JA 3037 du 24 au 30 mars 2019

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LIBANAIS D’AFRIQUE

Les 30 familles qui comptent

ENQUÊTE La face cachée de l’or noir nigérian

SÉNÉGAL Ousmane Sonko se dévoile

HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL NO 3037 DU 24 AU 30 MARS 2019

ALGÉRIE

À la recherche du temps perdu Les manifestations qui se multiplient sont le symbole d’une nouvelle dynamique. Objectif: un changement profond pour réinventer tout un pays. SPÉCIAL 20 PAGES

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GRAND FORMAT

ALGÉRIE

EPA-EFE/MOHAMED MESSARA

Pour tout comprendre de l’évolution d’un pays

C’est déjà demain

L’élan citoyen qui a conduit le président Bouteflika à renoncer à un cinquième mandat a impulsé une nouvelle dynamique qui devrait déboucher sur de profondes réformes politiques et économiques. jeuneafrique no 3037 du 24 au 30 mars 2019

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COMMUNIQUÉ

Accor, premier investisseur et opérateur étranger dans l’hôtellerie en Algérie

Accor est le premier opérateur hôtelier international implanté en Algérie suite à la signature du contrat de management en 1992 avec l’EGT Centre (société publique), pour la gestion de l’hôtel Sofitel Alger Hamma Garden, le second contrat de gestion a été conclu en 2001 pour le Mercure Alger aéroport avec la même société. La JV SIEHA (Société Immobilière d’Exploitation Hôtelière Algérienne), dont l’objet est la réalisation d’une vingtaine d’hôtels sous les enseignes Novotel et ibis a ouvert à ce jour 7 hôtels, dont 5 Ibis et 2 Novotel. La société continue son expansion avec la construction du Novotel Alger (255 chambres), l’extension de l Ibis Alger de 104 chambres et enfin un ibis de 120 chambres l’Ibis

CHIFFRES CLÉS ACCOR ALGÉRIE r r r r

Horizon 2021

Près de 1 500 collaborateurs croissance parc 1 % d’expatriés + 65 % Près 55 % des collaborateurs formés en 2018 Parc futur 14 hôtels / plus 3 000 chambres

Immeuble CMA CGM, quartier d’affaires de Bab Ezzouar, Alger

à Mostaganem et ce malgré un contexte économique relativement difficile. A noter que Accor est le seul Groupe international hôtelier à investir et transférer son savoir-faire en Algérie. Accor a aussi signé un contrat de franchise avec Djilali MEHRI en 2012 pour l’hôtel Royal Oran, qui porte actuellement le label MGallery (enseigne haut de gamme). La capacité du parc actuel s’élève à 1 815 chambres (sous enseignes Accor) permettant au Groupe de conforter sa position de leader parmi les chaînes internationales en termes de part de marché. Accor a conclu plusieurs contrats de management : en 2014 signature d’un contrat de management avec un partenaire privé pour la gestion de l’hôtel Mercure Alger palais des congrès situé à Ain Bénian de 152 chambres, en 2015 la signature d’un contrat de gestion de l’hôtel Sofitel Alger Thalassa, un complexe hôtelier de thalassothérapie de 180 chambres à Sidi Fredj avec un partenaire public. D’autres contrats de gestion ont également été signés récemment avec des partenaires privés tel que l’hôtel Mercure à Skikda de 178 chambres (2018) et l’hôtel Mövenpick Alger aéroport de e 180 chambres (2018). Le e secteur hôtellerie & tourisme fait partie des secteurs straté égiques pour l’Algérie afin de permettre de diversifier son écconomie. Pour faciliter le développement de ce secteur, l’état algérien a instauré des mesures incitatives pour favoriser l’inve estissement hôtelier tel que des avantages fiscaux et financiers très intéressants.

JAMG - PHOTOS : D.R.

Accor en Algérie est organisé en deux entités juridiques : Accor Hôtels Algérie crée en 2004 (opérateur et gestionnaire) et la JV SIEHA crée en 2005 (investisseur et propriétaire en partenariat avec le groupe GIMMO détenu par Djilali MEHRI), en distinguant ses deux structures Accor se donne les moyens de développer ses projets avec plus d’efficacité, de flexibilité et une meilleure rentabilité en Algérie, chaque entité avec son savoir-faire constitue un levier de création de valeur au service d’une même ambition.

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Marwane Ben Yahmed marwaneBY

Une page se tourne ’Algérie n’existe pas? Nous allons l’inventer », disait l’un de ses responsables à l’aube de l’indépendance. Trop rares sont les Algériens qui, depuis, se sont réellement interrogés sur ce pays à inventer. Pourquoi une telle nation s’est-elle ainsi dérobée à son destin ? Une nation qui ne crée de richesses que grâce à son sous-sol et dont la répartition pose question. Une nation, aussi, à laquelle ses enfants sont extrêmement attachés, mais, comble du paradoxe, dont la plupart rêvent de s’évader. Une nation, enfin, qui n’a jamais cessé d’hésiter entre optimisme et amertume, espoir et résignation. Affrontant les tempêtes, recroquevillée, les yeux fermés, en attendant que le grain passe sans chercher à l’éviter. On écope, on rafistole, mais on ne change point de navire ni d’équipage. Le passé, même douloureux, n’explique pas tout, mais il a trop longtemps représenté un refuge bien commode pour la génération toujours au pouvoir à Alger. Cette génération, celle de l’indépendance, a sacrifié les suivantes sur l’autel de l’Histoire, de la gloire oubliée des années 1970, quand Alger suscitait admiration, respect mais aussi crainte. Aujourd’hui, elle est arrivée au bout de son chemin. Ce peuple rebelle, réputé colérique, qui n’a jamais accepté de se soumettre aux envahisseurs, quels qu’ils soient, a longtemps fait preuve d’une infinie patience. Marqués par les épreuves, comme celle de l’horreur de la décennie noire, trimballés de promesses en gâchis, de coups d’éclat en occasions manquées, les Algériens ont éprouvé toutes les peines du monde à faire sauter les nombreux carcans qui les contraignaient à l’inertie. Impéritie des élites, multiples clivages (hommes-femmes, jeunes-vieux, Arabes-Berbères, bande côtière-intérieur du pays, etc.), système bloqué, jeunesse sans repères, faiblesse du débat public et intellectuel, potentiel économique bridé, avenir incertain…

