SOMMAIRE INSPIR’ ASSOCIATION 3 O.S.E.R. L’Afrique
INSPIR’ INTERVIEW 5 Fatima Bocoum
FOCULTURE 9 Mutilations Génitales Féminines
INSPIR’ START-UP 11 Nathalie Moth
INSPIR’ POLITIC’ 19 Laetitia Y. Sagno
INSPIR’ CAREER 23 Hapsatou Sy 4 QUESTIONS A 25 Sandra Ntsonde
INSPIRE AFRIKA Femmes Engagées ! 90 ans… 90 ans de lutte pour une justice et une égalité de droits. Les femmes du monde entier célèbrent aujourd’hui encore, leur histoire, leur journée. Une fois dans l’année, l’occasion nous est donnée de faire le point sur notre condition et sur l’égalité des sexes. Bien sûr, le chemin à parcourir reste long. Dans de nombreux pays, des milliers de femmes sont mutilées, violées, ou battues. Dans d’autres, elles ne bénéficient même pas du droit de vote. Toutefois, fidèle à son « afro optimisme », Inspire Afrika se propose dans ce numéro de célébrer les progrès accomplis par les femmes jusqu’ici, notamment celles d’Afrique. Selon les organismes internationaux, le taux d’alphabétisation des jeunes femmes entre 15 et 24 ans, en Afrique subsaharienne était de 67,2% en 2010, contre 53,6% en 2008. Cette évolution exponentielle illustre l’une des victoires des femmes dans le domaine de l’éducation. « Le sexe faible » (pas si faible que ça), représente un taux d’entreprenariat en nette évolution sur le continent. Le Rwanda, pays au monde qui se rapproche le plus de la parité hommes/femmes avec 48,8% de femmes élues au sein du parlement, montre une fois de plus la détermination des femmes à atteindre les objectifs fixés en matière d’égalité des chances. Cet engagement politique, Laetitia Sagno nous en parlera en page 19 Loin derrière nous l’époque où la valeur d’une femme se limitait à son seul attrait physique. Les femmes du 21ème Siècle occupent tout aussi bien et avec la même aisance, l’espace public que la scène internationale. Belles, fortes, dynamiques, elles prennent de plus en plus d’initiatives. Mais surtout, elles innovent. Avec Hapsatou Sy (p.23), on apprendra qu’il est réellement possible de vivre de ses rêves. En page 11, Nathalie Moth nous donnera quelques clés pour monter une entreprise sur Internet. Fatima Bocoum quant à elle, nous expliquera le rôle déterminant qu’ont joué ses multiples influences culturelles dans l’initiation de la marque BOCOUM (p.5). Diversité et Innovation sont donc les thématiques maitresses autour desquelles nous avons choisi de rendre hommage à la femme ce mois-ci. Place à la découverte ! Bonne lecture. Joan
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Y.
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INSPIR’ ASSOCIATION
O.S.E.R. L’AFRIQUE «La jeunesse africaine saura faire entendre sa voix.» Marilia Mayaki.
Parce
que les jeunes africains représentent une part importante des étudiants suivant des études supérieures hors de leurs pays d'origine, ils sont considérés comme les plus mobiles du monde par l'UNICEF. Cette mobilité a donc « forcé » l'occident à accueillir de plus en plus d'étudiants issus de pays africains. A leur tour, ces jeunes africains ont INSPIRE AFRIKA – MARS 2012
su s'ouvrir à leur nouvel environnement. A présent formés et compétents, on les voit de plus en plus solidaires dans le but de montrer l'exemple à ceux et celles qui désirent contribuer au développement du continent. C'est dans cette logique que l'association OSER l'Afrique a vu le jour en 2010, lors de la célébration du cinquantenaire des indépendances africaines. 3
INSPIR’ ASSOCIATION Ouverture, Solidarité, Exemplarité et Respect sont les quatre mots qui caractérisent l'association dont l’objectif principal est de "faire prendre conscience aux jeunes africains que le développement du continent ne saurait se construire dans une logique attentiste". Après le forum de la jeunesse pour l'Afrique organisé en juillet 2010, l’équipe OSER nous revient cette fois ci avec un ouvrage intitulé "Le carnet de la jeunesse pour l'Afrique". Préfacé par Cyrille Nkoutchou et Postfacé par Marguerite Barankitse, le carnet résume l'entreprenariat en 4 actes: incarner, se regrouper, innover et rayonner.
Dans le carnet, on retrouve des «success stories », des témoignages, mais aussi des avis d'aînés. Chaque rubrique contient une section "mon engagement" dans laquelle le lecteur est appelé à noter ses objectifs, les actions à entreprendre et la date limite pour atteindre ces différents objectifs. Mais le collectif ne compte pas s'arrêter là. Tout au long de l'année, la jeunesse africaine aura droit à des ateliers qui auront pour but d'appliquer les différentes propositions émises dans le carnet. De plus le site ouvrira bientôt une plateforme virtuelle qui permettra aux jeunes d’échanger et d’agir ensemble pour l’émergence du continent. OSER l'Afrique tient en effet à débattre sur tous les maux de la jeunesse africaine de manière globale. Interrogée sur l'importance de la journée internationale de la femme, la responsable Communication de l’association, Marília Mayaki doute de " l'impact réel de cet événement pour la cause des femmes". Néanmoins, elle souhaite que les jeunes femmes Africaines "aient la conviction et la volonté de disposer des outils et moyens nécessaires à leur épanouissement". Le collectif OSER l’Afrique est une initiative de la jeunesse africaine par la jeunesse africaine pour la jeunesse africaine qui voit l’émergence du continent à travers la solidarité. Si vous aussi, vous souhaiter OSER, n’hésitez pas à les rejoindre. Consulter le Carnet à l’adresse suivante: http://www.oserlafrique.com/
Karl N.
