Faribole n°2

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faribole.org image : "Vote for women", Propriété Oregon Historical Society - Carrie Chapman Catt photograph.

Par Pierre-Alexandre MOREAU

L’univers culturel masculin est hégémonique. Selon l’association féministe La Barbe, les femmes artistes ne sont représentées qu’à trois pour cent sur la totalité des œuvres exposées dans les musées, expositions, lieux culturels et revues spécialisées. Il en est de même dans les directions de structures culturelles. Dans Faribole, nous aspirons à une société plus égalitaire et progressiste. C’est pourquoi dans ce numéro, nous avons décidé de parler de femmes, qui à travers le monde, investissent, malgré les contraintes sociétales, le milieu de la culture. Dans l’espoir de peindre un avenir qui soit plus juste qu’un présent parfois encore archaïque dans ses modes de penser et d’agir.

n°2

décembre 2012 - janvier 2013 3 rue des Tanneurs 37000 Tours redaction@faribole.org www.faribole.org Toute reproduction interdite sans autorisation préalable des auteurs © Faribole - 2012

Rédacteur en chef

Illustrations

Pierre-Alexandre MOREAU

Lorie BALLAGE Justine GHINTER Chloé GOUZERH Charlotte OUDOT Fanny ROUPNEL Anne-Lise VOISIN

Rédaction Aline AMELIN Clara ESNAULT Florian FERRAND Emmanuelle FER Aurore GRANGIER Humbert HUMBERT Julien MIQUEL Bérénice MOREAU Esmeralda VENAULT Georges VERNAT

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Remerciements Christelle BERTHIER Chantal COLLEU-DUMOND Marie LANSADE Rozenn MORIZUR Pierre-Henri RAMBOZ


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Page 4 Entretien avec Chantal COLLEU-DUMOND

Page 7 Un Chapeau de Paille d'Italie

Page 8 Entretien avec ALINE / Romain GUERRET

Page 12 Entretien avec Marie-Bernard AMIRAULT-DEISS

Page 16 Entretien avec Gretchen PARLATO

Page 20 Entretien avec Françoiz BREUT

Page 22 Entretien avec Barbara CARLOTTI

Page 24 Carte Blanche : Cléo THOMASSON

Page 40 Déliquescence Poétique

Page 42 Belles Lettres, etc

Page 44 La Sélection du Chef -3-


faribole.org image : © G.Béguin

Chantal Colleu-Dumond est une grande dame de culture aux airs charmeurs, à l'esprit vif et dynamique. Son parcours l'a menée à de hautes fonctions au Ministère des A�aires Étrangères, au Ministère de la Culture, dans les ambassades, mais également à la direction de l'Abbaye de Fontevraud. Elle est depuis 2007 la directrice du Domaine de Chaumont-sur-Loire.

Propos recueillis par H.H.

Être une femme a-t-il pu être un frein à votre ascension ? Je ne pense pas, mais être une femme a toujours été plus compliqué. Une femme doit toujours faire plus qu’un homme pour que sa crédibilité s’installe. Nous devions naguère toujours prouver que nous étions aussi compétentes et marquer notre légitimité.

Quelle est l’origine de votre passion pour la culture ? Elle est très ancienne, en fait : le hasard a fait que j’ai passé toute mon adolescence à Tours, où j’ai fait mes études littéraires en classe préparatoire au Lycée Descartes. J’ai eu un merveilleux enseignant, le professeur Verdier, qui a été un passeur extraordinaire pour des générations d’élèves. Il a imprimé en nous ce rapport à la culture, qui est une manière d’exister plus intensément. Je voulais avoir cette relation à la culture pour moi-même, mais aussi avoir un métier qui permette de la mettre en pratique et de la faire partager.

Diriez-vous que la culture est vitale ? Absolument. Je pense que c’est la réponse à des aspirations profondes. Vivre avec la musique, vivre avec l’art, vivre avec la pensée est indispensable pour avoir une vie avec une véritable profondeur.

Quelles sont les formes de culture qui vous touchent le plus ? Je suis très sensible à la musique, à toutes les musiques. Plutôt la musique classique, mais je me suis aussi occupée de musiques actuelles. J’ai eu également dans ma vie une action très engagée au service de la danse contemporaine, notamment quand j’étais en Allemagne, mais j’aime évidemment énormément l’art contemporain, donc c’est très di�cile de vous répondre.

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faribole.org Quand on a eu la chance de toucher des domaines culturels très di�érents, en France comme à l’étranger, que ce soit la musique ou la danse contemporaine, comme je vous le disais, mais aussi la photographie, les arts plastiques ou la littérature, on finit par avoir une curiosité très grande. C’est un grand privilège, car en France, habituellement, on est très spécialisé, alors que j’ai la chance d’avoir une grande appétence pour tous les arts.

Mais n’y a-t-il pas de la porosité entre les formes de culture ? Tout à fait. À Chaumont-sur-Loire, se lient le patrimoine, les jardins et l’art contemporain, et cela a toujours été mon credo : il n’y a pas de frontière entre les disciplines. L’interdisciplinarité est pour moi très importante.

Est-ce une ouverture sur le monde ? C’est fondamental, et vous qui êtes jeunes, avez une immense responsabilité pour la maintenir dans un monde qui o�re des perspectives à la fois extraordinaires et dangereuses - les nouvelles technologies permettent par exemple un accès exceptionnel à toutes les musiques et à toutes les images mais produisent à l’inverse une espèce de pulvérisation des savoirs, qui peut faire en sorte que les gens se perdent. De plus, la culture, sous toutes ses formes, c’est la vraie vie, parce que sans elle, on vit dans la standardisation, le prêt-à-penser, on a une vision des choses rétrécie. La culture permet d’accroître considérablement son existence.

Quel est votre rapport aux musiques actuelles ? Je suis partie diriger un Institut français en Allemagne. Puis en tant qu’attachée artistique à l’Ambassade de France, à l’époque où Bonn était la capitale, j’établissais des liens entre la culture française et le public allemand, grâce aux Instituts français qui étaient répartis sur tout le territoire. J’ai fait venir des chanteurs et des ensembles de jazz français en Allemagne. Puis en tant que responsable des a�aires internationales du Ministère de la Culture, où nous avions un département de musiques actuelles, j’ai beaucoup travaillé avec les représentants des artistes et des maisons de disques. J’ai tendance à penser qu'il y a des champs de la musique qui aujourd’hui sont très intéressants, mais pas forcément su�samment valorisés par les médias. Il y a une sorte de normalisation et il faut lutter contre cela. Le grand combat d’aujourd'hui est la lutte contre la standardisation et pour la diversité.

