Eamon Ore-Giron Auto-Tune

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EAMON ORE-GIRON

AUTO-TUNE September 24 / December 11, 2021


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EAMON ORE-GIRON AUTO-TUNE September 24 / December 11, 2021

Textes / Texts Caroline Freymond Valentina Locatelli Exposition organisée par / Exhibition curated by Valentina Locatelli

AUTO-TUNE September 24 / December 11, 2021

Coordination / Coordinator Studio Eamon Ore-Giron et Valentina Locatelli Espace Muraille, Genève Caroline et Eric Freymond Nicolas Christol, Antoine Boillet

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VALENTINA LOCATELLI LE PRINCIPE DE LA NECESSITE INTERIEURE CHEZ EAMON ORE-GIRON: L’EXPOSITION «AUTO-TUNE»

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EXPOSITION

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LISTE DES ŒUVRES

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EAMON ORE-GIRON EN CONVERSATION AVEC VALENTINA LOCATELLI

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BIOGRAPHIE

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CAROLINE FREYMOND AUTO-TUNE Avec ce titre, l’exposition d’Eamon Ore-Giron, Espace Muraille, la première en solo sur notre continent, fait la part belle à la musique et au son, très présents dans son travail. Eamon, que nous avons eu l’occasion de rencontrer à Gstaad où il est venu nous trouver dans la perspective de cette présente exposition, puis au SFMOMA à San Francisco lors de l’exposition collective Soft Power en octobre 2019, est non seulement peintre, mais aussi DJ à ses heures. Sa démarche s’insère, tant graphiquement que sur le plan musical, dans une approche globalisante aux multiples références qui témoignent du large spectre de sa curiosité et des différents milieux culturels au sein desquels il a grandi et où il évolue.

Vivant à Los Angeles, mais ayant passé beaucoup de temps en Espagne, au Pérou et au Mexique, ses œuvres s’inspirent de ces lieux et de leurs traditions, et assemblent, tout à la fois et entre autres, dans notre mémoire collective, les roues de médecine amérindiennes, les tapisseries amazoniennes, le suprematism russe, l’abstraction et le modernisme européen. Correcteur de tonalité en musique, l’auto-tune d’Eamon Ore-Giron nous entraîne dans d’infinies directions jamais atteintes, mais nous invitant sans cesse à remettre en perspective notre vision. Grâce à Valentina Locatelli, commissaire de l’exposition, que nous remercions chaleureusement et d’une seule voix pour sa précieuse collaboration, Espace Muraille et toute son équipe sont heureux d’ouvrir la voie à la découverte à Genève de l’expression artistique originale et multi parlante d’Eamon Ore-Giron.

A travers ses peintures géométriques abstraites aux couleurs vives, réalisées sur du lin brut et de la toile, comme dans ses belles tapisseries qu’il a fait tisser à Guadalajara, Eamon nous fait voyager visuellement (précieux en période Covid!) de l’Amérique latine aux Etats-Unis, où il vit, jusqu’à l’Europe. Eamon est un artiste contemporain transculturel et son vocabulaire singulier nous parle à tous, car les formes géométriques qu’il utilise nous renvoient à diverses expressions ayant jalonné l’histoire de l’art, de l’artisanat, du folklore, des pratiques indigènes, etc.

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CAROLINE FREYMOND AUTO-TUNE Eamon Ore-Giron's exhibition at Espace Muraille, his first solo show in continental Europe, honours music and sound with this title, both very present in his work. Eamon, whom we had the opportunity to meet in Gstaad where he came to us with this current exhibition in mind, and then again at SFMOMA in San Francisco during the collective exhibition Soft Power in October 2019, is not only a painter but also a DJ in his spare time. Both graphically and musically, his approach is a global one, with many references attesting to his wide-ranging curiosity and to the diverse cultural environments in which he grew up and evolved. With his brightly coloured and abstract geometric paintings, Eamon takes us on a visual journey (invaluable during Covid-19 times!) from Latin America and the United States, where he lives, to Europe. His paintings are realised on raw linen and canvas, and his beautiful tapestries were loom-woven in Guadalajara.

Living in Los Angeles, but having spent a lot of time in Spain, Peru and Mexico, his works are inspired by these places and their traditions, and bring together from our collective memory the medicine wheels of various Native American tribes, tapestries from the Amazon region, Russian supremacism, abstraction, and European modernism all at once. Used in music for pitch correction, Eamon Ore-Giron's Auto-Tune frontiers through endless roads never taken before, constantly inviting us to put our worldview into perspective. Thanks to Valentina Locatelli, curator of the exhibition, whom we warmly thank for her precious collaboration, Espace Muraille and its team are happy to pave the way for Geneva's exploration of Eamon Ore-Giron's original and interconnected artistic expression.

Eamon is a contemporary cross-cultural artist and his singular vocabulary speaks to all of us: his geometric shapes echo various milestones of the history of arts, crafts, folklore, indigenous practices, etc.

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LE PRINCIPE DE LA NECESSITE INTERIEURE CHEZ EAMON ORE-GIRON: L'EXPOSITION «AUTO-TUNE» VALENTINA LOCATELLI 1

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C'est le cas notamment si l'on considère les œuvres que l'artiste a présentées à l'occasion de l'exposition «Widely Unknown», une exposition collective organisée par Eungie Joo au Deitch Projects à New York, du 10 novembre au 22 décembre 2001: https ://deitch.com/archive/deitch-projects/exhibitions/widely-unknown (consulté le 31 août 2021). Vassily Kandinsky, Über das Geistige in der Kunst: insbesondere in der Malerei, 2. éd., Munich, 1912. Il existe plusieurs traductions françaises de la publication originale en allemand. Celle citée ici et dans les notes suivantes est Vassily Kandinsky, Du spirituel dans l’art, et dans la peinture en particulier, 3e éd, Ed. de Beaune, Paris, 1963, p. 49. Ibid., p. 11. Ibid., p. 57.

Depuis le début des années 2000, alors que ses œuvres regorgeaient encore de références de l'Ouest américain et de ses excentricités folkloriques accumulées de son expérience concrète,1 la pratique artistique d'Eamon Ore-Giron est passée de principalement figurative et narrative à la création de compositions abstraites à la fois exclusivement intellectuelles et émouvantes. C'est surtout au cours de la dernière décennie qu'Ore-Giron a progressivement abandonné tout vestige de perspective dans ses peintures et déclaré sa fascination pour les icônes de l'abstraction latino-américaine et occidentale, de Joaquín Torres-García à Jorge Eielson et Carmen Herrera, en passant par El Lissitzky à Max Bill. En effet, les toiles d'Ore-Giron sont maintenant entièrement dominées par des surfaces planes et des arrangements non figuratifs de formes intensément colorées, géométriques et bidimensionnelles. L'artiste estime que cette évolution peut être attribuée au fait qu'au cours des dix dernières années, il a progressivement perdu la vision de son œil droit. Bien que la condition physique de l'artiste ait pu contribuer à ce développement artistique formel, il existe également d'autres causes sous-jacentes plus substantielles pour le caractère abstrait et même transcendant qui définit ses œuvres récentes. Celles-ci doivent être recherchées essentiellement dans l'affinité et le travail d'Ore-Giron avec la musique et dans son approche synesthésique qui en résulte, qu'il adopte naturellement lorsqu'il peint et qu'il accueille plus ou moins consciemment dans sa compréhension de la réalité. Le Principe de la Nécessité Intérieure Dans son traité novateur Über das Geistige in der Kunst (Du spirituel dans l'art, 1912), l'artiste russe Vassily Kandinsky (1866-1944) explique les raisons de sa préférence pour un langage artistique abstrait et non figuratif axé sur l'expression des émotions et de la spiritualité, marquant littéralement le début d'un tout nouveau chapitre de l'histoire de l'art. En formulant son principe artistique de la «nécessité intérieure» («Prinzip der inneren Notwendigkeit» dans le texte allemand original), Kandinsky observe comment «l'harmonie des formes doit reposer sur le principe du contact efficace de l’âme humaine».2 Il y déclare sa conviction d'une nécessité absolue pour une visualisation picturale illimitée et non objective des émotions et des sensations, qu'il valorise par rapport à toute représentation figurative et reconnaissable du monde matériel. Au début de son livre, Kandinsky observe que «toute œuvre d’art est l’enfant de son temps et, bien souvent, la mère de nos sentiments». 3 S'il est incontestable que chaque période culturelle crée de l'art qui lui est propre - ainsi, les principes abstraits de Kandinsky étaient partagés par d'autres contemporains et pionniers de l'abstraction tels que Kasimir Malevitch ou Piet Mondrian - Kandinsky soutient que les trois éléments mystiques fondamentaux sur lesquels son «principe de la nécessité intérieure» réside sont universels et éternels. Ils sont d'ailleurs toujours valables aujourd'hui et peuvent servir de vade mecum pour aider à décortiquer et comprendre le travail d'Ore-Giron. Le premier facteur est «l'Elément de la personnalité»; deuxièmement, «l'Elément de style» - ou le message de l'époque et de la langue du pays dans lequel l'artiste vit et travaille; et troisièmement, «l'Elément d’art pur et éternel qu’on retrouve chez tous les êtres humains, chez tous les peuples et dans tous les temps» et qui «n’obéit [...] à aucune loi d’espace ni de temps».4

