Pulsations juillet-septembre 2021

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Pulsations

Jeunes

Prendre soin des étudiant.es Mieux-vivre

Gérer les écrans en famille

DOSSIER

Recherche

La science au cœur des HUG


URGENCES TROIS-CHÊNE, UN ACCUEIL RAPIDE ET EXCLUSIF AUX PERSONNES DE 75 ANS ET PLUS Pour les urgences non vitales et non chirurgicales Ouvert tous les jours de 8h à 19h

Hôpital des Trois-Chêne Chemin du Pont-Bochet 3 1226 Thônex Accueil d’urgence : 022 305 60 60


Pulsations Juillet - Septembre 2021

Sommaire Actualité 04 Nouvelle immunothérapie 07 Un pilulier virtuel bon pour le cœur 08 Traiter les nodules thyroïdiens

24 Le portrait Lamyae Benzakour :

32 Témoignage Jean-Dominique Grau : « Ma vie avec mon demi-cœur artificiel »

« Les patients nous confient ce qu’ils ont de plus précieux »

34 L’infographie Les varices

26 11 24

09 Soulager l’angine de poitrine 11 Un implant pour retrouver l’équilibre

26 Reportage Salle de thérapies à l’Hôpital de Bellerive

12 L’invitée Nathalie Vernaz-Hegi, pharmacienne cantonale

29 Vrai/Faux Le jeûne intermittent

22 L’organe Le larynx

30 Sécurité La matériovigilance veille sur nous

36 Rencontre Dre Sanae Mazouri : Covid et télémédecine 38 Jeunes Prendre soin des étudiant·es

40 36

14

40 Junior Peurs et angoisses

La science au cœur des HUG

44 Brèves Agenda

DOSSIER RECHERCHE

42 Mieux-vivre Gérer les écrans en famille

48 Livres & Web Pour en savoir plus

IMPRESSUM Editeur Bertrand Levrat, Hôpitaux universitaires de Genève, Rue Gabrielle-Perret-Gentil 4, CH-1211 Genève 14, www.hug.ch Réalisation Bertrand Kiefer, Michael Balavoine, Planète Santé / Médecine et Hygiène, www.planetesante.ch Responsable de publication Frédérique Tissandier Rédactrice en chef Suzy Soumaille Edition Joanna Szymanski, Giuseppe Costa Maquette et mise en page Jennifer Freuler, Bogsch & Bacco Publicité Michaela Kirschner, pub@medhyg.ch Abonnements Version électronique : gratuit, www.hug.ch/ pulsations-magazine. Version papier : gratuit, Tél. 022 702 93 11, www.pulsations.swiss Fiche technique Tirage : 41’000 exemplaires, 4 fois par an. Référence 441696 — La reproduction totale ou partielle des articles contenus dans Pulsations est autorisée, libre de droits, avec mention obligatoire de la source. Crédits couverture: istockphoto, Science Photo Library, Carolina Pimenta Crédits sommaire : istockphoto, Fred Merz | Lundi 13, Nicolas Righetti | Lundi 13

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Pulsations

La recherche s’ouvre au public

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Juillet - Septembre 2021

Pandémie oblige, nous assistons depuis dix-huit mois à la fabrique de la science en temps réel. Du jour au lendemain, le Covid-19 a fait émerger dans le débat public toute Ce partenariat a la complexité de la franchi un pas sup­ médecine et de plémentaire avec la la recherche médicale. création d’un site Essai thérapeutique, d’information* destiné étude de séroprévaaux professionnel·les lence, randomisation, et au grand public. faux positif… Des Les mots clés ? concepts difficiles ont Suzy Soumaille Transparence et envahi notre quotidien, Rédactrice en chef collaboration. Du avec leur lot de controchoix de l’étude à l’interprétation verses médiatiques et d’incertitudes, des résultats, cette plateforme sur mais aussi d’avancées majeures. les coulisses de la recherche clinique offre aussi la possibilité d’intégrer une Comment sont réalisées les études équipe de chercheurs·euses. Davancliniques ? Que veut dire « médecine tage qu’un sujet d’observation, les fondée sur les preuves » ? Comment patient·es deviennent des partenaires se construit un protocole de à part entière en contribuant à une recherche ? Ces questions et bien ou plusieurs étapes de la chaîne de d’autres font l’objet du dossier production du savoir scientifique.  de cette édition consacrée à la * recherche.hug.ch démarche scientifique.

E d i t o r i a l

Les HUG, en tant que centre universitaire, sont au cœur de la recherche médicale. Ils contribuent à son développement dans de multiples domaines. Elle n’est pour autant pas qu’une affaire de spécialistes : la participation active des patientes et des patients est également indispensable pour progresser dans la connaissance et améliorer les soins.


Pulsations

Des « tueurs en série »

Par Elisabeth Gordon Illustration Benjamin Schulte

Juillet - Septembre 2021

A c t u a l i t é

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Une cellule T est prélevée du sang du∙de la patient∙e

Les personnes souffrant de certaines formes de leucémie aiguë ou de lymphomes peuvent désormais bénéficier aux HUG d’une nouvelle immunothérapie innovante, très efficace et aux effets durables.

A

u cours des dernières années, la lutte anticancéreuse s’est dotée d’une nouvelle arme : l'immunothérapie. Elle vise à stimuler le système immunitaire pour aider certains de ses composants, les lymphocytes T, à détruire les cellules tumorales. Dans ce cadre, une stratégie innovante, qui utilise des cellules nommées CAR-T (pour Chimeric Antigen Receptor-T cells ou lymphocytes T dotés de récepteurs anti­géniques chimériques), est en passe de bouleverser le traitement de certains cancers. Elle consiste à prélever chez un·e patient·e ses propres lymphocytes T puis, au laboratoire, à les reprogrammer génétiquement. L’objectif est de les doter d’une « tête chercheuse » qui leur permet de détecter une molécule (nommée « antigène ») exprimée à la surface des cellules cancéreuses – la protéine CD19 par exemple, dans les leucémies et les lymphomes B. Ces lymphocytes T modifiés, qui prennent le nom de CAR-T, 4

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Au laboratoire, cette cellule T est reprogrammée génétiquement en cellule CAR-T

sont ensuite réinjectés dans la circulation sanguine de la personne. « Ce sont de véritables “tueurs en série” pour les cellules tumorales », explique le Pr Denis Migliorini, médecin hospitalo-universitaire au Service d’oncologie des HUG et titulaire d’une chaire ISREC en immunologie des tumeurs cérébrales. Homologuée en Suisse

Cette technique a été approuvée en 2017 par la Food and Drug Administration, l’autorité sanitaire américaine, et l’année suivante par son homologue suisse, Swissmedic, pour le traitement des leucémies lymphoblastiques aiguës B réfractaires, chez l’enfant et les moins de 25 ans – elle le sera bientôt chez les plus âgés – et des lymphocytes B de haut grade chez l’adulte. « Chez les personnes traitées, pour lesquelles toutes les thérapies standards avaient été épuisées, on obtient jusqu’à 90% de rémission complète. En outre, pour certaines d’entre elles, l’effet persiste pendant plusieurs années », précise l’oncologue. Il s’agit donc selon lui « d’une véritable révolution » dont peuvent bénéficier les patient·es des HUG. Ces personnes doivent d’abord se rendre au Centre de transfusion sanguine qui prélève


Actualité

de cellules tumorales du sang et isole des lymphocytes T, lesquels seront ensuite transformés en laboratoire. Les patient·es sont hospitalisé·es et traité·es dans le Service d’hématologie des HUG sous la supervision de l’équipe du Pr Yves Chalandon. Concrètement, ils·elles « recevront une chimiothérapie dite lympho­ déplétante visant à affaiblir leur système immunitaire, afin de limiter le plus possible le risque de rejet des CAR-T », précise le Pr Chalandon. Ces lymphocytes modifiés leur seront ensuite injectés via un cathéter. Effets indésirables

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Les cellules CAR-T ainsi produites sont administrées au patient ou à la patiente

Juillet - Septembre 2021

Ce traitement est « tellement puissant qu’il peut éliminer les cellules tumorales en quelques heures. Mais de ce fait, celles-ci déversent dans la circulation sanguine leur contenu », précise le Pr Migliorini. Il en résulte une inflammation importante qui peut entraîner des effets indésirables, notamment sur le système immunitaire, ce qui rend alors les patient·es plus fragiles vis-à-vis des infections. En outre, « dans de très rares cas, l’inflammation peut affecter le système nerveux central et provoquer des œdèmes cérébraux », poursuit-il.

Le médecin-chercheur a élucidé les causes de cette neurotoxicité. Il a constaté que « les protéines CD19 ne s’expriment pas uniquement à la surface des cellules tumorales. Elles se trouvent aussi sur les cellules de la barrière hémato-encéphalique qui protège le cerveau contre les agents pathogènes », explique-t-il. Les CAR-T ne font pas la différence et s’attaquent aux unes comme aux autres. L’étape en cours de développement consiste donc à améliorer les lymphocytes reprogrammés pour qu’ils puissent distinguer les CD19 « amies » des « ennemies », afin qu’ils ne s’attaquent qu’à ces dernières. Des travaux « prometteurs mais coûteux » que, grâce à des soutiens financiers publics et privés, les chercheurs·euses espèrent pouvoir « amener au lit du patient », conclut le Pr Migliorini. 

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La cellule CAR-T peut reconnaître les cellules cancéreuses et les tuer

Le double défi des tumeurs solides

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La cellule CAR-T est reproduite au laboratoire

Dans les cas de leucémies et de lymphomes, les cellules tumorales circulent dans le sang, où les CAR-T peuvent facilement les détecter et les éliminer. Ce n’est pas le cas d’autres tumeurs (cérébrales, pancréatiques, colorectales, ovariennes, etc.) dites « solides ». « Comme leur nom l’indique, les lymphocytes peuvent difficilement les pénétrer », explique le Pr Denis Migliorini, médecin hospitalo-universitaire

5

au Service d’oncologie des HUG. En outre, « ces tumeurs peuvent être infiltrées par des cellules bloquant la réponse immunitaire ». Les CAR-T sont toutefois en mesure de relever ce double défi. L’équipe du Pr Migliorini, qui développe des CAR-T ciblant les tumeurs cérébrales, commence cette année des tests sur des souris avec l’espoir, dit-il, « de pouvoir lancer les tout premiers essais cliniques d’ici deux à cinq ans ».


PROCHAINES ÉDITIONS 2021-2022 MODULES ÉVALUATION CLINIQUE SANTÉ MENTALE OUTILS ET CONNAISSANCES POUR L’USAGE DES SAVOIRS SCIENTIFIQUES CONDUITE DE PROJETS MALTRAITANCE ENVERS LA PERSONNE ÂGÉE CAS

ÉVALUATION CLINIQUE INFIRMIÈRE COORDINATION DES SOINS ET TRAVAIL EN RÉSEAU MANAGEMENT : DÉVELOPPER SA POSTURE DE CADRE

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Pulsations

Atout cœur avec le pilulier virtuel Pas toujours simple de s’y retrouver dans ses traitements médicamenteux. Pour faciliter la gestion au quotidien, les HUG ont imaginé l’application Swiss-Meds.*

Crédit : HUG

Le pilulier virtuel Swiss-Meds répertorie chaque médicament du traitement.

30%

des patient·es arrêtent totalement ou partiellement leur traitement médicamenteux dans les mois qui suivent un syndrome coronarien aigu.

L’historique des prises assure un bon suivi du traitement.

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* L’application Swiss-Meds a bénéficié d’un financement de la Fondation privée GEcor.

Juillet - Septembre 2021

Outre le confort d’utilisation, Swiss-Meds facilite aussi la mise à disposition, pour le∙la médecin traitant∙e, d’éléments importants pour le suivi, comme la carte de traitement ou l’historique des prises. 

Par Clémentine Fitaire

L’application, qui pourra prochainement être proposée à d’autres publics, se présente comme une carte de traitement digitale dans

Swiss-Meds

A c t u a l i t é

N

é d’une collaboration étroite entre le Service de cardiologie, la Direction des systèmes d’information, la Pharmacie et la Direction médicale des HUG, cet outil a été imaginé pour les personnes touchées par un infarctus du myocarde. « Nous avons mis notre expertise du médicament au service de cette application, en complément des autres piliers fondamentaux de la réadaptation cardiaque que sont l’activité physique, l’adoption d’une alimentation méditerranéenne et l’arrêt du tabac », explique le Dr Philippe Meyer, médecin adjoint agrégé au Service de cardiologie. L’adhésion thérapeutique, dans ces cas-là, est cruciale. « L’absence de symptômes suite à l’évènement cardiaque peut amener à délaisser le traitement, avec parfois des conséquences graves », constate le cardiologue

laquelle chaque médicament peut être intégré en scannant le code-barres de l’emballage. Elle envoie, entre autres, une alerte pour avertir du moment de la prise ou calcule le nombre de comprimés restant dans la boîte afin d’anticiper un renouvellement. « Les notices ont été vulgarisées pour faciliter la compréhension et des quiz en lien avec la maladie ont été développés », détaille Frédéric Ehrler de la Direction des systèmes d’information.


Pulsations

Des ultrasons contre les nodules thyroïdiens

Par Giuseppe Costa Photo Louis Brisset

Juillet-Septembre 2021

A c t u a l i t é

Récupération plus rapide

Un nouveau traitement non invasif, unique en Suisse, est proposé depuis février aux HUG. La prise en charge a lieu sous hypnose.

