Penser la santé N° 22 – MAI 2021
DOSSIER
LA SCIENCE FACE AUX VIRUS TRANSMISSIONS / VARIANTS / VACCINS
OBÉSITÉ Maladies cardiovasculaires, dépression et grossophobie NUISANCES Quand le bruit fait (très) mal FERTILITÉ Ces femmes qui font congeler leurs ovocytes Édité par le CHUV www.invivomagazine.com IN EXTENSO LES DENTS
« Un coup de foudre immédiat. » Pascal M., Genève
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Penser la santé
N° 19 – DÉCEMBRE 2019
« Super mise en page ! »
MAIN BIONIQUE
Ce nouveau type de prothèse est relié au cerveau.
MAIN BIONIQUE
TOUCHER, BOUGER, SENTIR ? IN VIVO N° 19 – DÉCEMBRE 2019
Laure A., Lausanne
EBOLA Comment les vaccins ont été conçus à Lausanne et à Genève SOCIÉTÉ Ces couples qui ne veulent pas devenir parents INTERVIEW Pierre-François Leyvraz sur ses onze ans à la tête du CHUV Édité par le CHUV www.invivomagazine.com
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Penser la santé
N° 22 – AVRIL 2021
VIRUS
COVID-19
COMBATTRE LE VIRUS
DOSSIER SPÉCIAL / REPORTAGE PHOTO
Isabelle G., Lausanne
/
DOSSIER
TÉMOIGNAGES
Édité par le CHUV www.invivomagazine.com
IN VIVO N° 22 – AVRIL 2021
IN VIVO N° 20 – JUIN 2020
LA SCIENCE FACE AUX VIRUS MATERNITÉ Quand l’accouchement crée des angoisses THÉRAPIE Les bienfaits des selles ADDICTION Les Suisses face au fléau des cachets
IN EXTENSO 24 HEURES DANS LA PEAU D’UN ATHLÈTE
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Penser la santé
N° 20 – JUIN 2020
COVID-19
« Vos infographies sont géniales, faciles à comprendre et adaptées au public auquel j’enseigne. »
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TRANSMISSIONS / VARIANTS / VACCINS
OBESITÉ Maladies cardiovasculaires, dépression et grossophobie NUISANCES Quand le bruit fait (très) mal FERTILITÉ Ces femmes qui font congeler leurs ovocytes Édité par le CHUV www.invivomagazine.com IN EXTENSO LES DENTS
Seule une participation aux frais d’envoi est demandée (20 francs).
IN VIVO / N° 22 / MAI 2021
SOMMAIRE
IN SITU
7 / HEALTH VALLEY Mal de dos : les Suisses de plus en plus touchés
17 / AUTOUR DU GLOBE On ne devrait pas parler de « variant sud-africain »
FOCUS
19 / DOSSIER Comprendre les virus pour mieux les apprivoiser Bien entraînés, les chiens sont capables de détecter le covid avec une efficacité proche de 90%. À Genève, le Service de sécurité des Nations Unies a décidé d’utiliser cette compétence canine en s’associant à l’armée suisse et aux Hôpitaux universitaires (HUG) dans le but d’entraîner des chiens à détecter les personnes contaminées. Ce n’est pas le virus à proprement parler que les chiens reniflent, mais l’odeur particulière que dégage la personne infectée. Il suffit de présenter au chien entraîné un échantillon de sueur (qui ne contient pas de virus actif, afin de ne pas contaminer l’animal) pour déterminer si la personne est atteinte. Ci-contre, des chiens détecteurs de covid à l’entraînement dans la commune de Bredene, en Belgique.
Le magazine In Vivo édité par le CHUV est vendu au prix de CHF 5.- en librairie et distribué gratuitement sur les différents sites du CHUV.
JAMES ARTHUR GEKIERE/AFP
PAR CLÉMENT ETTER
SOMMAIRE
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54
32
MENS SANA
CORPORE SANO
CURSUS
32 / INTERVIEW
50 / PROSPECTION
71 / ÉCLAIRAGE
PAR ROBERT GLOY
74 / PARCOURS
54 / TENDANCE
Le portrait de Sabrina Urbinati Moinat, infirmière praticienne spécialisée
Sauvegarder la fertilité
58 / TABOU
Obèse, et alors ?
Quand le suicide fait boule de neige
PAR ALEXANDRE WÄLTI
39 / PROSPECTION
PAR PATRICIA MICHAUD
Nuisances sonores, un mal silencieux
60 / DÉCRYPTAGE Cancer du côlon, un mal qui frappe toujours plus tôt
PAR ANTONIO ROSATI
42 / TENDANCE
PAR ERIK FREUDENREICH
Relations sexuelles : néant
64 / EN IMAGES
PAR SYLVAIN MENÉTREY
45 /
PAR ANDRÉE-MARIE DUSSAULT
PAR AUDREY MAGAT
36 / DÉCRYPTAGE
Le vaccin covid en 10 questions
Les seins vers la libération
COULISSES
Petite histoire des visites à l’hôpital PAR BERTRAND TAPPY
2
PAR LAURENCE JAQUET SUIVEZ-NOUS SUR : TWITTER : INVIVO_CHUV FACEBOOK : CHUVLAUSANNE
GUILLAUME PERRET / LUNDI13, DENNIS KUNKEL MICROSCOPY/SCIENCE PHOTO LIBRARY, DR
Alexandra KautzkyWiller : « Les femmes prennent des médicaments dont les doses ont été fixées en fonction des hommes »
Faut-il vraiment craindre une invasion des maladies tropicales ?
Éditorial
HOMMAGE À L’INSOUPÇONNABLE
GILLES WEBER
PROF. PHILIPPE ECKERT Directeur général du CHUV
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Filer la métaphore face à une grande institution est une tentation fréquente. Ainsi, pour évoquer un hôpital tel que le CHUV, il est courant de réquisitionner le registre animalier. Sa taille est volontiers qualifiée d’éléphantesque et sa souplesse tient a priori plus du mammouth que de la gazelle. Dès lors, lorsqu’il y a un peu plus de 365 jours , nous avons plongé dans la gestion de la pandémie, nul n’aurait pu envisager ce qui allait se produire. Pour Einstein, les préjugés sont plus difficiles à désagréger qu’un atome et, pourtant, en quelques mois, notre hôpital a contredit tous les clichés. Nous avons ainsi fait venir des avions de Chine pour obtenir les masques quand ils manquaient cruellement en Europe, les Soins intensifs ont plus que doublé leur capacité en quelques semaines, des blocs opératoires ont été transformés en chambres de soins, des soignants ont collaboré avec des soldats. Les cloisons qu’on imagine structurer l’hôpital dans une verticalité stérile sont tombées, et de ces réorganisations, sont nées des collaborations nouvelles, nouées en des temps record. Dans le même temps, des traitements ont été développés, des recherches ont été lancées pour éclairer la clinique d’un jour nouveau et mieux comprendre ce virus (voir page 19). Nous avons, au cours de cette crise, démontré à ceux qui pouvaient encore en douter que notre gestion financière était saine. En un mot comme en mille, nous avons répondu présent. Le classement de Newsweek qui place le CHUV pour la seconde fois au 9e rang des meilleurs hôpitaux du monde est non seulement venu couronner ces efforts homériques, et ceux effectués jusqu’ici, il est aussi venu confirmer que les clichés ont bon dos. Face à l’adversité, une institution, fût-elle d’une taille pachydermique, peut démontrer une agilité hors norme. Ce ranking classe quelque 2000 établissements, dans 25 pays. L’évaluation repose sur trois piliers : l’expérience du patient (mesurée sur la base des questionnaires de satisfaction), les recommandations par des pairs (au total 74 000 experts de 25 pays ont été consultés) et des indicateurs portant par exemple sur la qualité des traitements ou le respect de l’hygiène. En l’occurrence, les experts mandatés par Newsweek se sont basés sur les résultats de l’ANQ – Agence nationale pour l’amélioration de la qualité dans les hôpitaux ou de l’Office fédéral de la santé publique. Il va sans dire qu’après l’année que viennent de vivre les collaborateurs de notre hôpital, ce classement vient saluer, d’une autre manière, l’engagement consenti. Il y a douze mois encore, personne n’aurait été à même d’envisager l’épopée que nous aurions à vivre. De même, personne n’aurait été apte à imaginer avec quelle puissance, quelle constance et quelle efficacité 12 000 personnes seraient capables de s’engager. Ce classement tombe donc à point nommé, comme un hommage à l’insoupçonnable. /
IN SITU
HEALTH VALLEY
Grâce à ses hôpitaux universitaires, ses centres de recherche et ses nombreuses start-up qui se spécialisent dans le domaine de la santé, la Suisse romande excelle en matière d’innovation médicale. Ce savoir-faire unique lui vaut aujourd’hui le surnom de « Health Valley ».
IN SITU
HEALTH VALLEY Actualité de l’innovation médicale en Suisse romande.
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IN SITU
HEALTH VALLEY
RENENS P. 6
Un robot pour désinfecter les avions.
PRÉVERENGES P. 8
Un meilleur triage des poissons de laboratoire.
GENÈVE P. 6
Lancement d’un test sanguin utilisable à domicile.
MARTIGNY P. 9
Développement d’un antiviral contre le Covid-19.
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HEALTH VALLEY
START-UP
« Je viens de la récupérer dans un colis de La Poste »
TEST COVID À DOMICILE
DIDIER PITTET LE PROFESSEUR DIDIER PITTET A EXPLIQUÉ AVEC HUMOUR QU’IL N’AVAIT ÉVIDEMMENT PAS PU SE DÉPLACER À STOCKHOLM POUR RECEVOIR SA MÉDAILLE PASTEUR, DÉCERNÉE TOUS LES DIX ANS À DES SCIENTIFIQUES AYANT APPORTÉ DES CONTRIBUTIONS EXCEPTIONNELLES DANS LES DOMAINES DE LA BACTÉRIOLOGIE OU DE L’HYGIÈNE. L’INFECTIOLOGUE ET ÉPIDÉMIOLOGUE GENEVOIS EST MONDIALEMENT CONNU POUR LE DÉVELOPPEMENT, EN 1995, DU GEL HYDROALCOOLIQUE POUR L’HYGIÈNE DES MAINS, QUI A PROBABLEMENT SAUVÉ DES MILLIONS DE VIES.
La start-up CoreMedica Europe a reçu en décembre 2020 l’autorisation par Swismedic de commercialiser son test sanguin utilisable à domicile qui permet de détecter le coronavirus. Cette jeune entreprise basée au Campus Biotech de Genève a été rachetée par le groupe Swiss Medical Network (Genolier).
ROBOT DÉSINFECTANT
La start-up vaudoise Uveya a développé un robot destiné à la désinfection des avions qui a été adopté par le groupe Dnata, géant des services aériens. Basé sur une technologie de rayons UV concentrés, l’appareil peut tuer les bactéries et « inactiver les virus », ont indiqué à la presse les responsables de la start-up, qui cherche actuellement des investisseurs.
MONITORING SPORTIF
La start-up Be.Care a signé 18 partenariats stratégiques pour l’utilisation de son outil de gestion des performances sportives InCorpus. Réservé pour l’instant aux athlètes d’élite, cet appareil permet d’éviter les blessures en mesurant la variabilité de la fréquence cardiaque. Le Centre de médecine du sport du CHUV, de même que les fédérations françaises de cyclisme, de voile, d’aviron et de canoë-kayak ont déjà utilisé son système.
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Toujours plus d’innovatrices
START-UP Au tournant du siècle, la proportion de femmes parmi les créateurs de start-up était de 15% à peine. Elle a doublé en vingt ans, pour s’établir à 31,6%. C’est l’un des enseignements d’une étude récente publiée par la Fachhochschule Nordwestschweiz. Cette étude indique aussi que le niveau de satisfaction des fondateurs et fondatrices de start-up atteint 87%. Leurs motivations principales : la réalisation de soi, la réalisation d’un projet et l’indépendance.
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million
Comme l’empreinte digitale, la structure des veines est propre à chacun et permet ainsi d’identifier les individus. Se basant sur cette propriété, la start-up lausannoise Global ID développe le projet Candy, un scanner destiné au personnel médical qui permettra d’identifier les patients en enregistrant le réseau veineux de leur main. L’avantage de cette technique est de pouvoir être menée sans contact. Lancé en collaboration avec l’institut de recherche Idiap, basé à Martigny, le projet Candy est doté d’un budget d’un million de francs. Les deux partenaires sont soutenus par l’agence suisse pour l’encouragement de l’innovation (Innosuisse).
DR
IN SITU
IN SITU
HEALTH VALLEY
Mal de dos : les Suisses de plus en plus touchés Un Suisse sur deux souffre de douleurs dorsales. Un chiffre à la hausse malgré une prévention élevée. ENQUÊTE Considéré comme une maladie de société, le mal de dos progresse en Suisse et touche tous les âges. Selon le nouveau rapport sur le dos de la Ligue suisse contre le rhumatisme, 50% des personnes interrogées déclarent avoir mal au dos plusieurs fois par semaine ou par mois en 2020, contre 39% lors de l’enquête de 2011. Chez les jeunes entre 16 et 29 ans, ce chiffre monte à 57%. Les douleurs sont vraisemblablement liées à certains mouvements ou à des postures prolongées, mais peuvent aussi cacher des problèmes psychosociaux comme le stress ou des angoisses, qui jouent un rôle important dans les douleurs chroniques.
PICHITCHAI CHANPEN, HEIDI DIAZ
Les douleurs dorsales affectent négativement la vie des personnes concernées, en particulier le sommeil. En outre, une personne sur quatre se dit gênée dans son activité professionnelle. Sur le plan économique, les maux de dos ont un coût direct : sur les douze derniers mois, les personnes atteintes ont déboursé en moyenne 524 francs pour les médicaments et le traitement ambulatoire. Des frais non remboursés par l’assurance maladie et qui sont encore plus élevés pour les personnes souffrant de douleurs chroniques. Quant aux pertes de production causées par les arrêts de travail ou les départs anticipés à la retraite, elles s’élèveraient à près de 4940 francs par an et par patient. La prévention ne fait pas tout Les Suisses sont actifs sur le plan de la prévention : environ 80% des personnes font attention à leur posture, pratiquent une activité physique régulière et évitent de porter des charges excessives. Paradoxalement, le mal de dos progresse. « Il n’y a pas de preuve nette d’efficacité de la prévention sur les douleurs dorsales », explique le Dr Guillaume Muff, chef de clinique à l’Unité de médecine physique et réhabilitation du CHUV. « Ce sont plutôt des recommandations empi7
TEXTE : CLÉMENT ETTER
riques, qui restent utiles et sont à appliquer. » Des spécialistes rappellent aussi que les longues phases de station assise, six heures par jour en moyenne, ne peuvent pas être compensées par une séance de sport le soir. Il est donc recommandé de les interrompre régulièrement pendant quelques minutes toutes les trente à soixante minutes. La prévention mise en place par l’employeur sur le lieu de travail est tout aussi importante et même prévue par la loi. Pourtant, près de la moitié des personnes interrogées indiquent qu’aucune mesure de prévention ou d’atténuation des douleurs dorsales n’est proposée. Les Romands sont d’ailleurs presque deux fois moins nombreux que les Alémaniques à disposer d’équipements de travail ergonomiques, et les personnes exerçant un métier physique quatre fois moins nombreuses que celles ayant une activité plutôt assise.
