Entreprise & Santé N°43

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BTP I SERVICE I COMMERCE & ARTISANAT I INDUSTRIE I INTERIM

C omme n t je v a i s f a i re ?

Services à la personne

ON EN AURA TOUS BESOIN UN JOUR ! Cahier central juridique détachable

Zoom sur

PRST3 : priorité aux dialogues

T HARCÈLEMEN p15

Interview

Bruno Delcampe : SOS Entrepreneur

N°43

p24

p27

3e trimestre 2018 www.entrepriseetsante.fr


SOMMAIRE

N°43 • 3e trimestre 2018

p23

p04

Y PENSER !

INVESTIR

Conseils pratiques

Bien-être au travail : de quoi parle-t-on ? p24

p05 ZOOM SUR

Plan régional santé travail 2016-2020 : prévention en entreprise, priorité aux dialogues !

EN DIRECT

PÔLE SANTÉ TRAVAIL : tout repose sur un dialogue permanent ASTAV – STSA : ensemble pour innover en prévention ! MTA : travail sur écran, restons vigilants !

p26

ENVIRONNEMENT & TECHNIQUE

Equipement de protection individuelle : nouvelle réglementation pour le bruit

p08

ERGONOMIE & ORGANISATION

AISMT : de la cotation OSHA… à l’étude ergonomique

p27 p27

INTERVIEW

Bruno Delcampe, directeur fondateur, SOS Entrepreneur

p10

p30

VU !

L’actualité en santé au travail AUX ALENTOURS

RGPD (règlement général sur la protection des données) Il est encore temps de s’y conformer !

p11

DOSSIER

p31

Services à la personne : on en aura tous besoin un jour !

p15

02

LE CAHIER JURIDIQUE

VOTRE AGENDA

Avec ce cahier central détachable, nous abordons les fondamentaux législatifs de la santé au travail, tels que définis par le Code du travail et donc, applicables aux entreprises privées.

Entreprise & Santé • 3e trimestre 2018 • N°43 • www.entrepriseetsante.fr


ÉDITO

Hervé Delpierre Les témoignages d’entreprises sont au « cœur » d’Entreprise & Santé et démontrent ainsi combien les services de santé au travail sont proches d’elles, en leur apportant expertise médicale et scientifique spécialisée devant toute situation de travail à améliorer. Le dossier de ce numéro est consacré aux services à la personne. L’importance de ce secteur d’activité va en croissant et devant les difficultés à embaucher, l’amélioration des conditions de travail est essentielle. Ces métiers seront plus attractifs si la santé au travail est toujours mieux prise en compte. Face aux risques physiques et biologiques, aux risques psychosociaux, aux risques routiers, les services de santé au travail vous conseillent. Les autres rubriques montrent la diversité des compétences de nos services de santé au travail : partenariat au long cours en EHPAD, prévention des TMS en industrie, aménagement des postes de travail informatiques chez un notaire, amélioration des conditions de travail sur chantier.

AISMT - Association Interprofessionnelle des Services Médicaux du Travail 1461 avenue du Cateau place Santos Dumont CS 50182 - 59404 CAMBRAI Tél. 03 27 72 63 63 www.aismtcai.com

ASMIS - Association Santé et Médecine Interentreprises du département de la Somme 77, rue Debaussaux CS 60132 80001 AMIENS Cedex 1 Tél. 03 22 54 58 00 www.asmis.net

AST - Action Santé Travail 174 route de Béthune CS 20023 62160 AIX-NOULETTE CEDEX Tel. 03 21 18 42 00 www.actionsantetravail.fr

Bruno Delcampe, directeur de SOS Entrepreneur, a accepté de répondre à nos questions. Il nous explique combien la santé de son dirigeant est en danger, quand une TPE ou une PME est en difficulté. Il nous éclaire sur les services que son association apporte, pour sauver l’entreprise face à une situation de cessation de paiement. Merci à lui. Les partenaires sociaux ont adopté le Plan régional Santé Travail Hauts de France 2016-2020, à travers le Coreoct (comité régional d’orientation des conditions de travail) mis en place par la Direction régionale des entreprises, de la consommation, de la concurrence, du travail et de l’emploi (Direccte). Entreprise & Santé était présent à la table ronde, organisée à Arras le 18 juin par l’Agence régionale pour l’amélioration des conditions de travail (Aract). Depuis le numéro 28 d’Entreprise & Santé, j’assure la responsabilité de directeur de publication. Soit 15 numéros, au cours desquels, Entreprise & Santé a évolué : une mise en page plus chaleureuse et attractive, plus de brèves et d’informations pratiques, plus de prolongements d’articles sur le site internet, une présence sur les réseaux sociaux… Aujourd’hui, « Entreprise & Santé », c’est aussi une chaîne YouTube, avec près de 25 vidéo-reportages en entreprise. À partir du prochain numéro, c’est le nouveau président du Gisset, Jean-François

ASTAV - Association de Santé au Travail de l’Arrondissement de Valenciennes 1, avenue de l’Europe 59880 SAINT SAULVE Tél. 03 27 46 19 24 www.astav.fr

ASTIL 62 - Association Santé Travail Interentreprises du Littoral 430 boulevard du Parc BP 94 62903 COQUELLES Cedex Tél. 03 21 85 51 85 www.astil62.fr

CEDEST - Centre pour le Développement Santé au Travail 4/10, rue Albert Thomas 59210 COUDEKERQUE-BRANCHE Tél. 03 28 24 98 98 www.cedest.net

MTA - Médecine du Travail de l’Aisne rue Théodore Monod - Z.A. Bois de la Chocque 02100 SAINT-QUENTIN Tél. 03 23 62 52 48 www.mt02.org

Lescart, qui sera le directeur de publication d’Entreprise & Santé. Nul doute que votre magazine continuera d’évoluer pour toujours mieux vous informer. Encore un grand merci à tous les collaborateurs d’Entreprise & Santé pour le support apporté pendant toutes ces années. Et plein de beaux projets pour la santé au travail… Hervé Delpierre Directeur de publication pour les services de santé au travail

...Retrouvez la suite des articles grâce aux

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entrepriseetsante.fr

PÔLE SANTÉ TRAVAIL Centre Vauban - 199/201 rue Colbert Bâtiment Douai - CS 71365 59014 LILLE Cedex Tél. 03 20 12 83 00 www.polesantetravail.fr

SIMUP - Service Interprofessionnel de Santé au Travail de la Vallée de la Lys - Lille Métropole 22 rue de Lille BP 40018 - 59431 HALLUIN Cedex TÉL. 03 20 94 12 54 www.simup.fr

STSA - Santé Travail Sambre Avesnois 24, rue Romain Duchateau 59720 LOUVROIL Tél : 03 27 53 31 31 www.sante-travail-sa.fr

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Y penser ! TRAVAIL À LA CHALEUR

MANUTENTION

L’INRS (Institut national de recherches et sécurité) indique qu’au-delà de 30°C pour une activité sédentaire, et 28°C pour un travail nécessitant une activité physique, la chaleur peut constituer un risque pour les salariés (ex. : sueurs excessives, difficulté de vigilance voire somnolence, déshydratation, …). Conseils : ajuster l’organisation du travail (ex. : pauses, horaires), l’aménagement des locaux (ex. aération) ou du chantier (ex. : zones d’ombre). Mettre à disposition de l’eau en quantité suffisante : 2 à 3 litres par jour et par personne !

Pour l’article R. 4541-2 du Code du travail, une manutention est « toute opération de transport ou de soutien d’une charge, dont le levage, la pose, la poussée, la traction, le port ou le déplacement, qui exige l’effort physique d’un ou plusieurs travailleurs ». La norme AFNOR NF X 35-109 fixe les recommandations suivantes : - Charges à déplacer : inacceptable à partir de 25 Kg, sous conditions à partir de 15 Kg. - Chariot à tirer/pousser : inacceptable à partir de 400 Kg, sous conditions à partir de 200 Kg.

INNOVER

SÉDENTARITÉ

La sécurité et la santé au travail concourent au développement de l’entreprise. Innover en santé et sécurité au travail est source de progrès pour l’entreprise, sur son marché. Organisée par le réseau ANACT-ARACT, la Semaine de la Qualité de Vie au Travail, du 11 au 18 juin 2018, a été placée sous le signe de l’innovation, pour concilier performance, agilité de l’entreprise et bien-être des salariés.

Pour l’Organisation mondiale de la santé, la sédentarité est un des premiers facteurs dégradant la qualité de vie sans incapacité et aggravant la mortalité : surpoids, obésité, diabète, maladies cardio-vasculaires, cancers, etc. D’où une priorité incontournable : éviter toute activité sédentaire prolongée, tant dans sa vie personnelle que professionnelle.

DÉSINSERTION PROFESSIONNELLE Pour le 3e Plan national santé travail 2016-2020, éviter la désinsertion professionnelle du fait d’une maladie ou d’un accident est une priorité majeure. Des aides existent pour le maintien dans l’emploi, au-devant d’une éventuelle inaptitude médicale au poste de travail. Tout repose sur la qualité du dialogue au sein de l’entreprise, pour un accompagnement constructif du service de santé au travail et des différents partenaires concernés.

IMPORTANT ! Votre service de santé au travail est là pour vous conseiller. 04

IL VOUS APPORTE DES COMPÉTENCES ET SAVOIR-FAIRE RÉPONDANT AUX DIFFÉRENTS RISQUES DE VOTRE ENTREPRISE. CONSULTEZ-LE !