P

etite boule à la base du cou, le nodule thyroïdien est un problème commun, puisqu’il affecte notamment plus de la moitié des femmes après 60 ans. Cette tumeur, qui se forme dans la glande thyroïde et reste bénigne dans 90 à 95% des cas, peut grossir. Que faire lorsque le nodule augmente de volume jusqu’à mesurer plusieurs centimètres et qu’il provoque une gêne fonctionnelle ou esthétique ? « Jusqu’à présent, nous ne faisions rien ou nous opérions pour l’enlever, avec les risques inhérents à une chirurgie et une cicatrice visible. Désormais, nous proposons un traitement non invasif par échothérapie, unique en Suisse, qui réduit la taille du nodule », répond le Dr Patrick Meyer, médecin consultant à l’Unité d’endocrinologie des HUG. 8

Cette technique, dite « ultrasons focalisés à haute intensité » (ou HIFU pour High Intensity Focused Ultrasound), utilise l’énergie ultrasonique. Les ondes sonores émises à certaines fréquences génèrent une chaleur qui détruit le tissu ciblé sans endommager les structures environnantes. Le faisceau d’ultrasons agit comme les rayons du soleil à travers une loupe. « Cette technique présente de nombreux avantages. La récupération est plus rapide et il n’y a aucun hématome ni risque d’infection puisqu’il n’y a pas de ponction ni d’incision de la peau », précise le Dr Meyer. Cette prise en charge ambulatoire dure entre 45 et 90 minutes et ne nécessite pas d’anesthésie. Avant le traitement, des antalgiques et des anti-inflammatoires sont donnés et, pendant, l’hypnose permet à la∙le patient∙e de s’éloigner des sensations douloureuses dues au soin. « Au cours d’une consultation, j’explique les principes de l’hypnose et la personne l’expérimente. Lors du traitement, j’induis par la parole un état de conscience modifié, de sorte que la personne soit plus réceptive aux suggestions, focalisée ainsi ailleurs que sur l’environnement immédiat », détaille la Dre Adriana Wolff, médecin adjointe au Service d’anesthésiologie et hypnothérapeute. Avec quels résultats ? « Les premières personnes sont satisfaites : comme les séquences d’ultrasons sont intermittentes, l’hypnose les a aussi aidées à replonger à chaque fois dans un confort. » Une échographie est effectuée tous les trois mois pendant un an afin d’observer la réduction de la taille du nodule dans le temps. Les HUG prévoient de traiter une quarantaine de patient∙es par année avec cette méthode. 


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Du nouveau pour soulager l’angine de poitrine Inédite en Suisse romande, l’intervention qui s’est déroulée fin mars aux HUG chez une patiente pourrait changer la vie de nombreux autres malades.

Crédit : NEOVASC

* Neovasc Inc., Richmond, Canada.

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Juillet - Septembre 2021

La prothèse miniature implantée pour la première fois en Suisse romande par le Service de cardiologie des HUG, le 26 mars dernier, est précisément destinée à ces personnes. Baptisée « Neovasc Reducer TM » par ses concepteurs canadiens*, il s’agit d’un dispositif en acier inoxydable. Se présentant sous la forme d’un sablier, il réduit le diamètre du sinus coronaire, cette veine nichée à la base de l’oreillette droite et qui collecte le sang appauvri en oxygène du cœur. À cet endroit, dans les années 1950 déjà, des chirurgiens avaient eu l’idée d’intervenir. Leur stratégie : réduire le diamètre du sinus coronaire pour y accroître la pression sanguine et, par ricochet, celle régnant dans le muscle cardiaque.

Aujourd’hui, l’objectif est le même, mais le procédé tout autre. Aussi simple que novateur, il consiste à introduire le dispositif depuis une veine du cou jusqu’au fameux sinus coronaire. Implanté dans la veine, il y livre son secret : un goulet d’étranglement réduisant le flux sanguin pénétrant dans le cœur. « L’intervention dure une heure environ et se fait sous anesthésie locale, sans effet secondaire et avec un taux de complications très faible », indique le Dr Juan F. Iglesias, médecin adjoint agrégé à l’Unité de cardiologie interventionnelle des HUG. Et les résultats s’avèrent spectaculaires. La sévérité de l’angine de poitrine est évaluée depuis la classe 1, la moins invalidante, à la classe 4, synonyme de symptômes aigus sur­ venant au repos. « Pour 70% des patients ayant subi cette intervention, l’angine de poitrine s’améliore d’au moins une classe de sévérité, et d’au moins deux classes dans 35% des cas. Au-delà des chiffres, cela se traduit donc pour beaucoup par une qualité de vie réellement retrouvée », se réjouit le cardiologue. 

A c t u a l i t é

Réduire le diamètre du sinus coronaire

Une qualité de vie retrouvée

Par Laetitia Grimaldi

S

ensation d’oppression et douleurs thoraciques irradiant dans les bras, le cou ou la mâchoire, sont les symptômes caractéristiques de l’angine de poitrine, aussi appelée angor. Signe d’un manque d’afflux sanguin au niveau du cœur, elle survient le plus souvent lors d’efforts physiques, mais également au repos dans les cas les plus sévères. Pour la contrer, traitements médicamenteux et interventions percutanées (stents coronaires) ou chirurgicales (pontages coronariens) sont envisagés au cas par cas. Le problème : chez 5 à 15% des patient·es, les traitements habituels sont vains et les symptômes deviennent chroniques. La qualité de vie se dégrade et les hospitalisations se multiplient.


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Pulsations

Retrouver l’équilibre grâce à l’implant vestibulaire

Fixée au-dessus de l'oreille, l'antenne externe renferme des capteurs qui enregistrent les mouvements de la tête . Ces informations sont transmises à un appareil implanté dans la tête , doté d'un récepteur qui les transforme en signaux électriques envoyés via des électrodes  aux nerfs vestibulaires . Le cerveau peut alors interpréter ce signal de mouvement.

Depuis, « nous avons démontré qu’elle restituait la fonction vestibulaire lors de tests de laboratoire », détaille la spécialiste. Cependant, jusqu’ici, l’implant vestibulaire n’avait été activé que pendant des séances de test de quelques heures. Pour mesurer les performances « en conditions réelles », les scientifiques vont inviter cet été une patiente, implantée en 2012, à passer plusieurs jours aux HUG en gardant la double prothèse activée en permanence. Cette première mondiale « nous permettra d’examiner les bénéfices de la neuroprothèse à plus long terme », précise Angelica PerezFornos, qui entre­voit une commercialisation « à un horizon de cinq à dix ans ». 

 

Manette de contrôle

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Juillet - Septembre 2021

I

l n’existe pour l’instant aucun traitement pour lutter contre les déficits sévères du système vestibulaire – ce GPS de l’oreille interne qui nous permet de nous déplacer sans perdre l’équilibre. L’implant vestibulaire vise à combler ce manque. Il a été élaboré par l’équipe d’Angelica Perez-Fornos, ingénieure responsable du Centre romand d’implants cochléaires, et du Dr Nils Guinand, médecin adjoint agrégé, responsable de l'Unité d'oto-neurologie. Conçu sur le même principe que l’implant cochléaire (destiné aux individus atteints de surdité), ce dispositif renferme des capteurs fixés sur la tête qui en enregistrent les mouvements. Ces informations, traitées par un processeur et transformées en signaux

A c t u a l i t é

Une neuroprothèse va être testée en conditions réelles chez une patiente souffrant de troubles vestibulaires sévères.

Par Elisabeth Gordon Illustrations Communication in Science

électriques, sont ensuite transmises, via une antenne, à un appareil implanté. Celui-ci comporte des électrodes insérées dans l’oreille interne, « à proximité des branches des nerfs vestibulaires que l’on souhaite stimuler », explique Angelica Perez-Fornos. Les interventions dans l’oreille interne risquant de provoquer une perte de l’audition, « nous avons décidé d’implanter les électrodes sur des personnes sourdes auxquelles nous posions un implant cochléaire », ajoute l’ingénieure. Pour ce faire, pour­suivant le travail du Pr Jean-Philippe Guyot, ancien chef du Service ORL, l’équipe des HUG a élaboré une double prothèse – vestibulaire et cochléaire – qui a été implantée pour la première fois en 2007. Aujourd'hui, quinze patient·es, à Genève et aux Pays-Bas, ont reçu ce dispositif, élaboré en collaboration avec une entreprise autrichienne et un partenaire académique néerlandais.


Pulsations

Par Laetitia Grimaldi Photo François Wavre | lundi 13

Juillet - Septembre 2021

L ’ i n v i t é e

« Face à l’adversité, j’ai appris à regarder loin devant » Après dix-huit années aux HUG, d’abord en tant qu’adjointe responsable des achats et de la distribution de la pharmacie centrale puis à la direction médicale, Nathalie Vernaz-Hegi est devenue la nouvelle pharmacienne cantonale en novembre dernier.

loi relatifs aux produits thérapeutiques (les médicaments), stupéfiants et chimiques (les gels hydroalcooliques, par exemple). Il exerce également une surveillance sur les professions de la santé soumises à autorisation, telles que pharmaciens, droguistes, spécialistes en analyses médicales, optométristes et opticiens, ainsi que sur les institutions de santé. Il est par ailleurs investi au niveau de la commission cantonale d’éthique de la recherche.

Gestion d’officines, missions humanitaires, pharmacienne hospitalière, MBA en sciences économiques, responsable d’enseignement sur le système de santé… la richesse de votre parcours semblait vous prédestiner à la mission de pharmacienne cantonale. Nathalie Vernaz-Hegi J’avoue que c’est ce que je me suis dit en découvrant le descriptif du poste. Celui-ci se libérait en raison du départ à la retraite de mon prédécesseur, Christian Robert. J’ai beaucoup réfléchi avant de postuler, au vu de l’ampleur de la tâche et parce que j’étais très heureuse aux HUG, mais je me suis dit que c’était le genre d’opportunité qui ne se présente qu’une fois dans une vie.

Pandémie oblige, deux heures après votre prise de fonction, vous gériez l’urgence de la mise en place des tests antigéniques rapides dans le canton. Comment avez-vous vécu cette immersion dans le feu de l’action ? J’y étais préparée puisque depuis plusieurs mois déjà, dans le cadre de mon poste aux HUG, j’étais mobilisée par la pandémie, tant au niveau de mes fonctions au sein de la direction médicale que pour le dépistage et le soutien aux malades hospitalisés. Il m’est rapidement apparu que j’allais pouvoir mettre à profit mes expériences d’achat et de distribution à la pharmacie de l’hôpital. Et pour cause, mes premières missions en tant que pharmacienne cantonale ont surtout reposé sur un immense défi logistique pour la mise en place des tests antigéniques rapides et la campagne de vaccination.

Pouvez-vous nous rappeler les rôles clés du Service de la pharmacienne cantonale ? Il constitue l’autorité cantonale compétente pour veiller à l’application des textes de

Un défi logistique et… forcément humain : comment se sont organisées vos tâches au sein de l’équipe en place ? Le degré d’urgence lié à la pandémie a rendu les interactions immédiatement

Pulsations

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L’invitée

efficaces et positives, avec l’idée que nous étions toutes et tous dans le même bateau. Cette dynamique valait au sein du Service ainsi qu’au Comité stratégique de la Direction générale de la santé (DGS), dont fait partie Aglaé Tardin, la médecin cantonale. Et puis il y a eu les interactions avec les autres services de la DGS et les partenaires extérieurs, les centres de vaccination par exemple. Cela a engendré des séances régulières à distance, très appréciées pour beaucoup. Elles représentaient à la fois des enjeux stratégiques et opérationnels, mais également des temps d’échange précieux dans les moments plus difficiles.

Vous imaginiez-vous endosser un jour de telles responsabilités ? Comme souvent, mon parcours résulte d’intérêts personnels, de rencontres et du hasard. Pourquoi les médicaments ? Cela remonte sans doute à l’enfance : nous étions cinq frères et sœurs, avec chacun des rôles bien définis. L’un des miens était d’aller à la pharmacie. C’est un univers dans lequel je me sentais bien. Et puis il y a eu les missions humanitaires, qui m’ont donné des clés précieuses pour mieux comprendre le monde, et l’hôpital, où j’ai énormément appris. J’ai aussi longtemps pratiqué la compétition de patinage artistique. Une belle école pour se dépasser et apprendre à se relever, travailler sans jamais se décourager. Cela me guide encore aujourd’hui. 

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Juillet - Septembre 2021

Ils ont été nombreux dans un contexte si exceptionnel. Comment y faire face ? L’unité et la confiance au sein du service lui-même et d’une institution comme la DGS tiennent pour beaucoup quand le défi est d’une telle ampleur. D’un point de vue individuel, le travail et l’état d’esprit sont forcément déterminants. J’ai la chance d’avoir une bonne résistance au stress et j’avance depuis toujours avec l’idée que même si on ne peut tout maîtriser, l’action reste possible. Face à l’adversité, j’ai appris à regarder loin devant et à tout donner.


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HUG: mission recherche médicale

Illusrtation Bogsch & Bacco Par Elodie Lavigne

Juillet - Septembre 2021

D o s s i e r

Hôpitaux universitaires de Genève

Avec les soins et l’enseignement, la recherche scientifique est l’une des missions des HUG. Un domaine que le Covid-19 a brutalement mis sur le devant de la scène dès le début de la pandémie. Comment sont réalisées les études cliniques ? Qu’est-ce qu’une preuve scientifique ? Plongée dans les méthodes de fabrication de la science au service des patientes et des patients.

