamey, la capitale, qui sont placées sous l’égide d’un Commissariat.
A
u Niger, comme dans beaucoup de pays africains, le développement urbain s’est opéré dans la capitale et souvent au détriment des autres agglomérations. Le rééquilibrage de cette situation fait partie des priorités du programme de développement économique et social du Niger, comme nous l’explique Mahamadou Salissou Habi, ministre de l’Urbanisme et du Logement. Le gouvernement a engagé la construction d’importantes infrastructures dans les villes du Niger. Quel est l’apport de votre ministère dans ce programme ?
Quelle est l’importance de ces réalisations, quel est leur coût ? H.M.S. : Les travaux concernent particulièrement la réhabilitation et la modernisation des services administratifs régionaux, ainsi que celles de centres socio-éducatifs, culturels et sportifs tels que des stades, des arènes de jeux, gouvernorats, maisons de la culture, résidences officielles, des ouvrages d’assainissement et bien d’autres équipements. Le montant consacré à chaque région est d’environ 50 milliards de F CFA. Le programme a été lancé en 2014 dans la région de Dosso. Cette année 2015, nous nous attelons à la finalisation des travaux à Maradi. En 2016, ce sera Agadez, et ainsi de suite.
> Maradi : La maison de la culture et l’arène des jeux traditionnels en chantier
Pouvez-vous nous parler des autres actions menées par votre Ministère ?
H.M.S. : Comme vous le savez, le Président de la République, Mahamadou Issoufou, a décidé de mettre à profit la commémoration de la proclamation de la République, le 18 décembre de chaque année, pour entreprendre des actions tendant à rehausser le niveau d’équipements de nos régions. Dans ce cadre, d’importants programmes de
H.M.S. : Dans ce même cadre du rehaussement du niveau d’équipements de nos régions, nous avons entrepris la rénovation des équipements marchands de plusieurs villes, parmi lesquels on peut citer le Marché central de Maradi, achevé depuis 2014, et celui de Zinder, dont les travaux de reconstruction vont bientôt commencer. Nous sommes également
Niamey, Niger Tél. : (+227) 20 72 42 66 Fax : (+227) 20 72 53 22
> Le président de la république Mahamadou Issoufou etHabiMahamadouSalissoulorsd’unevisitedechantier.
> Maradi : Le marché central reconstruit.
> Dosso : La cité du 18 décembre.
Communiqué
Ministère de l’Urbanisme et du Logement
DIFCOM/DF - PHOTOS : DR.
> Habi Mahamadou Salissou, ministre de l’Urbanisme et du Logement.
engagés dans un vaste programme de construction de 5 000 logements sociaux en Partenariat public privé. Sur un plan plus institutionnel, nous venons d’engager une refonte de la réglementation de la gestion foncière urbaine. Et nous assurons, entre autres, la constitution, l’entretien et la réhabilitation du patrimoine immobilier de l’État.
Niger Le Plus de J.A. Business
affaires de femmes
© TAGAZA DJIBO
Que ce soit dans la microfinance, l’agroalimentaire ou la banque, elles sont incontournables. Portrait de trois businesswomen qui prouvent que l’esprit d’entreprise n’est pas réservé aux hommes.
réki Moussa 45 ans, PDG d’Asusu
l
a rencontrer relève de la gageure : elle enchaîne les réunions, les heures de travail et les voyages aux quatre coins du pays. Au siège de l’établissement de microfinance que Réki Moussa a créé, les incessants va-et-vient témoignent de la vitalité d’une institution qui a changé la vie de milliers de Nigériens. Société leader dans le domaine de la microfinance au Niger, Asusu propose des crédits et des produits d’épargne aux
jeune afrique
petits entrepreneurs et aux familles modestes dans l’ensemble du pays. Pour Réki Moussa, l’aventure a commencé dans les années 1990. Au sein de l’ONG Care, elle s’occupe alors du projet Mata Masu Dubara, qui consiste à créer dans les villages de petites caisses d’épargne et de crédit gérées par les populations elles-mêmes. Persuadée que ce projet peut se décliner à l’échelle nationale, elle démissionne et,
en 2005, crée l’association Asusu Ciigaba. Le succès est immédiat. En trois ans, elle parvient à réunir plus de 120 000 épargnants et 50 000 emprunteurs, ce qui, en 2008, la pousse à transformer l’association en entreprise. Aujourd’hui, plus de 300 000 personnes, essentiellement en zone rurale, bénéficient des produits financiers d’Asusu, qui compte 300 salariés à travers le pays. ● Clarisse JUOMPaN-YaKaM n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
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Le Plus de J.A. Niger
Zeinabou Maidah 53 ans, PDG de Niger-Lait
«P
our chaque porte qui se referme, une autre s’ouvre. » L’adage s’est vérifié pour Zeinabou Maidah. Ingénieure agroalimentaire, elle est victime d’un licenciement abusif en 1992 et, après un passage par la case tribunal, obtient une importante indemnité, qu’elle investit aussitôt dans la création de sa petite entreprise, Niger-Lait, en 1994. Son ambition est double : fournir à la population, notamment aux enfants, des produits laitiers et dérivés à forte valeur nutritionnelle, et valoriser les salariés en cultivant chez eux un véritable sentiment d’appartenance à l’entreprise. Zeinabou Maidah débute son activité dans son garage de 20 m2, avec cinq employés, et jure de faire de ce petit « atelier de travail » une véritable industrie agroalimentaire. Pari tenu : vingt ans plus tard, Niger-Lait, désormais installé sur un immense site
industriel de plus de 5000 m2, est devenu l’un des fleurons de l’industrie nigérienne. La société réalise un chiffre d’affaires annuel de 5 milliards de F CFA (7,6 millions d’euros), contre 15 millions de F CFA lors de sa première année d’exercice. Elle emploie 118 salariés et affiche une capacité de production de 55 000 litres par jour, tous produits confondus, lesquels sont distribués dans toutes les régions du pays (hormis celle de Diffa). Niger-Lait s’était déployé dans la sous-région, mais des contraintes douanières l’ont obligé à marquer un arrêt ; des négociations sont en cours avec des entreprises locales au Bénin, au Togo et au Burkina Faso, pour que la société y développe de nouveau ses activités. Zeinabou Maidah s’amuse des préjugés auxquels elle a été confrontée lors de la création de son entreprise (« les
© Tagaza djibo pour j.a.
