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Débat Les nouveaux philanthropes

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 56e année • no 2897 • du 17 au 23 juillet 2016

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Gabon Que peut espérer l’opposition ?

jeuneafrique.com

Internet Dans la jungle de l’e-commerce

O G N O C RD

r i n e v a L’ é l l i t n i o p n e es frontièr s le t n éfis. o pays, d breux d m le o , s n e e u eàd olitiq ns faire fac itudes p 0 millio t 1 it r t o e c e d , in 8 s des que. sinée entre Au-delà ie publi é redes ation – v t r é é la t n n é à g o fois res elle intérieu remière ne nouv p u r la e r g u r o ES me ipera p . L 24 PAG n ic t IA o r Et voit é i C a t É p P a i S t mu es – qu ant en é g de jeun n u te sur Enquê


Inaugurée en octobre 2010, BGFIBank RDC focalise sa gestion sur un développement commercial soutenu et innovant, une offre de services personnalisée et l’atteinte d’une performance financière maîtrisée. À fin 2015, la banque emploie 133 collaborateurs répartis dans un réseau comptant huit agences dans les villes de Kinshasa (3 agences), Bunia, Lubumbashi, Matadi, Boma et récemment Mbuji-Mayi. EnvIRonnEMEnt éConoMIquE L’économie nationale connait depuis plusieurs années une croissance macroéconomique de l’ordre de 9,5% tirée essentiellement par l’essor de l’industrie minière. Depuis près de deux ans, cette courbe haussière a subi les revers du ralentissement des grandes économies mondiales, chinoise en particulier, avec comme conséquence pour la RDC une forte baisse de la demande étrangère des produits miniers. L’abrègement consécutif des cours et la diminution de la production ont engendré l’affaissement des recettes de l’Etat dont une importante quotité provient de l’industrie minière. Une situation qui caractérise les défis que doit relever le secteur des PME sous traitantes des grands opérateurs miniers. PERCéE DE BGFIBank RDC Dans cet environnement économique devenu délicat, les résultats de BGFIBank RDC sont au rendez-vous des efforts accomplis, en particulier durant ces deux dernières années : la banque compte huit agences bancaires utilement réparties dans le pays ainsi qu’un guichet de 15 caisses, à kinshasa, dédiées à l’accueil des fonctionnaires et agents de l’état bancarisés conformément à la campagne de bancarisation propulsée par le gouvernement.

Ce guichet, ainsi que les agences des les villes de Boma et de Mbuji-Mayi, ont été ouverts en 2015. au terme de son 5ème exercice d’exploitation, BGFIBank RDC réussit une belle pénétration du marché bancaire. Sur 18 banques actives dans le pays, BGFIBank RDC se positionne au 6e rang en termes de total de bilan et de crédits, et au 7e rang en termes de dépôts. À noter que, dans le même temps, le total de bilan de l’ensemble du secteur bancaire n’a crû que de 9 % en 2015 contre 27 % en 2014 et 32 % en 2013. évoLutIon pRoGREssIvE vERs La pERFoRManCE Ces résultats illustrent le succès de la stratégie de la banque qui se positionne comme la banque des grandes entreprises qu’elle accompagne en développant son réseau d’agences bancaires. En parallèle, concourent à la performance : la dynamique commerciale et la qualité du service offert, la rapidité des réactions et des prises de décisions, le savoir-faire et les compétences des femmes et des hommes au service du

BGFIBank RDC se positionne, au terme de son cinquième exercice social, parmi le TOP 5 des banques les plus rentables du pays

client, la bonne connaissance du marché et de ses enjeux ainsi que la parfaite maîtrise des frais généraux. L’exercice 2016 s’annonce exigeant pour les banques compte tenu des perspectives économiques modérées en ce début d’année. Il n’empêche que, dans un secteur bancaire très compétitif, BGFIBank RDC ambitionne de renforcer sa pénétration du marché par une entrée dans le top 5 en se démarquant de la concurrence par une offre spécialisée et distinctive pour accompagner le développement de sa clientèle cible à travers la banque des grandes entreprises et institutionnels et la banque de détail pour accompagner les PME/PMI ainsi que les particuliers.


LE PLUS

de Jeune Afrique

POLITIQUE À l’heure du bilan

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JEUNESSE Pourront-ils faire entendre leur voix? TERRITOIRES Une réforme à parachever ÉCONOMIE L’or noir ne fait pas encore recette

Défis majeurs Au-delà des incertitudes politiques, une nouvelle génération arrive dans la vie publique au moment où le pays a redessiné ses frontières intérieures. Autant de challenges à relever.

JEUNE AFRIQUE

N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

SIPHIWE SIBEKO/REUTERS

RD CONGO


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Le Plus de Jeune Afrique

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Prélude François Soudan

Minuit moins une

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ses ministres, ses affidés ou ses bailleurs our le meilleur comme pour le pire, de fonds : Kamerhe, Kamitatu, Katumbi, la scène politique congolaise ressemble à un jeu d’échecs à somme Lumbi… Avec eux, les dés sont jetés, et leur défection, vécue comme une trahison par nulle. Plus personne ne croit que la l’intéressé, l’a comme replongé dans ses présidentielle et les législatives se tiendront réflexes d’antan. Le Kabila de juillet 2016 d’ici à la fin de cette année, et plus personne est plus que jamais secret et indéchiffrable, ne se risque à prévoir de quoi seront faits les cinq mois à venir. Dans ce pays-continent technique de survie que lui a enseignée son aux 70 millions d’habitants, 40 millions père dès l’enfance, quand il lui fallait sans d’électeurs, 26 provinces et 700 partis policesse changer de nom et de lieu pour échapper aux « hiboux », les tueurs de Mobutu tiques, aucune élection n’a eu lieu à date lancés sur les traces de la famille. échue depuis l’indépendance. Une sorte de malédiction calendaire à laquelle l’oppoSi le dialogue échoue, ou avorte, il ne sition affirme ne plus se résigner. Mieux restera plus que le rapport des forces. vaut, dit-elle, des élections imparfaites que le maintien au pouvoir de Joseph Kabila L’opposition, qui bénéficie d’un préjugé au-delà du 19 décembre, un minimum de favorable au sein d’une partie de la comvolonté politique et l’assistance de la communauté internationale (États-Unis, Union européenne, secrétariat général de l’ONU), munauté internationale pouvant permettre a pour elle la société civile, le soutien de de conjurer ce qui est perçu par elle comme un viol de la légalité constitutionnelle. la majorité de la diaspora et l’impact des S’il paraît clair que le président sortant ne sera pas La situation reste à la merci des candidat à sa propre sucsnipers et des boutefeux, qui ne cession, sa décision de prolonger son mandat le temps manqueront pas dans les deux camps. d’organiser des consultations réseaux sociaux. Tshisekedi a ses divisions, techniquement irréprochables et d’y présenKamerhe et le G7 leurs bataillons, Katumbi ter un dauphin susceptible de l’emporter (et peut-êtredefigurerdansunesortederemake sa célébrité (dont il conviendra de voir dans congolais du scénario Poutine-Medvedev) quelle mesure elle se convertit en populasemble, elle aussi, évidente. Deux camps, rité). Leur arme : les manifestations et la désobéissance civile. aux intérêts et aux stratégies contraires, se Le pouvoir, lui, dispose d’un parti largefont donc face, comme deux trains lancés ment implanté, de quelques alliés comme en sens inverse sur la même voie. Collision le très lumumbiste Gizenga, et joue à fond inévitable? La Conférence épiscopale nationale du Congo, qui appelle à un « sursaut la carte, toujours payante dans l’ex-Zaïre, du patriotique », le Conseil de sécurité de l’ONU nationalisme face aux « diktats » de l’étranger et à ses « agents » locaux. Il contrôle l’appareil danssarésolution2277, leGroupedesoutien à la facilitation autour d’Edem Kodjo, de sécuritaire, les gouverneurs de province et les PDG des grandes sociétés d’État. Son Maman Sidikou et de Smail Chergui veulent croire que le fil du dialogue entre les deux arme: le maintien de l’ordre et des ressources parties n’est pas rompu. Il est ténu tant est financières à disposition. La situation est élevé l’Everest de méfiance qui les sépare. donc volatile, à la merci des boutefeux et Paradoxalement, ce dernier est peut-être des snipers qui ne sauraient manquer, dans moins infranchissable entre Kabila et celui l’un et l’autre camp. De Kinshasa à Goma, de qui n’a jamais reconnu sa légitimité, Étienne Kisangani à Lubumbashi, il est minuit moins Tshisekedi, qu’entre Kabila et tous ceux une. À peine le temps que les invectives qui, à un moment ou à un autre, ont été cèdent enfin la place au dialogue. JEUNE AFRIQUE

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POLITIQUE À l’heure du bilan JEUNESSE Pourront-ils faire entendre leur voix ?

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INTERVIEW Maker Mwangu Famba, ministre de l’Enseignement primaire p. 63 TERRITOIRES Une réforme à parachever p. 66 ÉCONOMIE L’or noir ne fait pas encore recette PORTRAITS Sur le pont

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INTERVIEW Germain Kambinga, ministre de l’Industrie p. 82 TRANSPORTS

En route pour la capitale p. 84 MÉDIAS Chantal Kanyimbo, singulière et ambitieuse p. 92 CULTURE La scène de tous les p. 94 possibles


Le Plus de Jeune Afrique

RD CONGO

À l’heure du

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TRÉSOR KIBANGULA, envoyé spécial

place déchu, les nouveaux maîtres de Kinshasa tait-ce son dernier message solennel tentent, avec l’aide de l’Angola, de reconstituer à la nation ? Rien n’est moins sûr. Ne dérogeant pas à ses habitudes, l’armée congolaise en s’appuyant sur ces kadogo, Joseph Kabila s’est adressé à ses rebaptisés Bana Mura, dont l’essentiel des hommes compatriotes à la veille des festivicompose aujourd’hui la garde républicaine. Mais, au cœur de la nouvelle guerre, Kabila père est tés commémoratives de l’indépendance du pays, le mercredi 29 juin au soir. Son assassiné dans son palais. Désigner Kabila fils second mandat expire à la fin de l’année et, en pour lui succéder fut ainsi un « choix judicieux l’état actuel de la Constitution, il ne peut plus se qui a évité la révolte des troupes », explique ce proche collaborateur du chef de l’État. représenter. Il n’a pourtant rien laissé transparaître, ni sur ses intentions ni sur son avenir politique. Joseph Kabila se retrouve alors à la tête d’un pays morcelé. Très rapidement, il décide de relancer C’est pourtant sur ces terrains-là que beaucoup, les discussions avec les rebelles qui contrôlaient en interne et au-delà des frontières nationales, l’est et le nord du territoire national. « Avec la attendaient ce chef d’État secret et taciturne. Mais formule 1+4 [un président assisté de quatre vicecelui que ses détracteurs soupçonnent de vouloir présidents], il a accepté de partager le pouvoir se maintenir au pouvoir est resté muet sur le sujet, pour que la RD Congo se réunifie », reconnaît un se contentant d’affirmer que « plus rien ne pourra arrêter le train des futures élections ». Avec ou sans diplomate occidental, ancien membre du Comité lui ? Le suspense demeure, et ses lieutenants mulinternational d’accompagnement de la transition tiplient les ballons d’essai dans la perspective de (CIAT). C’est également sous Kabila fils que le négocier un prolongement du bail de pays organise ses premières élections leur champion à la tête du pays, par la présidentielles pluralistes, d’abord en L’appel au 2006 puis en 2011. « Dans ce pays où voie d’une révision constitutionnelle, « dialogue l’arrivée d’un homme au sommet de d’un changement de la Constitution, national l’État a toujours fait couler le sang, voire d’un référendum. inclusif » il voulait changer définitivement le BATAILLE. En attendant, place au mode d’accès au pouvoir », commente peine à Kikaya. bilan. Quinze années se sont écoulées convaincre depuis que Joseph Kabila est arrivé au au-delà CONSOLIDATION. Mais deux quinpouvoir, à la mi-janvier 2001. Il n’avait que 29 ans à l’époque, mais dirigeait de son camp. quennats plus tard, au moment de passer le flambeau, la machine élecdéjà les forces terrestres de l’armée congolaise. Un leadership militaire que le fils aîné torale semble s’être enrayée, et la tenue de la préde Laurent-Désiré Kabila avait acquis quelques sidentielle dans les délais constitutionnels semble années plus tôt. « Il était à la tête des kadogo désormais bien incertaine. Ce qui risque d’« anni[“petits”, en swahili], ces jeunes gens appuyés par hiler les efforts consentis pour la consolidation de l’État de droit démocratique », estime l’opposant des troupes régulières rwandaises qui constituaient l’armée de son père, alors chef rebelle », rappelle Moïse Moni Della, leader des Conservateurs de la nature et démocrates (Conade), qui a adressé fin Barnabé Kikaya Bin Karubi, son principal conseiller diplomatique. « Avec James Kabarebe [aujourd’hui juin une lettre ouverte au chef de l’État l’invitant à ministre rwandais de la Défense], explique-t-il, démissionner « au plus tard le 19 décembre », au Joseph Kabila a conduit et remporté en mars 1997 terme de son second mandat. Kabila, lui, appelle la la grande bataille de Kisangani, dans le nord-est classe politique et la société civile à un « dialogue national inclusif ». Lequel peine à convaincre du Zaïre, alors que le pouvoir de Mobutu proau-delà de son camp. mettait de défendre jusqu’au bout la troisième Les perspectives socio-économiques comville du pays, menaçant de mener des “contreoffensives foudroyantes”. » Une fois le régime en mencent également à s’assombrir. Stable quand N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

Des supporters de Joseph Kabila attendent leur candidat pour un meeting à Goma, le 14 novembre 2011.

GWENN DUBOURTHOUMIEU

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JEUNE AFRIQUE


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bilan

JEUNE AFRIQUE

Ses lieutenants rêvent d’une prolongation de son bail à la tête de l’État. Lui ne laisse rien deviner de ses intentions. En attendant d’en savoir plus sur l’avenir politique de Joseph Kabila, retour sur ses quinze années au pouvoir.

