JA 3100 MAI 2021 INTER BELGIQUE

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www.jeuneafrique.com

NO 3100 – MAI 2021

BELGIQUEAFRIQUE

Passé recomposé CÔTE D’IVOIRE

NOUVELLE FORMULE ENRICHIE

Que va faire Gbagbo ?

DOSSIER FINANCE & ASSURANCE

JEAN-PIERRE BEMBA

« Je n’ai aucune revanche à prendre sur Joseph Kabila » De retour dans la majorité, aux côtés de Félix Tshisekedi, après quinze années dans le costume d’opposant, l’ancien vice-président sort du silence. Interview exclusive.

Algérie 420 DA • Allemagne 9 € • Belgique 9 € Canada /A 12,99 $CAN • Espagne 9 € • France 7,90 € Grèce 9 € • DOM 9 € • Italie 9 € • Maroc 50 MAD Pays-Bas 9,20 € • Portugal continental 9 € • RD Congo 10 USD Suisse 15 CHF • Tunisie 8 TND • TOM 1 000 XPF Zone CFA 4800 F CFA • ISSN 1950-1285

SPÉCIAL 12 PAGES


INTERNATIONAL

BELGIQUE-AFRIQUE

Passé recomposé Dotés d’un nouveau gouvernement depuis octobre, après plus d’une année d’attente, les Belges relancent progressivement leur diplomatie, notamment sur le continent, avec qui ils préparent l’avenir en exorcisant de vieux démons.

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JEUNE AFRIQUE – N° 3100 – MAI 2021


BENOIT DOPPAGNE / BELGA VIA AFP

Le Premier ministre Alexander De Croo, alors ministre des Finances et de la Coopération au développement, en visite à Kinshasa, le 6 février 2020.

JEUNE AFRIQUE – N° 3100 – MAI 2021

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INTERNATIONAL BELGIQUE-AFRIQUE

OLIVIER CASLIN

I

I ngouvernable, la Belgique ? Le royaume est, en tout cas, à nouveau gouverné, depuis le 1er octobre 2020 et la nomination du libéral Alexander De Croo au poste de Premier ministre. Le pays aura dû patienter près de 500 jours – 493 exactement – après les résultats des élections législatives du 26 mai 2019 pour disposer d’un gouvernement fédéral de plein exercice. C’est moins que durant la crise de 2010-2011 durant laquelle la Belgique était restée sans exécutif pendant 541 jours, mais le plus dur commence peut-être maintenant pour le nouveau chef de gouvernement, le premier d’origine flamande depuis dix ans, qui devra composer avec une co­­alition de sept partis, représentative du morcellement du paysage politique belge depuis l’éclatement de la précédente équipe gouvernementale de centredroit à la fin de 2018. Pour contrecarrer la poussée de l’extrême droite et récompenser celle des environnementalistes lors du dernier scrutin fédéral, les partis traditionnels en perte de vitesse ont réussi à s’entendre – sous la pression constante du palais royal –, autour d’une équipe gouvernementale composée de quatre couleurs politiques : libérale, socialiste, écologiste, auxquelles vient s’ajouter la démocratie ­chrétienne flamande. Alexander De Croo a donc la lourde tâche de mettre en musique les actions de cette mosaïque baptisée « Vivaldi »

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JEUNE AFRIQUE – N° 3100 – MAI 2021

par la presse belge. Cet ancien ministre des Finances du gouvernement précédent pourra s’appuyer, pour le seconder, sur celle à qui il a succédé. Également d’aspiration libérale, Sophie Wilmès est désormais vice-Première ministre et a récupéré le portefeuille bien garni des Affaires étrangères et européennes, du Commerce extérieur et des Institutions culturelles fédérales (lire p. 128). « Une reconnaissance de son travail très apprécié pendant l’année qu’elle a passé à la tête du gouvernement d’affaires courantes », estime un fin connaisseur du sérail belge. Notamment pour sa gestion de l’épidémie de Covid-19, qui s’est vite imposée dans l’agenda de son successeur.