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EN DIRECT

GROUPE FLORALYS Service aux personnes âgées

Nous avons ainsi maintenu des salariés en emploi plutôt que de prononcer une inaptitude médicale Dr Alain Moniez, médecin du travail, PÔLE SANTÉ TRAVAIL

Philippe Lefebvre est directeur des ressources humaines au sein de FLORALYS : « Avec PÔLE SANTÉ TRAVAIL, nous avons une relation intelligente. Je sais que je peux joindre le Dr Alain Moniez, médecin du travail, ou madame Isabelle Bourgeois, infirmière de santé au travail. Ils savent qu’ils peuvent aussi m’appeler. C’est une collaboration continue, basée sur la confiance et le dialogue ». Les situations à accompagner sont très diversifiées. Pour exemple, FLORALYS emploie 300 aides à domicile, 30 hôtesses pour les béguinages, 250 agents pour les EHPAD, sans compter les fonctions supports telles que l’administration, la gestion, l’entretien, la maintenance, la logistique, la restauration, la blanchisserie, etc. De larges compétences Pour Philippe Lefebvre, « C’est difficile de résumer en quelques mots la collaboration avec l’équipe de PÔLE SANTÉ

700 salariés

Philippe Lefebvre, directeur des ressources humaines DOUAISIS PÔLE SANTÉ TRAVAIL MÉTROPOLE NORD

Santé et sécurité au travail

Tout repose sur un dialogue permanent Sur le secteur du Douaisis, le groupe FLORALYS est le « N°1 du service aux personnes âgées ». Depuis plus de 20 ans, il intervient dans la vie des seniors pour l’aide à domicile (1 200 clients), l’animation de 31 béguinages (600 locataires) et la gestion de 5 maisons de retraite médicalisées (375 résidents en EHPAD). FLORALYS emploie 700 salariés exerçant des métiers très différents. C’est dire que le partenariat « au long cours » entretenu avec PÔLE SANTÉ TRAVAIL Métropole Nord est important. Tant pour le suivi de santé au travail des personnels, que pour le maintien dans l’emploi ou la prévention des risques.

TRAVAIL. Ils sont présents au sein des différentes instances Hygiène et Sécurité. Ils participent aux réunions et visites du CHSCT. Ils suivent nos évolutions organisationnelles ou techniques. Pour exemple, ils nous ont assistés dans la mise en place progressive de rails de transferts dans nos EHPAD depuis deux ans. Egalement, dans la mise en place de la blanchisserie centrale en 2016. Ils nous ont accompagnés dans l’actualisation de notre Document Unique d’Evaluation des Risques. C’est réellement un partenariat au long cours. Sans compter le suivi individuel de santé au travail de chacun de nos salariés ». Disponibilité et réactivité « Le dialogue permanent nous a conduits à une réactivité de part et d’autre. Je sais que je peux appeler Philippe Lefebvre si un salarié rencontre une difficulté de santé. Nous avons ainsi maintenu des salariés en emploi plutôt que de prononcer une inaptitude médicale, notamment avec la collabo-

ration du Sameth1, ou bien mettre en place des mi-temps thérapeutiques » précise le Dr Alain Moniez. Les exemples d’actions sont également multiples : analyse des fiches de données de sécurité avec un toxicologue, intervention d’une ergonome, participation au dispositif EVREST (Observatoire national de santé au travail) ou à une étude sur les risques psychosociaux. Alain Moniez conclut : « Tout repose sur la qualité du dialogue. Aujourd’hui, dans mon activité de conseil, nous apportons à FLORALYS les compétences nécessaires en fonction des questions à traiter. Cette collaboration régulière permet de s’inscrire dans une perspective continue d’amélioration de la santé au travail des salariés ».

1- Service d’aide au maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés.

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EN DIRECT

GROUPE SUEZ 150 salariés Renaud Camus, directeur des sites Sylvie Leflon, préventeur santé sécurité ANZIN- MAUBEUGE - FOURMIES SANTÉ AU TRAVAIL DE VALENCIENNES (ASTAV) SANTÉ AU TRAVAIL SAMBRE AVESNOIS (STSA)

Management santé sécurité

Ensemble pour innover en prévention ! Au sein du groupe SUEZ, les agences d’Anzin, Maubeuge et Fourmies développent une démarche innovante, avec l’accompagnement conjoint de STSA1, l’ASTAV2 et la CARSAT3 . Des salariés référents, l’encadrement et la direction se réunissent chaque trimestre au sein du « Comité Innovation Prévention », pour apporter des solutions les plus proches du terrain. 150 salariés exercent des métiers très différents : production, gestion et distribution d’eau potable, chantiers de voirie, station d’épuration, curage, etc. Managers, employés et ouvriers se mobilisent donc pour faire progresser chaque jour la santé et la sécurité au travail. Directeur des sites d’Anzin, Maubeuge et Fourmies au sein du groupe SUEZ, Renaud Camus situe le contexte : « Au sein du groupe, nous avons une politique et des procédures efficaces de sécurité. Les résultats sont là. Cependant, nous allons plus loin avec une démarche qualitative, associant les salariés. Ils sont les mieux placés pour identifier et faire remonter les problématiques ». Préventeur santé-sécurité au sein du groupe SUEZ, Sylvie Leflon précise : « La participation de chacun est nécessaire pour progresser et rester proactifs. Les experts de l’ASTAV, de STSA et de la CARSAT sont essentiels : ils apportent une plus-value médicale, technique et scientifique ». ASTAV et STSA : une démarche conjointe Médecins du travail, le Dr Didier Courcier, STSA, suit le site de Maubeuge et le Dr Bernard Ruiz, ASTAV, celui d’Anzin. Ergonome à STSA, Sabrina Girard

explique : « Nous avons mis en place trois groupes de travail communs aux deux sites : organisations, moyens techniques, vêtements de travail. Ce dernier groupe s’explique parce que les chantiers se réalisent autant en hiver, dans le froid, qu’en été en pleine chaleur ». Tony Bureau, ergonome à l’ASTAV, précise : « Ces groupes de travail ont associé l’encadrement, les employés et les ouvriers en liaison avec le CHSCT, dans une dynamique constructive ». Ergonome à STSA, Ludovic Le Goupil précise : « Nous leur apportons des conseils techniques tant pour l’évaluation que pour les préconisations de solutions. Pour la mesure des vibrations causées par certains outils, nous avons bénéficié de l’expertise de la CARSAT ». Février 2018 : le plan d’action Sabrina Girard poursuit : « En février 2018, nous avons organisé une restitution générale des groupes de travail en présence de la direction. Les salariés ont présenté

1 - Santé au Travail Sambre Avesnois. 2 - Service de santé au travail du Valenciennois. 3 - Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail.

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Nous allons plus loin avec une démarche qualitative, associant les salariés Renaud Camus, directeur des sites, Groupe Suez.

le fruit de leur réflexion débouchant sur la construction d’un plan d’action». Renaud Camus conclut : « Nous avons à présent quinze référents volontaires représentatifs des différents métiers de l’entreprise. Chaque référent conseille ses pairs, fait remonter les informations, assure une veille technique et règlementaire, participe à l’élaboration de solutions. Ils constituent le Comité Innovation Prévention ». La démarche est devenue pérenne.

Flashez-moi !

...la suite sur le site internet


EN DIRECT

ÉTUDE DES MAÎTRES YVES ET YANN CHATELAIN 10 salariés Eve Chatelain, assistante à la rédaction d’actes

« Les résultats bénéfiques se sont vite fait sentir Eve Chatelain, Etude Maîtres Chatelain.

Le Dr Serge Gibbe est le médecin du travail de MTA, qui suit l’étude de Maîtres Chatelain : « C’est l’exemple typique d’une demande qui arrive directement auprès de Stéphanie Buisine, notre responsable du pôle prévention. Je donne mon accord et après, l’équipe intervient en totale autonomie. Je reste bien sûr informé des avancées ». Le Dr Gibbe précise : « Les visites périodiques sont une occasion de renouveler les conseils d’ergonomie. Mais, nous avons tous des difficultés à adopter et conserver les bonnes postures et les bons réglages de notre poste informatique, souvent en raison des contraintes de travail : client en face de soi, document de travail devant soi ou à côté du clavier... Et pourtant, ils sont essentiels. C’est la seule solution pour combattre mal de dos, fourmillements, torticolis. Il faut aussi tenir compte s’il s’agit d’un usage permanent ou par intermittence. Les temps de relâchement et de changements de posture, notamment la station debout, sont essentiels ». La santé arrive chez le notaire « En fait, le naturel revient au galop… Nous avons tous tendance à mal nous tenir devant

GUISE SANTE AU TRAVAIL DE SAINT-QUENTIN (MTA)

Travail sur écran

Ordinateurs, siège, souris et claviers : restons vigilants ! Implantée à Guise depuis 1926, l’étude de maîtres Yves Chatelain et Yann Chatelain emploie 10 salariés. Que l’on soit notaire, clerc de notaire, agent d’accueil, assistant, formaliste, comptable ou négociateur, les heures passées avec l’ordinateur sont nombreuses… Devant la demande d’une salariée, concernée par des douleurs dorsales importantes, l’entreprise fait appel au service prévention de Médecine du travail de l’Aisne (MTA). Avec réactivité, ce service de santé au travail a dépêché sur place une technicienne de prévention, après accord du médecin du travail. l’ordinateur, en oubliant les réglages compatibles avec notre santé. On se positionne mal, sans en prendre conscience. Et nous sommes assis pendant plusieurs heures… Quand on a une sensibilité au mal de dos, cela ne pardonne pas ! » nous situe Eve Chatelain, assistante à la rédaction d’actes. « Nous avons reçu Lydie Marlier, sur une demi-journée. Elle a examiné chaque poste de travail et a prodigué des conseils d’aménagement, voire de réaménagements à chacun, en fonction des spécificités rencontrées. Pour l’instant, il n’y a pas eu d’investissements matériels conséquents. Les résultats bénéfiques se sont vite fait sentir, notamment pour les soucis de dos ou de torticolis en fin de journée ». Des conseils personnalisés Lydie Marlier est technicienne de prévention à MTA : « L’intervention au sein de l’étude notariale de Maître Chatelain est classique devant des postes informatiques. J’ai pu rencontrer chacun pour prodiguer sur place des conseils adaptés. Dans certains cas, nous avons réinstallé totalement le poste de travail ». Lydie Marlier précise : « Il faut éviter les écrans trop bas, posés dans le

coin du bureau, qui forcent à des rotations du tronc avec inclinaison de la tête. Souvent le clavier est trop éloigné, tandis que le fauteuil n’est plus réglé. D’ailleurs, on s’assoit sur le bord de l’assise : cela n’arrange rien pour les jambes. Sans compter les problématiques d’éclairage mal adapté…Le poids des habitudes est toujours là. Petit à petit chacun a tendance à oublier les bons gestes et les bonnes postures. Et la colonne vertébrale se rappelle alors à notre bon souvenir ! ».

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La démarche complète sur le site internet !

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ERGONOMIE & ORGANISATION

>P révention TMS U D NE E A L’ C A T IS IO M N T.

