CONS TRUCTION & BÂTI MENT PROJETS ET CHANTIERS DES PROFESSIONNELS DU BÂTIMENT
UNE ÉDITION
CHF 8.–
Si l’habitat est au cœur de ce numéro, c’est parce qu’il se trouve à un moment clé de son histoire. D’une part, l’évolution des modes de vie invite à repenser les espaces. L’éclatement de la cellule familiale type, la volonté de vivre en colocation ou en petite communauté sont notamment à prendre en compte. En plus de la villa ou de l’immeuble, des formes d’habitat comme la maison collective, la maison intergénérationnelle ou la coopérative constituent de nouvelles possibilités. D’autre part, les enjeux environnementaux poussent à reconsidérer l’empreinte de la construction sur le territoire. Face à la raréfaction du terrain, l’augmentation du nombre de pièces et des surfaces doit être pondérée par une recherche de densité. Les surfaces doivent désormais être les plus compactes et efficaces possibles, les gabarits doivent mieux s’insérer dans leur contexte et les techniques et matériaux doivent être plus durables. Si la LAT cherche à réguler l’étalement du bâti sur le territoire, si les diverses règlementations tentent de répondre aux aspects environnementaux, un engagement durable de la part de chacun d’entre nous est désormais nécessaire. Répondre aux besoins diversifiés des nouveaux ménages et instaurer une conscience écologique globale chez les constructeurs et les habitants, tel est l’enjeu pour l’habitat aujourd’hui. Salomé Houllier Binder, rédactrice en chef adjointe
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CONSTRUCTION & BÂTIMENT
ÉDITO
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Édito
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ACTUALITÉS Les news de l’architecture et de la construction
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INTERVIEW Prix des matières premières et valorisation des déchets bitumeux
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REPORTAGE Deux immeubles locatifs en pierre massive Trois ruraux transformés en logements
42 46 56 58 60 61 62
TECHNIQUES DU BÂTIMENT Peinture, la gestion des déchets Le solaire en façade comme en toiture Isolation et durabilité Améliorer l’efficacité énergétique Des travaux acrobatiques L’Eternit prend des couleurs Densifier en surélevant
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DOSSIER Repenser l’habitat, maintenant Evolution des typologies
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Un habitat adapté et adaptable Exemples d’aujourdhui : DomaHabitare à Sainte-Croix, Immeuble Boveresses à Lausanne PROJET L’École des Vergers à Meyrin Le Bled, un bâtiment mixte en coopérative d’habitants à Lausanne Le Centre d’enseignement spécialisé Carré d’As à Romont Un écoquartier sur le site de l’ancienne Papeterie à Marly À Bussigny, le nouveau QG de QoQa Un nouveau quartier sur le site de la Gare de Bulle À Meyrin, le Geneva Marriott Hotel Majestic-Alco, un quartier mixte à Chavannes-près-Renens Le Parc du Simplon, un quartier « autonome » et sans voiture
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ENTREPRISES Zoom sur des entreprises locales
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AGENDA Expos, salons
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REPORTAGE
REPORTAGE
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Pour bénéficier d’un bout de jardin ou avoir le privilège de se déclarer chez soi, beaucoup de personnes sont prêtes à s’éloigner des centres urbains et emménager en milieu rural. Pourtant, là aussi, les biens disponibles deviennent rares et les prix peu accessibles. En réponse à cela, des formes de logements collectifs émergent, en village ou même en zone agricole. Outils de valorisation du patrimoine, de lutte contre le mitage du territoire ou contre l’abandon des hameaux, ces ensembles renouent avec un mode de vie rustique où le rapport à la nature donne un sens au terme collectif. Héloïse Gailing
MISE AU VERT COLLECTIVE 28
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REPORTAGE
© Rolf Siegenthaler
© Rolf Siegenthaler
