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02 ÉDITO 04 SAISON 22_23 08 INTÉRIEUR/EXTÉRIEUR – Entretien avec Lisa Streich 1 1 T H E O U T C A S T D ’ O L G A N E U W I R T H : L A M E R C O M M E E S PA C E U T O P I Q U E 17 CONVERGENCES – Entretien avec Roberto Negro et Nicolas Crosse 24 GRAMMAIRES DU SONORE – Entretien avec Philippe Manoury 31 LES CORPS EN RÉSEAU – Entretien avec Noé Soulier 3 5 E D G A R D VA R È S E : Q U E L Q U E S N O T E S À P R O P O S D E D É S E R T S 3 8 U N S U K C H I N : L’ I M A G I N AT I O N P O U R S E U L E C O N T R A I N T E 4 1 V I M B AY I K A Z I B O N I : L’ A LT É R I T É F E R T I L E 43 GYÖRGY LIGETI ET LES MUSIQUES TRADITIONNELLES D’AFRIQUE 5 2 S A B U R O T E S H I G AW A R A : C O R P S R É S O N N A N T S 5 8 P O È T E D U S O U F F L E D I S PA R U – E n t r e t i e n a v e c M a r k A n d r e 6 1 O R G I A : U N LY R I S M E E X A C E R B É – E n t r e t i e n a v e c H è c t o r P a r r a 64 RÉVÉLER LE POTENTIEL SONORE ET ÉMOTIONNEL – Entretien avec Rebecca Saunders
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6 7 A C T I O N S C U LT U R E L L E S 7 2 M É C É N AT 7 4 L’ E N S E M B L E I N T E R C O N T E M P O R A I N 7 5 M AT T H I A S P I N T S C H E R , D I R E C T E U R M U S I C A L 77 ÉQUIPES 7 9 I N F O R M AT I O N S P R AT I Q U E S
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« Au cours de cette saison, les nombreuses créations dialogueront avec les chefs-d’œuvre de notre répertoire. »
M AT T H I A S P I N T S C H E R
DIRECTEUR MUSICAL A L L E R D E L’ AVA N T, S A N S J A M A I S S ’ A R R Ê T E R D E C H E R C H E R
Ce rêve qui, au fil des ans, est devenu réalité se poursuit cette saison, sous différentes formes. À commencer par celle de projets pluridisciplinaires, dont le grand Edgard Varèse nous avait déjà montré la voie : en janvier, l’Ensemble interprètera ainsi son radical Déserts, accompagné comme il l’avait imaginé d’un contrepoint filmique, avec une vidéo éblouissante de Bill Viola. Pluridisciplinarité encore avec l’opéra The Outcast de ma chère complice Olga Neuwirth que nous donnons le 26 septembre en création française. Un ouvrage scénique et totalement atypique, à son image, qui revisite le Moby Dick de Herman Melville. Le même Herman Melville qui lui a inspiré Le Encantadas, grandiose odyssée imaginaire de Venise aux Galapagos, que l’on jouera le 13 décembre, sept ans déjà après la première française à la Cité de la musique.
En septembre 2013, j’ai inauguré mon mandat à la tête de l’Ensemble intercontemporain avec la création de ma pièce bereshit. Une œuvre tout indiquée puisqu’elle a pour titre et pour thème le premier mot de la Genèse : « À un commencement ». Nous nous retrouvons aujourd’hui à un autre commencement : un cycle se referme, un autre s’ouvre, pour moi comme pour les solistes de l’Ensemble intercontemporain qui, au fil de ces dix dernières années, sont devenus des amis intimes, au gré des concerts et des œuvres jouées, des partitions créées et des expériences vécues ensemble, tandis que Paris devenait mon véritable foyer musical. Au cours de ces dix saisons, nous avons multiplié les projets, explorant dans toutes les directions tout en restant fidèle à l’ADN de cet ensemble fondé par Pierre Boulez. J’ai ainsi essayé d’offrir une vision de notre répertoire, en même temps qu’une vision pour l’avenir de notre musique. Ensemble, nous avons traversé des épreuves inédites et nous sommes confrontés aujourd’hui au retour de la guerre sur le sol européen. Autant de périls pour notre société, auxquels nous avons opposé des valeurs d’ouverture, d’écoute et de partage. Je suis honoré et heureux de la confiance que l’on a placée en moi pour porter ces valeurs et les manifester dans nos activités.
Ce rêve, c’est aussi celui de la création, et je suis très heureux de la commande que nous avons pu passer à Philippe Manoury, Grammaires du sonore, qui sera créée le 9 décembre, en clôture de cette année 2022 qui marque ses 70 ans. La création est notre mission première — en même temps que la transmission et l’encouragement des nouveaux talents.
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de diriger, pour la première fois de ma vie, Dérive 2. En dix années à l’Ensemble, j’ai dirigé toutes les œuvres du maître, sauf celle-ci, qui est pourtant sa dernière achevée ! Tout vient à temps à qui sait attendre… Et je présenterai d’ailleurs Dérive 2 plus d’une fois, puisque ce sera l’une des œuvres que nous jouerons à chaque étape d’une grande tournée aux États-Unis, qui passera à Houston, New York (au Carnegie Hall) et Miami. Un peu avant, toujours aux États-Unis, nous rejouerons, au magnifique Walt Disney Concert Hall de Los Angeles, la grande partition composée par Olga Neuwirth pour le film muet La Ville sans Juifs, véritable pamphlet contre l’antisémitisme réalisé en 1924 par Hans Karl Breslauer. Ayant un pied de chaque côté de l’Atlantique, j’ai eu à cœur toutes ces années de me faire le meilleur ambassadeur possible d’un dialogue artistique transatlantique, d’encourager la curiosité et le respect de part et d’autre. En ces temps de grande instabilité où les nationalismes de tous bords et la xénophobie grondent, l’échange et l’ouverture doivent être défendus avec vigueur.
À cet égard, je suis, chaque année, époustouflé par la qualité et la diversité de la génération montante de compositrices et de compositeurs. La force d’une institution comme l’Ensemble intercontemporain est de pouvoir prendre des risques et d’oser. Ce que ces jeunes musiciens et musiciennes ont à offrir est exceptionnel. Vous le découvrirez notamment au cours de la deuxième édition du Tremplin de la création, toute la journée du 11 mars, au cours de laquelle, conjointement avec nos collègues de trois autres ensembles, nous présenterons vingt-neuf créations mondiales ! Le principe du « tremplin » est une invention commune de l’Ensemble et de l’Ircam voilà plus de vingt ans, qui a plus d’une fois prouvé son utilité en révélant des créateurs et des créatrices devenu·e·s de grandes personnalités du monde musical. Gageons qu’il en sera à nouveau ainsi cette année. Au cours de cette saison, ces nombreuses créations dialogueront avec les chefs-d’œuvre de notre répertoire, comme lors de notre concert d’ouverture, le 14 septembre, au cours duquel deux créations de compositeurs qui me sont très chers, la jeune Suédoise Lisa Streich et son aîné Anders Hillborg, sont mises en perspective avec le désormais classique et toujours aussi actuel Concertini de Helmut Lachenmann. Nous n’avons jamais été un ensemble exclusivement tourné vers la création : nous avons des racines, et un répertoire à cultiver, dont Helmut Lachenmann fait indéniablement partie, en incontournable de la modernité qu’il est. Il en va de même de György Ligeti, dont on fêtera cette année le centenaire de la naissance, avec des concerts à Paris et en tournée. Celui du 3 mars mettra plusieurs de ses œuvres en perspective avec les musiques créées par des compositeurs originaires du continent africain ou des Caraïbes. Idem pour Pierre Boulez, notre père-fondateur, que nous célèbrerons également, en participant cette année encore à la Biennale que la Philharmonie de Paris lui consacre. Le 16 avril, j’aurai d’ailleurs l’occasion
Le dernier concert que je dirigerai cette saison mettra en regard une création de mon ami et collègue Mark Andre et les bouleversants Quatre chants pour franchir le seuil de Gérard Grisey. Interpréter cette œuvre si profondément spirituelle de Grisey — un compositeur français de surcroît, produit de cette tradition que j’admire depuis si longtemps — est pour moi une grande émotion. Ce seuil, c’est aussi, symboliquement, celui que nous devrons franchir ensemble pour aller de l’avant, sans jamais s’arrêter de chercher. Dans les prochaines années, j’aurai bien sûr plaisir à poursuivre ma relation avec ces musiciens extraordinaires, qui forment ma famille musicale de cœur.En attendant, je tenais à vous remercier toutes et tous, notre cher public, nos amis, pour votre fidélité, votre confiance, votre curiosité et votre enthousiasme qui nous ont portés durant toutes ces années extraordinaires.
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H CONCERTINI
L E E N C A N TA D A S
DOMAINES
THE OUTCAST
CLOCKS & CLOUDS
DÉRIVE
EXTENSIONS M U LT I P L E S
LIGETI : CONCERTOS
É C L AT S D E PERCUSSION
IN SITU
DÉSERTS
PIERROT LUNAIRE / LOST IN DANCE
14.09.22 PARIS
26.09.22 PARIS
29.09.22 MUNICH
20.10.22 PARIS
13.12.22 PARIS
LA VILLE SANS JUIFS
VOX ANIMALIS 17.11.22 PARIS
HUDDERSFIELD CONTEMPORARY M U S I C F E S T I VA L 19.11.22 HUDDERSFIELD
YORK ACADEMY 22 + 23.11.22 YORK
ÉMERGENCES I 25.11.22 PARIS
HARLEKIN 27.11.22 MULHOUSE
HOMMAGE À BETSY JOLAS 06.12.22 PARIS
PORTRAIT MANOURY 09.12.22 PARIS
10.05.23 PARIS
22.01.23 PARIS
NEWBORN 07.11.22 MULHOUSE 15.12.22 VANVES
16.04.23 PARIS
15.01.23 ROME
ÉMERGENCES II
01.11.22 BERLIN
13.04.23 PARIS
06 + 07 + 08.01.23 PARIS
SONIC ECLIPSE
14.09.22
11 + 12.05.23 PARIS
T H É ÂT R E ET MUSIQUE
27.01.23 PARIS
12.05.23 NÎMES
TROIS TEMPS
28.01.23 SANTA BARBARA 30.01.23 LOS ANGELES
23.05.23 PARIS
UN SOUFFLE DE LUMIÈRE
F E S T I VA L PRÉSENCES UNSUK CHIN
09.06.23 PARIS
07.02.23 PARIS
ORGIA
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22 + 24.06.23 BILBAO
PHARMAKEIA 10.02.23 HAMBOURG
ALCHIMIE MUSICALE
LETTRES INTIMES
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23.06.23 PARIS
14.02.23 PARIS
ACADÉMIE MANIFESTE
LIGETI : AUX SOURCES DU RYTHME
01.07.23 PARIS
03.03.23 PARIS
TREMPLIN D E L A C R É AT I O N 11.03.23 PARIS
TOURNÉE A U X É TAT S - U N I S 23.03.23 – 01.04.23
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01.07.23
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ÉCLAIRAGE Helmut Lachenmann : le son, rien que le son. par Matthias Pintscher
Helmut Lachenmann est un immense maître et sans conteste l’un de mes pères artistiques. Nous nous connaissons depuis longtemps : j’assistais à un stage de direction d’orchestre à Stuttgart et il était présent. À peine avions-nous fait connaissance qu’une complicité est née, immédiate ! Il n’a jamais été mon professeur officiel, mais nous avons énormément parlé de musique : la sienne, la mienne, qui sont pourtant fort différentes. Son apport est fondamental : après la Seconde Guerre mondiale, Lachenmann a senti la nécessité, presque philosophique, de construire – reconstruire – les structures musicales. Il a élaboré un nouveau vocabulaire, inédit, de la projection du son, auquel il reste fidèle aujourd’hui. Sa musique témoigne d’une extraordinaire réflexion sur les diverses sortes de son : les phénomènes d’oscillations, de fluctuations, d’impulsions… Les phénomènes sonores l’intéressent pour eux-mêmes. C’est donc tout naturellement que j’ai souhaité que l’Ensemble reprenne Concertini pour le concert d’ouverture de saison. C’est une œuvre qui témoigne d’une vraie réflexion sur la spatialisation : pendant 45 minutes, les musiciens sont disposés à divers endroits de la salle et je me trouve au milieu du plateau. Les groupes d’instruments dialoguent, selon un système antiphonique, pour permettre aux sonorités de se déployer. Il y a sept ans que j’ai dirigé cette œuvre pour la dernière fois et c’est aujourd’hui, selon moi, un grand classique qui est entré dans le répertoire des ensembles : Concertini est au répertoire contemporain ce que les symphonies de Bruckner sont au classique !
MERCREDI 14 SEPTEMBRE 20:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
CONCERTINI Un classique, deux créations L’Ensemble intercontemporain ouvre sa saison à la Philharmonie de Paris avec un concert emblématique de son identité musicale. Au programme : un grand et toujours aussi surprenant classique du répertoire contemporain et deux créations pour ensemble. Le « classique », c’est Concertini d’Helmut Lachenmann, l’inventeur de la « musique concrète instrumentale ». Le compositeur allemand n’aime rien tant que de se jouer des idées reçues et des attentes. Ainsi, le titre « Concertini » est-il là pour nous « induire en erreur » : ce titre « nous promet une série de situations “concertantes”, mais l’œuvre répond à cette
attente tout au plus par des irritations ». Quant aux « solos », ils sont « pour mouvements dans l’espace, pour résonances, pour suites d’accords ou figures rythmiques ». Résultat : une œuvre fondatrice, un concerto « gratté » et multiple, pour six groupes d’instrumentistes répartis autour du public, qu’il faut vivre plus encore qu’écouter. Cette exquise fragilité sonore se retrouve dans l’univers poétique de Lisa Streich. La jeune Suédoise, qui voit en Helmut Lachenmann un mentor, expérimente, elle aussi, notamment en équipant les instruments de petits moteurs pour produire des sons inouïs. C’est en revanche plutôt l’éclectisme stylistique qui frappe chez son compatriote Anders Hillborg, que l’EIC jouera pour la première fois, avec une commande dans laquelle le jeu musical s’enrichit d’une dimension spectaculaire inattendue.
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Lisa STREICH Ofelia, pour ensemble et électronique Création mondiale Commande Ensemble intercontemporain, Ircam-Centre Pompidou, Collegium Novum Zürich
Anders HILLBORG Nouvelle œuvre, pour ensemble Création mondiale Commande de Vincent Meyer pour l’Ensemble intercontemporain
Helmut LACHENMANN Concertini. Musique pour ensemble Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction João Svidzinski électronique Ircam Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris En partenariat avec l’Ircam-Centre Pompidou Tarif 20 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 Concert enregistré par France Musique
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Intérieur /extérieur silencieusement sur les touches, de pincer les cordes à l’intérieur du piano. Les moteurs construits par l’Ircam pourront également fonctionner lorsque le piano est fermé. L’idée est venue d’une expérience d’écoute faite à la fontaine Stravinsky de Paris : c’était un matin d’hiver glacial, en novembre 2011, sur la place encore déserte. D’habitude les machines de la fontaine sont éteintes lorsque la température descend très bas et pourtant, elles fonctionnaient, émettant de très jolis chants plaintifs. Je me suis demandé si j’arriverais à écrire quelque chose d’aussi beau, d’aussi simple et authentique. J’ai imaginé de nombreuses combinaisons de voix et d’instruments sans jamais y parvenir. Il manquait quelque chose d’essentiel. L’essence de la beauté, ce matin-là, était née de l’action d’une machine, chose totalement étrangère à ce que l’on peut attendre d’elle… qu’elle puisse produire quelque chose de sensible et d’expressif… d’où l’idée d’utiliser des moteurs !
Un vent de fraîcheur souffle sur la scène musicale contemporaine et ce vent vient du nord : l’Ensemble intercontemporain joue pour la première fois la jeune compositrice suédoise Lisa Streich. Ofelia, la nouvelle œuvre pour ensemble et électronique est le fruit d’une démarche singulière, dont elle nous dévoile en avant-première les ressorts mécaniques inattendus.
C’est la première fois que vous êtes jouée par l’EIC : avez-vous prévu des dispositions particulières concernant la formation instrumentale de votre composition ? Cette nouvelle œuvre est écrite pour grand ensemble et deux pianos : l’un des deux est motorisé et doté de microphones placés à l’intérieur de l’instrument. Le but est de donner l’illusion à l’auditeur qu’il est à l’intérieur du piano. Nous avons donc deux perspectives d’écoute – l’une venant de l’extérieur et l’autre de l’intérieur. La formation inclut également une harpe accordée en quarts de ton.
Votre nouvelle composition fait appel à l’informatique musicale Ircam. Comment est conçue la partie électronique – traitement en direct ou sons déjà fixés – et quelle place a-t-elle dans l’écriture musicale ? Il s’agit d’une partie électronique live dans le sens où le piano motorisé est amplifié et diffusé dans la salle. De plus, je travaille avec différentes résonances provenant d’accords spectraux chantés par des chœurs amateurs. Tout cela sera très subtil cependant. Et même si j’ai une longue expérience avec les instruments motorisés, l’Ircam a développé des moteurs à un niveau de précision encore inédit. On peut se poser la question de savoir si c’est un mieux ou un moins bien… J’espère du moins qu’il subsistera toujours un sentiment d’imperfection entre l’humain et la machine.
Plusieurs de vos pièces incluent des instruments motorisés ; le piano mais aussi le violoncelle ou l’ensemble. En quoi consiste cette motorisation et comment vous en est venue l’idée ? Ma première œuvre motorisée, Pieta, écrite au terme de mon année de Cursus à l’Ircam, est pour violoncelle seul, plusieurs moteurs étant collés sur le dessus de sa caisse, derrière le chevalet et au niveau du cordier, qu’ils frappent, grattent ou frottent. S’agissant du piano, ils sont fixés à l’intérieur de la mécanique du clavier grâce à un système spécialement conçu pour ne pas abîmer l’instrument. Ils sont munis de bandes de papier qui leur permettent, pendant que le pianiste appuie
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Vous avez étudié avec un certain nombre de professeurs d’esthétiques diverses. Quels sont ceux qui vous ont le plus influencée ? Je n’ai pas vraiment de modèle mais je suis reconnaissante envers chacun d’eux. La plus belle phrase cependant, qui résonne presque tous les jours en moi, est celle de Chaya Czernowin : « Work hard, live hard. »
Vous avez parfois recours aux citations dans vos œuvres. Quel rapport entretenez-vous avec la musique du passé, avec l’histoire de la musique en général ? J’envisage la composition comme une conversation avec la musique. L’héritage ancien est en quelque sorte le point de départ, voire la plus infime particule d’une nouvelle composition/conversation.
Propos recueillis par Michèle Tosi
Votre écriture fait appel aux techniques de jeu étendues. Quel type de son recherchez-vous ? Je n’ai pas le sentiment d’utiliser beaucoup les techniques de jeu étendues. Mais je travaille la plupart du temps avec des quarts de tons qui peuvent revêtir un caractère bruité. En général je m’intéresse à l’imperfection du son, à tous ces parasites qui altèrent sa nature. Je recherche également les contrastes, une certaine brutalité au côté de la fragilité, par exemple. Mais je m’efforce le plus possible de traduire tous ces comportements instrumentaux à travers une notation traditionnelle.
En relation avec le concert Concertini, p. 6
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La mer comme espace utopique The Outcast (« Le Paria ») est une œuvre sur la crise globale de notre époque, un récit bouleversant sur la décadence et la xénophobie. Il s’inspire de Moby Dick, roman complexe et visionnaire de Herman Melville. Dès Bählamms Fest (1992-1998), Olga Neuwirth rompait avec la tradition de l’opéra. En mêlant divers genres et médias dans des œuvres présentant une structure insolite, elle brouille la frontière entre l’écran et la scène. Parmi les thèmes essentiels qu’elle a abordés ces vingt-cinq dernières années figurent le caractère changeant de l’identité et de l’espace, leur rapide transformation, et la question, posée en sons et en images, de savoir ce qui est réel et ce qui est virtuel. Ces sujets, elle les traite dans une forme en constante évolution, riche en polysémies. Rien n’est stable, tout se transforme en permanence. Passé et avenir sont sans cesse reconsidérés avec des matériaux hétérogènes, plastiquement déformables, qui s’entrechoquent, et ils interagissent dans ce qu’elle a qualifié un jour de « monde sonore imprévisible aux nombreuses ramifications ». De là son recours fréquent à l’électronique surround et à la vidéo : une expérience immersive permet, par la transformation de l’espace et du son, de réduire à néant l’idée d’une identité fixe. Cette conception jouait déjà un rôle central dans ses partitions des années 1990, bien avant qu’elle la prolonge sur un plus vaste terrain. Olga Neuwirth s’est toujours intéressée aux expériences esthétiques qui suppriment le niveau familier de la réalité auditive et dans lesquelles chanteurs et instrumentistes dialoguent avec leur alter ego électronique ou préenregistré. Une façon d’évoquer comment nous créons chacun notre propre réalité au milieu d’un monde de chaos, de discontinuité, de fausses informations, de déclin.
Olga NEUWIRTH The Outcast Hommage à Herman Melville Musicstallation-theater avec vidéo pour cinq solistes, acteurs, chœur d’enfants, chœur d’hommes, orchestre et électronique Création française
Musique d’Olga Neuwirth Livret de Barry Gifford et Olga Neuwirth, avec les monologues pour Old Melville d’Anna Mitgutsch
LUNDI 26 SEPTEMBRE 20:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS
Susanne Elmark Ishmaela Otto Katzameier Ahab Andrew Watts Queequeg Georgette Dee Bartleby Johan Leysen Old Melville Steve Karier Le père Mapple Johannes Bamberger Starbuck Peter Brathwaite Stubb Soliste du Münchner Knabenchor Pip Münchner Knabenchor chœur d’enfants Company of Music chœur d’hommes Orchestre du Conservatoire de Paris Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Gilbert Nouno projection sonore Netia Jones réalisation et design vidéo
GRANDE SALLE PIERRE BOULEZ – PHILHARMONIE
THE OUTCAST Désord res du monde contem p ora i n Avant le concert, à 18:30 Clé d’écoute sur The Outcast Entrée libre La passion que nourrit la compositrice autrichienne Olga Neuwirth pour l’œuvre du grand écrivain américain Herman Melville ne date pas d’hier. Elle irrigue largement son imaginaire depuis de nombreuses années. Quatre ans avant son grand œuvre d’après Melville qu’est Le Encantadas o le avventure nel mare delle meraviglie, elle lui rendait déjà hommage dans un opéra atypique, mêlant
installation, théâtre, musique et vidéo : The Outcast (Le Paria), créé en 2012 à l’opéra de Mannheim en Allemagne. Elle y revisite le mythique roman Moby Dick pour aborder sous un angle inattendu les différentes crises du monde contemporain. Cet opéra d’un nouveau genre, cette « musicstallation-theater » comme le décrit Neuwirth, sera présenté pour la première fois sur une scène française.
Production ORF RSO Wien, Wien Modern, Wiener Konzerthaus, Elbphilharmonie Hamburg Coproduction Ensemble intercontemporain, Festival d’Automne à Paris, Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, Philharmonie de Paris Avec le soutien de la Fondation Ernst von Siemens pour la musique et du Forum Culturel Autrichien Tarifs 10 € / 20 € / 32 € / 42 € / 52 € / 62 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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ainsi que sur le thème de la mer comme lieu de refuge. Comme Moby Dick, The Outcast est une sorte d’étude de cas qui a pour objet les rapports étroits entre les périls écologiques, politiques et sociétaux de notre époque. Avec cet ouvrage, Olga Neuwirth met en évidence à quel point la compassion humaine est une absolue nécessité. […]
[Dans The Outcast], un jeu de rapides alternances d’espaces musicaux se met en place sur la scène agencée de manière presque traditionnelle, et en même temps naît une sorte d’installation. La compositrice réunit tous ces moyens dans une seule caisse de résonance musicale pour nous présenter un échantillon de vie contemporaine sous la forme d’une « musicstallation-theater with video », selon la terminologie de la partition, d’une œuvre mêlant musique, théâtre, installation et vidéo de manière interactive. Il n’est pas étonnant qu’elle prenne la mer comme métaphore d’un espace utopique : la mer est ouverte, dangereuse, illimitée et indomptée. Olga Neuwirth s’est notamment fait connaître par sa propension à élargir le spectre musical au-delà des catégories classiques en recourant au cinéma, à la vidéo, au radio-théâtre, à la bande dessinée et à bien d’autres moyens, et ce faisant, elle a donné une nouvelle impulsion au genre musico-théâtral dès la fin des années 1980. Ses œuvres sont parsemées de « faux accidents », d’interruptions, de coupures et de fissures. Il a toujours été évident à ses yeux que le sombre pouvoir de la réalité veille sous la fausse idylle du monde apparemment si paisible de la « musique classique » – et sous la création artistique – jusqu’à briser la surface. Le combat de l’individu contre une foule en colère et contre l’autorité joue un rôle récurrent dans ses œuvres. Depuis les années 1980, son art tourne autour de l’absurdité de certains clichés sociétaux et de l’oppression d’autrui par l’abus de pouvoir. Elle cherche constamment à créer une « musique consciente », afin d’attirer l’attention sur les injustices et les discriminations. The Outcast est une allégorie, la politique n’est donc pas loin. Cette œuvre réunit les recherches entreprises en 2006 par la compositrice sur la dérégulation des océans comme espaces maritimes, sur la fragilité de leur écosystème,
« La compassion humaine est une absolue nécessité. » Même si The Outcast est une chronique de la violence, de l’amour, de la perte et de la souffrance, les parias déboussolés, ces outcasts, sont pour Olga Neuwirth un symbole d’espoir. Comme elle le notait en février 2010, à New York, au moment où elle donnait naissance à l’essentiel de la partition : « Secouer les sens, émouvoir l’âme, tel a été mon objectif en écrivant The Outcast : éveiller les oreilles, les yeux et les pensées au-delà des frontières partout dressées et de nos contraintes économiques. Par le biais de la folie de Moby Dick et de Melville lui-même. » Qu’avec Moby Dick Melville mette en scène l’océan impitoyable comme un « espace oublié » ne manque pas d’ironie amère : au moment de sa mort, en 1891, son roman était complètement tombé dans l’oubli. Dès le départ, les critiques avaient adopté une attitude méprisante vis-à-vis de son œuvre. Lui qui avait pourtant donné naissance à l’un des ouvrages les plus importants de la littérature mondiale, il dut travailler pendant dix-neuf ans comme inspecteur des douanes à cause de son insuccès comme auteur.