De la cotation OSHA… à l’étude ergonomique

En sous-traitance de l’industrie automobile, Trémois produit des pièces intérieures de véhicules : tapis d’habitacle, pièces de coffre, plages arrière… Outre leurs qualités esthétiques, ces pièces jouent un rôle majeur dans l’environnement acoustique de l’habitacle. Implantée au Cateau-Cambrésis, l’entreprise emploie 173 collaborateurs. En relation étroite avec l’AISMT, service de santé au travail de Cambrai, Trémois s’est engagée dans une démarche de progrès pour la prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS). L’ensemble est conduit en liaison avec le CHSCT. Coralie Dehanne est responsable des ressources humaines : « Notre médecin du travail, le Dr Zulfikar Aytekin, est notre interlocuteur privilégié sur toute question de santé et sécurité au travail. Nos équipes Méthodes réalisent régulièrement la cotation de nos postes de travail avec la check-list OSHA ». La cotation OSHA permet, sur sept critères simples en tenant compte des durées d’exposition, de dépister les situations de travail à risque de TMS, en vue d’une analyse plus approfondie. « Dès lors que le résultat est supérieur à 9 sur un poste, nous décidons de trouver des solutions adaptées qui permettent de revenir à une cotation acceptable. Nous avons consulté le Dr Aytekin, sur des postes où nos équipes n’avaient pas identifié ces solutions ». Le poste de négoce Pour exemple, une étude ergonomique est en cours sur le poste de négoce. Coralie Dehanne explique : « Sur ce poste, les salariées travaillent en équipe de deux. Elles reconditionnent, dans des contenants correspondant aux prescriptions de nos clients, des pièces de différents poids et tailles, reçues en grands volumes ». Hélène Bouret, ergonome et psychologue du travail à l’AISMT, a pris en charge la demande, avec Alexis Crespin, stagiaire en Master 1 d’ergonomie à l’Université 08

de Lille. La direction du site, les partenaires sociaux et les opérateurs sont associés dans une démarche participative dans un souci d’une amélioration pérenne des conditions de travail. L’ergonomie, une alliée La démarche ergonomique permet de prendre en compte les facteurs biomécaniques, psychosociaux, organisationnels et environnementaux. « Les opératrices ont entre 45 et 60 ans. Elles sont associées à l’observation de la situation de travail et la recherche de solutions », précise Alexis Crespin. « Après une phase d’analyse de la demande et une visite de l’entreprise en mars 2018, avec rencontre des différents acteurs concernés, nous avons engagé l’analyse des tâches et des contraintes. Les différences entre travail prescrit et travail réel, ainsi que les aspects organisationnels, sont abordés. L’aménagement de ce type de poste demande une importante réflexion pour trouver des outils mobiles et adaptés aux différentes manutentions ». Les perspectives Alexis Crespin poursuit : « Un comité de pilotage, associant direction, membres du CHSCT et de l’AISMT a déjà eu lieu en mai dernier. Il a permis d’échanger sur le contexte

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de la situation de travail, l’analyse des tâches, l’évaluation des charges de travail. Il a permis de présenter les premières hypothèses de préconisations. Un deuxième comité de pilotage est prévu en juillet prochain sur ces préconisations ». Actuellement, des études sont en cours pour la recherche et l’installation d’outils d’aide à la manutention polyvalents et adaptés. TRÉMOIS Industrie automobile 173 salariés Coralie Dehanne, responsable des ressources humaines CATEAU-CAMBRÉSIS SANTÉ AU TRAVAIL DE CAMBRAI (AISMT)

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En savoir + sur la méthode

OSHA...



Vu ! BONHEUR AU TRAVAIL

DROIT A LA DÉCONNEXION

En France : 28 % des actifs sont très satisfaits de leur situation professionnelle ; 7 % sont satisfaits ; 34 % sont insatisfaits et 18 % sont très insatisfaits ; 13% des actifs sont à mi-chemin, entre le mal être ou le mieux être. Trois leviers d’actions sont scientifiquement établis : la reconnaissance, l’autonomie et la qualité des relations humaines.

52 % des cadres pensent que leur entreprise devrait mieux appliquer le droit à la déconnexion. Depuis 2017, le Code du travail impose l’obligation de mettre en place des instruments de régulation des outils numériques, afin d’assurer les temps de repos et de congés des salariés et de respecter ainsi l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée.

Source : Baromètre National du Bonheur au Travail, Fabrique Spinoza, mai 2017.

SANTÉ DES ARTISANS DU BTP Fruit du partenariat entre l’IRIS ST, la CAPEB et la CNATP, le 4e baromètre annuel « ARTI SANTE BTP » montre que 61 % des artisans du BTP se déclarent en bonne santé contre 80 % en 2014. 68 % souffrent de douleurs musculaires ou articulaires. 24 % souffrent de troubles émotionnels (irritabilité, nervosité, angoisse). 58 % se trouvent stressés. 8 % déclarent avoir été victime d’un burn out et 29 % pensent l’avoir peutêtre fait. Source : iris-st.org (Enquête réalisée en France métropolitaine, par questionnaire en ligne auprès de 2 222 chefs d’entreprises artisanales du BTP, de 0 à 19 salariés, en décembre 2017).

Source : managerattitude.fr.

TMS PROS 2018-2022 Première cause de maladie professionnelle indemnisable en France, les TMS ont augmenté de 60 % depuis 2003. Développé par l’Assurance Maladie - Risques Professionnels, le programme de prévention TMS PROS est renouvelé pour 4 ans. Outre un accompagnement individualisé en ligne, TMS PROS vous permet de bénéficier d’aides pour le diagnostic et la prévention, en prenant contact avec la CARSAT (Caisse d’Assurance Retraite et de Santé au Travail). Source : tmspros.fr

« GEOSÉCURE » Grâce à cette ceinture discrète et connectée, les travailleurs isolés bénéficient d’un dispositif d’alarme manuelle ou automatique en cas d’agression, malaise, chute ou immobilisation prolongée. Dispositif d’alarme pour travailleur isolé (DATI), elle permet de déclencher une alerte qui géo-localise la victime pour lui adresser rapidement les secours. Rechargeable, la ceinture a une autonomie de deux jours à une semaine. Prix de l’innovation Préventica 2017, geosecure.fr

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DOSSIER

Services à la personne

ON EN AURA TOUS BESOIN UN JOUR ! En France, chaque année et en données arrondies, près de 900 000 000 d’heures rémunérées pour des services à la personne sont exercées au domicile des particuliers. Environ 2 000 000 de particuliers emploient directement 900 000 intervenants pour réaliser à leur domicile des prestations de service à la personne, pour un total

de près de 500 000 000 d’heures rémunérées. Près de 30 000 organismes actifs de services à la personne emploient 400 000 intervenants pour réaliser des prestations au domicile de leurs clients, représentant près de 400 000 000 d’heures de travail. Des situations de santé et sécurité au travail très différentes !

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BTP SERVICES E COMMERC T & ARTISANA INDUSTRIE INTERIM

Services à la personne DE QUOI PARLE-T-ON ? Les « services à la personne » recouvrent un champ d’activité très vaste : de la garde d’enfant à l’aide en situation de dépendance (temporaire ou définitive), en passant par le jardinage ou le bricolage. C’est dire que les situations de travail sont extrêmement variées. Outre que les intervenants travaillent au domicile des personnes aidées, les déplacements sont nombreux et sous contrainte de temps. Car les délais et durées d’intervention sont très souvent comptés. La charge affective et relationnelle est également très présente.

LA SANTÉ PHYSIQUE

LES CONTRAINTES DE TEMPS

• Tous les risques peuvent être rencontrés en fonction de l’activité : blessures, chute, risques chimiques, risques mécaniques, etc. • Point d’attention : les risques liés à la mobilisation de personnes en situation de handicap ou en situation de perte d’autonomie.

• La durée d’intervention est décomptée ; si elle est trop réduite elle intervient comme un risque supplémentaire, notamment en cas d’aléa. • Le délai d’intervention intervient également comme une contrainte forte. • Dans les activités d’accompagnement et de soins, les horaires sont décalés (matin, fin de journée, nuit).

LA SANTÉ MENTALE

• Les charges affectives ou émotionnelles sont présentes dans l’accompagnement de personnes en situation de handicap ou de perte d’autonomie. • L’organisation du travail, la reconnaissance et le degré d’autonomie sont des facteurs de bien-être ou de mal-être ; ils sont constitutifs de risques psychosociaux.

IMPORTANT !

Priorité PRST 3 (2016-2020) Les activités de service à la personne constituent une priorité de santé et sécurité au travail dans le Plan régional de santé au travail, adopté par les partenaires sociaux et la Direccte (Direction régionale des entreprises, de la consommation, de la concurrence, du travail et de l’emploi).

LES RISQUES ROUTIERS

• Les trajets sont au cœur de l’activité : un accident de la route entre deux domiciles est un accident de mission. • Attention : ces trajets se réalisent souvent sous contrainte de temps.

A NOTER ! Suivi individuel renforcé ? La connaissance du travail réel (ex. : horaires décalés, risques infectieux, …) peut conduire à adopter, sous décision du médecin du travail, un suivi individuel renforcé en santé au travail des salariés.

S’INFORMER ET ÊTRE CONSEILLÉ !

Les services de santé au travail interentreprises ont une mission générale de CONSEIL DES EMPLOYEURS, DES SALARIÉS ET LEURS REPRÉSENTANTS afin d’éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail :

ILS CONDUISENT LES ACTIONS DE SANTÉ AU TRAVAIL, ILS CONSEILLENT SUR LES DISPOSITIONS ET MESURES NÉCESSAIRES, ILS ASSURENT LE SUIVI DE L’ÉTAT DE SANTÉ DES TRAVAILLEURS, ILS CONTRIBUENT À LA TRAÇABILITÉ DES EXPOSITIONS PROFESSIONNELLES ET À LA VEILLE SANITAIRE. 12

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DOSSIER

TROIS MODES D’EMPLOI ! Le recours à une tierce personne relève de deux cadres contractuels et juridiques différents :

LE POIDS DES MOTS… Différentes expressions sont utilisées. Elles se recoupent, tout en décrivant des domaines d’activité identiques ou complémentaires… et des représentations différentes des risques. Service à la personne Il s’agit du terme générique utilisé pour un ensemble d’activité très large : garde d’enfants (de plus ou moins de trois ans), soutien scolaire, jardinage, repassage, bricolage, assistance informatique au domicile, aide et assistance à la vie quotidienne pour des personnes en situation de handicap ou de perte d’autonomie, etc. Aide au domicile Cette expression recouvre les activités décrites ci-dessus tout en précisant explicitement que le lieu de travail de l’intervenant est le domicile. Cette expression induit implicitement que l’intervenant est exposé aux risques liés aux déplacements, notamment routiers. Aide à la personne Cette expression est plus utilisée pour les activités comprenant des relations importantes avec la personne aidée : accompagnement, aide à la mobilisation, aide à la toilette, aide à la prise de repas… Outre les risques liés aux déplacements, cette expression induit l’exposition à des risques de mobilisation de personne, de charges émotionnelles et affectives, de risques infectieux, etc.