femmes baissent toujours les bras à la première embûche », s’entendait-elle dire) et estime avoir relevé tous les défis qu’elle s’était fixés, sauf un : trouver localement toute la matière première nécessaire… Moins de 10 % proviennent de son réseau de 472 éleveurs réunis en coopérativesouen associations, et elle doit donc importer du lait des pays de l’Union européenne ou d’Amérique du Sud,
pour un montant annuel de 3,5 milliards de F CFA. « Avec une telle somme, regrette Zeinabou Maidah, le gouvernement aurait pu élaborer une stratégie plus dynamique pour développer la filière et lutter contre la pauvreté. » Ses prochains défis: s’impliquer davantage dans le social et créer une école de référence consacrée à l’agroalimentaire. ● Clarisse JUOMPaN-YaKaM
Nana-aissa ango Koussa 48 ans, directrice générale de Banque Atlantique Niger
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© Tagaza djibo pour j.a.
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n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
l n’y en a qu’une. Depuis 2009, Nana-Aissa Ango Koussa est l’unique femme directrice générale d’une banque au Niger. Après avoir fait ses premières armes chez Ecobank au Sénégal, la jeune femme a pris en main la filiale nigérienne du groupe Banque Atlantique dès qu’elle a ouvert à Niamey, en 2005. Enceinte de six mois, elle en est alors la seule employée et travaille de chez elle. Dix ans plus tard, battant en brèche nombre de préjugés, Nana-Aissa Ango Koussa a quelque 170 salariés sous sa responsabilité. Qu’importe si certains la trouvent « dure », le pari de celle qui se veut simplement « dynamique et travailleuse », c’est de contribuer à améliorer le taux de bancarisation de ses concitoyens, qui est le plus faible de la région (seulement 3 %). Pour elle, la bancarisation permet de lutter contre la pauvreté, puisque la détention d’un compte permet plus facilement d’épargner pour financer ses futurs projets. « La banque, c’est un métier de terrain et de contacts, avec toutes les couches de la population », souligne Nana-Aissa Ango Koussa. Y compris avec les plus démunis, ajoute celle qui suit avec attention les différents projets de la fondation créée par le groupe Banque Atlantique concernant ces derniers. ● C.J.-Y. jeune afrique
Ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement
NIGER
Vers l’accès à l’eau potable pour tous au Niger
L
a création du Ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement, chargé de la mise en œuvre du Programme national d’alimentation en eau potable et d’assainissement (PN-AEPA) 2011-2015 font partie des premières actions entreprises par Son Excellence Monsieur Mahamadou Issoufou dès son élection à la Présidence de la République du Niger.
• 2,5 milliards de m3 renouvelables • 2 000 milliards de m3 non renouvelables
Des stratégies et des programmes clairement définis
> Wassalke Boukari, ministre de l’Hydraulique et de l’Assainissement.
en eau potable dans le domaine de l’hydraulique rurale ; • Le schéma d’alimentation en eau potable des villages insulaires et riverains du fleuve Niger. D’autres documents importants sont en cours d’élaboration, tels que : • Le Plan d’action national pour la gestion intégrée des ressources en eau (PANGIRE) ; • La Politique nationale de l’eau ; • La Politique nationale de l’hygiène et de l’assainissement ; • Les Schémas directeurs de l’assainissement des principaux centres urbains. Par ailleurs, le ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement et les partenaires au
© VINCENT FOURNIER/J.A.
À travers le PN-AEPA, le Ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement s’est doté d’un cadre formel sur les plans institutionnel, organisationnel, législatif et règlementaire devant garantir la viabilité de toutes ses interventions. En font notamment partie : • Le code de l’eau et ses textes d’application ; • La Stratégie nationale de l’hydraulique pastorale ; • La stratégie opérationnelle pour la promotion de l’hygiène et d’assainissement de base ; • Le PN-AEPA 2011-2015 ; • Le Guide des services d’alimentation
Dans le domaine de l’hydraulique urbaine, une des principales réformes a conduit à la création de la Société de patrimoine des eaux du Niger (SPEN), une structure autonome financièrement viable, capable d’assurer à moindre coût l’alimentation en eau potable, en quantité suffisante et en qualité acceptable, des populations des centres urbains, en particulier celles à faibles revenus.
Des objectifs ambitieux • Poursuivre la collecte des données et renforcer le dispositif de suivi de la qualité de l’eau ; • Relever le taux d’accès à l’eau potable de 48 % en 2009 à 58 % en 2015 en milieu rural par la réalisation de 14 000 équivalentspoints d’eau modernes sur 5 ans ; • Relever le taux de desserte en eau potable en milieu urbain de 74 % en 2009 à 85 % d’ici à 2015 ; • Accroître la disponibilité d’infrastructures d’assainissement de base, en faisant passer le taux de 7 % de la population en 2009 à 25 % en 2015 en milieu rural et de 35 % à 79 % en milieu urbain.
Un bilan très encourageant Fin 2014, soit après quatre ans d’exécution du PN-AEPA 2011-2015 sur les cinq prévus : • En hydraulique rurale, 7 907 nouveaux équipements ont été réalisés sur 11 000, soit près de 72 % de taux de réalisation. • En milieu urbain, le taux de desserte en eau potable est passé de 79 % à 88,9 %, soit au-dessus de la cible de 82,5 % en 2015 fixée par les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD).
Ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement (MH/A) BP 257, Niamey - Niger Tél. : (+227) 20 72 38 89 ; Fax : (+227) 20 72 40 15 ; > De nouveaux châteaux d’eau ont apporté l’eau dans les quartiers périphériques de Niamey.
Communiqué
E-mail : documents_mha_niger@yahoo.fr
DIFCOM/DF - PHOTOS DR SAUF MENTION.
D’importantes ressources en eau souterraines
développement ont mis en place des cadres de concertation État-Partenaires Techniques et Financiers, État-ONGs du secteur eau et assainissement, État-collectivités territoriales.