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Comme pratiquement aucun écrivain avant lui, dès le milieu du xixe siècle, il ramène dans Moby Dick l’homme à son besoin irrépressible de soumettre, traiter avec mépris, exploiter autrui et conquérir l’espace dans un but économique. Cent cinquante ans plus tard, Olga Neuwirth livre avec The Outcast un plaidoyer insistant contre la xénophobie, contre la peur des autres et de l’inconnu, et aborde des sujets comme la liberté, l’abus de pouvoir, la responsabilité personnelle, ainsi que la surexploitation et la destruction de la nature. Son œuvre étudie les conditions dans lesquelles l’intolérance et la haine prennent des dimensions hystériques et débouchent sur la violence. Le débat sur les racines de la haine et les efforts pour créer une société plus juste ne sont pas moins indispensables aujourd’hui que du vivant de Melville. Et une chose n’a pas changé : la violence appelle la violence. Cela vaut notamment lorsque les détenteurs du pouvoir y font appel pour intimider et tourmenter autrui. Nous sommes alors tous perdants. Tel est le message central de l’œuvre d’Olga Neuwirth. Tom Michelsen (traduction de l’allemand par Daniel Fesquet)
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JEUDI 29 SEPTEMBRE 19:30 MUNICH PRINZREGENTENTHEATER
EXTENSIONS M U LT I P L E S Ensem ble + orchestre Pour sa création pour ensemble et orchestre réunis, Rebecca Saunders s’est appuyée sur une œuvre antérieure, Scar, ou plus précisément sur l’interprétation que l’EIC en a donnée en 2019, s’attachant à élargir les possibilités expressives du matériau originel. Dans une mise en abyme vertigineuse, qui flirte aussi bien avec les limites du silence qu’avec les vacarmes les plus stridents, la plus berlinoise des compositrices britanniques « pèle et déploie » (ses propres mots) un discours dialectique jouant sur les mondes sonores spécifiques et contrastés d’un ensemble et d’un grand orchestre, pour explorer différentes formes de densité, et de mutation du son. En deuxième partie, l’Orchestre de la Suisse Romande fera converser deux œuvres pour orchestre du Suisse Dieter Ammann, compositeur venu des musiques improvisées et du jazz, avec le cryptique Messagesquisse de Pierre Boulez, qui fut aussi son mentor.
ÉCLAIRAGE Nouvelle œuvre, pour ensemble et orchestre par Rebecca Saunders
Pour cette nouvelle œuvre, tout est parti d’une interprétation fabuleuse de ma pièce Scar, au cours d’un concert donné par l’Ensemble intercontemporain en novembre 2019 à Paris. Le concert était quasi extatique ! Déjà en amont, les répétitions avaient été intenses. Cela m’a convaincue de prendre Scar comme point de départ. Comme j’avais vu ces solistes expérimenter sur mes sons, j’ai conservé la même instrumentation. Je connais certains d’entre eux, mais pas de manière intime : c’est leur approche instrumentale, leur virtuosité, leur style de jeu, qui me servent de référence et me permettent d’imaginer ce qu’ils pourront réaliser. Je cherche aujourd’hui, en composant, à étendre, ou à condenser le potentiel sonore et émotionnel de Scar dans une dimension nouvelle. Je cherche à « éplucher la surface », à libérer ce qui est à l’intérieur du corps du son, le potentiel sonore et émotionnel qui serait caché, en attente d’être exploré. En 2016, j’ai composé une pièce intitulée Skin : c’est un mot fantastique, qui signifie « peau », mais aussi le verbe « peler ». Je crois que c’est une image intéressante du processus de composition. Et la pièce Scar (cicatrice, en français) parle précisément de la mémoire de la peau...
Dieter AMMANN BOOST, pour orchestre glut, pour orchestre Pierre BOULEZ Messagesquisse, pour violoncelle solo et six violoncelles, sur le nom de Paul Sacher Rebecca SAUNDERS Nouvelle œuvre, pour ensemble et orchestre Création mondiale Commande Ernst von Siemens Music Foundation, Orchestre de la Suisse Romande, Ensemble intercontemporain, Casa da Música Porto et Radio France
Orchestre de la Suisse Romande Ensemble intercontemporain Jonathan Nott direction Dans le cadre de BR musicaviva Renseignements et réservations br-musica-viva.de
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JEUDI 20 OCTOBRE 20:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
IN SITU Réi nventer l’orchestre Avant le concert, à 18:30 Rencontre avec Philippe Manoury Entrée libre Philippe Manoury fête ses 70 ans sans avoir jamais cessé d’interroger son art : dans In situ, créé à Cologne en 2013, il remet en question la répartition spatiale des instruments de l’orchestre, et met le symphonique sens dessus dessous : il s’agit, dit-il, « de le repenser, en s’éloignant des habituels groupements homogènes par familles d’instruments, ou en disséminant des musiciens dans le public ». L’écriture pour orchestre, l’Américain Charles Ives l’avait réinventée également à sa manière. Faisant suite aux fameux Three Places in New
England, son Orchestral Set No. 2 est un recueil de souvenirs musicaux du compositeur. Quant à Matthias Pintscher et Emmanuel Nunes, ils tournent leurs regards, l’un vers l’œuvre de Jean-Michel Basquiat, dans skull, l’autre vers Goethe, dans La main noire pour deux trios atypiques. Matthias PINTSCHER skull, pour trois trompettes Charles IVES Orchestral Set No. 2, pour orchestre Emmanuel NUNES La main noire, pour trois altos Philippe MANOURY In situ, pour groupe de solistes, orchestre à cordes et huit groupes d’orchestre spatialisés Lucas Lipari-Mayer, Clément Saunier, NN* trompettes John Stulz, Pierre-Pascal Jean*, Éva Garnet* altos Orchestre du Conservatoire de Paris* Ensemble intercontemporain Peter Rundel direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, Philharmonie de Paris Tarif 20 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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MARDI 1 ER NOVEMBRE
LUNDI 7 NOVEMBRE
JEUDI 15 DÉCEMBRE
19:30 BERLIN
20:00 MULHOUSE
20:00 VANVES
PIERRE BOULEZ SAAL
LA FILATURE
THÉÂTRE DE VANVES
SONIC ECLIPSE
NEWBORN
Mé ca n ique céleste
Création hybride
L’EIC se sent désormais comme chez lui à la Pierre Boulez Saal de Berlin. Il revient cette année avec un programme sur lequel semble flotter un sentiment d’éternité et de transcendance. Fruit d’un intense travail d’exploration de l’univers sonore de la harpe avec Valeria Kafelnikov, wohin de Mark Andre fait ainsi référence à un passage de l’Évangile de Jean (3,8) : « Le vent souffle où il veut, et tu en entends le son ; mais tu ne sais d’où il vient [woher er kommt], ni où il va [und wohin er geht] : il en est ainsi de tout homme qui est né de l’Esprit. » L’esthétique du presque rien de Mark Andre n’est pas sans rappeler celle de Helmut Lachenmann. Dans l’énigmatique Mouvement (– vor der Erstarrung), celui-ci utilise son spectaculaire détournement du jeu instrumental pour évoquer « les derniers mouvements réflexes qui agitent le corps avant de se figer dans la mort » : une matière sonore délibérément vierge, dénuée d’expressivité, faite de gestes mécaniques, de palpitations frénétiques et de fractures sonores… Mécanique, encore, mais céleste, cette fois : comme son titre l’indique, Matthias Pintscher s’est inspiré pour son triptyque sonic eclipse d’un phénomène astronomique. Les deux premiers volets présentent les deux astres protagonistes du cycle, incarnés respectivement par la trompette et le cor, et leurs matériaux musicaux propres. Puis les deux se retrouvent, étroitement mêlés dans le dernier volet.
Prenez un pianiste et compositeur de la scène jazz actuelle, musicien curieux en constante recherche de nouvelles expériences. Mettez-le en présence de solistes de l’Ensemble intercontemporain, pour une stimulante session d’improvisation. Puis laissez mijoter, chacun de son côté, non sans remuer de temps à autre. Au bout de quelque temps, une œuvre surprenante jaillira : une partition hybride, pour trio piano/contrebasse/percussions et ensemble, à la structure solidement composée mais au sein de laquelle l’improvisation est reine. C’est NEWBORN, création de Roberto Negro, dont la petite graine a été semée au cours d’une « Intersession » au Triton (Les Lilas) en 2015. Portée par Roberto Negro lui-même, Nicolas Crosse à la contrebasse, et le percussionniste Michele Rabbia, NEWBORN est une expérience originale de hors-piste musical qui sera en outre enrichie d’une création lumière de la scénographe et plasticienne Caty Olive. Roberto NEGRO NEWBORN, pour trio et ensemble Roberto Negro, Michele Rabbia, Nicolas Crosse conception musicale Roberto Negro composition et piano électronique Michele Rabbia percussions, électronique Nicolas Crosse contrebasse, électronique Ensemble intercontemporain Mathieu Pion son Caty Olive lumière
Mark ANDRE wohin, pour harpe et ensemble
Producteur délégué Merci pour le poisson / Full Rhizome Producteur associé Ensemble intercontemporain Coproduction La Filature, Scène nationale de Mulhouse, Maison de la Culture d’Amiens – Pôle européen de création et de production, Château Rouge - Scène conventionnée – Annemasse Ce projet a reçu le soutien de la DRAC Île-de-France, la Sacem, le CNM, l’Adami, la Spedidam.
Helmut LACHENMANN Mouvement (– vor der Erstarrung), pour ensemble Matthias PINTSCHER sonic eclipse : celestial object I, pour trompette et ensemble celestial object II, pour cor et ensemble occultation, pour cor, trompette et ensemble
Roberto Negro est artiste associé de Château Rouge (Annemasse) et de la Maison de la Culture d’Amiens.
Valeria Kafelnikov harpe Clément Saunier trompette Jean-Christophe Vervoitte cor Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction
Renseignements et réservations La Filature, Scène nationale de Mulhouse lafilature.org / 03 89 36 28 28
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Convergences C’est une expérience inédite que nous proposent Roberto Negro et l’Ensemble intercontemporain dans ce nouveau projet en collaboration avec les solistes de l’Ensemble. Une rencontre unique en son genre, entre improvisation et composition, née d’une autre rencontre entre ce musicien de la scène jazz actuelle et Nicolas Crosse, contrebassiste de l’EIC. Ils reviennent pour nous sur la genèse de cette création en forme de hors-piste musical.
Avant toute chose, comment vous êtes-vous rencontrés et comment vous est venue l’idée de travailler ensemble à ce projet ? Roberto Negro : On s’est rencontrés en 2015. Sous l’impulsion du club Le Triton qui depuis des années organise sous l’appellation « Intersessions » des rencontres entre musiciens de jazz et solistes de l’Ensemble intercontemporain, on a monté un projet en grande partie improvisé avec, d’une part, moi-même au piano et Théo Ceccaldi au violon, et de l’autre Nicolas à la contrebasse et Éric-Maria Couturier au violoncelle. Du temps a passé mais j’ai conservé cette expérience dans un coin de la tête et, quelques années plus tard, j’ai recontacté Nicolas pour lui proposer un nouveau projet, en trio cette fois, avec le percussionniste Michele Rabbia, dans lequel le paramètre du son serait central. Nicolas Crosse : Le principe du trio m’a immédiatement séduit mais très vite l’idée qu’on pourrait aller encore plus loin en éclatant les formes s’est imposée. Olivier Leymarie, directeur général de l’EIC, qui connaissait déjà le travail de Roberto et notamment son duo avec Émile Parisien autour de la musique de György Ligeti, a accepté l’idée d’une collaboration entre notre institution et la coopérative Full Rhizome dont fait partie Roberto.
« L’improvisation fait partie de l’hygiène de base d’un musicien et se doit d’entrer de façon quotidienne dans sa pratique. » À l’origine de ce projet il y a donc un trio. Quel type de musique avez-vous expérimenté dans ce cadre qui à un moment a pu vous donner l’envie d’en développer les intuitions dans une formule orchestrale plus étoffée ? RN : On s’est d’abord vus de façon éparse en sessions de travail totalement improvisées qu’on enregistrait pour voir quel type de matériau sonore on pouvait créer et quel type d’impulsions cela pouvait engendrer en matière d’écriture. Quand l’idée d’embrigader d’autres membres de l’Ensemble s’est profilée et que le principe de composer une pièce s’est décidé, j’ai choisi d’écrire pour ce trio initial en projetant le fait que, dans un second temps, j’arrangerais pour l’Ensemble.
Théâtre de Vanves theatre- vanves.fr Renseignements et réservations boulezsaal.de 16
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Roberto, vous êtes connu et reconnu en tant que musicien de la scène jazz : quelle est votre relation à la musique contemporaine ? RN : Un grand nombre de musiciens de ma génération qu’on relie aux mondes du jazz intègrent dans leur musique des éléments de langage issus du domaine contemporain. Ça fait partie de notre culture. Ceci posé je ne me considère d’aucune manière comme un compositeur de musique contemporaine. Ce que je peux apporter de personnel et de différent dans un tel projet, c’est cette pratique qui est au cœur de mon travail de composition et qui consiste à concevoir des architectures qui intègrent le geste de l’improvisation en prenant en compte la personnalité des musiciens qui vont les interpréter. Une étape très importante pour moi dans ce travail s’est déroulée en avril 2021 lorsque j’ai rencontré tous les musiciens de l’EIC intéressés par l’idée de participer au projet. J’ai alors pu mesurer jusqu’où chacun pouvait aller dans l’improvisation.
quelle partition, l’improvisation ça ne s’improvise pas ! Ce sont des années de pratique. Pour que ces deux univers se rencontrent, il faut que chacun fasse un mouvement vers l’autre et multiplier les projets qui vont dans ce sens. Précisément, comment avez-vous abordé l’élaboration de cette œuvre hybride pour jeter concrètement des ponts entre ces deux univers ? RN : Il faut d’abord préciser que si je m’étais retrouvé seul face à l’Ensemble ça n’aurait tout simplement pas été possible ! Par son engagement hyperactif dans le projet et par sa position stratégique, à l’interface entre le trio et l’orchestre, l’apport de Nicolas est fondamental. Ce que j’amène au final aux musiciens est très architecturé. Mais à l’intérieur de ces cadres précisément définis, ce qui va se construire musicalement au moment de la performance va le plus souvent être le fruit de propositions improvisées qui vont être suscitées dans des registres et à des niveaux d’implication différents selon les dispositifs mis en place.
Précisément Nicolas, quelle est votre relation au jazz et à l’improvisation et comment œuvrez-vous au sein de l’institution pour l’ouvrir à ces pratiques ? NC : Personnellement j’ai toujours considéré que l’improvisation fait partie de l’hygiène de base d’un musicien et se doit d’entrer de façon quotidienne dans sa pratique. Mais c’est vrai que l’Ensemble intercontemporain est une institution qui, dans la droite ligne de son fondateur Pierre Boulez, continue de privilégier la partition. Cependant, des individualités au sein de l’Ensemble sont intéressées par l’improvisation et, à travers ce type de projets, ouvrent de nouveaux chantiers et questionnent concrètement la musique contemporaine quant aux orientations qu’elle pourrait prendre à l’avenir.
« La matière sonore induit des déplacements et des changements d’équilibre. » Vous avez écrit avec la contrainte d’une instrumentation qui s’est décidée de façon un peu aléatoire par le choix qu’ont fait les musiciens de l’Ensemble de participer ou non au projet, qui donne un effectif assez « musique contemporaine »… Est-ce que cela a orienté votre écriture ? RN : Je suis passé par mille phases mais bien sûr la matière sonore induit des déplacements et des changements d’équilibre qui parfois peuvent être déroutants. J’ai ressenti à un moment que je m’aventurais trop loin de mes bases et que ce que je proposais ne me ressemblait pas. J’ai donc ramené ce que j’avais écrit vers des territoires plus coutumiers et j’ai beaucoup travaillé la forme dans
Pensez-vous qu’à travers ce type de propositions l’improvisation se voit de nouveau donner une place dans le langage contemporain ? RN : De la même manière qu’on ne devient pas un musicien d’orchestre capable de lire à vue n’importe
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ce va-et-vient. Tout ça a demandé un travail très empirique qui n’est pas forcément dans le quotidien de musiciens plus habitués à rendre les moindres nuances d’une partition qu’à participer concrètement à son élaboration. NC : C’est vrai que composer pour un ensemble comme l’intercontemporain, quand on n’est pas du « sérail », peut être impressionnant. On peut inconsciemment tomber dans des postures d’écriture qui renvoient à certains clichés « contemporains » pour se rassurer ou donner des gages de sa légitimité. Sachant cela, j’ai tout de suite invité Roberto à oublier toutes les références qu’il pouvait avoir en tête. Je voulais simplement que Roberto propose sa musique… Propos recueillis par Stéphane Ollivier
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JEUDI 17 NOVEMBRE
SAMEDI 19 NOVEMBRE
MARDI 22 NOVEMBRE, 13:00
VENDREDI 25 NOVEMBRE
20:00 PARIS
19:30 HUDDERSFIELD
MERCREDI 23 NOVEMBRE, HORAIRE À DÉTERMINER
19:00 PARIS
PHILHARMONIE DE PARIS
TOWN HALL
YORK – UNIVERSITY OF YORK
CONSERVATOIRE DE PARIS – ESPACE MAURICE FLEURET
HUDDERSFIELD CONTEMPORARY M U S I C F E S T I VA L
YORK ACADEMY
ÉMERGENCES I
Tra nsm ission et création
Pépi n ière de ta lents
AMPHITHÉÂTRE – CITÉ DE LA MUSIQUE
VOX ANIMALIS Fa u ne m usica le Dans le cadre d’une semaine de programmation consacrée par la Philharmonie de Paris aux animaux et de l’exposition Musicanimale, les solistes de l’EIC se plongent avec délice dans plusieurs œuvres prenant pour modèle la nature, dans toute sa (bio)diversité. À commencer par les chants d’oiseaux, source d’inspiration inépuisable pour d’innombrables compositeurs, et particulièrement Olivier Messiaen. C’est un autre chant qui inspire George Crumb : un enregistrement de chants de baleines à bosse entendu à la fin des années 1960 donnera naissance à l’un des chefsd’œuvre les plus singuliers du compositeur américain : Vox Balenae, pour trois musiciens… masqués. Pour Mana, André Jolivet s’inspire de six petits objets représentant des animaux, offerts par Edgard Varèse à son départ pour les Amériques. Une commande à la jeune australienne Lisa Illean vient compléter un tableau déjà foisonnant de couleurs et de vie.
Du solo a u g ra nd ensem ble Invité du Huddersfield Contemporary Music Festival, rendez-vous incontournable de la création musicale outre-manche, l’EIC propose un concert tout à son image, alternant pièce soliste, œuvres pour grand ensemble, et création. Au programme : Le Lieu et la formule de Franck Bedrossian qui s’inspire d’un poème de Rimbaud, Soliloquy VII, septième opus des intrigants soliloques instrumentaux de Thomas Simaku, compositeur et professeur de composition à l’université de York, et, last but not least, deux œuvres récentes de la jeune compositrice suédoise Lisa Streich, étoile montante de la nouvelle génération, qui cultive l’art de créer des mondes sonores d’une troublante et délicate poésie.
György LIGETI Galamb Borong – extrait des Études pour piano (Livre II, n° 7)
Depuis de nombreuses années, les solistes de l’EIC mènent un travail pédagogique approfondi avec les étudiants des classes de composition et d’interprétation du Conservatoire de Paris. Une mission au cœur de l’ADN de l’Ensemble depuis sa fondation en 1976. Ce nouveau concert en entrée libre présentera plusieurs créations d’une dizaine de minutes de jeunes compositeurs et compositrices aux origines, parcours et esthétiques très différents. Elles seront interprétées conjointement par les solistes de l’Ensemble et les musiciens et musiciennes étudiant au Conservatoire. L’opportunité, toujours renouvelée et passionnante, de découvrir les créateurs mais aussi les interprètes de demain.
Les solistes de l’EIC posent leurs valises pendant quelques jours dans la petite ville universitaire de York, au nord de l’Angleterre, pour une de ces résidences dont ils sont coutumiers : concerts, ateliers, master classes, lectures de partitions écrites par les étudiant·e·s en composition qui seront créées le 22 novembre. Le tout sous le patronage de Thomas Simaku, compositeur albanais installé à York depuis 1991, dont les solistes interpréteront, le 23 novembre, quelques-unes de ses œuvres les plus récentes, caractéristiques de ses inventions sonores (ou KLANG Inventions, comme il les appelle lui-même) : dans Soliloquy VII, une clarinette virtuose se sert d’un piano comme d’un porte-voix et amplificateur d’effets, tandis qu’ENgREnage, pour violon et piano, part d’un ré pour jouer avec la polysémie multilingue de son titre.
Créations des étudiant·e·s de la classe de composition du Conservatoire de Paris
Frédéric Durieux, Stefano Gervasoni, Gérard Pesson professeurs de composition Département écriture, composition et direction d’orchestre Hae-Sun Kang professeure Artist Diploma – Interprétation / Création
22 novembre Thomas SIMAKU Soliloquy VII, pour clarinette et piano résonnant
André JOLIVET L’Oiseau, La Chèvre, La Vache – extraits de Mana, pour piano
Création mondiale
Lisa ILLEAN Nouvelle œuvre, pour violoncelle et piano
Lisa STREICH Ofelia, pour ensemble et électronique
Lisa STREICH HIMMEL, pour grand ensemble
Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain
Création nationale Commande Ensemble intercontemporain, Ircam-Centre Pompidou, Collegium Novum Zürich
Olivier MESSIAEN Quatuor pour la fin du Temps : III. « Abîme des oiseaux », pour clarinette
Franck BEDROSSIAN Le Lieu et la formule, pour grand ensemble
George CRUMB Vox Balaenae, pour trois joueurs masqués
Créations des jeunes compositeurs et compositrices de la classe de composition de Thomas Simaku
Ensemble intercontemporain Solistes de l’Ensemble Next Oscar Jockel direction
23 novembre Thomas SIMAKU Soliloquy VII, pour clarinette et piano résonnant ENgREnage, pour violon et piano Klang Inventions, pour six interprètes
Coproduction Ensemble intercontemporain, Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris
Pierre BOULEZ Dérive 1, pour six instruments Sonatine, pour flûte et piano
Entrée libre (dans la limite des places disponibles) sur réservation reservation@cnsmdp.fr
Bastien DAVID Riff, pour violoncelle et batterie préparée Création de la nouvelle version
Jérôme Comte clarinette Ensemble intercontemporain François López-Ferrer direction João Svidzinski électronique Ircam
Solistes de l’Ensemble intercontemporain Coproduction Ensemble intercontemporain, Philarmonie de Paris
Renseignements et réservations hcmf.co.uk
Tarif 33 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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Solistes de l’Ensemble intercontemporain Avec le soutien de Diaphonique, fonds francobritannique pour la musique contemporaine en partenariat avec la Sacem, les Amis de l’Institut français du Royaume-Uni, le British Council, l’Institut français, l’Institut français du Royaume-Uni, le Centre National de la Musique, Creative Scotland et la Fondation Salabert.
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DIMANCHE 27 NOVEMBRE
MARDI 6 DÉCEMBRE
10:00 MULHOUSE
19:00 PARIS
LA FILATURE
PHILHARMONIE DE PARIS LE STUDIO – PHILHARMONIE
HARLEKIN
HOMMAGE À BETSY JOLAS
Com me d ia del l’Sto ckha usen
ÔL Ala
Harlekin, c’est évidemment le personnage bien connu de la Commedia dell’arte, que Stockhausen revisite, sous les traits d’un clarinettiste. « Harlekin est à présent un musicien des pieds à la tête, écrit le compositeur. Venu des hauteurs, il descend en spirale et, finalement, livre toute sa mélodie à genoux, très près du public, en lui faisant face ; puis il remonte dans les hauteurs, en spirale à nouveau. Du messager enchanté des rêves naissent successivement le constructeur joueur, le lyrique énamouré, le professeur pédant, le bouffon espiègle, le danseur passionné et finalement l’esprit exalté du derviche tourneur avec ses cris d’oiseaux. » Véritable pièce-spectacle, Harlekin unifie musique et chorégraphie avec un clarinettiste qui se fait aussi danseur et même comédien.
