Construction&Bâtiment n°2/2022. Extraits

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CONS TRUCTION & BÂTI MENT PROJETS ET CHANTIERS DES PROFESSIONNELS DU BÂTIMENT

UNE ÉDITION

CHF 8.–


La question de l’énergie, bis C’était le titre de notre dernier éditorial. On y évoquait les enjeux, les objectifs et les perspectives qui se dessinent autour de la problématique énergieenvironnement, les stratégies et les moyens mis en œuvre pour y répondre. Tout cela, c’était avant. Avant la guerre et la montagne d’incertitudes qu’elle suscite et les remises en question qu’elle provoque. La sécurité énergétique pourrait inverser les priorités et bousculer les agendas. Certes, il est trop tôt pour tirer des conclusions et pour observer des changements de direction. Mais il est certain que cette crise va faire ce que les crises font en général. Elle va permettre des changements difficiles à accomplir en temps normal. Elle va permettre de pousser les limites et de briser certaines lignes. Elle va peut-être – finalement – permettre ce changement de paradigmes tant évoqué. Aujourd’hui, l’effort porte principalement sur le remplacement de l’énergie fossile par une énergie renouvelable. Il pourrait se déplacer vers une baisse de consommation, une baisse d’énergie. Par exemple, pour illustration, comparons la dimension des logements : dans les années soixante la taille moyenne d’un logement en Suisse était de 83 m 2, aujourd’hui elle est de 103 m 2. On était en moyenne 2,9 habitants par logement contre 2,2 aujourd’hui. Dur, dur… mais c’est ça la guerre. Maroun Zahar, Rédacteur en chef

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CONSTRUCTION & BÂTIMENT

ÉDITO


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Édito

ACTUALITÉS 10 Les news de l’architecture et de la construction INTERVIEW 16 La formation, pierre angulaire du savoir-faire REPORTAGE 20 L’école de la Fondation de la Monneresse 28 Trois établissements d’accueil vaudois TECHNIQUES DU BÂTIMENT 42 Peinture et plâtrerie, la sécurité du travail en question 46 Façades, préparer le futur 60 Portes et fenêtres, quoi de neuf ? 72 Sécurité incendie, anticiper pour limiter les coûts 74 Le bois, matériau de construction à part entière DOSSIER 80 Transformation : composer avec l’existant

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86. Trois cas d’étude : le Conservatoire de Musique de Genève, l’Ancienne-Douane à Lausanne et la Villa Vermont à Genève PROJET 110 À Orbe, le lumineux EMS Montchoisi 118 Le centre d’hébergement Rigot à Genève 126 À Fribourg, un nouveau pôle pour les métiers de la construction 136 Le collège Croset-Parc à Écublens 146 Au nord de Lausanne, le complexe scolaire de Riant-Pré 154 Ensemble de logements à Cheseaux-sur-Lausanne 160 Transformation et agrandissement de l’hôpital de Sion ENTREPRISES 150 Zoom sur des entreprises locales SALON 176 À Neuchâtel, le Salon de l’immobilier fait son retour AGENDA 161 Expos, salons, congrès et formations

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Des situations particulières de vie – telles que handicaps, pathologies psychiatriques, difficultés sociales, familiales ou personnelles – amènent des enfants ou des adultes à ne plus pouvoir vivre dans le milieu familial ou de manière indépendante. Certains passent toute leur enfance dans un foyer, d’autres poursuivent leur vie dans des établissements spécialisés. Quels sont les enjeux de ces architectures ? Comment y créer une atmosphère domestique ? Comment favoriser le lien, le partage, la vie en commun ? Comment préserver une certaine intimité ? Comment s’intégrer au contexte géographique, social et historique ? Voici trois lieux d’accueil vaudois situés dans trois contextes différents : urbain, péri-urbain et rural. Marielle Savoyat

