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Tunisie Gafsa, bassin miné

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HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL INDÉPENDANT • 57e année • no 2911-2912 • du 23 octobre au 5 novembre 2016

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À Marrakech, le sommet sur le climat (COP22) s’annonce comme celui de l’Afrique. Le royaume chérifien, lui, entend montrer la voie au reste du continent. Spécial 18 pages ÉDITION MAGHREB & MOYEN-ORIENT France 6  • Algérie 360 DA • Allemagne 8  • Autriche 8  • Belgique 6  • Canada 11,90 $ CAN • DOM 8  • Espagne 7,20  • Éthiopie 95 birrs • Grèce 8  Italie 7,20  • Luxembourg 8  • Maroc 40 DH • Mauritanie 2 000 MRO • Norvège 75 NK • Pays-Bas 7,20  • Portugal cont. 7,20  • RD Congo 11 $ US Royaume-Uni 6 £ • Suisse 11,80 FS • Tunisie 6 DT • USA 13 $ US • Zone CFA 3 2 00 F CFA • ISSN 1950-1285


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LE PLUS

de Jeune Afrique

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PANORAMA COP au Sud INTERVIEW Hakima El Haite, ministre déléguée à l’Environnement INNOVATION Quand l’écologie booste les entreprises ENTREPRENEURIAT Du sens et des responsabilités

COP22

QUAND

LE MAROC PASSE AU VERT

JEUNE AFRIQUE

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Le Plus de Jeune Afrique

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Prélude Nadia Lamlili

Injustice climatique savent depuis la nuit des temps que les chocs environnementaux provoquent des chocs sociaux, que chaque bout de terre inondé ou désertifié les obligera inéluctablement à aller ailleurs pour y chercher une vie meilleure. Là où les vulnérabilités climatiques se manifestent, des solutions simples et efficaces émergent. Au Maroc, à 50 km de Rabat, un village du nom de Brachoua est sorti de la misère grâce à la permaculture (méthode s’inspirant de l’écologie naturelle), qui a permis à ses habitants de cultiver leur terre, selon l’exemple proposé par l’association française Les incroyables comestibles, et d’assurer leur autosuffisance alimentaire. Dans le delta du Saloum, au Sénégal, les villageois se sont interdit de pêcher pour préserver une ressource piscicole en dégradation constante. Ils ont construit une aire marine protégée, et développé autour d'elle des activités touristiques qui leur permettent de

En réalité, le changement se fait déjà sentir en Afrique, où les premiers dégâts sont déjà constatés. La montée du niveau des mers, les sécheresses et les inondations à répétition ont jeté des populations entières sur les routes de la migration au sein du continent comme à l’extérieur. Selon l’ONU, il y aurait quelque 250 millions de migrants climatiques dans le monde à l’horizon 2050. Et l’Afrique est largement menacée. Pourtant, elle n’a aucune responsabilité historique dans L’Afrique représente à peine le réchauffement climatique 4 % des émissions mondiales mondial, sur lequel elle influe également peu. Représentant à de gaz à effet de serre. peine 4 % des émissions monvivre. Grâce à cette gestion solidaire, diales de gaz à effet de serre, l’Afrique paie en fait la dette des pays industrialisés, ces villageois sont devenus autonomes tout en assistant, plus grave encore, à et peuvent mieux se protéger face aux périls climatiques. l’exploitation effrénée de ses ressources naturelles. Partout sur le continent, des voix La bataille des pays africains est, alternatives commencent à se faire dorénavant, de faire en sorte que les entendre et des citoyens se battent pour financements prévus par la 21e conféréconcilier l’homme avec la nature. Ce qu’il faut maintenant, c’est que cette rence climat de l’ONU (la COP21), notamment le fonds vert, n’aillent pas engraisser parole puisse nourrir les sommets internationaux et relancer un débat qui se les pollueurs mais, au contraire, aider les populations des pays en développement doit de démarrer, afin que ces initiatives à trouver et à appliquer leurs propres puissent recevoir les financements dont solutions de résistance. elles ont besoin. Plus qu’un enjeu cliCar les recettes du sauvetage sont en matique, c’est une question de justice partie entre les mains des Africains, qui tout court. JEUNE AFRIQUE

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PANORAMA COP au Sud

p. 80

INTERVIEW Hakima El Haite, ministre déléguée à l’Environnement p. 86

DR

L

une des grandes batailles de la COP22, organisée en novembre à Marrakech, va être de rendre justice à l’Afrique. Selon le rapport 2015 du cabinet d’études britannique Maplecroft, qui analyse chaque année la vulnérabilité des pays et des villes au changement climatique, le continent compte sept des dix pays les plus menacés au monde par le réchauffement : la Sierra Leone, le Soudan du Sud, le Tchad, le Nigeria, la Centrafrique, l’Érythrée et l’Éthiopie.

INNOVATION Quand l’écologie booste les entreprises p. 88 ASSAINISSEMENT Oum Azza, décharge électrique p. 92 TRIBUNE Économies renouvelables, par Moha Ennaji

p. 96

CONSOMMATION Le bio prend ses marques p. 98 ENTREPRENEURIAT Du sens et des responsabilités p. 100 TRIBUNE Pour un « écoféminisme » d’urgence, par Fathïa Bennis p. 102


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Le Plus de Jeune Afrique

MAROC

COP au Sud

FAHD IRAQI, à Casablanca

H

istorique! Avant même son ouverture, la COP22 s’annonce comme un rendez-vous qui fera date. Et pour cause : l’accord de Paris, adopté le 12 décembre 2015 par quelque 195 délégations, entrera en vigueur dès le 4 novembre, soit trois jours seulement avant l’ouverture officielle à Marrakech de la 22e Conférence des parties (en anglais, « Conference of the Parties », ou COP) à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Depuis un peu plus d’un an, la présidence française sortante et la future présidence marocaine de ce sommet mondial sur le climat n’ont cessé de se mobiliser pour rendre applicable cet accord de

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Paris, dont la mesure phare est de limiter le réchauffement climatique à moins de 2 °C. En septembre, à New York, une étape importante a été franchie, avec le dépôt par 60 pays de leur « instrument de ratification » de l’accord, autrement dit l’annonce officielle de leurs actions concrètes pour lutter contre les effets des changements climatiques. Le premier seuil avait déjà été atteint, avec plus de 55 pays signataires, mais il fallait encore que les pays engagés représentent plus de 55 % des émissions de gaz à effet de serre. « Un seuil désormais dépassé, grâce au dépôt des instruments de ratification de l’Union européenne et du Népal auprès des Nations unies », explique Hakima El Haite, ministre déléguée, chargée de l’Environnement et nommée « championne marocaine pour le climat » par les JEUNE AFRIQUE


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©STUDD/RHPL/ANDIA

À Marrakech, le sommet sur le climat devrait être celui de l’Afrique, première victime du réchauffement de la planète. Engagé dans la transition énergétique, le royaume entend montrer la voie aux autres pays du continent.

La place Jemaael-Fna et la mosquée de la Koutoubia, au cœur de la médina, près de laquelle se tiendra la conférence.

Nations unies (lire pp. 86-87). « L’étape, franchie désormais, témoigne de la mobilisation et de la confiance de la communauté internationale pour la mise en œuvre de l’accord de Paris », assure de son côté Salaheddine Mezouar, ministre marocain des Affaires étrangères et futur président de ce sommet, pour qui, « la COP22 sera indiscutablement celle de l’action ». PRIORITÉS. Dans les faits, le sommet de Marrakech

sera la première Conférence des parties organisée sous le régime de l’accord de Paris. Il devrait ainsi avoir pour priorités le renforcement des capacités, le financement du fonds climat et le transfert des technologies en direction des pays les plus vulnérables, à savoir les petits États insulaires, JEUNE AFRIQUE

les pays les moins avancés et le continent africain dans son ensemble. En d’autres termes, « c’est l’occasion d’approfondir la réflexion sur tous les moyens de mener une transition ordonnée vers la neutralité carbone », comme l’explique Carole Mathieu, chercheuse au Centre Énergie de l’Institut français des relations internationales (Ifri), dans une récente étude intitulée « De la COP21 à la COP22 : comment gagner le combat climatique ? ». Réalisée en partenariat avec le think tank OCP Policy Center, cette publication évoque les thèmes devenus structurants dans les politiques climatiques : la restriction des activités les plus émettrices de gaz à effet de serre, le renforcement de la réglementation pour une utilisation plus efficace des ressources N 0 2911-2912 • DU 23 OCTOBRE AU 5 NOVEMBRE 2016


Le Plus de JA Maroc

La COP22 en chiffres

30 000

PAUL LANGROCK/ZENIT-LAIF-REA

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Le parc éolien de Haouma, près de Tanger, dispose d’une capacité de production de 50 MW.

