ENVIRONNEMENT
L’AFRIQUE AU BANC D’ESSAI
BURKINA Pour qui votera la diaspora ?
12 PAGES
TUNISIE Béji Caïd Essebsi (1926-2019) Un destin tunisien
HEBDOMADAIRE INTERNATIONAL NO 3055 DU 28 JUILLET AU 3 AOÛT 2019
Pékin ouvre de nouvelles routes commerciales à travers la planète. Et notamment sur le continent. Son ambition : concilier ses propres intérêts et le développement de ses partenaires.
CHINE-AFRIQUE
Gagnant-gagnant ? Spécial 22 pages .
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France 3,80 € Algérie 290 DA Allemagne 4,80 € Autriche 4,80 € Belgique 3,80 € Canada 6,50 $ CAN Espagne 4,30 € Éthiopie 67 birrs Grèce 4,80 € Guadeloupe 4,60 € Guyane 5,80 € Italie 4,30 € Luxembourg 4,80 € Maroc 25 DH Martinique 4,60 € Mayotte 4,60 € Norvège 48 NK Pays-Bas 5 € Portugal cont. 4,30 € Réunion 4,60 € RD Congo 5 $ US Royaume-Uni 3,60 £ Suisse 7 FS Tunisie 4 DT USA 6,90 $ US Zone CFA 2 000 F CFA ISSN 1950-1285
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PORT DE DOUALA-BONABÉRI
DES PROJETS ET DES AMBITIONS
Le Port de Douala-Bonabéri est en chantier. Depuis l’année 2018, de nombreux projets arrivés à maturité sont en cours d’exécution. L’ambition, à terme, est de mettre à profit la position stratégique du port de Douala-Bonabéri, pour en faire un hub incontournable en Afrique Centrale. Monsieur le Directeur Général, qu’est-ce qui sous-tend la dynamique de transformation actuelle du Port de Douala-Bonabéri ?
La politique du Gouvernement dans le secteur maritime et portuaire est de faire du Cameroun un hub incontournable dans la sous-région Afrique centrale. C’est ce qui justifie la réforme portuaire de 1998 qui crée quatre ports autonomes. Le Port en eau profonde de Kribi étant déjà fonctionnel, le combinat portuaire de Douala-Bonabéri se devait non seulement de s’arrimer aux standards internationaux de l’industrie portuaire mais également de booster ses performances, son attractivité et sa compétitivité, de manière à attirer et fidéliser plus d’armateurs et de chargeurs. Et ceci passe par une transformation en profondeur de l’existant. Et c’est ce qui est en train d’être fait.
« Notre volonté est d’être la plateforme logistique incontournable du golfe de Guinée, le catalyseur du développement du Cameroun. » En quoi consiste cette transformation ?
Face aux limites naturelles du Port de Douala-Bonabéri et du niveau de dégradation de ses installations et infrastructures d’exploitation devenues par ailleurs, peu compétitives et hétérogènes, nous avons, avec l’appui du gouvernement, lancé un important processus de normalisation de toutes les activités sans exception, pour un retour à l’orthodoxie de la pratique des métiers portuaires. Celle-ci est accompagnée par un vaste programme d’investissements pour le renouvellement, le développement et la modernisation des infrastructures, superstructures et des équipements portuaires. C’est donc des projets structurants nombreux, sous-jacents et en cours de réalisation, qui vont transformer en profondeur le combinat portuaire de Douala-Bonabéri.
PO Box 4020 Douala Bonanjo - Centre des affaires maritimes Tél. : (+237) 33 42 01 33 - E Port Authority of Douala : @PADofficiel
Parlons du processus de normalisation. Concerne-t-il également la révision des concessions, comme celle du terminal à conteneurs du Port de Douala-Bonabéri, qui fait couler beaucoup d’encre et de salive, après l’éviction du groupement Bolloré-APMT. Où en est-on aujourd’hui ? Qu’attendez-vous du nouveau concessionnaire ?