1 LE PATRIMOINE EN COMMUN Quand le bureau LVPH est intervenu sur ce projet, plusieurs appartements cohabitaient déjà dans cette ancienne villégiature construite à la fin du 17e siècle. La famille propriétaire occupait le premier étage tandis qu’un appartement indépendant au rez-de-jardin attendait d’être rénové. En héritant du domaine, protégé par le Service des biens culturels du canton de Fribourg, les enfants ont décidé d’augmenter les surfaces d’habitation, d’améliorer les performances énergétiques de l’enveloppe et de transformer l’ensemble en une PPE de cinq appartements pour couples ou personnes seules. En s’appuyant sur la partition existante, les architectes ont ainsi aménagé deux appartements par niveaux et un dans les combles transformés. Au rez-de-jardin, le dallage existant a été assaini avec la mise en place d’un drainage et d’une isolation sous radier. Le déplacement du local technique au sous-sol a permis de libérer la partie nord du bâtiment pour y aménager un appartement 2 pièces. De l’autre côté, un 3 pièces est devenu un grand 2 pièces avec le décloisonnement d’un séjour généreux, en relation directe avec le jardin. À l’étage, l’appartement familial a été scindé en deux logements à l’organisation originale : dans le premier on accède à la chambre en passant par une salle de bain dérobée, dans l’autre, une galerie non rénovée offre un espace semi-extérieur unique. Comme souvent dans des rénovations patrimoniales, les typologies varient pour s’adapter au contexte. Ici on retrouve
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pourtant une constante dans l’aménagement systématique d’une grande pièce de vie avec cuisine ouverte et des chambres plus petites. La salle de bain est organisée dans une construction neuve qui vient servir la partition générale des logements. Ces modules sanitaires s’intègrent de manière discrète en offrant rangements et confort aux espaces majeurs restaurés. Le choix des matériaux contemporains bruts comme la pierre de la Molière des plans de travail ou les sols en béton apparent s’accorde avec l’existant. Partout, des détails signifiants et témoins de l’histoire sont conservés et valorisés : fresques de peinture découvertes et restaurées pendant les travaux, anciennes portes et serrures, niches aménagées en rangement, boiseries apparentes, sol de molasse... De nombreux éléments contribuent à créer l’atmosphère des lieux. Dans les combles, la réfection de la toiture pour l’isoler a permis la création d’un grand appartement ouvert où l’omniprésence du bois de la charpente et des revêtements contraste avec l’ambiance très minérale des niveaux inférieurs. Avec l’intégration d’ouvertures zénithales de part et d’autre du faîte et la création d’un balcon derrière les colombages de façade, le logement reste en relation avec son environnement. Car au-delà de la maison de maître, le domaine dispose de dépendances et d’un jardin à la française dont peuvent profiter locataires et propriétaires. Dans cette maison d’apparence familiale et unifiée, chaque habitation offre ainsi un univers intérieur propre tout en partageant un contexte unique.
REPORTAGE
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© Rolf Siegenthaler
© Rolf Siegenthaler
© Jaromir Kreiliger
DOSSIER
REPENSER L’HABITAT
Immeuble Soubeyran: La coopérative d’habitation de la rue Soubeyran à Genève favorise les relations entre les habitants en insérant des zones d’échanges et de rencontres. Cela se matérialise notamment par des espaces de circulation verticaux et horizontaux et une composition de façade qui génère des liaisons physiques et visuelles entre les appartements. / Architecte: atba architecture + énergie
L’habitat reflète notre mode de vie mais aussi notre relation aux autres, à la ville et à la nature. Face à l’évolution de nos manières d’habiter d’une part et à une approche normative toujours plus grande des modes de conception et de construction d’autre part, il est nécessaire de repenser notre habitat contemporain afin de répondre à cette question fondamentale : comment habiter ? Salomé Houllier Binder