« Ma pensée musicale, dit la compositrice franco-américaine Betsy Jolas, est alimentée par mon expérience quotidienne de la vie et a besoin pour s’incarner de se référer constamment à une double lignée parcourant, d’une part, ma propre production, d’autre part une bonne partie de l’Histoire de la musique considérée à travers mes goûts et ma sensibilité. » Ainsi, pour le bicentenaire de la mort de Haydn en 2009, elle compose un éloquent Ah ! Haydn puis, dans ÔLAla, réunit un quatuor « d’aujourd’hui » (flûte, violon, violoncelle, piano) et un « d’hier » (traverso, violon baroque, viole de gambe, clavecin)… Quant à Anton Webern, elle n’a jamais caché sa fascination pour le compositeur viennois, dont la découverte lui fit l’effet d’un « choc très doux ». Ce concert-hommage sera l’occasion de belles retrouvailles musicales entre les solistes de l’EIC, de l’Orchestre de Paris et des Arts Florissants.
Karlheinz STOCKHAUSEN Harlekin, pour clarinette Martin Adámek clarinette Anna Chirescu mise en espace
Claude DEBUSSY Syrinx, pour flûte
Complément de programme à déterminer
Joseph HAYDN Trio n° 39 en sol majeur pour violon, violoncelle et piano (premier mouvement Andante)
Renseignements et réservations lafilature.org / 03 89 36 28 28
Anton WEBERN Trois Petites Pièces, op. 11 pour violoncelle et piano Betsy JOLAS ÔLAla, pour double quatuor d’aujourd’hui et d’hier Ah ! Haydn, pour piano, violon et violoncelle Musique pour Delphine, pour violon et violoncelle Étude 1, pour flûte Trois études campanaires, pour piano Quatre pièces en marge, pour piano et violoncelle Autour, pour clavecin Roland de LASSUS / Betsy JOLAS Cantiones sine textu Musicien·ne·s de l’Orchestre de Paris Musicien·ne·s des Arts Florissants Solistes de l’Ensemble intercontemporain Tarif 33 €
VENDREDI 9 DÉCEMBRE 20:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
PORTRAIT MANOURY Création a n n iversa i re Suite et fin des célébrations du 70e anniversaire de Philippe Manoury ! Sous la direction de François-Xavier Roth, l’Ensemble intercontemporain conclut en beauté ce parcours dans l’œuvre du compositeur avec la création de ses Grammaires du sonore, composée sur mesure pour ses solistes. Au fil de sa carrière, Philippe Manoury a noué une relation unique avec l’EIC : son Numéro 5 était au programme du premier concert de l’Ensemble en 1976 ! Depuis, ses Fragments pour un portrait, inspirés des méthodes de travail du peintre Francis Bacon, ont été composés avec en tête l’identité de chaque soliste. Concerto pour
ensemble, Grammaires du sonore est l’occasion de renouer avec ces amitiés : chaque soliste peut y briller à la manière d’un concerto grosso. Quant aux Vier Lieder, ils sont extraits de son opéra Kein Licht créé en 2017 d’après un texte de la prix Nobel de littérature Elfriede Jelinek, en réaction à la catastrophe de Fukushima. Philippe MANOURY Grammaires du sonore, pour ensemble Création mondiale / Commande des mécènes Françoise et Jean-Philippe Billarant et de l’Ensemble intercontemporain
Vier Lieder aus Kein Licht pour mezzo-soprano et ensemble Création mondiale
Fragments pour un portrait. Sept pièces pour ensemble de trente musiciens Christina Daletska mezzo-soprano Ensemble intercontemporain François-Xavier Roth direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarif 20 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 Concert enregistré par France Musique
Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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Grammaires du sonore Elle a été créée par Peter Eötvös, directeur musical à l’époque, Emmanuelle Ophèle, Florent Boffard et Pierre-Laurent Aimard. Mais bizarrement, ni Jupiter, ni Pluton, pour piano et électronique, qui lui a immédiatement succédé, n’ont été créés par des musiciens de l’Ensemble. Seul Neptune, pour trois percussions et électronique, a été créé par les trois percussionnistes de l’époque à l’EIC : Daniel Ciampolini, Michel Cerruti et Vincent Bauer. L’arrivée de David Robertson a vu un nouveau projet avec tout l’ensemble, divisé en plusieurs entités : c’était Fragments pour un portrait (1998), qui sera rejouée en décembre. Malgré ce que le titre pourrait suggérer, ce n’est pas un portrait de l’Ensemble : l’idée m’est venue du travail de Francis Bacon, qui ne peignait jamais un portrait, mais toujours des Esquisses ou des Études pour un portrait, traduisant le fait d’approcher une personne ou un visage sous différents angles. Ici, c’était comme aborder une grande pièce sous différentes approches, au fil de sept fragments ayant chacun leur caractère propre. Puis est venue Identités remarquables, dont chaque mouvement s’appuie sur un élément identitaire artistique précis : un perpetuum mobile, un ut aigu (inspiré par le titre d’un tableau de Paul Klee), un autre titre faisant référence à Jackson Pollock, deux accords d’une pièce pour piano de Schönberg, un thème de Thelonious Monk, une mesure du Wozzeck de Berg…
Ultime temps fort des célébrations du 70e anniversaire de Philippe Manoury, l’Ensemble intercontemporain créera, le 9 décembre, une nouvelle œuvre d’envergure du compositeur : Grammaires du sonore. Une création en forme de concerto pour ensemble taillée sur mesure pour les solistes de l’EIC.
À quand remontent vos premiers contacts avec l’Ensemble intercontemporain ? Au tout début ! À ma grande surprise, ma pièce Numéro 5 pour piano et douze instruments, était au programme de son premier concert à Villeurbanne. Je n’ai jamais compris pourquoi. D’ailleurs, j’ai bien vu tout de suite que Pierre Boulez ne l’appréciait pas beaucoup : c’était une partition assez radicale, influencée par Iannis Xenakis. Par la suite, ma collaboration avec l’Ensemble a été assez régulière. Surtout parce que j’ai occupé un moment les fonctions de « directeur de la pédagogie » : je faisais les conférences d’avant concerts, les présentations de concerts au Centre Pompidou et au Musée d’Art Moderne, je proposais aussi des convergences peinture/musique… La première pièce que j’ai composée pour l’Ensemble intercontemporain, et l’Ircam du reste, c’était Zeitlauf, pour les cuivres et les percussions de l’Ensemble et le Groupe Vocal de France, écrite en 1979 et créée l’année suivante. Pour les dix ans de l’Ircam, j’ai reçu une commande pour Jupiter, pour flûte et électronique. La pièce devait être jouée par Lawrence Beauregard, lequel avait travaillé sur la connexion de la flûte avec la machine 4X. C’était la préhistoire du temps réel. Hélas, Larry est décédé prématurément et c’est Pierre-André Valade qui a repris le flambeau. Après Jupiter est venu tout un cycle, qui s’est continué avec La Partition du ciel et de l’enfer (1989), ma première pièce pour l’Ensemble dans son entier, qui réunissait les solistes des volets précédents du cycle : une flûte et deux pianos.
Et quelle est « l’identité musicale » de cette nouvelle œuvre, Grammaires du sonore ? En hommage à l’Ensemble intercontemporain qui, dans l’esprit de Pierre Boulez, est un ensemble de solistes, sans hiérarchie entre eux, l’idée de départ est celle d’un concerto de solistes. C’est-à-dire que chaque musicien s’exprimera à son tour en tant que soliste, soit individuellement soit en petit groupe – à la manière
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du concerto grosso. Grammaires du sonore reprend également une idée déjà effleurée dans Fragments pour un portrait : exception faite des cordes, tous les solistes joueront d’un éventail d’instruments de la même famille que le leur. Ainsi les flûtes jouent de toutes les flûtes, et les trompettes de toutes les trompettes – et même une trompette à deux pavillons pour Clément Saunier. Je me suis aussi intéressé à des instruments méconnus tels le tenortuben (ou tuba wagnérien), que Jens McManama apprécie beaucoup, la trompette basse ou le saxhorn. Cette découverte de l’instrumentarium élargi a d’ailleurs fait l’objet de quelques sessions de travail avec les solistes.
Idem pour les modes de jeu qu’ils ont eux-mêmes développés, en collaboration ou non avec des compositeurs, ou découverts au gré du répertoire… Quand je compose une pièce pour un ensemble comme celui-là, je pense presque physiquement aux musiciens. Je les connais tant, je les admire, ce sont mes amis. Je sais qui va tenir telle partie, je sais à laquelle des deux flûtistes je confie certains passages. Quand je compose pour eux, je pense à eux, exactement comme un scénariste qui écrit son scénario en songeant à un comédien en particulier. Cette question du « lexique sonore » m’amène à la question inévitable : que signifie ce titre de « Grammaires du sonore » ? Cela participe d’une recherche engagée depuis plusieurs années sur ce que j’appelle « grammaire musicale générative », autour du concept de syntaxe musicale. Qu’est-ce qu’une syntaxe musicale ? Imaginez trois éléments – au hasard : un trille, des notes répétées, une figure ascendante. Ces trois unités peuvent se mélanger, se succéder ou se superposer. Il doit donc y avoir une manière de l’écrire. Si on les appelle respectivement A, B et C, je peux écrire différentes formules : A.B.C, pour signifier qu’elles seront successives, ou A/B/C, pour indiquer qu’elles seront simultanées, etc.
Avec tout votre métier, on pourrait croire que vous n’avez plus besoin de ces sessions pour affiner votre écriture instrumentale… Pas pour ces instruments rares, que j’entendais pour certains pour la première fois : il fallait que je connaisse leurs potentialités techniques, leurs timbres et leurs couleurs. Et, pour tout dire, si je maîtrise bien l’écriture des instruments usuels, rencontrer les musiciens n’est jamais inutile puisque ça me permet d’en découvrir les nouvelles possibilités. Depuis Fragments pour un portrait, j’ai par exemple découvert que l’ambitus couvert par les trompettistes de l’Ensemble s’était encore élargi : ça monte encore plus aigu et ça descend encore plus grave !
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À PROPOS DE PHILIPPE MANOURY...
la société. Par exemple, il y a dans Grammaire du sonore un quintette avec piano, comme on en trouve dans le répertoire classique, mais, à droite du quatuor se trouve la contrebasse : on peut donc imaginer que, de temps en temps, c’est le quintette à cordes qui s’exprime, puis le quintette avec piano, mais on peut aussi former un trio piano-contrebasse-percussions, lesquelles ne sont pas loin. Il s’agit de trouver une formule qui me permet de recombiner les instruments, ou les groupes d’instruments de manière évolutive au fil de la partition – jusqu’au tutti. On a ici un trio à cordes, un quatuor à cordes, ainsi qu’un groupe de cuivres au centre, qui pourra s’éclater ensuite (six d’entre eux allant à gauche et à droite du public), un trio d’anches, un trio clarinette basse-flûte-harpe, dont la flûte se déplacera même un moment pour dialoguer avec le quatuor à cordes.
J’élabore ainsi un système, qui me permet de faire des opérations logiques : permutations, superpositions, filtrages, multiplications. Et tout cela me permet en fin de compte de construire des phrases. Pour Grammaires du sonore, j’ai donc d’abord composé du matériau, des idées, notées par exemple au cours de mes sessions de travail avec les musiciens. Idées que j’ai ensuite décrites, de manière formelle pour en préciser le matériau, en le décomposant en petites unités comme celles dont je viens de parler. Ainsi, si je veux évoquer ou rappeler ces séquences au fil de la pièce, je pourrai en reprendre la grammaire, quitte à la modifier un peu, ou en lui ajoutant d’autres éléments. On peut comparer ça à de la sémantique. Quand on répète plusieurs fois une même succession d’événements, même dans des contextes variés, on crée une relation entre eux et ça finit par faire sens. Cependant, le concept de « grammaire » s’entend du point de vue syntaxique, et ne donne pas d’idée quant à l’expression. Une même structure syntaxique peut prendre des caractères variables, selon le tempo, la dynamique : des aspects qui ne sont pas prédéterminés par la grammaire, et restent du domaine de l’intuition. C’est la différence que je fais entre forme et structure : la structure concerne la morphologie des éléments musicaux quand la forme charrie l’expression.
Pourquoi déplacer les musiciens ? D’une part pour recombiner les groupes instrumentaux, comme je le disais à l’instant, mais aussi pour souligner certains aspects de l’écriture. La spatialisation a en effet l’intérêt de clarifier le discours : si, pour un discours contrapuntique, on réunit tous les musiciens dans un même espace (comme dans la fosse de l’opéra de Bayreuth par exemple), tout va se mélanger. Si on les éclate dans l’espace, tout s’éclaire et on entendra parfaitement les lignes individuelles. La spatialisation peut aussi servir à créer des effets. À un moment, je veux un phénomène immersif : deux trios de cuivres se déplaceront pour s’installer de part et d’autre du public, tandis que la clarinette contrebasse et le saxhorn resteront en frontal, créant un triangle pour immerger le public, au centre du dispositif, de sons puissants et massifs. Lorsqu’on place deux musiciens côte à côte et qu’on les fait jouer ensemble, il se crée immédiatement entre eux une relation, aussi du fait de leur proximité géographique.
Aujourd’hui, chaque œuvre contemporaine ou presque vient avec sa disposition spatiale des instrumentistes. C’est un aspect sur lequel vous travaillez beaucoup depuis quelques années, dans vos pièces d’orchestre notamment : comment l’avez-vous pensé ici ? Je veux créer différentes spatialisations, ou différentes mises en espace de l’ensemble, car je lutte contre une certaine standardisation, liée à l’histoire de la musique. Il n’y a aucune raison de penser qu’il n’y a qu’une seule manière de disposer un orchestre ou un ensemble ! Je ne veux pas non plus d’un ensemble de familles homogènes. Certaines fois, les familles sont homogènes. D’autres fois, elles sont recomposées, comme dans
Propos recueillis par Jérémie Szpirglas En relation avec le concert Portrait Manoury, p. 23
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PHILIPPE GRAUVOGEL HAUBOÏSTE
ALAIN BILLARD CLARINETTISTE
Je connais Philippe Manoury depuis plus de quinze ans à présent, et j’ai toujours trouvé en lui un homme charmant, mais surtout un compositeur hors du commun. Encore récemment, j’ai eu la chance et l’honneur qu’il vienne me trouver personnellement pour évoquer ensemble les modes de jeu du hautbois, en vue de la composition de sa nouvelle pièce, Grammaires du sonore, suite à une commande que lui a passée l’Ensemble. Alors que l’on fête ses 70 ans en grande pompe, cet immense compositeur vient ainsi encore nous voir, nous autres musiciens, pour approfondir ses connaissances de l’instrument ! Pourtant, il connaît à l’évidence l’organologie de l’instrument sur le bout des doigts – à peine avais-je mentionné un doigté ou une technique qu’il savait ce qui fonctionne, ce qui est malcommode… À un moment, je lui ai même indiqué un doigté particulier de multiphonique, en lui précisant que je ne pourrais obtenir qu’un son très doux, et avec seulement deux notes – mais cela aussi, il le savait déjà ! Ce qui ne l’empêchait pas de poursuivre son exploration. Un peu plus tard, il m’a carrément soufflé : alors que je lui jouais des multiphoniques particulièrement complexes, il les a immédiatement rejoués au piano afin de s’assurer des différentes notes. Entendre ces sons parfois à la limite de l’audible est très fort. Son aisance est tout à fait étonnante ! Il a également été très curieux d’un instrument dont l’Ensemble intercontemporain a fait l’acquisition récemment : un hautbois baryton. Il a tout de suite aimé et l’a intégré à sa nouvelle pièce…
J’ai rencontré Philippe Manoury avant même d’intégrer l’EIC. C’était en 1993, pendant mes études au CNSMD de Lyon. Philippe y enseignait la composition et l’informatique musicale. En vue d’un concert d’étudiants, il m’a demandé si j’étais prêt à interpréter un trio d’Emmanuel Nunes, pour violon, clarinette basse et flûte octobasse. Le violoniste n’avait jamais joué de musique contemporaine et, au fur et à mesure des répétitions, Philippe s’est proposé de nous diriger pour nous aider. Ensuite, je l’ai recroisé à de nombreuses reprises dans le cadre de l’EIC. Je me souviens que, pour composer Fragments pour un portrait, il m’a appelé pour connaître toutes les possibilités de la clarinette contrebasse. Le professeur est alors devenu l’élève, et vice versa ! Je lui ai montré ce que je savais faire et ce que je ne savais pas faire – et que, demain, peut-être, j’arriverai à faire. Encore aujourd’hui, je continue à lui présenter les nouvelles techniques et les nouveaux sons de mes instruments – même pour Grammaires du sonore. Il y a tant de choses que je sais faire aujourd’hui que je ne savais pas faire voilà à peine quelques années ! C’est tout l’intérêt de notre métier, particulièrement à l’EIC. Compositeurs et interprètes forment des binômes indispensables : ce qui était vrai pour Mozart et Stadler l’est encore aujourd’hui. Le compositeur, seul dans son atelier, ne pourra jamais véritablement éclore.
SAMUEL FAVRE PERCUSSIONNISTE
J’ai de nombreux souvenirs inoubliables liés à Philippe Manoury et à sa musique. Le premier remonte à ma rencontre avec lui, au Centre Acanthes, à Villeneuvelès-Avignon en 1996. J’y assistais en tant que stagiaire, et j’ai pu travailler pour la première fois des extraits de son Livre des Claviers. Fragments pour un portrait, ensuite, une commande de l’EIC que j’ai trouvée absolument extraordinaire et inventive, que ce soit par l’agencement des mouvements, par les sonorités ou par les différents univers qui s’en dégagent : un vrai chef-d’œuvre à mon sens. Et puis bien sûr, Neptune, pour trois percussionnistes et électronique en temps réel, que j’ai joué à trois reprises, à chaque fois à dix ans d’intervalle – ce qui signifie que l’on repart quasiment de zéro. J’ai toujours joué la partie de Vibraphone 1, mais l’expérience était chaque fois différente, surtout dans la relation du jeu instrumental à l’électronique.
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EMMANUELLE OPHÈLE FLÛTISTE
Philippe Manoury est étroitement lié à l’histoire de l’Ensemble intercontemporain et je me sens moi-même liée à lui ! Cela remonte à la première création que j’ai faite de lui, emblématique de ce bonheur musical que l’on vit à l’Ensemble. C’était en 1989, j’étais entrée à l’EIC deux ans auparavant et Philippe m’a proposé de créer la partie de flûte soliste de Partition du Ciel et de l’Enfer. Une première qui se doublait d’une découverte : celle de la flûte MIDI. Je me souviens encore de me tenir sur le podium, et d’admirer les deux autres solistes, les pianistes Florent Boffard et Pierre-Laurent Aimard. Quelques années plus tard, en 1998, nous avons créé Fragments pour un portrait, qui réunit sept pièces géniales écrites spécifiquement pour nous par un compositeur qui nous connaît parfaitement. Nous sommes au complet, 31 musiciens sur scène, et c’est intense voire intensif, mais quel régal ! Et puis encore, en 2020, au plus fort de la pandémie, trois Miniatures pour flûtes, célesta et quatuor à cordes, trois bijoux délicats et furtifs, qui me touchent immensément.
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Olga Neuwirth et Matthias Pintscher
ÉCLAIRAGE Olga Neuwirth : une compositrice sans détours. par Matthias Pintscher
MARDI 13 DÉCEMBRE 20:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
L E E N C A N TA D A S D’î le en î le ave c Olg a Neuwi r th Créé en 2015 pendant les Donaueschinger Musiktage, Le Encantadas o le avventure nel mare delle meraviglie (Le Encantadas ou les aventures en mer des merveilles) d’Olga Neuwirth propose une grande odyssée imaginaire qui nous emmène de Venise aux îles Galápagos. Le titre fait référence au recueil éponyme du grand romancier américain Herman Melville, dans lequel il évoque les Galápagos (Les Îles enchantées). L’idée de l’archipel se traduit ici par une dispersion de l’ensemble en six groupes disséminés dans l’espace. Pour la compositrice, « c’est surtout l’idée de la traversée incertaine d’un archipel
qui est importante : vivre la perception de quelque chose qui pourrait faire partie d’un ensemble, mais qui apparaît dans le même temps comme autonome ». Olga NEUWIRTH Le Encantadas o le avventure nel mare delle meraviglie pour six groupes instrumentaux spatialisés, samples et électronique en temps réel Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Serge Lemouton, Markus Noisternig électronique Ircam Sylvain Cadars diffusion sonore Ircam Coproduction Ensemble intercontemporain, Festival d’Automne à Paris, Philharmonie de Paris En partenariat avec l’Ircam-Centre Pompidou
J’ai tenu à la présence d’Olga, immense compositrice, pour ma dernière saison à la tête de l’Ensemble. Je la considère comme une grande sœur. Ce qui me touche tout particulièrement chez elle, c’est sa force : elle dit la vérité dans sa musique. C’est une compositrice qui n’a jamais voulu faire de détours. Elle est très exigeante et ce pour de bonnes raisons : elle recherche une vérité sonore dans ses œuvres. La musique d’Olga est terriblement vivante, pleine d’élan, d’allégresse : un appel au rêve. Pourtant, elle prend racine dans les catastrophes de notre société, dans un contexte profondément troublé ; elle ne cherche jamais à esquiver la réalité du contexte dans lequel elle écrit. J’ai donc un respect énorme pour son courage artistique. La musique est le miroir des circonstances actuelles de notre temps et Olga fait cela comme peu d’artistes. C’est une musique très précise – Olga est très minutieuse dans les indications qu’elle donne aux musiciens sur ses partitions –, mais qui nous laisse très libre : elle fait confiance aux musiciens, c’est un grand cadeau pour nous ! On peut sculpter sa musique dans l’instant. Nous jouerons donc deux de ses œuvres, qui témoignent de son intérêt pour la littérature et l’acoustique des lieux : les fameuses et labyrinthiques Le Encantadas o le avventure nel mare
Avec le soutien de la Fondation Ernst Von Siemens pour la musique Tarif 20 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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delle meraviglie, pièce de 2015 d’après la nouvelle éponyme d’Herman Melville, créée avec la complicité des ingénieurs de l’Ircam. Grâce à l’électronique en temps réel, elle a voulu simuler l’acoustique et les réverbérations uniques d’un lieu patrimonial vénitien : l’église San Lorenzo, à Venise. C’est d’ailleurs un puissant hommage à Luigi Nono, qui avait créé son Prometheo dans cette même église. Grâce à cette œuvre, le public parisien se trouve transporté… à Venise ! Et puis, en début de saison, The Outcast, une pièce antérieure, de 2012, également inspirée de Herman Melville, du mythique Moby Dick cette fois. Au-delà du voyage, ce sont des œuvres qui nous racontent beaucoup sur nous-mêmes : ce sont deux véritables invitations à l’écoute, à la résonance, à la lenteur. Bref, à l’introspection et au rêve.
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VENDREDI 6 JANVIER, 19:30 SAMEDI 7 JANVIER, 15:00 ET 19:30 DIMANCHE 8 JANVIER, 15:00 PARIS LE CARREAU DU TEMPLE
CLOCKS & CLOUDS Ligeti choré g ra ph ique « Le titre de Concerto, écrivait György Ligeti à propos de son Concerto de chambre, fait allusion au fait que les treize instrumentistes ont tous des parties d’égale importance à jouer. Il n’y a pas d’articulation en soli et tutti comme dans le concerto traditionnel, mais des groupements toujours nouveaux de solistes qui se détachent, la texture polyphonique demeurant toujours très visible. » Bien que purement musicale de nature, cette vision ligetienne a inspiré au chorégraphe Noé Soulier une approche décentralisée d’un ballet à large effectif. À partir de phrases de mouvements précisément écrites,
Les corps en réseau
György LIGETI Sonate pour alto Dix Pièces, pour quintette à vent Concerto de chambre, pour treize instrumentistes
la composition se tisse en temps réel à travers les multiples décisions prises par chaque membre du groupe. Comme l’improvisation spontanée qui permet à des passants de se croiser sur une place, la chorégraphie émerge de ces choix multiples sans être dictée par un modèle imposé au collectif, et souligne les individualités concourant à la construction d’une structure commune sans pour autant s’y fondre.
Depuis 2020, le jeune chorégraphe Noé Soulier dirige le Centre national de danse contemporaine d’Angers. Pour ses élèves et ceux du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, il a conçu Clocks & Clouds, sur un programme d’œuvres de György Ligeti interprétées par les solistes de l’Ensemble intercontemporain.
Noé Soulier chorégraphie Danseur·euse·s, étudiant·e·s de l’école du CndcAngers et du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris John Stulz alto Ensemble intercontemporain Oscar Jockel direction Victor Burel création lumière Dans le cadre du Festival d’Automne à Paris Coproduction Cndc-Angers, Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, Festival d’Automne à Paris Coréalisation Carreau du Temple En partenariat avec l’Ensemble intercontemporain Avec le soutien de Dance Reflections by Van Cleef & Arpels
Clocks & Clouds réunit une quarantaine de danseurs au Carreau du Temple, qui n’est pas une salle de spectacle. Concevez-vous cette création comme un ballet, une performance ? C’est une chorégraphie. Ce qui m’intéressait, c’était de trouver des manières de composer pour un effectif assez important, sans tout chorégraphier. Les danseurs interprètent des phrases chorégraphiques précises, mais quelque chose demeure toujours ouvert.
