Pdf ja2977 du 28 janvier 2018 au 3 février 2018 gf suisse afrique

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ENQUÊTE

INTERVIEW EXCLUSIVE IDIR : « Il est temps que l’Algérie s’ouvre aux autres »

FRANCS-MAÇONS : LE POUVOIR DES FEMMES

NOUVELLE FORMULE

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL NO 2977 DU 28 JANVIER AU 3 FÉVRIER 2018

SUISSEAFRIQUE Une relation en or Spécial 8 pages

SÉNÉGAL

De père en fils ?

De tous les dauphins potentiels d’Abdoulaye Wade au sein du PDS, seul son fils, Karim, en exil au Qatar, a été adoubé par l’ancien chef de l’État. Il est même le candidat officiel du principal parti d’opposition pour la présidentielle de 2019…

ÉDITION INTERNATIONALE ET AFRIQUE DE L’OUEST

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France 3,80 € Algérie 290 DA Allemagne 4,80 € Autriche 4,80 € Belgique 3,80 € Canada 6,50 $ CAN Espagne 4,30 € Éthiopie 67 birrs Grèce 4,80 € Guadeloupe 4,60 €

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Guyane 5,80 € Italie 4,30 € Luxembourg 4,80 € Maroc 25 DH Martinique 4,60 € Mauritanie 1 200 MRO Mayotte 4,60 € Norvège 48 NK Pays-Bas 4,80 €

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Portugal cont. 4,30 € Réunion 4,60 € RD Congo 6,10 $ US Royaume-Uni 3,60 £ Suisse 6,50 FS Tunisie 3,50 DT USA 6,90 $ US Zone CFA 2 000 F CFA ISSN 1950-1285


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SUISSE-AFRIQUE Une relation en or

La confédération entretient un lien particulier avec le précieux métal. Mais pas que. Ses entreprises jouent aussi un rôle non négligeable dans le secteur du cacao ou encore dans celui du pétrole. jeuneafrique no 2977 du 28 janvier au 3 février 2018

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Alain Faujas

Heureux comme un Africain en Suisse a Confédération helvétique n’est pas particulièrement accueillante pour les Africains. Dans sa générosité – et surtout à cause de la raréfaction de sa main-d’œuvre –, elle va augmenter d’un poil son quota d’immigrés hors Union européenne en 2018 : 500 personnes de plus, soit un total annuel de 8 000 individus à se partager avec le reste de la planète. Cela ne fait pas lourd pour les Africains qui rêvent de s’installer dans le plus clean des meilleurs des mondes. Pour tenter de forcer la porte de ce luxueux bunker, ils peuvent choisir la rude voie de l’immigration illégale. Comme ce Nigérian débarqué clandestinement en 1999 et renvoyé dans son pays l’année suivante, mais revenu en 2003 et aujourd’hui à la tête de la première webtélévision communautaire du pays, soutenue qui plus est par la ville de Berne. Un choix risqué… Les sages du Groupe d’experts de la confédération prédisent une croissance de 2,3 % en 2018, après 1 % en 2017, grâce à la reprise mondiale et malgré les lubies de Donald Trump. Médiocre? Oui, vu depuis l’Éthiopie, qui galope à 7 % l’an. Mais une hausse de 2,3 % de beaucoup, c’est tout de même mieux que 7 % de peu, d’autant que le chômage en Suisse devrait chuter à 2,9 %, taux stupéfiant ailleurs sur la planète, a fortiori sur le continent. Sans oublier que le prix astronomique de l’immobilier helvétique devrait se modérer sous l’effet d’une baisse de la demande. Alors, heureux comme un Africain en Suisse? Pour relativiser cette image d’eldorado, certains avanceront que le pouvoir d’achat du salarié n’y bougera guère et que l’affaiblissement du franc suisse par rapport aux

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autres monnaies (– 6 % en 2017) réduira la valeur des envois au village en francs CFA, son petit-cousin, via Western Union. Si l’on n’adopte pas le point de vue du travailleur africain, mais celui du milliardaire nigérian ou de la femme angolaise la plus riche du continent, qui cherchent à mettre leurs sous à l’ombre des banques de Zurich et dans les ports francs de Genève, il est vrai que des nuages pointent là aussi à l’horizon.