L

«

94 ENJEUX

Les promesses du printemps

Aujourd’hui, comme par magie, nous assistons au grand sursaut du peuple algérien. Une page qui se tourne et l’ouverture d’un nouveau chapitre, passionnant. Au-delà de l’effet de surprise – car personne ne pouvait prévoir l’ampleur des manifestations –, des inquiétudes légitimes et des nombreuses questions que la crise actuelle soulève, on ne peut que se féliciter de l’extraordinaire dynamique qui étreint les Algériens. Tout devient possible, tout est discuté, mis sur la table. Le civisme et le sens des responsabilités sont omniprésents, les cortèges obéissent à une discipline remarquable. Mais le plus dur commence: gérer au mieux, dans l’intérêt de tous, cette transition entre l’Algérie d’hier et celle de demain. Les vingt années au pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika ont permis l’essentiel, qu’il convient, à l’heure du bilan, de ne pas sous-estimer. L’Algérie est aujourd’hui un pays en paix, stabilisé et reconstruit. Un pays qui dispose de cadres compétents, bien formés, travailleurs et soucieux de la défense des intérêts de la nation. Pour qui se souvient des conditions dans lesquelles « Boutef » est arrivé à la tête d’un État qui n’était pas loin de mettre genou à terre, ce n’est pas mince.

96 En débat

En finir avec l’État providence

98 ÉCONOMIE Un modèle à réinventer

104 Tourisme

Arrivés à bon aéroport

108 Entrepreneuriat

Ils l’ont fait

112 SOCIÉTÉ

Femmes zone

Transition politique

La liste des défis qui attendent les Algériens est longue, très longue. En tête des priorités, la gestion de la transition politique. Avec qui? Selon quel calendrier? Pour quels objectifs et quel système de gouvernance? Faut-il tout remettre à plat ou au contraire procéder avec parcimonie? C’est à eux, cinquante-sept ans après leur indépendance, de répondre à ces questions et de prendre en main leur destin. Pour s’inventer un avenir en concentrant leurs efforts sur la destination souhaitée et non plus sur le point de départ et le chemin jusqu’ici parcouru. Une véritable révolution…

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Grand format ALGÉRIE

SIDALI DJENIDI/REA

ENJEUX

À Alger, le 15 mars.


Les promesses du printemps Face à l’ampleur de la mobilisation populaire contre la pérennisation d’un système à bout de souffle, le pouvoir a rapidement lâché du lest. Et ouvert la voie à un vrai changement. L’alternance, le renouvellement des élites dirigeantes et l’instauration d’un mode de gouvernance plus démocratique ne sont désormais plus des vœux pieux. FARID ALILAT, envoyé spécial à Alger

H

uit ans après la Tunisie et l’Égypte, l’Algérie connaît elle aussi son printemps en ce début d’année 2019. Un printemps pacifique, festif et porteur des espoirs les plus fous. Beaucoup redoutaient que le changement intervienne dans le chaos et les violences qui ont déjà endeuillé le pays pendant la décennie noire. Mais les Algériens ont surpris tout le monde, à commencer peut-être par eux-mêmes, en donnant une véritable leçon de civisme, de patriotisme et d’engagement citoyen. « La candidature du président Bouteflika pour un cinquième mandat était un mal qui a fait un bien fou à ses compatriotes »,

ironise un ancien ministre. Et il y a du vrai derrière ce trait d’humour que les Algériens pratiquent dorénavant sans modération. En acceptant de tirer sa révérence après une conférence de consensus national, qui pourrait avoir lieu avant la fin de l’année si aucun événement ne venait perturber cet agenda, le chef de l’État, au pouvoir depuis 1999, reconnaît explicitement avoir échoué à transmettre le flambeau aux nouvelles générations. Un véritable gâchis pour l’Algérie et pour les Algériens, mais, surtout, beaucoup d’occasions manquées. Le pays aurait certainement pu gagner du temps, faire des économies et avancer davantage vers le progrès et le développement si les promesses maintes

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Grand format ALGÉRIE ENJEUX

EN DÉBAT

En finir avec l’État providence FARID ALILAT

É

tat trop dépensier, population très assistée… L’une des réformes les plus emblématiques à laquelle doivent s’atteler au plus vite les autorités algériennes n’est autre que celle du système des subventions directes et indirectes en vigueur depuis l’époque de l’Algérie socialiste. En constante hausse depuis dix ans, ces s u bve n t i o n s, q u i touchent les produits de première nécessité et couvrent les secteurs névralgiques de la santé, du logement et de l’éducation, s’élèvent aujourd’hui à 13 milliards d’euros. Cette réforme est d’autant plus urgente et nécessaire que ces dépenses étatiques ne cessent de croître au rythme de

96

l’augmentation de la population algérienne, estimée chaque année à 1 million de personnes supplémentaires. Il fut un temps où, l’argent du pétrole coulant à flots, le pouvoir dépensait des milliards de dollars dans ce système pour garantir la paix sociale et s’éviter une contestation populaire à l’image de celle qui a balayé les régimes en Tunisie ou en Égypte. La dégringolade des revenus en devises – assurés à 95 % par l’exportation des hydrocarbures –, conjuguée à l ’a s s è c h e m e n t total des réserves de change dans les cinq prochaines années, remet en question ce modèle et place le gouvernement devant un dilemme. Faut-il

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maintenir un système dispendieux qu’il sera difficile de financer dans un avenir proche ou tailler dans le vif au risque de provoquer un mécontentement populaire ? « Il y a un manque de courage politique », juge l’économiste Ferhat Aït Ali pour expliquer le peu d’empressement du pouvoir à trouver un autre modèle de protection sociale. « Ce système, qui absorbe près de 50 % des dépenses de fonctionnement, est intenable, dit l’économiste Alexandre Kateb. Il faut passer aujourd’hui à un système de subvention ciblée. » Même constat chez les experts du FMI et de la Banque mondiale, qui recommandent la suppression graduelle de ces subventions et leur remplacement par des programmes de transferts monétaires et de compensations en faveur des couches les plus défavorisées. Un fichier national est en cours d’élaboration par le gouvernement, avec le concours de divers organismes sociaux, afin de recenser les catégories nécessiteuses, tandis qu’une cartographie des ménages, en fonction de leurs revenus et des régions, est en préparation. Rien que la mise en place de ce fichier, prérequis pourtant indispensable à toute réforme, risque de prendre des années.

fois formulées avaient été tenues. Il est heureux de constater que, dans cette ambiance d’enivrement collectif, les Algériens n’ont ni la tête ni le cœur aux règlements de comptes et aux chasses aux sorcières. L’heure des bilans et des procès viendra certainement un jour, mais il est encore trop tôt. « Nous laverons notre linge sale en famille », entend-on le plus souvent lors des manifestations à Alger et dans le reste du pays.

