JA 3037 du 24 au 30 mars 2019 Focus Monétique

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LIBANAIS D’AFRIQUE

ENQUÊTE La face cachée de l’or noir nigérian

Les 30 familles qui comptent

SÉNÉGAL Ousmane Sonko se dévoile

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL NO 3037 DU 24 AU 30 MARS 2019

ALGÉRIE

À la recherche du temps perdu Les manifestations qui se multiplient sont le symbole d’une nouvelle dynamique. Objectif: un changement profond pour réinventer tout un pays. SPÉCIAL 20 PAGES

ÉDITION INTERNATIONALE ET MAGHREB & MOYEN-ORIENT

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France 3,80 € Algérie 290 DA Allemagne 4,80 € Autriche 4,80 € Belgique 3,80 € Canada 6,50 $ CAN Espagne 4,30 € Éthiopie 67 birrs Grèce 4,80 €

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Guadeloupe 4,60 € Guyane 5,80 € Italie 4,30 € Luxembourg 4,80 € Maroc 25 DH Martinique 4,60 € Mayotte 4,60 € Norvège 48 NK Pays-Bas 5 € Portugal cont. 4,30 € Réunion 4,60 € RD Congo 6,10 $ US Royaume-Uni 3,60 £ Suisse 7 FS Tunisie 4 DT USA 6,90 $ US Zone CFA 2000 F CFA ISSN 1950-1285


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La plateforme bancaire en Afrique

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GETTYIMAGES

Focus Monétique

PIRATAGE

Quand l’Afrique prend sa sécurité en main Les cyberattaques contre les établissements financiers se sont multipliées ces dernières semaines en Afrique de l’Ouest. Mais, face à des procédés de plus en plus sophistiqués, les moyens manquent.

STÉPHANIE WENGER

À

mesure que l’économie digitale se développe, les paiements dématérialisés augmentent (396 millions de comptes mobile money en 2018, +14 %, 26,8 milliards de transactions), et les menaces concernant la sécurité des opérations s’accroissent également. Une étude menée dans plusieurs

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2,32 MILLIARDS DE DOLLARS

La valeur que pèsera le marché de la cybersécurité en 2020 sur le continent, selon Africa CyberSecurity Market. Il s’élève aujourd’hui à 1,33 milliard de dollars.

États d’Afrique de l’Ouest publiée en mars 2017 par Interpol et l’éditeur de logiciels Trend Micro relevait que « le nombre de cyberescroqueries avait augmenté de 132 % entre 2013 et 2015, et que le montant moyen des sommes dérobées chaque année aux entreprises s’était élevé à 2,7 millions de dollars et à 422 000 dollars pour les particuliers ».

Des cybercriminels aux méthodes de plus en plus pointues

L’organisation de lutte contre le crime soulignait aussi la sophistication croissante des attaques, et l’émergence de cybercriminels d’un nouveau genre, rompus à des modes opératoires très élaborés, utilisant des logiciels de capture de frappe ou des chevaux de Troie qui permettent la prise de contrôle à distance. Les attaques se sont multipliées ces dernières semaines. Mi-mars la Banque de Dakar (BDK), au Sénégal, aurait ainsi perdu, selon la presse sénégalaise, 50 millions de F CFA. Selon les premiers éléments de l’enquête, les auteurs du piratage seraient parvenus à pénétrer dans le système informatique

de la banque en ouvrant un compte dans l’établissement. Début mars, toujours à Dakar, c’est Ecobank qui a été victime d’une fraude importante, alors qu’UBA parvenait à déjouer de son côté un ordre de virement frauduleux. Fin 2018, deux mois après son lancement, la plateforme de paiement universelle PayQin (comprenant 10 000 comptes en Côte d’Ivoire et au Cameroun), qui permet de recevoir, d’envoyer de l’argent et d’accéder aux services marchands en ligne, même non partenaires, a vu sa base de données supprimée. « Heureusement on fait des sauvegardes régulièrement. Techniquement, PayQin est une coquille vide, toutes les données sensibles sont abritées chez Visa, les fonds sont dans les banques partenaires. Finalement les pirates n'ont obtenu que des noms et des adresses e-mail cryptés », rapporte son fondateur, l’ancien banquier franco-ivoirien Fabrice Amalaman. À un niveau encore plus important, les États sont aussi confrontés à ce genre de situations. Ceux-ci tentent de dématérialiser le

Encore des entraves à l’interopérabilité En 2018, l’interopérabilité a franchi un cap. Deux des plus gros opérateurs du continent, Orange et MTN, ont décidé de s’unir pour créer Mowali (pour Mobile Money Interoperability). La filiale sera installée à Abidjan. Les tests techniques sont en cours, et l’ouverture effective est prévue pour cette année. Une coentreprise créée alors que l’Afrique est en tête de course concernant l’usage des paiements digitaux via smartphone, puisqu’elle concentre les trois quarts des usagers de ce type de transactions. Ce qui représente aujourd’hui, selon Orange, 338 millions de clients. « Mowali