Le Plus de J.A. Niger
Cipmen
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p À Niamey, le 15 août 2014, lors d’une rencontre entre porteurs de projet. EntrEprisEs
un coup de pouce aux jeunes pousses
PME, explique Almoktar Allahoury, directeur général du centre. Nous pouvons donc leur ouvrir des portes. Auparavant, les jeunes n’étaient pas écoutés par les banques ou par les grands patrons car ils n’avaient aucune référence ; aujourd’hui, nous pouvons leur donner de la crédibilité. » En contrepartie de leur hébergement, les PME en phase d’incubation, lorsqu’elles commencent à faire des bénéfices, versent au Cipmen entre 7 % et 9 % de la part du chiffre d’affaires qui excède le montant qui leur avait été fixé. « Par exemple, si ce dernier est dépassé de 100 000 F CFA [150 euros], nous récupérons 7 000 ou 9 000 F CFA, selon le programme », précise Almoktar Allahoury. Le centre tire aussi une partie de son financement de ses activités de conseil auprès des grandes entreprises et de quelques ONG. VIABLE. Avec le soutien de ses partenaires
privés nigériens, français et nord-américains, le Cipmen, qui emploie actuellement sept collaborateurs à plein temps, compte atteindre rapidement l’équilibre financier. Il prévoit aussi de confier proCréer une start-up innovante est une chose. Qu’elle soit rentable chainement son programme de préincuet pérenne en est une autre. C’est là que le Centre incubateur bation à l’université de Niamey et espère des PME au Niger intervient. pouvoir bientôt emménager dans des locaux plus vastes, qui lui permettront ruit d’un partenariat public-privé grâce à des formations de quatre mois, de d’accueillir jusqu’à 30 entreprises. « Notre entre les pouvoirs publics nigémieux cerner les contours de leur future modèle, fondé sur l’accompagnement et riens d’un côté (dont la ville et PME en matière de produit et de clientèle. l’hébergement de 30 PME, n’est viable l’université de Niamey) et pluLa phase d’incubation proprement que si l’on ne paie pas de loyer, et nous sieurs grands groupes privés de l’autre dite dure quant à elle trois ans et ne peut attendons donc que l’État mette un espace (dont les nigériens Sinergi SA et Gamma être accessible pour le moment qu’à à disposition », explique le direcInformatique Niger, les français Orange, huit entreprises en même teur général, qui assure avoir Bolloré, Total et Veolia, les Canadiens de temps, comme c’est le cas reçu l’accord du Premier En Afrique la Lundin Foundation ou encore Bank of de GiMafoR, spécialiministre. subsaharienne, Africa), le Centre incubateur des PME au sée dans les services En attendant cette Niger (Cipmen) a été créé à la fin de 2013 écoénergétiques et étape « politique » des entreprises ne survivent pas et a démarré ses activités en avril 2014. le solaire photovol– qui risque d’être à leur deuxième année d’activité. Premier dispositif du genre dans le pays, il taïque. Espaces de retardée jusqu’à la Celles qui suivent un processus travail mis à dispoa un statut d’association à but non lucratif. tenue des élections d’incubation s’en tirent mieux, Sa mission consiste à renforcer la croissition, formation législatives et préavec un taux de survie de sance et à améliorer le taux de survie de en gestion de prosidentielle, prévues petites et moyennes entreprises innojet, en marketing ou en février 2016 –, le vantes dans trois secteurs d’activité prioen communication, centre multiplie les après cinq années ritaires: les technologies de l’information accompagnement compactions de sensibilisation d’exercice et de la communication (TIC), les énergies table, coaching… Toutes les et les sessions de formation, renouvelables et l’environnement. prestations du Cipmen visent à en particulier dans le domaine permettre aux jeunes sociétés hébergées des TIC. « Il faut créer cette culture de CRÉDIBILITÉ. La phase de préincubation de rentabiliser au mieux leur activité. start-up, qui n’existe pas au Niger, et casser s’adresse à une vingtaine de porteurs de « De par notre expérience et nos parles barrières entre les jeunes entrepreprojet, pour la plupart des étudiants de tenaires, nous avons facilement accès neurs et les grands patrons », conclut troisième cycle désireux de créer leur aux bailleurs de fonds et aux grandes Almoktar Allahoury. Reste à y mettre les entreprise. Cet accompagnement permet, entreprises du pays qui parrainent nos moyens. ● MAThIEu OLIVIER
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jeune afrique
NIGER
Ministère de l’Agriculture
Assurer la sécurité alimentaire et le développement agricole durable du Niger une année sur trois. L’Initiative 3 N vise à mettre définitivement les populations nigériennes à l’abri de la famine et à leur garantir les conditions d’une pleine participation à la production nationale et à l’amélioration de leurs revenus.
Quelles perspectives pour les années à venir ? M.A. : Mon département ministériel poursuivra et accélérera la mise en œuvre de l’Initiative 3 N sur la période 2016-2020, avec des objectifs encore plus ambitieux. Tirant les leçons de notre expérience passée, la sécurité alimentaire au Niger sera garantie avec tout le dispositif mis en place entre 2011 et 2015. Nous disposons de solides atouts pour y parvenir, notamment l’engagement politique au plus haut niveau de l’État, des documents de stratégies, un potentiel important de terres irrigables – plus de dix millions d’hectares –, l’achèvement de la construction du barrage de Kandadji et enfin la disponibilité d’une main d’œuvre bon marché.
M.A. : Nous menons des actions concrètes visant en priorité la résorption du déficit céréalier à travers le développement de l’irrigation, de la collecte des eaux de ruissellement et de l’amélioration de la productivité des cultures pluviales et irriguées. En outre, nous sommes très actifs dans la promotion des productions alimentaires de substitution, la promotion des filières agricoles à haute valeur ajoutée et la valorisation des productions agricoles. Cette stratégie s’appuie sur deux composantes essentielles, la maison du paysan, qui est une plateforme de services intégrés de proximité, et la maîtrise de l’eau.
>Monsieur M. Maidagi Allambeye. Ministre d’État, Minsitre de l’Agriculture
E
M.A. : L’Initiative 3 N constitue le cadre unique de référence en matière de développement agricole durable et de sécurité alimentaire et nutritionnelle au Niger. La situation d’insécurité alimentaire et nutritionnelle de notre pays est devenue plutôt structurelle que conjoncturelle, avec pour résultat un déficit de la production céréalière
DES RÉSULTATS ÉLOQUENTS Bilan des réalisations du ministère de l’Agriculture du Niger d’avril 2011 à juillet 2015, pour un budget total de 205 milliards de F CFA : • 23 211 ha de nouvelles terres aménagées ; • 3 864 ha d’aménagements hydro-agricoles réhabilités et 6 205 ha confortés ; • 201 nouveaux ouvrages de mobilisation des eaux et plus de 100 autres en cours de construction ;
Communiqué
> Cultures de contre-saison au Niger, près de Niamey.