DR GUILLAUME MUFF, CHEF DE CLINIQUE À L’UNITÉ DE MÉDECINE PHYSIQUE ET RÉHABILITATION DU CHUV.
Parmi les personnes souffrant de douleurs dorsales, 21% déclarent ne rien faire et souffrent en silence. « Le repos strict au lit n’est plus indiqué. Il faut rester actif et poursuivre ses activités quotidiennes, dans la mesure de ce que la douleur nous permet de faire », ajoute Guillaume Muff. Bouger lors de maux de dos est une mesure davantage appliquée en Suisse alémanique qu’en Suisse romande (24% contre 14%). À l’opposé, les Romands se ménagent davantage et prennent plus souvent des analgésiques. Dans ce dernier cas, les spécialistes conseillent la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens. Le rapport soulève enfin que les personnes consultent moins leur médecin qu’en 2011 et surtout qu’elles ne connaissent pas les signes qui doivent alerter : seuls 26% consultent en cas de fourmillements dans les bras ou les jambes, 13% en cas de fièvre et 6% pour une perte de poids. Signe que les campagnes de prévention et de sensibilisation au mal de dos doivent continuer. /
IN SITU
L’OBJET
DES IMPLANTS NEURONAUX PLUS SOUPLES Les implants neuronaux sont utiles pour surveiller et traiter les troubles neurologiques, mais leur rigidité peut poser problème. C’est précisément pour fabriquer des électrodes plus flexibles que la start-up Neurosoft Bioelectronics, issue de l’EPFL, développe des matériaux en couche mince. Cette entreprise, basée au Campus Biotech de Genève, a reçu un soutien de 150 000 francs de la part de l’initiative Venture Kick. Ses implants ouvrent la voie à de nouvelles interfaces homme-machine.
HEALTH VALLEY
Inceste : stopper la transmission
ABUS Au début de l’année, de nombreuses victimes d’inceste ont témoigné sur les réseaux sociaux avec le hashtag #MeTooInceste, suite à la publication du best-seller La familia grande de Camille Kouchner. Le débat déclenché par ces récits a permis aux professionnels de rappeler que « toute victime ne deviendra pas pour autant agresseur », comme la déclaré dans le journal Le Temps la psychologue Pascale Forni, de l’unité du CHUV destinée aux personnes ayant subi ou commis des abus sexuels au sein de la famille.
« L’inceste étant une pathologie relationnelle, pour que la victime retrouve sa place au sein de la famille et qu’une communication saine puisse reprendre, il est nécessaire d’organiser des entretiens de famille pour lesquels chaque membre est d’abord suivi par un thérapeute différent », a-t-elle expliqué. « Cette approche paraît fondamentale pour stopper la transmission de l’inceste. » Au CHUV, la consultation Les Boréales, pour laquelle travaille Pascale Forni, est ainsi destinée aux personnes de tout âge ayant subi ou commis des violences notamment sexuelles dans le cadre de la famille. Les consultations, uniquement sur rendezvous préalable, peuvent être agendées rapidement.
PRÉVERENGES Le poisson zèbre (danio rerio) est très utilisé dans la recherche en génétique et en toxicologie. Pour mieux gérer son élevage en laboratoire, la start-up Bionomous, basée à Préverenges (VD), développe des dispositifs capables de trier, de compter et de classer automatiquement les œufs de ce poisson en se basant sur le machine learning et la microtechnique. La Fondation pour l’innovation technologique (FIT) a accordé un prêt de CHF 100 000.- à cette jeune pousse liée à l’Innovation Park de l’EPFL.
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SÉVERINE CARREAU / HANS LUCAS, CHRISTIAN WEISS
Mieux trier les poissons zèbres
IN SITU
HEALTH VALLEY
Alisporivir,
le traitement développé à Martigny L’antiviral de Debiopharm pourrait être efficace contre le Covid-19.
Après des résultats prometteurs dans la phase de recherche préclinique, menée par l’Institut Mondor à Paris, le traitement imaginé par le groupe lausannois Debiopharm entre dans sa deuxième phase d’étude. Depuis le mois de janvier, 90 patients hospitalisés reçoivent cet antiviral baptisé « Alisporivir ». Le but est de démontrer sa capacité à réduire la charge virale dans les cellules et le risque de dégâts aux poumons. « Contrairement au Remdesivir et aux autres antiviraux qui ont montré des résultats décevants dans le traitement du Covid-19, l’Alisporivir a un autre mécanisme d’action, souligne Bertrand Ducrey, CEO de Debiopharm, dans les colonnes du Nouvelliste. Il agit sur l’homme et non directement sur le virus. » Cette nouvelle approche thérapeutique cible la machinerie cellulaire humaine et bloque la protéine cyclophiline A qui permet au virus de se multiplier.
Au départ, l’antiviral a été développé dans l’unité de Debiopharm à Martigny pour lutter contre l’hépatite C et le VIH. Il a déjà été testé sur 3000 patients souffrant de maladies virales. Si les phases II et III de l’étude clinique se montrent concluantes et que Debiopharm confie la distribution et la commercialisation du produit à une grande entreprise pharmaceutique ou à un organisme de santé publique, l’entreprise reversera tout gain financier éventuel à une fondation. Celle-ci devra être active dans le développement de nouvelles classes d’antibiotiques pour lutter contre les bactéries résistantes et anticiper de nouvelles pandémies virales à venir.
Quatre traitements testés contre le SARS-CoV-2 Parallèlement aux vaccins, plusieurs médicaments font ou ont fait l’objet d’essais cliniques dans les hôpitaux depuis l’apparition du virus. Développés dans le cadre d’autres maladies, soit ils se montrent prometteurs, soit ils sont écartés.
Tocilizumab
Ivermectine
Colchicine
Remdesivir
Pour 25 patients traités avec ce médicament anti-inflammatoire (pris habituellement contre des maladies auto-immunes), une vie supplémentaire serait sauvée, selon l’étude britannique Recovery.
Cet antiparasitaire, déjà utilisé dans le cadre de la gale ou du paludisme, fait partie des pistes explorées par la communauté scientifique.
L’anti-inflammatoire, prescrit contre la goutte, pourrait réduire en moyenne de 21% les risques d’hospitalisation ou de décès des patients traités, d’après l’Institut de cardiologie de Montréal.
Antiviral développé contre Ebola et administré à Donald Trump durant la pandémie, dont l’efficacité contre le Covid-19 n’a pas pu être démontrée par l’étude mondiale Solidarity.
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2,1 IN SITU
HEALTH VALLEY
milliards
Les start-up suisses ont levé 2,1 milliards de francs en 2020, toutes catégories confondues. Derrière les pôles zurichois (636 millions) et bâlois (540 millions), les cantons romands ont fait bonne figure avec d’importantes levées de fonds dans les secteurs biotech et medtech. C’est ce qui ressort du rapport publié en début d’année par l’Association suisse des investisseurs en capital et de financement (SECA) et le portail Startupticker. L’an dernier, les start-up vaudoises ont ainsi affiché des investissements à hauteur de 409 millions de francs (dont 110 millions pour la seule Sophia Genetics). Jusque-là deuxième du classement, le canton de Vaud a essuyé un recul de 10% des investissements dans ses jeunes entreprises, et s’est donc fait dépasser par Bâle, mais reste loin devant Genève (87 millions, dont 47 pour des entreprises actives dans les biotechs) et le Valais (30 millions). À noter que les medtechs vaudoises Polares et Lunaphore ont levé respectivement 37 et 23 millions de francs en 2020.
ont augmenté de plus de 50% entre 2018 et 2019, pour atteindre près d’un milliard de francs. Les femtech se concentrent sur la fertilité, la grossesse et le post-partum, les menstruations, la ménopause, la santé mentale ou encore la vie familiale. Ce marché en forte croissance pourrait atteindre 50 milliards de dollars d’ici à 2025 selon le bureau d’études Frost & Sullivan.
LA FERTILITÉ PEUT ÊTRE VERIFIÉE EN TOUT TEMPS GRÂCE AU BRACELET IMAGINÉ PAR LA SOCIÉTÉ AVA.
Les femtechs montent en puissance
DÉVELOPPEMENT DU MARCHÉ Seulement 4% des investissements de la santé mondiaux sont aujourd’hui consacrés spécifiquement aux femmes. C’est l’une des raisons qui a motivé la création de Tech4Eva, un incubateur de start-up dédié à ce qu’on appelle les « femtech ». L’EPFL Innovation Park et le Groupe Mutuel se sont associés pour valoriser ce pan de recherche (lire aussi In Vivo 16 p. 15).
Tech4Eva sera ainsi le premier accélérateur de start-up femtech en Suisse. L’incubateur accueillera des entreprises suisses et européennes pour un programme d’accompagnement de neuf mois. Le comité sélectionne actuellement les 15 projets qui seront soutenus pour cette première édition. Tech4Eva entend promouvoir les sociétés développant des solutions technologiques comme des applications, des plateformes d’échange, des outils de diagnostics, des dispositifs thérapeutiques, mais aussi des idées alliant l’intelligence artificielle à des fins de prévention. / AVA
Application de suivi du cycle menstruel, tire-lait ou soutien-gorge connecté sont autant de solutions innovantes de traitement, de prévention ou de soins dans le domaine de la santé des femmes proposées par les femtechs. Les investissements dans ce secteur
Zoom sur la Suisse La Suisse compte déjà des acteurs novateurs dans ce secteur, comme la société Ava, qui fabrique un bracelet connecté permettant de suivre les courbes de fertilité. Le canton de Vaud a aussi vu apparaître des start-up prometteuses, comme Anecova (aide à la fertilité), Annaida (analyse des embryons avant leur implantation lors de procréations médicalement assistées), ou la start-up Rea et sa serviette hygiénique capable de confirmer ou non un risque d’accouchement prématuré, technologie imaginée par le Service d’obstétrique du CHUV et l’EPFL.
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IN SITU
HEALTH VALLEY
ÉTAPE N° 22
GENÈVE
SUR LA ROUTE
PLAIR
À la rencontre des acteurs de la Health Valley. Nouvelle étape : Genève.
Détecter les virus dans l’air en temps réel La start-up genevoise Plair s’appuie sur une technologie laser. TEXTE : CLÉMENT ETTER
Identifier les microbes qui se trouvent dans l’air, à n’importe quel moment, alors même qu’ils sont invisibles pour nos yeux. C’est le projet de la jeune entreprise Plair, spin-off issu de l’Université de Genève. Fondée en 2014 par deux doctorants, Svetlana Kiseleva et Denis Kiselev, la startup Plair se base sur la technologie laser qu’ils ont développée pour analyser l’air en temps réel et identifier la composition des aérosols. Ces particules en suspension transportent en effet des composés chimiques ou biologiques, notamment des virus. L’entreprise a déjà développé des instruments de détection en temps réel de pollens, polluants atmosphériques et allergènes. Les deux chercheurs ont notamment collaboré avec MétéoSuisse et leurs appareils ont été installés dans plusieurs pays d’Europe et au Canada. Ces premiers instruments étaient cependant destinés à un usage en extérieur uniquement. « Par la suite, nous avons adapté notre machine pour qu’elle soit plus compacte et destinée à l’analyse de l’air intérieur, notamment des microbes, explique Svetlana Kiseleva, 11
cofondatrice chargée du marketing. À la fin de l’année 2020, nous avons conclu un partenariat avec le leader mondial dans ce domaine, le groupe zurichois MBV. » À l’heure actuelle, il n’est pas possible d’identifier les virus, bactéries et champignons présents dans l’air. La nouvelle collaboration avec le groupe MBV, spécialiste de l’échantillonnage et d’analyse des microbes de l’air, pourrait permettre à l’équipe de Plair d’atteindre ce but. « Nous prévoyons de travailler sur un système qui, grâce à l’échantillonnage, combine en temps réel la détection et l’identification précise des microbes. » Ce qui pourrait s’avérer utile dans le contexte du SARS-CoV-2. Le futur dispositif de Plair pourrait à l’avenir s’appliquer aux industries pharmaceutique et agroalimentaire, à la recherche scientifique et aux hôpitaux. « Afin de développer commercialement notre appareil, nous devons encore effectuer des tests en laboratoire, notamment pour la détection des virus. Nous sommes donc à la recherche de partenaires pour cette phase », conclut Svetlana Kiseleva. /
IN SITU
HEALTH VALLEY BENOÎT DUBUIS Ingénieur, entrepreneur, président de la Fondation Inartis et directeur du Campus Biotech
VIRAL
inartis.ch republic-of-innovation.ch healthvalley.ch
TEXTE : BENOÎT DUBUIS
Il y a une année, nous nous demandions si ce vague virus allait nous toucher et comment il nous impacterait. Nous n’imaginions pas ce que nous allions vivre les mois suivants.