Place aux jeunes

Cette mobilisation populaire impressionnante qui réclame la fin d’un système décrié pour n’avoir pas su changer démontre à quel point les Algériens attendaient et souhaitaient une alternance du pouvoir, un renouvellement des élites dirigeantes à tous les niveaux et le passage d’un mode de gouvernance dirigiste vers une gouvernance plus équilibrée, plus transparente, en un mot plus démocratique. C’est d’autant plus vrai que ce mouvement citoyen est essentiellement porté par des garçons et des filles qui n’ont connu que le président Bouteflika. Dans un pays où 45 % de la population a moins de 25 ans, il est grand temps que la génération de l’indépendance cède la place aux jeunes. Voilà le premier des grands défis qui attendent les Algériens dans les prochains mois : réussir une alternance ordonnée, apaisée et consensuelle, susceptible de fonder les bases de cette « nouvelle république » appelée de ses vœux par tout un pays. Mais le succès d’une telle transition politique

PREMIER DÉFI: RÉUSSIR UNE ALTERNANCE ORDONNÉE ET APAISÉE SUSCEPTIBLE DE JETER LES BASES D’UNE « NOUVELLE RÉPUBLIQUE ».


n’est possible que si les dirigeants élus ou désignés demain pour prendre les commandes se refusent à tergiverser et ne renvoient pas une nouvelle fois aux calendes grecques les profondes réformes économiques qui auraient dû être menées il y a vingt ans. Bien sûr, le rejet actuel de Bouteflika s’explique en grande partie par son obsession à rester au pouvoir au-delà du raisonnable. À l’heure où il met enfin un pied en dehors du palais présidentiel, il laisse un pays confronté à une crise économique et financière sérieuse, malgré les 1000 milliards de dollars engrangés par le pays au cours des vingt dernières années grâce à ses hydrocarbures. Et aujourd’hui encore, l’Algérie dépend toujours autant de son gaz et de son pétrole. En 1999, ils assuraient ensemble 95 % des recettes en devises du pays. Deux décennies plus tard, cette proportion n’a pas

L’EUPHORIE AMBIANTE NE DOIT PAS FAIRE OUBLIER QUE LES RÉSERVES DE CHANGE POURRAIENT RAPIDEMENT S’ÉPUISER. varié d’un iota. Ce printemps algérien ne doit pas non plus leur faire oublier que les réserves de change pourraient s’épuiser avant même la fin du mandat du futur successeur d’Abdelaziz Bouteflika. L’autre grand défi qui attend celles et ceux qui prendront les rênes du pays concerne la nécessaire réforme de l’administration, beaucoup trop bureaucratique. Il faudra aussi assouplir

les cadres qui régissent l’investissement, diversifier l’économie, ouvrir les vannes au secteur privé pour lui permettre de créer les emplois qui manquent tant au pays. Il n’y a aucune raison pour que les recettes qui ont marché ailleurs ne réussissent pas en Algérie. « De mauvais résultats économiques peuvent provoquer la chute des régimes autoritaires et ouvrir la voie à la démocratie, comme ce fut le cas au Brésil ou dans les pays de l’Est, explique l’ancien ministre Abdelaziz Rahabi. De bons résultats économiques peuvent créer une dynamique vers la démocratie, comme ce fut le cas en Corée du Sud. » L’Algérie, futur dragon de l’Afrique ? En défilant par millions dans les rues chaque vendredi, sans haine et sans violences, les Algériens ont démontré une nouvelle fois qu’ils étaient décidément capables de tout.

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Grand format ALGÉRIE

ÉCONOMIE

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Un modèle à

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Malgré sa résilience, le système économique a urgemment besoin d’être réformé pour sortir de la dépendance aux hydrocarbures, libérer les énergies et offrir des débouchés à une population majoritairement jeune.

réinventer

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FRÉDÉRIC REGLAIN

Le tramway d’Alger, inauguré en 2011.

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Grand format ALGÉRIE ÉCONOMIE

ALAIN FAUJAS

D

epuis 2014, le prix de l’or noir a été divisé par quatre, et l’économie algérienne, droguée aux hydrocarbures (95 % de ses exportations et 40 % de ses recettes budgétaires), s’en est trouvée paralysée. Pour tenter de maintenir un niveau de vie satisfaisant pour une population qui compte seulement 1,5 % de personnes vivant dans l’extrême pauvreté (1,25 dollar par jour) et éviter de possibles émeutes, le pouvoir a puisé dans ses fonds dans l’attente d’une reprise des cours pétroliers qui ne s’est jamais concrétisée. Les 32 milliards de dollars du Fonds de régulation des recettes réunis en 2015 ont fondu comme neige au soleil. Les réserves en devises sont tombées à 86 milliards de dollars. Quoique douloureux, l’état du patient algérien n’est pas dramatique. Son économie montre une résilience certaine, avec un taux de croissance de + 3,4 % en 2018 et une prévision à la baisse avec + 2,9 % en 2019, selon le FMI. Les cours du pétrole ont rebondi, ce qui a permis de compenser le recul de la production ainsi que la hausse de la consommation domestique de carburants dans le pays. Le déficit budgétaire a été contenu. La dette extérieure est quasi inexistante. L’Algérie ne subit aucun embargo, au contraire du Venezuela ou de l’Iran.

Coûteuses perfusions

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Le spectre du Venezuela

Car le pouvoir algérien n’aime pas le privé, pourtant seul capable de créer des emplois. Contrairement à ce qu’il prétend, il n’arrive pas à limiter aux secteurs stratégiques la règle du 51/49, qui contraint l’investisseur étranger à demeurer minoritaire dans sa filiale algérienne et qui paralyse bien des projets. Il aimerait que les entreprises algériennes explorent les marchés d’Afrique subsaharienne, à l’instar des marocaines, mais il leur interdit de sortir les capitaux nécessaires à cette conquête. À la fois puissante et impotente, car bâtie sur un modèle de type Europe de l’Est des années 1980, l’économie algérienne n’offre aucune perspective aux 45 % d’Algériens âgés de moins de 25 ans. Certains prédisent au pays le même sort que celui du Venezuela, autre grand « intoxiqué » au pétrole. « L’Algérie n’en est pas là, juge Thierry Apoteker, président du cabinet d’analyse TAC Economics. Son économie continue à croître, même médiocrement, alors que le Venezuela est en récession depuis trois ans. Elle dispose d’importantes réserves de dollars. La remontée du baril soulage également ses comptes. Mais si le pays ne se réforme pas, s’il ne crée pas un secteur formel non étatique, s’il ne pratique pas un taux de change réaliste, s’il continue de connaître le même niveau de corruption et la même gouvernance d’une économie de rente au profit d’une caste, il risque de se retrouver dans cinq ou dix ans dans un état insurrectionnel comme celui que connaît le Venezuela. » L’exploitation possible du pétrole et du gaz de schiste peut bien retarder l’échéance, mais pas l’issue finale.

