DÉCEMBRE 2021
GABON 2023, C’EST DÉJÀ DEMAIN
SPÉCIAL 30 PAGES
NO 3107 – DÉCEMBRE 2021
www.jeuneafrique.com
RD CONGO Tshisekedi compte ses forces MAROC-UE Le grand reset ?
Covid-19, crise économique, coups d’État… L’année qui s’achève n’incite guère à l’optimisme. Pourtant, de bonnes nouvelles émergent grâce à la détermination de quelques-uns, qui se battent pour une Afrique plus moderne, plus juste, innovante et fière d’elle-même. Portraits de ces pionniers qui, chacun dans son domaine, tirent le continent vers le haut.
Édition IA
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SPÉCIAL 20 PAGES
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UNE AUTRE IDÉE DE L’AFRIQUE
M 01936 - 3107 - F: 7,90 E - RD
JEUNE AFRIQUE N O 3 1 07
CÔTE D’IVOIRE Pourquoi Laurent Gbagbo redescend dans l’arène
UN PAYS, SES DÉFIS
PAPA MATAR DIOP / PRÉSIDENCE DU SÉNÉGAL
OBJECTIF SÉNÉGAL
Le chef de l’État, Macky Sall, sur le pont de WindouBosseabe, le 17 juin, jour de l’inauguration de l’édifice.
DIPLOMATIE
L’exception sénégalaise Macky Sall assumera au début de 2022 la présidence tournante de l’Union africaine, dans un contexte sécuritaire, politique, économique et sanitaire particulièrement délicat. Jusque-là épargné par le jihadisme et par les tensions politiques, peu touché par le Covid-19, Dakar pourra-t-il faire profiter le reste du continent de son expérience et de sa stabilité ? MEHDI BA
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A
u sein de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), le Sénégal fait figure de double exception. Parmi les quinze pays qui composent l’organisation, il est en effet le seul, avec le Cap-Vert, à n’avoir jamais connu de coup d’État depuis son indépendance, en 1960. Un statut de bon élève dans une classe très agitée, qui lui vaut une aura internationale faisant parfois grincer des dents certains « cousins à plaisanterie » influents de la sous-région. Le Sénégal est aussi – malgré sa position géographique périlleuse, aux portes du Sahel, et une population à 90 % musulmane – l’un des pays ouest-africains qui seront parvenus jusqu’ici à tenir à distance la menace jihadiste, quand le Mali, le Niger, le Burkina Faso, le Nigeria ou encore la Côte d’Ivoire ne l’ont pu.
Stabilité politique
Alors que le président Macky Sall s’apprête à prendre la présidence tournante de l’Union africaine (UA), en février 2022, succédant ainsi au Congolais Félix Tshisekedi, c’est donc un pays tout à la fois exemplaire et novice qui se trouvera confronté à des tourments qu’il n’a, lui-même, jamais éprouvés. Coup d’État au Soudan ; crise politique et militaire en Éthiopie; intervention du Rwanda et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) au Mozambique face aux Shebab; conflits latents au Mali ou en République centrafricaine ; foyers de rébellion toujours vivaces en RD Congo ; conflit entre l’Éthiopie, l’Égypte et le Soudan à propos du barrage sur le Nil… Le Sénégal aura fort à faire, tandis qu’à ses propres frontières deux régimes putschistes, désormais tenus par les militaires – la Guinée et le Mali –, sont actuellement suspendus par les instances de la Cedeao. « Exempt de coup d’État, le Sénégal, qui a connu deux alternances démocratiques depuis 2000, fait en effet figure d’exception dans la sousrégion », analyse Vincent Foucher, chercheur en science politique au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), rattaché au laboratoire Les Afriques dans le monde (unité
mixte associant le CNRS et Sciences Po Bordeaux), et fin connaisseur du Sénégal. « Grâce à cette singularité, le pays est devenu un partenaire privilégié pour un certain nombre d’acteurs internationaux. Il a de la présence et de l’influence dans les arènes internationales qui comptent : à la Cedeao, à l’UA, au Conseil de sécurité des Nations unies… Il peut en tirer un profit diplomatique face à ses voisins turbulents, tenter d’être une sorte de “patron” régional. Tantôt il se place en médiateur ou en facilitateur auprès d’un nouveau régime encore fragile, comme Abdoulaye Wade avait essayé de le faire en Mauritanie, après le coup d’État de 2008, ou en Guinée, après la prise de pouvoir de Moussa Dadis Camara, et comme Macky Sall, en Guinée-Bissau, après le coup d’État de 2012. Tantôt il adopte une posture raide, à l’instar de Macky Sall face à Yahya Jammeh, en Gambie, à la fin de 2016. » Îlot de stabilité politique, le Sénégal est entouré de pays dont les soubresauts se répercutent sur son propre
C’est un pays à la fois exemplaire et novice qui se trouvera confronté à des tourments qu’il n’a, lui-même, jamais éprouvés. équilibre. Lorsque le Mali, son principal partenaire économique – dont les importations transitent surtout par le port de Dakar –, est placé sous embargo par la Cedeao, Dakar en subit le contrecoup. C’est d’ailleurs pourquoi Macky Sall s’était initialement montré réticent à imposer une telle mesure à son voisin au lendemain du putsch du 18 août 2020. Sa position a toutefois évolué : « Le président n’accepte pas que les putschistes cherchent à jouer avec les délais, confie l’un de ses proches. Ceux-ci ne comptent pas rendre le pouvoir de sitôt, et ça le contrarie beaucoup. » Quant à la relation de son pays avec la Guinée, laquelle a connu des hauts et des bas au cours des dernières
années – le président déchu, Alpha Condé, soupçonnant Dakar de se montrer trop accueillant envers ses opposants et, en particulier, envers son vieux rival, Cellou Dalein Diallo –, elle aura tout de même apprécié une avancée depuis l’arrivée au pouvoir du colonel Mamadou Doumbouya. Le 29 septembre, la frontière entre les deux pays a en effet été rouverte, après un blocus qui aura duré près d’un an.
Solutions communes
Quant à la Gambie, qui a longtemps constitué une base arrière pour l’un des maquis du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), et dont le président de l’époque, Yahya Jammeh, entretenait avec Dakar des relations pour le moins fraîches, elle semble rejoindre une zone de turbulences à l’approche de la prochaine présidentielle : après avoir promis qu’il ne se représenterait pas, Adama Barrow vient de se porter candidat – soutenu par le parti de l’ancien dictateur. « Le premier défi qui se posera à Macky Sall sera sécuritaire », estime l’économiste et analyste politique Gilles Olakounlé Yabi, fondateur du think tank citoyen Wathi. « Outre la situation politique au Mali et en Guinée et la persistance du jihadisme dans la sous-région, les situations en Éthiopie [pays qui abrite le siège de l’UA], au Mozambique et au Soudan, actuellement en crise, ne seront sans doute toujours pas normalisées lorsque le Sénégal prendra la présidence tournante de l’organisation. » Prélude aux défis qu’il devra relever à la tête de l’UA, la septième édition du Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique doit être présidée, les 6 et 7 décembre, par Macky Sall. Y assisteront notamment, outre un panel transdisciplinaire d’experts, ses homologues Cyril Ramaphosa (Afrique du Sud), Umaro Sissoco Embaló (Guinée-Bissau) et Mohamed Bazoum (Niger), ainsi que la ministre française de la Défense, Florence Parly. Parmi les thématiques qui seront débattues : la gestion collective des pandémies, l’impact de la démographie et du changement climatique en Afrique, la cybersécurité et la lutte contre la désinformation, la JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
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OBJECTIF SÉNÉGAL
MANASSE WONDAMU HAALU/ANADOLU AGENCY VIA AFP
permettraient de s’entendre sur des règles communes, démocratiques et consensuelles », poursuit notre source. « Un autre dossier prioritaire porte sur les réformes internes de l’UA, estime Gilles Olakounlé Yabi. À l’époque où il assurait la présidence de l’organisation, le président Paul Kagame avait formulé des propositions relativement importantes, notamment la focalisation de l’UA sur un nombre plus réduit de priorités et sur les moyens de parvenir à un financement de l’organisation et des projets qu’elle met en œuvre qui émanerait davantage de l’Afrique ellemême que de l’extérieur. » Macky Sall lors de l’ouverture du 33e Sommet de l’Union africaine, à Addis-Abeba, le 9 février 2020.