Effectivement, le processus de normalisation des activités d’exploitation du Port de Douala-Bonabéri concerne les activités concédées mais également celles qui sont simplement autorisées. S’agissant de la concession du terminal à conteneurs, laissez-moi préciser de prime abord qu’il ne s’agit pas d’une éviction. Un appel public international à manifestation d’intérêt et/ou un avis de consultation internationale restreinte sont des compétitions qui mettent en lice plusieurs candidats. C’est d’ailleurs le dispositif que prévoit la Convention de concession n°389 du 28 juin 2004 du terminal à conteneurs (TAC) du Port de Douala-Bonabéri, en son article 25, relatif au renouvellement et à la révision de la concession. Le groupement que vous évoquez a donc pris part librement à la compétition et n’a tout simplement pas été admis parmi les cinq premiers, après examen et évaluation des candidats classés selon des critères rigoureux, par la Commission Interne ad hoc de passation de la concession du terminal à conteneurs du Port de Douala-Bonabéri, dans laquelle siègent plusieurs administrations. Donc, le processus, qui est dans sa seconde phase, se poursuit normalement, en toute transparence, dans le strict respect de l’éthique et de l’équité. Du nouvel opérateur, nous attendons tout simplement qu’il s’arrime à la dynamique de développement et de modernisation en cours d’implémentation au Port Autonome de Douala et contribue efficacement à la croissance économique du Cameroun.
www.pad.cm
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MESSAGE
ENTRETIEN AVEC MONSIEUR CYRUS NGO'O, DIRECTEUR GÉNÉRAL
Focus Ports
TANGERMED
Les deux terminaux de Tanger Med 2 doivent permettre de tripler les volumes traités.
TANGER MED TANGERMED
Rachid Houari
Directeur central du complexe portuaire
« Nous offrons la première capacité de Méditerranée pour les conteneurs » Après l’inauguration à la fin de juin de l’extension du port marocain, le royaume entend dépasser ses grands rivaux d’Europe du Sud. Propos recueillis par EL MEHDI BERRADA, envoyé spécial à Tanger
I
naugurée le 28 juin, Tanger Med 2 doit faire passer la capacité du port marocain de 3 à 9 millions de conteneurs EVP (équivalents vingt pieds). Avant même cette extension majeure, qui a nécessité 1,3 milliard d’euros d’investissements, le complexe portuaire, imaginé en 2002 et entré en exploitation en 2007, était déjà devenu le premier port africain pour le transport
de conteneurs, dépassant ceux de Port-Saïd, en Égypte et de Durban, en Afrique du Sud. L’année dernière, Tanger Med a traité 52 millions de tonnes de marchandises, dont 70 % en transbordement (conteneurs déchargés d’un navire puis rechargés à bord d’un autre) et le reste en import-export. Avec la nouvelle extension, dotée de deux nouveaux terminaux à conteneurs, l’ambition
est de figurer parmi les vingt premiers ports mondiaux. Pour compléter la panoplie et atteindre cet objectif, l’Agence spéciale de Tanger Med (TMSA) prévoit encore de consacrer 28 millions d’euros pour l’extension des terminaux passagers et rouliers. Rachid Houari, 41 ans, a rejoint l’Autorité portuaire de Tanger Med (TMPA), filiale de TMSA, dès le début
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Focus Ports TANGER MED
ASIE
de l’aventure en 2005. TANGER MED ALGÉRIE TUNISIE Originaire de la AMÉRIQUES ÉGYPTE région, ce diplômé en ingénierie porMAROC tuaire et maritime de la Solent University de MAURITANIE Southampton, complété d’un MBA de CAP VERT TOGO BÉNIN NIGERIA l’École des Ponts GAMBIE SÉNÉGAL Paris-Tech, a CAMEROUN GUINÉE-BISSAU GUINÉE d’abord piloté SIERRA le terminal des LEONE GUINÉE EQUA. LIBERIA hydrocarbures. Il a ensuite géré celui expéCONGO GABON diant les véhicules de l’usine Renault, puis a supervisé le terminal CÔTE D’IVOIRE réservé aux passagers et aux rouANGOLA UN HUB POUR liers, avant d’être nommé directeur LA CÔTE ATLANTIQUE central du complexe portuaire en Nombre de jours de novembre 2012. Il revient pour Jeune transit depuis/vers NAMIBIE le port marocain Afrique sur les ambitions de la plate>15 <5 5-10 10-15 forme Tanger Med face à ses concurrents du pourtour méditerranéen. Jeune Afrique: Pourquoi était-il stratégique de construire Tanger Med 2 ?
