LA FÉDÉRATION QUÉBÉCOISE POUR LE SAUMON ATLANTIQUE
Saumons VOLUME 32, NUMÉRO 1 • HIVER 2009
illimités 82
700$ / 5 €
Convention Poste-publications 40063917
La Fédé fête ses 25 ans, et fait peau neuve
Sommaire
Numéro 83 Photo couverture : Revue officielle de la Fédération québécoise pour le saumon atlantique et de la Fondation François de Beaulieu-Gourdeau, dont le siège social et le secrétariat sont au 42-B, rue Racine, Québec (Québec) G2B 1C6 Téléphone : 418 847-9191 • Télécopieur : 418 847-9279 secretariat@saumon-fqsa.qc.ca www.saumon-fqsa.qc.ca Éditeur : FQSA Coordonnateur : Marc-Antoine Jean, majean@saumon-fqsa.qc.ca Collaborateurs : Gérard Bilodeau, Pierre Manseau, Richard Sirois, Michel Jean, Gilles Shooner, Bernard Beaudin. Tirage : 4 000 copies Convention Poste-publications 40063917 RETOURNER TOUTE CORRESPONDANCE NE POUVANT ÊTRE LIVRÉE AU CANADA À : FQSA, 42-b, Racine, Québec (Québec) G2B 1C6 Dépôt légal : Bibliothèque nationale du Québec • Bibliothèque nationale du Canada Adhésion FQSA : 40 $ (hors Canada ajouter 10 $) Abonnement au magazine Saumons illimités 25 $ (hors Canada ajouter 10 $) • La Fédération ne s’engage pas à publier tous les écrits qu’elle reçoit. • Si cela est jugé pertinent, la Fédération se garde le droit de répondre à tout propos. • La Fédération ne publiera pas les propos qui sont jugés diffamatoires, qui contiennent des erreurs, qui sont fondés sur des opinions racistes ou qui pourraient inciter à la violence. • Les opinions émises dans les articles n’engagent que leurs auteurs. • Dans cette revue, la forme masculine n’est utilisée que pour alléger les textes. LE CONSEIL D’ADMINISTRATION DE LA FQSA Président : Yvon Côté Secrétaire : André Baril Trésorier : Georges Malenfant
4 Mot du président
10 Statistiques de pêche sportive en 2008
La rivière Coppermine
17 Échos des régions L’histoire d’un chenal
Vice-présidence à la pêche sportive : Claude Hamel, V.P. • Bas-Saint-Laurent et Gaspésie : Dial Arsenault • Côte-Nord : Gilles Poirier • Montréal : Yannick Chuit, François Chapados, Marc Dancose • Québec et Saguenay : Marc Sélesse, Michel Ouellet
23 Les secrets de Salmo Didymo persiste
Vice-président aux affaires autochtones : Jean-Marie Picard
Vice-présidence à la gestion des rivières : Pierre-Paul Turcotte, président de la Société de gestion de la rivière Matane • Rive sud : Marco Bellavance, administrateur à l’Association des pêcheurs sportifs de saumon de la rivière Rimouski • Rive nord : Georges Gagnon, directeur général de la Société d’aménagement de Baie-Trinité poste
12 Échos d’ailleurs
27 Les coulisses de la rédaction
Vice présidence aux finances et affaires corporatives : Jean-Claude Villeneuve Représentant de la FPQ : Dominic Dugré Représentants gestionnaires (2) : Ronald Desbiens, Saumon de la rivière Malbaie, vacant Délégués externes : • CIRSA : Gilles L. Duhaime • FSA : Charles Cusson • CIFQ : Vacant • Relations extérieures : Pierre Tremblay Directeur général : Michel Jean Présidents honoraires : Bernard Beaudin, Jean-Pierre Mailhot, Jean Racine, André Vézina
LE SAUMON 32 Échos de France 20 000 ans d’histoire
400 ans d’histoire et de passion au Québec
Index des publicités APRM.................................................................................. 22 Boutique Orvis Salmo Nature ......................................... 52 Camp Bonaventure........................................................... 21 Encan faune et nature Toyota........................................ 43 Fondation de la faune du Québec.....................................9 Hydro Québec .....................................................................2 L’atelier du moucheur ..................................................... 45 La Capitale assurances générales.................................. 21 Latulippe ...............................................................................9 Motel Restigouche . ......................................................... 45 Pourvoirie J.M.L. inc. ........................................................ 45 Québec Pêche................................................................... 49 Salmon Lodge..................................................................... 31 Salon Expert chasse, pêche et camping....................... 51 Sogerm................................................................................ 31 UNI........................................................................................47
LE CONSEIL DES GOUVERNEURS 2006-2007 MEMBRES CORPORATIFS Hydro-Québec Camp de pêche de la rivière Moisie inc. Corporation de pêche Sainte-Marguerite inc. Fondation Blairmore MEMBRE INDIVIDUEL M. John E. Houghton
46 Babillard
40 Histoire de pêche Premier contact
Mot du ministre délégué aux Ressources naturelles et à la Faune C’est avec grand plaisir qu’à titre de ministre délégué aux Ressources naturelles et à la Faune, je m’adresse à vous, passionnés de la pêche au saumon. Je suis heureux de réaffirmer la volonté de mon gouvernement de travailler en étroite collaboration avec tous les organismes concernés par la faune et ses habitats. En 2008, mon ministère s’est doté d’un plan stratégique pour déterminer les défis importants à relever d’ici 2011. La mission que s’est donnée le Ministère est d’assurer la conservation des ressources naturelles et du territoire tout en favorisant la création de richesse par leur mise en valeur. Cette mission s’accomplira, bien entendu, dans une perspective de développement durable et au bénéfice des citoyens. Voici trois des orientations stratégiques qui ont été retenues : • optimiser la mise en valeur des ressources naturelles et du territoire; • assurer la conservation et le renouvellement des ressources naturelles; • instaurer une gestion intégrée et régionalisée des ressources naturelles et du territoire. En matière de connaissance et de gestion des ressources fauniques, le gouvernement libéral a fait preuve d’un réel leadership au cours des dernières années, et ce, tant sur le plan national qu’international. J’ai l’intention de poursuivre ces efforts concertés qui garantissent le succès de nos interventions. Ainsi, le 30 janvier dernier, j’ai annoncé un réinvestissement annuel de près de quatre millions de dollars pour la mise en valeur et la conservation de la faune. Ce réinvestissement est rendu possible grâce à la révision des tarifs des permis et des droits liés à la pratique de la pêche, de la chasse et du piégeage. Réclamée depuis longtemps par les partenaires du milieu faunique, cette révision tarifaire permettra la mise en œuvre de plusieurs projets dont les retombées positives devraient se faire sentir principalement dans les régions. Par ailleurs, le Règlement de pêche du Québec (1990) a récemment été modifié et entrera en vigueur le 1er avril 2009, tout comme la nouvelle tarification. Les nouvelles règles établies à l’égard de la pêche au saumon comportent une série de modifications susceptibles de solutionner des problèmes de gestion et de protection que les gestionnaires de rivière et les saumoniers eux-mêmes dénonçaient depuis plusieurs années. S’étant avérés difficiles à comprendre et, par conséquent, difficiles à appliquer sur le terrain, certains éléments réglementaires ont donc été corrigés. Enfin, j’entends poursuivre les efforts d’acquisition de connaissances sur le saumon atlantique afin d’améliorer et d’élaborer des approches de gestion toujours plus innovantes et garantes de la pérennité des populations de saumon atlantique présentes au Québec. Comme vous pouvez le constater, ce ne sont pas les projets qui manquent et c’est avec beaucoup d’enthousiasme que je compte me consacrer au mieux-être de notre belle faune québécoise. Bonne pêche!
Serge Simard Ministre délégué aux Ressources naturelles et à la Faune
Mot du président
D’hier à demain, la FQSA un trait d’union pour la conservation et la mise en valeur du saumon atlantique
I
l y a 25 ans, cette année, l’Association des pêcheurs sportifs de saumon du Québec (APSSQ), fondée en 1975, se transformait en la Fédération québécoise pour le saumon atlantique (FQSA). Ce changement de statut s’imposait puisque que depuis 1982, les sept nouvelles zecs-saumon crées en 1980, avaient rejoint les rangs de l’APSSQ. Il fallait donc refléter cette nouvelle réalité dans les statuts et dans la structure de l’organisation. Le dénominateur commun entre pêcheurs sportifs et gestionnaires de rivière étant le saumon, on ne s’étonnera pas du choix du nom attribuée à la nouvelle organisation. Les pères fondateurs de cette toute nouvelle organisation étaient : Jean-Marie Belisle, Serge Bisaillon, Peter Dubé, Jean-Paul Duguay, Jacques Fugère, James Lee Hopkins, Charles A. Langlois, Serge Levasseur, Joseph Mullen, Claude Ouellet, Guy Papillon, Roger Pelletier, Paul Potvin, Jean Racine, Gilles Shooner, Claude Théberge André Vézina, Bernard Beaudin, Laura Chouinard, et Normand Morisset Rappelons que les zecs-saumon d’abord placées par le Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche sous le chapeau de la Fédération québécoise des gestionnaires de zecs (FQGZ) avaient d’elles-mêmes délaissé cette organisation. En effet le dossier saumon ne recevait que peu d’attention au sein de la FQGZ. Et c’est bien compréhensible : il n’y avait que 7 zecs-saumon noyées dans une soixantaine de zecs-faune. La FQGZ étant alors elle-même à ses débuts, ses priorités portaient tout naturellement sur les besoins de la majorité, le saumon ne représentant pas vraiment un poids important dans l’ensemble de l’offre de chasse et de pêche. Pêcheurs sportifs et pêcheurs-gestionnaires s’étaient donc d’instinct réunis pour constituer un poids politique important, qu’ils n’avaient pas pris isolément. Dès le départ, la symbiose des deux groupes avait bien fonctionné, notamment au cours de l’hiver 1983-1984, alors que le ministre Chevrette convoquait, à Rimouski, des états généraux du saumon pour faire face à la situation critique de la ressource saumon. Le ministre avait même lancé une flamboyante campagne de presse intitulée : La mort en rose ! Sous la pression conjuguée des pêcheurs et des associations gestionnaires le
ministre Chevrette acceptait d’adopter, pour la saison1984, des mesures qui répondaient non seulement aux impératifs de la conservation du saumon, mais aussi, dans une certaine mesure, aux attentes des pêcheurs sportifs et à celles des organismes gestionnaires. Voilà ce qui fut le prélude à la création de la Fédération québécoise pour le saumon atlantique en novembre 1984. La FQSA a mené bien des combats depuis. Pour n’en nommer que quelques-uns mentionnons, la lutte pour la diminution, voire l’abolition de la pêche commerciale au Québec, les pressions visant l’élimination des pêches au filet interceptant des saumons en migration vers les rivières du Québec, le contrôle des pêches accidentelles le long des côtes maritimes du Québec, le contrôle du braconnage en rivière, le contrôle de la vente de spécimens capturés illicitement, etc. La FQSA est intervenue également dans des dossiers à caractère environnemental : l’exploitation des forêts, le développement de l’industrie porcine, le dossier de l’énergie et des micro-centrales, les empiètements routiers et industriels en bordure des rivières, la construction de ponts enjambant les rivières à saumon, l’élevage de salmonidés le long des côtes maritimes du Québec, etc. La FQSA s’est donc imposée comme un organisme visant la conservation de la ressource. Mais la FQSA ne s’est pas contenté de lutter contre les situations adverses au saumon, elle a également œuvré sur un aspect plus positif, soit le développement et la mise en valeur de la ressource et des rivières à saumon. On doit à André Vézina, premier président de la FQSA, l’idée de l’opportunité socio-économique d’un plan majeur de développement de la ressource et de son habitat, à l’exemple disait-il, du Salmon Enhancement Plan (Plan de développement du saumon du Pacifique). Dès 1985, le président Vézina lançait cette offensive sur toutes les tribunes qui s’offraient à lui. Il avait même organisé un atelier spécial sur ce sujet lors d’un congrès de la FQSA. Au fil des ans l’idée fit son chemin de sorte que politiciens et hauts fonctionnaires concernés par la gestion de la ressource saumon et le développement régional trouvèrent l’idée intéressante et mirent en place le Plan de Saumons illimités 5
développement économique du saumon (PDES), annoncé par le ministre Benoit Bouchard (fédéral) et le ministre Yvon Picotte (provincial) en novembre 1990 à Bonaventure. Au fil des ans la FQSA a aussi mis en place une gamme d’activités pour informer ses membres et la population en général de l’importance de conserver cette espèce de poisson : colloques d’information sur des thématiques précises, ateliers de travail et d’information lors des congrès des membres, programme éducatif en milieu scolaire, programme de soutien à la protection des rivières, présentation de mémoires au Bureau des audiences publiques en environnement, publications spéciales sur différents sujets et, surtout, Saumons illimités, le magazine des membres de la FQSA. Plus récemment la Fédération s’est associée à Québec Pêche, le webzine francophone le plus important pour la pêche sportive, ce qui permet à un vaste réseau de pêcheurs sportifs de se familiariser avec la pêche du saumon et les problèmes de conservation de cette espèce. D’une organisation ouverte aux pêcheurs de saumon et aux associations de pêcheurs, la FQSA a progressivement élargi ses cadres pour devenir un forum ouvert à tous ceux qui portent un intérêt à la conservation et au développement de la ressource saumon. Aux pêcheurs sportifs de la base et aux associations de pêcheurs-gestionnaires de rivières à saumon, se sont ajoutées les entreprises de pourvoirie-saumon, les communautés autochtones intéressées à cette espèces, des corporations municipales établies sur les bassins versants de rivière à saumon, des gens de la grande industrie, des chercheurs scientifiques de nos universités québécoises, etc. L’adhésion des membres de la FQSA comporte donc une « géométrie variable », comme le veut une expression populaire et la structure de gouvernance de la Fédération reflète cette réalité. La FQSA peut s’enorgueillir d’être la première, la seule, fédération de faune à créer une vice-présidence aux affaires autochtones, dirigée par un autochtone. Incidemment, la plus haute distinction accordée par la FQSA à un individu ou à un organisme s’étant illustré dans la conservation et la mise en valeur du saumon se nomme le prix François de Beaulieu Gourdeau-Uitchitun (paix, amour, amitié en langue innue) reflétant l’alliance des communautés québécoise et amérindienne pour la sauvegarde du saumon. L’ouverture de la FQSA à toute personne, corporation ou groupement intéressé au saumon et aux rivières à saumon a conduit la Fédération à développer une attitude favorisant le partenariat avec toutes les organisations concernées par le saumon, qu’elles soient du niveau régional, provincial, national ou même international. C’est ainsi que la FQSA est reconnue comme le Conseil régional de la Fédération du saumon atlantique au Québec (FSA) et qu’elle est également reconnue par l’Organisation pour la conservation du saumon de l’Atlantique nord (OCSAN) comme organisme non-gouvernemental habilité à siéger aux rencontres internationales de cet organismes.