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Partant de chacun de ces éléments - la biographie de l'artiste, son style et son idée intrinsèque et spirituelle sous-jacente de l'art en tant que tel - et en réfléchissant à leur rôle, à leur relation réciproque et à leur impact, il devient plus facile d'interpréter le parcours artistique d'Ore-Giron comme un voyage heuristique et une découverte spirituelle motivés par son histoire personnelle autant que par un discours plus large de résistance socio-politique: le langage de la musique et une harmonie de codes visuels et abstraits y sont utilisés pour évoquer un sentiment d'appartenance partagée et provoquer des réponses profondément émotionnelles et des «vibrations» dans l'âme du spectateur. Des impressions musicales et des improvisations artistiques… Né en 1973 à Tucson, en Arizona, d'un père péruvien qui a émigré aux Etats-Unis et d'une mère irlando-américaine, Eamon Ore-Giron a grandi et a étudié dans un environnement où diverses cultures se croisaient et se mélangeaient - une expérience déterminante qui a influencé ses goûts artistiques et ses intérêts. Il a passé une partie importante de ses années de formation au Mexique et au Pérou, en particulier à Huancayo, où il a travaillé avec Josué Sánchez Cerron (né en 1945), un artiste connu pour ses fresques et ses aplats de couleurs représentant des scènes de la vie quotidienne et des traditions populaires andines. Ore-Giron a progressivement développé une pratique ancrée dans le métissage culturel et caractérisée par l'interdisciplinarité et la multiplicité des genres. En plus d'être peintre, Ore-Giron a également travaillé comme sculpteur, vidéaste, musicien et DJ - il est également connu sous le pseudonyme de «DJ Lengua», qui signifie «langue» en espagnol. En réfléchissant à son œuvre la plus récente, il n'est pas surprenant de découvrir qu'une partie fondatrice de sa carrière a été le résultat d'une exposition à un environnement principalement musical plutôt que purement visuel. En 2001, avec Julio César Morales, Luis Illades, Joseph Franko et Juan Luna Avin, Ore-Giron a fondé le Club Unicornio, un projet collaboratif entre artistes visuels et musiciens basé à San Francisco consistant en une soirée dansante mensuelle avec des DJ sets de musique folk et latino-américaine, dont la cumbia, le boogaloo et le mambo sud-américains, fusionnés avec une musique électronique contemporaine avant-gardiste. Puis, au milieu des années 2000, alors qu'il était à Los Angeles pour préparer sa maîtrise en beaux-arts à l'Université de Californie, Ore-Giron a également commencé à travailler avec le collectif OJO, un groupe de performance artistique et de musique de sept personnes s'inspirant de différentes sources musicales. L'artiste se souvient que c'est à cette époque qu'il a également «commencé à expérimenter différentes manières de travailler, telles que le collage et l'incorporation de texte» et s'est «éloigné du travail figuratif et s’est dirigé davantage vers une association libre de textes et de formes.» 5 En 2009, pour l'exposition «Into a Long Punk» à la galerie Steve Turner Contemporary à Los Angeles, Ore-Giron a proposé une réinterprétation de ses vieux disques vinyles abandonnés et les a incorporés dans son travail, y compris des «textes faisant référence aux mythes de la création gaéliques, mayas et aztèques. De la tradition orale présentée visuellement, avec des clins d'œil au modernisme et au graphisme», explique-t-il.6 Enfin, toujours avec César Morales - bien que cette fois sous le nom de Los Jaichakers (en espagnol pour «hijacker», pirate de l'air) 7 - Ore-Giron a continué à détourner et à s'approprier les genres musicaux traditionnels d'Amérique latine et des Etats-Unis, en particulier de la diaspora mexicaine, l'absorbant et la subvertissant dans le but de libérer l'information sur l'économie des marchés noirs et de produire quelque chose de complètement nouveau et d'audacieux qui résonne avec la conscience collective tant de l'Amérique du Nord que du Sud. Comme l'a souligné Kandinsky, tout peintre laissant s'exprimer librement son monde intérieur ne peut qu'envier la facilité et la légèreté avec lesquelles la musique, le plus «immatériel» des arts, est capable d'atteindre un tel objectif. «Un art», observe-t-il, «doit apprendre d’un autre art l’emploi de ses moyens, même des plus particuliers et appliquer ensuite, selon ses propres principes, les moyens qui sont à lui, et à lui seul. Mais il ne faut pas que l’artiste oublie qu’à chaque moyen répond un emploi spécial qu’il s’agit de découvrir.» 8 Plus qu'un simple «emprunt» de sa méthodologie musicale, Ore-Giron s'est laissé inspirer et guider par la musique: il l'a utilisée comme point de départ pour créer une œuvre riche et diversifiée qui est le résultat d'un processus de recherche continu centré sur le langage de l'abstraction et son potentiel synthétique, rythmique et globalement «symphonique». Il est bien connu qu'en tirant de nouvelles catégories créatives de la musique et en nommant ses œuvres «Impressions», «Improvisations» et «Compositions», Kandinsky a théorisé un système de correspondances abstraites entre sons, formes et couleurs, capable d'activer chez le spectateur les réponses émotionnelles et vibratoires qu'il recherchait. Si les impressions sont le résultat direct de toute exposition à la vie - à la «nature extérieure», comme par exemple dans le cas des impressions stimulées par un concert de musique - et constituent en ce sens le fondement de toute expérience sensorielle humaine et interaction artistique, c'est bien le concept d'improvisation - «expressions, pour une grande part inconscientes et souvent formées soudainement, d’événements de caractère intérieur, donc impressions de la ‘Nature Intérieure’» 9 - qui est une composante particulièrement essentielle de l'œuvre d'Ore-Giron. Comme il le fait remarquer: «[...] dans ma pratique globale de la peinture, tout est vraiment une question d’improvisation et de relation entre les différents éléments. Sans limitation, on se donne toujours beaucoup plus de liberté. Je pense que les expérimentations rendent toujours tout beaucoup plus intéressant.» 10 Pourtant, les peintures d'Ore-Giron sont aussi le résultat «[d’]Expressions [...] lentement élaborées» - pour se référer une fois de plus aux mots de Kandinsky. Elles sont le fruit d'une démarche scientifique nourrie d'une méthodologie expérimentale, parfois pointilleuse, pratiquée sur une longue période, de manière répétée et avec une attention particulière aux détails.

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Eamon Ore-Giron, interviewé par Tiffany Barber, 15 juin 2011. Transcription de l'interview publiée sur Latin.Art.com - an online journal of art and culture, http://www.latinart.com/transcript.cfm?id=110 (consulté le 31 août 2021). 6 Ibid. 7 En 2013, Ore-Giron et Morales ont présenté le projet de performance «Night Shade/Solanaceae» en tant que Los Jaichackers, à l'occasion de l'inauguration du Pérez Art Museum à Miami. 8 Kandinsky 1963 (note 2), p. 36. 9 Ibid., p. 103. 10 Eamon Ore-Giron en conversation avec Jalis 2019, «Eamon Ore-Giron: Notre Renaissance sera une exaltation collective», 18 juillet 2020, Soleil Rouge Magazine, https://soleilrougemagazine.com/selon-ore-giron-notre-renaissance-sera-une-exaltation-collective (consulté le 31 août 2021). Texte original en français.

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Fig.1 PRAISE FOR THE MORNING, 2004 Latex acrylique sur contreplaqué / Latex acrylic on plywood, 81.3x66cm Collection de l'artiste / Collection of the artist, Los Angeles Fig.2 EXIT STRATEGY, 2005 Acrylique sur toile / Acrylic on canvas, 152.4x121.9cm Avec l'aimable autorisation de la Pennsylvania Academy of the Fine Arts, Philadelphie Fonds de développement de l'art contemporain Courtesy of the Pennsylvania Academy of the Fine Arts, Philadelphia Contemporary Art Development Fund, 2005.17

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Pour plus d'informations sur l'histoire de la guitare Ayacuchana, voir la contribution d'Eamon Ore-Giron en tant que DJ Lengua «La Guitarra Ayacuchana» sur le blog très respecté de Joseph Franko, Super Sonido. The Latin American Cultural Reverb, publié le 27 janvier 2011, https://supersonido.net/2011/01/27/la-guitarra-ayacuchana/ (consulté le 31 août 2021). 12 Dans l'installation vidéo à deux canaux Morococha (2014), Ore-Giron réfléchit à l'achat par la Chine de la ville minière éponyme des Andes et à la relocalisation de sa population dans une nouvelle ville créée à neuf kilomètres afin de permettre l'extraction du cuivre du sol sous le village d'origine. 13 Nathaniel Lee, critique de l'exposition «Eamon Ore-Giron: Smuggling the Sun» à la Nicelle Beauchene Gallery, New York, Artforum, https://www.artforum.com/picks/eamon-ore-giron-41712 (consulté le 31 août 2021). 14 Eamon Ore-Giron dans l'entretien vidéo réalisé par James Cohan à l'occasion de l'exposition «The Symmetry of Tears», New York, 2021, https://www.jamescohan.com/ (consulté le 31 août 2021). 15 Les œuvres de cette série ont été exposées par l'artiste dans différents lieux aux Etats-Unis, plus récemment à l'occasion de la Whitney Biennial à New York (2017), de l'exposition collective «Soft Power» au SFMOMA de San Francisco (2019) et l'exposition individuelle «The Symmetry of Tears» à la galerie James Cohan à New York (2021).

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…aux compositions symphoniques constructivistes La pratique artistique d'Ore-Giron émerge d'une exploration des canons occidentaux et latino-américains, où les héritages historiques et visuels de l'hémisphère Sud rencontrent et dialoguent avec les traditions modernistes nord-américaines et européennes. En conséquence, son travail propose des discours alternatifs et inattendus élargissant le potentiel de synchronicité et d'interconnectivité, en les débloquant à travers le temps et l'espace. Des plus grandes aux plus petites, les peintures qu'Ore-Giron a produites au cours de la dernière décennie sont toutes réalisées sur des toiles de lin brut à l'aide de peinture Flashe, une marque de peinture vinylique richement pigmentée et ultramate. Elles se caractérisent par un ballet irrésistible de motifs circulaires et tranchants dans lesquels différentes couches de tons vifs, pastels ou naturels s'imbriquent et se chevauchent, alternant les pleins et les vides, l'avant et l'arrière-plan. Evoquant des motifs dérivés de l'architecture précolombienne, des textiles andins et de l'orfèvrerie péruvienne ancienne autant que des compositions abstraites des mouvements d'avant-garde européens, du Constructivisme russe et du Néo-Concrétisme brésilien, les peintures d'Ore-Giron sont une réponse synthétique et personnelle de l'artiste à la rencontre entre tous ces récits et héritages transnationaux. Comme observé précédemment, les travaux d'Ore-Giron n'ont pas toujours été non figuratifs. Néanmoins, même si les peintures qu'il a présentées en 2005 à l'occasion de «Mirage» sa toute première exposition dans un musée, tenue à la Pennsylvania Academy of Fine Art de Philadelphie - étaient basées sur des photographies et représentaient les références et les particularités culturelles qu'il avait absorbées et auxquelles il avait été confronté à la fois au Pérou et aux USA, le langage visuel qu'il adopte est déjà abstrait dans son essence. Dans ses peintures telles que Praise for the Morning (fig.1) ou Exit Strategy (fig.2), la profondeur et l'espace sont aplatis, la distance et la perspective ne sont rendues que par la juxtaposition de rayures et d'aplats de différents tons terreux homogènes. Cependant, afin de dépasser les limites imposées par la figuration et de pouvoir élever son message artistique et cristalliser la légèreté iconique des compositions géométriques qui sont désormais devenues la signature de l'artiste, Ore-Giron a d'abord dû s'immerger complètement dans la musique avant de pouvoir en ressurgir, synthétiser son expérience émotionnelle et être capable de tirer un nouveau vocabulaire visuel de sa réponse personnelle à celle-ci. Ce n'est qu'en 2012 que l'influence de l'art populaire, du graphisme et du muralisme contenus en substance dans ses œuvres présentées à Philadelphie convergera enfin avec ses connaissances issues de toutes les expériences musicales et impressions acoustiques profondes décrites ci-dessus. Pour l'exposition «Open Tuning, E-D-G-B-D-G», présentée au 18th Street Arts Center à Santa Monica, l’artiste proposait une chorégraphie d'œuvres multiples, de la sculpture en passant par la peinture à la vidéo, de la musique aux performances live. Nommé d'après la gamme d'accordage de la «guitare Ayacuchana»,11 l'instrument à cordes exceptionnellement mélancolique typique de la région andine d'Ayacucho, le projet s'est inspiré à la fois d'épisodes et de souvenirs autobiographiques - le père d'Ore-Giron était originaire d'Ayacucho. Il était aussi le fruit d’une réflexion sur l'histoire séculaire de la colonisation et de l'exploitation de l'Amérique latine, ainsi que du métissage et de la fusion des codes culturels et esthétiques indigènes et occidentaux qui, depuis la conquête espagnole, ont caractérisé la production artistique locale, tant musicale que visuelle. Outre une vidéo politique condamnant les effets les plus sinistres de la mondialisation sur le cadre social péruvien 12 et une sélection d'œuvres principalement figuratives réalisées à partir de photographies, l'exposition comprenait également quelques-unes des premières peintures abstraites de l'artiste sur des toiles de lin brut. Parmi celles-ci, Head (fig.3), une représentation abstraite de la guitare Ayacucho, qui était également un clin d'œil aux célèbres toiles cubistes de guitares par les maîtres européens tels que Pablo Picasso et Georges Braque. Ore-Giron continuera sur sa lancée débutée à Santa Monica et la perfectionnera avec «Smuggling the Sun», sa première exposition individuelle à New York, qui s'est tenue en 2013 à la Galerie Nicelle Beauchene. A l'exception d'une œuvre sculpturale abstraite - une déconstruction de la guitare Ayacucho composée d'un ensemble de six carillons de cuivre colorés suspendus à une structure métallique linéaire (fig.4) - l'exposition était cette fois consacrée à la peinture. Ore-Giron rend hommage dans dix petites toiles aux maîtres modernes qui, comme le souligne le critique d'art Nathaniel Lee, «ont joué un rôle déterminant dans la formation de l'art géométrique non figuratif», faisant par exemple référence à la brillante palette de couleurs orphiques et aux compositions concentriques de Sonia et Robert Delaunay ainsi qu'à la «perspective oblique associée à des anciens schémas mécaniques, à savoir - en tout cas partiellement - les conceptions élégantes et en apparence rationnelles de Marcel Duchamp et Francis Picabia».13 En ce sens, «Smuggling the Sun» représente un moment charnière dans la carrière de l'artiste, car il marque le passage irréversible d'Ore-Giron de la figuration à l'abstraction constructiviste et géométrique. Ce n'est qu'après avoir pleinement embrassé un vocabulaire artistique non figuratif que l'artiste a finalement pu exprimer sa «nécessité intérieure» et articuler ses émotions et sa spiritualité comme il n'avait pu le faire jusqu'à présent qu'avec la musique. Infinite Regress Tout en reconnaissant que les peintures d'Ore-Giron exposées à la Galerie Nicelle Beauchene étaient «intelligentes, exceptionnellement sympathiques et d'une modestie à s'y méprendre», le critique d'art du New York Times Ken Johnson conclut son analyse de l'exposition en se demandant à quoi elles ressembleraient si l'artiste «s'y investissait complètement?». Ore-Giron a répondu avec audace à cette question quelque peu provocatrice peu de temps après avec son nouveau corpus d'œuvres toujours en cours. En 2015, en moins d'un mois, l'artiste a vécu la mort de sa mère et la naissance de son premier enfant, Octavio. Ces événements émotionnels intenses l'ont amené dans un espace mental où, comme il l'explique, il faisait à la fois «l'expérience de l'avenir potentiel» mais où il a aussi connu la «perte, qui était comme traverser le passé».14 C'est en voyant se refléter et se chevaucher de manière perturbante l'idée de fin définitive avec celle d'un tout nouveau départ que l'artiste a commencé à travailler sur sa série Infinite Regress, créant des compositions rigoureusement constructivistes et pourtant magnifiquement symphoniques qui, dans leur essence, résultent de manière frappante en l'aboutissement du processus d'intégration entre la musique, les couleurs et les formes abstraites qu'il a poursuivi tout au long de sa carrière.15 18 I 19