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Le Plus de J.A. L’inflation, qui dépassait les 120 %, est passée à Matata Ponyo était aux affaires (ministre des moins de 1 %. Finances en 2010, puis Premier ministre depuis 2012), le franc congolais est désormais en perte Pour le sénateur Mokonda Bonza, le pouvoir est néanmoins loin du compte. « En quinze années de vitesse face au dollar. Et les taux de croissance, notamment à cause de la chute des matières de règne, rien n’a été fait pour la population. Pas premières, sont sans cesse revus à la d’eau courante, pas d’électricité. Pis, baisse. Un coup dur pour le pouvoir Kabila n’a pas été capable d’assurer À petits pas… d’achat, et qui a creusé plus encore le la sécurité intérieure et extérieure du Indicateurs sociaux 2005 2015 fossé entre les riches et les pauvres. Et pays », tacle l’ancien directeur de cabice malgré la multiplication par trois ces net de Mobutu. Et de nombreux parteClassement IDH, 167e 176e sur 188 pays dernières années du salaire des fonctionnaires internationaux de la RD Congo, naires. « Un militaire touche aujourd’hui Union européenne et États-Unis en tête, Indice 71,3 % 63,3 % de pauvreté 115 dollars [104 euros], contre 35 dans dénoncent de leur côté le « rétrécissele passé, relève une source gouvernement de l’espace politique » caractérisé 55 % Taux de scolarisation ces derniers mois par une campagne mentale. C’est encore insuffisant, mais 68,6 % de répression contre les opposants pour être visibles les efforts entrepris 97 ‰ Taux de mortalité au régime. Des ingérences étrangères doivent être inscrits dans la durée. Le infantile 74,5 ‰ « intempestives et illicites dans les pays était tombé trop bas. Aujourd’hui, PIB par 554 $ 732 $ affaires de politique intérieure » de la les Congolais n’ont retrouvé que leur habitant niveau de vie de 1990 ! » RD Congo, rétorque le président Kabila. 48,7 Espérance Toujours aussi droit dans ses bottes. Quelques performances macroécono42 ans de vie ans Pour l’instant. miques ont néanmoins été enregistrées.

Questions à Corneille Nangaa Président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni)

« Nous ne sommes pas les seuls à exiger un consensus politique »

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n fonction depuis 2015, Corneille Nangaa s’est attelé à relancer le processus électoral. Avec quelques résultats, comme le plan de décaissement de 300 millions de dollars, la promulgation de la loi sur l’identification et l’enrôlement des électeurs et l’organisation de l’élection des gouverneurs des 21 nouvelles provinces. JEUNE AFRIQUE: Pourquoi la Ceni n’estelle pas en mesure de publier le nouveau calendrier électoral ? CORNEILLE NANGAA : Ce calendrier

nécessite des consultations. La Ceni en a déjà publié trois. Ils n’ont pas été exécutés. Nous avons retenu quelques hypothèses sur lesquelles nous allons travailler. En attendant, nous lançons dès le 31 juillet le processus d’enrôlement des électeurs dans la province du Nord-Ubangi [Nord-Ouest].

Que répondez-vous à ceux qui soutiennent que la Ceni trahit son indépendance lorsqu’elle attend l’instruction des politiques avant de publier le calendrier des élections? N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

La Ceni est indépendante, mais elle opère dans un environnement constitutionnel bien déterminé, et les parties prenantes au processus sont nombreuses. Elle ne peut pas agir sans tenir compte des uns et des autres. Nous ne sommes d’ailleurs pas les seuls à exiger un consensus politique avant de publier un nouveau chronogramme des scrutins. La résolution du Conseil de sécurité et les rapports concertés Nations unies-OIF ont clairement indiqué qu’une publication arbitraire du calendrier électoral par la Ceni peut être source de violence. Selon la Ceni, le processus de révision du fichier électoral prendra au moins « seize mois et un jour ». Donc pas de présidentielle dans les délais constitutionnels. Qui est responsable de ce « glissement » ?

Ce n’est pas à la Ceni d’établir les responsabilités. En février 2015, nous avions publié un calendrier global qui prévoyait le scrutin présidentiel dans les délais constitutionnels. Ce chronogramme était assorti de 23 contraintes. Nous avons évalué le processus

GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

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électoral et indiqué qu’il fallait seize mois et un jour pour constituer un nouveau fichier fiable. Ces seize mois courent depuis février, et il ne nous en reste que onze. Comment concilier cette contrainte technique au respect des délais constitutionnels ? En 2005 et en 2006, lorsque le second tour n’avait pas pu se tenir dans les quinze jours comme prévu à l’époque par la Constitution, les Congolais avaient trouvé une solution. J’ai confiance en la responsabilité des acteurs politiques. Car ce qu’ils ont tous en commun et de plus cher, ce n’est pas leur positionnement, opposition ou majorité, mais bien la RD Congo. Propos recueillis par TRÉSOR KIBANGULA JEUNE AFRIQUE



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Le Plus de J.A. RD Congo POLITIQUE

Pourront-ils faire entendre leur voix? L’actuelle liste électorale, qui exclut nombre de jeunes majeurs, pourrait ne pas être révisée avant la présidentielle. Au grand dam de toute une génération. Reportage à travers le pays.

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ici à la fin de l’année, ils seront quelque dix millions. Dix millions de jeunes qui auront fêté leurs 18 ans, l’âge légal pour voter, mais dont les noms ne figurent pas sur le fichier électoral. La carte d’électeur servant de « pièce d’identité provisoire », la plupart d’entre eux – ceux qui n’ont pas les moyens de payer 180 dollars (162 euros) pour se procurer un passeport – vivent donc sans papiers dans leur propre pays. Et, par voie de conséquence, sans droit de vote. Pis, leur sort a même été relégué un temps au second plan, après que la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a publié, à la mi-février 2015, le « calendrier global des élections ». « À l’époque, le chronogramme électoral voulait que le processus démarre par les scrutins provinciaux et locaux pour épuiser les arriérés électoraux de 2006 et de 2011, lorsque les élections locales n’avaient pas pu se tenir. Seuls les électeurs déjà inscrits pouvaient donc voter.

Et les nouveaux majeurs devaient encore attendre leur tour », confesse un proche de l’abbé Apollinaire Malumalu, ancien président de la Ceni (décédé le 30 juin). Rejeté par l’opposition, le calendrier a depuis été abandonné. FICHIER CORROMPU. « Cela a été un stratagème de plus pour retarder la tenue delaprésidentielledanslesdélaisconstitutionnels », estime Martin Fayulu. Candidat déclaré à la présidentielle, le leader de l’Engagement pour la citoyenneté et le développement (Ecidé) et coordonnateur des Forces acquises au changement (FAC) rappelle également que, depuis 2013, son parti et la coalition dont il est membre ont toujours plaidé pour l’enrôlement de tous les électeurs. D’autant que « le fichier électoral de 2011 a été jugé corrompu et comprend des noms de personnes décédées et des doublons, alors que les nouveaux majeurs n’y figurent pas », explique-t‑il. L’idée a depuis fait son chemin, et le présidentJosephKabilalui-mêmelereconnaît

Lubumbashi « Il y a de l’argent ici, mais on n’en voit pas la couleur »

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n ce dimanche soir, commed’autresjeunes de leur âge, Gad, Tourins, Enock, Wembo et Idriss traînent à la « plage », au bord du lac Kipopo. Dans ce centre commercial huppé de Lubumbashi, il y a des cafés, des salles de jeux vidéo et des terrains de sport. Pour tous ces étudiants, c’est la veille de la reprise des cours, mais, pour l’heure, la douceur de la nuit invite à paresser sur un muret. Du moins, si les vigiles leur en laissent le loisir. Car à peine sont-ils assis que l’un d’eux s’approche, casquette

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vissée sur le crâne. « Désolé, vous connaissez les règles, vous ne pouvez pas rester là. » À Lubumbashi, depuis plusieurs semaines, l’appareil sécuritaire est sur les dents. Tout rassemblement de jeunes, même en petit nombre, est dispersé. « Si tu oses manifester, tu disparais », assure Gad. Lui et ses amis ne

Les prochaines élections ? Ils n’en attendent pas grand-chose.

sont pas très politisés, mais ils ont soif de changement. « Les difficultés sont surtoutfinancières,lanceWembo dans un français parfait. Les frais scolaires augmentent chaque année. » « Et pour réussir, s’indigne Gad, il faut distribuerdespots-de-vin.Les professeursnousfontéchouer délibérément. Puis on nous dit : “Il y a un autre circuit. Pour 15 dollars, tu peux réussir l’examen. L’université, c’est pas pour les pauvres”. » « À la maison, on est obligé de mentir, renchérit Wembo. Si on dit la vérité, nos parents nous

accusent de n’avoir pas assez travaillé. » Et puis le diplôme n’est même pas une garantie de réussite. « Il y a plein de gens qui ne trouvent pas de travail jusqu’à l’âge de 30 ou de 40 ans », poursuit Wembo. Alors on préfère rêver à un avenir radicalement différent pour fuir la fatalité de ce quotidien : réussir dans la musique, s’expatrier en Europe ou aux États-Unis… SÉSAME. Ces jeunes ne sont pourtant pas les plus à plaindre. Leurs parents sont fonctionnaires ou JEUNE AFRIQUE


Défis majeurs aujourd’hui: le fichier électoral est « peu fiable et non inclusif en raison de l’exclusion de plusieurs millions d’électeurs, au nombre desquels des jeunes majeurs et les Congolais vivant à l’étranger », a-t‑il relevé lors de son message à la nation, le 29 juin, à la veille du 56e anniversaire de l’indépendance du pays. « Tout le monde s’accorde aujourd’hui sur la nécessité de reprendre tout à zéro et d’enregistrer tous les électeurs », confirme Patrick Muyaya, 34 ans, député du Parti lumumbiste unifié,quiconvoitelesnouveauxmajeurs.Avec d’autres parlementaires de sa génération, il a d’ailleurs mis en place un « caucus ». « Nous allons nous impliquer pour sensibiliser les jeunes afin qu’ils s’inscrivent massivement sur les listes électorales », reprend l’élu du district de la Funa, dans le sud de Kinshasa. Et la Ceni semble disposée à leur fournir le matériel et les outils nécessaires à cette mission. IMPOSSIBLE. Maissileconsensusaffichésurla

PIERRE BOISSELET, envoyé spécial

TRÉSOR KIBANGULA

GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

et qui, espèrent-ils, sera leur sésame contre les arrestations arbitraires. « Comme nous sommes sans papiers, à tout moment la police peut nous soupçonner de ne pas être congolais et nous arrêter », explique Enock. Une des nombreuses familles expatriées de cette provinceminièrepassedevant lepetitgroupeetentredansun restaurant chic. « Il y a beaucoup d’argent dans ce pays, lance Idriss, amer. Le problème, c’est que les habitants n’en voient pas la couleur. »

question était un leurre? « Le président Joseph Kabila et les siens ont accepté notre position sur ce dossier, mais ils ont un agenda caché: ils espèrent, grâce au temps nécessaire pour l’enrôlementdesnouveauxélecteurs,obtenirle glissement du calendrier électoral. C’est pourquoilaCeniadéjàannoncéqueceprocessusva prendre au moins seize mois et un jour », peste MartinFayulu,convaincuque«cinquantejours suffiraient largement » pour inscrire quelque 40 millions de Congolais sur le nouveau fichier. « C’est une mission impossible, rétorque un expert électoral. Les politiques doivent avoir l’honnêteté de dire la vérité au peuple : la révision intégrale du fichier électoral s’étendra au-delà du délai constitutionnel prévu pour la tenue de la présidentielle. » Abondant dans le même sens, la Cour constitutionnelle a de son côté indiqué, dans son arrêt du 11 mai, que, « suivant le principe de la continuité de l’État et pour éviter le vide à sa tête, le président actuel reste en fonction jusqu’à l’installation effective du nouveau président élu ». Depuis cette décision, la coalition au pouvoir jubile. « Kabila, wumela ! », scandent ses partisans pour demander à leur champion de « rester » dans son fauteuil. Flouée, l’opposition ne s’avoue pas vaincue et décide même de se radicaliser, boudant au passage le « dialogue politique national inclusif » convoqué par le chef de l’État, dont elle attend la démission le 20 décembre, au lendemaindelafindesondeuxièmeetderniermandatconstitutionnel.Maintenusbienloindeces bisbilles technico-politiciennes, les nouveaux majeurs observent et attendent impatiemment d’avoir eux aussi voix au chapitre.

Stade de Kinshasa, en juin 2016.

commerçants. Ils sont vêtus à la mode, et portent des lunettes de soleil dernier cri. Ils gardent leurs distances avec les jeunes qui traînent un peu plus loin – « je crois que ce sont des voyous », se méfie l’un d’eux –, mais ne font pas non plus partie des puissants, dont ils dénoncent les privilèges. « La raison du plus fort est toujours la meilleure », lance Idriss. Les prochaines élections ? Ils n’en attendent pas grandchose.Sicen’estleurpremière carte d’électeur, seule pièce d’identité qu’ils posséderont JEUNE AFRIQUE

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Le Plus de J.A. RD Congo

Kinshasa « Il nous faut quelqu’un qui ait une vision collective »

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alvani, 21 ans, ne cache plus son agacement. « Les années passent et rien ne change », grogne cet étudiant en maintenance des réseaux dans un institut supérieur de Kinshasa. Il habite N’Djili, l’une des communes les plus peuplées de la capitale. « Ici, c’est la loi de la débrouille. Le gouvernement nous chante “stabilité macroéconomique” et “taux de croissance en nette évolution”, mais nous n’en voyons pas l’impact sur notre quotidien », peste-t‑il, « pressé d’avoir [sa] carte d’électeur pour sanctionner ». En attendant, son avenir l’inquiète : « C’est probablement le chômage qui Ceux qui n’ont pu continuer nous attend à la sortie de la fac. » leurs études se débrouillent Quelque 15 km plus au nord de pour gagner leur vie. N’Djili, c’est l’effervescence au rondpoint Victoire. Malgré une chaleur suffocante, le carrefour le plus célèbre les électeurs », s’énerve Doudou. Lui et ses amis ne comptent même pas pardu pays est bondé. D’un côté, ceux qui attendent désespérément une place ticiper à l’enrôlement des électeurs sur dans un « esprit de mort » – l’un de ces les prochaines listes. Convaincus qu’ils minibus Mercedes 207 interdits dans sont que « rien ne changera jamais ». Dans le quartier de la Gombe, le centre de Kinshasa mais tolérés dans une petite foule de jeunes à l’allure les autres quartiers de la capitale –, studieuse se presse à l’entrée d’un de l’autre, ceux qui sont là souvent depuis très tôt le matin pour s’adonconcert de musique chrétienne évanner à des « cops », ces petites activités gélique. On est en plein centre-ville de informelles. Il y a là des cambistes, Kinshasa, mais la plupart de ceux qui des « chayeurs » (vendeurs ambusont là viennent de quartiers populants ou à la sauvette), des « wewas » laires de la capitale. Certains ont revêtu (motos-taxis), mais aussi des « charleurs plus beaux atours pour prier, geurs », comme Doudou et sa bande, danser et chanter. cinq jeunes âgés de 19 à Jonathan, 19 ans, fer23 ans qui viennent de vent adepte, est étudiant Jonathan Ngaba, dans le sud de la en littérature. Il accepte capitale. Dans un lingala souhaite voter, de parler de politique bien kinois, Dieumerci, quelques minutes, en car c’est son le plus jeune, se confie : attendant que ses amis le devoir « Faute de moyens finanrejoignent. « Je n’ai encore ciers, nous n’avons pas jamais voté et je souhaite de citoyen. le faire, c’est mon devoir pu continuer nos études. Et chaque matin nous venons ici pour de citoyen. J’attends l’enrôlement sur les charger des passagers. » Comprendre : listes électorales dans le calme, mais si faire les rabatteurs pour les chaufcela prend trop de temps, je n’irai pas feurs de taxi contre 500 FC (environ pour autant dans la rue », prévient-il, 0,50 euro). craignant des troubles préélectoraux qui gâcheraient son année universiAussi, les esprits s’échauffent lorsque la discussion glisse sur la classe politaire 2016-2017. « Je ne veux pas être chômeur à cause de la politique, mais tique. « Président, ministres, députés, tous des menteurs ! Avant d’être aux je n’aime ni la violence ni les pillages », affaires, ils font des promesses. Arrivés explique encore Jonathan, soucieux de au pouvoir, ils s’achètent des bagnoles préparer au mieux le concours d’entrée de luxe, des immeubles, et ils oublient de l’académie d’architecture. Son camp