Rachid Houari : Il nous fallait saisir au plus vite les occasions de trafic, faute de quoi d’autres auraient pu se les approprier. L’activité conteneurs avait atteint son seuil de saturation, avec des volumes accueillis – 3,4 millions de conteneurs EVP en 2018 – dépassant de 15 % notre capacité. Grâce à Tanger Med 2, nous disposons de la première capacité du pourtour méditerranéen pour l’activité conteneurs, y compris de sa façade nord puisque nous passons devant
tous les ports espagnols, français, italiens ou encore grecs. Cette extension est-elle une simple augmentation de capacité ?
Non, c’est plus complexe que cela. Certes, Tanger Med 2 est, en superficie, deux fois plus grand que Tanger Med 1. Ce dernier dispose de 80 hectares consacrés à la zone de stockage de conteneurs, contre presque 200 ha pour la nouvelle extension. Mais ces nouvelles installations portuaires nous apportent aussi, et surtout, des changements technologiques. Depuis
VOIE CRUCIALE POUR LES HYDROCARBURES La seule raffinerie que comptait le Maroc, la Samir, implantée à Mohammédia (près de Casablanca), est à l’arrêt depuis août 2015. Le port de Tanger Med a pris son relais pour l’approvisionnement du royaume chérifien en carburant. « Quatre millions de tonnes d’hydrocarbures y transitent chaque année.
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Une moitié est destinée à la consommation interne du pays, tandis que l’autre repart en transbordement ou permet d’approvisionner des navires en carburant », indique Rachid Houari, le directeur central du complexe portuaire. Alors que la liquidation judiciaire de la Samir,
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filiale du saoudien Corral Petroleum Holding, a été prononcée en juin 2016, qu’aucune solution industrielle locale ne s’est pour l’instant dégagée et que la plupart des raffineries du monde sont surcapacitaires, l’importation via Tanger Med de carburants raffinés à l’étranger va perdurer. E.M.B. et C.L.B.
2007, la façon de concevoir les ports a évolué, avec une automatisation accrue des opérations de transbordement et des tirants d’eau plus importants. À Tanger Med 2, le rendement par navire sera supérieur, l’opérateur pouvant allouer jusqu’à huit grues pour le chargement ou le déchargement d’un seul navire. Par ailleurs, l’ensemble du bassin de Tanger Med 2 affiche 18 mètres de profondeur, alors que ce n’était le cas que d’une partie de la première partie du complexe portuaire. Cela nous permettra d’accueillir les plus gros navires du monde (400 mètres de long, avec une capacité de 22 000 conteneurs). Sept d’entre eux peuvent tenir en même temps à Tanger, et cela n’est possible nulle part ailleurs en Méditerranée. Comment se passent les relations entre l’autorité portuaire, que vous représentez, et les différents concessionnaires des terminaux ?
Les choses sont claires et la relation est bonne. TMPA met en place les quais et les bassins, la capitainerie et le pilotage qui permettent aux navires de rentrer et de sortir rapidement. Nous sommes aussi responsables des appels d’offres pour la gestion des quais, attribués pour une durée de trente ans, et devons veiller à leur bonne mise en œuvre. C’est en revanche au concessionnaire sélectionné d’équiper les quais, en investissant les montants convenus, et de former le personnel nécessaire. Il doit aussi assurer un trafic minimal contractuellement défini. À Tanger Med 1, les opérateurs APM Terminals et Eurogate ont chacun investi environ 150 millions d’euros. À Tanger Med 2, l’un des terminaux à conteneurs, le TC4, est également géré par APM Terminals. L’opérateur néerlandais y a investi 900 millions d’euros. L’autre quai, le TC3, est revenu au consortium formé par Marsa Maroc, Eurogate et Contship Italia, lequel est en train
Tous flux confondus, le port espagnol surclasse son rival marocain.