Le concept de Infinite Regress, «régression infinie» (du latin regressus in infinitum), est philosophique et déterminé par le scepticisme, par la volonté de prouver l'insuffisance d'une démonstration et donc de remettre en cause le savoir. Il désigne la progression logique, ou plutôt la régression, qui se produit lorsque, pour expliquer un terme donné, il est nécessaire de se référer à un autre et ainsi de suite, sans jamais pouvoir atteindre sa définition ou sa vérité ultime et finale. Chaque tableau de la série d'Ore-Giron est comme un anneau dans une chaîne infinie de sens: s'il requiert et est contenu dans sa forme embryonnaire dans les œuvres qui le précèdent, il y introduit aussi des variations et est donc indispensable pour donner naissance et comprendre l'essence des œuvres qui le suivent dans la séquence. En ce sens, la série est une mise en abyme avec d'innombrables variations et une métaphore de la continuité entre la vie et la mort. La série Infinite Regress d'Ore-Giron semble condamnée à un processus sans fin d'élaboration par addition ou réduction vers une destination sans limites et inaccessible. Cette situation impossible peut cependant être résolue et prendre sens si la série est mise en relation avec les autres œuvres de l'artiste: celles qui précèdent, comme tenté de le faire avec ce texte, et celles qui en découleront. Par la même occasion, Infinite Regress doit également être appréciée à la lumière de ce qui a été dit sur le «principe de la nécessité intérieure»: dans le contexte plus large de l'histoire de l'art, c'est l'interprétation personnelle et la réponse d'Ore-Giron à l'art non figuratif, sa contribution - modulée par «l'élément de la personnalité» et «l'élément de style» - à la grammaire en constante évolution de «l'art pur et éternel». C'est aussi la tentative d'Ore-Giron d'étoffer les différentes histoires de l'abstraction auxquelles il a été confronté, à la fois andine, occidentale et eurocentrique, en mélangeant leurs enseignements afin de mettre en évidence leur origine commune dans le besoin intrinsèquement humain d'un sentiment d'appartenance spirituelle. Les peintures de la série Infinite Regress sont toutes structurées suivant une composition spatiale régulière. Elles comportent une section supérieure, correspondant à peu près au tiers supérieur de la toile, définissant la ligne d'horizon sur laquelle se déploie l'arrangement géométrique abstrait polychrome et quasi astral, et une section inférieure, dominée par la couleur or, laquelle l'artiste appelle «la partie terrestre de la peinture».16 Cette dernière crée une sorte d'écran architectonique lumineux qui rappelle les murs perforés typiques d'une grande partie de l'architecture vernaculaire d'Amérique latine. C'est à travers ce filtre que le spectateur observant le tableau peut apercevoir la cosmogenèse qui se déroule à l'arrière-plan de la composition et au-dessus de la ligne d'horizon, dans le royaume céleste. En même temps, la palette d'or dominante évoque aussi «les jupes en forme de cloches des Vierges dans les peintures de l'école péruvienne de Cuzco» 17 ainsi que l'utilisation de la feuille d'or et du fond d'or dans l'art byzantin et du début de la Renaissance avec l'iconographie chrétienne. De plus, il existe une dynamique culturelle spécifique, une tentative de réparation de torts historiques implicite par Ore-Giron dans son utilisation de la peinture dorée. Comme il le souligne: «J'ai exploré l'histoire de la conquête et tant d'or a été pris aux populations autochtones, le double vol qui s'est produit, d'un côté le vol physique de l'or, et de l'autre côté le vol culturel de tous les artefacts qui ont été fondus pour obtenir plus d'or. Tous ces chefs-d'œuvre qui se sont transformés en or liquide ont été perdus à jamais.» 18 En ce sens, Infinite Regress exprime la contribution de l'artiste à un processus de décolonisation, son désir de restituer l'or volé et de recréer des chefs-d'œuvre contemporains capables de renouer avec cette lignée perdue. L'exposition à l'Espace Muraille L'exposition «Auto-Tune» à l'Espace Muraille est la première exposition d'Eamon Ore-Giron en Europe continentale. Réparties sur les deux niveaux de l'espace de la galerie, les œuvres de l'exposition rayonnent de lumière et émanent d'une légèreté transcendante. Leur luminosité transforme l'espace et suscite une conversation avec l'architecture historique de l'Espace Muraille. Sous les plafonds voûtés en forme de crypte de ce qui était autrefois une cave du XVIIIe siècle, le public y découvre une présentation immersive du travail d'Ore-Giron, qui génère une expérience méditative, presque mystique, et provoque un sentiment de déplacement spatial.

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Eamon Ore-Giron 2021 (note 14). Marcela Guerrero, «Eamon Ore-Giron», dans Soft Power. A Conversation for the Future, cat. exp., éd. Eugenie Joo, San Francisco Museum of Modern Art, 2019, pp. 156-161, ici p. 156. 18 Eamon Ore-Giron lors d'une conversation avec l'auteure de ce texte, le 21 mai 2021. 19 MacKenzie Stevens, «Eamon Ore-Giron», dans Anne Ellegood et Erin Christovale, Made in LA 2018, exh. catalogue, Hammer Museum, Université de Californie, Los Angeles, Munich, Londres et New York, 2018, pp. 169-170. 17

L'exposition présente dix-huit nouvelles peintures de différentes tailles de la série continue Infinite Regress (du numéro CLX au CLXXVII; cat.1 à 18) ainsi que deux tapisseries tissées sur métier et créées en collaboration avec le Taller Mexicano de Gobelinos à Guadalajara, au Mexique, qui font directement référence aux mythes aztèques de la création et ajoutent ainsi une autre facette spirituelle à la vision cosmique de l'artiste. La tapisserie Talking Shit with Quetzalcoatl / I Like Mexico and Mexico Likes Me (cat.19) a été exposée pour la première fois dans une exposition collective organisée par l'artiste performeur américain Rafa Esparza (né en 1981) au Ballroom Marfa au Texas. A cette occasion, elle était placée sur un «monticule de briques à deux niveaux d'adobe créé par Esparza - mi-socle, mi-autel - qui servait à la fois de support physique et métaphorique pour la grande surface textile. Présentée de cette manière, l'œuvre d'Ore-Giron a été transformée en objet rituel ou en offrande à Quetzalcoatl», l'un des dieux les plus importants du panthéon aztèque, «ici transformé en un serpent abstrait tourbillonnant composé de verts, de bleus et de rouges».19 Conçue comme un poncho - un vêtement traditionnel utilisé par les peuples amérindiens avant la conquête espagnole - et présentée à l'Espace Muraille sur une structure en bois suggérant une présence humaine, cette œuvre tissée était à l'origine destinée à être portée par Esparza comme un attribut de lien spirituel permettant aux deux artistes d'engager une conversation critique. Talking Shit with Coatlicue (cat.20), en revanche, a été conçue et réalisée pour l'exposition à l'Espace Muraille. Suspendue comme une tapisserie murale sur l'escalier reliant l'espace d'exposition au rez-de-chaussée à celui du sous-sol, elle fonctionne selon l'artiste comme «la protectrice de l'exposition», soulignant ainsi un sentiment de descente cérémonielle dans la dimension sacrée de la crypte où sont présentées les plus grandes toiles d'Ore-Giron dans l'exposition.

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Coatlicue, la déesse aztèque à la jupe de serpents, créatrice et destructrice de toute forme et matière, qui représente la dualité du spirituel et du physique, du féminin et du masculin, est évoquée par l'artiste au moyen d'une synthèse symétrique de son vocabulaire totémique, iconique, de formes abstraites et par une palette dominée par des bleus et des tons terreux. Le choix des couleurs d’Ore-Giron peut être interprété comme la tentative de l'artiste de réunir et de mélanger des systèmes de croyances et de connaissances différents et pourtant convergents. Lorsque les Conquistadores espagnols ont importé leurs croyances et valeurs religieuses dans le soi-disant Nouveau Monde, la figure de la Vierge Marie (la Vierge de Guadalupe) a été superposée à celle de Coatlicue, qui a été brusquement privée de ses caractéristiques plus instinctives et sexuelles. Si le bleu évoque les éléments naturels de l'eau et de l'air, dans la tradition aztèque, il était aussi associé à la divinité et dans la religion catholique, il est devenu inextricablement lié à la Vierge Marie. Le brun en revanche représente la ségrégation ou la mort (c'est la couleur de l'ordre des frères franciscains), mais est aussi étroitement associé à la terre et donc à la fertilité. Synesthésie cosmique et Auto-Tuning Dans l'étude Über das Geistige in der Kunst, Kandinsky a rigoureusement étudié la relation qui existe entre la musique et certaines formes et couleurs spécifiques. Selon lui, ces éléments sont intimement liés et leurs relations sont réglées par des rapports exacts et pratiquement universaux: «On parle couramment du ‘parfum des couleurs’ ou de leur sonorité. Et il n’y a personne, tant cette sonorité est évidente, qui puisse trouver une ressemblance entre le jaune vif et les notes basses du piano ou entre la voix du soprano et la laque rouge foncé».20 Le phénomène neurologique décrit par Kandinsky et selon lequel l'expérience d'une sensation dans un domaine de perception stimule une sensation involontaire dans un autre domaine de perception est connu sous le nom de synesthésie (du grec ancien syn, «ensemble» et aesthesis, «sensation»). De récentes études ont démontré qu'il existe jusqu'à dix-neuf types différents de perceptions intersensorielles, dont les plus courantes sont caractérisées par une association de lettres et de chiffres (graphèmes-couleurs) ou de sons (audition colorée) avec des couleurs spécifiques.21 Cette coalescence de différents aspects du sensorium peut être un phénomène biologique et donc non délibéré (synesthésie réelle) ou une construction volontaire déterminée par l'exposition à la culture (synesthésie artistique). Comme Dani Cavallaro l'a observé dans son étude détaillée Synesthesia and the Arts, «même une œuvre d'art sans caractéristiques synesthésiques évidentes peut être vécue comme un événement synesthésique par des récepteurs disposés à la laisser stimuler non seulement le sens auquel elle s'adresse explicitement, mais aussi d'autres parties du sensorium.» 22

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Kandinsky 1963 (note 2), p. 44. Dani Cavallaro, Synesthesia and the Arts, Jefferson, Caroline du Nord et Londres, 2013, pp. 7-8. 22 Ibid., p. 5. 23 Eamon Ore-Giron lors d'une conversation avec l'auteure de ce texte, le 21 mai 2021. 24 Eamon Ore-Giron lors d'une conversation avec l'auteure de ce texte, le 21 mai 2021. 25 Vassily Kandinsky, Rückblick [1913], Baden-Baden, 1955, p. 25. La traduction française citée ici provient de Vassily Kandinsky et Buffet-Picabia Gabrielle, Regard sur le passé, Galerie R. Drouin, Paris, 1946, p. 24. 21

