Ja 2865 du 6 au 121215 plus senegal

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Daesh Main basse sur l’Afrique

jeuneafrique.com

Hebdomadaire international indépendant • 56e année • no 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

Burkina Kaboré : secrets de victoire Avocats Cabinets d’affaires : le top 20

L’exception sénégalaise Spécial 20 pages

édition SÉNÉGAL France 3,80 € • Algérie 220 DA • Allemagne 4,80 € • Autriche 4,80 € • Belgique 3,80 € • Canada 6,50 $ CAN • Espagne 4,30 € • Éthiopie 67 birrs • Grèce 4,80 € Guadeloupe 4,60 € • Guyane 5,80 € • Italie 4,30 € • Maroc 25 DH • Martinique 4,60 € • Mauritanie 1200 MRO • Mayotte 4,30 € • Norvège 48 NK • Pays-Bas 4,80 € Portugal cont. 4,30 € • Réunion 4,60 € • RD Congo 6,10 $ US • Royaume-Uni 3,60 £ • Suisse 6,50 FS • Tunisie 3,50 DT • USA 6,90 $ US • Zone CFA 1900 F CFA • ISSN 1950-1285


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Le pLuS

de Jeune Afrique

PANORAMA Casse-tête référendaire

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ÉMERGENCE Où en sont les chantiers prioritaires? TRIBUNE Identité contemporaine, par Felwine Sarr, écrivain SPORT Génération Foot, une fabrique de pros

À contre-courant Alors que nombre de chefs d’État s’escriment à se maintenir au pouvoir, son président propose d’écourter son mandat. Le Sénégal est décidément un pays à part.

jeune afrique

n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

Per-Anders Pettersson / Cosmos

SÉNÉGAL



Le pLuS

Le Plus de Jeune Afrique

de Jeune Afrique

PANORAMA Casse-tête référendaire ÉMERGENCE Où en sont les chantiers prioritaires? TRIBUNE Identité contemporaine, par Felwine Sarr, écrivain SPORT Génération Foot, une fabrique de pros

Prélude Mehdi Ba

SÉNÉGAL

L’exception sénégalaise

S

il n’est pas à l’abri des maladies infectieuses et autres épidémies qui frappent le continent, du paludisme à Ebola, le Sénégal semble préservé des maux politiques endémiques qui, aux yeux du monde, semblent confiner l’Afrique au rang de continent maudit. Les putschs ? Il n’en a connu aucun en cinquante-cinq ans d’indépendance. Les présidents inamovibles ? Depuis la fin du règne bidécennal d’Abdou Diouf, en 2000, le pays a connu deux alternances. Les tripatouillages constitutionnels douteux? Il aura suffi que les Dakarois descendent dans la rue, en juin 2011, pour qu’Abdoulaye Wade renonce à une révision controversée; et son successeur, Macky Sall, a spontanément promis de réduire son mandat de sept à cinq ans. Les attentats terroristes ? Jamais un jihadiste n’a ensanglanté le pays, musulman à 90 %. Les tensions interreligieuses ou intercommunautaires? Tidjanes, Niassènes etMourides,chrétiensetmusulmans,Diolas, Halpulaaren et Wolofs, tels les musiciens d’un orchestre philharmonique, jouent, sans fausses notes, une même partition… Il faudrait chercher longtemps – et en vain –, à l’échelle de l’Afrique de l’Ouest élargie, un pays susceptible de s’enorgueillir d’un tel bilan. De la Mauritanie à la Côte d’Ivoire, du Niger à la Sierra Leone, de la Guinée-Bissau au Togo, hoquets démocratiques et déchirements fratricides sont légion. Pas au Sénégal, pays miraculé et, à ce titre, couvé par ses mentors occidentaux, de François Hollande à Barack Obama.

Préservé de la guerre, des attentats, de l’instabilité politique, le pays s’est-il pour autant montré à la hauteur de ces atouts fièrement cultivés ? Récemment, son classement par le FMI parmi les 25 pays les plus pauvres du monde a provoqué l’irritation des autorités, tout en faisant le miel de l’opposition. Malgré les nombreux satisfecit que lui délivrent ses partenaires techniques et financiers, le Sénégal, arrimé à des indicateurs peu flatteurs en matière de développement jeune afrique

humain, tarde à gagner le large. Les détracteurs du régime veulent y voir l’échec de Macky Sall à hisser son pays vers les cimes que prétend atteindre son plan Sénégal émergent (PSE). Mais, au-delà des polémiques politiciennes, de bonne guerre et réversibles, les racines du mal sont connues de tous, de Matam à Ziguinchor. Au Sénégal, la fierté nationale n’exclut pas l’introspection. En privé, autour d’un thieboudiène ou d’un bissap, les dysfonctionnements structurels se dévoilent. Tendance à l’autosatisfaction (le pays de Senghor n’a-t-il pas grandi dans la conviction de constituer une élite sous-régionale?). Appétence excessive pour l’assistanat (interpersonnel ou international). Délaissement coupable du bien commun. Tolérance contre-productive envers la corruption quotidienne, le népotisme ou les passe-droits (parfois jusqu’au drame, comme l’a montré, en 2002, le naufrage du Joola). Mépris affiché pour l’environnement, dans un pays qui dissémine aux quatre vents les sacs en plastique, ignore l’invention des poubelles publiques et axe son indépendance énergétique sur les centrales à charbon. Fascination pour les signes extérieurs de richesse et les fortunes sorties du néant, etc. Lorsqu’une étudiante trouve banal de monnayer son corps pour acquérir un iPhone 6 ou que des serviteurs de l’État se montrent prêts à vendre leur âme pour obtenir qui un 4×4 dernier modèle, qui une villa de standing, la méritocratie reste en rade. Les Sénégalais le savent, le déplorent et souhaiteraient tourner la page. Cette réforme en profondeur des mentalités, qui transcende les clivages partisans, est le prix à payer pour transformer l’essai que le Sénégal n’a que trop attendu. Or ce « tri sélectif », comme l’évoque dans ces pages l’écrivain Felwine Sarr, « ne saurait être imposé de l’extérieur ». « Ñuni neen la », dit une expression wolof difficilement transposable en français, mais que l’on pourrait traduire par: « Jetons bas les masques, on ne se connaît que trop bien. » ● n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

À contre-courant PANORAMA Casse-tête référendaire p. 58 ÉMeRgeNCe Où en sont les chantiers prioritaires ? p. 62 MAjORitÉ

Sall vs Sall, bras de fer entre alliés p. 68 iNteRview Mamadou Diop Decroix, secrétaire général d’AJ/PADS (opposition) p. 70 tRibuNe Felwine Sarr, écrivain p. 73 ÉCONOMie terre de contrastes

p. 76

NStS signe le retour de l’industrie textile locale p. 78 DÉvelOPPeMeNt la diaspora met la main à la pâte, à bakel p. 80 StyliSMe Des créatrices dans l’air du temps

p. 82

SPORt génération Foot, une fabrique de pros p. 86

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Le Plus de Jeune afrique

SénégaL

Le président

qui voulait réduire la durée de son mandat Macky Sall l’a assuré : en mai, il soumettra à référendum son projet de passer du septennat au quinquennat. Une promesse qui fait pourtant grincer des dents, surtout dans les rangs de la majorité.


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MEhDI BA,

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© Bruno LEVY pour J.A.

t Le chef de l’État, au palais présidentiel, à Dakar.

w

à Dakar

consultatif et ne saurait s’imposer au chef de l’État, qui a repris solennellement cette promesse électorale lors de sa première adresse à la nation. » Une lecture que semblait confirmer, en septembre, le conseiller juridique de Macky Sall, Ismaïla Madior Fall. « Il est difficile de trouver un rattachement juridique à cet engagement, expliquait alors le constitutionnaliste. Mais il s’agit d’une promesse qui a une base politique, symbolique, métajuridique. » Pour l’heure, le Conseil constitutionnel n’a pas été saisi de la question.

andis que le syndicat des chefs d’État africains désireux de se maintenir au pouvoir au-delà du terme prévu rivalise d’ardeur pour réformer les dispositions constitutionnelles susceptibles de les en empêcher, le président sénégalais, lui, rame à contre-courant en décidant d’écourter de deux ans son mandat. Mais, face à une réforme encore largement virtuelle, certains observateurs finissent par s’interroger CALENDRIER. Autre critique récurrente : le choix sur la sincérité de son engagement. de la voie référendaire. « Le peuple s’est déjà C’est en février 2012, à la veille du second tour prononcé sur cette promesse électorale en élide la présidentielle, que le candidat Macky Sall sant Macky Sall à 65 % », considère un député de s’est engagé à réduire la durée du mandat prél’opposition. Tout comme Ismaïla Madior Fall, sidentiel de sept à cinq ans et d’appliquer cette qui convient que « le référendum n’est pas une mesure à son premier mandat s’il était élu. Une obligation », le parlementaire rappelle qu’en 2008 promesse, maintes fois réitérée depuis, qui lui a valu de vibrants hommages de la part de l’Union Abdoulaye Wade avait procédé à un allongement européenne, de la Maison Blanche, de l’Élysée… de la durée du mandat en passant par la voie Pourtant, au Sénégal, la gestion de ce dossier parlementaire (qui nécessite l’approbation des par le chef de l’État est loin de provoquer l’enthoutrois cinquièmes des députés). siasme. Dans les rangs du parti présidentiel, pluLa troisième incertitude est relative aux contours sieurs cadres importants ont ainsi fait connaître du référendum, dont le passage du septennat au leur opposition de principe à une telle réforme, à quinquennat ne devrait être qu’une disposition l’instar du député Moustapha Cissé parmi d’autres. Pourquoi mêler Lô ou de l’ancien porte-parole du une question simple, qui fait l’objet Le Conseil gouvernement, Oumar Youm. Quant d’un large consensus, à un package constitutionnel de réformes institutionnelles susà l’opposition, elle s’offusque des modalités et du calendrier de sa ceptibles d’entraîner des clivages n’a pas encore mise en œuvre. La réduction du plus marqués? « Nous ne disposons été saisi de mandat présidentiel devrait en effet d’aucune information sur le contenu la question. être noyée dans un référendum pordes mesures qui seront soumises tant sur un « paquet » de réformes à référendum », s’étonne Thierno institutionnelles. Et celui-ci ne sera soumis aux Bocoum, qui juge cette opacité « antirépublicaine ». Sénégalais qu’en mai 2016, plus de quatre ans Ultime motif d’insatisfaction: le calendrier tardif adopté par le chef de l’État, certains estimant que après le sacre de « Macky ». cette question aurait pu se régler dès 2012 par un REVIREMENT. À cinq mois de l’échéance, plusieurs vote du Parlement à la majorité qualifiée et que incertitudes planent encore sur cette réforme tant Macky Sall a repoussé l’échéance à dessein. Un attendue. La première tient à la position qu’adopconseiller présidentiel fait valoir que la priorité tera le Conseil constitutionnel, que le chef de était de faire avancer les chantiers du plan Sénégal l’État est tenu de consulter avant de soumettre son émergent (PSE) et non d’engager une campagne projet au vote des Sénégalais. Or, selon certains référendaire prématurée. juristes, l’orthodoxie pourrait inciter les cinq sages Cette absence de lisibilité pose un problème au à désavouer l’initiative de Macky Sall : ce dernier sein de la classe politique. Au Parti socialiste, par a prêté serment sur la Constitution, laquelle fixe exemple (membre de la coalition gouvernementale), on fait savoir que la question d’une candidala durée du mandat présidentiel à sept ans ; la coutume voudrait donc que la réforme modifie ture autonome à la prochaine présidentielle sera la durée du mandat à venir et non celle de celui posée après le référendum. Ce qui signifie qu’en qui est en cours. Les plus sceptiques, à l’instar du cas d’élection en février 2017 le parti d’Ousmane politologue Babacar Justin Ndiaye, avancent même Tanor Dieng et de Khalifa Sall (lire p. 68) dispoque « Macky Sall utilisera le Conseil pour maquiller serait, au mieux, de neuf mois pour trancher la un revirement qui lui serait trop préjudiciable si question, organiser éventuellement une primaire lui-même revenait ouvertement sur sa promesse ». et faire campagne. Autant de préoccupations qui Une hypothèse que rejette Thierno Bocoum, laissent de marbre l’entourage de Macky Sall. député de Rewmi (opposition) : « Une loi peut, « La date du référendum est secondaire, élude par exception, être expressément rétroactive. En un ministre. L’important, c’est qu’il revienne au outre, rappelle-t-il, l’avis du Conseil est purement peuple de décider. » ● n o 2865 • du 6 Au 12 décEmBrE 2015


ENTRETIEN M. Doudou KA Administrateur général du FONGIP Conseiller du Président de la République Ingénieur des Ponts et Chaussées

Dans quel contexte a été créé le Fongip ? M. Doudou KA : Les PME/PMI constituant 90 % du tissu économique au Sénégal, ne reçoivent que 10 % des crédits bancaires générant une demande insatisfaite estimée annuellement à 500 milliards de FCFA. Par un effort conséquent, le Président de la République du Sénégal, Macky Sall a fini d’installer un dispositif de guichet articulé de souveraineté économique pour enrichir un système financier destiné à jouer pleinement un rôle de premier plan dans la mise en œuvre du Plan Sénégal Emergent (PSE), en particulier dans l’opérationnalisation de l’un des ses axes relatif à la création de richesse et à la transformation structurelle de l’économie.