Tarifs de 8 € à 20 € Renseignements et réservations festival-automne.com / 01 53 45 17 17
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21:00 ROME AUDITORIUM PARCO DELLA MUSICA SALLE SINOPOLI
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LIGETI : CONCERTOS Por tra it concer ta nt
toujours dans l’innovation, et en même temps en dialogue constant avec l’histoire de la musique occidentale. J’ai fait moi-même beaucoup de danse classique avant d’aborder la danse contemporaine, et j’ai traversé pas mal de répertoires différents. J’essaie de digérer ce que j’ai traversé, physiquement, et de voir comment produire quelque chose d’autre avec ça.
Par exemple, deux groupes de danseurs qui exécutent une phrase peuvent choisir leurs parcours dans l’espace. Chaque danseur peut choisir de passer devant ou derrière telle personne comme on pourrait le faire à un carrefour très fréquenté. Dans ce type de situation, on prend tous des micro-décisions très spontanées qui génèrent, pourtant, une sorte d’ordre global, comme dans un banc de poissons.
La mémoire corporelle est importante pour vous ? J’essaie de déclencher des vécus, des impressions diffuses liées au corps. Je tente d’activer la mémoire corporelle des spectateurs comme on pourrait le faire avec la littérature, mais plus violemment, par le mouvement, sans aucune dramaturgie. Les phrases chorégraphiques sont conçues avec des buts pratiques : frapper, éviter, par exemple. On effectue tous au quotidien, sans s’en apercevoir, des mouvements ainsi motivés. Il était important pour moi de désamorcer la reconnaissance de ces buts pour que ces séquences ne soient pas perçues comme du mime. C’est pourquoi les danseurs frappent avec des parties de leurs corps qui ne sont pas destinées à ça, comme la cage thoracique ou la gorge.
Comment composez-vous une chorégraphie si complexe ? Les phrases chorégraphiques préexistaient. Elles ne sont pas nées de mon écoute d’œuvres de Ligeti. Il y en a une quinzaine, mais c’est rare qu’elles soient employées toutes ensemble. Le plus souvent, ce sont quatre ou cinq phrases différentes, et pas toujours traitées dans leur intégralité, qui sont interprétées. On peut permettre aux danseurs d’utiliser une phrase comme une sorte de réservoir de gestes. Ils peuvent aussi entrer dans la phrase à n’importe quel moment, la découper autant qu’ils le veulent. Suivant les règles d’improvisation choisies, et selon le nombre d’interprètes, on peut ainsi imaginer des chorégraphies pour de grands groupes qui sont plus complexes que ce qu’un cerveau humain seul peut imaginer.
Dans votre façon d’écrire cette chorégraphie en laissant au danseur une part de libre arbitre, faut-il lire votre confiance en la liberté ? Oui, mais pas seulement. Bien que différents paramètres, différents ajustements, génèrent de façon fiable un certain type de résultats, comme dans la nature les bancs de poissons ou les vols d’étourneaux qu’on peut modéliser scientifiquement, dans la chorégraphie, c’est différent : on a affaire à des humains, et ça se voit ! Il ne s’agit pas purement d’aléatoire ou de stochastique. Il y a quelque chose de social. Cela m’évoque une conversation, où l’on arrive avec des questions et des idées mais où personne ne sait vraiment sur quoi elle va se conclure. Ou encore tous les réseaux qui tissent notre monde actuel : réseaux d’information, réseaux politiques, économiques… Chacun agit mais a très peu d’impact sur le résultat. Personne n’est capable de prédire où va aller l’ensemble.
Pourquoi avoir appelé cette chorégraphie Clocks & Clouds ? C’est le titre d’une pièce de Ligeti qui n’est pas dans le programme. Le compositeur l’a tiré d’un livre du philosophe Karl Popper, où ce dernier réfléchit à la question du déterminé et de l’indéterminé. Il explique qu’il y a des phénomènes très prévisibles comme le mouvement des horloges ou des planètes, et d’autres très imprévisibles comme la météo. Ligeti reprend cette métaphore. Il a déclaré que sa musique ressemblait, avec sa polyrythmie, à des horloges, et avec les nombreuses polyphonies qui s’entremêlent, plutôt aux nuages. Dans ma chorégraphie je ne cherche pas à illustrer les phases de musique de Ligeti mais plutôt à chercher des principes communs avec ses œuvres. Par ailleurs, son rapport à l’histoire de la musique me touche. Ses compositions sont
La musique de György Ligeti a subi de nombreuses mutations et métamorphoses au fil des ans et chacun de ses quatre concertos est emblématique de la période dans laquelle il s’inscrit. Contemporain de Lux Aeterna et de Lontano, et reposant sur une micropolyphonie qui évoque l’agitation irisée d’un nuage sonore, le Concerto pour violoncelle (1966) remet en question le statut du soliste face à la masse. Quatre ans plus tard, le Kammerkonzert (1970) explore le principe de micropolyphonie jusqu’à son maximum juste avant que Ligeti n’abandonne ce radicalisme pour s’intéresser à nouveau à la mélodie. Réglant au millimètre des mécaniques qu’il prend ensuite un malin plaisir à détraquer, il veut « un certain ordre, mais un ordre un peu désordonné ». Composé près de vingt ans plus tard, le Concerto pour piano présente plutôt un kaléidoscope rythmique, Ligeti s’inspirant des polyrythmies africaines et des géométries fractales. Dans son Concerto pour violon en 1990-92, il réconcilie son écriture concertante avec un certain lyrisme romantique toujours plein de grâce, et plongé dans un contexte sonore « défamiliarisé » par l’harmonie microtonale.
ÉCLAIRAGE Concerto pour violoncelle de György Ligeti par Renaud Déjardin
Beaucoup d’idées reçues circulent sur ce Concerto pour violoncelle de Ligeti : ce serait un « non concerto », « antiromantique ». Des idées fausses selon moi : j’y trouve par exemple des traces d’atmosphères romantiques – Ligeti choisit de commencer sur la même note que les Concertos de Schumann ou Saint-Saëns, les indications « espressivo » sont nombreuses –, et le dialogue concertant est là. Certes, l’écriture est micropolyphonique, et le violoncelle solo est effectivement mêlé de manière étroite à la masse des cordes. Mais c’est lui qui initie ou conclut les « phrases » musicales : l’orchestre amplifie ses gestes, parfois, en les reprenant – le solo finissant alors par être submergé pour s’intégrer au nuage harmonique global – ou, à l’inverse, en laissant le violoncelle sortir du lot pour les conclure. Et puis, bien sûr, il a droit à sa cadence ! Pour moi qui l’interprèterai pour la première fois, la tâche est titanesque. L’enjeu est moins d’en offrir une lecture ou un point de vue stylistique – l’écriture est si précise – que de parvenir à respecter le moindre détail, à atteindre les extrêmes que Ligeti exige, notamment dans les nuances piano et l’exploration des confins du silence. On part de rien – j’entre sur une note tenue qui doit émerger lentement du silence pour atteindre la nuance la plus douce possible – pour revenir au rien.
György LIGETI Concerto pour piano et orchestre Concerto de chambre, pour treize instrumentistes Concerto pour violoncelle et orchestre Concerto pour violon et orchestre Hidéki Nagano piano Renaud Déjardin violoncelle Jeanne-Marie Conquer violon Ensemble intercontemporain Pierre Bleuse direction Renseignements et réservations auditorium.com
Propos recueillis par Axelle Corty 32
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Quelques notes à propos de Déserts
DIMANCHE 22 JANVIER 16:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS GRANDE SALLE PIERRE BOULEZ – PHILHARMONIE
DÉSERTS Mirages sonores C’est Edgard Varèse lui-même qui a eu l’idée d’ajouter une composante cinématographique à son chef-d’œuvre révolutionnaire Déserts : le vidéaste américain Bill Viola a concrétisé ce rêve en 1993, à partir de notes laissées par le compositeur. À sa création au Théâtre des Champs-Élysées en 1954, la musique seule de Déserts suffit à provoquer un scandale retentissant. Qu’en eut-il été si Varèse avait pu déjà l’accompagner d’un film ? Synthétisant la pensée du compositeur, Déserts est une œuvre fondatrice, dissonante et puissante, abstraite et personnelle. Varèse y transpose les théories d’Einstein à l’écriture musicale et la projection sonore, cherchant à rendre une musique comme venant d’une autre dimension, dont
on n’entendrait que la trace laissée dans notre monde restreint à ses trois dimensions. Avec son vaste et intense Jagden und Formen (Chasses et Formes), le compositeur allemand Wolfgang Rihm nous plonge quant à lui dans une œuvre foisonnante, dont la matière musicale est en constante transformation : « Ce qui compte, pour moi, c’est un matériau en mouvement, générateur. Le côté statique d’un point de vue ne m’intéresse presque jamais ». Edgard VARÈSE Déserts, pour vingt musiciens avec interpolations de bande magnétique Film de Bill Viola Wolfgang RIHM Jagden und Formen, pour ensemble Bill Viola vidéo Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarifs 10 € / 15 € / 22 € / 30 € / 37 € / 42 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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Déserts). Jusqu’à sa mort, en 1965, il continuera de modifier ces interpolations. Dans plusieurs interviews, Varèse a déclaré que Déserts incluait des images filmées, pour lesquelles il tenta de susciter l’intérêt de Walt Disney : « L’idée de ce projet est de produire un film d’une conception nouvelle dans sa relation entre les images et le son. (…) Par désert, il faut entendre tous les déserts : déserts de la terre (sable, neige, montagnes), déserts de la mer, déserts du ciel (nébuleuses, galaxies, etc.), et déserts de l’esprit humain. (…) Pour la réalisation de mon projet, la partition sera écrite en premier, puis répétée et enregistrée sur la bande son. (…) La dynamique, la tension, les rythmes (ou plutôt LE RYTHME, élément de stabilité) seront bien entendu calculés avec l’entièreté du film à l’esprit. Le directeur de la photographie se familiarisera avec la partition de manière approfondie. (…) Les images de terre, de ciel et d’eau seront filmées dans les déserts américains : Californie (vallée de la Mort), Nouveau-Mexique, Arizona, Utah, Alaska : déserts de sable, étendues d’eau isolées, solitudes de neige, gorges désertes et escarpées, routes abandonnées, villes-fantômes, etc. Pour les galaxies d’étoiles, les nébuleuses, les montagnes lunaires, on pourrait utiliser des photographies existantes. Caméra : 35 millimètres, noir et blanc, infrarouge, (couleur si c’est souhaitable,) télescopique. L’ensemble doit évoquer un sentiment d’intemporalité, de légende, de fantasmagorie dantesque et apocalyptique. » Tout bien considéré, la proposition que fit Le Corbusier à Varèse, en 1958, de créer, à l’invitation de Philips, un poème électronique à l’aide des derniers équipements technologiques du moment, venait à point nommé.
Participant d’une recherche inlassable « d’instruments qui aient une voix plus conforme à notre époque », Déserts d’Edgard Varèse est le dernier avatar d’une pièce qui en a connu de nombreux, sous les titres successifs de L’Astronome puis The One All Alone, pièce de théâtre musical spectaculaire de science-fiction en 1928, ou encore Espace – dont une Étude, pour deux pianos, percussions et chœur, voit le jour en 1947. Cependant, en 1949, Varèse décide de reprendre ses plans pour Espace et d’incorporer dans une nouvelle œuvre, Déserts, les esquisses réalisées à cet effet. Il en achève les parties instrumentales en 1952. La même année, il reçoit en cadeau un enregistreur à bande, et part à New York faire des enregistrements pour ce qu’il appelle les « interpolations » dans Déserts. Celles-ci peuvent être jouées en alternance avec les parties instrumentales. La première interpolation est déjà achevée lorsque, en 1954, Varèse retourne à Paris à l’invitation du Club d’essai de la radio française afin de terminer (avec l’aide de Pierre Henry) son travail sur les interpolations. Hermann Scherchen en dirige la première exécution à Paris, en 1954, qui suscite de vives réactions. Cette exécution, en 1954, suscite de vives réactions. Ce n’est que lors de la deuxième exécution à Hambourg – dirigée par Bruno Maderna, et à laquelle assiste Karlheinz Stockhausen – que Déserts est reçu favorablement. Initialement, les interpolations étaient enregistrées en mono, mais pour les enregistrements de Déserts que Robert Craft réalise (notamment) en 1960 pour Columbia Records, une version stéréo est créée. En 1965, Varèse donne cette version au compositeur turc İlhan Mimaroğlu, en lui expliquant que les interpolations peuvent également être exécutées en tant qu’œuvre électronique indépendante (tout comme on peut omettre la bande sonore dans
D’après Willem Hering
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VENDREDI 27 JANVIER
SAMEDI 28 JANVIER
LUNDI 30 JANVIER
MARDI 7 FÉVRIER
19:00 PARIS
19:00 SANTA BARBARA
20:00 LOS ANGELES
20:00 PARIS
CONSERVATOIRE DE PARIS – ESPACE MAURICE FLEURET
HAHN HALL
WALT DISNEY CONCERT HALL
MAISON DE LA RADIO – AUDITORIUM
ÉMERGENCES II
LA VILLE SANS JUIFS
Cou p de pha re s u r la jeu ne création
Ci né-concer t dystopique
Le principe des concerts Émergences est simple : mettre en lumière le travail des jeunes compositeurs et compositrices, étudiant·e·s au Conservatoire de Paris. Après un premier concert le 25 novembre, les solistes de l’Ensemble intercontemporain se joindront à nouveau à leurs jeunes collègues musiciens et musiciennes du Conservatoire pour interpréter et révéler au public les créations pour petit ensemble de plusieurs jeunes talents internationaux de la création musicale.
« Je commence par analyser le film, image par image. C’est un travail immense, mais il est très intéressant de voir comment se structure le film dans le détail. Il n’y a pas de réponse simple aux relations complexes entre image et musique. […] Un tel ouvrage représente une responsabilité considérable. » Ainsi Olga Neuwirth décrit-elle sa démarche pour composer sa musique pour la version restaurée de La Ville sans Juifs, film muet réalisé en 1924 par son compatriote Hans Karl Breslauer, adaptation du livre éponyme d’Hugo Bettauer. Car Olga Neuwirth n’est pas seulement compositrice, c’est aussi une personnalité engagée contre les développements des mouvements nationalistes de tous bords politiques. À ce titre, le film est un véritable pamphlet contre l’antisémitisme. Une farce grotesque qui joue avec une drôlerie désespérée des clichés et sidère encore aujourd’hui par sa puissance prémonitoire.
Créations des étudiant·e·s de la classe de composition du Conservatoire de Paris Frédéric Durieux, Stefano Gervasoni, Gérard Pesson professeurs de composition Département écriture, composition et direction d’orchestre Hae-Sun Kang professeure Artist Diploma – Interprétation / Création Solistes de l’Ensemble Next Ensemble intercontemporain Nicolo Foron direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris
Die Stadt ohne Juden Film de Hans Karl BRESLAUER (Autriche, 1924, 80 minutes) Musique d’Olga NEUWIRTH
Entrée libre (dans la limite des places disponibles) sur réservation reservation@cnsmdp.fr
Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Renseignements et réservations Hahn Hall artsandlectures.ucsb.edu Dans le cadre de UC Santa Barbara Arts & Lectures Walt Disney Concert Hall laphil.com
FESTIVAL PRÉSENCES Unsu k Ch i n : jeux de notes et jeux de mots Invitée d’honneur du Festival Présences de Radio France, Unsuk Chin est une familière de l’Ensemble intercontemporain. En deux œuvres emblématiques, il dévoile l’étendue du talent de la compositrice sud-coréenne. Doppelkonzert, véritable manifeste de son génie inimitable de marieuse de timbres, témoigne également de son goût pour les jeux de mots et de formes. Tout comme Cantatrix Sopranica, qui s’inspire de l’ouvrage éponyme de Georges Perec : une parodie de publication scientifique faisant compte rendu d’une série d’expériences de lancers de tomates sur des sopranos. Unsuk Chin y propose une « exploration de l’acte de chanter », comme un chant à propos du… chant. Et comme Présences se veut aussi un festival de création, le programme en comportera deux, très différentes : la première de la jeune Taïwanaise Chia-Ying Lin, repérée par Unsuk Chin en 2019, la seconde de Bastien David, pour ensemble, chœur et métallophone, le nouvel et spectaculaire instrument qu’il a lui-même inventé.
ÉCLAIRAGE Nouvelle œuvre, pour maîtrise, métallophone et ensemble par Bastien David
Cette nouvelle œuvre parlera de l’après Urban Song, pièce qui fut créée lors du concert de clôture du Festival Présences 2020 par l’Ensemble intercontemporain sous la direction de Pierre Bleuse. Elle en reprendra l’effectif de 26 solistes de l’EIC, auxquels s’ajouteront les 54 voix de la Maîtrise de Radio France et Les insectes, compagnie dédiée au métallophone et composée de six percussionnistes : François Vallet, Morgan Laplace Mermoud, Adélaïde Ferrière, Aurélien Gignoux, Élisa Humanes et Maxime Echardour. Au travers ce grand cycle, je parle du temps, du dialogue entre l’indicible et le concret, ainsi que des liens tissés entre les vivants pour affronter le poids du passé et les problématiques à venir. Tel un postlude à Urban Song, qui évoquait l’énergie prédatrice des villes, cette future pièce fera entendre le songe d’un après. Cet éloge au monde sensible mêlera l’abondance des végétations primitives aux vapeurs de rêverie d’un monde fantasmé.
Unsuk CHIN Doppelkonzert, pour piano, percussion et ensemble Cantatrix Sopranica, pour deux sopranos, contre-ténor et ensemble Chia-Ying LIN Nouvelle œuvre, pour ensemble Création mondiale / Commande de l’Ensemble intercontemporain et de Radio France
Bastien DAVID Nouvelle œuvre, pour maîtrise, métallophone et ensemble Création mondiale / Commande de l’Ensemble intercontemporain et de Radio France / Avec le soutien de Covéa Finance
Dimitri Vassilakis piano / Samuel Favre percussions Maîtrise de Radio France / Sofi Jeannin cheffe de chœur Compagnie Les insectes / Neue Vocalsolisten Stuttgart Ensemble intercontemporain / Tito Ceccherini direction Dans le cadre du festival Présences 2023, festival de création musicale de Radio France Tarifs de 7€ à 16 € Réservations maisondelaradioetdelamusique.fr / 01 56 40 15 16 Concert enregistré par France Musique
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L’imagination pour seule contrainte poursuit, dans le domaine musical, le travail ouvert par les littérateurs de l’Oulipo. Le jeu (de mot ou de son) apparaît parfois ouvertement dans ses titres – Akrostichon-Wortspiel (1993), en référence à l’acrostiche (pièce dont les vers sont disposés de telle manière que la lecture des premières lettres de chacun d’eux, effectuée de haut en bas, révèle un nom, une devise, une sentence, en rapport avec l’auteur, le dédicataire, le sujet du poème, etc.). Dans Miroir des Temps pour solistes et orchestre (2001), c’est l’idée – hautement oulipienne – du palindrome qui génère non seulement la forme, mais fournit jusqu’au point de départ de la pièce, en suggérant un regard en arrière sur l’histoire de la musique. Le goût de la compositrice pour la contrainte s’affirme plus encore dans les œuvres où elle a recours à des procédés théâtraux, quelles que soient leurs destinations (la scène ou le concert). Ainsi d’Allegro ma non troppo pour percussion solo et bande (1998), dont le matériau de base est composé de bruits de papiers de soie, de montres, de gouttelettes d’eau et autres percussions, ou de Double Bind? pour violon et électronique (2007). Dans cette dernière pièce, dont le titre évoque une « double contrainte » (une situation paradoxale a priori insoluble), la compositrice se propose d’offrir « un regard fabulé, manipulé, altéré de la relation entre le musicien et l’instrument ainsi que de la vie “ dans les coulisses ” du musicien ». C’est en réalité un jeu d’autoréférentialité et de miroir dans lequel elle se lance, avec une réinterprétation toute musicale de la mise en abyme théâtrale, et un dévoilement des processus en jeu. Cantatrix Sopranica pour deux sopranos, contre-ténor et ensemble (2005) est sans doute l’œuvre la plus emblématique de cette veine d’inspiration ludicoartistique. S’inspirant de l’ouvrage éponyme de Georges
Pour son édition 2023 le festival Présences a choisi de mettre en lumière la compositrice sud-coréenne Unsuk Chin. L’Ensemble intercontemporain ouvrira d’ailleurs le festival avec, notamment au programme, deux de ses œuvres, très différentes : Doppelkonzert et Cantatrix Sopranica. Il faut dire que la compositrice et l’EIC se connaissent bien et depuis plus de trente ans. Un long compagnonnage qui a permis à l’Ensemble de suivre pas à pas son cheminement artistique, jusqu’à devenir cette figure majeure de la scène musicale contemporaine qu’elle est aujourd’hui. Petit aperçu d’une œuvre à tiroirs, toujours surprenante.
L’appréhension de l’œuvre d’Unsuk Chin est un parcours sinueux, que la compositrice a voulu délibérément ludique, semé de pièges et de faux-semblants. Premier piège : sa nationalité. Si elle est née à Séoul, la nationalité sud-coréenne d’Unsuk Chin transparait peu dans sa musique. Autre piège, biographique également : son long apprentissage auprès de György Ligeti. Si l’influence de ce dernier est littéralement palpable dans certaines partitions de Chin – les Études (2003) pour piano par exemple –, la voix de l’élève a peu en commun avec celle du maître. Plus qu’une influence musicale, c’est l’approche de l’écriture ligetiste, sa manière si singulière d’envisager la composition, qu’elle s’approprie, en même temps que de partager avec lui quelques passions constitutives. Parmi lesquelles celle pour les objets mathématiques, qui va de pair avec un goût prononcé pour le jeu. À bien des égards, au moyen de parodies ou d’imitations, de jeux de mots ou de jeux de contraintes, Unsuk Chin
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« Rêve » : c’est sans doute l’un des mots-clefs les plus importants pour pénétrer l’univers d’Unsuk Chin, et l’un des aspects qu’elle travaille le plus assidument. C’est au travers du prisme de l’onirisme qu’il faut comprendre ces titres aux allures à la fois fantasmatiques et mystérieuses – même s’ils sont souvent choisis pour leurs qualités musicales et sonores, et éventuellement pour les jeux de mots qu’ils véhiculent : Fanfare chimérique (2010) ou Fantaisie mécanique (1997). Si l’orchestre est pour elle une « machine à illusion » qu’elle utiliserait comme un potier son tour, sa musique est un reflet de ses rêves. C’est peut-être justement pour susciter ce sentiment constant d’incertitude et d’inattendu des rêves, qu’elle ménage ainsi son œuvre tant de surprises et de fausses pistes, de tours et d’imprévisibles.
Perec, parodie de publication scientifique faisant compte rendu d’une série d’expériences de lancers de tomates sur des sopranos, Unsuk Chin propose quant à elle une « exploration de l’acte de chanter », comme un chant à propos du chant. Bref, de l’autoréflexivité : la musique écrit sur elle-même. Et, comme chez les Oulipiens, la contrainte est pour Unsuk Chin le lieu de la liberté. Dans la rigidité de son cadre, elle laisse s’exprimer une fantaisie souvent imprévisible : c’est dans l’équilibre entre perfection formelle et volubilité ludique qu’Unsuk Chin trouve son ton – un ton dont la légèreté, bien que réelle et intentionnelle, n’est qu’apparente : il ne tient qu’à l’auditeur d’ouvrir les divers tiroirs aménagés ça et là. Eu égard à son goût pour l’autoréférence, l’absurde, les jeux mathématiques et autres jeux de contraintes, on ne s’étonnera pas de l’attirance d’Unsuk Chin pour Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll, qui lui a inspiré un opéra en 2007. Mais c’est moins le « conte » qui l’attire que l’absence d’intrigue (au sens conventionnel du mot), de morale, ou même d’émotion. « Le récit, remarque Unsuk Chin, est une suite de jeux de mots, de situations absurdes et de “ nonsense ”. Leur logique tordue brosse un tableau d’un univers alternatif, régi par des règles physiques différentes des nôtres. Pour moi, Lewis Carroll est le premier surréaliste – dans son œuvre, tout est rêve. »
Par Jérémie Szpirglas En relation avec le concert Présences Unsuk Chin, p. 37
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VENDREDI 10 FÉVRIER
MARDI 14 FÉVRIER
20:00 HAMBOURG
20:00 PARIS
ELBPHILHARMONIE – GROSSER SAAL
PHILHARMONIE DE PARIS LE STUDIO – PHILHARMONIE
PHARMAKEIA
LETTRES INTIMES
Feu sacré et sor ti lè ges sonores
Musique épistola i re Aucun mot ne sera prononcé au cours de ce concert. Le verbe y sera pourtant omniprésent. Selon Peter Eötvös, « les cordes autorisent comme des articulations linguistiques éminemment subtiles », rendant possible ce paradoxe : une musique épistolaire… S’intéressant à la correspondance entre Mozart, père et fils, le compositeur hongrois confie à l’alto le rôle de Wolfgang et au violoncelle celui de Leopold, le second prodiguant conseil au premier, alors que l’essentiel de leurs vies reste de l’ordre du non-dit… « J’y serai seul avec toi. Personne d’autre avec nous », confie Leoš Janáček à Kamila Stöslova, sa muse et amour impossible, à propos de son deuxième quatuor dit « Lettres intimes ». S’écartant de tout modèle préconçu, ce quatuor se veut un miroir de l’imaginaire amoureux du compositeur, reflet des sentiments : de leur nature fluctuante autant que de leur urgence et instantanéité. Un sentiment d’éphémère que l’on retrouve dans les Sept Papillons, pièce en sept courts et intenses mouvements pour violoncelle solo, composée par Kaija Saariaho après son opéra L’Amour de loin.