Ore-Giron n'est pas «réellement» synesthète et n'essaie pas non plus de fournir une clé d'interprétation pour lire ses œuvres comme Kandinsky l'a fait. Pourtant, son approche synesthésique va bien au-delà de son expérience personnelle et d'un contexte circonstanciel. Au contraire, il repousse la limite géographique et culturelle de son identité métissée pour incorporer et absorber un mariage intersensoriel de sons peints et de visions acoustiques et pour exprimer une nouvelle interprétation égalitaire et en ce sens cosmique de l'abstraction géométrique. Par la même occasion, l'observation de ses compositions abstraites aux couleurs vives entraîne indéniablement une sensation rythmique, qui éveille une réponse émotionnelle et spirituelle individuelle chez le spectateur. Le titre de l'exposition de l'Espace Muraille, «Auto-Tune», est né lors d'une conversation avec l'artiste au sujet de sa série Infinite Regress, qui constitue le plus grand des deux ensembles d'œuvres inclus dans l'exposition. «Auto-Tune» fait référence au processeur audio utilisé par les producteurs de musique depuis la fin des années 1990 pour mesurer et corriger la tonalité des voix et des instruments de musique. Connu comme «l'effet Cher» parce qu'il a commencé à être largement utilisé par les musiciens pop après le succès de l'artiste américaine avec sa chanson Believe (1998), l'auto-tune est en fait né en tant que dispositif pour corriger la justesse de la voix, tout en y ajoutant un éclat supplémentaire et peut ainsi porter une connotation légèrement négative. En fixant des paramètres, qui ne se répètent pas exactement, mais sont néanmoins présents dans chaque œuvre de la série, les peintures d'Ore-Giron de la série Infinite Regress peuvent être interprétées comme une transposition visuelle d'un effet d'auto-tune. «Comme la musique», explique l'artiste, «elles se livrent à un remix sans fin, constamment soumises à une réinterprétation.» 23 Il ne fait aucun doute qu'Ore-Giron n'a pas besoin d'auto-tune pour faire chanter ses tableaux. Cependant, le caractère métallique et réverbérant que l'utilisation de couleurs vives et d'or ajoute à ses peintures leur confère une qualité mélismatique insaisissable et surnaturelle. L'effet musical généré par le chant d'une seule syllabe étendue tout en suivant une succession de notes différentes est visuellement traduit dans les peintures d'Ore-Giron en multipliant la succession d'une sélection réduite de formes géométriques à travers une multitude de combinaisons chromatiques. En introduisant une variation répétitive dans une réflexion sur la culture populaire passée et présente, l'artiste l'amène à un tout nouveau niveau de conscience. Le résultat est un son visuel sacré et pourtant futuriste. «Infinite Regress», selon l'artiste, «est en quelque sorte une forme d'auto-tune: elle définit des paramètres qui ne se répètent pas tout à fait mais sont présents dans chaque pièce».24 «L’Art de peindre est la rencontre tonitruante de plusieurs mondes différents», observe Kandinsky. Le résultat de ce choc est la création d'un nouveau monde «qu’on appelle l'œuvre d’Art. Chaque œuvre engendre une nouvelle technique, comme le cosmos a engendré de catastrophe en catastrophe une symphonie issue du vacarme chaotique des éléments cosmiques, qu’on appelle la musique des sphères. Créer une œuvre, c’est créer un monde».25 Mêlant les leçons de musique à sa recherche picturale, l'œuvre d'Ore-Giron est une cosmogonie synesthésique qui célèbre à la fois la richesse et la diversité de son héritage culturel panaméricain et l'héritage formel et chromatique qu'il a reçu de la lignée artistique de l'avant-garde européenne. Ses œuvres incarnent à la fois l'empreinte tragique de l'histoire et la vision pleine d'espoir et harmonieuse d'un monde nouveau.

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EAMON ORE-GIRON’S PRINCIPLE OF THE INNERMOST NECESSITY: THE “AUTO-TUNE” EXHIBITION VALENTINA LOCATELLI 1

This is the case, for instance, if we consider the works the artist presented on the occasion of the “Widely Unknown” exhibition, a group show curated by Eungie Joo at Deitch Projects in New York, November 10 - December 22, 2001: https://deitch.com/archive/deitch-projects/exhibitions/widely-unknown (accessed August 31, 2021). 2 Wassily Kandinsky, Über das Geistige in der Kunst: insbesondere in der Malerei, 2. ed., Munich, 1912. There are various English translations of the original German publication. That cited here and in the following notes is On the Spiritual in Art, first complete English translation, edited and translated by Hilla Rebay, published by the Solomon R. Guggenheim Foundation, New York, 1946, p. 47. Available online: https://www.wassilykandinsky.net/book-concerning_the_spiritual_in_art.html (accessed August 31, 2021). 3 Ibid., p. 11. 4 Ibid., p. 57.

Since the early 2000s, when his works were still replete with references accumulated from a direct experience of the American West and its folkloristic eccentricities,1 Eamon Ore-Giron’s artistic practice has evolved from being mostly figurative and narrative to creating exquisitely intellectual yet emotionally moving abstract compositions. It is especially during the last decade that Ore-Giron has progressively abandoned any vestige of perspective in his paintings and declared his fascination for the icons of both Latin American and Western abstraction, from Joaquín Torres-García to Jorge Eielson and Carmen Herrera, from El Lissitzky to Max Bill. In fact, Ore-Giron’s canvases are now entirely dominated by flat planes and non-representational arrangements of intensely colored, geometric, and two-dimensional shapes. The artist believes that this evolution may be attributed to the fact that, over the past ten years, he has been gradually losing the vision in his right eye. While the artist’s physical condition might have contributed to this formal artistic development, there are also other more substantial underlying causes for the abstract and even transcendent character which defines his recent work. These have to be sought primarily in Ore-Giron’s affinity for and work with music and in the resulting synesthetic approach that he adopts more or less consciously in his understanding of reality and naturally embraces when painting. The Principle of the Innermost Necessity In his groundbreaking treatise Über das Geistige in der Kunst (On the Spiritual in Art, 1912) the Russian artist Wassily Kandinsky (1866–1944) articulated the reasons behind his own preference for an abstract and non-representational artistic language focused on expressing emotions and spirituality, literally marking the beginning of an entirely new chapter in art history. Formulating his artistic “principle of the innermost necessity” (in the original German text the “Prinzip der inneren Notwendigkeit”), Kandinsky observed how different “forms of harmony reflect in a corresponding vibration of the human soul”.2 He stated his belief in the absolute need of an unrestricted and non-objective painterly visualization of emotions and sensations, which he valued over any figurative and recognizable representation of the material world. At the beginning of his book, Kandinsky observed that “every work of art is a child of its time, while often it is the parent of our emotions.” 3 While it is indisputable that every cultural period creates its art - and Kandinsky’s abstract principles were in fact shared by other contemporaries and pioneers of abstraction such as Kazimir Malevich or Piet Mondrian - Kandinsky argued that the three fundamental mystical elements upon which his “principle of the innermost necessity” resides are universal and eternal. And, as a matter of fact, they are still valid nowadays and can serve as a vade mecum to help unpack and understand Ore-Giron’s work. These factors are: first, the “element of personality”; second, the “element of style” - or the message of the epoch and the language of the nation in which the artist lives and works; and third, “the element of pure, eternal art, which is constant among all people, nations and ages” and “irrespective of time and space.” 4

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Departing from each one of these elements - the artist’s biography, his style and his underlying intrinsic and spiritual idea of art as such - and reflecting on their role, reciprocal relation and resulting impact, it becomes easier to interpret Ore-Giron’s artistic path as that of a heuristic journey and spiritual discovery motivated by personal history as much as by a broader discourse of socio-political resistance, in which the language of music and a harmony of visual and abstract codes is used to evoke a sense of shared belonging and generates deep emotional responses and “vibrations” within the viewer’s soul. From Musical Impressions and Artistic Improvisations… Born in 1973 in Tucson, Arizona, to a Peruvian father, who emigrated to the United States, and an Irish-American mother, Eamon Ore-Giron was raised and educated in an environment where diverse cultures intersect and mix, a decisive experience which has informed his artistic aesthetics and interests. Spending an important part of his formative years in Mexico and Peru - especially in Huancayo, where he worked with Josué Sánchez Cerron (b. 1945), an artist best known for his murals and his flat colored paintings depicting scenes of everyday life and popular Andean traditions - Ore-Giron has gradually developed a practice firmly rooted in the idea of cultural cross-fertilization and characterized by interdisciplinarity and a multiplicity of genres. Besides being a painter, Ore-Giron has also worked as a sculptor, video artist, musician, and DJ - he is also known under the pseudonym of “DJ Lengua”, which means “tongue” in Spanish. When reflecting on his most recent body of work, it is not surprising to discover that a seminal part of his career was the result of an exposure to a predominantly musical, rather than merely visual, environment. In 2001, together with Julio César Morales, Luis Illades, Joseph Franko and Juan Luna Avin, Ore-Giron founded Club Unicornio, a collaborative project between visual artists and musicians based in San Francisco consisting of a monthly dance party with DJ sets playing folk music and Latin American sounds, including South American cumbia, boogaloo and mambo, fused with cutting-edge contemporary electronic music. Then, in the mid-2000s, when he was in Los Angeles studying for his Master of Fine Arts at the University of California, Ore-Giron also began working with the OJO collective, a seven-person artistic performance and music group which drew inspiration from different musical sources. It was at this time that, as the artist recollects, he also “began to experiment with different ways of working, such as collage and incorporating text” and “moved further away from the figurative work and more into a free association of text and shapes.” 5 In 2009, for the “Into a Long Punk” exhibition at Steve Turner Contemporary Los Angeles, Ore-Giron proposed a reinterpretation of his old discarded vinyl records and incorporated them into his work including “text pieces that referenced Gaelic, Mayan, and Aztec [creation] myths. Oral tradition presented visually, with nods to Modernism and graphic design”, as he explains.6 Finally, once again with César Morales - although this time as Los Jaichakers (Spanglish for “hijacker”) 7 - Ore-Giron has continued “hijacking” and appropriating traditional music genres from Latin America and the US, especially the Mexican diaspora, absorbing and subverting them with the objective of freeing information on the black market economy and producing something completely new and audacious that resonates with the collective consciousness of both North and South America. As Kandinsky pointed out, any painter striving to let his inner world freely express itself can only but envy the ease and levity with which music, the most “non-material” of the arts, is able to achieve such a goal. “One art”, he observed, “must learn from another how to use its common principle and how to apply it to the fundamentals of its own medium. Borrowing those methods, the artist must not forget that all mediums contain within themselves unique characteristics, and it is up to him to discover the proper application.” 8 More than just “borrowing” his methodology from music, Ore-Giron has let music inspire and guide him: he has used it as a starting point to create a rich and diverse body of work which is the result of an ongoing research process centered on the language of abstraction and its synthetic, rhythmic and overall “symphonic” potential. It is well known that, by deriving new creative categories from the language of music and naming his artworks “Impressions”, “Improvisations”, and “Compositions”, Kandinsky theorized a system of abstract correspondences between sounds, shapes and colors, capable of activating in the viewer those emotional and vibrational responses for which he was looking. If impressions are the direct result of any exposure to life - to the “outward nature”, as for example in the case of the impressions stimulated by a music concert - and in this sense constitute the foundation of any human sensorial experience and artistic interaction, it is the concept of improvisation – the “intuitive, for the greater part spontaneous expression of incidents of an inner character, or impressions of the ‘inner nature’” 9 - which is an especially essential component of Ore-Giron’s work. As he points out: “[...] in my global painterly practice, it's really all about improvisation and the relationship between the different elements. Without limitations, you always give yourself a lot more freedom. I think experimentation always makes everything much more interesting.” 10 Yet Ore-Giron’s paintings are also the result of “slowly evolved feelings” - to refer once more to Kandinsky’s own words. They are the outcome of a scientific approach fed by an experimental and even pedantic methodology practiced over a long period of time, repeatedly and with careful attention to details.