Qu’est-ce qui vous a amenée à la direction du Domaine de Chaumont-sur-Loire ? Quand j’étais en Italie, j’allais régulièrement au Festival des Jardins de Chaumont-sur-Loire. Je trouvais que c’était un endroit extraordinaire. C’est un lieu d'invention et de créativité exceptionnelles. Donc j’ai fait acte de candidature en apprenant, lorsque j’étais à Berlin, que le fondateur du festival Jean-Paul Pigeat était décédé. Ce qui est intéressant pour moi, c’est que c’était à la fois un lieu patrimonial, puisque la Région rapprochait le Château du Festival - et un festival très connu à l’étranger, beaucoup plus que l’on pourrait le penser en France, et destiné à devenir, en outre, un lieu d’art contemporain. Je suis très heureuse de vivre dans un lieu aussi singulier, parce qu’il est très fort, par son passé, par son présent et par son futur, grâce aux artistes que l’on reçoit chaque année. Il est passionnant de vivre dans un lieu très ancré dans son territoire, qui est, en même temps, un lieu à résonance nationale et internationale.

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v e r s i o n

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i m p r i m é e

© Cléo Thomasson

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faribole.org image : Nadar (1820-1910)

Aline AMELIN & Florian FERRAND

Le ridicule est fait pour notre amusement disait Jean-Baptiste-Louis GRESSET(1), et c'est de cela dont il est question dans Le Chapeau de Paille d’Italie, mis en scène au CDRT par Gilles BOUILLON. Le metteur en scène fait commencer la pièce par un rêve : allégorie succinte des péripéties à venir. Un mariage se prépare, mais la mauvaise fortune le compromet du fait de la rencontre malheureuse entre un joli chapeau de paille tout droit venu d’Italie et les molaires d’un cheval. Un tonitruant « tout est rompu » lancé par un beau-père frustré saccade la pièce : la farce continue. Gilles BOUILLON ne nous o�re cependant pas, comme on pourrait l’imaginer en lisant l’'œuvre de LABICHE, le spectacle pathétique d’un FADINARD tout penaud aux prises avec un destin qui s'acharne contre lui. Bien au contraire, interprété par Frédéric CHERBOEUF dont on applaudira la performance, FADINARD apparait plus félin et séducteur que jamais. Notre héros danse, court, chante et séduit en même temps. Jamais on ne le voit s’apitoyer sur sa condition d’homme naviguant face à des vents contraires. L'œuvre, abordée de manière légère, amuse l'esprit mais l'initié distinguera audelà des masques, les vices d'une société oppressante où l’homme manque d'oxygène : un thème très actuel donc.

(1)Jean-Baptiste-Louis GRESSET, né le 29 août 1709 à Amiens où il est mort le 16 juin 1777, est un poète et dramaturge français. Il fut jésuite de 1726 à 1735.

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faribole.org image : © G.Béguin

ALINE (anciennement YOUNG MICHELIN) est un groupe d'indiepop au parfum très 80's avec des paroles en français. Projet de 4 garçons de Marseille autour de Romain GUERRET qui sonnent d'outre-manche et chantent en français.

Illustrations : © Martin Étienne

Propos recueillis par Clara ESNAULT

C'est quoi votre référence ultime du mouvement Cold-Wave ? J'ai du mal à considérer la Cold-Wave comme autre chose qu'une variante du mouvement Post-Punk. Moi je dirais que SIOUXIE & the BANSHEES, THE CURE et JOY DIVISION en sont les plus grands représentants en Angleterre. Il me semble qu'eux ne pensaient pas du tout faire de la Cold-Wave, ni de la New-Wave, ils faisaient de la musique sur les cendres noires du Punk. En France je dirais TRISOMIE 21 et KAS PRODUCT.

Quels sentiments cherchez-vous à transmettre dans vos textes ? L'important pour moi c'est que l'auditeur puisse s'approprier les chansons, ça doit parler à chacun de nous. Les histoires de ruptures, de frustration, la mélancolie qui se dégage des textes, ce sont des émotions pour le moins universelles. Les chansons sont toutes assez tristes mais la musique, les tempos, l'interprétation ne le sont pas forcément, il y a un détachement qui s'opère, je suis le propre spectateur de mes états d'âmes. Je fuis le pathos et la surinterprétation qui selon moi gâcheraient tout. Je suis pudique et il faut savoir rester léger en toutes circonstances.

Dans quelle athmosphère composez-vous vos morceaux ? Les premiers morceaux ont vu le jour dans un ancien cinéma d'art et essai marseillais dans lequel j'avais mon studio. Un lieu « habité » rempli de vieux projecteurs, de vieilles a�ches, de matériel hors d'âge. Avec une salle de projection qui n'a pas bougé depuis 50 ans. J'étais seul là-dedans, avec ma guitare, quelques synthés et une boîte à rythme. Une seule fenêtre me renvoyait une lumière fragile et gracieuse.

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Quels thèmes vous inspirent le plus ? La perte de l'innocence, le désenchantement, la frustration, la sensation de catastrophe imminente, la peur du futur, la tentation de se réfugier dans son propre passé et pour finir l'espoir de retrouver la lumière, les paradis perdus. Regarder le ciel et avancer malgré tout.

Pourquoi le pseudonyme d'ALINE et comment le groupe s'est-il formé ? ALINE parce que dans la première biographie de YOUNG MICHELIN (comme on s'appelait à l'époque avant le problème avec le marchand de pneus...) il était dit que les membres du groupes venaient tous d'un petite ville du nom d'Aline. Une ville triste et grise, traversée par un fleuve opaque. Je suis à l'origine du projet, j'ai voulu créer mon idéal de groupe, j'ai imaginé cette entité comme on écrit un scénario, faire la musique que je voulais entendre et que je n'entendais plus. Ensuite j'ai rappelé mes camarades qui jouaient avec moi pour mon autre projet, DONDOLO, ils ont tout de suite accepté et ils n'ont pas tardé à mettre la main à la pâte pour composer et apporter leur pierre à l'édifice.