Pour Matthias Pintscher, le choix du titre de NUR tient autant à la destination de l’œuvre qu’à la sémantique du terme. Absent de la Genèse mais présent dans le reste de L’Ancien Testament, « nur » est un mot hébreu mais aussi arabe qui a le même sens dans les deux langues : le feu. Par extension, « nur », c’est aussi la lumière que le feu produit ainsi que son pouvoir destructeur et purificateur. De même, øáp a ov / phármakon, l’étymologie grecque de Pharmakeia, titre du vaste cycle de James Dillon, est double, signifiant à la fois « remède » et « poison ». Le compositeur écossais nous plonge au cœur du Temenos, le sanctuaire, afin d’y recréer les mystérieux enchantements de la sorcellerie et des arts magiques – et notamment ceux de la magicienne Circé, qui enchanta Ulysse et ses compagnons. Au programme : transmutation, illusion et nécromancie – pour un conte aussi troublant qu’enchanteur. h
Matthias PINTSCHER NUR, pour piano et ensemble James DILLON Pharmakeia, pour seize interprètes
Peter EÖTVÖS Korrespondenz – scènes pour quatuor à cordes Kaija SAARIAHO Sept Papillons, pour violoncelle seul
Dimitri Vassilakis piano Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction
Leoš JANÁČEK Quatuor à cordes n° 2 « Lettres intimes »
Dans le cadre de Elbphilharmonie Visions
Solistes de l’Ensemble intercontemporain Musicien·ne·s de l’Orchestre de Paris
Renseignements et réservations elbphilharmonie.de
Tarif 33 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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L’altérité fertile En songeant aux célébrations du centenaire de György Ligeti, j’ai eu envie d’explorer la manière dont son langage musical a évolué au contact de la musique africaine à partir des années 1980. Son processus compositionnel a été bouleversé en profondeur. Le moteur intime de sa musique a peu à peu intégré des formes polyrythmiques complexes. Et même le travail de l’harmonie (via les modes ou l’accord) s’est transformé, gagnant en complexité polyphonique. Cela est particulièrement audible dans l’œuvre pour piano, comme le Concerto pour piano ou les Études, ainsi que dans le Concerto pour violon et les Nonsense Madrigals. Je crois d’ailleurs que la grande multiplicité des influences dans cette musique figure en bonne place parmi les nombreux facteurs qui la distinguent des autres. C’est un véritable empilement de couches d’influences, dont certaines sont évidentes et d’autres plus subtiles. Les entendre toutes, appréhender et comprendre chacune, exige des centaines d’écoutes extrêmement attentives ! Ce qui n’empêche pas cette musique de toucher l’auditeur directement au cœur, même sans en saisir l’immense complexité. Tout au long de ces réflexions, je me suis dit qu’il serait intéressant, voire poétique, de mettre ces œuvres de Ligeti en perspective avec celles des compositeurs africains qui, à l’intersection avec la musique occidentale de tradition écrite, aspirent eux aussi à adopter ou à styliser des éléments traditionnels africains dans leurs œuvres pour clavier, en particulier pour le piano. Ce concept est connu sous le nom de « pianisme africain », tel que théorisé par le compositeur nigérian Akin Euba dans les années 1960. Un des exemples les plus éloquents est selon moi le concerto pour piano Invisble Self d’Andile Khumalo, qui mêle dans un même geste compositionnel le jeu traditionnel du xylophone africain, les pianismes africains, et les techniques d’écriture spectrale.
L’effet relationnel des influences interculturelles a été un des éléments structurels de l’élaboration de ce programme, en jouant principalement sur les similarités et les divergences de traitement des différentes traditions au fil des œuvres. En fin de compte, tous les compositeurs en présence ont recours à des techniques et des éléments qui leur sont étrangers – voire travaillent une forme artistique qui leur est étrangère. D’une manière ou d’une autre, ici, le concept de « l’altérité » infuse la musique. J’ai finalement le sentiment que le processus compositionnel de Ligeti lui-même a eu en retour une influence sur les autres compositeurs au programme de ce concert. Son inventivité a inspiré toutes les générations qui l’ont suivi, et ce concert nous montre également le rayonnement de Ligeti sur tous les continents, un rayonnement aussi vaste et influent que celui que les musiques traditionnelles africaines ont pu exercer sur l’art musical occidental. En relation avec le concert Ligeti : aux sources du rythme, p. 42
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VENDREDI 3 MARS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
Inf luences croisé es Avant le concert, à 18:30 Clé d’écoute sur György Ligeti Entrée libre Dans les années 1980, György Ligeti puise largement son inspiration dans les musiques traditionnelles africaines et caribéennes. D’où la place prépondérante accordée à la pulsation, parfois multiple et procédant toujours d’une énergie expressive irrésistible, dans son Concerto pour piano (1988) ou ses Études
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György LIGETI Sonate pour alto (extrait : deuxième mouvement) Désordre (extrait des Études pour piano, Livre I, n° 1) Concerto pour piano et orchestre
20:00 PARIS
LIGETI : AUX SOURCES DU RYTHME
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Kevin VOLANS Leaping Dance, pour ensemble de vents Tania LEÓN Rítmicas, pour orchestre de chambre
pour piano. Ces préoccupations se retrouvent dans les œuvres des compositeurs africains et caribéens au programme, toutes présentées en création française. Ainsi du Leaping Dance du Sud-Africain Kevin Volans ou de Talking Drums du Nigérian Joshua Uzoigwe, dont les titres parlent d’eux-mêmes, ou même de l’espiègle The Homeless Wanderer de la compositrice (et religieuse) éthiopienne Emahoy Tsegué-Maryam Guèbrou. Et que dire de Rítmicas de la Cubaine Tania León, basé « sur un spectre rythmique qui génère un arc-en-ciel d’inventions polymétriques ». Enfin, surprenant par ses incessants détours esthétiques, Invisible Self du compositeur sud-africain Andile Khumalo aspire à faire entendre la voix de l’identité multidimensionnelle de la culture africaine contemporaine.
György Ligeti et les musiques traditionnelles d’Afrique
Conlon NANCARROW Study No. 7, arrangée pour ensemble par Ivar Mikhashoff Emahoy Tsegué-Maryam GUÈBROU The Homeless Wanderer, pour piano Joshua UZOIGWE Talking Drums — 1. Ukom, pour piano Andile KHUMALO Invisible Self, pour piano et grand ensemble
La musique populaire d’Afrique fut pour Ligeti une véritable révélation et peut-être la source populaire la plus exploitée à partir du Premier livre d’études pour piano (1985). Le continent africain le fascinait d’ailleurs depuis son enfance, avant même qu’il n’en connût la musique : « Mon intérêt en géographie se concentrait de plus en plus sur l’Afrique. Je commençai à lire beaucoup de livres sur l’Afrique, pas seulement des descriptions de voyages, mais aussi des ouvrages géographiques et ethnographiques. Je ne pouvais pas prévoir que la musique africaine deviendrait, cinquante ans plus tard, une des impulsions majeures pour mes propres compositions.1 »
Hidéki Nagano, Dimitri Vassilakis, Sébastien Vichard pianos John Stulz alto Ensemble intercontemporain Vimbayi Kaziboni direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarifs 20 € / 26 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 Concert enregistré par France Musique
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« J’ai été très impressionné par les chants à penser des Gbáyá, qui sont très simples, mais qui sont pour moi de la très grande musique, à l’égal de celle de Mozart. »
La découverte de la musique elle-même se fit progressivement dans les années 1980. L’intérêt premier de Ligeti se porta sur les polyphonies complexes que l’on y rencontre. De ce fait, les musiques subsahariennes (en particulier d’Afrique centrale) furent préférées aux musiques sahariennes (et sahéliennes) en général plus mélodiques et se mêlant rarement en polyphonie. L’approche des musiques populaires africaines fut toutefois très différente de celle des musiques populaires d’Europe centrale. Alors que l’étude de cette dernière fut une étude « de terrain », Ligeti ne connut la musique africaine qu’à travers les écrits théoriques et les enregistrements. Il n’a jamais voyagé en Afrique, ou seulement en Égypte, mais jamais en tout cas en Afrique subsaharienne. Sur l’ensemble des écrits, nous retiendrons deux ouvrages de référence : d’abord, Musik in Afrika, ouvrage collectif paru en 1983 (soit deux ans avant le Premier livre d’études pour piano) et à propos duquel Ligeti n’hésitait pas à parler de « bible ». Et, Polyphonies et Polyrythmies instrumentales d’Afrique centrale de Simha Arom paru en 1985. L’importance de ce dernier s’est manifestée, compte tenu de sa date de publication, dans les œuvres postérieures à 1985. Outre les écrits, l’ampleur de cette influence ne peut se mesurer qu’à l’écoute de plusieurs enregistrements, notamment ceux réalisés par Simha Arom sur les Pygmées Aka ou encore les collectes de Gerhard Kubik chez les Banda-Linda et celles de Vincent Dehoux pour les Gbáyá. Ces quelques références n’ont pour Ligeti rien d’anecdotique et deviennent peu à peu substrat : « J’ai été très impressionné par les chants à penser des Gbáyá, qui sont très simples, mais qui sont pour moi de la très grande musique, à l’égal de celle de Mozart.2 »
Les « chants à penser » (« gima ta mo » signifie chant/ à penser/chose) des Gbáyá, vivant en République centrafricaine et au sud du Soudan, peuvent en cela faire exception, puisqu’ils ont une fonction plus « autonome » et ne sont pas nécessairement liés à la danse. Ligeti admirait tout particulièrement ce genre musical. Il s’agit d’un répertoire pour voix d’hommes où le chant est accompagné de la sanza (lamellophone de petite taille joué avec les pouces) et parfois de petites percussions tels des hochets (soko) ou des bâtons entrechoqués (gada). Le matériau de base est donc très simple, mais la polyphonie résultante est d’une grande richesse, tirant le meilleur profit du petit nombre d’éléments constitutifs à travers une organisation métrique complexe. Les Pygmées Aka produisent eux aussi une musique dont on comprend aisément qu’elle ait retenu l’attention du compositeur. Ce peuple de la forêt vit au sud-ouest de la République centrafricaine. La polyphonie complexe qu’ils exercent a la particularité d’utiliser le « yode » (technique de chant qui fait alterner très rapidement voix de poitrine et voix de tête), phénomène assez rare sur le continent africain et dont on ne trouve l’équivalent que chez les autres Pygmées de la forêt équatoriale (Bibayak par exemple) ou chez les Khoisans (Bochimans et Hottentos) du désert de l’hémisphère sud (Namibie). Les chants yodelés s’accompagnent souvent eux aussi de percussions. Ligeti fut attiré également par la musique des BandaLinda, eux aussi originaires de République centrafricaine. Comme l’a montré Simha Arom dans sa thèse, leurs orchestres de « trompes » (aérophones de grande taille) présentent une polyrythmie extrêmement dense ; chaque instrumentiste ne produit qu’une seule hauteur
La musique d’Afrique centrale est une tradition orale. Elle n’est théorisée que par les musicologues occidentaux et en aucun cas par ses exécutants. Pour notre tradition écrite de musique savante, cela paraît d’autant plus inconvenant que « ces musiques, transmises oralement, obéissent à des lois parfois fort complexes, mais qui demeurent implicites3 ».
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Simha Arom, György Ligeti et Pierre Laurent Aimard, entourés de l’orchestre de trompes des Banda-Linda et des Pygmées Aka de République centrafricaine. Théâtre du Châtelet, Paris, décembre 1999
de son (ou deux tout au plus), mais l’ensemble peut contenir jusqu’à dix-huit trompes de tailles différentes (donc dix-huit hauteurs différentes). La technique de « hoquet », procédé polyphonique où des silences répartis dans une partie musicale sont comblés par les sons d’une autre partie, est à la base de cette musique. Enfin, une autre des régions musicales d’Afrique qu’affectionnait particulièrement Ligeti est celle aux alentours du lac Victoria, le style des Bantou, à l’exemple des Amadinda de l’ancien royaume du Bouganda (au sud-ouest de l’Ouganda). Leur musique de xylophone (amadinda) est l’une des premières en Afrique à laquelle le compositeur s’est intéressé. Le phénomène d’imbrication de lignes mélodiques équidistantes (en anglais interlocking) exécutées dans un tempo très rapide est une source d’inspiration capitale des Études pour piano. « Les musiciens s’assoient face à face de chaque côté de l’instrument et chaque groupe joue en octaves parallèles l’une des deux mélodies de base. Ces deux mélodies s’imbriquent comme deux roues d’engrenage dans un tempo d’environ 200 pulsations par minute. Le résultat combiné nous donne une suite de patterns et intervalles réguliers se déplaçant à une vitesse vertigineuse (600 pulsations par minute) ; cette suite de patterns se répétera comme une boucle en fonction de la longueur des deux mélodies de base.4 »
Depuis le Premier livre d’études pour piano, on retrouve sur quasiment toutes les esquisses préparatoires les indications « Banda-Linda », « Akav », « Gbáyá » ou autres « Dan » (Côte d’Ivoire et Libéria), ainsi que les techniques qui leurs sont associées, « yodel », « hoquet », etc. Nous n’aurons de cesse de répéter que le compositeur ne reprend « qu’une idée technique empruntée au répertoire des mouvements des Africains, et non la musique elle-même5 ». Sa musique se nourrit de son éclectisme, et s’inspire de très nombreux autres domaines qu’il est impossible de soustraire de façon univoque au résultat final. Extrait de : György Ligeti et la musique populaire de Simon Gallot, préface de György Kurtág, Lyon, éditions Symétrie, 2010. 1. György Ligeti, « Mein Judentum », p. 239. 2. Cité dans Philippe Albèra, Musique en création, Paris : Contrechamps – Festival d’automne à Paris, 1999, p. 88 (« Entretien avec György Ligeti »). 3. Monique Brandily, Introduction aux musiques africaines, collection Musiques du monde, Arles – Paris : Actes Sud – Cité de la musique, 1997, p. 19. 4. Gerhard Kubik. Traduit et cité dans Bouliane, « Six Études pour piano de György Ligeti », p. 107. 5. György Ligeti. Cité dans György Ligeti Edition, disque 3 : Works for piano, Sony Classical, 1997, notice introductive du disque compact SK 62308, p. 25.
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T O U R N É E A U X É TAT S - U N I S
SAMEDI 11 MARS 18:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS LE STUDIO – PHILHARMONIE
Cela fait maintenant plusieurs années que l’EIC se rend régulièrement aux États-Unis, pour d’importantes tournées faisant la part belle à la musique française. Celle-ci mènera l’Ensemble et son directeur musical, Matthias Pintscher (qui réside à New York) de Houston à Miami en passant par New York. Chaque étape sera l’occasion de faire briller les nombreuses facettes de l’Ensemble, avec un riche programme puisant autant dans le répertoire du e siècle que dans des œuvres plus contemporaines. Pour la dernière étape, en Floride, l’Ensemble sera en quelque sorte la guest star du New World Symphony, orchestre fondé voilà plus de trente ans à Miami par le chef Michael Tilson Thomas, et constitué de jeunes instrumentistes. Nos solistes y mèneront un intense programme d’ateliers et de rencontres, pour aller au-devant de ces jeunes interprètes et les faire bénéficier de leur grande connaissance des musiques de création et des classiques du e siècle. Toutes et tous se retrouveront pour une production exceptionnelle Des canyons aux étoiles… d’Olivier Messiaen qui, rappelons-le, fut créée en 1974, pour célébrer le bicentenaire de l’indépendance des États-Unis. Tout un symbole !
TREMPLIN D E L A C R É AT I O N Dé couvri r u ne nouvel le génération de com p ositeu rs Pour cette deuxième édition du « Tremplin de la création », le principe reste le même : faire découvrir pendant toute une journée une nouvelle génération de compositeurs et de compositrices, vingt-neuf au total, venu·e·s des quatre coins du monde. Leurs nouvelles œuvres, d’une dizaine de minutes et spécialement commandées pour l’occasion, seront créées par les différents ensembles et institutions participant à l’événement dont, bien sûr, l’Ensemble intercontemporain qui conclura la manifestation. Des moments de rencontres et d’échanges avec ces jeunes musiciens et musiciennes offriront des respirations aussi passionnantes que bienvenues au cours de cet intense marathon de la création.
JEUDI 23 MARS
VENDREDI 31 MARS
19:30 HOUSTON
21:00 MIAMI
RICE UNIVERSITY SHEPHERD SCHOOL OF MUSIC
NEW WORLD CENTER
STUDE CONCERT HALL
Olga NEUWIRTH Hommage à Klaus Nomi Neuf chansons pour contre-ténor et petit ensemble arrangées par Olga Neuwirth
Arnold SCHÖNBERG Cinq Pièces pour orchestre, op. 16 réduction pour orchestre de chambre du compositeur
Jake Arditti contre-ténor New World Symphony Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction
Pierre BOULEZ Dérive 2, pour onze instruments Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction
Renseignements et réservations nws.edu
Renseignements et réservations dacamera.com
— Nouvelles œuvres pour ensemble de Tom BIERTON, Jaehyuck CHOI, Emmanuelle DA COSTA, Lanqing DING, Manuela GUERRA, Lisa HEUTE, Matt SCHULTHEIS*
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SAMEDI 1 ER AVRIL
SAMEDI 25 MARS
19:30 MIAMI
19:30 NEW YORK
NEW WORLD CENTER
Créations mondiales Commandes de l’Ensemble intercontemporain
CARNEGIE HALL – ZANKEL HALL
Sylvain MARTY Nouvelle œuvre, pour trois ensembles **
Arnold SCHÖNBERG Cinq Pièces pour orchestre, op. 16 réduction pour orchestre de chambre du compositeur
Création mondiale Commande Ensemble intercontemporain, Ensemble Cairn, Ensemble Multilatérale et Philharmonie de Paris
Olivier MESSIAEN Des canyons aux étoiles… pour piano solo, cor, xylorimba, glockenspiel et orchestre Dimitri Vassilakis piano NN cor* NN xylorimba* NN glockenspiel* New World Symphony* Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction
Matthias PINTSCHER sonic eclipse : celestial object I, pour trompette et ensemble celestial object II, pour cor et ensemble occultation, pour cor, trompette et ensemble
Ensemble intercontemporain Toby Thatcher * direction NN** direction
Pierre BOULEZ Dérive 2, pour onze instruments
Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris
Tarif pour l’ensemble des concerts de la journée 20 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
Répétitions et concert Tremplin de la création, Cité de la musique, mars 2022
L’intégralité du programme de la journée (de 10h à 21h) est à consulter sur philharmoniedeparis.fr
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Renseignements et réservations nws.edu
Jean-Christophe Vervoitte cor Clément Saunier trompette Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction
Cette tournée a reçu le soutien du programme Jazz & New Music de la Fondation FACE, en partenariat avec le service culturel de l’Ambassade de France aux États-Unis.
Renseignements et réservations carnegiehall.org
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BIENNALE PIERRE BOULEZ
JEUDI 13 AVRIL
DIMANCHE 16 AVRIL
20:00 PARIS
16:00 PARIS
PHILHARMONIE DE PARIS
PHILHARMONIE DE PARIS
LE STUDIO – PHILHARMONIE
SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
DOMAINES
DÉRIVE
Œuvre ouver te, hom mage et f i l iations
Pierre Bou lez et ses raci nes
Œuvre pour clarinette seule, Domaines est une composition dite « semi-ouverte », l’interprète choisissant librement l’ordre dans lequel il joue les six cahiers « originaux » puis les six cahiers « miroirs ». Créée en 1968, cette pièce avait à l’origine pour titre provisoire « Labyrinthe », soulignant le parcours pour le moins complexe de l’interprète. Plus anciennes, les Notations (1945) témoignent de la radicalité formelle, d’inspiration toute dodécaphonique, du jeune Boulez. Les douze courts mouvements de l’œuvre forment comme un cycle de variations tout en contrastes comme leur titre respectif en atteste : « Fantasque et modéré », « Doux et improvisé » ou encore « Lent-puissant et âpre ». Plus rarement joué, Improvisé – pour le Dr. K. (1969) est un vibrant hommage à Alfred Kalmus, directeur de la branche londonienne d’Universal Edition, l’éditeur historique de Pierre Boulez. En regard de ces trois œuvres, deux trios, pour flûte, alto et harpe : le premier, célèbre, de Claude Debussy dont on connaît l’importance pour Pierre Boulez, et, le second de Peter Eötvös, lequel, en plus d’être une figure majeure de la scène musicale contemporaine, fut aussi directeur musical de l’EIC de 1979 à 1991.
Pour ce deuxième concert de l’Ensemble intercontemporain dans le cadre de la Biennale Pierre Boulez, on remonte aux sources esthétiques du compositeur : la Seconde école de Vienne, ici représentée sous ses formes les plus dramatiques. « Danger imminent, peur, catastrophe » : voilà les quelques mots d’accroche qui ont donné naissance à la Musique d’accompagnement pour une scène de film (1929-30) – un film imaginaire qui, dans l’esprit de Schönberg, était peut-être celui de la vieille Europe courant à sa perte. C’est de cinq « cartes postales » du poète Peter Altenberg qu’Alban Berg tirait quant à lui en 1912 un recueil de Lieder au romantisme revisité et combatif. Le défi que se lance Pierre Boulez est plus ambitieux encore : la poésie de Stéphane Mallarmé lui inspire des « Improvisations » pourtant excessivement écrites et délicatement sensuelles. Une sensualité que l’on retrouve, vertigineuse, dans Dérive 2, sa dernière grande œuvre, toute en variations kaléidoscopiques.
Claude DEBUSSY Deuxième Sonate en trio, pour flûte, alto et harpe
Peter EÖTVÖS Psy, pour flûte en sol, alto et harpe
Yeree Suh soprano Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction
Tarif 33 €
Redécouvrir la musique de Pierre Boulez par Matthias Pintscher
Nous sommes dans une période fort intéressante vis-à-vis de l’œuvre de Pierre Boulez, qui nous a quittés en 2016. C’est plus que jamais le moment de relire, de réétudier ses partitions, de réécouter et redécouvrir sa musique, car il n’est plus là pour en parler avec nous. Les musiciens doivent élaborer une nouvelle mémoire de sa musique, ni plus ni moins. Il ne s’agit pas de proposer un fac-similé, une copie de ce qu’aurait fait ou proposé Pierre mais de rouvrir les partitions pour faire vivre les possibles de l’interprétation. Cette perspective est tout à fait grisante et… c’est précisément ce qu’il souhaitait ! Il m’a d’ailleurs soufflé, quand j’ai pris la direction de l’Ensemble : « Matthias, soyez différent. » Il s’agit de recommencer à zéro – ou presque – comme lorsqu’on s’attaque à un monument tel qu’une symphonie de Brahms. Pour redécouvrir un héritage, le faire vivre, et le présenter au public, il faut impérativement garder un œil neuf. Cette année, pour la Biennale Pierre Boulez, nous privilégions, dans la programmation, les petites formes et les opus chambristes, qui impliquent individuellement les membres de l’EIC : les Notations pour piano, Domaines pour clarinette… J’ai aussi choisi Dérive 2, composé spécialement pour l’Ensemble. Cela peut surprendre, mais ce sera la première fois que je dirige cette grande œuvre ! Les solistes connaissent pour l’instant la partition beaucoup mieux que moi. C’est une page blanche et je dois dire que c’est très excitant de redécouvrir Boulez après dix années passées à la tête de l’Ensemble. Et puis sa musique se transmet naturellement, organiquement, aux jeunes musiciens qui nous rejoignent : elle fait résolument partie de notre ADN !