6 Saumons illimités
Comme la FQSA préconise l’utilisation et le développement de la ressource saumon et des rivières à saumon pour la pêche sportive, logiquement la Fédération admet aussi que l’ensemble des ressources naturelles d’un bassin versant peuvent être valorisées à la fois dans un contexte écologique et socio-économique, ce qui se nomme le développement durable. Utilisation polyvalente des ressources du milieu et développement durable sont donc devenus deux des leitmotivs de la Fédération. Ces deux concepts, dans le cas d’une rivière à saumon, prennent leur véritable sens, en matière de développement, par l’approche de gestion par bassin versant, héritage de la notion de gestion rivière par rivière. En effet, les saumoniers le savent, chaque rivière à saumon est différente des autres tant par ses caractéristiques physiques que par les populations de saumon qu’on y trouve. En ce début du XXIe siècle, de nouveaux défis, de nouvelles menaces, mais également de nouvelles opportunités solliciteront la FQSA et nécessiteront la cohésion de toutes les forces vives qui croient en la valeur écologique, sociale et économique de cette espèce de poisson et des rivières qu’elle fréquente. Aussi, davantage de recherche scientifique sera nécessaire pour faire face aux défis nouveaux que posent les changements « globaux » de notre environnement et de notre société. Sur le plan démographique, le vieillissement des populations modifiera la demande pour la pêche sportive du saumon. A cet égard, Pierre Manseau, passionné et membre de la FQSA, a lancé l’idée du mentorat pour combler l’écart intergénérationnel entre anciens et nouveaux pêcheurs ou même pour favoriser l’accès à la pêche aux jeunes, aux néophytes. La FQSA a fait sienne cette magnifique idée, car qui mieux que les pêcheurs sportifs peuvent se porter à la défense des rivières à saumons afin que ce patrimoine puisse être transmis aux générations futures tout comme nous l’avons reçu des générations qui nous ont procédé. D’où l’importance de maintenir un fort contingent de saumoniers partout au Québec. En terminant ce tour d’horizon, je me dois de remercier très sincèrement André Vézina (1984-1987), Jean Racine (19871989), Bernard Beaudin (1989-1994) et Jean-Pierre Mailhot (1994-2000), tous anciens présidents de la Fédération. Ils m’ont précédé à la barre de notre organisation, ils l’ont fait progresser, avec brio, chacun à leur manière, en des époques différentes et dans des situations qui ont sollicité créativité, savoir-faire et énergie, tout cela bénévolement. Longue vie à la Fédération québécoise pour le saumon atlantique.
Yvon Côté, président
prĂŠsident
Saumons illimitĂŠs 7
prĂŠsident
8 Saumons illimitĂŠs
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Saumons illimités 9
STATISTIQUES DE PÊCHE SPORTIVE AU Données fournies par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune Nom de la rivière Bonaventure Cascapédia Causapscal Kedgwick Matapédia Nouvelle Patapédia Petite rivière Cascapédia Total Q1
Mad.
Captures rapportées Réd. Total
Effort jours-pêche
Succès (cap./j-p)
848 65 17 16 1 082 10 126 68 2 232
0 85 57 9 456 0 12 0 619
848 150 74 25 1 538 10 138 68 2 851
4 873 4 159 343 188 7 986 281 847 962 19 639
0,17 0,04 0,22 0,13 0,19 0,04 0,16 0,07 0,15
138
22
160
970
0,16
18 18 8 83 12
0 0 0 26 0
18 18 8 109 12
213 93 189 571 124
3 240 368 888
0 15 271 334
3 255 639 1 222
74
0
128 810 352 75 55 172
Remises à l’eau
Succès Ajusté 1
809 876 19 6 325 14 28 268 2 345
0,34 0,25 0,27 0,16 0,23 0,09 0,20 0,35 0,26
0,08 0,19 0,04 0,19 0,10
60 51 44 26 0
0,37 0,74 0,28 0,24 0,10
21 1 700 4 097 7 978
0,14 0,15 0,16 0,15
0 410 157 748
0,14 0,39 0,19 0,25
74
519
0,14
37
0,21
40 249 83 27 0 38
168 1 059 435 102 55 210
963 6 947 1 767 338 683 1 751
0,17 0,15 0,25 0,30 0,08 0,12
37 44 74 0 35 249
0,21 0,16 0,29 0,30 0,13 0,26
1 666
437
2 103
12 968
0,16
476
0,20
Du Gouffre Jacques-Cartier* Malbaie (Charlevoix) Total Q5
173
0
173
1 470
0,12
150
0,22
87 260
0 0
87 260
578 2 048
0,15 0,13
32 182
0,21 0,22
À Mars Petit Saguenay Sainte-Marguerite Sainte-Marguerite Nord-Est Saint-Jean Total Q6
41 41 82 138 92 394
0 0 0 0 0 0
41 41 82 138 92 394
438 463 1 769 607 635 3 912
0,09 0,09 0,05 0,23 0,14 0,10
34 46 127 123 68 398
0,17 0,19 0,12 0,43 0,25 0,20
111
47
158
1 021
0,15
228
0,38
112 76
0 0
112 76
788 364
0,14 0,21
42 48
0,20 0,34
157 1
0 0
157 1
682 61
0,23 0,02
208
0,54
33
23
56
329
0,17
490
70
560
3 245
0,17
526
0,33
5 0 15 1 6
25 0 2 6 8
30 0 17 7 14
183
0,16
1
0,17
102 117 54
0,17 0,06 0,26
66 2
0,81 0,08
5 28 186 12 7 0 2 47
159 30 437 5 5 0 25 190
164 58 623 17 12 0 27 237
2 411 80 867 73 58
0,07 0,73 0,72 0,23 0,21
734 7 2 37 15
0,37 0,81 0,72 0,74 0,47
104 852
0,26 0,28
147
0,45
4 318
9 901
13 1 219
153 5 054
0,08 0,24
211 1 222
1,46 0,48
Dartmouth De l’Anse à la Barbe* Du Grand Pabos Du Grand Pabos Ouest Du Petit Pabos Grande Rivière Malbaie Petite rivière Port-Daniel* Port-Daniel du Milieu* Port-Daniel Nord Saint-Jean York Total Q2 Cap-Chat De Mont-Louis* Madeleine Matane Mitis Ouelle Rimouski Sainte-Anne Sud-Ouest* Total Q3
Aux Anglais* Aux Rochers Betsiamites* De la Trinité Des Escoumins Du Calumet* Franquelin* Godbout Laval Mistassini* Pentecôte Petite rivière de la Trinité* Total Q7 Aguanus Au Bouleau De la Corneille Jupitagon Magpie Matamec* Mingan Moisie Nabisipi Natashquan Petite rivière Watshishou Piashti Pigou Romaine Saint-Jean (Moy. Côte-Nord) Sheldrake* Watshishou Total Q8
10 Saumons illimités
S
U
SAUMON PAR RIVIÈRE EN 2008 Nom de la rivière Brador Est Chécatica Coacoachou Coxipi Du Gros Mécatina Du Petit Mécatina Du ruisseau au Saumon Du ruisseau des Belles Du Vieux Fort Étamamiou Kécarpoui Kégaska Musquanousse Musquaro Napetipi Nétagamiou Olomane Saint-Augustin Saint-Augustin Nord-Ouest Saint-Paul Véco Washicoutai Total Q9
Mad.
Captures rapportées Réd. Total
Effort jours-pêche
Succès (cap./j-p)
133
0,42
Remises à l’eau
Succès Ajusté 1
53 0
3 0
56 0
0 131
0 3
0 134
128
1,05
129
2,05
4 8 52 167 21 23 20 92 18
3 0 0 32 0 10 0 6 1
7 8 52 199 21 33 20 98 19
17 19 186 164 233 78 78 173 89
0,41 0,42 0,28 1,21 0,09 0,42 0,26 0,57 0,21
420 200 22 27 1 33 386
2,54 2,43 0,18 0,77 0,27 0,76 4,55
0 91 23 23 726
0 33 2 1 94
0 124 25 24 820
687 60 78 2 123
0,18 0,42 0,31 0,39
1 366
2,17
9 2 593
0,42 1,61
26
3
29
192
0,15
5
0,18
30
3
33
242
0,14
9
0,17
25
4
29
142
0,20
19
0,34
8
3
11
28
0,39
5
0,57
311
7
318
551
0,58
278
1,08
400
20
420
1 155
0,36
316
0,64
À la Baleine Autres rivières Aux Feuilles George Koksoak Total Q11
76 51 127
72 91 163
148 142 290
290 125 415
0,51 1,14 0,70
109 159 268
0,89 2,41 1,34
Total Québec
7 501
2 638
10 139
58 537
0,17
9 074
0,33
À la Loutre À la Patate* À l’Huile* Aux Cailloux* Aux Plats* Aux Saumons Bec-Scie* Bell* Chicotte* Dauphiné* De la Chaloupe Du Pavillon* Du Renard* Du ruisseau Box* Du ruisseau Martin* Ferrée Galiote* Jupiter Maccan* MacDonald* Petite rivière de la Chaloupe* Petite rivière de la Loutre* Sainte-Marie* Vauréal* Total Q10
Note * = Rivière fermée à la pêche au saumon. 1 : Le succès de pêche ajusté représente le nombre de poissons capturés auquel on ajoute ceux remis à l’eau vivants. Les rivières du Brick (Q10), depuis 1993, et au Tonnerre (Q8), depuis 1999, n’ont plus le statut de rivière à saumon, de même que les rivières Port-Daniel du Milieu et de l’Anse à la Barbe.
Étant donné que la remise à l’eau ne fait pas l’objet d’une déclaration obligatoire, les statistiques rapportées à cet effet demeurent un minimum et constituent donc une estimation. Depuis 2002, tous les saumons de 63 cm et plus (rédibermarin) doivent être remis à l’eau dans la zone Q10 (Île d’Anticosti). Toutefois, en se basant sur des lectures d’âge des années antérieures, on considère que les saumons de plus de 58 cm sont des rédibermarins dans cette zone, ce qui explique leur présence dans les captures sportives. Les gestionnaires de la rivière à la Baleine (Q11), aux Feuilles (Q11) et Mingan (Q8) n’ont fournis aucune donnée à ce jour pour l’année 2008.
Saumons illimités 11
Échos d’ailleurs
LES VRAIES PERLES DE LA
RIVIÈRE COPPERMINE ESCAPE RAPIDS
Par Faruk Ekich
Lorsque je pense
à la grande passion de ma vie – la pêche à la mouche –, je me trouve très chanceux. Chanceux non pas pour le nombre ou la taille des poissons pêchés (l’époque où ces valeurs primaient m’est lointaine), mais pour avoir vécu dans des endroits qui m’ont offert les meilleures opportunités pour assouvir ma passion, et ce, avec toutes les espèces de salmonidés. J’ai grandi sur les rives de la Vrbas, une magnifique rivière calcaire ornant les deux millénaires d’histoire de la ville de Banja Luka (en Bosnie). Comme toutes les rivières de cette région, la Vrbas possède une vie aquatique riche où ombres communs, truites brunes et huchons abondent. C’est d’ailleurs dans cette région que la première pêche à la mouche aurait été enregistrée, par un voyageur romain du IIIe siècle. Nous utilisions cette même technique ancestrale lorsque j’ai commencé à pêcher, peu après la Seconde Guerre mondiale : des lignes tressées de crin de cheval, se terminant sur un seul poil en guise de bas de ligne, des cannes souples de noisetier, et des mouches nouées à la main sur le bord de la rivière. Tout cela dans le but d’appâter le « prince » : l’ombre commun. Mon arrivée au Canada en 1966 fut l’événement le plus heureux de mon existence. Outre me donner la chance de mener une bonne vie, j’eus l’occasion d’élargir aux salmonidés ma passion pour la pêche à la ligne. Ma femme, une belle Saguenéenne, et moi nous sommes établis à Smithers, en Colombie-Britannique, un endroit rêvé pour tout pêcheur de truite arc-enciel. La pêche de cet acrobate de l’Ouest était d’ailleurs en plein essor à la fin des années 60. Plus tard, dans les années 70, nous avons déménagé plus à l’Est, et j’ai plongé tête première dans le paradis du saumon atlantique : le Québec. 12 Saumons illimités
LES PERLES ARGENTÉES DE LA COPPERMINE
La passion pour le saumon m’a habité si puissamment que je voyais le reste de mes jours comme autant de possibilités de rencontrer le roi de nos rivières, sur son territoire et suivant ses conditions. Mais malgré tout l’attrait qu’exerçaient sur moi la grandeur et la puissance du saumon, j’étais déjà sous le charme et j’avais offert mon cœur à la « princesse » de ces mêmes eaux : l’omble de fontaine, la magnifique perle de la famille. Et cette relation d’amour a lentement pris le dessus. Je suis parti à sa recherche dans ses meilleurs environnements, de la baie James à la baie d’Hudson, en passant par la baie d’Ungava, où j’ai rencontré son patriarche, l’omble chevalier. Possédant la puissance du saumon (plusieurs croient que l’omble chevalier est le plus fort des salmonidés), il a la beauté de l’omble de fontaine tout en étant entouré d’un mystérieux caractère sauvage. L’environnement dans lequel il vit est majestueux et propose de nombreux défis. Intrigué, je tentai de trouver des informations à son sujet. Outre quelques histoires de pêche qui offraient très peu d’informations concernant les techniques de mouche, il existait certains ouvrages scientifiques, comme The Artic Charr Salvelinus Alpinus du biologiste Lionel Johnson (datant de 1980). Entre autres choses, j’ai pu tirer de ces études couvrant le bassin polaire, de la Sibérie au Canada, que l’omble chevalier est un poisson d’eau douce anadrome hivernant dans les lacs. Lionel Johnson mentionne d’ailleurs la chose suivante : « … la fonte des neiges occasionnée par le Soleil incessant de mai et juin augmente sous la glace le débit des rivières (lesquelles s’écoulent de façon constante durant l’hiver), ou entraîne la reprise du flot des rivières entièrement gelées. Pendant cette période, l’omble chevalier anadrome quitte les lacs encore glacés et commence sa migration vers la mer. En même temps, les glaces de la mer commencent à fondre et un chenal se crée entre la terre et la banquise perpétuelle. Au printemps, ce chenal contient une activité biologique importante et ce sont de ces ressources de nourriture brièvement abondantes dont dépend l’omble chevalier anadrome. Après une période relativement courte d’alimentation intensive, l’omble chevalier retourne en eau douce... » La période de retour varie d’année en année et d’une région à l’autre, le pic se situant généralement entre la miaoût et le début du mois de septembre. En 1988, j’entrai donc en contact avec un certain Johanson d’Arctic Waterways, une entreprise qui proposait des voyages en radeau dans le Grand Nord canadien. La
pêche à l’omble chevalier était l’une des activités proposée et comprise dans le voyage sur la rivière Coppermine. Mais en réalité, il s’agissait essentiellement d’une descente de la rivière avec quelques occasions pour pêcher en soirée, ce qui ne correspondait pas vraiment à ma conception de la pêche. Je possédais déjà des bateaux gonflables et les accessoires nécessaires aux voyages par avion pour pêcher l’omble de mer sur la rivière Sutton, sur la côte ouest de la baie d’Hudson. Je décidai donc d’y aller par mes propres moyens et d’apprendre. De 1990 à 2004, je passai quinze étés dans le Nord à pêcher l’omble chevalier anadrome, et tous sauf un ont été sur la rivière Coppermine. La rivière Coppermine s’étire sur 850 km au nord-est de Yellowknife pour atteindre le golfe du Couronnement dans la mer Arctique. Après un premier voyage exploratoire en 1990, lequel a débuté à quelque 200 km de la mer, j’ai établi « mon camp » au carrefour du ruisseau Melville, situé à environ 120 km (de rivière) en amont de la mer et du village de Kugluktuk. Cette portion de la rivière fait entre 200 et 300 m de largeur, avec une profondeur moyenne d’un à deux mètres et une vitesse de 6 à 7 km/h. Les rives sont composées de près de 20 m d’énormes éboulis rocheux, témoins de la puissance des glaces durant la débâcle. Il en est ainsi sur encore 15 km en aval, puis la rivière traverse les canyons schisteux sur la majorité du reste de sa route jusqu’à la mer. C’est là une rivière unique générant son propre microclimat, permettant à la limite forestière de s’étendre bien au-delà du cercle polaire dans la toundra. Les épinettes noires s’accrochent aux versants protégés du vent, dans une vallée formée par les montagnes Coppermine et Septembre, toutes deux sculptées à merveille par les artistes des glaces. J’aimerais tant pouvoir décrire toute la beauté que j’ai laissée derrière... Son histoire y est également riche. Il s’agissait d’un endroit très important pour les premières nations (Dénés et Inuits) à cause du cuivre pur s’y trouvant, lequel a façonné leur culture. La rivière a également été utilisée comme route vers la mer Arctique par des explorateurs tels que Samuel Hearne, Franklin et d’autres. Au début des années 90, cet immense bassin-versant a été perturbé par la plus grande découverte de diamants du monde, événement qui en changerait la face à jamais. Toutefois, à mes yeux, la vraie perle de la rivière Coppermine est son caractère sauvage immaculé d’une beauté indescriptible, qui accueille grizzlis, bœufs musqués, caribous, et bien sûr ombles chevaliers et ombres communs. Saumons illimités 13
L’EMPLACEMENT DE MON CAMPEMENT SUR LES BERGES DE LA COPPERMINE
Mes voyages avaient généralement lieu à partir de la deuxième semaine de juillet, alors que la rivière perd ses glaces, et se prolongeaient jusqu’à la deuxième semaine d’août, avant que le temps froid ne s’installe. Les auberges du cercle polaire (comme le Plumers, au bord du Grand lac de l’Ours) ferment leurs portes à la première semaine d’août à cause du climat incertain; il est donc important d’être bien préparé si vous comptez rester par vous-même après la mi-août. À la fin des années 80, alors que je cherchais à pêcher l’omble chevalier, plusieurs pensaient qu’il serait très difficile, voire impossible, d’attraper un omble chevalier anadrome à la mouche. Sachant que des croyances similaires avaient été entretenues à l’égard de la truite arc-en-ciel quelque trente ans auparavant, j’ignorai ces doutes et allai de l’avant en utilisant l’approche des pêcheurs d’arc-en-ciel. Cela signifiait aborder le poisson avec les lignes appropriées. La canne que j’utilisais était une Sage à action rapide de 9 pi 6 po avec une soie numéro 8. Le moulinet était un Hurdy Ocean Prince avec antiretour, dont la capacité approchait les 400 verges au total. Une seconde canne était utilisée comme compromis pour l’ombre commun et jouait le rôle de canne de rechange pour mon partenaire et moi. Il s’agissait d’une Sage avec soie numéro 6. Les lignes étaient principalement des shooting heads allant de 275 à 375 grains, les densités pouvant varier. La soie flottante à fuseau décentré, pour la pêche à la mouche sèche, a été raccourcie dans la partie arrière pour faire des connexions boucle à boucle. J’avais également avec moi ma ligne de crin de cheval pour la pêche traditionnelle à l’ombre commun avec mouches sèches montées à la main.
