EXPRESSO Le choc QUOTIDIEN DU MASTER DE JOURNALISME DE L’INSTITUT FRANÇAIS DE PRESSE - PROMO 2015
13 02 2014
L’ESSENTIEL SPÉCIAL LIBÉ
P.2
Libération dans la tourmente
n Le journal souffre mais l’esprit tente de demeurer. Alors que la situation semble sclérosée, le quotidien veut trouver une issue favorable à la crise qui le menace.
FRANCE
# 07
La vie du quotidien est en jeu
P.4
Moi, jeune du FN
n Ils sont de plus
en plus nombreux à rejoindre le parti de Marine Le Pen. Deux jeunes racontent à l’Expresso pourquoi ils ont adhéré au FN.
INTERNATIONAL
P.6
Situation explosive en Centrafrique
n Dans un rapport paru hier, Amnesty International qualifie le conflit de « nettoyage ethnique ». La présidente de transition Catherine Samba Panza durcit le ton contre les anti-balaka.
ECO/CONSO
Nickel, la banque
P.8
n Une banque chez les
buralistes. C’est le pari lancé par Nickel, un objet non identifié qui va faire parler de lui. Reportage.
PORTRAIT
P.10
L’avocat des Ultras
n Pierre Barthélémy
est un fervent supporter du PSG. Dans le cadre de son métier d’avocat, il défend les supporters interdits de stade.
n « L’enfer, c’est les autres ». Qui voque, mais périclite. Comme tous
serait mieux placé pour décrire la situation du journal que son fondateur, Jean-Paul Sartre. Actionnaires irrités, salariés inquiets, lecteurs divisés… « L’esprit Libé » pro-
les quotidiens français ? Pas si sûr. Expresso a voulu comprendre l’histoire d’un journal adulé et décrié, mais nécessaire au pluralisme de la presse française.
evenement MEDIAS Malgré la crise, les salariés continuent à faire « leur » journal
Libération en pleine crise de la quarantaine
A
u 11 rue Béranger, une atmosphère studieuse masque l’inquiétude latente. « On a poussé notre cri du cœur samedi, mais maintenant, c’est notre métier, notre journalisme qui prime », explique Alexandra Schwartzbrod, directrice-adjointe de la rédaction de Libération. Samedi 8 février, la colère s’étale en Une du quotidien menacé. Le titre « Nous sommes un journal » illustre l’indignation face au projet des actionnaires, accueilli comme une « insulte », « un foutage de gueule », voire un « bras d’honneur » par la majorité des 290 salariés. Bruno Ledoux, Édouard de Rothschild et le groupe italien Ersel, entendent faire de Libé un « réseau social, créateur de contenus monétisables sur une large palette de supports ». Pour l’heure, le papier n’est pas officiellement abandonné, mais le journal sera bouclé à 20h, au lieu de 21h30, pour économiser 120 000 euros par mois. Et la rédaction devra probablement déménager. Des finances en berne Les actionnaires ne veulent plus mettre la main au portefeuille pour un journal depuis trop longtemps « sous perfusion ». Les comptes de Libération sont passés dans le rouge en 2013, avec une perte nette de 1,3 million d’euros. En 2012, selon le ministère de la Culture, Libération a touché 6,5 millions d’euros d’aides
Libération est entré en conflit direct avec ses actionnaires (crédit : Pierre Andrieu / AFP) directes, et 3,5 millions d’aides indirectes, notamment postales. Le quotidien est le sixième titre le plus subventionné. Après 40 ans d’existence, il vit désormais dans la peur d’un avenir sans papier. Les ventes physiques du journal ont chuté de plus de 15% sur les 11 premiers mois de l’année 2013, et sont tombées en novembre sous la barre symbolique des 100 000 exemplaires. Depuis l’arrivée de Nicolas Demorand, qui cumulait au départ les fonctions de directeur de la publication et de la rédaction, avant d’être poussé
vers le directoire, la rédaction crie son désarroi. Jusqu’à adopter, en novembre, une motion de défiance avec 90% des voix. Aux dernières nouvelles, les actionnaires réaffirment un « soutien total » au directoire. « L’unité face à l’adversité » Mi-janvier, on évoquait déjà des « baisses volontaires de salaires », ainsi que de nouveaux investisseurs connus « dans les deux mois ». Mardi, l’homme d’affaires François Moulias annonçait chercher « quelqu’un qui dirige », à la
barbe de Fabrice Rousselot, plébiscité en juillet dernier pour prendre la tête de la rédaction. Depuis le début de la crise, Alexandra Schwartzbrod remarque « une unité face à l’adversité assez émouvante » au sein de la rédaction. Pourtant, aucun projet concret n’a pour l’instant émergé des groupes de réflexion formés spontanément. Même si personne ne sait « de quoi demain sera fait », à Libération, un seul mot d’ordre : « continuer à faire le meilleur journal possible ». o Robin Braquet
Les années noires de la presse papier n Il y a un an jour pour jour, Philippe Bouvard tenait un discours relevant de la science-fiction au micro de Frédéric Taddei sur France Culture: « Le journal payait tout. J’étais au Figaro , j’étais chargé de faire des reportages sur les Français en vacances. Il fallait aller les débusquer où il se trouvaient, c’est à dire sur les plages. Le journal louait pour le mettre à ma disposition - et j’y embarquais ma petite famille - un yacht et du personnel, et je menais une vie de riche sans fortune ». L’année 2011 a signé la disparition de deux quotidiens. L’un, 02 - EXpresso - Jeudi 13 fevrier
France Soir, devenait peu après un hebdomadaire pour tablettes. L’autre, La Tribune, revenait dans les kiosques en parution hebdomadaire après plusieurs mois de web. En 2013, les chiffres de l’OJD étaient en berne. L’évolution de la diffusion payée en France affiche une baisse qui touche tout le monde, que ce soit dans la presse quotidienne régionale (PQR) ou dans la presse quotidienne nationale. Le Parisien et Aujourd’hui en France sont par exemple les plus touchés dans la PQR, et seule La Croix tire à peine son épingle du jeu dans la presse quotidienne
nationale. En 2013, Libération était diffusé à 101 000 exemplaires en France, contre plus de 129 000 sept ans plus tôt. La baisse de la diffusion, les journaux se retrouvent dans une position de faiblesse face aux annonceurs. En effet, plus la diffusion chute, plus le prix des espaces publicitaires baisse, entraînant les journaux dans un cercle infernal. Le web, croissance sans revenus En réalité, la seule diffusion en hausse, c’est celle des sites Internet. Selon l’OJD toujours, lemonde.fr a comptabilisé 146
millions de pages vues en juillet 2006. En janvier 2014, ce chiffre s’élève à plus de 287 millions. Idem au figaro.fr qui est passé de 141 millions de pages vues à 313 millions. Le problème reste le modèle économique. Contrairement à de nombreux médias anglosaxons, les sites français peinent à gagner de l’argent. L’abonnement est une solution qui tarde à trouver son public, et les sites, pour la plupart gratuits, cherchent chaque jour de nouvelles méthodes, souvent envahissantes pour l’utilisateur, afin de dégager des revenus publicitaires. o Florian Reynaud
evenement Trois générations de journalistes témoignent
Raconte-moi ton quotidien
J