ARTUR WIDAK/NURPHOTO/AFP
d’équiper le quai pour près de 200 millions d’euros. Cela fait douze ans que les deux derniers opérateurs respectent leurs engagements et paient à temps leurs redevances. À la fin de la concession, le contrat prévoit la possibilité d’un renouvellement sur une période plus courte, moyennant un investissement pour remettre à niveau les superstructures, la flotte de camions et les grues. Comment Tanger Med s’interface-t-il avec d’autres moyens de transport, terrestres et aériens ?
Le choix de Renault de construire une usine automobile à proximité de Tanger Med [à 29 km] dépendait notamment de la possibilité de disposer d’une voie ferrée reliant leurs installations à la zone portuaire. Chaque jour, six trains transportant les véhicules Renault arrivent au port, auxquels viendront s’ajouter prochainement deux de plus en provenance de la nouvelle usine PSA à Kénitra [ville située à 245 km au sud de Tanger, sur la façade atlantique]. Deux autres trains chargés en hydrocarbures sortent quotidiennement du port, tandis que quatre autres transportent les passagers des bateaux. Nous réfléchissons également à la mise en place de trains de céréales. Tous nos terminaux sont aujourd’hui reliés au réseau ferré. Par ailleurs, l’autoroute arrive jusqu’au port de Tanger Med. Pas moins de 330 000 camions y passent chaque année, allant en Europe ou revenant d’Europe. Enfin, les gros logisticiens installés dans la zone franche peuvent, notamment en cas d’urgence, faire le choix de la voie aérienne depuis l’aéroport de Tanger, tout proche. Commentexpliquez-vousque40%du traficdemarchandisesdeTangerMed se fassent avec l’Afrique de l’Ouest?
Par la géographie et par nos performances ! L’Afrique de l’Ouest est sur une route maritime le long de la côte Atlantique suivant un axe nordsud, qui croise au niveau de Tanger les flux vers l’Asie (axe est-ouest). Un
ALGÉSIRAS, GÉANT DE L’AUTRE RIVE
Situé à 12 kilomètres de Tanger Med, mais de l’autre côté du détroit de Gibraltar, le port d’Algésiras a bien l’intention de tenir tête à son rival marocain. Les quais andalous bâtis en 1965 ont séduit les transporteurs maritimes du monde entier, qui venaient y effectuer leurs opérations de transbordement de conteneurs au carrefour des routes de l’Atlantique et de la Méditerranée. Un avantage dont ils ont été les seuls à profiter jusqu’au lancement de Tanger Med en 2007. Si l’infrastructure marocaine a très bien démarré dans le sillage d’Algésiras, c’est notamment parce qu’elle est entrée en scène au moment où les installations vieillissantes de son concurrent européen commençaient à saturer. Les deux ports se livrent depuis une compétition frontale, proposant le même catalogue de services: trafic passager, roulier, transbordement, etc. Ce qui ne les empêche pas en parallèle d’entretenir des liens étroits, du fait notamment que plus de 2 millions de passagers – dont une grande partie de Marocains résidant en Europe – traversent chaque année le détroit, essentiellement de juin à septembre. Après une remise à niveau majeure côté espagnol en 2009, qui a nécessité un plan d’investissement de 365 millions d’euros, le port andalou traite désormais annuellement plus de 100 millions de tonnes tous flux confondus, soit près du double de l’activité de son concurrent en 2018. Même si l’avènement du complexe Tanger Med devrait changer la donne sur l’activité conteneurs, les Marocains ne sont pas près de rattraper leur retard sur les autres flux de marchandises. Algésiras est devenu progressivement un port majeur d’import-export de l’Union européenne, alors que seulement 30 % du trafic de Tanger Med a pour origine ou destination le Maroc. CHRISTOPHE LE BEC avec EL MEHDI BERRADA
transbordement de marchandises à Tanger Med entre des navires de ces deux axes fait gagner jusqu’à dix jours aux transporteurs maritimes par rapport aux autres ports méditerranéens. Quels liens spécifiques avez-vous noués avec d’autres ports d’Afrique?