• 17 250 forages maraichers ; • 3 756 puits maraichers nouveaux ou réhabilités ; • 620 000 mètres de réseau californien et 760 000 mètres de clôture. À quoi s’ajoutent de nombreuses infrastructures, notamment : 88 magasins de stockage, 82 centrales d’approvisionnement en intrants agricoles, 336 km de pistes rurales, 15 marchés à bétail, 189 radios communautaires, 600 tracteurs, 11 000 motopompes et 30 motopompes solaires…
> Fruits, légumes et marchandises arrivent par le fleuve Niger à Niamey.
Ministère de l’Agriculture BP : 12091, Niamey, Niger Tél. : (+227) 20 73 20 58/ 20 73 35 41 Fax : (+227) 20 73 20 08 Email : dagricole@yahoo.fr
DIFCOM/DF - PHOTOS SUIVANT MENTION.
Quels sont les principales orientations de l’Initiative 3 N ?
© DJIBO TAGAZA
n matière d’agriculture, les priorités stratégiques du programme de la Renaissance du Niger lancé par le Président Mahamadou Issoufou dès son investiture, en avril 2011, sont mises en œuvre par son gouvernement dans le cadre d’un programme spécifique, l’« Initiative 3 N » : les Nigériens nourrissent les Nigériens. Cela va bien plus loin que la lutte contre la famine, comme nous l’indique Maidagi Allambèye, ministre d’État, ministre de l’Agriculture.
© VINCENT FOURNIER/J.A.
Comment votre département ministériel est-il impliqué dans sa mise en œuvre ?
PUBLI-INFORMATION
La renaissance
• Chiffre d’affaires multiplié par 8 en 3 ans (2012 à 2014). • Adamou Mahaman Laouali, Administrateur Délégué, distingué par le Super trophée de Meilleur Manager d’Entreprise 2014.
S
ahelCom a pour mission d’accompagner le Niger sur la voie du développement en démocratisant l’accès aux services de téléphonie mobile. Son objectif est de favoriser l’accès de la grande majorité des Nigériens aux Technologies de l’information et de la communication (TIC) à des tarifs abordables, qui tiennent compte de leur pouvoir d’achat.
M. Adamou Mahaman Laouali, Administrateur Délégué de SahelCom (à droite) recevant des mains du Directeur de Cabinet du Ministre du Commerce, le Super trophée de Meilleur Manager d’Entreprise 2014.
Ses atouts sont, La qualité de son réseau, ses tarifs et ses offres de services, sa capacité à être plus proche des populations en leur permettant de communiquer à moindre coût quel que soit leur groupe socioprofessionnel font partie des atouts majeurs de SahelCom.
SahelCom est en permanence dans la dynamique de l’amélioration de ses services et de sa couverture en se fondant sur ses valeurs que sont la satisfaction du client, l’innovation, la pro-activité et l’accessibilité. Une telle dynamique a permis à SahelCom de relancer les activités commerciales et marketing avec une augmentation exceptionnelle de son chiffre d’affaires, multiplié par huit Avec de 2012 à 2014, et de son parc d’abonnés. Ces résultats, la création de centaine d’emplois et SahelCom, la prise en charge de centaines de jeunes stagiaires encadrés dans le cadre de l’insertion les Nigériens socioprofessionnelle ont permis à l’Administraconnectent teur Délégué de recevoir le Super trophée de Meilleur Manager d’Entreprise 2014, attribué par les Nigériens l’Agence Afrique-Medias Communication.
Pour réussir sa relance et répondre aux attentes des clients, SahelCom se rapproche chaque jour de la population. Dans le cadre de la responsabilité sociale, la société a soutenu et financé plusieurs activités et œuvres sociales des jeunes, des Forces de défense et de sécurité, des personnes défavorisées, etc.
Dans le cadre de la gestion des ressources humaines, une gestion axée sur les résultats est adoptée et soutenue par une nette amélioration des conditions de vie et de travail des agents et un renforcement des capacités du personnel dans les domaines technique, commercial, managérial , de la régulation et de la finance.
SahelCom s’est attelée depuis un certain temps à bousculer les dogmes imposés sur le marché nigérien en innovant et en marquant chaque jour sa présence dans le secteur des TIC au Niger. Sous l’impulsion de son administrateur délégué, Adamou M. Laouali, SahelCom relève de nouveaux défis grâce à une multitude de stratégies appropriées.
SahelCom 60 rue de l’Uranium, BP : 849, Niamey, Niger Tél. : (+227) 20 72 47 72/75/78 - Fax : (+227) 20 72 43 01 Email : sahelcom@sahelcom.ne - Facebook : SahelCom-Niger
Des clients dans le hall commercial du siège de SahelCom.
Entrée de SahelCom.
www.sahelcom.ne
DIFCOM/FC - Photos : DR
La vision de SahelCom est d’être une entreprise citoyenne plus compétitive qui comptera davantage dans le secteur des TIC et contribuera à atteindre le taux de 50 % de pénétration et celui de 72 % de couverture nationale en 2015, tels que définis dans la déclaration de politique générale du gouvernement.
Niger Le Plus de J.A.
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Tendance
Dans les coulisses du Fima Des centaines de créateurs, mannequins, stars venus du monde entier… le dixième Festival international de la mode en afrique, du 25 au 29 novembre à Niamey, promet d’être exceptionnel.