- Emploi direct d’un intervenant au domicile, avec ou sans mandataire. - Appel à un organisme prestataire, qui envoie un de ses salariés.

Trois modalités d’emploi coexistent donc : EMPLOI DIRECT SANS MANDATAIRE

La personne aidée ou son entourage est l’employeur. Dans ce cas, la personne aidée ou son entourage recrute, établit le contrat de travail, gère les fiches de paye et toutes les déclarations relatives à un contrat de travail. Il lui incombe donc toutes les obligations et responsabilités relatives à la santé et la sécurité au travail.

EMPLOI DIRECT AVEC MANDATAIRE

En cas d’emploi direct avec mandataire, la personne aidée ou son entourage est l’employeur. L’organisme mandataire réalise le recrutement, établit le contrat de travail, gère les fiches de paye et toutes déclarations relatives à un contrat de travail. Toutes les obligations et responsabilités relatives à la santé et la sécurité au travail incombent à la personne aidée ou son entourage qui est l’employeur, sur le plan légal.

RECOURS A UN PRESTATAIRE

En cas de recours à un organisme prestataire, la personne aidée ou son entourage passe un contrat de prestation de service avec cet organisme. Les obligations et responsabilités relatives à la santé et la sécurité au travail incombent à l’organisme prestataire qui est l’employeur de l’intervenant, mis à disposition par le contrat de prestation de service.

Attention !

Dans le cadre du régime commun de déclaration, que l’on soit mandataire ou prestataire, certaines activités de services à la personne sont soumises à agrément ou autorisation (Décret n°2016-750 du 6 juin 2018, article D.7231-1 du code du travail).

• Exemples d’activités sous agrément

- Garde d’enfants de moins de 3 ans à domicile (en mode prestataire et mandataire). - Assistance dans les actes quotidiens de la vie aux personnes âgées, handicapées ou atteintes de pathologies chroniques, en mode mandataire.

• Exemples d’activité sous autorisation, en mode prestataire uniquement

- Assistance dans les actes quotidiens de la vie ou l’aide à l’insertion sociale aux personnes âgées, handicapées ou atteintes de pathologies chroniques qui ont besoin de telles prestations à leur domicile.

• Exemples d’activité sans agrément ou autorisation

- Entretien de la maison, Petits travaux de jardinage, Travaux de petit bricolage. - Garde d’enfants de plus de 3 ans à domicile. - Soins esthétiques à domicile pour les personnes dépendantes. Source : entreprises.gouv.fr

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BTP SERVICES E COMMERC T & ARTISANA INDUSTRIE INTERIM

Services à la personne SE FORMER POUR BIEN PORTER ET MIEUX SE PORTER ! Comme de nombreux services de santé au travail, ACTION SANTE TRAVAIL développe pour ses entreprises adhérentes des formations connues antérieurement sous le terme « Gestes et Postures ». Ces formations, agréés par l’Institut National de Recherche et Sécurité (INRS), s’appellent aujourd’hui « PRAP », comme Prévention des risques liés à l’activité physique. Un format spécifique Médico-social a été mis au point pour les salariés amenés à aider une personne en situation de perte d’autonomie, quel que soit son âge. En effet, dans ce cas, réaliser des aides à toilette ou des transferts au fauteuil ne s’improvise pas. Catherine Dassonville est l’une des sept formatrices PRAP au sein d’ACTION SANTE TRAVAIL (service de santé au travail d’ArrasLens-Béthune-Carvin-Hénin Beaumont). « Nous avons des formations PRAP destinées aux secteurs IndustrieBâtiment-Bureaux-Commerce. Et nous

avons des modules de formation destinés au secteur médico-social. Nous intervenons alors auprès d’hôpitaux, de maisons d’accueil spécialisé (MAS), d’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), et tout organisme de soins, d’aides et maintien au domicile ».

S’ADAPTER En effet, avoir des gestes et postures adaptées auprès d’une personne en situation de handicap ou de perte d’autonomie est très important. Tant pour l’aidant, que la personne aidée. Les situations sont très variées : mise au lit, transfert au fauteuil, toilette, réinstallation au lit ou au fauteuil, transfert en véhicule automobile, etc. Les contextes sont très variables : établissement de soin ou d’hébergement, domicile, voire extérieur. Les personnes aidées sont toutes différentes : âge, poids, degré de perte d’autonomie. Il faut s’adapter en permanence, avec ou sans dispositif d’aide à la manutention.

SE FORMER

SE RECYCLER

Catherine Dassonville précise : « La formation comprend une partie théorique et une partie pratique. Elle se déroule en situation réelle de travail : chambre libre d’un établissement ou lit médicalisé, avec utilisation de lève-malade, de verticalisateur, de planche de transfert ou de drap de glisse. Dans un premier temps, nous échangeons sur les particularités de l’anatomie et de la mobilité : comprendre les bons gestes et identifier les facteurs aggravants. Puis, nous donnons des outils pour observer et analyser une situation de travail. Le stagiaire doit mettre en pratique une observation de poste. Enfin, nous réalisons des mises en situation et des mises en pratique. L’idéal est de réaliser deux jours de formation consécutifs et de se revoir pour le dernier jour après un délai, permettant au stagiaire de mettre en pratique dans sa situation réelle de travail ». ...la suite

« Au terme d’une formation de trois jours, nous remettons un certificat validant les acquis », précise Catherine Dassonville. Cette attestation est valable deux ans. En effet, une séance d’une journée est alors organisée, permettant d’actualiser et de conforter ses acquis.

sur le site internet !

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BTP I SERVICE I COMMERCE & ARTISANAT I INDUSTRIE I INTERIM

LE CAHIER JURIDIQUE détachable !

Avec ce cahier central, nous abordons les fondamentaux législatifs de la santé au travail, tels que définis par le Code du travail et donc, applicables aux entreprises privées. Il s’agit de synthèses qui ne substituent pas à la lecture des textes originaux.

L’ACTU

Le harcèlement moral et sexuel au travail Texte de référence : Harcèlement moral au travail : articles L. 1152-1 à 6 du Code du travail. Harcèlement sexuel au travail : articles L. 1153-1 à 5 du Code du travail. Ces six derniers mois, les questions de harcèlement sexuel sont au premier plan de l’actualité. Le Code du travail distingue deux faits de harcèlement, en donnant une définition légale à chacun : • HARCELEMENT MORAL (article L. 1152-1) : Agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible : - de porter atteinte aux droits et à la dignité, - d’altérer la santé physique ou mentale - de compromettre l’avenir professionnel. • HARCELEMENT SEXUEL (article L. 1153-1) : Soit des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à la dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à l’encontre du salarié une situation intimidante, hostile ou offensante ; Soit toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.

Comme résumé dans les pages suivantes, le Code du travail établit des dispositions : - de sanctions disciplinaires (sans préjudice des sanctions pénales) vis à vis de la personne commettant les faits de harcèlement. - de non-discrimination vis-à-vis de la victime (ou des victimes) ou d’une personne témoignant des faits de harcèlement, ou les relatant. - d’information de tout salarié sur les sanctions pénales prévues. Attention : La responsabilité de l’employeur est engagée La prévention du harcèlement moral et sexuel au travail fait partie des obligations générales de l’employeur, stipulées aux articles L. 4121-1 à 5 du Code du travail : « assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés ». La prévention du harcèlement moral et sexuel au travail entre dans le champ de l’obligation de résultat en matière de sécurité, créé par la jurisprudence (Arrêt n°00-10051 de la Cour de cassation en date du 28 février 2002, et suivants).

(Source : service-public.fr) Entreprise & Santé • 3e trimestre 2018 • N°43 • www.entrepriseetsante.fr

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Code du travail Harcèlement moral et harcèlement sexuel au travail Textes de références : Code du travail (1ère Partie : Les relations individuelles de travail, Livre 1 : Disposition

préliminaire, Titre 5 : Harcèlement, Chapitre 2 : Dispositions générales). Les articles L. 1152 et L. 1153 du Code du travail définissent les dispositions relatives au harcèlement moral et sexuel au travail.

Définition du harcèlement moral au travail : agissements répétés susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité, d’altérer la santé physique ou mentale, de compromettre l’avenir professionnel. Article L. 1152-1 Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Pas de sanction si refus de subir ou témoignage et relation de faits connus de harcèlement moral au travail Article L. 1152-2 Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

Obligation de prévention du harcèlement moral au travail Article L 1152-4 L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral. Les personnes mentionnées à l’article L. 1152-2 sont informées par tout moyen du texte de l’article 222-33-2 du Code pénal.

Sanction disciplinaire Article L. 1152-5 Tout salarié ayant procédé à des agissements de harcèlement moral est passible d’une sanction disciplinaire.

Médiation

Sanction pénale : 2 ans d’emprisonnement, 30 000 € d’amende Article 222-33-2 du Code pénal Le fait de harceler autrui par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.

Article L. 1152-6 Une procédure de médiation peut être mise en œuvre par toute personne de l’entreprise s’estimant victime de harcèlement moral ou par la personne mise en cause. Le choix du médiateur fait l’objet d’un accord entre les parties. Le médiateur s’informe de l’état des relations entre les parties. Il tente de les concilier et leur soumet des propositions qu’il consigne par écrit en vue de mettre fin au harcèlement. Lorsque la conciliation échoue, le médiateur informe les parties des éventuelles sanctions encourues et des garanties procédurales prévues en faveur de la victime.

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Le harcèlement sexuel au travail : propos ou comportements répétés à connotation sexuelle Article L. 1153-1 Aucun salarié ne doit subir des faits : 1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ; 2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.

Pas de sanction ni de mesure discriminatoire pour avoir subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel au travail Article L. 1153-2 Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage, aucun candidat à un recrutement, à un stage ou à une formation en entreprise ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel tels que définis à l’article L. 1153-1, y compris, dans le cas mentionné au 1° du même article, si les propos ou comportements n’ont pas été répétés.