fossiles, mais aussi la suppression des avantages fiscaux pour les hydrocarbures. En effet, près de 40 gouvernements appellent désormais à cesser de maintenir le prix des énergies fossiles artificiellement bas pour « obtenir une baisse des émissions mondiales de l’ordre de 10 % d’ici à 2050 et permettre une réallocation des quelque 500 milliards de dollars [plus de 455 milliards d’euros] par an dédiés actuellement aux subventions de ces énergies », comme le préconisent les spécialistes. JUSTICE. L’un des autres enjeux fondamentaux de

la COP22 concernera la consécration du principe de justice climatique. Il s’agit, entre autres, de permettre aux pays qui ont faiblement contribué à l’accumulation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère d’être appuyés dans leurs efforts d’adaptation aux dérèglements climatiques. En ce sens, la dimension africaine de la conférence de Marrakech constituera un sujet majeur des négociations. « L’Afrique est l’une des régions les plus affectées par le changement climatique, et celle qui a le plus besoin d’assistance et de soutien financier pour renforcer ses capacités d’adaptation », nous rappelle la présidence marocaine de la COP, qui assure que « le Maroc fera tout ce qui est en son pouvoir pour faire de cette 22e Conférence des parties la COP de l’Afrique ». De fait, selon les estimations du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), le continent africain ne représente que 4 % des émissions globales, mais doit supporter des coûts d’adaptation de l’ordre de 7 à 15 milliards de dollars par an. C’est dans cette optique que la Banque africaine de développement (BAD), dans le sillage de son Nouveau Pacte pour l’énergie en Afrique, N 0 2911-2912 • DU 23 OCTOBRE AU 5 NOVEMBRE 2016

s’est engagée à tripler son financement pour la lutte contre les changements climatiques, qu’elle porterait à quelque 5 milliards de dollars par an. L’organisation entend aussi consacrer 12 milliards de dollars aux investissements dans les énergies renouvelables à l’horizon 2020. RÉPARTITION. Plusieurs autres initiatives africaines prennent forme, notamment celle que pilote le ministère marocain de l’Agriculture. Baptisée Initiative pour l’adaptation de l’agriculture africaine aux changements climatiques (AAA), elle vise à « obtenir une répartition équitable des fonds climat entre adaptation aux changements et atténuation de leurs effets, pour favoriser la mise en œuvre de projets concrets en matière de gestion des sols et de l’eau agricole, de maîtrise des risques climatiques et de renforcement des capacités et des solutions de financement»,indique-t-onducôtédudépartement d’Aziz Akhannouch, le ministre de l’Agriculture. Un autre grand défi de la COP22 consiste à encourager un alignement des innovations avec les besoins du marché. Car, si les technologies vertes progressent, leur pleine utilité ne peut être garantie sans que la réglementation, les modèles d’affaires ou encore les habitudes des consommateurs évoluent. « Les acteurs économiques semblent se tenir prêts à basculer vers la sobriété carbone, sans toutefois considérer que les innovations technologiques, réglementaires et sociétales sont encore parfaitement alignées », peut-on lire dans l’étude de l’Ifri. En ce sens, le sommet de Marrakech constituera sans doute un carrefour d’excellence pour réunir projets innovants, financements verts et grands acteurs mondiaux dans les différents domaines qui influent de près ou de loin sur le climat.

personnes (dont 13 000 sont accréditées par le secrétariat général de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques)

8 000

délégués de la société civile, représentant plus de 3 000 ONG internationales

1 500

journalistes

196

pays participants Plus de

100

chefs d’État et de gouvernement attendus

90

millions d’euros de frais d’organisation

25

hectares pour le site, installé le long des remparts de la médina

12

jours du 7 au 18 novembre

JEUNE AFRIQUE


DE LA PR I S E DE CO NS C I ENCE À L’AC T I O N

S’EN GAGE À R ÉDUIRE SON EMP REINTE ÉCOLOGIQUE G LO BAL GRE EN SU P P LY C HA I N E CO SYS TE M

RECYCLAGE

GREEN TECH

ÉNERGIES RENOUVELABLES MOBILITÉ DURABLE

S NT L G RO U P PA R T E N A I R E O F F I C I E L DE LA COP22 DU 7 AU 18 NOVEMBRE 2016


Le Plus de JA Maroc

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Le casse-tête du budget planète Déjà stratosphérique en 2009, la cagnotte nécessaire à l’aide des pays en développement confrontés aux changements climatiques a été revue à la hausse. La COP doit définir un plan pour la financer.

C

ent milliards de dollars (environ 90 milliards d’euros) par an à partir de 2020. C’est l’engagement financier des pays développés, acté par l’accord de Paris, en faveur des pays en développement, pour les aider à supporter le coût des changements climatiques. Si stratosphérique soit-il, le chiffre n’est pas nouveau. Il avait été évoqué lors du sommet de Copenhague, en 2009, avant d’être confirmé à Cancún, en 2010. Mais, depuis, cette cagnotte n’a jamais pu être mobilisée. « Aujourd’hui, nous sommes plus près que jamais de trouver un accord pour la mise en place d’un mécanisme assurant des contributions durables de la part des pays industrialisés », explique Hakima El Haite, ministre déléguée, chargée de l’Environnement. « À présent, les pays développés doivent sortir leur chéquier, certes, mais surtout dire comment ils vont le sortir. C’est-à-dire expliquer aux pays les plus vulnérables ce qu’ils vont financer », confirme Aziz Mekouar, ambassadeur pour les négociations multilatérales.

En attendant, les négociateurs de la COP22 sont déterminés à trouver un montage réaliste pour les 100 milliards de dollars. Les clés de répartition se précisent: «Nousallonsnousorienterversunecontribution de 30 % minimum en fonds publics, sachant que chaque dollar public rapporte 3 dollars privés, préconise Hakima El Haite. C’est ce que demandent les pays en développement, qui espèrent consacrer un tiers des 100 milliards à l’adaptation (déforestation, réseaux d’irrigation…). Ce

L’annonce de la feuille de route financière pour la mobilisation de ces 100 milliards de dollars devrait constituer un des moments forts de la COP22. D’autant que les participants comme les organisateurs sont bien conscients de l’urgence d’agir avant 2020, car les estimations des investissements qui seront nécessaires pour l’accompaSelon l’ONU, la somme annuelle gnement des changements de 100 milliards de dollars est climatiques ont été largement revues à la hausse. « significativement sous-estimée RÉALISME. En mai, un rapport du

Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) est en effet venu brouiller les comptes. Il fait état d’un coût d’adaptation pour les pays en développement qui pourrait atteindre entre 140 et 300 milliards de dollars par an en 2030, puis entre 280 et 500 milliards de dollars d’ici à 2050. L’étude explique par ailleurs que la précédente évaluation, comprise entre 70 et 100 milliards de dollars, était « significativement sous-estimée ».

».

type de projet est généralement financé par des fonds publics, au vu des délais longs de retour sur investissement, peu séduisants pour le secteur privé. » Pour ce premier pas dans l’engagement financier des États, l’implication du secteur privé est indispensable. « Car plus nous tarderons à mener les investissements nécessaires pour l’adaptation, plus les besoins de financement seront importants pour les décennies à venir », insiste la ministre déléguée, chargée de l’Environnement. FAHD IRAQI

NURPHOTO

Les présidents du Nigeria, du Niger, de Guinée, du Mali et du Ghana (de g. à dr.), avec Ban Ki-moon, le 1er décembre 2015, à Paris, lors de la COP21.

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JEUNE AFRIQUE


COMMUNIQUÉ

AU SERVICE DE LA SANTÉ DEPUIS 1949

M. Ali Bennis Président de LAPROPHAN

« Pionnier et Leader de l’Industrie Pharmaceutique Nationale depuis 1949, LAPROPHAN s’est profondément engagé au service de la Santé pour enrichir l’arsenal thérapeutique du corps médical. »

Enracinement et fidélité au cœur de l’Afrique !

Récit d’une formidable aventure de développement de plus d’un demi-siècle de travail, d’abnégation, de réalisations, d’innovations et qui continue aujourd’hui en toute confiance. Depuis plus de 65 ans, les Laboratoires LAPROPHAN ont joué un rôle de premier ordre dans les différentes étapes intéressant le domaine de la santé et de l’industrialisation de ce secteur au Maroc : l Participation à la lutte contre les maladies graves de l’époque : Trachome, paludisme, Teigne, Tuberculose… l Participation à l’élaboration et la consolidation des textes règlementaires et de la déontologie régissant la pharmacie pour la mise sur pied d’une industrie pharmaceutique marocaine dont LAPROPHAN est l’emblème. l Politique d’ouverture sur le monde extérieur en préservant les acquis. l Politique de qualité rigoureuse selon les normes BPF. L’image des Laboratoires LAPROPHAN rayonne ainsi dans les 4 coins du monde de par son leadership et la qualité de ses produits reconnue par de nombreuses distinctions Nationales et Internationales : l Rapport élogieux de l’audit de la banque Mondiale en 1995 (extrait de la page 31) : « Il est exceptionnel de voir une entreprise où règne une telle discipline, un tel esprit de collaboration à tous les niveaux et d’être confronté à un personnel dont les qualifications et compétences, associées à l’expérience, paraissent indéniables et donnent à cette société la possibilité, dès actuellement, de participer de manière compétitive au marché international sur le plan qualitatif ». Ces prévisions étaient bien fondées et le pari est gagné pour LAPROPHAN qui se voit décerner plus tard : l 1er prix qualité tous secteurs confondus en 1998 par le Ministère du Commerce et de l’Industrie. l 1er Laboratoire dans la région MENA/ AFRIQUE à décrocher haut la main des brevets d’invention internationaux (4 brevets) enregistrés dans plus de 110 pays au Monde l 1er prix de l’innovation par l’Association R&D Maroc en 2008 (attribué à l’unanimité) pour avoir mis au point le 1er médicament an-

ti-sécrétoire de la classe des IPP (Inhibiteurs de la pompe à protons) en effervescent connu sous le nom de marque IXOR. l 1er prix de l’innovation par l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) remis à l’occasion du 3ème Symposium Economique de la Fondation Suisse Maroc pour le Développement Durable, le 3 octobre 2008. RECHERCHE & DÉVELOPPEMENT, Maîtres mots du succès : Toutes ces accréditations et consécrations encouragent LAPROPHAN à intensifier de manière exponentielle ses efforts dans la Recherche & Développement R&D, mission très chère à la culture de l’entreprise. Une recherche qui ambitionne de relever de nouveaux défis auxquels la Santé est confrontée pour accompagner l’évolution du marché pharmaceutique International à la recherche sans cesse de produits innovants à forte valeur ajoutée. FORTE PRÉSENCE EN AFRIQUE : Les produits LAPROPHAN connaissent un dynamisme incontestable en Afrique avec certaines spécialités qui se positionnent au 1er ou au 2ème rang de leurs classes thérapeutiques, tous laboratoires pharmaceutiques confondus. Avec un large éventail de plus de 400 spécialités couvrant la plupart des pathologies, LAPROPHAN offre une gamme complète de produits très adaptée au contexte des pays africains à des prix accessibles. COOPÉRATION SUD-SUD : La stratégie de développement de LAPROPHAN est orientée à l’international avec une présence en Afrique, au Moyen-Orient, en Europe, et en Amérique du Sud. La coopération Sud-Sud demeure en ligne de mire pour LAPROPHAN. Par son soutien indéfectible des politiques de Santé instaurées en Afrique et par son accompagnement des professionnels de la Santé, LAPROPHAN s’inscrit parmi les principaux garants de la Santé de tout le continent. Siège social : 18, Bd Emile zola, 20300- Casablanca Tél : +212 522 54 38 38 - Fax : +212 522 44 43 97 Email : siege@laprophan.com