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10%

CRC

Centre de recherche clinique

=

UAM

Unité d'appui méthodologique

+

UIC

Unité d'investigation clinique

+

CQ

Cellule qualité

La subvention de l’État pour les activités académiques aux HUG – recherche et enseignement – se monte à 10% du budget des HUG


Études cliniques Recherche fondamentale biologique cellulaire Recherche translationnelle HUG

F

Clinique, fondamentale ou translationnelle

Depuis le début de la pandémie nous assistons, en direct, à la progression du savoir médical grâce au travail scientifique. Avec la formation, la recherche fait partie des activités académiques de l’hôpital. Elle occupe une place importante en termes de budget d’abord, puisque 10% de celui-ci y est consacré. Elle est évidemment aussi en lien direct avec la mission des HUG, puisque le but premier de la recherche est d’avancer dans la compréhension des maladies et la prise en charge des patient·es. Il existe plusieurs types d’investigations scientifiques en médecine. À l’hôpital, ce sont surtout des études cliniques, orientées vers les patient·es. La recherche fondamentale (biologique, cellulaire ou moléculaire) est plutôt l’affaire de la Faculté de médecine de l’Université de Genève (UNIGE) et se pratique au sein de laboratoires. Entre les deux se situe la recherche translationnelle qui consiste à poser des

questions cliniques et à y répondre par le biais de la recherche fondamentale ou, à l’inverse, à appliquer des découvertes fondamentales en clinique. Une recherche plurielle

La recherche clinique est elle-même plurielle. Dans un essai thérapeutique, il est possible d’évaluer l’efficacité d’une nouvelle substance ou encore tester une molécule déjà connue dans une autre indication. Les études cliniques peuvent également porter sur des programmes de soins dans différents domaines, comme l’alimentation, l’exercice physique, la méditation de pleine conscience, etc.

« Dans toute bonne étude performante et ambitieuse, nous demandons l’avis des patients au moment d’écrire le protocole, surtout pour les maladies chroniques » Pr Jérôme PUGIN

Les études populationnelles visent de leur côté à identifier, au sein d’une population donnée, les facteurs pré­disposant à certaines affections (diabète, obésité, maladies cardiovasculaires, par exemple). Les études de cohortes, pour leur part, permettent un suivi dans le temps d’un grand volume de patient·es sur des thématiques particulières (VIH, trans­plantation, prothèse de hanche, etc.). Dans le cas du Covid-19, par exemple, la santé des personnes infectées est évaluée dans le temps à intervalles réguliers pour identifier et traiter les séquelles potentielles, dans une étude dite prospective.

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Juillet - Septembre 2021

ascinante et complexe, la science médicale est depuis plus d’un an au centre de l’attention. La pandémie de Covid-19 a quelque peu levé le voile sur la recherche scientifique, ses pouvoirs et ses limites, suscitant par là confiance et optimisme, mais aussi méfiance chez le grand public. Comment un nouveau virus peut-il être aussi ravageur et insaisissable ? Pourquoi autant de tâtonnements dans la mise en place de traitements ? Comment un vaccin a pu voir le jour si rapidement ? Autant de questions amenant une certaine perplexité, voire un regard critique sur la médecine. Une science qui ne se révèle pas aussi puissante ni exacte que nous l’aurions souhaité mais qui, de par son caractère évolutif, est en même temps source d’espoir, comme l’a démontré l’avènement du vaccin contre le Covid-19.

HUG UNIGE moléculaire UNIGE

Re ch er ch e

Dossier


Pulsations

À l’inverse, les études rétrospectives analysent dans la durée et après coup le bien-fondé d’une prise en charge sur la base des données des dossiers patient·es. La participation à une étude clinique peut se résumer à répondre à un questionnaire ou consister en différentes visites médicales, en une intervention, voire un séjour dans l’unité d’investigation clinique. Elle peut être ponctuelle ou durer plusieurs mois, voire plusieurs années.

Étude rétrospective Étude prospective

Quels que soient le format et la question posée, « l’approche scientifique consiste à rechercher, sur la base d’une hypothèse, un niveau de preuve permettant d’affirmer ou d’infirmer un certain nombre d’éléments », explique le Pr Cem Gabay, directeur de l’enseignement et de la recherche aux HUG et doyen de la Faculté de médecine de l’UNIGE. Savoir si une molécule est efficace ou non, déterminer dans quelle mesure un virus ou une bactérie est associé à telle ou telle maladie, analyser les mécanismes impliqués… Souvent, une question en amène une autre, poursuit le Pr Gabay : « Dans un essai thérapeutique, on veut savoir comment le médicament se distribue dans le sang, comment il agit, quelle est la bonne dose à administrer et celle à ne pas dépasser afin d’éviter des effets secondaires, ou encore connaître le rapport entre efficacité et économicité en comparaison à d’autres traitements existants. »

Malika, 71 ans

Juillet - Septembre 2021

participe à une étude clinique qui évalue une thérapie pour la préservation de la fonction rénale après transplantation du rein. « Lorsque mon néphrologue m’a demandé si j’étais d’accord de participer à cette étude, j’ai spontanément accepté afin d’aider la recherche. Il s’agissait de prendre un médicament deux fois par jour pendant deux ans, avec un suivi trimestriel pour des analyses de sang. Lorsque j’ai su que j’avais reçu le placebo, j’étais un peu déçue, même si je savais que cela pouvait arriver. Si c’était à refaire, je le referais. D’ailleurs, je vais prochainement participer à une étude sur l’ostéoporose. Nous sommes très bien informés du déroulement des choses. Nous recevons de la documentation et nous pouvons ensuite poser des questions. Personne ne nous force, nous sommes libres de participer ou non. »

270

études pros­pectives

119

études rétro­ spectives

Une démarche rigoureuse

Pour obtenir des réponses significatives, la démarche scientifique doit être rigoureuse et répondre à des exigences précises (lire encadré en page 19). La meilleure qualité est obtenue avec des études randomisées en double aveugle. Deux groupes de patient·es sont comparés : le premier reçoit le traite­ ment, tandis que l’autre reçoit un placebo (sans substance active). Ni les participant·es ni les investigateurs et investigatrices ne savent à quel groupe ils ou elles appartien­ nent. « Ceci n’est toutefois pas possible dans tous les cas. Lorsqu’un chirurgien implante un pacemaker par exemple, il sait quel dispositif il pose à son patient », note le Pr Jérôme Pugin, chef du Centre de recherche clinique et du Service des soins

En 2020, le Centre de recherche clinique a travaillé sur 389 études

16


intensifs des HUG. Une telle démarche vaut aussi pour les approches non pharmaco­ logiques. Même si les résultats d’une étude sont significatifs, pour qu’une attitude thérapeutique change, « il faut au moins deux grandes études, afin d’affirmer que l’effet démontré n’est pas dû au hasard », explique le Pr Pugin. Dans le cas où les résultats obtenus ne sont pas ceux attendus, « publier des conclusions négatives est tout aussi important, car cela permet de ne pas exposer inutilement un patient à un traitement », poursuit-il.

Données de la recherche

Expérience clinique

Re ch er ch e

Dossier

Décision

Préférences du patient

La médecine basée sur les preuves (evidence based medicine ou EBM)

La valeur d’une étude tient à différents facteurs : la pertinence de la question posée, la rigueur de l’approche, le respect du protocole, la transparence, la taille de l’échantillon, le caractère définitif des résultats obtenus, la collaboration entre plusieurs centres de recherche, notamment.

« Dans un essai thérapeutique, on veut savoir comment le médicament se distribue dans le sang, comment il agit, quelle est la bonne dose à administrer et celle à ne pas dépasser afin d’éviter des effets secondaires » Pr Cem GABAY

A

Essais comparatifs randomisés de forte puissance • Métaanalyse d’essais comparatifs rando­ misés • Analyse de décision fondée sur des études bien menées

La revue dans laquelle l’article paraît est un autre gage de validité, poursuit le Pr Pugin : « L’idée est de dessiner une étude qui pourra être publiée dans une revue d’excellence, ce qui n’est pas si fréquent, mais qui arrive régulièrement pour nos chercheurs aux HUG. » Pour en arriver là, le chemin est long et laborieux. Il faut faire preuve de ténacité et de conviction, y compris dans la demande de financements. Différentes sources, publiques et privées, existent. Chaque service de l’hôpital dispose

B

Essais comparatifs randomisés de faible puissance • Études comparatives non randomisées bien menées • Études de cohortes

17

C D

Études de cas-témoins

Études comparatives comportant des biais importants • Études rétrospectives • Séries de cas • Études épidémiologiques descriptives (transversale, longitudinale)

E

En l’absence d’études, les recommandations sont fondées sur un accord professionnel

Juillet - Septembre 2021

Ce concept permet de déterminer le niveau de preuve scientifique d’un médicament, d’une stratégie thérapeutique ou encore de mesures de prévention sur la base des connaissances scientifiques, issues des recherches cliniques. Le niveau A, le meilleur, signifie que plusieurs essais randomisés, contrôlés et de grande envergure ont répondu de manière univoque à une question donnée. À l’opposé, le niveau E, le plus bas degré d’évidence, se réfère à une simple recommandation issue d’un comité d’experts. Le concept d’EBM est central pour toutes les recommandations qui régissent la pratique médicale.


Pulsations

d’un budget pour la recherche. À plus large échelle, le soutien est assuré par le Fonds national suisse de la recherche scientifique, l’industrie pharmaceutique ainsi que de nombreuses fondations privées (Fondation privée des HUG, Children Action, Asso­ ciation suisse pour la recherche sur l’Alzheimer, Fondation Dinu Lipatti, etc.).

Juillet - Septembre 2021

Sous l’œil de la Commission cantonale d’éthique de la recherche

Véritable partenariat

La participation des patients et des patientes est elle aussi indispensable pour progresser dans la connaissance et améliorer les soins, commente le Pr Pugin : « Dans toute bonne étude performante et ambitieuse, nous demandons l’avis des patients au moment d’écrire le protocole, surtout pour les maladies chroniques. Car ils connaissent bien leur maladie et savent ce dont ils ont besoin. » Plus qu’un sujet d’étude, les patient·es sont de véritables partenaires. Une nouvelle plateforme de recherche clinique leur est désormais destinée. Ils∙elles accèdent aux informations et résultats des recherches et donnent leur avis sur leur expérience.

Tout projet de recherche médicale doit être approuvé par la Commission cantonale d’éthique de la recherche (CCER). Son rôle est d’évaluer les projets et de vérifier qu’ils répondent aux exigences de la loi relative à la recherche sur l’être humain (LRH). La CCER reçoit environ 300 projets par an, dont une vaste majorité provient des HUG. En raison de la pandémie, les demandes ont augmenté en 2020, avec par ailleurs une hausse de projets nonCovid. « La plupart du temps, nous rendons une décision provisoire avec une demande de modifications. Souvent, c’est la partie consacrée à l’information patients, relative au consentement, qui pose problème », relève le Pr Bernard Hirschel, président de la CCER. Un travail de vulgarisation et d’explicitation, dans un but de transparence, est alors demandé.

« Les traitements d’immunothérapie en oncologie ont le vent en poupe. » Pr Bernard HIRSCHEL

Plusieurs grands axes de recherche Parmi les projets soumis à l’avis de la commission, beaucoup concernent des essais thérapeutiques : « Les traitements d’immunothérapie en oncologie ont le vent en poupe », observe le Pr Hirschel. Les études à long terme sont aussi nombreuses. Les axes de recherche sont multiples. En épidémiologie, par exemple, une grande étude portant sur l’infection au Covid-19 a été menée en 2020 par l’intermédiaire du Bus santé. Le domaine des neurosciences est aussi très investigué, notamment en lien avec la prévention précoce de la maladie d’Alzheimer. En infectiologie, les antibiotiques sont sous la loupe, avec un objectif triple : raccourcir la durée des traitements, minimiser les effets secondaires et réduire la résistance à ces substances. Les maladies métaboliques font aussi l’objet de nombreuses recherches (diabète, obésité, etc.).

Malgré la technicité dont elle bénéficie, la recherche reste profondément humaine parce qu’elle est réalisée par des femmes et des hommes désirant faire avancer la science. Alors forcément, cette dimension humaine peut amener des biais et des défauts dans son fonctionnement, d’où l’importance d’une régulation forte, pour éviter les dérapages tels que ceux survenus durant la première vague de Covid-19 (plus de 100 articles scientifiques publiés dans des revues puis rétractés). « En tant que scientifiques, nous devons être très prudents avant de communiquer des résultats. Il faut laisser la science travailler à son rythme », conclut le Pr Gabay. 

18


Dossier

D’une hypothèse de recherche à la publication de résultats dans une revue médicale, le chemin que suit une étude scientifique est long et rigoureux. En voici les étapes clés.

La question du financement est elle aussi cruciale. Les coordinateurs du Centre de recherche clinique (CRC) peuvent aider à en estimer le coût. Le protocole de recherche est ensuite soumis à l’avis de la Commission cantonale d’éthique de la recherche (lire encadré en page 18). Si celui-ci est favorable, l’étude peut débuter. Une palette de spécialistes interviennent durant tout le processus de l’étude clinique. Les médicaments et placebos sont par exemple préparés par des pharmacien·nes qui se consacrent à la recherche. Un personnel spécialisé récolte les données des patient∙es, puis les insère dans une banque de données sécurisée à laquelle personne d’autre ne peut accéder. Le CRC effectue une surveillance

pour vérifier que l’étude répond aux bonnes pratiques et que le protocole est respecté. Des biostatisticiens analysent ensuite les données à l’aide de logiciels de pointe, puis celles-ci sont organisées dans des tableaux et des graphiques. Pour rendre compte des résultats à la communauté scientifique, un article est rédigé selon une structure définie. Avant d’être publié, ce dernier est revu par un comité d’édition. Enfin, les auteur·es doivent répondre aux critiques et mettre le texte en conformité. La publication peut alors être effectuée.