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Initialement, les mouches pour l’omble chevalier constituaient un mélange de streamers et de speys pour arc-en-ciel, imitant crevettes et vairons, noués à des hameçons à saumon ordinaires. Le tout fonctionnait assez bien, mais entraînait un désavantage à leur endroit, ce qui m’a encouragé à apporter des modifications à la mouche traditionnelle. Voici un extrait d’un article précédent que j’ai rédigé sur le sujet : Ces séjours dans les terres du soleil de minuit duraient trois semaines, et la majorité du temps était passé à pêcher – parfois jusqu’à seize heures par jour. Avec autant de possibilités de nourrir les poissons, n’importe qui peut faire un nombre vraiment élevé de prises. Le seul défi réside dans le fait de les remettre à l’eau de la meilleure façon possible. Utiliser un bas de ligne fort et pesant aidait à raccourcir les épuisantes batailles et accélérait la remise à l’eau. Mais la famille des ombles présente des problèmes de coagulation et le moindre saignement peut entraîner la mort du poisson. À mon avis, la mouche traditionnelle, avec son hameçon à longue hampe, présente deux désavantages majeurs pour la sécurité du poisson : la longueur de sa hampe et son orientation descendante. Lorsque la lutte s’étire, la portion de la longue hampe fait un plus gros trou (et donc une plus grande blessure), et son orientation descendante vient souvent presser la langue à l’endroit où se trouvent les vaisseaux sanguins. Il y a un troisième désavantage qui pourrait affecter la sécurité du poisson : dans la mare qui a été dérangée par la
lutte précédente, le poisson se tient tranquille et souvent, en tentant de l’approcher, le pêcheur rattrapera le poisson. La lutte qui s’ensuit fatigue le poisson (tout comme le pêcheur qui tente de le ramener pour le gracier). Étape par étape, j’ai donc développé ce concept de mouche « à tube », un hameçon à hampe courte fixe qui lui permet de pointer vers le haut. En plus de réduire les blessures occasionnées aux poissons, cette mouche offre les avantages suivants : • Une meilleure tenue que l’hameçon à longue hampe, compte tenu de sa taille plus courte; • Un meilleur ferrage, particulièrement pour une mouche en aval à la fin de sa course à la fin de sa course, et lorsque le poisson plonge directement vers le bas après la montée. Fermant sa bouche sur la mouche dans cette position descendante, la mâchoire supérieure sur toute sa largeur est à la portée de l’hameçon, contrairement au seul bout de la mâchoire inférieure dans le cas d’une mouche ordinaire avec pointe vers le bas; • Elle réduit les frustrations engendrées lorsqu’une mouche est abîmée lors du bris de l’hameçon; • Elle vous permet de choisir un hameçon beaucoup plus léger pour obtenir l’ouverture désirée sur les grosses mouches sèches, ce qui vous permet d’obtenir une mouche à parure clairsemée offrant une meilleure flottabilité;
UN DÎNER ROYAL : OMBLE CHEVALIER, SALADE DE POMMES DE TERRE ET CHÂTEAU CHEVAL BLANC
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REMISE À L’EAU D’UN MAGNIFIQUE SPÉCIMEN
• L’hameçon se dégage de la mouche au début de la lutte, et la mouche demeure à une distance sécuritaire par rapport aux dents du poisson; • La mouche « à tube », comme la « mouche à quille », réduit les chances de rester accroché au fond. Ce concept fait ses preuves depuis plusieurs saisons et j’espère qu’il intéressera nombre d’entre vous, en particulier les pêcheurs d’omble chevalier. Vous pouvez obtenir les instructions de tressage sur mon site Web : www.ekichbobbin. com, à la page « To Tie For ». La dernière portion du voyage vers « mon camp » en bordure de rivière est un vol de 600 km au départ de Yellowknife à bord d’un petit hydravion. L’espace et le poids y étant limités, chaque élément d’équipement doit être bien choisi et doit répondre aux besoins minimaux de deux personnes pour un séjour de trois semaines. Des voyages de cette nature, sans aide, doivent être bien planifiés pour être agréables et sécuritaires. Et le plus important à mon sens est le choix du bon partenaire. Les huit personnes avec qui j’ai partagé ces voyages étaient d’excellents partenaires, mais deux sortent du lot : le regretté Serge Potvin, originaire du Lac-Saint-Jean, et mon partenaire lors de sept voyages, Bill Blatch, le « Franglais de Bordeaux ». Marchand de vin reconnu et voyageur de l’Arctique de longue date, il améliorait nos voyages avec des enseignements pratiques portant sur cette boisson « civilisée ». Nous avons couronné chacun de ces séjours avec les meilleurs crûs, du Chateau de la Tour au Cheval 16 Saumons illimités
LE MONTAGE D’UNE MOUCHE « À TUBE »
blanc. Et comme il le dit si bien : « Nous faisons maintenant partie de tout ça ! » J’ai conservé d’excellents souvenirs des randonnées en territoire vierge, rencontrant tous ses habitants, des sic-sic (spermophiles) propriétaires de notre camp aux grizzlis, caribous, bœufs musqués et loups. Mais les souvenirs les plus impérissables sont nos plongées pour danser avec l’omble chevalier. J’ai tenu un journal quotidien durant tous ces voyages. La dernière entrée, en date du 31 juillet 2004 dans les Escape Rapids, va comme suit : « À 21 h 45, nous sommes assis à notre camp, sur la rive qui offre une vue sur les rapides. Le côté est du canyon est éclairé par les doux rayons du soleil du soir, et montre toutes ses couleurs : un basalte gris foncé auquel s’ajoutent les accents délavés de certains minéraux affaissés par l’infiltration des eaux et l’orangé rouillé des lichens. Nous avons mangé du gurabija, le dessert que ma mère prépare pour chacun de mes voyages, et avons bu de l’armagnac. C’est vraisemblablement la dernière fois que je m’assois ici, alors j’essaie de me souvenir de tout. L’odeur des fleurs de la toundra, le son des rapides, le pépiement des hirondelles nourrissant leurs petits tout près de nous, la chute à Sophy’s Creek et sa crête haute de 60 mètres. Sera-t-il possible de montrer ceci à mes petits-enfants Adam et Sophie, et cette pure beauté sauvage sera-t-elle la même ? »
Échos des régions
L’histoire d’un
CHENAL Par Gaétan Soucy et Yvon Côté
L
a rivière du Petit Pabos, longue de 50 km, est accessible au saumon sur environ 30 % de son parcours. Avec un bassin hydrographique de seulement 210 km2, elle se classe parmi les petites rivières à saumon du Québec. Aucune comparaison qui tient avec la Matapédia, la Cascapédia ou la Bonaventure. Elle est plutôt du calibre de la rivière Malbaie près de Percé, et est un peu plus grande que la rivière Port-Daniel. Quelle que soit son envergure, elle n’en demeure pas moins l’une des belles rivières de la Gaspésie et contribue à la diversité des rivières à saumon de cette région. Ses eaux aux reflets turquoise sont d’une limpidité exceptionnelle. Nos amis anglophones disent que ses eaux sont claires comme du gin et les francophones disent qu’elle est claire comme de l’eau de roche.
Un peu d’histoire L’histoire de cette rivière rappelle en plusieurs points celle de plusieurs rivières de la Gaspésie. En effet, comme pour la plupart des rivières à saumon de la région, il y avait autrefois un club de pêche appartenant à des citoyens américains. En 1946, le nombre de saumons ayant grandement diminué, les propriétaires du club abandonnèrent le bail de location qu’ils détenaient du gouvernement du Québec pour la pêche sportive sur ce territoire. La rivière revenait donc au domaine public. On verra par le tableau joint à cet article l’évolution de la gestion de cette rivière depuis 1947.
Évolution des modalités de gestion de la rivière du Petit Pabos Période
Statut de gestion
1947 à 1979
Rivière publique libre
1980 à 1983
Rivière incluse dans la Zec des Anses
1984 à 1989
Rivière publique libre
1990 à 1996
Rivière fermée à la pêche
1997 à maintenant
Zec-saumon gérée par le RRTRP
Les modifications de l’estuaire Comme sur la plupart des rivières de la Gaspésie, on y a pratiqué le flottage du bois. À cette fin, des estacades ont été construites dans l’estuaire de la rivière afin de retenir le bois jusqu’au moment de son expédition par barges, ou plus tard par camion. Une fois les opérations de flottage du bois abandonnées, les estacades y ont été arasées, mais les fondations de pierre sont demeurées enfouies dans le lit de l’estuaire. Les hydrauliciens estiment que ces structures, en favorisant la rétention des sédiments, auraient contribué à diminuer la profondeur générale de l’estuaire. Enfin, comme plusieurs rivières de la région, l’estuaire de la Pabos est délimité par une flèche littorale sur laquelle passe la route de ceinture de la Gaspésie. L’embouchure de la rivière est bien entendue enjambée par un pont. En fait, le pont actuel est le troisième pont de l’histoire de cette partie de la rivière. Le pont actuel, construit en 1960, est localisé à quelques mètres en aval du précédent.
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TRAVAUX RÉALISÉS EN 2001 ENLÈVEMENT DE LA DIGUE CONSTRUITE EN 1998 IMPOSITION D’UNE RESTRICTION À L’ÉCOULEMENT EN RIVE OUEST AFIN DE DIRIGER LE DÉBIT PRÉFÉRENTIELLEMENT VERS LA RIVE EST CHENALISATION FORCÉE DE L’ÉCOULEMENT VERS LA RIVE EST DANS LA PARTIE BASSE DE L’ESTUAIRE
TRAVAUX RÉALISÉS EN 1998 CONSTRUCTION D’UNE DIGUE EN RIVE EST POUR FORCER LA TOTALITÉ DU DÉBIT EN RIVE OUEST
TRAVAUX RÉALISÉS À L’HIVER 2004-2005 RECTIFICATION DE LA CHENALISATION POUR ORIENTER LE DÉBIT VERS LA RIVE EST DE LA PARTIE BASSE DE L’ESTUAIRE
Le Comité de la rivière Pabos Le Regroupement pour la restauration des trois rivières Pabos (RRTRP) a été créé en 1990. Avant même d’obtenir la gestion de cette rivière, le Regroupement s’est investi dans la protection et l’ensemencement de cette rivière en utilisant la technique des incubateurs à courant ascendant. La mission que s’est donnée le RRTRP est de protéger le saumon de cette rivière contre le braconnage et de développer la pêche sportive. En effet, au fil des ans, bien que les montées de saumon étaient de moins en moins abondantes en rivière, le potentiel salmonicole s’est toujours maintenu grâce à des habitats exceptionnels selon les descriptions des biologistes. L’eau y est de qualité, et on y trouve des fosses et des zones de reproduction en abondance. La rivière s’écoule en pente douce sur un lit de gravier, de cailloux et de galets, qui offrent abris et nourriture pour les alevins et les tacons.
Une contrainte à la migration du saumon Lorsque le RRTRP a commencé à s’intéresser à la rivière du Petit Pabos, les montées de saumons présentaient déjà depuis plusieurs années un aspect problématique. En effet, bien que chaque année de nombreux saumons étaient présents à l’embouchure de la rivière dès la mi-juin, comme ils l’ont toujours fait de mémoire d’homme, ils tardaient cependant à monter vers les fosses de la rivière. 18 Saumons illimités
LE CANAL CREUSÉ DANS L’ESTUAIRE (LE BAS DE L’IMAGE CORRESPONDANT À L’AVAL). LA PRÉSENCE D’UN FORT COURANT RETARDE LA PRISE DES GLACES EN HIVER ET ACCÉLÈRE LE DÉGEL AU PRINTEMPS. LES SÉDIMENTS EXTRAITS DE LIT DE L’ESTUAIRE. ON DISTINGUE LES BLOCS DE BÉTON ARMÉ QUI ONT ÉTÉ LAISSÉS DANS LE FOND LORS DU DÉMANTÈLEMENT DE L’ANCIEN PONT. UNE PELLE MÉCANIQUE JUSTE EN AMONT DU PONT DE LA ROUTE 132 EN TRAIN DE RECREUSER LE CHENAL DE L’ESTUAIRE.