eanne Villeneuve est arrivée en 1982 au service éco. Aussi simple que cela puisse paraître, c’est la « Libération » promise par l’intitulé du journal qui l’a attirée dans la rédaction. « A l’époque la presse éco était très encadrée, très respectueuse et je voulais pouvoir écrire honnêtement sur le monde des affaires, dire la vérité » se souvient-t-elle. Partie en 1986 pour « voir autre chose » elle se souvient de la belle époque. « C’était extraordinaire parce qu’on s’amusait beaucoup. Le monde était à nous » racontet-elle avec nostalgie. En 1995, au moment où le titre connaît des difficultés suite à l’échec de « Libération 3 », un journal de 80 pages qui peine à trouver son lectorat, Serge July la rappelle. « J’avais une telle reconnaissance que je n’ai pas pu refuser » avoue-t-elle « mais c’était une erreur, le journal était... fatigué. C’était plus du tout le même contexte. Peut être qu’il y a des journaux qui appartiennent à des époques... » conclue la journaliste. «Tout le monde rêvait d’y travailler» Entrée à Libé en 1991, Judith Perrignon a commencé par y faire son stage de fin d’étude « quand on sortait d’école, tout le monde rêvait de travailler à Libé » explique-t-elle. « J’aimais les convictions, le ton et la liberté du journal. Il pouvait être agaçant parfois, mais était toujours innovant » poursuit-elle. Elle reconnaît pourtant avoir toujours senti la crise dans le journal, « je suis restée 16 ans à Libé, j’ai toujours connu les AG, les votes, les angoisses, j’ai toujours senti
Assemblé générale dans les locaux de Libération (crédit : Vincent Nguyen / Rivapress ) planner la crise, tout en y étant très heureuse. C’est le journal qui a tout compris des années 1980 et qui a commencé à s’interroger sur sa place dès la décennie suivante. Libé ne savait plus épouser son époque » selon elle, même si elle estime que la crise que traverse le journal est inhérent au contexte économique de l’ensemble de la presse. «Ce n’est plus la même époque» Mathieu Palain, pigiste régulier, a débarqué dans la rédaction en avril 2011. C’est avant tout le ton du journal qui lui a plu. « Je lis Libé pour le style, parce que certaines plumes me plaisent. Il y a une liberté que l’on ne retrouve pas ailleurs », déclare-t-il. « Aujourd’hui l’ambiance n’est sûrement plus la même qu’avant », concède le
jeune journaliste « mais ce n’est pas la même époque. » o Marine Zambrano
Repères Avril 1973 : parution du 1er numéro 1974 : Serge July remplace JP Sartre à la direction de la publication 1981: refondation des principes du journal avec l’arrivée de la pub (1982) et des financiers dans le capital (1983) 1996 : plan de recapitalisation du journal 2005 : entrée de Rothschild dans le capital 2006 : départ de Serge July et de Louis Dreyfus à la demande d’E. de Rothschild
« Le journal n’a pas su se transformer » n Entretien avec Patrick Eveno, professeur d’Histoire des médias à l’université Paris-I et auteur de « La presse » chez PUF.
Les difficultés de Libération sont-elles liées à un certain déclin de l’idéologie de gauche ? Pas du tout, il s’agit d’autre chose. On a tendance à tout voir sous le prisme politique en France. Mais les gens n’achètent pas les journaux seulement pour des raisons politiques mais pour s’informer. Est-ce qu’on peut établir une corrélation entre le déclin du Figaro et la désorganisation de la pensée de droite ? Je ne le crois pas. D’ailleurs le
déclin de l’idéologie de gauche que vous affirmez est très discuté, cela reste à confirmer.
Mais la chute de Libération est sans commune mesure avec les autres titres de presse. Comment l’expliquer ? Le problème de Libération, c’est que le journal n’a pas su se transformer. Il a raté le passage du papier vers les écrans. C’est un titre qui s’achète surtout au numéro. Or, son lectorat est avant tout un public jeune, branché et connecté qui ne lit que peu sur papier. Donc les ventes décrochent. Pour les titres comme La Croix ou Le Figaro, cette transition est plus simple car ils disposent de beau-
coup d’abonnés sur leur version internet. « Libé » est-il condamné ou bien peut-il encore être sauvé ? Je pense que c’est trop tard. En sept ans le journal a brûlé entre 30 et 40 millions d’euros sans se transformer. Les actionnaires comme Édouard de Rothschild n’ont pas de projet journalistique tandis que la rédaction s’arcboute sur un modèle dépassé. Le journal pourra sans doute encore survivre quelques années mais il faudrait qu’il soit repris par un actionnaire avec un vrai projet pour renaître. Vous savez, France-Soir a mis près de 30 ans à mourir. o Recueillis par S.Fontvieille
edito
Espoirs Libé est en danger, en danger de mort. Nous, lecteurs de Libération et jeunes journalistes, sommes atterrés. Atterrés car Libération était dans les années 1980 le mieux placé pour traiter des évolutions sociales et politiques. Libé incarnait alors l’espoir de la jeunesse, son audace et son irrévérence. Et surtout, ce journal incarnait la gauche. Une gauche aujourd’hui mal-aimée, décriée et qui souffre de s’être rangée du côté de l’économie de marché. Comme la gauche, Libération s’est édulcoré. Au point de défendre des idées que le journal combattait à sa création. En 1973, Sartre ne voulait ni actionnaires, ni publicité pour garantir l’indépendance du journal. Ironie du sort, dans les derniers numéros, le portrait de la dernière page a laissé sa place à une publicité. De quoi donner la nausée à Jean-Paul Sartre. Ce n’est pas qu’un quotidien de gauche qui suffoque, c’est le pluralisme de la presse qui s’estompe. Une idée qui fait peur. Mais plus que la peur, c’est le sentiment de tristesse qui domine. Tristesse d’imaginer un jour sans « une » percutante, sans titres parsemés de jeux de mots, sans photographies poignantes. Le journal peut renaître mais il doit retrouver son « esprit pionnier ». Il doit être capable, par la plume de ses journalistes, de se positionner sur l’avenir des médias. Toute transition nécessite des choix et Libé doit faire les siens. Oser, séduire, bousculer. Ce quotidien quarantenaire continue de nous faire rêver. Aujourd’hui un journalisme jeune, militant et audacieux est encore possible. Au XXIe siècle, l’espoir est toujours permis. Pour Libération aussi. o La rédaction Jedui 13 fevrier- EXpresso - 03
FRANCE POLITIQUE Les limites de la dédiabolisation du Front national
Marine Le Pen séduit mais ne convainc pas
U
ne image en demi-teinte. C’est l’impression laissée par le dernier baromètre TNS Sofres sur le Front national. Si les Français sont toujours plus nombreux à se dire d’accord avec les idées du parti d’extrême droite (34% cette année, contre 32% en 2013), ils ne sont pourtant pas dupes : un tiers d’entre eux adhèrent aux constats que Marine Le Pen exprime, mais pas aux solutions qu’elle propose. Ainsi, le retour au franc est une mesure très largement impopulaire auprès des Français. Seuls 29% d’entre eux souscrivent à une suppression de l’euro. De même, en matière d’emploi, la préférence nationale n’apparaît pas comme un remède efficace. Pour une large majorité des sondés, il n’y a en effet pas de différence entre un Français et un immigré en situation régulière. L’insécurité, carburant du FN Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les revendications « identitaires » n’arrivent pas en tête lorsque l’on tente de déterminer les causes de
viennent plutôt grossir les rangs de collectifs comme « Jour de Colère ».
