L’AMAZONIE
AMAZONIE TEXTES SERGE GUIR AUD I L L U S T R A T I O N S J A C Q U E S D AYA N
UNE IMMENSITÉ VERTE
Les formations rocheuses du parc de la Serra do Aracá, au Brésil, sont parmi les plus anciennes du monde.
L’Amazonie est une vaste région de l’Amérique du Sud, cachée sous un épais toit de feuilles qui la plonge dans la pénombre. Cet endroit envoûtant se distingue par sa faune et sa flore, uniques au monde. Avec le temps, l’Amazonie a acquis
Une terre très ancienne
un rôle vital dans l’équilibre écologique
L’Amazonie abrite des montagnes vieilles de 2 milliards d’années, nées à une époque où il n’y avait sur la Terre qu’un très grand continent, la Pangée. Les continents actuels ne se sont séparés les uns des autres que petit à petit : l’Amérique du Sud s’est détachée de l’Afrique, dérivant vers l’ouest. Les montagnes de la cordillère des Andes se sont ensuite formées, il y a environ 100 millions d’années, lors de la collision entre deux plaques tectoniques (des morceaux de croûte terrestre qui se déplacent). En élevant l’extrémité ouest du continent, elles ont changé la direction des cours d’eau qui se jetaient alors dans l’océan et ont créé une mer intérieure (dans les terres), appelée Pebas. La forêt amazonienne n’apparaît que vers 10 millions d’années.
de notre planète, en développant sans cesse ce qui est devenu aujourd’hui l’une des biodiversités les plus riches. La découvrir, c’est s’immerger dans un monde en perpétuelle transformation.
COSTA RICA San José
Caracas
PANAMA Panama City Quito
Bogota
VENEZUELA
COLOMBIE
GUYANA
SURINAME
Paramaribo
Georgetown Cayenne
GUYANE FRANÇAISE équateur terrestre
ÉQUATEUR
Buse à tête blanche
Lima
BRÉSIL PÉROU
Une région partagée entre 9 pays L’Amazonie représente une immense zone équatoriale et intertropicale qui s’étend sur presque 8 millions de kilomètres carrés, soit près de la moitié de la superficie de l'Amérique du Sud. Ce vaste territoire, composé à 80 % de forêts, est partagé entre 9 pays. Ces nations englobent la France (le département de la Guyane), le Surinam, le Guyana, le Venezuela, la Colombie, l’Équateur, le Pérou, la Bolivie et le Brésil. Ce dernier en détient la plus grande partie. 2
BOLIVIE
Brasilia
La Paz / Sucre
PARAGUAY Océan Pacifique
Asuncion
CHILI Santiago
ARGENTINE
URUGUAY
Montevideo
Océan Atlantique
Buenos Aires
Carte de l'Amérique du Sud
L’Amazonie, une terre plate ?
L’idée commune que l’Amazonie est une vaste plaine monotone et plate n’est pas tout à fait exacte. Bien que les plaines du fleuve Amazone (voir page 4) et de ses affluents (cours d’eau annexes) le soient, le bassin amazonien est en réalité bordé par trois formations montagneuses : la cordillère des Andes à l’ouest, ainsi que deux boucliers montagneux au nord et au sud. Ces anciens massifs, constitués de divers types de roches cristallines, confèrent à la région un relief bien plus varié que ce que l’on pourrait penser.