PUBLI-INFORMATION

Quelles sont les implications sur sa gestion du modèle économique du Fongip ? M. D. K. : Créé par décret en 2013, le Fongip, qui est institutionnellement une agence nationale, a démarré ses activités après son premier conseil d’administration tenu en mars 2014. Il est dirigé par un administrateur général et possède comme organes de gouvernance statutaires : un

conseil d’administration dont les membres au nombre de onze proviennent du secteur public, du secteur privé et de la société civile, un comité de garantie et de bonification (CGB) dirigé par un représentant du ministre des Finances. Le Fongip qui reçoit l’ensemble de ses ressources du Budget de l’État, s’est doté d’outils stratégiques et de gestion validés et adoptés qui lui permettent à côté de ressources humaines expertes de développer d’une façon normée et qualitative ses activités. Les outils pour l’essentiel sont : un organigramme, un règlement intérieur, un système d’information, un plan de développement stratégique sur un horizon de cinq ans, un manuel des procédures administratives, comptables et financières, une certification régulière des comptes par un cabinet agréé, indépendant et extérieur. Le modèle économique du Fongip est de second rang permettant au Fongip d’asseoir un véritable management des risques avec la mise en œuvre d’une plateforme chargée d’instruire les requêtes de garantie et de refinancement provenant des partenaires bancaires et de la microfinance. Le modèle pour être opérant, a conduit le Fongip à nouer des relations opérationnelles

techniques et financières basées sur des fonctionnalités recherchées avec toutes les catégories d’acteurs présents dans son écosystème. C’est ainsi que la cartographie relationnelle et fonctionnelle du Fongip se décline comme suit : • Garantie : les conventions sont passées avec la quasi-totalité des banques de la place ; • Refinancement : les institutions de microfinance de premier plan

ont signé des conventions avec le FONGIP ; • Accompagnement : le Fongip a, non seulement scellé des partenariats avec les agences nationales, institutions d’appui sectoriel, les interprofessions, les chambres de commerce, chambres de métiers, associations patronales mais également, a contractualisé avec les cabinets privés pour en faire des Opérateurs Techniques Réseaux (OTR) en appui des quatre

Immeuble Atryum Center - 1 er étage - km 8 - Route de Ouakam - BP 64848 Tél.: (+221) 33 859 19 19 - Dakar, Sénégal


Communautaire (PUDC) actuellement en phase d’exécution et pour lequel le PNUD a délégué au Fongip, l’exécution sur une période de deux ans de la composante « Entrepreneuriat rural » d’un montant de six milliards de FCFA dont deux milliards apportés par le fongip.

En près de deux ans d’existence, les résultats sont-ils satisfaisants ? M. D. K. : Le Fongip a disposé à ce jour de 14 milliards FCFA de fonds propres, ayant permis, en un an et demi d’activités, à 400GIEdefemmesetdejeunessur 28 départements d’accéder aux financements des Institutions de Microfinance, grâce à notre refinancement pour 2, 5 milliards de FCFA. Pour l’accompagnement, plus de 12 000 personnes ont été accueillies, 5500 dossiers reçus sur lesquels près de 1600 dossiers ont été structurés par nos ingénieurs financiers et transmis aux banques partenaires pour un volume de financement requis de 23 milliards FCFA. Près de 100 PME/PMI sur 18 départements, ont déjà acquis des financements bancaires pour près de 10 milliards FCFA

grâce à notre garantie et notre accompagnement. Les actions du FONGIP ont permis de générer plus de 15 000 emplois, grâce aux GIE de femmes et jeunes et aux PME/PMI, sans compter les 90 000 acteurs dont l’activité est confortée dans la filière oignon et le secteur agricole.

Quelles sont vos perspectives de développement ? M. D. K. : L’État et en particulier, notre ministère de tutelle, celui en charge des finances, font des efforts importants. Ainsi, dans le Programme triennal d’investissement prioritaire (Ptip) avant 2018, il est prévu 15 milliards FCFA supplémentaires. Nous pourrions donc atteindre 30 milliards FCFA de fonds propres et l’objectif stratégique de 50 milliards FCFA de fonds propres minimum peut être atteint. Or, nous avons finalisé notre Plan stratégique 2016-2020 et parmi nos objectifs, figure la transformation institutionnelle en SA pour notamment bénéficié de l’agrément de la BCEAO et augmenter notre effet de levier. ■

▼ Signature de la convention du premier dispositif articulé entre la BNDE pour le financement, le Fongip pour la Garantie et le Fonsis pour investir en cas de besoin de la structure dans le cadre du Fonds de Garantie pour les PMI.

• Sous fonds dédiés : dans l’optique d’une optimisation des interventions, le Fongip et ses partenaires en particulier les départements ministériels ont mis en place des sous fonds dédiés permettant de mutualiser les ressources et de renforcer les impacts. C’est ainsi qu’ont vu le jour une demi-douzaine de sous-fonds dont le FOGART destiné à l’artisa-

nat, le FOGALOG pour l’accès au logement ou le FONBONI pour le refinancement des institutions de microfinance, le FOGAREJ pour les jeunes, le FOGARIN pour l’industrie. • Programmes : dans le cadre de la mise en œuvre de programmes nationaux, le Fongip est invité à contribuer pour la prise en charge de certaines composantes. C’est en effet, le cas du Programme d’ Urgence de Développement

www.fongip.sn

DIFCOM/DF - PHOTOS : DR

antennes réseaux disséminées à travers le territoire national ;


Le Plus de J.A. Sénégal stratégie

Huit chantiers pour construire l’avenir De la santé au tourisme en passant par l’éducation, le plan Sénégal émergent engagé par Macky Sall couvre des domaines très divers et voit loin. Où en est-on ?

C

ouverture maladie universelle, réforme des secteurs de l’énergie et de l’université, restructuration de Sénégal Airlines pour accompagner l’achèvement de l’aéroport international Blaise-Diagne… Macky Sall réforme tous azimuts. De la réalisation de ces chantiers dépendra, pour une grande part, sa réélection à la tête du pays. Il doit en effet faire au moins aussi bien que son prédécesseur, Abdoulaye Wade, resté aujourd’hui encore dans

1. Rendre la santé accessible à tous LA mesure sociale du PSE. Macky Sall ne peut donc en faire l’économie. Dotée d’un budget de 17 milliards de F CFA (25,9 millions d’euros) en 2015, la couverture maladie universelle (CMU) a pour ambition de procurer, d’ici à 2017, une protection sociale à 75 % de la population, contre trois fois moins aujourd’hui. À un an de l’échéance, ce taux n’a pourtant progressé que de 12 points, à 32 %. L’agence chargée de la CMU, qui recevra un budget de 50 milliards de F CFA en 2016, devra donc mettre les bouchées doubles pour espérer atteindre l’objectif assigné. Son plan stratégique s’appuie sur un certain nombre de leviers, comme le programme

l’imaginaire de ses compatriotes comme « l’homme des chantiers ». C’est d’ailleurs le critère de comparaison retenu lorsque les Sénégalais veulent dresser un parallèle entre les deux personnalités. D’un point de vue plus économique, ces huit chantiers articulés dans le plan Sénégal émergent (PSE) devraient, en cas de réussite, contribuer à transformer la structure de l’économie du pays, tout en produisant une croissance plus forte, durable et inclusive.

de réforme des institutions de prévoyance maladie, le renforcement des politiques de gratuité existantes, la gratuité des soins pour les enfants de moins de 5 ans et, surtout, le développement de la CMU de base, via les mutuelles de santé. À court terme, il s’agira de doter toutes les communes du pays d’une mutuelle de santé fonctionnelle.

pierres. La crise de l’université sénégalaise, paupérisée par les politiques d’ajustement structurel menées durant les années 1990, est ancienne. Étudiants en sureffectif, vétusté des infrastructures, retards dans le paiement des bourses, augmentation des droits d’inscription, inadaptation des filières universitaires au marché de l’emploi, grèves et années « blanches »… sont autant de maux qui conduisent les familles qui en ont les moyens à orienter leur progéniture vers les instituts privés. En mars, un accord entre le Syndicat autonome de l’enseignement supérieur (Saes) et le gouvernement avait notamment prévu le rééquilibrage du budget des universités, l’acquittement de leurs dettes et le respect du paiement des salaires de leurs personnels. Mais,

2. Réhabiliter l’université Venu annoncer aux étudiants de l’université Cheikh-Anta-Diop (Ucad), le 31 juillet, son ambition « que la mère des universités francophones rejoigne, à l’horizon 2025, le top 100 des meilleures universités mondiales », Macky Sall a dû rebrousser chemin sous les jets de

© Sylvain CheRkaoui pouR J.a.

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u À l’heure des résultats, dans le hall de la faculté des sciences politiques et juridiques de l’Ucad.

p Consultation au centre de PMI de la médina. n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

jeune afrique


henRi TABARAnT / onlyWoRlD.neT

p En Casamance, première région rizicole du pays.

neuf mois plus tard, le Saes considère toujours que « le gouvernement n’a pas tenu ses promesses ».

Programme national d’autosuffisance en riz (Pnar). Ce plan prévoit la mise en place d’une politique soutenue d’aménagement des périmètres rizicoles, d’appuis aux riziculteurs en intrants (fertilisants, semences, etc.) et en matériel agricole, d’effacement de dettes… Des avancées notables ont déjà été enregistrées en matière de production: l’année 2015 a connu une campagne record avec 917 371 tonnes de riz paddy, soit une hausse de 64 % par rapport à 2014. Si certains spécialistes doutent du caractère réaliste de l’objectif, les acteurs de la filière sont plus optimistes. Sous certaines conditions, à commencer par une meilleure protection tarifaire, pour limiter les importations, et l’amélioration des circuits de stockage, de distribution et de commercialisation.

3. Atteindre l’autosuffisance en riz Le Sénégal peut bien figurer parmi les premiers importateurs de riz brisé du continent, avec près de 900 000 tonnes chaque année, l’offre ne répond pas à la demande. La consommation nationale annuelle dépasse le million de tonnes, que l’apport de la production locale comble à peine avec 130 000 tonnes récoltées annuellement. Pour donner un peu de marge à son pays et éloigner le spectre d’une crise alimentaire, Macky Sall a, dès son arrivée aux affaires, lancé le

© SylvAin CheRkAoui pouR J.A.

4. Résoudre la crise de l’énergie

Jeune AfRique

C’est l’un des autres grands axes porteurs de la stratégie du gouvernement pour assurer le développement du pays. Sous-capacité structurelle de la production, sous-investissement dans la Société nationale d’électricité (Senelec), le tout sur fond de demande exponentielle d’énergie, expliquent en large partie les difficultés que rencontrent les consommateurs et le secteur privé à se fournir en électricité. Selon la Banque mondiale, entre 2006 et 2011, au plus fort des difficultés de l’opérateur public, les délestages faisaient perdre jusqu’à 2 points de croissance annuelle au Sénégal. Même s’il reste beaucoup à faire, le secteur sort progressivement du noir grâce à un ambitieux programme d’investissements de plusieurs centaines de milliards de F CFA, sous forme de ● ● ●


© SylvAin CherkAoui pour J.A.