montée de l’extrémisme violent ou encore le contrôle et la maîtrise des espaces maritimes. Et, actualité oblige, les coups d’État qui secouent à intervalles réguliers le continent. Selon Aïssata Tall Sall, la ministre sénégalaise des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, qui exposait à Dakar, le 5 novembre, les enjeux du sommet, « un coup d’État ne naît pas seulement parce qu’il y a de l’insécurité, mais […] lorsqu’il survient il s’accompagne d’une certaine forme d’insécurité. Ces questions seront évoquées lors du sommet afin d’élaborer des solutions communes à l’échelle africaine ». Mais les enjeux auxquels Macky Sall sera bientôt confronté ne sauraient se limiter aux coups d’État. « Parmi les dossiers importants qui l’attendent à l’UA, il y a la gestion du dossier Covid19 et la relance économique consécutive à la pandémie, poursuit Gilles Olakounlé Yabi. L’UA entend jouer un rôle important dans cette impulsion au profit des économies du continent, qui ont été très affectées par la crise sanitaire. Le président Macky Sall a d’ailleurs été mobilisé régulièrement, tout comme son homologue sud-africain Cyril Ramaphosa et d’autres, sur la gestion immédiate de la crise économique provoquée par la situation sanitaire et les leçons à en tirer sur le plan économique. Des initiatives ont par ailleurs vu le jour pour stimuler la production locale de vaccins, centraliser l’achat de médicaments
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et d’équipements médicaux… Elles contribuent à réhabiliter l’UA en montrant qu’elle est une organisation utile, concentrée sur des dossiers concrets. » Quant aux priorités que se donne Macky Sall, selon l’un de ses proches, elles ne manquent pas : « Il y a l’allègement de la dette, car il considère que le contrôle de celle-ci ne suffit pas à injecter les ressources nécessaires pour financer les économies africaines, a fortiori au sortir d’une pandémie mondiale qui a ralenti la croissance partout. Une autre de ses priorités est de développer des pôles régionaux dans différents domaines: par exemple un pôle orienté sur la santé, que ce soit au Sénégal, au Ghana ou au Nigeria; un autre sur les productions manufacturières ou logistiques; et ainsi de suite. » Autre dossier important pour le chef de l’État sénégalais, la Grande Muraille verte, cette barrière écologique censée lutter contre les effets du changement climatique et la désertification en reliant onze pays du continent, d’ouest en est, à l’initiative de l’UA. Les chantiers ne manquent pas : densifier les infrastructures de transport, favoriser l’intégration des économies africaines, dynamiser la Zone de libre-échange continentale africaine (Zleca)… Enfin, comment œuvrer à la pacification politique sur un continent où les règles du jeu font débat tous les quatre matins? « Macky Sall aimerait promouvoir des procédures qui, à défaut d’être uniformes,
Savoir ne pas aller trop loin
Le Sénégal aura-t-il, par ailleurs, des conseils à donner en matière de transition pacifique et démocratique – lui qui en a connu deux au cours des vingt dernières années –, afin d’épargner au continent la litanie des coups d’État, qui le font passer pour une zone de non-droit perpétuelle? « Tous les pays ont une histoire particulière, et le parcours du Sénégal a notamment été marqué par la personnalité de son premier président, Léopold Sédar Senghor. La personnalité et le comportement des personnes placées dans une position clé déterminent la trajectoire politique de leur pays, selon Gilles Olakounlé Yabi. Il ne faut pas oublier non plus la qualité des ressources humaines qui œuvrent au service de l’État sénégalais, chez les civils comme chez les militaires – je pense notamment au Prytanée militaire de Saint-Louis, un établissement d’excellence au Sénégal. Dès lors qu’un État ne crée pas les conditions politiques propices à un coup d’État, c’est-à-dire donnant aux militaires l’impression qu’ils peuvent passer à l’action et être acceptés par une partie de la population et des acteurs régionaux et internationaux, le passage à l’acte est bien plus difficile. » En résumé, toujours selon Gilles Olakounlé Yabi, les dirigeants sénégalais qui se sont succédé depuis 1960 « ont su ne pas aller trop loin », évitant ainsi toute tentative de renversement par la force. Macky Sall devra naviguer, de Charybde en Scylla, parmi les nombreux écueils d’un continent tourmenté.
COMMUNIQUÉ
« L’APPARTENANCE À L’UN DES PREMIERS GROUPES BANCAIRES AFRICAINS DE PLUS DE 127 ANS NOUS PERMET D’OFFRIR UNE MEILLEURE EXPÉRIENCE CLIENT » Entretien avec OMAR DIOUM
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SYLVAIN CHERKAOUI POUR JA
OBJECTIF SÉNÉGAL
POLITIQUE
Élections locales, à quitte ou double La bataille fait désormais rage pour ces scrutins de mi-mandat, les premiers depuis la victoire de Macky Sall en 2019. Des échéances que ni la majorité ni l’opposition n’entendent prendre à la légère. MARIÈME SOUMARÉ, À DAKAR
L
a candidature du protégé de Khalifa Sall vient tout juste d’être déposée officiellement, et le voilà reparti dans l’arène. Ce vendredi 5 novembre, l’ancien maire de Dakar fait face à la presse pour défendre son camarade socialiste Barthélémy Dias, investi deux jours auparavant pour la capitale par sa coalition, et convoqué le 10 novembre par la justice dans le cadre d’une procédure en appel. Khalifa Sall, qui ne croit pas à la coïncidence, critique alors une « volonté manifeste du régime de restreindre illégalement les droits à la liberté de mouvement d’un candidat » et dénonce « l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques ». Comme une vieille rengaine dans un pays où certains opposants – Khalifa Sall compris – ont déjà
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pu cumulé mandats électifs et séjours en prison. La campagne des élections locales du 23 janvier 2022 n’avait pas encore officiellement commencé que celles-ci cristallisaient déjà les tensions et les ambitions d’une classe politique prête à tout pour aborder la présidentielle de 2024 en position de force. Qu’ils appartiennent à la majorité ou à l’opposition, le choix des candidats a résulté de mois de discussions et de négociations au sein des différents partis politiques. Pour la coalition présidentielle Benno Bokk Yakaar (BBY), il s’agit avant tout de conserver son hégémonie à travers le territoire. Une hégémonie qui a peu à voir avec la déroute de la coalition au dernier scrutin local, en 2014, et qui doit surtout beaucoup aux ralliements d’anciens opposants à la
majorité. « 2014, c’était une première expérience, mais les choses seront différentescettefois-ci,assureunconseiller du chef de l’État. Nous sommes conscients que l’opposition essaie de renverser le rapport des forces et que l’avenir du pouvoir est en jeu. »
Des poids lourds en embuscade
Les adversaires de Macky Sall espèrent ainsi (se) prouver que, malgré les ralliements successifs engrangés par Macky Sall depuis son arrivée au pouvoir, en 2012, sa coalition a des failles. En voulant récupérer sous sa bannière une myriade de partis et de personnalités, Macky Sall a aussi choisi de s’entourer de poids lourds du paysage politique sénégalais, dont certains pourraient bien convoiter son propre siège. Saura-t-il conserver leur soutien tout en contenant leurs ambitions?
OBJECTIF SÉNÉGAL
SYLVAIN CHERKAOUI POUR JA
OUSSEYNOU SAMB/CREATIVE COMMONS
De g. à dr., Barthélémy Dias, maire de Mermoz-Sacré-Coeur ; Khalifa Sall, ancien maire de Dakar ; et Abdoulaye Diouf Sarr, ministre de la Santé et de l’Action sociale.
Lors du remaniement ministériel de novembre 2020, le chef de l’État s’était séparé de fidèles jugés présidentiables, à la faveur de certains nouveaux alliés. Un temps pressenti pour mener la bataille de Dakar, l’un d’entre eux, Amadou Ba, ex-ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur, a été mis de côté au profit d’un membredu gouvernement,leministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr.
« Pour Khalifa Sall, c’est une question de survie. S’il perd à Dakar, il sera temps pour lui d’aller se reposer », estime un membre du gouvernement. Le ministre d’État Mame Mbaye Niang, proche conseiller du président, s’est, quant à lui, porté candidat pour la capitale sur une liste parallèle dont personne n’imagine qu’elle n’ait pas reçu l’assentiment de Macky Sall. Avec un objectif évident : s’assurer un maximum de victoires et un minimum de défections au sein de la majorité. « Un nouveau problème se posera si un candidat qui se présente avec une liste dissidente remporte le scrutin, observe un ministre de Macky Sall, membre d’un parti allié. Normalement, ils doivent être sanctionnés, mais dans
les faits la coalition aura tout intérêt à se rapprocher d’eux… » Le camp présidentiel se rassure néanmoins en observant la division dans les rangs de ses adversaires. « La seule chose qui les fédère, c’est leur rejet de Macky Sall. Ils construisent uniquement des alliances électorales qui ne sont certainement pas politiques et qui ne durent pas. C’est pour cela qu’on les bat », plastronne le conseiller cité plus haut. Mais Macky Sall n’est pas victorieux partout, loin de là. Et son propre camp est conscient qu’il ne lui faudra pas juste protéger les bastions sous contrôle, mais en conquérir d’autres. Dakar en tête. Pour faire oublier la défaite cuisante de sa Première ministre Aminata Touré dans la capitale en 2014, il a fait le choix d’Abdoulaye Diouf Sarr, un Lébou, maire de la commune de Yoff, qui peut capitaliser sur la bonne gestion de la pandémie de Covid-19 par sonministère.Maisildevraconvaincre face à plusieurs candidats de l’opposition, dont l’opposant Barthélémy Dias ou l’ancien maire de Dakar Pape Diop. La bataille de Dakar sera aussi cruciale auniveauindividuel pour Khalifa Sall, bien qu’il soit inéligible. Gracié par Macky Sall à la fin de 2019 dans l’affaire d’enrichissement illicite qui lui avait coûté ses fauteuils de maire et de député, le socialiste cherche toujours à récupérer ses droits civiques et politiques. « Pour Khalifa Sall, c’est une question de survie. S’il perd à
Dakar, il sera temps pour lui d’aller se reposer », prédit un membre du gouvernement. Après des atermoiements, l’intéressé a donc décidé de lâcher sa remplaçante Soham El Wardini au profit de Barthélémy Dias, candidat de la coalition Yewwi Askan Wi (« libérez le peuple »), à laquelle appartient aussi Ousmane Sonko. Et tant pis si cette dernière a décidé de se présenter sur sa propre liste. « L’unité, c’est un rêve que les gens nourrissent, mais dans les faits ça n’existe pas », glisse le conseiller politique de Barthélémy Dias, Djibril Faye. Il reconnaît néanmoins qu’en se regroupant l’opposition aurait pu obtenir de meilleurs scores aux législatives de 2017. Le maire de Mermoz-Sacré-Cœur nous confiait pourtant en juin que l’unité était « la voie de salut » des opposants en difficulté. « Ousmane Sonko nous a tendu la main à plusieurs reprises, et tous savent ce qu’ils doivent faire pour s’unir », avait-il ajouté.
En attendant la suite
Le Parti démocratique sénégalais (PDS), qui devait rejoindre cette coalition, a finalement choisi de se regrouper sous la bannière d’une autre formation, Wallu Sénégal. Et ne regrette rien. Il n’empêche que le parti d’Abdoulaye Wade, en perte de vitesse, a lui aussi besoin de ces élections pour prouver qu’il existe encore. Au sein même de sa coalition, les velléités du PDS de dominer la formation avaient agacé ses alliés. L’ancien libéral Pape Diop a même décidé de quitter le navire, à la fin d’octobre. « Nous sommes d’égale dignité, mais avec des capacités électorales et politiques différentes », balaie Cheikh Dieng, l’un des onze secrétaires généraux adjoints du parti. Pour le PDS comme pour les autres partis, ces « capacités » seront mises à l’épreuve le 23 janvier. Il s’agira ensuite de se préparer pour la suite : les législatives sont toujours prévues pour juillet 2022, et la présidentielle se tiendra deux ans plus tard. JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
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OBJECTIF SÉNÉGAL
ÉCONOMIE
Et l’emploi, dans tout ça ?
Si les autorités ont relativement bien géré le choc du Covid, elles ont tout de même dû solliciter l’aide du FMI, qui leur a accordé un prêt au mois de juin. Tout en rappelant que la priorité absolue restait la lutte contre le chômage.