notre attentisme coupable, notre incapacité à anticiper de vrais dilemmes. Qui a l’autorité de juger si un compte de réseau social doit être interrompu ou pas ? Le réseau social qui est Quand nous réécoutons certains propos plus que rassurants l’outil de la diffusion ? Une cour de justice ? de la part d’officiels de haut rang, nous nous demandons Le monde politique ? Nous ne savons aborder la s’il s’agissait, à l’époque, d’intox, de naïveté ou d’excès question des fake news, car comment détermid’optimisme. La suite, nous la connaissons tous. Le ner objectivement ce qui est « fake » ? Et pour 11 mars, l’OMS qualifiait la situation de « pandémie », reprendre les termes de Myret Zaki, ancienne le 2 avril, 4 milliards de personnes étaient confinées. rédactrice en chef de Bilan qui nous avait fait Aujourd’hui, nous sommes à plus de 100 millions de cas. l’honneur de partager sa vision dans le cadre du Dissémination rapide ? Éclair ? Et pourtant, ce n’est rien Challenge Fake News Inartis, « la sélection de au vu de la propagation virale de l’information. contenu, aussi bienveillante soit-elle, peut s’avérer pire que la censure elle-même car elle casse notre En 2012 apparaît une vidéo qualifiée de la « plus virale libre arbitre et choisit, pour nous. » de l’histoire » avec plus de 100 millions de vues en seulement six jours. Il s’agit du film Kony 2012, Acteur. Le constat est saisissant : 7 millions de vues un documentaire de trente minutes sur Joseph Kony, pour les dernières vidéos du youtubeur Norman, chef de guerre ougandais, fondateur de l’Armée de 2,8 millions de vues pour le documentaire conspirésistance du Seigneur. Une ONG américaine est rationniste Hold-Up sur Internet, 733 vues pour une derrière la réalisation et la diffusion de cette vidéo, des dernières vidéos « technologiques » du World déterminée à dénoncer les crimes de Kony et à le faire Economic Forum, 316 vues pour un documentaire arrêter. La vidéo publiée sur YouTube est relayée par des millions d’internautes grâce à Facebook et Twitter. didactique EPFL à destination des enfants… Comment justifier une telle différence pour du contenu La vidéo est partagée par des célébrités très suivies 100% digital ? La qualité du tournage et celle du sur Twitter.La viralité, c’est cela : 100 millions de vues en six jours pour une vidéo. Quand nous parlons d’un produit final n’expliquent rien. Et encore moins la qualité du contenu. Si, hier, l’influence pouvait être monde qui s’est rétréci à la taille d’un village, on drainée par des personnalités et des véhicules qualitasuppose encore une certaine distance. Aujourd’hui, tifs reconnus, des « références », ce sont aujourd’hui nous avons tous été engloutis par nos smartphones les nombres et les nombres seuls, qui plaident en faveur au point de devenir les victimes et les acteurs de la diffusion du contenu sur la planète. « Qui maîtrise consentants de ces réseaux ultra-centralisés. les nombres, maîtrise la dissémination du Savoir et finalement maîtrise l’opinion de la population », nous Victime. Le mot « viralité » nous renvoie à une rappelle Juliette Lemaignen, de la fondation Inartis. image négative de quelque chose d’invisible qui s’immisce et cause du mal : que l’on pense au virus informatique, à la pandémie qui sévit. Cette Inquiétée par ce phénomène d’inadéquation entre la viralité repose ainsi entièrement sur un système valeur des contenus et leur puissance de diffusion, de recommandations et s’apparente au principe notamment pour ce qui est de la communication des start-up qu’elle accompagne et de leur capacité à se faire du bouche-à-oreille, réactualisé de manière reconnaître, la fondation Inartis lancera en septembre virtuelle dans le cyberespace. Cette viralité, prochain son « Growth Hacking Lab » : l’outil de reconintrinsèquement mauvaise ? Non sur la forme, quête de l’univers des médias digitaux. mais dangereuse sur le fond, car ces réseaux peuvent propager les messages les plus radiÀ défaut de pouvoir enrayer le phénomène des fake news, caux sans régulation établie. occupez le terrain médiatique, apprenez à gérer, diffuser, propager vos connaissances, vos savoir-faire et en particulier Le récent épisode ayant touché le président vos contenus scientifiques. Apprenez à contrôler la viralité ! / des États-Unis nous montre une fois de plus
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POST-SCRIPTUM LA SUITE DES ARTICLES DE IN VIVO IL EST POSSIBLE DE S’ABONNER OU D’ACQUÉRIR LES ANCIENS NUMÉROS SUR LE SITE WWW.INVIVOMAGAZINE.COM
IMMUNOTHÉRAPIE IV n° 11
p. 50
Un prix pour Lausanne La SITC, la société internationale la plus prestigieuse dans le domaine de l’immunothérapie du cancer, a remis en novembre 2020 son prix annuel « Team Science Award » à l’institut Ludwig de Lausanne, qui est rattaché au CHUV et à l’Unil. C’est précisément l’équipe du professeur George Coukos qui a été distinguée pour ses améliorations des résultats des patients atteints de cancer et pour ses contributions à la compréhension de l’immunobiologie. /
PERTURBATEURS IV n° 21
p. 52
DR TONY BRAIN/SCIENCE PHOTO LIBRARY
Le grand bain chimique Une étude menée en Suisse romande par le CHU de Liège sur 33 enfants âgés de 3 à 15 ans a démontré que la totalité d’entre eux avait été exposée à des perturbateurs endocriniens avérés ou potentiels. Même lorsque l’exposition est minime, certains de ces perturbateurs peuvent entraîner une puberté précoce. Dans le cadre de cette étude menée pour le compte de l’émission À bon entendeur de la RTS, le toxicologue Vincent Perret a recommandé d’éviter de réchauffer la nourriture dans des contenants en plastique. /
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MICROBIOTE IV n° 20
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Guérir grâce aux selles Des chercheurs genevois et italiens ont pu établir un lien entre le microbiote intestinal et la maladie d’Alzheimer. Publiée en novembre 2020 dans le Journal of Alzheimer’s Disease, leur étude a été menée sur 89 personnes âgées de 65 à 85 ans, dont certaines étaient atteintes de la maladie d’Alzheimer. Ces dernières avaient un microbiote intestinal altéré, présentant moins de diversité microbienne. L’étude « permet d’envisager de nouvelles stratégies préventives basées sur la modulation du microbiote des personnes à risques », a annoncé l’Université de Genève. Mais pour être efficaces, ces stratégies devraient être menées à un stade très précoce de cette maladie, qui demeure difficile à diagnostiquer. /
CELLULES SOUCHES IV n° 11
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Quand la science crée la vie Des modèles d’embryons humains ont été créés en laboratoire par des équipes basées aux États-Unis et en Australie. Développées à partir de cellules souches humaines, ces structures nommées « blastoïdes » miment le fonctionnement d’un embryon humain à un stade qui correspond aux sixième et septième jours après la fécondation. Ces recherches doivent permettre d’étudier des cas d’infertilité ainsi que l’impact de toxiques, de virus et de drogues, ont déclaré les auteurs de ces études publiées par la revue Nature du 17 mars 2021. /
IN SITU
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POPULATION EXPOSÉE Un personnel de santé sous haute protection. Des citoyens contaminés. Des masques, des combinaisons, des contrôles… Cette image n’a pas été prise en 2021 mais dix ans plus tôt, à Koriyama, dans la préfecture de Fukushima. En mars dernier, la commémoration du 10e anniversaire de la catastrophe nucléaire a donné lieu à de nombreuses comparaisons entre le choc subi par le Japon en 2011 et la situation de la planète à l’heure du covid : mauvaise évaluation des risques, manque de préparation, fragilité des populations, revanche de la nature… En 2011, le séisme de magnitude 9 et le tsunami avaient tué 19 000 personnes. Cependant, dix ans plus tard, « aucun effet néfaste sur la santé des habitants de Fukushima pouvant être directement attribué à l’exposition aux radiations n’a été documenté », a affirmé en mars 2021 le comité scientifique de l’ONU sur les conséquences des émissions radioactives. La conclusion de son rapport est inattendue : si une forte augmentation des cancers de la thyroïde a été observée chez les enfants exposés, elle est due à une amélioration des techniques de dépistage, a indiqué le comité d’experts. PHOTO : KEN SHIMIZU (18 MARS 2011)
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AFRIQUE DU SUD Parce que le virus ne s’arrête pas aux frontières, In Vivo se penche sur sa diffusion à travers le monde. Étape en Afrique du Sud.
Facteurs aggravants
RISQUES Les maladies non transmissibles comme l’hypertension ou le diabète augmentent le risque de mourir du Covid-19. C’est ce qu’explique une étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’Afrique du Sud, pays le plus endeuillé du continent africain, constate que 61% des patients atteints du virus dans les hôpitaux souffraient d’hypertension et 52% de diabète.
Inégalités face au virus
APPEL Lors du Forum économique de Davos, le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, a fustigé les pays riches qui « accaparent » les vaccins anti-covid. Relativement épargnée par la première vague, l’Afrique doit faire face à une seconde vague, plus virulente, de la pandémie. Le continent a besoin de 1,5 milliard de vaccins pour un coût compris entre 5,8 et 8,2 milliards d’euros.
BIDONVILLES Eau courante, savon, masque : les communautés rurales en Afrique du Sud n’ont pas toujours les moyens d’appliquer les gestes barrières pour freiner la propagation du coronavirus. Les habitants de bidonvilles surpeuplés sont particulièrement exposés, parce que déjà victimes de malnutrition ou atteints d’autres maladies.
MARCO LONGARI / AFP
LES PAGES « GLOBE » SONT RÉALISÉES EN PARTENARIAT AVEC SWISSNEX.
Contre le nationalisme vaccinal
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IN SITU
GLOBE
LUCA SOLA / AFP
On ne devrait pas parler de « variant sud-africain » L’émergence des mutations du SARS-CoV-2 conduit à des abus de langage. SOUCHE Le nom « 501Y.V1. » ne vous dit sans doute rien. Et pourtant, c’est le terme correct pour désigner ce qu’on appelle communément le « variant sud-africain ». Il été baptisé ainsi parce qu’il a été détecté pour la première fois en Afrique du Sud le 18 décembre dernier. Or, cette appellation est fortement rejetée par la communauté scientifique, parce qu’il est impossible de déterminer où le variant est apparu pour la première fois, ni qui était le patient zéro. Ce variant peut très bien être arrivé en Afrique du Sud avec un voyageur. De plus, l’effort important du pays en matière de « séquençage », la technique qui permet de savoir si un prélèvement positif est dû à telle ou telle souche du virus, peut expliquer l’identification du variant dans cette région plutôt qu’une autre. Qualifier de « sud-africain » un variant désormais présent dans une quarantaine de pays pose problème. Depuis 2005, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande d’ailleurs de ne pas associer un lieu géographique à une maladie pour éviter de stigmatiser une nation.
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Mais alors, que sait-on concrètement de ce variant ? Selon les scientifiques, il est plus transmissible et pourrait amoindrir l’immunité acquise par une infection passée ou par les vaccins. Cela, en raison des mutations qu’il comporte, à savoir N501Y et E484K. Cette dernière modification empêcherait les anticorps développés par l’organisme de détecter le virus. En outre, selon deux études publiées récemment dans la revue médicale New England Journal of Medicine, la quantité d’anticorps produits après l’injection des vaccins Pfizer et Moderna serait moins importante quand on est en présence du 501Y.V1. Un constat qui laisse donc supposer que le degré de protection est plus faible comparé au VoC 202012/01, soit le variant dit « britannique » ou au SARS-CoV-2, le coronavirus « classique ». /
LES VIRUS
LES COMPRENDRE POUR MIEUX LES APPRIVOISER / Le Covid-19 aura fait parler des virus comme jamais. Ils ont conquis la planète grâce à leur étonnante faculté d’adaptation. Les humains aussi ont dû s’adapter, en les étudiant pour s’en protéger. Portrait de la grande famille des virus.
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FOCUS
VIRUS
S’ADAPTER OU PÉRIR Une des clés de l’adaptation des virus se trouve dans leur capacité à muter. Pendant la réplication des virus dans les cellules infectées, de petites modifications du génome viral peuvent apparaître à cause d’erreurs de copie : les mutations. Si la majorité d’entre elles n’ont pas d’effets sur les virus ou s’avèrent délétères, les mutations qui leur apportent un avantage seront retenues par la sélection naturelle. Elles peuvent permettre aux virus d’infecter de manière très ciblée leur hôte ou de passer la barrière des espèces, d’échapper au système immunitaire et de résister aux traitements ou aux vaccins. Dans le cas du SARS-CoV-2, qui avait vraisemblablement pour GRIPPE ESPAGNOLE hôte principal une chauvesouris, les mutations ont favorisé (1918–1919) son adaptation aux récepteurs des cellules humaines et probablement sa capacité d’infection Estimation basse du nombre de victimes. et de pathogénicité. Depuis, de nouvelles mutations sont appa/ rues, notamment sur des gènes codants pour la protéine Spike, la « clé » permettant de pénétrer Estimation haute du nombre de dans les cellules. Ces variants victimes, selon des études récentes. apparus au Royaume-Uni, en / Afrique du Sud et au Brésil semblent se propager plus rapidement que le variant initial.
ans le règne du vivant, les virus sont souvent considérés comme une classe à part. Ils ne ressemblent en effet à aucune des formes de vie connues sur la terre, toutes constituées d’une ou plusieurs cellules. Eux ne sont composés que d’un génome, protégé par une capsule de protéines, parfois aussi de lipides. Dépourvus de structure cellulaire, ils ont donc l’obligation d’en trouver pour s’y multiplier. C’est pourquoi une partie des scientifiques ne les considèrent pas comme vivants. D’autres estiment que la complexité des virus, leur capacité d’adaptation et d’évolution les hissent au rang d’êtres vivants. Peut-être le sont-ils de façon transitoire. Selon les théories, les virus auraient pu apparaître avant les autres formes de vie, ou étaient auparavant des organismes vivants, mais qui auraient ensuite perdu la plupart de leurs fonctions cellulaires.