Alban BERG Altenberg Lieder, op. 4 Arrangement pour soprano et orchestre de chambre d’Emilio Pomàrico Pierre BOULEZ Improvisations sur Mallarmé I & II, pour soprano et ensemble Dérive 2, pour onze instruments
Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris
ÉCLAIRAGE
Arnold SCHÖNBERG Musique d’accompagnement pour une scène de film, op. 34, pour orchestre (Begleitmusik zu einer Lichtspielszene)
Pierre BOULEZ Improvisé – pour le Dr. K., pour piano et quatre instruments Domaines, pour clarinette seule Douze Notations, pour piano
Solistes de l’Ensemble intercontemporain
Matthias Pintscher et Pierre Boulez, Salzburg, janvier 2009
Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarif 20 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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MERCREDI 10 MAI 20:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS LE STUDIO – PHILHARMONIE CONCERT PARTICIPATIF
ÉCLATS DE PERCUSSION L a p ercussion da ns tous ses états Instruments premiers par excellence, les percussions sont l’une des familles les plus riches en potentiel d’inouï pour les compositeurs d’aujourd’hui. Démonstration avec ce vaste programme varié et spectaculaire, qui mêle ludique et virtuosité. Virtuoses, frappants… et frappeurs : tels sont les Éclats de peaux (2021), pièce pour trois percussionnistes et deux grosses caisses d’orchestre de Bruno Giner. C’est au contraire le silence qui prédomine dans Trichromie de Yoshihisa Taïra : celui qui s’installe après la fin de la vibration des instruments, quand la nature reprend ses droits. Une nature que l’on retrouve dans Rain Tree de Tōru Takemitsu, quand les Nagoya Marimbas de Steve Reich installent leurs fascinants déphasages dans la durée…
JEUDI 11 MAI, 20:00 VENDREDI 12 MAI, 20:00 PARIS – PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
Bruno GINER Éclats de peaux, pour trois percussions
PIERROT LUNAIRE / LOST IN DANCE
Thierry DE MEY Musique de tables, pour trois exécutants Tōru TAKEMITSU Rain Tree, pour trois percussions Yoshihisa TAÏRA Trichromie, pour trois percussionnistes
L’a r t de l’épu re
Steve REICH Nagoya Marimbas, pour deux marimbas
Avant le concert du 11 mai, à 18:30 Clé d’écoute sur Saburo Teshigawara Entrée libre
Stéphane Grosjean percussions corporelles, chorégraphie Solistes de l’Ensemble intercontemporain Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarif 33 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
Gilles Durot, Samuel Favre et Aurélien Gignoux
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Cultivant depuis de nombreuses années un art du mouvement épuré et vibrant, à la pointe de la création chorégraphique, le danseur et chorégraphe japonais Saburo Teshigawara retrouve les solistes de l’EIC avec Pierrot lunaire d’Arnold Schönberg et la Suite lyrique, pour quatuor à cordes d’Alban Berg. Revisitant les poèmes du Pierrot lunaire, recueil de poésie du Belge Albert Giraud, Saburo Teshigawara invente un nouveau vocabulaire de gestes
pour répondre au Sprechgesang (parlé-chanté) utilisé par Schönberg dans ce chef-d’œuvre marquant une véritable rupture avec la musique post-romantique. Poursuivant son exploration de la Seconde école de Vienne, Teshigawara s’empare aussi de la Suite lyrique d’Alban Berg. Cette œuvre à la structure labyrinthique donne ici lieu à un corps-à-corps aussi vif que majestueux, faisant affleurer tous les tourments de la passion. Alban BERG Suite lyrique, pour quatuor à cordes Arnold SCHÖNBERG Pierrot lunaire, op. 21 pour voix et cinq musiciens Saburo Teshigawara mise en scène, scénographie, lumières, costumes, danse Rihoko Sato danse Salomé Haller mezzo-soprano Solistes de l’Ensemble intercontemporain Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarifs 20 € / 26 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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Corps résonnants Par essence éphémère, suspendue entre apparition et disparition, cette écriture en mouvement(s) permet à Teshigawara d’exprimer ce que les mots ne peuvent dire. « Je crois en la capacité du corps à nous apprendre des choses que l’on ne soupçonne même pas2 », déclara-t-il dans un entretien. Ayant effectué une apparition très remarquée lors du Concours chorégraphique international de Bagnolet en 1986, Saburo Teshigawara va par la suite affirmer toujours davantage sa singularité au gré de nombreuses créations (solos, duos ou pièces de groupe) accueillies dans le monde entier.
Cultivant depuis trente-cinq ans un art du mouvement sophistiqué et vibrant, le danseur et chorégraphe japonais Saburo Teshigawara présente cette saison un Pierrot lunaire singulièrement revisité avec l’Ensemble intercontemporain. Portrait d’un créateur unique, véritable sculpteur d’une danse de l’âme, épurée et épique.
Après avoir suivi une formation en danse classique et en arts plastiques, Saburo Teshigawara (né en 1953) a démarré son activité chorégraphique au début des années 1980, en participant à des performances diverses et en collaborant avec des vidéastes ou des musiciens. « Ce n’était ni de la danse contemporaine ni du butô. J’étais absorbé par ce qu’on peut découvrir dans son propre corps et par la manière dont on pouvait exprimer ces découvertes. Tout est mouvement dans notre corps, les fluides, le pouls, la respiration. Je pense avoir développé une méthode du langage par le mouvement qui se démarque de la danse.1 » Ce langage va prendre progressivement forme à partir de 1985, année de création de Karas, sa propre compagnie (dont le nom signifie « corbeau » en japonais). Fondée avec Kei Miyata, une danseuse autodidacte qui va devenir sa principale collaboratrice et interprète durant dix ans, la compagnie cherche à susciter « une nouvelle forme de beauté ».
D’une intensité remarquable, ses productions scéniques conjuguent rigueur extrême de la composition et vivacité sensible de l’interprétation, en sollicitant une implication totale des corps en scène, parfois jusqu’à la prise de risques. Ainsi, bien que très sophistiquées sur le plan esthétique, échappent-elles à la vaine virtuosité formelle et traduisentelles une véritable nécessité organique. À la fois danseur et chorégraphe, Teshigawara conçoit également les costumes, les jeux de lumière et les dispositifs scéniques de ses pièces. Il accorde en outre une importance primordiale à la musique et se montre très à l’écoute de la création contemporaine. Parmi ses premières pièces en témoignent notamment Noiject (1992), imaginée avec le mythique (et ultra prolifique) musicien bruitiste japonais Merzbow, et In: side (1996), élaborée avec le collectif expérimental anglais Zoviet France. Depuis le début des années 2000, Teshigawara s’inscrit de plus en plus profondément dans le champ foisonnant de la musique contemporaine. En 2002, il collabore avec le compositeur autrichien Wolfgang Mitterer, pour Oxygen, pièce performative que traversent aussi des fragments d’œuvres de Xenakis. En 2003, sur une commande de l’Opéra de Paris, il crée Air, ballet en quatre tableaux inspirés par quatre pages musicales de John Cage,
De fait, lorsqu’on pense à l’univers de Saburo Teshigawara, le mot « beauté » est celui qui s’impose le premier à l’esprit. Agencées au cordeau, ses pièces ne sont pourtant engoncées dans aucun carcan, esthétique ou autre : les corps respirent pleinement, palpitent profondément, se déplient élégamment et se déploient amplement, sculptant l’espace avec une grâce ardente en un constant va-et-vient de l’ombre à la lumière. Rares sont les chorégraphes qui donnent ainsi autant le sentiment d’écrire avec le(s) corps.
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qui lui permet d’explorer le rapport – fondamental dans son univers – entre l’air et le(s) corp(s). Apparue plus récemment, Landscape (2014) est une frémissante fresque chorégraphique et musicale cosignée avec le pianiste Francesco Tristano, dans laquelle Saburo Teshigawara se meut, tout en grâce et audace, au sein d’une étendue sonore riche en contrastes – des Variations Goldberg à des pièces de Tristano en passant, de nouveau, par John Cage. Au fil de son parcours, le chorégraphe japonais s’attache ainsi à établir des correspondances et des résonances d’une pièce à l’autre, en tissant des liens avec certains compositeurs en particulier. Outre John Cage, on peut citer par exemple Olivier Messiaen, dont on entend le motet O sacrum convivium dans Mirror and Music (2009) – pièce interprétée en duo par Teshigawara et Rihoko Sato, sa partenaire d’élection depuis 1996 – et qui tient une place centrale dans Flexible Silence (2017). Dansée par quatre interprètes (dont Saburo Teshigawara et Rihoko Sato), cette pièce réunit en outre six solistes de l’Ensemble intercontemporain et le sextuor d’ondes Martenot du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris pour confronter la musique d’Olivier Messiaen à celle de Tōru Takemitsu. Empreinte d’une spiritualité vibrante, elle offre une ample méditation sur le dialogue culturel entre Orient et Occident à travers le rapprochement de ces deux grands compositeurs du xxe siècle. Saburo Teshigawara avait auparavant déjà collaboré avec l’Ensemble intercontemporain, en l’occurrence pour Solaris (2015), opéra contemporain dérivant du roman éponyme de Stanislas Lem – déjà adapté au cinéma par Andreï Tarkovski et Steven Soderbergh. Dans un décor stylisé à la Bob Wilson, Teshigawara déploie une mise en scène et une chorégraphie en apesanteur. À la fois
savante et ludique, la partition de Dai Fujikura conjugue voix, ensemble instrumental et électronique avec une belle inventivité. « Le travail de Saburo Teshigawara est ce que je recherche avec ardeur dans le domaine chorégraphique3 », déclarait Matthias Pintscher, directeur musical de l’Ensemble intercontemporain, au moment de la création de Solaris. Le fertile dialogue artistique engagé avec l’EIC se poursuit cette saison via deux autres pièces. Conçues et interprétées par Teshigawara et Rihoko Sato, elles puisent leur matière musicale à la source ô combien stimulante de la Seconde école de Vienne. Intitulée Lost in Dance, la première pièce se fonde sur la Suite lyrique d’Alban Berg. Inspirée au compositeur par sa liaison secrète avec Hanna FuchsRobettin (la sœur de Franz Werfel) et créée à Vienne en 1927, cette œuvre pour quatuor à cordes a été décrite par Theodor W. Adorno comme un « opéra latent ». Elle donne ici lieu à un corps-à-corps aussi vif que majestueux, faisant affleurer tous les tourments de la passion. La seconde pièce porte en scène le Pierrot lunaire (1912) d’Arnold Schönberg. D’une saisissante acuité et d’une frémissante suggestivité, elle confère un relief inédit à l’une des œuvres les plus novatrices du xxe siècle, qui a marqué le début de la rupture avec le système tonal et ouvert un nouvel horizon musical. par Jérôme Provençal 1. Gérard Mannoni, Les grands chorégraphes du e siècle, Paris, Buchet-Chastel, 2015. 2. Rosita Boisseau, « La vibration au bout du pinceau de Saburo Teshigawara », Le Monde, 25 octobre 2017. 3. Brochure de l’Ensemble intercontemporain, saison 2014-2015. 53
VENDREDI 12 MAI
MARDI 23 MAI
20:00 NÎMES
20:00 PARIS
THÉÂTRE – SALLE BERNADETTE LAFONT
PHILHARMONIE DE PARIS LE STUDIO – PHILHARMONIE
T H É ÂT R E ET MUSIQUE
TROIS TEMPS Su ite f ra nça ise
Mettre en scène la m usique On connaît le dicton, « En mai fais ce qu’il te plaît », alors pourquoi ne pas participer à une nouvelle et passionnante aventure pédagogique ! Un projet qui réunit toutes les missions de la matrice de l’EIC : création, transmission et pluridisciplinarité. Organisée par T&M à Nîmes, sous la direction du metteur en scène Antoine Gindt et du chef d’orchestre Léo Warynski, cette Académie internationale de Mise en scène de Théâtre musical réunit une quarantaine de jeunes artistes de toutes les disciplines du spectacle vivant désireux de se former, se perfectionner ou s’instruire sur l’art exigeant de la mise en scène d’œuvres musicales. Venant de douze pays différents, c’est toute une nouvelle génération qui prend le relais de l’histoire sans cesse renouvelée du théâtre et de la musique, épaulée par une équipe de tuteurs dans laquelle les solistes de l’EIC sont aux avant-postes. La deuxième édition de cette académie unique en France, propose de surcroît une dizaine de rendez-vous publics : spectacles, master classes, concerts…
ÉCLAIRAGE par Antoine Gindt
Cette Académie est née l’année dernière pour répondre à un triple objectif, qu’aucune autre académie ne remplissait jusqu’alors. D’abord et avant tout, compléter la formation des jeunes metteur·se·s en scène, qui se trouvent souvent fort démuni·e·s lorsqu’il s’agit d’aborder des œuvres musicales, a fortiori contemporaines. Ensuite, transmettre un certain nombre d’ouvrages de référence à une nouvelle génération d’interprètes, de compositeurs, de dramaturges, de metteurs en scène – bref tous les métiers du spectacle – et leur redonner leur juste place dans l’histoire de la musique. Enfin, confronter tout ce travail à la fois pédagogique et artistique avec un public, celui de Nîmes, où se développe l’Académie, mais aussi de nombreux professionnels qui échangeront avec les participants. Cette deuxième édition, comme la première, s’organise donc autour d’un ouvrage de référence du début xxe siècle (l’Opéra de quat’sous de Kurt Weill) et d’un programme intitulé « Aventures du Roi fou » qui réunit deux œuvres emblématiques du théâtre musical contemporain : Aventures et Nouvelles Aventures de Ligeti, dont on célèbre le centenaire, et Eight Songs for a Mad King de Peter Maxwell Davies. Dmitri Kourliandski sera en outre compositeur associé à l’Académie, pour permettre à des jeunes compositeurs de se familiariser avec les ressorts du montage de telles œuvres… Enfin, nous voulons offrir aux participants les meilleurs outils possibles pour leurs réalisations, afin que l’on puisse les juger principalement sur leur geste de mise en scène. D’où l’importance de faire appel aux solistes de l’EIC afin de garantir l’excellence du niveau musical et de l’engagement.
György LIGETI Aventures et Nouvelles Aventures pour trois voix et ensemble Peter MAXWELL DAVIES Eight Songs for a Mad King pour baryton et ensemble NN soprano Laura Müller mezzo-soprano Ivan Ludlow baryton Ensemble intercontemporain Léo Warynski direction Équipe sélectionnée pour l’Académie 2023 mise en scène Production T&M Nîmes/Occitanie-Académie internationale de Mise en scène de Théâtre musical, en partenariat avec le Théâtre de Nîmes et l’Ensemble intercontemporain Renseignements et réservations theatredenimes.com
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Dès ses premiers récitals de piano, Camille Saint-Saëns portait en lui un goût de la musique ancienne. Vers la fin de sa vie, comme une consécration, il travaille à l’édition des œuvres de Jean-Philippe Rameau. Répondant au besoin de s’émanciper de la musique allemande, Saint-Saëns trouve dans la musique de Rameau une source inépuisable de richesses et de beautés. Dans son Septuor pour trompette, cordes et piano, il associe les couleurs claires de la musique française avec un piano évoquant Franz Liszt. La création pour quatuor à cordes et piano de la compositrice française Florence Baschet apportera le contrepoint contemporain au concert. Il y sera question « d’énergie, de vibration et même d’irréversibilité du temps ».
ÉCLAIRAGE Si par un jour… par Florence Baschet
Le titre Si par un jour… s’inspire de celui d’Italo Calvino, Se una notte d’inverno un viaggiatore, traduit en français par Si par une nuit d’hiver un voyageur. Tout au long des dix incipits du texte de Calvino, les récits sont brusquement interrompus, comme des voyages inachevés ; le lecteur est alors immédiatement embarqué dans une autre narration, une nouvelle itinérance. Ce que je veux retenir ici, c’est le désir de l’idée du voyage comme métaphore du voyage lui-même, qu’il soit le début d’un périple, source de péripéties imprévisibles, ou bien préliminaire d’un déplacement effectué dans les limites d’un espace restreint. J’ai entendu en moi cette musique pendant le confinement imposé au printemps 2020. En espace confiné, l’énergie se conserve sans déperdition : les physiciens disent que l’énergie est ségréguée, donc a priori ordonnée. Dans cette nouvelle œuvre, je voulais que les cinq instruments suivent le fil d’une trame tendue par la dramaturgie où la pensée musicale s’entendrait comme vibration, ou comme énergie, tantôt ségréguée, tantôt dispersée. Qui dit confinement, dit espace clos : c’est de cet espace clos que je veux entendre une vibration sonore qui traverserait des « lieux », des « topos », des espaces de temps se divisant ou se multipliant, retenant ou libérant une énergie qui, elle, ne cherche qu’à se disperser – altération impalpable et surprenante de l’énergie sonore dans l’espace et le temps.
Jean-Philippe RAMEAU Pièces de clavecin en concerts (extraits) Camille SAINT-SAËNS Septuor en mi bémol majeur op. 65 pour trompette, deux violons, alto, violoncelle, contrebasse et piano Florence BASCHET Si par un jour…, pour quatuor à cordes et piano Création mondiale Commande Ensemble intercontemporain, Orchestre de Paris et Philharmonie de Paris
Solistes de l’Ensemble intercontemporain Musicien·ne·s de l’Orchestre de Paris Musicien·ne·s des Arts Florissants Tarif 33 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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ÉCLAIRAGE Mark Andre : quelque chose de l’ordre du sacré… par Matthias Pintscher
Si Olga Neuwirth est ma grande sœur, Mark Andre est mon grand frère. Nous sommes amis depuis quinze ans et j’admire sa musique très délicate, organique : elle vibre, bruisse, respire ! Mark a d’ailleurs étudié auprès de Helmut Lachenmann, en Allemagne. Cela n’a jamais manqué : chacun des ensembles ou des orchestres symphoniques auxquels j’ai présenté sa musique a tout de suite été marqué par sa présence, son art des sonorités, son humanité. Mark fait partie de ces compositeurs qui sont sûrs de leurs idées, mais qui laissent une belle souplesse aux interprètes : il nous fait confiance pour sculpter le son. Diriger ses œuvres reste l’une des plus fortes expériences de ma vie de musicien. D’ailleurs, le mot « diriger » n’est pas correct. Je dirais donc « mettre en mouvement ». À chaque fois que je me mets en mouvement avec la musique de Mark, il émane quelque chose de l’ordre du sacré, du divin. Cette musique nous propulse dans un contexte qui nous dépasse, elle donne accès à une forme de transcendance. Nous créerons, le 9 juin, la nouvelle œuvre que nous lui avons commandée. Pour cette création avec électronique, je lui ai laissé carte blanche : seul impératif, composer pour grand ensemble bien sûr !
VENDREDI 9 JUIN 20:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
Kaija SAARIAHO Lichtbogen, pour neuf instrumentistes et électronique en temps réel Mark ANDRE woher, pour ensemble et électronique
UN SOUFFLE DE LUMIÈRE Du premier au dernier souffle Avant le concert, à 18:30 Rencontre avec Mark Andre Entrée libre De la fugacité des pièces d’Anton Webern aux aurores boréales qui ont inspiré Lichtbogen de Kaija Saariaho, un sentiment spectral se dégage de ce programme. Sentiment renforcé par la recherche des manifestations les plus éphémères et mystérieuses du souffle de Mark Andre dans sa nouvelle œuvre, woher. Venant après wohin destiné à la harpe de Valeria
Création mondiale Commande Ensemble intercontemporain, Ircam-Centre Pompidou
Anton WEBERN Cinq Pièces, op. 10, pour orchestre
Kafelnikov et à l’Ensemble, woher fait appel à l’électronique pour creuser plus encore cette notion de souffle, dans tous les sens du terme, y compris celui spirituel de l’Évangile selon Jean dans une esthétique de la disparition. Quatre chants pour franchir le seuil, enfin, a tout d’une œuvre testament, même si elle n’a pas été conçue comme telle : c’est la dernière œuvre achevée de Gérard Grisey, avant sa tragique disparition en 1998. S’inspirant du Livre des morts égyptien, il y compose involontairement son propre Requiem, le seuil dont il est question étant celui qui sépare la vie du trépas…
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Gérard GRISEY Quatre Chants pour franchir le seuil pour voix de soprano et quinze musiciens Sophia Burgos soprano Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Carlo Laurenzi électronique Ircam Éric Soyer lumière Coproduction Ensemble intercontemporain, Ircam-Centre Pompidou, Philharmonie de Paris Dans le cadre de ManiFeste-2023, festival de l’Ircam Tarifs 20 € / 26 € Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 Concert enregistré par France Musique
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Poète du souffle disparu qui déploie des espaces compositionnels intermédiaires, des éléments en état de disparition. On retrouve cette idée dans l’Évangile : à Pâques, dans l’épisode des disciples d’Emmaüs, le disparu est ressuscité et le ressuscité est disparu...
En juin 2023, l’Ensemble intercontemporain, dirigé par Matthias Pintscher, créera woher, de Mark Andre. C’est l’aboutissement d’une collaboration au long cours entre les solistes, le chef et le compositeur, fasciné par les phénomènes d’instabilité et de disparition.
N’y a-t-il pas un paradoxe à faire appel à l’électronique pour amplifier la disparition du son ? C’est une électronique en extrême introversion. Comme chez Schumann, dans la dernière pièce des Kinderszenen, « Der Dichter spricht », où le compositeur combine de multiples points d’orgue et l’indication de ritardando, ce qui crée une déstabilisation du marquage métrique. La disparition n’est pas négative ou psychologique, c’est une typologie de l’instabilité – Dieter Schnebel parle d’« entretemps incertain » à propos d’un lied de l’opus 24 du même Schumann.
À propos de votre pièce wohin, créée en 2021, vous évoquiez la traduction allemande d’un passage de l’Évangile selon Jean (3,8) : « Le vent souffle où il veut, et tu en entends le son ; mais tu ne sais d’où il vient [woher er kommt], ni où il va [und wohin er geht] : il en est ainsi de tout homme qui est né de l’Esprit. » Votre nouvelle pièce, woher, pour ensemble et électronique, que l’Ensemble intercontemporain créera en juin 2023, prend-elle sa source dans ce même passage de l’Évangile ? Cela renvoie à la même péricope, qui évoque le vent et l’esprit. J’y vois une dimension transcendantale et poétique. Si j’en crois les spécialistes en théologie, c’est lié au mot araméen ru’ach, qui évoque la respiration, le vent, le souffle, donc l’esprit. Cela fait écho pour un compositeur, pas seulement pour la dimension spirituelle, mais en pensant au phénomène de la respiration, et au son du vent : est-il stable ou instable ?
En quoi consisteront les séances de travail à l’Ircam ? Je viens avec des fragments, presque des monades, et je demande aux solistes de l’EIC d’apporter des sons contrôlés, virtuoses, mais qui déploient le plus possible d’instabilité et de fragilité. Je pense par exemple, pour les vents, à des passages très lents, comme des effets de loupe, entre des sons ordinaires et des multiphoniques. Nous allons enregistrer et analyser les sons avec le programme d’intelligence artificielle Orchidea, qui propose une sorte d’automatisation de l’orchestration – ce qui me fascine et m’inquiète en même temps ! Je prépare aussi de mon côté des fichiers, notamment des enregistrements concrets de vent, réalisés en Israël, dans le désert entre Jérusalem et la mer Morte. Et je peux compter sur le réalisateur en informatique musicale, Carlo Laurenzi, pour des questions d’ingénierie, le choix des micros, la finalisation des patchs Max, et bien d’autres choses.
Où en êtes-vous du travail de composition ? J’en suis encore au début – nous commencerons vraiment le travail en septembre à l’Ircam. La formation sera la même que pour wohin, avec, en sus, des plaques-tonnerre. J’utiliserai des transducteurs sur les percussions, sur la contrebasse, le violoncelle, le piano, pour sonoriser ces instruments. De sorte qu’en dernière instance ce sont les instruments acoustiques qui résonneront dans cette musique avec électronique. J’aime l’idée d’une musique
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Au programme de ce concert, figurent aussi l’opus 10 de Webern, les Quatre chants pour franchir le seuil de Gérard Grisey, qui a été votre professeur, et Lichtbogen de Kaija Saariaho. Quels liens pourriezvous tisser entre ces univers et le vôtre ? L’opus 10 de Webern fait partie de ce corpus extraordinaire, entre 1910 et 1914, de l’opus 7 à l’opus 11, où l’on constate une décorrélation entre le temps réel et les couches de temps compositionnel, longues et denses ! C’est une idée de la courbure de l’espace-temps, assez proche de ce que j’évoquais chez Schumann. Ce qui m’a marqué chez Gérard Grisey, c’est son obsession de la forme, entre le matériau et son déploiement. Je suis très sensible au traitement vocal audacieux, expressif, presque extraverti des Quatre chants pour franchir le seuil. Quant à Kaija Saariaho, j’ai beaucoup d’admiration pour son parcours, pour la finesse de sa musique, et sa grande précision dans son rapport au son.
de Varèse, les Notations de Boulez et ma pièce ...auf... 2. Je suis honoré de sa confiance et de sa fidélité, et j’admire ses dons multiples de compositeur, de chef et de pédagogue. Nous sommes différents, mais nous avons en commun des préoccupations spirituelles. Je lui ai proposé d’enregistrer, dans sa voix murmurée, des fragments de textes du Tanakh, de l’Ancien Testament. J’ai aussi demandé aux solistes de l’Ensemble d’expirer et d’inspirer, pour inclure leur respiration dans la pièce, comme des cartes d’identité sonore. Toutes ces années de collaboration avec Matthias et l’Ensemble ont profondément marqué ma vie, et ma musique. Propos recueillis par Arnaud Merlin
Vous avez collaboré régulièrement avec l’Ensemble intercontemporain depuis une dizaine d’années. Quelle relation entretenez-vous avec son directeur musical Matthias Pintscher ? Matthias et moi sommes très liés depuis une quinzaine d’années. Nous nous sommes rencontrés lors d’une tournée orchestrale sous la direction de Pierre Boulez, avec au programme Towards Osiris de Matthias, Amériques
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JEUDI 22 JUIN SAMEDI 24 JUIN HORAIRES À DÉTERMINER BILBAO TEATRO ARRIAGA
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Op éra de la pa role En 1968, Pasolini publie son « manifeste pour un nouveau théâtre », défini par sa totale opposition au théâtre de « bavardage » naturaliste et au « théâtre du geste et du cri ». Le premier serait une sorte de miroir de la bourgeoisie qui s’écoute tandis que le deuxième, dans lequel on pourrait placer une certaine avant-garde, crée le scandale dans le but de satisfaire les fausses prétentions anti-bourgeoises au sein même de la bourgeoisie. Le « théâtre de parole » vise en revanche à « racheter le langage et l’oppression qu’il véhicule par une parole qui passe par le corps et sa vérité ». Un principe qu’il appliquera pleinement dans Orgia, pièce de théâtre choc, la seule que Pasolini mettra en scène, en 1968 à Turin. En six épisodes d’un rituel sadomasochiste glacé et glaçant avec la mort pour seule issue, se dévoile en creux le tableau, sombre, d’une société décadente et mortifère. Ce monstrueux huis clos accompagne depuis plusieurs années le compositeur catalan Hèctor Parra, qui lui a déjà consacré son quatrième quatuor à cordes en 2020. Il l’a également choisi pour ce nouvel opéra de chambre, dans lequel le compositeur explore les « limites de la voix chantée, où cohabitent des vocalités quasiment opposées », afin d’approcher de l’idéal pasolinien.