Ingrid, 47 ans participe à une étude sur les effets d’une alimentation à heures fixes chez les personnes en surpoids ou obèses. « Durant les quinze premiers et derniers jours de l’étude, il faut noter ce qu’on mange dans une application, porter une montre pour quantifier son sommeil et son activité physique, et mesurer son taux de glycémie via un autre appareil. Une série d’examens (prise de sang, calorimétrie, densité osseuse, poids, IMC, etc.) est réalisée au début et à la fin de l’étude. Pendant trois mois, je ne dois pas manger avant midi ni après 20 heures et je dois prendre en photo la première et la dernière chose que j’avale. J’avais peur d’avoir faim le matin, mais ce n’est pas le cas. Pour l’instant, mon poids est stable, c’est déjà bien. Peut-être que les résultats me motiveront à une autre prise en charge. Dans tous les cas, je suis contente de faire avancer la science. »

19

Juillet - Septembre 2021

Pour qu’une étude scientifique puisse voir le jour, il faut d’abord établir un protocole de recherche selon des règles strictes. « Il s’agit de dire ce qu’on fait et de faire ce qu’on dit », souligne le Pr Jérôme Pugin, chef du Centre de recherche clinique et du Service des soins intensifs des HUG. Tout doit être explicité : après une revue de la littérature scientifique, l’hypothèse de recherche est formulée, ses objectifs fixés, la population cible (âge, sexe, vulnérabilité, etc.) déterminée, puis la taille de l’échantillon est calculée en fonction de la prévalence de la maladie et de sa mortalité, notamment. Une fois la puissance de l’étude évaluée, il est temps de décrire la manière de sélectionner les patient·es, le mode et la durée d’administration du traitement et son suivi. Il convient ensuite de recruter les participant·es et d’obtenir leur consentement. Un point très important, souligne le Pr Pugin : « Déroulement de l’étude, avantages et inconvénients, effets secondaires potentiels, confidentialité et sécurisation des données, clause de retrait : l’information doit être détaillée et vulgarisée. Le patient donne son accord en signant un formulaire de consentement spécifique devant témoin. »

Re ch er ch e

La recherche pas à pas


Pulsations

Types d'essais cliniques effectués au Centre de recherche clinique en 2020

4

%

Transplantation, thérapie génique

17 %

Dispositifs médicaux

43 %

Médicaments

36 %

Autres essais cliniques

Juillet - Septembre 2021

Le Centre de recherche clinique

87%

60’000 patient·es des HUG ont signé le consentement général. Cela signifie que 87% des patient.es ont accepté la réutilisation de leurs données et échantillons biologiques à des fins de recherche, de manière anonyme, confidentielle et sécurisée. Tandis que 13% des patient·es ont refusé la réutilisation de leurs données. Le consentement peut être révoqué en tout temps.

Fondé en 2005, le Centre de recherche clinique (CRC) a pour mission de pro­ mouvoir la recherche clinique au sein des HUG et de la Faculté de médecine de l’Université de Genève (UNIGE). Véritable support pour les chercheurs et les chercheuses, il veille au respect rigoureux des règlements, lois et directives nécessaires à une recherche de qualité, en valorisant l’innovation. Le CRC s’organise en trois unités. L’Unité d’appui méthodologique d’abord, où épidémiologistes et bio-statisticien·nes offrent un cadre méthodologique ainsi qu’une aide dans le traitement des données des études cliniques et l’analyse des résultats. L’Unité d’investigations cliniques fournit quant à elle la logistique et l’infrastructure dédiées à la réalisation des études. Elle dispose de chambres pour les patient·es et les volontaires sains participant aux études. Des infirmiers·ères et attaché·es en recherche clinique ainsi qu’un·e médecin veillent à leur sécurité. Enfin, l’Unité qualité réalise des audits des études cliniques en cours afin d’en assurer le bon fonctionnement. Elle contribue ainsi à l’amélioration de la qualité des essais cliniques et au maintien du niveau d’excellence. Le CRC est financé par les HUG, l’UNIGE et le Secrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l’innovation (SEFRI).

Savoir + www.hug.ch/aider-recherche

Nathalie, 54 ans atteinte de la maladie de Charcot, a accepté de tester une nouvelle molécule contre la douleur. « J’ai beaucoup de douleurs neurologiques, surtout dans les membres inférieurs. J’étais motivée à participer à cette étude dans l’espoir de moins souffrir pendant quelque temps. Le traitement a très bien fonctionné. L’étude est terminée et comme la molécule n’est pas encore homologuée, je ne peux plus en bénéficier. Il est difficile pour moi de revivre ce niveau de douleur, mais j’espère, malgré ma déception de ne pas pouvoir poursuivre ce traitement, avoir apporté quelque chose à la science. »

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Re ch er ch e

Dossier

3 questions au Pr Jérôme Pugin, chef

du Centre de recherche clinique et du Service des soins intensifs aux HUG.

Comment Genève a-t-elle géré cette pression ?

Nous avons gardé le cap et mis les bouchées doubles. Le Covid-19 a accéléré les temps nécessaires pour passer d’une étape à l’autre des protocoles de recherche. Nous avons simplifié les choses, tout en redoublant de vigilance. Le Centre de recherche clinique et la Commission cantonale d’éthique de la recherche (CCER) ont été très réactifs et très performants. Si nous communiquons bien, nous pouvons aller plus vite. Quelles leçons tirez-vous de cette année ?

pandémie de Covid-19 a-t-elle bouleversé les codes en matière de recherche?

Au printemps 2020, lors de la première vague, les choses se sont déroulées de manière un peu désordonnée, avec un foisonnement d’études et de résultats. Face au besoin urgent de réponses, des auteurs ont publié en passant outre les niveaux de contrôle habituels. Par la suite, un certain nombre d’articles ont dû être retirés, car leur qualité n’était pas suffisante et les résultats n’étaient pas valides. Sous la pression également, des molécules ont été administrées sur la base uniquement d’études fondamentales in vitro, dans lesquelles des effets positifs avaient été démontrés. Heureusement, l’été dernier, de nouvelles recherches ont pu être menées, cette fois sur un grand volume de malades. L’étude britannique Recovery, notamment, a permis de faire la lumière sur l’efficacité, versus l’inefficacité, de plusieurs substances contre le Covid-19.

Photo : Louis Brisset

Pr Jérôme Pugin

« Le Centre de recherche clinique et la Commission cantonale d’éthique de la recherche ont été très réactifs et très performants » Pr Jérôme PUGIN

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Pulsations La

Mes sentiments sont contradictoires. Dans le monde, certains médecins n’ont pas tenu compte des exigences de sécurité propres à une recherche scientifique. Une attitude qui porte préjudice à la communauté scientifique et qui suscite la méfiance du grand public. Nous nous sommes rendu compte de la nécessité de revenir sur le droit chemin. Je retiens par ailleurs une émulation fantastique dans la gestion de la crise sanitaire. Nous avons beaucoup appris : d’un virus, de la contamination, des traitements, etc., mais aussi dans les soins aux patients. La pandémie a fédéré les équipes dans la prise en charge des malades. L’image de la vague résume bien les choses : il y a d’un côté la volonté de surfer sur la vague et de l’autre la prudence pour ne pas tomber. 


Par Geneviève Ruiz Illustration Light and paper

Juillet - Septembre 2021

L ’ o r g a n e

Pulsations

Situé dans la gorge, le larynx est peu connu et pourtant vital. Ses principales fonctions participent à la respiration, la déglutition et la parole. Expert

Dr Igor Leuchter, responsable de l’Unité de phoniatrie des HUG

LE

L’organe de la parole

Le larynx est un organe du système respiratoire situé dans la gorge. Ce conduit rigide est constitué de plusieurs cartilages aux emboîtements complexes, de muscles ainsi que de ligaments. Il a cinq fonctions principales. La première est respiratoire et cela en fait un organe vital : si l’un des cartilages est fracturé, il n’est plus possible de respirer. Le deuxième rôle du larynx est de protéger les voies aériennes pendant la déglutition. Une autre fonction, non moins capitale, est la production de la voix (phonation) grâce aux cordes vocales, qu’il faudrait plutôt appeler « plis vocaux ». C’est leur mise en vibration par l’air expiré depuis les poumons qui produit une onde sonore. Les dernières fonctions sont la toux et la capacité de pousser en fermant les cordes vocales, par exemple pour aller à selle ou lors d’un accouchement.

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L’organe

Une spécificité unique chez les mammifères

Epiglotte Os hyoïde Cartilage thyroïde Cartilage cricoïde

Membrane thyro-hyoïdienne Ligament crico-thyroïdien

Trachée

Chez l’humain, le larynx est situé dans le bas du cou, ce qui entraîne un croisement entre les voies aériennes et digestives. Un tel croisement n’existe pas chez les nouveau-nés ou les autres mammifères, dont le larynx est situé haut dans le cou. Dans le cas de l’adulte, le bon fonctionnement du larynx et la fermeture des cordes vocales lors de la déglutition sont vitaux pour éviter les fausses routes. Chez le jeune enfant, le fonctionnement du larynx n’est pas encore bien acquis, alors que chez les personnes âgées, il a tendance à décliner. Cela rend ces populations vulnérables aux fausses routes.

3’000

Le nombre moyen de déglutitions d’un être humain par jour.

1,5 million Le nombre de fois que vibrent les cordes vocales par jour.

Nodules et polypes

Le cancer du larynx

Le larynx peut être affecté par des virus causant une laryngite, dont les symptômes communs sont le mal de gorge, la perte ou l’enrouement de la voix. La plupart du temps sans gravité, ceux-ci nécessitent néanmoins une consultation lorsqu’ils perdurent plus de trois semaines. Ils pourraient alors révéler un nodule, sorte de callosité se formant sur les cordes vocales lorsqu’elles sont surutilisées. Les polypes sont des excroissances bénignes qui peuvent aussi gêner le travail des cordes vocales et qui, dans certains cas, doivent être enlevés par chirurgie.

L’enrouement chronique peut aussi être le symptôme d’un cancer du larynx, dont l’un des facteurs de risque est le tabagisme. À un stade avancé, l’ablation du larynx est nécessaire, complétée par une radiothérapie. Le chirurgien sépare alors les voies digestives des voies aériennes, car le larynx ne peut plus protéger ces dernières. Les personnes ne respirent plus par la bouche ou le nez, mais par un trachéostome, un orifice situé à la base du cou. Elles doivent réapprendre à parler au moyen d’autres techniques qu’avec les cordes vocales.

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100 à 300

La fréquence de la voix humaine varie entre 100 et 300 Hertz. Elle est en moyenne plus élevée chez les enfants et les femmes.

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Le nombre de cartilages qui constituent le larynx.

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LARYNX


Pulsations

Par Elodie Lavigne Photo Nicolas Righetti | lundi13

L e

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p o r t r a i t

« Les patients nous confient ce qu’ils ont de plus précieux »

Médecin adjointe en charge des activités de psychiatrie de liaison aux HUG, la Dre Lamyae Benzakour répond aux difficultés psychiques des patient·es hospitalisé·es pour un problème somatique. Durant la crise sanitaire, elle a mis son expertise au service de celles et ceux que le Covid-19 a mis·es à rude épreuve. 24


Le portrait

E

Ensemble, c’est tout

lle se rend au chevet des blessé·es de la vie pour les aider à surmonter une épreuve, imposée par la maladie ou l’hospitalisation. La Dre Lamyae Benzakour, psychiatre de liaison, intervient auprès des patient·es hospitalisé·es qui présentent par ailleurs une souffrance psychique.

La psychiatre se spécialise en psychotraumatologie. En 2015, lorsque les attentats du Bataclan frappent Paris, elle est aux premières loges : « L’unité dans laquelle je travaillais se trouvait à proximité, nous avons été mobilisés pour prendre en charge les victimes. » Avec une mission : celle d’objectiver leur souffrance et veiller au risque de complications, comme le syndrome de stress post-traumatique. La charge émotionnelle est lourde : « Nous pouvions nous identifier à nos patients, des Parisiens qui n’avaient jamais vécu en temps de guerre. C’était dur de les sécuriser en étant soi-même dans un climat d’insécurité. » Mais la professionnelle aime être sur le terrain et contribuer à l’effort collectif.

1981

Naissance à Paris.

2011

Thèse de doctorat en médecine1, spécialité psychiatrie.

2016

Arrivée aux HUG comme cheffe de clinique au CAPPI Servette.

2018

Nomination comme médecin adjointe au Service de psychiatrie de liaison et d’intervention de crise.

Malgré son parcours brillant, la psychiatre avance avec humilité : « Je crois en les outils que j’utilise et en la preuve scientifique, mais il faut rester modeste. Je dis toujours à mes patients qu’il n’y a pas de garantie de résultat, mais que nous devons essayer ensemble. » Elle se dit consciente de l’exigence à atteindre et du défi que représente le fait de devoir répondre à la souffrance de l’autre : « En parlant de leur intimité, les patients nous confient ce qu’ils ont de plus précieux. » Humaine et profondément empathique, elle a appris à se préserver. Cette parisienne née apprécie la vie genevoise, plus calme et plus proche de la nature. Cinéphile et musicienne, elle joue du violon dans un orchestre à cordes. Son regard s’illumine lorsqu’elle évoque le Maroc, son pays d’origine, et les concerts donnés dans les campagnes de Marrakech pour des enfants qui n’avaient jamais entendu de musique classique. 

1. « Le système endocannabinoïde : une nouvelle approche de l’anxiété et de la dépression ».