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Vivants ou non, les virus sont très diversifiés et se trouvent partout : dans l’eau, l’air, la terre, et infectent toutes les formes de vie, des bactéries aux plantes, des insectes aux humains, et jusqu’à eux-mêmes… Aujourd’hui, plus de 5000 espèces de virus ont été identifiées, mais il en existe probablement des millions. Parmi eux se trouve la fameuse famille des Coronaviridés, qui comprend quatre espèces de coronavirus (CoV) saisonniers, provoquant le rhume, et trois espèces plus virulentes qui causent des Pourcentage de l’humanité ayant « syndromes respiratoires aigus séperdu la vie, selon l’estimation haute. Les virus de la grippe aussi vères » (SARS). Il s’agit du SARSs’adaptent par mutations. En CoV-1, à l’origine d’une épidémie qui a démarré en Chine et a duré deux ans, le SARS- changeant fréquemment leurs antigènes (les molécules CoV-2, responsable de la pandémie Covid-19 (Coronavirus qui déclenchent la réponse immunitaire), ils restent disease 2019), et le MERS-CoV, originaire du Moyen- infectieux. C’est pourquoi de nouveaux vaccins sont créés chaque année, afin de s’adapter aux variations Orient, où il est toujours présent. d’antigènes. Mais parfois, un changement beaucoup D’autres familles comprennent les virus humains de la plus brutal a lieu chez les virus de la grippe. Lorsque grippe (Influenza) ou des virus hémorragiques comme deux virus différents infectent la même cellule, ils Ebola. Certains virus, les phages, infectent essentielle- peuvent échanger des fragments de leur génome et, ment les bactéries et sont aussi rassemblés dans diffé- créer un nouvel assortiment génétique. Un virus inédit rentes familles. Il existe aussi des virus dits « géants », fait dès lors, son apparition, échappant à la reconnaiscomme les Mimivirus ; découverts dans une amibe, leur sance du système immunitaire. « Ces réassortiments hôte, ils ont d’abord été pris pour une bactérie à cause sont à l’origine des grandes épidémies de grippe », de leur taille gigantesque. Leur génome contient parfois explique Gilbert Greub, directeur de l’Institut de microplus de 1000 gènes, bien plus que les autres virus et que biologie de l’Université de Lausanne et médecin-chef certaines bactéries… Des caractéristiques qui repoussent des laboratoires de microbiologie diagnostique du les définitions classiques des virus et questionnent leur CHUV. « La grippe espagnole de 1918 a causé entre 25 millions et 100 millions de morts à travers le monde. place dans l’arbre du vivant.
20 millions
100 millions 5%
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VIRUS
COMMENT LES VIRUS HUMAINS ÉMERGENT-ILS ? Les explications de Sylvia Rothenberger, cheffe de projet à l’Institut de microbiologie du CHUV. PROPOS RECUEILLIS PAR
CLÉMENT ETTER
On utilise le mot « émergence » pour parler de l’apparition ou de la dissémination rapide d’un nouveau virus au sein d’une espèce. Faut-il s’attendre à une multiplication de tels phénomènes dans les années à venir ? Chez l’humain, 60% des maladies infectieuses de ce type sont d’origine animale, et 70% des animaux concernés sont sauvages. La cause de l’émergence est multifactorielle mais résulte principalement de la modification des écosystèmes par l’humain et des changements de son mode de vie.
GILLES WEBER
Parmi ces facteurs, la chercheuse Sylvia Rothenberger, cite « la déforestation, le développement de l’agriculture ou encore les marchés d’animaux vivants, qui augmentent les contacts entre les humains et les animaux ». Les virus sont généralement adaptés à une espèce en particulier, il y a donc une barrière à franchir pour infecter une autre espèce. Mais les rapprochements plus fréquents avec des animaux susceptibles de porter des virus, en particulier les rongeurs et les chauves-souris, facilitent le passage de ces microbes à l’humain. Les guerres constituent également un contexte favorable à l’apparition de nouveaux virus chez l’humain. Les déplacements des soldats et des personnes, l’effondrement des systèmes de santé et le manque d’hygiène augmentent la transmission des virus. Pendant la guerre de Corée, par exemple (1950–1953), des milliers de soldats avaient été 21
infectés par le virus de la fièvre hémorragique Hantaan, transmis par les excréments de rongeurs présents en grand nombre dans les rizières. Plus récemment, en Syrie, les années de guerre ont empêché une vaccination efficace contre le poliovirus, qui a pu réémerger temporairement.
ADN et certaines de ces mutations peuvent favoriser leur adaptation à un nouvel hôte. Il existe en effet différents stades d’adaptation à un nouvel hôte, les extrêmes étant les virus exclusivement associés aux animaux et ceux exclusivement associés aux humains. Entre les deux existent des virus qui peuvent infecter les humains de façon limitée, comme le virus Andes en Amérique du Sud : « Il est transmis par un rongeur et sa mortalité est équivalente au virus Ebola. Mais la différence entre les deux, c’est qu’il n’y a pas de transmission interhumaine efficace pour Andes, car il ne s’est pas encore adapté à l’humain. » Au contraire du SARS-CoV-2 qui, après son émergence, s’est propagé très rapidement d’un hôte humain à l’autre, créant la pandémie actuelle.
Pour Sylvia Rothenberger, « nous allons probablement vers une augmentation des émergences, avec la mondialisation et l’augmentation de la population, dit Sylvia Rothenberger. Le réchauffement climatique aura également un impact, car les espèces animales peuvent progresser vers de nouveaux endroits au climat plus doux. » C’est le cas des moustiques vecteurs de la dengue ou du Zika, de l’encéphalite à tiques ou encore des rongeurs porteurs de hantavirus.
Pour lutter contre les virus émergents, Sylvia Rothenberger rappelle qu’il faut les étudier davantage, de même que leurs hôtes. C’est dans cette optique qu’a été mis en place le concept « One health » au début des années 2000. Il s’agit d’une approche globale et interdisciplinaire de la santé qui reconnaît les interconnexions entre humains, animaux et plantes dans leur environnement. Cette approche promeut la collaboration, la communication et la coordination entre de nombreux partenaires, comme des biologistes, médecins, vétérinaires, épidémiologistes, agriculteurs et politiciens. Cette approche pourrait donc jouer un rôle important dans la prévention, la surveillance et le contrôle des épidémies de maladies infectieuses. /
Les virus constitués d’ARN mutent plus facilement que les virus à
Lire aussi l’article sur les maladies tropicales en p. 50
FOCUS
VIRUS
En 1956, il y a eu la grippe asiatique, et en 1968 un nouveau réassortiment avec des fragments de virus aviaire a provoqué la grippe de Hong-Kong. » Plus proches de nous, les grippes aviaires se déclarent en 1997 et 2003, et la grippe porcine en 2010, contenant des fragments de virus aviaires, porcins et humains. STRATÉGIES D’INFECTION Pour survivre, certains virus utilisent la stratégie hit and run (littéralement : qui frappe fort et part aussitôt). Ils se multiplient très rapidement et détruisent la cellule, provoquant une inflammation importante. Ils doivent ensuite s’échapper et trouver un nouvel hôte avant de se faire attaquer par le système immunitaire ou que l’hôte ne meure. Cela peut se faire par la voie respiratoire, comme pour les coronavirus, la grippe ou la rougeole, par une morsure d’animal pour la rage, ou via les sécrétions pour Ebola. L’infection est donc hautement transmissible et aiguë, c’est-à-dire que les virus provoquent rapidement des symptômes.
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Dans la stratégie alternative, le virus frappe moins fort… et reste. Il persiste dans les cellules de l’hôte dans un état de latence, sans se multiplier, parfois en s’intégrant à son génome. Dans cette situation, le virus doit trouver un équilibre pour ne pas être trop virulent au risque de tuer l’hôte, et rester discret pour échapper au système immunitaire. Mais au cours de son existence, le virus peut se réactiver. C’est le cas de l’herpès, qui se réactive quand notre immunité baisse, provoquant les boutons de fièvre. Le virus de la varicelle peut aussi se réactiver des années plus tard et causer un zona. Ce type d’infection est donc chronique (de longue durée) et peu ou pas transmissible en période de latence. PASSER D’UNE PERSONNE À L’AUTRE Un autre aspect à considérer dans une infection est la contagiosité, c’est-à-dire dans quelle mesure le virus se transmet. Elle dépend notamment de la charge virale globale (le nombre de virus dans l’hôte), de la viabilité du virus hors de l’hôte, de sa capacité à y entrer et du mode de transmission. « On évalue la contagiosité en termes de taux de reproduction R0, qui correspond au nombre de personnes que le virus contamine si rien
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VACCINO-SCEPTIQUES : PEUR ET INDIVIDUALISME Près de 24% des Suisses déclaraient ne pas souhaiter se faire vacciner contre le Covid-19 lors du sondage SSR du mois de janvier 2021. Ce scepticisme n’est pas nouveau, comme l’explique Vincent Barras, directeur de l’Institut des humanités en médecine CHUV-UNIL. « Au début du XVIIIe siècle, des querelles existaient concernant les statistiques et l’efficacité de l’inoculation, notamment dans la communauté savante. De plus, il fallait accepter de s’inoculer la variole alors qu’on était en bonne santé… » La peur de se rendre malade est une des raisons qui peuvent nourrir les vaccino-sceptiques. Une autre est l’origine étrangère du matériel injecté, la vache dans le vaccin de Jenner (lire ci-contre, infographie). L’individualisme des sociétés occidentales serait aussi une explication : « Se faire vacciner est un geste altruiste : ce n’est pas uniquement pour se protéger soi-même, mais pour l’ensemble de la population et les personnes à risque. » Une couverture vaccinale importante est donc nécessaire pour éviter des flambées d’épidémies, comme cela arrive encore avec la rougeole, très contagieuse.
n’est fait pour l’en empêcher, explique Gilbert Greub. Pour le SARS-CoV-2, il est d’environ 3, donc chaque personne peut infecter en moyenne trois autres personnes. » En comparaison, le R0 de la rougeole est de 12 et celui de la grippe saisonnière, 1,5. Heureusement, notre comportement peut faire baisser le taux de reproduction effectif du virus, le Re. Les mesures préventives réalisées dans le cadre du Covid-19, comme la distanciation sociale, l’hygiène des mains ou le port du masque réduisent le risque de transmettre le virus. Quand le Re passe en dessous de 1, cela signifie que le nombre de nouvelles infections diminue. Autre facteur qui peut faire varier la contagiosité mais sur lequel nous n’avons pas de contrôle : les saisons. En été, le Re du SARS-CoV-2 est plus bas car il persiste moins dans l’air chaud et humide. De plus, nous passons plus de temps à l’extérieur. C’est l’inverse en hiver.
FOCUS
VIRUS
ANATOMIE D’UN VIRUS Enveloppe
Souvent présente chez les virus d’animaux. Elle est constituée de lipides provenant des cellules infectées et contient des protéines à sa surface, qui servent de clé pour entrer dans les cellules.
Capside
Elle protège le génome. Elle est composée de protéines identiques, ce qui lui donne une forme symétrique d’hélice ou d’icosaèdre.
Génome
ADN ou une forme proche, l’ARN. Il existe sous de nombreuses formes : simple ou double brin, segmenté, en plusieurs exemplaires…
Taille
La plupart des virus mesurent entre 18 et 320 nm, soit environ 100 fois plus petits qu’une bactérie, elle-même 100 fois plus petite que le diamètre d’un cheveu.
REPRODUCTION virus
noyau cellule
génome
protéine
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Les protéines de surface du virus, la « clé », se lient aux récepteurs de la cellule, la « serrure », afin d’entrer. Une fois à l’intérieur, le virus libère son génome qui contient les instructions pour fabriquer de nouveaux virus.
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La machinerie cellulaire de l’hôte est piratée pour copier ce génome de nombreuses fois et produire les protéines nécessaires.
Les milliers de virus assemblés sortent de la cellule pour en infecter d’autres.
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VIRUS
ÉRADIQUER LES VIRUS OU S’ADAPTER Nous avons appris à vivre avec de nombreux virus et su nous adapter à eux, comme celui de la grippe, rappelle Gilbert Greub : « Nous la subissons généralement dès l’enfance sans trop de problèmes et des vaccins existent pour protéger les personnes à risque. Nous allons probablement devoir vivre aussi avec le SARS-CoV-2, en essayant de le contenir et de proposer un vaccin aux personnes à risque, qu’il faudra adapter en fonction de l’évolution du virus et des variants qui circulent. » À ce jour, la variole est la seule maladie causée par un virus qui a été éradiquée, en 1980. Des stocks de ce virus sont toutefois encore conservés dans deux laboratoires de confinement renforcé pour être étudiés. La poliomyélite est également sur cette voie, puisque le virus a été déclaré éradiqué d’Afrique par l’OMS en août 2020 et ne subsiste plus qu’au Pakistan et en Afghanistan. Pour tous les autres, nous n’avons eu d’autre choix que de nous adapter en développant des mesures préventives, des vaccins et des traitements pour limiter les transmissions et les effets de la maladie.
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Pourquoi l’éradication de la variole a-t-elle été possible, contrairement aux autres virus ? Tout d’abord, la variole n’avait qu’un seul réservoir : le virus ne se multipliait que chez les humains. Le SARS-CoV-2, lui, en a plusieurs (chauve-souris et pangolin), ce qui augmente les chances qu’il resurgisse et contamine à nouveau l’être humain. Ensuite, la variole se manifestait par des symptômes typiques et facilement détectables : des pustules sur tout le corps. En revanche, les symptômes du Covid-19 (toux, fièvre) ne sont pas propres à cette maladie, ce qui complique son identification, et environ un tiers des personnes infectées sont asymptomatiques. Dans le cas du VIH, les premiers symptômes ne se déclarent qu’après une longue période de latence, le virus peut donc se transmettre alors qu’il est indétectable. De plus, son infection est chronique, ce qui rend l’éradication plus difficile. Un autre facteur déterminant est la stabilité du génome viral. Les virus composés d’ADN, comme celui de la variole, sont très stables, alors que le VIH, composé d’ARN, mute très souvent, ce qui complique la création d’un vaccin. « Plus globalement, pour éradiquer un virus, il faut un effort collectif, une volonté politique et une stabilité géopolitique, notamment pour conduire les programmes de vaccination au niveau mondial. »
PETITE HISTOIRE DES VACCINS EN 5 DATES La vaccination permet de sauver entre 2 et 3 millions de personnes chaque année, selon l’OMS. Par contre, il n’existe toujours pas de vaccin contre le VIH ou l’hépatite C par exemple, malgré des années de recherche.
DÉBUT DU XVIIIE SIÈCLE
L’inoculation, une forme primitive de vaccination, est utilisée pour prévenir la variole en utilisant le pus des pustules d’enfants contractant une forme mineure de la maladie.
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1796
Edward Jenner constate que des fermiers sont protégés contre la variole après avoir été en contact avec des vaches atteintes d’une maladie similaire appelée « vaccine ». Il transpose la technique d’inoculation en utilisant la variole de la vache pour immuniser une personne contre la variole humaine. Le premier vaccin est né.
FOCUS
VIRUS
« Pustules de vaches, ou Les merveilleux effets de l’inoculation » (1802). Cette gravure de James Gillray exprime de manière humoristique les peurs liées à la vaccination au début du XIXe siècle.
LIBRARY OF CONGRESS
1883
Louis Pasteur décrit le principe de la vaccination : « Inoculer des virus affaiblis ayant le caractère de ne jamais tuer, de donner une maladie bénigne qui préserve de la maladie mortelle. » Deux ans plus tard, il met au point un vaccin contre la rage.
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1980
L’OMS déclare la variole éradiquée, la seule maladie infectieuse dans ce cas actuellement.