Pas de sanction en cas de témoignage ou de relation de faits connus de harcèlement sexuel au travail Article L. 1153-3 Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné de faits de harcèlement sexuel ou pour les avoir relatés.

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Obligation de prévention du harcèlement sexuel au travail

Sanction disciplinaire

Article L. 1153-5 L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d’y mettre un terme et de les sanctionner. Dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche, les personnes mentionnées à l’article L. 1153-2 sont informées par tout moyen du texte de l’article 222-33 du Code pénal.

Article L. 1153-5 Tout salarié ayant procédé à des faits de harcèlement sexuel est passible d’une sanction disciplinaire.

Sanction pénale : 2 à 3 ans d’emprisonnement, 30 000 à 45 000 € d’amende Article 222-33 du Code pénal I. - Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. II. - Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. III. - Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 s d’amende. Ces peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende lorsque les faits sont commis : 1° P ar une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ; ur un mineur de quinze ans ; 2° S 3° S ur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ; 4° S ur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur ; 5° Par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice.

Obligation d’informer le (les) salarié (s) En application de la loi 2012-954 relative au harcèlement sexuel et de l’ordonnance 2014-699 portant simplification et adaptation du droit du travail, il y a obligation, quelle que soit la taille de l’entreprise, d’informer par tout moyen le ou les salarié (s) des sanctions pénales pour harcèlement moral et harcèlement sexuel au travail : - harcèlement moral : contenu de l’article 222-33-2 du Code pénal (voir ci-dessus) - harcèlement sexuel : contenu de l’article 222-33 du Code pénal (voir ci-dessus) Ces dispositions sont reprises dans les articles L. 1152-4 (harcèlement moral) et L. 1153-5 (harcèlement sexuel) du Code du travail.

Règlement intérieur (obligatoire pour toute entreprise employant habituellement au moins 20 salariés) Le règlement intérieur doit rappeler les dispositions du Code du travail relatives au harcèlement moral et sexuel au travail.

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DOSSIER

Auxiliaires de vie

AU PLUS PRÈS DU TRAVAIL RÉEL… La prévention des risques professionnels dans le secteur des services à la personne est une des priorités majeures du Plan Régional Santé Travail 2018-2022. Grâce à son équipe pluridisciplnaire, l’ASTIL développe la prévention des risques professionnels des auxiliaires de vie dès leur formation en centre d’apprentissage. Ces apprenti(e)s deviennent ensuite salarié(e)s d’un organisme spécialisé ou de particuliers. Les équipes pluridisciplinaires de l’ASTIL les retrouvent pour la prévention au cours de leur vie professionnelle. La boucle est bouclée. En 2016, après trente ans de médecine générale, le Dr Jean-Marc Himpens est devenu médecin collaborateur en santé au travail à ASTIL : « Notre service de santé au travail voit, en suivi individuel, les aides à domicile, ainsi que les formateurs de l’AFPA. J’ai tout de suite fait le rapprochement sur la prévention du risque d’Hépatite B pour les auxiliaires de vie. Mais aussi d’autres risques infectieux : tuberculose et scarlatine, par exemple. Car, c’est dès leur formation qu’il faut sensibiliser les aides à domicile ! Et il y a aussi les risques de troubles musculo-squelettiques liés à la mobilisation des personnes, le risque psychosocial lié à la relation étroite qui se crée entre aidant et aidé, le risque routier lié aux déplacements incessants. Sans compter le risque lié aux animaux domestiques ! ».

Comment repérer et suivre les auxiliaires de vie au domicile ? La question parait simple ; la réponse est plus complexe. « Il s’agit en très grande majorité de femmes. Pourtant le métier est ouvert aux hommes. Quand elles sont employées par un organisme spécialisé, on arrive à les repérer. Quand elles sont embauchées par un particulier, c’est plus difficile. Tout dépend comment il ou elle a été déclarée. La connaissance du travail réel est souvent le seul moyen d’identifier le risque. Dès lors que la personne réalise une assistance aux gestes d’hygiène ou une aide à la toilette, on doit considérer que le travail expose à un risque infectieux ». D’autant que, souvent, le degré de dépendance augmente avec l’âge et que le salarié effectuant l’aide à la personne ne change pas.

Être au clair avec ses vaccinations Vis à vis du risque d’Hépatite B, le Dr Jean-Marc Himpens a mis en place une démarche simple, respectueuse des protocoles de la Haute Autorité de Santé : « Sur une simple prise de sang, nous pouvons savoir si la personne a déjà été en contact ou pas avec le virus de l’hépatite B. Si elle n’est pas immunisée, nous lui proposons de réaliser la vaccination, avec une incitation forte en faveur de celle-ci. Le salarié nous signifie s’il accepte ou refuse cette vaccination. Il reste libre de choisir ». Une information sur la conduite à tenir en cas d’accident avec exposition au sang est également réalisée.

Informer dès l’apprentissage Pour le Dr Jean-Marc Himpens, ces informations doivent être données dès l’apprentissage. Infirmière de santé au travail, Anne Rasseneur assure ces sessions d’information, mises au point avec Julie Croquet, chargée de projet : « Avec les centres AFPA de Calais et de Boulogne sur mer, nous avons conçu des modules pour les formations d’assistantes de vie aux familles. Nous abordons, de manière très participative et pragmatique, différents risques, que ces apprenti(e)s vont vite retrouver au cours de leurs stages. Le risque infectieux certes, mais aussi la prévention des TMS, des risques routiers et des risques psychosociaux… Les échanges sont privilégiés, pour qu’ils ou elles bénéficient de solutions pratiques avant d’entrer dans leur vie professionnelle ». Le succès de cette démarche repose sur un important travail d’équipe, associant des compétences pluridisciplinaires.

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« Les personnes qui ont été sensibilisées à la prévention au cours de leur formation ont deux fois moins d’accident du travail que ceux qui ne l’ont pas été »

Centres AFPA de Calais et Boulogne-sur-mer

SENSIBILISER, INFORMER… DES LA FORMATION !

Marie-Hélène Reymbaut est formatrice « Assistant(e) de vie aux familles » à l’AFPA : « Nous assurons une formation qui est sanctionnée par un titre professionnel de niveau V (BEP) pour l’aide à domicile, en 585 heures de formation théorique sur 5 à 6 mois, et 8 semaines en stage sur le terrain. Par action de formation, nous accueillons 12 à 16 personnes, de 20 à 55 ans, essentiellement des femmes demandeuses d’emploi ou en reconversion professionnelle. En 2017, Julie Croquet et Anne Rasseneur, de l’ASTIL, ont assuré une session de sensibilisation sur le risque infectieux lors d’une action de formation à Boulogne sur mer. Devant les résultats très positifs, avec notre manager de formation Denis Buhagiar, nous avons décidé de l’étendre dans l’année et sur les deux sites. L’ASTIL nous permet de bénéficier d’une équipe de spécialistes, abordant six thèmes sous un angle pragmatique et participatif : différence entre travail réel et prescrit, gestes et postures dans l’entretien d’un domicile, mobilisation des personnes dépendantes, risques infectieux et conduite à tenir, risques routiers, sensibilisation aux risques psychosociaux. A la fin de ces sessions, chaque future salariée sait également ce que l’ASTIL peut lui apporter dans sa future vie professionnelle ». La grande majorité de nos apprenti(e)s trouve un emploi dans le bassin d’emploi du lieu de formation.

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Aidàdom Côte d’Opale ( Le Portel et Etaples/mer)

DE LA CERTIFICATION À L’ACCOMPAGNEMENT EN SANTÉ

Créée en 2007 et présidée par M. Pierre Jaffré, AIDADOM est une association sans but lucratif, qui emploie 125 salariés dont 97 % sont des femmes. AIDADOM intervient sur la côte d’opale, d’Ambleteuse à Berck-sur-Mer. Bénéficiant d’une double certification (NF SERVICE – Service à la personne et CAP’HANDEO), elle assure des services au domicile pour personnes actives, âgées ou handicapées : jardinage, aides à la toilette, élaboration de repas, assistance au lever et au coucher, accompagnement à des activités extérieures (sorties, courses, promenade). Emmanuel Lepoutre en est le directeur : « L’ASTIL est associée à notre démarche de prévention, en liaison, en interne avec le CHSCT. Nous bénéficions de conseils, d’un suivi continu, médical et paramédical. Des sessions d’informations sont également réalisées : risque routier, gestes et postures, risques d’accident d’exposition au sang. Pour ces derniers, il est capital que nos salariés connaissent bien les procédures de désinfection et de prise en charge en cas de piqure accidentelle, au domicile d’un de nos clients. Récemment, sont apparus des besoins d’informations sur les maladies anciennes : gale, scarlatine, tuberculose. Des visites au domicile ont eu lieu, permettant de voir les conditions réelles de mobilisation des malades, notamment des transferts au fauteuil. De même, nous avons été sensibilisés à l’analyse de l’arbre des causes, à mettre en œuvre en cas d’accident ». Ces sessions d’information s’adressent à l’ensemble du personnel, y compris les encadrants.


DOSSIER

Services à la personne

CAPITALISER LES EXPERIENCES DE CHACUN PERMET DE S’AMELIORER EN CONTINU Avec l’ASSAD de Dunkerque (Association de Services et de Soins à Domicile), le Centre pour le Développement de la Santé au Travail (CEDEST) a développé une collaboration experte, à l’écoute des besoins des salariés. Un travail d’enquête, réalisé auprès de 350 auxiliaires de vie en 2016-2017, a notamment porté sur la perception et la connaissance des risques infectieux. La prise en charge du personnel de l’ASSAD en Suivi Individuel Renforcé (SIR) par le CEDEST permet d’engager une collaboration active pour une politique de qualité et de suivi régulier. Pour la prévention, les expériences de chacun profitent à tous ! Le Dr Philippe Defasque est le médecin du travail du CEDEST qui suit l’ASSAD de Dunkerque : « Avec Aurore Deschamps, infirmière de santé au travail au CEDEST, nous assurons un suivi de proximité. Le travail d’équipe est essentiel. En mettant les salariés de l’ASSAD en suivi individuel renforcé, nous engageons une collaboration active et nous concourons à une politique de qualité au sein de l’Assad. Nous apportons une cohérence entre l’importance sociale de la prévention et les impératifs de qualité de leurs missions. La participation aux réunions de CHSCT, le dialogue constructif et permanent avec la direction et les salariés permettent de développer des actions continues, devant des enjeux de prévention de première importance ».