25

Juillet - Septembre 2021

Cette vocation de soigner est apparue très tôt. Lamyae Benzakour a toujours voulu être médecin. À l’âge de quatre ans, elle demande à ses parents une mallette de docteur. D’un père banquier et d’une mère juriste de formation, tous deux marocains, elle grandit à Paris, entourée d’une grande sœur et d’un petit frère. Au lycée, elle se passionne pour la philosophie, mais choisit finalement la médecine, qu’elle juge plus pragmatique. Sa soif de réflexion n’est toutefois pas assouvie. Elle suit alors en parallèle un cursus de philosophie et obtient un bachelor. « Je reste très attachée à la philosophie des sciences, de l’art et à l’éthique », souffle-t-elle. Les neurosciences l’amènent ensuite à la psychiatrie, qui devient une évidence : « Elle donne accès à l’humain dans sa globalité. » C’est encore plus vrai pour la psychiatrie de liaison, qu’elle découvre durant son internat. Face à des situations complexes, où le somatique et le psychique sont intriqués, elle apprend l’art du diagnostic et la nécessité d’être dans une approche pluridisciplinaire.

Forte de son expérience, au printemps dernier, elle mobilise son équipe pour repérer la détresse psychique des patient·es touché·es par le Covid-19. Dans l’éternel souci d’améliorer sa pratique, elle met en place des outils de dépistage et des espaces de parole pour le personnel soignant. Travailler ensemble est pour elle un moteur : « En tant que psychiatre de liaison, on fonctionne toujours en regards croisés. Les patients Covid ont particulièrement besoin de cette complémentarité. » Formée à l’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) et à la thérapie cognitive et comportementale, elle mène aussi une activité de psychothérapeute à part entière. Elle est très impliquée en périnatalité et s’investit par ailleurs dans l’enseignement et la recherche. Elle a mis en place notamment des études sur le trouble du stress post-traumatique postnatal ou encore sur l’impact psychique du Covid-19 sur les personnes infectées.


Pulsations

Par André Koller Photos Nicolas Righetti | lundi13

Juillet - Septembre 2021

R e p o r t a g e

Un nouvel espace dédié à la neuroréadaptation Face à la hausse de la demande, le Service de médecine interne et réadaptation de l’Hôpital de Bellerive aménage un espace de thérapies flambant neuf et des équipements plus adaptés.

E

n lien avec le vieillissement, le stress, la sédentarité, l’obésité, l’hypertension artérielle, les maladies cardiovasculaires ne cessent de progresser. Et avec elles, les accidents vasculaires cérébraux (AVC). Première cause de handicap dans les pays occidentaux, les AVC devraient augmenter encore de 30% d’ici 2035. À l’Hôpital de Bellerive, l’Unité spécialisée en neuroréadaptation est passée de 17 à 27 lits en trois ans. « La grande majorité des quelque 250 patients par an hospitalisés ici le sont à la suite d’un AVC », constate le Dr Christian Thomas, médecin adjoint du Service de médecine interne et réadaptation de l’Hôpital de Bellerive. Pour lui, la nouvelle salle de thérapies pluridisciplinaires, financée par la Fondation privée des HUG, constitue une réponse idéale à une demande croissante et offre plusieurs avantages. 26

Aménagée au 3e étage, elle est située à quelques pas des chambres. Un atout non négligeable pour des personnes de 80 ans en moyenne, à mobilité réduite, qui s’y rendent plusieurs fois par jour pendant environ cinq semaines. Autre gain, sa dimension. Médecins, infirmiers·ères, physiothérapeutes, ergothérapeutes, logopédistes, neuropsychologues, psychologues, voire diététicien·nes et assistant·es sociaux peuvent y organiser plus facilement des séances de réadaptation pluridisciplinaires.


Reportage

Juillet - Septembre 2021

La rééducation des fonctions cognitives peut être réalisée, au calme, dans un box fermé (photo de gauche).

Témoignage #1

« Je sors seul de mon lit » « La salle est splendide ! », s’exclame tout de go Gérald Goy, 96 ans. Hospitalisé après une mauvaise chute, il avait perdu beaucoup de force et de masse musculaire. « Après deux semaines de réadaptation, j’ai fait des gros progrès. Je sors seul de mon lit ! » Plus encore que les équipements, ce sont les méthodes qui l’ont impressionné. « J’ai dû faire un exercice surprenant : tomber et me relever. Chuter volontairement, même sur un épais tapis de mousse, n’a pas été facile. Me mettre debout seul, impossible. J’ai cru rester par terre toute la journée. Les soignants ont eu pitié. Ils m’ont remis sur pied ! Blague à part, ils nous font prendre conscience des dangers. J’ai appris, moi, à ne plus tomber », se félicite le nonagénaire.

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Pulsations

Cette salle comprend, par exemple, un box clos équipé d’un poste informatique où logopédistes et neuropsychologues exercent dans le calme les fonctions cognitives et langagières des patient·es. « Des synergies essentielles… La réadaptation ne vise pas forcément à supprimer le handicap mais à faire avec. Or la collaboration étroite entre spécialistes permet souvent de trouver des stratégies ad hoc pour rendre les patients plus autonomes », souligne le Dr Thomas, qui enchaîne avec une visite guidée. Exosquelette robotisé

Juillet - Septembre 2021

De prime abord, le nouvel espace ressemble à un beau fitness. À travers la baie vitrée, des champs de colza jaune vif éclatent comme un soleil. Le second regard détrompe. Une salle de sport classique ne comprend pas d’exosquelette robotisé pour la rééducation des bras. Ni de harnais suspendu à un rail fixé au plafond pour l’aide à la marche. Et encore moins un jeu Puissance 4 de la taille d’un espalier. « Tous ces outils ont été analysés. Le Puissance 4, par exemple, combine rééducation physique et neuropsychologique. Les physiothérapeutes et ergothérapeutes analysent la dextérité et les mouvements nécessaires pour manipuler les pions. Les neuropsychologues mesurent les capacités cognitives. Avant l’ouverture de cette salle, dont l’inauguration officielle est prévue cet été, plus de la moitié des patients regagnaient leur domicile après leur hospitalisation. C’était déjà excellent. Nous espérons maintenant améliorer ce taux », conclut le Dr Christian Thomas. 

Témoignage #2

« De bonnes sensations » « Quand je suis arrivé à l’Hôpital de Bellerive, il y a trois semaines, j’étais incapable de parler et je marchais avec difficulté. » Le débit fluide et l’articulation parfaite de Mohand Salah Rezzouk, 83 ans, témoignent de ses récents progrès. Opéré d’un hématome cérébral, cet ancien sportif, grand amateur de football, loue la proximité de la salle avec les chambres. « C’est très important d’avoir

facilement accès à ces installations pour s’exercer tous les jours. » Il apprécie aussi la qualité des équipements. « J’ai perdu de la force dans les jambes. Ma main droite est encore un peu faible. Mais les appareils qui travaillent l’ensemble du corps sont ceux qui me font le plus de bien. Au fil des séances, j’ai recouvré de bonnes sensations. J’espère rentrer très bientôt à la maison », conclut-il.

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Le Dr Christian Thomas est médecin adjoint au Service de médecine interne et réadaptation de l’Hôpital de Bellerive.


Pulsations

Jeûner au bon rythme

Crédit : istockphoto

régimes classiques qui rognent sur les graisses, le sucre et les calories, le jeûne intermittent se concentre sur les jours du mois ou sur les heures de la journée durant lesquels nous mangeons. Une des formes populaires est le 16h/8h : sur une journée, il s’agit de jeûner pendant seize heures (en buvant de l’eau ou des boissons sans calories) et de manger et boire selon ses envies durant huit heures.

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L’organisme a besoin de plusieurs semaines pour s’habituer au nouveau rythme. Faux. Ce rythme est facile

à instaurer. Toutefois, il est difficile de le maintenir sur la durée. 

Juillet - Septembre 2021

Le jeûne intermittent permet de manger de tout. Vrai. Contrairement aux

l’insuline, fabriquée dans les heures qui suivent le repas, permet au sucre d’être absorbé par nos cellules. En mettant le corps au repos pendant seize heures, elle n’est plus libérée et, partant, le tissu graisseux (cellules adipeuses) et les muscles utilisent comme source d’énergie les sucres et les graisses stockés.

Par Giuseppe Costa

La mise au repos du métabolisme est un facteur-clé. Vrai. Habituellement,

L’attention est portée sur l’heure plutôt que sur le contenu. Vrai. L’idée est que manger

au bon moment pour notre corps serait plus bénéfique pour notre santé. Il est fait référence ici aux horloges internes, qui suivent un rythme circadien d’environ 24 heures. Situées dans le cerveau et de nombreux tissus, elles contrôlent le métabolisme et nous aident à suivre le rythme de l’alimentation et du sommeil. Elles nous permettent ainsi d’anticiper quand nous devons manger et quand nous devons vivre sur nos réserves. Lorsqu’il y a un décalage entre ces deux rythmes, notre métabolisme devient moins efficace et accumule des graisses.

facile à suivre qu’un régime classique. Avoir ses points faibles et ses petits plaisirs, c’est humain. Avec le jeûne intermittent, les frustrations imposées par les régimes classiques sont moins présentes. Et le fameux effet yoyo, qui fait parfois reprendre plus de poids que nous n’en avons perdu, serait moins fréquent. En revanche, chez certaines personnes, le jeûne intermittent peut entraîner des symptômes désagréables comme de la fatigue, des maux de tête ou des nausées.

V r a i / F a u x

Le jeûne intermittent met l’organisme au repos pendant plusieurs heures. Explications sur cette approche qui contribue à la perte de poids avec le Dr Thin-Hai Collet, médecin adjoint à l’Unité de nutrition des HUG.

Le jeûne intermittent n’a que des avantages. Vrai et faux. Il est plus


Pulsations

Par Laetitia Grimald1

Juillet - Septembre 2021

S é c u r i t é

De la simple compresse au respirateur, rien ne doit échapper à l’équipe de matériovigilance pour assurer la sécurité des patient·es. Dix secteurs clés des HUG y contribuent également, évitant ainsi des préjudices graves aux personnes soignées.

homologation « CE médical », sésame indispensable permettant une utilisation au sein de l’hôpital. Concrètement, les institutions de santé et Swissmedic, en tant qu’instances d’autorisation et de surveillance des produits thérapeutiques, ont l’obligation d’assurer une veille rigoureuse et d’agir si besoin afin d’écarter tout danger potentiel pour les patient·es. Dès lors, une double dynamique s’opère : d’un côté, les signalements émanant de l’hôpital et remontant à Swissmedic (système dit « ascendant »), de l’autre, ceux alertant les institutions de santé (système dit « descendant »). « Toute faille doit être signalée » Particulièrement investis sur le sujet, les HUG n’ont de cesse d’affûter leurs armes pour gérer au mieux ces flux. En première

LA MATÉRIO VEILLE SUR C’ est un travail de l’ombre et de tous les instants qui incombe à la matériovigilance des HUG. Sous le feu de ses projecteurs : tout dispositif médical faisant l’objet d’un signalement, depuis l’hôpital lui-même ou depuis l’extérieur, à savoir le fabricant ou Swissmedic. Et pour cause, à l’instar des médicaments, chacun de ces dispositifs reste soumis à une surveillance après son autorisation de mise sur le marché et son

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ligne, un duo mobilisé au quotidien : Hervé Jacquemoud, chef du Service d’ingénierie médicale, et Delphine Lecerf, responsable qualité au Service d’ingénierie médicale. « Aujourd’hui, le message est clair : dans le doute, toute faille doit être signalée », relèvent-ils d’entrée. Tous deux œuvrent d’ailleurs au sein de la Commission de vigilance pour laquelle ils collaborent étroitement avec les représentants de dix secteurs clés de l’hôpital (soins, corps médical, direction des systèmes d’information, direction des affaires juridiques, service prévention et contrôle de l’infection, pharmacie, stérilisation centrale, maintenance des équipements biomédicaux, achats, laboratoire). En découlent une mobilisation croissante au sein de l’institution et, côté logistique, des procédures informatisées


Sécurité

toujours plus performantes. Celles-ci permettent à tout membre du personnel soignant de signaler une défaillance et à la matériovigilance elle-même d’examiner tout incident interne ou signalement extérieur. Sécurisation des soins toujours plus élevée Dans le détail, 925 signalements ont ainsi été annoncés pour la seule année 2020, dont 605 relevaient de notifications de sécurité de Swissmedic. Des chiffres inquiétants ? Logiques et plutôt rassurants au contraire, détaille Hervé Jacquemoud : « Le nombre d’alertes, qui est d’ailleurs en constante augmentation, s’explique par deux principales raisons. La première découle de l’offre de soins qui ne cesse de s’intensifier et de se diversifier au fil des années.