Marine Le Pen, recueille toujours plus d’opinions favorables. DR.
la progression du FN. Si une majorité de Français pensent que les valeurs traditionnelles ne sont pas assez défendues, c’est la question de l’insécurité qui connaît la plus forte hausse. Les mauvais résultats de Manuel Valls en la matière profitent sans aucun doute à la formation d’extrême droite. Ainsi, de nombreux sondés
pensent que la justice n’est pas assez sévère avec les petits délinquants. A l’inverse, les opinions négatives sur la place de l’Islam et des musulmans en France connaissent une légère baisse. Le racisme n’apparait donc pas comme le principal élément du FN. Il est désormais l’apanage de groupes intégristes et xénophobes qui
Une « dédiabolisation » peu efficace Marine Le Pen s’est insurgée à de nombreuses reprises contre l’appellation « extrême droite » accolée au Front national. Elle a menacé de poursuivre ceux qui oseraient le qualifier ainsi, et réitère à chaque interview le caractère républicain de son parti. De fait, si toujours plus de sympathisants UMP sont favorables à des alliances électorales avec le FN (40%), la plupart des français sont toutefois plus réservés. En effet, 50% des sondés pensent que le parti de Marine Le Pen représente un danger pour la démocratie, contre 47% l’an passé. Quant à la présidente du parti, elle recueille toujours plus d’opinions favorables. Le baromètre TNS Sofres vient donc confirmer une donnée essentielle : le succès du FN tient davantage à la personnalité de son leader qu’au programme de la formation. o Lilia Hassaine
Charles et Raphaël, deux parcours vers le FN n Prendre sa carte au Front natio-
nal, ce n’était « pas prévu » pour Raphaël, 21 ans, membre depuis deux ans du parti d’extrêmedroite. A l’approche des élections présidentielles, cet étudiant en biologie s’apprêtait à voter pour la première fois. Un devoir qu’il ne voulait pas « prendre à la légère ». Il assiste alors à des tractages, des réunions de tous les partis confondus sans exceptions. Il se renseigne sur les sites officiels, rencontre des militants pour que son bulletin émane d’une décision murement réfléchie. Sa mère, infirmière libérale, et son père commerçant, aujourd’hui décédé, étaient tous deux sympathisants UMP. Lui votera Front national. « C’était le seul parti à proposer une vraie défense des oubliés contre la ploutocratie. Dans les autres partis, les gens que j’ai rencontrés étaient seulement intéressés par le pouvoir 04 - EXPRESSO - JEUDI 13 FEVRIER
Raphael en lice pour les municipales DR.
et le pognon », assure-t-il. Ce constat l’a poussé à entrer dans les rangs du FN et à s’impliquer de plus en plus dans ce parti. Pour les municipales, il sera sur la liste de Dominique Chalard à Landelles (Eure-et-Loir). Charles Duclos a également rejoint le parti d’extrême droite il y a deux ans et sera sur les listes à Louviers en Normandie. Mais pour ce jeune homme de 24 ans, c’est une
autre histoire. Télévendeur dans les placements financiers, il a perdu son travail dans une vague de licenciements économiques. « Plus d’emploi, plus de maison. En l’espace d’un an j’ai tout perdu » raconte-til. « En fait, ce sont les aléas de la vie qui m’ont poussé à rejoindre ce parti ». Avant ces coups durs, il votait pour l’UMP mais n’était pas encarté. Ses parents et sa femme, eux, militaient déjà pour le FN. La solution protectionniste Tractages, boitages, collages, le militantisme c’est aussi pour lui « l’occasion d’échanger des idées et de créer des liens d’amitié » avec des gens qui ont connu les mêmes épreuves que lui. « Il y a beaucoup de chômeurs parmi les militants de la section », constate-t-il. Une
dimension sociale importante pour Charles, dont la plupart des amis sont également encartés au FN. A l’inverse, les amis de Raphaël, viennent de tous les bords politiques. « Ils sont proches du PS et du PCF ». Même s’il reconnaît que depuis qu’il a obtenu sa carte il s’est fait beaucoup d’amis sympathisants FN au fil des actions militantes. Les deux jeunes militants rejettent les débordements racistes qui ternissent l’image du parti. Selon eux cela ne représente « pas du tout la position du FN ». Ce qui leur parle, c’est surtout le côté « proche du peuple » et le modèle protectionniste et sécuritaire du parti d’extrême droite. « Dans un monde agressif, on doit se protéger de l’hostilité de l’environnement extérieur » constate Raphaël. o Angèle Guicharnaud
FRANCE MUNICIPALES Le président de l’UMP encourage ses troupes
Jean-François Copé, soutien de façade
D
ans la « bataille de Paris », JeanFrançois Copé intervient bien tard. Alors que le premier tour des élections municipales débute dans un peu plus d’un mois, le président de l’UMP est venu soutenir mercredi 12 février les têtes de liste des Vème, IXème et XVIIème arrondissements de Paris. Un soutien tardif, dans une ville où l’UMP doit faire face à de nombreuses dissidences, au premier rang desquelles figure les listes « Paris libéré» menées par l’homme d’affaires Charles Begbeider. Ce dernier, proche du maire de Meaux et contributeur de l’UMP, a mal vécu d’être évincé en décembre de la deuxième place de la liste du VIIIe arrondissement, au profit du filloniste Pierre Lellouche. Après avoir tenté de convaincre son ami entrepreneur de rentrer dans le rang, Jean-François Copé a dû se résoudre à l’exclure du parti le 13 janvier. « Copé est emmerdé, il ne veut pas lâcher Beigbeder » avait jugé l’équipe de campagne de la candidate UMP. La bataille du Vème Loin de sceller un rapprochement entre les deux figures de l’opposition, la tournée parisienne de M. Copé laisse pla-
n Ils sont 6,3 % des hommes et
4,3 % des femmes, selon l’enquête « Fecond », réalisée en 2010 par l’INED et l’Inserm, à ne pas vouloir devenir parents. Ils affirment être « bien » ou qu’ils « veulent rester libres ». Parmi les raisons expliquant le fait de rester sans enfant, la notion d’épanouissement personnel est largement citée : huit sur dix, femmes (79%) et hommes (83%).