Le risque infectieux « Le risque est réel et méconnu ». Ancienne infirmière libérale devenue infirmière de santé au travail au CEDEST, Aurore Deschamps connaît les contraintes du travail à domicile : « Dans le cadre de mon mémoire de spécialisation en santé au travail, j’ai réalisé une enquête anonyme auprès de 350 auxiliaires de vie, en 2016-2017. Les résultats sont là : une exposition certaine au risque biologique dans leurs activités quotidiennes de travail, un manque de connaissance évident sur les modes de contamination et sur la conduite à tenir en cas d’accident d’exposition au risque viral (AEV). Or la désinformation majore le danger, c’est une réalité ». En liaison avec le

« Chaque jour, un à deux travailleurs ne rentrent pas chez eux le soir… » En liaison avec le CEDEST, Alain Partage, délégué régional de l’association PSRE (Prévention à la Sécurité Routière en Entreprise) intervient au sein de l’Assad de Dunkerque : « Je travaille de manière très participative et ludique avec des groupes de 40 personnes comprenant tous les métiers : infirmiers, aides-soignants, aides à la personne, agents de ménage et administratifs. Il faut savoir que chaque jour, en France, un à deux travailleurs ne rentrent pas chez eux le soir du fait d’un accident mortel de la route. Avec de courtes vidéos d’une minute et des boitiers interactifs anonymes qui permettent de répondre en temps réel, nous abordons en 3 heures de nombreux aspects : conduite automobile et accidentologie, conduite et inattention, vitesse, ceintures et objets transportés, fatigue, addictions, outils GPS et régulateurs de vitesse, vision et angle morts… Partant du vécu de chacun, en le respectant sans jugements, ces échanges permettent de se situer et de progresser ».

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Dr Philippe Defasque et l’ASSAD, Aurore Descamps va donc mettre en place, dès 2018, à l’occasion notamment des réunions trimestrielles d’expression du personnel, de courtes sessions de sensibilisation au risque infectieux. Les équipes de formation interne à l’ASSAD vont également bénéficier de ces sessions de sensibilisation et d’information. Ces sessions sont basées sur la connaissance du travail réel et sur l’état des connaissances scientifiques en la matière.

Le suivi individuel « Pour l’ASSAD, avec Aurore Deschamps, nous avons opté pour le suivi individuel renforcé, cela me permet d’avoir une connaissance précise de la situation de chacun et de mettre en perspective les enjeux collectifs de prévention, tant vis-àvis de soi-même que vis-à-vis des personnes prises en charge à leurs domiciles respectifs », nous explique le Dr Philippe Defasque. « Lors des entretiens individuels de prévention assurés par Aurore Deschamps, en tant qu’infirmière de santé au travail, et des visites médicales que j’assure personnellement, nous pouvons dialoguer avec chaque salarié au regard de son statut sérologique et dans le respect du secret médical. Le statut sérologique est déterminé par la réalisation

d’une prise de sang évaluant des marqueurs sérologiques spécifiques permettant de caractériser un « historique » vis-à-vis du virus. Dans le cas du virus de l’hépatite B : vacciné ou pas, protégé ou pas, ayant eu un contact antérieur avec le virus… guéri ou pas (infection chronique plus ou moins active, à potentiel infectant variable) porteur d’un virus de co infection (virus de l’hépatite Delta) ? Ceci permet d’engager une information personnalisée et objective sur l’importance des moyens de protection (comme la vaccination) ». Chaque salarié reste libre de ses choix vaccinaux. « L’important est que chacun puisse prendre ses responsabilités, en toute objectivité et dans le respect mutuel au cours d’un dialogue apaisé vis-à-vis des obligations vaccinales » conclut le Dr Philippe Defasque.

LES TMS, LA ROUTE… MAIS AUSSI LES ACCIDENTS D’EXPOSITION AU SANG. Créée en 1965, l’ASSAD est présidée depuis 1993 par le Dr Marc Prud’homme. Dirigé par Françoise Hilst, l’Assad comprend 650 salariés et regroupe plusieurs services : un service prestataire d’aide à domicile qui effectue plus de 331 000 heures auprès de 2 175 bénéficiaires, dont 8 700 heures dans le cadre de la garde itinérante (jour et nuit) ; un service de garde d’enfants en horaires atypiques Gédhéon (plus de 10 000 heures) ; un service mandataire d’employés familiaux qui intervient auprès de 51 bénéficiaires ; un accueil de jour de 14 places ; un centre de soins infirmiers situé à Bergues ; et un service polyvalent d’aide et de soins à domicile (SPASAD) de 336 places dont 25 réservées à des personnes en situation de handicap. Christine Allentin est directrice du pôle soins à l’Assad : « Les auxiliaires de vie, les aides-soignants et les infirmiers interviennent au domicile de personnes de tout âge, sept jours sur sept. Les interventions sont programmées auquel cas, les salariés travaillent par tournées. Mais nous tenons aussi compte des interventions inopinées faites

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à la demande de nos clients. Notamment par ceux qui sont abonnés au service de la garde itinérante dans le cadre de la téléassistance pour les séniors. Au domicile, le facteur temps est primordial puisque les agents disposent d’un laps de temps limité pour effectuer les actes. Le Dr Philippe Defasque, notre médecin du travail, et Madame Aurore Deschamps, infirmière de santé au travail au CEDEST, participent régulièrement aux réunions trimestrielles du CHSCT. Outre une analyse régulière et rigoureuse de la sinistralité, le CEDEST nous apporte compétences et expertise spécialisée vis-à-vis de nos activités. Nous avons développé des actions de prévention des Troubles Musculo-Squelettiques et des accidents de la route. Après un travail d’enquête réalisé auprès de nos 350 auxiliaires de vie, nous développons des actions de sensibilisation aux accidents d’exposition au sang, avec un suivi précis et adapté de nos salariés. En effet, ce risque est bien connu en établissement de soins. Il l’est moins au domicile des patients. Il est pourtant tout autant essentiel ».

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INVESTIR

Bien-être au Travail

De quoi parle-t-on ? Le « bien-être au travail » fait l’actualité de tous les médias. Et les reportages convergent : « le bien-être au travail rend l’entreprise compétitive, car si les salariés vont bien, l’entreprise va mieux ». Comme une découverte ! Voire un remède miracle… Nouvelles valeurs ? Nouvelles pratiques ? Effet de mode ? Existe-t-il une définition officielle ? Quelle place pour le « bien-être au travail » dans une entreprise ? Entreprise & Santé vous propose quelques éléments de réponse .

Certes, pour l’OMS, la santé est « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». En entreprise, la santé et la sécurité au travail recouvrent plusieurs domaines d’actions hautement complémentaires.

PREVENTION DES RISQUES PROFESSIONNELS : • Textes de références : Code du travail et Code de la Sécurité Sociale (Loi et décrets d’application) • Obligation d’évaluer (Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels) et d’éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail (Santé physique et santé mentale)

SANTÉ ET QUALITÉ DE VIE AU TRAVAIL • T exte de références : Accord National Interprofessionnel signé par les partenaires sociaux en date du 19 juin 2013 relatif à la Qualité de Vie au travail. • 8 points sont définis : l’environnement de travail, le développement personnel, le contenu du travail (autonomie, auto-organisation), soutien managérial, soutien collectif, dialogue social, sécurité de l’emploi, équilibre vie privée et vie professionnelle. • Une semaine nationale de la Qualité de Vie au Travail est organisée depuis 15 ans par le réseau ANACT-ARACT. • L’AFNOR mène des travaux sur l’éventualité d’une norme française.

• Obligation de sécurité de résultat (Jurisprudence « Amiante », 2002)

BIEN-ÊTRE AU TRAVAIL

• Dispositif obligatoire de financement et d’organisation des Services de Santé au Travail interentreprises ou autonomes

• Pas de texte législatif, règlementaire ou relevant d’accords sociaux nationaux apportant une définition précise.

• Dispositif obligatoire de financement de l’Assurance Accident du Travail-Maladie Professionnelle auprès du Régime Général (CNAMTS) ou du régime agricole (MSA).

• Dictionnaire Larousse : « État agréable résultant de la satisfaction des besoins du corps et du calme de l’esprit - Aisance matérielle qui permet une existence agréable ».

1-D irection Régionale de l’Emploi, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et des Entreprises, « Bien-être au travail et performance économique » étude réalisée par Laure Brahami, chargée de mission au Département compétitivité et international, Directeur de publication : Philippe Nicolas, Juin 2014, 40 p.

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ZOOM SUR

Plan régional santé travail 2016-2020

Prévention en entreprise : priorité aux dialogues ! Le Plan régional santé travail 2016-2020 a été adopté par une instance peu connue : le Coreoct (Comité régional d’orientation sur les conditions de travail). Mis en place par la Direccte Hauts-de-France, le Coreoct réunit les partenaires sociaux. Le 18 juin 2018, une matinée d’échanges a eu lieu à ARRAS. Elle était placée sous la haute autorité de Madame Michèle Lailler Beaulieu, directrice régionale Direccte Hauts-de-France. Entreprise & Santé résume ci-après la table ronde réunissant les partenaires sociaux et animée par Laurence Théry, directrice Aract Hauts-de-France.

« Saisir l’opportunité des nouvelles instances » Raymond Annaloro, président de région CFE-CGC, attire l’attention sur la disparition du CHSCT. Il faut donc être d’autant plus vigilant sur la mise en place du CSE, pour que la prévention primaire soit une priorité permanente de l’entreprise. Il faut, à ce propos, embarquer tous les acteurs de l’entreprise. Et, notamment l’encadrement. Au-delà des enjeux économiques, la Responsabilité sociale des entreprises (RSE) est une réalité : il est urgent d’éviter la réparation et de privilégier la prévention primaire.

« Les salariés connaissent leurs métiers » Georges Boulenger, secrétaire régional CGT souligne que le dialogue social doit être permanent, car les salariés connaissent leurs métiers. Pourtant, des progrès sont encore à faire… car 48 % des entreprises ont leur Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels (Duerp). Il faut aussi intégrer le vieillissement de la population au travail. La prévention doit faire partie des programmes de formation professionnelle. A terme, il faudrait pouvoir recruter des salariés déjà sensibilisés. La formation à la prévention chez les apprentis est essentielle.