N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

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politique – celui de Joseph Kabila – est, affirme-t‑il, celui du maintien de l’ordre public. « Je me suis rendu compte en discutant avec mon père que le président travaillait bien. Il a fait avancer les grands chantiers d’infrastructures du pays », estime le jeune homme, qui vit chez ses parents, dans le quartier de Kasa-Vubu. Autre son de cloche chez Junior, Blaise et Valéry-Justin, qui ont entre 22 et 23 ans. « NOUVELLES TÊTES ». Eux aussi

s’intéressent à la politique, mais ils sont remontés contre le « manque de sérieux » des politiciens congolais en général, et en particulier de ceux qui sont au pouvoir. « Ils pensent tous à leur petite personne », estime Blaise. « J’aimerais voter pour quelqu’un qui aurait une vision collective », renchérit Valéry-Justin. « Nous avons besoin de nouvelles têtes », affirme Blaise. « Nous voulons sentir que notre voix peut changer le système », fait valoir Junior. Pour autant, les trois camarades des communes de Kalamu et de Mont-Ngafula, engrandebanlieuedeKinshasa,ne sont pas prêts à s’encarter. Encore moins à s’engager physiquement pour défendre leurs idées dans la rue. « Nous rejetons la violence. On veut le changement, mais dans la stabilité », résume Junior, quelque peu contradictoire. T.K. et CHRISTOPHE LE BEC, envoyés spéciaux JEUNE AFRIQUE


Défis majeurs ÉDUCATION

Maker Mwangu Famba « Grâce à la gratuité, les enfants ont repris le chemin de l’école »

JEUNE AFRIQUE: Pourquoi le phénomène de la prise en charge des salaires des enseignants par les parents d’élèves perdure-t‑il dans les écoles publiques alors que le budget alloué à l’éducation est passé de 4 % à 16 % ? MAKER MWANGU FAMBA: Beaucoup ont

gardé à l’esprit le discours des années 1990. À cette période, quand le budget de l’Éducation nationale représentait à peine 1 % du PIB, l’école était en effet totalement prise en charge par les ménages. Cette démarche, que je qualifierais de résiliente, avait permis au système éducatif congolais de faire face à la crise. Mais, aujourd’hui, l’État paie un salaire mensuel aux enseignants. Et même si cette rémunération est encore modeste, elle est passée de moins de 20 dollars à un minimum de 100 dollars. L’État s’occupe également des frais de fonctionnement des établissements publics du primaire. Le phénomène dont vous parlez existe encore dans certains cas, mais personne ne peut dire aujourd’hui que l’État ne fait rien.

trois de ses enfants d’accéder à des soins de qualité. Elle couvre toutes les maladies, sans exception. Elle est pour l’instant réservée au personnel de Kinshasa, de Lubumbashi et de Mbandaka. Il est prévu qu’elle s’étende progressivement à l’ensemble du territoire. Où en est la politique de la gratuité de l’enseignement primaire ?

Beaucoup d’enfants congolais n’étaient pas ou plus scolarisés. Il a fallu prendre des mesures. Nous avons ainsi opté pour la gratuité. Je me suis rendu au Kenya, en Tanzanie et en Ouganda, des pays qui nous ont précédés dans la mise en œuvre de cette stratégie. Nous avons ensuite adapté leur approche à notre propre réalité. En RD Congo, nous avançons doucement : d’abord les trois premières

Comment évolue la mutuelle de santé créée en faveur des enseignants ?

C’est une première en Afrique et un exemple à suivre. Il s’agit d’une prise en charge équitable entre l’État et l’enseignant, dont la contribution est retenue à la source. Depuis 2011, la mutuelle de santé mise en place permet à l’enseignant, à son conjoint et à JEUNE AFRIQUE

u Le ministre de l’Enseignement primaire, le 23 juin, à Kinshasa.

années du primaire, gratuites depuis 2010, puis la quatrième, et aujourd’hui la cinquième. Nous privilégions également les enfants qui vivent en milieu rural. Cette politique nous a permis de passer de quelque 11 millions d’élèves en 2007 à 18 millions en 2016. Dans certains villages, une salle de classe peut compter jusqu’à 180 élèves! C’est certes trop, mais l’enfant congolais a repris le chemin de l’école. Le gouvernement s’est également donné pour objectif de construire 1 000 écoles par an…

L’État n’en avait pas construit depuis l’indépendance. Dans les villages, les cours avaient lieu dans les huttes, voire sous les manguiers. Un gouvernement responsable ne pouvait pas laisser cette situation perdurer. Nous avons donc d’abord élaboré un manuel de procédure pour construire des écoles à moindre coût avec des matériaux locaux. Ensuite, les ressources financières ont pu être débloquées. À ce jour, nous comptons environ 750 chantiers, implantés surtout dans les campagnes, dont les deux tiers ont déjà été achevés et livrés. Des difficultés liées notamment à la géographie de certains lieux ne nous ont pas permis d’atteindre l’objectif de 1 000 écoles. Mais nous allons continuer, parce que les besoins sont considérables.

© GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

I

ndéboulonnable ! Depuis le premier gouvernement d’Antoine Gizenga, en 2007, il occupe le ministère de l’Enseignement primaire, secondaire et professionnel. À 55 ans, il gère également, depuis peu, l’Initiation à la nouvelle citoyenneté, avec pour mission de relancer le secteur éducatif.

Beaucoup de jeunes en âge de voter ne sont pas inscrits sur les listes. Que pensez-vous du débat autour de la révision du fichier électoral ?

Il faut permettre aux nouveaux majeurs de s’exprimer. Et le meilleur moyen d’y parvenir, c’est le vote. Si les acteurs politiques décidaient de ne pas réviser le fichier électoral, ce serait antidémocratique. Propos recueillis par TRÉSOR KIBANGULA N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

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Le Plus de J.A. RD Congo TERRITOIRES

Une réforme à parachever La Constitution prévoyait le redécoupage des provinces. C’est chose faite depuis un an. Elles attendent maintenant de disposer de moyens financiers.

E

lle était pour le moins attendue. Inscrite dans la Constitution de 2006, la réforme territoriale qui prévoyait le passage de onze à vingt-six provinces a finalement été mise en œuvre, dans la précipitation, en 2015. Un calendrier qui a provoqué des suspicions. Beaucoup ont en effet craint que le gouvernement cherche, notamment par ce moyen, à contrecarrer l’influence de l’ex-homme fort du Katanga, Moïse Katumbi, passé dans l’opposition. Et ce fut bien l’une des conséquences de ce démembrement. Le pouvoir central a pu reprendre le contrôle de quinze des vingt nouvelles provinces. Dans l’ex-Katanga, les autorités des quatre entités issues du découpage élues avec le soutien de Kinshasa sont unanimement hostiles à Katumbi, qui a pourtant été leur gouverneur élu pendant une décennie… Mais ça n’a pas été le seul effet. Partout sur le territoire des villes sont devenues chefs-lieux de ces nouvelles provinces et hébergent des gouverneurs et des gouvernements provinciaux. De quoi redonner espoir à la population, qui espère que ses élus, désormais plus proches d’elle, seront davantage à l’écoute de ses problèmes, comme c’est déjà le cas à Kolwezi (lire pp. 67-68). Seront-ils déçus ? L’expérience montre qu’il vaut mieux rester prudent. L’autonomie de certaines provinces, relativement riches et constituées de longue date, comme le Bas-Congo – renommé Kongo central – ne leur a jusqu’ici guère bénéficié. Davantage qu’une décentralisation, qui suppose de conférer moyens et liberté aux nouvelles entités, c’est une déconcentration que Kinshasa a mise en œuvre : le gouvernement central conserve un contrôle étroit sur les provinces et refuse toujours de leur rétrocéder les 40 % des recettes fiscales qui devraient leur revenir. Cela aussi, pourtant, est prévu par la PIERRE BOISSELET Constitution. N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

SudUbangi

NordUbangi

Bas-Uele

Province orientale

Mongala

ANCIENNES PROVINCES

Haut-Uele

Ituri

Tshopo

Équateur Équateur

NordKivu

Tshuapa

Mai-Ndombe

Sankuru

Bandundu Kinshasa

Kasaï

Kwilu

Bas-Congo

Kasaï- Maniema Oriental Lulua

KasaïOccidental

Lomami KasaïOriental

SudKivu

Tanganyika

Kwango Haut-Lomami

Katanga

Lualaba

District

Haut-Katanga

Province

SudUbangi

NordUbangi

Bas-Uele

Haut-Uele

Mongala

NOUVEAU DÉCOUPAGE

Ituri

Tshopo Équateur

NordKivu

Tshuapa

Mai-Ndombe

Sankuru Maniema

Kinshasa

Kwilu

Kasaï Lulua Lomami KasaïOriental

Kongo central

Sud-Kivu

Tanganyika

Kwango Haut-Lomami Lualaba Haut-Katanga

Provinces non découpées Provinces issues du découpage JEUNE AFRIQUE


GWENN DUBOURTHOUMIEU

Défis majeurs

Sur un marché du centre de Lubumbashi, capitale de la province minière de l’ex-Katanga, un commerçant vend des souvenirs en malachite.

Les leçons du « Kolwexit » Le démembrement des territoires améliore bel et bien le quotidien des Katangais.

C

est provisoire, mais c’est déjà confortable. Pour se réunir, la nouvelle assemblée provinciale du Lualaba dispose d’une vaste salle dans le centre de Kolwezi, avec un large bureau sur une estrade décorée de drapeaux congolais. Le secrétariat est certes encore un peu à l’étroit dans des bureaux cloisonnés par des planches de bois, mais il y a bien assez de gradins pour accueillir les députés provinciaux qui y siègent. Autrefois,legrandhallservaitdesalledes fêtes pour les employés de la Gécamines, la grande entreprise créée par les colons belges pour gérer les immenses ressources minièrescongolaises.Elleestensuitedevenue la plus puissante des sociétés d’État du pays. Qu’elle est encore aujourd’hui, bien que dans une moindre mesure. JEUNE AFRIQUE

Ce bâtiment est loin d’être une exception : presque toute la ville de Kolwezi – quelque 500000 habitants aujourd’hui – a été bâtie par l’industrie minière qui exploite les ressources environnantes. Ses employés expatriés y étaient logés, de même que les travailleurs locaux – les deux groupes vivaient dans des quartiers strictement séparés. Pas vraiment d’autre vocation pour cette cité qui n’a longtemps été qu’une périphérie du grand Katanga. Riche, certes, mais toujours dépendante de sa capitale d’alors, Lubumbashi. IMPULSION. Depuis 2015, ce n’est plus

le cas. À la faveur de la réforme territoriale, le Lualaba est devenu une province autonome, dont Kolwezi est la capitale. À sa tête, Richard Muyej Mangeze, l’ancien ministre del’Intérieur. Uncolosse souriant, dont chaque pas résonne sur les murs immaculés. Le nouveau gouvernorat, flambant neuf, a été édifié sur le terrain de la mairie, partie s’installer un peu plus loin.«Vousêtesdansunbâtimentconstruit en cent jours », lance fièrement Muyej.

Vu de Kolwezi, le redécoupage des provinces a permis l’émancipation de la tutelle de Lubumbashi. Un « Kolwexit », en somme. Avec son sous-sol immensément riche et les mines les plus modernes du pays, comme celle de Tenke Fungurume, la nouvelle province redonne de l’espoir à ses habitants, qui pourraient bénéficier de ses richesses plus directement. La réforme a été très bien accueillie, et ses premiers effets ont été rapidement visibles. L’hôpital général est en pleine rénovation, le rond-point du centre-ville en réfection. Très vite après sa nomination au poste de commissaire spécial par le président Joseph Kabila, en 2015, Richard Muyej Mangeze a ordonné ces grands travaux pour que le changement – et son arrivée – soit remarqué. « Cette partie du territoire a été abandonnée, lance-t‑il. Quand vous aviez mal aux dents, vous deviez prendre un bus pour Lubumbashi ! » Cette impulsion était d’autant plus nécessaire que l’économie de la région a nettement ralenti. La sécheresse, qui frappe les voisins de l’Afrique australe, dont dépend cette partie du pays pour son approvisionnement en nourriture, devrait faire augmenter les prix des denrées de base. Et, dans le même temps, le cours des minerais a beaucoup baissé. Certaines mines ont réduit leur production et leur personnel, d’autres, comme Kamoto Copper Company, ont dû stopper leur activité. Mas Muyej est rassurant : « Cela affecte peu nos recettes, jure-t‑il, car nos taxes portent sur le tonnage plus que sur la valeur des exportations. » DÉSENCLAVER. Reste que, pour finan-

cer ces grands travaux, le gouverneur a dû faire appel à des prêts. Ces investissements seront-ils soutenables à long terme? Il n’imagine en tout cas pas s’éterniser dans la région. Il veut seulement lui donner de l’élan. Pour pallier les difficultés du secteur minier, le gouverneur veut relancer le secteur agricole – une idée que partagent tous les décideurs congolais depuis des décennies sans avoir réussi à lui faire prendre forme – et parie sur un hypothétique lancement du secteur touristique. Mais il voudrait surtout désenclaver sa province pour sortir de la dépendance de Lubumbashi, où transite pour l’instant l’essentiel de la production du territoire. La solution : construire la route vers N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

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Le Plus de J.A. RD Congo Solwezi, en Zambie, et réhabiliter le chemin de fer qui rejoint l’Angola. Ce projet, qui dépend du feu vert de Kinshasa, pourrait, à terme, faire de Kolwezi un carrefour de communication, notamment pour le Haut-Lomami, une des nouvelles provinces issues du démembrement du Katanga. Sans frontière avec les pays voisins, cette province ne dispose d’aucune infrastructure, et surtout pas des ressources minières de Kolwezi. « Mon homologue du Haut-Lomami se plaint d’avoir trouvé les caisses vides, confie Jean-Claude Kazembe, gouverneur du Haut-Katanga, dans son bureau de Lubumbashi. Si l’État

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ne répartit pas équitablement les moyens, certaines provinces vont déchanter et ne soutiendront plus le découpage. » ACCEPTÉE. Lui n’a pas eu besoin de faire de grands travaux pour s’installer : il a repris le gouvernorat qu’occupait avant lui Moïse Katumbi, du temps du grand Katanga. Seul le territoire qu’il administre s’est considérablement réduit. Les Lushois ne sont-ils pas frustrés par cette réforme qui acte leur relative perte d’influence ? « Le Haut-Katanga reste quatre fois plus vaste que la Belgique, assure Kazembe. Et puis certains habitants avaient l’impression d’étouffer, de ne plus être chez eux, du

fait de l’afflux de toutes les communautés à Lubumbashi. » « On pouvait penser que les nouvelles provinces les moins riches se seraient senties lésées, mais, globalement, la réforme territoriale a été très bien acceptée par la population, assure un diplomate basé à Lubumbashi. Elle voit l’Administration se rapprocher d’eux et espère pourvoir lui faire part de ses problèmes plus facilement. » Mais pour que cette première impression persiste, encore faut-il donner à ces nouvelles entités les moyens de répondre aux préoccupations de leurs administrés. Sous la contrainte de la crise économique actuelle… PIERRE BOISSELET

GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

Loin de Kinshasa, le Kongo central regarde vers Luanda

C’est par le port de Banana, à l’embouchure du fleuve Congo, que transite l’essentiel du trafic de carburant provenant de l’Angola.