De plus en plus transparent

Le formidable marché suisse de l’or est de plus en plus transparent, et le « métal des dieux » venu du Burkina Faso ou de Mauritanie y est raffiné sans trucage ni dissimulation. Mieux : à partir de l’automne 2018, le fisc helvétique échange automatiquement des informations bancaires avec ses partenaires étrangers. On rétorquera que les fiscs de Tunis ou de Victoria (Seychelles) ne sont encore ni très réactifs ni bien équipés pour débusquer les fraudeurs et les « blanchisseurs » de tout poil. Il n’empêche : les valises de dollars, d’or et de diamants trimballées en Suisse par le Nigérian Abacha ou le Zaïrois Mobutu sont à ranger définitivement au rayon de la préhistoire financière du continent. Les fortunes africaines qui reviennent à Genève après avoir transité par les sociétés-écrans des paradis fiscaux peuvent se faire du souci à terme. Le secret bancaire helvétique n’est plus ce qu’il était. En plus, plane toujours la menace d’un enquêteur des Paradise Papers ou des Offshore Leaks traquant les magouilles fiscales et financières. Et c’est tant mieux pour le développement du continent.

74 ENJEUX

Tout ce qui brille…

78 Interview de

Pascal Couchepin

Président de la Confédération helvétique en 2003 et en 2008

80 ÉCONOMIE

Oryx gonflé à bloc

81 L’homme qui

valait des milliards Portrait de Jean-Claude Bastos de Morais

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UN VRAI TRÉSOR

Avec un stock de 1 040 tonnes en décembre 2017 – soit plus de 7 % des réserves internationales de la Banque nationale suisse –, la confédération détient la septième plus grande réserve officielle d’or du monde (après les États-Unis, l’Allemagne, l’Italie, la France, la Chine et la Russie) et la plus importante rapportée au nombre d’habitants.

OLIVIER CASLIN, envoyé spécial

O

«

n dit que les Suisses aiment l’argent. C’est une calomnie. Ils aiment l’or aussi », assure un vieil adage. Le constat semble toujours d’actualité. Fin 2014, plusieurs députés de la très conservatrice Union démocratique du centre réussissaient à mobiliser la nation lors d’une votation populaire pour lui demander de « sauver l’or suisse ». L’objectif était d’obliger la Banque nationale suisse (BNS) à posséder 20 % de ses actifs en or physique (contre moins de 8 % actuellement), stocké exclusivement en Suisse (alors que 30 % sont placés dans les banques centrales britannique et canadienne) et interdit de vente. Si l’initiative n’a pas recueilli la majorité, elle a trouvé auprès de la population « un certain écho, basé sur des peurs irraisonnées héritées des époques inflationnistes qui ont secoué le capitalisme européen », sourit un banquier genevois. Comme si le pays était encore traumatisé par la vente à marche forcée, entre 2000 et 2008, de plus de deux tiers de ses réserves, soit 1550 tonnes d’or, à la suite de la décision de Berne d’abandonner l’obligation constitutionnelle de couvrir 40 % de ses émissions monétaires en métal jaune. Que les citoyens suisses se rassurent: avec des réserves de 1040 t (lire ci-contre), la confédération reste le pays qui dispose du plus important stock d’or par habitant au monde, soit 128 g, loin devant les Libanais (48 g), les Allemands (42 g), les Français (38 g) et les Américains (26 g). La relation particulière qu’entretient la Suisse avec le métal précieux est encore plus ancienne que le système financier du pays. S’appuyant sur sa neutralité et sa stabilité politique, ainsi que sur la discrétion proverbiale de ses banquiers, la confédération s’est imposée au fil des siècles comme le refuge naturel d’une valeur qui l’est tout autant. En 1685, ses coffres abritaient l’or des huguenots contraints de fuir la France. Avant la Seconde Guerre mondiale, c’était celui des Juifs d’Europe qui trouvait asile dans les banques helvétiques. Viendra s’y ajouter, quelques années plus tard, l’or des nazis, qui transitera par la Suisse pour y être blanchi. La confédération est alors le seul pays d’Europe à accepter les lingots vendus par la Reichsbank, comme elle le fera avec l’or de l’apartheid quelques décennies plus tard, n’étant pas sommée de suivre l’embargo international décrété par les Nations unies envers l’Afrique du Sud, puisqu’elle n’est pas membre de l’organisation à l’époque.

Un lingotin de 250 grammes était coté 8 950 euros au 22 janvier.

BLOOMBERG VIA GETTY IMAGES

Réputation d’excellence

La confédération a ainsi été plusieurs fois pointée du doigt. Comme en 2012, lorsque le Conseil de sécurité de l’ONU épingle deux raffineries suisses, Argor-Heraeus et Metalor Technologies, pour l’achat, en 2005, de plusieurs tonnes d’or extraites clandestinement des mines de l’Ituri, dans une RD Congo alors en guerre. « La Suisse ne cherche pas à connaître l’origine ou les conditions de production de l’or qu’elle importe », regrette un responsable de l’ONG Trial International (établie à Genève), à l’origine des révélations sur l’or congolais – lesquelles se termineront par un non-lieu devant la justice helvétique. En 2014, c’est au tour de la raffinerie Valcambi de se faire prendre la main dans le sac pour avoir accepté de fondre 7 t de métal précieux sorties en contrebande du Burkina Faso via le Togo.