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Eamon Ore-Giron, interviewed by Tiffany Barber, June 15, 2011. Transcript of the interview published on Latin.Art.com - an online journal of art and culture, http://www.latinart.com/transcript.cfm?id=110 (accessed August 31, 2021). 6 Ibid. 7 In 2013, as Los Jaichackers, Ore-Giron and Morales presented the performance-based project “Night Shade/Solanaceae” on the occasion of the opening event of the Pérez Art Museum in Miami. 8 Kandinsky 1946 (note 2), p. 35. 9 Ibid., p. 98. 10 Eamon Ore-Giron in conversation with Jalis 2019, “Eamon Ore-Giron: Notre Renaissance sera une exaltation collective”, July 18, 2020, Soleil Rouge Magazine, https://soleilrougemagazine.com/selon-ore-giron-notre-renaissance-sera-une-exaltation-collective (accessed, August 31, 2021). Original text in French, English translation by the author of this text.

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… to Constructivist Symphonic Compositions Ore-Giron’s artistic practice grows out of an investigation of both Western and Latin American canons, whereby the historic and visual legacies of the Global South meet and converge with North American and European modernist traditions. As a result, his work proposes alternative and unexpected discourses expanding the potential of synchronicity and interconnectedness, unlocking them across time and space. From the largest to the smallest, the paintings which Ore-Giron has produced during the last decade are all realized on raw linen canvases using Flashe paint, a brand of richly pigmented and ultra-matte vinyl-based paint. They are characterized by appealing choreographies of circular and sharp edged-motifs in which different layers of bright, pastel or earthen colors and gold interlock and overlap, alternating solids and voids, fore- and background. Evoking motifs derived from pre-Columbian architecture, Andean textiles and ancient Peruvian gold work as much as from the abstract compositions of European avant-garde movements, Russian Constructivism and Brazilian Neo-Concretism, Ore-Giron’s paintings are the artist’s synthetic and personal response to the encounter between all these transnational narratives and legacies.

Fig.3 HEAD, 2012 Flashe on linen / Flashe sur lin, 30.5x30.5cm Private collection, courtesy of the artist Collection privée, avec l'aimable autorisation de l'artiste Fig.4 E-D-G-B-D-G (Open Tuning), 2012 Hydrocal, cocaine, steel, twine, copper pipe, wood, flashe Hydrocal, cocaïne, acier, ficelle, tuyau en cuivre, bois, flashe, 188x68.6x30.5cm Collection of the artist / Collection de l'artiste, Los Angeles

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On the history of the Ayacuchana guitar, see Eamon Ore-Giron’s contribution as DJ Lengua “La Guitarra Ayacuchana” on Joseph Franko’s well-respected blog, Super Sonido. The Latin American Cultural Reverb, published on January 27, 2011, https://supersonido.net/2011/01/27/la-guitarra-ayacuchana/ (accessed August 31, 2021). 12 In the two-channel video installation Morococha (2014), Ore-Giron reflects on China’s purchase of the eponymous Andean mining town and the relocation of its population to a new town created nine kilometers away in order to enable the extraction of copper from the soil beneath the original village. 13 Nathaniel Lee, review of the “Eamon Ore-Giron: Smuggling the Sun” exhibition at the Nicelle Beauchene Gallery, New York, Artforum, https://www.artforum.com/picks/eamon-ore-giron-41712 (accessed August 31, 2021). 14 Eamon Ore-Giron in the video-interview featured by James Cohan on the occasion of “The Symmetry of Tears” exhibition, New York, 2021, https://www.jamescohan.com/ (accessed August 31, 2021). 15 Works from this series have been exhibited by the artist at different venues in the USA, most recently on the occasion of the Whitney Biennial in New York (2017), the group exhibition “Soft Power” at the SFMOMA in San Francisco (2019) and the solo show “The Symmetry of Tears” at the James Cohan gallery in New York (2021).

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As observed previously, Ore-Giron’s work has not always been non-representational. Nonetheless, even if the paintings he presented in 2005 on the occasion of “Mirage” - his first museum exhibition, held at the Pennsylvania Academy of Fine Art in Philadelphia - were based on photographs and depicted the cultural references and idiosyncrasies he had absorbed and been confronted with both in Peru and the USA, the visual language he adopted was already abstract in its essence. In paintings such as Praise for the Morning (fig.1) or Exit Strategy (fig.2), depth and space are flattened, distance and perspective are rendered only by the juxtaposition of stripes and flat planes of different homogeneous earthy tones. However, in order to overcome the boundaries imposed by figuration and be able to elevate and crystallize his artistic message into the iconic levity of the geometric compositions which have by now become the artist’s signature, Ore-Giron had first to completely immerse himself in music before he could re-emerge from it, synthetize that emotional experience and be able to derive a new visual vocabulary from his personal response to it. It was only in 2012 that the influence of popular art, graphic design and muralism contained in essence in the works presented in Philadelphia would finally converge with the knowledge derived from all the musical experiences and profound acoustic impressions outlined above. For the “Open Tuning, E-D-G-B-D-G” exhibition, presented in Santa Monica at the 18th Street Arts Center, the artist proposed a choreography of multifarious artworks, from sculpture and painting to video, from music to live performances. Named after the tuning scale of the “guitarra Ayacuchana”,11 the exceptionally melancholic string instrument typical of the Andean region of Ayacucho, the project drew inspiration both from autobiographical episodes and memories - Ore-Giron’s father was from Ayacucho - and from a reflection over the centuries-long history of colonization and exploitation of Latin America and the resulting miscegenation and fusion of indigenous and Western cultural and aesthetic codes which, from the Spanish conquest onwards, have characterized the local artistic production, both musical and visual. Next to a political video piece condemning the grimmest effects of globalization on the Peruvian social frame 12 and a selection of mostly figurative works based on photographs, the exhibition included some of the artist’s first abstract paintings on raw linen canvases. Among these Head (fig.3), an abstract portrait of the Ayacucho guitar, was also a clin d’œil to the celebrated cubist guitar paintings of European masters such as Pablo Picasso and Georges Braque. The same trajectory initiated in Santa Monica was continued and further perfected with “Smuggling the Sun”, the artist’s first solo show in New York, held in 2013 at the Nicelle Beauchene Gallery. With the exception of one abstract sculptural piece - a deconstruction of the Ayacucho guitar composed of a set of six colored copper chimes hanging from a linear metal structure (fig.4) - this time the exhibition was devoted to painting. In ten small format canvases, Ore-Giron paid tribute to the modern masters who, as art critic Nathaniel Lee points out, “were instrumental in the early formation of nonrepresentational, geometric art”, for instance referencing the brilliant orphic color palette and concentric compositions of Sonia and Robert Delaunay as well as the “oblique perspective seen in the mechanical drawings of a certain vintage, namely - if faintly - the sleek, seemingly rational designs of Marcel Duchamp and Francis Picabia.” 13 In this sense, “Smuggling the Sun” represents a pivotal moment in the artist’s career, as it marks Ore-Giron’s non-reversible transition from figuration to constructivist and geometric abstraction. It was only after fully embracing a non-representational artistic vocabulary that the artist was finally enabled to express his “innermost necessity” and articulate his emotions and spirituality in the manner he had so far only been able to do with music. Infinite Regress While acknowledging that Ore-Giron’s paintings exhibited at the Nicelle Beauchene Gallery were “smart, exceptionally likable and deceptively modest”, The New York Times art critic Ken Johnson concluded his review of the show wondering what would they be like if the artist “put his all into them?”. This rather provocative question was boldly answered by Ore-Giron shortly thereafter with his new and still ongoing body of work. In 2015, within less than a month, the artist experienced the death of his beloved mother and the birth of his first child, Octavio. These intense emotional events brought him to a mental space where, as he explains, he was simultaneously “experiencing the potential future” but also a “loss, which was like through the past.” 14 It was from the perturbing mirroring and overlapping of the idea of definitive end with that of a brand-new beginning that the artist began work on his so called Infinite Regress series, creating rigorously constructivist and yet splendidly symphonic compositions which, in their essence, are the most striking result and the culmination of the integration process between music, colors and abstract forms he has been pursuing all through his career.15

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The concept of “infinite regress” (from the latin regressus in infinitum) is a philosophical one and is determined by skepticism, by the will to prove the inadequacy of a demonstration and hence put knowledge in question. It designates the logical progression, or rather regression, that occurs when, in order to explain a given term, it is necessary to refer to another one and so forth, without ever being able to reach the final and ultimate definition or truth. Each painting in Ore-Giron’s series is like a ring in an endless chain of meaning: while it requires and is contained in its embryonic form in the works that precede it, it also introduces variations to them and is therefore indispensable for giving birth to and understanding the essence of the works that follow it in the sequence. In this sense, the series is a “mise en abyme” with countless variations and a metaphor for the continuity between life and death. Ore-Giron’s Infinite Regress series would apparently be condemned to an endless process of elaboration by addition or reduction towards a limitless and unreachable destination. This impossible situation can however be solved and acquire meaning if the series is placed in relation to the rest of the artist’s work: that which preceded it, as this text has attempted to do so far, and that which will eventually unfold from it. At the same time, Infinite Regress should also be appreciated in light of what has been said about the “principle of the innermost necessity”: in the broader context of art history, it is Ore-Giron’s personal interpretation of and response to non-representational art, his contribution - modulated by the “element of personality” and the “element of style” - to the ever-evolving grammar of “pure, eternal art”. It is also Ore-Giron’s attempt at elaborating on the different histories of abstraction with which he has been confronted, both Andean and Western and Eurocentric, commingling their lessons in order to underscore their common origin in the intrinsically human need for a sense of spiritual belonging. The Infinite Regress paintings are all structured following a regular spatial composition. They have an upper section, roughly corresponding to the upper third of the canvas, setting the line of the horizon upon which the astral-like and polychromatic abstract geometric arrangement unfolds, and a lower section, dominated by the color gold, and to which the artist refers to as “the terrestrial part of the painting.” 16 The latter creates a sort of luminous architectonic screen reminiscent of the perforated walls typically found in much of the vernacular architecture in Latin America. It is through this filter which the viewer standing in front of the painting can glimpse the cosmogenesis happening in the background of the composition and above the horizon line, in the celestial realm. At the same time, the dominant gold palette is also evocative of “the bell-shaped skirts of the Virgins in paintings of the Peruvian Cuzco school” 17 as well as of the use of gold leaf and gold ground in Byzantine and early Renaissance art with Christian iconography. Furthermore, there is a specific cultural dynamic, an attempt at making amends for history implicit in Ore-Giron’s use of gold paint in his canvases. As he points out: “I’ve been exploring the occurrence when the Conquest happened and so much gold was taken from the native people, the double theft that occurred, on the one side the physical theft of the gold, and on the other side the cultural theft of all the artifacts that were melted down to obtain more gold. All those masterpieces which were turned into liquid gold and were lost forever.” 18 In this sense, Infinite Regress expresses the artist’s contribution to a process of decolonization, his desire to restitute the stolen gold and recreate contemporary masterpieces capable of reconnecting to that lost lineage. The Exhibition at Espace Muraille The “Auto-Tune” exhibition at Espace Muraille is Eamon Ore-Giron’s first solo show in continental Europe. Distributed on the two levels of the gallery space, the artworks in the exhibition radiate light and emanate transcendent levity. Their luminosity transforms the space and sparks a conversation with Espace Muraille’s historic architecture. Under the crypt-like vaulted ceilings of what used to be an 18th century cellar, the public encounter an immersive presentation of Ore-Giron’s work, which generates a meditative and almost mystical experience and causes a sense of spatial displacement.