Enfants du peuple Kayapo, au Brésil, courant sous la pluie
Serra do Aracá, état d'Amazonas, au Brésil
Un climat chaud et humide L’Amazonie est située sur l’équateur terrestre, une ligne imaginaire qui marque le milieu de la Terre, une zone touchée directement par la lumière du Soleil. Ainsi, étant fortement exposée aux rayons ultraviolets de ce dernier, l'Amazonie possède un climat équatorial et tropical : températures chaudes toute l'année (autour de 27°C), humidité élevée et pluies abondantes (de courte durée mais d'une grande intensité). En moyenne, la région amazonienne reçoit 2 500 millimètres de précipitations par an ! Il n'y a que deux saisons : la saison des pluies et la saison sèche (les averses sont moins fréquentes). Celle-ci dure généralement deux à cinq mois, mais ces dernières années elle a tendance à s’allonger car les pluies arrivent de plus en plus tard. Forêt inondée
Savane
Plusieurs visages ! L’Amazonie est souvent perçue comme une seule grande forêt, mais en réalité elle est composée de plusieurs types de forêts, avec divers écosystèmes. Par exemple, les forêts de montagne situées sur les pentes de la cordillère des Andes, constamment baignées de brume, diffèrent de celles des plaines ou des forêts inondées, dont les racines des arbres sont constamment immergées. Elles n’ont ni la même structure ni le même climat. De plus, 20 % du bassin amazonien est en réalité une savane, c’est-à-dire une vaste prairie où prédominent des herbes hautes. 3
L’AMAZONE ET SES MILLES AFFLUENTS L’Amazone est un fleuve qui prend sa
La naissance du fleuve Selon le mythe indigène Macuxi, bien avant que le monde n'existe, Soleil et Lune s'aimaient d'un amour fougueux. Mais le dieu Tupã, qui voulait créer les humains, était gêné dans sa tâche par la chaleur du Soleil. Il sépara donc les deux amoureux. Fou de rage, Soleil plia ses rayons et s'éloigna. Il fit soudain moins chaud. Lune, inconsolable, se mit à pleurer de manière ininterrompue. Elle pleura tant que ses larmes coulèrent sur la Terre et donnèrent naissance à un fleuve : l’Amazone.
source en hauteur dans la cordillère des Andes, au mont Nevada Mismi, appartenant au Pérou. Lorsqu’il atteint la région de Borja (au Pérou) et quitte les montagnes, descendant à 175 mètres d’altitude, c’est le début de son voyage d’ouest en est à travers tout le continent sud-américain. C’est le fleuve le plus long du monde, s’étendant sur une distance de 6 992 kilomètres.
Un fleuve puissant Même si la région est souvent plate, le fleuve Amazone possède un débit (vitesse) puissant. Lorsqu’il se jette dans l’océan Atlantique, il repousse ce dernier à plus de 100 km au large. En un jour, le fleuve déverse dans l’océan autant d'eau que la Seine en France ne le fait en une année ! Sa force est telle qu'il charrie par an jusqu'à son embouchure, soit son ouverture sur l’océan, une quantité de débris de terre et de matières organiques égale à 9 000 trains de 900 tonnes chacun : 8 100 000 tonnes en tout !
Loutre géante dévorant un poisson
Une mer intérieure Le bassin amazonien draine 20 % des eaux liquides de la planète. La largeur moyenne de l'Amazone est de 2 kilomètres, mais elle atteint à certains endroits 10 à 30 km. À la fin de la saison des pluies (en juin), le fleuve déborde de son lit. Il inonde alors des milliers d'hectares de terres et de forêts, s'étendant jusqu'à 100 km d'une rive à l'autre et s'élevant d'au moins 10 mètres. De plus, le fleuve est aussi influencé par l'effet de la marée, c’est-à-dire la variation de la hauteur de l’océan, qui se fait sentir jusqu'à 1 000 km à l'intérieur des terres ! 4
PLUSIEURS NOMS De sa source jusqu’à l’embouchure le fleuve change plusieurs fois de nom : Apurimac, Ene, Tambo, Ucayali et Amazonas au Pérou, puis Solimões au Brésil, avant de prendre le nom d’Amazone à la confluence avec la rivière Negro.
Lorsque les eaux « blanches » rencontrent les eaux « noires » ou « bleues », elles forment d’abord deux lignes de couleurs distinctes et se côtoient durant plusieurs kilomètres avant de se réunir.