Communication éludée

Comme le pays, la diplomatie belge n’est donc pas vraiment sortie du confinement dans lequel elle est maintenue depuis le départ de Didier Reynders, aujourd’hui commissaire européen à la justice et habitué des chancelleries après avoir été en charge des Affaires étrangères de son pays pendant huit ans. Après l’inexpérimenté Philippe Goffin, c’est au tour de Sylvie Wilmès de découvrir une fonction occupée pour la première fois par une femme dans le royaume. Aussi jeune que son Premier ministre – elle a eu 46 ans en janvier, lui les aura en novembre –, « elle ne s’est pas montrée très agissante jusqu’à présent », persifle un observateur européen depuis Bruxelles. Pas plus que ses services, qui préfèrent communiquer par médias sociaux interposés sur les tourments causés par le sofagate à l’ancien Premier ministre Charles Michel, « que de s’exprimer sur les derniers événements en RD Congo ou sur les conclusions du rapport publié en France sur le Rwanda », constate un journaliste belge. L’Afrique fait d’ailleurs figure aujourd’hui de parent pauvre, « au regard de ce qu’a pu être l’implication passée de la Belgique sur le continent », reprend notre observateur. Fidèle à sa doctrine tri­dimensionnelle (diplomatie, défense, développement) en matière de relations extérieures, la Belgique semble avoir essentiellement concentré son attention sur le Sahel, où son armée est présente aux côtés des Français depuis l’opération

Serval de 2013. Sur le reste du continent, « Bruxelles délègue beaucoup à Bruxelles », sourit notre diplomate européen. Peut-être plus encore depuis ces derniers mois et la nomination de Bernard Quintin, ancien directeur de cabinet de Philippe Goffin, au poste de directeur général adjoint en charge de l’Afrique au Service européen pour l’action extérieure. Même en RD Congo, la Belgique ne semble pas vraiment profiter des bonnes relations retrouvées avec son ancienne colonie depuis l’élection à la présidence de Félix Tshisekedi, en janvier 2019. Seul dossier – d’importance –, sur le bureau de la ministre : le rapatriement solennel à Kinshasa des restes de Patrice Lumumba, dans le cadre des festivités du 61e anniversaire de l’indépendance congolaise en juin prochain. Sujet hautement inflammable que la diplomatie belge tente de manier avec précaution. Un temps envisagée, la visite pour l’occasion du roi Philippe, la première d’un souverain belge depuis celle d’Albert II en 2010 pour le cinquantenaire du pays, n’aura finalement certainement pas lieu, « pour ne pas prendre le risque d’éclipser l’événement », souffle-t-on dans les couloirs du ministère.

Le royaume semble avoir concentré son attention sur le Sahel, où il se tient aux côtés des Français depuis l’opération Serval de 2013. Autre sujet d’actualité tourné vers le passé, la Commission parlementaire vérité et réconciliation, chargée, depuis juillet 2020, de « faire la paix avec le passé colonial » du pays, n’a toujours pas rendu ses conclusions, pourtant annoncées pour le 3 mars. De ces dernières dépendront également les décisions à prendre par le gouvernement belge en matière de restitution d’œuvres d’art. Une façon de préparer, à l’aune de ce qu’elles ont pu être, l’avenir des relations entre l’Afrique et le royaume.


COMMUNIQUÉ

AVIS D’EXPERT

Agence wallonne à l’Exportation et aux Investissements étrangers (AWEX) Tél. : (+32) 2 421 82 11 Email : info@awex.be www.awex.be

Afrique et Wallonie sous le signe du partenariat…

À

l’image de la Belgique, l a Wa l lon ie , p a r t ie francophone du pays, s’investit e n A f r ique p ou r l a p a i x e t la stabilité, le respect de la démocratie et des droits de l’homme, la bonne gouvernance, la coopération au développement et l’émergence économique.

présent s da n s des pay s avec lesquels la Wallonie entretient des relations privilégiées, comme la Tunisie, l’Égypte, la République démoc rat ique du Con go et le Rw a nda ». De cet te m a n ière, l ’e n s e m b l e du c o nt i n e nt e s t parfaitement couvert.

Dominique Delattre Inspecteur général

L’AWEX orga n ise bon a n ma l

Mais l’action économique de l’AWEX

an une quinzaine d’actions en

ne se limite pas aux missions

domaines liés à l ’économie

A frique. Depuis 2015, l ’AWEX

et aux relations commerciales...

internationale pour la

a dédié à ce continent deux de

De multiples coopérations entre

Wa l l o n i e , l ’AW E X – A g e n c e

ses m a rc hés c ibles a n nuel s :

institutions publiques ont ainsi

wallonne à l’Exportation et aux

l ’A frique du Sud en 2015 et le

été mises en place ces dernières

I nvest i ssement s ét r a n ger s –

Ro y au me du Ma ro c e n 201 8 .