Ces dernières années, plusieurs ports subsahariens ont souhaité s’inspirer de notre expérience. Nous
avons notamment été sollicités pour des sessions de formation, ainsi que pour aider à la refonte du modèle de gestion de plusieurs terminaux portuaires. Nous avons créé Tanger Med Engineering (TME), une filiale de l’agence TMSA, qui regroupe 70 ingénieurs et techniciens expérimentés. Ses équipes sont déjà parties en mission au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Cameroun et à Madagascar.
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ENTREPRISES
PATRICK ROBERT
chinois de l’ingénierie CHEC construit des infrastructures à Abidjan, Tema ou encore Kribi mais, ces fois encore, ce ne sont pas ses compatriotes qui les exploitent. Ainsi, le chinois Sinotrans a été devancé par le philippin ICTSI pour le contrat de gestion du terminal polyvalent de Kribi, au Cameroun. Les seuls succès chinois récents en matière de concessions portuaires sont ceux, modestes, de PowerChina, associé à Bolloré, dans le projet nigérian d'Akwa Ibom, et de CHEC, dont ce n’est pourtant pas le cœur de métier, pour la gestion du terminal à conteneurs de Kribi, au sein d’un groupement avec Bolloré et CMA CGM. Sur le port djiboutien de Doraleh, le déchargement d’un vraquier marocain à destination de l’Éthiopie.
Le paradoxe chinois Alors que Pékin investit massivement dans les infrastructures et construit des complexes portuaires, ses groupes remportent peu de contrats d’exploitation. THIBAUD TEILLARD
es opérateurs portuaires chinois n’ont guère brillé ces derniers mois en Afrique. Au Kenya, c’est le sud-africain Transnet, pourtant un monopole public peu habitué à sortir de son pré carré, qui a emporté en mars la concession des premières phases du mégaprojet du port de Lamu, financé par Pékin. De son côté, l’italo-suisse MSC est pressenti dans le cadre d’une première privatisation de terminal à Mombasa. Toujours en Afrique de l’Est, le groupe public China Merchants, qui menait le bal des concessions portuaires sino-africaines avec une présence à Djibouti, à Lagos aux côtés de Bolloré et à Lomé avec MSC, vient de connaître une grosse déconvenue à Bagamoyo, en Tanzanie. La revue générale menée par le président John Magufuli a conclu au report sine die de ce projet portuaire à 10 milliards de dollars (8,95 milliards d’euros) conçu par les Chinois en 2013.
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À Djibouti, le même China Merchants, pourtant arrivé en force comme actionnaire minoritaire du port avec un soutien des autorités locales, ne parvient pas à s’imposer aussi facilement qu’il pouvait l’imaginer. L'émirati DP World, écarté en 2018 du terminal à conteneurs de Doraleh, n’en finit pas de gagner ses recours internationaux contre les opérateurs qui souhaiteraient les supplanter. Tout investissement massif s’avère donc compliqué pour China Merchants tant que le volet juridique ne sera pas déminé. Dans d’autres régions du continent, la situation n’est guère plus rose. Les opérateurs européens règnent en maître à Tanger Med, le plus grand port à conteneurs d’Afrique. En Algérie, où les Chinois étaient censés construire et exploiter le grand port d’El Hamdania, le projet est à l’arrêt. À Takoradi, au Ghana, ce sont des intérêts locaux qui l'ont emporté. À Lekki, au Nigeria, c'est CMA CGM qui a décroché la mise. Bien sûr, le géant
En Europe, l’empire du Milieu adopte une stratégie opposée
« Même s’ils en ont les moyens financiers, en Afrique les Chinois n’optent généralement pas pour un mode intégré, c’est-à-dire qu’ils n’interviennent pas de la construction du port jusqu’à son exploitation. Ils ne sont pas les opérateurs de leurs propres investissements », décrypte Yann Alix, délégué général de la Fondation Sefacil. Ce spécialiste de la logistique africaine relève que les groupes chinois misent sur une stratégie différente en Europe où, à l’inverse, ils cherchent à devenir opérateurs portuaires sans construire les infrastructures. China Cosco gère ainsi les ports du Pirée, en Grèce, de Zeebruges, en Belgique et de Valence, en Espagne. « Peut-être craignent-ils la surcapacité de plusieurs ports du continent, notamment en Afrique de l'Ouest, ce qui pourrait rendre leur exploitation insuffisamment rentable, alors qu’ils sont sûrs de s'y retrouver financièrement sur les seuls projets de construction portuaire », avance comme hypothèse Yann Alix. Si, lors du sommet Chine-Afrique de 2018, Pékin s’est engagé à consacrer 60 milliards de dollars supplémentaires au développement du continent, et notamment de ses infrastructures portuaires, son objectif n’est pas de prendre le contrôle de ces dernières, mais d’y faire transiter les matières premières importées et les marchandises exportées.