D’UN CÔTÉ, ON CHANTE LES LOUANGES DE L’INITIATIVE PRIVÉE, DE L’AUTRE, ON MAINTIENT LES LOURDEURS ET TRACASSERIES ADMINISTRATIVES QUI LA PARALYSENT.

Le problème réside dans le fait que les « médecins » de l’économie algérienne ne savent pratiquer que des perfusions. La première s’appelle la planche à billets. Refusant de recourir à l’emprunt international, le pouvoir a demandé à la Banque centrale de boucher les trous budgétaires, obligeant celle-ci à débloquer, entre fin 2017 et janvier 2019, 55,2 milliards de dollars. Si elle était poursuivie, une telle thérapeutique déclencherait une forte inflation et une nouvelle dégringolade de la monnaie nationale. Autre perfusion aussi douteuse que coûteuse : le maintien des 11 milliards de dollars de subventions aux produits de première nécessité et l’adoption d’un budget 2019 – à visée électorale – prévoyant notamment la reprise du recrutement dans une fonction publique déjà pléthorique, la construction de 180 000 logements et l’amnistie des jeunes qui ne remboursent pas leurs prêts. Ces « médecins » semblent atteints de schizophrénie. Ils alternent entre ouverture et fermeture, dépenses et économies, générosité et austérité. Leurs mesures de relance stimulent une consommation qui ne peut être satisfaite par un secteur privé local anémique et qui se tourne donc vers les importations, aggravant le déficit chronique de la balance commerciale. Ils s’en

100

effraient et interdisent l’importation d’un millier de produits. Face au concert de protestations – notamment de la nomenklatura – et à la montée de la fraude, ils annulent leurs interdictions mais surtaxent ces importations de 30 % à 200 %. Particuliers et entreprises ne savent à quel saint se vouer. Ces mêmes « médecins » chantent les louanges de l’entreprise privée, et Ali Haddad, le président du Forum des chefs d’entreprise (FCE), ne cesse d’exprimer sa gratitude pour ce que le gouvernement fait pour ses mandants. La réalité est tout autre : les banques ne prêtent pas aux entreprises ; les administrations bloquent leurs projets – notamment ceux d’Issad Rebrab, le patron de Cevital – sauf pour des proches du pouvoir ; les autorisations de construire ou d’importer sont délivrées au compte-gouttes et à la tête du client.


COMMUNIQUÉ

AVIS D’EXPERT

REPÈRES

Un net ralentissement de la croissance 2016 PIB réel, à prix constants PIB hors hydrocarbures Inflation moyenne annuelle

2017

Projections

2018

2019

(variation annuelle en %)

3,3

1,6

3,0

2,7

2,3

2,6

3,4

2,9

6,4

5,6

7,4

7,6

(en % du PIB)

Solde budgétaire global Total des recettes Dont hydrocarbures Total des dépenses

– 13,5 28,8 9,7 42,3

– 8,8 32,7 12,5 41,5

– 9,0 30,6 12,4 39,5

– 4,8 28,2 11,2 33,0

Solde extérieur courant

– 16,6

– 12,9

– 9,7

– 10,1

IDE Dette publique brute Dette extérieure

1,0

0,7

0,8

0,8

20,6

27,0

34,8

39,9

2,4

2,4

2,1

1,9

Un développement humain élevé

Des IDE timorés... (Flux entrants, en millions de dollars)

2011

Pour l’année 2017

2 580

2013

1 684

Population ayant accès à l’électricité

2016

2014

1 635

1 507

99 %

2012

1 499

2017

1 203

Population ayant accès à des sources d’eau potable améliorées

93,5 %

... surtout par rapport à ceux des voisins

2015

Population vivant au-dessous du seuil de pauvreté (1,90 $/jour)

– 584

30,1 %

SOURCES : AUTORITÉS NATIONALES, FMI, CNUCED, PNUDGLAIN

En 2017

7 392 Espérance de vie

76,3 ans

2 651 1 203

Égypte

Maroc

Algérie

880

Tunisie

Cyril CRICHTON Directeur Général, Kepler Technologies

Indice de développement humain (IDH) : 0,754, soit le 83e rang sur 189 pays classés au niveau mondial, loin devant la Tunisie (95e), la Libye (108e), l’Égypte (115e) et le Maroc (123e)

FinTech, un enjeu majeur pour l’Afrique Algérie, un nouvel eldorado pour les services Avec l’un des taux d’alphabétisation les plus élevé d’Afrique et 1,7 million de jeunes algériens dans l’enseignement supérieur, le niveau d’éducation en Algérie est massif et élevé. De plus, les algériens sont francophones, et un vivier important de jeunes diplômés est en quête de travail avec une forte appétence pour les projets internationaux. De par sa localisation entre la France et l’Afrique subsaharienne, avec une infrastructure aéroportuaire et de télécommunication L’Algérie a bien développée, de grands groupes des atouts (banque, audit) ont majeurs pour déjà choisi Alger accompagner pour implémenter les institutions leurs centres de financières services régionaux. africaines dans Enfin, les services « made in Algeria » la digitalisation sont très compétitifs de leurs sur le marché interprocessus. national. Le Digital, un enjeu majeur pour les institutions financières africaines La FinTech Kepler Technologies, installée en Algérie en 2009, a tissé des partenariats avec les écoles d’ingénieurs du pays ; et comptes parmi ses clients la quasi-totalité des institutions financières de la place. Kepler Technologies s’est spécialisée dans la digitalisation des processus pour les banques et assurances, et exporte son savoir-faire depuis 2013. Ces dix années écoulées nous confortent dans le choix de l’Algérie comme hub technologique d’exception au service de l’Afrique, pour l’accompagner dans son développement avec des technologies robustes et abordables.