Deux explications ont été avancées pour expliquer le retard de migration observé sur la rivière du Petit Pabos. Certains biologistes ont dit que vu le faible calibre de cette rivière, il s’agissait probablement d’une rivière à montée tardive, comme il s’en voit ailleurs (la rivière Port-Daniel par exemple). Dans ce genre de rivière, le saumon, même s’il est présent à l’embouchure tout au long de l’été, n’y monte qu’à la faveur des crues de fins d’été ou d’automne. D’autres estimaient que l’absence d’un chenal profond concentrant la majeure partie de l’écoulement des eaux estuariennes constituait un élément peu propice à la migration du saumon, ce qui pourrait expliquer les retards de migration dans certaines conditions hydrauliques. Quant aux pêcheurs locaux, ils savaient par la tradition orale qu’à l’époque du club des Américains, le saumon remontait cette rivière au début de l’été, soit dès son arrivée à l’embouchure. En outre, les anciens du village de Pabos disaient que ce sont les opérations de flottage du bois et surtout la construction du nouveau pont qui avaient modifié l’estuaire de la rivière et qui étaient responsables de la modification du comportement du saumon. Le RRTRP a donc mandaté des firmes d’ingénieurs et de biologistes-conseils pour obtenir une expertise technique indépendante sur le sujet. Les observations sur le terrain ont bien entendu permis de confirmer l’absence d’un chenal d’écoulement préférentiel des eaux de l’estuaire, dont l’effet négatif sur la migration du saumon se manifestait surtout en période d’hydraulicité faible à moyenne. De l’avis des ingénieurs, l’aménagement d’un chenal préférentiel était techniquement possible, sans toutefois offrir de garantie de résultat sur la migration du saumon. Il était en effet impossible de confirmer scientifiquement si la rivière du Petit Pabos était une rivière à montée tardive sans rapport avec les conditions estuariennes, ou si elle était une rivière à montée hâtive présentant un problème d’habitat suite à une dégradation du
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Écart des montaisons 1997 à 2001
Rivière à montée tardive ou problème de chenal
Comparaison des montaisons de 2002 à 2005 versus 1997 à 2001, sur la rivière Petit Pabos
Nombre de saumon
Les pêcheurs avaient noté que lors des années à bas niveau d’eau en début de saison, le saumon ne remontait la rivière qu’à la fin juillet, voire en août. Le confinement des saumons à l’embouchure de la rivière donnait même lieu à une activité de braconnage inacceptable et d’après nos observations, à une déprédation inhabituelle par les phoques patrouillant régulièrement près de l’embouchure de la rivière. Par contre, lors d’épisodes de coups d’eau ou durant les années à fortes précipitations, le saumon n’hésitait pas à progresser vers l’amont de la rivière.
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Période de montaison
milieu estuarien. Cependant, les avis techniques indiquaient qu’il n’y avait pas de contre-indication biologique à aménager un chenal principal dans cet estuaire, dans la mesure où les estuaires des rivières à saumon présentent normalement un ou deux chenaux d’écoulement préférentiel.
Les diverses tentatives À la suite d’une première étude conduite en 1997, le RRTRP a fait construire une digue de déviation sur la branche est de l’estuaire, de manière à forcer l’écoulement de l’eau douce de la rivière vers le côté ouest de l’estuaire. La raison ayant motivé ce choix était la suivante : à une certaine époque le gros du débit de la rivière s’écoulait en rive ouest de l’estuaire; en outre en concentrant l’écoulement de ce côté, on espérait qu’il en résulterait un débit d’appel qui serait rapidement détecté par les saumons présents à l’embouchure. Après quelques années, vu l’absence de réponse du saumon à cet aménagement, il a fallu se rendre à l’évidence que cette solution théoriquement valable n’était pas concluante. Une seconde étude a été faite en 2000 et un tout autre concept d’aménagement a été mis en place. Plutôt que de tenter de reconstituer l’écoulement de l’eau selon les conditions qui prévalaient il y a fort longtemps, le nouveau scénario d’aménagement proposait plutôt de tirer profit de la nouvelle configuration de l’estuaire qui s’est établie en réponse aux modifications apportées par les usages faits par l’homme de cet environnement. Selon ce scénario, il fallait laisser passer un maximum de débit en rive est de l’estuaire puisque le chenal de cette branche de l’estuaire semblait Saumons illimités 19
alors plus important que le chenal de la partie ouest. Il fallait ensuite prolonger vers l’embouchure un chenal existant sur une courte distance dans l’estuaire, en le dirigeant vers la rive ouest tout près de l’embouchure. Un chenal de 300 mètres a ainsi été creusé en 2001. L’année suivante, nous avions prévu un programme de suivi incluant l’observation des mouvements du saumon à l’embouchure et le suivi bathymétrique du nouveau chenal. Nous avons fait des observations sur le comportement du saumon en aval du chenal, près du pont de la voie ferrée. Dès l’été suivant le creusage du chenal nous avons constaté son bon fonctionnement par des remontées plus hâtives (voir Saumons illimités # 65). Mais à partir de la deuxième année et surtout de la troisième année (2006), nous avons constaté que la partie nouvellement creusée du chenal se remplissait progressivement de sédiments, le rendant de moins en moins attrayant pour le saumon.
Un troisième essai Malgré ce succès mitigé, nous étions forts des résultats obtenus en 2002 et demeurions persuadés que la solution résidait dans l’implantation d’un chenal permanent près de l’embouchure de la rivière. En effet, la présence d’un seuil rocheux en rive ouest tout près du pont était peut-être l’explication au phénomène de sédimentation du chenal nouvellement creusé. Après avoir consulté des gens qui ont bien connu l’estuaire dans les années 60, certaines remarques nous ont mis la puce à l’oreille. Selon les pêcheurs commerciaux du temps, lesquels amarraient leurs bateaux dans la partie en aval de l’estuaire, le chenal principal de la partie inférieure de la rivière se situait autrefois du côté est du pont de la route 132. Ils nous ont aussi fait remarquer que les changements les plus importants de l’écoulement des eaux de l’estuaire se sont produits après la reconstruction du pont de la route 132. De plus, certaines personnes ayant travaillé à la démolition de l’ancien pont nous affirmaient qu’une partie des anciens piliers aurait été dynamitée et qu’une quantité appréciable de matériaux auraient été laissés sur place. Effectivement, on peut voir encore aujourd’hui certains blocs de ciment et d’armature au fond de la baie, près du pont. Il était donc possible que la présence de ces matériaux constitue un seuil à partir duquel le fond de la rivière s’est ajusté, entraînant la disparition du chenal dans cette partie de la rivière au profit de l’étalement de la nappe d’eau à la largeur de l’estuaire. Des pourparlers ont eu lieu avec le ministère des Transports pour obtenir l’appui de cet organisme dans la réorientation du chenal vers le côté est de l’estuaire. Ce fut toutefois peine perdue. Malgré ce refus, nous avons pu
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réaliser nos travaux de creusement du chenal durant l’hiver 2004-2005. La faible profondeur d’eau et l’épaisse couche de glace à cette période de l’année nous ont permis de réaliser les travaux en hiver, ce qui minimisait de beaucoup les impacts environnementaux. Le nouveau chenal est en place depuis l’été 2005. Après quatre ans d’observation, le suivi bathymétrique annuel nous démontre que le chenal maintient sa profondeur. En outre, nous avons noté que dans sa partie supérieure, le chenal creusé est en voie de se prolonger de lui-même vers l’amont, phénomène très intéressant pour la migration du saumon. Et, en fin de compte, ce qui était le plus important pour le RRTRP, la réponse du saumon ne s’est pas fait attendre : les remontées se font plus tôt en saison, ce qui permet une meilleure gestion de la pêche sportive.
Leçons à tirer Dans ce dossier, toutes les études, les démarches et les travaux entrepris nous ont démontré que l’hydrologie et l’hydraulique sont des disciplines scientifiques très complexes, mais que les solutions pratiques relèvent parfois autant de l’art que de la science. En outre, au plan biologique, le comportement estuarien du saumon en réaction aux variations de la vitesse du courant et de la profondeur d’eau n’est pas parfaitement connu, laissant place à une large part d’interprétation et d’expérience personnelle de la part des intervenants. Enfin, la connaissance des gens qui vivent en périphérie de l’estuaire nous a été d’un précieux secours, même si à l’occasion ces présentaient présentèrent un caractère anecdotique. Il a aussi fallu tenir compte de la réglementation environnementale qui vise à protéger les milieux dans un état le plus naturel possible, même si l’état actuel de l’estuaire est le résultat d’un ajustement à des modifications apportées par l’homme au cours des siècles. En effet, cette réglementation a aussi pour but de minimiser les impacts potentiels de la réalisation de travaux en milieu naturel, même s’il s’agit de travaux qui ont pour objet d’améliorer l’habitat de l’une des espèces qui vit dans le milieu naturel. En somme, il faut s’armer d’une bonne dose de patience et être prêt à tenir compte des très nombreuses considérations avant de réaliser un aménagement faunique en milieu naturel.
Note : nous remercions Jean-Louis Verrette, ingénieur hydraulicien, pour sa contribution à l’élaboration du concept d’aménagement de l’estuaire de la rivière du Petit Pabos.
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Secrets de Salmo
Didymo persiste… Qu’en sera-t-il des saumons? Étude basée sur la modification de la chaîne alimentaire de la rivière Matapédia par l’algue Didymo
Par Carole-Anne Gillis, Biologiste. Conseil de bassin versant de la rivière Matapédia et Université du Québec à Rimouski
L’algue Didymo (Didymosphenia geminata), une espèce exotique envahissante, peut former des tapis modifiant de façon importante les caractéristiques de l’habitat fluvial. À l’été 2006, sa présence fut observée dans la rivière Matapédia et sa prolifération a provoqué un véritable vent de panique chez les gestionnaires et les utilisateurs de la ressource saumon. Cette inquiétude était en grande partie causée par le manque de connaissances concernant les impacts potentiels de Didymo sur la ressource salmonicole de la rivière.
Didymo, c’est de l’histoire ancienne, non? Nous avons observé une grande variabilité dans l’ampleur de sa présence au fil des ans (2006-2007-2008). En 2007, l’algue avait un plus faible pourcentage de recouvrement qu’en 2006, mais elle a été observée sur une plus grande distance du tronçon fluvial. Quelques colonies ont été observées en 2008; elles se sont toutefois avérées être très localisées et ne représentaient qu’un faible pourcentage de recouvrement (ce qui pourrait être expliqué par les conditions hydrologiques). En effet, 2006 fut une année de faible débit, ce qui a favorisé une prolifération excessive de l’algue. Toutefois, en 2007 et 2008, la fonte des glaces a créé une forte abrasion du lit de la rivière, limitant ainsi l’apparition des tapis de Didymo. De plus, des précipitations abondantes et fréquentes ont occasionné plusieurs crues. Celles-ci ont contribué à augmenter le débit et la turbidité de la rivière et donc limiter le développement algal. Si cette année les conditions de débit sont favorables, il est possible qu’on assiste à une croissance algale comparable à celle de 2006.
Étude scientifique de l’impact de Didymo sur la chaîne alimentaire L’algue Didymo peut modifier plusieurs composantes physiques de l’habitat aquatique et, en conséquence, l’abondance et la proportion d’insectes aquatiques. Quelques études antérieures ont fait état de l’impact de Didymo sur le fonctionnement de l’écosystème en altérant la distribution des individus à la base de la chaîne alimentaire. Ainsi, à l’automne 2006, le Conseil de bassin versant de la rivière Matapédia (CBVRM) a effectué un échantillonnage de larves d’insectes aquatiques, principales ressources alimentaires des saumons juvéniles.
TAPIS ALGAL
Source : Conseil de bassin versant de la rivière Matapédia
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Source : MDDEP
ÉCHANTILLONNAGE DES LARVES D’INSECTES AQUATIQUES. BRASSAGE DES SÉDIMENTS PENDANT 30 SECONDES. LE TOUT EST RÉCOLTÉ DANS LE FILET.
Source : Conseil de bassin versant de la rivière Matapédia
Dans le but d’étudier les modifications que causerait Didymo à l’écosystème aquatique, trois stations exemptes de Didymo, mais potentiellement favorables à sa croissance et sa prolifération, ont été sélectionnées. Selon les connaissances acquises, les stations ont été choisies en fonction du substrat, de la vitesse du courant, de la profondeur et de la luminosité correspondant aux préférences de l’algue. De plus, les sites étaient localisés à proximité de fosses à saumons afin que la probabilité d’introduction soit élevée. En effet, le vecteur principal de propagation des cellules serait l’équipement de pêche « contaminé », en particulier les bottes de pêche à semelle de feutre. Les stations sont localisées dans les municipalités de Causapscal et de Sainte-Florence, soit près de la fosse Wyer’s (88) et de celle du Pont-duChemin-de-Fer (82). En 2007, l’algue était présente sur la presque totalité du tronçon fluvial principal de la Matapédia. Comme prévu, les stations présentaient des colonies actives d’algues Didymo. Il a alors été possible d’étudier l’impact du tapis de cette algue sur la structure de la communauté de larves d’insectes benthiques (c.-à-d. habitant le fond du cours d’eau) présente sur le lit de la rivière en comparant leurs distributions avant (2006) et après (2007) l’arrivée de l’espèce envahissante.
Principaux résultats de l’étude Une plus forte densité de larves d’insectes aquatiques a été prélevée en 2007 (en présence de Didymo), comparativement à 2006 (en son absence). Toutefois, l’abondance de larves est très variable d’année en année en fonction des conditions hydrologiques et chimiques de la rivière. Pour le moment, nous ne pouvons conclure que didymo augmente leur densité dans la rivière Matapédia. Selon quelques études internationales réalisées sur l’effet du tapis de didymo, une modification de la communauté de macroinvertébrés (c.-à-d. les larves) en termes de quantité peut modifier la diète des poissons et, par conséquent, leur condition physique. De plus, le comportement associé à la quête alimentaire pourrait même être influencé par la présence de Didymo, puisque la disponibilité de la nourriture en serait affectée.
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1 RMAB1 2006
2 RMAB2 2006
3 RMAB3 2006
Sites
4 RMAB1 2007
5 RMAB2 2007
6 RMAB3 2007
10000
9000
8000
Nombre d'invertébrés/ m
2
7000
6000
2006 5000
2007 4000
3000
2000
1000
0 1
2
3
Sites
NOMBRE D’INVERTÉBRÉS PAR UNITÉ DE SURFACE À CHACUN DES SITES POUR LES DEUX ANNÉES D’ÉCHANTILLONNAGE. ON REMARQUE QU’EN PRÉSENCE DE DIDYMO (2007), LA DENSITÉ ÉTAIT MULTIPLIÉE PAR PRÈS DE QUATRE COMPARATIVEMENT À 2006 (AVANT SON INTRODUCTION).
IMAGES DE LARVES D’INSECTES AQUATIQUES LARVE D’INSECTE AQUATIQUE : PERLIDAE (PLÉCOPTÈRE)
LARVE D’INSECTE AQUATIQUE : HYDROPSYCHIDAE (TRICHOPTÈRE)
Photo : Carole-Anne Gillis
Photo : Carole-Anne Gillis
LARVE D’INSECTE AQUATIQUE : CHIRONOMIDAE (DIPTÈRE)
Photo : Robert Chabot
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Les tendances observées entre les deux années permettent de conclure que la présence du tapis algal crée une modification de la structure de la communauté de larves aquatiques. En effet, avant la prolifération de l’algue, il y avait une plus grande proportion d’éphéméroptères, plécoptères et trichoptères (%EPT) que de chironomides. L’indice de Simpson permet de caractériser la diversité et la répartition homogène des différents types de larves retrouvées en milieu aquatique. En 2006, il y a une grande diversité et une équivalence entre les différents types de larves puisque les valeurs sont près de 1. En 2007, la disproportion entre les types diminue la valeur de l’index, décrivant à nouveau la domination des chironomides lorsque Didymo est présente.