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« Préserver l’expertise du CHSCT » Pour Onno Ypma, secrétaire général Hautsde-France CFTC, le dialogue social est essentiel, mais il ne faut pas perdre l’expertise acquise par le CHSCT dans la mise en place de la nouvelle instance représentative du personnel, à savoir le CSE (Conseil économique et social). D’autant plus qu’apparaissent de nouvelles formes de travail, qui viennent bouleverser les relations au travail. La formation des élus est ici essentielle.

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ZOOM SUR

uroses. illionsnisadtio’e 532 coM n des victim ût de l’indem

C’est le de maladies profesd’accidents du travail et les Hauts-de-France. sionnelles en 2016 pour ECCTE) (Source : CARSAT – DIR

2,34 € pour 1 € investit r investissemen C’est le retour moyen su n dans des entred’une action de préventio lai moyen de prises du BTP, avec un dé P) 2 ans. (Source : OPPBT

« La sécurité et la santé : une priorité concertée » Jérôme Lefebvre, représentant le MEDEF, souligne que les partenaires sociaux ont tous adopté le Plan régional de santé au travail. Il faut donc le mettre en œuvre. Pour cela, le CSE a explicitement des missions en santé et sécurité au travail, qu’il importe donc d’activer. La santé et la sécurité en entreprise sont des priorités essentielles dont les résultats positifs peuvent se mesurer. Ceci concourt au dialogue au sein de l’entreprise. Trois attitudes personnelles sont précieuses : le courage, l’exemplarité et le bon sens.

« Toutes les entreprises quelle que soit la taille » Arnaud Flament, secrétaire régional en charge de la santé au travail à la CFDT, souligne que la sécurité et la santé au travail concernent toutes les entreprises quelles que soient leurs tailles. Il va donc falloir accompagner toutes les entreprises, avec ou sans CSE. Pour cela, le dialogue intersyndical concourt aussi à la réussite, dans le respect de chacun dans le cadre de son mandat. La Qualité de vie au travail a fait l’objet d’un accord national interprofessionnel en 2013. Il fait consensus. Il faut privilégier les groupes de paroles dans les équipes, quel que soit le syndicat.

« Un travail commun » Jean-Jacques Bouchonnet, conseiller juridique FO, souligne que la santé et la sécurité au travail constituent un enjeu commun au sein d’une entreprise. En d’autres termes : "tout le monde doit tirer dans le même sens". Le dialogue doit donc fonctionner entre employeurs, instances représentatives du personnel et salariés eux-mêmes. Pour nombre d’entreprise, c’est une priorité, voire LA priorité. De la qualité de ce dialogue, dépend le succès des actions de santé au travail. Il en est de même entre employeurs et salariés dans les entreprises sans instances représentatives du personnel. Rester vigilant et cohérent pour se parler en entreprise.

« Former les dirigeants » Pour Didier Fabre, délégué régional CPME, le métier de dirigeant est complexe et multifacettes. Il ne faut pas l’oublier. La santé du dirigeant est aussi une question cruciale pour l’entreprise. Dans la très grande majorité des cas, une PME qui embauche souhaite garder son salarié. Il faut donc une double approche : préserver la santé du salarié et celle du dirigeant. Pour cela, la sensibilisation, l’information et la formation concerne autant le salarié que le dirigeant. On voit apparaître des indices de bien-être qui ont toute utilité pour objectiver une situation. Parfois, il faut avoir recours à la médiation. Elle peut être utile.

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ENVIRONNEMENT & TECHNIQUE

Equipement de protection individuelle

Nouvelle réglementation pour le bruit

Une nouvelle réglementation s’applique dès le 21 avril 2018 pour les équipements de protection individuelle contre le bruit (PICB). Ces équipements passent de la catégorie II à la catégorie III (voir ci-dessous). Cette disposition entre dans une nouvelle réglementation concernant l’ensemble des équipements de protection individuelle (EPI). La durée de validité de la certification CE est désormais limitée à 5 ans. Les fabricants ont un an à compter du 21 avril 2018 pour se mettre en conformité, même s’ils ont jusqu’au 23 avril 2023 pour écouler leurs stocks actuels. Il existe trois catégories d’équipements de protection individuelle, tant pour la vie domestique (ex. : gants de jardinage) que pour la vie professionnelle (ex. : protecteur contre le bruit). Les catégories se distinguent selon

les risques, dangers et obligations de certification. A minima, la déclaration UE de conformité devient obligatoire pour tout EPI mis en vente.

Catégorie 3 Catégorie 1

Risque : faible. rficielles. Danger : lésions supe leil, so Exemples : lunette de tabliers, etc. e d’autoFabricant : procédur certification. Utilisateur : contrôle ilisation recommandé avant ut et tous les ans.

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Catég

Risque orie 2 Dange : intermédiair r e Exemp : lésions grav . es. les : ch lunette aussure s s anti-co de sécurité, g de sécurité, upures a nts , Fabric ant : ce casques, etc. rtificati organis o m (ex. : m e extérieur n par arquag Utilisa e CE) t avant u eur : contrôle t recomm et tous ilisation andé les ans.

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Risque : important. Danger : lésions irréversibles ou mortelles. Exemples : protection contre les chutes de hauteur, contre le bruit, contre les toxiques respiratoires, etc. Fabricant : contrôle du processus de fabrication et de la qualité du produit ; certification par un organisme extérieur (ex. : marquage CE) tous les 5 ans. Utilisateur : contrôle obligatoire avant utilisation et au moins une fois par an.


INTERVIEW Chef d’entreprise d’une PME du second Œuvre (100 salariés et 10 millions d’euros de chiffre d’affaires) Bruno Delcampe a connu l’échec, la liquidation judiciaire et l’enfer des tribunaux de commerce… Mais aussi la solitude… Refusant de sombrer suite à ses déboires, il décide de mettre ses compétences au service des entrepreneurs en grande difficulté et créée l’association SOS Entrepreneur, une structure dédiée aux chefs d’entreprise de TPE et PME, qui souhaitent être aidés et épaulés en toute confidentialité (là où lui s’était retrouvé seul par manque de structure existante). Parce que la souffrance des chefs d’entreprise TPE et PME en difficulté est réelle, Entreprise & Santé a souhaité le rencontrer. Merci à lui pour sa sincérité, son humilité, ses convictions et son énergie salutaire.

Bruno Delcampe

Dirigeant Fondateur, SOS Entrepreneur

«Aider à temps le ou la chef(fe) d’entreprise de TPE/PME en difficulté » Pourquoi accompagner les patrons de TPE ou PME en difficulté ? Bruno Delcampe : Par an, en France, 60 000 chefs d’entreprise perdent leur entreprise. Je vais être direct pour l’avoir vécu : non accompagné, c’est l’enfer. D’autant que l’on ne peut en parler à personne. Surtout pas à la banque, qui perd très vite confiance… Ni aux clients, qu’il faut préserver. Ni aux fournisseurs, dont on dépend pour servir les clients… Et il faut aussi sauvegarder le moral et la confiance des collaborateurs. On est donc seul, dans un état de solitude extrême… On vit avec l’angoisse permanente de voir disparaître son entreprise. L’angoisse d’être rayé de la carte et de revenir au point de départ. Qu’en est-il alors de la santé de ce dirigeant en difficulté ? Bruno Delcampe : Le chef d’entreprise d’une TPE ou d’une PME

en grande difficulté met en péril sa santé. 90 % des chefs d’entreprise en cessation de paiement ont recours aux antidépresseurs. Ils vont voir un médecin, car la situation est redoutablement épuisante. Ils sont face à une montagne trop importante : ils ne peuvent plus se payer, il doivent tenir le moral de l’équipe, faire face aux clients, répondre aux appels de la banque et aux relances des fournisseurs. Cette tension permanente est extrême… La santé d’un chef d’entreprise en situation de paiement est dégradée. Si on monte avec lui un plan de redressement, sa santé s’améliore. Car il entrevoit alors sa survie. Il faut oser consulter tôt un médecin et dépasser sa pudeur ou sa fierté. On a du mal à accepter cela. On cherche à comprendre une situation très complexe qui nous dépasse : une situation non vécue auparavant et dont on a espéré qu’elle n’arriverait jamais.

On peut donc parler de souffrance au travail du patron de TPE ou PME… Bruno Delcampe : C’est le moins que l’on puisse dire ! On peut plutôt parler de souffrance tout court. Le patron d’une TPE ou d’une PME a un mandat social et dans la majorité des cas il est travailleur non salarié. Ses perspectives sont simples : plus de travail, pas de séurité sociale, voire perte de sa maison, etc… Petit à petit il rentre dans un état second : réveils incessants, pertes de sommeil, voire insomnie totale, stress au quotidien et stress devant son avenir, etc. Sa famille est impactée. Elle se trouve impliquée. On est aussi père ou mère et on est, excusez-moi l’expression, complètement vidé le soir… Avec une question lancinante : vais-je réussir à survivre et maintenir en vie mon entreprise. L’absence de visibilité est extrêmement dure à vivre. Et il faut trouver réponse à toutes sortes de questions. Où est le marché ?

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INTERVIEW

Quelle solution économique ? Quelles perspectives avec ou contre mes concurrents ? Les sujets à aborder sont multiples. Il arrive même petit à petit que l’on perde son discernement. Peut-on parler alors de burn out ? Bruno Delcampe : Oui et non. Oui, au sens au de la souffrance psychologique extrême. Non, car il ou elle ne s’arrête pas. S’il ou elle ne se présente pas dans l’entreprise, tout s’aggrave. L’entreprise s’arrête. Les collaborateurs s’appuient sur le chef d’entreprise. Il ne peut donc pas s’arrêter immédiatement. On est vraiment devant une situation d’isolement d’une personne qui a donné toute son énergie. Et pour un revenu moyen peu élevé, qui n’a rien à voir avec l’image que l’on a du « patron ». Voire un revenu nul en cas de crise. Et, au fur et à mesure de la crise, il ou elle est de plus en plus seul(e).

Pourquoi avoir créé SOS Entrepreneur ? Bruno Delcampe : Pour répondre aux situations d’urgence et éviter la liquidation devant le tribunal de commerce. Il y a pour le chef d’entreprise une seule chose à faire : se faire accompagner. Nous apportons une expertise de crise. Nous aidons à sortir d’une situation de cessation de paiement. Au tribunal, le chef d’entreprise ne doit pas être seul. L’expert comptable est l’homme des chiffres et le chef d’entreprise est l’homme de l’entreprise. Il faut un positionnement intermédiaire qui sache utiliser la loi de sauvegarde de 2005, et non pas la subir. SOS Entrepreneur est la seule association qui accompagne le chef d’entreprise en situation de cessation de paiement. Céée en 2011, l’association a déjà traité plus de 9 000 appels. Nous sommes joignables 24 heures sur 24, sept jours sur sept.