années, à l’instar de la coopération

soutient tout naturellement les

Preuve supplémentaire de

mise en œuvre entre l’AWEX et son

Responsable de l’ensemble des

efforts en matière d’émergence

l ’intérêt de l ’AWEX pour cette

pendant tunisien, le CEPEX. « Plus

é conom ique. Une ac t ion de

partie du monde, trois missions

largement, détaille Dominique

l ’AW E X q u i e s t n o t a m m e n t

économiques princières y ont été

Delattre, l’objectif principal de ces

soutenue par un important réseau

organisées ces dernières années…

collaborations est de faire émerger

de neuf Conseillers économiques

« En 201 3, le déplacement en

sur le continent africain un secteur

et commerciaux (CEC) établis

A n gol a et en A f r ique du Sud

privé dynamique porteur de belles

sur le continent africain. « Ces

était la première mission de SAR

coopérations à venir avec nos

CEC sont localisés dans des pays

la Princesse Astrid de Belgique,

entreprises. C’est pourquoi, notre

pa r t ic u l ièrement i mpor t a nt s

se souvient Dominique Delattre.

démarche et notre action visent

pour leur rôle stratégique dans

Tout un symbole… La mission

à permettre une appropriation

le développement économique du continent africain, comme l’explique Dominique Delattre,

en Côte d ’Ivoire de 2017 était

des projets par les populations

également un beau succès. Mais

locales. En l ’occurrence, nous

ce n’était rien à côté de celle de

créons des projets plutôt que de

inspecteur général à l’AWEX en

2018 au Ma roc, avec quelque

vendre des produits. Des projets

c ha rge de l ’A frique. Ces pays

470 participants belges, dont une

qui produiront demain des effets

const ituent aujou rd ’ hui les

majorité de Wallons. Un record

multiplicateurs et dont le maître-

vér itables por tes d ’ent rée du

à l ’époque… » Et une nouvelle

mot reste le partenariat . » Un

continent : le Maroc, le Sénégal , la

mission économique princière

partenariat qui se doit de s’inscrire

Côte d’Ivoire, le Kenya et l’Afrique

est annoncée au Sénégal, en mai

dans une dynamique toujours

du Sud. Les CEC sont également

2022.

mutuellement bénéfique.


INTERNATIONAL BELGIQUE-AFRIQUE

ENTRETIEN

Sophie Wilmès « Nous voulons voir nos voisins africains se développer en paix » Diplomatie, défense, développement… La ministre fédérale belge des Affaires étrangères et du Commerce extérieur a répondu aux questions de Jeune Afrique, sept mois après sa nomination. PROPOS RECUEILLIS PAR OLIVIER CASLIN

C

hef d’un éphémère gouvernement d’affaires courantes, entre octobre 2019 et 2020, Sophie Wilmès est aujourd’hui à la tête de la diplomatie fédérale belge. À 46 ans, la numéro deux de l’actuel gouvernement de plein exercice découvre ses fonctions et revient pour Jeune Afrique sur les priorités et l’agenda de la Belgique sur le continent africain.

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JEUNE AFRIQUE – N° 3100 – MAI 2021

La diplomatie belge s’inscrit-elle toujours dans l’approche 3 D – diplomatie, défense, développement – suivie par votre ministère depuis plusieurs années ? Cette approche a été renforcée en 2017, quand la Belgique a décidé de suivre une approche globale en matière d’action étrangère, face à des situations souvent très complexes qui requièrent un renforcement de la coordination et de la synchronisation de nos instruments. Cette stratégie dépasse donc les simples Affaires étrangères, même si nous restons le centre de gravité de leur mise en

E IQU ELG EB MA

Jeune Afrique : Vous avez été nommée ministre il y a quelques mois, avec quelle feuille de route concernant l’Afrique ? Sophie Wilmès : Notre intérêt est que nos voisins se développent en paix. Notre accord de gouvernement identifie en particulier deux zones prioritaires d’engagement sur le continent : la région des Grands Lacs et le Sahel. Nos liens sont historiques avec la première, plus récents avec la seconde, ce qui est lié à son instabilité grandissante qui inquiète l’Europe. La Belgique continue donc de participer aux efforts internationaux entrepris dans la région comme elle le fait depuis l’opération Serval de 2013. Nous comptons par ailleurs approfondir nos relations avec les États d’Afrique du Nord. Nous restons enfin très attachés au renforcement des relations de continent à continent et souhaitons la mise en place d’un partenariat stratégique

et global entre l’Union européenne (UE) et l’Union africaine (UA).