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INSPIR’ INTERVIEW
Une Africaine du monde : Fatima Bocoum. Pendant que certains hésitent à se lancer dans l’entreprenariat, d’autres n’attendent pas d’avoir fini leurs études pour devenir chef d’entreprise. Titulaire d’un diplôme BAC+2 en Business et en Art, Fatima Bocoum est aujourd’hui étudiante en Bachelor Business Administration, Marketing, Management and International Business à Mercer University (Atlanta, GA). Issue d’une famille de 3 enfants, Fatima est devenue très tôt une jeune femme dynamique. A 17 ans seulement, elle cumulait déjà les responsabilités d’élève et de INSPIRE AFRIKA – MARS 2012
salarié. Souvenez-vous, elle a été la présentatrice de l’émission Vidéo Hit sur la chaine Africable. L’Afrique justement, tient une place importante dans sa vie car elle pense qu’il est « important de faire connaitre l’art africain à travers le monde». Motivée par des rencontres avec des figures du Show Business telles que Nas ou Nadia Buari, Fatima est observatrice et s’inspire de tout ce qu’elle voit autour d’elle. Aujourd’hui elle est la directrice de la marque Bocoum.
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INSPIR’ INTERVIEW IA: Vous avez commencé à travailler très jeune en tant qu’animatrice chez Africable. Dites-nous en plus. Qu’avez-vous appris de cette période ? Fatima: C’est à cette période que j’ai réalisé que dans la vie il faut travailler dur. C’était l’année de mon Baccalauréat. Il fallait donc que j’ai mon diplôme à la fin de l’année. Je devais non seulement travailler, mais aussi être performante dans les tâches qui m’incombaient. L’émission était diffusée quotidiennement sur Africable. Par conséquent tous les jours après les cours, j’allais enregistrer. Cela m’a amené à avoir des priorités. Je ne perdais pas mon temps à sortir. J’étais au boulot jusqu’aux environs de minuit, ensuite quand j’arrivais à la maison je devais encore travailler sur mes cours. Ma vie se résumait à l’école et au boulot parce que mes priorités avaient changé.
Inspire Afrika: Fatima, vous êtes une malienne, née en chine qui a grandi en Lybie et qui vit aux Etats-Unis. Comment vivez-vous ce mélange de cultures ? Fatima Bocoum: Pour moi c’est naturel. Je n’ai jamais eu à me poser de questions. Chaque année je rentrais au Mali en vacances, donc même si ma famille et moi habitions un peu partout dans le monde, on retournait toujours à la source. Je ne me suis jamais demandée d’où est ce que je viens par exemple. Pour moi ça a toujours été clair : Je suis Malienne. Et d’ailleurs cela a été très enrichissant parce que cette culture m’a permis d’avoir l’esprit assez ouvert. Le fait d’avoir été au contact de plusieurs cultures a aujourd’hui une influence sur qui je suis et sur ce que je fais.
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IA: Avez-vous, au cours de votre aventure entrepreneuriale été confrontée au machisme ou au « complexe de l’ainé » ? Fatima: Oui, et je l’ai plutôt bien pris. C’est vrai qu’il y a eu des moments où j’avais l’impression qu’on ne me prenait pas au sérieux quand je disais aux gens « Je suis entrepreneur ». Il fallait que la conversation aille plus loin pour que ces personnes se rendent compte que même si je suis jeune, je suis assez mature. Il est parfois nécessaire que je tape du poing sur la table et que je dise « écoutez, voilà ce que je veux accomplir et je ne compte pas abandonner ». C’est assez difficile parce que je suis jeune, je suis une femme en plus, mais je pense justement qu’il est important qu’une femme ait du caractère et qu’elle ne se laisse pas marcher sur les pieds.
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INSPIR’ INTERVIEW IA: Parlez-nous de Bocoum, la marque, l’équipe… Fatima: Bocoum a été lancé en septembre 2011. C’est une marque qui est influencée par tout ce que j’ai vu dans le monde, même si ça ne se traduit pas forcément dans la première collection. Ce que j’essaie de faire avec Bocoum c’est d’aller au-delà de la création de vêtement. J’ai envie de pouvoir toucher la vie des femmes à travers mes collections. La mode est forcément une passion pour moi, mais j’aimerais avoir une connexion émotionnelle avec les femmes qui porteront mes vêtements. En ce qui concerne l’équipe, elle est formée de quatre personnes, mais nous travaillons bien entendu avec des personnes extérieures telles que les fournisseurs et les entreprises de relation publique. Nous vivons tous les quatre sur différents continents, en Europe, en Afrique et en Amérique.