Le Plus de J.A. Sénégal

p L’AIBD, situé à 40 km de la capitale, entrera en service en juillet 2016 (ici en septembre).

partenariat avec le secteur privé. Les centrales à charbon de Kayar (350 MW) et de Sendou (125 MW), ainsi que celle – bithermique – de Tobène (fioul lourd et gaz, 70 MW) en sont les exemples les plus représentatifs.

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5. Achever l’aéroport Blaise-Diagne Régulièrement repoussée depuis 2012, l’entrée en service de l’aéroport international Blaise-Diagne, situé à 40 km de Dakar,

est désormais annoncée pour le second semestre de 2016. « L’État veut nous faire croire qu’il a la situation en main », ironise un expert du secteur aérien, faisant allusion aux deux contentieux venus compliquer la donne depuis le mois d’août. L’opérateur allemand Fraport, dont la filiale sénégalaise détient 51 % des droits d’exploitation commerciale et de gestion du futur aéroport, a fait connaître son intention de jeter l’éponge. Un choix qui serait dû à la décision de Macky Sall de réduire les redevances aéroportuaires

« sûreté » et « passager », laissant craindre à l’opérateur une rentabilité moindre. Un deuxième bras de fer opposait le Sénégal au Saudi Binladin Group, chargé des travaux, pour un avenant controversé. Le groupe saoudien réclamait 63 milliards de F CFA à l’État, lequel a menacé de porter le litige devant le tribunal arbitral de Paris. Mais un compromis aurait été trouvé en novembre pour permettre – enfin – l’achèvement des travaux en juillet 2016.

6. Désengorger Dakar

© youri lenquette pour J.A.

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p Des ouvriers de la Société nationale d’électricité, à Dakar. n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

Pour permettre à la capitale de respirer, 700 milliards de F CFA ont été investis. À elle seule, la presqu’île du Cap-Vert concentre en effet 3,2 millions d’habitants et plus de 50 % des unités industrielles du pays. Composante essentielle du plan Sénégal émergent (PSE), le nouveau pôle urbain de Diamniadio, construit à une trentaine de kilomètres de Dakar, s’étendra sur une superficie de plus de 1 500 ha. La panoplie d’équipements publics à venir est impressionnante : centre administratif et cité des affaires, université, hôpitaux, zone industrielle, infrastructures culturelles… Dix-sept mille habitations, sur les 40 000 prévues et financées par partenariat publicprivé, doivent être livrées au cours des trois prochaines années. Située à dix minutes de l’aéroport international ● ● ● jeune afrique



Le Plus de J.A. Sénégal

© SylvAin CheRkAoui pouR J.A

u La ville nouvelle de Diamniadio, en pleine construction.

● ● ● Blaise-Diagne (AIBD), cette excroissance de la capitale sera reliée par l’autoroute à péage et par le futur train express régional (TER), dont l’adjudicataire des travaux devrait être connu sous peu.

7. Relancer Sénégal Airlines C’est l’un des fardeaux du mandat de Macky Sall. Créée un peu rapidement par son prédécesseur sur les cendres d’Air Sénégal International, la compagnie aérienne (détenue à 36 % par l’État) n’est jamais parvenue à prendre son envol. Avec un chiffre d’affaires en chute libre (152 000 euros) et une dette abyssale (91,5 millions d’euros), elle est aujourd’hui quasi moribonde. « Nous n’exploitons plus qu’un seul avion de 25 places, en leasing, qui dessert à la fois Ziguinchor, Bissau et Praia », déplore un responsable du collège des délégués. Depuis près d’un an, les employés courent derrière leurs arriérés de salaires et une partie des effectifs a dû être placée en chômage technique prolongé. « Les autorités tergiversent, constate la même source. Nous attendons que l’État prenne une décision, quelle qu’elle soit. » Maintes fois envisagée, la perspective d’un partenariat stratégique entre le transporteur sénégalais et une compagnie susceptible de l’aider à se relancer apparaît plus éloignée que jamais. n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

8. Attirer les touristes Le président de la République aspire à en faire l’un des piliers du plan Sénégal émergent (PSE). Mais l’objectif ambitieux de 2 millions de touristes en 2018 semble, pour l’heure, hors d’atteinte. Sérieusement affecté par l’effet Ebola pendant la saison 2014-2015, ce secteur, ô combien stratégique car principal pourvoyeur de devises du pays, a subi une baisse de fréquentation de 30 % à 40 % venue accentuer un lent déclin entamé au cours des années 2000. S’il a bénéficié récemment de la

suppression du visad’entrée et de la réduction de certaines taxes aéroportuaires, le tourisme sénégalais souffre, de l’avis des professionnels, de deux handicaps majeurs : un manque de compétitivité face aux destinations concurrentes et, surtout, l’absence d’une politique de promotion digne de ce nom. En novembre, la ministre du Tourisme et des Transports aériens, Maïmouna Ndoye Seck, déplorait la faiblesse des moyens alloués à son ministère – qui a vu se succéder quatre ministres en trois ans. ● Mehdi Ba et aMadou oury diallo, à Dakar

© SylvAin CheRkAoui pouR J.A.

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p Touristes et pélicans au Parc national des oiseaux, au nord de Saint-Louis. jeune afrique



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Le Plus de J.A. Sénégal Majorité

Sall contre Sall Les passes d’armes se multiplient entre la présidence et le maire de Dakar. Beaucoup y voient les prémices de la joute qui pourrait les opposer au cours de la prochaine présidentielle.

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fficiellement, leurs partis, l’Alliance pour la République (APR) et le Parti socialiste (PS), sont alliés. Mais en coulisses, entre le chef de l’État, Macky Sall, et le maire de Dakar, Khalifa Sall, l’ambiance est de plus en plus fraîche. En octobre, le ministre de la Gouvernance locale, Abdoulaye Diouf Sarr, retirait à l’Entente Cadak-Car (organisme intercommunalrassemblantlescommunautés d’agglomération de Dakar et de Rufisque) la gestion des déchets solides urbains dans la région de Dakar pour la confier à une structure placée sous la tutelle du gouvernement. Selon le ministre, la capitale se trouvait « plongée depuis plusieurs semaines dans une situation d’insalubrité indescriptible ». Invoquant divers « dysfonctionnements dans le dispositif de collecte des déchets », ainsi que des « conflits répétés » entre les «concessionnaires»chargésduramassage et l’Entente Cadak-Car, l’État a donc retiré à cette dernière le marché pour lequel il lui versait annuellement 10 milliards de F CFA (plus de 15,24 millions d’euros). La mairie de Dakar a porté le litige devant la Cour suprême. « Nous perdons là une prérogative naturelle pour une collectivité locale, laquelle nous était dévolue par la loi », déplore un proche du maire. GUERRE FROIDE. Depuis plusieurs

mois, l’entourage de Khalifa Sall en est convaincu : la mouvance présidentielle s’active pour lui tirer dans les pattes. En 2014, l’adoption – sans concertation, accuse-t-on à l’hôtel de ville – de l’Acte III de la décentralisation avait marqué le début de la guerre froide. En érigeant les communes d’arrondissement en communes de plein exercice, le texte aboutissait en effet à retirer à la mairie de la capitale de nombreuses prérogatives. Un an plus tard, le ministre des Finances s’est opposé, à la dernière minute, au lancement par la mairie d’un ambitieux emprunt obligataire n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

Depuis 2012, le parti de Khalifa Sall est un pilier de la majorité présidentielle Benno Bokk Yakaar (BBY, « unis pour le même espoir », en wolof ). Son leader, Ousmane Tanor Dieng, n’a d’ailleurs pas encore soumis à l’arbitrage des instances du PS la perspective d’une candidature autonome, qu’il semble réticent à cautionner. Mais, pour le camp présidentiel, Khalifa Sall « est un En octobre, la gestion des déchets opposant, puisqu’il a présenté sa propre liste face solides de la capitale a été placée à nous lors des élections locales », estime une source sous la tutelle du gouvernement. gouvernementale. avis de non-objection avant de se raviser En remportant pour la seconde fois la in extremis, ce blocage – qui a donné lieu mairie de Dakar, en juin 2014, face à la à la saisine de la Cour suprême – serait candidate de BBY (l’ex-Première ministre Aminata Touré), Khalifa Sall a effectiveavant tout politique. ment signé son non-alignement. D’autant que sa victoire, aux allures de plébiscite, a NON-ALIGNEMENT. « Historiquement, le maire de la capitale a toujours été un donné à la mouvance présidentielle une homme puissant, à qui l’on prête des idée de sa popularité dans la capitale. ambitions présidentielles », analyse un « Il est probable que le PS lâchera conseiller de Khalifa Sall. En l’occurrence, Khalifa pour se ranger derrière Macky », si l’élu socialiste entretient toujours le anticipe un proche collaborateur du flou sur une éventuelle candidature en maire de Dakar. Discret et consensuel, 2019 (ou en 2017, si l’issue du référendum Khalifa Sall ravalera-t-il ses ambitions prévu l’an prochain penche en faveur d’un dans une telle hypothèse ? « Il est passage au quinquennat), l’entourage capable de défier le PS », assure ce même de Macky Sall anticipe manifestement interlocuteur. ● ce scénario. MEhDI BA (30,5 millions d’euros) qui bénéficiait pourtant de la garantie de l’Usaid et de la Fondation Bill & Melinda Gates. « Le niveau d’endettement de la ville était trop important, c’est pourquoi le gouvernement a posé son veto », justifie un ministre. Mais, pour les collaborateurs de Khalifa Sall, qui rappellent que les autorités avaient rendu successivement deux

jeune afrique



Le Plus de J.A. Sénégal

© guillaume bassinet pour j.a.

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t Fin novembre, à Dakar. interview

Mamadou Diop Decroix « il est choquant de constater que l’opposition est inexistante à l’assemblée » Le député et secrétaire général d’AJ/PADS coordonne les deux principales plateformes antigouvernementales. Et tente de leur donner une meilleure visibilité.

S

ecrétaire général d’And-Jëf/ Parti africain pour la démocratie et le socialisme (AJ/PADS), parti issu de la gauche révolutionnaire des années 1970, Mamadou Diop Decroix est aujourd’hui le compagnon de route du groupe parlementaire Libéraux et Démocrates, emmené par le Parti démocratique sénégalais (PDS), d’AbdoulayeWade.Coordinateurdesdeux principales plateformes de l’opposition, le Front patriotique pour la défense de la République (FPDR) et le Cadre de concertation des leaders de l’opposition (C2O), il revient sur la stratégie des siens en vue des prochaines échéances électorales. jeune afrique: en cherchant à écarter le réformateur du PDS, Modou Diagne fada, de la présidence du groupe Libéraux et Démocrates, l’opposition ne s’est-elle pas tiré une balle dans le pied ? n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

Ce groupe parlementaire a été créé par le PDS en 2012. La seule chose qui a changé, c’est qu’en octobre Modou Diagne Fada, qui le présidait depuis le début, a été remplacé par Aïda Mbodj. Mais l’aspect le MaMaDOu DiOP DeCrOiX :

Pourquoi la coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar (BBY), largement majoritaire, s’inquiéterait-elle de l’existence d’un tel groupe ?