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Le Plus de JA Maroc

Cette femme d’affaires engagée est entrée au gouvernement en 2013. INTERVIEW

Hakima El Haite « Nous ferons une annonce par jour » Nommée « championne marocaine du climat » par les Nations unies, la ministre déléguée à l’Environnement expose les enjeux du sommet de Marrakech. Elle en attend des retombées très concrètes.

H

akima El Haite n’a pas volé son surnom de « ministre verte ». L’écologie, elle est tombée dedans très jeune. Sa licence en microbiologie des eaux, décrochée en 1986, n’a été que le premier d’une collection de diplômes – dont deux doctorats – dans le domaine de N 0 2911-2912 • DU 23 OCTOBRE AU 5 NOVEMBRE 2016

l’environnement. À l’issue de ses études, après une première expérience au sein de l’Agence urbaine de Fès (où elle est née en 1963), Hakima El Haite a créé en 1994 EauGlobe, une entreprise spécialisée dans l’ingénierie et les travaux environnementaux. Ses compétences lui ont permis d’exercer en tant qu’experte

auprès de la Banque mondiale, chargée du suivi des projets de retraitement des déchets au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Féministe, Hakima El Haite est aussi une entrepreneuse engagée. Dès 2003, elle intègre les rangs du Mouvement populaire. Elle y gravit un à un les échelons, mais ce n’est que lors du remaniement ministériel de 2013 que les Marocains découvrent cette militante de l’ombre dans le gouvernement Benkirane II : elle est nommée ministre JEUNE AFRIQUE

HASSAN OUAZZANI POUR JA

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Quand le Maroc passe au vert déléguée… chargée de l’Environnement, évidemment. Son bilan au sein de l’exécutif est assez honorable : si la récente polémique autour de l’importation de 2 500 tonnes de déchets en provenance d’Italie (destinés à être incinérés au Maroc) a quelque peu entaché son mandat, sa loi interdisant l’utilisation des sacs plastique et son programme de modernisation des décharges publiques ont été salués par les observateurs. Sa consécration ? Avoir été nommée par les Nations unies « championne marocaine du climat », dans le cadre de l’organisation par le royaume de la COP22. Un événement plein de promesses, à en croire la ministre, qui dévoile pour JA les enjeux du sommet de Marrakech. JEUNE AFRIQUE : En tant que « championne marocaine du climat », en quoi consiste votre mission ? HAKIMA EL HAITE : C’est une expé-

rience nouvelle. La COP a toujours été une affaire de ministres de l’Environnement et de négociations très techniques. Or le secteur privé et les organisations

l’accord de Paris. C’est-à-dire plus de 80 pays signataires, qui totalisent 55 % des émissions carbone. De quoi faire du sommet de Marrakech un événement historique : cette COP sera la première sous le régime de l’accord de Paris.

Et parmi les chefs d’État, qui a confirmé sa présence ?

Que restera-t-il alors à négocier à Marrakech ?

Quels sont concrètement les « instruments de ratification » de l’accord de Paris qu’a présentés le Maroc à New York ?

Beaucoup de choses ! Il faut encore déterminer les mécanismes de contribution des pays, définir les objectifs d’ici à 2020 et établir une feuille de route pour le financement, entre autres, des différentes initiatives lancées, comme Énergie pour l’Afrique ou la dernière initiative marocaine pour l’adaptation de l’agriculture africaine. En plus de ces négociations, nous avons également déposé 28 projets, en attente de financement, et nous avons même une proposition de création d’un nouveau fonds climatique. Que sera-t-il annoncé à l’issue de cette COP ?

Les négociations se poursuivent encore, mais ce que je peux vous assu-

À l’horizon 2030, le royaume espère porter la part des énergies renouvelables dans son bouquet énergétique à 52 %. non étatiques sont eux aussi concernés par le changement climatique. Mon rôle, c’est de faire le pont entre les politiques publiques et les initiatives du secteur privé, des territoires ou des coalitions mondiales. Il s’agit de créer un environnement favorable au développement de technologies sobres en carbone. Avec mon homologue française, Laurence Tubiana, nous avons quasi sillonné la planète pour encourager les pays à faire plus d’efforts, à favoriser les financements sobres en carbone et à intégrer les initiatives du secteur privé dans les contributions des États. L’une de vos missions était de mobiliser les pays pour faire ratifier l’accord de Paris. Êtes-vous soulagée d’y être parvenue ?

En effet, nous avons annoncé le 7 octobre avoir atteint, avec la ratification de l’Union européenne, le seuil nécessaire à l’entrée en vigueur de JEUNE AFRIQUE

rer, c’est que le Maroc fera de grandes annonces durant cette COP. Nous espérons, dès le 8 novembre et jusqu’à la fin de l’événement, réaliser une grande annonce par jour. Où en sont les préparatifs ?

Nous sommes prêts, et nous comptons les minutes ! Le déroulé des négociations et de l’Agenda de l’action a été validé. Plus de 300 orateurs vont se relayer dans la zone bleue, tandis que 600 événements parallèles sont prévus dans la zone verte et le pavillon Maroc. Il y aura en outre énormément d’activités en dehors du village de la COP. Nous allons, par exemple, recevoir les plus grands philanthropes lors d’une conférence. À New York, déjà, nous avons réuni quelque 150 investisseurs et plus de 70 mécènes, parmi lesquels Rockefeller et Bill Gates, qui ont tous confirmé leur présence à Marrakech. Nous comptons sur eux pour sortir leur chéquier.

C’est un volet dont s’occupe le cabinet royal. Mais, bien évidemment, il y aura de nombreux chefs d’État à l’ouverture de la COP22.

Le royaume s’est engagé à réaliser des investissements de l’ordre de 40 milliards de dollars [environ 36 milliards d’euros] à l’horizon 2030. À cette échéance, le Maroc espère porter la part des énergies renouvelables à 52 % dans son bouquet énergétique. Les instruments de ratification comprennent aussi tous les engagements pris à travers le pays dans divers domaines, comme l’efficacité énergétique, le recyclage ou le traitement des déchets. Où trouver ces 40 milliards de dollars ? Est-ce vraiment un objectif réaliste ?

Bien sûr que cela est réaliste ! Il s’agit d’un montant à mobiliser sur quinze ans et de partenariats public-privé. Sachant que 1 dollar apporté par le secteur public entraîneenviron3dollarsd’investissement de la part du secteur privé, le royaume n’aura pas besoin de plus de 1,5 milliard de dollars par an pour dépasser cet objectif. Ce qui représente à peine 1,5 % de la cagnotte de 100 milliards de dollars par an promise par les pays développés dès 2020 dans le cadre de l’accord de Paris. Le Maroc mérite largement cette part. Justement, comment réunir ces 100 milliards de dollars dont on parle depuis le sommet de Copenhague, en 2009 ?

Effectivement,cemontantaétéannoncé dès2009,maisdepuisl’accorddeParisc’est devenu un engagement ferme de la part des pays développés. Mieux encore, on sait désormaisque celavarelever d’unecontribution des États et du secteur privé. Nous observons depuis 2014, dans le monde entier, que le secteur privé injecte plus d’argent dans les énergies renouvelables que dans les énergies fossiles. Or ces investissements n’étaient pas intégrés dans les contributions des pays. Aujourd’hui, tout le monde est d’accord pour tenir compte de l’importance du secteur privé. C’est d’ailleurs le meilleur moyen pour que les États puissent revoir leurs ambitions à la hausse. Propos recueillis à Rabat par FAHD IRAQI N 0 2911-2912 • DU 23 OCTOBRE AU 5 NOVEMBRE 2016

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Le Plus de JA Maroc énergétique est bien réelle au Maroc. Plusieurs initiatives viennent confirmer cette tendance. La Confédération générale des entreprises marocaines (CGEM) a par exemple créé une commission climat, énergie et économie verte. Mieux encore, le patronat a signé en début d’année un pacte avec la Fondation Mohammed VI pour la protection de l’environnement. « Baptisé Qualit’air, il vise à généraliser les outils permettant la réalisation d'un bilan des émissions de gaz à effet de serre et la compensation volontaire des émissions inévitables », nous explique-t‑on du côté de la CGEM.

INNOVATION

Quand l’écologie booste les entreprises Dans un pays qui s’est doté depuis plusieurs années d’un programme solaire et éolien très ambitieux, le secteur privé aussi commence à s’intéresser au développement durable.