IA: Est-ce que la distance ne rend pas la prise de décision difficile ? Fatima: Non pas du tout, parce qu’avec Internet et le téléphone on se parle tous les jours et on travaille parfaitement ensemble. On se comprend et on est sur la même longueur d’ondes. Pour un entrepreneur c’est important de pouvoir créer une bonne équipe. Une bonne équipe est celle-là qui est constituée de personnes motivées, qui comprennent la vision de l’entrepreneur et qui parfois veulent réussir plus que lui. Le dernier critère est important parce que le jour où ça ne va pas, il faut que ce soit eux qui boostent l’entrepreneur. C’est très important de pouvoir compter sur son équipe surtout quand l’entreprise est encore jeune. Ce n’est pas facile tous les jours. Il y a des moments où tout va de travers et à ces moments-là c’est important d’avoir la motivation. IA: Avez-vous des projets pour le Mali ? Fatima: J’ai vraiment envie de pouvoir agrandir mon business au Mali en y créant des emplois. Je pense qu’il y a beaucoup de
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talents, pas seulement au Mali, mais aussi en Afrique. Je crois que c’est important qu’on comprenne que même si nous ne pouvons pas rentrer nous installer chez nous, nous pouvons travailler avec nos frères dans le but d’aider nos pays, notre continent. J’aimerais pouvoir mettre en avant nos talents, qui n’arrivent pas à se faire connaitre, malheureusement. IA: Un mot pour les entrepreneurs de demain ?
jeunes
Fatima: Il ne faut jamais abandonner ses rêves. Parfois, on est amené à faire des choix qui nous mènent à des endroits où on ne souhaite pas être. Mais il faut déjà pouvoir visualiser ce qu’on veut dans la vie. A partir du moment où on a cette image, il faut pouvoir se donner les moyens de réaliser son rêve. Et même quand rien ne va, il ne faut pas abandonner. Il ne faut juste jamais abandonner. Je le répète parce que je passe par là tous les jours et c’est important de continuer. Parfois il faut prendre un moment et réfléchir, mais il faut surtout se relever pour se battre et continuer à réaliser ses rêves. C.E.N
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FOCULTURE QUAND TRADITION ET CULTURE DEPASSENT LES BORNES : LES MUTILATIONS GENITALES FEMININES Fleur du Désert est un film qui raconte l’histoire d’une petite fille issue d’une famille Somalienne nomade. A l’âge de cinq ans, elle est victime d’excision, l’horrible tradition qui consiste à enlever partiellement ou entièrement les parties externes du sexe féminin. A 13 ans, elle est forcée d’épouser un homme qui pourrait être son grand père. Désespérée, elle quittera son village, traversera le désert et après plusieurs difficultés, se retrouvera à Londres. Là-bas, elle est découverte par un photographe, puis est rapidement propulsée dans le monde de la mode. Elle se sert de sa beauté unique et de son talent pour dénoncer les pratiques de son village, afin d’agir pour changer les choses. Le film est touchant, et se rapproche du conte de fée: Comment une petite Africaine échappée du désert peut-elle finir sur les grands podiums londoniens? Et si je vous disais qu’elle s’appelle Waris Dirie, qu’elle est bien réelle et que le film est inspiré de l’histoire de sa vie? Elle est l’une des rares femmes qui ait survécu à l’excision et qui ait décidé d’en parler. Aujourd’hui Waris Dirie milite pour sensibiliser les jeunes femmes aux risques liées aux mutilations génitales.
Afrique de l’Ouest en général.
Malgré qu’elle soit un sujet tabou, la pratique des Mutilations Génitales Féminines (MGF), est un problème encore omniprésent dans de nombreux pays Musulmans et Chrétiens. C’est une tradition qui existe depuis l’Egypte ancienne et qui est toujours pratiquée en Egypte, au Soudan, en Ethiopie, au Mali et en
Il existe plusieurs types de MGF. La plus courante est l’excision ou la clitoridectomie qui est l’ablation partielle ou intégrale du clitoris et des petites lèvres. L’infibulation quant à elle est la forme la plus grave de MGF. Elle consiste en l’ablation du clitoris, des petites et grandes lèvres, suivie d’une séance de points de suture de la vulve avec du fil de soie et des épines. La sunna ou excision symbolique, est la coupure de la membrane du clitoris. Enfin, toute procédure qui consiste à mutiler le sexe féminin sans raison médicale est considérée comme une MGF.
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FOCULTURE Alors pourquoi cette atrocité est-elle encore pratiquée? Le pouvoir des traditions est indéniablement le point de départ de cette pratique. Pour les « exciseuses », c’est une façon d’empêcher la jeune fille de devenir dépendante de l’acte sexuel. C’est aussi une sanctification de la jeune fille car une fille excisée est une fille pure, que l’on peut épouser. C’est le mélange de facteurs culturels, religieux et sociaux qui pousse la communauté à se conformer à ces traditions. La mutilation est une norme sociale, et un rite de passage nécessaire pour l’éducation « correcte » d’une jeune fille, tout simplement parce qu’elle empêche l’acte sexuel avant le mariage. Les pratiquants se défendent en affirmant que la tradition est ancrée dans la religion, alors qu’aucun texte religieux n’enseigne cette pratique. Dans la plupart des pays où l’excision est pratiquée, les élites telles que les chefs religieux, les chefs de villages mais aussi l’influence du droit d’aînesse, participent à la perpétration de cette pratique. La Combattre consisterait à changer des mœurs présentes depuis des générations dans certaines traditions. Cela reviendrait à aller vers ces chefs religieux, ceux qui possèdent le droit d’aînesse, afin de leur faire comprendre le mal être physique et psychologique infligé à ces jeunes filles généralement excisées entre l’âge de 3 et 15 ans. L’histoire de Waris Dirie, prouve que ces petites filles se conforment à la tradition malgré elles. Très peu sont aussi courageuses que Waris. En effet, environ
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140 millions de filles et de femmes vivent avec les séquelles dues à ces mutilations génitales. En Afrique, environ 92 million de fillettes âgées de 10 ans et plus, auraient subi une mutilation génitale féminine. La procédure a souvent pour conséquence une perte considérable de sang, ou encore des problèmes urinaires. Certaines décèdent à cause des infections contractées lors de la pratique. De plus, ces mutilations peuvent rendre la femme incapable de concevoir, et conduisent parfois à la naissance de bébés morts. En 2002, Waris a créé Fondation Fleur du Désert, basée à Vienne en Autriche pour promouvoir sa campagne contre les MGF. Aujourd’hui les femmes sont de plus en plus menacées car un nombre croissant de médecins sont désormais qualifiés pour pratiquer les mutilations génitales féminines. Ceci atteste de la puissance des traditions en Afrique, capable de s’adapter, d’être perpétuées et de se moderniser pour subsister. Nous pouvons agir, tout simplement en nous informant et en partageant cette information pour susciter une prise de conscience. Visitez www.desertfowerfoundation.org pour vous informer et faire des donations si possible. Amma O.