Quatre pièces, une huitantaine de m2, une cuisine ouverte sur le séjour, un espace extérieur et une grande salle de bain avec colonne de lavage, voici le logement familial type tel qu’il existe un peu partout en Suisse romande. Un habitat soi-disant optimal qui se retrouve majoritairement au sein des logements collectifs. Ces derniers se propagent progressivement sur le territoire suisse, dans les grandes villes comme dans les petites communes, même si la villa individuelle reste encore le modèle dominant ; sur les 1,7 million de bâtiments d’habitation, 1 million sont des villas individuelles1. La Loi sur l’aménagement du territoire entrée en vigueur en 2014, la raréfaction du sol et le coût élevé des terrains à bâtir contribuent à la propagation d’un bâti de plus en plus dense et compact. Ainsi, l’enjeu de l’habitat se situe bien dans le logement collectif, celui qui doit avoir la capacité de répondre au plus grand nombre. L’augmentation de la durée de vie, l’évolution de la structure des ménages (familles monoparentales, couples sans enfants, personnes vivant seules, etc.), l’avènement du télétravail, les nouveaux modes de consommation (participatifs, collaboratifs, connectés, durables), sont autant de changements sociétaux à prendre en compte. Mais l’habitat est aujourd’hui soumis à un nouveau champ de tensions. En effet, la volonté générale d’augmentation de la surface du logement apparaît contradictoire avec la nécessité de préserver le territoire et de réduire l’empreinte écologique de la construction. Cette antinomie est révélatrice d’une certaine manière de concevoir l’espace : la surcharge normative de l’architecture contribue à déconnecter l’individu de son habitat, alors même que c’est spécifiquement dans cet espace qu’il devrait être capable de se reconnecter et de prendre conscience de son empreinte sur le territoire. Face à la difficulté à prendre en compte des formes de vie plurielles et complexes, il est nécessaire de déconstruire l’habitat pour mieux habiter, pour mieux inventer.
HABITER, AUX SOURCES DE L’ARCHITECTURE Au-delà du besoin fondamental qu’il représente, le logement a aussi une raison presque philosophique. En théorie de l’architecture, l’abri constitue la toute première forme bâtie. Dans son essai intitulé « Bâtir Habiter Penser » 2 aujourd’hui considéré comme texte fondateur du questionnement en architecture, le philosophe allemand Martin Heidegger fut le premier penseur à proclamer que la signification architecturale ne réside pas dans l’acte de bâtir mais dans l’acte d’habiter. Historiquement, l’acte d’habiter précède en effet tout projet architectural. Il est donc primordial de replacer l’habiter, et l’habitat, au centre du discours architectural et de repenser ses fondements, ses formes, ses typologies. Car il s’agit bien de traiter des réalités et spatialités induites par une philosophie spécifique de l’habiter. Ce questionnement se place en prolongement des bouleversements économiques, sociaux et écologiques connus ces dernières décennies : quel mode de vie adopter ? Comment avoir accès à un logement digne ? Comment vivre ensemble ? L’HABITAT VERSATILE L’homme a toujours eu besoin de se protéger, de s’abriter et de s’approprier des espaces. De la cabane primitive de Vitruve à aujourd’hui, nous partageons tous le besoin de façonner notre habitat en harmonie avec l’espace qui nous entoure. Mais nous n’y parvenons pas tous avec le même succès. Tandis que certains font de leur lieu de vie le réceptacle de leurs rêves, de leurs valeurs, d’autres habitent leur espace de manière passive, d’autres encore le subissent. En effet, à l’heure de la standardisation des modes de vie et de la construction, l’habitat comme utopie est souvent oublié au profit d’une architecture dirigiste, normée, anonyme. Les logements se cloisonnent, au sens propre comme au sens figuré, les plans se paralysent, puisqu’il est parfois même interdit de planter un clou dans le mur afin de personnaliser son espace, de le faire sien. 1
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Office fédéral de la statistique, « Bâtiments selon la catégorie de bâtiment, les cantons et l’époque de construction » (bfs.admin.ch/bfs/fr/home/actualites/quoi-de-neuf.assetdetail.14407204.html) Heidegger Martin [1951]. « Bâtir habiter penser », Essais et conférences. Paris : Gallimard.