Dispositifs médicaux : de quoi parle-t-on ? Soumis à des niveaux d’exigence toujours plus élevés, les dispositifs médicaux sont classés en différentes catégories et réglementés par des normes européennes. Classe III Prothèse (hanche, genou, etc.) — implant mammaire — pacemaker Classe IIb Respirateur — machine de dialyse — appareil de massage cardiaque

Classe IIa IRM — gant chirurgical — tube de trachéotomie Classe I Lit médical — pansement — béquille

Conséquence : la quantité de dispositifs médicaux utilisés a doublé en dix ans. Le risque d’une anomalie sur un lot, d’une erreur sur une notice croît en conséquence. La seconde explication relève d’une culture de la vigilance croissante, ce qui va dans le sens d’une sécurisation des soins toujours plus élevée. Cette tendance s’observe tant du côté de l’institution que de Swissmedic. » Se devine une mission alliant expertise technique, expérience et réactivité. « Si le signalement vient de l’interne, nous devons rapidement pouvoir identifier s’il s’agit par exemple d’une panne, d’une erreur d’utilisation ou d’un réel défaut de conception. Si le problème est avéré, nous alertons Swissmedic et le fabricant. La suite des investigations n’est pas de notre ressort, mais en attendant les directives, nous pro-

cédons à une sécurisation, par exemple via un retrait de lot ou une mise en quarantaine de l’appareil incriminé. Si l’alerte vient de l’extérieur, la démarche est différente, mais aboutit aux mêmes mesures de mise en sécurité », précise Hervé Jacquemoud. Si le plus souvent les alertes relèvent de dysfonctionnements ponctuels et mineurs, 30 à 50 risques graves pouvant porter préjudice aux patient·es seraient ainsi écartés chaque année. 

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Juillet - Septembre 2021

VIGILANCE NOUS


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Photo Nicolas Schopfer Par Clémentine Fitaire

Juillet - Septembre 2021

T é m o i g n a g e

« Ma vie avec mon demi-cœur artificiel » Cela fait cinq ans que Jean-Dominique Grau, 77 ans, souffrant d’insuffisance cardiaque*, a bénéficié de l’implantation d’une assistance ventriculaire.

Jean-Dominique Grau accompagné d’Aurélie Schneider-Paccot, infirmière spécialisée à l’Unité d’insuffisance cardiaque et réadaptation cardiaque.

* On parle d’insuffisance cardiaque lorsque le cœur n’arrive pas à exercer correctement sa fonction de pompe. S’il peine à se remplir ou à expulser le sang, l’apport d’oxygène aux organes devient insuffisant. 32


Témoignage

S

La solution de la dernière chance

Tout a commencé en 2010. Jean-Dominique Grau est sujet à une décompensation cardiaque qui traduit un épuisement du cœur. Les médecins envisagent alors une greffe cardiaque, mais au vu de son âge et de la fragilité de son cœur, cette possibilité est finalement écartée. Après une nouvelle décompensation en 2016, deux solutions lui sont proposées. Tout d’abord, l’essai d’un médicament destiné à stimuler

le cœur. Mais les effets escomptés ne se font pas sentir. Reste donc le recours à une assistance ventriculaire. Le dispositif, nommé « HeartMate », se présente sous forme d’une turbine à flux continu qui aspire le sang du ventricule gauche et le réinjecte dans l’aorte. Cette mini-pompe est alimentée électriquement par des batteries externes reliées à un câble sortant de l’abdomen du patient. Après une série de tests pour confirmer sa compatibilité, Jean-Dominique Grau a bénéficié de la dernière génération de cet appareil. Plus physiologique que ses prédécesseurs, il fonctionne par lévitation électromagnétique et entraîne un risque moindre de thromboses ou de saignements. « On sait que les choses peuvent mal tourner. Mais les équipes sont très à l’écoute et j’ai abordé sereinement le sujet des directives anticipées. » Jean-Dominique Grau rencontre également d’autres patients déjà implantés, qui l’aident à préparer « l’après ». L’implantation de l’assistance ventriculaire est une intervention à cœur ouvert réalisée sous anesthésie générale. « Je n’avais pas imaginé la difficulté des soins intensifs. Sous l’effet des médicaments, j’étais dans un état délirant pendant trois jours. » Un patient partenaire

Après plusieurs semaines en soins intensifs, au Service de chirurgie cardiovasculaire puis en réadaptation cardiaque, Jean-Dominique Grau a dû réapprendre à 33

manger, à marcher, et apprivoiser sa « machine ». « La nuit, par exemple, je dois me brancher sur un secteur placé sur la table de nuit. Je craignais de ne pas pouvoir me positionner sur le côté. Mais je me suis habitué et je dors bien… il faut juste ne pas avoir envie d’aller aux toilettes. » Le système d’alarme a également de quoi surprendre. « En cas de problème ou si les batteries sont à plat, une sirène retentit et ça réveille le quartier ! » Toutes les semaines, une aide à domicile vient changer le pansement au niveau de l’orifice de sortie. Tous les quinze jours, Jean-Dominique Grau se rend également à l’hôpital pour effectuer un dosage de son traitement anticoagulant. Tous les mois, il est soumis à un bilan sanguin complet. Deux fois par an, le bon fonctionnement cardiaque est surveillé via une échographie de contrôle. « Je suis suivi comme mon ombre ! C’est parfois contraignant, mais finalement très rassurant. » À la maison aussi, Jean-Dominique Grau est entouré. « La maman de ma filleule vient régulièrement pour le ménage et les courses. Mon neveu, physiothérapeute, me fait des séances car je souffre de douleurs dorsales et une amie, coiffeuse, me lave les cheveux toutes les semaines. Enfin, mes deux sœurs habitent près de chez moi. Je suis dépendant, certes, mais de personnes que j’aime. » 

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Une trentaine d’implantations d’assistances ventriculaires ont été réalisées depuis 2008 aux HUG.

Juillet - Septembre 2021

on « demi-cœur artificiel », comme le surnomme JeanDominique Grau, fonctionne à merveille. Moins d’essoufflement lors des efforts, une meilleure capacité de respiration et de récupération… s’il n’y avait pas cette sacoche de trois kilos en bandoulière qui le relie à des batteries, il lui arriverait même de l’oublier. Sa vie quotidienne a pourtant été adaptée. « La plus grosse contrainte est d’avoir dû renoncer aux bains. J’ai essayé la douche, en faisant attention à ne pas mouiller les branchements, mais c’était un exercice de contorsionniste compliqué qui annulait le plaisir du moment ! Je me contente donc de faire ma toilette avec le gant. » Des petits ajustements du quotidien qui ne sont rien à côté de ce que cette nouvelle vie lui apporte. « Je ne mets plus une demi-heure pour simplement descendre chercher mon courrier. »


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1

Arrivée du sang « frais »

Remontée du sang « veineux »

Arrivé aux pieds, il est pris en charge par le système veineux pour remonter vers le cœur. Cette mission est assurée à 70% par les veines profondes et à 30% par les veines superficielles. Ces dernières sont le plus souvent sujettes aux varices.

2

Le sang en provenance du cœur, chargé en oxygène, descend vers les jambes via les artères.

Les varices

1

Grande saphène Veine superficielle donnant naissance aux varices

Veine fémorale Veine profonde située au centre de la jambe, invisible de l’extérieur

Artère

4

3

Expert : Pr Marc Righini, médecin-chef du Service d’angiologie et d’hémostase des HUG

Veines dilatées et tortueuses, les varices peuvent empêcher le sang d’être correctement ramené vers le cœur. Il s’agit alors d’un mauvais retour veineux qui provoque des symptômes désagréables, mais le plus souvent sans danger. Lorsque ceux-ci deviennent invalidants ou sont associés à des varices importantes, à un œdème ou à un ulcère, il faut toutefois intervenir. Un vaste arsenal thérapeutique est à disposition pour traiter cette affection fréquente.

Concernant le plus souvent les membres inférieurs, les varices engendrent une « insuffisance veineuse » : le sang n’est pas correctement ramené vers le cœur.

Le retour veineux

• Âge • Surpoids • Sédentarité • Position debout ou assise prolongée • Grossesse • Hérédité • Contraception orale • Ménopause

Facteurs de risque

Le pourcentage de la population atteinte de varices

25%

Par Laetitia Grimaldi Illustration Muti | Folioart

L ’ i n f o g r a p h i e

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Varicosités intradermiques

Varice tronculaire

Ulcère En cas de varices importantes, une insuffisance veineuse chronique peut survenir, dont la complication la plus sévère est un ulcère cutané au niveau des chevilles.

5

Au niveau des veines comportant des varices, le retour veineux se fait mal. Une partie du sang stagne. Conséquences : sensation de jambes lourdes, fourmillements, coloration brunâtre de la peau, etc.

4

Fines dilatations des veines superficielles, les varicosités intradermiques sont sans gravité.

3

En cas de mauvais retour veineux, des complications peuvent apparaître :

Mauvais retour veineux

La proportion de femmes concernées par rapport aux hommes

x2à3

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• Port de talons hauts

• Exposition prolongée à des sources de chaleur (soleil, sauna, hammam, etc.)

• Position debout ou assise prolongée

Déconseillé

• Surélévation des jambes (si possible la journée ; en surélevant les pieds du lit de 10-15 cm la nuit).

• Douche d’eau froide sur les jambes matin et soir

• Activité physique régulière (marche, vélo, natation, etc.)

Conseillé

L’hygiène de vie prévient l’apparition des varices et atténue les symptômes si elles sont installées.

Prévention

Pour assurer le retour veineux, certaines veines sont équipées de valvules, sortes de clapets évitant un reflux du sang vers le bas.

2

Traitements

5

Les valvules dysfonctionnent. Sous le poids du sang refluant, la veine se dilate. On parle de veine « incontinente ».

En cas de varices

Injection d’un liquide sclérosant faisant disparaître Éveinage chirurgical les varices de petite taille (varicosités intradermiques). Aussi appelée stripping, cette intervention consiste à retirer la veine malade à partir de deux Sclérothérapie à la mousse incisions : une au niveau du pli de l’aine, l’autre, plus bas, dans la jambe. Injection d’une mousse faisant disparaître

Il élimine la veine de l’intérieur en utilisant l’énergie thermique (chaleur).

Laser endoveineux

La compression élastique freine l’évolution des varices. Sclérothérapie liquide

Il s’agit de retirer les varices via des micro-incisions.

Mini-phlébectomie

les varices de taille plus importante (varices tronculaires).

Bas de compression de classe 2

Conseillés par cures de 1 à 3 mois, ils soulagent les douleurs et la sensation de jambes lourdes.

Médicaments veino-actifs

De nombreuses options thérapeutiques existent selon la taille des varices et l’ampleur des symptômes.

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Ulcère

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Veine saine

L’infographie


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Photo Nicolas Schopfer Par Clémentine Fitaire

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R e n c o n t r e

« La crise Covid nous a fait faire un bond de géant » Limiter les contacts tout en assurant la continuité des soins, tel a été le défi relevé avec brio par l’équipe du Service de cybersanté et télémédecine. La Dre Sanae Mazouri, médecin adjointe, revient sur ce tournant historique.

La télémédecine a commencé à se développer bien avant la crise Covid… Dre Sanae Mazouri En effet, dès fin 2017, nous travaillions déjà sur une première version de plateforme de téléconsultations assistées, financée par la Fondation privée des HUG et par la Direction générale de la santé du canton de Genève. Pulsations

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Rencontre

Déployée auprès de l’imad et d’autres prestataires de soins à domicile, cette application permet aux patientes et patients de se faire accompagner par une infirmière ou un pharmacien lors de leur téléconsultation avec le médecin. Nous avancions alors à petits pas, en explorant le terrain pour mesurer les besoins de télémédecine à Genève, ville extrêmement bien dotée en services médicaux.

Des choses doivent-elles encore être améliorées ? Il y a toujours des choses à améliorer ! Par exemple, cette plateforme n’était pas accessible aux 10% de patients allophones, soit ceux qui ne parlent pas la même langue que le médecin. Sans compter les personnes malentendantes avec qui la communication est également difficile. Nous avons donc saisi l’occasion d’inté-

La plateforme a été mise à disposition d’autres institutions. C’était important pour vous ? Oui, c’est une façon pour nous de soutenir le déploiement de la télémédecine, d’apprendre, d’évoluer, d’élargir nos connaissances. Nous fournissons à l’Hôpital ophtalmique Jules-Gonin, à l’Hôpital du Jura ou encore à la Croix Rouge internationale une version adaptée à leurs spécificités. Cet outil va-t-il trouver sa place dans l’après Covid ? C’est ce que nous sommes en train de préparer. Je pense qu’il a un grand intérêt pour les maladies chroniques ou la psychiatrie par exemple. De nombreux patients peuvent bénéficier de consultations à distance, intégrées à un suivi en face-à-face si nécessaire. Dans le domaine de la chirurgie, nous travaillons avec l’équipe du Pr Frédéric Triponez et du futur Centre

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de chirurgie ambulatoire, car HUG@home pourrait aussi être utilisée en pré et postopératoire pour préparer une consultation d’anesthésie, recueillir les formulaires de consentement, adapter le traitement antalgique, effectuer le suivi… La télémédecine trouve également sa place dans le tri des urgences via le 144 car elle permet une évaluation clinique plus fine grâce à la vidéo. Bref, le potentiel est vaste. Nous menons actuellement un projet de recherche avec l’Université de Genève pour identifier les représentations et les préférences des médecins et des patients en téléconsultation, afin de former au mieux les équipes soignantes à cette nouvelle pratique. 

Un grand succès De mars 2020 à avril 2021, près de 12’000 téléconsultations ont été réalisées via les applications HUG@home et Doctor@home (version développée pour les médecins de ville). Plus de 1’000 professionnel·les des HUG et plus de 400 médecins de ville y ont eu recours. Une phase pilote pour les pharmacies est également en cours avec Pharma24.