100
90
80
Pourcentage (%)
70
60
%EPT
50
%Chironomidae
40
30
20
10
0
1 RMAB1 2006
2 RMAB2 2006
3 RMAB3 2006
Sites
4 RMAB1 2007
5 RMAB2 2007
6 RMAB3 2007
PROPORTIONS D’EPT ET DE CHIRONOMIDES SELON LA PRÉSENCE DE DIDYMO. DIDYMO DIMINUE CONSIDÉRABLEMENT LE POURCENTAGE D’EPT EN RAISON DE LA PRÉDOMINANCE DES CHIRONOMIDES DANS CHACUNE DES STATIONS. LA PRÉSENCE IMPRESSIONNANTE DE CES DERNIERS DÉCRIT UN STRESS ENVIRONNEMENTAL. 10000
HOMOGÉNÉITÉ DE LA COMMUNAUTÉ DE LARVES D’INSECTES 9000 AQUATIQUES SELON L’ANNÉE D’ÉTUDE. 8000
7000
2006
2007
RMAB1
0,88
RMAB2
0,95
RMAB3
0,86
Nombre d'invertébrés/ m
2
Site d’étude
Index d’homogénéité de Simpson
6000
0,63 0,57
5000
0,16
4000
L’étude réalisée sur les larves présentes au niveau du lit du 3000 cours d’eau permet de prédire l’effet de Didymo sur les larves 2000 Les saumons qui seront ultimement emportées par le courant. juvéniles s’alimentent presque exclusivement d’organismes pro1000 venant de la dérive. Si cette base est modifiée, une cascade d’interactions positives ou négatives aura lieu 0au niveau des 1 maillons supérieurs tels que le saumon atlantique. Une étude comparative du genre est la première à évaluer l’impact de Didymo sur les macroinvertébrés dans l’est du Canada. D’ailleurs, les impacts associés à la présence de Didymo peuvent demeurer présents même sans présence cellulaire, puisque les tapis sont très résistants. L’intégrité de l’écosystème aquatique de la rivière Matapédia est donc susceptible d’être affectée par la présence de cette espèce envahissante.
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Entamons la recherche « Saumon-Didymo » au Québec Plusieurs rivières de la Gaspésie présentent des conditions idéales pour la prolifération de cette algue et il s’avère crucial de mieux comprendre les effets de Didymo sur les différents 2006 stades de vie du saumon atlantique. Puisque l’économie locale de la vallée de la Matapédia est fortement dépendante de2007 la pêche sportive du saumon atlantique, il est nécessaire d’évaluer l’impact sur le recrutement de cette espèce prisée. Pour le moment, aucune étude ne confirme l’impact négatif ou positif de Didymo sur le succès de pêche ou la densité de juvéniles de saumon atlantique. Toutefois, quelques stocks de salmonidés, tels que la truite brune, ont connu une diminution marquée mettant en cause cette algue envahissante. 3 2 Sites Ainsi, au cours des deux prochaines années, un projet de recherche de l’INRS-ETE tentera d’évaluer l’impact de l’algue envahissante Didymosphenia geminata sur la densité, la sélection d’habitats et la croissance des saumons juvéniles dans le bassin versant de la rivière Matapédia. Plus précisément, le projet de recherche vise à évaluer l’impact potentiel de Didymo sur la sélection d’habitats des juvéniles, ce qui permettra de déterminer si les jeunes saumons recherchent ou évitent les habitats où prolifère Didymo. De plus, il vise à déterminer l’effet potentiel de Didymo sur le régime alimentaire et la croissance des saumons juvéniles. Les résultats de ce projet permettront de mieux évaluer les conséquences à court et moyen termes de la présence de Didymo sur la production de saumons juvéniles.
LES COULISSES DE LA
RÉDACTION
À
pareille date l’an dernier, nous cherchions une idée originale pour marquer le 23e souper de la Fédération tout en donnant un coup de chapeau au 400e de la ville de Québec. Marquer le pas pour la FQSA tout en contribuant de façon remarquable à un événement historique, c’était le défi à relever.
Un livre sur le saumon? Une histoire à raconter! Spontanément, dans la frénésie du moment, tous acquiescent sans vraiment poser de questions! Des réunions de planifiON LE SAU40M re oi st cation s’organisent. Le fil conducteur est esquissé autour d’un titre qui fait consensus. 0 ans d’hi Québec au n io ss pa On parle d’abord des sujets à aborder pour témoigner de la réalité historique du et de saumon au Québec, sous des formes qui traduisent l’engouement et les passions que cette ressource soulève chez nous depuis quatre siècles. Passion pour une ressource alimentaire fabuleuse, apparemment sans limite dans un pays d’abondance; passion régionale; passion de frontières; passion d’appartenance; passion de conservation, de recherches, de collaborations et de contrôles entre les utilisateurs pour en assurer la pérennité... Bref, un survol de toutes ces passions dans un livre accrocheur qu’on lira comme une référence, comme un témoignage crédible. Quelque chose de plaisant, ni trop long et ni trop compliqué, mais qui fera époque. Le contenu des chapitres est circonscrit, les scribes sont ciblés : c’est le départ sur l’envolée! Mais c’était sans vraiment compter sur les aléas et les exigences liés à une pareille aventure, lesquels n’ont pas manqué de se révéler peu de temps après le coup d’envoi de la production : disponibilité et implication des gens, budget et recherche de financement et de commanditaires, contrôle du contenu et de la production des chapitres dans le cadre d’échéanciers serrés, approbation et révision des textes, choix des illustrations... Ouf! De quoi en décourager plus d’un! Mais on découvre aussi la valeur et l’inédit que recèle un tel document, ce qui donne des ailes aux éditeurs.
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Et que dire de ce syndrome de la page blanche qui guette tous les concepteurs et rédacteurs de documents? Dans mon cas, la première page du chapitre 7 est demeurée blanche plus longtemps que prévu. J’étais fébrile, j’ai lu plein de choses sur la gastronomie, et sans être un expert, j’aurais pu parler des grands chefs, de Talleyrand, du château de Valençay, des grands banquets des cours des rois et des tsars, de Curnonsky, des Trois Gros, etc. Mais je me serais alors complètement éloigné de l’objectif visant à démontrer simplement comment, au Québec, nous avons pris beaucoup de temps à développer un traitement culinaire méritant pour les poissons en général et pour le saumon en particulier. Je voulais aussi démontrer comment, grâce aux techniques de production, de conservation, d’enseignement et de communication, nous sommes actuellement dans une sphère de choix et de goûts qui forcent les passions culinaires (qu’elle soit amérindienne, traditionnelle ou dite fine et française) à exploser pour le plus grand plaisir de tous et toutes. Le sentiment du travail accompli se mesure, je crois, au plaisir que chaque auteur ressent et exprime en feuilletant ce document, où la passion des sujets traités transparaît nettement! Quelle belle histoire, aussi! Gilles Shooner 22 janvier 2009
La genèse d’une idée En 1985, lors d’un colloque à Bergerac en France sur la restauration des rivières à saumon, j’ai visité une grotte où, il y a trente mille ans, un homme a sculpté un saumon. C’est là le plus vieux témoignage de la relation entre l’homme et le poisson – et pas n’importe lequel, puisqu’il s’agit d’un superbe saumon. Dès ce moment, j’ai senti le besoin de faire connaître à mes concitoyens les diverses passions que le Salmo salar suscite chez nous. Tout pouvait partir de ce témoignage! Il nous donnait l’origine de la pêche commerciale et sportive, celle de sa gastronomie, de l’inspiration artistique et de l’intérêt scientifique pour son écologie... Il y avait là de quoi faire une exposition, un livre, et un documentaire. En 2008, année du 400e anniversaire de la ville de Québec, j’ai été coprésident du comité organisateur du souper-bénéfice de la Fédération québécoise pour le saumon 28 Saumons illimités
atlantique (FQSA). Il me semblait essentiel de célébrer cet événement d’une manière particulière. J’ai alors proposé à Yvon Côté d’éditer un livre sur les passions de l’homme pour le saumon. Yvon avait lui aussi pensé à un ouvrage en partie semblable à ma proposition. « Le saumon, 400 ans d’histoire et de passion au Québec » est donc le fruit de nos cogitations d’équipe. Pour réaliser ce livre haut en couleur de 229 pages, nous avons pu compter sur un collectif d’auteurs chevronnés. Ils ont travaillé de façon remarquable malgré des délais très contraignants. Je tiens à les remercier publiquement pour leur création unique et bénévole. Cette œuvre appartient à tous ceux et celles qui souhaitent la pérennité du saumon atlantique. Les fonds recueillis serviront d’ailleurs à la préservation de l’espèce. Bernard Beaudin 21 janvier 2009
L’idée que nous a présentée Bernard Beaudin de participer à la rédaction d’un livre sur les multiples facettes qui relient le saumon atlantique à l’Homme m’a emballé dès le départ. Je rêvais depuis longtemps d’écrire un jour sur ce sujet, et l’occasion d’associer la FQSA aux fêtes du 400e anniversaire de la fondation de la ville de Québec était trop belle pour que je la laisse passer. Ma formation de biologiste et mes nombreuses années de travail pour le gouvernement du Québec comme biologiste responsable du dossier saumon m’ont particulièrement bien préparé à la rédaction des chapitres sur les connaissances scientifiques et sur la place du saumon dans l’histoire du Québec. Pour la rédaction de ces deux chapitres, je m’étais donné un double défi. D’abord, celui de faire le lien entre d’une part la connaissance traditionnelle des Amérindiens sur le saumon et la place occupée par cette espèce de poisson dans leurs sociétés, et d’autre part ce que nous savons aujourd’hui et ce que notre société fait de cette ressource naturelle. Puis, comme second défi, il fallait synthétiser et vulgariser ces sujets pour qu’ils s’insèrent de façon équilibrée avec les autres chapitres du livre. Par ailleurs, ayant participé avec Bernard à la coordination des diverses étapes de la production du livre, j’ai eu l’occasion de discuter et travailler avec chacun des nombreux auteurs associés à ce travail, de même qu’avec les
réviseurs linguistiques et les personnes ayant contribué aux illustrations et à l’infographie du livre. La production de ce livre fut un travail d’équipe, mais aussi une activité nouvelle et emballante pour moi. Je souhaite que le résultat plaise à tous ceux et celles qui veulent comprendre un peu mieux les multiples dimensions de cette ressource dont nous avons hérité et que nous avons le devoir de laisser en héritage aux générations futures.
devenait soudainement si clair – limpide comme les eaux de la Bonaventure – à la lueur de l’entretien que j’eus cette journée-là... Par la suite, de nombreux contacts se sont multipliés afin de mener à bien mon projet : institutions muséales, artistes, fondations diverses, et j’en passe. Aussi constatai-je avec émerveillement l’ampleur du travail fourni par toute une équipe, lorsque mon travail fut intégré au corpus qui allait devenir Le saumon, 400 ans d’histoire et de passion au Québec. C’est à ce moment seulement, je crois, que j’ai véritablement compris ce que représentait la somme de l’effort fourni par l’ensemble des rédacteurs – pour le plus grand plaisir des lecteurs.
Yvon Côté 19 janvier 2009
Marc-Antoine Jean 19 janvier 2009
Le saumon, des gens de passion au Québec
Le Saumon, 400 ans d’histoire et de passion au Québec : une expérience passionnante
Lorsque la FQSA a annoncé qu’elle réaliserait un livre, je savais que la charge de travail augmenterait de façon colossale dans mon petit bureau de la rue Racine, à Québec. Mais quelle ne fut pas ma surprise d’apprendre que Bernard et Yvon allaient me demander de rédiger un chapitre entier sur l’art! Bien évidemment, j’acceptai. Dès le début, plusieurs problèmes se posèrent. D’une part, on me parlait de toutes ces babioles à connotation artisanale – horloges, sculptures de cheminée, saumons naturalisés, vaisselle à l’image de la bête, et j’en passe! Et puis il y avait la peinture… Puisqu’il était impensable d’envisager un texte cohérent traitant de tous ces sujets à la fois, j’avais un choix à faire. Et il m’apparaissait déjà bien évident que j’allais replacer les images peintes des rivières à saumon du Québec dans la grande histoire de l’art du paysage au Canada. Cette tâche m’apparaissait toutefois aussi grandiose et colossale que les vastes plaines de Verner… Du coup, je me retrouvai par la force des choses au point où j’étais il n’y a pas si longtemps encore, alors que j’arpentais les rayons de la bibliothèque de l’Université Laval pour mes travaux de recherche au baccalauréat. Cela me permit d’ailleurs de renouer avec mon amour perdu (et maintenant renouvelé) pour l’art. Le véritable choc est toutefois arrivé un peu plus tard, lorsque je rencontrai St-Gilles dans son atelier pour lui faire part de mon projet de rédaction. Je me sentais privilégié d’avoir ce contact avec l’artiste, de découvrir ses idées sur l’art et de savoir où il se plaçait lui-même dans la tradition du paysage. J’étais arrivé bien préparé afin d’entretenir une conversation intéressante avec l’homme, mais tout
Quand Bernard Beaudin et Jean-Pierre Mailhot m’ont rencontré un midi de février 2008 pour me présenter le projet « Le saumon, 400 ans d’histoire et de passion au Québec », ils n’ont pas eu besoin d’insister pour me convaincre de collaborer à la rédaction d’un chapitre de ce livre. Dès le départ, le projet m’a plu en raison de son rapprochement avec les fêtes du 400e de Québec. Le plan de travail présenté par Beaudin et Mailhot m’a séduit immédiatement. Faut dire que ces deux bougres, qui ont œuvré à tour de rôle comme président de la Fédération Québécoise du saumon atlantique (FQSA) il y a quelques années, avaient misé juste en choisissant les thèmes abordés dans chaque chapitre. La liste des collaborateurs potentiels qu’ils m’ont alors présentée m’indiquait hors de tout doute que le professionnalisme et la rigueur que je leur reconnaissais assureraient la qualité du produit final. Enfin, élément déterminant dans ma décision de m’impliquer dans ce projet, tous les profits de ce livre devaient être investis dans la conservation du saumon. Sans aucune hésitation, j’ai proposé de rédiger le chapitre sur la pêche sportive « Souvenirs et conseils pratiques d’un saumonier » Inspiré par la trame de fond du livre, j’ai choisi d’allier anecdotes, trucs et techniques afin non seulement d’illustrer mes propos mais aussi de faire vivre au lecteur les émotions exceptionnelles que le saumon provoque. Je savais que l’expérience serait exigeante, l’ayant déjà vécue il y a vingt ans lors de la rédaction de Saumon Atlantique, mais je savais aussi qu’elle serait riche tant sur le plan intellectuel que sur le plan humain. Je voudrais saluer tous les Saumons illimités 29
collaborateurs pour la grande qualité du travail qu’ils ont produit. Yvon Côté, l’actuel président de la FQSA, a assuré une coordination rigoureuse de l’équipe de collaborateurs et du contenu rédactionnel. Ce que cette expérience m’a apporté ? Spontanément, je dirais la satisfaction du devoir accompli, l’agréable impression d’avoir apporté ma modeste contribution à la cause du saumon, ce noble poisson qui me passionne tant. Quand, le soir du 4 décembre dernier, ma conjointe et moi avons rejoint les bénévoles de la FQSA, dans un restaurant de Québec, je n’oublierai jamais le visage rayonnant de Michel Jean quand il m’a dit dès notre arrivée ; « Viens Gérard, j’ai quelque chose à te montrer ». Il m’a alors entraîné derrière le salon, et m’a remis séance tenante une copie du livre. En le feuilletant, je me suis rappelé les innombrables heures passées devant mon ordinateur ainsi que celles passées à sélectionner des photos et je me suis dit que tout cet investissement en valait bien la peine. Car après tout, le saumon mérite bien cela ! Gérard Bilodeau 21 janvier 2009
le cadre de ma profession, je n’avais jamais eu l’occasion de contribuer à la rédaction d’un livre. Je ne suis pas un lâcheur et c’est pourquoi j’ai accepté le défi! Il a donc fallu que je fasse appel à ma mémoire et à mes archives personnelles pour produire l’ébauche du contenu de ce chapitre. De plus, il m’était tout aussi important de traiter des personnes qui ont été impliquées dans le Championnat de la FQSA, à titre d’organisateurs ou de participants, qu’il l’était de montrer l’influence de celui-ci sur l’art de la création et du montage de mouches à saumon au cours des vingt-cinq dernières années. Afin de respecter les balises imposées pour ce chapitre, j’ai dû trouver les photographies les plus représentatives pour d’une part illustrer l’évolution de l’art de la création des mouches à saumon, et d’autre part offrir la possibilité à tous d’admirer quelques-unes des plus belles œuvres montées par des passionnés du montage de mouches à saumon. Je suis très heureux du résultat d’ensemble et de ma modeste contribution à cette œuvre collective ayant fait appel à autant de passionnés de la cause salmonicole.