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© Tonatiuh Ambrosetti © Eik Frenzel
UNE NOUVELLE TYPOLOGIE DE LOGEMENT Face à la demande de typologies de logements plus ouvertes à la vie en communauté, l’écoquartier Jonction, à Genève, propose une typologie entre espaces communs et unités privatives. Intitulée « Social Loft », elle consiste en un grand appartement communautaire comprenant des unités privatives réduites (contenant chambre, salle de bain, cuisine et parfois un petit salon) agrégées au sein d’un vaste espace de vie collectif. Ouverte sur l’extérieur, cette grande pièce contient à la fois un salon, une salle à manger, une cuisine, des espaces de travail et des circulations, autant de fonctions collectives calibrées au regard du nombre de « colocataires ». Par ses dimensions qui lui confèrent un statut semi-public, elle joue un rôle déterminant dans la transition entre l’espace collectif et l’unité de logement. De 8 à 28 pièces, cette typologie a l’avantage de pouvoir accueillir des communautés aux configurations diverses. Elle répond à la fois aux besoins conventionnels de privacité et aux différentes formes de vivre ensemble, encore peu habituelles dans la production courante du logement.
IMMEUBLE RISOUX La transformation et l’extension interstitielle de deux immeubles d’habitation à Lausanne a donné naissance à un ensemble qui propose des typologies uniques. Afin de s’adapter aux besoins d’une famille dont les parents sont séparés, les chambres des enfants sont autonomes et flexibles: par un jeu de portes, elles peuvent être reliées spatialement à un appartement ou à un autre. Architecte: Biolley Pollini Architectes et M–AP Architectes
Architecte : Dreier Frenzel Architecture + Communication
Ceux à qui l’habitat est destiné sont exclus du processus qui le génère. Face à cette déshumanisation destructive du logement, une mise à l’épreuve de la norme est nécessaire. Un travail typologique doit être fait afin de pouvoir répondre aux différents scénarios d’habiter. Un appartement communautaire, des chambres partagées, une cuisine commune sont autant d’éléments qui répondent à la diversité des besoins d’aujourd’hui. La versatilité qui marque la vie actuelle se traduit dans le logement par un besoin accru de flexibilité. Que ce soit à travers l’évolution de la famille ou l’inclusion de la sphère du travail dans celle du logement, l’habitat doit miser sur la réversibilité de ses espaces afin d’intégrer les divers chemins d’un individu. La réintroduction de l’idée conceptuelle du plan libre dans les habitats permet de proposer des logements plus adaptables, capables d’accueillir diverses fonctions au fil du temps. Cela peut se faire par une conception qui réfléchit à la possibilité de rajouter ou d’enlever facilement des parois, ou encore à l’équivalence des pièces permettant un aménagement plus libre (cf. article « D’une pièce à l’autre » p.84).
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Dès lors, l’habitat proposé se présente comme « non fini », laissant aux habitants la responsabilité de la touche finale. Pour l’architecte français Patrick Bouchain, partisan d’une intégration plus active de l’humain dans l’habiter, ce « non fini » permet de réintroduire de la vie dans le logement et, par là-même, de la liberté dans l’habiter. AU-DELÀ DU LOGEMENT Si l’habitat est le lieu de l’intimité, il ne doit toutefois pas être celui du repli extrême, lié à un appauvrissement social et spatial. Penser l’habitat ne se limite donc pas à s’interroger sur la façon dont on occupe l’espace, mais aussi dont on le partage. Cela mène à une question fondamentale, qui s’étend à l’échelle de la ville : comment réaliser une cohabitation à la fois créatrice de lien social et préservatrice d’intimité ? Le « vivre ensemble » ? C’est là tout le défi. Dans ce cadre, les espaces partagés demandent une attention renouvelée afin de définir de nouvelles porosités entre la cellule de l’habitat et le monde extérieur. Ces espaces « entre-deux » offrent des territoires divers, modulables et appropriables par tout un chacun et contribuent ainsi à concevoir l’habiter comme une activité à la fois individuelle mais aussi collective.