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Grand format ALGÉRIE ÉCONOMIE

Biskra, le potager de l’Algérie Quand Mohamed Tahraoui palpe les grappes de tomates cerises qu’il cultive sous serre, il en parle comme le ferait un chef étoilé de ses plats, avec une certaine emphase et beaucoup de poésie. Pas besoin de forcer le trait pourtant, les tomates de Mohamed Tahraoui peuvent largement figurer en bonne place aux menus des meilleures tables. Biskra, 400 km au sud-est d’Alger, presque aux portes du désert. À l’époque romaine, cette ville appelée Vescera était surtout réputée pour ses thermes. À l’époque coloniale, la bonne société

venait y prendre le soleil et profiter de cette lumière exceptionnelle qui a captivé tant de grands noms, d’Henri Matisse à Eugène Fromentin, en passant par André Gide. Aujourd’hui, Biskra s’est inventé une nouvelle vie, en devenant le potager de l’Algérie. À 56 ans, l’entrepreneur ne se prédestinait pas à cultiver des tomates, des poivrons ou des aubergines. Architecte de formation, cet homme aussi

sec qu’un roseau s’est pris de passion pour l’agriculture. Il en a fait une activité supplémentaire de l’entreprise qu’il a fondée il y a plus de trente ans et qui est présente sur des secteurs aussi divers que les matériaux de construction, la chirurgie de pointe ou plus récemment l’eau embouteillée. Le groupe Tahraoui gère également une exploitation agricole de 70 hectares. « La plus grande en Algérie »,

IL EXPORTE SES FÈVES AU CANADA, SES TOMATES ET MELONS EN FRANCE ET EN ESPAGNE, SES POIVRONS À DUBAÏ.

AVIS D’EXPERT

Karim AREZKI Directeur Général GEFCO Algérie

Les défis logistiques de la diversification industrielle algérienne Depuis plusieurs années, l’Algérie a fait du développement de la production industrielle une priorité pour diversifier une économie jugée trop dépendante aux hydrocarbures. L’automobile est le premier bénéficiaire de cette transformation économique depuis l’instauration de quotas stricts à l’importation qui ont conduit de nombreux constructeurs à s’implanter directement dans le pays. Ils comptent alors sur l’expertise de la supply chain pour accompagner leurs projets de développement, à l’image du soutien apporté par GEFCO à PSA en vue de l’implantation d’une nouvelle usine dans la région d’Oran.

Le secteur pharmaceutique est l’autre grand gagnant de cette politique volontariste. Doté d’une situation géographique qui en fait un marchepied vers tout le continent, l’Algérie dispose d’un potentiel unique. Sanofi ne s’y est d’ailleurs pas trompé en annonçant l’ouverture du plus grand complexe phar-

Les compétences opérationnelles des experts de la supply chain et leurs capacités d’innovation permet aux industriels de se concentrer sur leur cœur de métier.

précise son propriétaire. Des serres de son vaste domaine sortent, hiver comme été, des norias de camions chargés de produits agricoles destinés à garnir les assiettes de ses compatriotes, et ce aux quatre coins du pays. Mais pas seulement. Ses fèves s’exportent au Canada, ses tomates et melons en France et en Espagne, ses poivrons à Dubaï. Mohamed Tahraoui espère maintenant conquérir des marchés aussi différents que ceux de l’Ukraine et de la Russie, de la Chine ou de la Côte d’Ivoire. « Nous ne nous contentons pas de satisfaire la demande

maceutique d’Afrique à Sidi Abdallah et les projets se multiplient. Pour les déployer, les laboratoires ont besoin de s’appuyer sur des experts en logistique ayant une connaissance précise des spécificités de ce marché (sécurité des médicaments, température dirigée, etc.) ainsi que les capacités de les soutenir en temps de crise via des solutions door-to-door (freight forwarding, entreposage, route et rail) dédiées. Une double expertise qui a justement su convaincre un leader mondial du secteur pharmaceutique de confier à GEFCO la gestion de ses stocks en Algérie.

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De plus en plus de petites fermes se lancent dans la culture sous serre. Ici à El Oued, dans le nord-est du Sahara algérien.

locale, nous cherchons surtout à nous faire une place sur le marché international », insiste l’homme d’affaires. Les fermes sont nombreuses dans les environs de Biskra, mais celle de la famille Tahraoui se distingue par ses équipements ultramodernes. Comme ces serres, qui, sur des dizaines d’ha, forment une véritable mer de plastique qui rappelle la région d’Almería, dans le sud de l’Espagne, où chaque année sont produites plus de 3 millions de tonnes de fruits et légumes destinés au marché européen. Depuis une dizaine d’années, Biskra et sa région fournissent 40 % de la production agricole nationale, pour un chiffre d’affaires de quelque 3 milliards d’euros. Dans cette

Algérie où les revenus en devises sont assurés à 98 % par le pétrole et le gaz et où la facture des importations alimentaires frôle chaque année la barre des 8 milliards d’euros, la wilaya ressemble à un exemple à suivre pour tous ceux qui rêvent de voir le pays sortir enfin de sa dépendance aux hydrocarbures. « Le pétrole n’est pas éternel, rappelle Mohamed Tahraoui. La terre si. »

Terre fertile

Des montagnes de Kabylie, d’où sa famille est partie au début des années 1990 aux vastes étendues semidésertiques de Biskra, le parcours de Samir Saadoudi relève presque d’un chemin de croix. Dans sa ferme de 55 ha, Samir cultive un vignoble

dont les raisins couleur grenat commencent à susciter l’intérêt de certains importateurs français. « Climat, eau, terre fertile, ici il y a tout pour réussir, dit le jeune homme. Même quand tu plantes un caillou, il pousse. » Reste à équiper

LA RÉGION FOURNIT 40 % DE LA PRODUCTION AGRICOLE NATIONALE POUR UN CHIFFRE D’AFFAIRES DE QUELQUE 3 MILLIARDS D’EUROS.

ce jardin extraordinaire en infrastructures nécessaires pour doper l’impact économique de la filière. C’est justement pour combler ce manque qu’Ali Serraoui, patron du groupe du même nom, a décidé d’implanter, pour 50 millions d’euros, un complexe agro-industriel dimensionné pour transformer, conserver et conditionner les productions alimentaires de la région. Il rêve également de mettre en place une centrale d’exportation. « Nous pouvons faire de Biskra le fleuron d’une industrie capable d’injecter 4 milliards d’euros par an dans l’économie du pays », s’enthousiasme Ali Serraoui, pour qui faire fleurir le désert n’est pas une vue de l’esprit. FARID ALILAT

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Grand format ALGÉRIE ÉCONOMIE

TOURISME

Arrivés à bon aéroport

Présentée comme la deuxième du continent, la nouvelle aérogare de la capitale pourra accueillir 16 millions de voyageurs par an. De quoi attirer davantage de visiteurs. DJAMILA OULD KHETTAB, à Alger

es courbes modernes et sa façade vitrée attirent déjà tous les regards. Mais il faudra s’armer de patience pour découvrir l’intérieur de la nouvelle aérogare d’Alger, qui s’étend sur plus de 20 hectares, dans le prolongement de l’aéroport international Houari-Boumédiène. Prévue initialement fin février, la cérémonie d’inauguration a été reportée sine die, d’après la Société de gestion des services et infrastructures aéroportuaires d’Alger (SGCIA). La crise politique qui secoue le pays et a causé l’annulation de l’élection présidentielle y est certainement pour quelque chose.