L

e Bas-Congo est devenu le Kongo central, mais c’est bien tout ce qui a changé depuis l’application de la loi de décentralisation, en 2015. Contrairement à beaucoup d’autres provinces, ses frontières n’ont pas bougé, et même son nom n’est pas vraiment une nouveauté. C’est déjà ainsi qu’était appelée, au lendemain de l’indépendance, cette partie du pays, en référence au royaume historique qui s’étendait entre le Congovoisinetl’Angola.AuKongocentral, l’identité, voire l’unité, des populations bakongos est donc forte. Et Kinshasa est JEUNE AFRIQUE

loin. Après Matadi, l’influence de la capitale s’érode à mesure que l’état des routes se dégrade. Le littoral a les yeux tournés vers le Cabinda, et le trafic transfrontalier bat son plein grâce au bon état des infrastructures de transport dans l’enclave. L’Angola et son industrie pétrolière exercent même un véritable attrait auprès de la population locale, et de nombreux Congolais n’hésitent pas à tenter d’immigrer chez le voisin lusophone, où les perspectives de travail semblent bien plus prometteuses. Un mouvement inverse à celui des années 1975-2002, lorsque,

pendant la guerre civile, les Bakongos angolais partaient se réfugier de l’autre côté du fleuve. Un an après la réforme, le sentiment d’attachement de la région à Kinshasa ne semble guère s’être renforcé. Et le fait que la capitale garde la haute main sur les grands projets provinciaux, des ports de Matadi, Boma et Banana aux barrages d’Inga et de Zongo, ne devrait pas inverser la tendance. Loin d’être incarnée par un pouvoir local démuni, la décentralisation reste pour l’instant un vain mot au Kongo central. CHRISTOPHE LE BEC N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016


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Le Plus de J.A. Défis majeurs

Puits de pétrole près de Muanda, le 28 juin.

© GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

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ÉCONOMIE

L’or noir ne fait pas encore recette Le secteur des hydrocarbures peine à se développer. Excepté à Muanda, unique zone d’exploitation de tout le territoire, où le pétrole est roi.

A

tteindre l’embouchure du fleuve Congo, ça se mérite ! Les cent derniers kilomètres de la route nationale 1, qui relie Muanda à Kinshasa, mettent à rude épreuve les véhicules qui empruntent cette piste ensablée menant tout droit à l’océan. Au bout du chemin, à l’horizon, des dizaines de torchères éclairent la nuit. Signe que le visiteur va bientôt atteindre la ville pétrolière, chef-lieu de l’unique zone d’exploitation du brut enfermé dans le sous-sol de la République démocratique du Congo.

À Muanda, le secteur des hydrocarbures est roi. Et depuis longtemps. « L’américain Chevron, actif au Cabinda angolais tout proche, s’est implanté en premier, dans les années 1970, pour exploiter les gisements en mer. Puis, dans les années 1980, le belge Fina [qui a fusionné avec Total en 1999] a démarré l’exploitation des gisements à terre », raconte Baptiste Breton, directeur général de Perenco pour la RD Congo. C’est ce groupe franco-britannique, dirigé depuis Londres, qui a repris en 2001 l’activité onshore de Fina, puis, en

Regain de croissance en vue…

« Doing Business » 2016

8 6

Croissance

4

184e

Inflation

sur 189

(gain de 3 places)

2 0

2014 JEUNE AFRIQUE

2015

2016

2017

2018

2004 et en 2005, les champs offshore de Chevron. Des acquisitions qui font aujourd’hui de lui le seul producteur de pétrole du pays, puisque aucun autre projet n’est entré en exploitation depuis lors. MISSION. « En RD Congo comme ailleurs,

le modèle économique de Perenco est de racheter des gisements en fin de vie à des majors – comme Total ou Chevron – et d’en optimiser l’exploitation », explique Baptiste Breton, qui estime avoir parfaitement réussi cette mission

… avec les félicitations du FMI La RD Congo aligne les taux de croissance parmi les plus élevés du continent, mais l’économie souffre de la baisse des cours des matières premières, constatée depuis 2015. Les prévisions de la Banque centrale du Congo, en accord avec celles du FMI, tablent sur une croissance comprise entre 5,1 % et 5,3 % pour 2016. Elle était de 6,9 % l’an dernier. Le gouvernement a déjà réduit la voilure en baissant de 22 % les dépenses budgétaires de l’État. Il envisage d’accroître les recettes fiscales et cherche à attirer les investissements privés. Autant de mesures saluées par les experts du FMI, en visite dans le pays en juin. Seule l’inflation, qui pourrait dépasser 2,5 % d’ici à 2018, contre 1,6 % cette année, inquiète les observateurs. OLIVIER CASLIN N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016


Le Plus de J.A. RD Congo

© GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

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La base du pétrolier franco-britannique Perenco, à Banana, à l’embouchure du fleuve Congo, dans l’extrême ouest du pays.

à Muanda. « Cela fait quinze ans que nous sommes dans la région, précise-t-il. Nous avons toujours maintenu la production, de 9500 barils par jour pour la partie onshore, et de 12 500 barils pour la partie offshore. Quand nous sommes arrivés, il n’y avait que 150 puits de pétrole onshore, il y en a aujourd’hui environ 400 ! » De fait, tout l’arrière-pays de Muanda, jusqu’au Cabinda, est truffé de forages, reliés entre eux par un réseau de pipelines

d’une trentaine de kilomètres. « Il y a cinq stations de production, qui concentrent l’ensemble de l’exploitation, séparant l’huile et le gaz. La première est envoyée dans le pipeline d’exportation, le second brûlé par les torchères ou utilisé pour la production d’électricité », explique l’ingénieur Stéphane Rolland, qui dirige, pour Perenco, la station de Kinkasi où sont installées les nouvelles turbines électrogènes arrivées il y a seulement

deux mois. « Grâce au gaz, nous fournissons l’électricité à toute la ville en approvisionnant le réseau géré par la Société nationale d’électricité », précise le patron du site. Depuis la côte de Muanda, seuls quelques-uns des 70 puits de forage offshore sont visibles. « Il y a très peu de fond au large de la ville, entre 2 et 20 mètres, mais cela rend l’exploitation parfois plus difficile en raison

CAP À L’EST

E

© GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

n plus de la zone située à l’embouchure du fleuve Congo, deux autres zones géologiques recèlent un fort potentiel pétrolier : la Cuvette centrale, dans la province de

l’Équateur, frontalière avec le Congo-Brazzaville, où travaille notamment le britannique Soco International ; et la région du lac Albert et du lac Édouard,

D’importantes réserves ont été identifiées dans la région du lac Albert et du lac Édouard. N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

où est implantéTotal ainsi que les petites sociétés Foxwhelp et Caprikat, de l’homme d’affaires israélien controversé Dan Gertler. C’est de cette dernière région que pourraient venir les perspectives les plus intéressantes.Total vient de réaliser une étude géologique sismique sur son permis d’exploration au sud-est du lac Albert. « Il est encore trop tôt pour en avoir les résultats, mais, grâce à notre projet ougandais voisin, un modèle économique pourrait se dessiner si nous trouvions des réserves prometteuses », indique Guy Maurice, directeur Afrique du géant

pétrolier français. Qui estime que le pétrole de l’est de la RD Congo pourrait être exporté par le pipeline Ouganda-Tanzanie, dont le parcours vient d’être avalisé par les autorités de Kampala. Reste que les questions environnementales font débat dans cette région, comme en témoignent les polémiques sur l’exploration pétrolière réalisée par Soco International sur le bloc V, près du lac Édouard. Accusé de corruption et de pollution du Parc national des Virunga, sur lequel empiétait sa licence, le groupe britannique a dû y cesser ses activités en juin 2014. CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE


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Le Plus de J.A. RD Congo des forts courants et des marées », explique Baptiste Breton. Tout le pétrole, onshore et offshore, est évacué par le pipeline et stocké sur une barge pouvant contenir jusqu’à 650 000 barils, ancrée à une vingtaine de kilomètres de la côte. Le brut est ensuite exporté par un navire tanker, qui effectue des rotations toutes les cinq semaines. AT Y P I Q U E . La production de la RD Congo, assurée depuis Muanda par le seul Perenco, est modeste au regard des standards de l’industrie. Avec ses 22 000 barils par jour au total, le pays fait figure de Lilliputien face au géant angolais, qui en a produit 1,8 million par jour en 2015. Même à l’échelle de Perenco, l’activité congolaise pèse peu. Le groupe extrait environ 45 000 barils par jour – soit deux fois plus – du sous-sol du CongoBrazzaville, et autour de 75000 barils tant au Gabon qu’au Cameroun.

« La RD Congo n’est pas un pays pétrolier, et notre filiale dans ce pays est atypique, notamment du fait de son isolement logistique, note Baptiste Breton. Muanda, contrairement à Pointe-Noire, la capitale pétrolière régionale, n’abrite pas de sociétés de services pétroliers comme Schlumberger ou Technip. Nous faisons donc le maximum nous-mêmes, en

une production dans le pays, pour étoffer un tissu industriel bien moins développé que celui du secteur minier. « Bien qu’il soit difficile d’avoir des chiffres précis, la population de Muanda a probablement quadruplé en une dizaine d’années du fait de l’industrie pétrolière. Beaucoup de gens sont venus en ville dans l’espoir de travailler pour nous ou pour un sous-traitant. Mais nous sommes encore bien seuls. Les Perenco extrait deux fois plus de sociétés Energulf et Surge brut au Congo-Brazzaville, et trois Stream ont bien une activité d’exploration dans la fois plus au Gabon et au Cameroun. région, mais elles n’ont pas encore annoncé de projet d’entrée développant les compétences au niveau en exploitation. Quant au démarrage local avec 850 employés, dont seuled’une production dans d’autres régions ment une dizaine d’expatriés. Et nous du pays (lire encadré), on en est encore essayons de recourir le moins possible aux techniciens, qu’il faut faire venir de loin », regrette Baptiste Breton, qui pense Pointe-Noire et qui coûtent cher », ajoute que la conjoncture morose de son secteur, le dirigeant local de Perenco. avec un cours du baril très bas, ne va pas accélérer les choses. Baptiste Breton aimerait toutefois que CHRISTOPHE LE BEC d’autres compagnies démarrent elles aussi

L’ouverture du marché des assurances attire les convoitises

L

e monopole de la Société nationale d’assurances (Sonas) ne devrait plus être qu’un lointain souvenir. La promulgation en mars du décret libéralisant le secteur pourrait bientôt permettre aux particuliers et aux entreprises de choisir enfin leur assureur. « À l’exception d’une modeste indemnisation en cas d’accident de voiture, la Sonas ne versait le plus souvent rien lors de dommages sur les biens et les personnes, affirme un professionnel installé à Lubumbashi. Jusqu’à présent, les plus grandes entreprises, notamment dans le secteur minier, préféraient s’assurer à l’étranger et faisaient “congoliser” leurs contrats en recourant à des courtiers basés en RD Congo en contact avec la Sonas », précise-t-il. L’ouverture du marché a attisé les convoitises, et deux types d’acteurs étudient actuellement les créneaux à exploiter. Sur celui du grand public, deux banques – Rawbank et Trust Merchant Bank (TMB) – souhaitent profiter de leurs réseaux pour proposer des contrats d’assurance. Sur celui des entreprises, les grands groupes sont déjà à la manœuvre, comme le britannique AON, le sudafricain Hollard ou l’américain AIG. « Trois zones intéressent en priorité ces compagnies : le Katanga et l’est de la N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

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Rawbank et Trust Merchant Bank vont proposer des contrats aux particuliers.

RD Congo pour leurs secteurs miniers ; et Kinshasa pour le secteur tertiaire. Les banques ont notamment besoin d’assurer leurs transferts de fonds », détaille notre expert lushois. Reste que la route semble encore longue avant l’entrée réelle de nouveaux acteurs sur ce marché. L’Autorité de régulation et de contrôle des assurances (Arca) a bien été instituée, mais son patron n’a toujours

pas été nommé. « Carole Agito, directrice générale de la Sonas et membre influente du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD, au pouvoir), s’agite pour retarder le plus possible l’entrée en vigueur d’une libéralisation qui pourrait entraîner la faillite de la société d’ici à quatre ans », estime un observateur averti du secteur. C.L.B. JEUNE AFRIQUE


MESSAGE

Modèle de développement intégré, le parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo est destiné aux cultures modernes sur 80 000 hectares.

Développer l’agriculture, plus que jamais une priorité En dépit de bons résultats, l’économie du pays pâtit du ralentissement du secteur minier. Le gouvernement accélère sa politique de diversification et met l’accent sur les produits agricoles et l’agro-industrie.


A

Avec le soutien de la Banque africaine de développement, elle incite les jeunes Congolais à s’intéresser à l’agriculture. Le secteur est d’autant plus prometteur que le Président de la République a depuis longtemps fixé l’objectif de l’autosuffisance alimentaire. Pour le Premier ministre, Matata Ponyo, l’agriculture doit non seulement nourrir cet immense pays, mais aussi limiter les importations alimentaires, qui représentent près de 3 milliards de dollars chaque année.

Fort peu de ces pays ont résisté à l’effondrement des cours. Diverses mesures ont été prises un peu partout sur le continent, allant des théorèmes et principes économiques à la prière, comme on l’a vu en Zambie, qui a consacré le dimanche 18 octobre 2015 au jeûne et au recueillement dans l’espoir de sortir le pays des problèmes économiques. Plus communément, un consensus se dégage en faveur de solutions durables : bâtir des économies résilientes, c’est à dire capables de résister aux chocs endogènes et exogènes. Pour y parvenir, il est indispensable de diversifier les activités en dynamisant d’autres secteurs dont, en premier lieu, l’agriculture.