SOS Entrepreneur a un statut d’association sans but lucratif… Bruno Delcampe : Oui. Et SOS entrepreneur ne bénéficie d’aucune subvention de l’Etat, en raison de la loi européenne qui dénoncerait alors une situation de concurrence déloyale ou de soutien abusif. A ce même titre, SOS Entrepreneur ne bénéficie d’aucune aide de collectivités territoriales ou de chambres de commerce. SOS Entrepreneur bénéficie du soutien de partenaires privés qui considèrent qu’éviter une cessation de paiement, c’est servir l’économie d’un territoire. Vous pouvez préciser ? Bruno Delcampe : Au récent sommet de la CEE de Bratislava, nous avons démontré que c’est moins coûteux d’aider une entreprise à temps que d’attendre que tout soit perdu. Et je parle bien de TPE ou PME. En termes simples : relever un homme ou une femme chef d’entreprise qui

SOS entrepreneur, Association Loi 1901 d’intérêt général et à but non lucratif.

Sa vision :

Permettre à tous les entrepreneurs de P.M.E. en grande difficulté, de pouvoir recréer de la richesse économique (contribution au développement du P.I.B. de leur région) et de l’emploi.

Ses mises en œuvre :

1) u n numéro joignable 24h./24 : 06 15 24 19 77 => plus de 9 000 appels de détresse traités depuis sa création en 2011 ; 2) un entretien de première urgence dans les 5 à 8 heures du 1er contact.
 3) un accompagnement d’urgence avec un Expert de Crise issu du milieu PME, pendant 3 à 6 mois.
 4) Interventions dans la société civile : abrogation de l’indicateur banque de France 040 ; Loi de Sauvegarde Accélérée ; Intervention Sommet européen de Bratislava ; Intervention dans la Loi PACTE au parlement (juin 2018).

Son fonctionnement :

Aide gratuite apportée directement auprès du dirigeant en grande difficulté qui ne peut plus se rémunérer. Accompagnement assuré par un expert de crise rendu éligible par SOS Entrepreneur.

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est à terre, cela a un coût considérable. Sans compter les conséquences psychologiques et sociales au sein de l’entreprise, des familles et de soimême. La chute est d’autant plus douloureuse que le chef d’entreprise de TPE ou PME recherche l’autonomie, la responsabilité et la reconnaissance à travers son travail, souvent sans prétention particulière. Au niveau européen, il y a aujourd’hui de plus en plus de sociologues et d’économistes qui travaillent sur la notion de rebond. Il faut permettre à ces hommes et ces femmes chef d’entreprise de rebondir. Il faut pouvoir se reconstruire.

sont formés au conseil économique spécialisé face à la loi de sauvegarde de 2005, qu’il faut savoir utiliser. Nous accompagnons aux audiences du tribunal de commerce, comme nous discutons avec l’administrateur judiciaire. Nous refusons un système qui conduit à l’échec. Ce qui nous intéresse, c’est l’entrepreneur.

Quel conseil donneriez-vous à un patron de TPE ou PME ? Bruno Delcampe : Ne pas hésiter à nous appeler. Ne pas subir une situation de cessation de paiement. Nous apportons une expertise de crise. C’est notre spécialité. La TPE ou la PME n’a pas les moyens de se la payer. Nous l’apportons. Nos intervenants

BIOGRAPHIE EXPRESS Bruno Delcampe

Diplômé d’une maîtrise de gestion des entreprises Paris-Sorbonne, ayant poursuivi une formation de DESS de Finances Paris Sorbonne et obtenu un MBA EDHEC, Bruno Delcampe a été chef d’entreprise, créateur d’entreprises, en Belgique et en France dans la distribution, le conseil et le second œuvre. Il a auparavant dirigé des entreprises de distribution en France et en Belgique (Sergent Major, Tout Compte Fait, Etam) après avoir occupé des postes de direction d’achats, de direction commerciale, de direction générale et d’administrateur délégué.

• 2011 : Création de SOS Entrepreneur : - Prix edhec 2012 de l’entreprise solidaire - Agréée « entreprise solidaire » par la direccte • 2013 : Participation aux assises de l’entreprenariat (ministère de l’Économie et des Finances) • 2013 : Création de la fondation « entrepreneurs en détresse » sous l’égide de la Fondation Caritas France afin que les entrepreneurs de PME en grande difficulté puissent trouver les ressources nécessaires au sauvetage de leur entreprise et échappent aux risques d’exclusion et de faillites personnelles.

• 2013/2014 : Participation au groupe de travail de la réforme des tribunaux de commerce (Ministère de la justice) • 2014 : Participation à la rencontre de « labEx entreprendre » (chaire sante des dirigeants de PME et des entrepreneurs – Universite de Montpellier) • 2016 : Intervention au sommet de la CEE de Bratislava • 2018 : Intervention à l’Assemblée nationale dans le cadre de la loi Pacte.

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AUX ALENTOURS

RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données)

Il est encore temps de s’y conformer ! Le 25 mai 2018, le règlement général sur la protection des données (RGPD) est entré en vigueur et a bouleversé les pratiques liées à la collecte des données personnelles. Ce règlement (d’application immédiate dans les pays de l’Union Européenne le 25 mai 2018) modernise les principes énoncés dans la directive de 1995 sur la protection des données personnelles. Il définit les droits des personnes physiques et fixe les obligations des organisations qui effectuent le traitement des données et de celles qui sont responsables de ces traitements. Il définit également les méthodes visant à assurer le respect des dispositions prévues, ainsi que l’étendue des sanctions imposées à ceux qui enfreignent les règles.

L’autorité de contrôle en France est la CNIL. Les contrôles et sanctions peuvent être lourds en cas de non-conformité (4% du chiffre d’affaires, ou 20 millions d’euros). Afin de réduire les risques de sanction, le régulateur attend une dynamique de mise en conformité engagée, organisée et planifiée.

Au sein de vos entreprises et organisations, il convient alors de se poser les bonnes questions :

Une méthodologie de mise en conformité peut se dérouler comme suit :

- comment sont traitées et gérées mes données personnelles ?

- informer et communiquer sur le RGPD avec les différents services en interne

- comment mettre en place au sein de mon organisation une procédure et une organisation pour me conformer au règlement ? - qui va porter le projet de mise en conformité en interne ?

- identifier les traitements sur les données à caractère personnel qu’effectue l’organisation - sur ces traitements, identifier leurs caractéristiques et qualifier la maturité de la protection des données personnelles dessus.

Article écrit en collaboration avec Perrine Guillemant, juriste

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AGENDA

e de détail » « Bien-être au travail et commerc Réservé aux adhérents du secteur de

commerce de détail de STSA

> Le lundi 17 septembre 2018 à Louvroil, 24 Rue Romain Duchâteau > Le lundi 24 septembre 2018 à Fourmies, 2 Rue Louis Braille Santé au Travail Sambre Avesnois, en partenariat avec l’ARACT Hauts-de-France (Agence Régionale pour l’Amélioration des Conditions de Travail), vous invite à participer à ses Matins des Préventeurs : Bien-être au travail et commerce de détail de 8 h 45 à 11 h 00 (accueil à partir de 8 h 30). Rejoignez-nous ! Facebook/Santé au Travail Sambre Avesnois Contact et inscription : invitations@st-sa.fr. Inscrivez-vous vite, places limitées !

phone «Semaine internationale franco au travail » pour la Santé et qualité de vie Paris et Bordeaux du 1er au 5 octobre

2018

> Paris et Bordeaux du 1er au 5 octobre 2018 Lors de la Semaine Internationale Francophone pour la santé et la qualité de vie au travail 2018, les participants auront l’occasion : • de visiter des entreprises industrielles et de services ayant déployé des démarches de santé et qualité de vie au travail, • d’approfondir leurs connaissances des enjeux et thématiques reliés à la santé et la qualité de vie au travail (SQVT), qui sont d’intérêt commun à la fois pour les organisations de la Francophonie, par l’entremise d’ateliers de travail et de cocréation, • de suivre des formations, • d’échanger avec des experts reconnus, • deprendre part à diverses activités de réseautage.

Cette semaine s’adresse aux : • employeurs sensibles à l’objectif, désireux de passer à l’action et demandeurs de solutions, • cadres en ressources humaines, DRH, préventeurs, partenaires d’affaires, • médecins du travail et professionnels de la santé en entreprise, • représentants et membres des comités de santé et du personnel, • assureurs, mutuelles et intermédiaires de marché, • prestataires de services innovants destinés aux entreprises et aux salariés. Informations et inscription : info@semaineinternationale.com

Contact : entrepriseetsante@nordnet.fr Les éditions de l’encre vive Tél. 03 20 14 07 77 Directeur de publication : Hervé Delpierre Conception et Réalisation : Méthodes et Médiation – Lille Responsable de rédaction et rédaction : Dr Matthieu Méreau Méthodes et Médiation - Lille Coordinatrice d’édition : Nathanaëlle Debaene Méthodes et Médiation – Lille

Comité de rédaction : Alain Cuisse, Francine Lemonnier, Louis-Marie Hardy, Dr Alain Moniez Relecture scientifique : Dr Bernard Fontaine Correctrice : Christine Bayart Création et mise en page : Altitude I GDSGROUP - www.gdsgroup.fr Crédit photos : P6 : GROUPE SUEZ ; P7 : ETUDE MAÎTRES CHATELAIN ; P8 : TREMOIS ; P14 : ACTION SANTE TRAVAIL ; P19-20 : ASTIL, AIDADOM, AFPA ; P24 : METHODES & MEDIATION ; P27 : BRUNO DELCAMPE ; FOTOLIA.

Coordination, Fabrication, Diffusion : Les éditions de l’encre vive 71 boulevard Montebello - 59000 Lille Tél. 03 20 14 07 77 Régie publicitaire : Entreprise et Santé - Matthieu Méreau, Nathanaëlle Debaene Tél. 03 20 14 07 77 Impression : Léonce Deprez - Ruitz Dépôt légal à parution N°ISSN en cours Tirage : 94 000 exemplaires Édité par : Groupement Inter Services Santé Et Travail 40 bis allée du Bénélux - Zone Artoipole 62060 Arras Cedex 9 - Tél. 03 21 22 28 21

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