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INSPIR’ START-UP NATHALIE MOTH, OU COMMENT SE LANCER DANS L’AVENTURE START UP
Créer une entreprise sur Internet semble être la voie la plus simple aujourd’hui pour obtenir rapidement de la visibilité et de la notoriété. Qu’en est- il réellement sur le terrain ? Nous avons fait appel à la ravissante Nathalie Moth, créatrice de la marque Eshe And Jalia. Elle nous raconte avec bonne humeur, son parcours et nous donne quelques conseils sur la démarche à suivre en cas de création d’une Start-Up1.
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Anglicisme désignant une jeune entreprise disposant d’un fort potentiel de développement à court terme. On parle de startup dans le domaine des technologies de pointe, notamment Internet.
INSPIR’ START-UP Bonjour Nathalie ! Tout d’abord peux tu te présenter aux lecteurs de Inspire Afrika ? Je m’appelle Nathalie Moth, je suis une Camerounaise de 23 ans, ma formation n’a rien à voir avec Eshe & Jalia ou la mode (ça fait sourire certains encore d’ailleurs), je suis étudiante en Finance, et auparavant j’ai fait de l’économétrie ce qui m’éloigne encore plus de notre sujet (rires)!
Parle nous de E&J. Comment t’est venu en tête un tel projet?
Eshe And Jalia est né à partir du moment où je me suis dit que je ne perdais rien à me lancer. C’est un projet qui nous(l’équipe et moi) tient à cœur depuis environ 2 ans, et qui est d’autant plus pertinent que la mode africaine en ce moment est sous le feu des projecteurs. On avait envie de trouver un compromis entre ce qui nous plaisait vraiment et les tendances modes actuelles. Le pivot de notre marque, c’est le tissu, l’imprimé Africain que nous mixons dans nos
silhouettes.
Pouvoir
associer librement
plusieurs matières dans les vêtements, sans forcément s’enfermer dans un carcan, en restant accessibles.
INSPIR’ START-UP Que signifie « Eshe And Jalia » ? Nous avons le sentiment qu’il s’agit là de prénoms africains. Est ce le cas ? Pourquoi avoir choisi cette dénomination ? Effectivement, ce sont des prénoms Africains que nous avons choisi car ceux-ci renvoyaient le moins à la tradition pure. Selon la description, Eshe représente la femme introvertie et prude, tandis que Jalia représente la femme sûre d’elle, qui prend les devants. Il se trouve que toutes les femmes ont un peu de Eshe et un peu de Jalia en elles. On voulait donc être les portes paroles de femmes qui jouent de leur propres différences et audacieuses car elles peuvent porter à la fois des imprimés africains, tout en les mixant avec des pièces plus basiques telles que des blouses, ou des shorts par exemple. L’idée derrière la marque, c’est la promotion de l’Afrique, mais d’une manière beaucoup plus ouverte que celle qu’on a l’habitude de voir. Nous voulions rompre avec cette image de l’Afrique « Boubou », très traditionnelle et plutôt simpliste. Ainsi, même à travers le nom, nous avons essayé d’être contemporains et de faire jouer notre double culture, pour rester sur un positionnement « ethnique/minimaliste ».
Que penses tu du panorama actuel de la mode africaine ? Déjà il faut savoir que la mode africaine se développe
depuis
un
bon
moment
déjà,
contrairement à ce qu’on pourrait penser. Après, cela se ressent plus dans des pays comme le Nigéria, le Kenya, ou l’Afrique du Sud où la mode est vraiment une institution. Avant ce « boom » de la mode africaine, le souci résidait dans le fait qu’elle était cantonnée à des designers, et à des défilés de mode. De fait, il n’existait quasiment pas d’enceintes ou de boutiques pour répondre aux attentes du grand public. Chose qui est entrain de changer radicalement aujourd’hui. Il faut donc reconnaitre que cet enthousiasme autour de la mode africaine, permet aux nouvelles marques comme nous de mieux se vendre. INSPIRE AFRIKA – MARS 2012
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INSPIR’ START-UP Je pense que cette situation va perdurer si on sort de ce « cliché de la robe en pagne », pour moderniser notre vision de la mode.