Le parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo Lancé officiellement le 15 juillet 2014 par le Président de la République en personne, le parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo est un énorme projet couvrant environ 80 000 hectares. Des terres à perte de vue, capables de nourrir le Congo tout entier, et pourquoi pas les pays voisins. Le site emploie aujourd’hui près de 500 personnes, alors que les activités prévues n’ont pas encore atteint les 50 %. À terme, ce parc générera au moins 5 000 emplois permanents.

Créer des emplois et des projets industriels Président de la Banque africaine de développement (BAD) depuis mai 2015, Akinwumi Adesina, qui a été ministre de l’Agriculture et du Développement rural du Nigeria, est un fervent partisan de cette solution. Pour lui, il existe de nombreuses opportunités de développement agricole sur ce continent en plein essor, où les ressources naturelles que sont la terre et le climat sont sous-utilisées. Le secteur est particulièrement porteur, notamment en termes de création d’emplois, y compris pour les jeunes, qu’il faut encourager à concevoir des projets liés à l’agro-business et à y investir. La RD Congo n’a pas attendu la crise et la chute des cours des matières premières pour développer son agriculture et favoriser l’industrialisation locale des ressources agricoles.

 D.R

Moderniser les exploitations et favoriser la transformation industrielle locale.

vec « seulement » 7,7 % de croissance en 2015, après 9,5 % en 2014 et 8,5 % en 2013, la République Démocratique du Congo a connu son premier ralentissement économique depuis le début des années 2000. En cause, le crash financier qui a touché les marchés des matières premières. Il a par ailleurs contraint les États africains dont l’économie reposait essentiellement sur les minerais ou les hydrocarbures à remettre en cause leurs modèles de développement.

Le Président Kabila Kabange (à gauche) et le Premier ministre Matata Ponyo à l’inauguration du PAI de Bukanga-Lonzo.

Ce projet immense est composé de trois volets complémentaires mais distincts, illustration d’un partenariat public-privé qui porte ses fruits. L’État congolais possède des parts majoritaires dans les entités qui le constituent, aux côtés de partenaires sud-africains. Tout d’abord, le Parc Agro-Industriel (PAI) de Bukanga Lonzo est en charge de l’aménage-


 D.R

MESSAGE

À terme, le parc de Bukango-Lonzo générera au moins 5 000 emplois permanents.

ment du site. Vient ensuite la Société d’Exploitation du PAI, en charge de la production, et enfin, le marché international, en charge de la commercialisation. Les partenaires privés apportent leur savoir-faire et leur technologie, dont ils assurent le tranfert par des formations. Un exemple. Au sein-même du parc, un espace est réservé à la production de manioc par les employés locaux du PAI. Ils sont encadrés dans cette activité, ce qui leur permet de bénéficier de transfert de technologie et de fournir des produits alimentaires répondant aux mêmes standards internationaux que ceux produits par le PAI.

tranformation, de conditionnement et de commercialisation des produits du Parc. Un des derniers handicaps à l’essor du PAI de Bukanga-Lonzo vient d’être résolu. Il possède désormais une station de transformation de courant haute tension en moyenne tension, ce qui lui fournit bien plus d’électricité qu’un simple raccordement au réseau. Enfin, au plan social, le parc s’est interdit de produire le manioc, principal produit cultivé par les petits producteurs locaux. En revanche, leur production de manioc est achetée par le PAI, qui assure de ce fait, leur survie.

Grâce aux parcs agro-industriels, la RD Congo pourra nourrir sa population et celle des pays voisins.

Un parc, une chaîne de valeurs

 D.R

Bukanga-Lonzo n’est pas le fruit du hasard. Sa position géographique, à 240 kilomètres à l’est de Kinshasa, permet une évacuation facile de la production, qui sera constituée à terme de volaille, de bovins et d’ovins, ainsi que de légumes. Chaque fois, Madame Ida Naserwa, la Directrice générale, rappelle que le PAI de Bukanga-Lonzo n’est pas une ferme. C’est un carrefour de services déployés et développés sur toute la chaîne de valeurs. C’est donc un complexe de production, de Un poste de transformation assure l’alimentation électrique des installations du parc.


MESSAGE

Chaque parc-industriel assure la production,la transformation, le conditionnement et la commercialisation.

Après l’expérience des mines, dont la production a explosé avant d’être en chute libre depuis bientôt deux ans, le Gouvernement congolais met l’accent sur ce que le pays a de plus précieux : l’immense espace géographique (2,34 millions de km 2) constitué de près de 80 % de terres arables et riches. Pour rendre ce secteur compétitif, il a été décidé d’industrialiser l’agriculture qui, jusqu’à présent, était essentiellement une agriculture de subsistance. Bien entendu, les petits producteurs restent protégés, quoiqu’il advienne. À Bukanga-Lonzo par exemple, ils constituent la main d’œuvre du parc, bénéficiant de ce fait aussi bien de l’accompagnement des partenaires sud-africains que du transfert de leurs technologies. À ce jour, Bukanga-Lonzo est un projet financé par le Gouvernement congolais. Un ballon d’essai qui se révèle une grande réussite : la récolte en cours produit 7 tonnes par hectare. Un argument de nature à convaincre d’autres investisseurs dans le secteur de l’agriculture. Sur l’ensemble du pays, vingt-deux sites ont été identifiés pour l’implantation de parcs agroindustriels. Pour l’année 2016, l’accent est mis sur les sites identifiés à Kalemie (province du Tanganyika), Kindu (province du Maniema), Luiza (Kasai Central) et Nkundi, dans la province du Kongo central. Ils font partie des nombreuses opportunités d’investissements qu’offre ce pays aux énormes potentialités. La stratégie des parcs agro-industriels met l’accent sur l’agriculture, mais aussi sur la transformation industrielle locale. Elle s’appuie sur la qualité des sols et du climat, qui sont propices à d’importants rendements et même à deux récoltes par an. Le pays est situé de part et d’autre de l’Équateur, les saisons alternent entre les parties nord et sud, créant un équilibre sur le débit des cours d’eau. En somme, la RD Congo peut non seulement

nourrir ses 70 millions d’habitants, mais aussi exporter des produits agroalimentaires vers les pays voisins. Grâce à ses multiples fleuves et rivières, l’évacuation des produits n’en sera que facilitée. Partageant ses frontières avec neuf pays, qui constituent autant de marchés potentiels, la RD Congo est en bonne position pour devenir un hub alimentaire, situé en plein cœur de l’Afrique.

Sept tonnes par hectare : les premières récoltes au parc de Bukanga-Lonzo.

Le développement de l’agriculture congolaise aura sans nul doute un effet d’entraînement sur d’autres secteurs d’activité. Au fur et à mesure que les sites se transformeront en parcs agroindustriels, de nouvelles opportunités d’investissements s’ouvriront, notamment dans le domaine du transport et de la logistique. Le gouvernement a lancé un vaste plan de modernisation associant fleuves, route et rail. Le transport multimodal fait en effet partie de moyens de mieux relier les hommes et d’améliorer la productivité et la compétitivité de la République démocratique du Congo.

PRIMATURE DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

5 avenue du roi Baudouin - Gombe-Kinshasa - E-mail : cabinet@primature.cd - http://www.primature.cd/public/

DIFCOM/DF - PHOTOS : MDMM/JA SAUF MENTION.

22 autres parcs agroindustriels en projet


Le Plus de J.A. Défis majeurs

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PORTRAITS

Sur le pont

© VINCENT FOURNIER/J.A.

Homme et femme d’affaires à succès, ou ingénieur hydraulique aux commandes du barrage d’Inga… Rencontre avec ces Congolais qui construisent aujourd’hui leur pays de demain.

Gentiny Ngobila Mbaka Enfant de la balle

O

ù trouve-t-il le temps? En l’espace de deux ans, Gentiny Ngobila Mbaka a pris la présidence du Daring Club Motema Pembe (DCMP), l’un des clubs de football les plus populaires de Kinshasa, et a été nommé puis élu gouverneur du Mai-Ndombe, province de l’ouest du pays née de la reconfiguration territoriale, en 2015. Tout en continuant de siéger à l’Assemblée nationale, au bureau du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD, au pouvoir), et en dirigeant deux sociétés: Universal Security (sécurité)etG-ComServices(Immobilier). Mais lorsqu’il reçoit dans son bureau de Kinshasa, il disserte passionnément de tout autre chose. Dans l’une de ses nombreuses vies, il fut producteur de musique, en France, ce qui lui a permis de côtoyer son idole, Tabu Ley Rochereau, le roi de la rumba congolaise, décédé en 2013. « Il est la source à laquelle s’abreuvent tous les artistes congolais », lance-t-il, les yeux brillants d’admiration. JEUNE AFRIQUE

Cecaractèrehétéroclite,NgobilaMbaka, 52 ans, l’a hérité de son père, Omer, qui fut joueur pour l’équipe junior du DCMP puis directeur de cabinet au ministère de la Fonction publique dans le gouvernement de Patrice Lumumba, avant de se lancer dans les affaires. Et c’est en France, où son père l’avait envoyé étudier, que Gentiny a lancé ses premières affaires, dans la sécurité et le gardiennage. « Nos clients étaient de grandes enseignes comme Décathlon ou Carrefour », s’enorgueillit-il. En 1997, après le renversement de Mobutu par l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) de LaurentDésiré Kabila, il rentre au pays. « J’avais des ambitions politiques, explique-t-il sans ambages. Cofondateur du PPRD, plusieurs fois conseiller ministériel, il est nommé député à la Constituante en 2000, et transfère ses entreprises au pays. Aujourd’hui, sa société UniSec est l’un des principaux acteurs du secteur de la sécurité, qui profite de la faiblesse de l’État

dans ce domaine. « J’ai fait appel à lui pour sécuriser la place du marché. Ses hommes suppléent la police », explique Thierry Bayllon, bourgmestre de Matete. Gentiny Ngobila est peu disert lorsqu’il évoquesesentreprises.Ilrefusededévoiler son chiffre d’affaires et reste évasif sur le nombre de ses employés – « des milliers » – ou sur le nom de ses plus gros clients. Sa formule pour éluder les questions : « Lorsqu’on est engagé en politique, il n’est pas bon de tout dire. » Toujours est-il que cette activité lui permet de participer largement au financement du DCMP (quelque 2 millions de dollars annuels). « Nous avons des partenaires financiers, précise-t-il. Et certains administrateurs du club contribuent aussi, comme le président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku, qui est un ami d’enfance. » Depuis qu’il a pris la présidence, en 2014, sa renommée est montée en flèche. Où s’arrêtera Gentiny Ngobila Mbaka ? PIERRE BOISSELET N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016


Le Plus de J.A. RD Congo

Nicole Sulu Tisseuse de réseaux

© GWENN DUBOURTHOUMIEU/J.A.

S

on sens des affaires ne date pas d’hier. Nicole Sulu, 42 ans, s’est forgé très jeune une expérience en gérant les entreprises familiales dans le charbon ou les produits pharmaceutiques. Avant de partir à Bruxelles pour des études d’orthophoniste. Une fois diplômée, en 2001, elle rentre en RD Congo pour reprendre les affaires de son père, atteint d’un cancer. « J’étais pressée de venir l’épauler », se souvient-elle. À son retour, elle prend les commandes du centre hospitalier et de radiothérapie Nganda, à Kinshasa. « L’un des premiers en Afrique centrale à disposer d’un scanner médical. » Et est confrontée de près à la souffrance de ses compatriotes. « C’est difficile de gérer un hôpital quand la majorité de la population vit dans la misère et n’a pas les moyens financiers de se soigner », avoue-t-elle. Dix ans plus tard, elle quitte le milieu hospitalier pour l’hôtellerie. En 2012, son père la désigne pour prendre la gestion du Sultani Hotel, dans le quartier de La Gombe, à Kinshasa. Elle y a organisé en janvier la première édition de Sultani Makutano, qui a rassemblé plus de 130 chefs d’entreprises congolais. Car Nicole se bat pour constituer un grand réseau d’entrepreneurs congolais à travers le pays. « Cet événement vise à montrer aux jeunes des modèles économiques de réussite, loin de la sphère politique. Leur prouver que l’on peut réussir par le travail. »

Les 16 et 17 septembre, pour sa deuxième édition, Sultani Makutano s’ouvrira aux chefs d’entreprise des autres pays d’Afrique. Ainsi qu’aux représentants des cinq meilleures startup congolaises, qui disposeront chacune de cinq minutes pour vendre un de leur projet. Sous le regard d’un invité de marque : Luc Gerard, entrepreneur d’origine congolaise, aujourd’hui à la tête de Tribeca Asset Management, l’un des plus grands fonds d’investissement d’Amérique latine. TRÉSOR KIBANGULA

Henry Makap Énergie et le sang-froid

© GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

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près vingt-neuf années passées à la Société nationale d’électricité (Snel), Henri Makap est revenu à ses premières amours. Le 14 avril 2015, à 51 ans, cet ingénieur hydroélectricien formé à Kinshasa était nommé directeur de la production Ouest (DPO). Un poste prestigieux puisque c’est dans l’Ouest que la Snel produit la majeure partie de son électricité, avec les barrages, ô combien N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

stratégiques, Inga I et Inga II, qui approvisionnent Kinshasa et Matadi, mais aussi le Congo central et le Katanga. Et une suite logique aux neuf années passées à la direction de la production Sud, dans sa région d’origine, le Katanga. Le DPO est un homme de terrain, aux compétences techniques reconnues par les 331 salariés de la Snel qu’il dirige sur la concession. « Dès qu’il y a un souci sur une

turbine, il descend aux barrages. Il dirige lui-même certaines opérations tendues de maintenance, toujours avec sang-froid », indique l’un de ses collaborateurs. « C’est sans doute pour mon expérience de la réhabilitation des barrages au Katanga que j’ai été nommé ici », estime l’ingénieur. Car les turbines d’Inga I et d’Inga II, entrées en service respectivement en 1972 et 1982, sont en pleine rénovation, et près de 500 employés travaillent sur ces vastes chantiers. L’objectif de ces travaux est de redonner aux barrages leur puissance d’antan, soit 1 772 MW, contre moins de 700 MW aujourd’hui. Makap est tous les jours sur le pont, parfois même le weekend. Il s’assure que les chantiers avancent selon le calendrier prévu et que le personnel s’adapte aux nouveaux équipements. Sans oublier ses tâches habituelles, du bon fonctionnement des turbines à celui des lignes à haute tension qui alimentent Kinshasa et le Katanga. Henri Makap sait que l’enjeu de la réussite de la réhabilitation d’Inga I et d’Inga II est élevé : si la Snel montre sa capacité à redonner de la puissance aux installations actuelles, elle pourra jouer un rôle clé dans l’exploitation des six nouveaux barrages envisagés dans le cadre du mégaprojet du Grand Inga. CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE


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Le Plus de J.A. RD Congo INTERVIEW

Germain Kambinga « Face à la crise, la RD Congo a fait preuve de résistance » Passé par le secteur privé, le ministre de l’Industrie et benjamin du gouvernement a la lourde tâche de diversifier l’économie nationale.