Le pouvoir ne veut pas d’une opposition structurée au Parlement. Sans doute voit-il d’un mauvais œil le rassemblement, au sein d’un même groupe, des différentes franges de l’opposition. Il est profondément choquant de constater qu’en 2015 l’opposition sénégalaise

nous sommes d’accord pour constituer une liste unique aux législatives de 2017. plus important, c’est que les députés de l’opposition jusqu’alors non inscrits ont décidé de rejoindre le groupe. Ce qui a conduit le président de l’Assemblée nationale à commettre une véritable forfaiture en déclarant irrecevable la liste de ce groupe élargi. L’opposition entend se battre pour mettre un terme à cette situation, illégale au vu du règlement de l’Assemblée.

est inexistante à l’Assemblée nationale, comme si on était revenus au temps du parti unique. Dans l’hypothèse où la prochaine présidentielle se tiendrait en 2017 et non en 2019 – si le référendum prévu en mai 2016 entérine le passage au quinquennat –, l’opposition présentera-t-elle un candidat unique ? jeune afrique


À contre-courant Notre objectif est d’obtenir d’abord la majorité au Parlement. Pour y parvenir, les principaux partis de l’opposition se sont mis d’accord pour constituer une liste unique pour les législatives de 2017. De sorte que si le mandat de Macky Sall devait se prolonger jusqu’en 2019, nous lui imposerions la cohabitation. Concernant la présidentielle, en revanche, nous ne prévoyons pas de candidature unique mais plutôt une pluralité contrôlée. Si nos candidatsremportentdesbastionsimportants, comme la Casamance, l’axe Dakar-Touba – sur lequel se concentre environ 70 % de l’électorat – ou quelques grandes localités du Nord, comme Saint-Louis, l’élection peut basculer. Donc nous travaillons en ce sens. Par ailleurs, au deuxième tour, les leaders de l’opposition appelleront à soutenir leur candidat le mieux placé face à Macky Sall. Ce dernier a été élu à une large majorité en 2012. En quoi aurait-il démérité ?

Partout où vous allez, les Sénégalais expriment leurs critiques vis-à-vis du régime. Le pays s’est appauvri. Avant même les récents chiffres du FMI classant le Sénégal parmi les vingt-cinq pays les plus pauvres du monde, nos compatriotes avaient perçu cette réalité. Contrairement aux principaux partenaires techniques et financiers du Sénégal, vous ne croyez donc pas aux promesses de développement du plan Sénégal émergent (PSE)?

On ne peut pas aller vers le développement sans avoir préalablement réformé ce pays en profondeur. Le président Wade avait fait beaucoup d’efforts en matière d’infrastructures routières, autoroutières, éducatives, sanitaires… Mais le fond du problème, c’est la nécessité de réformer les mentalités. Au Sénégal une culture contre-productive s’est installée, qu’il faut élaguer. Quant au PSE, c’est un produit d’importation, sur le modèle des plans du même ordre qu’on a vus fleurir ailleurs en Afrique. On parle d’émergence, alors que notre énergie est la plus onéreuse du continent. On parle d’agriculture, alors qu’on ne maîtrise pas l’approvisionnement en eau, que la mécanisation fait défaut, qu’on manque d’infrastructures de stockage ou d’une industrie légère de transformation… Après les indépendances, nous n’avons pas su réinventer notre économie, notre agriculture, notre système de santé. Forcément, on est à bout de souffle ; il nous manque une « vision». C’estpourquoi nous travaillons à une nouvelle offre programmatique susceptible de réformer les mentalités et les institutions. ● Propos recueillis à Dakar par MEhdi BA jeune afrique

Unis dans l’adversité… seulement dans l’adversité Accusant le chef de l’État de tous leurs maux, ses détracteurs semblent oublier les petits et gros problèmes qui, dans leurs rangs mêmes, les affaiblissent.

«

M

on rôle, c’est de tout faire pour réduire l’opposition à sa plus simple expression, mais dans les règles d’éthique et de comportement politique. » En s’adressant à la presse sénégalaise, en avril, Macky Sall n’avait pas fait mystère de la recette qu’il comptait concocter pour prolonger son mandat présidentiel. Un discours que l’opposition sénégalaise n’a pas oublié. Du Parti démocratique sénégalais (PDS, d’Abdoulaye Wade) à Rewmi (Idrissa Seck), en passant par l’AJ/ PADS (Mamadou Diop Decroix, lire ci-contre) ou l’Union centriste du Sénégal (UCS, d’Abdoulaye Baldé), les détracteurs de Macky Sall en sont convaincus : leur principal adversaire cherche à les dissoudre dans l’acide politique. Refus – par l’indéfectible allié du chef de l’État, Moustapha Niasse, président de l’Assemblée nationale – d’homologuer le groupe parlementaire unitaire de l’opposition

quelque peu sa propre capacité d’introspection ? Certes, le Cadre de concertation des leaders de l’opposition (C2O) est parvenu à susciter un rassemblement transpartisan qui, à défaut de compenser une position ultraminoritaire à l’Assemblée nationale, augure de possibles alliances électorales en vue des législatives – et, le cas échéant, de la présidentielle – qui se tiendront en 2017. Mais la volonté du clan Wade de faire mordre la poussière à Modou Diagne Fada, jeune réformateur qui milite pour un renouvellement des instances du PDS, s’est traduite par un mélodrame parlementaire (deux listes distinctes déposées pour un même groupe). Lequel a abouti à l’invalidation de la liste officielle du parti et de ses nouveaux alliés. MiEttES. Second problème de taille,

qui ne doit rien à Macky Sall, celui du leadership. Idrissa Seck ayant disparu des radars depuis dix-huit mois et son parti ayant longtemps fait cavalier seul, il est difficile de ne Le PdS garde pour mentor pas le constater : un nonagénaire qui réside une les anti-Macky bonne partie de l’année en France. ont pour mentor Abdoulaye Wade, présenté par la direction du PDS, un nonagénaire deux fois président lui préférant celui du réformateur et qui réside une bonne partie de Modou Diagne Fada – récemment l’année à Versailles, en région pariexclu du parti d’Abdoulaye Wade. sienne. Le fils de ce dernier, Karim, Débauchage régulier d’opposants, candidat officiel du PDS à la présile dernier en date étant Djibo Leyti dentielle, ne sortira de prison qu’en Kâ. Allégations récurrentes repro2019. Derrière ce tandem familial, chant au camp présidentiel de il existe bien quelques ténors suschercher à fausser les prochaines ceptibles de contribuer à placer échéances électorales en tripaMacky Sall en ballottage. Mais au touillant à son profit les commisvu de la dernière présidentielle, où sions chargées de renouveler les seulement cinq candidats (dont deux millions de cartes d’identité qui sont aujourd’hui aux côtés de Macky arriveront à expiration en 2016… Sall) ont dépassé les 7 %, laissant des L’opposition accuse Macky Sall de miettes à leurs rivaux, l’opposition, tous les maux. Mais, en s’attachant aussi bruyante et déterminée soitpresque exclusivement à diaboliser elle, aura fort à faire pour détrôner le chef de l’État, n’entrave-t-elle pas le président sortant. ● M.B. n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

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Sénégal Le Plus de J.A.

Tribune

Identité contemporaine Felwine SArr Écrivain, professeur d’économie à l’université Gaston-Berger, à Saint-Louis

t

raversée par des mouvements identitaires contradictoires, la société sénégalaise est à la croisée de problématiques sociétales, économiques et culturelles. Elle est tiraillée entre ses traditions et les tensions liées à l’invention de sa propre contemporanéité, ce qui la conduit à négocier avec ses identités multiples. Parmi celles-ci, notre culture négro-africaine originelle, l’islam, l’Occident – par le truchement du fait colonial – et le mouvement du monde. Autant d’influences entrecroisées, asymétriques, parfois contradictoires. L’entreprise coloniale, pour réussir et perdurer, a eu besoin de délégitimer tous les systèmes de référence préexistants. Une tentative, encore timide, de se réapproprier ses propres systèmes de référence et d’opérer ses synthèses est actuellement à l’œuvre en Afrique. Elle consiste dans le fait de dire : « Voici qui nous sommes. Voici la ligne de partage entre nos valeurs, celles qui nous viennent de l’extérieur et celles que nous choisissons d’incorporer dans notre dynamique d’évolution sociétale. »

différents héritages, ce qui implique la liberté de les interroger tous. Ne pas s’inscrire dans un rejet épidermique de ce qui viendrait d’ailleurs ni opter pour une fétichisation de notre culture originelle. Si des pratiques issues de celle-ci avilissent l’individu, il faut les rejeter. Lorsqu’elle intègre des valeurs issues d’autres horizons, une société doit pouvoir le faire à son propre rythme et non en fonction d’un agenda culturel venu d’ailleurs. Au Rwanda, Paul Kagamé tient de longue date un discours de ce type, avec une posture sans doute plus tranchée que celle du président sénégalais. Ce qui est intéressant, dans les deux cas, c’est que des pays africains, indé-

Il nous manque une réflexion critique sur le type de société que nous voulons devenir.

Méditations africaines, éd. Mémoire d’encrier, 130 pages, Montréal, 2012 105 rue Carnot, éd. Mémoire d’encrier, 78 pages, Montréal, 2011 Dahij, éd. Gallimard 144 pages, Paris, 2009 jeune afrique

Interpellé à propos de la pénalisation de l’homosexualité au Sénégal lors d’une interview sur iTélé, le 25 octobre, le président sénégalais a rappelé que chaque société avait son métabolisme propre et une échelle de valeurs qui lui était singulière*. Le véritable enjeu n’est pas tant la position actuelle de la société sénégalaise sur cette question. Il est que chaque société puisse établir son système de valeurs de manière endogène: interroger celles-ci, en rejeter certaines au besoin, et formuler des choix autonomes. Certaines dynamiques, qu’il faut encourager, sont favorables aux libertés individuelles, d’autres s’avèrent plus conservatrices. Ce « tri sélectif » ne saurait être imposé de l’extérieur. Le Sénégal est un creuset. Il a un pied en Orient, un autre en Occident, et on peut se demander où bat son cœur profond. Celui-ci est censé s’enraciner dans une souche négroafricaine. Mais force est de constater que la puissance d’imprégnation de chacune de ces influences – et leur force de frappe médiatique et culturelle – est inégale. Il nous revient d’adopter une forme de distance critique envers ces

pendamment de leur poids économique ou géostratégique, démontrent qu’ils ont la capacité d’affirmer leur singularité et leur désir d’être les sujets de leur propre histoire. C’est à cette condition que la postcolonie peut s’avérer féconde, pas si des indépendances concédées perpétuent un système de domination culturel et intellectuel. Or, faute d’aiguillons, cette affirmation de soi peine à émerger. Au Sénégal, la société civile est prompte à se mobiliser autour d’enjeux institutionnels ou politiques. Elle a épousé des formes de mobilisation à l’occidentale et sait se montrer efficace concernant certains enjeux. Mais il nous manque une réflexion critique, intellectuelle, sur le type de société que nous voulons devenir. Depuis Cheikh Anta Diop, ce terrain a été laissé en friche. Il nous faudrait des cultural studies à l’africaine afin d’adopter une distance critique épistémologique par rapport aux cadres occidentaux et orientaux. C’est ce travail de dépoussiérage et de régénération qui nous permettra d’édifier notre propre voie. Et de faire entendre notre propre voix. ● *« Nous avons notre code de la famille, nous avons notre culture, nous avons notre civilisation, il faut que les gens apprennent à respecter nos croyances et nos convictions. » n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

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GÉNÈSE DU FONDS Le Fonds Souverain d’Investissements Stratégiques S.A., en abrégé « FONSIS » a été constitué, le 29 juillet 2013, en société anonyme avec conseil d’administration avec à terme un capital qui atteindra 500 milliards de FCFA, composé d’apports en numéraire et d’actifs de l’État du Sénégal, en conformité avec la loi 2012-34 portant création du FONSIS. Le FONSIS a pour mission de promouvoir le rôle de l’État du Sénégal, en tant qu’investisseur à long terme dans l’économie productive, partenaire et complément du secteur privé. Le FONSIS a officiellement démarré ses activités en octobre 2013, avec la nomination de son Directeur Général, Monsieur Amadou HOTT. En 2014, le Fonds a progressivement constitué une équipe de qualité, composée de professionnels issus du monde de la finance et du secteur privé avec plus de 80 années d’expérience cumulée.

