Sénégal Peut-on encore sauver la corniche ?
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 58e année • no 2962 • du 15 au 21 octobre 2017
jeuneafrique.com
Pétrole Pourquoi les majors ne connaissent plus la crise DOSSIER
Femmes d’affaires et plafond de verre
OLUSEGUN OBASANJO
« 10 ans au pouvoir, ça suffit »
Ouattara et Soro, Kabila, Talon, Biya, élections, mandats, violence, aspirations de la jeunesse… Droit dans ses bottes, l’ancien chef de l’État nigérian, devenu médiateur au long cours, passe en revue les dirigeants africains et les débats du moment. Interview exclusive. ÉDITION AFRIQUE SUBSAHARIENNE France3,80€•Algérie250DA•Allemagne4,80€•Autriche4,80€•Belgique3,80€•Canada6,50$CAN•Espagne4,30€•Éthiopie67birrs•Grèce4,80€•Guadeloupe4,60 € Guyane 5,80 € • Italie 4,30 € • Luxembourg 4,80 € • Maroc 25 DH • Martinique 4,60 € • Mauritanie 1200 MRO • Mayotte 4,60 € • Norvège 48 NK • Pays-Bas 4,80 € Portugal cont. 4,30 € • Réunion 4,60 € • RD Congo 6,10 $ US • Royaume-Uni 3,60 £ • Suisse 6,50 FS • Tunisie 3,50 DT • USA 6,90 $ US • Zone CFA 2000 F CFA • ISSN 1950-1285
Prochaine édition
Abidjan 26-27 MARS 2018
Shaping the future of Africa
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Focus
Femmes d’affaires
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Un leadership engagé
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Encore rares au sein des états-majors, les dirigeantes s’impliquent pour permettre à davantage de femmes d’atteindre les plus hautes fonctions.
La dirigeante de Telcar Cocoa, Kate Fotso, s’exprime au dernier Forum, à Genève. RÉMY DARRAS
L
a soif d’égalité et de reconnaissance chevillée au corps, ces femmes ont toutes une ambition commune : participer au développement du continent. De Binta Touré, directrice générale d’Oragroup, à Rosemary Yeboah, directrice exécutive d’Ecobank Ghana, en passant par Ibukun Awosika, directrice de First Bank of Nigeria, et Janine Diagou, PDG de l’assureur NSIA, de nombreuses dirigeantes africaines ont pris part en mars à Genève aux débats du dernier Africa CEO Forum. L’occasion pour Tania Holt, associée chez McKinsey à Johannesburg, auteure en 2016 du rapport « Women Matter Africa » (« les femmes comptent en Afrique »), de rappeler que, « bien que 40 % des postes de middle management soient occupés par des femmes sur le continent, elles ne représentent que 5 % des CEO ». « Beaucoup travaillent à chaque échelon, mais peu auront la JEUNE AFRIQUE
possibilité d’atteindre le niveau straépanouissement dans la sphère pritégique », poursuit Madeleine Berre, vée. « Mon employeur estimait que, du fait de ma maternité, je n’étais pas en ministre gabonaise du Commerce, qui, après avoir accompli ses études au Gabon mesure de suivre nombre de dossiers. On et en France, a passé dix ans chez PwC m’a enlevé le suivi de certains secteurs : j’ai été discriminée », témoigne ainsi avant de devenir directrice juridique de Madeleine Berre. L’ancienne patronne Deloitte, à Libreville. Et d’évoquer les des patrons gabonais innombrables obstacles estime avoir perdu trois qui bloquent, trop souElles se cooptent vent encore, l’évolution ans de carrière en raison de ses maternités. de leur carrière et leur pour intégrer C’est avant tout, pour accès à des postes de preles conseils Rosemary Yeboah, une mier plan. À commencer d’administration. par les préjugés tenaces affaire d’éducation « qui sur leurs compétences. cantonne les filles à un « Lorsque j’allais voir la rôle secondaire et ne les clientèle, on me demandait souvent si incite que trop peu à prendre la parole j’étais bien la directrice générale de la en public ». filiale. Cela n’était pas naturel qu’une Mais le principal aspect se dégageant de ces échanges, c’est que les femme conduise une délégation », poursuit la ministre. dirigeantes africaines savent prendre Une fois en fonction, les femmes leur destin en main et montrer que la peinent ensuite à concilier pleinesituation n’a rien d’insurmontable. Si, ment réussite professionnelle et la plupart du temps, elles se cooptent N 0 2962 • DU 15 AU 21 OCTOBRE 2017
Focus centrale. Des initiatives que ces diripour intégrer des conseils d’administrageantes comptent développer dans les tion, « elles ont aussi su créer des outils, prochains mois. « Ces femmes avec de comme le Boardroom Africa, lancé par hautes responsabilités la Sud-Africaine Marcia représentent toutes les Ashong, qui doit constituer Les dirigeantes une base de données de femmes, car leurs déciafricaines femmes très qualifiées, ou sions affectent le continent savent prendre le Women’s Investment entier », estime Oulimata Club Sénégal, dont l’obSarr. leur destin en jectif est de devenir un Ayant noué des liens main. étroits durant la session, capital-risqueur consacré aux projets portés par la elles ont émis plusieurs recommandations en vue d’améliorer gent féminine », souligne Oulimata Sarr, conseillère régionale d’ONU Femmes l’accès des femmes aux postes de décipour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique sion, prônant la systématisation des
mentors, la promotion de la flexibilité des horaires pour « établir un bon équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle », et la mise en place de mesures promouvant la mixité dans les conseils d’administration, comme cela a déjà été fait au Rwanda. Mais, selon Jennifer Blanke, vice-présidente de la BAD pour l’agriculture et le développement humain et social, « il ne s’agit pas seulement de gravir les échelons mais de savoir quoi faire une fois arrivée au sommet », et donc de construire une autre manière de manager. « Un leadership engagé », juge Oulimata Sarr.