œuvre au quotidien. C’est l’approche que nous appliquons au Sahel, peutêtre plus encore que partout ailleurs, pour faire face aux multiples causes d’instabilité de la région. Comment évolue la présence belge sur le continent ? La Belgique est sensiblement plus présente en Afrique de l’Ouest ces dernières années, avec l’ouverture de nouvelles ambassades, comme en Guinée. L’armée belge a considérablement étendu son action au Sahel, qui est désormais son premier théâtre d’opérations à l’étranger. Au niveau économique aussi, bien que l’Afrique du Sud reste notre premier partenaire commercial sur le continent, les échanges avec les pays de la Cedeao montent en puissance, notamment la Côte d’Ivoire, où une importante mission princière s’était rendue en 2017, et le Sénégal, où une autre mission est prévue, si possible en 2022. En ce qui concerne la coopération au développement, tous les pays partenaires de la Belgique, à l’exception de la Palestine, se trouvent sur le continent. Et nous sommes bien sûr très présents en RD Congo, où j’ai personnellement eu le plaisir de rouvrir, en tant que Première ministre, le consulat-général de Belgique à Lubumbashi, en 2020. Cela faisait dix ans qu’un chef de gouvernement belge ne s’était pas rendu dans le pays.


INTERNATIONAL BELGIQUE-AFRIQUE Comment qualifiez-vous l’état de vos relations avec Kinshasa ? La Belgique salue et soutient la volonté du président Tshisekedi de mener des réformes en faveur de sa population. Nous partageons son analyse de la situation de la sécurité dans l’est de la RD Congo, de l’état de l’économie et des finances publiques du pays, ainsi que sa vision de la lutte à mener contre la corruption et l’impunité. Nous sommes en contacts très étroits pour voir comment soutenir au mieux les autorités. Le chef de l’État a montré depuis son arrivée au pouvoir une volonté de dialogue et de réengagement avec la communauté internationale. Sa visite de travail, en 2019, a débouché sur une série d’accords qui ont permis de relancer la coopération dans les domaines de la finance et de la défense. Nous espérons la ratification prochaine de la convention bilatérale sur la protection des

investissements, qui serait un très bon signe pour les investisseurs belges en RD Congo. Quelle est la posture du royaume à l’égard des conclusions du rapport Duclert sur la position de la France au Rwanda ? Ce rapport représente un travail historique considérable, mais qui reste spécifique à la France. Je rappelle que la Belgique a effectué son devoir d’introspection sur cette

Nos échanges avec les pays de la Cedeao, notamment la Côte d’Ivoire et le Sénégal, montent en puissance.

période tragique. Après dix-huit mois de travaux en commission parlementaire, le Sénat a rendu un rapport d’enquête détaillé dès 1997, qui a mis en évidence certains dysfonctionnements. Et, en 2000, mon prédécesseur, Guy Verhofstadt, a exprimé à Kigali les excuses de la Belgique auprès du Rwanda. Comme la France, la Belgique travaille sur la question de la restitution d’œuvres d’art à l’Afrique. Comment évolue ce dossier ? Les discussions entre experts sont en cours, il s’agit de trouver la bonne formule, et nous sommes ouverts au dialogue avec nos partenaires africains. Diverses pistes sont étudiées, notamment dans le cadre de la célébration du 61e anniversaire de l’indépendance de la RD Congo. Et j’espère que certaines auront pu aboutir d’ici au 30 juin.

ÉCONOMIE

Trio gagnant Depuis la loi de régionalisation de 1993, les provinces belges ont repris le flambeau du commerce extérieur, avec la création de trois organismes – francophone, néerlandophone et bruxellois – résolument tournés vers l’Afrique. OLIVIER CASLIN

P

our assurer la promotion de ses entreprises à l’international et attirer les investissements étrangers, la Belgique joue depuis le début des années 1990 la carte linguistique et régionale. Trois organismes ont vu le jour : l’Agence wallonne à l’exportation et aux investissements étrangers (Awex) pour les régions francophones, le Flanders Investment & Trade (FIT) pour les néerlandophones, et­ hub.brussels pour la capitale fédérale. Ce qui n’empêche pas les trois entités de travailler ensemble. « L’essentiel est d’être présent en Afrique en tant qu’État belge pour pouvoir présenter une offre complète et représentative

des savoir-faire propres à chacune des trois régions », explique Carole Moné, manager export pour l’Afrique subsaharienne.