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Eamon Ore-Giron 2021 (note 14). Marcela Guerrero, “Eamon Ore-Giron”, in: Soft Power. A Conversation for the Future, exh. cat., ed. by Eugenie Joo, San Francisco Museum of Modern Art, 2019, pp. 156–161, here p. 156. 18 Eamon Ore-Giron during a conversation with the author of this text, May 21, 2021. 19 MacKenzie Stevens, “Eamon Ore-Giron”, in Anne Ellegood and Erin Christovale, Made in L.A. 2018, exh. catalogue, Hammer Museum, University of California, Los Angeles, Munich, London and New York, 2018, pp. 169-170. 17

The show features eighteen new paintings of different scales from the artist’s ongoing Infinite Regress series (from number CLX to CLXXVII; cat.1 to 18) as well as two loom-woven tapestries created in collaboration with the Taller Mexicano de Gobelinos in Guadalajara, Mexico, which directly reference the Aztec creation myths and hence add a further spiritual facet to the artist’s cosmic vision. The tapestry Talking Shit with Quetzalcoatl / I Like Mexico and Mexico Likes Me (cat.19) was exhibited for the first time in a group show organized by the American performance artist Rafa Esparza (b.1981) at Ballroom Marfa in Texas. On that occasion it was placed on a “two-layer mound of adobe bricks created by Esparza - part plinth part altar - that served as both a physical and a metaphorical support for the large textile. Presented in this way, Ore-Giron’s work was transformed into a ritual object or offering to Quetzalcoatl”, one of the most important gods in the Aztec pantheon, “here abstracted into a swirling snake composed of greens, blues, and reds.” 19 Designed as a poncho - a traditional garment used by Native American peoples since before the Spanish conquest - and presented at Espace Muraille on a wooden structure suggesting a human presence, the textile artwork was originally meant to be worn by Esparza as an attribute of spiritual connection enabling the two artists to enter into a critical conversation. Talking Shit with Coatlicue (cat.20), on the other hand, has been deliberately conceived and produced for the exhibition at Espace Muraille. Hanging like a wall tapestry on the staircase connecting the exhibition space on the ground floor with the one in the basement, it functions according to the artist as “the protector of the exhibition”, hence underscoring a sense of ceremonial descent into the sacral dimension of the crypt where Ore-Giron’s largest paintings in the exhibition are presented.

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Coatlicue, the Aztec snake-skirted goddess, creator and destroyer of all matter and form, who stands for the duality of bodily and spiritual, feminine and masculine elements, is evoked by the artist by means of a symmetric synthesis of his iconic totemic vocabulary of abstract shapes and by a palette dominated by blues and earthy tones. Ore-Giron choice of colors can be interpreted as the artist’s attempt at reuniting and blending different and yet convergent systems of beliefs and knowledge. When the Spanish conquistadores imported their set of religious beliefs and values to the so-called New World, the figure of the Virgin Mary (the Virgin of Guadalupe) was overlapped with that of Coatlicue, who was abruptly deprived of her more instinctual and sexual elements. If blue is evocative of the natural elements of water and air, in the Aztec tradition it was also associated with deity, and in the Catholic religion it became inextricably related to the Virgin Mary. Brown, on the other hand, represents segregation or death (it is the color of the order of the Franciscan friars) but is also strongly associated with the earth and hence with fertility. Cosmic Synesthesia and Auto-Tuning In the study Über das Geistige in der Kunst, Kandinsky rigorously investigated the correspondence between music and specific shapes and colors. He believed that these elements were intimately connected and their relationships regulated by exact and nearly universal correspondences: “the sound of colour is so precise”, he wrote, “that it would be difficult to locate anyone who would attempt to express the impression of bright yellow in the bass notes of the piano, or rose-madder as a soprano voice.” 20 The neurological phenomenon described by Kandinsky and according to which the experience of a sensation in one domain of perception stimulates an inadvertent sensation in another domain of perception is known as synesthesia (from the ancient Greek root syn, “together” and aesthesis, “sensation”). Contemporary research has demonstrated that there are as many as nineteen different types of cross-sensory perceptions, the most common of which are characterized by an association of letters and numbers (grapheme-color) or sound (colored-hearing) with specific colors.21 This coalescence of different aspects of the sensorium can be a biological and hence undeliberate phenomenon (actual synesthesia) or a voluntary construction determined by cultural exposure (artistic synesthesia). As Dani Cavallaro has observed in her comprehensive study Synesthesia and the Arts, “even an artwork with no obvious synesthetic features may be experienced as a synesthetic event by receivers willing to let it stimulate not only the sense to which it explicitly appeals but also other parts of the sensorium.” 22 Ore-Giron was not born an “actual” synesthete nor does he attempt to provide an interpretation key to read his works as did Kandinsky. Yet, his synesthetic approach goes well beyond a personal and circumstantial background. Rather, it pushes the geographical and cultural limit of his mixed identity to incorporate and absorb a cross-sensory blend of painted sounds and acoustic visions and give expression to a new, egalitarian and in this sense cosmic interpretation of geometric abstraction. At the same time, observing his brightly colored abstract compositions does undeniably result in a rhythmic sensation, which awakens an individual emotional and spiritual response in the viewer. 20 21

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Kandinsky 1963 (note 2), p. 44. Dani Cavallaro, Synesthesia and the Arts, Jefferson, North Carolina and London, 2013, pp. 7-8. Ibid., p. 5. Eamon Ore-Giron during a conversation with the author of this text, May 21, 2021. Eamon Ore-Giron during a conversation with the author of this text, May 21, 2021. Vassily Kandinsky, Rückblick [1913], Baden-Baden, 1955, p. 25. Translated by the author of this text. German original text: “Das Malen ist ein donnernder Zusammenstoß verschiedener Welten, die in und aus dem Kampfe miteinander die neue Welt zu schaffen bestimmt sind, die das Werk heißt. Jedes Werk entsteht technisch so, wie der Kosmos entstand - durch Katastrophen, die aus dem chaotischen Gebrüll der Instrumente zum Schluss eine Symphonie bilden, die Sphärenmusik heißt. Werkschöpfung ist Weltschöpfung.”

The title of the Espace Muraille exhibition, “Auto-Tune”, emerged during a conversation with the artist about his Infinite Regress series, which makes up the largest of the two body of works included in the show. “Auto-Tune” refers to an audio processor that has been used by music producers since the late 1990s for the purpose of measuring and improving pitch in both vocal and instrumental music. Known as the “Cher effect” because it became widely used by pop musicians after the success of the American recording artist’s song Believe (1998), auto-tune was actually born as a device to correct a singer’s off-pitch voice, adding extra shine to it, and can hence carry a slightly negative connotation. By setting parameters that do not exactly repeat but are nevertheless present in every work in the series, Ore-Giron’s Infinite Regress paintings can therefore be interpreted as a visual transposition of an auto-tuning effect. “Like music”, as the artist explains, “they are engaged in an endless remix, constantly subject to reinterpretation.” 23 There is no question that Ore-Giron does not need auto-tune to make his paintings sing in tune. However, the metallic and reverberating character that the use of vibrant colors and gold adds to his paintings provides them with an elusive and otherworldly melismatic quality. The musical effect generated by the singing of a single, extended syllable of text while moving between a succession of different notes is visually translated in Ore-Giron’s paintings by multiplying the succession of a reduced selection of geometric shapes through a variety of chromatic combinations. Introducing a repetitive variation into a reflection on past and present popular culture, the artist brings it to an entirely new level of consciousness. The result is a sacral yet futuristic visual sound. “Infinite Regress”, according to the artist, “is in a way a form of auto-tuning, it sets parameters that don’t quite repeat but are present in every piece.” 24 “Painting is a thunderous collision of different worlds”, Kandinsky observed. The outcome of this clash is the creation of a new world “which is called an artwork. Technically, each artwork is created in the same way as the cosmos was created - through catastrophes, which, out of the chaotic dissonance of instruments, at the end produce a symphony, which is called the music of the spheres. The creation of an artwork is the creation of a world.” 25 Blending the lessons of music into his painterly research, Ore-Giron’s work is a synesthetic cosmogony that celebrates both the richness and diversity of his Pan-American cultural heritage and the formal and chromatic legacy he has inherited from the artistic lineage of the European avant-garde. His works enact at the same time the tragic footprint of history and the hopeful and harmonic vision of a new world.

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Cat.18 INFINITE REGRESS CLXXVII, 2021 Cat.15 INFINITE REGRESS CLXXIV, 2021

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Cat.02 INFINITE REGRESS CLXI, 2021

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INFINITE REGRESS CLXIV, 2021 INFINITE REGRESS CLXVII, 2021 INFINITE REGRESS CLXVI, 2021 INFINITE REGRESS CLXV, 2021

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Cat.12 INFINITE REGRESS CLXXI, 2021

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Cat.10 INFINITE REGRESS CLXIX, 2021 Cat.20 TALKING SHIT WITH COATLICUE, 2020 Cat.11 INFINITE REGRESS CLXX, 2021

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Cat.11 INFINITE REGRESS CLXX, 2021

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Cat.20 TALKING SHIT WITH COATLICUE, 2020

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Cat.17 INFINITE REGRESS CLXXVI, 2021


Cat.09 INFINITE REGRESS CLXVIII, 2021 Cat.19 TALKING SHIT WITH QUETZALCOATL / I LIKE MEXICO AND MEXICO LIKES ME, 2017

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Cat.03 INFINITE REGRESS CLXII, 2021

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Cat.13 INFINITE REGRESS CLXXII, 2021 Cat.16 INFINITE REGRESS CLXXV, 2021 Cat.14 INFINITE REGRESS CLXXIII, 2021


Cat.04 INFINITE REGRESS CLXIII, 2021

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Cat.01 INFINITE REGRESS CLX, 2021

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Cat.01 INFINITE REGRESS CLX, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 69x54in / 175x137cm 60 I 62

Cat.09 INFINITE REGRESS CLXVIII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 52 I 53 I 71

Cat.17 INFINITE REGRESS CLXXVI, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 51

Cat.02 INFINITE REGRESS CLXI, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 69x54in / 175x137cm 27 I 39

Cat.10 INFINITE REGRESS CLXIX, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 44

Cat.18 INFINITE REGRESS CLXXVII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 35 I 36

Cat.03 INFINITE REGRESS CLXII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 72x72in / 183x183cm 56 I 57 I 75

Cat.11 INFINITE REGRESS CLXX, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 45 I 47

Cat.19 TALKING SHIT WITH QUETZALCOATL / I LIKE MEXICO AND MEXICO LIKES ME, 2017 Loom-woven tapestry Tapisserie tissée sur métier 93x76in / 236x193cm 53 I 55 I 66

Cat.04 INFINITE REGRESS CLXIII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 72x72in / 183x183cm 01 I 06 I 49 I 60 I 61

Cat.12 INFINITE REGRESS CLXXI, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 42

Cat.05 INFINITE REGRESS CLXIV, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 10 I 40

Cat.13 INFINITE REGRESS CLXXII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 58 I 60

Cat.06 INFINITE REGRESS CLXV, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 11 I 41

Cat.14 INFINITE REGRESS CLXXIII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 59 I 60

Cat.07 INFINITE REGRESS CLXVI, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 11 I 41

Cat.15 INFINITE REGRESS CLXXIV, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 35 I 36

Cat.08 INFINITE REGRESS CLXVII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 10 I 40

Cat.16 INFINITE REGRESS CLXXV, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 59

Cat.20 TALKING SHIT WITH COATLICUE, 2020 Loom-woven tapestry Tapisserie tissée sur métier 145x114in / 369x291cm 45 I 48

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EOG / J'ai travaillé pendant plusieurs années à tendre des toiles dans un endroit à Los Angeles appelé Fine Art Stretcher Bars. Je tendais de la toile de lin selon la vieille technique éprouvée de la colle de peau de lapin, et il y avait une beauté dans ce rapport quotidien à la matière tout en étant dans une ambiance de travail. Cela m'a fait connaître le matériau et apprécier cette présence palpable dont tu parles. J'adorais la physicalité du lin et ma relation à l'objet. La peinture Flashe est très mate, et j'aime le fait qu'elle ne réfléchisse pas mais absorbe la lumière; elle accentue les espaces négatifs du lin. A bien des égards, la peinture ressemble davantage à un objet. Le lien avec l'idée de construire quelque chose m'a conduit d'une certaine manière à explorer les idées constructivistes sur la réalisation de tableaux. VL / La couleur a évidemment un rôle central dans ton travail. Ta palette est riche et variée et tes arrangements chromatiques sont toujours différents et soigneusement composés. Comment choisis-tu quelles couleurs utiliser dans un tableau? Est-ce que tu suis un plan ou un schéma progressif et continu? Quelle place l'imprévu et le hasard ont-ils dans ta démarche artistique?