Jean-François Copé est venu soutenir NKM à Paris R.M/SIPA
ner le doute quant à la sincérité de son engagement en faveur de Mme Kosciusko-Morizet. A l’approche des élections, c’est bien une alliance de circonstances qui rapprochent ces deux quarantenaires aux ambitions présidentielles notoires. Sur le terrain, leur concurrence reste palpable. Seule la permanence du Vème arrondissement aura vu M. Copé et Mme Kosciusko-Morizet battre la campagne de concert durant une petite heure, l’entourage de la candidate avançant un agenda chargé pour expliquer la briè-
veté de la rencontre. La mairie du Vème arrondissement présente pourtant un enjeu majeur en vue des élections de mars, ce fief historique de la droite parisienne pouvant basculer à gauche en raison de la dissidence de Dominique Tibéri, fils du maire sortant Jean Tibéri. Si la campagne parisienne réussit pour l’instant à faire taire les rivalités personnelles qui parcourent l’UMP, d’autres « batailles» ne sauraient tarder à les raviver. o Grégoire Belhoste avec Gaspard Augendre
La France face au défi du vieillissement çais ont plus de 60 ans. En 2035, ce chiffre devrait augmenter de 80% selon l’INSEE. « J’engagerai une réforme de la dépendance permettant de mieux accompagner la perte d’autonomie ». L’engagement numéro 18 du candidat François Hollande en 2012 est sur les rails. La ministre déléguée aux personnes âgées et à l’Autonomie, Michèle Delaunay, a présenté son projet de loi d’orientation et de programmation «pour l’adaptation de la société au vieillissement». L’objectif du gouvernement est d’aider les personnes âgées à rester chez elles. Le texte ne prévoit rien pour l’instant pour les rési-
5% des Français ne veulent pas d’enfants
Dieudonné une nouvelle fois condamné
SOCIETE L’exécutif présente son plan d’aide aux aînés n Aujourd’hui, 25% des Fran-
en bref
dents des maisons de retraite. Jean-Marc Ayrault l’a confirmé, « priorité (est) donnée au maintien à domicile. » Davantage d’aide à l’avenir Les plafonds d’aide mensuels de l’APA (Allocation Personnalisé d’Autonomie) des 1,2 millions de personnes bénéficiaires en France vont être relevés de 100 à 400 euros. L’APA est décisive pour les personnes dépendantes. Elle permet le portage des repas, l’aide à domicile, l’achat de matériel spécialisé où les travaux d’adaptation de l’habitat. D’ici 2017, le gouvernement veut lancer un plan d’équipement de 80 000 logements. L’information auprès des personnes
dépendantes va être également relancée, ainsi que la multiplication de foyer-logements, compromis entre le « chez soi » et la maison de retraite. Enfin, une offre de répit sera consacrée aux aidants, ces 4,3 millions de personnes qui peuvent prendre jusqu’à cinq heures par jour pour aider les personnes dépendantes. Le texte doit être examiné et voté au Parlement à la fin de l’année, afin d’entrer en vigueur le 1er janvier 2015. L’enjeu est de taille. Il coûterait quelques 600 millions d’euros à l’Etat. o Pierre Adrian avec Gaspard Augendre
n L’ humoriste va devoir retirer
deux passages de sa vidéo intitulée « 2014 sera l’année de la quenelle ». Postée en décembre dernier sur Youtube, cette dernière totalise déjà plus de 3 millions de vues. La décision du tribunal de grande instance de Paris (TIG) a écarté « l’humour » invoqué pour sa défense par l’humoriste, et condamné Dieudonné pour « contestation de crimes contre l’humanité et diffamation raciale » Le Sénat lève l’immunité parlementaire de Serge Dassault
n Le bureau du Sénat a levé
mercredi l’immunité parlementaire de Serge Dassault, dans le cadre d’une enquête le mettant en cause au sujet d’achats présumés de voix à CorbeilEssonnes. Le 8 janvier, un précédent vote à bulletins secrets avait abouti au maintien de cette immunité. Lundi, l’ex-maire UMP avait lui-même demandé à ce qu’elle soit levée, estimant qu’il n’avait « rien à (se) reprocher ». Lors de ce nouveau vote, à main levée, les 14 sénateurs de gauche ont vote à l’unanimité le retrait de l’immunité, les 12 parlementaires de droite, ont refusé de participer au scrutin. Serge Dassault est désormais susceptible d’être placé en garde à vue. Il s’est dit « prêt à affronter cette épreuve » Jeudi 13 Fevrier - EXpresso - 05
international CENTRAFRIQUE Amnesty International dénonce un « nettoyage ethnique »
Les prémices d’un génocide
N
ettoyage ethnique. Les mots sont enfin prononcés. Joanne Mariner, conseillère d’Amnesty International pour les situations de crise a déclaré mercredi 12 février que « les milices anti-balaka mènent des attaques violentes dans le but de procéder au nettoyage ethnique des musulmans en République centrafricaine ». Ces derniers fuient le pays, accusés d’avoir coopéré avec les milices de la Séléka. Cette déclaration fait écho à celle d’Abdou Dieng, coordinateur humanitaire des Nations Unies à Bangui qui dénonçait en début de semaine la situation actuelle dans le pays : « C’est de la purification ethnique, même si personne de la communauté internationale n’a le courage de le dire ». Avec ce rapport d’Amnesty International, le pas est franchi. A la suite de ces déclarations, la troisième visite de Jean-Yves le Drian, mercredi à Bangui, prend une nouvelle dimension. Le ministre de la Défense français arrive en Centrafrique pour réaffirmer la volonté hexagonale faire cesser les exactions « si besoin par la force ». L’instigateur de l’opération Sangaris est soutenu par la présidente
de transition, Catherine Samba Panza qui a affirmé vouloir « partir en guerre » contre les milices antibalaka.