Qui se charge de la création des modèles chez E & J ? Alors, Eshe and Jalia est articulée autour de 4 pôles : Le pôle création et production dont je suis responsable. J’ai comme collaboratrices une amie camerounaise, ainsi qu’une stagiaire gabonaise, issue d’ESMOD. Ensuite, il y’a le pôle visuel/marketing, qui a trait à tout ce qui concerne l’interface de la marque, la production d’images, la relation avec les influenceurs et la stratégie. Pour terminer, nous avons un pôle administratif, plutôt formalisé, et qui tempère un peu nos ardeurs sinon ça va dans tous les sens ! Et bien sûr, le pôle finance, qui est encore pire ! (rires). Quels sont les designers qui t’inspirent tout particulièrement ? Oulà ! Il y ‘en a énormément ! Disons que la plupart sont soit nigérians soit kenyans. Je pense notamment à Jewel By Lisa, Maki OH et Duro Olowu2.
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Créateur et styliste nigérian basé à Londres. http://www.duroolowu.com/aw11photos.html
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INSPIR’ START-UP Nos lecteurs aimeraient à présent avoir quelques conseils sur la création d’une Start up.
Quelle est la première chose à faire dans ce cadre selon toi ? Quels sont les prérequis avant d’ouvrir un web site ? Il y’a t-il des comptes à rendre à l’avance ? Déjà, créer une Start up3 sur Internet revient beaucoup moins cher que d’en créer une physiquement. On a la possibilité de faire des économies au niveau de la gestion des stocks ou de la location d’un entrepôt par exemple. Par conséquent, elle est plus facile à manager pour des étudiants, qui n’ont pas toujours le temps de gérer à la fois les cours et le suivi régulier de l’entreprise.
Avez vous eu recours à un business plan ou existe t-il d’autres manières de s’y prendre ? Oui, il faut toujours passer par un business plan. Mais honnêtement, le premier business plan de Eshe And Jalia était très scolaire. Je l’ai envoyé à mon père (qui nous a aidé à financer la première collection), et il n’était pas très détaillé. On y sentait vraiment l’empreinte familiale. Le second business plan par contre, a été plus formel et plus professionnel. On y a inséré des prévisions, une analyse stratégique et un SWOT de nos activités de manière à répondre à toutes les questions qu’on pourrait nous poser, notamment à propos des canaux de distribution choisis pour la marque.
Je suppose que le site web est déjà légalisé. Comment cela se passe t-il concrètement ? En fait, il faut créer l’entreprise en tant que personne morale. Nous avons dans un premier temps déposé le nom de l’entreprise à l’INPI4. Cela nous a coûté 200 euros, ce qui n’est pas excessivement cher, quand on sait que l’INPI apporte une protection à notre marque. Ce que je recommande à ceux qui ont envie de se dans cette aventure, c’est toujours d’avoir un comptable sous à la main, et ce dès le début. Si il y’a moyen d’avoir un juriste ou quelqu’un qui s’y connaît en droit, il est bon de le contacter aussi.
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Institut national de la propriété industrielle
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INSPIR’ START-UP En tant qu’entreprise en construction, vous avez dû passer par des demandes de crédits. Comment faut-il s’y prendre pour démarcher avec les banques ? La première chose à faire, est de créer un compte au nom de l’entreprise. Le problème c’est qu’il faut être assez crédible pour que la banque accepte cette création de compte. Le statut d’étudiant rend les banques très frileuses à ce sujet. Il faut donc prouver à la banque votre solvabilité et justifier des moyens que vous allez employer pour payer vos fournisseurs, vos employés, etc. Il faut aussi montrer aux banquiers que vous pouvez parer à toutes les éventualités. La banque doit avoir confiance en votre projet. En ce qui concerne les crédits à proprement parler, ils sont plutôt simples à gérer pour ce qui est des marques de textiles. En effet, les
crédits
fournisseurs
s’échelonnent en général sur 3 à 6 mois.
Pour
lancer
une
collection/production par exemple, le mieux est de signer une lettre de crédit avec son fournisseur où il faudra
préciser
le
mode
d’échelonnement des paiements. Ces opérations entre entreprises et fournisseurs
se
déroulent
de
banque à banque, d’où la nécessité d’être crédible à 100%.
Comment gérez vous les paiements en ligne? Pour les paiements, nous avons choisi l’interface la plus simple, qui se trouve être paypal. Les clients créent un compte paypal, et leurs paiements effectués en ligne sont versés directement sur le compte paypal de Eshe And Jalia.
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INSPIR’ START-UP Quels sont les pièges à éviter lorsqu’on veut monter une entreprise comme celle ci ? Et quelles difficultés as tu rencontré ? Il y’en a tellement ! Au début, on a toujours l’impression que tout ira bien. Mais c’est très utopique. Il faut prendre en compte les imprévus. On va dire que ma première frayeur était lors de la toute première collection. J’étais sensé recevoir les pièces à shooter pour le lancement, et la veille de la date butoir, je n’avais encore rien reçu ! Il fallait absolument que je récupère tous les prototypes ainsi qu’une partie de la production ce jour là. J’étais au bord des larmes… Heureusement, nous avons réussi à basculer le délai au jour suivant. Dans la même semaine, le jour du shooting
pour
le
lookbook
de
la
collection,
la
maquilleuse, la coiffeuse, la vidéaste et ont annulé en même temps leur participation. On a du se débrouiller tout seuls pour les photos. Ma petite sœur s’est occupée des coiffures et du maquillage, et vu le résultat, on peut dire qu’elle est très douée ! (Rires). Ce qu’il faut savoir c’est que s’entourer d’amis polyvalents et compétents peut se révéler très utile aussi dans ce genre de situations. Et plus que tout, il faut savoir rebondir et ne pas céder à la panique.