EMPLOIS. Plusieurs initiatives sont éga-

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Créé en 2013, le Moroccan Solar Race Challenge est un rallye sans essence ni gazole.

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alorisation des déchets, utilisation rationnelle de l’eau, investissements dans les énergies renouvelables ou encore efficacité énergétique ainsi que construction de bâtiments écologiques… autant de domaines dans lesquels le Maroc a réalisé d’importantes avancées ces dernières années. Pourtant, les défis sont également énormes. En matière de traitement des déchets, par exemple, un plan de réhabilitation des décharges a été mis en place dès 2008, mais il reste encore loin de ses objectifs initiaux. S’il prévoyait de mettre en place, pour une échéance en 2015, des décharges contrôlées dans la totalité des communes urbaines du royaume, seulement 48 % des ordures sont aujourd’hui traitées dans des déchetteries aux normes environnementales (lire pp. 92-93). Il n’empêche que le programme se poursuit: il bénéficie désormais de l’appui de la Banque mondiale, mais surtout il suscite l’intérêt du secteur privé, notamment des sociétés délégataires chargées de la collecte des déchets ménagers dans les villes. N O 2911-2912 • DU 23 OCTOBRE AU 5 NOVEMBRE 2016

lement destinées à l’innovation et à la création des emplois verts. Le Maroc dispose d’ailleurs de sa propre déclinaison du Programme global d’innovation en technologies propres (Global Cleantech Innovation Program/GCIP), qui s’appuie sur une initiative mondiale de l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel (Onudi) et du Fonds pour l’environnement mondial (FEM). À l’occasion de la COP22 seront d’ailleurs dévoilés les lauréats d’un appel à projets lancé dans le cadre de cette initiative visant les entrepreneurs, les TPE et PME, ainsi que les start-up innovantes dans le domaine écologique. Car la green technology commence à faire son chemin au Maroc. Au Technopark de Casablanca notamment, on compte une bonne dizaine de petites structures ou d’associations très actives

C’est que, depuis plusieurs années, le Maroc a choisi de s’inscrire dans un modèle de développement durable. Son programme solaire et son plan éolien sont considérés comme des exemples sur le continent et attirent à chaque appel d’offres les La green technology groupements les plus presfait son chemin, notamment tigieux à travers le monde. « Le développement de au Technopark de Casablanca. ces énergies est réalisé en parallèle de l’émergence d’une indusdans ce domaine. Stenrich Cycles travaille par exemple sur le développement de trie locale, explique Saïd Mouline (lire voitures solaires ou de scooters élecp. 90), directeur de l’Agence marocaine de l’efficacité énergétique et membre triques, et ses quadricycles solaires seront du comité de pilotage de l’organisation présentés lors du sommet de Marrakech. de la COP22. Nous avons désormais un De son côté, Prod’air conçoit et réalise des taux d’intégration industrielle qui atteint solutions technologiques innovantes pour 42 % dans le secteur thermo-solaire et des applications dans la cartographie des réseaux de distribution (électricité, eau, devrait avoisiner les 70 % dans celui de assainissement). Sa gamme de services l’énergie éolienne, avec l’installation [en 2017] d’une usine à Tanger lancée par s’étend au comptage d’énergie numérique Siemens. » et intelligent, au diagnostic des réseaux d’éclairage public, sans oublier le géoIMPLICATION. Qu’il s’agisse de multi­ data management ou d’autres spécialités de pointe, caractéristiques de la green nationalesoudesociétéslocales,l’implicatechnology. FAHD IRAQI tiondusecteurprivéen matièred’efficacité JEUNE AFRIQUE


Quand le Maroc passe au vert

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Le solaire au zénith

ABDELJALIL BOUNHAR/AP/SIPA

Forte de ses succès, l’agence chargée du programme Noor, la Masen, étend encore ses prérogatives.

L

a Moroccan Agency for Solar Energy (Masen) a vu le jour en 2010, pour piloter le plan solaire le plus ambitieux et le plus avant-gardiste en matière d’énergie renouvelable jamais lancé au Maroc, ni même en Afrique. L’objectif annoncé était de produire 2000 mégawatts (MW) d’énergie solaire à l’horizon 2020, pour 9 milliards de dollars d’investissements. Baptisé Noor (« lumière », en arabe), ce plan marocain a été présenté en novembre 2009 à Ouarzazate devant Mohammed VI, accompagné de Hillary Clinton, alors secrétaire d’État. La Masen était alors une super agence, doublée d’une entreprise publique aux

COMMUNIQUÉ

T

Vue aérienne de la centrale Noor I, près de Ouarzazate.

pouvoirs suffisamment étendus pour lancer sur les meilleures bases possible ce chantier royal. Depuis, elle a parcouru bien du chemin et elle est devenue l’entité la plus stratégique du royaume, véritable porte-drapeau du secteur des énergies propres. Six ans après la création de cette entité, ses réalisations sont en effet

palpables, avec la première tranche du projet solaire de Ouarzazate, qui alimente à hauteur de 160 MW le réseau de distribution électrique du royaume. Cette puissance permet à la station Noor I de figurer aujourd’hui parmi les dix installations solaires les plus importantes au monde. Deux autres phases du projet sont en cours de

Les solutions climat Signées SUEZ

raquer les fuites sur le réseau de distribution, économiser la ressource en multipliant les approches et techniques innovantes, telle est l’action de Lydec, filiale de SUEZ, dans la région du Grand Casablanca. Capteurs acoustiques, modulation de pression, sectorisation avancée… ces technologies font figure d’exemples dans cette partie du monde où la disponibilité en eau est inférieure à 1 000 m3 par habitant et par an.

Lutter contre les pertes en eau pour préserver la ressource Conscientes de cette situation de stress hydrique, les autorités marocaines ont pris les devants et ont fait du développement durable une priorité nationale avec une mention spéciale pour la gestion raisonnée des ressources en eau. Depuis 1997, Lydec contribue à l’atteinte de ces objectifs nationaux en menant une lutte drastique contre les pertes en eau sur la Région de Casablanca, au travers d’une stratégie innovante de détection des fuites sur le réseau de distribution et d’amélioration de son rendement. Le résultat ? 38 millions de m3 d’eau potable économisés en 2015 par rapport à 1997, soit l’équivalent de la consommation de plus d’un million d’habitants.

Placer les réseaux sous haute surveillance La préservation de la ressource en eau passe également par l’installation de capteurs sur les compteurs. L’opérateur est alors alerté dans les plus brefs délais. La fuite détectée est aussitôt maîtrisée et la ressource en eau, préservée. Ainsi placé sous haute surveillance, le service de l’eau peut être contrôlé en permanence par une gestion intelligente du réseau. Grâce à ce système, près de 20 000 fuites sur des branchements et compteurs d’utilisateurs et plus de 850 fuites sur des canalisations ont pu être détectées et réparées en 2015. Une des technologies qui permettra de répondre à l’objectif que s’est fixé Lydec dans le cadre de ses engagements climat pris en juin 2016 : économiser l’équivalent de la consommation en eau d’une ville de 1,2 million d’habitants d’ici 2020.


Le Plus de JA Maroc construction, pour une puissance totale de 350 MW. Après le succès du lancement de ce plan solaire, la Masen, devenue la Moroccan Agency for Sustainable Energy, a vu s’élargir ses prérogatives et obtenu de nouvelles attributions. En juin, trois lois ont été adoptées pour en faire l’unique acteur de la politique publique du Maroc en matière d’énergies renouvelables. D’autant que le royaume a revu à la hausse ses ambitions:

à l’horizon 2030, 52 % de l’électricité du pays devrait être d’origine renouvelable – pour un objectif initial de 42 %. PROJETS. Concrètement, la Masen est

en train de récupérer sous son autorité tous les projets d’installations solaires et éoliennes de l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE). Le plus célèbre est le programme intégré de l’énergie éolienne, portant sur une

capacité de 1 000 MW. Mais il faut aussi mentionner tous les projets photo­ voltaïques – Noor IV (70 MW), Noor Laayoune (50 MW), Noor Boujdour (50 MW) et Noor Tafilalt (de 75 MW à 100 MW) –, ainsi que les barrages hydro­ électriques. Au total, d’après les projets en cours, la Masen devrait piloter plus de 10 milliards d’euros d'investissement dans les dix ans à venir. FAHD IRAQI

INTERVIEW

Saïd Mouline « Le secteur privé est un rouage essentiel de ce sommet »

L

e parcours de Saïd Mouline est emblématique du chemin accompli par le Maroc en matière de protection de l’environnement ces dernières années. En 1992, cet ingénieur formé en France et aux ÉtatsUnis occupe le poste de directeur scientifique et technique du Centre de développement des énergies renouvelables (CDER). Après un détour par le secteur privé, où il pilote les programmes environnementaux de grands groupes, il revient dans l’établissement public comme directeur général en 2009. Lors de la dernière réforme institutionnelle, le Centre devient l’Agence nationale pour le développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique (Aderee). Maîtrisant le fonctionnement des administrations autant que les contraintes des entreprises, Saïd Mouline était la personne idéale pour diriger le pôle partenariat public-privé (PPP) au sein du comité de pilotage de la COP. JEUNE AFRIQUE: Quel rôle joue le secteur privé lors de cette conférence ? SAÏD MOULINE : Le secteur

privé est de plus en plus mis en avant lors des COP, réservées jusqu’à récemment aux négociations entre États. Il

du hasard, mais celui de la politique volontariste, menée depuis plusieurs années et appuyée par la lettre royale de 2009, consacrée aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique. BRAHIM TAOUGAR

90

Cet ingénieur dirige le pôle partenariat public-privé au sein du comité de pilotage de la COP.

participe d’abord au financement de l’événement : pour l’organisation, à Marrakech, nous prévoyons d’atteindre les 200 millions de dirhams [plus de 18 millions d’euros] de contributions financières privées. Nous comptons 25 partenaires officiels qui financent la COP directement ou indirectement et plus de 120 entreprises qui louent des stands dans l’espace innovation. Mais, au-delà de cet apport, le secteur privé est un rouage essentiel pour concrétiser l’accord de Paris. C’est grâce à des partenariats entre les secteurs public et privé que nous finançons des projets ou que nous faisons avancer la recherche et le développement. D’où la mise en place d’un PPP au sein du comité de pilotage de la COP22.