© OSIPHOTO.FR
q Lors de la précédente édition, en 2013.
rayonnement. Rien d’étonnant, à
en croire Moulaye Seidnaly, fondateur d’Afrique Prestige, une agence de communication parisienne chargée de la promotion du festival à Paris : « Le Fima célèbre la culture africaine et contribue jeune afrique
FInbaRR O’REILLY
l
es stars du football Samuel Eto’o et Yaya Touré, l’acteur portugais Joaquim de Almeida, la chanteuse nigériane Yemi Alade (interprète du single à succès Johnny), les stylistes Xuly Bët, KikoRomeo ou encore Agnès b… Ce n’est là qu’un petit aperçu des invités attendus à Niamey pour la dixième édition du Festival international de la mode en Afrique (Fima), du 25 au 29 novembre. Et elles ne manqueront pas de compagnie. Les organisateurs ont convié quelque 350 stylistes, mannequins, personnalités du show-biz et des médias à cette grandmesse de la mode africaine, qui devrait réunir plus de 3 000 participants venus du monde entier pour quatre jours de défilés et de concerts.
u Un modèle du créateur nigérien Alphadi.
à son rayonnement à travers le monde. » Autant que le Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou (Fespaco) ou le Marché des arts du spectacle africain (Masa) d’Abidjan, ne manque pas de préciser le styliste nigérien Alphadi,
fondateur du festival et président de la Fédération africaine des créateurs de mode (lire interview p. 94). Contrairement aux précédentes éditions, le Fima 2015 se déroulera dans la capitale nigérienne et non sur un site l l l n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
Le Plus de J.A. Niger
© XULY BËT
92
p Créations pour homme et femme du styliste malien Lamine Badian Kouyaté, alias Xuly Bët.
naturel classé par l’Unesco, comme les falaises de Tiguidit, où Alphadi avait organisé le tout premier festival, en 1998. La logistique n’en sera que plus légère et le budget – subventionné par l’État nigérien et différents sponsors – moins lourd : 980 millions de F CFA (près de 1,5 million d’euros). Le thème retenu cette année tient en une formule : « Éducation et industrie pour une Afrique de métissage et de paix ». Car pour le maître de cérémonie Alphadi, si le continent regorge de lll
multiples talents, l’enjeu aujourd’hui est de donner à ces derniers les moyens de se professionnaliser et de vivre de leur art. Et qui dit professionnalisation dit formation dans un établissement spécialisé dans les métiers de la mode. Les festivaliers pourront donc visiter l’École supérieure de la mode et des arts, encore en construction (d’un coût estimé à 1,5 milliard de F CFA, pour lequel l’État nigérien a promis une contribution de 250 millions). L’école formera au stylisme et, surtout, au management des industries
de la mode, un enseignement qui sera sanctionné par un diplôme de niveau bac + 4. Car les stylistes ne sont pas que des créatifs, ils doivent également être des chefs d’entreprise à même de gérer leur marque. Le prochain Fima pourrait d’ailleurs abriter le premier salon d’échanges entre acheteurs et vendeurs et servir de plateforme de rencontres B2B (« business to business ») entre les créateurs et leurs financeurs potentiels. Les promoteurs du festival en sont convaincus, une filière génératrice de
Entre deux fronts
SÉANCES PHOTOS. Avant l’ouverture du festival, deux manifestations orga‑ nisées par le Fima, particulièrement mobilisatrices, ont déjà tressé des lau‑ riers à d’heureux élus. La première, le concours Jeunes Stylistes, vise à repérer les jeunes talents de la mode vivant et travaillant sur le continent afin de leur offrir des opportunités de carrière à l’international. Un jury de profession‑ nels de la mode, réuni le 7 septembre au Musée des arts décoratifs de Paris, a choisi ses dix lauréats 2015 (sept femmes
© KIKOROMEO
plusieurs millions d’emplois devrait éclore sur le continent grâce au textile. Ils rêvent même d’une Afrique capable d’accueillir la production mondiale du prêt‑à‑porter. Les créateurs du monde entier pourraient par exemple, grâce à l’African Growth and Opportunity Act (Agoa, loi qui facilite l’accès au marché américain de produits en provenance de trente‑huit pays africains), inonder les États‑Unis de leurs modèles en les faisant fabriquer en Afrique, la Chine devenant de moins en moins compétitive…
p Parmi les incontournables du festival : les collections de KikoRomeo (Kenya).
et trois hommes) parmi quelque 400 sty‑ listes africains appelés à concourir. Ils participeront au Fima 2015, à Niamey. Car c’est l’une des particularités du fes‑ tival : il réunit des créateurs aguerris et renommés, dont certains exercent depuis trente ans (qui défilent sur « le grand podium »), et de jeunes talents,
qui, après cinq à dix ans de pratique professionnelle, sont admis sur le petit podium. L’autre événement « pré‑Fima », ce sont les sélections au concours Top Model 2015, devenu un classique : 80 mannequins hommes et femmes, originaires de 40 pays, ont été sélec‑ tionnés. Parmi eux, un homme et une femme seront couronnés meilleurs mannequins d’Afrique à l’issue de la compétition. Un titre qui ouvre de réelles perspectives professionnelles. Les mannequins primés par le Fima sont en effet courtisés tant par les agences que par les créateurs, comme l’Ivoi‑ rienne Valérie Ka (lauréate 2003) ou la Camerounaise Amanda Efathel (2013), qui enchaînent les défilés, les séances photos et les campagnes publicitaires à Paris, New York, Tokyo, Madrid… Un succès qu’apprécie Alphadi, même s’il préfère que le Fima soit avant tout un tremplin permettant aux stylistes et aux mannequins de prendre leur envol sur le continent africain. ● ClAriSSE JUOMPAN-YAKAM
NIGER
Ministère de l’Équipement
Bilan et perspectives
C
hargé de la conception et la mise en œuvre des politiques en matière d’infrastructures de transports routiers, de chemin de fer et de voies navigables, le ministère de l’Équipement
Dans ce cadre, le ministère de l’Équipement a mené à bien depuis 2011 d’importants travaux, représentant un investissement global de près de 363 milliards de F CFA (hors chemin de fer) :
• 2 117 km de routes construits ou réhabilités, dont 870 km bitumés, 853 km de routes rurales et 394 km de routes en terre modernes, • 126 km de voie ferrée, • le premier échangeur de Niamey, « Mali Bero », inauguré en 2013. Parmi les réalisations en cours : • 1 461 km de routes bitumées neuves ou réhabilitées, • 692 km de routes rurales, • deux nouveaux échangeurs, ronds-points des Martyrs et Diori Hamani, • la construction du pont Farié, à 70 km en amont de Niamey. • et aussi près de 15 km de conduites d’assainissement, 12 520 arbres plantés et la création de 17 359 emplois.