S

D’une capacité de 16 millions de voyageurs par an – contre 6 millions pour le site actuel –, le nouvel aéroport international d’Alger est présenté comme le deuxième plus grand du continent, selon le ministère des Travaux publics et des Transports. Il sera desservi par une nouvelle gare ferroviaire, dont les travaux ont été achevés, et par une station de métro, toujours en cours de construction. Cette dernière, confiée à l’entreprise publique Cosider, doit être livrée dans le courant de l’année, selon la même source.

Activités de transit

ANIS BELGHOUL/AP/SIPA

Des passagers du bateau de croisière Viking Sea, en provenance des États-Unis, faisant escale à Alger.

Ce mégaprojet, qui s’élève à plus de 80 milliards de dinars (588 millions d’euros), se fixe pour objectif « d’accéder aux activités de transit qui constituent actuellement un marché important en matière de transport aérien », indique toujours le ministère. Il pourrait également dynamiser une

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COMMUNIQUÉ

1 - Philippe COUDERC

AVIS D’EXPERTS

Managing Partner PwC Algérie

2 - Gael DUYCK

Directeur Consulting PwC Algérie

3 - Olivier CHEVIYER

Directeur Secteur Public PwC France & Afrique Francophone 1

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Les entreprises publiques : un levier de transformation pour l’économie algérienne Pour celui qui prend le temps de comprendre ses codes et ses fondamentaux, l’Algérie est une économie prometteuse malgré les incertitudes et les difficultés liées à l’environnement des affaires. Il suffit de regarder les entreprises publiques algériennes et certains groupes privés pour mesurer les efforts de transformation d’ores et déjà en cours. De nouvelles orientations sont à l’agenda des dirigeants telles que la diversification des activités, l’optimisation des outils productifs ou encore l’expansion des activités sur les marchés africains. Pour rattraper leur retard, les entreprises font aujourd’hui simultanément face à des enjeux d’informatisation des métiers (ERP, digitalisation, cyber sécurité) et de changements d’orgaAccompagner nisation dont l’imporses clients tance de la dimension et contribuer h u m a i n e reste t ro p à la dynamique souvent sous-estimée.

des économies, c'est l'engagement de PwC, leader mondial en conseil, audit et expertise comptable.

Chez PwC, nous sommes convaincus que l’humain doit être au cœur des actions de transformation afin d’éviter les écueils habituels des projets réalisés à marche forcée, sans concertation et surtout sans transmission de compétences. Nous pensons qu’il est important que les entreprises publiques puissent s’atteler à plusieurs chantiers prioritaires pour pérenniser les effets positifs du changement. Tout d’abord, il existe un besoin fort de formalisation d’une vision stratégique clairement explicitée. Ensuite, il est essentiel d’embarquer les salariés dans les projets de transformation afin qu’ils se sentent engagés. Penser pour l’avenir, bâtir des plans de succession

réalistes, préparer les futurs talents sont des actions prioritaires. Les ressources existent avec des écoles algériennes regorgeant de talents mais qui doivent être révélés par un accompagnement structuré au sein des entreprises. Enfin, les entreprises pules entreprises bliques doivent investir publiques doivent dans le numérique et le expliciter leur vision digital, domaines dans stratégique. lesquels elles accusent un certain retard. Mais elles peuvent transformer cette situation à leur avantage en ne reproduisant pas les recettes du passé mais en se tournant vers des solutions nouvelles, agiles, disruptives et moins coûteuses. A chaque acteur de l’économie algérienne de participer à la définition et à la réalisation d’une feuille de route ambitieuse qui placera l’humain au cœur de tout projet pour se lancer dans cette transformation prometteuse. Compte-tenu de l’importance des entreprises publiques dans l’économie algérienne, elles peuvent y jouer un rôle moteur.

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activité touristique, encore timide. « Toute nouvelle infrastructure est un vecteur essentiel pour le développement du tourisme », estime Karim Cherif, PDG du groupe Eden, l’une des principales sociétés privées d’hôtellerie en Algérie. Meriem Bisker, gérante du M Suite Hotel, un établissement indépendant qui a ouvert ses portes en octobre 2018 dans le quartier de Dar el-Beida, à proximité de l’aéroport international, est tout aussi confiante. « On s’attend à une augmentation du flux des voyageurs étrangers », espère la directrice de cet hôtel qui cible en priorité les professionnels, algériens et étrangers, en déplacement dans la capitale. « Le tourisme d’affaires peut ouvrir la voie à un tourisme de loisirs. Nous n’avons eu que des retours positifs de nos clients sur leur découverte de l’Algérie. Et lorsqu’un homme d’affaires étranger rentre de son voyage, il parle de l’Algérie à son entourage », assure-t-elle. En comparaison avec ses voisins maghrébins, la Tunisie et le Maroc, qui reçoivent respectivement 8 millions et

LE TOURISME D’AFFAIRES PEUT OUVRIR LA VOIE À UN TOURISME DE LOISIRS. NOUS N’AVONS EU QUE DES RETOURS POSITIFS. MERIEM BISKER, gérante du M Suite Hotel

10 millions de touristes étrangers par an, l’Algérie, avec ses 10000 voyageurs étrangers en 2017, selon le ministère, reste un « nain touristique », estime Rachid Gorri, consultant en marketing et en développement du tourisme. Les chiffres le prouvent: en Algérie, le secteur du tourisme a contribué pour moins de 2 % au PIB en 2017, alors qu’au Maroc et en Tunisie il comptait, la même année, pour plus de 10 % de leurs PIB respectifs, selon un rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced).

Priorité à la demande interne

Pour Rachid Gorri, la priorité doit être donnée au développement du tourisme national. « Des investissements importants ont été opérés, comme le réseau autoroutier et ce nouvel aéroport international. C’est une bonne chose. Mais il faut désormais stimuler le tourisme domestique en proposant des produits compatibles avec le pouvoir d’achat des Algériens. Sans demande interne, le tourisme de loisirs ne pourra pas décoller en Algérie », conclut-il.