Nouvel Album "Regarde le ciel" disponible en pré-commande sur iTunes http://goo.gl/r6atd

"ALINE EP" disponible sur iTunes http://goo.gl/yQTUF Vidéo du single "Je bois et puis je danse" : extrait de l'album "ALINE EP" http://goo.gl/Z828j

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Femmes Oiseau : Š Fanny Roupnel

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faribole.org image : © G.Béguin Photographie ©Claire Garate

Elle est responsable des Relations Internationales de la Ville de Tours. Limiter sa personnalité à sa fonction serait extrêmement parcellaire et les facettes les plus éclatantes de cette tourangelle s'en trouveraient occultées. Ses convictions et ses engagements font, d'elle aussi, une véritable citoyenne du monde. Son amour de la nourriture saine et éthique, sa détermination à soutenir les gens singuliers, et son élégance en toutes situations font d'elle un être à part. Cette di�érence cultivée est sa plus grande richesse.

Propos recueillis par Pierre-Alexandre MOREAU / Aurore GRANGIER

Qu'est-ce que 4Cities4dev ? C’est un projet co-financé par la Commission européenne, qui a été mis en œuvre & coaché par l'association internationale Slow Food autour de 4 villes européennes : Bilbao, Riga, Tours et Turin. Le projet vise à accroître le rôle des villes, comme pilotes actifs des politiques locales et de la coopération décentralisée à travers l'approche de Slow Food, basée sur la participation des communautés de la nourriture et des consommateurs. Dans chaque ville partenaire de 4Cities4Dev existe, d'ores et déjà, comme à Tours, une manifestation de type Euro Gusto – biennale européenne du goût, de la biodiversité et des cultures alimentaires – . Le projet a pour leitmotiv la valorisation d'une alimentation de proximité, ici en Touraine, en Europe et en Afrique, selon l'éthique de Slow Food, "bonne, propre et juste". Dans le cadre de 4cities4dev, chaque ville a "adopté" une ou deux communautés de l'alimentation. Tours a choisis une communauté maraîchère en Côte d’Ivoire et une communauté de femmes en Mauritanie. "Ces adoption" sont un moyen de permettre aux villes européennes de comprendre la situation de ces pays par le soutien de projets en courset et la création de relations durables. Il s'agit aussi de sensibiliser les citoyens européens à des choix responsables et aux conséquences de nos habitudes alimentaires. La lutte contre la pauvreté exige que tout un chacun se comporte d'une manière responsable et raisonnable. En Mauritanie, les femmes Imraguen font de la poutargue (poche d’œufs de mulet, salée et séchée), un produit Sentinelle®(1) Slow Food. Ce sont des femmes de pêcheurs ou des femmes seules, toutes dans la chaîne alimentaire. les hommes pêchent, les femmes transforment. Elles ne s'occupent pas uniquement de la poutargue, elles cultivent aussi un jardin communautaire parce qu'elles ont souvent la charge d'une famille nombreuse. Et puis elles apprennent tout un process d’hygiène qui répond aux normes internationales. Leur produit ancestral va devenir une sorte de caviar hyper qualitatif qui à des qualités organoleptiques, constantes et uniques. Ce mêmes produit, on le retrouvera sur les manifestations internationales organisées par Slow Food. (1) http://goo.gl/Sb8eM

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faribole.org International comme el Salone del Gusto de Turin. Elles apprennent également à gérer un process économique de coopérative, à gérer un budget, la commercialisation... Le projet permet aussi l'alphabétisation des femmes et la scolarisation de leurs enfants.

Se nourrir est-il un engagement ? Se nourrir est à la fois un acte culturel identitaire, derrière un aliment, il y a du patrimoine, une économie, un environnement, des relations homme-femme équitables, des relations enfant-famille, du tourisme... Le touriste doit aussi être un coproducteur, un acteur de son environnement, dans le respect du "bon, propre et juste". En côte d’Ivoire, les projets qui sont soutenus, s'inscrivent dans la perspective de 10.000 jardins potagers en Afrique, dernier pari de Slow Food, pour l'avenir du continent africain. L'objectif est de créer des modèles concrets d'agriculture durable, attentifs aux di�érentes réalités environnementales, sociales et culturelles tout en demeurant simple à reproduire. Nous travaillons notamment au développement des jardins pédagogiques qui permettent à la fois aux femmes et aux enfants d’apprendre à cultiver. C’est un investissement sur l’avenir, mais aussi sur le présent pour manger au quotidien. Une partie du fruit de ces jardins cultivés sans produit chimique va être reversée aux cantines des écoles, ce qui permet aux enfants de manger tous les jours au moins un repas ; cela sans gaspillage ce sont eux qui ont produit. Ils apprennent aussi à cuisinier des denrées locales, des graines de Côte d’Ivoire. L'autre partie de la production est versée aux familles, aux femmes qui ont travaillé, ce qui permet aussi de nourrir leurs foyers. Quant au surplus, il est vendu au marché et la recette de cette vente repart au pot commun pour acheter des semences et renouveler le matériel agricole. C'est un circuit d'autosu�sance alimentaire qui permet également de préserver des espèces locales.

Comment peut-on agir à notre échelle ? Acheter à des petits producteurs locaux qui ne sont pas forcément bio mais qui ne traitent pas. Ces produits en moyenne ont fait 25 km. C'est aussi une manière d'échanger, d'entretenir un relationnel avec ces producteurs, qui nous font part de leurs di�cultés et une façon de maintenir l'économie de proximité, de préserver la vie d’un territoire. Quand vous voyez le Centre de la France comme il est vide, c'est terrible.

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4Cities4Dev mène aussi des actions locales, quelles sont-elles ? Pour di�user l'information auprès des familles, il faut être soi-même instruit. C’est pourquoi 4Cities4Dev s'associe à d'autres acteurs, les écoles ou le Centre socio-culturel Courteline, dans le cadre d'un projet "développement durable", notamment sur le volet consommation et alimentation. L'objectif étant d'informer les animateurs à l'alimentation de proximité, les gestes d'une alimentation saine, en pleine conscience et responsable. Ensuite ces professionnels di�useront auprès des publics, des familles et des enfants.