L’échec de Sangaris
Les troupes internationales ont laissé « les milices anti-balaka remplir au niveau du pouvoir le vide créé par le départ de la Séléka » s’est offusquée Donatella Rovera d’Amnesty International. Les forces françaises et africaines ont jusque là échoué dans leur opération de maintien de la paix. L’opération Sangaris avait pour objectif de désarmer les rebelles de la Séléka. Elle a, malgré elle, établi un nouveau rapport de forces en faveur des milices chrétiennes anti-balaka. Afin de lutter contre les violences, les opérations militaires se décentralisent. Une partie des troupes quitte Bangui et se déploie dans les provinces pour les sécuriser. Les exactions se sont multipliées dans les villages situés au nordouest de Bangui, une région où musulmans et chrétiens cohabitaient parfaitement jusqu’à l’arrivée de la Séléka il y a un an. La situation humanitaire est d’autant plus préoccupante en Centrafrique que les derniers chiffres de l’ONU sont alarmants. Selon les
Un soldat de l’Union Africaine en janvier 2014. (crédit : Zentaro Lefort)
Nations Unies, près d’1,3 million de personnes ont besoin d’une assistance alimentaire immédiate. Un pont aérien, mis en place par le Programme alimentaire mondial, va re-
lier Bangui et Douala au Cameroun pour nourrir 150 000 personnes. Une aide quasiment vaine face à l’ampleur de cette crise.
o Alexis Guilleux et Claire de Roux
Pas d’engagement américain en Centrafrique Barack Obama a salué mardi l’action de la France au Mali mais est resté réservé quant à une intervention de soldats américains en Centrafrique. « Nous avons convenu d’améliorer notre coopération » a tout de même déclaré M. Obama. Le même jour, la secrétaire d’Etat américaine aux Affaires africaines, Linda Thomas-Greenfield a affirmé faire confiance au « leadership de l’Union africaine » pour tenter de régler la crise centrafricaine.
SYRIE Les négociations de Genève portent sur la situation humanitaire, catastrophique
Chronique d’un échec annoncé aux Nations Unies n Même avec la meilleure volon-
té du monde, les Nations Unies semblent impuissantes à faire aboutir les négociations entre le régime syrien et l’opposition alors la guerre civile a fait plus de 136 000 morts. Selon Ali Haidar, ministre syrien de la Réconciliation nationale, les négociations sont « vouées à l’échec en l’état actuel des choses ». Il n’y a « pas eu de percée sur la question antiterroriste ni sur le processus politique. Les deux parties étaient convaincues d’avance que ce dialogue n’aboutirait pas à un règlement de la crise syrienne ». Lakhdar Brahimi, médiateur de l’ONU le reconnaît aussi, les discussions sont « laborieuses ».
Pris au piège
La résolution de l’ONU prévoit un meilleur accès humanitaire aux zones de combat et la « levée immé-
06 - EXpresso - JEUDI 13 FEVRIER
». Mais cette réussite pourrait bien être la seule. La Russie, principale alliée de Bachar al-Assad est hostile à la résolution de l’ONU.
Une résolution non contraignante
Louay Safi, porte-parole de la Coalition syrienne (crédit : AFP)
diate des sièges » de plusieurs villes (dans la région de Damas et d’Alep) où des milliers de civils sont pris au piège des combats entre les rebelles
et les forces loyalistes. A Homs, 1 200 civils ont été évacués depuis lundi. Pour Lakhdar Brahimi : « Homs peut être appelé un succès
Le texte a été jugé « absolument inacceptable » par Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères. Pour tenter d’amadouer Moscou, il contient une condamnation des « attentas terroristes en augmentation ». Il réclame aussi le départ du pays « de tous les combattants étrangers ». La résolution n’est pas contraignante et ne prévoit pas de sanctions automatiques en cas de non-respect des clauses. Les discussions doivent se poursuivre jusqu’à vendredi, mais il est très peu probable qu’elles débouchent sur autre chose qu’un texte vide de sens, pour cacher la faillite des Nations Unies.
o Déborah Coeffier
INTERNATIONAL TURQUIE Ankara écarte une réconciliation tant que dure le blocus de Gaza
Erdogan hausse le ton face à Israël
E
n exigeant d’Israël la levée du blocus de Gaza, le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan a subitement bloqué en début de semaine la normalisation des relations entre les deux pays. La veille, pourtant, le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu déclarait que les deux Etats n’avaient jamais été aussi proche de l’apaisement. Les relations entre la Turquie et l’Etat hébreu sont fortement dégradées depuis la crise de 2010. Un commando israélien avait tenté de stopper un bateau humanitaire, le Mavi Marmara, en route pour Gaza. L’opération s’était soldée par la mort de neuf ressortissants turcs. Ankara expulse alors l’ambassadeur d’Israël, puis exige excuses officielles et indemnisations. Les excuses sont finalement arrivées en mars 2013, sous l’impulsion de Barack Obama. Depuis, les négociations sur le montant des réparations continuent, et semblaient sur le point d’aboutir. Le quotidien hébreu Haaretz révélait début février que le gouvernement israélien était prêt à verser 20 millions de dollars en compensation.