ALAIN FAUJAS
C
ertes, le Sénégal est de longue date un bon élève. Sa croissance est unanimement qualifiée de « robuste ». Son économie est ouverte et relativement diversifiée. « Bien que le Covid ait fait chuter ses exportations de 10 %, durement touché son tourisme et affecté les revenus de 85 % de ses ménages, il a réussi à échapper à la récession qui lui était promise et a maintenu en 2020 une croissance de + 1,5 %, déclare Élisa Saint Martin, analyste politique au centre de développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques [OCDE]. Le FMI lui prédit + 4,7 % cette année. » Le gouvernement espère même que cette performance sera comprise entre 5 % et 6 %. Il faut dire que le confinement sanitaire a privé de revenus une majorité de la population vivant du secteur informel, dominant dans l’économie du pays. Le gouvernement a réagi rapidement pour éviter une catastrophe sociale en mettant en œuvre un « programme de résilience économique » de 1 000 milliards de F CFA (1,5 milliard d’euros) pour soutenir ménages et PME. Il n’empêche qu’on ne peut pas être épargné par une pandémie mondiale, même quand on est un bon élève. Le
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virus a affecté la trajectoire de l’Instrument de coordination des politiques économiques (ICPE) et fait déraper les comptes. Cette année, le déficit budgétaire se dégradera à 5,4 % au lieu des 4,8 % prévus, tout comme le déficit courant (–11,3 % du PIB, contre –10,5 % en 2020) et la dette publique (plus de 70 % du PIB, au lieu de 68,7 % en 2020). Comme l’a dit Mitshuhiro Furusawa, directeur général adjoint du FMI, « les perspectives macroéconomiques se sont détériorées ».
Créer 450 000 postes
C’est cette détérioration qui a poussé le Sénégal à se tourner une fois de plus vers le FMI. En effet, bien que le pays se soit serré la ceinture, les comptes ont été déséquilibrés par la poursuite des importations de matériels destinés au secteur des hydrocarbures et par le freinage des exportations, malgré une production agricole exceptionnelle (+ 23 %). Il lui fallait donc signer avec le Fonds un nouvel accord qui l’aiderait à supporter le surcoût sanitaire, le soutien aux plus démunis et un déficit budgétaire accru. Le 7 juin, c’était chose faite: le FMI prêtera au Sénégal 650 millions de dollars (350 milliards de F CFA) sur dix-huit mois, avec un déblocage
immédiat de 187 millions de dollars. Ajouté aux 440 millions de dollars en provenance de l’augmentation des droits de tirage spéciaux du FMI, cela permettra de passer un cap délicat sur le plan financier, bien que la dette sénégalaise ne présente pas de risque majeur. Dans ses documents officiels, le Fonds presse le gouvernement de se soucier en priorité de l’emploi des jeunes. Comme le dit l’économiste en chef de Renaissance Capital, Charles Robertson, dans plusieurs interviews, « le modèle de développement du Sénégal fondé sur les infrastructures
EIFFAGE
OBJECTIF SÉNÉGAL
Construction de la digue Grand-Tortue, à Dakar.
a créé de la croissance, mais pas d’emplois ». Les émeutes, qui ont vandalisé en mars centres commerciaux et stations-service – français par leurs enseignes, mais sénégalais par leurs propriétaires –, ont prouvé qu’il y a urgence. Ce sont 200 000 jeunes qui arrivent chaque année sur le marché du travail. Un tiers des 15-34 ans est au chômage. Le président Macky Sall a reçu le message 5 sur 5. En avril, il annonçait un programme d’urgence d’un montant de 450 milliards de F CFA pour la période 2021-2023. Celui-ci prévoit l’embauche de 65 000
travailleurs (enseignants, personnels de la sécurité, de la maintenance et du reboisement), l’augmentation des subventions aux stages d’apprentissage et à l’emploi dans le secteur privé, le lancement de travaux publics à forte intensité de main-d’œuvre, le renforcement de la formation technique et professionnelle, et le soutien à la création d’entreprise à l’aide de solutions innovantes. Objectif: créer 450 000 postes. Le programme plaît au FMI, qui souhaite cependant que ce ne soit pas, une fois de plus, des emplois publics – dangereux pour les
comptes de l’État – qui soient créés, mais des emplois privés. Il a raison de s’inquiéter, car les premières annonces de créations d’emplois faites au mois d’août concernent 10 000 emplois « verts », soit 3 000 pour le ministère de l’Environnement et 7 000 affectés à l’agence nationale de la Grande Muraille verte. Créer des emplois privés est une autre paire de manches. Cela nécessite que l’effort d’amélioration du climat des affaires soit vigoureusement poursuivi pour faciliter la vie des entreprises et les pousser à JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
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OBJECTIF SÉNÉGAL
REPÈRES Moins de dégâts que prévu, mais… 2019
2020
2021
2022
Croissance (PIB réel, à prix constants)
4,4
1,5
3,7
5,5
Hors agriculture
4,4
– 0,8
3,8
5,6
Inflation (moyenne annuelle)
1,0
2,5
2,0
2,0
Projections (en %)
(en % du PIB)
Solde budgétaire global Dépenses
– 3,9 20,4 24,3
– 6,4 30,0 26,4
– 5,4 20,2 25,7
– 4,2 21,0 25,2
Balance des paiements
– 8,1
– 10,5
– 11,3
– 10,5
Dette publique totale
63,8
68,7
70,9
69,9
Dette extérieure
52,8
54,1
56,9
56,6
Recettes
Encore « faible » côté développement humain
IDH
Indice de développement humain (IDH)
0,512, contre une moyenne de 0,547 en Afrique subsaharienne, soit le 168e rang sur 189 pays classés dans le monde
Espérance de vie
67,9 ans, supérieure à la moyenne de 61,5 ans en Afrique subsaharienne
Population
16,3 millions d’habitants, dont 46,9 % d’urbains, au-dessus de la moyenne de 39,7 % en Afrique subsaharienne
investir et à recruter. Le gouvernement n’est pas resté inerte dans ce domaine, comme le prouve le gain de 18 places du Sénégal dans le classement « Doing Business » 2020 publié par la Banque mondiale.
Réformes à moyen terme
Le FMI a établi une longue liste des réformes restant à réaliser au profit des entreprises. Par exemple, la publication du décret établissant le registre des garanties avant la fin de l’année, la réduction du délai moyen de traitement des contrats de travail ou l’adoption du décret sur la méthode d’évaluation cadastrale simplifiée. Il faudra aussi que le Sénégal sorte de la surveillance renforcée du Groupe d’action financier international (Gafi), à laquelle il est soumis pour « déficiences stratégiques dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ».
Une aide américaine de 550 millions de dollars permettra à 1,2 million de foyers d’accéder à l’électricité.
Population vivant au-dessous du seuil de pauvreté
(moins de 1,90 $ par jour) 38,5 % contre une moyenne de 45,7 % en Afrique subsaharienne
Taux de chômage
7,1 % de la population active
Durée moyenne de scolarisation
d’un Sénégalais âgé de 25 ans 3 ans, au-dessous de la durée attendue de 9,7 ans et de la moyenne de 5,6 ans en Afrique subsaharienne SOURCES : PNUD, RDH 2020 ; BANQUE MONDIALE ET FMI, AVRIL 2021
Une économie relativement diversifiée 51,4
Services Industrie Agriculture Autres
57,0 24,4
14,8
En % du PIB
9,4
30,0 13,0
En % des emplois SOURCE : BANQUE MONDIALE
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JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
Le défi est d’importance, mais le pays devrait avoir de quoi le relever à moyen terme. En effet, de nouvelles ressources financières devraient affluer avec la mise en exploitation des gisements offshore de Grand-Tortue Ahmeyim (gaz) et de Sangomar (pétrole) en 20232024. Toujours dans le domaine de l’énergie, le Sénégal recevra un sérieux coup de main des États-Unis, qui lui donneront 550 millions de dollars dans le cadre du Millennium Challenge Corporation, et qui permettra à 1,2 million de foyers d’accéder à l’électricité. En espérant que, en attendant que ces mesures produisent leur effet, les Sénégalais supporteront sans trop broncher la flambée des prix des produits de base aggravée par la hausse mondiale des coûts du transport maritime…
COMMUNIQUÉ
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OBJECTIF SÉNÉGAL
ENTREPRENEURIAT
Papa Amadou Sarr
Ministre délégué général à l’Entrepreneuriat rapide des femmes et des jeunes (DER/FJ)
« Notre modèle fait des jaloux »
Nommé par le président Macky Sall, le patron de la DER a pour mission d’accompagner les Sénégalais désireux de créer leur activité ou de sortir de l’informel. Sa mission suscite aujourd’hui l’intérêt de nombreux pays voisins. OLIVIER MARBOT
chef de l’État. Lorsque la crise est arrivée, certains disaient que nous allions mourir. En fait, nous nous sommes installés durablement. Nous allons finir l’année avec un peu plus de 70 milliards de F CFA [environ 107 millions d’euros] injectés dans l’économie sénégalaise, en particulier grâce à nos partenaires comme la Banque africaine de développement (BAD), l’Agence française de développement (AFD), la Fondation Gates, l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID)… Aujourd’hui, nous sommes présents dans toutes les régions, dans toutes les villes du pays. Nous avons octroyé 150000 crédits, soutenu la création de plus de 3 400 entreprises, formé plus de 4 000 entrepreneurs.
Jeune Afrique : Comment se porte l’économie du Sénégal après dix-huit mois de pandémie mondiale et la désorganisation générale qui en a résulté ? PapaAmadouSarr:L’économie est en phase de rebond. L’un des grands enjeux était et reste la forte part que constitue le secteur informel dans notre économie. De l’ordre de 70 % à 80 %. La conséquence directe, c’est une assiette fiscale trop étroite. Il y a beaucoup de sensibilisation à faire sur ce sujet, mais aussi, je pense, des mesures à prendre : trop de gens attendent tout de l’État-providence, mais refusent encore de payer le moindre impôt.
Les projets que vous accompagnez sont-ils de pures créations, ou plutôt le résultat de la régularisation d’activités informelles? Ce sont en majorité des activités déjà existantes, donc issues de l’informel. Des personnes qui entendent parler de nous, qui n’arrivaient pas à se faire financer par les voies classiques et qui tentent leur chance. Ce sont aussi, à 70 %, des femmes.