La poursuite de ce programme à moyen et long terme, maillon essentiel du développement économique et social du Niger, offre un cadre favorable aux partenariats gagnant-gagnant entre le gouvernement et des partenaires privés.
Ministère de l’Équipement B.P. 403, Niamey, Niger Tél. : (+227) 20 73 53 57 E-mail : equipementministere @yahoo.fr
DIFCOM/DF - PHOTO : DR
> Ibrahim Nomao, ministre de l’Équipement.
du Niger est en première ligne pour la réussite du Programme de la Renaissance. Ses actions visent quatre objectifs : 1. préserver le patrimoine routier, notamment en modernisant les activités du Fonds routier, 2. accroître le désenclavement des régions et du pays lui-même par la construction de nouvelles routes, 3. diversifier les ouvrages de franchissement et les échangeurs urbains, 4. promouvoir le chemin de fer.
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Le Plus de J.A. Niger interview
Alphadi « Dès qu’il s’agit de mode africaine, les financiers sont frileux » Le styliste appelle les décideurs du continent à prendre conscience du potentiel de la filière textile. Et à la soutenir.
G
rande figure de la mode africaine, le styliste nigérien Alphadi souhaite voir décol‑ ler une véritable industrie du prêt‑à‑portersurlecontinent.Nousl’avons rencontré dans son atelier, à Niamey.
jeune Afrique: Lors de la neuvième édition du fima, en 2013, vous avez dit qu’il était temps « de réaliser la promesse des fleurs »… que vouliez-vous dire ? ALPHADi: Je souhaiterais voir l’industrie
textile africaine éclater et briller de tous ses feux, grâce notamment à la classe moyenne qui émerge sur le continent et ne demande qu’à acheter les vêtements de créateurs locaux. Ces classes moyennes ne peuvent pas continuer à aller chercher, en Occident, le prêt‑à‑porter français, anglais ou chinois! Car l’Afrique, elle aussi, a son prêt‑à‑porter. Et elle tient son salon. Pourtant, si la matière première et les talents sont là, ce prêt-à-porter africain ne décolle pas…
Parce que les financiers sont frileux quand il s’agit de mode africaine, alors qu’en Occident, dès qu’un créateur est repéré, ils accourent. Il nous faut trou‑ ver des partenaires prêts à miser sur nos marques pour nous permettre de nous consacrer à notre art et d’en vivre, sachant qu’il nécessite toute une équipe,
du styliste au distributeur en passant par le responsable marketing. Tout repose sur les financements. Or si les décideurs du continent ne croient pas en leurs créa‑ tifs, pourquoi les étrangers y croiraient davantage? Il faut pourtant rappeler que la haute couture européenne a été financée par l’argent venu d’Afrique : Yves Saint Laurent, Christian Lacroix et LVMH ont bénéficié d’investissements de la com‑ pagnie Elf, c’est ce qui leur a permis de se développer. Pourquoi n’investirait‑on pas l’argent du pétrole africain dans nos marques pour nous permettre d’évoluer ?
Vincent Fournier/JA
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la poche pour encourager l’industriali‑ sation du textile, plutôt que de laisser les pagnes hollandais envahir les marchés du continent. Si je me suis lancé dans la maroquinerie, sij’ai créédes parfums, si j’ai
Les ministres nigériens ne s’habillent pas en Alphadi. ils devraient! ne faut-il pas diversifier les matières, qui se résument souvent au seul coton?
C’est vrai. Pour l’essentiel, l’Afrique ne dispose que du coton, ce qui bride la création et la production à grande échelle. Difficile, par exemple, d’imaginer une collection hiver en coton léger ou en bazin, qui n’est d’ailleurs pas un tissu africain. Il est grand temps de cultiver de la soie, de mélanger les matières, soie et taffetas, par exemple. Il faut que les politiques, les gouver‑ nants, commencent à mettre la main à
ouvert des magasins aux quatre coins du monde, c’est pour faire savoir que je suis capable de jouer dans la cour des grands… Sauf que mes concurrents ont la chance d’avoir leurs pays pour les soutenir, qui leur cherchent des partenaires financiers, qui communiquent pour eux, notamment en portant leurs vêtements. Les ministres nigériens ne s’habillent pas en Alphadi. Ils devraient… Mes partenaires financiers y trouveraient leur compte. ● Propos recueillis par CLArisse juOMPAn-YAKAM
Tél: + 227 20 35 04 70 / 21 76 45 73 / 90 90 93 00
Haute Autorité de Lutte contre la Corruption et les Infractions Assimilées (HALCIA) Des résultats probants et de belles perspectives, quatre ans après la création de l’institution anti-corruption. Le bureau du Président de la Haute Autorité de Lutte contre la Corruption et les Infractions Assimilées sis au Plateau – le quartier résidentiel de Niamey – ne désemplit pas. À longueur de journée, souvent tard le soir, Issoufou Boureima, magistrat formé dans les années 1990 à l’École de Magistrature de Paris, reçoit sans relâche, membres du bureau de la HALCIA, enquêteurs, chargés de programmes des organisations internationales, acteurs de la société civile et plaignants. Cette effervescence – plutôt, ce regain d’intérêt – suscite fierté et optimisme chez le premier responsable de la HALCIA. Après sa nomination, Issoufou Boureima « squattait » un bureau obscur au premier étage du palais de la Présidence, sans personnel ni fournitures. Un souvenir qui le fait sourire et qui souligne le chemin parcouru. La tâche était rude, mais le défi non insurmontable aimait-il rappeler et l’histoire lui a effectivement donné raison. Il ne peut en être autrement car la HALCIA est née pour concrétiser la promesse du Président de la République SE. Mahamadou Issoufou de combattre la corruption qu’il a diagnostiquée dans son discours d’investiture comme un obstacle au développement du Niger. En effet, le chef de l’État disait à ce propos : « Des dispositions seront prises pour créer un environnement et des conditions favorables à l’accroissement de la productivité des agents de l’État. La corruption, les passe-droits, les trafics d’influence, les détournements des deniers publics, notamment les fausses factures et les surfacturations, ainsi que toutes les autres dérives seront combattus ». Le principe de la recevabilité a guidé le Président Issoufou car, comme il aime à le répéter, le Niger est un pays riche, mais le Niger est un pays mal gouverné. D’où sa préoccupation fondamentale de restaurer le monopole fiscal de l’État et le rétablissement de l’efficacité de la dépense publique fortement érodée par des fraudes de tous genres. La lutte contre la corruption constitue également une préoccupation du gouvernement telle que déclinée dans la déclaration de politique générale pour asseoir la transparence et la redevabilité dans la gestion des affaires publiques. Dans cette dynamique, un accent particulier a été mis sur les mesures de modernisation des finances publiques, le renforcement du dispositif des codes d’éthique et de déontologie de certains corps, etc. Quatre ans après la naissance de la HALCIA, les résultats, sans être satisfaisants, poussent à l’optimisme. L’institution a en effet récupéré l’ensemble des dossiers de l’inspection d’État et de l’ancienne commission « Délinquance Économique, Financière et Fiscale » qui porte sur soixante dossiers. Sur ce point, Issoufou Boureima se veut clair. « La COMMUNIQUÉ
Le Président de la HALCIA, Issoufou Boureima, avec son homologue de l’EFCC du Nigeria, M. Ibrahim Lamordé.