FIT, les Flamands osent

FIT a vu le jour en 2005, après la décision du gouvernement flamand de fusionner Export Flanders et le Service of Investment in Flanders, les deux entités qui géraient les différents aspects du commerce extérieur de la région depuis le début des années 1990. Pour promouvoir la destination flamande ou aider ses entreprises à exporter leur savoir-faire, FIT dispose de cinq représentations sur le territoire belge (une à Bruxelles et quatre

en Flandre), ainsi que d’un réseau de 75 bureaux à travers le monde, dont trois en Afrique (au Maroc, en Égypte et en Afrique du Sud), le continent accueillant également deux antennes, établies au Nigeria et au Ghana. La province néerlandophone s’adresse donc en priorité aux pays de l’Afrique anglophone. Son agence gouvernementale mutualise avec l’Awex et hub.brussels la couverture du continent dans son ensemble. En Afrique, ses actions visent essentiellement à soutenir les PME flamandes qui souhaitent s’implanter sur le continent en fournissant conseils et renseignements ainsi que certaines aides financières JEUNE AFRIQUE – N° 3100 – MAI 2021

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INTERNATIONAL BELGIQUE-AFRIQUE

LIONEL MANDEIX / PRÉSIDENCE DU SÉNÉGAL

Les Belges savent bien que pour aider leurs entreprises à s’implanter en Afrique, rien ne remplace le contact direct.

Signature de déclarations d’intentions autour de la production de vaccins anti-Covid-19 entre le Sénégal et la start-up belge Univercells, soutenue par l’Awex, en présence de Macky Sall (à l’arrière-plan, à gauche), le 13 avril 2021, à Namur.

dans le cadre de missions explo­ ratoires. FIT, comme ses deux autres « collègues » régionaux, sait bien qu’en Afrique rien ne remplace le contact direct. Faute de pouvoir par­ ticiper, en cette période de mobilité restreinte, aux visites organisées à l’échelon fédéral, l’organisme fla­ mand garde néanmoins le contact avec le continent. Un événement est organisé en mai, à distance, avec le Sénégal, comme une alternative à la mission princière prévue pour 2020 dans ce pays. En juin, c’est en compa­ gnie de hub.brussels que FIT s’inté­ ressera au marché tunisien.

Awex, l’atout wallon

Depuis le début des années 1990, le tissu économique wallon, composé à 99,5 % de PME, toujours en recherche de nouveaux marchés, bénéficie du soutien de l’Awex. L’organisme public dispose de trois structures de repré­ sentation : les centres régionaux dissé­ minés dans les provinces wallonnes, les réseaux de conseillers commer­ ciaux déployés dans les ambassades belges, et, au centre, le siège de l’or­ ganisation à Bruxelles, « véritable quartier général stratégique et opéra­ tionnel », selon Dominique Delattre, inspecteur général de l’Awex, chargé notamment de l’Afrique. Le conti­ nent tient d’ailleurs une bonne place dans le dispositif international de

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JEUNE AFRIQUE – N° 3100 – MAI 2021

l’agence wallonne, qui dispose de neuf bureaux, un dans chaque pays du Maghreb, ainsi qu’au Sénégal, en Côte d’Ivoire, en RD Congo, au Rwanda, au Kenya et en Afrique du Sud. Plus de 6 500 sociétés wallonnes s’appuient aujourd’hui sur l’Awex, qui de son côté note un intérêt certain pour les mar­ chés africains, « même si cela ne se confirme pas encore dans les chiffres d’affaires », constate Dominique Delattre. La province peut également s’ap­ puyer sur ses diasporas marocaines et congolaises, vecteurs d’échanges historiques autant que culturels, pour tisser ses liens avec l’Afrique et renforcer ainsi la confiance des entre­ preneurs. « Ils ont besoin de savoir où ils mettent les pieds », reprend le responsable de l’Awex, qui mul­ tiplie les missions sur le continent, seul, avec ses consœurs de FIT et de brussels.hub ou sous drapeau fédé­ ral. L’Awex dispose également avec la Sofinex de l’outil financier suscep­ tible de les aider dans leurs projets. Le réseau bruxellois d’accompa­ gnement des entreprises a connu sa petite révolution en 2018 lorsque les trois organismes alors existants ont fusionné leurs missions respec­ tives en une seule. « hub.brussels » s’écrit en lettres minuscules mais remplit une fonction ô combien capitale auprès du secteur privé

régional, essentiellement constitué de PME, notamment en direction de l’international.