Et quel est le bilan, au sortir de cette période difficile, de la délégation que vous dirigez? Nous arrivons à trois ans d’exercice. Les deux premières années ont été dures, nous avons été critiqués. Beaucoup nous voyaient comme un instrument politique au service du
Quels secteurs sont les plus représentés parmi les entreprises que vous aidez? Le secteur primaire est largement dominant, à 60 % : agriculture, élevage, pêche… Nous les incitons à transformer leurs produits, localement. Ensuite, ce sont les services,
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JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
DR
S
i le Sénégal a bien résisté à la crise née de la pandémie de Covid-19, son économie souffre de deux faiblesses récurrentes : lenteur dans la création d’emploi face à l’évolution de la démographie du pays, et un secteur informel encore trop important. C’est en grande partie pour répondre à ce double défi que la Délégation générale à l’entrepreneuriat rapide des femmes et des jeunes (DER / FJ) a vu le jour il y a trois ans.
15 % environ. Certains, comme la restauration, le transport ou l’hôtellerie ont souffert de la crise sanitaire, mais d’autres ont émergé, en particulier la livraison. Suivent l’artisanat, à 11,8 %, le numérique, à 5,7 %, la culture et la création, autour de 1 %. Le modèle de la DER semble intéresser beaucoup de pays parmi vos voisins. Avec lesquels êtes-vous en discussion? La Côte d’Ivoire est très intéressée, surtout pour le secteur numérique. Nous travaillons avec la Guinée, et ce partenariat a perduré malgré la crise que le pays a traversée. Nous avons des échanges avec le Togo, le Burkina Faso, le Congo et la Mauritanie, certains sont venus nous voir, je suis allé en visiter d’autres. Il est clair que nous faisons des jaloux: les gens se disent « si le Sénégal le fait, nous pouvons le faire aussi ». Pour la période 20222024, nous visons un doublement de nos ressources et peut-être une évolution de notre statut pour être moins dépendants des financements publics. C’est indispensable, sinon nous continuerons à être critiqués.
Communiqué
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OBJECTIF SÉNÉGAL
SOCIÉTÉ
Peut-on débattre de l’avortement ?
L’interruption volontaire de grossesse a-t-elle sa place dans un pays à 90 % musulman ? Interview croisée des représentants d’une association féministe et d’une association islamique. MEHDI BA
R
épublique laïque d’après la Constitution, mais imprégnée de religion, société moderne où le conservatisme n’a toutefois pas dit son dernier mot, le Sénégal a vu ressurgir au cours des derniers mois le débat sur l’avortement. Et, comme tout sujet touchant aux mœurs, celui-ci a déchaîné les passions. Tandis qu’une frange de la société milite pour des avancées en la matière, une autre s’arc-boute sur le statu quo, invoquant les traditions du pays et la religion. D’un côté, Aïssatou Ndiaye, présidente de Youth Women for Action-Sénégal, une association qu’elle a contribué à créer en 2013 et qui travaille sur les questions de violences basées sur le genre et de droit à la santé sexuelle et reproductive. De l’autre, Mame Mactar Guèye, porte-parole de l’association islamique Jamra, qui surveille sans relâche les entorses présumées à l’ordre moral et religieux au Sénégal et multiplie les actions de plaidoyer sur la question. Pour Jeune Afrique, tous deux ont confronté leurs points de vue sur ce sujet hautement sensible qu’est l’avortement. Jeune Afrique : Une polémique a récemment émergé autour de l’avortement médicalisé. Comment est-elle apparue? Mame Mactar Guèye : Le débat a surgi à l’initiative d’associations soucieuses de préserver l’intérêt des femmes et de lutter contre les violences qui leur sont faites – démarche que nous avons toujours saluée. En mai 2019, la responsable d’une de ces associations, Amy Sakho, porte-parole du comité de plaidoyer
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pour le droit à l’avortement médicalisé en cas de viol ou d’inceste, m’avait contacté. Elle demandait à Jamra un soutien dans le cadre d’une campagne visant à ce que le viol soit criminalisé. Nous avons donc accompagné nos sœurs des mouvements féministes dans ce combat, avec comme mot d’ordre l’accentuation des sanctions pénales contre ce fléau, afin d’en finir avec l’impunité – relative – des auteurs de viols. Quelques mois plus tard, le 10 janvier 2020, l’Assemblée nationale a voté la loi 2020-2005 portant sur la criminalisation du viol. Nous ne sommes pas dans une adversité tranchée : nous avons des points de convergence, même s’il est vrai que nous ne sommes pas d’accord sur tout. D’ailleurs, depuis lors, le viol est puni d’un minimum de dix ans de prison, pouvant aller jusqu’à la perpétuité s’il est suivi d’un meurtre. Quand vous parlez de vos « sœurs », voulez-vous dire qu’il y a une collaboration entre Jamra et les mouvements féministes? Mame Mactar Guèye : Nous avons des relations régulières avec plusieurs mouvements. Outre celui d’Aïssatou Ndiaye, il y a également l’Association des juristes sénégalaises (AJS), d’Amy Sakho, et bien d’autres. Nos points de friction sont apparus vers 2013, quand certaines de ces associations ont mis en place un comité de plaidoyer appelé « taskforce ». Les organisations qui le composent revendiquent une révision de la législation en matière d’avortement. Le Sénégal a en effet signé en 2003 – et ratifié en 2005 – le protocole de Maputo, dont l’article 14 dit que les États signataires sont favorables à ce que les femmes victimes de viol ou
d’inceste puissent bénéficier d’un avortement médicalisé. Le combat des mouvements féministes consistait donc à faire évoluer en ce sens l’article 305 du code pénal sénégalais, qui réprime l’avortement. Le débat a ressurgi récemment à l’initiative de l’AJS, qui offre une assistance juridique à des femmes qui se retrouvent dans une situation de détresse consécutivement à un viol.
Nous avons des points de convergence, même s’il est vrai que nous ne sommes pas d’accord sur tout. Plusieurs médias ont alors organisé des débats entre nous au cours des dernières années. Nous comprenons leurs revendications, même si nous pensons que l’avortement n’est pas la seule option. L’idéal est de préserver l’honneur et la dignité de la femme qui ne veut pas de sa grossesse, mais également de sauver la vie de l’enfant. Aïssatou Ndiaye, quelle est la position de l’organisation que vous représentez en ce qui concerne les cas où l’avortement devrait pouvoir être autorisé? La législation actuelle doit-elle être réformée? Aïssatou Ndiaye : Le débat est revenu à l’ordre du jour il y a deux ou trois mois, à la suite d’une campagne lancée par l’Association des journalistes en populations, santé
OBJECTIF SÉNÉGAL
Mame Mactar Guèye et Aïssatou Ndiaye, à Dakar, le 25 octobre.
CARMEN ABD ALI POUR JA
et développement (AJPSD), avec comme mot d’ordre : « Wuyu Wallu » [« répondre et secourir », en wolof]. Celle-ci a été diffusée aux heures de grande écoute sur les médias traditionnels, les médias mainstream et les réseaux sociaux. Certains ont considéré que cette campagne était uniquement conduite par des féministes. Mais il y a aussi dans notre task-force des médecins, des journalistes, des infirmiers, des sages-femmes, des religieux ou encore des universitaires. L’idée de cette task-force émane en réalité de l’État, à travers la Direction de la santé de la mère et de l’enfant (DSME), qui dépend du ministère de la Santé. Mais puisque l’État ne pouvait être à la fois décideur et acteur du plaidoyer, le rôle de coordination est revenu à l’AJS. Une disposition du code médical sénégalais évoque la question de l’avortement médicalisé : qu’autorise-t-elle au juste? Aïssatou Ndiaye : Les articles 305 et 305 bis du code pénal répriment ceux qui auront commis ou aidé à commettre un avortement. Toutefois, l’article 35 du code de déontologie médicale prévoit que l’on puisse procéder à un avortement thérapeutique lorsque la santé de la mère est en danger. Ce qui pose problème, dans ce dernier cas, c’est la procédure. Les conditions sont tellement draconiennes que les respecter obligerait à dépasser le délai imparti pour pouvoir procéder à un avortement. Dans les conditions posées par la loi, il faudrait que trois médecins attestent successivement que la grossesse met en danger la vie de la maman – le troisième devant être un expert mandaté par le tribunal. Or les femmes concernées sont souvent dépourvues des ressources financières qui leur permettraient de consulter ces médecins. Par ailleurs, certains praticiens peuvent décliner le fait de procéder à un avortement en invoquant que cela est contraire à leurs principes éthiques. Concrètement, quelle réforme des textes en vigueur espérez-vous? Aïssatou Ndiaye : Nous voudrions que la procédure de l’avortement médicalisé soit facilitée. JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
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OBJECTIF SÉNÉGAL
CARMEN ABD ALI POUR JA
plusieurs cas de projets d’avortement. Quand nous avons appris qu’une jeune femme était enceinte après avoir été victime d’un viol ou d’un inceste, nous sommes allés la voir – accompagnés d’un ou de deux imams – pour essayer de la raisonner et de la convaincre qu’elle n’avait pas le droit d’ôter la vie à son enfant, quelles que soient les conditions de sa conception.
Le religieux et la féministe se retrouvent sur certains points. Mais s’opposent sur une possible modification de la législation autorisant l’avortement médicalisé.