A

ncien porte-parole du Mouvement de libération du Congo (MLC), de Jean-Pierre Bemba, Germain Kambinga dirige le ministère de l’Industrie depuis 2014. Fils de diplomate, cet économiste de formation a étudié dans les meilleures écoles européennes, avant de rentrer au pays pour intégrer le secteur privé. Le « Macron congolais », comme il aime se faire appeler, a été élu député de Kinshasa en 2011, avant donc de faire son entrée dans l’équipe ministérielle Matata II. La nomination de celui qui, à 38 ans, est le benjamin du gouvernement a été pour beaucoup un gage donné à la jeunesse. Il est aujourd’hui chargé de l’un des dossiers les plus importants: la diversification économique de son pays. JEUNE AFRIQUE : Comment qualifieriezvous l’état actuel de l’économie congolaise ? GERMAIN KAMBINGA: Elle est en bonne

santé. Avec une hausse de 6,6 % attendue pour 2016, elle est certes en baisse par rapport aux années précédentes, mais elle reste satisfaisante comparée à celle des pays voisins. Et les efforts réalisés ces dernières années par le gouvernement pour améliorer notre cadre macroéconomique commencent à porter leurs fruits. Personne ne pouvait prévoir cette crise mondiale et ses effets durables. Dans de telles conditions, l’économie de notre pays a fait preuve d’une résilience certaine. La baisse des cours des matières premières a-t-elle poussé le pays à diversifier son économie, essentiellement fondée sur le secteur extractif ?

Le processus a été enclenché il y a plusieurs années. Le secteur extractif représente toujours 40 % du PIB, mais d’autres filières, comme les télécommunications, se sont développées. N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

JOHN BOMPENGO

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Le 15 janvier 2015, lors du lancement de la campagne « made in Congo ».

L’industrialisation de notre économie s’inscrit sur le long terme, surtout que nous partons de très loin. Alors qu’il y avait plus de 2 500 sociétés industrielles viables au lendemain de l’indépendance, on en compte aujourd’hui à peine 350.

Il nous faut des structures viables et qui s’inscrivent dans la durée. Nous ne disposons pas des ressources nécessaires pour de telles implantations. Nous devons donc créer une banque publique consacrée aux investissements industriels. Elle viendra

L’industrialisation s’inscrit sur le long terme. Nous partons de si loin… Quelles stratégies de diversification suivez-vous ?

Nous allons mettre en place des zones économiques spéciales. La première verra le jour dans les prochains mois sur le site de Maluku, pour un investissement de 350 millions de dollars apportés par les secteurs privés congolais et étrangers. Dans l’est de Kinshasa, nous avons investi 130 millions de dollars pour créer, sur plus de 90 000 ha, le parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo, avec l’objectif de développer dans cette région l’agriculture intensive et mécanisée. L’idée est d’installer un parc de ce type dans chaque province. La BAD nous soutient sur ce dossier. Justement, comment assurez-vous le financement de ces structures ?

Nous parlons de projets à long terme.

en complément du Fonds de promotion de l’industrie, mis en place en 1989 et doté d’un budget de 70 millions de dollars. Parallèlement, nous comptons redoubler nos efforts pour améliorer le climat des affaires et attirer ainsi les investissements directs étrangers. Quels résultats attendez-vous de ces zones spéciales ?

Certains sont déjà perceptibles. Dans le secteur de la construction, par exemple, la production locale de ciment a quintuplé en quelques années. Une vingtaine d’entreprises sont déjà en lice pour s’installer sur Maluku. Et plus de 3 000 emplois directs doivent voir le jour sur cette zone ainsi que plus de 20 000 emplois indirects. Propos recueillis par OLIVIER CASLIN JEUNE AFRIQUE


Prix de l’excellence et de l’intégration

T

rouver la perle rare. Pouvoir répondre aux exigences les plus pointues des employeurs toujours à la recherche des meilleurs talents. Telle est notre mission au quotidien depuis plus de dix ans sur tout le territoire de la République Démocratique du Congo.

MD Services est une société 100 % congolaise qui a été créée en 2005 par son Directeur Général, Monsieur Mudogo Didi.

▲ Le 8 juin 2016, Mr Didi Mudogo, DG de MD Services entouré de l’équipe organisatrice à l’occasion de la remise du prix d’excellence de meilleur sous-traitant en gestion des ressources humaines lors de la semaine minière à Lubumbashi.

travaille en étroite collaboration avec ses partenaires en offrant un excellent environnement de travail au personnel et en développant les milieux sociocommunautaires dans lesquels opèrent ses différents clients. Un vrai win-win !

Désormais, forte de ses multiples expériences MD SERVICES accompagne aussi les entreprises nationales et étrangères dans les divers processus d’implantation et d’investissement en RD Congo. Une gamme de services et un niveau de qualité ont permis au directeur général d’être plébiscité comme « Manager RH de l’année 2015/2016 (RH/OUTSOURCING LEADER 2015/2016) en RD Congo » dans le secteur minier lors de la Semaine minière organisée à Lubumbashi le 8 Juin 2016.

Monsieur Mudogo, et Monsieur Mark Bistrow, CEO de Randgold Resources, à Moanda point de chute de la campagne de solidarité nos vies en partage.

Ce prix d’excellence de Meilleur sous-traitant en gestion des ressources humaines est une vraie reconnaissance pour notre investissement quotidien dans le secteur. Ce prix nous a été attribué en présence de 180 professionnels des entreprises influentes dans l’industrie minière, ce qui lui ajoute encore plus de valeur. Le Jury a été particulièrement impressionné par le modèle de MD Services qui

Preuve de son savoir-faire, MD Services recrute et gère le personnel local mais aussi les expatriés. Pour répondre au mieux aux exigences de ses clients, MD Services a su nouer des relations étroites avec les communautés locales, ce qui en fait un partenaire incontournable pour les entreprises qui veulent s’installer en RD Congo et, demain, dans d’autres pays du continent.

Ce prix, c’est aussi pour MD Services et pour Monsieur Mudogo, son Directeur Général, l’occasion de saluer le soutien et la bienveillance de Monsieur Mark Bistrow, le CEO de Randgold Resources. Il a toujours été à nos côtés et s’est engagé à promouvoir les entreprises locales congolaises. MD Services tient aussi à remercier tous ses partenaires pour leur soutien continu. Le succès de MD Services, c’est aussi le succès de tous ses employés qui ne ménagent jamais leurs efforts pour offrir le meilleur à tous les clients.

En RDC Immeuble Future Tower 8e niveau, local 804 - Kinshasa, Gombe Tel. : +243 811 816 938 - Email : info@md-drc.com À Johannesburg : Tél. : +271 161 52 093

COMMUNIQUÉ

Spécialisée dans le recrutement de personnel et la gestion des ressources humaines, MD Services, au fil des ans, s’est bâtie une réputation sans faille dans tout le pays et s’est imposée comme un acteur majeur pour nombre d’entreprises actives dans le secteur minier, mais aussi dans la cimenterie et l’exploration pétrolière.


Le Plus de J.A. RD Congo À la gare centrale de Kinshasa, le 25 juin.

GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

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Des agents du CFMK, dans leur uniforme bleu vif. TRANSPORTS

En route vers la capitale Pour le plus grand bonheur des voyageurs, il est de nouveau possible de rejoindre Kinshasa depuis Matadi en train. Confortablement si on en a les moyens, et, pour tous… en sécurité !

C

e 12 juin, comme tous les dimanches depuis le redémarrage de la liaison de chemin de fer avec Kinshasa, en août 2015, la gare de Matadi est bondée. Peint aux couleurs du pays – le bleu et le rouge –, le train de 7 h 30, arrivé la veille, piaffe avant de pouvoir s’ébranler. Direction : la capitale. À l’entrée du quai, les policiers de la brigade ferroviaire vérifient les billets et les identités de chacun. Des contrôles tatillons qui obligent même certains passagers à préciser une nouvelle fois leur destination et leur profession avant d’être enfin autorisés à rejoindre leur wagon. Derrière la locomotive carburant au gazole, la classe luxe ; à sa suite, la voiture de première; en queue de train, les cinq wagons de seconde. L’heure du départ est annoncée. Sur les quais, l’agitation culmine, pour

quelques minutes encore. Le temps que les agents de la compagnie du Chemin de fer Matadi-Kinshasa (CFMK), reconnaissables à leur uniforme bleu vif, transbahutent les derniers bagages volumineux. SI DIEU LE VEUT. À l’heure indiquée sur

le billet, le train fait retentir son sifflet avant de quitter la gare, située au cœur des installations du port fluvial. Il gagne rapidement en vitesse et laisse derrière lui les dernières maisons de cette capitale provinciale de quelque 300 000 habitants. Il suit d’abord sagement le fleuve Congo, avant de bifurquer une vingtaine de minutes plus tard pour longer l’un de ses affluents, la Mpozo, qui fait office de frontière avec l’Angola. En classe luxe, la climatisation tourne à plein régime. Deux écrans plasma diffusent – dimanche oblige – des clips de musique évangélique,

qui seront suivis de six épisodes d’une série télévisée en lingala qui mêle amour et sorcellerie, pour la plus grande joie des voyageurs. Les sept privilégiés qui s’y sont installés, moyennant 83 330 FC (77 euros), reçoivent à 8 heures la visite du chef adjoint du train, qui vient personnellement leur souhaiter la bienvenue. Avant d’annoncer au micro qu’après un trajet de 365 km le train atteindra Kinshasa vers 14 h 30. « Si Dieu le veut. »

UN CHEMIN DE FER SEMÉ D’EMBÛCHES

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ès la colonisation, le chemin de fer entre Matadi et Kinshasa est apparu comme la seule solution logistique possible entre la capitale et le dernier port accessible depuis l’Atlantique. Réquisitionnés de force, plusieurs milliers de N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

travailleurs sont morts d’épuisement et de mauvais traitements lors des travaux titanesques de construction de la ligne, entre 1880 et 1898. Après l’indépendance, le tronçon a été péniblement exploité par l’Office national des transports (Onatra).

Jusqu’en novembre 2003 et au déraillement d’un convoi qui a coûté la vie à une dizaine de personnes, causant l’arrêt immédiat de l’exploitation de la ligne… pour onze longues années. Ce n’est que depuis la mi-2015, après complète rénovation,

que les trains ont pu de nouveau circuler. D’abord dans le fret, puis dans le transport de passagers à partir d’août. Avec un certain succès, puisque 12700 personnes ont utilisé le train depuis la réouverture du service. CHRISTOPHE LE BEC JEUNE AFRIQUE


GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

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Il espère faire mieux que la veille, lorsque le train est arrivé à Matadi avec près de quarante-cinq minutes de retard. « D’habitude, nous comptons une heure trente de retard en raison de l’état des voies. Ce n’est donc pas très grave », estime Théo Tambwe, un habitué, qui se rend régulièrement à Matadi pour des raisons professionnelles. « Ce n’est pas la vitesse qui compte, mais la sécurité. Et avec le train, on est plus détendu, surtout en classe luxe, où l’on bénéficie de nombreux services », apprécie l’usager. L’argument de la sécurité fait aussi mouche chez ses voisins. « Ici, pas de stress, à la différence du taxi ou du bus », fait valoir Marcel Makaba, cadre supérieur à l’Organisation pour l’équipement de Banana-Kinshasa (OEBK). Il a pris l’habitude d’emprunter le train à chaque fois qu’il doit se rendre à Kinshasa. « La classe luxe est certes plus de trois fois plus chère que la première [24 040 FC pour JEUNE AFRIQUE

un Matadi-Kinshasa], mais il faut savoir se faire plaisir », justifie-t‑il, savourant le petit déjeuner qu’on vient de lui servir. La première classe compte un peu plus de passagers. Une trentaine de personnes sont réparties sur les cinquante sièges disponibles. La clim est tout aussi puissante que dans la voiture précédente. La faute aux vitres teintées. « Elles nous empêchent de voir le paysage. Nous sommes obligés d’ouvrir les fenêtres, ce qui fait monter la température », s’agace Jean-Pierre Ntumba, patron d’une petite société de transport. Un désagrément qui ne semble pas gêner sa voisine. À 55 ans, Anne-Marie Mbuluku voyage en train pour la première fois. C’est son mari qui lui a offert le billet aller-retour pour son anniversaire. « J’avais déjà fait le voyage par la route jusqu’à Matadi, mais le train est beaucoup plus confortable », apprécie-t‑elle. Au point que la plupart des voyageurs regrettent

la faible fréquence des services – une seule liaison par semaine –, qui les oblige à prendre le bus s’ils ne veulent pas être bloqués pour la semaine. HILARES. Pour rejoindre la seconde classe, il faut d’abord traverser le wagonrestaurant, essentiellement fréquentée par les passagers de la première et par… le personnel de la CFMK. Puis la voiture-bar et son ambiance survoltée, rythmée par la rumba crachée à tue-tête par le poste de radio. Une bonne partie des clients en seconde sont des étudiants. Originaires du Kongo central. Ils rejoignent leur fac à Kinshasa après avoir payé leur billet 7 220 FC. Sur le parcours, le train fait une dizaine d’arrêts, dans les principales gares. À chaque fois, le même cérémonial: le chef de gare agite d’abord son drapeau rouge, le temps que se fassent la descente et la montée des passagers ; puis, une N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016


PUBLI-INFORMATION

VOTRE ATOUT CŒUR EN RDC La BCDC est bien représentée dans les principaux centres économiques du pays. Deux principes prévalent dans cette démarche : l’accompagnement des grandes entreprises sur leurs centres d’exploitation d’une part, la proximité des clients particuliers, professionnels et des PME pour leur faciliter l’accès à des services bancaires de qualité, d’autre part. L’expansion du réseau d’agences en 2015

Les développements en 2016

Fin 2015, le réseau de la BCDC compte 31 centres d’exploitation en RDC dont 23 agences principales et 8 guichets avancés. Ces derniers sont des extensions d’agences ; les clients peuvent y faire l’ensemble des opérations de guichet.

La BCDC a opté pour une stratégie progressive d’ouverture d’agences, sans précipitation mais dans le cadre d’une démarche mesurée et assurée. Le parc immobilier dont dispose la banque dû à sa présence historique dans le pays offre encore d’intéressantes perspectives d’extension du réseau en fonction de l’évolution des besoins du marché.