COMMUNIQUÉ
Prix de la meilleure productivité à quai des ports d’Afrique de l’Ouest et du Centre
Une forte délégation du PAPN, conduite par son directeur général monsieur Séraphin Bhalat, a pris part aux travaux du 40e Conseil annuel de l’Association de Gestion des Ports de l’Afrique de l’Ouest et du Centre (AGPAOC) sous le thème du « rôle de l’État dans l’économie maritime et portuaire » C’était du 18 au 20 juin 2019 à Lomé au Togo. Les performances réalisées ces dernières années par le PAPN ont particulièrement retenu l’attention des participants à ce sommet, notamment de la Fondation African Ports Po Awards et du Codex. Ces deux institutions spécialisées dans l’observation des perfors mances portuaires ont décerné au PAPN le m « Prix de la meilleure productivité à quai » des ports de l’Afrique de l’Ouest et du Centre. En effet, grâce aux investissements enE gagés par la direction du Port et Congo g Terminal (Groupe Bolloré) le concessionT naire du terminal à conteneurs, le Port Autonome de Pointe-Noire a triplé sa productivité/navire, qui est passée p de d 15 mouvements par heure en 2009 à environ 60 mouvements 2 en e 2018. C’est quasiment un record ! Avec pour conséquences positives, la suppression des
attentes en rades de navires, et la croissance continue du trafic général du PAPN depuis 2010. Ainsi, parti de 180 515 conteneurs manutentionnés en 2009 lors de la mise de concession, ce trafic a dépassé les 735 000 conteneurs manutentionnés en 2018. Il est indéniable que de plus en plus les armateurs font confiance au Port autonome de Pointe-Noire, pour la qualité de ses infrastructures et à son service d’accueil des navires. De fait, le PAPN a obtenu en Novembre 2018 sa certification ISO 9001/2015. Par ailleurs, les mesures prises pour la simplification et la facilitation du passage portuaire ont commencé à porter leurs fruits. La suppression des contrôles illégaux par des administrations non habilités le long de la chaine de passage a permis de faciliter la sortie des marchandises. Un seul et unique point de contrôle de sortie des conteneurs a été installé. De fait, le temps de passage portuaire d’un conteneur a été raccourci 23 à 12 jours, avec l’espoir d’atteindre moins de 10 jours à la fin de cette année, et le délai de sortie physique est passé de 72 heures à moins de 22 heures. Un Port en eaux profondes, un service d’accueil des navires certifiés ISO 9001 V2015, des infrastructures et équipements adéquats, autant d’atouts pour rassurer les armateurs et les chargeurs. BP 711 - Pointe-Noire, République du Congo Tél. : (+242) 22 294 00 13 Fax. : (+242) 22 294 02 87 E-mail : info@papn-cg.org D @papncg - E @PAPNCONGO
M. Séraphin Bhalat, Directeur Général du PAPN recevant son prix
JAMG - Photos : D.R.
Lors de la 40e session du Conseil annuel de l’Association de Gestion des Ports de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, le Port Autonome de Pointe-Noire (PAPN) s’est vu décerner le Prix « Port, meilleure productivité à quai » de l’Afrique de l’Ouest et du Centre.
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