C'est donc un projet global ? Dans notre projet 4Cities4Dev, outre travailler entre européens, travailler avec les producteurs locaux, travailler avec nos amis et collègues africains, nous avons cette mission par la Commission européenne et Slow Food international de di�user auprès de toutes sortes de publics. Par exemple, avec le Convivium Slow Food Tours-Val de Loire, nous avons participé à des événements comme le festival Des Lyres d'Été de Blois ou le Forum rural de Montreuil-Bellay, en proposant deux ateliers à des publics très hétérogènes. L'idée était d’associer un produit issu de l’alimentation de proximité à un produit en provenance de nos deux communautés de l'alimentation africaines et en expliquant le process de fabrication, de culture, mais aussi la valeur identitaire, patrimoniale, culturelle, gustative et environnementale, sociale, éducative… Et puis, à partir de ce produit là, toute la valeur de la chaîne homme-femme-enfant et environnement. Au travers d'un produit c’est tout cela qui est expliqué. Les publics sensibilisés se mettent à la place des populations africaines et se disent « est ce que l'on voudrait que nos produits locaux disparaissent ? » Non, bien sûr, c’est notre identité locale, c'est notre histoire, c'est tout un savoir-faire et tout un environnement. 4Cities4Dev a permis aussi des connexions entre nos collègues ivoiriens et l’association des jardins Oasis de Sainte-Maure-de-Touraine pour des échanges d'expériences et de savoir-faire. En e�et, la mission d'Oasis est, ici en Touraine, de permettre à des familles de cultiver la terre et de se nourrir du fruit de leur travail et de leur récolte. Nous espérons renforcer davantage cette relation, en particulier développer les réseaux locaux avec l'international. Les citoyens sont connectés, dans un esprit de partage et de bienveillance, plus ils sont dans la connaissance, plus ils sentent que c'est important pour l’autre et que c'est important pour eux de vivre et faire ensemble, d’agir au local et à l'international. La problématique "se nourrir au quotidien" n'est pas seulement une problématique africaine, mais de plus en plus ici, y compris dans le jardin de la France. L'actualité nous le rappelle quotidiennement : "Il est urgent de poursuivre et d'agir ici et là-bas".

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Illustrations : Š Fanny Roupnel

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faribole.org Photographies : © obliksound

Propos recueillis par Julien MIQUEL C'est à Blois, au cinéma Les Lobis, dans une ambiance feutrée et très lounge que je rencontre Gretchen. L'artiste s'est produite la veille à Rotterdam et vient d'arriver en France juste quelques heures plus tôt. Ce sera son unique date dans l'hexagone cette année, mais grâce à Didier BERGEN, président du Festival All that Jazz, nous avons eu la chance de l'interviewer en exclusivité pour Faribole, confortablement installés dans les fauteuils club de la loge de l'artiste. Souriante, charmante et pétillante, Gretchen PARLATO et moi prenons le thé en dégustant quelques délicieux scones comme on n'en trouve qu'à New-York, tandis que les musiciens dans la grande salle de spectacle finissent les balances et accordent leurs instruments. Un membre du personnel apporte une superbe coupe abondant de fruits frais, l'interview peut commencer.

Bonjour Gretchen PARLATO, merci d'avoir accepté de nous recevoir, c'est évidemment un honneur et un grand privilège pour nous de vous rencontrer. L'univers du jazz étant davantage un milieu d'hommes, comment voyez-vous votre rôle en tant que chanteuse et en tant que femme ? Cela a-t-il été di�cile pour vous de vous imposer et de vous faire connaître ? Dans mon cas, en tant que femme, je n'ai jamais rencontré de problème. Ma préoccupation a toujours été avant tout la musique. Être une femme dans le milieu du jazz est devenu plutôt commun même si cela reste un milieu assez masculin. Mais je n'ai jamais eu de problème. Le jazz, ce n'est ni une question de race, ni de genre, ni de classe sociale, c'est purement l'art qui prime. La question du genre, le fait d'être une femme n'a que peu d'importance lorsqu'il s'agit d'art.

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Vous êtes la première chanteuse a avoir été acceptée au sein du prestigieux �elonius Monk Institute of Jazz. Qu'est-ce que cela a pu changer dans votre vie et dans votre carrière ? Dans quelle mesure cela vous a-t-il aidé professionnellement ? C'est un programme formidable et c'est une excellente idée qu'ils aient pensé à ouvrir les auditions aux chanteurs. Ils ont déjà compté dans leurs rangs une pianiste il y a quelques années, Helen SUNG, mais il y avait beaucoup d'hommes dans ce programme et je devais être seulement la deuxième femme et la premiére chanteuse. C'est un programme pour tous ceux qui veulent évoluer et se trouver, ça permet de se poser les bonnes questions à savoir qui vous êtes et ce que vous voulez vraiment faire artistiquement. On est très bien entourés et cela aide à se découvrir et à trouver ce qui est au cœur de votre art, au fond de votre âme.

Votre père, Dave PARLATO a été bassiste pour Franck ZAPPA et a travaillé avec de nombreux artistes. Votre grand-père, Charlie PARLATO a été trompettiste, notamment au sein du Kay Kyser Big Band et également chanteur. Le fait de naître au sein d'une famille de musiciens a-t-il eu une influence importante quant à votre éducation musicale ? Comment avez-vous rencontré le jazz ? Vous mentionnez mon père et mon grand-père, tous deux musiciens, mais tout le monde dans ma famille, y compris ma mère, ses parents, mes oncles et tantes, mes cousins, tous sont des artistes à leur manière. Quand j'étais enfant, la musique faisait partie intégrante de ma vie de tous les jours, il y avait toujours de la musique à la maison. Mes parents nous ont exposé ma sœur et moi, dès notre plus jeune âge, à toutes sortes d'art. Tout le monde était plus ou moins dans le milieu artistique dans ma famille, mais aussi nos proches. Le jazz faisait partie de tout cela, c'était quelque chose que j'entendais, à quoi j'étais exposée, même avant que je ne puisse mettre forcément les mots dessus. C'est un des sons familiers de mon enfance.