Des eaux de toutes les couleurs L’Amazone et ses affluents sont de véritables routes humides, empruntées par des milliers d’embarcations.
Le bassin amazonien se distingue par trois types de cours d'eau, dont les couleurs varient en fonction de l'environnement géologique et de la couverture végétale qu'ils traversent. Les eaux dites « blanches » (en réalité de couleur marron) sont des eaux descendues des Andes, qui charrient des quantités de terre et de vase. Les principales rivières, en plus du fleuve Amazone, sont le Marañon, le Japurá ou encore le Napo. Les eaux « noires » quant à elles, de couleur café, sont acides. On y trouve peu de poissons. Les principales rivières sont le Negro et le Trombetas. Enfin, les eaux « bleues » sont des eaux très acides, qui proviennent du massif central brésilien. Les principales rivières sont le Guaporé, le Tapajos et le Xingu.
Amazone
équateur terrestre
Negro Solimões Amazonas Ucayali Tambo Ene Apurimac
La première descente du fleuve
En 1541, la première exploration de l’Amazone par les Européens fut menée par l’Espagnol Francisco de Orellana. À la recherche de fabuleux trésors, ces conquistadors partirent de la rivière Napo en Équateur et s’aventurèrent sur l'Amazone, alors inconnue. L’expédition dura 8 mois. Au cours de ce voyage naquit le mythe des Amazones (des femmes guerrières) dont le fleuve, en leur honneur, porte aujourd’hui le nom.
Océan Pacifique Océan Atlantique
Carte du bassin amazonien
5
LES FORÊTS AMAZONIENNES À première vue, les forêts amazoniennes peuvent sembler chaotiques. Mais leur apparence est trompeuse : la nature a incroyablement bien organisé ces écosystèmes, cela dépasse même la compréhension humaine ! Malgré la pauvreté des sols, elle a réussi à créer l'une des végétations les plus luxuriantes de la planète. Cette structure est d’une telle complexité que la moindre perturbation peut rompre son équilibre délicat.
Une forêt à étages Les forêts amazoniennes ont une structure complexe et stratifiée, comme un immeuble à plusieurs étages. Dans les étages supérieurs, la canopée forme le toit vert, abritant une grande diversité d'espèces végétales et animales. Les niveaux intermédiaires, comparables à des appartements superposés, regorgent de lianes, d'épiphytes (voir page 11) et de petits arbres qui créent une densité de vie unique. Au sol, la strate inférieure est l'équivalent du rez-de-chaussée, abritant une variété de créatures, comme des insectes, des reptiles ou des amphibiens (voir page 13). Chaque étage de la forêt amazonienne est essentiel à l'équilibre de l'écosystème, formant ainsi un véritable gratte-ciel de biodiversité !
Lianes
Des sols pauvres Les forêts amazoniennes se développent sur des sols extrêmement pauvres, principalement composés de sable et d'argile, qui ne peuvent pas nourrir les arbres. Afin d'obtenir les éléments nutritifs dont ces derniers ont besoin pour survivre, comme le phosphore, le calcium ou le magnésium, ils ont donc développé des stratégies de survie ingénieuses : ils produisent eux-mêmes entre 75 à 90 % de ces éléments indispensables à leur croissance, à partir de la chute de leurs feuilles, de leurs graines, de leurs fruits ou des lianes qui les enlacent. Dès qu'une feuille tombe au sol, elle se décompose, alimentant ainsi son arbre d'origine. 6
UN CYCLE NATUREL Lorsque les feuilles, les lianes ou encore les fruits de la forêt tombent au sol, ils se décomposent rapidement grâce à la chaleur, à la pluie, aux insectes, aux champignons et aux bactéries. Ils deviennent alors de l'humus, une terre presque noire, et peuvent être recyclés : ils alimentent les plantes. Ainsi, ils reviennent dans le cycle naturel de la nature environ quatre à cinq fois par an.