EAMON ORE-GIRON EN CONVERSATION AVEC VALENTINA LOCATELLI 30 JUILLET 2021 VL / Eamon, tu es né en Arizona, mais en grandissant, tu as passé beaucoup de temps au Mexique, en Espagne et même au Pérou - d'où était originaire ton père. Ce bagage multiculturel a clairement influencé ta pratique artistique. Y a-t-il un moment clé lors de ton parcours où tu as compris que tu voulais devenir artiste? Est-ce que pour toi, il existe un lien entre cette décision et l'un de tes environnements culturels en particulier? EOG / Je vivais en Espagne en 1982. A cette époque, j'avais 9 ans, presque 10. Ma mère m'emmenait au Museo del Prado pendant le week-end. Je me souviens avoir été obsédé par Saturne dévorant un de ses fils et Le colosse de Francisco Goya, ainsi que Le jardin des délices de Jérôme Bosch. Ces trois tableaux m'ont profondément marqué. Ils étaient si inquiétants et incroyables à la fois. Enfant, je pouvais puiser directement dans leur force narrative, et j’ai le souvenir de m’être dit que je voulais peut-être devenir artiste quand je serais grand… Ma mère s'est toujours entourée de musiciens et de personnes créatives, aussi bien en Espagne qu'en Arizona, où je suis né. Cela a certainement renforcé le sentiment qu'être un artiste était une option viable. Elle était très attachée à la communauté amérindienne et a enseigné dans la nation de Tohono O'odham, une réserve à l'ouest de Tucson et la deuxième plus grande terre autochtone de l'Etat. Elle connaissait également l'un des principaux acteurs culturels du peuple Yaqui à Tucson, Felipe Molina, et était amie avec un peintre du peuple Diné nommé Justin Tso. Je pense que ces deux expériences culturelles, l'une en Espagne et l'autre en Arizona, ont toutes deux contribué à ma décision de devenir artiste. VL / Le savoir-faire, la matière et la couleur sont trois des éléments fondamentaux de ton travail. Tes peintures donnent la sensation d'une forte présence palpable qui est liée à l'utilisation de la toile de lin brut et renforcée par son interaction avec les couleurs acryliques saturées que tu utilises dans tes compositions. Peux-tu nous en dire plus sur la façon dont tu as commencé à travailler avec ces matériaux?

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EOG / Mes premières peintures sont fondées sur l'utilisation de couleurs primaires. Au fur et à mesure que ma pratique se développait et en me lançant dans la série Infinite Regress, mes peintures se sont complexifiées. Elles ont fait leur chemin davantage vers des relations de couleurs secondaires et tertiaires. Les plus grandes œuvres de la série Infinite Regress de l'exposition «Auto-Tune» à l’Espace Muraille se concentrent principalement sur des nuances de bleu et de lavande. J'ai décidé de travailler autour de cette partie du spectre chromatique, et en même temps j'ai aussi trouvé des espaces où le spectre évoluait vers des relations plus inhabituelles générant une certaine tension. D'autres œuvres de cette exposition sont davantage liées aux premières œuvres de la série, avec des couleurs plus vives, comme des oranges, turquoises et verts émeraude. Je pense qu'il y a une certaine vulnérabilité à la palette précédente; elle nous permet du recul par rapport à la sophistication d'un dégradé. D'une certaine manière, elle me rappelle les couleurs utilisées par l'architecte mexicain Luis Barragán, avec ces roses, oranges et bleus vifs. Il y a évidemment un lien avec la sensibilité chromatique latino-américaine. Mes peintures abstraites ne suivent aucune logique mathématique. Elles sont principalement guidées par l'émotion et l'intuition, et je crois que c'est la plus grande différence entre mes abstractions et celles des peintres de la tendance Hard Edge des années 1970 auxquels mon travail est parfois comparé. Je n'ai pas besoin d'avoir une formule mathématique pour justifier mes décisions et, pour moi, ceci est au cœur du concept de la décolonisation de l'abstraction, quelque chose qui m'intéresse beaucoup et que j'explore constamment. VL / L'influence de la musique est fondamentale dans ton travail visuel et tes peintures ont une qualité intrinsèquement synesthésique. Même si tu n'es pas un «réel» synesthète, peux-tu essayer de nous expliquer comment tu laisses la musique façonner ton vocabulaire visuel? Est-ce que tu écoutes de la musique en dessinant et en peignant? EOG / Il y a quelques années, j'ai failli devenir aveugle de l'œil droit. Maintenant, je suis habitué à voir comme de grands arcs-en-ciel et des éclats de lumière dans cet œil. J'ai réalisé que j'ai commencé à jouer avec les formes et les couleurs de manière plus primaire depuis que j’ai été touché par ce problème. Je me considère comme un synesthète, et je crois que quiconque fait de la musique l'est, dans une certaine mesure. Il y a beaucoup de rythme dans mes peintures; il y a des moments où les choses se répètent et il y a des moments où tout est lié. Chaque élément dépend des autres éléments. De cette façon, la peinture est très similaire à la musique. Le bleu est la caisse claire, le rouge est la basse, l'or est la batterie… et quand tout est réuni, tu obtiens l'énergie de l'ensemble. Si tu écoutes mes œuvres de musicien et producteur et que tu regardes ensuite mes peintures, il y a une relation directe avec l'hybridité culturelle. Il y a des peintures qui résonnent clairement avec l'hybridité, une hybridité de références et d'histoires. Lorsque les œuvres sont terminées, que l'exposition est installée et que les pièces sont placées dans un environnement, c'est à ce moment-là que j'entends un son, j'entends les pièces faire écho les unes aux autres. Il n'y a rien de spécifique en termes de religion, mais il y a incontestablement une résonance spirituelle dans ces œuvres. Et cette résonance est la qualité synesthésique que je ressens. 66 I 67


EOG / I used to work for several years stretching canvases at a place in Los Angeles called Fine Art Stretcher Bars. I would stretch linen using the old technique of rabbit skin glue, and there was something beautiful about that daily relationship to material in a working atmosphere. It made me know the material and appreciate that haptic presence you are referring to. I loved the physicality of the linen and my relationship to the object. Flashe paint is very matte, and I like the fact that it does not reflect but absorbs light; it accentuates those negative spaces of the linen. In many ways, it makes the painting feel more like an object. The connection to the idea of constructing something led me in some way to explore constructivist ideas about making paintings.

VL / Tu as récemment été chargé d'importantes commandes publiques officielles pour des stations de métro près du LACMA au Wilshire Boulevard à Los Angeles et à Brooklyn, New York. Pour la Biennale de Los Angeles «Made in LA» en 2018, tu as également peint une fresque murale à grande échelle dans le hall d'entrée du Hammer Museum. Est-ce que tu penses que ta méthodologie de travail en tant que peintre a été influencée par ces expériences? Ces commandes de grande envergure ont-elles eu un impact sur ton travail en atelier? EOG / L'expérience de ces commandes publiques fait dialoguer mon travail avec des artistes comme Roberto Burle Marx au Brésil et beaucoup d'autres artistes latino-américains du milieu des années 1900. Il existe une relation forte avec l'idée du sens civique, et je pense qu'elle provient en grande partie des grands muralistes mexicains. Selon moi, la période du récit figuratif dans les travaux publics est quelque chose du passé. Ce qui m'intrigue à cette échelle, c'est de travailler avec l'abstraction. De simples gestes et formes se transforment lorsqu'ils sont produits à grande échelle; ils modifient les structures architecturales, ajoutant de nouvelles dimensions et transformant la façon dont nous vivons un espace. Lorsque je réalise de grandes œuvres pour un espace public, je me pose la question: «Comment ces formes fonctionnent-elles dans une société pluraliste, avec de nombreuses différentes histoires et expériences vécues? Quel est leur rapport à un langage visuel collectif?» Ce sont ces idées qui m'intéressent et qui m'inspirent. En termes d'échelle, je dirais que l'œuvre qui a eu le plus d'impact sur ma pratique artistique est la peinture murale que j'ai réalisée au Hammer Museum de Los Angeles. Pour cette commande, j'ai dû réagir à un espace très ambitieux et à ses caractéristiques architecturales, comme l'escalier dans le hall d'entrée du musée. Cela m'a appris à voir mon travail dans le contexte de l'architecture et à réfléchir à la façon dont l'architecture peut façonner le travail. VL / A l'Espace Muraille, tu présentes de nouvelles peintures de la série continue Infinite Regress. Au moment où nous parlons, la série comprend 177 œuvres au total. Quand penses-tu que la série sera potentiellement terminée? Ou l'idée de fin et d'achèvement est-elle en fait impossible pour ce corpus d'œuvres, comme son titre l'indique? EOG / Je n'y mets aucune limitation. La série Infinite Regress est un processus continu; c'est en quelque sorte une pratique heuristique et en ce sens, elle se génère elle-même. VL / Je t’ai entendu comparer tes peintures à des structures architecturales rappelant des «sanctuaires». Des adjectifs comme «transcendant», «spirituel», «mystique» sont très souvent utilisés par les critiques pour décrire tes œuvres. Y a-t-il en réalité aussi une composante religieuse ou sacrée dans ton travail? EOG / Je considère en effet que mes pièces ont certains moments très architecturaux, surtout si tu regardes la partie inférieure de mes peintures de la série Infinite Regress. En fait, je pense qu'ils sont directement liés à l'architecture. Par exemple, j'ai toujours été très inspiré par Carlo Scarpa. La façon dont il incorporait des éléments en or dans son travail et son obsession avec les cercles et les carrés en tant que formes élémentaires résonnent beaucoup en moi. Plus je produis des pièces à grande échelle, plus je commence à les considérer comme des extensions de l'architecture. Pour ce qui est de l'aspect spirituel de mon travail, j'essaie d'éviter toute simplification. Bien sûr, le travail d'un artiste peut faire l'objet d'interprétations différentes, et mes œuvres comportent une certaine part de transcendantalisme. Surtout quand je pense à l'état d'esprit dans lequel j'étais quand j'ai commencé la série… A certains égards, la peinture a toujours été pour moi un lieu sacré. Je pense que l'on sous-estime à quel point la peinture peut aider un artiste à explorer de nombreuses idées, émotions et expériences. Il y a quelque chose de magique et de divin dans le fait de pouvoir évoquer un contenu émotionnel et de pouvoir le traduire et le communiquer à tant de personnes. En même temps, je veux que les gens se sentent libres d'avoir leur propre interprétation. Je me sens lié à un sentiment de spiritualisme quotidien, quelque chose qui naît de la vie de tous les jours. Ce travail m'intéresse comme moyen d'explorer mon histoire personnelle ainsi que l'idée du temps et des différentes histoires culturelles. EAMON ORE-GIRON

VL / Color has obviously a central role in your work. Your palette is rich and varied and your chromatic arrangements are always different and carefully composed. How do you choose which colors to use in a painting? Do you follow a progressive and regular scheme or pattern? What space do contingency and accident have in your artistic process?

EAMON ORE-GIRON IN CONVERSATION WITH VALENTINA LOCATELLI JULY 30, 2021 VL / A quoi ressemble ton avenir professionnel? Quels sont tes prochains projets et sur quoi travailles-tu en ce moment? EOG / Il y a des choses passionnantes qui se dessinent… Pour commencer, au début de l'année prochaine, je participerai à une grande exposition individuelle au Museum of Contemporary Art Denver pour laquelle nous produisons également un catalogue d'exposition publié par Rizzoli. J'inaugure également une exposition intitulée «Non Plus Ultra» à la Collection Anderson à l'Université de Stanford cet automne.