Plusieurs chantiers ont abouti en 2015 parmi lesquels : « Kibali » à Durba dans la province du Haut-Uélé, « Kintambo » à Kinshasa, « Aru » dans la province de l’Ituri afin d’accompagner le développement de l’activité commerciale dans cette zone frontalière avec l’Ouganda, « Inga » dans le cadre du partenariat de la BCDC avec la SNEL (Société Nationale d’Electricité). En parallèle à ce développement, 17 nouveaux guichets automatiques bancaires ont été installés en 2015. Les agences et guichets avancés sont désormais équipés d’au moins deux GAB : l’un en francs congolais, l’autre en dollars.

C’est ainsi que, pour 2016, la direction de la banque a opté pour un budget volontariste.

L’ouverture de dix centres d’exploitation est à l’ordre du jour :

L’ouverture de nouvelles agences dans la capitale s’inscrit dans la stratégie de pénétration du marché « Retail Banking » qui nécessite un large réseau de proximité. La BCDC apporte ainsi des réponses précises aux besoins et attentes du marché, comme le démontre le succès de la nouvelle agence de Kintambo qui, quelques mois après son ouverture, comptait plus de 1500 clients.

L’année 2016 est également mise à profit pour relooker les agences dans le cadre d’un projet de modernisation et standardisation. Une nouvelle charte graphique a été élaborée à cet effet.

! deux agences à Kimpese et Kindu ; ! un guichet avancé de l’agence de Kimpese à Lufu ; ! deux guichets avancés à Mahagi et à Namoya (Zone Est) ; ! une agence à Kalemie (nouvelle province du Tanganyika) ; ! quatre agences à Kinshasa dont une sur le nouveau site de l’Université Catholique du Congo.

www.bcdc.cd

« Avec une expertise de plus d’un siècle et un service de qualité assuré par des équipes de commerciaux motivés, la BCDC entend demeurer la première banque de choix en République démocratique du Congo. »

BANQUE NA NGA

YA MOTEMA


Le Plus de J.A. Défis majeurs dizaine de minutes plus tard, son drapeau vert, pour autoriser le convoi à reprendre sa route. À Kwilu-Ngongo, l’arrêt dure une bonne demi-heure, pour permettre à la locomotive de se ravitailler en eau. Le convoi est aussi parfois obligé de s’arrêter en rase campagne, par exemple pour débroussailler la voie. À chaque arrêt, programmé ou non, le train est assailli par les vendeurs, des femmes et des enfants, qui tendent aux passagers fruits, légumes ou jus à travers les fenêtres grandes ouvertes.

À mesure que le train se rapproche de Kinshasa et que la densité de la population s’accroît, le convoi est obligé de ralentir aux signaux, de plus en plus répétés, de son sifflet. À partir de Kimwenza, à l’entrée de la province de Kinshasa, les habitants se massent le long de la voie pour saluer le passage du train. À Matete, dernier arrêt avant d’arriver à destination, beaucoup de voyageurs descendent dans un fracas de valises. C’est aujourd’hui dimanche, et les bars à ciel ouvert installés le long des rails ont

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fait le plein de clients qui trinquent à la santé des passagers, hilares. À 16 h 9 tapantes, le train arrive enfin à son terminus, la petite gare centrale de Kinshasa, tout juste rénovée. Les taxis attendent à côté de la voie pour charger les bagages plus rapidement. Le trajet a duré une bonne heure et demie de plus que prévu, mais le plus important semble être ailleurs pour les passagers, qui s’engouffrent dans les voitures. Heureux d’être arrivés à destination, sans inquiétude et CHRISTOPHE LE BEC sans encombre.

Matadi se cherche un avenir

L

ambiance est morose au port de Matadi, géré par la Société commerciale des transports et des ports (SCTP), détenue par l’État. Le trafic du port fluvial, principale porte d’entrée de la RD Congo, stagne depuis 2013, avec environ 2,9 millions de tonnes chaque année, dont les deux tiers sont importées. Pourtant, dans la capitale Kinshasa – à laquelle Matadi est reliée par route et par rail (voir p. 84) –, où vivent plus de 18 millions d’habitants, les besoins en produits manufacturés explosent. Situé dans la province du Kongo central, dont le potentiel agro-industriel est considérable mais sous-exploité, Matadi pourrait traiter des quantités importantes de marchandises agricoles. Mais, en 2015, seules quelques dizaines de milliers de tonnes de blé, de caoutchouc et de cacao, pour la plupart produits en dehors de la région, y ont transité. « Le bois, descendu de la province de l’Équateur, est le premier produit d’exportation du port fluvial, avec 112 707 tonnes de grumes », indique Lephtaly Mavinga, chargé de la communication au port de Matadi. Derrière ces performances en demiteinte, plusieurs soucis logistiques. D’abord,laCongolaisedesvoiesmaritimes (CVM), avec laquelle la SCTP entretient des relations difficiles, peine à réaliser les opérations de dragage du fleuve Congo. JEUNE AFRIQUE

© GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

Malgré un potentiel considérable, ce port maritime, principale porte d’entrée du pays, peine à relancer son activité. Et la libéralisation de la manutention portuaire pourrait aggraver la situation. Les quais ne peuvent recevoir que des navires de 6 mètres de tirant d’eau.

Résultat, Matadi ne peut actuellement recevoir que des navires de 6 mètres de tirant d’eau. Autre difficulté, le goulet d’étranglement logistique : « En dépit du redémarrage du rail à la mi-2015, seulement 2 % des marchandises transitent par voie ferrée. Tout le reste emprunte encore la route. La SCTP ne dispose que de cinq locomotives très anciennes. Nous en attendons de nouvelles avec impatience », explique Lephtaly Mavinga, qui regrette le temps où le réseau ferroviaire reliait Matadi à la province minière du Katanga en passant par le Kasaï. TERMINAL. Si à Matadi les équipes de la

SCTP, premier employeur de la ville avec plus de 1 100 salariés, ont la mine des mauvais jours, c’est aussi parce qu’elles craignent d’être délocalisées. Un terminal mixte traitant les conteneurs, le trafic roulier ainsi que les colis lourds et volumineux sera bientôt construit par le groupe de manutention philippin ICTSI, juste en amont de Matadi, sur la rive nord

du fleuve. Et il pourrait faire de l’ombre aux installations actuelles. Avec 10 % des parts, la SCTP n’en sera qu’actionnaire minoritaire. Un autre projet est à l’étude : un port en eau profonde au large de Banana, à l’embouchure du fleuve, ainsi que la construction d’une voie ferrée qui le reliera à Kinshasa via Matadi. Un groupe chinois – dont l’identité n’a pas été divulguée – aurait été retenu pour la construction. Les noms des sociétés chargées de la future exploitation de ces deux terminaux n’ont pas été arrêtés, mais la SCTP s’inquiète d’une éventuelle attribution de leurs concessions à un groupe international, tel Bolloré, opérateur du terminal à conteneurs du port en eau profonde de Pointe-Noire, au Congo-Brazzaville, le concurrent de Matadi. Le groupe français organise déjà depuis Pointe-Noire un important trafic de transbordement vers Matadi, via des navires de faible tirant d’eau qui parcourent aisément les 145 km de fleuve depuis l’embouchure. C.L.B. N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016


RAWBANK, « ENTREPRISE RESPONSABLE »

La solidarité de Rawbank envers les déshérités et son intérêt envers l’enfance malheureuse L’amélioration des conditions de vie des couches vulnérables dans un pays comme la RDC encore en période post conflit, n’est pas seulement l’affaire des autorités politiques. Elle concerne également toutes les structures privées ainsi que des hommes de bonne volonté qui se préoccupent de l’avenir national. C’est dans cette optique qu’il convient de situer la cérémonie qui s’est déroulée le vendredi 24 juin 2016 à l’orphelinat de Kimbondo - Mama Koko dans la commune de Mont-Ngafula à Kinshasa.

P Le directeur général de Rawbank Thierry Taeymans accompagné d'une partenaire de l’orphelinat de Kimbondo - Mama Koko

renant la parole à cette occasion, le Révérend Père Hugo Rios Diaza, CMF, directeur général de la Fondation de Kimbondo, a expliqué la mission de cette structure en laissant entendre que « la pédiatrie est engagée dans la protection de la vie et des droits des enfants en leur offrant la possibilité d’être nourris, soignés et instruits en vue d’assurer leur développement intégral et leur réinsertion dans la société ». De ce fait, at-il poursuivi, la pédiatrie constitue une famille pour tous les orphelins et enfants abandonnés qui y habitent. Le Révérend Père Hugo s’est félicité du fait que Rawbank fait partie intégrante de cette famille qui n’est pas biologique, mais universelle, et qui repose uniquement sur un socle « L’amour pour les plus pauvres ». Par conséquent, la famille a le devoir de venir en aide à ces enfants abandonnés par leurs parents biologiques, comblant de la sorte leur irresponsabilité. Par ailleurs, le Révérend Père Hugo a indiqué que la pédiatrie accueille aussi des personnes vulnérables de tout âge qui ont besoin de ses services, étant entendu que son option préférentielle est celle

des plus démunis. A cet effet, il a exprimé ses sincères remerciements à la direction générale de Rawbank qui l’accompagne depuis des années dans la réalisation de sa mission. Pour lui, la première institution bancaire congolaise contribue, autant que faire se peut, au bien-être du peuple abandonné à son triste sort.

Lancement de l’appel de secours aux démunis

De son côté, Thierry Taeymans, directeur général de Rawbank a tenu, d’entrée de jeu, à rendre un hommage mérité au Père Hugo Diaz et à la Sœur Laura Perna, deux fondateurs qui avaient pris depuis 1989 l’initiative de mettre cette structure en place. Il a reconnu que Kimbondo est l’une des rares structures existant en RDC qui met à la disposition des malades, un logement, des soins, de la nourriture et l’accès à l’éducation, de même qu’elle accueille des enfants de 0 à 18 ans ainsi que leurs parents malades. C’est donc pour aider l’orphelinat à mieux remplir sa mission, a dit le directeur général, que Rawbank s’est engagée à lui apporter son soutien dans son projet de renforcement et de la poursuite de sa croissance en lui faisant


COMMUNIQUÉ

ORPhELINAT dE KIMBONdO

à ce jour, l’orphelinat accueille 480 enfants abandonnés dont l’âge va de 0 à 20 ans dans sept maisons différentes dont l’une reçoit des enfants vivant avec un handicap

don d’un bus. Ce geste de bienfaisance, a expliqué Thierry Taeymans, s’inscrit dans la droite ligne de la volonté et de l’implication de la banque qu’il dirige dans la vie sociale des Congolais. Il convient de signaler que ce geste vient à la suite de bien d’autres actions d’assistance multiforme déjà menées par la banque en vue de permettre aux enfants en situation difficile de s’intégrer dans la société. Il est enfin le témoignage de la solidarité de Rawbank envers les déshérités et de son intérêt envers l’enfance malheureuse. Pour finir, le directeur général a salué comme il se doit l’ensemble du personnel de cet établissement pour ses efforts constants afin d’assurer avec efficacité l’encadrement des orphelins au quotidien. Il en a profité pour lancer un vibrant appel à toutes les personnes de bonne volonté afin qu’elles viennent en aide à ces enfants qui sont soit des orphelins, soit encore des enfants abandonnés par un monde non équitable. Il sied d’indiquer qu’à ce jour, l’orphelinat accueille 480 enfants abandonnés dont

l’âge va de 0 à 20 ans dans sept maisons différentes dont l’une reçoit des enfants vivant avec handicap. Toujours dans sa vision d’améliorer le vécu quotidien de la population, Rawbank finance les travaux de lutte contre les têtes d’érosion qui menacent dangereusement le site de Kimbondo ainsi que la route Kinshasa-Matadi.

Une fois réhabilité, ce tronçon routier aidera la population environnante à mieux assurer ses déplacements ainsi que ceux de ses produits. Ce qui ajoutera à ce quartier une certaine valeur en attirant des hommes de bonne volonté à y installer des activités génératrices de revenus. ■


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Le Plus de J.A. RD Congo

TRIBUNE

Priorité à l’agriculture SOUAIBOU ABARY Directeur d’Afriland RD Congo

L

a République démocratique du Congo est reconnue comme un pays à fort potentiel disposant aussi bien de ressources considérables dans son soussol que d’une terre des plus fertiles. Ces potentialités peuvent lui permettre de générer un taux de croissance à deux chiffres. Pourtant, selon la Banque centrale du Congo, il ne devrait pas dépasser les 6 %, du fait de la baisse des cours des matières premières et de l’absence de mécanismes de diversification des sources de revenus. Tous les regards se tournent, logiquement, vers le secteur de l’agriculture, qui emploie 60 % des Congolais et qui devrait constituer l’une des composantes essentielles de l’économie à travers l’approvisionnement du marché national, l’amélioration continue de la sécurité alimentaire, la réduction des importations et l’augmentation des exportations. Ce secteur a contribué, en 2013, à hauteur de 40 % du PIB, mais, paradoxalement, et malgré l’enjeu, il ne reçoit que très peu de financements. La RD Congo bénéficie pourtant d’une remarquable diversité de climats qui lui offre des possibilités de cultures très variées, avec une superficie de terres agricoles inégalée en Afrique.

les besoins des agriculteurs en fonction de la taille de leurs exploitations. D’abord à court terme, avec l’approvisionnement en intrants, la mise en place d’une main-d’œuvre salariée, la définition des baux de métayage, le développement des équipements de stockage et de transformation de la production. Ensuite à moyen terme, avec la dotation de matériels mécanisés, la redéfinition de l’achat des terres. Enfin à long terme, avec la création de plantations plus vastes de cultures pérennes. Les produits financiers spécifiques qui tiennent compte des aléas du secteur tout en maîtrisant les risques restent à mettre en place. Pour débloquer cette situation et favoriser la création de prêts à faible taux d’intérêt, plusieurs changements sont nécessaires. Il faut avant tout réunir les producteurs au sein de coopératives, qui pourront ainsi bénéficier de crédits

Tous les regards se tournent vers ce secteur, qui emploie 60 % de la population congolaise.