Le mot de la fin : comment vois tu la marque dans 10 ans ? Dans 10 ans, je nous vois tournés vers l’Afrique. Le but serait d’être bien implanté en Afrique et avoir éventuellement quelques boutiques aussi en Europe. Nous aimerions être bien accueillis et surtout bien perçus par les fans de modes africains.
Joan Y.
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INSPIR’ POLITIC’
Laetitia Y. SAGNO, Femme politique d’exception.
Il y a quelques années il était de coutume de croire que lorsqu'on est née et qu'on a grandi hors de son pays d'origine, on ne peut pas y être attache. Il était donc très difficile pour les jeunes de la diaspora de participer activement au développement de leur pays. Mais c'était avant. Avec de plus en plus de pays accordant le droit de vote à la diaspora, la politique Africaine prend une dimension internationale et requiert donc une présence plus importante des partis politiques en dehors de leur pays. Les opportunités crées par cette nouvelle démarche électorale n'ont pas échappé à des jeunes comme Laetitia SAGNO, qui ont le désir de participer au
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développement de leur continent. Née en France, Laetitia passe son enfance à paris aux cotés de ses parents dont elle a hérité ses origines guinéennes. Elle ira ensuite en Côte d'Ivoire à l’âge de 13 ans et reviendra en France à 18 ans pour débuter des études de droit. Agée aujourd'hui de 30ans, Laetitia SAGNO est la responsable des relations extérieures de la section de son parti, l'union des forces républicaines. Doucement et avec talent, elle inscrit sa carrière politique dans la continuité de femmes africaines comme Ellen Sirleaf Johnson. Entretien...
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INSPIR’ POLITIC’ Inspire Afrika: Pourquoi avoir choisi de faire un master en sciences politiques spécialisation relations institutionnelles ? Laetitia Sagno: J’ai toujours souhaité que mes actions s’inscrivent dans la sphère publique. Depuis très jeune, j’aspire à opérer à un haut niveau au service de la collectivité. La politique, en son sens le plus noble est le domaine qui correspond le mieux à mes attentes. Après avoir hésité entre le Droit public et les Relations Internationales, c’est donc en Relations Institutionnelles que j’ai choisi de me former. Ce qui m’a toujours importé c’est de voir l’impact immédiat de mes actions sur mon environnement et de pouvoir en mesurer l’efficacité. Par la suite, j’ai complété mon cursus académique par un MBA en Management des Communications d’Entreprises pour avoir une maîtrise globale des différents enjeux.
IA: Comment avez-vous été engagée dans l’Union des Forces Républicaines en 2006 ? Laetitia: En amont, j’avais commencé par prospecter le paysage politique. J’ai fait la démarche de m’intéresser de plus près à la réalité de la situation politique de mon pays d’origine, la République de Guinée. Très vite, à mes yeux l’Union des Forces Républicaines (UFR) s’est distinguée par sa structure, son organisation et par sa vision
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pragmatique et réaliste du développement de la Guinée. De plus, L’UFR se distingue aussi par sa représentativité car il est le seul parti en Guinée à caractère transnational et non ethnicisé, ce qui est une rareté sur notre continent. Le leader, Sidya Touré, mais aussi les équipes et les partisans sont l’illustration parfaite de cette diversité nationale. C’est donc au sein de la représentation française de l’UFR que j’ai choisi de m’investir. J’ai suivi le parcours classique de sympathisante à militante avant d’intégrer le bureau en 2009 en tant que chargée puis responsable des Relations Extérieures du parti. IA : En quoi consiste votre rôle de responsable des relations extérieures de la section France de l’UFR ? Laetitia: Dans les grandes lignes, mon rôle est de promouvoir le parti, ses valeurs et son leader auprès de trois publics différents que sont les médias, les partis politiques français et les partis politiques guinéens représentés en France. Les trois volets dans les missions qui m’incombent consistent donc à trouver des opportunités de prises de parole pour le président de l’UFR quand il se déplace en France, créer des synergies avec les autres partis politiques pour échanger sur les idées et les projets de développement, et enfin sensibiliser la diaspora guinéenne sur la vie publique de notre pays.
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INSPIR’ POLITIC’ IA: Il a été dit que vous vouliez monter une structure à destination des hommes politiques africains. Où en est le projet? Laetitia: Le projet est en pleine gestation! Il s’agit d’une structure de conseil en communication envers les décideurs en général et les politiques en particulier présents en Afrique. C’est un projet à moyen terme que je prends le temps de mûrir en me préparant et m’exerçant à titre gracieux, en acquérant de l’expérience tout en constituant mon réseau. Je ne veux surtout pas me précipiter et me lancer pour m’essouffler. Ce qui me semble important, c’est de pouvoir discerner la bonne saison, celle à laquelle on a la conviction profonde qu’on est la bonne personne, au bon moment, au bon endroit.
IA : D’après vous quel rôle politique doit jouer la femme en Afrique en Général et en Guinée en particulier ? Laetitia: Je ne suis pas sûre qu’il faille spécifier le rôle politique d’une femme selon qu’elle se trouve en Guinée ou au Malawi. Il me semble plus pertinent d’évoquer ce que l’on peut attendre d’elle de façon générale, même si je conviens que les moyens, les actions à entreprendre sont conditionnés par le contexte sociopolitique du pays dans lequel chacune se trouve. A mon sens, son rôle se joue à trois niveaux : influencer, mobiliser et éduquer. Les femmes doivent apprendre à user de leur pouvoir d’influence naturel en conseillant leur entourage, notamment les hommes autour d’elles. Elles doivent également se servir de cette capacité qu’elles ont à rassembler pour mobiliser le plus grand nombre autour de causes justes afin de mener les bons combats. Elles peuvent jouer le rôle de personnes ressources émettant aussi des propositions auprès des dirigeants. Enfin, c’est aux femmes qu’incombe la tâche de transmettre des valeurs fortes à leurs enfants qui seront des leaders demain. Autant dire que le poids de leurs responsabilités est grand.