VL / Eamon, you were born in Arizona but growing up you spent lots of time in Peru - where you father was from -, Mexico and even Spain. This multicultural background has clearly influenced your artistic practice. Is there a key moment in your biography when you came to the realization that you wanted to become an artist? Do you link this decision with any of these cultural contexts in particular? EOG / I was living in Spain in 1982. At that time, I was 9 years old going on 10. My mother would take me to the Museo del Prado during the weekend. I remember being obsessed with Francisco Goya’s Saturn Devouring His Son and The Colossus and Hieronymus Bosch’s The Garden of Earthly Delights. Those three paintings had a visceral impact on me. They were so disturbing and incredible at the same time. As a child I could tap directly into their narrative, and I remember thinking that maybe I wanted to be an artist when I grew up… My mother always surrounded herself with musicians and creative people, both in Spain and in Arizona, where I was born. That certainly fostered the sense that being an artist was a viable option. She was very connected to the Native American community and taught in the Tohono O'odham Nation, a reservation west of Tucson which is the second-largest indigenous land holding in the state. She also knew one of the main Yaqui cultural figures in Tucson, Felipe Molina, and was friends with a Diné painter named Justin Tso. I think these two cultural experiences - one in Spain and the other in Arizona - both contributed to my decision to become an artist. VL / Craftsmanship, material and color are equally fundamental components of your work. Your paintings have a strong haptic presence which is determined by the use of the raw linen canvas and enhanced by its interaction with the saturated acrylic colors you use in your compositions. Can you tell us more about how you came to start working with these materials?

EOG / My earlier paintings are rooted in the use of primary colors. As my practice developed and I embarked on the Infinite Regress series, my paintings became more complex. They have moved more into secondary and tertiary color relationships. The larger works from the Infinite Regress series in the Espace Muraille exhibition focus mostly around blue and lavender nuances. I decided to work around that part of the color spectrum, and at the same time I also found spaces where the spectrum is shifting into more unconventional relationships that create a certain tension. Other works in this exhibition are more connected to the earliest works in the series, with bolder colors, like oranges and turquoises and emerald greens. I think there is a certain vulnerability to this earlier palette; it is a step back from the sophistication of a gradient. In a certain way they remind me of the colors used by the Mexican architect Luis Barragán, those bold pinks, oranges and blues. There is clearly a connection to the color sensibilities of Latin America. My abstract paintings do not follow any mathematical scheme. They are mostly led by emotion and intuition, and I believe that this is the biggest difference between my abstractions and those of hard-edge painters from the 1970s to which my work sometimes gets compared. I don’t need to have a mathematical formula to justify what my decisions are, and, for me, this is at the core of the concept of decolonizing abstraction, something I am very interested in and constantly exploring. VL / The influence of music is fundamental in your visual work and your paintings have an intrinsic synesthetic quality. Even if you are not an ‘actual’ synesthete, can you please try to unpack for us how you let music inform your visual vocabulary? Do you listen to music while drawing and painting? EOG / A couple of years ago I almost went blind in my right eye. Now I am used to seeing big rainbows and flashes of light in that eye. I realized that it was when I started being affected by this problem that I started to play with shapes and colors in more primary ways. I do think of myself as a synesthete, and I believe that anybody who makes music is, to a certain degree, a synesthete. There is a lot of rhythm in my paintings; there are moments when things get repeated and there are moments when things all come together. Everything relies upon each other. In this way painting is very similar to making music. Blue is the snare, red is the bass, gold is the drums… and when it all comes together you get the energy of the whole piece. If you listen to my works as a musician and a producer and then you look at my paintings, there is a direct relationship to cultural hybridity. There are paintings which have a clear resonance with hybridity, a hybridity of references and histories. When the pieces are done, and the show is installed, and the works are in an environment, that’s when I hear a tone, I hear the pieces playing off of one another. There is nothing specific in terms of a religion, but there is definitely a spiritual resonance that the work has. And that resonance is the synesthetic quality that I feel.

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VL / You have recently been assigned important official public commissions for subway stations near LACMA on Wilshire Boulevard in Los Angeles and in Brooklyn, New York. For the Los Angeles Biennial “Made in L.A.” in 2018 you also painted a large-scale mural in the lobby of the Hammer Museum. Do you think that your working methodology as a painter has been influenced by these experiences? Have these large-scale commissions had an impact on your work in the studio? EOG / The experience of these public commissions puts my work in dialogue with artists like Roberto Burle Marx in Brazil and a lot of other Latin American artists from the mid 1900s. There is very much this relation to the idea of civic mindedness, and I think a lot of it originates from the great muralists in Mexico. The period of figurative narrative in public works is, for me, something that lives in the past. To work in abstraction on that scale is what intrigues me. Simple gestures and forms transform when realized at a large scale; they change architectural structures, adding new dimensions and transforming how we experience a space. When making large works for a public space I ask myself, “How do these forms function in a pluralistic society, with numerous different lived experiences and histories? What is their relationship to a collective visual language?” These are the ideas that interest me and are inspiring. In terms of the scale, I would say that the work which had the biggest impact on my artistic practice is the mural I painted at the Hammer Museum in Los Angeles. For that commission I had to react to a very ambitious space and its architectural characteristics, such as the staircase in the museum’s lobby. This taught me how to view my work in the context of architecture and to think about how architecture can inform the work. VL / At Espace Muraille you are presenting new paintings from the ongoing Infinite Regress series. As we are speaking, the series comprises 177 works in total. When do you imagine the series might be complete? Or is the idea of completion and end an essentially impossible circumstance for this body of work, like its title suggests? EOG / I am not putting any limitation on it. The Infinite Regress series is an ongoing process; it is in some ways a heuristic practice and in this sense, it generates itself. VL / I have heard you compare your paintings to architectural structures reminiscent of “sanctuaries”. Adjectives like “transcendent”, “spiritual”, “mystical” are very often used by critics to describe your paintings. Is there actually also a religious or sacred component in your work?

VL / What does your professional future look like? What are your next projects and what are you working on at the moment? EOG / There are exciting times ahead for me… To start with, early next year I have a large solo show at the Museum of Contemporary Art Denver for which we are also producing an accompanying catalogue published by Rizzoli. I am also opening an exhibition titled “Non Plus Ultra” at the Anderson Collection at Stanford University this fall.

EOG / In terms of architecture I do think of my pieces as having certain moments that are very architectural, especially if you look at the lower section of my paintings in the Infinite Regress series. In fact, I think they directly relate to architecture. For instance, I have always been very inspired by Carlo Scarpa. The way he incorporated some gold elements in his work and his obsession with the circle and the square as elemental forms very much resonate with me. The more I produce pieces at a large scale, the more I start to view them as extensions of architecture. In terms of the spiritual aspect of my work, I try to avoid any simplification. Of course, an artist’s work can end up being interpreted in many different ways, and there is a certain element to transcendentalism within my work. Especially when I think about the state of mind I was in when I started to create the series… In some ways, painting for me has always been a sacred place. I think it is underestimated how much painting can function for an artist as a place to work through many different ideas, emotions and experiences. There is something magical and divine about being able to conjure up this emotional content and being able to translate that and communicate it to so many people. At the same time, I want people to feel free to have their own interpretation. I am connected to a sense of quotidian spiritualism, something that is born out of everyday life. I am interested in the work as a means to explore my personal history as well as the idea of time and different cultural histories.

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BIOGRAPHIE EAMON ORE-GIRON L'ARTISTE / Né en 1973 à Tucson, Arizona, Eamon Ore-Giron a passé de longues périodes au Mexique et au Pérou, avant de s'installer à Los Angeles, où il continue de vivre et de travailler. Il a obtenu un baccalauréat en beaux-arts au San Francisco Art Institute et une maîtrise en beaux-arts à l'Université de Californie à Los Angeles. Le travail d'Eamon Ore-Giron a été présenté dans d'importantes expositions collectives, notamment «Soft Power» au San Francisco Museum of Modern Art (2019) et «Made in LA 2018» au Hammer Museum à Los Angeles (2018). Il a participé à «Something Else», la Biennale OFF du Caire (2015) et à la California Biennial du Orange County Museum of Art à Newport Beach en Californie (2008). Son travail a également fait l'objet de plusieurs expositions personnelles, entre autres au LAXART à Los Angeles (2015) et à la Pennsylvania Academy of the Fine Arts en Philadelphie (2005). Au sein du duo artistique LOS JAICHACKERS, son travail a été exposé au Pérez Art Museum Miami (2013), au Los Angeles County Museum of Art (2008), et à l'occasion de «Prospect.3» à la Nouvelle-Orléans (2014). Ore-Giron a été sélectionné pour réaliser d'importantes commandes publiques par la New York Metropolitan Transportation Authority et LA METRO pour les stations de métro de Brooklyn et Los Angeles, respectivement. Ses œuvres font partie des collections suivantes: Hammer Museum, Los Angeles; Kadist, San Francisco; Los Angeles County Museum of Art; Museum of Fine Arts, Boston, MA; Pennsylvania Academy of the Fine Arts, Philadelphia; Pérez Art Museum Miami; San Francisco Museum of Modern Art; et le Whitney Museum of American Art, New York.

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© Fabian Guerrero / 2021

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BIOGRAPHY EAMON ORE-GIRON THE ARTIST / Born in 1973 in Tucson, Arizona, Eamon Ore-Giron spent extended periods of time in Mexico and Peru, before settling in Los Angeles, where he continues to live and work. He received a BFA from the San Francisco Art Institute and an MFA from the University of California, Los Angeles. Eamon Ore-Giron’s work has been featured in important group shows, including “Soft Power” at the San Francisco Museum of Modern Art (2019) and “Made in L.A. 2018” at the Hammer Museum, Los Angeles (2018). He participated in “Something Else”, the OFF Biennale Cairo (2015) and the California Biennial at the Orange County Museum of Art, Newport Beach, California (2008). He has also had numerous solo exhibitions, among others at LAXART, Los Angeles (2015) and the Pennsylvania Academy of the Fine Arts, Philadelphia (2005). As part of the artistic duo LOS JAICHACKERS, his work has been shown at Pérez Art Museum Miami (2013), the Los Angeles County Museum of Art (2008), and on the occasion of “Prospect.3” in New Orleans (2014). Ore-Giron has been selected to realize major public commissions by the New York Metropolitan Transportation Authority and LA METRO for subway stations in Brooklyn and Los Angeles, respectively. His work is held in the following collections: Hammer Museum, Los Angeles; Kadist, San Francisco; Los Angeles County Museum of Art; Museum of Fine Arts, Boston, MA; Pennsylvania Academy of the Fine Arts, Philadelphia; Pérez Art Museum Miami; San Francisco Museum of Modern Art; and the Whitney Museum of American Art, New York.

EAMON ORE-GIRON

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IMPRESSUM / COLOPHON Traduction / Translation Sophie Müller

Commissaire d'exposition / Exhibition curator Valentina Locatelli

Crédits photographiques / Photo credits Luca Fascini, Geneva Charles White, New York / pages 01, 19 (fig.1), 29, 40, 41, 47, 62 Barbara Katus / page 19 (fig.2)

Remerciements / Acknowledgements Studio Eamon Ore-Giron Caroline et Eric Freymond Nicolas Christol, Antoine Boillet Christopher Duckett

Graphisme / Design 2S Stefan Sigel Photolitho / Prepress Solutionpixel Imprimeur / Printer Atar Roto Presse SA Imprimé à 500 exemplaires 500 copies printed © Espace Muraille 2021 © Eamon Ore-Giron 2021 All rights reserved. No part of this publication may be reproduced in any manner without permission, in writing, by publisher and artist. All images are courtesy of the artist and the Espace Muraille. All texts reproduced by kind permission of the authors.

EAMON ORE-GIRON

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ESPACE MURAILLE

5 PLACE DES CASEMATES CP 3166 / 1211 GENEVE 3 / SUISSE

T +41 (0)22 310 4292 F +41 (0)22 310 4293

INFO@ESPACEMURAILLE.COM ESPACEMURAILLE.COM


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