2020
Premiers vaccins utilisant l’ARN messager (ARNm), développés contre le Covid-19.
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VIRUS
NOUVELLES PRATIQUES À LONG TERME Les impacts actuels du Covid-19 sur la recherche, les pratiques cliniques et la société pourraient s’étendre, estime Oriol Manuel, médecin adjoint au Service des maladies infectieuses et au centre de transplantation du CHUV : « Nous avons compris la nécessité d’avoir un système de santé publique solide et l’importance de la recherche et de la collaboration scientifiques. De ce fait, il y aura une surveillance plus étroite de ce genre de virus afin de le contrôler de façon plus précoce. » La recherche innovante ayant conduit aux vaccins contre le SARS-CoV-2 pourrait aussi servir de plateforme pour développer de nouveaux vaccins contre la grippe et d’autres virus respiratoires.
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Les études cliniques multicentriques qui se sont révélées très utiles pour tester des traitements anti-Covid-19 le seront aussi dans d’autres situations. Appliquées selon un protocole identique et en même temps dans différents pays, elles ont l’avantage de réunir un grand nombre de patients.
En milieu hospitalier, l’utilisation des gestes barrières et le port du masque vont probablement perdurer dans le contact avec les patients, afin d’éviter la contagion avec d’autres virus respiratoires ou celui de la grippe. Dans la société, aussi : « Les personnes à risque pourraient continuer de porter un masque et elles ne seront plus stigmatisées pour cela. » DES VIRUS UTILES Environ 200 espèces de virus sont capables de nous infecter. Une poignée parmi les milliers, si ce n’est les millions qui existent, mais qui accaparent notre attention en raison des maladies qu’ils peuvent provoquer. Cependant, les virus ne se limitent pas à leur statut de pathogènes et certains sont bénéfiques aux humains. Ils font d’ailleurs partie de notre microbiote intestinal, même si leur rôle est mal connu. La majorité d’entre eux sont des phages, des virus qui infectent les bactéries. Sur le plan thérapeutique, les phages peuvent être utilisés contre les infections bactériennes, c’est intéressant dans le contexte des résistances aux antibiotiques. De plus, ils pourraient être adaptés
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LE VIRUS RECRÉÉ À BERNE
Dès février 2020, des scientifiques de l’Université de Berne ont réussi à recréer des clones du coronavirus (SARSCoV-2) en laboratoire. Les informations apportées par ces études sont cruciales : les reconstructions du poliovirus, du virus de la grippe espagnole et plus récemment du Zika ont permis de comprendre leur virulence et donnent des pistes de traitement et de prévention pour les pandémies actuelles et à venir. Pour y parvenir, les chercheurs des instituts de virologie et de bactériologie vétérinaires ont développé une technique utilisant la levure pour réassembler le génome complet du virus à partir de fragments synthétiques. Au début de la pandémie, cette méthode a permis à plusieurs groupes de recherche dans le monde d’étudier ce virus avant même d’avoir accès à des échantillons de patients infectés. La méthode permet aussi d’étudier les nombreuses souches de virus mutées 26
qui circulent dans la population sans devoir attendre les nouveaux échantillons : « Nous pouvons recréer in vitro l’ensemble des mutations du variant que l’on veut, dans des conditions maîtrisées, explique Fabien Labroussaa, chercheur en bactériologie vétérinaire à l’Université de Berne. Cela permet de comprendre l’impact d’une mutation sur le fonctionnement du virus et de comparer les souches entre elles. Il est aussi possible d’ajouter des marqueurs fluorescents pour tester plus rapidement des molécules antivirales. » Quand le virus entier n’est pas disponible, les scientifiques peuvent étudier des fragments de son génome, comme le gène codant pour la protéine de surface Spike. Une approche notamment utilisée dans le développement des nouveaux vaccins à ARN. « C’est rapide, mais cela ne permet pas d’étudier de façon complète la biologie du virus, comme sa réplication et sa transmission in vivo. »
Cette méthode présente-t-elle un danger ? Les recherches sur les virus synthétiques sont fortement régulées par la législation et requièrent des autorisations. L’étape finale d’infection des cellules, qui permet au virus de se répliquer, se fait uniquement dans le laboratoire de haute sécurité de Mittelhäusern, près de Berne. « Le risque que le virus s’échappe tend vers 0 en raison des installations et des mesures mises en place. » Quant au risque que le système soit utilisé comme arme biologique, Fabien Labroussaa rappelle la notion de « biens à double usage » en science : d’un côté, des découvertes majeures font avancer la science ; de l’autre, elles pourraient aussi être détournées pour en faire mauvais usage. Un exemple bien connu étant l’énergie nucléaire. « En soi, notre technique est très encadrée et elle reste compliquée pour tout un chacun, sans l’équipement et les connaissances spécifiques. »
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VIRUS
LE FONCTIONNEMENT D’UN VACCIN Un vaccin permet d’entraîner le système immunitaire à reconnaître un agent pathogène (virus, bactérie) pour l’éliminer avant qu’il ne provoque une maladie.
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Un vaccin classique contient soit le microbe en entier, atténué ou mort, soit un fragment de celui-ci, par exemple une protéine spécifique.
Ces éléments vont entraîner une réponse du système immunitaire, qui va garder en mémoire la rencontre avec le microbe.
S’il rencontre le véritable pathogène, le système immunitaire pourra réagir rapidement et efficacement pour lutter contre lui.
Vaccin à ARN : même principe, contenu inédit Contre le Covid-19, un vaccin à ARN a été utilisé pour la première fois, même si la technologie est connue depuis des années. Du matériel génétique synthétique du virus, l’ARN messager, est injecté : il code pour la protéine de surface du virus, Spike. Le code génétique étant partagé entre les êtres vivants, l’ARN qui arrive dans nos cellules est traduit en protéine Spike, avant d’être dégradé. La protéine migre à la surface de la cellule et entraîne une réponse immunitaire.
pour cibler uniquement certaines bactéries pathogènes, alors que les antibiotiques tuent aussi des bactéries utiles. Certains virus jouent également un rôle important dans l’évolution des espèces, comme les rétrovirus, capables d’intégrer leur génome dans celui de leur hôte. Quand cela se produit dans une cellule reproductrice, ce génome viral peut être transmis à la descendance. Ainsi, 8% de notre patrimoine génétique serait issu de rétrovirus. Certaines séquences, devenues vitales, seraient notamment à l’origine de la formation du placenta chez les mammifères comme nous. D’autres virus pourraient avoir des effets bénéfiques contre des infections ou maladies. Le Pegivirus, totalement bénin, aurait un effet protecteur chez des personnes co-infectées par le VIH ou Ebola. Des expériences sur les souris ont aussi montré que des virus de l’herpès protégeaient les rongeurs contre les bactéries causant la peste et la listériose. Plus récemment, des 27
scientifiques ont découvert des virus oncolytiques, capables de détruire les cellules cancéreuses et qui pourraient être utilisés comme thérapies anticancéreuses. Plus largement, à l’échelle de la planète, les virus jouent un rôle important dans les écosystèmes et le maintien de la biodiversité. Par exemple, les phages contrôlent la population microbienne dans les océans, qui représente 90% de la biomasse. En détruisant une partie des bactéries, ils assurent le recyclage des nutriments nécessaires au phytoplancton qui produit la moitié de l’oxygène que nous respirons. Qu’ils soient menaçants, utiles ou mystérieux, les virus ont su s’imposer dans tous les recoins de la terre et font partie des écosystèmes. Aujourd’hui, seule une fraction de leur diversité nous est connue. À travers la recherche, nous pouvons trouver comment nous protéger des virus mortels, prévenir leur émergence et exploiter ceux qui pourraient nous être bénéfiques. /
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PROPOS RECUEILLIS PAR
ANDRÉE-MARIE DUSSAULT
VIRUS
INTERVIEW « VU LA VITESSE DE DÉVELOPPEMENT DES VACCINS, IL NOUS MANQUE DES INFORMATIONS »
Chef du Service d’immunologie et allergie au CHUV, expert en virus et en vaccin, Giuseppe Pantaleo répond aux questions que se pose la population. Entrevue. Comment s’explique la grande diversité de réponses immunitaires face au SARS-CoV-2 ? giuseppe pantaleo En ce moment, nous avons une certitude : la plupart des personnes âgées de moins de 60 ans font des infections asymptomatiques. Contrairement aux personnes de plus de 60 ans, dont le pourcentage ayant des symptômes est substantiel et dont 10 à 15% doivent être hospitalisées. On ne sait pas encore pourquoi la différence d’âge a un impact si important. La seule chose que l’on peut dire est que le SARS-CoV-2 provoque chez les personnes âgées des réactions immunologiques disproportionnées par rapport à la sévérité des symptômes et de la maladie, soit une hyperactivation du système immunitaire, ce que l’on rencontre rarement chez les jeunes. Une hypothèse est qu’avec l’âge, la régulation du système immunitaire n’est plus optimale ; il y a des dysfonctionnements, un effet anti-immunité, qui se traduit notamment par des réponses inflammatoires excessives. in vivo
Giuseppe Pantaleo Chef du Service d’immunologie et allergies au CHUV, Giuseppe Pantaleo est également directeur exécutif de l’Institut suisse de recherche sur les vaccins (SIVR). Ces dix dernières années, ses recherches se sont concentrées sur la délimitation de l’immunopathogénèse de l’infection par le VIH. Récipiendaire de nombreux prix et auteur ou coauteur d’environ 290 publications dans des revues scientifiques internationales, l’immunologue est pionnier dans divers domaines, comme les interventions basées sur l’immunité dans l’infection par le VIH. À la page 73 de ce numéro, il répond à quelques questions supplémentaires sur la vaccination. 28
Qu’en est-il de l’immunité après avoir contracté le SARS-CoV-2 ? gp Jusqu’à présent, nous avons vécu quelque dix mois avec ce virus puisqu’il est arrivé en Suisse à la fin février 2020. Nous commençons donc à peine à avoir des données sur la durabilité et la persistance de la réponse immunitaire liées au SARS-CoV-2. Sur la base de données préliminaires recueillies au CHUV, nous pouvons dire que, parmi les personnes qui ont développé des symptômes ou qui ont eu une forme sévère de la maladie, plus de 80% demeurent immunisées six mois plus tard. Par contre, parmi les individus qui ont été infectés, mais sont asymptomatiques, un pourcentage très bas est immunisé après six mois. Or, les personnes immunisées contre le virus original ne le sont pas forcément contre ses variantes. Les gens pensent qu’une fois qu’ils ont attrapé le SARS-CoV2, ils sont protégés, mais autant les asymptomatiques que ceux qui ont eu une version sévère de la maladie peuvent être infectés par une de ses variantes.
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La vitesse à laquelle des vaccins ont été rendus disponibles a-t-elle de quoi nous inquiéter ? gp Vu la vitesse de leur développement, il nous manque certainement des informations, notamment par rapport à la durée de la persistance de la réponse immunitaire qu’il induit, ce qui est tout de même problématique. Il y a tout un débat autour de la question de savoir si nous pouvons espacer davantage ou non les doses, de façon à pouvoir vacciner plus de personnes. Or, nous ne disposons d’aucune donnée scientifique permettant de répondre. Il faut se baser sur des schémas hypothétiques. Les autorités sanitaires estiment que les vaccins sont efficaces à 90% et que cela suffit pour nous rassurer et aller de l’avant. Mais nous savons seulement qu’ils sont efficaces à 90% une semaine après l’injection de la seconde dose, c’est-à-dire au moment où leur efficacité est le plus élevée. Qu’en sera-t-il six mois plus tard ? iv
FOCUS
VIRUS
Normalement, l’efficacité d’un vaccin est contrôlée douze voire vingt-quatre mois après l’injection de la seconde dose. Par ailleurs, à votre avis, il n’y a pas eu d’évaluation suffisamment approfondie sur la dose de vaccin à administrer ? gp Normalement, la phase II des essais cliniques – qui sert à déterminer la dose optimale d’un médicament et ses éventuels effets indésirables – est beaucoup plus étendue dans le temps. Des études plus longues sont nécessaires pour tester différentes doses afin d’identifier le meilleur rapport « maximum d’efficacité/minimum d’effets secondaires », lesquels sont pour la majorité mineurs, mais toujours présents. Moderna et Pfizer, pour faire plus vite, ont choisi une dose sans faire d’évaluation claire sur la même capacité d’induire une réponse immunitaire en limitant les effets secondaires. Cela aurait pris au moins six à huit mois de plus. Il faudra maintenant répondre aux questions laissées en suspens. iv
Existe-t-il des alternatives aux vaccins pour se protéger des virus ? gp Il y a l’utilisation d’anticorps monoclonaux, surtout utilisés dans le domaine thérapeutique, qui peuvent bloquer les virus et qui font l’objet d’un programme au CHUV. Ceux-ci peuvent être efficaces dans un environnement immunodéprimé qui ne répond pas aux vaccins, ce qui est le cas de millions de personnes, plus fragiles, par exemple des patients atteints de cancers. Nous leur fournissons une immunité passive en leur donnant des anticorps pour prévenir une infection. La problématique est complexe car les anticorps ont une vie de deux à trois semaines. Nous ne pourrions cependant pas injecter continuellement chez des personnes des anticorps à cette fréquence. Mais, grâce à l’ingénierie des anticorps, nous pouvons modifier leur structure afin de prolonger leur durée de vie de quatre à six mois, de sorte que seules deux injections par an seraient nécessaires. Alors que pour les vaccins contre le SARS-CoV-2, on ne sait pas à quelle fréquence devront être faits les rappels puisque nous ne
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savons pas encore quelle sera la durée de la protection qu’ils induisent. Certains virus peuvent-ils provoquer une infection chronique, persistant toute la vie ? gp Les deux plus importants et les plus diffusés sont, d’une part, l’Epstein Barr (EBV), qui touche presque la totalité de la population et peut provoquer notamment la mononucléose et, d’autre part, le cytomégalovirus, dont environ 60% de la population sont infectés. Souvent, ces virus passent inaperçus, mais selon la santé des individus, chez ceux qui ont des défenses immunitaires affaiblies, ils sont susceptibles de provoquer des inflammations, voire des cancers. iv
Avec l’élévation de la température et la fonte du pergélisol, vous ne craignez pas que d’anciens virus piégés dans la glace réapparaissent ? gp Non ; pour le moment, il n’y a pas de preuve que le changement climatique puisse influencer la prolifération de virus. Au contraire, les rayons ultraviolets (UV) les détruisent. Si leur présence augmente dans l’atmosphère, plus de virus seront tués. D’ailleurs, les UV sont étudiés par rapport à leur éventuel usage pour le nettoyage de surfaces contre le SARS-CoV-2. / iv
FOCUS
EN LECTURES
« LES VIRUS PATHOGÈNES SONT MINORITAIRES, MAIS NOUS NE PARLONS QUE DE CEUX-LÀ » Adopte un virus.com. Quand les microbes passent de l’animal à l’homme DR FRANÇOIS MOUTOU DELACHAUX & NIESTLÉ, 2021, CHF 28.80
aseptise, plus on se fragilise. Les virus négatifs sont très minoritaires, mais nous ne parlons que de ceux-là, et les voyons comme des ennemis. Pourtant, en mutant pour résister, ils nous survivront . Battre la pandémie actuelle est donc un élément de langage ? fm La recherche scientifique intègre l’erreur, ce qui n’est pas facile à vulgariser. Plus personne d’influent n’ose dire « je ne sais pas » ou « je me suis trompé », par peur de finir au tribunal. Or, un accident comme cette émergence doit servir à comprendre, à améliorer, pas à accuser . La pandémie qui a suivi n’a pas été anticipée, il a fallu inventer les réponses au fur et à mesure et, dans le cas d’une maladie aussi contagieuse, elles ne peuvent être que collectives et citoyennes. Et, bien que nous, humains, soyons responsables de l’amplification de cette crise (mondialisation, politique, environnement, inégalités, etc.), nous restons encore incapables de la résoudre. iv
L’épidémiologiste et vétérinaire François Moutou vient de publier Adopte un virus.com. virus.com Interview. in vivo Votre ouvrage est sous-titré « Quand les microbes passent de l’animal à l’homme ». Est-ce si courant ? françois moutou « L’homme » s’entend ici comme «les humains»: il est absurde d’opposer l’homme et l’animal – que signifie « animal » au singulier d’ailleurs, un escargot, un éléphant ? L’humain est juste un mammifère parmi plus de 6000 autres, et les microbes, oui, le colonisent depuis toujours, s’adaptant à nous bien plus vite que l’inverse, puisqu’ils se multiplient et évoluent des millions de fois en une génération humaine !