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durable, développé depuis 2003 avec l’ONG Rainforest Alliance. Si, en matière de production, Nespresso a les yeux tournés vers la zone orientale, la compagnie suisse regarde davantage vers l’ouest pour la distribution de ses produits. En dehors du marché très particulier de l’Afrique du Sud, Nespresso s’appuie sur des partenaires locaux en Égypte et au Maghreb et a ouvert ses premiers magasins au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Ghana et, dernièrement, au Gabon et à Maurice. « Avec des concepts identiques à ceux développés en Europe et en Amérique du Nord », préciset‑on au siège, qui travaille déjà sur d’autres implantations en Afrique, où il voit « un très fort potentiel ». OLIVIER CASLIN

ANITA LYNN BAUMANN

Central, acquis en 2012, situé dans la zone maritime de partage entre le Sénégal et la Guinée-Bissau. D’ici à 2020, Oryx y investira 100 millions de dollars pour forer deux puits. « Les résultats de la sismique 3D sont très prometteurs », s’enthousiasme JeanClaude Gandur, qui est un proche du président sénégalais Macky Sall – ils se sont côtoyés lorsque ce dernier était encore ingénieur pétrolier. Le Suisse, qui a passé une partie de son enfance en Égypte, consacre son temps libre à sa famille, à ses œuvres d’art et au mécénat, notamment à travers la Fondation Gandur pour l’art. Propriétaire de l’une des plus importantes collections privées d’antiquités égyptiennes du monde, il cherche un lieu pour la partager avec le plus grand nombre. En 2016, un vote défavorable des Genevois a mis un terme à son projet d’agrandissement du Musée d’art et d’histoire (sur des plans conçus par l’architecte français Jean Nouvel), mais il en faut plus pour le décourager. Depuis quelques années, Jean-Claude Gandur se passionne pour l’art moderne africain, dont il acquiert une vingtaine d’œuvres par an, misant sur son flair légendaire pour débusquer les artistes qui feront bientôt parler d’eux dans les salles des ventes.

Jean-Claude Bastos de Morais gère une partie du fonds souverain angolais.

L’homme qui valait des milliards Jean-Claude Bastos de Morais a la cinquantaine chic et décontractée. En digne descendant d’une lignée d’industriels suisses de l’horlogerie et de héros angolais de l’indépendance, l’entrepreneur né à Fribourg (où il a obtenu un master en gestion d’entreprise) est aussi passionné par les finances que par l’innovation, de préférence lorsqu’elles sont au service du développement socio-économique de l’Afrique. Depuis 2012, il gère une partie des milliards du Fundo Soberano de Angola (FSDEA, le fonds souverain angolais), dont son ami José Filomeno dos Santos, le fils de l’ex-chef de l’État angolais, assurait la présidence avant d’en être limogé, début janvier, par le successeur de son père, le président João Lourenço. Mais pas de quoi inquiéter Jean-Claude Bastos de Morais, le FSDEA pesant moins de 50 % des 8 milliards de dollars gérés par Quantum Global Group (QG), qu’il a créé en 2007 à Zoug (à 30 km au sud de Zurich) et dont il est le directeur général. Quantum, qui compte des bureaux en Suisse, en Angola et dans six autres pays du continent, regroupe des sociétés spécialisées dans l’assistance financière aux entreprises, la gestion d’actifs et de patrimoine privé, le conseil en investissement

et en immobilier. L’HelveticoAngolais est aussi directeur de Banco Kwanza Invest, la première banque d’investissement du pays lusophone, qu’il a fondée en 2008.

Innovation hybride

L’année suivante, pour soutenir encore plus activement l’entrepreneuriat local et les projets innovants dans les domaines de la gouvernance, de l’accès aux technologies et du développement social, il lançait l’African Innovation Foundation (AIF). Chaque année, celle-ci remet son Prix de l’innovation pour l’Afrique en partenariat avec la commission économique pour l’Afrique de l’ONU, afin de récompenser « ceux qui voient dans le continent une opportunité à saisir et non pas un défi à relever », explique Jean-Claude Bastos de Morais. Comme lui-même a su si bien le faire. Depuis deux ans, dans une ancienne savonnerie du plus grand quartier populaire de Luanda, il a installé La Fábrica de Sabão, le premier centre angolais d’innovation hybride, à mi-chemin entre le modèle classique, où l’innovation est protégée par la propriété intellectuelle, et le modèle « ouvert », où elle est partagée. O.C.

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