COMMUNIQUÉ

AVIS D’EXPERT

Stéphane DIEUDE

CEO & CFO chez Fertial SPA

La fertilisation raisonnée au service de l’agriculture Algérienne La fertilisation raisonnée constitue un des moyens les plus efficaces qui permet aux agriculteurs d’optimiser leur exploitation et d’obtenir de ce fait une meilleure rentabilité de leur culture. Le succès en fertilisation ne dépend pas de quelque action d’envergure, mais de petits gestes associés les uns aux autres. C’est une vérité tout à fait simple en soi mais on en oublie parfois l’importance. La fertilité d’un sol évolue dans le temps, elle dépend de la nature, de l’eau et de sa composition mais surtout de l’action de l’homme qui constitue l’un des éléments fondamentaux pour une production optimum. Chaque geste compte. Nous avons remarqué, malheureusement que les agriculteurs adoptent une fertilisation aléatoire et endommagent de la sorte leurs récoltes. Soucieuse de la qualité de la production agricole, Fertial a sensibilisé les fellahs sur la nécessité d’une fertilisation raisonnée et réfléchie. La quantité d’engrais à appliquer n’est pas seulement un calcul mathématique, elle demande une réflexion. Le résultat dépend des pratiques culturales comme le mode d’épandage, la présence de mauvaises Pour réussir herbes, les apports sa fertilisation, de fumier. Pour réussir l’agriculteur doit sa fertilisation, l’agrid’abord calculer culteur doit d’abord et analyser le sol. calculer et analyser le sol afin d’apporter les compléments d’éléments nutritifs adaptés aux besoins de la terre sans excès. Cette démarche permettra à l’agriculteur d’augmenter le rendement et la qualité de ses cultures. Heureusement, il est désormais de plus en plus facile de déterminer la quantité des éléments disponibles dans un sol grâce notamment à l’analyse du sol. Afin de contribuer au développement de l’agriculture algérienne, Fertial a mobilisé d’importants moyens techniques et humains en collaboration avec des

professionnels du secteur agricole. De plus, Fertial dispose de deux laboratoires agronomiques mis à la disposition des agriculteurs Algériens. Pour une meilleure compréhension de la fertilisation Nos conseillers raisonnée, une équipe agronomiques de 18 conseillers agrosillonnent le pays nomiques a été mise en place pour sillonner le afin de sensibiliser pays afin de prodiguer les fellahs aux des conseils, de réaliser méthodes adéquates des démonstrations et de fertilisation. sensibiliser les fellahs sur des méthodes de fertilisation adéquates et adaptées aux besoins du sol. Sans oublier, la confection d’un manuel d’utilisation des engrais et un guide pratique de prélèvement des échantillons de terre, édités et distribués par les soins de Fertial au niveau national aux profits des exploitants et des distributeurs d’engrais. Toute fertilisation raisonnée doit se faire en symbiose avec son conseiller agronomique qui est en mesure de par son expérience à apporter un conseil avisé.

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ENTREPRENEURIAT

Ils l’ont fait

Laïd BENAMOR Le pionnier de l’agro 2.0

I

VINCENT FOURNIER/JA

Est-il possible de désintoxiquer l’Algérie de la rente pétrolière ? Oui, répond une nouvelle génération de patrons qui s’attache à revivifier le tissu productif. Si tous ont hérité d’une industrie familiale, chacun s’est fixé comme objectif d’exceller dans son secteur, et de briller bien au-delà du marché domestique. Portraits.

l faut visiter le site industriel du groupe Amor Benamor à Guelma, dans l’Est, pour saisir à quel point l’agroalimentaire est devenu une science pour Laïd Benamor. Dès 1986, le PDG éponyme du groupe leader dans la conserverie de tomates y impose les premiers ordinateurs. Et aujourd’hui encore, à 52 ans, l’héritier de la société suit les cours internationaux des produits agricoles sur son smartphone. Quand il en reprend les rênes en 2003, sa première préoccupation est d’aller voir ailleurs ce qui se fait de mieux pour l’appliquer ensuite dans le groupe. Celui-ci augmente les rendements de ses fournisseurs en créant une pépinière qui leur procure des plants plus résistants. Il les pourvoit également en pesticides et en machines diverses pour mécaniser petit à petit la filière. Les volumes de production quadruplent en dix ans. Entre-temps, Laïd Benamor a diversifié les activités de la société: à la conserverie d’origine s’ajoutent la production de pâtes, de couscous, mais aussi les épices, la harissa et la confiture. Et dans la foulée d’Amor Benamor, c’est toute l’agriculture de la région qui est passée à l’heure de l’agro 2.0. NEÏLA LATROUS

T

out le monde à Alger connaît le jeune patron de la Compagnie internationale d’assurance et de réassurance (Ciar). À 42 ans, Hakim Soufi entretient sur les réseaux sociaux l’image d’un chef d’entreprise accessible et ouvert, dont le mantra est très bien résumé par son hashtag #MovingForward (« aller de l’avant »). C’est que cet énarque, également passé par les couloirs de la technostructure algérienne, n’hésite pas à bousculer les traditions. Lorsque son père – « Monsieur Soufi », comme

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il l’appelle lui-même – crée la Ciar, il demande à travailler à ses côtés. Il démarre au service livraison, puis reprend la société en 2018. Il n’a depuis qu’une obsession: négocier au mieux le virage technologique. Fidèle à lui-même, il s’agace devant la lenteur du gouvernement à prendre des décisions sur ce dossier et n’a pas hésité à interpeller dernièrement le Premier ministre pour hâter la mise en œuvre du paiement électronique dans le pays. Il se voit comme un facilitateur d’échanges, un accélérateur d’énergie, un doux

DR

Hakim SOUFI Accélérateur de changement

rêveur réaliste qui voit dans l’Algérie « le futur Dubaï de l’Afrique ». N.L.


COMMUNIQUÉ

AVIS D’EXPERT

Frantz YVELIN

Président d’Aigle Azur

La diversification permet d’offrir une meilleure connectivité internationale à la clientèle des pays d’Afrique Quelle a été l’évolution récente de la compagnie ?

Qu’en est-il de la diversification ?

Lorsque je suis arrivé à la présidence d’Aigle Azur, en août 2017, la compagnie était clairement en perte de vitesse. Depuis cette date, un effort a été fait pour réinventer Aigle Azur.

L’année 2017 a marqué le début d’une expansion significative du réseau d’Aigle Azur avec le lancement des dessertes de Beyrouth, Berlin, Moscou, puis, Milan en 2018. En 2018, le réseau sur le long-courrier a été développé avec deux destinations : Pékin (3 vols/semaine) et São Paulo (5 vols/semaine).