Mon expérience dans la réalisation du livre
André Vézina 20 janvier 2009
Quand, au début de l’année 2008, dans le cadre des préparatifs du souper-bénéfice de la FQSA du 24 octobre dernier, nous avons évoqué l’idée de réaliser un livre sur le saumon atlantique afin de contribuer aux célébrations du 400e de la ville de Québec, j’ai été particulièrement enthousiaste. Toutefois, je ne réalisais pas encore à ce moment toute l’énergie et les efforts qui seraient requis pour arriver à produire un livre de cette qualité. Nos ambitions de départ étaient plutôt modestes, avec comme objectif un livre d’une centaine de pages. Progressivement, le nombre de pages de même que la qualité souhaitée pour cette œuvre ont pris une certaine ampleur, de telle sorte qu’avec le matériel produit par les différents auteurs, nous nous sommes rapidement aperçus que nous avions un projet d’envergure à réaliser. Par ailleurs, quand on m’a demandé, en dernier recours, de rédiger le chapitre traitant de l’art de la mouche, j’ai été touché en même temps que craintif de ne pas être capable de livrer le contenu attendu, compte tenu du délai accordé et de mon inexpérience dans la rédaction de livre. En effet, bien qu’habitué à rédiger différents textes administratifs dans 30 Saumons illimités
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Échos de France
Les saumons de l’Allier et les hommes :
20 000 ans d’histoire
Conservatoire National du Saumon Sauvage, Syndicat Mixte d’Aménagement du Haut-Allier, Olivier Le Gall (CNRS IPGQ-PACEA)
Les hommes préhistoriques et le saumon Si les premiers hommes ont consommé du poisson lorsque l’occasion s’en présentait, la pêche, en tant que véritable activité, n’apparaît qu’avec l’arrivée de l’Homme moderne en Europe, il y a 400 000 ans. La pêche se développe au cours du paléolithique supérieur (aurignacien, gravetien, solutréen, magdalénien) soit 40 000 à 12 000 ans BP (avant le présent). Le saumon est régulièrement capturé par les hommes préhistoriques qui vivent sur le bassin versant atlantique dès 33 000 ans BP. Des fouilles ont révélé que l’homme de Néandertal mangeait déjà du saumon dès 200 000 ans BP (abri Vaufrey, en Dordogne), mais ce n’est qu’au cours de l’aurignacien que la pêche s’intensifie (abri Pataud, en Dordogne). La pêche au saumon est à son apogée au magdalénien (19 000 à 12 000 ans BP), surtout lors des dernières phases. La dépendance des hommes envers le saumon se traduit de différentes manières : Par une forte présence d’ossements de saumon. Il s’agit essentiellement de vertèbres trouvées dans des restes de repas. Ces découvertes nous apportent des renseignements concernant la composition du cheptel capturé : nombre d’années passées en mer, taille des individus et, lorsque les conditions s’y prêtent, la ou les saisons de capture. Cet ensemble de données nous permet de définir les conditions mises à profit pour effectuer leur pêche (migrations, frai…) ; Par la diffusion en Europe de la culture magdalénienne. Tout d’abord cantonnée dans la partie méridionale (Espagne, France), la culture magdalénienne va, suite à la libération de nouveaux territoires, se développer en direction du nord-est jusqu’en Pologne. Toutefois, les magdaléniens resteront essentiellement fidèles au bassin versant atlantique qui correspond également à l’aire de répartition de Salmo salar ; 32 Saumons illimités
Par la répartition des sites sur le territoire français. De fortes concentrations de sites sont signalées à proximité des massifs montagneux dans les parties concernées par le saumon atlantique (Pyrénées, Massif central). Au paléolithique supérieur apparaissent les premières expressions artistiques sur supports pariétaux et mobiliers. Le saumon y joue un rôle non négligeable, bien illustré par une sculpture pariétale utilisant la technique du champlevé découverte à l’Abri du Poisson (Les Eyzies de Tayac, Dordogne).
CETTE ŒUVRE D’ART PARIÉTAL, INDIRECTEMENT ATTRIBUÉE AU PÉRIGORDIEN SUPÉRIEUR (25 000 ANS), REPRÉSENTE UN SAUMON MÂLE (BEC HYPERTROPHIÉ) EN PARURE DE NOCES (TRACES DE PEINTURE ROUGE) GRANDEUR NATURE (1,05 M). CETTE SCULPTURE EN CHAMPLEVÉ A ÉTÉ DÉCOUVERTE À L’ABRI DU POISSON EN DORDOGNE. (CENTRE DES MONUMENTS NATIONAUX, AUJOULAT)
Les œuvres sur supports mobiliers sont plus nombreuses et attribuées essentiellement à la culture magdalénienne. Sur supports animaux (bois de cervidés, os…) ou minéraux, elles sont de taille réduite, mais leur nombre et leur qualité artistique révèlent l’importance culturelle du saumon pour les pêcheurs de la fin de l’époque glaciaire. Cent soixante représentations de poissons ont été répertoriées. Parmi 70 % des gravures identifiables, 54 % concernent les salmonidés. Le saumon reste dominant avec 58 représentations contre 8 seulement pour la truite.
DÉTAIL D’UNE TÊTE DE SALMONIDÉ GRAVÉ.
DESSIN D’UN SAUMON GRAVÉ.
Une autre spécificité du magdalénien supérieur est la fabrication de harpons. Ces objets de dimensions variables ont pu être utilisés pour la pêche. Bien que leur emploi pour la truite et le brochet soit plus que probable, la répartition géographique de certains harpons les associe directement au saumon. Les premiers harpons sont à barbelures unilatérales, puis ils évolueront en barbelures bilatérales. Certains de ces objets sont décorés. Les harpons ne nous apportent guère de renseignements sur la pêche. Ils ne sont que des outils utilisés pendant la phase ultime, lors de l’appropriation du poisson.
On en distingue trois types. Ce sont, d’aval en amont : De grands barrages : où sont aménagées des passes conduisant les poissons dans des « parcs » ; Des pièges à doubles structures : où les saumons se concentrent entre deux palissades ; Des constructions mixtes (bois et pierre) : dans lesquelles les migrateurs se rassemblent dans des « vasques de repos » constituées de blocs de pierre à l’aval immédiat du barrage. Dans tous les cas, les aires de regroupement des poissons permettent d’établir des postes de pêche commodes. Ces barrages-pièges sont installés sur des parties différentes des cours d’eau : grands barrages ou barrages multiples sur le cours moyen, petits barrages-pièges en amont. De telles techniques ont pu être utilisées au magdalénien supérieur. Ces hommes avaient une bonne connaissance du saumon, de technologies avancées, ainsi que des matériaux végétaux abondants que la fin des temps glaciaires mettait à leur disposition.
HARPONS MAGDALÉNIENS EN BOIS DE RENNE À UN ET À DEUX RANGS DE BARBELURES.
Pour comprendre les différentes stratégies dans leur ensemble, il faut faire appel à des exemples ethnologiques, notamment ceux de la côte pacifique d’Amérique du Nord (de San Francisco jusqu’au Nord). Avant la colonisation, des civilisations du peuple indien y fondèrent leur économie sur l’exploitation des saumons du Pacifique et mirent en place des pièges à l’efficacité redoutable fonctionnant suivant des principes très simples. Le saumon est un migrateur qui remonte les rivières pour se reproduire. Pour en capturer de grandes quantités, il faut aménager des obstacles sur les cours d’eau qu’il fréquente.
CHANTEUGES, SON ABBAYE DU XIIe SIÈCLE ET SON ABRIS SOUS ROCHE DU MAGDALÉNIEN
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Au magdalénien, l’homme a tiré profit de nombreuses ressources du saumon. Ce poisson était devenu un élément primordial de l’alimentation, de la définition des territoires et de la culture. H. Breuil disait que le paléolithique supérieur était l’« Age du renne », le magdalénien était aussi l’« Age du saumon ». Pourra-t-on payer en retour les services que ce magnifique poisson nous a rendus ? Le protéger et assurer son avenir serait un minimum…
émanant du prieuré clunisien de Lavoûte-Chilhac. Afin de conserver ce droit de pêche le cours de l’Allier, en amont de Pont-du Château, resta jusqu’au XVIIIe siècle, non navigable. En 1742, l’intendant d’Auvergne, Robert de Bonnaventure, pour permettre l’essor de la navigation marchande en amont de Brassac-les-Mines, demanda l’ouverture de pertuis et autorisa les bateliers, le cas échéant, à détruire les pélières pour le passage des bateaux.
CONSTRUCTION ALLIANT LE BOIS ET LA PIERRE FORMANT UNE VASQUE OÙ SONT RETENUS LES POISSONS.
Un privilège seigneurial Au Moyen Age, les poissons tiennent une place à part dans l’alimentation. Les religieux le consomment lors des périodes de jeûne et en abondance durant le Carême et l’Avent. Pour subvenir à leurs besoins, les communautés religieuses s’établissent à proximité des cours d’eau. En 1025, Odilon de Mercœur, abbé de Cluny, fonde sur les bords de l’Allier le prieuré de Lavoûte. L’installation d’abbayes, de monastères entraîne l’édification de moulins hydrauliques et de barrages. Ceux-ci sont alimentés en eau par une digue ou une pélière barrant toute la rivière sans aucun pertuis. Les digues constituent de véritables barrages propices à la pêche. Aussi, dès le début du Moyen Age, les rois donnèrent aux seigneurs locaux et aux communautés religieuses le droit de jouir du droit de pêche. Au XIIIe siècle, ce privilège engendra des réglementations et la pêche fut interdite à certaines périodes de l’année. Les pélières se transforment progressivement en viviers par l’adjonction, à leurs extrémités, d’avaloirs constituant un parfait piège à poissons. La digue de la Bageasse, construite en 1312 par les chanoines-comtes de Brioude, devait posséder un système de montants et descendants dont l’utilisation est confirmée dans la vallée de l’Allier, par un acte de 1421 34 Saumons illimités
LES PÊCHERIES PRIRENT JUSQU’AU XVIIIe SIÈCLE DIFFÉRENTES DISPOSITIONS.
Un mets de choix Le saumon est apprécié pour ses valeurs gustatives depuis l’Antiquité. En Gaule et en Germanie, le saumon était, aux dires de Pline l’Ancien, très recherché. Après la conquête de la Gaule, les Romains aménagèrent de véritables viviers alimentés en eau douce pour accueillir le saumon. La capture des poissons s’effectue alors au rythme des besoins alimentaires, sans considération aucune pour les cycles de reproduction et de migration qui sont, au Moyen Age, totalement méconnus. Au XIVe siècle, dans un ouvrage intitulé Histoire générale de Paris, le saumon est répertorié parmi les poissons de mer. De plus, les saumons en provenance des rivières côtières de Bretagne ou de Normandie
arrivent dans la capitale avec les poissons véritablement pêchés en mer. Dans le Dictionnaire de Trévoux, rédigé au XVIIIe siècle, le saumon est un poisson de mer pêché en rivière. Ce poisson, aux mœurs étranges pour l’époque, est très prisé et sa conservation fait l’objet de toutes les attentions. A Paris, l’hôtel Royal-Saint-Pol, résidence de Charles V au XIVe siècle, possédait un aquarium spécifique appelé saumonoir ou sauvoir. Un saloir à saumons a subsisté à Pont-du-Château. De forme conique, il est constitué de quatre blocs de pierre de Volvic reposant sur une dalle en lave. Il pouvait contenir deux à trois saumons frais destinés à la table du seigneur.
cuire, mengié au poivre jaunet ou à la cameline et en pasté qui veult pouldré d’espice ; et se saumon est salé soit mengié au vin et à la ciboule par roüelles ». L’école de médecine de Salerne, en Italie, dans L’Art de conserver sa santé, recueil de préceptes d’hygiène alimentaire et de médecine familiale, donne des conseils relatifs à l’usage des aliments et à leur qualité gustative. Dans cet ouvrage, les yeux, les intestins et la tête du saumon font références en matière de goût : « les gros intestins des saulmons…sont mangers de rois et de reines…» Le saumon est un mets cher et festif servi à la table des plus grands. Lors d’un dîner d’apparat à Lyon, en 1548, le saumon rejoint «… lamproies, tortues, soles…». En 1566, un banquet offert à Charles IX et Catherine de Médicis au manoir de Pont-du-Château propose, parmi d’autres succulentes préparations, des pâtés de saumon. L’art culinaire évolue pour arriver à son apogée au XVIIIe siècle. Alexandre Balthazar Grimod de la Reynière, écrivain et gastronome, publie deux ouvrages : l’Almanach des gourmands et le Manuel des Amphytrions où le saumon tient une place de choix, préparé au court-bouillon et au champagne. « Ainsi paré, un saumon est vraiment une pièce curieuse ; bien des gens paieraient pour le voir ».
La Révolution : fin des privilèges et début du braconnage
LE MOIS DE FÉVRIER ET LE SIGNE ZODIACAL DU POISSON DU LIVRE D’HEURES, DE JACQUES DE LANGHAC (XVe SCIÈCLE).
Les premiers recueils de cuisine apparaissent à la fin du XIII siècle, le plus connu date du milieu du XIVe siècle. Il est attribué à Taillevent, maître-queux des rois Charles V et Charles VI et intitulé Le Viandier. Dans cet ouvrage, il est préconisé de consommer le saumon soit frais, soit baconné (fumé). Vers 1393, Le Mesnagier de Paris, texte d’économie domestique écrit par un bourgeois de Paris pour sa jeune épouse, reprend les recettes de Taillevent en les simplifiant : « saumon frais soit baconné et gardez l’éschine pour rostir puis despeçiez par dalles cuites en eau et du vin et du sel au e
Le droit de pêche est un privilège réservé aux seigneurs laïcs et religieux. Dès le XIIIe siècle, les rois qui se succèdent sur le trône de France prennent de multiples ordonnances pour réglementer plus ou moins la pêche et la vente de poissons. En période de frai, la pêche est interdite, mais cette interdiction ne s’applique pas au saumon. Malgré de nombreux conflits d’intérêt avec les seigneurs locaux, les monarques, jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, limitent la dévastation des cours d’eau. En 1792, l’abolition des droits seigneuriaux, entraînant la liberté de pêche pour tous les citoyens, provoque l’accélération de la dépopulation des cours d’eau. Le Directoire et l’Empire rétablissent les interdictions royales et promulguent une loi autorisant la pêche dans les rivières navigables aux détenteurs de licence et aux personnes adjudicataires de la pêche. Pour les rivières non navigables, la pêche est confiée par « l’avis du Conseil d’Etat du 27 pluviôse an XIII, non aux communes, mais aux propriétaires riverains en compensation des inconvénients attachés au voisinage de ces rivières ».