Madeleine Berre
MinistregabonaisedelaPromotiondesinvestissementsprivés,duCommerce,duTourismeetdel’Industrie
« On ne peut pas être un leader sans réussir sa vie privée »
M
p p p inistre depuis 2015,, passée par les cabiinets PwC et Deloitte avant dee devenir la présidente de la Confédératiion patronale gabonaise, Madeleine Berree souligne les difficultés des femmes à con ncilier vie professionnelle et vie privée. E : Comme vous l’avez JEUNE AFRIQUE indiqué durant lle CEO Forum, vos trois s ont coûté trois ans de maternités vous nelle. Quels obstacles vie professionn avez-vous rencon ntrés sur votre chemin? ERRE : C’est une attitude MADELEINE BE
souvent inconscciente chez les hommes et à laquelle les feemmes cèdent sans s’en rendrecompte.On nnousretiredesdossiers, on nous met de côté. Dans un univers dominé par la com mpétition, les femmes préfèrent donc parfois renoncer à leur n ne peut pas être un maternité. Or, on leader sans réusssir sa vie privée. vous surmonté ces Comment avez-v difficultés ?
Au début, j’ai pris sur moi. Puis, j’ai carrément dû changer nt de travail. d’environnemen onsciente, Sans stratégie co urée chez je me suis entou Deloitte de femm mes que j’ai recrutées pour leeurs compétences. Elles aavaient les N 0 2962 • DU 15 AU 21 OCTOBRE 2017
j meilleurs CV. Je n’ai jamais eu la volonté de les culpabiliser même si j’étais très exigeante avec elles. La maternité ne doit plus
p ç comme un facteur de baisse être perçue de rentabilité. Dee leur côté, les femmes ne doivent pas mon ntrer que leur maternité est fatiggante. Elles ne doivent pas L’ancienne la pensser elles-mêmes comme directrice un retrrait. Il m’est arrivé de rapgénérale du peler l’une de nos meilleures cabinet collabo oratrices qui était en congé juridique et matern nité alors que venait de fiscal Deloitte a été à la tête tomberr une importante mission de la chez l’u un de nos plus gros clients Confédération pétrolieers. L’amour de leur travail patronale leur peermettait d’y arriver. gabonaise pendant deux ans.
Peut-on changer les mentalités ?
Celaa va devenir une nécessité. Dee plus en plus de femmes parvien nnent à des postes à responsab bilité, et ce de plus en plus jeunes.. Cela passe par l’éducation, il ffaut confier davantage de rôles daans la tenue de la maison aux jeu unes garçons. Dans notre envirronnement social et culturel, les femmes ne doivent plu us, comme c’est trop sou uvent le cas, demeurer can ntonnées à des fonctions sub balternes telles que cuisin ner ou assurer les tâches mén nagères. DR
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Pro opos recueillis par RÉMY DARRAS JEUNE AFRIQUE
Femmes d’affaires
Rosemary Yeboah
Directrice exécutive d’Ecobank Ghana
« Les femmes s’intéressent plus à l’impact de leur action »
JEUNE AFRIQUE : Comment les femmes managent-elles ? ROSEMARY YEBOAH : Nous écoutons
plus, nous nous concentrons davantage et nous hiérarchisons mieux les priorités. Et il y a aussi une différence de mentalités. Si les hommes veulent réussir à tout prix et faire de l’argent, les femmes s’intéressent plus à l’impact de leur action. Elles développent une vision à long terme. Les Africaines font-elles exception ?
Rien ne distingue vraiment leur management de celui de leurs consœurs aux États-Unis ou au Royaume-Uni. Bien
entendu, l’environnement africain est assez particulier, et elles s’y adaptent bien. Comment s’imposent-elles ?
Souvent par leur passion pour leur métier. Une femme doit combattre sans arrêt pour prendre le pouvoir, pour faire valoir son point de vue, montrer aux hommes qu’elle n’est pas faible. Dans mon équipe, je suis seule parmi dix hommes. Sans passion, je renoncerais à la première difficulté.
DR
R
osemary Yeboah a fait ses études en Europe et travaillé à Londres, au Crédit suisse. Avant de devenir directrice générale de la Standard Chartered Bank au Botswana.
Comment aidez-vous les femmes ?
Au niveau junior, il y a 40 % d’hommes et 60 % de femmes. Très peu d’entre elles parviennent à des postes de décision. Les possibilités d’avancer sont limitées. Certains postes sont monopolisés par les hommes, et il est dur de les en déloger. Il faut faire valoir ses qualités en permanence. Le rôle du mentor doit être renforcé.
En quoi les épreuves de vos débuts vous influencent-elles ?
Être l’une des rares femmes africaines de la City m’a appris à lutter. J’ai travaillé plus, je me suis engagée plus. J’ai gagné en confiance sans devenir arrogante. Cela m’a rendue plus forte.
Propos recueillis par R.D.
Abidjan
WOMEN
26 - 27 MARS 2018
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1/2 JOURNÉE DÉDIÉE À L’INITIATIVE
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