La lutte pour la lumière En Amazonie, les arbres s'engagent dans une compétition féroce pour conquérir la canopée, la partie supérieure où la lumière du soleil est abondante. Là-haut, la végétation prospère sous l'éclat lumineux. Mais à mesure que l'on descend vers le sol, la luminosité diminue tandis que l'humidité augmente. La cime des arbres agit comme un rideau, laissant seulement 1 % de lumière atteindre le sous-bois. De ce fait, de la canopée jusqu'à la base de la forêt, différents microclimats se sont créés et ont permis le développement de nombreuses niches écologiques, c’est-à-dire d'espaces qui favorisent la croissance de plantes et d'animaux. Singe écureuil
Les géants de la forêt
L’AMAZONIE EN QUELQUES CHIFFRES L’Amazonie impressionne par ses records. Ses arbres peuvent culminer à plus de 50 mètres de hauteur et leur âge moyen est de 110 ans. Certains peuvent même atteindre 500 à 600 ans ! La végétation de la canopée capte 95 à 99 % des rayons solaires et fournit 80 % des nutriments dont la forêt a besoin. Enfin, les deux tiers des espèces de végétaux et d'animaux vivent à 10 mètres au-dessus du sol !
Les grands arbres d’Amazonie s'élèvent à des hauteurs vertigineuses, bien au-delà de la hauteur d'un immeuble de 20 étages ! Certains de ces colosses pèsent plusieurs tonnes et sont davantage alourdis par les plantes qu'ils portent (fougères, lianes...). Pour résister à ces charges imposantes, ces géants développent des racines, qui s'étendent à leur base et leur assurent un meilleur support. Mais ce mécanisme ne les préserve pas toujours de la chute, souvent causée par la violence des vents ou simplement par le poids des années. Lorsqu'ils tombent, ces arbres créent des espaces dégagés, appelés chablis. Ces clairières, alors inondées de soleil, favorisent le développement des jeunes plantes.
7
TA B L E D E S M AT I È R E S UNE IMMENSITÉ VERTE 2 L’AMAZONE ET SES MILLES AFFLUENTS 4 LES FORÊTS AMAZONIENNES 6 LE RÔLE DE L’AMAZONIE 8 LA BIODIVERSITÉ : LA FLORE 10 LA BIODIVERSITÉ : LA FAUNE 12 LES POPULATIONS INDIGÈNES 14 L’EXPLOITATION DES RESSOURCES 18 LES CONSÉQUENCES DE LA DÉFORESTATION 20 L’AVENIR DE L’AMAZONIE 22 © 2024, FLEURUS ÉDITIONS 57, rue Gaston Tessier, CS 50061, 75166 Paris Cedex 19 www.fleuruseditions.com Direction : Guillaume Pô Direction éditoriale : Sarah Malherbe Conception de la collection : Émilie Beaumont et Jack Delaroche Édition : Emma Gibaux Conception graphique : Éric Laurin sous la direction de création de Élisabeth Hébert Graphisme : Ambrine Angaud Mise en page : Studio BDAG Direction de fabrication : Thierry Dubus Fabrication : Juliette Darriere Loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse, modifiée par la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011. Dépôt légal : mars 2024 1ère édition – N° d’édition : 24L0041 ISBN : 9782215192893 • MDS : FS92893 Achevé d’imprimer en janvier 2024 en Europe (par Rotolito en Roumanie). Ce livre est imprimé avec des encres à base végétale et est composé de matériaux issus de forêts bien gérées, certifiées PEFC™ et d’autres sources contrôlées.
Crédits photographiques Page 2 : Carte politique de l’Amazonie © Jacques Dayan. Page 5 : Carte géologique de l’Amazonie © Jacques Dayan. Page 9 : Schéma de la photosynthèse © Jacques Dayan. La quasi-totalité des photographies a été fournie par l’auteur, Serge Guiraud. Les vignettes à découper reprennent des images des pages intérieures.
MDS : FS92893
Code prix : IM6