DOSSIER
© Lucas Olivet
© Ponnie Images
FAVORISER LA MIXITÉ SOCIALE La coopérative Gemeinnützige Wohngenossenschaft Langnau développe une nouvelle forme d’habitat. Envisagé comme une maison intergénérationnelle, le bâtiment de trois étages repense la mixité sociale. Vingt logements –de 1,5 à 4,5 pièces– comprennent des appartements familiaux, des appartements groupés, un cluster, des chambres d’amis louables selon les besoins. Ils sont groupés autour d’un vaste atrium éclairé zénithalement qui peut être utilisé comme salon commun, zone de rencontre et lieu d’activités collectives. Combiné à une salle polyvalente, à une laverie et une cuisine communes, l’ensemble propose une offre d’espaces collectifs variés. La diversité des typologies ainsi que la possibilité de leur reconfiguration selon l’évolution des besoins d’une famille ou d’un groupe d’individus permet de penser la maison comme un habitat intergénérationnel. Les personnes âgées et les familles vivent sous le même toit et se soutiennent mutuellement selon leurs possibilités.
CASA CCFF Située à proximité de la gare de Lancy, la maison est réalisée sur pilotis dans une construction légère en bois, offrant ainsi une alternative à l’archétype suisse des maisons en béton. Sa faible empreinte sur le sol est accentuée par un rez entièrement vitré. Son plan organisé en grille permet de disposer les espaces librement. Certains modules sont fermés, comme la salle de bain ou des jardins intérieurs. Le reste est laissé libre. Architecte: Leopold Banchini Architects
Architecte: werk.ARCHITEKTEN
Bien qu’encore trop peu reconnus dans les règlementations de par leur ambiguïté volontaire de statut et d’usage, ces espaces se développent progressivement au sein d’une certaine pratique architecturale, dans les coopératives d’habitations notamment où ils peuvent prendre la forme de terrains mutualisés, de potagers communs ou encore de locaux de loisirs partagés.
projets s’orientent de plus en plus dans cette direction (cf. article « Construire autrement, ensemble » p.80) et montrent qu’habiter c’est toujours cohabiter, avec les autres mais aussi avec la terre. La pensée sur l’habiter appelle à une architecture de la modestie et de la responsabilité de la part des architectes et constructeurs, mais aussi de la part des habitants. Car en effet, habiter c’est certes
Les coopératives constituent en effet à ce jour le principal moyen de repenser les manières d’habiter à travers une pensée collective de l’habitat. Maison intergénérationnelle, appartements loués une semaine sur deux… il faut multiplier ces nouvelles propositions déterminantes afin de favoriser l’émergence de nouveaux modèles. Un autre type d’habiter c’est aussi une autre pensée possible, un autre monde possible.
exister mais c’est aussi s’engager. Le logement « clés en main » doit laisser place à un habitat qui permet l’investissement de celui qui l’occupe. Que ce soit dans sa conception, sa construction, mais aussi et surtout dans son exploitation quotidienne, l’habitat doit permettre à l’individu de déployer son existence, non pas dans l’idée d’un confort efficace mais d’une manière existentielle.
UN HABITANT ENGAGÉ Ainsi, l’architecture doit suivre l’évolution des besoins dans les manières d’habiter. D’autant plus qu’avec la crise écologique et sociale, il y a urgence à changer notre rapport au territoire dans lequel nous vivons. En renouant avec les cycles de la terre, l’habitant pourrait tisser de nouveaux liens avec l’environnement. Certains
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N°2 / AVRIL–MAI 2022
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L’Ecole des Vergers, réalisée par le bureau Sylla Widmann Architectes.