Comment avez-vous réalisé que vous vouliez devenir une chanteuse de jazz professionnelle ? Ecoutiez-vous beaucoup de jazz lorsque vous étiez enfant ? Une fois encore, j'écoutais du jazz sans savoir forcément le définir, ma grandmère écoutait beaucoup de jazz et c'était juste habituel, comme un son familier, d'entendre Ella FITZGERALD ou Franck SINATRA, et c'est elle qui m'a vraiment fait découvrir le jazz. Elle adorait les chanteuses telles que Nancy WILSON, Sarah VAUGHAN. Mais c'est surtout à l'adolescence, vers mes 15/16 ans que j'ai vraiment re-découvert le jazz par moi-même et que je m'y suis vraiment intéressée.

Votre jazz est empreint d'une certaine "smoothness". D'où vous vient cette douceur et où puisez-vous votre inspiration ? Quelle est l'influence de la musique brésilienne sur votre travail et sur votre œuvre ? La musique brésilienne est une vieille histoire d'amour pour moi, je suis tombée amoureuse de la musique brésilienne un peu avant le jazz. Je devais avoir 13/14 ans à ce moment-là. La musique brésilienne que j'écoutais, et tout particulièrement la bossa-nova, João GILBERTO, Stan GETZ et Carlos JOBIM m'ont beaucoup marquée. Vous me dites "smoothness", douceur et je vous rejoins sur ce point. Dans cette musique, il y a de la douceur, c'est tangible. Il y a de la sensualité, une sorte de spiritualité dans tout cela. Ça te plonge dans quelque chose de plus grand, de plus profond, de plus haut comme je le disais tout à l'heure en parlant du �elonius Monk Institute of Jazz. Je ne pense pas

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faribole.org vraiment à tout cela en tant que femme. Le fait pour moi d'être une femme est assez secondaire par rapport à ma passion pour la musique. Homme ou femme, la plupart des personnes avec qui je joue et dont plus de la moitié sont des hommes, partagent avec moi cette connexion, cette sensualité, cette spiritualité, cet amour de la musique et du jazz quand ils jouent.

Hier vous étiez à Rotterdam, aujourd'hui vous nous faites l'honneur de vous produire à Blois pour votre unique concert en France, quand serez-vous de retour en France ? Je ne sais pas encore, mais je suis sûre que je reviendrai en France, sans doute l'an prochain. C'est en ce moment, à cette période de l'année que nous planifions les concerts, les dates de tournée, mais tout sera sur mon site internet http://www.gretchenparlato.com vous pourrez y trouver la date de notre prochain concert en France quand nous l'aurons fixée. Mais nous reviendrons l'an prochain, c'est certain.

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Votre parcours vous a menée de Los Angeles à New York, vous avez donné de nombreux concerts là-bas ainsi qu'en Europe et vous avez sorti votre dernier album studio "�e Lost and Found" en avril 2011. Quels sont vos projets musicaux ? Qu'est- ce qui vous attend ? Eh bien normalement, nous devrions bientôt sortir un album live. Nous avons voulu capturer en quelque sorte ce que nous avons réussi à produire avec le groupe et cet album devrait sortir l'an prochain. Nous pensons également retourner un peu en studio et enregistrer un nouvel album, mais c'est quelque chose à quoi nous pensons actuellement. Je n'ai pas encore tous les détails pour l'instant, mais j'en parlerai dès que j'en saurai un peu plus.

Et pourquoi pas un album de jazz brésilien ? J'ai toujours pensé faire quelque chose en rapport avec la musique brésilienne et j'en ai déjà parlé avec quelques amis et d'autres artistes brésiliens qui pourraient m'aider à réaliser ce projet et avec lesquels je pourrais collaborer. Donc c'est une excellente question, je ne sais pas encore quand cela se fera, mais ça a toujours été là dans un coin de mon esprit, c'est quelque chose que je rêve de faire, un album spécifique purement à base de musique brésilienne. Je voudrais rendre hommage à la tradition, tout en faisant quelque chose de nouveau et de di�érent, mais il est sûr que c'est un projet qui se fera à un moment ou à un autre.

"�e lost and found" disponible sur iTunes http://goo.gl/XvPEv ou sur son site http://goo.gl/fAKhE

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faribole.org image : © Françoiz Breut

Françoiz Breut est chanteuse et illustratrice. Elle fut diplomée à l’École Supérieure des Beaux-Arts de Caen. Elle a collaboré musicalement avec, notamment, Yann TIERSEN, Dominique A et François & the Atlas Mountain. Son dernier album, La Chirurgie des Sentiments (2012), est d’un lyrisme minimaliste, tout en poésie et recherche esthétique.

Propos recueillis par Pierre-Alexandre MOREAU

Vous avez commencé par des études aux Beaux-Arts, comment se sont-elle passées ? Relativement bien, j'ai fait quatre ans et je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire. Ce que je savais, c'est que je voulais dessiner, j'aimais beaucoup dessiner, et je me suis retrouvée dans di�érents départements. J'ai touché à toutes les techniques : sérigraphie, photographie, sculpture... Puis, suite à un échec de rentrer aux Arts Décoratifs de Strasbourg, j'ai décidé que je devais arrêter afin de me mettre pleinement et entièrement à l'illustration (ndlr : Françoiz Breut a notamment illustré des pochettes d'album de Yann TIERSEN et de Dominique A).

L'illustration était-elle une évidence ? Avez-vous un déclic à un moment de votre vie pour choisir cette voie ? C'est une rencontre avec Joël BOT, un professeur et artiste contemporain qui m'a mis la puce à l'oreille, en m'incitant à poursuivre dans cette voie. Comme je l'aimais beaucoup et que c'était une référence pour moi, j'ai été influencé par ce qu'il m'a conseillé. Et puis c'est vrai que j'avais envie de raconter des histoires aussi, c'était naturel.

Être une femme dans la culture, est-ce que cela a pu être un frein ? C'est peut-être plus di�cile quand on a des enfants de travailler en tant qu'artiste, au niveau de la concentration de son énergie. Il est vrai que j'ai toujours été entourée de beaucoup d'hommes, et que j'aimerais, notamment dans la musique, m'entourer de plus de femmes. Nous ne sommes pas dans un monde où les choses sont égales entre les hommes et les femmes, mais j'ai l'impression que cela tend à s'améliorer. Mais je ne pense pas cela en ces termes là, le hasard des rencontres joue aussi.