La cohabitation n’est donc pas le problème ? fm Non, car notre corps compte davantage de bactéries que de cellules humaines. Même les mitochondries, sans lesquelles nous ne pourrions pas vivre, sont de très anciennes bactéries. Et c’est grâce à un virus « intégré » que les femelles mammifères ne rejettent pas cet « étranger » qu’est le fœtus… Se résoudre à la perte de biodiversité en pensant éliminer ainsi des microbes est même un jeu dangereux, car plus on iv
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Alors le SARS-CoV-2 nous a adoptés… On ne l’a pas choisi, mais il a été « malin » et a bien profité de nos comportements: en 2019, un Terrien sur deux a pris l’avion pour changer de pays ou de continent, une aubaine pour un virus ! iv
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A-t-il tout de même, comme d’autres, son côté positif ? fm J’en vois deux. D’abord, les mesures contre lui semblent agir plus largement, contre la grippe par exemple, grâce aux masques, mais aussi parce que les deux virus pourraient bien être combattus par les mêmes défenses immunitaires non spécifiques. Ensuite, cet épisode si difficile a donné lieu à quelques belles manifestations de solidarité, et donne l’occasion de réfléchir aux moyens d’agir comme espèce plutôt que comme individus… iv
Et le pangolin ? Et le chaînon manquant ?
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VALÉRIE BESNARD
PROPOS RECUEILLIS PAR JOËLLE BRACK, RESPONSABLE ÉDITORIALE PAYOT LIBRAIRE
FOCUS
EN LECTURES
fm Il est probable que, malgré nos recherches, nous ne trouvions jamais exactement ce qui a permis la transmission du virus des rhinolophes (NB : chauves-souris) devenu SARS-CoV-2 chez les humains. Quant au pauvre pangolin de contrebande, je le pense victime collatérale d’une coïncidence ! /
Vétérinaire et mammalogiste, ancien épidémiologiste à l’Agence nationale de sécurité sanitaire, ancien membre du comité d’éthique de l’Inserm, le Dr François Moutou a travaillé sur diverses maladies communes aux humains et aux animaux, pour mieux les comprendre et les prévenir.
EN BREF Neige et corbeaux CHI ZIJIAN PICQUIER, 2020 366 PAGES, CHF 33.30
Ravagée par la peste pulmonaire, la cité mandchoue de Harbin est en 1910 une communauté à la dérive, mais aussi un kaléidoscope de destins uniques et terriblement romanesques. Ce souffle qui leur fera bientôt défaut, Chi Zijian l’insuffle à ses innombrables personnages d’une plume curieuse, humaniste et lucide, mêlant dans sa fresque mille détails historiques (mais très actuels !) aux drames et mésaventures de chacun : ici, on fabrique des masques à la chaîne, là les médecins se disputent à coups d’ego, tandis que le commerce tente de survivre…
CHRONIQUE Samuel Alizon est chercheur en écologie des maladies infectieuses, un nom plutôt agreste pour désigner la médecine évolutionniste. Impossible en effet, explique-t-il, de dissocier l’irruption de « nouvelles » pandémies – sida, SRAS, Ebola, etc. – et leurs C’est grave Dr Darwi ? caractéristiques (notamment la résisSAMUEL ALIZON tance aux médicaments) de leur réalité SEUIL, 2016 229 PAGES, biologique : les agents pathogènes ont un CHF 34.00 mode de vie calqué sur le nôtre, mais ils sont infiniment plus nombreux, coriaces, rapides et imaginatifs que nous… Dès lors, les évolutions sociétales, de la mondialisation aux pratiques de santé publique, en passant par l’urbanisation ou le changement des mœurs, peuvent-elles espérer concurrencer celle des maladies infectieuses ? Oui, estime l’auteur, à condition de prendre en compte cette dimension évolutive, à laquelle la médecine semble pourtant réticente, la percevant comme trop lente pour être constitutive de l’émergence des maladies. De question en question, dont les réponses très accessibles sont d’une passionnante diversité, se complète un état des lieux contemporain aussi riche que… vivant !
Dans chaque numéro d’In Vivo, le Focus se clôt sur une sélection d’ouvrages en « libres échos ». Ces suggestions de lectures sont préparées en collaboration avec Payot Libraire et sont signées Joëlle Brack, libraire et responsable éditoriale de www.payot.ch. 31
Fake news et viralité avant internet ROY PINKER, CNRS, 2020 231 PAGES, CHF 34.00
Englobant les vidéos rigolotes comme les mensonges pernicieux, la formule « c’est viral » est devenue… virale, laissant penser que nous avions inventé le concept : erreur, démontrent avec sérieux – mais ironie – trois historiens des médias, la propagation d’une info a toujours été inversement proportionnelle à sa véracité. Gazettes colportées (le terme est resté !), affiches publicitaires ou journaux réputés, thèmes frivoles ou tragiques, tout le XIXe siècle médiatique est passé au crible… et le résultat a de quoi vexer nos gazouillis numériques ! Le hussard sur le toit JEAN GIONO, GALLIMARD, 2020 512 PAGES, CHF 16.20
Soupçonné d’empoisonner l’eau, Angelo, jeune officier italien en cavale, s’est réfugié sur les toits de Manosque pour échapper au choléra et à la vindicte populaire : de là, il observe la ville, victime et agent de la terrible épidémie car, absurdement, les autorités de 1831 évacuent les citadins vers la campagne ! Mais le choléra, selon Giono, a deux qualités : il révèle les humains, vils ou magnifiques, et offre au héros une passion romantique pour l’intrépide Pauline de Théus, et une folle chevauchée au cœur de la Haute-Provence chère à l’écrivain.
« TRAITÉ COMPLET DE L’ANATOMIE DE L’HOMME » DE J. M. BOURGERY ET N. H. JACOB, 1831–1854
MENS SANA
Vue antéro-latérale droite des muscles thoraciques et abdominaux après ablation du plan cutané, présentée dans le « Traité complet de l’anatomie de l’homme » de J. M. Bourgery et N. H. Jacob, 1831–1854.
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MENS SANA
INTERVIEW
ALEXANDRA KAUTZKY-WILLER est la pionnière européenne de
la médecine de genre. Selon elle, les questions liées au sexe doivent être prises en compte pour des diagnostics et des traitements plus justes.
INTERVIEW : ROBERT GLOY
« Les femmes prennent des médicaments dont les doses ont été fixées en fonction des hommes » homme n’a pas forcément les mêmes effets Une femme a davantage de risques de mourir à la suite d’une chez une femme. De même, certaines pathocrise cardiaque. Mais un homme meurt plus facilement du logies se développent différemment selon le Covid-19 qu’une femme. Comprendre ces différences, tel est sexe. Mais la discipline s’intéresse également l’objectif de la médecine du genre. Cette jeune discipline, au genre, c’est-à-dire à la dimension culturelle née dans les années 1980 aux États-Unis, a encore du mal et sociale liée au sexe biologique. Plus récemà se faire entendre. Ainsi, la plupart des médicaments sont ment, la médecine du genre a pris aussi en toujours largement testés sur des hommes, tout en compte l’épigénétique, l’impact de facteurs extésachant que leur organisme fonctionne différemment rieurs – comme l’environnement, l’alimentation de celui des femmes. La chercheuse autrichienne ou le mode de vie – sur le fonctionnement des Alexandra Kautzky-Willer – détentrice depuis 2010 de gènes. En tant que chercheurs, nous regardons la première chaire consacrée à cette discipline en comment ces facteurs agissent selon le sexe. Europe – nous fait découvrir les enjeux de cette médecine encore largement méconnue dans les pays francophones. IV Quelles sont les différences principales entre les hommes et les femmes qui expliquent les variaIN VIVO Comment peut-on définir la médecine du tions d’efficacité d’un médicament ? AKW L’activité genre ? AKW La médecine du genre s’intéresse aux des enzymes – ces protéines qui règlent les réactions chimiques dans le corps – varie énormément entre un différences biologiques qui existent entre les organisme masculin et un organisme féminin. Par organismes de sexe différent et leurs conséexemple, les hommes ont un processus de digestion plus quences sur le développement de maladies, rapide, puisque leur organisme produit plus de bile, ce ainsi que sur l’efficacité des médicaments. qui élimine plus rapidement les nutriments dans l’estoDepuis les années 1980, plusieurs études ont mac. De même, l’activité métabolique du foie et des reins montré qu’un traitement testé sur un
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MENS SANA
INTERVIEW
de l’activité des hormones (endocrinologie), ainsi que sur le diabète afin d’améliorer la prise en charge de cette maladie selon le sexe et le genre des patients.
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BUBU DUJMIC
d’ailleurs chez les deux sexes – est très comest plus lente chez les femmes. Le corps d’un homme plexe. De plus, le ratio entre l’œstrogène et contient davantage d’eau, ce qui favorise l’efficacité d’un médicament hydrosoluble, comme certains antihyperten- la testostérone varie au cours de la vie : dans l’utérus, les différences sont grandes entre les seurs. De leur côté, les femmes ont plus de matière grasse, garçons et les filles. Elles s’estompent à la ce qui leur permet de stocker des médicaments liposonaissance et gagnent de nouveau en imporlubles – comme certains médicaments psychotropes – plus tance au moment de la puberté. À partir de la longtemps. ménopause, le ratio d’hormones masculines devient dominant chez les femmes, entraînant IV Quelles conséquences concrètes ont été observées ? un risque accru de développer des maladies AKW L’aspirine protège davantage une femme d’un cardiovasculaires, s’approchant de celui des premier AVC, un homme d’une crise cardiaque. Mais des hommes. études ont montré que les femmes ont 1,5 fois plus de risques de subir les effets secondaires d’un médicament que les hommes. Ainsi, avec ce médicament, les femmes IV Mais l’activité des œstrogènes semble aussi souffrent en plus d’un risque de saignements accru. De avoir des bénéfices pour les femmes… AKW Tout manière générale, ces risques concernent la majorité à fait. Ces hormones permettent aux femmes des catégories de médicaments et chaque discipline en d’avoir un meilleur système immunitaire que les médecine. Un autre exemple : pour traiter le diabète, hommes. Par exemple, l’organisme féminin est de nouveaux traitements permettent d’éliminer de mieux protégé contre des maladies virales car il grandes quantités de glucose par l’urine, ce qui rédéveloppe plus d’anticorps et de lymphocytes T. duit le taux de glycémie, mais aussi les problèmes de Des études sont en cours pour comprendre exactesurpoids et les troubles cardiovasculaires. Toutefois, ment les causes de ces avantages biologiques dont le glucose entraîne chez les femmes un risque plus bénéficient les femmes. élevé de développer des champignons dans les parties intimes et même, dans certains cas rares, des IV Les facteurs sociaux jouent aussi un rôle, hyperacidités qui peuvent se révéler mortelles. comme le montre l’exemple du Covid-19. AKW La pandémie de Covid-19 a révélé une probabilité plus élevée pour les hommes de développer des formes IV Quel rôle jouent les hormones ? AKW La comgraves de la maladie ou d’en mourir. Pourtant, les facpréhension du fonctionnement de l’œstrogène et teurs biologiques ne suffisent pas à expliquer ce de la testostérone dans l’organisme est essentielle phénomène, étant donné que les femmes sont plus pour la médecine du genre – ce sont ces horexposées au virus que les hommes. Ainsi, dans les pays mones qui déterminent le sexe biologique. Il occidentaux, les femmes représentent jusqu’à 70% des est toutefois important de comprendre que l’actieffectifs dans les métiers du soin. Il est alors probable vité de ces deux hormones – qui se retrouvent que les comportements jouent aussi un rôle. Plusieurs études ont par exemple montré que les femmes ont tendance à davantage respecter BIOGRAPHIE les consignes des autorités et donc les Alexandra Kautzky-Willer gestes barrières. Une autre question est professeure concerne l’accès aux tests : une étude a de médecine de montré que les femmes dans les pays qui genre à l’Univerfavorisent l’égalité des se font tester plus sité de médecine de Vienne depuis facilement. C’est un bon exemple de 2010. Ses rela complexité des questions auxquelles la cherches portent médecine de genre essaie de trouver des sur une meilleure réponses. compréhension
MENS SANA
INTERVIEW
Depuis les années 1990, il est obliga- par la discipline se trouvent aujourd’hui dans les manuels de toire, aux États-Unis et en Europe, d’inmédecine. Par exemple, les étudiants apprennent que les clure des femmes dans les tests cliniques. symptômes d’une crise cardiaque ne sont pas forcément les Pourquoi y a-t-il encore tant de différences mêmes chez les femmes. Contrairement aux hommes qui entre les sexes par rapport à l’efficacité des souffrent de douleurs aiguës dans la poitrine, les femmes médicaments ? AKW Aujourd’hui, le taux de ont souvent du mal à localiser et à décrire leurs souffrances, ce qui rend le diagnostic plus difficile. C’est pour participantes lors d’études cliniques est en cette raison qu’une femme a plus de risques de mourir à la moyenne de 35% seulement. La raison : les suite d’une crise cardiaque qu’un homme, comme l’a monmesures de sécurité sont si élevées que toute tré une étude américaine publiée en 2016. Un autre femme souhaitant participer à un test clinique exemple : on sait aujourd’hui que les tumeurs à l’origine doit suivre un protocole strict pour éviter toute d’un cancer du côlon se développent davantage dans la grossesse. Par conséquent, les laboratoires privipartie droite du gros intestin chez la femme (chez légient des femmes qui ont déjà eu la ménopaul’homme, elles se trouvent dans la partie gauche qui est sées. Pourtant, les résultats ainsi obtenus ne plus facilement accessible). Mais, de manière générale, s’appliquent pas automatiquement aux femmes ces connaissances propres au sexe ne se traduisent pas plus jeunes, car les taux d’œstrogène ne sont pas encore assez dans les pratiques médicales. Le chemin les mêmes, ce qui explique le risque d’effets seconest encore long. daires qu’elles peuvent subir. IV
« LES SYMPTÔMES D’UNE CRISE CARDIAQUE NE SONT PAS FORCÉMENT LES MÊMES CHEZ LES FEMMES. »
IV Les questions liées au genre ont connu une recon-
naissance croissante dans le débat public ces dernières années. Quelle position prend la médecine du genre dans ce contexte ? AKW Pour comprendre son positionnement, il faut savoir que la discipline trouve ses origines dans le mouvement des droits des femmes qui s’est développé dans les années 1980. L’idée était d’améliorer les conditions de santé des femmes, considérées comme désavantagées par rapport aux hommes. Depuis les années 2010 environ, la médecine du genre se fait parfois reprocher, par des sciences sociales, de trop se focaliser sur les différences biologiques entre les IV Et qu’en est-il de rédiger des consignes différentes sexes. Il y a une certaine tendance qui consiste à selon le sexe sur les boîtes de médicaments ? AKW À ce « nier » ces différences pour davantage se concenjour, il n’y a qu’un seul somnifère qui différencie ses trer sur le genre. Ma position là-dessus est consignes selon les hommes et les femmes. C’est la Food claire : les différences biologiques entre hommes and Drug Administration (FDA) aux États-Unis qui les a et femmes existent et elles doivent être prises rendues obligatoires. Cependant, l’Agence européenne des en compte dans la prise en charge médicale. médicaments ne les a pas retenues. Le constat est donc Mais cela n’exclut en aucun cas les autres questoujours le même : les femmes prennent des médicaments tions liées au genre, comme l’intersexualité ou dont les doses ont été fixées majoritairement en fonction la transsexualité. Ainsi, à Vienne, nous études hommes. dions l’impact des hormones du sexe opposé chez les personnes transgenres. Le but de la IV Depuis 2010, vous occupez la chaire de médecine du médecine du genre est de créer une pratique genre de l’Université de médecine de Vienne. Quelles médicale plus juste et plus individualisée avancées avez-vous observées dans votre domaine ces dix pour tout le monde. / dernières années ? AKW Certaines connaissances acquises
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MENS SANA
DÉCRYPTAGE
OBÈSE, ET ALORS ?