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Cependant, ces réglementations n’enrayent pas un phénomène apparu à la Révolution : le braconnage. L’appât du gain pousse les braconniers à tirer parti toujours plus de la rivière, au détriment de la ressource. Le saumon, dont la valeur marchande ne cesse de croître, fait l’objet d’une pêche clandestine.
Pêcheur, on peut lire que le président de la Fédération des sociétés de pêche du bassin de la Loire a informé le ministre de l’Agriculture de «certains faits véritablement scandaleux qui se sont passés récemment aux environs de Brioude, où le braconnage atteint, paraît-il, des proportions inouïes «.
TRIDENT, RÂTEAU, FER ET FOËNE.
Les braconniers utilisent alors le trident pour capturer leur proie, et ce en toute impunité ! Cette pêche se déroule souvent de nuit à la fin de l’été, époque de basses eaux, ou en période de frai. Dans les gorges de l’Allier, entre Monistrol et Alleyras ou plus en aval entre Langeac et Saint-Ilpize, les braconniers utilisent soit le râteau, soit le fer. La pêche au filet, tendu de part et d’autre du cours d’eau permet d’attraper en masse des poissons la nuit. Deux autres techniques sont également utilisées par le braconnier : la dynamite et le chlorure de chaux. L’empoisonnement des rivières est un fait ancien. Au début du XVIIIe siècle, il est interdit de jeter le « poizon » dans la Loire. Les moyens répressifs de l’époque étant insuffisants, ces méthodes barbares et ancestrales vont perdurer jusqu’au milieu du XXe siècle. En 1909, le Syndicat des pêcheurs à la ligne s’insurge du fait que « plus que jamais les braconniers dévalisent la rivière ; jour et nuit, sans relâche, ces pirates de l’eau se livrent à leurs exploits, emplissent leurs paniers de vandoises et autres poissons dont la pêche est interdite, et vendent ouvertement leur butin de porte en porte le lendemain, et poussent même l’audace, comme le fait s’est produit hier encore, jusqu’à faire annoncer par le tambour de ville, la mise en vente du poisson prohibé sur la place publique ». Dans un journal parisien, Le 36 Saumons illimités
« NOS MODERNES BRACONNIERS, VOLONTAIREMENT IGNORANTS DE LA LOI – QUI NE SEMBLE D’AILLEURS PAS FAITE POUR EUX – EMPLOIENT ENCORE DES TRIDENTS PERFECTIONNÉS POUR HARPONNER NUIT ET JOUR LES SAUMONS, SURTOUT À L’ÉPOQUE DE LA FRAYE. LA CHAIR DE CES POISSONS EST CEPENDANT SANS AUCUNE VALEUR ALIMENTAIRE À CE MOMENT, ELLE EST SÈCHE, FILANDREUSE, DÉCOLORÉE ET D’UN ASPECT PEU ENGAGEANT. MAIS QU’IMPORTE AUX RAVAGEURS DE RIVIÈRE, QUI TROUVERONT TOUJOURS À SE DÉFAIRE DE LEURS POISSONS, MÊME À BAS PRIX. CES GENS NE S’ARRÊTENT PAS AUX CONSIDÉRATIONS DU MAL QU’ILS PEUVENT FAIRE, POURVU QU’ILS ACCOMPLISSENT LEUR OEUVRE DE DESTRUCTION». H. BOYER (1930)
Le XXe : un siècle de pêche sportive Dans les années 1900, un pêcheur aguerri, venu prendre à la ligne des truites, se trouva aux prise avec un saumon. Après plusieurs heures et l’aide providentielle d’un autre pêcheur, le lieutenant Dubois amena sur la berge une pièce de 21 livres. Cet exploit, relaté dans la presse locale, eut un certain retentissement. Les néophytes tentèrent d’imiter le lieutenant ; la pêche aux saumons dans le haut Allier venait de naître. Les revues spécialisées, comme La Pêche illustrée, de 1912, relayèrent l’information. Les pêcheurs professionnels commencèrent à affluer à Brioude sur le site de la Bageasse, lieu mythique de capture du premier saumon. Dans le magazine La Pêche moderne et les Sports, l’auteur parle de « rendez-vous smart. ... Il était de mode, il n’y a pas encore bien longtemps, de se donner rendez-vous en Ecosse ou en Norvège pour capturer des saumons-ablettes ! Maintenant, les touristes ne manquent pas d’inscrire sur leur carnet de voyage : Brioude ».
1994, fermeture de la pêche
LES « SPORTSMEN » REJOIGNAIENT SUR LES BORDS DE L’ALLIER LES PÊCHEURS LOCAUX.
Cette pêche sportive impliquait l’utilisation d’un matériel solide et approprié : canne en bambou, moulinet, ligne en soie, gaffe pour la capture et sac de transport pouvant contenir trois gros saumons. Plusieurs techniques de pêche furent utilisées pour la capture du poisson-roi : la pêche à la cuiller, avec des variantes locales comme la cuiller « La Bageasse » munie d’un seul hameçon triple mobile, la pêche au devon, au poisson mort, à la crevette ou à la mouche. Dans les années 1930, la pêche du saumon est en plein essor, attirant toujours plus nombreux des pêcheurs de toutes nationalités et, avec eux, touristes et visiteurs. Le saumon devient un facteur de développement économique entre Vichy et Langogne. « Ainsi, grâce à lui, notre région du Centre retient une clientèle de touristes sans interruption. Selon la saison, pour une raison de pêche ou simplement de villégiature, elle offre un attrait continuel ». Les commerces, les restaurants et l’hôtellerie se développent le long de l’Allier, à Brioude, à Prades ou à Chapeauroux. A Brioude, une saumonerie ouvre ses portes pour fumer les saumons pris dans l’Allier. « A cette époque et jusque vers 1950, ici y en a qui vivaient de la pêche à la ligne ». Guy Lescure, ancien pêcheur brivadois. Après la Seconde guerre mondiale, la pêche devient un sport et des concours sont organisés. Au cours des années 1960, l’Association protectrice du saumon pour le bassin de l’Allier et de la Loire récompense les meilleurs pêcheurs de gros saumons des départements de la Nièvre, de l’Allier, du Puy-de-Dôme et de la Haute-Loire lors d’un championnat. MARIUS DELMAS DE RETOUR DE LA PÊCHE.
Au début des années 90, on estimait à une centaine de poissons la population de saumons sur l’ensemble de l’axe LoireAllier. Cette situation conduit à la fermeture de la pêche sportive et professionnelle en 1994. Les 12 et 13 mars 1994, considérant que les pêcheurs ne sont pas responsables de cette disparition, plus de 500 d’entre eux répondent à l’appel de Jean-Claude Chavaillon (président de l’Association de Pêche sportive du Saumon d’Allier, APSSA) pour une ouverture sauvage et médiatique, malgré l’interdiction de la pêche.
« AMIS SAUMONS ON NOUS A PRIS POUR VOTRE ENNEMI N° 1 MAIS VOS SOIT-DISANT SAUVEUR VOUS CONDUIRONT DROIT À VOTRE DISPARITION…»
(PHOTOS F. CAMPAGNONI)
Les activités humaines responsables Depuis le Moyen Age, les saumons ont commencé à se raréfier dans certains cours d’eau pour disparaître ensuite totalement de bon nombre d’entre eux. Ce cycle de vie remarquable, est considérablement entravé depuis la fin du XIXe siècle par l’activité humaine croissante et la création de nouvelles infrastructures sur les cours d’eau jadis paradis du grand salmonidé. Ces entraves ont pris différents aspects, liés soit à la pêche, soit à l’aménagement lourd des rivières (barrages, navigation…), aux pollutions mécaniques (extractions de granulats), pollutions (chimiques, agricoles, industrielles, ménagères). Le braconnage, à partir de la Révolution de 1789, a eu la première incidence négative sur le dépeuplement des cours d’eau en géniteurs, notamment à la période de fraye. En parallèle , le prélèvement massif de tacons dans les filets à petites mailles, ou à la ligne, a réduit dangereusement le renouvellement de l’espèce : à la fin des années 1940 par exemple, entre Alleyras et Pont-du-Château, on estime qu’environ 80 kilos de tacons étaient détruits quotidiennement. Saumons illimités 37
EN 1998, LE BARRAGE DE SAINT-ETIENNE-DUVIGAN (HAUTE-LOIRE) A ÉTÉ DÉTRUIT CAR IL ÉTAIT, DÈS SON ORIGINE, TOTALEMENT INFRANCHISSABLE PAR LES SAUMONS.
La construction de barrages destinés à la production d’électricité, ou la création de réservoirs d’eau pour l’irrigation, a progressivement et définitivement stérilisé de nombreuses zones de frayères, et entraîné la disparition du saumon sur la plupart des rivières. De 1973 à 1980, les pêches intensives en mer, sur les zones d’engraissement du saumon, récemment découvertes au Groënland mettent en péril les stocks de géniteurs. La pêche à la ligne est également incriminée dans l’extinction de l’espèce. Mais dans des proportions nettement plus faibles. Dès 1972, l’Association Protectrice du Saumon dénonce la pêche professionnelle sur la Loire ainsi que l’utilisation de filetsbarrages ou du grands carrelets à contre-poids de plus de 5 m de côté. L’aménagement de l’estuaire de la Loire est venu couronner le tout en transformant un phénomène naturel de mise en suspension des sédiments, à la rencontre de l’eau douce et de l’eau salée, en véritable et énorme bouchon vaseux à l’intérieur duquel personne ne sait exactement ce que deviennent les saumons, à la descente comme à la montée.
Les réactions de l’homme face au déclin Si l’on attribue la découverte de la fécondation artificielle à dom Pichon, moine de l’abbaye de Réome, en 1420, c’est en 1837 que M. John Shaw utilisa en Grande-Bretagne la méthode de fécondation artificielle décrite par Jacobi en 1758. Si en France, la pisciculture à été réellement développée à partir de 1848 sous l’impulsion de M. Coste, professeur au Collège de France, c’est M. Lecoq, professeur à la faculté de Clermont-Ferrand, qui l’introduisit en Auvergne grâce à la création d’une école en 1857. On commença alors à l’utiliser comme un outil de repeuplement pour de nombreuses espèces. C’est en 1922, à l’initiative de l’administration, qu’il fut décidé déjà, de créer « la plus grande pisciculture de repeuplement d’Europe » à proximité de Brioude. Les captures de géniteurs ont débuté pour effectuer des essais en novembre 1924 puis, de 1925 à 1928, environ 1 400 000 œufs furent incubés. En 1928, des difficultés d’approvisionnement en eau tant qualitatives que quantitatives n’ont pas permis de stabuler les géniteurs et de poursuivre à la hauteur des espoirs annoncés. La production fut arrêtée en 1932. 38 Saumons illimités
Suite à la construction du barrage de Poutès, en 1943, par la Compagnie Loire et Centre, celle-ci se trouva dans l’obligation de procurer une pisciculture au service des Eaux et Forêts, et de verser une indemnité annuelle pour permettre la production de 200 000 alevins chaque année. Dès la Libération, les recherches furent entreprises en Haute-Loire pour trouver un site de construction mais, aussi surprenant que cela puisse paraître, ces recherches ne donnèrent aucun résultat.
LE PROJET DE PISCICULTURE À LA LÉPROSERIE (1948).
Face à ces hésitations concernant le choix du site de construction, c’est en 1946 que va reprendre l’idée de production d’alevins près de Brioude. De nombreux travaux sont envisagés à la Léproserie et en partie réalisés. Neuf saumons capturés le 25 juillet 1950 meurent le même jour. Suite à ces nouveaux échecs, auxquels viennent se rajouter la réorganisation des services de la pêche et l’opposition des représentants des pêcheurs eux-mêmes, la plupart des projets envisagés ne connurent pas le jour. Toutefois, les captures de saumons se poursuivront à La Bajasse. En 1953, 43 saumons ainsi capturés produisirent 400 000 œufs, dont 250 000 iront à la pisciculture de Brioude et 150 000 à la pisciculture de Riom sous la responsabilité de l’Association Protectrice du Saumon (APS). Cette association assurera en parallèle la production et le déversement d’alevins, notamment à partir d’œufs envoyés par le Québec. La Léproserie poursuivra quant à elle son activité de pisciculture jusque dans les années 60 avec plus ou moins de réussite. Depuis, plusieurs projets de salmoniculture ont été imaginés et étudiés. A nouveau, les tergiversations concernant le choix du site, les difficultés de financement, ont ressurgi,
Quel avenir pour le saumon atlantique sauvage ?
PISCICULTURE DE BRIOUDE
DÉVERSEMENT D’ALEVINS PAR L’ASSOCIATION PROTECTRICE DU SAUMON.
condamnant le projet de création d’une grande salmoniculture à rester dans les cartons. Heureusement, pendant cette phase, la salmoniculture du Conseil Supérieur de la Pêche, à Augerolles, assurera le repeuplent en saumons à partir de 1968, évitant très certainement la disparition de l’espèce sur l’axe Loire-Allier. C’est malheureusement 75 ans après avoir annoncé la création de la plus grande salmoniculture de repeuplement d’Europe, que, grâce au Plan Loire grandeur nature, la salmoniculture du Conservatoire National du Saumon Sauvage de Chanteuges fut enfin construite, et c’est en 2001 que les premiers alevins issus de cet établissement furent libérés dans l’Allier et ses affluents. Bien entendu, le repeuplement ne peut que palier temporairement les problèmes environnementaux que l’espèce rencontre. La reconquête de son habitat, s’avère absolument indispensable. Les échelles à saumon ont été inventées en 1834 en Ecosse et mises en œuvre pour la première fois dans le bassin de la Loire, sur la Vienne, en 1868. De grandes réalisations comme l’aménagement du barrage de Vichy, ont été faites, mais près de deux siècles plus tard, de nombreux obstacles ne sont toujours pas suffisamment aménagés. Des progrès ont été obtenus en matière de lutte contre la pollution, de nombreuses stations d’épuration ont été construites et la plupart semblent efficaces.
Les nombreuses actions de restauration de l’espèce (le rachat des quotas de pêche industrielle au Groenland, la fermeture de la pêche au saumon sur le bassin de la Loire, la construction de dispositifs assurant la libre circulation des migrateurs, l’effacement de certains barrages infranchissables, la construction du Conservatoire National du Saumon Sauvage à Chanteuges…) commencent à porter leurs fruits et donnent des raisons d’espérer. En effet, alors qu’en 1992 on estimait que moins de 100 saumons étaient remontés jusqu’aux frayères de l’Allier, le suivi des effectifs montre aujourd’hui que la moyenne de ces dernières années oscille entre 500 et 1 000 migrateurs. Mais la vigilance reste de mise en matière environnementale. L’avenir de Salmo salar dépend indéniablement de la poursuite – voire de l’intensification – des actions de protection et de restauration en mer comme en rivière, c’està-dire d’une volonté politique clairement affirmée ! Si le climat océanique ne se dégrade pas, comme on pourrait le craindre, amenant des modifications importantes et irréversibles des courants marins en particulier, cette espèce devrait prospérer. L’avenir du saumon atlantique sauvage, et en particulier celui de l’axe Loire-Allier, sera celui que l’Homme et ses institutions voudront bien lui donner ! Mais si nous ne sommes pas capables de transmettre à notre descendance ce poisson emblématique qui a contribué à nourrir l’être humain depuis la Préhistoire, nous pouvons sérieusement nous poser des questions sur l’avenir de l’humanité.
PASSE À POISSONS DE VICHY.
LE CONSERVATOIRE NATIONAL DU SAUMON SAUVAGE.