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INSPIR’ POLITIC’ IA: On se rend compte avec vous que la femme prend une place de plus en plus importante dans la politique en Afrique. Estce que vous avez un message pour toutes celles qui veulent devenir demain des actrices politiques ? Laetitia: Cela fait très longtemps que les femmes sont impliquées sur ce terrain-là. Il y a juste aujourd’hui plus de visibilité de leur action. La dynamique a toujours existé. Je suis encore loin d’être arrivée au sommet mais j’inscris mon action dans la continuité de ce que d’illustres femmes ont fait et continuent de faire. Ce que je peux partager de ma jeune expérience, c’est que ce qui fait la différence, c’est l’engagement : être présent sur le terrain, identifier les besoins et apporter les solutions. S’inspirer ensuite de modèles de réussite, de personnes dont la vie a bonifié tout un milieu est très utile car cela fait gagner du temps. Il n’y a pas de petits commencements ou de petits combats. Il n’y a que des actions concrètes qui transforment et améliorent le quotidien d’un quartier, d’une région, d’une nation, d’une génération. Faire de la politique au sens où je l’entends implique avoir un certain état d’esprit, une disposition et une disponibilité à vouloir être utile et servir sa communauté. Il faut en mesurer les responsabilités mais également les sacrifices. « Quel problème ai-je envie de résoudre ? » A partir du moment où l’on raisonne ainsi, alors je pense qu’on commence à faire de la politique. IA: Comment voyez-vous la place de la femme politique Africaine dans 50 ans ? Laetitia: Je vois la femme politique africaine plus influente, avec un rayonnement non seulement en Afrique mais également au-delà du continent, à l’instar de la reconnaissance du travail abattu par de grandes dames que sont Marguerite Barankitse, Ellen Sirleaf Johnson ou Leymah Gbowee. Parallèlement, la société civile africaine dans son ensemble devrait croître en maturité politique pour permettre à d’autres femmes de pouvoir s’exprimer pleinement. Toutefois, j’ai bien conscience que cette place, personne ne nous la donnera : nous irons donc la chercher ! Karl N.
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INSPIR’ CAREER Une femme qui en impose: Hapsatou SY Le concept du “Sois belle et tais toi” est désormais désuet grâce à des femmes comme elle. Loin d’être uniquement une belle plante de 30 ans, Hapsatou Sy est aussi entrepreneur dans l’âme. Aventurière, elle aime à dire que les échecs la construisent. C’est dans cet état d’esprit, qu’elle crée Ethnicia : un concept d’espaces de beauté sur mesure, où les particularités de chaque client sont au cœur des préoccupations. Depuis 2005, Ethnicia ne cesse d’évoluer et s’impose aujourd’hui comme LE lieu beauté incontournable à Paris. Gros plan sur un parcours qui force l’admiration. Née d’un père sénégalais et d’une mère mauritanienne, Hapsatou grandit en France, dans la petite ville de Chaville5. Très tôt, elle côtoie le monde du travail, et fait déjà preuve d’une forte personnalité. Elle sait qu’elle a envie de devenir entrepreneur, et compte tout faire pour y arriver. Ainsi, après un Bac Pro Secrétariat, elle décide de se réorienter et obtient quelques années plus tard, son BTS en commerce international. Un voyage à New York dans le cadre de son stage de fin d’étude, va être à l’origine de la concrétisation du projet Ethnicia. De manière très simple, Ethnicia naît du besoin qu’éprouve la jeune femme de combiner les deux cultures dans lesquelles elle a baigné. « J’avais besoin de créer quelque chose où tout le monde pourrait se retrouver, que l’on soit noire, blanche ou métisse ». Ainsi, chez Ethnicia, il n’y a ni tendance phare, ni parti pris. Le client est source d’inspiration et est traité en fonction de sa singularité.