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Cette formule de PPP fonctionne-t‑elle bien au Maroc ?

En la matière, le royaume est un modèle qui peut inspirer tous les pays du Sud. Il n’y a qu’à voir ce que nous avons pu réaliser dans le cadre du plan solaire ou du

Comment inciter le secteur privé à investir davantage dans les énergies renouvelables et dans l’efficacité énergétique ?

À travers le PPP, nous essayons de cibler les projets qui répondent à des besoins spécifiques. Mais, au-delà, des mécanismes de financement se mettent en place. À titre d’exemple, il faut citer le Morocco Sustainable Energy Financing Facilities [MorSEFF], une ligne de crédit de 80 millions d’euros

Pour l’organisation de cette conférence, nous comptons 25 partenaires officiels. programme éolien! Des expériences novatrices ont également été menées, confirmant l’efficacité de ce PPP. La contribution, par les golfs de la ville, au financement d’une station d’épuration des eaux usées à Marrakech en est un bon exemple. Ce n’est pas le fruit

qui permet de financer les investissements en matière d’efficacité énergétique. À cela s’ajoutent les initiatives d’autres établissements financiers qui ont créé des fonds spécifiques pour l’environnement. Propos recueillis à Casablanca par F.I. JEUNE AFRIQUE



Le Plus de JA Maroc ASSAINISSEMENT

Décharge électrique Le royaume voit aujourd’hui dans la gestion des déchets une source d’emplois et d’énergie. Visite d’une usine pionnière en matière de tri et de traitement.

E

n haut de la colline souffle un vent froid. Sous les pieds, le sol est meuble, couleur terre de Sienne. Des touffes d’herbe et même quelques vaillants buissons ont pris racine. À part quelques effluves putrides qui piquent un peu les narines, rien ne permet au visiteur de deviner qu’il foule 4,5 tonnes d’ordures, réunies en un tas de 30 m de hauteur, enfoui puis recouvert de terre. À intervalles réguliers, de grands tuyaux noirs se dressent. Plantés au cœur du magma de déchets, ils extraient du biogaz, ce mélange complexe dont seul le méthane est exploitable. Transformé, il permet de produire de l’électricité. Ce n’est pas encore le cas dans le centre d’enfouissement d’Oum Azza, mais c’est l’une des pistes envisagées par le groupe français Pizzorno Environnement, qui exploite ce site depuis 2007.

La décharge, qui reçoit la collecte des ordures ménagères de 13 communes, dont Rabat, Salé et Témara, a remplacé un dépotoir à 12 km de là. Le Maroc compte encore 220 lieux hors de tout contrôle, où échouentmêmedesmatièresdangereuses. Le plan national de gestion des déchets ménagers prévoyait de les éliminer en 2015, mais, prudemment, la date a été reportée à 2020. La tâche est ardue mais le royaume ne renonce pas. L’enjeu n’est pas uniquement de limiter les dommages environnementaux,maisd’appréhenderle déchet comme une ressource à exploiter. JUNGLE. Les ordures seraient responsables de 7,5 % des émissions de gaz à effet de serre au Maroc, alors que la moyenne mondiale est de 3 % à 5 %. Aujourd’hui, à l’échelle du pays, seuls 10 % des déchets sont triés. À Oum Azza, sur les 2 000 t réceptionnées chaque jour, la moitié sera

À Oum Azza, le biogaz qui est extrait des détritus devrait permettre de produire de l’électricité.

bientôt triée, avec l’entrée en fonction d’une deuxième ligne de traitement, pour un investissement de 1,3 million d’euros. Dans la cour, derrière le centre de tri, des tas multicolores de matériaux récupérés, classés par genres. « Ici l’aluminium, là le fer-blanc et, dans le garage fermé, le plus précieux : le cuivre », explique Yassine Mazzout. Ce trentenaire est le président de la coopérative At-Tawafouk (« l’accord »). Créée en 2010, elle regroupe les chiffonniers de l’ancienne décharge, qui ont désormais un statut légal, avec des conditions de travail sûres et encadrées. La valorisation des déchets représente aussi un défi social. Un rapport du Programme des Nations unies pour

Questions à Adil El Koubbi Directeur technique du centre d’enfouissement d’Oum Azza

« Il faut aller plus loin » JEUNE AFRIQUE : Quelle est l’originalité du site ? ADIL EL KOUBBI : Elle tient à notre vision, axée sur la valorisation, avec un centre de tri qui traitera bien‑ tôt plus de la moitié des 2 000 tonnes de déchets reçues quotidiennement. Ensuite, à l’organisation en coopérative des anciens chiffonniers que nous employons, comme nous y obligeait notre cahier des charges. Le captage du bio‑ gaz fait aussi de nous la seule décharge du Maroc intégrée au Mécanisme de dévelop‑ pement propre [MDP], avec la mise sur le marché d’uni‑ tés de réduction de carbone. Cela nous a permis d’amortir

nos investissements. À terme, 90 % des bénéfices iront aux communes que nous servons. Quelles sont les perspectives du marché de la valorisation ? Nous sommes en phase test dans le cadre d’un par‑ tenariat avec la société suisse Éléphant vert, productrice de fertilisants et de pesticides bio pour la formation de compost à partir des déchets verts. Lafarge vient aussi d’acquérir une parcelle près du centre. La société récu‑ pérera les « refus » du tri et, après un processus de bio‑ séchage, les transformera en combustibles.

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M’HAMMED KILITO POUR JA

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Qu’attendez-vous de la COP22 ? J’aimerais que notre expé‑ rience serve d’exemple. Le plan national de gestion des déchets prévoit d’éradiquer les décharges sauvages et de recycler 20 % des ordures en 2020. Nous pouvons être un lieu d’expérimentation dans la recherche de pistes

de valorisation. Nous devons aussi aller plus loin en matière de cogénération, c’est‑à-dire dans l’utilisation du biogaz pour produire de l’énergie. La loi est votée mais, faute de décret d’appli‑ cation, nous ne pouvons injecter l’électricité obtenue dans le réseau. Propos recueillis par S.W. JEUNE AFRIQUE


M’HAMMED KILITO POUR JA

Quand le Maroc passe au vert

le développement (Pnud) estime à plus de 7 000 les emplois informels générés par l’exploitation sauvage des déchets. « J’ai été trieur, se souvient Yassine. J’ai commencé à 15 ans. Je travaillais la nuit, dans des conditions catastrophiques : la pluie, le froid, les déchets médicaux. C’était la loi de la jungle, les forts écrasaient les faibles. Aujourd’hui, les salariés sont payés 2 500 dirhams [environ 230 euros] par mois, les femmes et les plus âgés sont dispensés des tâches pénibles. Le travail des enfants est interdit. »

Les camions de collecte déversent leur La coopérative, elle, verse un salaire à cargaison en contrebas du centre, les ses 147 employés, dégage des bénéfices et prévoit une dizaine d’embauches. déchets montent ensuite sur un tapis puis passent dans une cribleuse, qui opère un « Nous avons engrangé 660 000 dirhams cette année, dit en souriant Yassine premier traitement en détachant les amas. Autour d’un tapis mécanique, chaque Mazzout. Nous allons pouvoir acheter un deuxième camion. » Le président employé récupère un type de matière. Les d’At-Tawafouk a décroché un diplôme rôles changent régulièrement. Pizzorno Environnement a investi pour permettre en gestion d’entreprise. Cet ancien chiffonnier qui plongeait les mains dans à la coopérative de travailler dans de les ordures vérifie aujourd’hui son bonnes conditions. La station est aérée, et les employés disposent de gants et de chaussures La coopérative At-Tawafouk de protection. regroupe d’anciens chiffonniers, Le site pionnier d’Oum qui ont désormais un statut légal. Azza espère diffuser de nouvelles manières de faire (lire chiffre d’affaires sur son smartphone : interview ci-dessous). Rendue obligatoire « On devrait dépasser les 5 millions de par les autorités, l’intégration des chiffonniers conditionne notamment l’obtendirhams en 2016. » Pas question pourtant d’oublier d’où il vient et comment tous tion de subventions. Avant cela, à Fès par exemple, où les trieurs n’ont pas été sont arrivés là : « J’aimerais transmettre intégrés,beaucoup sontpartisàTanger, sur mon expérience à travers le pays, former d’autres décharges. Les autres continuent les autres chiffonniers et les encourager à s’organiser. » leur tri en amont, directement dans la ville, STÉPHANIE WENGER, envoyée spéciale au grand mécontentement des riverains.

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MESSAGE

« C’est d’abord au niveau des territoires que s’organise la lutte contre le changement climatique » Le changement climatique est un enjeu et une préoccupation majeure de la vision et du mandat de CGLU Afrique. Le secrétaire général de l’organisation faîtière des collectivités territoriales du continent, M. Mbassi, relève le rôle primordial des élus locaux dans la lutte contre le changement climatique.