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Histoires de pêche
Photo : Romain Tremblay
Premier Contact
LE PAYSAGE DE LA SAINTE-MARGUERITE AUX ABORDS DE LA FOSSE 38, UN PEU EN AVAL DE BARDSVILLE.
Par Michel Trudel
I
l y a de cela plusieurs années, alors qu’avec mon ami, le regretté Ghyslain Bizier, je participais au tournage d’un film pour les soirées Chasse et Pêche Sport O’Keefe, j’avais remarqué que tous les soirs avant d’aller au lit Ghyslain s’assoyait à la table du camp et écrivait dans un cahier. Piqué de curiosité je lui demandai quel était l’objet de ses écrits. Il me répondit qu’à chacune des sorties de pêche ou de chasse, il notait dans son cahier le résumé des événements de la journée et que lorsque, plus tard, il relisait ses notes il avait l’impression de revivre son séjour. L’idée me plut et je me mis également à cette pratique. C’est en relisant mes cahiers de voyage que je me suis 40 Saumons illimités
rendu compte à quel point il avait raison. Et comme le temps passe ! Déjà plus de vingt ans que je pratique la pêche du saumon atlantique. De cette lecture me prit l’envie de partager avec d’autres saumoniers quelques unes de mes aventures sur les rivières du Québec. Bien sûr mon histoire est banale, mais peut-être pourra-t-elle faire revivre à certains d’entre vous les émotions qui nous font vibrer à la pêche de Salmo salar. Il faut dire aussi que j’ai été choyé pour mon apprentissage de cette technique de pêche car j’ai eu la chance de côtoyer des saumoniers chevronnés qui n’étaient pas avares de leurs connaissances. C’est 1987 que j’ai réellement fait mes débuts comme pêcheur à la mouche.
Durant l’été j’avais invité à la Pourvoirie du lac Duhamel quelques personnalités connues dans le domaine de la chasse et de la pêche, question de faire découvrir les beautés de ce site. Participaient à ce séjour, le coloré André Boucher et le non moins coloré Rémy Poulain qui, à l’époque, était député de Chauveau. Faisait aussi partie du groupe quelqu’un qui, sans que je le sache, allait modifier profondément mon approche de la pêche et devenir un excellent ami avec qui depuis j’ai eu le plaisir de partager moult aventures de chasse et de pêche. Il s’agit du « mouchologue » Pierre Tremblay. Pierre fut aussi celui qui m’a infecté de cette incurable maladie qu’est la « saumonite aiguë ».
Photo : Romain Tremblay
VUE AÉRIENNE DE BARDSVILLE, LÀ OÙ S’EST TENUE L’ÉCOLE DE PÊCHE.
Par une belle fin d’après-midi, alors que je le félicitais pour le magnifique brochet qu’il venait de capturer à la mouche. Pierre me demanda si j’étais un adepte de cette sorte de pêche. Je lui répondis que je possédais un modeste équipement et que j’étais un piètre moucheur. Chaque fois que j’avais rencontré un moucheur d’expérience les informations techniques que j’avais obtenues me semblaient complexes et inabordables, et comme je préfère les choses simples, je m’étais désintéressé de ce type de pêche. À mon grand étonnement Pierre me répondit que le lancer à la mouche était une technique relativement simple, et qu’en une demi-heure il pourrait faire de moi un moucheur. Il me dit aussi que si je voulais bien lui consacrer à cet effet une demi-heure au bout du quai, il m’enseignerait tout ce dont j’avais besoin afin de maîtriser cet art. Sceptique mais intrigué, j’acceptai la proposition et allai quérir mon équipement de pêche à la mouche. Pierre m’expliqua de façon simple et claire les principes physiques qui régissent le fonctionnement d’une canne à moucher. Il me guida dans mes premiers lancers,
m’indiquant les erreurs commises par les débutants et me donnant des trucs pour corriger ces erreurs. Le tout d’une manière conviviale et détendue. Une demi-heure plus tard Pierre me dit : ‘’Regarde, la demi-heure que je t’avais demandée s’est écoulée et déjà tu étends facilement entre 35 et 45 pieds de soie ‘’ J’étais ébahi, il avait raison. Alors toute la soirée, inlassablement, j’ai longé les berges du lac Duhamel en lançant ma mouche. Je n’ai capturé aucun poisson ce soir-là mais je n’y portai aucune attention, j’étais totalement concentré à apprivoiser ma canne. Bien sûr mes lancers étaient loin d’être parfaits et certains d’entre eux furent même désastreux, mais de lancer en lancer ma maîtrise et ma confiance s’amélioraient. Lentement je découvrais le plaisir d’étendre la soie. Je venais de franchir une autre frontière du plaisir de la pêche. L’hiver suivant ce séjour mémorable, Pierre, avec qui je m’étais lié d’amitié, m’initia à l’art du montage de mouche, activité qui vingt ans plus tard contribue toujours à agrémenter mes hivers.
Le printemps venu, Pierre m’informa qu’il organisait depuis quelques années une école de pêche au saumon atlantique, école qui se déroulait au début de l’été sur la rivière Sainte-Marguerite. Il me demanda si je souhaitais connaître cette pêche et m’invita à participer à son école. Je ne savais quoi répondre. J’avais entendu parler de la pêche du saumon que l’on surnomme le roi de nos eaux, mais je n’avais jamais été attiré par cette activité qui me semblait réservée à une certaine élite et qui m’apparaissait inabordable pour le commun des mortels. Pierre ajouta que cette année-là l’école coïncidait avec la sortie du livre Saumon Atlantique dont les auteurs étaient André A. Bellemarre, Gérard Bilodeau et Gilles Aubert et qu’un exemplaire du livre serait remis à chaque participant. De plus, les auteurs seraient parmi les instructeurs. Il n’en fallait pas plus pour piquer ma curiosité et j’acceptai d’emblée l’invitation. Environ une semaine avant le début de l’école, Pierre eut la gentillesse de me remettre le livre. Il n’est nul besoin de dire que j’ai dévoré cet ouvrage au moins à deux reprises avant le début des cours. Saumons illimités 41
Le 17 juin, en fin d’après midi, je me présentai au site de Bardsville sur la rivière Ste-Marguerite pour participer à l’école de pêche qui se déroulerait toute la fin de semaine. L’accueil fut chaleureux, les installations magnifiques, les instructeurs et participants d’agréable compagnie, bref tout y était pour que la fin de semaine soit mémorable. Mais mon premier vrai coup de cœur fut lorsque je découvris la fosse située à l’arrière de l’ancien camp de l’Alcan à Bardsville. J’étais subjugué par la beauté du décor. C’était donc ça une fosse à saumon ! Sitôt le souper consommé les cours commencèrent. Anatomie et cycle de vie du saumon ainsi que l’équipement de pêche furent les sujets abordés. Puis la soirée se termina avec une séance théorique et pratique sur la fabrication des nœuds, élément on ne peut plus important pour la pêche de salar. Vers 23 h 00, fatigué mais heureux, j’ai regagné mes appartements pour une bonne nuit de sommeil, mais qui s’annonçait courte puisque que le réveil était prévu pour 6 heures le lendemain matin. Les cours théoriques continuèrent dès 8 h 00 le lendemain. Les auteurs du livre Saumon Atlantique reprirent tour à tour les thèmes du livre : la rivière, lecture des fosses, tenue du saumon dans la fosse, le choix des mouches, technique de pêche à la mouche noyée etc. Je n’avais jamais reçu un tel bagage d’informations, transmis avec enthousiasme et d’une manière aussi ouverte pour la pêche. J’étais vraiment heureux d’avoir pu lire le livre avant le début de l’école, ce qui me facilitait l’assimilation de cette grande quantité de données. Enfin, vers le milieu de l’après-midi nous avons endossé bottes et veste, empoigné nos cannes, et nous nous sommes dirigés vers la rivière pour une première séance pratique de pêche à la mouche noyée. Chaque instructeur se vit affecter
à un petit groupe de cinq ou six participants regroupés selon leur degré d’aisance avec le lancer à la mouche. Je fus parmi les chanceux qui allaient pêcher dans la fosse numéro 36, celle-là même qui m’eut tant impressionné lors de mon arrivée. Notre instructeur nous expliqua les principes de la rotation dans une fosse et tour à tour nous en avons amorcé un premier balayage. Vint enfin mon tour. Je fis mon entrée dans la rivière, j’allongeai lentement ma soie et commençai le balayage. Rendu au début de la queue de la fosse, André A. Bellemarre, qui était mon instructeur, me dit : « Michel, peux-tu allonger ta soie d’un pied ou deux ? » J’obtempérai et j’allongeai la ligne afin de laisser dériver la mouche dans la fosse. À nouveau, André me dit : « Allonge encore d’un pied ou deux ». Je me suis exécuté à nouveau et à micourse de la dérive, ma soie s’est raidie lentement. Instinctivement j’ai levé ma canne et j’ai senti un contact ferme. Je me suis écrié « j’en ai un! » Quelques secondes passèrent. La soie était toujours tendue mais rien ne bougeait. Je dis à André ; « Je me suis trompé, ma mouche doit être accrochée dans le rocher submergé que l’on aperçoit de l’autre côté de la fosse ». Je venais à peine de terminer ma phrase que ce que je croyais un rocher se mit à bouger faisant dérouler la soie et tourner le moulinet à une vitesse fulgurante. J’ai crié de douleur lorsque la poignée du moulinet me heurta violemment les doigts. Puis en amont à l’autre bout de la fosse, la rivière explosa, un éclair d’argent jaillit hors de l’eau, brilla au soleil et retomba avec fracas dans l’onde. « Mais qu’est-ce que c’était ?» me demandai-je. Se peut-il qu’une bête d’une telle puissance puisse habiter un si petit plan d’eau? Instructeur et observateurs y allaient de leurs conseils : « ne le force pas, tiens ta canne bien haute, recule hors de l’eau, remonte sur la berge ». Mais je n’enten-
dais rien, j’étais complètement subjugué par la puissance du poisson et l’intensité du combat. Une main solide empoigna le dos de mes bottes pantalons, me força à reculer et remonter sur la berge. Peu à peu je sortis de ma torpeur et repris contact avec le monde extérieur. Je réussis à amener le poisson près de la berge et pour l’admirer. Wow ! Quel magnifique poisson ! Salar aussi me vit et d’un coup de queue reparti à toute vitesse, mais cette fois en aval, c’est à dire le rapide à la fin de la queue de la fosse. André me cria ; « Michel, ne le laisse pas prendre le rapide sinon on est dans la merde ! » Sans hésitation ma main gauche bloqua le moulinet, la canne se courba dangereusement sous l’effort, puis plus rien. La soie me revint en pleine figure. J’étais désemparé, le saumon avait gagné et s’était libéré de son lien. Les commentaires et exclamations de déception fusèrent. Qu’est-ce qui s’est passé ? Le nœud a-t-il lâché ? Le bas de ligne a-t-il cassé ? Je ramenai vers moi toute la ligne et constatai finalement qu’il n’y avait plus de mouche ni de bas de ligne. Seuls restaient au bout de la soie quelques centimètres de fils tressés qui en forment le cœur. L’enveloppe de matière plastique qui le recouvrait avait arraché et glissé dessus. Encore sous le coup de l’adrénaline, je m’assis sur le bord de la berge, déçu de la fin mais savourant tout de même l’expérience extraordinaire que je venais de vivre. Un peu plus tard en soirée, je m’étais remis de mes émotions et fanfaronnais à la blague que ce n’était pas si difficile la pêche du saumon. Quelques lancers bien exécutés et le tour était joué. Je ne me doutais pas que par la suite, salar me servirait une des plus belles leçons d’humilité de ma vie.
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Babillard Le Saumon de la rivière Malbaie tiendra son souper bénéfice annuel le 28 mars prochain au Fairmont le Manoir Richelieu sous la présidence d’honneur de monsieur Philippe Couillard. Le coût par carte est de 100 $. Contactez Lucie Forgues au 418 439-0672 pour plus d’informations. Le samedi 25 avril 2009 aura lieu le souper bénéfice de la rivière St-Jean Saguenay au centre de ski Mont-Édouard avec monsieur Louis Champagne, comédien, comme invité d’honneur. Pour des billets ou autres renseignements contactez Michel au 418 272-2199, ou écrivez à riviere@royaume.com Les 13 et 14 juin 2009 se tiendra la Fête de la pêche. Informez-vous des activités qui se dérouleront près de chez vous. L’Association des pêcheurs sportifs de saumon de la rivière Rimouski inc. (APSSRR) tiendra son quinzième souper bénéfice le 25 avril 2009 au chalet du Club de golf L’Empress de Rimouski. Vous pouvez réserver dès maintenant vos billets de participation, au coût de 50 $ le couvert, en laissant un message au bureau de l’APSSRR au 418-722-6453 ou en écrivant à apssrr@globetrotter.net.
L’événement terre et mer : les 3 rivières Pabos et la Gaspésie arrivent en ville. Le 29 mai, à Saint-Jean Baptiste de Rouville sur la Rive-Sud de Montréal, une activité bénéfice hors du commun pour permettre la restauration et l’aménagement des rivières Pabos. Tous les participants découvriront les plaisirs de la Gaspésie : initiation à la pêche à la mouche, golf et souper de crabe et homard. Pour recevoir de l’information supplémentaire, envoyez-nous votre adresse courriel à rsvpsaumongolf@missionclient.com. Le Centre interuniversitaire de recherche sur le saumon atlantique (CIRSA) tiendra les jeudi 30 avril et vendredi 1er mai 2009 son 12e colloque. Les membres du CIRSA présenteront les résultats de leur recherche sur les projets en cours. Nous vous invitons à cette rencontre qui se tiendra à l’auditorium Hydro-Québec du Pavillon Charles-EugèneMarchand de l’Université Laval. L’horaire des présentations sera disponible vers la fin février sur le site internet du CIRSA (www.bio.ulaval.ca/CIRSA). Une mise à jour régulière de cet horaire sera faite sur ce site.
La Corporation de gestion de la rivière à saumon Les Escoumins tiendra son 15e souper bénéfice annuel samedi le 18 avril 2009 dès 17 h à la Salle Multifonctionnelle Les Escoumins. Pour informations et réservations, contactez le comité organisateur de la CGRSE au 418 233-3121 ou à cgrse@bellnet.ca. Le début de la pêche au saumon dur la rivière Cap-Chat sera devancé de quatre semaines, soit le 15 juin 2009. Que les pêcheurs ayant des réservations de pêche dans notre Gaspésie ne manquent pas de venir nous visiter. Nous serons tous là pour vous accueillir, vous assurer un séjour des plus appréciés.
Le 4 avril prochain se tiendra le Congrès annuel des saumoniers de la FQSA à l’hôtel Clarion, situé au 3125, boul. Hochelaga à Québec, arrondissement Sainte-Foy. L’événement se déroulera sous le thème
L’Association des pêcheurs sportifs de la Bonaventure inc. tiendra un cours de pêche à la mouche. Ce cours s’adresse à toutes et à tous, avec ou sans expérience, désirant apprendre les techniques de pêche à la mouche, s’améliorer ou en connaître davantage sur ce merveilleux sport. Dates : 5-6-7 juin 2009 28-29-30 août 2009 Pour informations et inscriptions, contactez-nous au 418 534-1818 ou apsb@globetrotter.net
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« D’hier à demain ». Vous êtes invités en grand nombre. N’hésitez à nous joindre au 418 847-9191 ou via secretariat@saumon-fqsa.qc.ca pour avoir plus de renseignements, ou visitez-nous à www.saumon-fqsa.qc.ca
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Rivière Sainte-Marguerite Tex Lecor
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