L’obésité augmente les risques de dépression et de maladies cardiovasculaires. Mais les personnes concernées sont toujours plus nombreuses à se dire satisfaites de leur poids.
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TEXTE : ALEXANDRE WÄLTI
n constat surprend dans les chiffres sur l’obésité publiés par l’Office fédéral de la statistique dans son « Enquête suisse sur la santé » (ESS) : les obèses sont de plus en plus satisfaits de leur poids. En 2007, ils étaient 27% à vivre sereinement leur obésité. Dix ans plus tard, cette proportion est passée à 36%. Les résultats, publiés à l’automne dernier, indiquent que 11% de la population est obèse, soit plus de 940 000 personnes. « C ’est une mauvaise nouvelle d’apprendre que les obèses s’habituent à leur poids, puisqu’ils n’iront proba-
blement pas consulter. Alors qu’ils ont justement besoin d’un suivi pour être en meilleure santé », réagit la doctoresse Lucie Favre, médecin associée au Service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV). La lutte contre l’obésité doit être renforcée de manière plus ciblée. « Les cas de patients présentant une obésité modérée à sévère (IMC supérieur à 30 kg/m2) augmentent depuis une dizaine d’années dans notre service », dit Lucie Favre. Son service suit actuellement une centaine de patients de ce type. Ils arrivent uniquement de l’Arc lémanique et nécessitent une prise en charge pluridisciplinaire à la fois par des nutritionnistes, des diététiciens et des psychologues.
SIX CHIFFRES SUR L’OBÉSITÉ
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Les femmes dont le niveau de formation ne dépasse pas l’école obligatoire ont un risque 3,5 fois plus élevé d’être obèses. 36
UNE LUTTE GLOBALE En 2019, une étude de l’OCDE
MENS SANA
DÉCRYPTAGE
« L’obésité doit apparaître comme une priorité de santé publique et être considérée comme une maladie », dit Lucie Favre, médecin associée au Service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme du CHUV.
a par ailleurs relevé que l’espérance de vie des Suisses pourrait diminuer de 1,9 année d’ici à 2050 en raison de cette maladie. Le secrétaire général de l’OCDE, José Ángel Gurría, a appelé les pays membres à agir en améliorant la prévention et en demandant de restreindre la publicité pour les aliments malsains. L’offre alimentaire pose de nombreux problèmes de santé, au même titre que les publicités vantant les produits à haute teneur calorique tels que les boissons sucrées, la viande ou le fromage. « Le modèle économique de l’industrie agroalimentaire valorise excessivement des aliments sucrés, gras ou transformés qui sont peu sains et favorisent ainsi la prise de poids », explique Salvatore Bevilacqua, socio-anthropologue à l’Institut des humanités en Un homme ayant achevé médecine (IHM) du CHUV.
2,1
uniquement l’école obligatoire a un risque de devenir obèse 2,1 fois plus élevé qu’un homme au bénéfice d’une formation tertiaire.
En 2012, plusieurs organisations de consommateurs suisses (ACSI, FRC, Konsumentenschutz) ont mis leurs forces en commun pour étudier les publicités alimentaires. Leur étude a démontré que la part des publicités pour des produits de fast-food à la télévision s’intensifiait durant les horaires destinés aux enfants, tandis que les spots publicitaires pour des fruits et légumes diminuaient durant la même période. « Nos modes de vie sont à l’origine de l’augmentation de l’obésité puisqu’on peut aujourd’hui manger à n’importe quelle heure et que nous sommes constamment stimulés en ce sens par la publicité », regrette Lucie Favre. La médecin déplore également
DES CONSÉQUENCES PSYCHIQUES ET SOCIALES L’étude de l’Office fédéral de la statistique (OFS) évoque pour la première fois les conséquences de l’obésité sur la santé psychique des patients. L’enquête montre notamment que 12% des obèses déclarent souffrir de dépression modérée, 19% de détresse psychologique moyenne ou élevée, et qu’une personne obèse présente 1,6 fois plus de risques de dépression.
2×
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L’obésité a doublé ces vingt-cinq dernières années (5% en 1992 contre 11% en 2017). Une tendance qui se retrouve dans tous les pays industrialisés occidentaux. 37
que les enfants soient exposés à toutes sortes de sucreries, dans les centres commerciaux par exemple. « En Suisse, la pyramide alimentaire est inversée par la publicité et s’oppose ainsi aux recommandations de la Société suisse de nutrition, ajoute Salvatore Bevilacqua. Nous vivons dans une société obésogène. »
« La stigmatisation sociale des personnes obèses est un problème majeur pour nos patients et crée des souffrances
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DÉCRYPTAGE
39%
afin de les aider à identifier psychiques importantes », leurs troubles alimentaires », remarque Lucie Favre. Les explique Lucie Favre. consultations montrent que les personnes les plus défavoLes personnes obèses Les risques de l’obésité sont risées sont bien plus touchées ont 39% plus de connus depuis longtemps. par la maladie. Salvatore risques de souffrir « Les conséquences concrètes Bevilacqua précise que d’hypertension. sur la santé sont l’augmenta« les adolescents concernés tion des maladies cardiovascusouffrent d’autant plus qu’ils laires comme l’hypertension, et subissent pour la plupart des l’augmentation des risques de développer moqueries répétées de la part de leurs certains cancers ou encore du diabète, camarades de classe, durant une période poursuit Lucie Favre. L’obésité doit dès capitale pour la confiance en soi et lors apparaître comme une priorité de la construction de l’identité. » santé publique et être considérée comme une maladie. » / Les groupes de population avec un faible niveau de formation sont plus souvent affectés par l’obésité, indique l’étude de l’OFS. « Il est vrai que les personnes moins formées ont souvent moins de ressources personnelles et financières pour s’intéresser aux liens entre nutrition et santé », explique Les personnes obèses Lucie Favre.
1,6
ont 1,6 fois plus de risques d’avoir de l’arthrose/arthrite.
L’aspect psychologique du traitement est important. « Dès la première consultation, nous impliquons une psychologue et une diététicienne pour répondre aux besoins de nos patients et les accompagner le mieux possible dans leur perte de poids. » De nombreux patients peuvent exprimer leur désarroi et leur tristesse dès la première rencontre, parce qu’ils sont enfin pris au sérieux et trouvent un cadre rassurant pour avancer dans leur traitement. La prise en charge pluridisciplinaire par le Service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme du CHUV comprend ainsi des ateliers de groupe. « Nous travaillons ensemble sur leurs sensations liées à la nourriture
2,7
L’OCDE estime que l’espérance de vie moyenne des pays dits développés sera réduite de 2,7 ans à cause de l’obésité d’ici à 2050, causant la mort de près de 92 millions de personnes.
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LUTTER CONTRE LA GROSSOPHOBIE Plusieurs associations se battent contre les discriminations que subissent des personnes obèses telles que des moqueries sur leur poids ou le regard de la population. C’est le cas de Perceptio Cibus dans le canton de Vaud. Ses membres luttent contre la grossophobie, ou l’ensemble des attitudes et des comportements hostiles qui stigmatisent et discriminent les personnes obèses. « Je pense que le monde médical discrimine encore trop souvent les patients souffrant d’obésité, explique la doctoresse Lucie Favre, même si je ne trouve pas le terme grossophobie très adéquat. Je préfère parler de stigmatisation des obèses. » Ce n’est pas l’inquiétude de devenir obèse qui pose problème, mais bien « le regard que porte la société sur les malades d’obésité », souligne Salvatore Bevilacqua. Peceptio Cibus organise notamment des groupes de parole thérapeutiques et des ateliers afin de lutter contre la grossophobie. Elle propose enfin un suivi de perte de poids aux personnes touchées par l’obésité. Toutes les offres de l’association vaudoise visent à améliorer le bien-être des bénéficiaires de leurs services.
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PROSPECTION
NUISANCES SONORES, UN MAL SILENCIEUX LE BRUIT REPRÉSENTE UNE MENACE MAJEURE POUR LA SANTÉ ET PEUT CAUSER DES PATHOLOGIES GRAVES, JUSQU’À L’INFARCTUS. DES MAUX QUI EN FONT LA DEUXIÈME CAUSE DE MORTALITÉ PARMI LES FACTEURS DE RISQUES ENVIRONNEMENTAUX. TEXTE : ANTONIO ROSATI
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e sont ces roulis réguliers des voitures, ces éclats de voix des passants, les outils du chantier voisin. Les nuisances sonores, apparemment inoffensives et souvent non perçues, peuvent en réalité dégrader la santé. « Le sommeil peut être interrompu par des micro-réveils, généralement d’une durée d’une à trois secondes environ, que notre cerveau ne perçoit pas mais qui nous font néanmoins sortir du sommeil sans qu’on s’en souvienne, explique Raphaël Heinzer, directeur du Centre d’investigation et de recherche sur le sommeil (CIRS). Ces stimulations peuvent être associées à des activations du système nerveux autonome, celui qui gère notre rythme cardiaque et notre pression artérielle. Si leur nombre est élevé, cela peut provo-
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quer des augmentations répétées de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle avec potentiellement un risque de développer des maladies cardiovasculaires. » D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les nuisances sonores sont la deuxième cause de morbidité parmi les facteurs de risques environnementaux, derrière la pollution de l’air. En effet, chaque année dans l’Union européenne, 12 000 morts et 48 000 maladies cardiovasculaires sont attribués aux bruits routiers et autres nuisances sonores, selon les chiffres de l’Agence européenne de l’environnement. En Suisse, une personne sur sept est exposée à un bruit routier excessif à son domicile le jour, et une personne sur huit la nuit, soit près d’un million de personnes. La plupart
vivent dans les grandes villes ou en périphérie, avec de nombreuses collectivités qui se trouvent en état de non-conformité par rapport au cadre légal, malgré les mesures de prévention prises par les autorités (lire encadré). Selon les estimations de la Confédération, les coûts liés au bruit généré par la circulation se sont élevés à 2,7 milliards de francs en 2017. Ils ont été calculés en prenant en compte des études épidémiologiques mettant en relation exposition au bruit et effets négatifs sur la santé, pertes de valeur des lieux de vie et autres coûts immatériels.