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offre une promesse d’universalité, estime Patrick Roussel, directeur des services financiers mobiles chez Orange. Jusqu'à présent, on pouvait envoyer de l'argent et payer à condition que l'individu ou le site marchand soit client du même opérateur. Par exemple, un restaurateur à Dakar, pour accepter les paiements en mobile money de tous ses clients, devait ouvrir autant de comptes que d'opérateurs : c'était plus facile de prendre du cash. L'usage était limité aux frontières des réseaux de télécoms. » À partir du moment où l’usager est connecté à Mowali, il peut

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payer et recevoir des fonds de tout autre utilisateur de la plateforme, où qu’il soit. Les banques font partie des acteurs financiers invités à rejoindre l’aventure. À côté des 150 opérateurs de mobile money, l’Afrique compte 650 banques, rappelle Patrick Roussel: « Et, sauf à Madagascar et en Tanzanie, il n’y a pas d’interopérabilité entre les acteurs. Mowali offrira un service bank to wallet, il sera possible de transférer de l'argent vers et depuis ses comptes. » En Afrique de l’ouest, l’interopérabilité reste soumise à une réglementation parfois trop rigide, regrettent les acteurs du secteur. Si un

opérateur veut lancer des services interopérables, il doit demander une autorisation à la banque centrale de son pays et faire figurer les infrastructures techniques qui vont être utilisées. Pour le professeur Bitange Ndemo, ancien secrétaire permanent du ministère de l'Information et des Communications au Kenya, un pays à l’avantgarde de cette révolution, « les régulateurs ne devraient pas entraver l'innovation. On veut que les technologies soient plus accessibles pour être plus inclusives, les autorités doivent laisser de l'espace aux innovateurs ». S.W.


Un environnement juridique à améliorer et à harmoniser

Ancien secrétaire permanent du ministère de l'Information et des Communications kényan, Bitange Ndemo met en avant les solutions mises en œuvre par son pays, qui compte 50 % des utilisateurs de mobile money, passant notamment par l’intelligence artificielle et la blockchain. « Cette dernière est très difficile à briser, puisqu’il faut s'attaquer à plus de 50 % des serveurs des mineurs (procédés de sécurisation des transactions de la blockchain). La reconnaissance vocale peut être une bonne mesure. Au Kenya, le gouvernement essaie de créer une “identité digitale de confiance” avec des technologies qui s'améliorent pour permettre des paiements digitaux sécurisés et inviolables. » Pour Yoann Lhonneur, directeur associé au sein du cabinet Devlhon Consulting, « des efforts ont été accomplis, mais on revient de loin. La question est encore considérée sous le seul angle informatique et technique, alors qu'elle doit aussi être abordée du point de vue stratégique et logistique. La sécurité des transactions doit être envisagée à tous les niveaux de l’entreprise ». Le secteur est aussi en attente d'un arsenal juridique adéquat. « Sur une cinquantaine de pays, seul un tiers se sont dotés de lois complètes », poursuit l’expert. Mais, alors que 80 % des transactions frauduleuses en Afrique sont générées depuis l’Europe et les États-Unis, le principal défi réside dans la formation d’équipes locales. Qui commencent à émerger au Maroc ou en Tunisie.

FRANK SIMON

plus possible les transferts d’argent afin de réduire la corruption, les escroqueries comptables et les efforts demandés aux bénéficiaires (qui font parfois des trajets longs et dangereux pour encaisser paies ou pensions). Avec des politiques publiques qui sont amenées à davantage se digitaliser (comme pour le remboursement des frais médicaux au Sénégal), les montants et les volumes en circulation sont de plus en plus importants. Mais les moyens financiers et techniques manquent souvent pour mettre en œuvre une politique d’ensemble.

Karim Matrouf Directeur général délégué de Naps

« Nous voulons généraliser le paiement électronique aux commerces »

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remière institution non bancaire marocaine à acquérir des instruments de paiement électronique, Naps a fêté en novembre dernier sa première année d’activité comme nouvel opérateur monétique. La filiale de M2M, groupe spécialisé dans les logiciels bancaires, arrive sur un marché historiquement contrôlé par le Centre monétique interbancaire (CMI), détenu par un groupement bancaire, leader incontesté depuis 2004 et sans concurrence. M2M a jugé que le marché des instruments de paiement présente des potentialités et des segments non encore adressés, car seuls 2,3 % des commerces proposent le paiement électronique, et 9 % des Marocains seulement l’utilisent. En parallèle, c’est un marché qui connaît un taux de croissance annuel moyen de plus de 20 % en matière de flux monétiques. Le groupe, présidé par Redouan Bayed, a fait le choix d’une offre technologique et tarifaire diversifiée. Il nourrit même l’ambition d’exporter prochainement sa solution vers d’autres pays du continent africain. Êtes-vous parvenu à convaincre autant de clients que vous le souhaitiez ? Nous avons franchi il y a quelques semaines le cap de 1 000 commerçants affiliés dans différents secteurs. Nous avons également conclu des partenariats stratégiques qui introduisent