Un allié précieux
Mardi, une nouvelle condition a été ajoutée : la levée du blocus autour de la bande de Gaza. Inacceptable pour Israël. Mais Erdogan sait que le soutien de la Turquie est un atout stratégique pour l’Etat juif, entouré de pays arabes hostiles. L’idée même d’un rapprochement avec Ankara date de 1947. Le fondateur d’Israël, Ben Gourion, discernait déjà des traits communs entre les
Depuis la crise du Mavi Marmara en 2010, les relations restent tendues entre le Premier ministre turc et son homologue israélien bien que Netanyahou ait présenté ses excuses au peuple turc. (crédit : Sean Gallup/Getty Images)
deux nations qui cheminaient vers le progrès économique et l’organisation laïque de la société. Après trente ans de relations hésitantes,
Sept ans d’isolement pour les Gazaouites Depuis 2007, Israël et l’Egypte bloquent les accès vers Gaza. Cette décision fut prise après que le Hamas ait évincé le Fatah, représentant de l’Autorité palestinienne. Après l’épisode de la flottille de Gaza, l’indignation internationale a contraint Israël à alléger le blocus, notamment sur les biens de consommation. Le territoire reste surpeuplé avec l’un des taux de densité de population le plus élevé du monde (4 500 hab/km²).
aérien à l’aviation israélienne, qui peut désormais frapper la Syrie sur trois front et atteindre l’Iran beaucoup plus vite. La victoire du parti islamo-conservateur d’Erdogan en 2002 n’entame pas ce partenariat stratégique, jusqu’à l’affaire de la flottille de Gaza. Quand bien même aboutirait la normalisation en cours des relations diplomatiques, Israël a peu d’espoir de retrouver une alliance aussi avantageuse, pourtant cruciale dans le contexte d’instabilité du monde arabe.
o Jérôme Garro
MEDIAS Le rapport annuel de RSF
en bref
La liberté de la presse recule aux Etats-Unis n En 2013, la liberté de la presse a reculé dans les pays en guerre mais aussi dans les pays démocratiques. Les Etats-Unis ont chuté de treize places pour se retrouver à la 46ème position du rapport annuel de Reporters sans frontières (RSF). Le pays a fait les frais des affaires Edward Snowden et Bradley Manning. RSF déplore ainsi « un pic en termes de pression sur les journalistes et leurs sources ». Huit individus étant considérés comme des sources ont été inculpés au titre de l’ « Espionage Act » depuis l’accession au pouvoir de Barack Obama, s’indigne l’organisation non gouvernementale. Après le cybermilitant Julian As-
les deux pays ont développé un partenariat militaire très actif dans le milieu des années 1990. En 1996, la Turquie ouvre son espace
Réunions de famille pour les deux Corée
sange en 2012, la poursuite du « whistleblower » (lanceur d’alerte) Edward Snowden, aura marqué l’année 2013.
Les « whistleblowers » menacés
Le lanceur d’alerte avait dénoncé en juin dernier les programmes de surveillance massive développés par les services de renseignements des Etats-Unis. La pression autour de l‘informaticien de la NSA aura pesé dans la balance pour RSF. Ainsi que la condamnation à trente cinq ans de prison pour le soldat Manning, impliqué dans la publication de 250 000 câbles diplomatiques par WikiLeaks.
o Brice Laemle
n Les délégations des Corée du Nord et du Sud ont entamé mercredi des discussions. La reprise du programme des réunions des familles séparées par la guerre de Corée devrait être abordée. Les dernières prévues avaient été annulées au dernier moment par Pyongyang en septembre. Au Sud, certains craignent que le scénario de septembre ne se répète, avec une annulation de ces retrouvailles au dernier moment. Séoul avait suspendu les séjours accordés aux familles séparées en 2008, après que des soldats nord-coréens avaient abattu une touriste sud-coréenne.
Dégel entre Taipei et Pékin
Négociations à Chypre
n Les négociations entamées entre les deux pays en début de semaine continuent ce mercredi à Nankin. Ce rapprochement est historique puisque les deux voisins avaient rompu toute relation diplomatique depuis la proclamation de la République populaire de Chine en 1949.
n Les discussions sur la réu-
nification de l’île ont repris mercredi. Nicos Anastasiades, le président chypriote grec de l’île, a rencontré son homologue Dervis Eroglu, le dirigeant de la République turque de Chypre Nord, au sein de la zone tampon sous contrôle des Nations Unies de Nicosie.
JEUDI 13 FEVRIER- Expresso - 07
ECO/CONSO Argent Un nouveau service bancaire disponible dans les bureaux de tabac
Un compte en cinq minutes
C
’est un petit OVNI dans l’univers des banques. Avec ses couleurs discrètes, mais pas trop, la borne orange et blanche de Compte-Nickel a de quoi surprendre les clients d’un tabac dans le 6ème arrondissement de Paris. L’un des quatre buralistes de la capitale ayant accepté d’installer une borne dans leur commerce, parmi la soixantaine en France. Son patron, Alain, est conquis . « J’ai du flair, ça va révolutionner les banques », prophétise-t-il. « Depuis le lancement du service, il y a deux jours, plus de 60 personnes sont venues dans mon bureau pour ouvrir un compte. C’est simple et rapide à utiliser ». Ouvrir un compte bancaire en cinq minutes, sans dépôt ni revenus minimum, pour 20 euros , c’est l’offre de ce nouvel arrivant qui entend révolutionner le marché en séduisant tous ceux qui ont une dent contre leur banquier : interdits bancaires, victimes de frais trop élevés, demandeurs d’emplois, salariés modestes. Le kit de démarrage contient un relevé d’identité bancaire, une carte de paiement mais pas de chéquier car Nickel n’ est pas une banque. Elle n’émet pas de crédit, n’accorde pas de découvert. Mais Nickel a fait de cette faiblesse une force.
bâtons dans les roues ». Tout le monde y trouve son compte. Pas si rentable Les buralistes, eux, un peu moins. Avec un gain de trois euros par nouveau client et de 23 centimes par retrait d’espèces, les commerçants ne combleront pas le manque à gagner de la vente du tabac. « Vu les rémunérations, c’est presque du travail inutile », concède Alain. « Mais il faut voir l’intérêt ailleurs. En faisant office de banquiers, les bars-tabacs attirent d’autres clients pour acheter des cigarettes ou pour boire un café ». o Yoann Giammetta
Hugues Le Bret, banquier repenti
Soixante buralistes proposent des comptes Nickel. (Crédit: Expresso)
En matière de banques, Hugues Le Bret, co-fondateur de Nickel, possède de lourds antécédents. Directeur de la communication de la Société générale pendant dix ans, puis PDG de la banque en ligne Boursorama, le banquier lâche tout en octobre 2011 pour raconter sa version de l’affaire Kerviel. Deux ans plus tard, il écrit « No Bank » dans sa nouvelle philosophie bancaire, résumée en une ligne sur le site de Nickel : « Proposer la meilleure des solutions à tous ceux qui ne comptent pas pour les banques et à tous ceux qui ne comptent plus sur les banques. » C’est dit.