Entretien avec M. Jean Pierre Elong Mbassi, Secrétaire Général de Cités et Gouvernements Locaux Unis d’Afrique

Que fait CGLU Afrique en matière de développement durable et en particulier dans la lutte contre le changement climatique ? Notre organisation s’est donnée comme mission principale de promouvoir l’adoption et la mise en œuvre des politiques de la décentralisation qui nous apparaissent en effet comme un des moyens les plus efficaces d’améliorer la gouvernance des pays africains et de recentrer le développement autour de l’amélioration des conditions et du cadre de vie des populations. L’atténuation du réchauffement climatique et l’adaptation au changement climatique requièrent avant tout des réponses de proximité aussi bien en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, que de prévention des catastrophes ou d’organisation des secours en cas de catastrophes.

M. Mbassi, quels sont les enjeux de la COP22 pour les collectivités locales et pour la décentralisation ? Les collectivités locales d’Afrique estiment qu’après la COP21 à Paris qui était celle des engagements, la COP22 à Marrakech doit être celle de l’Action. Elle doit donc vérifier le respect Il est évident que les villes et territoires seront des engagements souscrits d’autant mieux armés que la décentralisation est à Paris, notamment les effective. Or une évaluation conduite par CGLU-A sur engagements financiers, 50 pays africains montre que seule une petite dizaine et plus spécifiquement la passe le test de l’effectivité de la décentralisation. Par mobilisation des ressources ailleurs on sait que les collectivités locales d’Afrique pour alimenter le Fonds Vert Climat de 100 milliards de dollars par an à compter de 2020. Si l’on est mettent en œuvre moins de 5% des budgets publics, d’accord que les villes et territoires sont responsables très loin de 40% des budgets publics mis en œuvre de 60% des émissions de gaz à effet de serre, et par les collectivités dans les pays de l’OCDE. Pour ne qu’elles sont souvent les premières à souffrir des pas citer l’état littéralement affligeant des ressources catastrophes liées au humaines de ces dérèglement climatique, collectivités, notamment ENGAGEMENTS ONUSIENS - 2013 il est logique qu’en des villes moyennes, qui matière de lutte contre le vont accueillir l’essentiel C’est dans les villes que la bataille pour changement climatique, de la croissance urbaine le développement durable sera gagnée l’application du principe en Afrique au cours des ou perdue. de subsidiarité soit la 15/20 prochaines années. règle. L’adoption et le Si la situation n’est pas respect de ce principe rapidement redressée mettent la décentralisation à l’ordre du jour dans la et si des mesures courageuses ne sont pas prises lutte contre le changement climatique. à très court terme, il est à craindre que les villes


d’Afrique sortent de toute possibilité de maîtrise avec des conséquences désastreuses en matière de développement durable.

En vue de la COP22, CGLU-A a organisé du 8 au 10 septembre à Cotonou au Bénin, un Forum des élus locaux et régionaux d’Afrique. Ce Forum, labellisé COP22, a été organisé avec l’appui du gouvernement du Bénin et de l’Institut de la Francophonie pour le Développement Durable (IFDD). Il a adopté la Déclaration de Cotonou qui lance un appel à prévoir un guichet Collectivités Territoriales dans le Fonds Vert, et de mettre en place au cours de la période précédant l’entrée en opérations du Fonds Vert, un Programme de renforcement des capacités des collectivités africaines pour les rendre aptes à présenter des requêtes éligibles aux sources de la finance climatique, y compris le Fonds Vert. Les élus locaux et régionaux d’Afrique se sont par ailleurs engagés à être massivement présents au Sommet des élus locaux et régionaux prévu le 14 novembre 2016 dans le cadre des travaux de la COP22. ■

Photo de famille - Forum pré-COP22 des Élus Locaux et Régionaux d’Afrique.

« Préparer les villes et territoires d’Afrique à emprunter une trajectoire de développement bas carbone et durable » Dans le cadre de son Académie Africaine des collectivités locales (ALGA), et de son Collège des transitions énergétique et écologique, CGLU-A propose un cycle de formation développé en collaboration avec l’IFDD sur les transitions vers des villes et territoires durables à l’intention des élus locaux et cadres supérieurs des administrations des villes et collectivités territoriales, mais aussi des architectes, ingénieurs, et responsables des organisations de la société civile qui s’investissent dans le domaine du Climat et/ou de l’environnement. Ce cycle doit démarrer ses opérations en septembre 2017. ■

DÉCLARATION DE COTONOU DU 10 SEPTEMBRE 2016

Nous insistons sur la nécessité de territorialiser les programmes et les projets pour l’atténuation et l’adaptation aux changements climatiques sous l’impulsion des élus locaux et régionaux d’Afrique.

TROPHÉES INITIATIVES CLIMAT - COP22 CGLU-Afrique s’est associée à l’organisation des Trophées Initiatives ClimatCOP22, pour les pays d’Afrique francophone. Le but de l’initiative est de faire connaître des projets en matière de lutte contre les effets des changements climatiques en vue de la valorisation et du transfert des bonnes pratiques dans d’autres Pays. Le Jury a retenu la Ville de Sfax (Tunisie) avec son initiative « Bilan Carbone de la ville de Sfax » et la Commune de Fezna (Maroc) avec son initiative « Prémices d’un plan climat communal », comme lauréats dans la catégorie collectivités locales. Plus d’informations sur www.initiativesclimat.org/. ■

CGLU AFRIQUE 22, rue Essaadyine, Hassan 10020, Rabat, Royaume du Maroc Tél. : + 212 537 26 00 62 / + 212 537 26 00 63 Fax : + 212 537 26 00 60

www.uclga.org

DIFCOM/creapub © : D.R.

La conférence de Marrakech est placée sous le signe de l’action. Qu’envisagez-vous de faire en termes d’action ? Les villes et territoires n’ont pas attendu Marrakech pour se mettre en ordre de bataille contre le changement climatique. Plusieurs d’entre elles ont adhéré à la Convention des Maires pour le Climat et l’Énergie qui ambitionne de doter chaque Ville d’un plan Climat avec des objectifs et actions précis en terme de baisse des émissions de gaz à effet de serre, d’efficacité énergétique et de baisse de l’empreinte carbone et de l’empreinte écologique, d’adaptation au changement climatique, et d’amorce d’une trajectoire d’économie circulaire. D’ores et déjà des villes comme Dakar, Johannesburg ou Sfax ont adopté et appliquent leur Plan Climat. Et à Porto Novo au Bénin est développée une des expériences au monde parmi les plus abouties dans le domaine de l’économie circulaire. Le bureau de CGLU-A pour l’Afrique de l’Ouest à Accra (Ghana), abrite le secrétariat du chapitre africain de la Convention des Maires pour le Climat et l’Énergie. Nous souhaitons que ces expériences soient mieux connues et diffusées. Comme COP de l’Action, nous attendons la confirmation des engagements nationaux et leur déclinaison au niveau des territoires, seul espace de vérification de leur mise en œuvre effective. Nous insistons sur ce point car si l’on veut que l’accord de Paris ait un impact, celui-ci doit se manifester là où les gens vivent, au niveau des territoires. Il faut donc que ce soit d’abord à ce niveau que s’organise la lutte contre le changement climatique, y compris en dotant ce niveau de moyens humains et financiers adéquats. On est loin du compte.


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Le Plus de JA Maroc

TRIBUNE

Économies renouvelables MOHA ENNAJI Professeur à l’université Sidi-MohamedBen-Abdellah, de Fès

L

effondrement des prix mondiaux du pétrole dévaste aujourd’hui plusieurs économies du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord. Pas question cette fois pour les dirigeants d’attendre de voir les prix repartir à la hausse. L’effondrement actuel est différent de ceux du passé, et les gouvernements doivent s’orienter vers de nouvelles stratégies en matière d’énergie et de développement. Le Maroc, qui souhaite devenir une puissance régionale dans le domaine des énergies renouvelables, devient, de ce fait, une véritable source d’inspiration pour beaucoup d’autres pays. Bien que le royaume investisse déjà depuis un certain temps dans des projets de grande ampleur, c’est seulement aujourd’hui que ces investissements prennent tout leur sens. Sans doute le plus impressionnant porte-t-il sur l’immense complexe solaire Noor I, situé dans le désert, près de Ouarzazate. Inaugurée le 4 février, cette centrale recourt à une technologie extrêmement avancée. Considérée comme la plus grande installation solaire au monde, Noor I devrait produire assez d’énergie pour subvenir aux besoins de 1 million de personnes et exporter ses excédents vers l’Europe et le reste de l’Afrique. Dans la mesure où le Maroc importe 97 % de son approvisionnement énergétique et ne dispose d’aucun gisement d’hydrocarbures, le gouvernement considère le développement des énergies renouvelables comme l’unique moyen d’assurer la continuité du développement économique du pays.

gouvernement marocain, dans le cadre de sa stratégie nationale de développement. Dans le même temps, le Maroc a installé sur la côte atlantique sud le parc éolien de Tarfaya, d’ores et déjà le plus étendu du continent. Grâce à ses 131 turbines, il dispose d’une capacité de production de 300 MW, permettant au pays de réduire de 900 000 tonnes par an ses émissions de dioxyde de carbone, tout en abaissant la facture annuelle des importations pétrolières marocaines de plus de 190 millions de dollars. Le pays entend développer, dans un futur proche, un programme éolien capable de produire 2000 MW par jour, ainsi qu’un projet d’énergie hydroélectrique d’une capacité identique. L’objectif du Maroc est d’assurer

Noor I est considérée comme la plus grande centrale solaire au monde.