le paiement électronique contact et sans contact pour la première fois dans les secteurs du transport en commun et dans les commerces de proximité au Maroc. Naps a aussi instauré de nouveaux modèles, comme celui d’agrégateur monétique. Ceux-ci sont consacrés aux associations professionnelles ou aux opérateurs industriels qui pourront les utiliser dans leurs écosystèmes. Comment comptez-vous vous différencier du CMI, qui était jusqu’à présent en situation de monopole ? Notre ambition est de généraliser le paiement électronique à tous les secteurs du commerce et des services. Nous avons fait le choix de l’innovation comme axe stratégique de notre développement, aussi bien dans les secteurs matures comme la distribution ou la restauration que dans le transport et les commerces de proximité. Nous voulons atteindre au cours de cette année un réseau de 12 500 points d’acceptation et traiter 15 millions de transactions pour un volume de 5 milliards de dirhams (457 millions d’euros). Pour l’activité e-commerce, notre objectif est d’atteindre en 2019 une communauté de 500 e-commerçants générant un volume de 900 millions de dirhams pour un total de 2 millions de transactions. Propos recueillis à Casablanca par EL MEHDI BERRADA

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Focus Monétique

TRANSACTIONS

Edenred parie sur la fin du cash

EDENRED

Après sa participation dans le fonds Partech, le français, leader mondial des solutions de paiement, s’est associé à Jumia pour profiter de l’essor de la digitalisation.

L’Afrique ne représente en 2018 que 6 % du CA de l’entreprise. NATACHA GORWITZ

n janvier, Jumia Travel, le premier portail de réservation d’hôtels en Afrique, a choisi de s’associer au leader mondial des solutions de paiement, le français Edenred (CA 1,38 milliard d’euros en 2018), pour faciliter et sécuriser le paiement de ses 25 000 partenaires hôteliers. L’agence de voyages en ligne pourra désormais les régler grâce à une carte bancaire virtuelle émise par Edenred, préchargée du montant de la réservation. Un moyen de paiement digital à usage unique et instantané : au terme du séjour, l’hôtelier reçoit automatiquement la confirmation de paiement au moment où la transaction s’effectue. Cette solution se présente comme une alternative au virement bancaire qui présente plusieurs difficultés : il coûte cher, peut prendre plusieurs jours, impose de gérer l’ensemble des codes Iban des prestataires et ne facilite pas la conciliation entre ses flux de facturations et ses flux de paiements. « Avec ce partenariat,

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Edenred entend étendre ses services de paiement aux entreprises du continent, souligne Vincent Previ, directeur du développement Afrique, notamment auprès de nouveaux acteurs dans les secteurs du voyage et de l’assistance. » L’ex-filiale d’Accor est implantée en Afrique depuis 2007 à travers sa filiale marocaine Edenred Maroc, qui commercialise des titres-restaurants et des titres-cadeaux. Depuis 2009, elle a lancé au Mali, au Soudan du Sud, en RD Congo et au Burundi, Agri Edenred, des solutions de paiement pour les intrants agricoles subventionnés. Selon GSMA, près de deux milliards de dollars ont été

DANS LES AIRS AUSSI

En juillet 2017, Edenred a remporté l’appel d’offres de la Iata avec un système de paiement spécifique à l’achat de billets d’avion par les agences le voyages. Vingt-deux pays devraient être couverts cette année.

déboursés en 2018 sous forme de mobile money par des entreprises, des administrations ou des ONG, en Afrique subsaharienne. Conscient d’un potentiel de marché considérable, Edenred a mis en place début 2018 une équipe spécialisée dans le développement de ses activités sur le continent. « Nous ne voulions pas louper le coche », raconte Vincent Previ, à la tête du dispositif. En incluant l’Amérique du Nord, le Moyen-Orient et l’Asie du Sud-Est, l’Afrique ne représentait en 2018 que 6 % du chiffre d’affaires opérationnel d’Edenred, contre 37 % pour l’Amérique latine.

Une première levée de fonds de 125 millions d’euros

« Historiquement, nos solutions sont des alternatives au cash. En Afrique, nous pouvons être moteur de la digitalisation des moyens de paiements », poursuit Vincent Previ. Et s’inspirer de ce qu’il a réussi à faire aux Émirats arabes unis, où Edenred distribue des « cartes salaires » pour permettre aux entreprises de payer leurs salariés non bancarisés, ou au Brésil, où il a lancé des « cartes fret » pour le compte de gros transporteurs qui ont recours à des camionneurs indépendants. Pour explorer le marché africain, Edenred a participé à la levée de fonds de 125 millions d’euros engagée par le capital-investisseur Partech Africa – cofondé par l’ancien Monsieur Afrique de Google, Tidjane Deme – et destinée aux starts-up actives dans l’économie numérique. Les deux premiers investissements du fonds, dans le nigérian Trade Depot, spécialisé dans les services aux marchands, et le sud-africain Yoco, dans le paiement numérique, ont sonné aux oreilles d’Edenred. Celui-ci compte aujourd’hui 1,7 million de partenaires commerçants, et, l’année dernière, 80 % du montant des transactions gérées par Edenred (28 milliards d’euros) s’effectuaient au format digital.


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