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Petite ville située à 13 km de Paris
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INSPIR’ CAREER Si Ethnicia est aujourd’hui devenue une référence, les choses n’ont pas toujours été faciles pour Hapsatou. En 2009, elle signe un contrat de bail avec la société GENERALI6 pour s’installer dans le quartier Opéra, à Paris. Malheureusement, les relations avec la société se dégradent vite et la jeune femme subit des pressions financières injustifiées de la part de la société. Elle finira par avoir gain de cause en justice, GENARALI ayant été condamné à payer des dommages et intérêts à Ethnicia. « Ça a été très dur psychologiquement et financièrement, mais je savais que je n’avais rien à perdre ». Seules l’envie de réussir et la passion permettent de surmonter les difficultés rencontrées dans l’entreprenariat qui, affirme t-elle, est une voie ardue. La jeune femme reconnaît aussi très humblement devoir son succès en grande partie à ses parents et ses professeurs qui l’ont toujours poussée à faire de bonnes études. A la question de savoir si elle a des projets pour l’Afrique, Hapsatou nous apprend qu’elle revient de Luanda7 où elle s’apprête à installer une nouvelle franchise. « Je crois beaucoup en l’Afrique et je pense qu’il s’y passera des choses très intéressantes d’ici les années à venir ». D’après elle les étudiants qui décident de rentrer développer le continent après leurs études sont à encourager. « Pendant des années, l’Afrique a été dépouillée de ses cerveaux et de ses potentialités. Nous ne pourrons nous en sortir que par l’éducation. Par conséquent, je trouve qu’il s’agit là d’une très belle initiative ». En tant que femme, son opinion sur l’engagement des africaines dans l’entreprise est claire : « La femme africaine est très forte. C’est l’entrepreneur le plus admirable qui soit ». Pour Hapsatou, la femme africaine emmènera le continent vers la réussite. Il suffit de voir comment, grâce aux systèmes de tontines8, elle réussit à s’organiser et à nourrir sa famille, sans forcément avoir d’énormes revenus. Si il fallait créer UNE recette du succès, Hapsatou proposerait indubitablement comme ingrédient principal la foi dans tout ce que l’on fait. « Il faut croire en soi. Rien n’est impossible ». Et l’acharnement de la jeune femme a payé. En dehors de la réputation que s’est construite Ethnicia, Hapsatou a remporté en 2007 le second prix de l’innovation commerciale organisé par Unibail Rodamco. Pour elle, l’aventure entrepreneuriale n’en est qu’à ses débuts. Depuis le 08 Mars 2011, elle a lancé le « concours 100 femmes », où elle donne à des femmes l’opportunité de changer leur vie en devenant gérantes de leur espace beauté Ethnicia. Hapsatou œuvre donc activement pour les femmes. Elle encourage l’esprit d’entreprise et la passion avant tout. Elle rêve d’une entreprise porteuse de valeurs, où les gens se reconnaissent. « Je souhaiterais que dans 10 ans, Ethnicia soit une belle entreprise ».
Joan Y.
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Compagnie internationale d’assurance.
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Capitale de l’Angola Sorte de cotisations populaires permettant d’épargner de l’argent et d’octroyer des crédits. La tontine est une pratique très répandue en Afrique, surtout chez les femmes 8
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4 QUESTIONS A INVEST AFRICA EST NEE !
Réunir investisseurs et entrepreneurs sur une même plateforme, tel est le
défi que souhaite relever Sandra Ntsonde, directrice d’Invest Africa. Lancée officiellement le 17 février dernier, cette plateforme permettra à plusieurs entrepreneurs africains d’augmenter leur capital afin d’agrandir leurs activités. Sandra a accepté de nous en dire plus.
Inspire Afrika : Qu’est-ce que Invest Africa et quelles sont les actions que vous avez mené jusqu’ici ? Sandra Ntsonde: Invest Africa est une plateforme de micro-investissement destinée à aider les entrepreneurs africains à développer leurs compagnies. Cette plateforme a été créée dans le but de résoudre le problème dit du « chaînon manquant » que connaissent les pays en voie de développement. En effet, malgré le fait que les entrepreneurs reçoivent un capital de départ à travers des micro-crédits (entre $0 et $ 5,000), il n’existe pas de financement disponible pour les Petites et Moyennes Entreprises ayant besoin d’investissement pouvant les aider à développer leurs activités. Invest Africa offre donc une plateforme où tous ceux qui, si ils le souhaitent pourront investir au moins 25 dollars dans une entreprise sélectionnée. Invest Africa offre également un programme de coaching qui fournit aux investisseurs l’opportunité d’offrir des services d’audit et de conseil à nos entrepreneurs.
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4 QUESTIONS A IA : Comment se passe la sélection des différentes entreprises ? Sandra: Invest Africa a pour partenaires des Organisations Non Gouvernementales et des institutions de micro finance. Ces partenaires identifient et sélectionnent les entreprises, procèdent aux transferts d’argent et implémentent un système de surveillance et de rapport d’activité. Cependant pour être sélectionnée, chaque entreprise doit avoir eu un bilan de flux de trésorerie positif pendant 2 à 3 ans, ou être un client de microcrédit effectuant des remboursements réguliers. Chaque entreprise doit être capable de présenter le projet pour lequel elle a besoin d’investissement, tout en démontrant que la réalisation de ce projet génèrera des bénéfices et créera des emplois.
IA: Quels sont les secteurs d’activités ciblés ? Sandra: Nous visons tous les secteurs d’activités car notre principal objectif est de créer des emplois. Par conséquent, les différentes entreprises que nous sélectionnons doivent être socialement responsables. Les secteurs dans lesquels nous espérons travailler sont l’agriculture, l’énergie, le tourisme, etc… Nous sommes également en train d’explorer les solutions proposées par le secteur privé afin de régler les problèmes de santé connus par les africains.
IA: Quels sont les projets d’Invest Africa ? Sandra: Invest Africa a été officiellement lancé en février 2012. Actuellement, les investisseurs peuvent aider le financement d’une usine de transformation agroindustrielle au Ghana ou une entreprise d’ignames au Benin. Nous espérons pouvoir proposer des projets dont les entreprises seront situées en Afrique de l’Est et en Afrique du Sud. De plus, nous prévoyons de créer une organisation à but non lucratif qui proposera des programmes d’éducation, de coaching et de bourses. Invest Africa souhaiterait devenir une société hybride qui aurait les caractéristiques d’une entreprise, et celles d’une organisation à but non lucratif cherchant à améliorer les conditions de vie des africains.
Valérie F.
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REMERCIEMENTS Cette édition n’aurait pas été possible sans le concours de : Jacques Jonathan Nyemb
Yves Bell
Joelle Itoua-Ngaporo
Gael Fotso Emilie Sarah
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