© Rasmus Norlander
PROJETS
QUAND LA STRUCTURE PRODUIT L’ARCHITECTURE Tout en subtilité, la nouvelle école des Vergers harmonise le site en dialoguant avec l’environnement bâti et naturel. Elle propose une conception structurelle audacieuse qui se marie avec une spatialité douce et fluide. Salomé Houllier Binder
© RasmusNorlander
UN NOUVEAU QUARTIER POUR RENENS L’ancienne zone des Entrepôts de l’Ouest lausannois se mue en un nouveau quartier mixte aux abords de la gare. texte : Magaly Mavilia photos : Duccio Malagamba
Depuis l’été 2021 le Parc du Simplon accueille le siège romand des CFF, 180 logements et de nombreuses activités dans 16 bâtiments dont 10 réalisés par Ferrari Architectes SA. Lauréats du mandat d’étude parallèle, le bureau Ferrari Architectes a concrétisé le schéma directeur du bureau KCAP Architects&Planners. Celui-ci s’organise autour d’un pôle gastronomique, d’un pôle d’activités et d’artisanat, de commerces, de bureaux et de logements. Les bâtiments ont été labelisés Minergie P et DGNB Silver (Conseil allemand de la construction durable). Futur quartier « autonome » et sans voiture, agrémenté d’une nouvelle voie verte, le Parc du Simplon est aussi une vitrine à l’entrée de Renens. La conception des façades a donc pris une importance toute particulière. Des inflexions volumétriques permettent d’avoir des vues dégagées et faire ainsi respirer les bâtiments. Les aménagements extérieurs mettent l’accent sur les axes piétons et les aires de rencontre.
on travaille debout, nous avons cherché à mettre en scène des lieux où les gens peuvent interagir de manière très différente. Le café et le restaurant font partie intégrante de ce concept, souligne Jean-Baptiste Ferrari. Au début du projet, nous nous sommes rendus au siège des CFF, à Wankdorf, afin de voir comment les employés travaillaient. Et cela a été pour nous une des très bonnes surprises de ce projet car les CFF ont une longueur d’avance sur beaucoup d’entreprises romandes dans leur façon de concevoir les espaces de travail et nous avons beaucoup appris. »
DES BUREAUX FACILITANT LES INTERACTIONS « Nous sommes partis d’un plan urbanistique très clair qui consistait à créer de grands bâtiments à l’extérieur afin de protéger le cœur du quartier des nuisances », précise l’architecte Jean-Baptiste Ferrari, administrateur et associé du bureau Ferrari Architectes. Le bâtiment Pléiades ainsi que le bâtiment Dufour – où les CFF ont installé leur siège romand en bordure du réseau ferroviaire – ont leur propre identité. « Ces deux bâtiments devaient proposer des plateaux de bureau flexibles avec les exigences d’aujourd’hui, explique l’architecte. C’est-à-dire favoriser les échanges et la créativité entre les collaborateurs en leur permettant de se rencontrer ailleurs que dans une salle de conférence traditionnelle. » Ces nouvelles typologies émergent surtout au sein des grandes entreprises. « Par des espaces diversifiés où, par exemple,
mais lumineuses et le retrait de cette « pièce à vivre extérieure » procurent une impression de sécurité et de confort.
OUVERTURE ET PROTECTION « La caractéristique du quartier est une extrême densité. Notre souci a été de ménager la qualité des vues. Ainsi, un certain nombre de loggias se situent dans les angles afin de donner des doubles orientations dans ce corset assez strict », relève l’architecte. Intégrées dans la profondeur des bâtiments, les loggias ont une importance certaine dans ce projet et tous les appartements en sont pourvus. L’alternance des claustras de couleurs douces
UN QUARTIER QUI FONCTIONNE Avec une telle densité, comment se porte ce nouveau quartier ? « J’y suis retourné dernièrement, confie Jean-Baptiste Ferrari, et j’ai le sentiment que le quartier fonctionne et que la densité n’est pas un obstacle, je dirais même le contraire. La mixité entre école, commerces, bureaux et logements donne de la vie. Parfois, j’ai l’impression d’être à Zurich, mais dans le bon sens du terme, surtout dans cette recherche de fluidité dans les circulations et les aménagements extérieurs. Une de nos collaboratrices y vit et confirme ce sentiment. »
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