PLUS D’INFOS SUR www.hug.ch/application-mobile/hughome

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Comment la pandémie a-t-elle accéléré les choses ? Dès mars 2020, nous avons pris la mesure de la situation et avons développé dans l’urgence une seconde version d’HUG@home pour la téléconsultation directe. Alors que les soins non urgents étaient déprogrammés, certains patients, notamment ceux concernés par des maladies chroniques, ont stoppé leur suivi. La mise en place des consultations virtuelles a permis d’assurer la continuité des soins, en particulier pour ces patients vulnérables, et d’éviter d’en arriver à des situations critiques.

grer à HUG@home l’outil Compréhensio (application de télé-interprétariat qui était en cours de développement aux HUG). Depuis mars 2021, nous avons développé une nouvelle version d’HUG@home permettant d’inviter un interprète dans la téléconsultation, mais aussi des proches aidants qui, on le sait, participent beaucoup aux soins. Enfin, nous travaillons à l’intégration des objets médicaux connectés (tensiomètre, thermomètre, saturomètre, glucomètre), utilisables par les soignants assistants ou les proches.


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Par Laetitia Grimaldi Illustration Helder Oliveira

Juillet - Septembre 2021

J e u n e s

Prendre soin des étudiant·es

Pas de médecin attitré·e, méconnaissance du système de soin, franchises élevées, les étudiant·es oublient souvent de s’occuper de leur santé. Depuis cinq ans, la Consultation de médecine interne générale leur offre un filet de sécurité adapté à leurs besoins. 38


Jeunes

E

ntre l’adolescence et l’âge où, quelques années plus tard, une certaine routine s’installe, il y a cette tranche de vie tour à tour exaltante et potentiellement angoissante où l’on construit son avenir. Côté santé ? Bien souvent, faute de temps, d’argent parfois, le sujet passe au second plan, sauf si un problème survient et ne laisse pas le choix. Pour les mieux loti·es, le ou la médecin généraliste sera contacté·e. Mais pour d’autres, notamment ceux ou celles ayant quitté leur canton – ou leur pays – pour les études, les freins sont concrets : pas de médecin attitré·e, méconnaissance du système de soins, franchises élevées. Cette équation périlleuse a motivé la création en 2016 de la Consultation de médecine interne générale pour les étudiant·es. Rattachée au Service de médecine de premier recours, elle réunit aujourd’hui trois médecins généralistes. En pratique, les rendez-vous sont à prendre en ligne (lire ci-dessous), mais un accès se fait aussi parfois par l’intermédiaire de l’Unité santé jeunes ou par le Service des urgences des HUG. Les consultations se veulent adaptées aux spécificités de cette tranche d’âge. Car si, bien sûr, les situations sont individuelles, certains points communs se profilent. Parmi eux : souffrances psychiques, insomnies, troubles du comportement alimentaire, affections gynécologiques, prise de risques par le biais de substances (tabac, alcool, cannabis, etc.) ou de rapports sexuels non protégés. « Si les problématiques de santé ne sont pas les mêmes à 20 et à 50 ans, la façon de les aborder diffère elle aussi. D’abord parce que ces sujets relèvent souvent de l’intime. Mais aussi car certains jeunes n’ont pas vu de médecin depuis le·la pédiatre de leur enfance. Ce nouveau contexte de soins peut les mettre mal à l’aise, physiquement et psychologiquement. Nous devons tenir compte de tout cela », explique le Dr Stéphane Bernard, chef de clinique et responsable de la consultation.

Faciliter l’accès aux soins

Car l’enjeu est de taille. Incidence sur la qualité de vie, mais également sur les études et, par ricochet, sur l’avenir : les conséquences de problèmes de santé sérieux non pris en charge à 20 ou 25 ans peuvent aller loin… « Une dépression sévère, une addiction ou encore des comportements à risque qui s’installent à ce moment-là de l’existence peuvent dessiner une vie tout autre que celle que l’on aurait voulue. Médicalement parlant, cela peut se mesurer en années de vie en parfaite santé perdues. Un constat d’autant plus rude que l’offre de soins est là et que les jeunes sont très souvent dotés de ressources et d’une capacité de résilience exceptionnelles. D’où l’importance de leur faciliter l’accès aux soins autant que possible », conclut le Dr Bernard.  Infos pratiques La Consultation de médecine interne générale pour les étudiant·es fonctionne exclusivement sur rendez-vous. Où ? Entrée principale des HUG (rue Gabrielle-Perret-Gentil 4, Service de médecine de premier recours, bâtiment Louise Morier, 2e étage) Quand ? Du lundi au vendredi Comment ? Prise de rendez-vous en ligne : hug.plus/consultationetudiants Plus d’infos ? Par email à rendez-vous.SMPR@hcuge.ch ou par téléphone au 079 553 56 57

Pédagogie, écoute, bienveillance

Parmi les outils à disposition ? La pédagogie, l’écoute et la bienveillance. « Un climat de confiance et de dialogue est essentiel pour 39

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S’adapter aux spécificités

comprendre ce qui se cache derrière certains symptômes. Une crise de palpitations qui conduit un jeune aux urgences, par exemple, masque peut-être une situation de détresse pouvant s’aggraver à plus ou moins long terme, même si le cœur, lui, va très bien. Notre rôle est d’être attentif à ce qui n’est pas dit spontanément, à tenir compte du jeune dans sa globalité et selon ses conditions de vie. L’ensemble du réseau de soins des HUG est ensuite un relais précieux et tout trouvé si besoin », poursuit l’expert.


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Par Elodie Lavigne

Juillet - Septembre 2021

J u n i o r

Illustrations PanpanCucul

J'ai la trouille, les chocottes, la pétoche Ce n'est pas parce qu'on a peur dans la vie que l'on est faible ou que l'on manque de courage. La peur est un sentiment normal, utile et même protecteur.

Experte Dre Marie Schneider, cheffe de clinique à l’Unité de guidance infantile, Service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent

Que se passe-t-il dans le corps ? Une émotion primaire La peur est une réaction très ancienne, inscrite en chacun•e de nous. C’est un signal d’alarme qui se déclenche lorsqu’on se sent menacé•e par une personne, un animal ou une situation. Elle est indispensable à notre survie : si tu n’avais jamais peur, tu risquerais de te mettre en danger. En partenariat avec

Face à un danger, l’organisme se mobilise pour se préparer à la fuite ou au combat. Le circuit de la peur se situe dans le cerveau. Différentes zones s’activent et une cascade de réactions biochimiques se produit. La sécrétion d’hormones du stress (l’adrénaline) par les glandes surrénales multiplie les forces physiques et mentales. Les battements du coeur et la respiration s’accélèrent et le sang afflue dans les muscles et les organes pour faire face à la menace. 40

J'ai une boule au ventre La peur peut se manifester sous la forme d’une angoisse. Parfois, on ne sait pas pourquoi on a ce sentiment de malaise diffus ou d’oppression plus ou moins durable. Chez les enfants, elle peut s’exprimer dans le corps par des maux de ventre. Chez les tout-petits, l’inquiétude se traduit parfois par de l’agitation.


Junior

J'ai trop peur !

Certaines peurs font partie du développement et disparaissent à mesure que l’on grandit. Entre 6 mois et 2 ans, les enfants ont peur quand leur maman ou papa s’éloigne et craignent l’inconnu. Entre 2 et 4 ans, on a peur du noir, des monstres, des sorcières, des clowns, des gros animaux ou des orages, par exemple. Entre 5 et 12 ans, on redoute plutôt les voleurs, le dentiste, les médecins. Vers l’âge de 10 ans, on est souvent effrayé•e par les catastrophes naturelles, les guerres ou les conséquences du réchauffement climatique, comme la disparition des espèces animales ou la pollution. Les craintes des adolescent•es sont plus proches de celles des adultes (peur de l’avenir, du rejet des autres, etc.). Les adultes aussi ont des peurs, même s’ils les cachent parfois.

Il arrive que la peur soit excessive. La phobie est une peur intense et irrationnelle qui se fixe sur un animal (chiens, araignées, insectes, etc.) ou une situation en particulier (prendre l’avion ou être dans la foule, par exemple). Une personne qui a la phobie des chiens changera de trottoir si elle en croise un ou refusera d’aller chez quelqu’un qui en possède un. On appelle cela des stratégies d’évitement. La peur panique est un type de crise d’angoisse. Elle se caractérise par une peur extrême et inattendue face à une situation : on se met à trembler, à transpirer, on a l’impression qu’on va mourir.

Comment apprivoiser ses peurs ? Si ces sentiments prennent trop de place dans ton esprit, si cela t’empêche de vivre normalement et te fait souffrir, il faut en parler à tes parents ou à une personne de confiance. Si, ensemble, vous ne trouvez pas de stratégies efficaces, mieux vaut en parler à un pédopsychiatre. Ne crains rien, il y a des solutions !

Le savais-tu ? La claustrophobie est la peur des espaces clos (ascenseur ou métro, par exemple). L’agoraphobie est la peur des espaces ouverts, des lieux publics et de la foule. La phobie scolaire est la peur d’aller à l’école.

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A chaque âge ses frayeurs


Par Clémentine Fitaire

Juillet - Septembre 2021

M i e u x -v i v r e

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Comment gérer la consommation d’écrans en famille La crise Covid a accéléré la transition numérique. Comment ne pas se laisser submerger par le virtuel ? Les conseils de la Dre Sophia Achab, médecin adjointe agrégée, responsable de la consultation ReConnecte aux HUG et experte pour l’Organisation mondiale de la santé et l’Office fédéral de la santé publique.

Adapter Face à la pénurie de loisirs, les écrans sont devenus une distraction facile pour de nombreux enfants. L’important, précise la Dre Sophia Achab, « est de ne pas les laisser prendre la place des interactions réelles. Chez les petits, le cerveau ne tire pas de la consommation passive d’écrans les apprentissages nécessaires à son bon développement ». Ainsi, avant l’âge de un an, l’Organisation mondiale de la santé recommande de ne pas exposer du tout les enfants aux écrans. Au-delà, ceux-ci peuvent être utilisés au maximum une heure par jour, mais en veillant « à consacrer au moins trois heures à différents types d’activité physique et à assurer un sommeil de bonne qualité ».1

1 www.who.int/fr/news/item/24-04-2019-to-grow-uphealthy-children-need-to-sit-less-and-play-more 2 Enquête « Écrans et confinement chez les enfants de 12 à 30 mois », Haute École de travail social et de la santé de Lausanne, 2020.

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Mieux-vivre

Rester actif Le problème, ce n’est pas tant la consommation d’écrans que le déséquilibre qui s’installe parfois au détriment des autres activités. Avec pour conséquence une sédentarité qui induit un risque de surpoids et d’obésité, en constante augmentation chez les jeunes. Il est conseillé de faire des pauses régulières pour bouger, ne serait-ce que quelques minutes et quel que soit l’âge. Autre impact des écrans : celui sur notre sommeil. Téléphones, tablettes ou ordinateurs nous accompagnent jusque sous la couette. Pourtant, la lumière bleue qu’ils projettent, tout comme les notifications ou les activités intellectuellement stimulantes, retardent l’endormissement. Quelques heures avant le coucher, il est donc recommandé de déconnecter.

Être un bon modèle « Faites ce que je dis, mais pas ce que je fais. » Voilà peut-être une devise qui parle à de nombreux parents. Difficile, particulièrement en ce moment, de rester un consommateur ou une consommatrice raisonné·e et d’arriver soi-même à respecter les normes imposées à ses enfants. « Il faut expliquer qu’il est normal qu’adultes et enfants n’aient pas les mêmes usages d’internet. Ce qui est important, c’est ce que nous donnons à voir à nos enfants en tant que modèle de consommation de ces univers, leur montrer que nous parvenons à garder la maîtrise de ces outils », rassure la Dre Achab.

Surveiller les dérives

Parler avec son enfant de ce qu’il ou elle fait et voit sur les écrans, le guider dans sa pratique, lui expliquer les avantages mais aussi les limites de ces outils, l’aide à les maîtriser. « La posture de parent s’exerce aussi dans le digital. Comme nous accompagnons un enfant dans une épicerie en lui décrivant ce qui l’entoure, il faut de la même façon expliquer ces univers virtuels », note la Dre Achab. Le dialogue permet aussi aux générations de discuter des centres d’intérêt parfois différents qu’elles trouvent dans ces outils. S’intéresser aux jeux, applications ou réseaux sociaux favoris de son enfant contribue à se libérer de certains préjugés.

Identifier une consommation problématique n’est pas toujours aisé. Plusieurs signes peuvent alerter : troubles du sommeil, difficultés de concentration, désintérêt pour les contacts sociaux ou les activités « réelles ». En résumé, une perturbation dans le fonctionnement habituel de la personne, que ce soit dans sa vie privée, professionnelle, familiale, financière… Chacun·e possède donc son propre curseur.

Une consommation en hausse Avant le confinement, 38% des enfants de 12 à 30 mois utilisaient quotidiennement au moins un écran. Pendant le confinement, cette proportion est montée à 60%.2

Déculpabiliser La pandémie a intensifié notre utilisation des outils numériques. De fait, nous avons tous et toutes lâché un peu de lest sur les règles familiales. Et ce n’est pas grave. « Les parents ne sont pas les uniques responsables des usages de leur enfant. Ce sont des guides qui doivent les protéger des dangers et veiller à ce qu’ils aient des activités variées. C’est l’essentiel », conclut la Dre Achab. 