NOS INVESTISSEMENTS À ce jour, le Conseil d’administration du Fonds a approuvé et validé sept (07) projets pour un investissement direct total de 72,7 milliards de FCFA. Il s’agit de :

PUBLI-INFORMATION

1. Prise de participation au capital de Biosoy S.A. Le projet Biosoy consiste en la mise en culture d’une superficie de 1 000 ha dans la région de Louga, commune de SYER, pour la production agricole de graines biologiques (soja, arachide, maïs et sésame), le marché bio constituant une filière à très haute valeur ajoutée sur le marché international. Cette exploitation agricole d’un investissement global de 4,6 milliards de FCFA aura un impact majeur sur l’économie locale avec la création, dans un premier temps, de 200 emplois directs, la mise en place d’une ligne électrique moyenne tension d’environ 20 km, une contribution significative au PIB et un impact favorable sur la balance commerciale du pays, 80 % de la production étant destinée à l’exportation. Le FONSIS est Co-développeur du projet aux côtés

de promoteurs privés nationaux et internationaux. L’apport des actionnaires étant déjà sécurisé, des négociations sont en cours avec les banques commerciales locales pour la partie dette et le closing financier est prévu pour début 2016.

2. Prise de participation au capital de Parenterus S.A. Il s’agit de la construction d’une unité industrielle pharmaceutique visant la production de flacons de solutions de perfusion pour le marché sénégalais et sous régional à des coûts plus abordables pour la population. Le projet PARENTERUS contribuera positivement à l’amélioration de la balance commerciale car ces produits sont à ce jour totalement importés par le Sénégal. D’un coût global de 6,5 milliards de FCFA pour une production annuelle de 12 millions de flacons, le Projet est implanté dans la Commune de Diender, Région de Thiès et aura un impact majeur sur l’économie locale avec la création de plus de 70 emplois directs à partir de la première année d’exploitation et de recettes fiscales pour l’État et les collectivités locales. Les travaux de construction de l’usine démarrent en décembre 2015 et l’usine sera opérationnelle à partir de 2017. Le FONSIS est Co-développeur du projet aux côtés de promoteurs privés locaux et internationaux, mais aussi d’investisseurs institutionnels tels que la Caisse des Dépôts et Consignations du Sénégal « CDC ».

3. Création de la société Pôles d’Infrastructures Médicales S.A.S.U « POLIMED » POLIMED est un projet stratégique initié par le FONSIS, avec la collaboration et le soutien du ministère de la Santé et de l’Action Sociale. POLIMED a pour mission, entre autres, de concevoir et de gérer des infrastructures médicales à travers le Sénégal. Le centre-pilote construit dans l’Établissement Public de Santé de Mbour pour un coût de 800 millions de FCFA, sera fonctionnel en fin décembre 2015 avec une vingtaine d’emplois supplémentaires. Avec la construction de ce premier centre d’imagerie médicale, le FONSIS contribue au renforcement de l’équilibre de la carte sanitaire. L’ambition de POLIMED


4. Prise de participation au capital de Senergy S.A. Il s’agit, pour ce projet, d’installer et d’exploiter une centrale solaire photovoltaïque de 30 MW dans la région de Thiès pour un coût global de 27 milliards FCFA en y incluant le raccordement. L’électricité produite sera vendue à la SENELEC. Le Projet est en ligne avec la vision et la volonté politique du président de la République, telle que formulée dans La Nouvelle Lettre de Politique Energétique « LPDSE ». Il contribue à l’atteinte de plusieurs objectifs de ce plan énergétique national, également déclinés dans le Plan Sénégal Emergent. Il participera notamment à diversifier le mix énergétique dès 2017. Il s’agit d’un projet solaire co-piloté par le FONSIS qui compte le répliquer dans différentes zones du territoire national en accord avec la SENELEC. Le FONSIS est Co-développeur du projet aux côtés de promoteurs privés dont un fonds international d’infrastructure gérant plus de 3 milliards d’euros.

5. Contribution à la mise en place d’un Sous-fonds dédié aux PME Ce fonds d’investissement multisectoriel, spécialement dédié aux PME sénégalaises à fort potentiel au Sénégal, sera à terme doté d’au moins 3 milliards FCFA dont 1 milliard de FCFA du FONSIS. Le fonds est le premier fonds de capital-risque sénégalais et permettra: • la création d’une cinquantaine de PME ; • la création et la préservation d’environ 2 600 emplois locaux ; • la promotion des marchés locaux et l’aide à la structuration et au renforcement des chaînes d’approvisionnement dans les secteurs mal desservis (par exemple l’agro-industrie) ; • la contribution à l’encadrement et au suivi de proximité, avec la mise à disposition d’une assistance technique experte pour renforcer la capacité des PME financées ; • l’augmentation des recettes fiscales pour l’État. Le fonds a été initié par deux (02) professionnels du capital investissement en collaboration avec un fonds international de capital-investissement. Le FONSIS est parmi les actionnaires fondateurs du fonds à leurs côtés et aux côtés d’autres actionnaires nationaux et internationaux.

6. Création du Fonds PME Fonsis-SAED Le Fonds PME FONSIS-SAED est un projet initié et développé par le FONSIS, en collaboration avec la SAED. Ce fonds lancé en octobre 2015, est dédié à l’investissement dans des PME agricoles de la Vallée du fleuve Sénégal. Plus de 300 emplois permanents directs et 500 indirects sont attendus de ce projet. Le FONSIS est l’actionnaire unique du fonds qui est initialement doté d’un capital d’1 milliard de FCFA.

7. Prise de participation au capital de la société de projet « Club Med SARABA» Il s’agit de la construction d’un village de vacances de 350 chambres sur le site de l’ancien Club Aldiana à Nianing, sur 30 hectares avec plage, à MBOUR, et de son exploitation sous la marque Club Med. Les actionnaires sont la VACAP S.A., le Club Med, la CDC du Sénégal et le FONSIS. Le Club Med SARABA devrait ouvrir en fin 2017.

PERSPECTIVES L’ambition du FONSIS est de développer le patrimoine de l’État du Sénégal et de créer des champions nationaux en soutenant le secteur privé

national tout en constituant des réserves pour les générations futures. De 2014 à fin 2015, les bases de l’activité ont été posées avec succès. Le FONSIS a en effet réussi à se positionner comme un acteur incontournable en matière de couverture des besoins de financement en capital et quasi-capital des porteurs de projets, des promoteurs et des fonds d’investissements désirant investir au Sénégal. Les perspectives sont très bonnes avec le transfert imminent des actifs de l’État ainsi que l’étude en cours, au niveau du FONSIS, de plusieurs autres projets dans les secteurs de l’énergie, des infrastructures de transport, de l’agriculture, de l’industrie, du tourisme et de la santé.

13 rue de Thann X Dagorne - Immeuble SNR 5ème étage Dakar, Sénégal - B.P. : 50882 Dakar RP Tél.: +221 33 889 33 77 - contact@fonsis.org

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DIFCOM/DF

est de devenir un Champion national en conception et gestion d’infrastructures médicales qui exportera son expertise dans la sous-région. Le FONSIS est l’actionnaire unique de POLIMED S.A.S.U.


Le Plus de J.A. Sénégal Économie

Terre de contrastes Dans le top 10 des plus réformateurs… et parmi les 25 plus pauvres du monde. Le point sur les grands indicateurs, la plupart au vert, d’un pays qui a renoué avec la croissance, mais où la vie reste chère.

C

omme au temps du régime précédent, déjà, le Sénégal est en chantier. De nombreux projets du plan Sénégal émergent (PSE) ont démarré ces derniers mois, de l’autoroute Thiès-Touba à la construction de la ville nouvelle de Diamniadio ou de plusieurs centrales électriques sur le territoire. En plus de doter le pays des infrastructures modernes qui lui manquaient, ces grands travaux apportent plusieursmilliersd’emploisàunejeunesse confrontée au chômage. La bonne tenue de ses fondamentaux macroéconomiques permet au Sénégal d’avoir aujourd’hui les moyens de ses ambitions. Le pays a renoué avec une croissance qui l’avait boudé pendant près d’une décennie. Selon les derniers chiffres du FMI, le PIB a progressé de 4,7 % en 2014, il est projeté à 5,1 % pour la fin de cette année et à 5,9 % pour 2016. Dans la foulée, l’essentiel des grands indicateurs économiquesestauvert,grâcenotamment à des finances publiques en bonne santé: l’endettement se creuse mais semble sous contrôle, l’inflation est au point mort et les déficits se résorbent lentement. Dans le même temps, les efforts d’amélioration de

l’environnement des affaires pour attirer les investissements privés se poursuivent. En 2016, le Sénégal figure, pour la seconde année consécutive, dansle topdix des pays les plus réformateurs du rapport « Doing Business » établi par la Banque mondiale. Les bémols ne manquent pourtant pas, de l’accès au foncierà la lenteurréglementaire des conflits commerciaux… PATIENCE. Ce cadre macroéconomique

satisfaisant cache en effet une réalité bien plus contrastée pour les Sénégalais en général et pour le secteur privé en particulier. Trois ans et demi après l’arrivée de Macky Sall aux affaires, les attentes sociales de la population restent encore très largement à combler. L’augmentation de certains produits et services de base, comme les denrées alimentaires, l’électricité ou l’accès aux soins, érode le pouvoir d’achat au point qu’aujourd’hui la rue a l’impression que « l’argent ne circule pas ». Un sentiment confirmé par les statistiques du FMI, qui vient de classer le Sénégal parmi les 25 pays les plus pauvres au monde en matière de PIB per capita. Au grand agacement des hautes sphères du pouvoir. « Le Sénégal est en train de vivre un

Une croissance au rendez-vous mais encore peu inclusive CROISSANCE 8

(variation en %, en prix constants, éch. de gauche)

1 038,9

PIB par habitant

(en dollars, éch. de droite)

1 078,6 934,6

7

986,4

Un taux d’endettement qui se creuse mais reste maîtrisé, pendant que le déficit public se résorbe Déficit public, en % du PIB 60

1 055,8 1 000

6,6 800

600

5,1 4,7

5

AmAdou ouRY dIALLo, à Dakar

Taux d’endettement, en % du PIB 1 200

5,9

6

programme d’ajustement structurel qui ne dit pas son nom, soutient Mamour Cissé, homme politique et acteur économique. L’activité tourne au ralenti, les populations, les commerçants ne voient pas la relation qualitative et quantitative de tout cela. » Le gouvernement tente pourtant de multiplier les initiatives sur plusieurs fronts, à commencer par l’accès aux crédits pour les PME-PMI. Indispensable à toute politique de relance de l’offre de production, donc de création de richesses et d’emplois, le secteur privé reste sous la pression fiscale, alors que l’électricité reste chère. Point de départ de l’exode rural, les campagnesfontl’objetd’unegrandeattention à Dakar, qui, en partenariat avec le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), va injecter plus de 400 milliards de F CFA (610 millions d’euros) pour financer la construction d’infrastructures socio-économiques et hâter ainsi leur développement. La réussite de tous ces dossiers, fondamentaux dans la politique de croissance économique du pays, s’inscrit évidemment dans la durée. En espérant que les Sénégalais sauront faire preuve de patience. ●

400 4

40

61,9

60,7

– 6,1

– 5,2

– 4,7

2013

2013

2013

53,1

54,9

– 10,4

– 8,8

2013

2013

46,6

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0

– 20

200

3,6 3

0 2013

2014

n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

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2016

2017

Classement « Doing Business » 2016

Inflation sous contrôle

153/189 (+ 8 places)

prévu

1,37 % en 2016 jeune afrique

source : FMI ; Banque MondIale

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Une contribution majeure au développement économique

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râce à l’engagement de ses sociétaires, de ses élus et de ses techniciens, le Crédit Mutuel du Sénégal confirme sa position de leader des systèmes financiers décentralisés au Sénégal et en Afrique de l’Ouest. Le Crédit Mutuel du Sénégal a été créé en 1988 dans la région de Kaolack, bastion agricole du pays. Vingt-sept ans plus tard, le CMS est incontestablement l’un des systèmes financiers décentralisés les plus importants du pays. Selon les statistiques officielles de la Direction de la micro-finance, en juin 2015, le CMS possède en parts de marché 47% de l’actif total du secteur de la micro-finance, 39,32% de la clientèle, 59,19% du volume des dépôts et 42,11 % de l’encours de crédit. Son taux de portefeuille à risque à trente jours se situe à 5,36 % en 2015 contre 7 % dans l’ensemble du secteur. Ce taux est à 3,53 % pour le risque à 90 jours contre 5,41% pour le secteur.