ÉCLAIRAGE Orgia d’Hèctor Parra par Pierre Bleuse
C’est avec grand enthousiasme que j’ai accepté la proposition de diriger Orgia, le nouvel opéra d’Hèctor Parra d’après Pasolini. C’est exactement le genre de projets qui dépasse les bornes du musical (l’opéra, évidemment, mais aussi le ballet ou le cinéma) ; l’opéra est un genre fabuleux, qui permet de croiser les arts et les univers. Je pense souvent au creuset créatif du début du xxe siècle, à la dynamique qu’a impulsée un Diaghilev à Paris, avec ses Ballets russes, ou à l’effervescence novatrice viennoise à la même époque : tous ces artistes, de toutes les disciplines, étaient connectés, ils conversaient et partageaient leurs idées. Le siècle qui a suivi a été celui d’un approfondissement de chaque discipline, mais plutôt chacune de son côté, et je crois qu’est revenu aujourd’hui le temps de la convergence. Non seulement pour des projets interdisciplinaires, mais parce que cette mise en commun permet d’ouvrir de nouveaux horizons dans chaque discipline en particulier – et donc un enrichissement de tous les projets, même purement musicaux. L’un des grands enjeux pour la musique d’aujourd’hui est d’encourager plus de compositeurs à s’emparer de la voix. Car l’écriture vocale se travaille bien différemment de l’écriture instrumentale, et les occasions ne sont pas si nombreuses pour l’expérimenter. L’opéra peut ainsi permettre d’aller chercher d’autres formes de vocalité, d’autres expressions de l’émotion.
Hèctor PARRA Orgia, opéra de chambre pour trois chanteurs et ensemble instrumental Création mondiale
Jone Martínez, Aušrinė Stundytė sopranos Leigh Melrose baryton Calixto Bieito mise en scène Ensemble intercontemporain Pierre Bleuse direction Renseignements et réservations teatroarriaga.eus
Orgia : un lyrisme exacerbé C’est à l’Ensemble intercontemporain, qui a déjà assuré la création de deux de ses six opéras précédents, qu’Hèctor Parra a confié celle de son septième : Orgia. Le compositeur catalan s’empare pour l’occasion d’une sombre tragédie de Pier Paolo Pasolini, qui représentait pour ce dernier un nouveau « théâtre de parole ».
Orgia vous occupe l’esprit depuis longtemps. La tragédie vous a inspiré deux pages instrumentales. Avec Orgia–irrisorio alito d’aria1, vous associez un ensemble baroque à un autre, spécialisé dans la création, et manipulez une référence à la JohannesPassion 2. Est-ce écho à « je suis une force du passé 3 » ? Le recueil4 d’où vient ce vers est là, avec le voyage dans le passé (Orgia, Épisodes 1 et 3), régression à un âge préindustriel où l’on était proche de la nature et d’une certaine vérité. L’architecture symétrique de la Saint-Jean me fascine. Orgia est structurellement proche de l’Évangile selon Jean, concentré sur la force de la foi, sans sermon. De même que la rage de Pasolini est énergie christique, le pendu du Prologue est figure christique. À la dernière minute de sa vie, ayant pris conscience de sa différence, il accomplit, habillé en femme, l’acte le plus puissant pour dénoncer son drame : son suicide accusateur pointe une société pleine d’incompréhension, d’hypocrisie, de cruauté et de mépris pour tout type de minorité. Attendant de concevoir l’opéra, j’obéis au désir impérieux de composer à partir de l’Épisode 4 d’Orgia avec le quatuor à cordes Un concertino di angeli.5
Plus que les voix des personnages, c’est la poésie qu’incarnent le chant et la métaphore opérée par la situation dramatique. Quelle vocalité pour Orgia ? Pasolini s’inspire beaucoup du théâtre grec où l’essentiel, par-delà masques et musique, est la poésie. La difficulté est de réaliser un lyrisme parallèle à cette beauté d’un texte dont on ne peut tout garder. Les personnages sont des figures mythologiques en évolution constante – on pense à Médée pour la Femme, à Saturne pour l’Homme. Le Prologue sera déclamé, avec un orchestre dense. Le lyrisme s’imposera dès après. Le soprano Aušrinė Stundytė et le baryton Leigh Melrose, deux grandes voix, peuvent tout faire : cette qualité d’engagement total est nécessaire. Les dialogues seront prestes, l’action étant dans le texte. La vocalité de la nostalgie sera monteverdienne, avec l’archiluth.
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Orgia est écrit en vers libres. Qu’est-ce que cela implique pour vous ? C’est un cadeau qui me dicte le rythme ! Le poids placé sur certains mots est musical. Il faut le suivre, c’est tout. Ce sera rapide. La lenteur, artificielle et laborieuse, de certains opéras d’aujourd’hui ne me plaît pas.
Dans le Prologue, le pendu s’adresse au public qui, dès lors, connaît l’issue de la pièce. Cela fait d’Orgia un conte, comme La mort i la primavera de Mercè Rodoreda qui vous a récemment inspiré…7 J’aime beaucoup les contes. Tellement cruels, ils parlent de réalité, au plus profond de nous. Tous évoquent la faiblesse humaine. Ceux de Rodoreda sont parmi les plus beaux. La brutalité des contes leur confère une aura d’irréalité : cette dialectique entre le fait qu’ils disent le réel sur le mode irréel crée un espace pour la musique. Le ritornello final d’Orgia est une formule rituelle issue du conte.
Dans son Manifesto 6, Pasolini revendique un théâtre de parole, aux ambitions scéniques minimales, un texte proféré comme une partition poétique. Qu’est-ce que cela implique pour le compositeur ? Avec une langue si riche, parfaitement ciselée, la vocalité est un défi. Des six tragédies, Orgia est la plus évidente à porter à l’opéra, parce qu’elle pousse la langue jusqu’au bout. Dérangeante, critique, politique, elle est écrite dans une poésie absolue. Entre tendresse et violence, la dialectique est sensible : peut-être est-ce la voix de Pasolini, si douce, proférant des propos forts, désagréables, provoquants.
Propos recueillis par Bertrand Bolognesi 1. Hèctor Parra, Orgia-irrisorio alito d’aria pour ensemble et orchestre baroque, 2017 ; création par Musikfabrik et Concerto Köln, en 2018 à Cologne. 2. Johann Sebastian Bach, Passio Domini nostri J.C. secundum Evangelistam Johannem BWV 245, 1724. 3. « Io sono una forza del Passato... » 4. Pier Paolo Pasolini, Poesia in forma di rosa, 1961-1964 ; Garzanti, 1964. 5. Hèctor Parra, Un concertino di angeli contro le pareti del mio cranio, 2020 ; création par le JACK Quartet, en 2021 à Cologne. 6. Pier Paolo Pasolini, Manifesto per un nuovo teatro, 1968 ; Nuovi argomenti, 1968. 7. Hèctor Parra, La mort i la primavera (tableaux pour un ballet imaginaire d’après le roman éponyme inachevé de Mercè Rodoreda) pour deux ensembles et deux chefs d’orchestre, 2021 ; créationpar Peter Rundel et Lucie Leguay à la tête du Remix Ensemble et de l’Ensemble intercontemporain, 23 janvier 2022 à Porto.
« La brutalité des contes leur confère une aura d’irréalité. » « Victime qui veut tuer, toi ; bourreau qui veut mourir, moi » : voilà Pasolini poète de l’oxymore. Quelle incidence dans votre opéra ? Aušrinė Stundytė est un soprano lyrique, parfois dramatique, et Leigh Melrose un baryton puissant, masculin : je tisse l’oxymore en recourant à son falsetto délicat et au grave affirmé, presque ambigu, de sa partenaire. Orgia est une anatomie du pouvoir, mais qui l’exerce ? Le rituel sadomasochiste a deux maîtres.
VENDREDI 23 JUIN
SAMEDI 1 ER JUILLET
20:00 PARIS
18:00 ET 20:30 PARIS
MAISON DE LA RADIO – STUDIO 104
LE CENTQUATRE-PARIS
ALCHIMIE MUSICALE
ACADÉMIE MANIFESTE
Da ns les a rca nes de la création
Pa nora ma de la jeu ne création
Pour sa création pour ensemble et orchestre réunis, Rebecca Saunders s’est appuyée sur une œuvre antérieure, Scar, ou plus précisément sur l’interprétation que l’EIC en a donnée en 2019, s’attachant à élargir les possibilités expressives du matériau originel. Dans une mise en abyme vertigineuse, qui flirte aussi bien avec les limites du silence qu’avec les vacarmes plus stridents, la compositrice britannique « pèle et déploie » un discours dialectique jouant sur les mondes sonores spécifiques et contrastés d’un ensemble et d’un grand orchestre. Pour cette première française, les solistes de l’EIC seront associés aux musiciens de l’Orchestre Philharmonique de Radio France. Ces derniers mettront ensuite en perspective les mystères de l’alchimie concertante avec ceux du grand classique astronomique qu’est Arcana d’Edgard Varèse, ainsi qu’avec une création avec électronique de la jeune compositrice iranienne Aida Shirazi, fraîche émoulue du Cursus de composition et d’informatique musicale de l’Ircam.
Depuis la première édition de l’Académie ManiFeste de l’Ircam, en 2012, l’Ensemble intercontemporain est le fidèle partenaire d’une aventure pédagogique toujours renouvelée. Pendant toute une semaine, il se met au service d’une dizaine de jeunes compositeurs et compositrices d’origines les plus diverses pour créer leurs nouvelles œuvres de musique de chambre au cours d’un concert de clôture. Une belle occasion de découvrir les nouveaux talents de la composition. Cette année, les solistes de l’EIC retrouveront ce même jour les jeunes musiciens de l’Ensemble ULYSSES pour un concert au programme mêlant œuvres existantes, avec ou sans électronique et création avec une nouvelle œuvre commandée spécialement pour l’occasion. À 18:00 Concert de sortie de l’atelier voix et musique de chambre Créations des huit compositeurs et compositrices stagiaires NN compositeur encadrant Solistes de l’Ensemble intercontemporain Les Métaboles
Aida SHIRAZI Nouvelle œuvre pour orchestre et électronique Création mondiale Commande Radio France, Ircam-Centre Pompidou
À 20:30 Concert de l’Ensemble intercontemporain et de l’ensemble ULYSSES
Edgard VARÈSE Arcana, pour orchestre
Enno POPPE Speicher I, pour grand ensemble
Rebecca SAUNDERS Nouvelle œuvre, pour ensemble et orchestre
Roque RIVAS Assemblage, pour piano, ensemble et dispositif électronique
Création française / Commande Ernst von Siemens Music Foundation, Orchestre de la Suisse Romande, Ensemble intercontemporain, Casa da Música Porto et Radio France
Complément de programme à déterminer Ensemble ULYSSES Ensemble intercontemporain Dimitri Vassilakis piano Lin Liao direction Dionysos Papanicolaou électronique Ircam
Orchestre Philharmonique de Radio France Ensemble intercontemporain Pascal Rophé direction Étienne Démoulin électronique Ircam Coproduction Radio France, Ircam-Centre Pompidou Dans le cadre de ManiFeste-2023, festival de l’Ircam
Dans le cadre de ManiFeste-2023, festival de l’Ircam Informations et réservations à partir d’avril 2023 manifeste.ircam.fr
Tarifs de 5 € à 26 € Réservations maisondelaradioetdelamusique.fr / 01 56 40 15 16 62
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Révéler le potentiel sonore et émotionnel Composer, pour vous, serait-ce de l’ordre de la révélation d’un potentiel sonore ? Oui, aujourd’hui, je cherche à « éplucher la surface », à libérer ce qui est à l’intérieur du corps du son, le potentiel sonore et émotionnel qui serait caché, en attente d’être exploré. En 2016, j’ai composé une pièce intitulée Skin : c’est un mot fantastique, qui signifie « peau », mais aussi le verbe « peler ». Je crois que c’est une image intéressante du processus de composition. Et la pièce Scar (cicatrice, en français) parle précisément de la mémoire de la peau...
Les voies de la création sont parfois surprenantes : c’est ce que révèle la compositrice anglaise Rebecca Saunders en levant le voile sur la genèse de sa nouvelle composition pour ensemble et orchestre, née d’une pièce antérieure, Scar (2019), dont l’interprétation par l’Ensemble intercontemporain l’avait particulièrement marquée. Après avoir été créée le 29 septembre à Munich, sa nouvelle œuvre sera présentée en création française le 23 juin à Paris, dans le cadre du festival ManiFeste.
Comment allez-vous articuler l’ensemble et l’orchestre ? Et comment travaillez-vous la partition des deux entités ? Simultanément, ou l’ensemble d’un côté et l’orchestre de l’autre ? Je suis en pleine recherche ! Le processus de composition consiste à approcher cette polarité, cette dialectique. Je trouve passionnant de travailler avec des cellules, des fragments, de les faire jouer par l’ensemble et de les étendre à l’orchestre, comme si vous aviez le relief du son et sa résonance. On peut aussi faire jouer un orchestre avec l’intimité et la virtuosité d’un ensemble. J’aime travailler avec les extrêmes : c’est une autre manière d’explorer différentes formes de densité, et de mutation du son. Le monde sonore de Scar constitue le point de départ, dont il faut ensuite élargir et explorer les possibilités expressives. C’est formidable de travailler avec les deux en même temps. Si vous pensez à un soliste ou à un ensemble, vous savez que les musiciens ont l’expérience de mondes sonores spécifiques, avec la virtuosité correspondante. Avec un orchestre, vous disposez d’une brosse plus large, vous pouvez presque appliquer vos mains et salir le son. C’est ce contraste entre deux manières de travailler qui est intéressant.
Rebecca Saunders, pour cette nouvelle pièce, vous retrouvez les solistes de l’Ensemble intercontemporain, que vous connaissez bien. Dans quelle mesure vous ont-ils inspirée ? Tout est parti d’une interprétation fabuleuse de ma pièce Scar, au cours d’un concert donné par l’Ensemble intercontemporain en novembre 2019 à Paris. Le concert était quasi extatique ! Déjà en amont, les répétitions avaient été intenses. Cela m’a convaincue de prendre Scar comme point de départ. Comme j’avais vu ces solistes expérimenter sur mes sons, j’ai conservé la même instrumentation. Je connais certains d’entre eux, mais pas de manière intime : c’est leur approche instrumentale, leur virtuosité, leur style de jeu, qui me servent de référence et me permettent d’imaginer ce qu’ils pourront réaliser. Je cherche aujourd’hui, en composant, à étendre, ou à condenser le potentiel sonore et émotionnel de Scar dans une dimension nouvelle.
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Pour la création française de votre nouvelle œuvre à Paris, vous figurez au même programme qu’Edgard Varèse, dont on entendra Arcana. Quelle relation entretenez-vous avec cette musique ? Cette combinaison est magnifique, c’est passionnant ! Je trouve les œuvres orchestrales de Varèse extraordinaires, et cette pièce, Arcana, m’a beaucoup fascinée quand j’étais plus jeune. Si l’on cherche un parallèle avec mon univers, il se trouve certainement dans l’exploration d’un paysage urbain. Particulièrement dans l’utilisation des cuivres, et, surtout, des percussions.
l’on parle du silence, le mot peut être mal compris. Il n’y a pas de musique sans silence : la pièce doit commencer dans le silence, et elle se termine avec le silence – sans le silence, nous n’avons aucun point de référence sonore. Lire ou écouter Beckett engendre des niveaux de tension, des moments de surprise, qui sont très utiles quand on crée une structure formelle. La pièce que j’écris en ce moment ne possède pas beaucoup de silence : c’est plutôt dense et urbain ! Vous êtes venue à plusieurs reprises à ManiFeste, le festival de l’Ircam. On se souvient notamment de votre dernière création à l’occasion de l’édition 2020, The Mouth, pour soprano et électronique. J’ai beaucoup travaillé à l’Ircam pour The Mouth, je faisais des allers et retours entre Paris et Berlin, c’était un cadre propice au travail. J’ai enseigné aussi à ManiFeste, avec des solistes de l’Ensemble intercontemporain, pour un groupe de jeunes compositeurs de bon niveau, c’était très plaisant. J’apprécie l’ambiance du festival, c’est vivant, le public est nombreux, c’est un environnement propice pour la musique contemporaine.
Vous avez grandi à Brixton, en Angleterre, et vous vivez aujourd’hui à Berlin, cela explique-t-il l’aspect urbain de votre musique ? Ce n’est pas aussi évident que dans Arcana ! Mais j’aime l’extase de la grande ville, le bruit, la vie et l’énergie. J’aime travailler, assise, tout en sentant le monde autour de moi. Je n’aime pas le soi-disant silence de la campagne, ce n’est pas du silence, la campagne est vraiment bruyante ! Vous appréciez tout spécialement la littérature de Samuel Beckett, qui affirme une relation particulière au silence et à la parole. J’ai découvert l’œuvre de Beckett en 1995 ou 1996, et cela m’a profondément marquée. Il faut faire attention lorsque
Propos recueillis par Arnaud Merlin En relation avec le concert Alchimie musicale, p. 63
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PA R TA G E R
A C T I O N S C U LT U R E L L E S
TOUT PUBLIC AUTOUR DES CONCERTS
CONCERTS ATELIERS AU TRITON
Les concerts donnés à Paris sont, pour certains d’entre eux, précédés d’une présentation des œuvres au programme. Elles offrent à chacun et chacune l’occasion d’être accompagné·e dans son expérience de la musique du e siècle à aujourd’hui. Certains concerts sont également suivis d’une rencontre avec les musiciens, ouverte aux questions du public sur les œuvres et leur interprétation. Cette saison, des clés d’écoute et des rencontres seront proposées à la Philharmonie de Paris autour des concerts suivants (et d’autres à venir à partir de janvier 2023) :
Nées en 2008, les « Intersessions » sont produites conjointement avec les équipes du Triton, scène de musiques présentes des Lilas en Seine-Saint-Denis, et l’Ensemble intercontemporain. Ensemble, ils proposent une série de rendez-vous entre solistes de l’EIC et musiciens ou musiciennes issu·e·s de la scène jazz actuelle. Ces concerts interrogent le rapport de l’improvisation à l’écriture avec des invités qui ont en commun la culture de la musique contemporaine et la passion de l’improvisation. Depuis 2021, des « Dodécadanse » sont présentées sur le même modèle, rassemblant solistes de l’Ensemble et danseur·se·s ou performers autour de l’improvisation.
THE OUTCAST, LE 26 SEPTEMBRE [P. 10] IN SITU, LE 20 OCTOBRE [P. 15]
Programme à venir sur le site letriton.com
LIGETI : AUX SOURCES DU RYTHME, LE 3 MARS [P. 42] PIERROT LUNAIRE / LOST IN DANCE, LE 11 MAI [P. 51] UN SOUFFLE DE LUMIÈRE, LE 9 JUIN [P. 56]
CONCERT PARTICIPATIF Pour fêter l’arrivée de son troisième percussionniste, l’Ensemble intercontemporain a souhaité s’associer à Stéphane Grosjean, chorégraphe spécialiste des percussions corporelles, pour proposer un concert participatif autour de son répertoire. Les spectateurs, dont certains complices sont entraînés en amont, sont invités à entrer dans la danse aux côtés des solistes.
RÉPÉTITIONS PUBLIQUES Chaque année, environ dix répétitions à Paris et en région sont ouvertes au public. Une autre façon de découvrir les œuvres (parfois au tout début du processus de création), ainsi que le travail des compositeurs et des interprètes. Ces répétitions sont le plus souvent commentées par un médiateur en collaboration avec les musiciens. Displacement, Pavillon de Romainville, décembre 2021 L’Ensemble intercontemporain et l’Orchestre du Conservatoire de Paris, Philharmonie de Paris, janvier 2022 Des notes et des bulles, Micro-folie Sevran, mai 2022
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ÉCLATS DE PERCUSSION, LE 10 MAI AU STUDIO DE LA PHILHARMONIE DE PARIS [P. 50]
Les dates et les horaires de ces répétitions seront précisés à partir du mois d’octobre sur le site ensembleintercontemporain.com
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MASTER CLASSES E T AT E L I E R S E N C O N S E R VAT O I R E
que les solistes prodigueront aux jeunes musiciens, et le bagage musical qu’ils leur transmettront, mais aussi par l’exemple qu’ils donnent d’un collectif consacré à la création. Les solistes de l’EIC ne seront plus non plus de simples chefs de pupitre, comme ils le sont souvent dans les coproductions menées chaque année en partenariat avec l’Orchestre des étudiants du Conservatoire de Paris : les relations interpersonnelles seront privilégiées et les étudiants bénéficieront également d’un coaching des équipes administratives de l’EIC, qui leur feront découvrir l’étendue des métiers associés à ce type d’ensemble, afin de les aider à définir leurs projets professionnels. » Clément Carpentier, responsable du département des disciplines instrumentales classiques et contemporaines au CNSMD de Paris
Accompagnés par les solistes de l’Ensemble, les étudiant·e·s des conservatoires nationaux, régionaux et internationaux, futur·e·s professionnel·le·s découvrent les techniques et les modes de jeu propres au répertoire contemporain. Ils se familiarisent ainsi avec des écritures musicales actuelles et les projets des compositeurs d’aujourd’hui.
ARTIST DIPLOMA – INTERPRÉTATION ET CRÉATION
En 2022-2023, les étudiant·e·s du Conservatoire de Paris seront associés aux solistes de l’Ensemble intercontemporain pour deux grandes productions à la Philharmonie de Paris :
L’Ensemble intercontemporain est le partenaire privilégié du nouveau cursus Artist Diploma – Interprétation et Création mis en place par le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris. Ambassadeurs d’un vaste répertoire contemporain comprenant des techniques et modes de jeux particuliers, les solistes de l’EIC travaillent en étroite collaboration avec les compositeurs et les compositrices dont nombre de figures majeures de la scène musicale contemporaine. Ils poursuivent aujourd’hui leur activité de transmission de savoirs et savoir-faire aux nouvelles générations de musicien·ne·s sur trois grands axes : la jeune création, les grands classiques du répertoire contemporain et l’interdisciplinarité.
THE OUTCAST, LE 26 SEPTEMBRE [P. 10] IN SITU, LE 20 OCTOBRE [P. 15]
L’Ensemble intercontemporain participe également à des master classes destinées aux élèves des classes de composition et de direction d’orchestre. Les ateliers autour de nouvelles œuvres des jeunes compositeurs et compositrices donneront lieu aux deux concerts Émergences au Conservatoire de Paris, en partenariat avec la classe de composition du Conservatoire : ÉMERGENCES I, LE 25 NOVEMBRE [P. 21]
À propos de l’Artist Diploma
ÉMERGENCES II, LE 27 JANVIER [P. 36]
« La formation que nous proposons avec ce cursus est unique sur la scène internationale : c’est tout simplement l’un des seuls diplômes post-Master consacré à l’interprétation de la création et des répertoires contemporains ! Nous recrutons donc des instrumentistes et des chanteurs d’un très haut niveau instrumental et artistique. Et l’engouement international est déjà palpable : 50 % des candidatures que nous recevons sont issues d’écoles étrangères. Cette formation se distingue également car elle est pensée en termes de collectif — un peu sur le modèle de la troupe. C’est-à-dire que, pendant les deux années de formation, les quinze étudiants d’une promotion feront tout ensemble : les activités d’interprétation, de médiation, et jusqu’au projet de recherche. L’idée est de les amener à progresser individuellement à travers une dynamique de groupe. En ce sens, le partenariat avec l’Ensemble intercontemporain est essentiel, non seulement par l’accompagnement renforcé et les conseils individuels
ACADÉMIES YORK University of York Forts de leur travail de transmission réalisé dans le cadre de diverses académies, de Lucerne à ManiFeste (Paris), les solistes de l’Ensemble intercontemporain s’investissent auprès de la classe de composition de Thomas Simaku en novembre 2022 à l’Université de York. Au programme, concert des œuvres écrites par ces compositrices et compositeurs en devenir, master classes instrumentales et rencontres leur permettront d’aller au-devant des étudiants de cette prestigieuse institution pour les faire bénéficier de leur grande connaissance des musiques de création et des classiques du e siècle. La session se déroulera du 21 au 23 novembre et se clôturera par un concert d’œuvres françaises et anglaises. Avec le soutien de Diaphonique, fonds franco-britannique pour la musique contemporaine en partenariat avec la Sacem, les Amis de l’Institut français du Royaume-Uni, le British Council, l’Institut français, l’Institut français du Royaume-Uni, le Centre National de la Musique, Creative Scotland et la Fondation Salabert.