LIEUX   D’ACCUEIL, LIEUX   DE   VIE 28

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REPORTAGE


© Cécile Monnier


© Rasmus Norlander

1 OUVERTURE ET INTROSPECTION Deux attitudes non contradictoires caractérisent la Maison du Jardin, inaugurée l’automne dernier sur les hauts de Saint-Prex : un geste structurel fort pour offrir une large ouverture vers le sud et une intégration fine au site, propice à l’introspection et au sentiment de sécurité. Le bâtiment comprend 22 chambres, ainsi que des ateliers et des espaces communs, destinés à des adultes en situation de handicap ; il propose également 5 appartements indépendants, loués à des personnes externes. Cette mixité inattendue génère un heureux lien social. Offrir un cadre protecteur et une atmosphère domestique à des résidents fortement fragilisés tout en favorisant l’ouverture sur le monde extérieur, une dualité qui s’exprime par l’architecture et le contraste des matériaux utilisés. La volumétrie pliée du bâtiment réduit son échelle en brisant les angles et les dimensions. Ce sont ainsi trois volumes, trois unités de vie, reliées sous une ligne de crête de toiture unique, qui s’étirent sur le terrain. L’architecture d’inspiration anthroposophique de quelques-uns des bâtiments environnants du site de la Fondation Perceval a guidé l’esquisse de la forme : toitures présentes, angles forts, façades et toitures s’enchaînant dans un mouvement continu et

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rythmé, répondant à la fois à la fonction du bâtiment et à son contexte paysager, ouvertures sur l’extérieur, échelle humaine... Orientés côté sud, les espaces communs réunis au rez-dechaussée, les chambres situées à l’étage ainsi que les appartements locatifs dans les combles s’ouvrent tous sur l’espace central protégé du jardin en direction du lac ; les services sont placés au nord, côté route. Au rez-de-chaussée, un grand espace central, hall de distribution conçu comme un jardin intérieur, se dilate pour former différents sous-espaces et favorise le lien social. Une vraie plus-value amenée par les architectes du bureau GNWA – Gonzalo Neri & Weck Architekten. Une longue ouverture s’étire sur toute la longueur de la terrasse au sud. Il s’agit là d’une prouesse structurelle hors du commun. La façade se voit en effet suspendue à la toiture. Ce dispositif est rendu possible grâce à la mise en place d’un noyau central porteur. À l’étage, les angles permettent de réduire les distances des corridors et de dilater l’espace en petits séjours. Les résidents sont guidés par la lumière : à chaque extrémité, une large fenêtre apporte luminosité naturelle et cadrage sur le paysage.

REPORTAGE


© Rasmus Norlander

REPORTAGE

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COMPOSER

Transformation d’une villa pour aménager une garderie aux premiers niveaux (Genève). Architectes: Lacroix Chessex

© Olivier Di Giambattista

DOSSIER TRANSFORMATION


Transformation en auto-construction d’une maison dans les vignes (Aigle). Architectes: Madeleine Architectes

© Olivier Di Giambattista

AVEC L’EXISTANT


© Olivier Di Giambattista © Olivier Di Giambattista

REVALORISER LES ESPACES Cette villa genevoise construite en 1868 abrite désormais une crèche. Les étages supérieurs restent dédiés au logement. Du fait que la bâtisse est protégée, aucune trace d’intervention contemporaine n’est visible sur les parties extérieures. À l’intérieur, le projet s’adapte aux structures existantes et tire parti des volumétries afin d’améliorer les connexions et de renforcer le lien avec le jardin. Un noyau central de distribution depuis la cour permet de desservir les étages. Une grande salle de jeu a été créée en hauteur sous les voûtes, offrant une nouvelle vocation à cet espace jusqu’alors peu éclairé et peu exploité. (Architectes: Lacroix Chessex - lacroixchessex.ch)

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CONSTRUCTION & BÂTIMENT DOSSIER


En raison d’un environnement construit toujours plus dense et d’un manque de terrain accru, le domaine de la construction s’occupe progressivement du patrimoine bâti. À l’heure où l’acte de construire est de plus en plus compliqué, normé et cher, comment composer et entrer en dialogue avec l’existant ? Salomé Houllier Binder