D’abord en matière de ponctualité, grâce à une révision complète de notre dispositif et une mobilisation exceptionnelle des pilotes et des équipes au sol. Nous avons atteint 80 % de ponctualité avec un écart de 15 minutes, ce qui fait d’Aigle Azur la 2e compagnie la plus ponctuelle à l’aéroport d’Orly. Par ailleurs, Aigle Azur a renforcé ses positions sur ses marchés historiques en Afrique. Pour ce qui est de l’Algérie, nous avons renforcé les liaisons Paris-Alger et Paris-Oran avec l’entrée en service, pour la première fois, à l’été 2018, d’appareils A330 et nous continuons à desservir quatre autres villes (Bejaïa, Constantine, Sétif et Tlemcen). L’Algérie demeure un marché stratégique pour la compagnie.

Aigle Azur a renforcé ses positions sur ses marchés historiques en Afrique.

Et en Afrique de l’Ouest ? La desserte du Mali a été nettement améliorée avec le renforcement du partenariat avec Corsair et la mise en place, à partir de l’été 2019, d’une liaison quotidienne directe Paris-Bamako en A330 (Aigle Azur : 4 vols/semaine ; et Corsair : 3 vols/semaine). Cette liaison propose un grand confort et un service de qualité avec, notamment, l’Internet à bord et des prestations gastronomiques de deux chefs doublement étoilés en classe business au départ de Paris : Bernard Bach (Aigle Azur) et Michel Rostang (Corsair). Enfin, Aigle Azur a maintenu sa présence au Sénégal avec une fréquence de trois vols Paris-Dakar par semaine en été, qui peut éventuellement être modulée en hiver.

Ces nouvelles liaisons ont été rendues possible grâce à la signature d’accords de partenariat stratégique avec des compagnies aériennes locales solidement implantées dans leurs pays respectifs : TAP (Portugal), Azul (Brésil), S7 Airlines (Russie), Hainan Arlines (Chine), Corsair et Air Caraïbes.

Quels sont les avantages de cette stratégie ? La diversification offre une meilleure connectivité internationale à nos clients d’Afrique. Ils peuvent ainsi se rendre dans plusieurs pays d’Europe mais aussi au Brésil, en Chine, au Liban et en Russie via l’aéroport d’Orly qui est devenu notre hub international. Par ailleurs, dans la mesure où nos partenaires locaux disposent de dessertes locales très développées, notamment au Brésil et en Russie, Aigle Azur est en mesure de proposer une solution « porte à porte », qui intéresse particulièrement notre clientèle affaires.

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Grand format ALGÉRIE ÉCONOMIE

Amor HABES C’est la ouate qu’il préfère

est l’une des plus belles réussites industrielles du pays. Trente ans après sa création, Faderco – pour Fabrication de dérivés de coton – est le leader incontesté dans l’industrie algérienne des produits d’hygiène. Et l’une des rares entreprises qui brille également au-delà des frontières. En 2018, elle a exporté plus de 3000 tonnes de ouate, à 90 % destinées au marché européen, les 10 % restants trouvant preneur sur le continent, au Maroc et en Tunisie, en Mauritanie et en Guinée, sans oublier le Togo, le Mali ou encore le Sénégal. Autant de pays où Faderco peut s’appuyer sur des partenaires locaux. Ce succès est en grande partie dû à Amor Habes, 47 ans, directeur général du groupe depuis 2006. À peine rentré de France après des études d’architecture et d’urbanisme, il reprend en main l’entreprise familiale et y fait souffler un vent de modernité: transparence comptable, démocratisation

SNL

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de la gouvernance, utilisation de progiciels de gestion. La recette se révèle vite payante et renforce l’assise du groupe, qui compte aujourd’hui plus de 1800 collaborateurs travaillant au service de 11 marques, réparties dans

7 domaines d’activités stratégiques. Faberco s’apprête à inaugurer sa quatrième usine à Sétif, dans l’est du pays. « En pensant déjà à la cinquième », confie Amor Habes. N.L.

Kamel MOULA La renaissance de Venus

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TSA-ALGÉRIE

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amel Moula peut être fier de représenter une certaine exception algérienne… Alors que partout ailleurs les grandes multinationales dominent le marché de la cosmétique, en Algérie, les laboratoires Venus règnent en maître, avec un peu plus d’un tiers de part de marchés. L’entreprise, fondée par son père en 1981 à Blida, ne comptait que dix employés à l’époque, contre plus de 500 aujourd’hui.

Kamel, 42 ans, est là depuis le début de l’aventure. Un temps directeur commercial, il reprend

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la gestion de l’entreprise en 2006. Il en lance alors une extension et effectue une montée de gamme

en allant s’approvisionner chez les mêmes fournisseurs que les grandes marque s internatio nales. Il crée une filiale, Venus Unité Emballage, chargée de concevoir le packaging des produits. Son ambition ? Rayonner davantage sur les marchés africains. Les produits des Laboratoires Venus sont aujourd’hui présents en Tunisie et en Mauritanie, ainsi qu’en Côte d’Ivoire, au Sénégal et au Gabon. N.L.


AVIS D’EXPERT

Ali RAFRAFI

Secrétaire général BNP Paribas El Djazaïr

Transformation : l’engagement pour nos clients Devenir la Banque reconnue pour la qualité de services, la sécurité des opérations sans faille et l’environnement de travail aux meilleurs standards. C’est l’objectif principal du plan de transformation qui s’étend sur 3 ans. Avec une démarche d’amélioration continue et des capacités d’innovation et d’adaptation, BNPPARIBAS se transforme sur 4 aspects : l’expérience client, un espace de travail où il fait bon vivre pour ses collaborateurs, un modèle opérationnel amélioré et un système d’information adapté avec une Data maitrisée.

Une transformation digitale portée par les collaborateurs et la refonte du système d’information. Pour une expérience client privilégiée, une digitalisation de l’offre et des services bancaires est engagée, les process sont simplifiés (dans le respect des réglementations) et les formats des agences et équipements installés revus (automates avec services bancaires et accès direct aux télés guichetiers). Un changement des méthodes de travail et des canaux de communi-

cation supporte la démarche avec une gouvernance sur la Data et son utilisation. D’où une refonte totale du système d’information avec un global banking à composants natifs (digital, intelligence artificielle, tracking et visibilité sur les opérations) et totalement sécurisé. Le programme se base sur un changement de culture avec des espaces de travail innovants, des outils plus collaboratifs et plus ouverts et des challenges pour des prestations de qualité avec un objectif de zéro défaut.

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