Aussi, le CMS réaffirme t-il son ancrage au monde rural surtout pour le financement de l’agriculture avec l’avènement de son Centre pour le Financement Agricole (CFA). Ce service dédié au financement de chaînes de valeur agricole avec une gamme de produits allant du CMTEA (Crédit Moyen Terme Équipement Agricole) au crédit Fonds de roulement en passant par le warrantage, sera articulé aux programmes de développement agricole initiés par les pouvoirs publics. La modernisation des moyens de paiement à travers le « Concept CMS Mobiles », qui intègre CMS Banking et CMS Money via une plateforme de téléphonie mobile, donnera un nouveau tournant aux défis de l’inclusion financière. À coté, la FONDATION CMS poursuit et amplifie les missions sociales dans le cadre d’une démarche de Responsabilité Socié-

Le CMS compte 225 points de services dont 107 en zone rurale et 120 en zone urbaine. Pour compléter ce large réseau et participer à la décentralisation des services financiers de base, des guichets mobiles permettent aux populations d’accéder à ses produits et services à l’occasion d’événements socio-économiques (fêtes religieuses, marchés hebdomadaires, etc.). Le réseau CMS compte près de 900 000 clients soit 23,07% de la population habituellement active du Sénégal avec l’ambition de dépasser le million de clients en 2016. Cette perspective sera rendue possible grâce à des services innovants avec le lancement imminent de la carte visa prépayée (BAOBAB).

Point E, Rue de Fatick (PE-17) - B.P.28052 Dakar-Médina. N° Agrément SN 00 00 01 F du M.E.F • Catégorie 1 Ligne info : Tél. : (221) 33.869.48.88 / E-mail: cms@cms.sn - www.cms.sn

tale d’Entreprise. Il s’agit notamment de soutenir : • les initiatives pour l’accès des populations démunies (la femme et l’enfant) à des soins de santé de qualité ; • les initiatives dans le domaine de l’éducation en encourageant la scolarisation des filles ; • enfin les secteurs comme la culture et le sport pour leurs vertus favorisant le développement humain.

Véritable système financier décentralisé, le Crédit Mutuel du Sénégal dispose d’un large réseau de plus de 220 points de services, en plus de 5 guichets mobiles


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 Dans l’un des ateliers de l’usine. EntrEprisE

NsTs signe le retour de l’industrie textile locale Implantée à Thiès, la filature a relancé ses activités en août après dix ans d’arrêt. Alors que son carnet de commandes se remplit, elle se modernise en investissant plus de 5 millions d’euros.

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out sourire, en passant dans les ateliers, il distribue sans compter les saluts et franches poignées de main aux différents groupes d’ouvriers qui s’escriment autour d’impressionnantes machines tournant à plein régime. Ibrahima Macodou Fall, le directeur de la Nouvelle Société textile sénégalaise (NSTS), semble être un patron heureux. Et pour cause. En réussissant à faire redémarrer la filature, à l’arrêt depuis 2005, il vient de remporter la bataille qui l’avait alors opposé, explique-t-il, à sa banque partenaire et à certains dignitaires de « l’ancien régime ». Unefoistournéecettedouloureusepage, la NSTS, implantée à Thiès, à 70 km à l’est de Dakar, a repris ses activités de production en août. Bénéficiant de l’implication personnelle du président Sall et de l’appui financier de la Banque nationale pour le développement économique (BNDE), qui lui a octroyé 600 millions de F CFA (près de 915 000 euros), la filature semble être en phase de relance. Environ 80 % de sa production sont destinés à l’export (principalement vers n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

le Maroc et quelques pays européens), les 20 % restants sont vendus à ce qui reste de l’industrie textile locale et à des artisans. Ainsi, le centre des arts et métiers Maam Samba de Ndem, situé dans la région de Diourbel (à environ 150 km à l’est de la capitale), spécialisé dans la confection d’articles textiles artisanaux, vient de pas-

production. Grâce à un investissement de 3,5 milliards de F CFA (5,3 millions d’euros), la filature vient de recevoir de nouvelles machines en provenance d’Allemagne et d’Italie. D’autres suivront, et l’usine devrait atteindre sa pleine capacité de production dès le début du deuxième semestre de 2016, avec un objectif de 20 milliards de F CFA de chiffre d’affaires et un effectif de 450 employés (contre 120 actuellement), précise le directeur. masse salariale. Selon lui, l’enjeu

essentiel de cette relance est la reprise du processus d’industrialisation textile au Sénégal, qui, jusqu’au début des années 1980, disposait de l’un des plus importants tissus industriels de la filière en Afrique de l’Ouest. « À l’époque, la filière textile était constituée de 7 unide 120 employés fin 2015, tés industrielles, avec un effectif la manufacture devrait passer d’environ 3 000 employés pour à un effectif de 450 mi-2016. une masse salariale de 5 milliards de F CFA, ce qui faisait vivre une ser commande à la NSTS du fil de coton population de 30000 personnes, explique le Pr MoustaphaKassé, doyen honoraire de qu’il importait jusqu’à présent du Mali voisin. L’entreprise reconquiert des parts la faculté des sciences économiques et de de marché. Et pour accélérer la cadence, gestion de l’université Cheikh-Anta-Diop Ibrahima Macodou Fall compte s’appuyer (Ucad), à Dakar. Sa liquidation a entraîné sur une campagne de communication et d’immenses pertes pour l’économie sénémieux faire connaître ses produits auprès galaise. » Et sa renaissance aujourd’hui est d’une clientèle sevrée de fil local depuis d’autant plus importante qu’elle rejoint dix ans… « Plus une seule fibre de coton l’ambition du pays de modifier profondément la structure de son économie, n’avait été transformée au Sénégal depuis encore principalement exportatrice de l’arrêt de toutes les filatures », déplore-t-il. La manufacture relancée, cap sur la produits bruts. ● phase de modernisation de son outil de amadou oury diallo jeune afrique

oumar SeYe

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climatisation, menuiserie métallique, électricité, etc.). Inauguré en 2010, il compte aujourd’hui 112 étudiants, répartis sur trois promotions. Boubou Sakho, né à Bakel il y a soixante-trois ans, est venu tout exprès pour accompagner l’ambassadeur de France dans Depuis dix ans, un programme de coopération franco-sénégalais sa tournée. Président de l’Association aide les émigrés à financer des projets de développement dans leur des ressortissants de Bakel en France, région d’origine. exemple à bakel, au sénégal oriental. il a pu mesurer le chemin parcouru. Pendant près de quarante ans, la e 12 novembre, tandis que s’achequi vient de sillonner la vallée du fleuve diaspora de Bakel en France s’est orgavait, à Malte, le sommet de La Sénégal, de Bakel à Saint-Louis, pour nisée de manière informelle avant de visiter les projets phares de ce prose constituer, en 2000, en association Valette sur la migration entre les loi de 1901. À l’origine, les cotisations pays africains et l’Union eurogramme qui a offert un cadre structuré de ses membres servaient à financer péenne, l’ambassadeur de France au aux initiatives, jusque-là informelles, le rapatriement au pays de la diaspora. Système Sénégal, Jean Félix-Paganon, entamait des Bakelois décédés en à Bakel, un chef-lieu du Sénégal oriend’adduction d’eau potable Parmi les France. « Peu à peu, nous tal proche des frontières malienne et à Diawara, postes de santé réalisations : nous sommes impliqués mauritanienne, une tournée de cinq à Wendou-Bosséabé et à adduction dans les questions alijours célébrant la contribution des émiGolléré, écoles, collèges grés au développement de leur région ou lycées à Ourossogui, d’eau potable, mentaires, le soutien aux périmètres irrigués ou aux à Ngano, à Thialy ou à d’origine. Piloté par la direction de la écoles, postes lieux de culte, la fourniture Sinthiou Bamambé… « Il Coopération technique sénégalaise et de santé… financé par le ministère français des s’agit de projets modestes, de livres pour les écoles ou Affaires étrangères, le Programme d’apdestinés à apporter des sercelle de médicaments », pui aux initiatives de solidarité pour vices de base aux populations locales, explique Boubou Sakho. le développement (PAISD), qui vient précise le diplomate français. Ils sont financés aux deux tiers par le PAISD, le de fêter son dixième anniversaire, a bras baLLants. En 2005, la création impliqué, depuis sa création, 25 000 restiers restant relevant d’une contribution du PAISD offre à l’association l’occasion sortissants sénégalais établis en France. des associations de la diaspora. » d’élaborer ses propres projets et de ne « Les émigrés sénégalais entretiennent À Bakel, le PAISD a accouché d’un plus seulement répondre aux besoins une relation étroite avec leur commune centre de formation professionnelle aux de première nécessité exprimés par les d’origine », confirme Jean Félix-Paganon, métiers du BTP (maçonnerie, froid et populations. La mairie leur attribue un terrain de 2 hectares, sur lequel ils q Boubou Sakho, président de l’Association des ressortissants décident d’implanter le centre de forde Bakel en France (ici à Dakar). mation. « La région de Bakel a connu un boom immobilier, mais les ouvriers venaient de Dakar ou de Kaolack », se souvient Boubou Sakho. Avec l’aide de différents partenaires, dont Architectes sans frontières et la Mairie de Paris, l’association a réuni plus de 45 millions de F CFA (environ 69 000 euros), soit 30 % du budget global. Pour assurer des débouchés sur place aux jeunes diplômés, elle s’apprête aujourd’hui à construire un complexe hôtelier tout confort, dans une ville encore dépourvue de toute capacité en la matière. « Il ne suffit pas de conseiller aux jeunes Sénégalais de ne pas opter pour l’émigration clandestine, il faut d’abord leur démontrer qu’une autre voie est possible, résume Boubou Sakho. Aujourd’hui, même s’ils quittent Bakel pour Dakar ou pour l’étranger, ces jeunes ne resteront pas les bras ballants, ils auront un métier. » ● Diaspora

Loin des yeux, près du « keur* »

© guillaume bassinet pour J.a.

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Mehdi ba

* « Maison », en wolof. n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

jeune afrique



Lire aussi « G Hip Hop, le supplément d’âme galsen de Guediawaye »

Le Plus de J.A. Sénégal

l’on sait dessiner », la mode n’est pas une vocation. « C’était plutôt l’occasion de créer ma propre entreprise ; je ne voulais plus travailler pour quelqu’un », explique Aissatou Sène. Avec les quelques économies prises sur son salaire de responsable d’enseigne d’une grande chaîne de cosmétiques, elle passe la vitesse supérieure grâce aux réseaux sociaux : « Les gens commandaient des robes et des chaussures via notre page Facebook depuis la France et les États-Unis. On a démarré comme ça. » Son ambition ? « J’aimerais être le H&M africain », lâche en souriant Aissatou Sène, qui vient d’ouvrir une nouvelle boutique dakaroise dans le quartier huppé des Almadies et continue de vendre ses créations via internet.

stylisme

Elles veulent créer le H&M africain Selly Raby Kane et Aissatou Sène, chacune avec sa griffe, ont su se faire un nom à l’international. Elles cassent les codes et incarnent le dynamisme de la mode au Sénégal.

 Aissatou Sène (à g.) et Selly Raby Kane devant le monument de la Renaissance africaine, à Dakar.

FASHION Et BUSINESS. Selly Raby Kane,

© Guillaume bassinet pour J.a.