La transformation du bâti est un thème majeur qui commence à occuper et occupera l’ensemble des professionnels de la construction pour les décennies à venir. Alors que la construction neuve a longtemps été perçue comme le symbole noble de l’architecture, le domaine entre aujourd’hui dans une nouvelle ère, celle de la transformation. Jusquelà souvent sous-estimée, cette dernière ouvre une nouvelle problématique autrement plus complexe : celle de travailler avec les contraintes de l’existant sans tomber dans la dichotomie, encore très ancrée, d’une destruction totale ou d’une conservation nostalgique. Désormais, les architectes accompagnent le patrimoine bâti, composent avec ses qualités et ses contraintes pour l’adapter à l’époque contemporaine, aussi bien au niveau énergétique qu’aux niveaux typologique et esthétique. La conscience écologique mais aussi l’évolution des besoins se placent au cœur des préoccupations, modifiant les manières de bâtir et de concevoir l’espace. La transformation se décline sous plusieurs formes : rénovation, réhabilitation, extension, surélévation ou encore réaffectation, autant de possibilités pour revaloriser l’existant et réduire l’impact de la construction sur la planète. C’est le défi à relever dans les années à venir. ENTRE PRAGMATISME ET CRÉATIVITÉ À l’origine de cette nouvelle ère se trouve un patrimoine vieillissant trop gourmand en énergie et inadapté aux normes actuelles en termes de protection incendie, de sécurité ou encore d’accès pour les personnes handicapées. L’impulsion de la transformation est née en partie de ces divers besoins. En effet, si l’on tient compte de l’énergie grise, le bilan énergétique tout au long du

cycle de vie du bâtiment est en faveur de la rénovation plutôt que de la démolition. C’est le cas pour les bâtiments historiques des siècles passés évidemment, mais aussi et surtout des bâtiments plus récents de la seconde moitié du 20e siècle dont l’isolation périphérique, les grandes surfaces vitrées et la surenchère technologique rendent l’exploitation très coûteuse. Par ailleurs, la transformation permet de penser la construction de façon plus globale afin de redonner une unité à l’ensemble du projet architectural et urbain, prolongeant donc sa durabilité. Dans une mutation progressive, le bâti présente ainsi une nouvelle identité, souvent plus en adéquation avec la ville contemporaine. La transformation nécessite alors une compréhension fine et globale de l’existant et de son fonctionnement. Une approche très pragmatique est nécessaire : il faut déterminer quels sont les éléments structurels principaux, les spatialités dominantes, etc. Cette connaissance est rendue possible, notamment, grâce à l’évolution de l’ingénierie énergétique durable et des progrès technologiques. Une technique comme le nuage de points permet de réaliser une modélisation 3D très précise qui peut servir de base de travail pour s’assurer du respect du patrimoine. La composition avec l’existant n’est dès lors plus perçue exclusivement comme une contrainte. Au contraire, elle peut être source de créativité. La transformation induit certes un grand nombre de concessions mais elle nécessite aussi de trouver des solutions spécifiques et adéquates à chaque situation. La standardisation n’existe plus. Chaque solution est singulière. Chaque transformation est un récit qui propose des innovations diverses, que ce soit dans l’usage des matériaux, dans l’expérimentation du réemploi ou encore dans la réaffectation originale d’un bâtiment.

DOSSIER

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© Think utopia

DOSSIER TRANSFORMATION / PROJET 1

ENTRE ABSTRACTION ET MISE EN VALEUR À Genève, la rénovation de l’emblématique Conservatoire de musique met en lumière la valeur patrimoniale du bâtiment tout en l’adaptant à l’époque actuelle. Un projet complexe qui réunit les différents thèmes de la transformation. texte : Salomé Houllier Binder photos : Think utopia