Comment êtes-vous venue à la musique ? Avec des amis, à Cherbourg, nous organisions des concerts. Et petit à petit, l'idée de me mettre à la musique a grandi, mais elle était freinée par mon manque de pratique instrumentale. Je considérais que ne pas jouer d'un instrument pouvait être un handicap. Mais c'est vraiment la rencontre avec Dominique A qui a déclenché la chose. À la fin de mes études, avec des amis et

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faribole.org Dominique A, nous avons créé un groupe, et nous faisions des concerts dans les bars de Nantes. Puis Dominique m'a proposé de chanter sur son disque, et c'est arrivé comme ça.

Y a-t-il une corrélation entre votre travail d'illustratrice et votre travail de chanteuse ? Au départ j'étais juste interprète dans la musique, et en me mettant à l'écriture, j'ai en e�et remarqué un rapport : l'image. Quand j'illustre un texte, les images sont dans ma tête, et je n'ai plus qu'à les coucher sur le papier. Le processus d'écriture d'une chanson est similaire : c'est l'image qui prime.

Quel rôle a l'image dans la société d'aujourd'hui ? On a tous des facultés à développer notre imagination, et on ne la développe pas assez, c'est riche et infini. On est tellement saturé par les possibilités que les enfants sont submergés par les images, les écrans et les jeux chronophages. L'imagination est pré-mâchée. Je pense que vivre à la campagne aujourd'hui avec trois morceaux de bois, est plus propice à la création et à l'imaginaire.

Sur vos albums, l'instrumentation a un aspect minimaliste. Est-ce voulu ? En e�et, habituellement, on partait d'un squelette de chanson avec piano/voix uniquement, et les morceaux s'éto�aient au fur et à mesure. J'ai travaillé sur ce dernier disque de manière di�érente, en utilisant des samples et des arrangements plus éto�és, tout en restant très proche d'esthétiques minimales. Il y a un équilibre à trouver entre le chant et la voix, afin que l'un n'absorbe pas trop l'autre.

Bandcamp : http://francoizbreut.bandcamp.com Site personnel : http://www.francoizbreut.be/ Discographie : http://caramelbeurresale.bigcartel.com/

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faribole.org image : © François Fleuri

Barbara CARLOTTI est un être remarquable qui transmet à travers ses chansons une grande force narrative, poétique et instrumentale. Sa grandeur musicale a été récompensée le 29 novembre 2012 par le Prix Charles Cros, décerné par l'Académie éponyme. Elle a rencontré Faribole.

Propos recueillis par Pierre-Alexandre MOREAU

Barbara, quelles sont vos influences musicales ? En musique française, ce serait plutôt Étienne DAHO et Alain BASHUNG. Je suis hyper fan du dernier album de DJAGO DJANGO. J'écoute toujours avec le même plaisir Nina SIMONE ou Bob DYLAN. Je suis assez éclectique, et je me nourris d'énormément de musiques anciennes ou actuelles. Il y a des choses très belles dans chaque style de musique, si on peut parler de style, car j'ai toujours considéré la musique comme un seul élément.

Comment voyez-vous l'avenir de la création musicale ? C'est assez compliqué en ce moment, mais la musique a cet aspect universel, qui fait que malgré les contraintes politiques, économiques ou culturelles, il reste une vivacité dans la création. Mais il est vrai qu'on doit se battre beaucoup plus aujourd'hui qu'hier, pour défendre ce que l'on fait. Il y a moins d'argent, ce qui rend les producteurs plus réticents. Les maisons de disques prennent beaucoup moins de risques, sont plus frileuses et ont beaucoup moins d'idées qu'avant. Par ailleurs, on nous demande de faire des concerts avec moins de musiciens. Je pense que ce n'est pas la création qui en pâtit tellement, mais l'idée que la musique a tendance à devenir un produit culturel consommable. Il faut lutter contre cela. Il faut continuer à défendre nos idées, et ne pas se mettre au diapason d'une industrie. Il est vrai que ce n'est pas toujours évident.

Diriez-vous qu'il y a une certaine normalisation ? Bien sûr ! Je crois que l'on n'écoute plus la musique aujourd'hui comme on pouvait l'écouter dans les années 1960 ou 1980. Aujourd'hui, il faudrait qu'on fasse tous la même chose. Le système est un peu enfermant, le formatage est un vrai problème dans la création musicale. On prend les gens pour des cons, car on pense qu'ils peuvent tous écouter la même chose. Je ne suis pas du tout d'accord avec cela. Quand on fait un spectacle, les gens sont touchés par des éléments bien plus singuliers que ce que l'on pourrait penser. BAUDELAIRE disait "le Beau est toujours bizarre". Il ne faut pas essayer de gommer nos aspérités quand on travaille dans la musique, et plus généralement dans n'importe quelle forme d'art. Exprimer sa di�érence est nécessaire et vital.

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Quels sont vos projets ? Notamment sur les dandys ? J'ai fait un atelier de création radiophonique sur France Culture qui était à l'origine un mélange de lectures de textes autour du dandysme (BAUDELAIRE, BYRON...). Au niveau musical, ça me permettait d'explorer un champ de la culture rock que j'aime bien, mais que je ne fais pas sur scène, avec notamment Andy WARHOL de David BOWIE, ou Tyrex. C'était un panorama du dandysme à travers la musique et la littérature, mais aussi avec des projections de films. J'aime ces créations qui rendent compte d'une totalité et d'une complémentarité. C'est un spectacle assez hybride, un peu à part, que j'ai joué dans certains festivals. Pour parler de l'avenir, je suis en train de finir un projet de livre avec Christophe BLAIN. C'est l'auteur de la bande dessinée Quai d'Orsay, et c'est un dessinateur que j'aime beaucoup. On a travaillé ensemble il y a quelques années sur l'a�che d'un spectacle. On est devenus proches. Ce projet est un opéra rock en bande dessinée. Moi, je m'occupe de la musique, et Christophe des dessins et de l'histoire. Cet ouvrage sortira fin mars ou début avril chez Gallimard.