Les difficultés liées à l’instabilité des cours, aux aléas climatiques, à la faible professionnalisation de la filière ou encore à l’enclavement des bassins de production ne manquent pas. Mais devons-nous pour autant nous détourner de ce secteur ô combien stratégique? En dehors de l’État, qui fixe le cadre normatif, les autres acteurs, par exemple les banques, doivent jouer leur partition. L’objectif majeur est d’améliorer significativement la bancarisation et de permettre au plus grand nombre d’accéder aux produits et services bancaires afin de réduire la part de l’informel dans le tissu économique du pays. Il faut pour cela fluidifier et alléger les procédures d’ouverture de comptes tout en respectant les contraintes réglementaires afférentes. Il convient ensuite de promouvoir l’initiative privée pour qu’une classe d’entrepreneurs puisse voir le jour. Le financement du secteur agricole nécessite donc de répertorier N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

grâce à un effet de groupement. Ensuite, financer les instituts de recherche agronomique pour accroître les rendements. Il est également nécessaire d’encourager les partenariats avec les professionnels de l’agro-industrie par l’intermédiaire d’un mécanisme contractuel qui intègre le financement des sous-traitants et autres petits producteurs. L’exemple, au Cameroun, du financement des palmeraies de la Socapalm avec la Société allemande d’investissement et de développement (DEG) pourrait servir de modèle. La production agricole provenant essentiellement des zones rurales, il faudra à cet effet développer les microbanques spécialisées dans le développement rural ou périurbain, dont la proximité avec les bassins de production sera un atout dans la maîtrise des cycles de production et permettra un apport financier approprié et adapté. Pour accompagner cet élan ou ce processus, les institutions bancaires doivent disposer d’unités d’accompagnement qui compléteraient le cursus des producteurs par une formation en montage et en gestion des projets. Notamment dans le cadre des jointventures. JEUNE AFRIQUE



Le Plus de J.A. RD Congo MÉDIAS

Chantal Kanyimbo, singulière et ambitieuse Journaliste vedette depuis l’époque de Mobutu, cette forte tête dirige aujourd’hui le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Et espère bien prendre un jour les rênes de la Radiotélévision nationale congolaise.

D

que 6 mois quand sa famille pose ses président Mobutu Sese Seko. « Pour valises à Kinshasa. Une fois diplômée de éviter le ciseau d’or [la censure interne l’Isti, elle demande son affectation à la avant la diffusion d’une séquence enredirection de l’information de l’OZRT… gistrée], j’avais exigé que l’émission se déroule en direct. Et, très vite, c’est Où elle crève l’écran. D’abord en tant que chroniqueuse, puis en tant que repordevenu le rendez-vous à ne pas manter, avant de présenter le journal télévisé. « La RTNC est un service public En 1994, elle lance sa financé par le contribuable. Pas un propre émission-débat, Deux Sons de cloche, qui bien de la majorité au pouvoir. » ose – une première dans le pays – donner la parole à l’opposition quer chaque mardi soir à 21 heures », sur une chaîne nationale alors comse souvient l’animatrice. L’émission est plètement inféodée au Mouvement pourtant suspendue au lendemain de la chute de Mobutu, en mai 1997. populaire de la révolution (MPR), du Six mois de tractations plus tard, Deux Sons de cloche revient sur les antennes de l’OZRT, rebaptisée entretemps Radiotélévision nationale congolaise (RTNC). Elle est désormais diffusée en différé… Et sans sa présentatrice vedette. Après avoir dirigé l’Union nationale de la presse congolaise, Chantal Kanyimbo est, depuis 2001, « en détachement » auprès du Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC). Assise dans son vaste bureau, coupe afro et boucles d’oreilles assorties à la gourmette, au collier et à la bague, « madame le rapporteur » pose un regard critique sur le traitement de l’information par la télévision nationale, redevenue la caisse de résonance du pouvoir en place. « Chacun doit intérioriser le fait que la RTNC n’est pas un bien de la majorité au pouvoir, mais un service public financé par le contribuable », interpelle celle qui ne cache plus son ambition de diriger un jour la « maison mère ». Pour éviter la censure avant diffusion, elle avait exigé

ans le milieu médiatique, c’est un modèle. Une « grande sœur », voire « une maman pour toute la nouvelle génération de journalistes congolais », affirment Pathy Ambroise Tshibamba et le député Patrick Muyaya, tous deux anciens étudiants de l’Institut facultaire des sciences de l’information et de la communication (Ifasic). Près de trois décennies se sont écoulées depuis que Chantal Martine Rosette Marie-Thérèse Kanyimbo, la cinquantaine aujourd’hui, a quitté les bancs de l’Institut supérieur des sciences et techniques de l’information de Kinshasa, « l’Isti, comme on l’appelait à notre époque », préciset-elle. Entre-temps, elle est également devenue l’un des visages les plus connus de l’Office zaïrois de radiodiffusion et de télévision (OZRT), qu’elle a intégré après sa deuxième année à l’Isti en réussissant le concours de recrutement de speakerine organisé par la chaîne publique. CISEAU D’OR. À l’OZRT,

elle ne tarde pas à montrer sa singularité. « Surtout grâce à sa diction parfaite », se souvient l’un de ses anciens collègues. Ses patrons la remarquent vite et lui confient dans un premier temps les émissions sportives Prolongations et Sportmania. En parallèle, elle poursuit ses études et s’oriente vers la politique extérieure. « La scène intérieure, dominée par les activités du partiÉtat, ne m’intéressait pas », explique celle dont le père, nationaliste lumumbiste, a fui Lubumbashi pendant la sécession orchestrée par Moïse Tshombe. Elle n’a N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

©GWENN DUBOURTHOUMIEU/J.A.

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des autorités zaïroises que son émission se déroule en direct.

TRÉSOR KIBANGULA JEUNE AFRIQUE



Le Plus de J.A. RD Congo

TARMAC DES AUTEURS

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CULTURE

La scène de tous les possibles

La pièce Amour Bunker, présentée par la compagnie Osase lors du festival Ça se passe à Kin, en juin.

« répertoire textuel du théâtre congolais ». Depuis des années, il cherche et forme des auteurs dans ce but. Et la démarche semble porter ses fruits. Fiston Mwanza Mujila, par exemple, l’un des premiers ce théâtre à Kitambo, première comà participer aux ateliers d’écriture du mune de Kinshasa, je voulais que la vie Tarmac, a été récompensé en 2009 par du quartier prenne part à la création une médaille d’or en littérature lors des VIe Jeux de la francophonie à Beyrouth, artistique », justifie cet adepte d’un théâtre « de proximité, proche des gens, conçu au Liban. Son texte, Te voir dressé sur tes au milieu du peuple et ancré dans son deux pattes ne fait que mettre de l’huile au noyau social ». feu, a d’ailleurs été programmé lors de la sixième édition du festival Ça se passe à Kin. « C’est une Quelques chaises en plastique, pièce qui parle aux jeunes de la Primus, des éclats de rire Congolais contraints parfois de quitter le pays et qui et des regards complices… se retrouvent à l’étranger confrontés à d’autres problèmes tels TERROIR. Depuis 2001, Israël Tshipamba, transfuge de l’emblématique Écurie que le racisme, l’humiliation », explique Maloba, travaille à l’éclosion d’« un Tshipamba, organisateur du festival. authentique théâtre congolais », qui doit, Pendant les huit jours qu’a duré l’événement, qui se veut l’occasion « de la selon lui, trouver son public, ses auteurs, rencontre et du partage d’expériences sa parole. « Le théâtre, c’est comme le vin: il se structure par rapport à un terroir », entre les comédiens congolais et des soutient-il. C’est ainsi que « son » Tarmac professionnels venus de l’étranger », tous les sujets de société – guerre, violences des auteurs œuvre à la constitution d’un

Lieu atypique où se retrouvent locaux et expatriés, le Tarmac des auteurs se rêve en authentique théâtre congolais. Tous les sujets de société y sont passés en revue. Avec humour et subtilité.

L

e doute se lit sur le visage de celui qui débarque pour la première fois au Tarmac des auteurs. « Est-ce la bonne adresse? Suis-je à l’endroit qu’indiquent les affiches en centre-ville ? » Impossible de ne pas s’interroger tant le théâtre, situé à Kitambo, commune du nord-ouest de Kinshasa, ressemble à l’un de ces nganda (bar) qui pullulent dans les quartiers de la capitale congolaise. Quelques chaises en plastique, des bouteilles de Primus, de Super Bock ou de Turbo King sur les tables. Autour, des éclats de rire, des regards complices, des messes basses… À l’intérieur, Israël Tshipamba accorde une interview à un journaliste local. « Tshitshi », comme l’appelait son père, est le créateur-concepteur-promoteur de ce lieu atypique où se côtoient les bruits du quotidien et les envolées lyriques des comédiens. « En choisissant d’implanter N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016

JEUNE AFRIQUE


Défis majeurs sexuelles, pauvreté, corruption – ont été passés en revue. Toujours avec subtilité. À l’instar de La Bonne Âme du Se-Tchouan, de Bertolt Brecht, revisitée par Israël Tshipamba. « Une pièce qui a eu une très grande résonance en RD Congo, où la population, appauvrie et meurtrie, semble se complaire dans sa situation. L’État ne protège pas ses citoyens, mais personne n’ose descendre dans les rues pour revendiquer ses droits. Beaucoup préfèrent aller se plaindre auprès des Églises, espérant une intervention divine », regrette le fondateur du Tarmac des auteurs, qui

voudrait « réveiller » ses compatriotes à travers des textes engagés et estampillés « théâtre et société ». COMPLET. Ce mercredi soir, avant-der-

nier jour du festival, le petit théâtre à ciel ouvert affiche complet. Sous les branches d’un arbre est installée une scène d’au moins 40 m2. Le spectacle a commencé depuis une trentaine de minutes. Les sketchs se succèdent entre deux sets de guitare sébène. Le public – expatriés et locaux mélangés – est conquis et interagit avec les humoristes, qui caricaturent la société congolaise d’aujourd’hui. Coincée

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entre tradition et modernité, ouverture et repli sur soi. Tour à tour fusent les blagues sur « le Noir », « le Blanc », « la maman congolaise », les tracasseries policières, les réseaux sociaux, les Églises de réveil qui se livrent à des « church battles ». Mais aussi sur l’homosexualité. Du début à la fin, l’ambiance est chaleureuse et conviviale. Et c’est tout naturellement qu’à l’issue du spectacle démarre le deuxième acte. Celui de la rencontre et de l’échange, en direct, entre les spectateurs et les comédiens. Parce que ça se passe comme ça au Tarmac. TRÉSOR KIBANGULA

David-Minor Ilunga Quand le naturel revient au galop

JEUNE AFRIQUE

GWENN DUBOURTHOUMIEU POUR J.A.

G

rand et svelte, barbichette, la voix un brin rauque, David-Minor Ilunga a du style. À bientôt 30 ans, ce jeune Kinois est l’un des auteurs les plus prometteurs du théâtre congolais contemporain. Après avoir longtemps hésité à rejoindre le monde artistique. Adolescent, il craignait d’être perçu comme un clown. Jusqu’à ce que l’un de ses enseignants, plus perspicace et plus tenace que les autres, l’oblige à monter sur les planches lors d’un festival scolaire après avoir décelé son talent naissant. Un choix de casting qui révèle David, alors sacré meilleur interprète masculin. Mais qui ne l’incite pas pour autant à poursuivre l’expérience. « J’ai eu de gros moments d’hésitation, confie-t-il. Je venais d’avoir la meilleure note de ma promotion, et mon père nourrissait déjà l’espoir de me voir devenir un grand statisticien ou un éminent professeur d’université. » Ses convictions religieuses ont également alimenté ses doutes. Fervent croyant du « message du temps de la fin » annoncé par le pasteur américain William Marrion Brahnam, David-Minor Ilunga décide pourtant de

Ce jeune Kinois est aujourd’hui l’un des auteurs les plus prometteurs.

combiner études et théâtre. Mais l’équation se révèle trop complexe. Quatre fois, il butte en deuxième année de son cursus d’économie. Avant de tout arrêter, en 2008. « J’ai même brûlé mes textes », se souvient-il. PRODIG E. Trois années

d’introspection plus tard, « tant le naturel a de force », comme l’a dit le Français Jean de La Fontaine, le comédien remonte sur les planches. À la grande satisfaction de son « maître », Israël Tshipamba.

D’autant que « le théâtre ne se renouvelle que par l’écriture », relève le fondateur du Tarmac des auteurs pour justifier sa démarche et son plaisir de voir l’enfant prodige de retour à la maison. D epuis, David-Minor Ilunga constitue peu à peu son « répertoire textuel édité ». On y trouve entre autres Einsteinnette, une pièce fabriquée lors d’un atelier d’écriture du Tarmac en 2010, qui narre en détail la vie de son auteur. « D’autres textes traînent encore dans le tiroir »,

glisse-t‑il. L’un d’entre eux a séduit Roland Mahauden, directeur du Théâtre de poche de Bruxelles. Dans le cadre du partenariat tissé entre la mythique salle de spectacle du Bois de la cambre et le Tarmac des auteurs, David-Minor s’apprête d’ailleurs à se rendre dans la capitale bruxelloise. Un séjour de trois mois pour retravailler son texte avec le dramaturge belge. Le jeune comédien semble bien avoir trouvé sa voie. T.K. N 0 2897 • DU 17 AU 23 JUILLET 2016


Congo Airways : des ambitions à la dimension du pays… et du continent !

A

vec deux avions au départ, Congo Airways peut se targuer aujourd’hui d’avoir une flotte. Deux Airbus A320 et deux Bombardiers Q400 qui font la

navette, en vue de couvrir totalement le pays. Un choix de modèles qui montre clairement les objectifs de la compagnie nationale, décidée à combler près de six années d’absence. Pour les vols à destination de petites localités, les Bombardier feront l’affaire. Ils sont légers et faciles à manœuvrer sur les pistes courtes. Pour le reste, les deux Airbus complèteront la liste des destinations. Congo Airways rencontre un succès fou auprès de sa clientèle. Les prix des billets ont

À neuf mois du lancement de sa compagnie aérienne nationale, la RDC affiche les couleurs. Et pas de doute possible : le pays a besoin de reconquérir l’espace aérien africain.

été divisés par deux, voire par trois. Et les


MESSAGE

www.congoairways.com agences ne désemplissent pas. Les avions non

qui est allée les y chercher. Une victoire

plus. Certaines destinations ont connu une

qui a eu pour effet de renforcer l’image

augmentation des rotations des vols, du fait

et le sentiment de fierté nationale.

de la demande, sans cesse croissante. Le prix des billets, mais aussi les conditions de voyage

Depuis le 23 juin 2016, la compagnie

et la sécurité y sont pour beaucoup.

aérienne nationale a acquis sa certification. Une ouverture sur le monde extérieure, avec les premières destinations prévues d’ici la fin de l’année. Pour y arriver, elle prévoit d’acheter un cinquième avion, un autre Airbus qui viendrait renforcer sa flotte. Au 30 juin 2016, Congo Airways a une fois de plus fait les preuves de son importance, dans le grand pays qu’est la RDC. Ce sont encore ses avions qui ont transporté les centaines de passagers qui se rendaient à Kindu, où se déroulaient les festivités du

Congo Airways s’incruste dans le paysage

56ème anniversaire d’indépendance du pays.

C’est elle qui a amené les Léopards en

La compagnie veut commencer par

République rwandaise (pour le CHAN) et en

les vols régionaux à la fin de cette année,

République malgache (pour les éliminations

avec les destinations les plus prisées

de la coupe d’Afrique). Et c’est elle encore,

des congolais : Luanda, Johannesburg, etc.

DIFCOM/DF - PHOTOS : DR.

congolais, chaque jour un peu plus.


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