lutte contre la corruption n’est ni une chasse aux sorcières ni un instrument d’élimination d’adversaires politiques », assure-t-il. D’ailleurs, toutes les personnalités politiques et les fonctionnaires indélicats tombés dans l’escarcelle de la HALCIA l’ont été sous la 7e République. Mais la HALCIA a par ailleurs une vision prospective. En dehors des plaintes et des dénonciations qu’elle reçoit, l’institution anti-corruption s’est résolument engagée dans la réflexion, la sensibilisation et surtout la formation sectorielle pour apporter des réponses aux dysfonctionnements qui donnent libre cours à la corruption. Conséquences, la HALCIA est étroitement associée dans l’organisation des examens scolaires et les concours d’entrée à la fonction publique, mais aussi dans les futures élections générales. Autre motif de satisfaction, Issoufou Boureima, en tant que Président du Réseau des Institutions anti-corruption de l’Afrique de l’Ouest, a réussi lors d’une rencontre à Doha, au Qatar, à introduire l’enseignement de modules sur la lutte contre la corruption dans les universités africaines, en collaborations avec le CAMES. Cependant, malgré les efforts déployés, l’opinion s’impatiente, elle attend le grand déballage. « La lenteur chez nous est gage de qualité », rétorque Issoufou Boureima, et d’ajouter « la preuve est que la justice ne trouve rien à réduire parce qu’elle trouve que nos dossiers sont de bonne qualité ». Le changement de mentalité et de comportement tant souhaité est un travail de longue haleine mais l’adoption en juin dernier d’une Stratégie nationale de lutte contre la corruption annonce de belles perspectives pour le Niger. ❑
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Le Plus de J.A. Niger Société
Juste pour rire Vieille tradition ouest-africaine consistant à s’insulter entre membres de certaines ethnies, le cousinage à plaisanterie est très pratiqué au Niger. Et donne lieu à des joutes verbales déconcertantes…
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iamey, le 1er septembre. Une interminable file d’attente s’étire devant les guichets d’une banque. Les clients attendent sagement leur tour quand un homme surgit qui grille la politesse à tout le monde pour se poster en tête, ignorant de sa superbe les regards désapprobateurs. Une voix de femme retentit : « Il faut être un Bagobiri pour agir de la sorte! Quand il s’agit d’argent, ils oublient les règles de bienséance. Ils n’y peuvent rien, c’est comme ça. Les Bagobiris se laissent toujours guider par leur cupidité. » « Et les Djermas, alors, n’est-ce pas pareil quand ils se retrouvent devant un plat de dibiganda bien assaisonné de tigadigué? Et que dire des Songhaïs devant une tasse de doungandi ? » rétorque le monsieur. Le ton est vif, mi-figue mi-raisin. Les deux protagonistes semblent prêts à en découdre. Quand l’atmosphère se détend, aussi soudainement. Et les rires fusent. L’homme et la femme se sont reconnus à leurs scarifications et n’ont pu résister à cette petite joute. C’est le « cousinage à plaisanterie » : un affrontement verbal au cours duquel on peut s’insulter entre membres de certaines ethnies, mais qui constitue en réalité un moyen de décrispation sociale. Au Niger, ces altercations verbales sont ainsi autorisées entre Peuls, Maouris et/ou Béris-Béris, entre Djermas, Songhaïs, Bagobiris et Touaregs, entre Gourmantchés et Touaregs… Elles atteignent leur paroxysme lors des grands rassemblements, comme les baptêmes, les mariages, les obsèques, où elles peuvent choquer un public non averti tant les piques sont acérées. Personne ne perd son sang-froid pour autant. C’est codifié. n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
Certains universitaires soulignent d’ailleurs l’absence de conflits interethniques majeurs dans les pays où règne cette pratique aux origines ancestrales. D’un point de vue sociologique, c’est un moyen de résoudre les tensions sociales, une sorte de potion antixénophobie. Ainsi, au plus fort de la rébellion touarègue, l’un des conflits ethno-politiques les plus importants qu’ait jamais connus le Niger, les Touaregs ne se sont jamais attaqués aux Songhaïs ni aux Djermas.