Comment vivez-vous votre succès ? Je suis ravie que la presse soit aussi enthousiaste. C'est un succès d'estime et j'en suis ravie, je suis très contente d'avoir fait ce disque-là et de le défendre. Faire des concerts est ce qui me plaît. Mais il faut toujours lutter pour être reconnue.

Sur votre dernier album, on sent une évolution dans l'écriture et dans l'instrumentation… J'avais envie d'écrire cet album, ailleurs et di�érement, que ce soit plus dense. J'étais plus dans une sorte de folk avant, et avec ce dernier album, je reviens à mes premières amours : quand j'avais quatorze ans, j'écoutais de la musique comme DEPECHE MODE, THE CURE, Étienne DAHO ou de la musique New-Wave avec des sonorités un peu plus barrées. C'est là qu'est né mon goût de la musique. Je voulais aller dans cette direction, dans une recherche de sons plus importante et plus dense. Je sentais ce besoin aussi sur scène : j'ai toujours besoin d'être emportée, or, ça manquait de densité scénique. Quand on écrit des chansons, il faut toujours évoluer, toujours aller plus loin dans la recherche des sonorités. Les rencontres et le groupe sont extrêmement importants dans ce travail là. On évolue ensemble. Tout les membres du groupe amènent leur touche.

On sent dans vos propos, un amour de la scène… Oui, vraiment. Je pense que j'ai besoin d'être en groupe. Je ne pourrais pas être toute seule devant le public, ça m'ennuierait franchement. Je trouverais que ça manquerait de consistance. On travaille ensemble, dans la même direction.

"L'amour, l'argent, disponible … :

le

vent" partout

Site personnel : http://www.barbaracarlotti.com/

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faribole.org image : © Lorie Ballage

T’es-tu bien reposé ? Pauvre niais ! Sur tes tares Complaisamment tu mets des râles de barbare Il faut le voir ; j’ai vu ! Ce que tu manies bien Le jugement fielleux sur toi-même ! Demain Tu la regretteras – tu vois ? Les larmes coulent La seule vérité qu’on interdit aux foules Qui sont bonnes dis-tu à bou�er de la fange En temps voulu – d’ailleurs, les larmes te dérangent Ca lave trop profond, ça délave les villes Les Fonctionnaires du Deuil en ont horreur ! Tranquilles Ils pèsent leur chagrin, l’étiquettent, l’emballent On le jouera demain dans les plus grandes salles Et si ça brille bien, les trompettes, les lustres On fait le show monsieur, on arrose les rustres Avec un beau pipi tout frais de son usine Je suis Dieu ! Phallus-Dieu ! La verge en porte-mine ! Tu t’es bien reposé, pauvre niais. La baraque Est bien morte, c’est beau – tout rouille, se détraque C’est d’avoir trop voulu la fange la plus belle L’oeil sec et le coeur noir ; de métal, de cervelle Où es-tu ? Où vas-tu ? Te souviens-tu d’avoir Le bon orgueil : celui de rêver et de croire ? Ah, le spectre – Monsieur, dites-moi, ça m’étonne N’est-il que la douleur pour éveiller un homme ? L’autre vieux, il grattait sa guitare en mourant Il disait ‘la douleur, c’est ce qu’on sait vraiment C’est ce qu’il reste’ – va ! Fais tes partouzes seul Tu la regretteras, drapé dans ton linceul Et puis tu souriras d’être vainqueur : la vie N’auras pas eu de toi d’allégeance – la nuit Tu riras d’échapper aux gri�es de ses mains Sans bonheur, sans douleur, sans odeur – Déshumain ! Mais je l’entends couiner, la tendre malheureuse L’enfance avec ses yeux immenses, ses joues creuses Et la gorge brisée des râles de barbares Qui ne vit plus qu’au fond blême des cauchemars Mais je l’entends couiner, la tendre malheureuse L’enfance avec ses yeux immenses, ses joues creuses Tout s’est tu – les regrets, tous les écroulements – Tu t’es bien reposé, pauvre niais. Fous le camp.

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La Ballade du Déshumain


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Les jointures du brouillard Je comme deux ombres Qui reviennent toujours au pied du même mur Et qui disent La dernière fois c’était Comme deux ombres Qui jouent à la grenade On finira bien par faire péter l’usine Boucher le bon tuyau Boire le bon détergent La phrase létale Nous comme quatre ombres Qui mélangent les gueuletons de trouille Et qui disent Est-ce que tu pourrais Comme quatre ombres Qui jouent à la grenade On finira bien par faire péter le complexe Et s’ils nous cherchent On se cachera pour dormir Dans les jointures du brouillard

sommes-nous si vieilles qu’aux mains dénouées de l’ombre la lumière n’est pas venue si vieilles encore qu’à toutes les danses les cadavres sont immobiles ils portent des lunettes d’écaille ils ont les yeux bleus de ma mère les joues grises de mon père les cadavres sont immobiles aux ombres deux ou quatre aux farandoles et aux abysses les cadavres sont immobiles aux banquets au piano du soir aux échos imaginaires les cadavres sont immobiles

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faribole.org image : FH Townsend

Par Esmeralda VENAULT

Comment aborder le thème de la place de la femme et de sa perception dans la société sans parler de ces deux grandes héroïnes, à l'amour sincère et vrai. Ces deux romans du XIXeme siècle ont tout de suite trouvé leur public et ont connu un grand succès bien que la critique fut grande pour Anna Karénine. Il est surprenant de voir comment la di�érence entre hommes et femmes se fait ressentir dans Anna Karénine sur le thème de l'infidélité et dans Jane Eyre du point de vue social. Charlotte Brontë et une jeune femme vivant dans la campagne anglaise et elle transpose ses sentiments et ses craintes au personnage de Jane Eyre lui donnant ainsi toute sa substance et la rendant vivante car Jane Eyre est Charlotte Brontë. Léon Tolstoï est quand à lui un homme russe de la bonne société vivant en ville, on retrouve ses sentiments et son caractère au travers du personnage de Lévine dont l'histoire se déroule en parallèle de celle d'Anna avec des interactions entre les deux histoires. Du point de vue de l'écriture pure, celle de Tolstoï est plus complexe que celle de Charlotte Brontë. Il crée des personnages denses et attachants, au caractère nuancé et se complait à nous faire passer d'une histoire à l'autre tout en jouant sur la proximité en société des personnages des deux histoires parallèles. Alors que dans Jane Eyre les personnages sont plus simples, très attachants et moins complexes mais d'une sincérité exemplaire. Les deux personnages féminins ont des di�érences très prononcées mais aussi des points communs. Anna et Jane sont toutes les deux des femmes qui doivent faire face à un amour passionnel et impossible. C'est de leur éducation et de leur caractère que viendra la di�érence dans leur manière de faire face aux épreuves qui se présenteront, pour garder leur amour et leur dignité. Jane Eyre est une orpheline abandonnée dans un pensionnat à la suite de la mort de son oncle. Elle va se battre pour montrer à tous ceux qui la critiquent qu'elle est une jeune femme respectable et digne de confiance. Elle entrera au service de Monsieur Rochester dont elle tombera éperdument amoureuse. Malheureusement, au moment où tout semble lui sourire enfin, le jour de son mariage, elle apprend que son amour est déjà marié.