Noor I, qui compte plus de 500 000 miroirs incurvés, sur plus de 4,5 km2, pour un investissement de 700 millions de dollars [environ 635 millions d’euros], n’est que la première tranche d’un complexe solaire prévu pour occuper plus de 30 km2. D’ici à 2018, trois autres centrales vont être construites, combinant des technologies comme la thermodynamique ou le photovoltaïque. L’ensemble produira 2000 mégawatts (MW) d’ici à 2020, contribuant à réduire l’écart de développement entre zones urbaines et rurales. Les deux tiers des 9 milliards de dollars nécessaires à la réalisation de l’ensemble ont été apportés par le N 0 2911-2912 • DU 23 OCTOBRE AU 5 NOVEMBRE 2016

lui-même 52 % de sa production totale d’électricité grâce aux énergies renouvelables. Une proportion inégalée dans toute l’Afrique. À l’heure où la demande en électricité augmente chaque année de 7 % à travers le royaume, le gouvernement sait qu’il ne peut rester passif et n’entend pas procéder à un sevrage brutal des sources énergétiques traditionnelles. Dans les cinq prochaines années, les autorités prévoient de faciliter l’accès des industries nationales au gaz naturel liquéfié (GNL). Un projet de plus de 4,5 milliards de dollars, entièrement financé par le secteur privé, doit voir le jour, comprenant un port doté d’un terminal gazier, raccordé à l’intérieur du pays par un pipeline de 400 km. Aujourd’hui, 90 % de la population est raccordée au réseau électrique, contre 18 % dans les années 1990. Sur la même période, les investissements ont dépassé 3 milliards de dollars. Cette somme colossale permet aujourd’hui au Maroc d’affirmer son indépendance énergétique, de réduire le coût de l’électricité et donc d’assurer à ses entreprises un approvisionnement suffisant pour subvenir à leurs besoins, renforçant les capacités du pays à diversifier son économie. Un exemple que beaucoup de pays d’Afrique et du MoyenOrient pourraient suivre à leur tour. JEUNE AFRIQUE


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Le Plus de JA Maroc

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YASSINE BENJDYA

La ferme de Yassine Benjdya, à Laouamra, dans la région de Tanger.

CONSOMMATION

Le bio prend ses marques Les produits issus de l’agriculture biologique ont la cote dans les grandes villes. Mais le secteur doit encore se structurer et, surtout, se doter de véritables labels.

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uit heures du matin. Comme chaque samedi, Yassine Benjdya s’apprête à livrer ses clients. Dans son véhicule, il transporte une vingtaine de paniers débordant d’aubergines, de poivrons, de pommes de terre et d’autres légumes de saison. Tous bio. Diplômé de la Pace University, de New York, et de la Hult International Business School, de Londres, ce jeune homme de 23 ans aurait pu suivre une carrière de golden-boy et gagner « un salaire de malade », comme il dit. Mais, issu d’une famille attachée à la terre, il est rentré au bled participer à la gestion du domaine familial, près de Larache. Dans cette belle exploitation de 1 700 ha, située à 220 km au nord de Casablanca, il a réservé une dizaine d’hectares à la réalisation de son rêve : une ferme bio consacrée à la culture maraîchère.

PRIX ÉLEVÉ. Le bio, Yassine Benjdya y croit dur comme fer. Ses légumes sont récoltés la veille de la livraison et, malgré leur prix élevé, ils séduisent ! Créé il y a un an, Farm Fresh compte déjà une centaine de clients, principalement issus des zones à fort pouvoir d’achat, comme Casablanca et Rabat. Une bonne semaine peut rapporter jusqu’à 15 000 dirhams (environ 1 370 euros) de chiffre d’affaires. Pas suffisant pour couvrir toutes les dépenses, mais il complète ses revenus N 0 2911-2912 • DU 23 OCTOBRE AU 5 NOVEMBRE 2016

avec d’autres produits bio, comme des yaourts, des œufs ou des confitures. Effet de mode? Phénomène de société? La multiplication des fermes bio aux abords des grandes villes marocaines suscite des interrogations. Depuis dix ans, de nombreuses exploitations ont vu le jour autour de Casablanca, de Rabat, de Marrakech et d’Agadir. « Il y a certes un engouement chez les ménages urbains, mais le Marocain lambda continue surtout à faire attention au prix », tempère Jalal Charaf, vice-président de la Fédération interprofessionnelle du bio (Fimabio).

Créée en juin dernier, cette association regroupe tous les acteurs de la chaîne et compte sur l’État pour l’aider à organiser la filière et à la développer. En avril 2011, le gouvernement marocain a signé un contrat-programme de 1,1 milliard de dirhams avec les opérateurs de l’agriculture biologique, regroupés alors au sein de l’Association marocaine du bio (Amabio), l’ancêtre de la Fimabio. Objectif : faire passer la production de 50 000 à 400 000 tonnes à l’horizon 2020, en s’appuyant sur les cultures liées à l’exportation, comme l’olivier, l’arganier, les cultures maraîchères, les plantes médicinales et les agrumes. DÉFIS. Avec un peu plus de 80 000 t actuellement, l’objectif est encore loin d’être atteint. Le secteur doit relever deux défis : sa structuration et, surtout, sa certification. Mêmes s’ils sont cultivés naturellement et sans pesticides, beaucoup de produits ne peuvent être estampillés bio, faute d’un organisme certificateur national. Quelques opérateurs recourent aux labels étrangers (Ecocert, AB, Veritas…), mais ils le font pour des productions destinées à l’exportation. Sans cette validation, la relation entre les agriculteurs et leurs clients reste fondée sur la confiance. « Nous ne connaîtrons l’état réel du bio au Maroc que quand les produits seront tous certifiés. Nous pourrons alors juger », insiste Jalal Charaf. NADIA LAMLILI

UNE OFFRE HAUT DE GAMME

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u Maroc, les produits bio font une percée timide dans les grandes surfaces. Les enseignes CarrefourLabel’Vie et Marjane proposent des pâtes alimentaires, des galettes de riz et quelques produits laitiers, essentiellement de marques européennes, tant l’offre locale certifiée est faible. La première entreprise spécialisée dans les produits bio au Maroc est une franchise du groupe français

La Vie Claire. Épicerie, produits frais, produits d’entretien, cosmétiques…: les étalages y sont mieux approvisionnés qu’ailleurs, mais pas toujours à la portée du grand public, la plupart des produits étant issus de l’importation. La franchise propose aussi des produits marocains, même lorsqu’ils ne sont pas certifiés. Une façon d’encourager

la production locale, malgré la difficulté de disposer d’un réseau de fournisseurs fiables. Filiale du holding royal SNI, les Domaines agricoles proposent aussi de l’épicerie fine, ainsi que des fruits et des légumes issus de l’agriculture raisonnée dans ses deux boutiques de Casablanca, en attendant l’ouverture d’une troisième, à Rabat. En se positionnant, là encore, sur une offre haut N.L. de gamme. JEUNE AFRIQUE


Creating energy systems that power progress. And a brighter future for an entire country. That’s Ingenuity for life. Morocco calls itself the “land of sunset” – but when it comes to clean energy it is a shining example: Generating a major part of the country’s power supply from sustainable sources, Morocco is leading the way for energy innovation in Africa. Now it’s time for the next step: applying Siemens’ comprehensive portfolio of solutions for sustainable energy infrastructures, Morocco is set to reach their ambitious energy and emission goals. At the same time, they will improve the growth prospects of its economy as well as the future perspective for the next generation of Moroccans. Building the future of a country, by building the future of energy. That’s Ingenuity for life.

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siemens.ma/ingenuityforlife


Le Plus de JA Maroc

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ENTREPRENEURIAT

Du sens et des responsabilités Ils sont botaniste, ingénieur, homme d’affaires ou architecte. Gros plan sur ces Marocains qui tentent d’apporter à leur pays de nouvelles nuances de vert.

Zineb Benrahmoune Idrissi

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i elle n’exprime pas sa révolte à la façon de José Bové, Zineb Benrahmoune Idrissi sait se mettre en colère quand elle voit la nature maltraitée. « Une fois, en face de ma ferme, j’ai vu un homme brûler un arbre sous prétexte qu’il abritait des serpents. J’ai crié comme une folle. J’étais prête au pire », se souvient-elle. À 57 ans, cette ancienne féministe, fille d’un grand savant de l’université Al Quaraouiyine de Fès, est la championne de la permaculture au Maroc. En 1998, parallèlement à son métier de professeure en botanique, elle acquiert un terrain aride de 2,5 ha à Shoul, près de Rabat, qu’elle décide

de « soigner » pour que les humains, la faune et la flore puissent y vivre en harmonie totale, sans excès, juste dans le partage. En dix-huit ans, elle en a fait un jardin modèle dans la région, un véritable éco­ système,suffisammentreconnu pour que des célébrités comme l’écologiste Pierre Rabhi ou le philosophe Edgar Morin soient venus le visiter. Le concept défendu par Zineb est un savant mélange de respect de la terre, de sauvegarde des traditions c o m m u nau t a i re s e t d e développement personnel. Chacun est invité à partager le repas des cinq familles qui travaillent dans sa ferme, se former à la permaculture, et

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Professeure en botanique, créatrice d’un jardin à Shoul

faire du woofing (vivre et travailler dans des fermes biologiques). Ou simplement se ressourcer spirituellement. Car Zineb est maître Reiki, un art ancestral de guérison, qui lui permet d’aider les gens à faire

circuler l’énergie dans leur organisme. Convaincue de la baraka (« bénédiction ») des lieux, elle cultive la durabilité, dans les champs aussi bien que dans les corps et les esprits. NADIA LAMLILI