Méfiance envers les banques En promouvant une « pratique responsable et pédagogique de l’argent », la société surfe sur la vague de méfiance ressentie
par certains clients envers les banques traditionnelles depuis le début de la crise. Henri a ouvert un compte Nickel pour faciliter les opérations de sa nouvelle activité de consulting. « Je ne voulais plus de paperasse superflue » explique-t-il . Jérôme lui, travaille dans le monde de la banque.
en bref
AUTOMOBILE 1,9 millions de Toyota concernées par un dysfonctionnement
Coup de marteau pour les bricoleurs n Les bricoleurs attendront.
Dans une décision rendue le 12 février, le Conseil d’Etat a suspendu le décret autorisant les magasins de bricolage à ouvrir le dimanche. En jeu, « un doute sérieux » quant à la légalité dudit décret, publié le 30 novembre dernier par le gouvernement et autorisant les enseignes de bricolage à faire une entorse au repos dominical. Cet aménagement du temps de travail divise profondément les salariés entre défenseurs du repos et ceux de l’augmentation du pouvoir d’achat.
08 - Expresso - JEUDI 13 FEVRIER
Il a franchi en catimini les portes du bureau du tabac pour découvrir ce dont tout le monde parle au boulot. « A mon avis, Nickel ne fera pas de concurrence aux banques traditionnelles. Au contraire. Il leur permettra de se débarrasser de tous les clients insolvables qui leur mettent des
Rappel massif de Prius pour défaillance n Près de deux millions de Prius vont être rappelées par Toyota à cause d’une défaillance motrice. Le coup est douloureux pour la marque, le modèle est celui qui a fait sa renommée à travers le monde. Le dernier modèle de la gamme Prius est concerné. 1,9 millions de véhicules fabriqués entre 2009 et 2014 seront rappelés à cause d’un dysfonctionnement du système hybride. Du Japon aux Etats-Unis, 400 cas ont été recensés par le constructeur. Le porte-parole de Toyota a expliqué que « la voiture peut s’arrêter pendant la conduite
» à cause d’une perte de puissance. Le risque est suffisant pour justifier un rappel de tous les véhicules construits sur le même modèle : au total, 15 600 en France contre un million au Japon. Reprogrammation du logiciel
Le premier constructeur mondial est le précurseur dans cette motorisation à essence et électricité qui a fait sa gloire. Et justement, la faille concerne directement le logiciel permettant de permuter entre motorisation essence et électrique. Il s’agira de reprogrammer le logiciel de chaque véhicule.
Ce n’est pas le premier rappel pour Toyota. Il y a quatre ans, c’était neuf millions de voitures dans le monde qui était rappelées à cause de problèmes de pédales d’accélération. L’image du constructeur avait été écornée, d’où sa réaction beaucoup plus rapide cette fois-ci. Extrêmement prudent désormais, Toyota installe des systèmes de freinage d’urgence sur tous ses nouveaux véhicules et rappelle par vague des voitures par centaines de milliers, voire millions, dès que survient un problème. o Flavian Charuel
culture/SPORT
expo Le centre Pompidou organise une rétrospective du reporter-photographe
Cartier-Bresson, l’oeil absolu
D
es prostituées mexicaines. Les funérailles de Gandhi. Un baiser. Le couronnement de George VI. Jean-Paul Sartre. Mai 68. Moscou. Pékin. Londres. Paris. Le photographe Henri Cartier-Bresson a sillonné le monde, traversé les époques. La rétrospective qui lui est consacrée au centre Georges Pompidou ne met pas en scène l’histoire, mais des histoires. Importantes ou insignifiantes. Heureuses ou malheureuses. Le fondateur de l’agence Magnum a immortalisé tour à tour les grands de ce monde et les petites gens. Les arts, il les a aussi quasiment tous éprouvés. La photographie, le cinéma, la peinture et le dessin. L’exposition attire du monde : français, étrangers, jeunes et seniors. Un photographe, des publics Cartier-Bresson a eu plusieurs vies, plusieurs carrières. D’abord jeune photographe, il fréquente les surréalistes. A partir de 1936, il adhère aux idées communistes. Son travail, il le place très vite sous le signe de l’engagement contre le fascisme, qui gangrène alors peu à peu l’Europe. Les visiteurs perçoivent aisément cette rupture. D’ailleurs, elle semble les scinder en deux groupes. Il y a d’un côté
Nicole, étudiante à Manchester, devant une photographie de Cartier-Bresson. (Crédit: Expresso) les initiés, qui se laissent séduire par les clichés pris en Grèce ou en Côte-d’Ivoire, hors du temps, hors de l’évènement historique. Nicole, une Anglaise de 26 ans qui étudie la photographie à Manchester, pourrait être classée dans cette première catégorie. De passage à Paris, elle n’aurait « man-
JO 2014 Il finit 35e sur 50 du combiné nordique
Jason Lamy-Chappuis au fond du puits n En tant que porte-drapeau de
l’équipe de France à Sotchi, il cristallisait tous les espoirs de médaille. Mais mercredi, lors de l’épreuve du combiné nordique sur petit tremplin – dont il était tenant du titre – Jason Lamy-Chappuis s’est complètement effondré. Après avoir décroché une solide huitième place au concours de saut à ski, le Français a ensuite craqué durant la course de ski de fond : parti à 31 secondes du premier, il n’a jamais su refaire son retard. « J’ai eu l’impression de donner tout ce que j’avais et de me faire doubler à droite et à gauche », a réagi le Jurassien selon qui « ce fut un calvaire pour finir ces mille bornes ». Voyant que son acharnement ne
payait pas, il a préféré couper ses efforts et termine seulement 35ème sur 50, à 2’37’’de l’allemand Eric Frenzel, nouveau champion olympique. Le japonais Akita Watabe (argent) et le norvégien Magnus Krog (bronze) complètent le podium. Les jeux continuent
Jason Lamy-Chappuis a désormais moins d’une semaine pour se remettre de cette immense désillusion : mardi 18 février, il s’élancera sur grand tremplin avant de concourir, jeudi prochain, pour l’épreuve du combiné nordique par équipe. « C’est une journée à oublier », a-t-il conclu en conférence de presse. o Romain Blanc
qué cette exposition pour rien au monde ». « Ce n’est pas tant son statut de photographe de presse qui m’intéresse. C’est plutôt son travail sur les portraits qui me fascine », explique-t-elle. Ils sont peu nombreux à s’arrêter devant ces clichés. Peut-être leur aspect purement artistique fait-il fuir
les profanes, insensibles à leur esthétique. Au contraire, les salles consacrées à l’arrivée du communisme en Chine ou à la Libération de Paris sont bondées. Sébastien, 22 ans, aime ce qu’il appelle « le côté livre d’histoire » de l’exposition. L’art, « il a du mal à capter ». o Sabrina Cicchini
en bref Bouillie à Sotchi
Suspension pour Laporte
n A Sotchi, ce n’est pas
encore le printemps, mais presque… Avec des températures frôlant les 15 degrés en journée et passant à peine sous la barre des 0 degrés durant la nuit, les conditions climatiques sont peu favorables aux sports d’hiver. Hier par exemple, sur le parcours du ski de fond olympique, la neige avait davantage l’allure d’un mélange de bouillie sale que d’un beau manteau blanc.