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n août, elles serraient la main de Barack Obama, à Washington. Sélectionnées parmi les 500 jeunes leaders africains de la Mandela Washington Fellowship, Selly Raby Kane, 29 ans, et Aissatou Sène, 26 ans, étaient invitées dans la capitale américaine pour représenter le Sénégal avec treize de leurs compatriotes issus de divers horizons. Mais les deux jeunes stylistes ont d’autres points en commun. Elles ont toutes deux lancé leur marque en 2012. Selly Raby Kane s’est fait remarquer dès 2008 en présentant sa collection, Be Street, lors d’un défilé conceptuel au siège dakarois de la Sénégalaise de l’automobile, métamorphosé pour l’occasion en univers urbain. « On a cassé les codes du défilé de mode classique », raconte la styliste. Quatre ans plus tard, elle créait sa griffe, Seraka. Quant à Aissatou Sène, c’est n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

elle, a cherché sa voie entre droit privé et gestion d’entreprise tout en couvant sa passion pour le stylisme. Elle finit par s’inscrire à Mod’Spe Paris pour un cursus Fashion et Business. Dès son retour au Sénégal, son style avant-gardiste explose. Mêlant ses multiples influences, du cinéma fantastique au street art en passant par l’actualité (elle a un temps envisagé le journalisme), la peinture ou la littérature, elle devient l’une des égéries de la vague arty dakaroise en pleine expansion – « ceux qui voient les choses autrement, résume-t-elle. Nous sommes dans une logique de groupe, nous nous épaulons les uns les autres ». Selly Raby Kane ouvrira sa boutique dakaroise et son site de vente en ligne début 2016. Sa marque va également être commercialisée en Afrique du Sud, en attendant, espère-t-elle, d’être présente au Ghana et en Côte d’Ivoire. Un seul et même regret pour ces deux « young african leaders » : que leurs

Baileys, qui, en sponsorisant le premier défilé de la jeune créatrice à l’hôtel des Almadies en 2012, donnera un coup de projecteur sur sa marque : Bélya. « C’est à la suite d’une discussion avec une amie, dans un taxi, que je me suis lancée, avec seulement 40 000 F CFA [60 euros], se souvient Aissatou Sène. Nous sommes allées au Leur seul regret : que leurs marché Sandaga acheter des marques soient plus appréciées perles, et j’ai fabriqué des colà l’étranger que dans leur pays. liers. » Alors que nombre de ses clientes témoignent de l’intérêt pour ses tenues en wax, des modèles créations semblent plus appréciées qu’elle se fait confectionner par un tailleur à l’étranger que dans leur pays. « Les local, l’idée lui vient d’étendre la marque Sénégalais ont un problème quand il Bélya aux vêtements, puis aux chaussures, s’agit de consommer local », déplore avec toujours le même concept: mélanger Aissatou Sène. « Le secteur de la mode style occidental et tissus traditionnels est très dynamique au Sénégal, conclut africains. Selly Raby Kane. Et il gagnerait beaucoup Pour la jeune femme, qui fut un temps à être envisagé comme une véritable mannequin et vient d’une famille « où industrie. » ● MEHdI BA jeune afrique


La direction générale des douanes Sénégalaises, une administration moderne au service du développement L’Administration des Douanes, en raison de sa position stratégique aux frontières, joue un rôle crucial dans le développement économique et social du Sénégal. Placée sous la tutelle du Ministère de l’Économie, des Finances et du Plan, elle assure des missions fiscale, économique et de sécurisation de la chaîne logistique internationale. La Direction générale des Douanes est dirigée par l’Inspecteur général d’État, Monsieur Papa Ousmane GUEYE (ci-contre). • Mission fiscale La Direction générale des Douanes est chargée de la liquidation des droits et taxes d’entrée et de sortie du territoire national. Cette mission est essentielle pour les pays en développement, notamment le Sénégal dans la mesure où les recettes douanières représentent plus du tiers du Budget de l’État. • Mission économique La lutte contre la fraude constitue une des missions essentielles de la DgD dans le cadre de la protection de l’Industrie nationale. La promotion du partenariat Douane-Entreprise est un des piliers de l’action du service des Douanes. Dans un contexte de mondialisation des échanges et de développement du commerce international, l’Administration des Douanes met en œuvre des mesures destinées à favoriser un environnement économique propice à l’investissement et à la création de richesses.

COMMUNIQUÉ

• Mission de sécurisation de la chaîne logistique internationale La sécurisation de la chaîne logistique internationale et la lutte contre la criminalité transnationale organisée constituent une préoccupation majeure du service. Du fait de sa présence active aux frontières, la DgD apporte son concours à différents services de l’État notamment en matière de santé publique, de protection des consommateurs et de la flore, du patrimoine historique et culturel, de contrôle des changes, de la préservation de l’ordre public, etc. De plus en plus, la lutte contre la drogue, la préservation de l’environnement, la protection de la propriété intellectuelle, la lutte contre le blanchiment d’argent et le terrorisme constituent des défis de notre Administration. Pour mener à bien ses missions, les Douanes Sénégalaises disposent de plusieurs instruments.

Le Plan stratégique 2014-2017 : L’Administration des Douanes s’inscrit dans le sillage du Plan Sénégal Émergent (PSE), à travers l’élaboration d’un Plan stratégique pour la période 2014-2017 jumelé à un Contrat de performance avec le Ministère de l’Économie, des Finances et du Plan (MEFP).Le Programme de Partenaires Privilégiés (PPP) : grâce à ce programme, des avantages particuliers sont accordés aux entreprises qui concourent à la réalisation des objectifs budgétaires. Des Vedettes : Ces moyens navals assurent une meilleure surveillance des côtes sénégalaises. Des Scanners : Ils permettent l’inspection sans intrusion des marchandises au moyen des rayons X. Le Système de surveillance électronique (SSE) : À l’aide de balises électroniques installées sur les véhicules, les chargements en transit sont surveillés en temps réel. Le Système GAINDE Intégral : Le système de gestion Automatisée des Informations Douanières et des Échanges (gAINDE), mis en place depuis 1990, fédère aujourd’hui la quasi-totalité des modules informatiques de la Douane. Depuis plusieurs années, la Direction générale des Douanes (DgD) a entrepris un vaste chantier de dématérialisation des procédures et des formalités du commerce extérieur par le biais de l’automatisation et de la réduction progressive de l’utilisation du papier. Ainsi, grâce aux technologies de l’Information, la DgD offre de plus en plus à ses usagers un ensemble de services permettant la facilitation des échanges. Le 26 janvier 2016, la Direction générale des Douanes va célébrer sous l’égide de l’Organisation mondiale des Douanes (OMD), la Journée internationale de la Douane sous le thème : « La Douane numérique : pour un engagement progressif ».Dans le même sillage, l’Administration des Douanes du Sénégal aura l’insigne honneur d’abriter en juin 2016 à Dakar la Conférence & Exposition de l’OMD sur les technologies de l’Information (TI).

OUTILS ET MOYENS MODERNES D’INTERVENTION Le Code des Douanes : Adopté le 18 février 2014 à l’unanimité par l’Assemblée nationale, le nouveau Code est un instrument juridique adapté aux multiples défis de l’heure.

Direction générale des Douanes Sénégalaises

Bloc des Madeleines, Bld de la République x Avenue Peytavin Tél. : +221 33 839 00 00 -Email : spdgd@douanes.sn

www.douanes.sn


 Yves Laplace, le propriétaire. Tendance

Sous le charme du djoloff Célèbre pour sa déco confiée à des pointures de l’artisanat sénégalais et africain, le chic et cosy « petit » hôtel dakarois s’agrandit. Avec une approche éthique et écolo.

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est un hôtel de charme où déco rime avec écolo. Un cocktail panafricain, aussi, conçu par Yves Laplace, un Français passionné du continent, qu’il n’a plus quitté depuis 1976. Surplombant la baie de Soumbédioune, les murs ocre de la terrasse du Djoloff évoquent la latérite sahélienne. Ses balcons fleuris de bougainvillées sont typiques de l’architecture saint-louisienne. Les tables en mosaïque de son restaurant sont inspirées des zelliges marocains. Quant au mobilier et aux éléments de décoration, ils ont été conçus par des artisans et artistes africains, pour la plupart sénégalais. « Nous voulions privilégier les matériaux locaux et concevoir un hôtel métissé, qui évoque l’Afrique », raconte Yves Laplace. Situé dans le quartier populaire de Fann Hock, à un jet de pierre de la corniche, le Djoloff fut, dans une autre vie, un bar-dancing et un espace de concert prisé avant de se transformer peu à peu en un lieu interlope, où la dizaine de chambres situées à l’étage servaient d’hôtel de passes. Fermé, délabré, squatté, il n’est plus que l’ombre de luimême en 2004 lorsque Yves Laplace et son épouse ivoirienne, Ella, le rachètent. Tous deux vivent alors en Côte d’Ivoire, n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

où la situation devient critique. Ils choisissent Dakar comme lieu de repli et acquièrent le bâtiment, sans vraiment savoir ce qu’ils en feront. Yves Laplace, 66 ans, n’est pas hôtelier, mais ingénieur des Eaux et Forêts. Pendant plus de vingt ans, il a vécu au Congo-Brazzaville, où il a planté 50 000 hectares d’eucalyptus dans les savanes côtières de Pointe-Noire pour le compte de l’État congolais. En 1999, il a poursuivi sa carrière en Côte d’Ivoire, comme consultant dans le cadre de l’agroforesterie et de l’agro-industrie. Et c’est donc à Dakar que le couple se construit une nouvelle vie. Une nouvelle vie, aussi, pour le Djoloff. nouvelle vie. Yves et Ella Laplace

décident de le réhabiliter pour en faire un hôtel de charme : « À l’époque, il n’existait quasiment pas d’établissements intermédiaires entre les hôtels 4 ou 5 étoiles et les bouis-bouis. De la construction à la décoration, nous voulions avoir recours aux savoir-faire et aux matériaux locaux. » Dans les couloirs, les murs sont ornés de peintures de Solly Cissé et d’Ibrahima Kébé. Les portes des chambres et les têtes de lit sont décorées de fresques réalisées par Jean Gnilane. Le mobilier de la réception, comme les

rideaux et les plaids, a été conçu par Aïssa Dione. Divers objets en fer forgé sortent des ateliers d’Ousmane Mbaye. Le Djoloff nouvelle formule ouvre ses portes en 2008. Et séduit immédiatement. Cette année-là, le jury du prix Albert-Londres y élit domicile pour la remise de son trophée du meilleur reportage. Quatre ans plus tard, de nombreux journalistes venus couvrir la présidentielle y posent leurs valises, devisant, le soir venu, dans son bar et restaurant terrasse face à l’océan, autour d’un verre et d’une assiette de tapas. Le Djoloff voit aussi défiler Alpha Blondy, Tiken Jah Fakoly, Solange Knowles… L’artiste polyvalent Kader Attia, le photographe Omar Viktor Diop ou la curatrice Koyo Kouoh y ont leurs habitudes. Cave. À sa touche déco, l’hôtel vient

d’ajouter une approche écolo. À l’occasion d’une extension qui, à partir de janvier, fera passer sa capacité de 21 à 33 chambres, Yves et Ella Laplace ont opté pour une approche « éthique et écologique ». Les nouveaux bâtiments sont en briques de terre compressée, alternative au tout-béton et dont les bilans énergétique et carbone sont meilleurs. Le système de climatisation est alimenté par une centrale à eau glacée, l’eau chaude, produite par une installation solaire thermique en toiture… Enfin, une cave fera office de lounge et accueillera des orchestres de jazz, sans toutefois chercher l’affluence. « Nous souhaitons conserver au lieu son côté intimiste », sourit Yves Laplace. ● Mehdi Ba jeune afrique

© guillaume bassinet - lens On life

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DGID, une amélioration des services aux usagers et du dispositif fiscal, portée par une administration tournée vers la modernisation Un dispositif fiscal rénové et propice à l’investissement

DIRECTEUR GÉNÉRAL DES IMPÔTS ET DES DOMAINES

L

a Direction générale des Impôts et des Domaines (DGID) est chargée d’appliquer la politique fiscale du Sénégal. Pour atteindre ses objectifs elle mise, à travers la définition d’un plan stratégique et la signature d’un contrat de performance, sur des outils modernes de gestion orientés qualité de service et efficacité.