Omar Balafrej Ingénieur, directeur du Technopark de Casablanca

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ALEXANDRE DUPEYRON POUR JA

orsqu’il a pris la tête du Technopark de Casablanca en 2008, Omar Balafrej n’a pas tardé à mettre les préoccupations environnementales au cœur du plan d’action de cet incubateur de start-up. Il s’est notamment attaché à promouvoir les synergies évidentes entre les green technologies et les nouvelles technologies, secteur historique de cette structure, dupliquée depuis à Rabat et à Tanger. Grâce à Omar Balafrej, une quinzaine de sociétés estampillées « green » sont aujourd’hui installées dans ces pépinières, devenues de véritables showrooms environnementaux. Avec ses équipes, cet ingénieur diplômé de l’École centrale de Lyon a mené de nombreux projets écologiques, des premières installations photovoltaïques urbaines aux lampadaires solaires, sans oublier les projets d’efficacité énergétique. À 43 ans, ce natif de Rabat est sur tous les fronts. Président de MITC Capital, un fonds d’investissement doté de 100 millions de dirhams (un peu plus de 9 millions d’euros) pour soutenir les entreprises du secteur des nouvelles technologies, il est également membre, depuis 2015, du conseil d’administration de la Fondation pour l’innovation en Afrique (AIF). Sans oublier la politique. Déjà conseiller municipal de la capitale, il a été élu député à la Chambre des représentants lors des législatives du 7 octobre, ce qui devrait l’obliger à démissionner de la direction du Technopark. FAHD IRAQI

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Salima Naji Architecte et anthropologue

DAVID GOEURY

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uand elle parle du patrimoine architectural marocain, sa voix module comme une chanson douce. À 45 ans, l’architecte Salima Naji fait revivre les casbahs, les ksour et tous les lieux de mémoire qui ont fait la gloire du Maroc d’antan, mais menacent aujourd’hui de tomber en ruine. « L’agonie de certains monuments est plus significative encore que leur heure de gloire », disait l’écrivain français Jean Genet. Salima Naji travaille en utilisant les mêmes matériaux qu’à l’époque de leur construction, redonnant ainsi ses lettres de noblesse au pisé, dont elle s’est servie pour restaurer le ksar d’Assa, bijou patrimonial du Sud marocain, édifié aux alentours du XIIe siècle. Dans la ville de Tata, dans le sud du Maroc, c’est en utilisant la pierre locale qu’elle a réhabilité des greniers collectifs quasi effondrés. « Rien n’est anodin en architecture. Il y a toujours une sagesse derrière la présence d’un matériau », dit l’architecte, qui figure dans la liste des participants

à la COP22 de Marrakech. Auteure de plusieurs ouvrages sur l’architecture responsable, lauréate de nombreux prix nationaux et internationaux, Salima Naji se bat contre l’amnésie des Marocains en ce qui concerne leur histoire. Après son diplôme de l’École nationale supérieure d’architecture de Paris-La Villette en 2002, elle s’inscrit à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS, à Paris) et obtient un doctorat

en anthropologie en 2008. Entre-temps, elle arpente les vallées du Draâ, du Dadès et du Haut Atlas, bercée par les récits du passé. « Je pense profondément que le cadre de vie, s’il est conçu selon les traditions locales, polit les êtres, les rend meilleurs et les empêche même de sombrer dans la misère humaine », conclut l’architecte, qui s’est bâti une carrière en mettant en pratique sa théorie. N.L.

Mehdi Alaoui Mdaghri Directeur associé d’Eganeo et fondateur de Planète citoyenne, du Forum de la mer et du Morocco Solar Festival

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d’une collection de diplômes décrochés en France, en EspagneouenItalie,ilsemblait tout destiné à une brillante carrière dans le monde des affaires. En 2009 néanmoins, il choisit de créer Planète citoyenne,

une ONG ayant pour objectif de promouvoir le développement durable et de sensibiliser à la protection de l’environnement. Un an plus tard, il parvient à allier sa passion pour l’écologie et son sens inné des affaires en fondant Eganeo, un

cabinet de conseil spécialisé dans la conception et l’organisation d’événements liés au développement durable. En 2013, il lance la première édition du Forum de la mer, une rencontre internationale organisée à El Jadida, visant à favoriser l’échange et le débat autour des problématiques liées à la mer, à l’océan et aux littoraux. En quatre ans, l’événement s’est imposé comme un rendez-vous incontournable pour tous les spécialistes de l’environnement maritime. Entre-temps, il crée un autre événement green friendly: le Morocco Solar Festival, qui attire chaque année à Ouarzazate près de 6 500 visiteurs venus s’enquérir des dernières innovations liées à l’énergie solaire et aux énergies renouvelables. F.I.

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est peut-être son enfance à la campagne, dans la région de Casablanca, qui a fait naître chez Mehdi Alaoui Mdaghri, aujourd’hui âgé de 44 ans, la fibre environnementale. Fils d’un ancien ministre et bardé

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Le Plus de JA Maroc

TRIBUNE

Pour un « écoféminisme » d’urgence

FATHÏA BENNIS Présidente de Maroclear, fondatrice de l’association Women’s Tribune

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e changement climatique est un défi lancé au développement durable, avec de larges incidences sur l’environnement et sur le développement. Il aggrave la vulnérabilité face aux catastrophes naturelles, les migrations climatiques, les difficultés d’accès aux matières premières et touche de plein fouet les régions les plus pauvres du monde, ainsi que les catégories sociales les plus défavorisées, en premier lieu les femmes, dont il augmente la précarité en matière de sécurité alimentaire, d’accès aux soins, à l’eau, à l’énergie ou encore au logement. Selon l’ONU, quand une catastrophe naturelle frappe une région, le risque de décès est 14 fois plus élevé pour les femmes, principalement parce qu’elles ne sont pas ciblées en priorité par les programmes d’alerte et de prévention des catastrophes. En 2004, au Japon, près de 80 % des victimes du tsunami étaient des femmes. Le dérèglement climatique provoque également des déplacements massifs de population, dont les femmes sont les principales victimes. Quand elles sont déplacées ou réfugiées, elles sont davantage exposées aux violences sexuelles et à la traite des êtres humains. Les effets du dérèglement sur la fertilité des sols, sur la disponibilité des ressources en eau et donc sur la sécurité alimentaire des pays en développement exercent aussi une pression plus forte sur les femmes. Ces contraintes provoquent une surcharge de travail qui aboutit souvent à une déscolarisation des jeunes filles. Pourtant, cette terrible injustice, c’est avec les femmes que nous pourrons l’éradiquer. Premières victimes des bouleversements climatiques, elles sont également un puissant vecteur social dans la diffusion des bonnes pratiques environnementales au quotidien.

place par ONU Femmes depuis 2011 pour favoriser leur participation dans des coopératives a permis d’augmenter les rendements agricoles et la diffusion des techniques de production « climato-protectrices ». Qu’il s'agisse de femmes immigrées qui deviennent « ambassadrices vertes » au Danemark ou de femmes indiennes qui créent des coopératives agricoles traditionnelles, les occasions d’agir sont démultipliées lorsque l’inégalité des sexes est prise en compte. Tous ces exemples plaident pour que les femmes soient placées au cœur des stratégies nationales et locales de lutte contre le dérèglement climatique, ainsi qu’au centre des négociations internationales sur ce sujet. D’une manière générale, elles ont plus de difficultés à influer sur les politiques publiques. Les négociations climatiques se font à des niveaux de gouvernance très élevés, où la parité décisionnelle ne progresse que très lentement, malgré les objectifs fixés par les politiques publiques et les Nations unies. Pourtant, en 1992, l’un des principes de la déclaration de Rio sur l’environnement stipulait que « les femmes ont un rôle vital dans la gestion de l’environnement et le développement. Leur pleine participation est donc essentielle à la réalisation d’un développement

Un programme conçu sans prise en compte des femmes est moins efficace.

Les femmes sont des agents importants du changement car elles ont les moyens de contribuer à l’atténuation de ses effets. Elles représentent un important levier de la mise en œuvre des politiques pour une gestion plus durable. Aujourd’hui, tous les spécialistes du développement le soulignent : un programme conçu sans prise en compte des femmes est moins efficace que le même programme planifié avec leur aide. Cette logique vaut aussi pour les actions de lutte contre le dérèglement climatique, où les femmes sont déjà actrices du changement. Au Rwanda, le programme mis en N O 2911-2912 • DU 23 OCTOBRE AU 5 NOVEMBRE 2016

durable. » Entre 1996 et 2010, la part des femmes dans les délégations envoyées par les pays négociateurs est passée de 20 % à 30 %. Et celle des chefs de délégation, d’à peine 12 % à 15 %. Aujourd’hui, nous devons nous mobiliser pour lancer un écoféminisme d’urgence, avec pour objectif d’assurer la pleine participation des femmes, sur un pied d’égalité avec les hommes, à tous les niveaux de la prise de décision, sur les questions d’environnement. Il faut aussi favoriser un accès aux ressources agricoles, dont elles ne disposent pas aujourd’hui. En Afrique, 90 % de la nourriture est produite par des femmes, mais seulement 15 % d’entre elles sont propriétaires terriennes. Si les causes du changement ne sont pas abordées dans un cadre réellement fondé sur la justice des genres, alors les objectifs de développement durable ne pourront être atteints, et les inégalités qui existent aujourd’hui ne feront qu’empirer. L’avenir de l’humanité ne sera garanti que quand toutes les discriminations seront dépassées. JEUNE AFRIQUE


#COP22 - cop22.ma

Face au réchauffement climatique, la question n’est pas de savoir le temps qu’il reste pour changer nos comportements, ni le temps que cela prendra. Des solutions existent. Des engagements ont été pris. Et aujourd’hui, une nouvelle étape commence. C’est le temps de l’action.




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