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Communiquer


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Sur une initiative du Centre de la mémoire des HUG, le Brain Health Registry Suisse (www.bhr-suisse.org) a mis en place un réseau de centres de la mémoire afin de faire avancer la recherche de manière conjointe. À ce jour, outre Genève, le partenariat comprend Zurich,

En mars, le Pr Hans Wolff a été élu 1er vice-président du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT). À ce titre, le médecin-chef du Service de médecine pénitentiaire des HUG représentera la Suisse au Conseil de l’Europe pour

Blog sur la santé mentale des jeunes Un nouvel espace d’information et de discussion, appelé JADAPT, a récemment vu le jour en ligne afin d’aborder les problématiques liées à la santé mentale. Issu du Programme ambulatoire pour les jeunes adultes avec troubles psychiques débutants (JADE), ce blog est destiné

Saint-Gall, Fribourg, Lausanne, Lugano et Berne. Chaque personne qui souhaite contribuer à la recherche peut s’inscrire. Elle est ensuite contactée par l’un des centres qu’elle a choisi et qui participe au projet. Le but de ce registre est de faciliter et de centraliser l’inscription des personnes qui souhaitent contribuer à la recherche sur Alzheimer et sur les maladies neurodégénératives afin de les orienter vers le centre de la mémoire le plus adéquat pour elles. Les chercheurs et chercheuses peuvent ensuite sélectionner, parmi le panel des personnes inscrites, en fonction des critères de sélection et d’exclusion de leurs études.

un mandat de deux ans. Les membres du CPT ont accès à l’ensemble des lieux de détention, leur rôle étant d’évaluer la manière dont les détenus sont traités et comment leurs droits sont respectés. Après chaque visite, un rapport est adressé à l’État concerné, constituant un point de départ pour un dialogue permanent et constructif autour des conditions de détention. Une opportunité unique pour faire avancer une médecine pénitentiaire moderne en Europe et promouvoir les valeurs de Genève au-delà des frontières.

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aux 18-25 ans. Mal-être, manque de motivation, mauvaise estime de soi, changements d’humeur figurent, entre autres, parmi les thèmes abordés. L’objectif de cet espace est de fournir une information claire et d’inviter au partage d’expérience par le biais de contenus à la fois courts et accessibles. Il s’adresse autant aux jeunes adultes qu’à leur entourage et aux professionnel∙les de la santé mentale, afin de faciliter le rétablissement et la réinsertion socioprofessionnelle des jeunes.

Crédits : Adobe Stock, DR, DR

Par Giuseppe Costa

Juillet - Septembre 2021

B r è v e s

Un registre national pour la santé du cerveau

Le Pr Hans Wolff nommé au CPT


Brèves

Nouveau scanner 3D HUG : chiffres-clés 2020

283’248

personnes soignées dans 30 lieux de soins répartis dans le canton.

Le Service de radiologie des HUG a acquis en janvier un scanner de dernière génération doté d’une technique d’imagerie innovante, appelée Cone Beam (CBCT). Il réalise des images tridimensionnelles (3D) tout en délivrant une plus faible irradiation aux patient·es. Cet appareil utilise une

Tests génétiques en libre accès Depuis quelques années, des tests génétiques médicaux payants en libre accès sont à disposition du grand public sur Internet. Ils proposent la recherche de prédispositions à des maladies très diverses comme un cancer du sein héréditaire ou un risque accru de développer la maladie d’Alzheimer. Des chercheurs·euses des HUG et de

Juillet - Septembre 2021

65’000

Crédits : istockphoto/vecorstate, Louis Brisset, shutterstock

litres de solution hydro-alcoolique utilisés. La consommation a doublé en un an.

100%

digital. Le dernier rapport d’activité est en ligne. Retour sur une année 2020 particulière : https:// panorama.hug.ch

dose quatre à cinq fois moins élevée qu’un CT-scan et obtient des clichés de meilleure qualité. Ce CBCT s’avère particulièrement performant, notamment pour détecter des pathologies de l’oreille interne, des sinus paranasaux et maxillo-dentaires. Troisième structure en Europe à avoir installé cette technologie, les HUG font un pas de plus vers la reconstruction d’images en 3D et l’acquisition numérisée des structures osseuses.

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l’UNIGE s’intéressent à l’information donnée aux personnes ayant eu recours à un test génétique médical en libre accès. L’objectif de l’étude est de savoir si elle était adéquate et comment, le cas échéant, elle pourrait être améliorée. Le projet de recherche consiste en un entretien téléphonique en français, confidentiel, d’environ 30 à 60 minutes. Les questions portent non seulement sur l’information reçue, mais encore sur le vécu du retour des résultats. Pour participer : etude-dtctests@unige.ch ou 022 379 46 13.


AOUT

JUIL.

Pulsations

Musique

24/08

Concert

Musique

15h Hôpital Beau-Séjour Av. de Beau-Séjour 26 Entrée libre

Les élèves et les enseignant∙es du Geneva International String Academy proposent de la musique de chambre dans le jardin de l’hôpital.

Ensemble romand Hôpital de Bellerive 14h30 Ch. de la Savonnière 11 1245 Collonge-Bellerive Entrée libre

Musique de chambre par le quatuor de l’Ensemble instrumental romand dans le jardin de l’hôpital.

Exposition collective Marie-Eve Brunner, Pascal Benoit, Alice Izzo Domaine de Belle-Idée À côté du Centre Nicolas Bouvier 2, ch. Petit-Bel-Air 1226 Thônex

Marie-Eve Brunner, Pascal Benoit et Alice Izzo sont trois artistes réunis à l’occasion d’une exposition collective dans le domaine de Belle-Idée. Trois techniques différentes sont représentées : le collage, la photographie et l’illustration. Cette exposition en plein air, dans le parc de Belle-Idée, est accessible au public jusqu’au 31 août 2021. www.arthug.ch/exposition/ p-benoit-m-e-brunner-izzo

Crédits : Michèle Lechevalier, Alice Izzo

Par Giuseppe Costa

Juillet - Septembre 2021

A g e n d a

08/07

Jusqu’au 31/08

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SEPT.

Agenda

possibilité de s’inscrire sur le registre national. Informations complémentaires et horaires disponibles dans l’agenda en ligne des HUG. Mardi 14 Entrée de l’Hôpital Rue Gabrielle-Perret-Gentil 4

Mercredi 15

07/09 Art et soins « Écoute Belle-Idée »

Comment prendre en soin les autres ? Une aprèsmidi de présentations, discussions et ateliers performatifs, avec des intervenant∙es des milieux de l’art et du soin. En collaboration avec la Haute Ecole d’art et de design (HEAD).

14, 15, 16 & 21/09 Don d’organes Stands d’information À l’occasion de la Journée nationale du don d’organes du 11 septembre, les HUG organisent quatre journées d’information destinées au grand public et aux collaborateurs∙trices avec la

Jeudi 16

Musique Concert hommage 15h Salle Ajuriaguerra Ch. du Petit-Bel-Air 2 Entrée libre

L’Ensemble instrumental romand (EIR) joue en hommage à Eric Bauer, chef d’orchestre fondateur de l’EIR. Répétition ouverte au public le 25/09, à 14h.

Hôpital de Bellerive Cafétéria Ch. de la Savonnière 11

Jusqu’au 31/12

Mardi 21

Alliances

Clinique de Jolimont Av. Trembley 45

Maëlle Cornut Entrée du domaine de Belle-Idée 2, ch. du Petit-Bel-Air Arrêt de bus de l’Hôpital des Trois-Chêne 3, ch. du Pont-Bochet 1226 Thônex

15/09 Allaitement Entretiens gratuits 9h-16h Maternité Bd de la Cluse 30

La Maternité informe sur l’allaitement en proposant des entretiens gratuits avec des consultantes en lactation. Renseignements et rendez-vous auprès d’Antonina Chilin : antonina.chilin@hcuge.ch ou 079 553 23 02. Retrouvez également les réponses aux questions fréquentes sur l’allaitement en vidéo : http://hug.plus/faqallaitement

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Maëlle Cornut, artiste formée à la Haute école d’art et de design de Genève (HEAD), a imaginé pour les HUG la série Alliances. Elle se compose de neuf images, chacune dotée d’une couleur différente. À appréhender de près ou de loin, ces formes colorées s’inspirent des fameuses planches à l’encre élaborées par le Dr Hermann Rorschach en 1921. Cette exposition en plein air, dans le domaine de Belle-Idée, est accessible au public jusqu’au 31/12. www.arthug.ch/exposition/ alliances

Juillet - Septembre 2021

Dès 14h Espace Abraham Joly Ch. du Petit-Bel-Air 2

Hôpital des enfants Hall d’accueil Rue Willy-Donzé 6

25/09


Pulsations

Pour en savoir plus sur… Recherche médicale

En collaboration avec la Bibliothèque de l’Unige, site CMU

L i v r e s

&

Juillet - Septembre 2021

W e b

Collection Santé PerSo Planète Santé Les traitements de demain seront-ils vraiment « sur mesure » ? Faut-il faire séquencer son ADN ? La médecine personnalisée sera-t-elle accessible à tou·te·s ? Chaque citoyen·ne est concerné·e par les changements qui s’amorcent aujourd’hui pour façonner la médecine de demain. La collection Santé Personnalisée & Société permet de s’informer sur les enjeux clés à travers des volumes thématiques.

Vertiges Les vertiges Bruno Sauron, Simone Dobler Odile Jacob, 2005 Vertige violent avec l’impression que « tout tourne », vertige plus léger et imprécis, trouble de l’équilibre bref ou continu... Avoir un vertige n’est jamais normal. Deux spécialistes répondent à toutes vos questions : de quelle forme souffrez-vous ? Quels sont les examens nécessaires pour établir le diagnostic ? Comment fonctionne l’organe de l’équilibre ?, etc. CONTACT Tous les livres référencés sont disponibles à la Bibliothèque de l’Université, site CMU. Ils peuvent être consultés et/ou empruntés gratuitement. Bibliothèque de l’Université de Genève Centre médical universitaire Avenue de Champel 9 1206 Genève Lu-ve : 8h-22h et sa-di : 9h-18h biblio-cmu@unige.ch 022 379 51 00 Pers. de contact : Annick Widmer www.unige.ch/biblio/patients/

Varices Comprendre les varices Bruce Campbel Modus Vivendi, 2007 Quelles sont les façons simples de maîtriser les symptômes des varices ? Quand faut-il procéder à une intervention chirurgicale ou à des injections ? Les varices vont-elles réapparaître ? Ce petit guide répond à vos questions.

Peurs et angoisses Guide de survie pour surmonter les peurs et les inquiétudes James J. Crist Midi trente, 2017 Ce guide propose des conseils pour bâtir la confiance en soi et faire le plein d’idées pour affronter les situations effrayantes ou stressantes. Il permet de mieux comprendre d’où viennent les peurs et les inquiétudes, et présente des stratégies pour les surmonter.

Les peurs de l’enfant : comprendre et rassurer Patricia Chalon Eyrolles, 2015 Les peurs sont bien réelles pour l’enfant et inquiétantes pour les parents. Faut-il éliminer les facteurs anxiogènes ou au contraire encourager l’enfant à affronter les situations  redoutées ? Un guide pour faire face aux peurs des enfants et y apporter la réponse adéquate.

Jeûne intermittent La vie dans le jeûne ! Dr Jason Fung, Eve Mayer, Megan Ramos Eyrolles, 2021 Ce guide unique et accessible répond aux questions les plus courantes sur le jeûne et propose un programme personnalisable.

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Écrans Dévoreurs d’écrans : comprendre et gérer notre appétit numérique Pascal Minotte Mardaga, 2015 L’auteur propose un point de vue nuancé sur les technologies de l’information et de la communication, souvent présentées comme source de problèmes, notamment chez les jeunes. Il aborde leurs usages et significations, puis présente leurs dangers et donne des conseils pour une utilisation raisonnée et bénéfique.

Connectés et heureux ! Du stress digital au bien-être numérique Marie-Pierre Fourquet-Courbet, Didier Courbet Dunod, 2020 Les écrans peuvent nous aider à améliorer notre bien-être, notre santé et nos relations aux autres… à condition de savoir comment bien les utiliser. Les auteur·es, s’appuyant sur de récentes recherches scientifiques, nous invitent à développer notre intelligence numérique en modifiant notre manière d’utiliser les écrans.

MonAdo.ch

Comment soutenir mon ado ? Quelles limites poser ? Comment faire, quand ça devient difficile ? Qui peut m’aider ? MonAdo.ch est un site pensé pour les parents, abordant la thématique des écrans et bien d’autres (alcool, cannabis, jeux vidéo, etc.). www.monado.ch

Ciao.ch

Le site ciao.ch met à disposition les compétences de professionnel·les pour répondre aux besoins d’information et d’orientation des jeunes romand·es de 11 à 20 ans sur toutes sortes de thématiques. www.ciao.ch


JE ME VACCINE CONTRE LE COVID-19 Pre Klara Posfay Barbe, directrice médicale adjointe. « La vaccination est une chance énorme. Elle protège les personnes vulnérables et réduit le nombre de cas sévères et de décès. »

INSCRIPTIONS POUR LA VACCINATION www.ge.ch/c/covid19-vaccin


GRÂCE À SES DONATEURS, LA FONDATION PRIVÉE DES HUG RÉALISE DES PROJETS INNOVANTS ET AMBITIEUX AVEC 3 OBJECTIFS

AU G M E N T E R LE BI EN - Ê T R E D U PAT I E N T Exemple de projet réalisé : favoriser la réhabilitation cardiaque par l’exercice physique encadré par des professionnels.

AMÉLIORER LA QUA L I T É DES SOINS Infokids Exemple de projet réalisé : création de l’application Infokids pour une assistance interactive lors d’urgences pédiatriques.

FAVO R I S E R L A R E C H E RC H E MÉ DI C A L E Exemple de projet réalisé : soutenir la recherche en immunothérapie pour lutter contre les tumeurs cérébrales.

L’EXCELLENCE MÉDICALE POUR VOUS, GRÂCE À VOUS.

Pour faire un don : www.fondationhug.org IBAN CH75 0483 5094 3228 2100 0 T +41 22 372 56 20 Email : fondation.hug@hcuge.ch


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