Un engagement résolu pour une qualité de service La DGID s’est engagée à être à l’écoute de ses usagers et à leur garantir une qualité de service inspirée des standards internationaux. Cet engagement se traduit par le respect des délais pour la délivrance des services et documents administratifs, et la prise en charge des demandes des usagers, suivant des procédures harmonisées et dématérialisées. La plateforme de téléprocédures mise en place en 2013 permet de déclarer et de payer en ligne les impôts et taxes. Progressivement étendue à l’ensemble des contribuables, elle procure un gain de temps important et une réduction significative du coût de gestion.

COMMUNIQUÉ

Le démarrage durant le premier semestre 2016 d’un centre de services aux usagers et d’un centre d’appel gratuit facilitera un suivi personnalisé et à temps réel des demandes des usagers.

La réalisation des politiques économiques définies par le Plan Sénégal Emergent repose sur un environnement des affaires propice à l’investissement. La politique fiscale sénégalaise a connu, en 2013, une refonte importante par l’adoption d’un nouveau Code des Impôts qui traduit une option de simplification et de stabilisation de la réglementation. Le nouveau référentiel fiscal se veut moderne et est caractérisé par un droit commun incitatif. Ainsi, tout en maintenant les avantages liés au Code des investissements et aux autres régimes incitatifs, les mesures fiscales les plus efficaces sont généralisées : réduction d’impôt de 50 % pour les entreprises exportatrices, baisse de la fiscalité immobilière1 et de la constitution de sociétés, etc. À travers le code général des Impôts et d’autres lois, le cadre fiscal sénégalais est davantage propice à l’investissement et aux mécanismes de financement innovants tels que les contrats de partenariat public-privé, le crédit-bail et la finance islamique.

Une nouvelle gouvernance foncière qui allie célérité des transactions et sécurisation des investissements La modernisation de la gestion foncière est une option forte du Gouvernement du Sénégal. La réforme en cours vise à rationaliser le dispositif foncier et à rendre sa gestion plus efficace, grâce à un accès à un portail d’information foncière et à la délivrance de droits juridiquement sécurisés. La procédure de la formalité fusionnée2 permet déjà l’inscription des droits au livre foncier dans un délai moyen de quarante-huit heures. 1. Réduction de 15 à 5 %. 2. Guichet unique qui centralise les procédures d’enregistrement et de publicité foncière pour les transactions immobilières passées devant notaire.

DIRECTION GÉNÉRALE DES IMPÔTS ET DES DOMAINES DU SÉNÉGAL 31, rue de Thiong - BP 1561 - Dakar, Sénégal, Tél. : (+221) 33 889 20 02 - Fax : (+221) 33 823 21 29 www.impotsetdomaines.gouv.sn

DIFCOM/DF - PHOTO : DR

Cheikh Ahmed Tidiane BA


Le Plus de J.A. Sénégal sport

Génération Foot, une fabrique de pros Les Sénégalais Papiss Cissé, Sadio Mané et Diafra Sakho, le Togolais Emmanuel Adebayor… En partenariat avec le club français FC Metz, l’académie créée par Mady Touré forme des champions.

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a reconversion est une préoccupation majeure des sportifs de haut niveau. Surtout s’ils n’ont pas amassé assez d’argent durant leur carrière pour s’assurer une retraite tranquille. Mady Touré, qui a joué pour des clubs français avant de devoir mettre fin prématurément à son activité à cause d’une blessure, connaît bien le problème: « Je me suis retrouvé un peu face à une page blanche. J’ai travaillé avec Nancy pour observer et, éventuellement, proposer des joueurs africains que j’aurais repérés. Quand le club est descendu en Ligue 2, cette collaboration s’est arrêtée. Ce qui m’a poussé à créer Génération Foot, en 2000, c’est de voir des jeunes arriver en Europe et se retrouver délaissés ou en difficulté pour trouver un club. » TÊTE DE GONDOLE. Sans véritables

moyens pour faire vivre un projet auquel « pas grand monde ne croyait », avoue-t-il, Mady Touré trouve une oreille attentive auprès du club lorrain de Metz (est de la France), où il fait admettre Dino Djiba, un grand espoir du football sénégalais vite usé par les blessures, Babacar Gueye, aujourd’hui en Chine, et Emmanuel Adebayor, le fantasque attaquant togolais. « Au départ, il n’y avait pas de partenariat entre Génération Foot et le FC Metz. Je galérais beaucoup pour faire vivre mon académie… Quand je venais en France, j’avais du mal à me payer une chambre d’hôtel », se souvient Mady Touré. Avec Gueye, Djiba et Adebayor en tête de gondole, il prouve aux dirigeants messins que son académie, malgré des moyens limités, obtient des résultats. Et Carlo Molinari, le président historique du FC Metz, décide de donner un coup d’accélérateur aux relations entre son club et Génération Foot. « À l’époque, l’académie était loin d’être aussi structurée que maintenant. Elle était située dans le centre de Dakar, les joueurs vivaient encore chez leurs parents », raconte Bernard Serin, qui a succédé à Molinari en 2009. n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

L’industriel, PDG du groupe international Cockerill Maintenance & Ingénierie (CMI), rappelle aussi que ce partenariat a plusieurs fois failli s’arrêter. « La question s’est posée quand le FC Metz a été relégué en Ligue 2 ou en National, alors même que Mady Touré avait trouvé un terrain de 16 hectares près du lac Rose [à Deni Biram N’Dao, à 20 km à l’est de Dakar]. Des travaux de modernisation avaient été entrepris, mais ont dû être suspendus. En effet, nous allouons un budget annuel à Génération Foot, mais il est évident que nosressourcesnesontpaslesmêmesselon la division dans laquelle nous évoluons. La question s’est encore posée quand la réglementation Fifa a changé – désormais, un club européen ne peut plus faire venir un joueur africain avant ses 18 ans [contre 15 ans auparavant] –, mais nous avons décidé de poursuivre le partenariat. Au départ, c’était un centre de préformation. Or, avec le changement de statuts, c’est devenu un centre de formation. » Aujourd’hui, Génération Foot dispose de structures modernes et fonctionnelles, inauguréesfin2013àDeniBiramN’Dao(le centre Amara-Touré), où elle accueille ses 120 pensionnaires, âgés de 13 à 19 ans. « Il y a des terrains gazonnés et parfaitement entretenus, une salle de musculation, un servicemédical,desbâtimentspourhéberger les jeunes et des salles de classe, car nous voulons qu’ils suivent une scolarité normale, tient à souligner Bernard Serin. Certains deviendront professionnels en Europe, d’autres resteront en Afrique et pourront éventuellement y jouer et gagner un peu d’argent. Mais il faut aussi penser à ceux qui ne seront pas pros : ils doivent apprendre un métier. L’académie dispose de locaux administratifs et d’une cafétéria où les jeunes peuvent avoir accès à une alimentation équilibrée. » MODÈLE. Mais si le FC Metz injecte tous

les ans une somme que ni Bernard Serin ni Mady Touré n’ont souhaité dévoiler, c’est qu’il espère un retour sur investissement

© académie génération foot

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en misant sur les futurs transferts. « À Génération Foot, qu’Olivier Perrin dirige depuis plus de deux ans, les joueurs sont formésselonlesmêmesprincipesqueceux dispensés dans notre centre de formation. Ainsi, en arrivant à Metz, ne sont-ils pas trop perturbés, ajoute Philippe Gaillot, le directeur général adjoint messin. Nous voulons faire venir un ou deux joueurs par an. On ne prend que les meilleurs. Ils intègrent Metz à 18 ans et poursuivent leur formation afin de se préparer à évoluer au niveau professionnel. L’objectif est de les transférer dans des clubs plus huppés. » Ce modèle économique a déjà permis au club messin, et donc à Génération Foot, de récupérer des sommes importantes. Plusieurs joueurs sénégalais, aujourd’hui tous internationaux, ont ainsi transité par la Lorraine avant de s’exporter à l’étranger. Papiss Cissé, actuellement à Newcastle United (Royaume-Uni), a transité par le SC Fribourg (Allemagne), accompagné par Fallou Diagne (qui évolue à Rennes). Plus récemment, Sadio Mané a été acheté par les Autrichiens de Salzbourg avant d’être revendu aux Anglais du FC Southampton. Et Diafra Sakho a quitté Metz en août 2014 pour West Ham et la Premier League anglaise. jeune afrique


À contre-courant À pICoRER sANs ModéRATIoN

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 Le centre accueille 120 pensionnaires, âgés de 13 à 19 ans.

Des transferts qui ont rapporté un peu plus de 18 millions d’euros au FC Metz. AFFAIRE RENTABLE. « L’argent récolté est ventilé entre Génération Foot et le FC Metz. Cela nous permet d’amortir nos investissements au Sénégal », explique le président messin. Et quand Mané ou Cissé passent de l’Autriche et de l’Allemagne à l’Angleterre, le FC Metz touche un intéressement forcément bienvenu dans le contexte économique difficile que connaissent beaucoup de clubs français. « Génération Foot est aujourd’hui une affaire rentable, même si on ne peut pas se permettre de rester trop longtemps sans sortir de joueurs ayant un gros potentiel et que nous savons capables de faire carrière en Europe », confie Mady Touré, qui n’a désormais plus de difficultés pour se payer une chambre d’hôtel quand il vient en France. Son académie, qui a mis en place un maillage efficace sur le territoire sénégalais, ne s’interdit pas de regarder ce qui se passe au-delà des frontières du pays de la Teranga. Les réseaux dont disposent Mady Touré et Olivier Perrin leur permettent de savoir si, au Mali, en Guinée, au Burkina Faso ou en Côte d’Ivoire, des adolescents jeune afrique

plus doués que la moyenne peuvent aspirer à intégrer Génération Foot. L’institution, dont l’équipe première évolue désormais en deuxième division sénégalaise, a également frappé un grand coup en remportant la Coupe nationale, ce qui lui donnera l’occasion de disputer pour la première fois de sa jeune histoire une compétition continentale en 2016 : la Coupe de la confédération. « Cette qualification et notre récente accession à la Division 2 vont peut-être nous ouvrir des portes. En Afrique, le sponsoring reste quelque chose d’assez marginal, nous essayons donc de trouver des financements supplémentaires. La réussite de Génération Foot en matière de formation est là. Et si l’équipe professionnelle fait parler d’elle au Sénégal et en Afrique, cela peut attirer de nouveaux partenaires », espère Bernard Serin. Le président reçoit également quelques appels venus de l’étranger, émanant de clubs alertés par la réussite de ce partenariat entre Metz et l’académie sénégalaise. « Cela donne des idées… Certains clubs, notamment portugais, s’intéressent à notre modèle économique et viennent prendre des renseignements. » ● ALExIs BILLEBAuLT

L

e Sénégal ne se découvre pas au pas de course, les yeux rivés sur un guide touristique. Il faut enlever sa montre et prendre le temps. Le temps d’engager la conversation avec les Sénégalais et de se lancer dans des débats passionnés sur la politique ou le foot, le temps d’échanger des recettes de cuisine autour d’un bon mafé ou d’un poulet yassa, le temps de siroter un bissap ou un thé à la menthe », écrit Christophe Parayre. Journaliste à l’Agence France-Presse, dont il a dirigé le bureau régional de Dakar de 2006 à 2010, il livre son Dictionnaire insolite du Sénégal – en même temps que son amour pour le pays et ses habitants.Truffé d’informations pratiques, sérieuses et décalées, cet abécédaire thématique tire le portrait de quelques grands hommes (Léopold Sédar Senghor, Abdou Diouf, Abdoulaye Wade, Macky Sall) et salue les « citoyens qui se mobilisent pour la liberté de penser et d’écrire ». D’une plume alerte, il virevolte de traditions religieuses en spécificités culturelles, avec des entrées sur les confréries religieuses, la lutte sénégalaise, le rythme du mbalax ou le yaboy (sardinelle) du thieboudiène, décryptant les particularités de la langue wolof et quelques truculentes expressions franco-sénégalaises du quotidien. Un régal. ● CéCILE MANCIAux

Dictionnaire insolite du Sénégal, Christophe Parayre, éd. Cosmopole, 158 pages, 11 euros n o 2865 • du 6 au 12 décembre 2015

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