Autrement dit, que le verdict d’un seul médecin suffise et que le certificat médical soit gratuit. Et aussi que, dans les cas de viol ou d’inceste, l’enquête policière puisse aller plus vite afin d’établir la réalité des faits. L’association Jamra cautionnet‑elle ces revendications? Mame Mactar Guèye : Nous sommes globalement d’accord sur le constat suivant : lorsque le fléau du viol a commencé à prendre de l’ampleur au Sénégal, les organisations féministes se sont mobilisées de manière plus énergique à propos des femmes victimes, qui ne voulaient pas assumer leur grossesse – ce qui est tout à fait légitime. Il reste que le Sénégal réprime cette forme d’infanticide qui ne dit pas son nom : l’avortement. L’article 305 du code pénal est clair à cet égard. Il est toutefois pondéré par l’article 35 du code de déontologie médicale et par l’article 15 de la loi sur la santé de la reproduction. Autrement dit, la loi sénégalaise interdit l’avortement, sous réserve que la grossesse ne soit pas de nature à mettre en danger la vie de la mère. Le véritable combat doit aller dans le sens de la simplification
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JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
des procédures, faute de quoi il serait trop tard pour intervenir. Là où nous divergeons, c’est dans le fait d’intégrer l’article 14 du protocole de Maputo dans le code pénal sénégalais. Celui-ci prévoit en effet que « les États prennent toutes les mesures appropriées pour protéger les droits reproductifs des femmes, particulièrement en autorisant l’avortement médicalisé en cas d’agression sexuelle, de viol, d’inceste, et lorsque la grossesse met en danger la santé mentale et physique de la mère ou la vie de la mère ou du fœtus ». Est-ce que Jamra conteste ce droit à l’avortement dans les cas de viol ou d’inceste ? Mame Mactar Guèye : Nous pensons qu’une telle situation n’est pas de nature à chambouler notre arsenal juridique alors que ces problèmes pourraient être gérés au cas par cas. Nous recommandons de se référer aux réalités sociales africaines au lieu d’avoir recours à l’avortement médicalisé. Que préconisez-vous, au juste ? Mame Mactar Guèye : L’association Jamra est intervenue dans
Mais que se passe-t-il après la naissance ? Mame Mactar Guèye : Nous ne demandons pas à la jeune femme de livrer son nom ni de cotiser pour les frais du bébé. Nous lui proposons d’accoucher et de laisser le bébé dans un orphelinat, tout en repartant elle-même dans l’anonymat. Son honneur est sauf, et l’enfant, quant à lui, a la vie sauve. Puis nous prenons contact avec l’Action éducative en milieu ouvert (Aemo), qui dépend du ministère de la Justice. L’objectif étant que cet enfant puisse ensuite être adopté.
C’est la même société qui énonce ces principes et qui se retourne ensuite contre les personnes victimes et les stigmatise.
À nos yeux, le meurtre d’un enfant dans le ventre de sa mère, que certains appellent pudiquement « avortement médicalisé », est une option occidentale. Nous préconisons que les associations mobilisées sur cette question réorientent les moyens dont elles disposent au profit des orphelinats, qui ne bénéficient actuellement d’aucun soutien de l’État, plutôt que dans des campagnes de promotion de l’avortement médicalisé dans les médias. Aïssatou Ndiaye, que vous inspire l’approche de Jamra ? Aïssatou Ndiaye : Dès lors qu’une relation forcée conduit à une
AFRIQUE DE L’OUEST
Air Sénégal, la Teranga vous ouvre le monde
Après avoir fait preuve de résilience pendant la pandémie du Covid-19, Air Sénégal relance ses liaisons au sein de son hub de base à l’aéroport de Diass au Sénégal.
Air Sénégal est devenu en peu de temps un acteur clé du transport aérien en Afrique. Un succès qui s’explique par la clarté de la vision stratégique de ses dirigeants mais aussi par la qualité du travail des membres d’équipage qui permettent d’aligner l’offre de la compagnie sur les standards internationaux les plus exigeants. UN HUB INTERNATIONAL Le Sénégal occupe une position géographique stratégique grâce à l’Aéroport international BlaiseDiagne, situé à Diass, près de Dakar. Cette localisation offre des opportunités remarquables dans le domaine du transport aérien. Le réseau Air Sénégal, dense et diversifié avec des lignes domestiques, régionales et intercontinentales, lui permet d’assurer chaque semaine 78 vols vers le monde. Le hub de la compagnie facilite de nombreuses combinaisons de destinations permettant à Dakar d’être
la porte d’entrée et de sortie de et vers l’Amérique, l’Europe, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, grâce à la desserte de 21 destinations, avec des temps de connexion très courts.
UNE FLOTTE MODERNE ET ADAPTÉE Air Sénégal garantit un service de haute qualité. Au centre du projet de la compagnie, nous trouvons la politique de sécurité, la tradition de la Teranga ainsi que le choix d’une flotte de dernière génération offrant aux passagers le wifi à bord, le confort et l’accueil qui garantissent une expérience unique à bord avec un réseau mondial sur 3 continents. Le réseau d’Air Sénégal est desservi par le moyen d’une flotte moderne et adaptée de 8 appareils (2-A321, 2-A319, 2-A330-900 Néo, 2 ATR-72 600). L’enracinement de la compagnie est déjà en œuvre avec la première promotion de 20 cadets pilotes et de 30 jeunes futurs techniciens en maintenance aéronautique, en collaboration avec l’Armée de l’air du Sénégal.
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Envolée de Dakar vers le monde
Route du King Fahd - Bâtiment N°2 Almadies - Dakar Sénégal - Pour plus d’informations (+221) 301 15 15 15
OBJECTIF SÉNÉGAL grossesse, l’avortement doit pouvoir rester une prérogative pour ces femmes. Nous vivons dans une société où la femme subit ces situations plus qu’elle n’exprime ses choix et sa volonté. Je pense donc que l’on doit permettre aux victimes de poser leur propre choix, à savoir : garder l’enfant ou non. J’ai récemment eu à m’occuper d’une adolescente qui a subi un inceste par son demi-frère. Cela a créé un véritable drame dans cette famille – un ménage polygame –, avec notamment, le décès, peu après, des deux coépouses de son père. Cette jeune femme, qui effectuait jusque-là une scolarité brillante, a subi des pressions pour la dissuader de porter plainte. Elle est allée au terme de sa grossesse, mais a dû interrompre provisoirement ses études. Le traitement « au cas par cas » ne réglerait pas ce type de situation. On dit que c’est contre la religion, contre nos traditions… Mais concrètement,
c’est la même société qui énonce ces principes et qui se retourne ensuite contre les personnes victimes et les stigmatise, au nom de préjugés profondément ancrés. Dans un documentaire réalisé à la prison de Thiès en 2015, La Liberté en prime, le réalisateur français Nils Tavernier montrait qu’une part non négligeable des femmes incarcérées l’étaient pour un infanticide lié à un avortement illégal. Qu’en est-il six ans plus tard ?
L’idéal est de préserver la dignité de la femme qui ne veut pas de sa grossesse, mais aussi de sauver la vie de l’enfant.
Aïssatou Ndiaye : Certaines de ces femmes ont été condamnées et incarcérées après avoir commis un avortement clandestin ou un infanticide consécutif à une grossesse non désirée. Aujourd’hui, selon l’AJS, l’infanticide constitue 19 % des motifs d’incarcération des femmes, et l’avortement 3 %. Or, si ces avortements avaient été encadrés et pratiqués par un médecin, beaucoup de femmes auraient évité l’incarcération. L’avortement clandestin a des répercussions négatives sur la société en général. Mame Mactar Guèye : Si une adolescente tombe enceinte à l’âge de 13 ans, comme cela arrive régulièrement, il n’est pas besoin d’être savant pour savoir qu’elle n’est pas en mesure de supporter naturellement une grossesse de neuf mois. Aussi nous trouverions souhaitable qu’un âge soit fixé en deçà duquel une grossesse non consentie ne saurait être acceptée.
NO PEACE, NO BUSINESS! Par Rev. Fr. Clement M. Aapengnuo, PhD.Executive Director
L
e bourbier du Sahel est arrivé. À mesure que le chaos s’installe, les populations côtières se demandent si leurs communau-
tés seront les prochaines. Je crois qu’une réponse régionale réside dans le secteur privé et dans la jeunesse. Nos adversaires sont le taux de chômage élevé, la corruption, le manque de services sociaux et l’inégalité d’accès au capital. Au lieu de prospérer, nos jeunes sont la proie d’organisations extrémistes violentes qui cherchent à tirer profit de la pauvreté. Avant l’indépendance, l’Église catholique s’employait déjà à renforcer la cohésion sociale et à créer des opportunités d’emploi. Aujourd’hui, nous
nous associons à nos frères musulmans et protestants dans une série d’initiatives visant à mobiliser des ressources pour
« Pourquoi ne pas penser aux jeunes comme des vecteurs de notre avenir ?» soutenir nos communautés. Nous avons besoin de partenaires du secteur privé capables de créer les emplois nécessaires pour répondre à la demande croissante. Nous aurons également besoin
Center for Conflict Transformation and Peace Studies (CECOTAPS) Caapengnuo@gmail.com +233 2445138052
de nos CEO pour amener les parties belligérantes à négocier afin de mettre fin au commerce illicite, qui introduit des armes dangereuses dans nos communautés. En outre, nous aurons besoin d’investissements dans des activités qui comblent les clivages et reconstruisent nos communautés. Il ne suffit pas de dire à nos jeunes de déposer leurs armes. Tant que nous n’aurons pas créé un environnement favorable à la prospérité, ils continueront à se tourner vers la violence pour répondre à leurs problèmes.
OBJECTIF SÉNÉGAL
Tribune Maimouna Astou Yade Présidente de JGEN-Sénégal, féministe, juriste
La société sénégalaise reste très conservatrice
A
u Sénégal, la question des droits des femmes a traversé toutes les générations militantes, de 1960 à nos jours. Les premières féministes ont vécu à une époque où déconstruire l’idéologie patriarcale était considéré comme un aveu d’opposition aux religions et aux cultures locales. Les défis pour les femmes de cette époque étaient énormes, car les sociétés africaines venaient de sortir d’un colonialisme qui avait affecté lourdement les attitudes et les comportements des hommes et des femmes. En tant que jeunes féministes et Africaines, nous pensons que l’impact de la colonisation sur les hommes africains fait partie des champs d’études encore peu explorés, mais qui, bien référencés, pourraient servir à renforcer le plaidoyer en faveur des droits fondamentaux des femmes et des filles. Car il y a un paradoxe: beaucoup, en Afrique, ont tendance à estimer que les revendications féministes sont inspirées par l’Occident, mais au temps de la colonisation le modèle imposé par les colons occidentaux était très patriarcal. Des chercheuses, poètes, journalistes, sociologues, pionnières du féminisme telles que Fatou Sow, Awa Thiam, MarieAngélique Savané ou Mariama Bâ sont revenues sur le modèle social
africain qui a été matrilinéaire. Une forme d’organisation sociale qui n’opprimait pas les femmes, ni les hommes d’ailleurs, un modèle social équilibré et propre aux peuples africains. Les femmes sénégalaises militantes ont capitalisé plus de soixante ans de lutte pour l’élimination des violences dont les femmes et les filles sont victimes. Notre pays a persévéré et évolué de revendication en revendication, et ce dans tous les domaines de la vie. Bien que le code sénégalais de la famille reste encore très discriminatoire, il faut reconnaître aux militantes pionnières le mérite d’avoir porté, en 1972, la voix des femmes dans le processus
Le féminisme n’est pas une opposition à l’homme mais un pur humanisme. d’adoption de ce nouveau code, une dynamique qui avait opposé plusieurs groupes sociaux et religieux à cette époque. À ce jour, nous avons assisté à une réhabilitation juridique du statut de la femme sénégalaise. La Constitution réaffirme son attachement à toutes les conventions
internationales et régionales qui garantissent la promotion et la protection des droits des femmes et des filles. Bien des mouvements féminins et féministes ont contribué à donner aux femmes cette place qu’elles occupent dans la société sénégalaise, une société encore très conservatrice et fidèle aux normes patriarcales.