Le Conservatoire de musique de Genève est un bâtiment néoclassique. Lorsqu’il a été construit en 1858, il proposait des spatialités et des volumétries en accord avec une haute qualité acoustique. Depuis, le bâtiment a subi six interventions. Les premières transformations, en 1910 et 1920, ont respecté la rigueur et la régularité du tracé d’origine. En effet, au 19e siècle un conservatoire se basait principalement sur les espaces de concert (salle principale et salons), l’enseignement se déroulant de façon plus privée à l’intérieur de la sphère domestique. En revanche, durant la deuxième moitié du 20e siècle, une série d’interventions intérieures ont visé à augmenter et remanier la surface ; le début de l’enseignement groupé poussait alors à revoir les espaces en les sous-divisant pour aménager des

salles de classe (cloisonnements, demi-niveaux, etc.). Ainsi, la cohérence du projet initial s’est progressivement altérée, créant un objet plus disparate qui répondait toutefois à l’évolution des besoins programmatiques. Dans le but de redonner une cohérence globale au bâtiment, le projet développé par le bureau GM Architectes Associés (GMAA) s’appuie sur l’histoire du bâtiment, s’en inspire pour retrouver les qualités d’origine et parfois s’en détache. Le projet de transformation a pour objectif une extension, une rénovation énergétique et une mise aux normes (incendie, sécurité, accès aux personnes à mobilité réduite). Un défi à la fois technique, conceptuel et historique.

DOSSIER

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N°1 / FÉVRIER–MARS 2022

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Le Collège de Riant-Pré au nord de Lausanne

© Federal Studio - Régis Golay

PROJETS


DYNAMISME ET POROSITÉ

Le complexe Riant-Pré, niché dans le quartier des Fiches au nord de Lausanne, est à la fois un lieu ouvert sur la ville et un cocon protégé dédié à la pédagogie. texte : Iphigeneia Debruyne photos : Federal Studio - Régis Golay


La façade est rythmée par de vastes fenêtres qui estompent la frontière entre intérieur et extérieur.

Objet d’un concours d’architecture SIA remporté par le bureau Aouabed & Figuccio Architectes à Carouge en 2014, le projet a été développé et réalisé entre 2015 et 2021 sous la direction d’Alberto Figuccio, architecte associé. Aujourd’hui, plusieurs sentiers piétons donnent accès à Riant-Pré. Situé à l’orée sudouest du nouveau quartier lausannois, le complexe se démarque d’emblée par l’aménagement du terrain de forme biscornue. Le bureau Aouabed & Figuccio Architectes y déploie le fruit d’une recherche urbanistique. Le programme monolithique du maître d’ouvrage, la Ville de Lausanne, est soigneusement décomposé en deux entités : la partie scolaire et la partie parascolaire. Puis, chaque bâtiment est positionné de façon à garantir une occupation optimale de la surface constructible et une intégration harmonieuse dans le tissu urbain. L’Accueil pour enfants en milieu scolaire (APEMS) est localisé à l’extrémité nord, soit en continuité avec la zone d’habitation. Le collège, assurant une fonction scolaire et sociétale, est implanté au centre de la parcelle. Bâtiment pivot, son rez-de-chaussée traversant favorise la circulation piétonne. L’aire de jeux aménagée à l’est et la crèche, déjà existante, à l’ouest complètent l’ensemble. « Cette structuration transforme

le site en un biotope dynamique et poreux. Les frontières entre la sphère privée et la sphère publique sont floutées. La ligne architecturale renforce cette conception », souligne Alberto Figuccio, architecte associé chez A&F Architectes. TRANSITION ET TRANSPARENCE À la limite nord, le pavillon APEMS destiné à accueillir jusqu’à 84 enfants en dehors des horaires scolaires se développe sur deux niveaux. Au rez se situe le réfectoire. L’étage est réservé aux activités parascolaires. Tant par sa situation dans le tissu bâti que par sa fonction, l’édifice fait tampon entre la vie scolaire et la vie en famille. L’esthétique du bâtiment nourrit cette dualité. Sans référence aucune à un établissement public, la construction se confond avec une maison résidentielle contemporaine. Au centre, le collège dédié aux activités scolaires et communautaires prend les dimensions d’une infrastructure de service. Le cube est composé de cinq niveaux dont un sous-sol consacré à l’activité physique et un rez doté d’un préau-passage traversant.

PROJET CONSTRUCTION & BÂTIMENT

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