hub.brussels, en lettres capitales

L’organisme public dispose d’un réseau de conseillers économiques et commerciaux à travers le monde, dont plusieurs sur le continent africain. Son bureau de Nairobi suit le Kenya, ainsi que l’Ouganda, la Tanzanie ou la Zambie, celui de Kinshasa s’occupe aussi de Brazzaville, et le dernier en date, installé à Dakar, couvre aussi la Guinée, la Gambie et le Cap-Vert. hub.brussels partage avec l’Awex une représentation à Abidjan, qui couvre le Ghana, le Togo et le Bénin, et s’in­ téresse également à l’Afrique du Nord – l’agence bruxelloise possède un bureau à Tunis en attendant l’ouver­ ture prochaine de celui de Rabat. hub.brussels en profite pour multi­ plier les échanges avec le continent, entre missions économiques en Afrique et réception d’entreprises afri­ caines en Belgique. « C’est le meilleur moyen pour instaurer la confiance des deux côtés », estime Carole Moné, qui veut aussi travailler avec les diasporas congolaises, camerounaises et séné­ galaises pour renforcer la dynamique des entrepreneurs bruxellois vers l’Afrique qui, malgré la pandémie, ne faiblit pas.


COMMUNIQUÉ Agence belge de développement Rue Haute 147 - 1000 Bruxelles +32 2 505 37 00 info@enabel.be www.enabel.be

AVIS D’EXPERT

« Notre réseau de partenaires permet d’apporter des solutions adaptées aux besoins de l’Afrique » Pouvez-vous vous présenter ?

possible.Ainsi, nous concentrons nos

L’Agence belge de développement

actions en Afrique. Pour des raisons

(Enabel) exécute la politique de

historiques, l’Afrique centrale occupe

coopération gouvernementale entre

une place prépondérante, mais nous

la Belgique et quatorze pays par-

souhaitons être davantage présents

tenaires, dont treize sont situés

en Afrique de l’ouest,y compris dans

en Afrique. Nous avons un rôle de

des projets à vocation régionale. Tel

plus en plus actif au niveau euro-

est le cas, par exemple, de la Grande

péen. Le contrat de gestion conclu

Muraille verte qui vise à restaurer

avec l’État belge nous permet de

cent millions d’hectares de terres au

travailler pour d’autres bailleurs

Sahel, à créer des emplois verts en

de fonds, dont l’Union européenne,

faveur des riverains et à améliorer

et d’élargir notre champ d’action

la sécurité alimentaire.

Jean Van Wetter Directeur général de l’Agence belge de développement (Enabel)

géographique à d’autre pays africains. Par ailleurs, Enabel assure actuellement, conjointement avec l’agence luxembourgeoise LuxDev,

« La coopération belge a ciblé l’Afrique : le partenariat fait partie de notre ADN »

la présidence tournante du PractiNous disposons d’une expertise

est d’apporter des solutions globales

dix-sept agences de développement

interne solide que nous complétons

parfaitement adaptées aux nou-

européennes.

grâce à des partenariats stratégiques

veaux besoins des pays africains.

Quelle est votre stratégie ?

(entreprises, ONG, associations, etc.),

Nous avons déterminé notre ambi-

belges ou européens. Nous sommes

tion et les domaines où Enabel offre

ainsi en mesure de mobiliser des

une valeur ajoutée pour arriver à

compétences pointues dans une

La crise sanitaire liée au Covid-19 vous a-t-elle conduit à prendre de nouvelles initiatives ?

un positionnement autour de cinq

approche partenariale et sur-mesure.

La nouvelle ministre de la Coopé-

enjeux mondiaux : la paix et la sé-

Ainsi, au Bénin nous travaillons en

ration au développement, Meryame

curité, le changement climatique, les

coopération avec le port d’Anvers,

Kitir, souhaite mettre l’accent sur le

inégalités sociales et économiques, la

qui assure l’exploitation du port de

renforcement des systèmes de santé

mobilité humaine et l’urbanisation.

Cotonou, en mettant en place des

des pays africains. Compte tenu de

tioners’ Network (PN), le réseau des

avec des acteurs publics et privés

Notre stratégie tient compte de l’évo-

coopérations sur les services avec

l’expertise belge en matière de vac-

lution de l’environnement dans le-

des opérateurs spécialisés (douane,

cins, nous réfléchissons également

quel nous travaillons et se caractérise

logistique, etc.). Nous sommes ainsi

au développement de capacités de

par la volonté d’être le plus efficace

des « facilitateurs » : l’objectif final

production dans les pays africains.


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