Chaque ethnie du Sahel est reliée à une autre (au moins) par ce lien de parenté à plaisanterie qui favorise la persistance de traditions séculaires de convivialité, de confiance, c’est un moyen de résoudre de tolérance et d’entraide les tensions sociales, une sorte mutuelles. Par exemple, en raison de leur cousinage à de potion antixénophobie. plaisanterie, les Peuls, les Le faire aurait signifié rompre un pacte Béris-Béris et les Maouris sont autorisés à millénaire, ce qui est potentiellement prendre leurs aises les uns chez les autres générateur de malheurs. et peuvent même s’approprier les biens des uns ou des autres sans que nul n’y coNcours. Nigérien d’origine française, trouve à redire. l’ethnologue Jean-Pierre Olivier de Sardan se veut plus mesuré. Si le cousinage à plaisanterie « décontracte » effectivement les relations, il ne témoigne pas forcément d’une ouverture « extraordinaire » à l’autre. Les relations sociales ne sont pas entièrement pacifiées au Niger, et, même si elles ne sont pas toujours perceptibles, la xénophobie tout comme les tensions interethniques existent. Pour lui, « le clientélisme du terroir » fait que l’on a tendance à favoriser les siens, ce qui crée des crispations. Il évoque aussi un racisme social persistant dans le nord et l’ouest du pays, notamment vis-à-vis des descendants de captifs. Les populations, elles, ne semblent pas s’arrêter à ces considérations. Depuis la fin des années 1990, le ministère nigérien de la Culture organise la « semaine de la parenté à plaisanterie », assortie d’un concours annuel. Et, il y a quelques années, une émission de radio consacrée à la parenté à plaisanterie a fait un carton d’audience dans le pays. La durée de l’émission était rapidement passée d’une heure à une heure trente, sans pause musicale. ● clarisse JuoMPaN-YaKaM jeune afrique
VILLE DE NIAMEY
COMMUNIQUÉ
NIGER
MOT DU MAIRE, PRÉSIDENT DU CONSEIL DE VILLE DE NIAMEY
«
À ma prise de fonction à la tête de la ville de Niamey, il y a bientôt trois ans, j’inscrivais en lettre d’or, trois
grandes priorités qui à mon sens rencontreront l’agrément de l’ensemble de la population de la ville de Niamey. Il s’agissait de : • La salubrité et l’hygiène urbaine • La mobilité urbaine • La sécurité à travers l’éclairage public
Trois grandes priorités dont nous nous évertuons à concrétiser sur le terrain de concert avec le programme Niamey Nyala, une idée noble insufflée par le président de la République, chef
»
de l’État, SEM Mahamadou ISSOUFOU, qui rêve d’une capitale où il fera bon vivre.
ASSANE SEYDOU SANDA, Maire, Président du Conseil de ville de Niamey
DIFCOM/FC - Photos : DR
VILLE DE NIAMEY
Le Plus de J.A. Niger
musique
tal National, succès mondial Des concerts outre-Atlantique, un label britannique… L’orchestre formé en 2000 a su séduire les oreilles anglo-saxonnes avec son savoureux mélange de culture nigérienne et de rock ouest-africain.
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ifficile de trouver de meilleurs ambassadeurs de la culture nigérienne que les musiciens du Tal National. Véritable « Niger en miniature », le groupe compte généralement six musiciens sur scène, mais est composé de dix-sept membres parmi lesquels des Haoussas, des Zarmas, des Peuls, des Gourmantchés, des Kanouris, des Fulanis, des Toubous, des Arabes et des Touaregs. Il a su créer une harmonie envoûtante, où chaque ethnie mêle sa sensibilité, son répertoire et ses sons à ceux du rock. Adulé de Niamey à Zinder, le Tal National a aussi conquis les oreilles anglosaxonnes. Cette année, il a enchaîné une tournée de six semaines aux États-Unis au printemps puis une série de concerts au Royaume-Uni en juillet avant de repartir outre-Atlantique pour 19 représentations qui, de mi-août à fin septembre, l’ont emmené à New York, Chicago, Portland, Pittsburgh et Washington. Même s’il y a fort à parier que peu de Yankees sauront situer le désert du Ténéré sur une carte, ils sont désormais nombreux à avoir goûté au savoureux mélange de culture nigérienne et d’héritage rock ouest-africain servi par le Tal National. RONDEURS. Formé en 2000 sur le modèle
des orchestres nationaux du Mali ou de Guinée, le groupe a joué aux quatre coins du pays avant de remporter un franc succès dès la sortie de son premier album, Apokte, en 2006, qui lui attire cependant les foudres de quelques religieux irrités par les paroles de certains titres magnifiant les rondeurs de la femme nigérienne. Qu’importe. Le Tal National continue de chanter les femmes de Niamey, les voleurs de sac de la gare routière ou les camions qui relient Zinder à Agadez en bravant les coupeurs de route, et ses deux albums suivants, A-Na Waya (2008) et Kaani (2011), le consacrent comme l’un des groupes phares du pays et lui ouvrent déjà quelques scènes européennes. L’orchestre surfe alors sur la montée en puissance de la téléphonie mobile et des réseaux sociaux pour se faire connaître n O 2857 • du 11 au 17 OctObre 2015
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p Dans le métro new-yorkais. Cette année, le groupe a effectué deux tournées aux États-Unis et une autre au Royaume-Uni.
du troisième opus dans la capitale nigédavantage. Il se produit jusqu’à cinq rienne, puis repart les mixer à Chicago. La fois par semaine au Tafadek, un établisnouvelle version de Kaani paraît en 2013, sement de Niamey pouvant accueillir diffusée cette fois-ci à l’international par jusqu’à 1 000 personnes, et, pour tenir le label indépendant britannique FatCat. les quatre ou cinq heures de concert, il Il est classé dans le top 10 de l’année 2013 a même établi un roulement de chandes meilleurs albums par le teurs, de guitaristes, de basNew York Times et encensé sistes et de percussionnistes par le quotidien britannique remplaçants. Une formation The Guardian. « doublée » qui permet aussi au Tal National d’assurer un concert et d’animer en même hypNOtiqUE. Depuis, le temps une soirée privée. Car « big band » nigérien peauHamadalIssoufouMoumime, fine ses atouts : une qualité Discographie alias Almeida, guitariste et de production internationale leader du groupe, met un pour une musique puissamApokte (2006) A-Na Waya (2008) point d’honneur à ne pas ment locale, hypnotique, parKaani (2013) refuser de demandes. Ancien fois à la limite de la transe. Zoy Zoy (2015) footballeur et, depuis vingt Toujours enregistré à Niamey ans, juge et greffier en chef au et produit à Chicago par Jamie tribunal de grande instance de Niamey, il Carter, le quatrième album du groupe, déborde d’énergie et d’exigence, comme Zoy Zoy, est sorti en avril 2015, toujours sa musique. chez FatCat. Le Tal National fait mouche C’est Almeida qui, lors d’un festival à une fois encore avec un cocktail sans Chicago, rencontre l’ingénieur du son frontières de chants, de guitare, de basse, américain Jamie Carter et le convainc de de batterie et de percussions qui fait le venir à Niamey. En 2011, studio mobile succès de « sa » musique du monde. ● sous le bras, ce dernier capture les titres MathiEU OLiViER jeune afrique