Éric-Maria Couturier et une musicienne de l’Ensemble Ulysses, Centquatre-Paris, juin 2020
MANIFESTE-2023
RESSOURCE INTERACTIVE DE PRÉSENTATION ET DE PRATIQUE DES MODES DE JEUX CONTEMPORAINS
L’Académie du festival ManiFeste, organisé par l’Ircam, offre chaque année à de jeunes compositeurs et compositrices venu·e·s du monde entier l’opportunité de travailler avec l’Ensemble intercontemporain, ensemble associé de l’Académie depuis sa création en 2012. Animés par une vocation pédagogique qui va de pair avec leur engagement envers la création, les solistes mettent leur expérience au service des jeunes compositeurs sélectionnés, mais aussi des jeunes musiciens venus se former à l’interprétation des musiques d’aujourd’hui. Cette année les ateliers seront consacrés à des créations de musique de chambre qui seront présentées au public au cours d’un concert :
L’Ensemble intercontemporain a entrepris de créer un « dispositif interactif » innovant pour présenter de façon aussi détaillée que pratique les techniques et les modes de jeu propres au répertoire contemporain, aux futur·e·s professionnel·le·s de la création et de l’interprétation musicale. Pour mener à bien ce projet d’envergure mêlant nouvelles technologies et pédagogie, l’EIC a fait appel à Yan Maresz, compositeur et professeur de composition électroacoustique au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, en relation avec les solistes de l’Ensemble. Actuellement en phase de conception ce nouvel « outil interactif » prendra la forme d’un site internet multimédia et verra le jour, dans une première version, au cours du premier trimestre 2023.
ACADÉMIE MANIFESTE LE 1 ER JUILLET AU CENTQUATRE-PARIS [P. 63]
En parallèle à ces ateliers, les solistes de l’EIC joueront, toujours le 1er juillet, aux côtés des jeunes musicien·ne·s de l’ensemble européen ULYSSES un programme mêlant répertoire et création. Émanation du réseau ULYSSES qui réunit diverses institutions européennes consacrées à la production et la diffusion des musiques de création, l’Ensemble ULYSSES est une formation de chambre éphémère destinée à faire le tour de trois des principaux rendez-vous européens estivaux de la musique contemporaine, travaillant à chaque étape avec des compositeurs, des chefs et des interprètes de premier plan. Concert Émergences, Conservatoire de Paris, novembre 2021
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Des notes et des bulles, Micro-folie Sevran, mai 2021
JEUNE PUBLIC ET SCOLAIRES
PARCOURS DE SENSIBILISATION MUSICALE Dans le cadre de la réforme des conservatoires, la Ville de Paris, en partenariat avec l’Académie de Paris, propose un Parcours de Sensibilisation Musicale (PSM) pour tous les élèves de cours préparatoire des écoles publiques parisiennes. Ce parcours a pour ambition de sensibiliser chaque enfant de CP à l’écoute, la rencontre et la pratique de la musique. L’Ensemble accueille des élèves tout au long de l’année. Les enfants peuvent s’installer aux côtés des musiciens et découvrir ainsi les instruments, les œuvres et la vie d’orchestre.
Faire découvrir la musique du e siècle à aujourd’hui aux plus jeunes, c’est les inviter à s’ouvrir à d’autres univers musicaux, peu médiatisés. Un enjeu décisif porté par des activités conçues pour le jeune public aussi bien à l’école qu’en famille.
CONCERT SCOLAIRE PARTICIPATIF Du terrain à la scène
APPLICATION POUR SCOLAIRES
Dans le cadre des Olympiades culturelles mises en place en parallèle des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 à Paris, quatre compositeurs et compositrices (Daphné Hejebri, Aline Gorisse, Jawher Matmati et Manon Lepauvre) seront en résidence dans une école parisienne pour permettre à des élèves d’une classe de CM1 (puis de CM2) de l’école Cavé (Paris 18e) de découvrir l’univers de la musique contemporaine par le prisme, inattendu, du sport. Chaque compositeur et compositrice devra s’inspirer d’un sport pour écrire une partition à destination de ces élèves non musiciens et de plusieurs solistes de l’Ensemble intercontemporain.
L’Ensemble intercontemporain a fait appel au musicologue et médiateur Clément Lebrun pour la création d’une application pédagogique à destination d’élèves du CE2 à la 5e. Pour pouvoir répondre à la pluralité des esthétiques abordées par l’Ensemble, cette ressource regroupe une série de jeux qui permet d’appréhender une œuvre phare de son répertoire, comme Dialogue de l’ombre double de Pierre Boulez, ouvrant de manière simple une voie d’accès aux secrets de la création musicale. Les élèves sont ainsi invités à manipuler les sons comme un compositeur le ferait dans sa tête, sur un piano ou sur un ordinateur.
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Twice upon… de Luciano Berio, Philharmonie de Paris, février 2022 Concert Terretektorh avec l’Orchestre du Conservatoire de Paris, Cité de la musique, mars 2022 Walden [Philharmonie de Paris], Philharmonie de Paris, juin 2022
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FA I T E S U N D O N !
LES PROJETS À SOUTENIR
DES AVANTAGES EXCLUSIFS
Choisissez d’accompagner l’Ensemble en soutenant le projet qui correspond le mieux à votre engagement
PARTICULIERS 50 € Donateur·trice 1 disque de l’Ensemble 1 tote bag
CRÉATION
PA R T I C I P E Z À L’ AV E N T U R E M U S I C A L E D E L’ E N S E M B L E I N T E R C O N T E M P O R A I N
— Commande à un·e compositeur·trice — Développement d’une académie de composition
150 € Bienfaiteur·trice 1 disque de l’Ensemble 1 tote bag 1 invitation par saison au concert de votre choix
MULTIDISCIPLINAIRE —C oncert carte blanche à des artistes venu·e·s d’autres disciplines — Projet de création musicale et visuelle (vidéo, arts visuels et numériques, installation multimédia, etc.)
300 € Ami·e 1 disque de l’Ensemble 1 tote bag 2 invitations par saison à une répétition générale et/ou commentée 1 invitation par saison au concert de votre choix
TRANSMISSION ET VIVRE ENSEMBLE — Concerts jeune public et scolaires — Résidences de création en milieu scolaire animées par les solistes, des musicologues et compositeurs·trices — Créations multidisciplinaires avec et pour les amateurs·trices — Créations avec et pour les mineurs isolés étrangers
— Formation de chef·fe·s assistant·e·s — Développement d’une académie de jeunes artistes
500 € et plus Mécène 1 disque de l’Ensemble 1 tote bag 2 invitations par saison à une répétition générale et/ou commentée 2 invitations par saison au concert de votre choix Possibilité d’accès backstage sur réservation
RAYONNEMENT DU RÉPERTOIRE
ENTREPRISES
— Diffusion du répertoire sur le territoire national — Tournées en Europe, Asie, États-Unis, Amérique latine
Entreprises mécènes, vous bénéficiez d’avantages sur mesure à définir avec vous. Une brochure spécifique est disponible sur demande.
ACCOMPAGNEMENT DES FUTUR·E·S PROFESSIONNEL·LE·S
Intérieur, Théâtre du Châtelet, novembre 2021
Chaque nouvelle saison, l’Ensemble s’engage à faire vivre l’extraordinaire diversité du répertoire et à proposer de nouveaux formats de concert. À transmettre au plus grand nombre et aux plus éloigné·e·s de notre art l’énergie musicale que nous ressentons pour éveiller les curiosités, rénover l’écoute et dépasser les clivages. C’est dans cet esprit que nous poursuivons une aventure musicale commencée il y a plus de quarante ans. Avec ce même désir d’ouverture, de rencontre entre les genres musicaux et de recherche de résonance avec le monde qui nous entoure ! À ce titre, nous remercions chaleureusement nos donateur·trice·s et partenaires qui nous soutiennent dans cet élan.
AUDIOVISUEL ET NUMÉRIQUE
LE SAVIEZ-VOUS ?
—D éveloppement d’une application de découverte et d’expérimentation du répertoire et des modes de jeux contemporains — Captations de concerts — Réalisation de reportages, vidéos pédagogiques, etc.
Particuliers, vous bénéficiez d’une réduction d’impôt égale à 66 % du montant de votre don, dans la limite de 20 % du revenu imposable. Entreprise mécène, vous bénéficiez d’une réduction d’impôt égale à 60 % du montant du don, dans la limite de 20 000 € ou 0,5 % de votre chiffre d’affaires annuel.
H POUR PLUS D’INFORMATIONS
Matthias Pintscher, directeur musical
Elisa Poli, chargée de communication et relations extérieures +33(0)1 44 84 44 53 e.poli@ensembleinter.com et sur le site ensembleintercontemporain.com rubrique Mécénat
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Matthias Pintscher Directeur musical de l’Ensemble intercontemporain
Répons de Pierre Boulez, Cité de la musique, juin 2021
Ensemble intercontemporain Résident à la Cité de la musique – Philharmonie de Paris Créé par Pierre Boulez en 1976 avec l’appui de Michel Guy (alors secrétaire d’État à la Culture) et la collaboration de Nicholas Snowman, l’Ensemble intercontemporain se consacre à la musique du xxe siècle à aujourd’hui. Les 31 musiciens solistes qui le composent sont placés sous la direction du chef d’orchestre et compositeur Matthias Pintscher. Unis par une même passion pour la création, ils participent à l’exploration de nouveaux territoires musicaux aux côtés des compositeurs, auxquels des commandes de nouvelles œuvres sont passées chaque année. Ce cheminement créatif se nourrit d’inventions et de rencontres avec d’autres formes d’expression artistique : danse, théâtre, vidéo, arts plastiques, etc. L’Ensemble développe également des projets intégrant les nouvelles technologies (informatique musicale, multimédia, techniques de spatialisation, etc.) dont certains en collaboration avec l’Ircam (Institut de Recherche et Coordination Acoustique / Musique).
Les activités de formation des jeunes interprètes, des compositeurs et compositrices, les concerts éducatifs ainsi que les nombreuses actions culturelles à destination du public traduisent un engagement toujours renouvelé en matière de transmission. En résidence à la Cité de la musique – Philharmonie de Paris, l’Ensemble intercontemporain se produit en France et à l’étranger où il est régulièrement invité par de grandes salles et festivals internationaux. En 2022, il est lauréat du prestigieux Polar Music Prize. Financé par le ministère de la Culture, l’Ensemble reçoit également le soutien de la Ville de Paris.
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« Ma pratique de chef d’orchestre est enrichie par mon activité de compositeur et vice versa. » Après une formation musicale (piano, violon, percussion), Matthias Pintscher débute ses études de direction d’orchestre avec Peter Eötvös et Pierre Boulez. Âgé d’une vingtaine d’années, il s’oriente vers la composition avant de trouver un équilibre entre ces deux activités, qu’il juge complémentaires. Matthias Pintscher est directeur musical de l’Ensemble intercontemporain depuis septembre 2013. Un mandat qui se terminera à la fin de la saison 2022-23. Pendant plusieurs années, il a été « Artiste associé » du BBC Scottish Symphony Orchestra, de l’Orchestre symphonique national du Danemark et du Los Angeles Chamber Orchestra. Depuis septembre 2020, il est également « Artiste associé » du Cincinnati Symphony Orchestra. Professeur de composition à la Juilliard School de New York depuis septembre 2014, il a été le chef principal de l’Orchestre de l’Académie du festival de Lucerne, de 2016 à 2018, succédant à Pierre Boulez. Chef d’orchestre reconnu internationalement, Matthias Pintscher dirige régulièrement de grands orchestres en Europe, aux États-Unis et en Australie : New York Philharmonic, Cleveland Orchestra, Los Angeles Philharmonic, National Symphony Orchestra de Washington, New World Symphony, Orchestre symphonique de Toronto, Orchestre philharmonique de Berlin, Orchestre philharmonique de Radio France, Orchestre de l’Opéra de Paris, BBC Symphony Orchestra, Orchestre de la Suisse Romande, l’Orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg, orchestres symphoniques de Melbourne et de Sydney… En décembre 2020, Matthias Pintscher a pu assurer la direction musicale d’une nouvelle production de Lohengrin de Richard Wagner
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au Staatsoper Unter den Linden de Berlin, filmée et diffusée sur Arte. Il a retrouvé la scène berlinoise au cours de la saison 2021-22 pour y diriger ce même opéra ainsi que La Fille du Far-West de Giacomo Puccini. Au cours de cette même saison, Leila Josefowicz a créé son nouveau concerto pour violon, Assonanza II, avec le Cincinnati Symphony Orchestra, sous la direction du compositeur. Toujours en 2021-22, il a fait ses débuts avec le Pittsburgh Symphony, la Staatskapelle Dresden, le Lahti Symphony et le Musikkollegium Winterthur. Auparavant, en août 2021, il a été le compositeur invité du prestigieux Suntory Hall Summer festival de Tokyo, au cours duquel a été créée sa nouvelle œuvre pour orchestre, neharot, jouée par le Tokyo Symphony Orchestra. En 2022-23, en plus de retrouver nombre des orchestres et ensembles avec lesquels il collabore régulièrement, Matthias Pintscher fera ses débuts avec le Wiener Symphoniker, le Philadelphia Orchestra, le Kansas City Symphony ou le Gürzenich Orchester de Cologne. Avec l’Ensemble intercontemporain, il dirigera de nombreuses productions sur de grandes scènes en France, en Europe et aux États-Unis, avec une nouvelle tournée en mars 2023. Matthias Pintscher est l’auteur de nombreuses compositions pour les formations les plus diverses. Ses œuvres sont jouées par de grands interprètes, chefs, ensembles et orchestres (Chicago Symphony, Cleveland Orchestra, New York Philharmonic, Philadelphia Orchestra, Berliner Philharmoniker, London Symphony Orchestra, Orchestre de Paris, Tokyo Symphony Orchestra, etc.). Elles sont toutes publiées chez Bärenreiter-Verlag et les enregistrements de celles-ci sont disponibles chez Kairos, EMI, Alpha Classics, Teldec, Wergo et Winter & Winter.
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Équipe artistique
Équipe administrative
Conseil de l’Ensemble
Directeur musical Matthias Pintscher1
Directeur général Olivier Leymarie
Présidente Emma Lavigne
LES SOLISTES
Directrice administrative et financière Pauline Ansel
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Flûtes Sophie Cherrier 25 Emmanuelle Ophèle 7 Hautbois Philippe Grauvogel 22, NN Clarinettes Martin Adámek 2, Jérôme Comte 15 Clarinette basse Alain Billard 26 Bassons Paul Riveaux 21, NN
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Cors Jens McManama 14 Jean-Christophe Vervoitte 12 Trompettes Clément Saunier 18 Lucas Lipari-Mayer 17 Trombones NN
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Tuba NN Percussions Gilles Durot 9, Samuel Favre 23, Aurélien Gignoux4 Pianos/claviers Hidéki Nagano 11, Dimitri Vassilakis 6 Sébastien Vichard 24
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Harpe Valeria Kafelnikov3 Violons Jeanne-Marie Conquer 13 Hae-Sun Kang 10, Diego Tosi 5
Responsable de la coordination artistique Alix Sabatier Responsable de la production et de la diffusion Marine Gaudry Responsable comptable et administrative Valérie Ronsse Régisseur général Jean Radel, jusqu’au 30 septembre 2022 Responsable de la régie générale Nicolas Berteloot, à partir du 1er octobre 2022 Responsable du personnel artistique Caroline Barillon, à partir du 1er octobre 2022 Régisseur de production / lumière Samuel Ferrand Régisseur·euse de production NN Bibliothécaire Olaf Munk Koefoed Responsable de l’action culturelle Pia Galloro Responsable de la communication Luc Hossepied Chargée de communication et des relations extérieures Elisa Poli
Altos Odile Auboin 20, John Stulz 16
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Violoncelles Éric-Maria Couturier 8, Renaud Déjardin 27 Contrebasse Nicolas Crosse 19
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Membres de droit Rima Abdul Malak Ministre de la Culture représentée par Christopher Miles Directeur général de la création artistique Anne Hidalgo Maire de Paris représentée par Arnaud Ngatcha Adjoint à la Maire chargé des relations internationales et de la francophonie Erol Ok Directeur général de l’Institut Français le Directeur de l’Office National de Diffusion Artistique l’Inspecteur de la création et des ensembles français artistiques désigné par le ministère de la Culture Personnalités qualifiées Catherine Boissière Secrétaire Vincent Meyer Trésorier Sasha J. Blondeau Michaël Dian Brigitte Lefèvre Bruno Patino
Réservations
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Les réservations et les souscriptions aux différentes formules d’abonnement se font directement auprès des salles accueillant l’Ensemble intercontemporain. Coordonnées des salles et organisateurs parisiens et franciliens ci-dessous. Pour les coordonnées en région et à l’étranger voir directement les pages de ces concerts sur ensembleintercontemporain.com
Ensemble intercontemporain 223, avenue Jean-Jaurès 75 019 Paris 01 44 84 44 50 / contact@ensembleinter.com ensembleintercontemporain.com
Relations presse
Cité de la musique – Philharmonie de Paris 221, avenue Jean-Jaurès 75 019 Paris 01 44 84 44 84 / philharmoniedeparis.fr
Opus 64 Valérie Samuel, Pablo Ruiz 01 40 26 77 94 / p.ruiz@opus64.com
Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris 209, avenue Jean-Jaurès 75 019 Paris 01 40 40 45 45 / conservatoiredeparis.fr reservation@cnsmdp.fr Le Carreau du Temple 2, rue Perrée 75 003 Paris 01 83 81 93 30 / lecarreaudutemple.eu billetterie@carreaudutemple.org Le Centquatre-Paris 5, rue Curial 75 019 Paris 01 53 35 50 00 / 104.fr Maison de la Radio 116, avenue du Président-Kennedy 75 016 Paris 01 56 40 15 16 / maisondelaradio.fr billetterie@radiofrance.com Théâtre de Vanves 12, rue Sadi-Carnot 92 170 Vanves 01 41 33 93 70 / theatre-vanves.fr
Ensemble intercontemporain Association loi 1901 / SIRET 306 664 863 00033 / Code APE 9001Z / Licence d’entrepreneur de spectacles L-R-21-10998 Présidente Emma Lavigne Directeur général Olivier Leymarie Directeur musical Matthias Pintscher Directrice administrative et financière Pauline Ansel Directeur de la publication Olivier Leymarie Coordination éditoriale Luc Hossepied, Jérémie Szpirglas Contenus rédactionnels Bertrand Bolognesi, Suzanne Gervais, Axelle Corty, Simon Gallot, Willem Hering, Arnaud Merlin, Tom Michelsen, Stéphane Ollivier, Matthias Pintscher, Jérôme Provençal, Jérémie Szpirglas, Michèle Tosi Conception graphique Belleville • Impression Lamazière Photographies couverture Adriana Lestido / Agence VU’ • p. 2, 17, 19, 37, 61, 70, 71 (photo 1/3), 76 (photo n° 8) Amandine Lauriol • p. 6 Jean-François Campos / Agence VU’ • p. 7, 43 Marion Kalter / akg-images • p. 9 Manu Theobald • p. 10, 15 Vincent Catala / Agence VU’ • p. 13 Claudia Hoehne • p. 14 Camille Blake • p. 23 Fabrice Picard / Agence VU’• p. 25, 33, 76 (sauf photo n° 8) Franck Ferville • p. 28 Juan Manuel Castro Prieto / Agence VU’ • p. 29, 46, 50, 51, 53, 57, 66 (photos 1/3 et 3/3), 68, 72 Luc Hossepied pour l’Ensemble intercontemporain • p. 30 Victoria-Tanto-Cndc-Angers • p. 31 Willfried Thiery • p. 34 Bernard Descamps / Agence VU’ • p. 35, 41 DR • p. 39 Peter Hundert • p. 42 Cyril Zannettacci / Agence VU’ • p. 45 Marie-Noëlle Robert • p. 48 Ronald Grant Archive / ArenaPAL • p. 49 Jean Radel • p. 54 Sandy Korzekwa • p. 55 Marc Delogu • p. 56 Gert Jochems / Agence VU’ • p. 59 Martin Sigmund • p. 60, 66 (photo 2/3), 69, 71 (2/3), 74, 75 Quentin Chevrier • p. 65 Astrid Ackermann
La reproduction, même partielle, d’un article de cette brochure est soumise à l’autorisation de l’Ensemble intercontemporain. Programmes et informations donnés sous réserve de modifications. Exemplaire gratuit. Ne pas jeter sur la voie publique.
Concert Terretektorh avec l’Orchestre du Conservatoire de Paris, Cité de la musique, mars 2022 78
© Ensemble intercontemporain 2022-2023
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SEPTEMBRE 2022 MER 14 LUN 26 JEU 29
20:00 20:00 19:30
CONCERTINI THE OUTCAST EXTENSIONS MULTIPLES
PHILHARMONIE DE PARIS / SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE PHILHARMONIE DE PARIS / GRANDE SALLE PIERRE BOULEZ – PHILHARMONIE MUNICH / PRINZREGENTENTHEATER
20:00
IN SITU
PHILHARMONIE DE PARIS / SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
SONIC ECLIPSE NEWBORN VOX ANIMALIS HUDDERSFIELD CONTEMPORARY MUSIC FESTIVAL YORK ACADEMY YORK ACADEMY ÉMERGENCES I HARLEKIN
BERLIN / PIERRE BOULEZ SAAL MULHOUSE / LA FILATURE PHILHARMONIE DE PARIS / AMPHITHÉÂTRE – CITÉ DE LA MUSIQUE HUDDERSFIELD / TOWN HALL YORK / UNIVERSITY OF YORK YORK / UNIVERSITY OF YORK CONSERVATOIRE DE PARIS / ESPACE MAURICE FLEURET MULHOUSE / LA FILATURE
HOMMAGE À BETSY JOLAS PORTRAIT MANOURY LE ENCANTADAS NEWBORN
PHILHARMONIE DE PARIS / LE STUDIO – PHILHARMONIE PHILHARMONIE DE PARIS / SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE PHILHARMONIE DE PARIS / SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE VANVES / THÉÂTRE DE VANVES
19:30 15:00 & 19:30 15:00 21:00 16:00 19:00 19:00 20:00
CLOCKS & CLOUDS CLOCKS & CLOUDS CLOCKS & CLOUDS LIGETI : CONCERTOS DÉSERTS ÉMERGENCES II LA VILLE SANS JUIFS LA VILLE SANS JUIFS
PARIS / LE CARREAU DU TEMPLE PARIS / LE CARREAU DU TEMPLE PARIS / LE CARREAU DU TEMPLE ROME / AUDITORIUM PARCO DELLA MUSICA – SALLE SINOPOLI PHILHARMONIE DE PARIS / GRANDE SALLE PIERRE BOULEZ – PHILHARMONIE CONSERVATOIRE DE PARIS / ESPACE MAURICE FLEURET SANTA BARBARA / HAHN HALL LOS ANGELES / WALT DISNEY CONCERT HALL
20:00 20:00 20:00
FESTIVAL PRÉSENCES UNSUK CHIN PHARMAKEIA LETTRES INTIMES
PARIS / MAISON DE LA RADIO – AUDITORIUM HAMBOURG / ELBPHILHARMONIE – GROSSER SAAL PHILHARMONIE DE PARIS / LE STUDIO – PHILHARMONIE
LIGETI : AUX SOURCES DU RYTHME TREMPLIN DE LA CREATION TOURNÉE AUX ÉTATS-UNIS
PHILHARMONIE DE PARIS / SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE PHILHARMONIE DE PARIS / LE STUDIO – PHILHARMONIE HOUSTON, NEW YORK, MIAMI
20:00 16:00
DOMAINES DÉRIVE
PHILHARMONIE DE PARIS / LE STUDIO – PHILHARMONIE PHILHARMONIE DE PARIS / SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
20:00 20:00 20:00 20:00 20:00
ÉCLATS DE PERCUSSION PIERROT LUNAIRE / LOST IN DANCE PIERROT LUNAIRE / LOST IN DANCE THÉÂTRE ET MUSIQUE TROIS TEMPS
PHILHARMONIE DE PARIS / LE STUDIO PHILHARMONIE DE PARIS / SALLE DES PHILHARMONIE DE PARIS / SALLE DES NÎMES / THÉÂTRE DE NÎMES PHILHARMONIE DE PARIS / LE STUDIO
20:00 À DÉTERMINER 20:00 À DÉTERMINER
UN SOUFFLE DE LUMIÈRE ORGIA ALCHIMIE MUSICALE ORGIA
PHILHARMONIE DE PARIS / SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE BILBAO / TEATRO ARRIAGA PARIS / MAISON DE LA RADIO – STUDIO 104 BILBAO / TEATRO ARRIAGA
18:00 & 20:30
ACADÉMIE MANIFESTE
PARIS / LE CENTQUATRE-PARIS
OCTOBRE JEU 20
NOVEMBRE MAR 1 ER LUN 7 JEU 17 SAM 19 MAR 22 MER 23 VEN 25 DIM 27
19:30 20:00 20:00 19:30 13:00 À DÉTERMINER 19:00 10:00
DÉCEMBRE MAR 6 VEN 9 MAR 13 JEU 15
19:00 20:00 20:00 20:00
JANVIER 2023 VEN 6 SAM 7 DIM 8 DIM 15 DIM 22 VEN 27 SAM 28 LUN 30
FÉVRIER MAR 7 VEN 10 MAR 14
MARS VEN 3 20:00 SAM 11 18:00 DU 23 AU 1 ER AVRIL
AVRIL JEU 13 DIM 16
MAI MER 10 JEU 11 VEN 12 VEN 12 MAR 23
– PHILHARMONIE CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE – PHILHARMONIE
JUIN VEN 9 JEU 22 VEN 23 SAM 24
JUILLET SAM 1 ER
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