Quoi faire livres
L’autrice queer Niviaq Korneliussen secoue — encore — le monde de la littérature en 2014, niviaq Korneliussen a fait une entrée fracassante dans le monde littéraire avec homo sapienne, un roman qui raconte les tourments et les rêves de cinq jeunes queers du groenland. Saluée par le new york times et traduite dans plusieurs langues, dont le français, l’autrice est sortie d’une longue léthargie pour écrire un nouveau roman coup de poing, la vallée des fleurs, dans lequel elle tente de comprendre pourquoi sa nation a le plus haut taux de suicide au monde.
dès les premières pages, on fait connaissance avec une jeune femme visiblement mal dans sa peau, qui appréhende son départ pour Copenhague, au danemark, le pays colonisateur. « Plusieurs Groenlandais sont déchirés entre deux cultures, car on est une société mixte », explique l’écrivaine. « Mais mon personnage est moins troublé par la question de sa nationalité que par l’impression de ne jamais se sentir à la maison nulle part. » Son mal-être n’a rien à voir avec le fait d’être queer. « Homo sapienne se concentrait déjà sur la queerness au Groenland, mais je ne voulais pas en faire un problème dans mon nouveau livre, et ce, même si j’ai décidé que la plupart des personnages de mes histoires seraient queers, car on a besoin de ces voix. dans La vallée des fleurs, j’ai préféré montrer des familles qui acceptent leurs enfants tels qu’ils sont. » néanmoins, son personnage principal n’arrive pas à éviter le trou noir qui la guette. « Cette jeune femme vit avec une famille correcte, sans problème d’alcool et sans histoires d’agressions sexuelles. Les gens disent que les jeunes se suicident principalement pour ces raisons, mais ce n’est pas ce que j’ai observé. Tout le monde peut se rendre là. Je voulais donc créer [ce personnage d’une jeune femme] privilégiée, avec un accès à l’éducation et une gentille amoureuse, qui a quand même le sentiment d’être inadéquate, de ne pas faire les bons choix et de ne pas être à sa place. » en faisant ses premiers pas dans une université de la capitale danoise, elle se fait constamment parler de son accent, des mots qu’elle exprime, de sa manière d’étudier, de manger et d’être en général. Ces microagressions accentuent le malaise qui l’habitait avant son arrivée, mais niviaq Korneliussen n’a pas voulu s’étendre sur le sujet trop longtemps. « Au début, j’ai écrit sur le racisme envers les Groenlandais et les relations entre les deux territoires, parce que j’imaginais que les lecteurs voulaient en entendre parler », souligne-t-elle. « Pourtant, je trouvais ça extrêmement inintéressant. 66 | FUGUES.COM