L’art bat des records n En 2013, il s’est vendu pour
12,05 milliards de dollars (8,8 milliards d’euros) d’œuvres d’art à travers le monde, a annoncé mercredi la société Art Price. Avec une part de marché de moins de 5%, la France conserve sa quatrième position sur le marché mondial de l’art.
n Mercredi, l’entraîneur du RC Toulon a reçu une suspension de 13 semaines pour injure à un arbitre. Lors de la défaite de son équipe à domicile face à Grenoble (21-22), le 4 janvier dernier en Top 14, il avait qualifié Laurent Cardona – arbitre de la rencontre – d’« incompétent », de « nul » et de « pipe ». L’ancien sélectionneur du XV de France est exclu jusqu’au 13 mai. JEUDI 13 FEVRIER- Expresso - 09
Expresso
13 02 2014
# 07
portrait Pierre Barthélemy défend les supporters du PSG
L’avocat des Ultras
L
a clameur de la foule, la couleur incendiaire des fumigènes. Pierre Barthélemy, trentenaire aux yeux bleus, est tombé amoureux du Parc des Princes un soir de 1996. C’était la demi-finale de la coupe des vainqueurs de Coupe contre la Corogne. Les chants, la ferveur et la foule rouge et bleu le subjuguent. En 2001, il s’abonne avec un copain, en tribune G, juste à côté du virage Auteuil. Mais depuis 2010, il n’a foulé qu’une fois les travées du Parc. Le « plan Leproux » et la dissolution des associations d’Ultras sont passés par là. Après la mort d’un supporter à la fin d’un PSG-OM, le club décide de faire le ménage dans ses tribunes. La plupart des associations sont dissoutes. En guise de contestation, les « historiques » boycottent le Parc, s’estimant la cible de la répression pour quelques amateurs du coup de poing. Mais pour Pierre, les milliers de drapeaux uniformes qui s’agitent aujourd’hui n’auront jamais la même saveur que les tifos d’hier. « J’ai toujours eu de l’admiration pour ces mecs qui sont dos à la pelouse et chantent pendant 90 minutes », confie-til, attablé à la terrasse d’un café du VIIIe arrondissement.
David contre Goliath
L’adolescent supporter est devenu avocat. Quinze heures par semaine, depuis son bureau
déplacements. Pourtant, Pierre n’est pas un des leurs. Il n’a jamais été encarté. Même quand les « Authentiks » se sont formés dans la tribune où il avait ses habitudes. Le ciment de son engagement : ses dix années au Parc mais aussi l’admiration qu’il voue à ces « mecs qui font des déplacements tout en sachant qu’ils ne vont pas rentrer. Simplement pour faire valoir leurs droits ». Pierre est un relais entre les médias, les autorités et ces supporters isolés. « Avant, ils avaient le complexe du petit face au puissant. Maintenant, ils sont remotivés de savoir qu’ils peuvent faire valoir leurs droits en justice ». Interdits de stade
A deux pas de son cabinet, rue du Faubourg-Saint-Honoré (crédit: Matthieu Bidan)
du Faubourg-Saint-Honoré, il soutient bénévolement d’anciens Ultras aux prises avec la justice. « J’essaie de montrer que les supporters ne sont pas
expresso clin d’oeil
des abrutis avinés », expliquet-il. Solidaire d’une culture qui meurt à petit feu, il conseille les Ultras, souvent la cible d’arrêtés leur interdisant les
Sextoys : l’acheteur type habite Montpellier
2 500 couples se marient en même temps
n Selon une étude
n 2 500 couples de l’Eglise de l’unification, connue sous le nom de « secte Moon », se sont unis en Corée du Sud lors d’une cérémonie de mariages collectifs. Plusieurs couples ne se connaissaient que depuis quelques jours. Ces unions collectives, dont certaines se déroulaient dans des stades sportifs et rassemblaient des dizaines de milliers de participants, sont traditionnels au sein de cette secte. Son fondateur, Sun Myung Moon disait que les mariages d’amour conduisaient au libertinage, aux couples mal assortis et à une société malade. Les couples, formés par les parents des jeunes gens ou par l’organisation, doivent alors jurer sous serment qu’ils sont vierges et ne pas consommer leur union avant 40 jours.
menée par PriceMinister-Rakuten, les hommes ont réalisé 70% des achats de sextoys sur le Web en 2013. Les chiffres se basent sur les 100 000 transactions qu’ont effectuées les 20 millions de membres du site de vente en ligne. C’est Montpellier qui arrive en tête du classement des villes qui consomment le plus de sextoys. Les Héraultais sont talonnés par leurs voisins Toulousains, tandis que Nancy complète le podium. L’étude révèle également que les plus gros acheteurs ont entre 26 et 35 ans.
10 - Expresso - Jeudi 13 fevrier
Le 11 octobre dernier, les Ultras se sont rappelés au bon souvenir du Parc des Princes. L’équipe de France reçoit l’Australie dans le stade du XVIe arrondissement. À la dixième minute, une poignée de supporters commencent à s’époumoner. Pierre Barthélemy est dans les rangs. « On arrive avec un huissier et un journaliste. On montre que l’on a respecté les règles ». Pourtant, l’accès est refusé à certains supporters, sans justification. À Monaco ce week-end, comme à tant d’autres matches, le même refus. Qu’importe, Pierre est là. « Si moi je n’ai pas la motivation, qui va l’avoir ? », sourit-il. o Matthieu Bidan
Espresso quotidien
Institut Français de Presse, Paris II 92 rue d’Assas 75006 Paris Quotidien école M1. Février 2014. Directeur de la publication : Jean-Baptiste Legrave. Sous la direction de Françoise Fressoz, rédactrice en chef et Fabien Rocha, éditeur en chef. Chefs de service : Grégoire belhoste (France), Alexis Guilleux (International), Simon Fontevielle (Eco/Conso), Robin Braquet (Culture et Sports) Chef d’édition : Maxime Lebufnoir