Encore des sujets tabous
Depuis deux ans, des groupes de jeunes féministes sont en effervescence au Sénégal. Les revendications pour l’avancement des droits des femmes portent encore sur des sujets extrêmement tabous, comme les droits sexuels des femmes, le droit à l’avortement médicalisé en cas d’inceste ou de viol, le caractère politique du féminisme… La volonté de maîtriser le corps des femmes reste une réalité dans notre société patriarcale. On a appris à la femme à normaliser son infériorité par rapport à l’homme, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle le combat féministe se heurte à la réticence de certaines femmes qui considèrent que les revendications féministes sont seulement une façon de s’opposer aux hommes. Il n’en est rien. Le féminisme n’est pas synonyme d’opposition à l’homme, c’est un pur humanisme.
JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
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OBJECTIF SÉNÉGAL
LITTÉRATURE
David Diop « Adanson était un précurseur » Écrivain franco-sénégalais
Dans son dernier roman, La Porte du voyage sans retour, le lauréat du Booker Prize International 2021 raconte le séjour d’un botaniste français atypique dans le Sénégal des années 1750. PROPOS RECUEILLIS PAR NICOLAS MICHEL
A
près Frère d’âme, prix Goncourt des lycéens en 2018 et Booker Prize International en 2021, David Diop publie aux éditions du Seuil La Porte du voyage sans retour. Dans un style totalement différent de celui de son livre précédent, l’écrivain d’origine sénégalaise raconte le voyage au Sénégal, au xviiie siècle, du savant français Michel Adanson (1727-1806). Partiellement inspiré de personnages réels, ce texte à l’écriture précise raconte l’évolution d’un homme des Lumières façonné par les préjugés de son époque et dont les certitudes sont progressivement mises à mal par l’amitié et, surtout, par l’amour. Jeune Afrique: Comment vous est venue l’idée de ce livre? David Diop : J’en ai eu l’idée il y a une quinzaine d’années, quand j’ai lu le récit de voyage que Michel Adanson a publié en 1757, racontant ses quatre ou cinq années passées au Sénégal au début des années 1750. Trois ans après son retour, il rédige un texte qui devait faire office d’introduction générale à son Histoire naturelle du Sénégal. J’ai été frappé par l’originalité de son regard et par la qualité de son écriture. Il sait raconter son voyage et se mettre en scène avec les « Nègres du Sénégal », comme il les appelle. Et comme il est savant, il observe leur société de façon méthodique. Quand j’ai lu son texte et que j’ai vu des mots, des noms, des réalités que j’ai moi-même connues au Sénégal,
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cela m’a extrêmement intéressé, au point que c’est de lui qu’est partie mon idée de créer un groupe de recherche sur les représentations européennes de l’Afrique aux xviie et xviiie siècles. Sur place, il essaie de savoir – c’est d’ailleurs une instruction qui lui avait été donnée par les frères Jussieu, membres éminents de l’Académie royale des sciences de Paris – quelles peuvent être les propriétés des plantes qu’il est venu décrire. Michel Adanson, c’est avant tout un botaniste. Oui, et il fait l’épreuve de ces plantes à travers son corps. C’est une attitude propre aux philosophes et aux savants des Lumières, l’expérimentation. Son autre originalité, c’est d’apprendre le wolof parce qu’il a compris que les propriétés de ces plantes sont connues d’un petit groupe de personnes, hommes ou femmes, que les traducteurs de l’époque ne sont pas en mesure de comprendre. Comment avez-vous travaillé sur ce personnage bien réel pour bâtir votre fiction? J’ai prélevé des indices. Un jeune historien sénégalais, Ousmane Seydi, a attiré mon attention sur le fait qu’au Muséum d’histoire naturelle de Paris sont conservés des brouillons rédigés par Michel Adanson. Lesquels contiennent des contes et des légendes en wolof qu’il a consignés dans le but d’écrire son Histoire naturelle du Sénégal. Il ne s’agissait pas seulement pour lui de classifier
des plantes, mais aussi de décrire des hommes et leurs sociétés. Y trouve-t-on l’histoire d’amour que vous nous racontez? Non, mais dans ses brouillons en wolof retranscrit, il y a des échanges entre un homme venant d’ailleurs et une jeune fille qui refuse ses avances de façon très pudique. Évidemment, cette donnée m’a laissé la liberté d’imaginer qu’il avait pu tomber amoureux. Mais c’est un prétexte, car je voulais cette histoire d’amour pour que ce jeune philosophe du
En 1757, il dit, je le cite, que les Nègres ne sont « ni cruels ni incultes », comme on les présente dans sa bibliothèque de voyageur. siècle des Lumières mette à l’épreuve sa représentation humaniste du monde au contact de la réalité crue de l’esclavage. Le meilleur moyen de le confronter à cette réalité, c’était de le faire tomber amoureux d’une jeune femme promise à l’esclavage. C’est un homme en avance sur son temps, qui commence à considérer les Noirs comme des humains.
OBJECTIF SÉNÉGAL Dans son récit de voyage de 1757, il dit, je le cite, que les Nègres ne sont « ni cruels ni incultes », comme on les présente dans sa bibliothèque de voyageur. Il affirme avoir découvert sur place que ce qu’il avait lu était faux. Dans un autre passage, et c’est d’ailleurs une phrase ambiguë, chargée des préjugés de son époque, il observe que les personnes du village dans lequel il se trouve ont une bonne connaissance des constellations. « Avec un peu d’études, les Nègres feraient d’excellents astronomes », dit-il. Si bien qu’il va être repéré, plus tard, par les abolitionnistes français, notamment la Société des amis des Noirs, qui vont considérer que c’est un précurseur. Ces passages vont être mis en évidence par le quaker abolitionniste Antoine Bénézet, qui se servira de ce qu’écrit Adanson sur les Nègres pour l’ajouter à son argumentation contre la traite.
Outre son histoire d’amour, Adanson vit une amitié très forte avec un jeune garçon, Ndiak. Ce Ndiak n’est pas mentionné dans le récit de voyage effectif publié en 1757, mais il se trouve être cité dans les brouillons d’Adanson. Qui affirme que c’est le fils d’un grand dignitaire du royaume du Waalo, âgé de 12 ans et qui lui a été donné comme « passeport ». J’en ai fait une sorte d’alter ego de Michel Adanson, un « fixeur » qui lui permet de voyager à l’intérieur du Sénégal.
Vous évoquez longuement l’organisation sociale du Sénégal de l’époque. J’ai voulu raconter la découverte, par un jeune savant de 23 ans, de sociétés et de façons de vivre absolument différentes. Je me suis servi de son œil de botaniste et du fait qu’il était formé pour décrire. Il est aussi important de préciser qu’il écrit pour sa fille et qu’il veut lui ouvrir un monde inconnu. On oublie trop souvent qu’il y a eu des personnes, bien avant notre période, qui ont eu leurs entrées dans des mondes radicalement différents et souvent caricaturés. De la sorte, à mon modeste niveau, je fais entrer des lecteurs dans cette Afrique ancienne que le grand public ne connaît pas. Si votre imagination joue à plein, vous restez néanmoins très précis. Je reconnais que tout n’est pas tout à fait exact. Mais, par exemple, la localisation des villes ou des grands villages que j’évoque, elle est précisément faite par Michel Adanson,
JOEL SAGET / AFP
Cela n’empêche pas le Français de participer au système… Oui, il est employé par la concession du Sénégal, dont le principal
revenu provient de l’esclavage. Luimême va penser qu’il serait judicieux de ne plus envoyer de Nègres aux Antilles et de les employer sur place. Il a une formule un peu étrange, en marge d’un article de son encyclopédie, où il soutient qu’il faudrait trouver des esclaves volontaires – drôle de formule ! – pour travailler sur place à la culture de la canne à sucre. Ce serait pour lui plus efficace que d’envoyer des gens mourir par milliers sur la route des Antilles.
À Paris, en 2018, l’année où il reçoit le prix Goncourt des lycéens pour Frère d’âme. JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
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LBUSCA/GETTY IMAGES
À g., portrait de Michel Adanson.
MP/LEEMAGE
Ci-contre: frontispice de son livre Histoire naturelle du Sénégal, paru en 1757.
qui a réalisé une carte du Sénégal que l’on peut voir sur la jaquette du livre ! C’est avec cette carte que j’ai travaillé. Je me suis renseigné ensuite pour savoir comment étaient organisés les cités et les royaumes à cette époque-là. Vous accordez aussi de la place aux croyances locales. Dans la presqu’île du Cap-Vert, les Lébous pratiquent le ndeup, une cérémonie d’exorcisme où l’on essaie de discerner ce qui tourmente les hommes et les femmes qui se sentent mal d’un point de vue psychologique. Ils parlent de rab ou de rapp, c’est-à-dire d’entités qui investissent notre corps et peuvent nous tourmenter, notamment par jalousie. Il m’a semblé important de placer la raison triomphante du siècle des Lumières face, non pas à l’irrationnel, mais plutôt face au surnaturel, qui peut paraître naturel dans certaines civilisations. Si vous lisez les récits de voyage du père Labat, Nouvelle relation de l’Afrique occidentale, publié en 1728, ou Nouveau voyage aux isles françoises de l’Amérique, publié en 1722, vous découvrez que tout ce qu’il appelle les fétiches, comme les croyances animistes, sont pour lui des œuvres du diable ! C’est la conception européenne habituelle qu’il exprime là. J’ai voulu revenir sur un rendez-vous manqué. Et la fiction le permet en toute liberté.