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faribole.org Elle s'enfuit, espérant se reconstruire en exerçant le métier d'institutrice dans un village de campagne. Bien qu'éloignée elle ne parviendra pas à oublier Monsieur Rochester et tentera de le retrouver pour comprendre les événements du passé et peut-être vivre son amour, sa passion librement. Jane Eyre est donc une femme forte, qui se battra toujours pour ne pas perdre le respect. Physiquement elle n'est ni belle ni moche ce qui constitue sa première di�érence avec Anna Karénine qui, elle, est d'une incroyable beauté. Cette dernière est admirée de tous. Elle fait partie de l'aristocratie russe et a une position sociale très enviée. Au début du roman elle apparaît au yeux de tous comme la femme parfaite, ce qui ne rendra son adultère que plus coupable au yeux de la société. Anna bien que mariée et mère d'un petit garçon va succomber au charme du capitaine Vronski. Elle tentera de lutter contre cet amour mais la passion l'emportera dans un tourbillon d'événements, qui feront passer les amants comme terribles aux yeux de tous. Ce n'est pas qu'une relation mondaine mais un amour véritable. Anna, contrairement à son frère, qui lui aussi commettra l'adultère, sera rejetée par les membres de sa société. Elle en tombera malade et voudra par la suite s'enfuir avec son amour. La di�érence entre hommes et femmes face à l'adultère est le sujet principal du roman. Pour un homme, la liaison n'est pas insurmontable pour son couple o�ciel et sa situation sociale. Une femme risque à tout moment de descendre sur l'échelle sociale et d'être conspuée par son entourage. Ces deux romans nous montrent que l'amour passionnel a des conséquences parfois terribles et qu'on ne peut le contrôler. Quand une femme de cette époque succombe à la passion, cela engendre des conflits intérieurs ou extérieurs. Il faut faire preuve d'un courage et d'une volonté inébranlables pour pouvoir y survivre. Pour les hommes, au contraire, dont la situation sera toujours enviable, c'est l'inverse. Pour moi ces deux romans sont incontournables, à lire au moins une fois. Mais aucune opinion ne sera meilleure que la vôtre. Alors lisez …

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faribole.org Zombie Zombie : http://www.myspace.com/therealzombiezombie BEAK> : J&Y :

Le Temps Machine :

http://beak.bandcamp.com http://jandy.bandcamp.com

http://letempsmachine.com

Par Clara ESNAULT La publicité virtuelle du Temps Machine avait prévenu que ça allait être une des meilleures soirées de la fin d'année, donc nous ne voulions la louper sous aucun prétexte. Je me suis donc rendue en bus au temple de la musique tourangelle, accompagnée de Faïza, une fada de musique et fan de Kra�werk Le trio d'a�ches J&Y, Zombie Zombie et Beak> était présenté sous l'appellation « Kraut rock futuriste ». Derrière cette appellation un peu curieuse, il s'agissait de réunir la nouvelle génération inspirée de ce rock allemand des années '70 , bercée par les figures emblématiques de Kra�werk et NEU!. Bien sûr ces racines rock progressives, étaient assaisonnées à la sauce actuelle , pour constituer une musique cosmique du futur. La grande salle était ouverte , Rubin Steiner mixait devant un diaporama des pochettes de vinyles mythiques et il y avait plein de monde. Le premier groupe à monter sur scène était J&Y. Ce duo parisien se présente comme des sosies/répliques de John Lennon et Yoko Ono. Plongés dans une atmosphère sombre, éclairée par des ampoules clignotantes disposées autour d'eux, les deux individus produisent un son rock, ambiant et psyché. La femme armée de sa basse et le mec à la batterie, ce duo balance leurs morceaux, avec un écho dans la voix et des jetés de cheveux impressionnants. Sur leur dernier titre ils sont accompagnés de Matt de Beak> . Puis c'est au tour de Zombie Zombie (notre coup de cœur) de submerger la salle. Installés dans une composition pyramidale, ils forment le trio parfait : deux batteries a�rontées et des synthétiseurs analogiques au sommet. Derrière ces instruments, s'agitent des musiciens expérimentés et bricoleurs : Etienne Jaumet accompagné de son saxophone et son béret, Cosmic Neman à la batterie de gauche et le nouveau batteur Lori de Berg Sans Nipple. Ces français sont au top et font un carton avec leur dernier album Rituels d'un nouveau monde dont on écoute en boucle les très bons Rocket n°2 et Illuminations. Ce mélange entre un condensé rock, ponctué de percussions mystiques, et de rafistolages électroniques, donne l'excentrique et paradoxal Zombie Zombie. A minuit tapante, c'est Beak> qui envahit le lieu. Cet autre trio basse/batterie/synthé sont comme des extraterrestres descendus sur Terre pour propager leur langage dans nos oreilles. Le public est hypnotisé par la synchronisation des gestes des trois musiciens alignés et par les écrans prismatiques colorés. Je vous invite à écouter leur dernier album >> , avec nos titres fétiches Spinning Top, Eggdog, Wulfstan II . Pour information , le groupe anglais est tout de même constitué de Geo� Barrow, membre de Portishead. A la fin du concert , comme sur la pochette de l’album ,vous ressortez du concert avec le cerveau retourné et vos visages traduisent la claque musicale que vous venez de prendre. C’était un beau syncrétisme musical et trois belles découvertes.

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