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Ce livre est écrit dans un style radicalement différent de celui de Frère d’âme. L’écriture naît de contraintes que l’on se fixe à soi-même. Pour Frère d’âme, je me suis imposé un personnage qui ne pouvait pas écrire une lettre parce qu’il ne parlait pas le français. Ce qui m’a conduit à faire entendre une voix intérieure qui, en principe, est cachée. Cette fois, le propos est différent, puisque je propose un voyage au lecteur par l’intermédiaire d’un homme des Lumières qui a une belle plume. Il s’agit d’un cahier secret écrit pour sa fille, un cahier intime, franc, animé d’un souci de clarté et de précision. Cela supposait un certain registre de langue. Mais je ne voulais pas pasticher l’écriture du xviiie siècle avec une langue qui serait trop éloignée de ce que l’on a l’habitude de lire ou d’entendre. Il n’y a pas de meilleurs écrivains dans la langue du xviiie que les écrivains du xviiie eux-mêmes ! Quelles relations entretenez-vous avec le Sénégal ? J’ai vécu à Dakar essentiellement, même si ma famille est originaire de Louga. Malheureusement, avec la pandémie, je n’ai pas pu m’y rendre depuis février 2018, époque à laquelle j’avais organisé un colloque à l’université Cheikh-Anta-Diop sur l’Afrique des savants du xviie au xxe siècle.
Dans le livre, vous écrivez « Cap Verd » et non « Cap-Vert ». Pourquoi ? C’est une coquetterie de ma part. C’est ainsi que l’écrit Michel Adanson et je me suis autorisé ce « d » car le savant reprend la façon d’écrire de l’époque, qui venait du nom portugais des lieux, « Cabo Verde ». Vous avez reçu le Booker Prize International. C’est une sacrée distinction ! Je ne mesurais pas, avant d’arriver parmi les finalistes, l’importance de ce prix. J’ai été extrêmement étonné par l’engouement qu’il suscite. Et je me suis rendu compte qu’il m’ouvrait, grâce à l’excellente traduction de la poétesse Anna Moschovakis, avec qui je le partage, les portes du Commonwealth. J’ai maintenant des lecteurs de l’ancien empire colonial britannique, notamment indiens, qui m’en parlent. C’est vraiment une chance extraordinaire pour moi.
La Porte du voyage sans retour, de David Diop, Seuil, 258 pages, 19 euros.
MESSAGE
SENEGAL POWER COMPACT du MCC : l’énergie pour la croissance
économique du Sénégal
Entré en vigueur le 9 septembre 2021, le Senegal Power Compact du Millennium Challenge Corporation (MCC) est un Programme mis en œuvre par le Millennium Challenge Account Sénégal II (MCA-Sénégal II). Prévu sur une durée de 5 ans, ce Programme représente un investissement de 600 millions de dollars américains. Il vise à moderniser et à renforcer le secteur électrique du Sénégal, à assurer un environnement propice à son développement et à améliorer l’accès à
Cet investissement comprend un don du gouvernement américain de 550 millions de dollars américains et une contribution du gouvernement sénégalais de 50 millions de dollars américains. Comme son nom l’indique, ce Programme est destiné au secteur de l’électricité et porte sur trois projets majeurs : • Projet Transport qui a pour objectif de moderniser et de renforcer le réseau de transport d’électricité de la Société nationale d’électricité du Sénégal (Senelec) avec une enveloppe de 403 millions de dollars américains, soit environ 227 milliards de F CFA.
CONDITIONS PRÉALABLES SATISFAITES Le Sénégal a satisfait à toutes les conditions préalables d’entrée en vigueur. Celles-ci ont trait, d’une part, au cadre juridique de mise en œuvre du Programme et d’autre part, à la mise en place d’un environnement propice au développement du secteur de l’électricité et à sa viabilité financière. Ainsi, le Sénégal a adopté une Feuille de route du secteur de l’électricité à l’horizon 2035, un nouveau Code de l’électricité, un Plan de remboursement du secteur de l’électricité, un Mécanisme d’incitation à la performance de la Société nationale d’électricité (Senelec) et un Plan tarifaire.
• Projet Accès qui vise à améliorer l’accès à l’électricité dans les zones péri-urbaines et rurales du Sénégal pour un montant de 63 millions de dollars américains, soit environ 35 milliards de francs CFA.
MCA-Sénégal II est placé sous la tutelle directe de la présidence de la République du Sénégal et travaille en étroite collaboration avec le Ministère du Pétrole et des Énergies.
• Projet Réforme qui est destiné à appuyer les efforts du gouvernement du Sénégal pour améliorer la gouvernance et la viabilité financière globales du secteur de l’électricité et créer un environnement durable. L’objectif est de satisfaire la demande croissante des entreprises et des consommateurs, et de promouvoir les investissements du secteur privé. 47 millions de dollars américains, soit environ 26 milliards de F CFA, seront affectés à ce projet.
Le Millennium Challenge Corporation (MCC) est une initiative de l’administration américaine qui consiste en un partenariat avec les pays qui ont réalisé des progrès dans les trois domaines suivants : bonne gouvernance dans la gestion des affaires publiques, création d’un environnement favorable à l’initiative privée et engagement de l’État à faire des investissements conséquents dans le secteur social. Le but du partenariat entre le Sénégal et les États-Unis est de réduire la pauvreté par la croissance économique.
Immeuble Talix, Rue 3 x B, Dakar, Sénégal
l’électricité.
UNE VOLONTÉ DE CONCRÉTISER L’équipe de mise en œuvre, qui est déjà à pied d’œuvre, cherche à relever le défi en réalisant les trois projets dans les délais impartis. Pour ce faire, elle entend recruter les meilleurs fournisseurs, entreprises de construction, consultants, cabinets de conseil et bureaux d’études. MCA-Sénégal II compte ainsi organiser des rencontres régulières avec le secteur privé afin de présenter les opportunités d’affaires à saisir. Le Senegal Power Compact est un Programme innovant. Il permettra entre autres de poser, pour la première fois, des câbles sous-marins de très grande capacité (225kv) dans le cadre du Projet Transport afin de garantir la fourniture d’électricité à la ville de Dakar et ses environs qui représentent plus de 60 % de la demande d’électricité du pays. Le Président du Sénégal, Macky SALL, lançant le compte à rebours du Senegal Power Compact, a déclaré qu’« au total, plus de 12 millions de Sénégalais seront impactés par ce Programme, contribuant de façon déterminante à mon objectif d’accès universel à l’électricité à l’horizon 2025 ». Il a précisé que « le premier Compact a permis l’amélioration du niveau de vie des populations sénégalaises à travers les infrastructures routières et l’agriculture ».
www.mcasenegal.sn
JAMG - PHOTOS DR
Visite des sites de Senelec devant bénéficier des investissements du Senegal Power Compact par une délégation de haut niveau de MCC et des autorités.
OBJECTIF SÉNÉGAL
CARMEN ABD ALI POUR JA
« Les Africains sont conscients que personne ne développera leur continent pour eux. C’est vrai pour le textile et c’est vrai pour le reste », déclare la fashion designer.
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OBJECTIF SÉNÉGAL
MODE
Marie Madeleine Diouf, la griffe sérère À la tête de la marque NuNu Design by DK, la styliste mise sur la recherche textile pour développer ses collections, entre création et engagement.
MARIÈME SOUMARÉ
S
ur le pagne, le dégradé de couleur s’étend du fuchsia profond au rose clair, avec des nuances de mauve. La teinture s’obtient en utilisant des bourgeons de cactus que l’on fait tremper pendant des heures dans l’eau pour en retirer les épines, avant de les écraser au pilon et au mortier. On laisse ensuite le tissu s’imprégner de la substance obtenue, d’un rouge rosé. « Une teinte comme celle-ci, c’est impossible à trouver en industrie », sourit Marie Madeleine Diouf. Encore faut-il parvenir à la fixer sur le pagne. « Qu’on fasse sécher les tissus à froid ou au soleil, la couleur a tendance à s’altérer. Il faudrait que l’on trouve un moyen de la conserver naturellement », ajoute la créatrice. Depuis qu’elle a ouvert sa propre boutique, NuNu Design by DK, dans la capitale sénégalaise, la Dakaroise expérimente autant qu’elle le peut de nouveaux procédés de peinture pour créer ses pièces. Cette teinture au cactus, elle l’a testée au début de l’année lors d’un atelier réalisé au cours d’une résidence à Gandiol (Saint-Louis) avec des femmes de la région. Elle a également expérimenté la teinture à l’argile, qui est tamisée et qu’on laisse macérer avant de la mêler aux tissus, auxquels elle donne un ton ocre et naturel. « L’idée, c’est de partager notre expérience avec ces femmes afin qu’elles puissent l’intégrer et l’utiliser pour leurs commerces », détaille Marie Madeleine Diouf. Une expérience qu’elle a ellemême acquise en autodidacte.
Avant de se lancer dans la mode et le design, cette entrepreneuse de 41 ans était assistante médicale. En 2015, lassée par son domaine de compétences, elle démissionne pour lancer sa propre affaire, en dépit des mises en garde de ses proches. « J’ai commencé sans vraiment savoir où j’allais, avec 60 000 F CFA [moins de 100 euros] de fonds de commerce et ma petite machine à coudre personnelle. Mais je n’ai pas hésité. J’avais envie de faire ce qui me plaisait. »
« Tradimoderne »
Avec une idée de départ : promouvoir à travers ses collections les savoirfaire et l’héritage culturel du continent. Dans sa petite boutique nichée au cœur du centre-ville de Dakar, les pièces font la part belle aux tissus et aux coloris typiques de la sousrégion. À l’arrière de la salle de vente et dans la cour intérieure, les couturiers s’affairent, et les pagnes indigo, trempés dans l’eau et le vinaigre pour que leur couleur résiste, sèchent au soleil. L’indigo est l’une des couleurs emblématiques de NuNu Design. Une partie des tissus (du bazin, du pagne tissé) sont achetés à Labé, en Guinée ; d’autres sont teints directement à Dakar. Marie Madeleine Diouf utilise aussi du tiwan, ou « pagne noir », habit traditionnel sérère utilisé lors des cérémonies, ou du koko dunda burkinabè. « À travers mes pièces, j’essaie de raconter le vécu des peuples qui ont conçu le textile », déclare la créatrice, qui définit son style comme « tradimoderne » et
« authentique ». « Réfléchir sur l’héritage de nos tissus serait un moyen de réfléchir au développement de nos territoires », assure la quadragénaire engagée. Marie Madeleine Diouf a progressivement agrandi sa boutique et son équipe. L’épidémie de Covid-19 a toutefois drastiquement ralenti son activité et l’a forcée à se séparer de la moitié de sa dizaine d’employés. Avec la réouverture de son principal lieu de vente, en juillet, elle espère cependant retrouver rapidement son rythme de croisière. Elle prévoit également de vendre ses collections dans différents concept stores de la
Elle commercialise aussi des senteurs à base de thiouraye, un encens à l’odeur entêtante, caractéristique du patrimoine culturel local. capitale. Lancée il y a bientôt sept ans, sa société produit cinq collections chaque année et plusieurs centaines de nouvelles pièces par semaine. Dans la lignée de ses collections, elle commercialise également des senteurs à base de thiouraye, cet encens à l’odeur entêtante, caractéristique du patrimoine culturel sénégalais. En y incorporant d’autres effluves, elle produit JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
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CARMEN ABD ALI POUR JA
OBJECTIF SÉNÉGAL
Dans sa boutique située dans le quartier de Dakar-Plateau, le 9 novembre.
des mélanges liquides aux senteurs moins lourdes que celle de cet outil de séduction traditionnel. Chacun des sept flacons porte le nom de l’une des ancêtres de sa lignée maternelle, à commencer par
sa grand-mère. Originaire du village de Fadiouth (Sine-Saloum), la créatrice a à cœur de magnifier la culture sérère. Passionnée de photographie, elle a également monté en 2020 l’exposition Fadiidi (« bienvenue », en
L’INDIGO, COULEUR PHARE DE NUNU DESIGN BY DK L’un des principaux savoir-faire utilisés par la créatrice est la teinture indigo. Qu’il s’agisse de travailler le bazin ou le lépi (un pagne traditionnel originaire de Guinée), cette teinture aux dégradés de bleu est agrémentée de dessins faits à l’aiguille et au fil. Un procédé minutieux qui aurait été disséminé à travers le continent par les Soninkés.
L’extraction naturelle se fait à partir de l’écorce d’indigotier, un arbuste que l’on trouve sur le continent africain, mais également en Amérique et en Asie. Une matière végétale peut également être utilisée, fabriquée à base de poudre qui vient majoritairement d’Inde. La « pièce maîtresse » de la marque NuNu Design est un modèle indigo (tunique ou
robe) assemblé avec les poches extérieures d’un jean bleu récupérées dans les friperies de la capitale.« C’est le modèle qui marche le mieux, assure Marie Madeleine Diouf. Il revient dans toutes mes collections, d’une manière ou d’une autre.» Comme un exemple de cette fusion entre tradition et modernité dont elle a fait sa marque de fabrique. M.S.
sérère), dans laquelle elle exposait des clichés du xxe siècle (1930-1980) dénichés au fil des années dans les archives familiales. Elle veut également privilégier le travail à la main pour ses pièces. « C’est une partie de notre héritage, rappelle-t-elle, et puis ça nous apprend la patience ! » Son engagement est aussi écologique : en expérimentant de nouveaux procédés de teinture, la designer tente de trouver des techniques le plus naturelles possible tout en générant un minimum de déchets. Elle se satisfait donc de constater que le wax perd peu à peu son statut de tissu africain par excellence, et que des méthodes ancestrales et des tissus traditionnels, comme le bogolan, sont remis au goût du jour. « C’est le processus normal de ce que l’Afrique doit proposer au monde. Les Africains sont conscients que personne ne développera leur continent pour eux. C’est vrai pour le textile, et c’est vrai pour le reste : approprions-nous ce qui nous ressemble. C’est ainsi que nous pourrons nous développer. » JEUNE AFRIQUE – N° 3107 – DECEMBRE 2021
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Le fleuve Sénégal
Levier de développement économique et social
CONTRIBUER À LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE
La centrale de Manantali au pied du barrage.
L’Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal (OMVS) a été créée le 11 mars 1972 par le Mali, la Mauritanie et le Sénégal, rejoints en 2006 par la Guinée, afin d’asseoir les bases d’une gestion concertée et harmonieuse des ressources en eau du bassin. Celle-ci repose sur plusieurs grands axes : aménagements hydro-agricoles, production d’énergie électrique, navigation fluviale et environnement. TROIS QUESTIONS À
Hamed Diane Séméga Haut-Commissaire de l’Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal (OMVS)
« Nous avons donné un coup d’accélérateur au traitement des dossiers stratégiques »
Les grands ouvrages réalisés par l’OMVS, en particulier le barrage anti-sel de Diama et son réservoir de 250 à 535 millions de m3, ont créé un potentiel de plus de 400 000 ha de terres irrigables, dont 130 000 sont exploités. Le bassin du fleuve Sénégal est aujourd’hui le théâtre d’une production agricole intensive qui contribue à la souveraineté alimentaire des pays membres. Cette contribution se renforce avec le Plan d’Action Régional pour l’Amélioration des Cultures Irriguées (PARACI) qui a obtenu un premier financement de 4,5 milliards F CFA (6,9 millions d’euros) pour son Projet d’Appui au Développement des Filières Semencières dans le bassin du fleuve Sénégal (PAFISEM). L’impact s’apprécie aussi sur l’eau potable. Nouakchott par exemple tire 100 % et Dakar 60 % de leurs besoins en eau potable à partir du fleuve Sénégal (grâce à la retenue d’eau de Diama), sans compter les localités riveraines.
Quel bilan tirez-vous de votre action en tant que haut-commissaire de l’OMVS ? Les chefs d’État de la Guinée, du Mali, de la Mauritanie et du Sénégal m’ont confié la noble charge de diriger l’Organisation pour la Mise en Valeur du fleuve Sénégal depuis juillet 2017. Au regard de l’organigramme et du mode de fonctionnement de l‘OMVS, le Haut-Commissaire est à la tête de tout une équipe de dirigeants de haut niveau, responsables des entités qui composent le système, notamment les sociétés de gestion de patrimoine. Les réalisations imputables à mon mandat ont été accomplies avec eux. Je pense que l’ADN de ce mandat, c’est vraiment d’avoir donné un coup d’accélérateur au traitement de dossiers stratégiques qui souffraient de retard ou de blocage pour diverses raisons, ainsi qu’à la recherche de financements pour nos projets.
COMMUNIQUÉ
Les ouvrages de l’OMVS : Manantali (800 GWh/an), Félou (350 GWh) et bientôt Gouina génèrent de l’hydroélectricité mise à disposition des sociétés nationales d’électricité des États membres, via un réseau de transport d’énergie de 1700 km. Le renforcement du réseau est en cours grâce à 1000 km de lignes haute tension supplémentaires et de grands nœuds permettant de positionner l’OMVS au cœur du marché ouest africain de l’énergie (WAPP). Les prochains ouvrages hydroélectriques programmés permettront de mobiliser un potentiel de 2000 MW. L’ « Initiative 400 MW » va diversifier les sources d’énergie en introduisant le solaire.
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AU CŒUR DU MARCHE OUEST AFRICAIN DE L’ÉNERGIE
La pollution par l’orpaillage menace le fleuve.
L’INTÉGRATION PAR LA NAVIGATION Le projet Navigation vise à restaurer le transport fluvial tout au long de l’année de Saint Louis au Sénégal à Ambidédi au Mali. Il devra favoriser le décollage économique du bassin et la valorisation de ses ressources naturelles en améliorant les conditions d’accès aux marchés extérieurs pour les régions enclavées. Le contrat commercial pour les travaux a été signé et le financement est en cours de mobilisation.
UN LEADERSHIP IINTERNATIONAL
Le président du conseil des ministres visite le chantier de Gouina.
Pouvez-vous nous en dire plus à propos des projets ? Plusieurs grands projets d’infrastructures ont franchi des étapes décisives. Il s’agit de la signature des contrats commerciaux du projet d’aménagement hydroélectrique de Koukoutamba, en février 2019, et du projet de navigation sur le fleuve Sénégal, en octobre 2019, après une léthargie de presque 40 ans. La mobilisation des financements nécessaires auprès des bailleurs est à un stade avancé. Nous prendrons bientôt livraison du barrage hydroélectrique de Gouina, exécuté à plus de 90% en 4 ans, ce qui est un record, grâce à un suivi rigoureux. Nous avons conduit au pas de charge un vaste programme de maintenance et de sécurisation de nos ouvrages, qui sont aujourd’hui des dames d’un certain âge, à savoir le barrage anti-sel de Diama situé dans le bas delta du fleuve, à cheval
Pour son expérience de gestion pacifique des eaux partagées, l’OMVS a été désignée par deux fois meilleur organisme de bassin au monde. Elle assure le secrétariat technique permanent du Réseau Africain des Organismes de Bassin (RAOB). Elle a été désignée partenaire stratégique pour la priorité «Coopération » du 9e forum mondial de l’eau qui se tiendra en mars 2022 à Dakar.
entre la Mauritanie et le Sénégal, et le complexe hydroélectrique de Manantali, dont les groupes ont fait l’objet d’une révision complète. Cette réhabilitation est couplée à la réalisation en cours de 1000 kilomètres de lignes haute tension supplémentaires. Parallèlement, nous avons bouclé les études concernant nos prochains ouvrages, dont celui de Gourbassi, pour lequel une requête de financement a même été présentée en mai dernier au gouvernement chinois. Les performances du Projet de Gestion Intégrée des Ressources en Eau (PGIRE), qui nous a permis d’investir massivement dans le développement à la base et l’amélioration des revenus des populations les plus vulnérables, sont également édifiantes. Une diligence accrue dans l’exécution des activités s’est traduite par des taux de décaissement qui sont passés de 23% au mois de juin 2017 à 82% au 30 avril 2020.
Où en est la réforme de l’OMVS ? Je suis particulièrement satisfait d’avoir pu poser les jalons d’une réforme en profondeur de l’Organisation pour en améliorer la gouvernance. Différentes études ont proposé des mesures concrètes et innovantes pour harmoniser et mettre en cohérence la gouvernance de l’OMVS, mais également favoriser un financement durable. L’objectif est de réduire le poids des contributions des États membres aux budgets de fonctionnement et d’investissement, notamment par la mise en place d’un Fonds pour l’autofinancement de l’OMVS. Cette mue institutionnelle, qui devrait être adoptée par la prochaine Conférence des chefs d’État, dessine les contours d’une nouvelle OMVS, moderne, plus résiliente, dotée d’outils, de structures et de compétences en adéquation avec les nouveaux défis.
www.omvs.org