HORMONES DE STRESS Selon l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), les nuisances sonores provoquent des réactions nerveuses et la sécrétion d’hormones du stress telles que
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l’adrénaline, la noradrénaline ou le cortisol. L’exposition à des pics sonores, même s’ils ne provoquent pas le réveil, produit autant de pics d’hormones liées au stress. L’étude nationale sur la santé des Suisses, publiée en 2017, a constaté le lien entre exposition aux bruits et maladies cardiovasculaires. Elle démontre qu’à une augmentation de 10 décibels des bruits routiers correspond une hausse du risque de décès d’infarctus du myocarde de 4%. L’OMS a fixé la limite pour les nuisances sonores nocturnes à 45 décibels, ce qui correspond au bruit émis par un réfrigérateur ou par une pluie modérée (le trafic citadin se situe à 70 décibels). L’Institut tropical et de santé publique suisse (Swiss TPH) a démontré dans une étude publiée en 2020 que sur 25 000 décès par arrêt cardiaque survenus à proximité de l’aéroport de Zurich, 800 sont directement dus au bruit des avions. Plus étonnant, selon cette recherche, l’exposition à des niveaux élevés de bruit dus aux avions durant la nuit pouvait provoquer des accidents cardiovasculaires fatals dans les deux heures suivantes. Les perturbations du sommeil dues aux nuisances sonores peuvent également avoir un impact sur notre métabolisme, avec comme possible conséquence une prise de poids. « Les personnes qui dorment moins ont tendance à prendre du poids, souligne Raphaël Heinzer. Le manque de sommeil provoque une baisse de la leptine, hormone dont la
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sécrétion réduit la sensation de satiété, et une augmentation de la ghréline, qui au contraire stimule l’appétit. Cette réponse endocrinienne explique donc le lien potentiel entre obésité, un facteur de risque cardiovasculaire majeur, et exposition au bruit, qui trouble le sommeil. » En dégradant la qualité du sommeil, les nuisances sonores nocturnes provoquent également une sensation de somnolence pendant la journée. Une étude publiée en 2018 par des chercheurs de l’EPFL et des hôpitaux universitaires vaudois et genevois a examiné le sentiment de somnolence de près de 3700 Lausannois en les confrontant avec les données du cadastre du bruit. Les résultats ont permis d’identifier des quartiers où les effets de somnolence diurne et de bruits nocturnes sont clairement associés. « Nous avons constaté une différence d’exposition au bruit nocturne de plus de 5 décibels entre les zones les plus exposées au trafic routier et celles qui le sont moins, explique Raphaël Heinzer, qui figure parmi les chercheurs ayant mené l’étude. C’est impressionnant, cela correspond à une perception trois fois plus forte du bruit ! »
LA SANTÉ MENTALE ÉGALEMENT TOUCHÉE En ce qui concerne la santé psychique, l’influence du bruit n’a pas encore été établie de manière évidente : « Plusieurs recherches suggèrent qu’une
exposition aux nuisances sonores n’augmente pas de manière générale, ou du moins pas chez tout le monde, le risque de développer un trouble de santé mentale », précise Philippe Conus, chef du Service de psychiatrie générale du CHUV. Il semble donc que nous ne soyons pas tous égaux face au bruit et à son impact : ce sont en effet le degré de sensibilité inné ou celui très individuel d’inconfort face au bruit, ainsi que la présence de troubles du sommeil qui modulent probablement le risque de problèmes de santé mentale en cas d’exposition. Les personnes qui présentent cette sensibilité particulière aux bruits sont beaucoup plus susceptibles de développer des troubles anxieux ou dépressifs. De plus, « chez les personnes souffrant d’une pathologie psychiatrique telle que la schizophrénie, l’exposition aux nuisances sonores peut aggraver les symptômes, en particulier les troubles cognitifs existants (mémoire et concentration), constate Philippe Conus. Par ailleurs, certains travaux ont démontré que le risque de développer une dépression post-partum est corrélé significativement avec l’intensité de l’exposition nocturne au bruit pendant la grossesse. » /
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PROSPECTION
PRÉVENIR LE BRUIT ROUTIER EN VILLE « La Suisse prend peu à peu conscience des effets néfastes du bruit sur la santé. Le cadre légal national date de 1983 et fixe des valeurs limites, tout en exigeant des mesures de réduction des émissions (revêtements phono-absorbants, véhicules silencieux, modération du trafic) et de protection via des dispositifs antibruit (murs ou buttes). « Le dernier délai pour la mise en œuvre du dispositif avait été fixé à 2018, précise Myriam Pasche, co-cheffe du Département Promotion de la santé et préventions à Unisanté. Malgré cela, de nombreuses communes sont aujourd’hui encore non conformes, avec des émissions de bruit largement au-dessus des limites imposées par le législateur. »
Pour réduire l’impact des nuisances sonores sur la population, il existe pourtant des solutions, à l’instar des radars à bruits afin de sensibiliser sur les effets de la vitesse, des revêtements phono-absorbants des routes, de la réduction de la vitesse maximum en ville. « Lausanne est devenue la première ville de Suisse à mettre à l’enquête une réduction de la vitesse à 30 km/h la nuit avec l’objectif de limiter les nuisances sonores, souligne Christelle Benaglia, directrice administrative à Unisanté, et qui a travaillé activement pour la modération du trafic routier en ville de Lausanne. Une telle mesure reste peu onéreuse à mettre en œuvre et réduit l’impact sonore du trafic de 2 voire 3 décibels, ce qui suffit à diminuer de moitié la perception de ce type de bruit. »
LAURENT GILLIERON / KEYSTONE
Un capteur de bruit routier, indiquant « Merci » ou « Bruit » selon le nombre de décibels émis par le véhicule qui passe, est un bon moyen de permettre aux automobilistes de se rendre compte de l’ampleur de leur impact sonore.
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TEXTE : SYLVAIN MENÉTREY ILLUSTRATION : ANA YAEL POUR IN VIVO
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TENDANCE
RELATIONS SEXUELLES : NÉANT
L’inactivité sexuelle est en hausse chez les hommes de moins de 30 ans. Cette tendance observée aux États-Unis et en Allemagne ne semble toutefois pas concerner les femmes. Explications.
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es spécialistes en santé sexuelle se sont traditionnellement inquiétés des comportements à risque chez les jeunes, ou d’une initiation trop précoce à la sexualité. Plusieurs études internationales récentes ont de quoi les rassurer. Selon une recherche américaine, la part des jeunes hommes qui n’ont pas eu de relations sexuelles sur un an a augmenté d’environ 60% depuis l’an 2000. Ils seraient désormais près d’un jeune sur trois inactifs sexuellement dans la tranche d’âge 18–24 ans. Même constat en Allemagne, où la part des jeunes hommes entre 18 et 30 ans qui n’ont eu aucune relation sexuelle au cours de l’année était de 20% en 2016, contre 7,5% en 2005. Ce phénomène ne semble pas concerner les femmes, aux États-Unis du moins, où leur taux d’inactivité est resté stable autour de 20%. « Ce découplage pourrait s’expliquer par le fait que les jeunes femmes ont des relations sexuelles avec des hommes d’autres classes d’âge », avance Yara Barrense-Dias du Groupe de recherche sur la santé des adolescents d’Unisanté à Lausanne.
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LE SEXE EN DISTANCIATION PHYSIQUE
2020 n’a pas été une année érotique, et 2021 ne semble pas non plus favoriser l’activité sexuelle. Les derniers mois ont été marqués par les multiples confinements et les impératifs de distance sociale.« Comme dans d’autres domaines, Internet a pris une place grandissante, observe la sexologue Yara Barrense-Dias. Le sexting a aussi certainement été très utilisé. Mais après un match sur Tinder, on fait quoi quand on est confiné ? » Réponse prochainement grâce à une étude que la chercheuse d’Unisanté mène sur le vécu des adolescents pendant le confinement.
Cette chercheuse a elle-même codirigé une étude sur la sexualité des jeunes Suisses en 2017, qui a montré un intérêt pauvre ou inexistant pour la sexualité chez une part de 6% d’hommes de 24 à 26 ans. « Comme la précédente étude portant spécifiquement sur la sexualité des jeunes en Suisse date de 1995 et qu’elle était menée selon des critères très hétéronormés, nous n’avons pas de recul historique », précise-t-elle. Comment expliquer ces évolutions en Occident alors que la génération montante profite d’un bon accès à la contraception et à l’avortement, que le sida est devenu une maladie chronique et que la drague en ligne facilite les rencontres ? Faut-il s’alarmer de cette sexualité en berne, alors que de nombreuses études prouvent que le sexe consenti est un facteur de bonheur ?
« Ce découplage pourrait s’expliquer par le fait que les jeunes femmes ont des relations sexuelles avec des hommes d’autres classes d’âge » Yara Barrense-Dias
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TENDANCE
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TENDANCE
Une augmentation des cas de dépression et d’anxiété
ORIENTATION ASEXUELLE
pourrait expliquer une
Lou*, 18 ans, n’a jamais eu de relation sexuelle. Il se définit comme asexuel aromantique, c’est-à-dire dépourvu d’attirance sexuelle et sentimentale. Il a pourtant un « partenaire », rencontré il y a quelques mois dans un groupe de jeunes d’une association de diversités sexuelles. Leur relation est de l’ordre de « l’amitié particulière ». Lou approche la sexualité et les sentiments par l’intellect : « J’aime les choses carrées. J’ai besoin de catégoriser des comportements. » Il a découvert à 15 ans la vidéo d’un youtubeur sur l’asexualité qui semblait correspondre à sa situation. « Comme les orientations se fixent durant l’adolescence, je doute que la mienne évolue. » Passionné de sciences, de game design et de modélisme, il s’estime comblé.
baisse de libido.
L’une des hypothèses avancées par les chercheurs américains pour expliquer ce reflux serait la proportion croissante de personnes célibataires. « Nous remarquons en effet qu’une relation stable s’accompagne d’une fréquence sexuelle plus soutenue », confirme Yara Barrense-Dias. Le couple resterait donc l’espace privilégié de l’expression de la sexualité, en dépit d’une société où le plan cul est à portée de clic. « En cabinet, je vois pas mal de gens qui prônent l’anarchie relationnelle, mais j’ai l’impression que le mythe romantique selon lequel on va trouver la personne de sa vie n’est pas mort », confirme Zoé Blanc-Scuderi, sexologue et directrice du centre spécialisé dans les questions d’intimité Sexopraxis. Selon elle, ce projet de grand amour exclusif serait contrecarré par les incertitudes du monde contemporain, qui s’accompagnent d’une difficulté à se projeter dans l’avenir, et donc dans un couple. Les auteurs américains observent d’ailleurs une augmentation des cas de dépression et d’anxiété chez les adolescents et les jeunes adultes qui pourrait expliquer une baisse de libido. Les hommes en situation économique précaire sont également moins actifs sexuellement. Les jeunes découvrent la sexualité dans un monde moins normé que les générations précédentes. « Avec la nouvelle vague de féminisme, la redéfinition des rôles de genre
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*Prénom d’emprunt
et la sortie du modèle hétérosexuel, les hommes ne doivent plus prouver leur masculinité en couchant avec le maximum de partenaires. En même temps, ces changements peuvent aussi générer de l’insécurité », analyse la sexologue. À cela s’ajoute le basculement de la drague en ligne qui peut renforcer les inégalités d’accès aux rencontres. Typiquement, l’algorithme de Tinder favorise les profils qui ont du succès au détriment des autres. « Les apps impliquent donc qu’on « matchera » plus avec certaines personnes belles, riches, diplômées, blanches, etc. », résume la sexologue. La limite des études citées tient au fait qu’elles réduisent la sexualité à la pénétration, alors que la compréhension de celle-ci s’est largement étendue. « Une possible hypothèse serait une sexualité plus individuelle avec une autonomie facilitée par l’accès à la pornographie. Ce sont des pratiques qui permettent de se connaître, de savoir ce que l’on aime, pour avoir une sexualité épanouie plus tard », analyse Yara Barrense-Dias. D’autres facteurs comme le stress dans les études, ou des jeunes qui logent plus longtemps chez leurs parents en raison d’études prolongées sont avancés par la chercheuse. L’asexualité (voir encadré), qui correspond à une absence durable de besoin de s’engager dans une relation sexuelle, ne concerne que 1% de la population mondiale. C’est donc davantage du côté des conditions de vie et de l’évolution des pratiques sexuelles ‒ qui s’exercent autrement, par procuration, ou plus tardivement ‒ qu’il faut chercher les réponses à cette impression de sexualité plus frugale. /
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PETITE HISTOIRE DES VISITES À L’HÔPITAL TEXTE :
La possibilité pour la famille de se rendre au chevet d’un malade n’a pas toujours été une évidence. Retour historique sur une pratique qui a beaucoup évolué au cours des siècles.
BERTRAND TAPPY
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orsqu’en octobre 2020, le CHUV décide d’interrompre les visites de proches pour des raisons de sécurité sanitaire liées au covid, la décision semble logique, presque évidente. Mais on ne peut que remarquer le paradoxe qu’une telle mesure soit prise au moment où il a été acquis de manière indiscutable que voir ses proches améliore grandement la situation des patients.
Accueillir, mais séparer Il aura en effet fallu de nombreux siècles pour en arriver là. Les traitements de l’époque antique se faisaient à domicile ou sur les champs de bataille et au Moyen-Âge, les hospices n’accueillaient pas beaucoup de visites de proches. « Les établissements de soins médiévaux remplissaient
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plusieurs missions, précise Vincent Barras, de l’Institut des humanités en médecine : accueillir les pèlerins, répartir l’aumône et soigner les pauvres qui étaient malades. Certains établissements cumulaient les trois fonctions, mais ce n’est qu’au XIXe siècle que l’hôpital fut finalement lié à l’État, qui y voyait un outil essentiel de prise en charge médicale de la population. »
L’hôpital médiéval – inspiré en grande partie par ce que les Croisés avaient pu découvrir dans les pays musulmans, bien plus avancés – n’est donc pas encore à proprement parler un lieu de soins strictement médicaux. En accueillant essentiellement les pauvres et les orphelins, il s’occupe avant tout du « salut de leur âme ». Et dans ce cadre où l’on s’occupe des gens mis à l’écart, les visites de proches ne sont pas une préoccupation cruciale. « L’hôpital à l’ancienne remplit une fonction de contrôle de diverses catégories de la population, tout en subvenant à leurs besoins essentiellement hôteliers et alimentaires, rappelle Vincent Barras. C’est d’ailleurs de là que viennent les fameux « vins des hospices », que l’on boit encore aujourd’hui, ainsi que certaines terres, dédiées alors à l’agriculture, qui sont encore en possession des hospices cantonaux aujourd’hui. »
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Du côté lausannois, c’est en 1760 qu’est fondé le premier véritable hôpital, au sens moderne du terme, ouvert aux malades démunis. Les soins sont accordés à tous. « Les besoins sont pris en charge tant par la direction de l’hôpital que par les proches – qui apportent le cas échéant la nourriture et les bûches de bois pour le feu, et peuvent donc venir au chevet des malades, mais de manière régulée », poursuit Vincent Barras.
Subvenir aux besoins de tous Depuis deux siècles environ, l’hôpital est devenu un endroit où l’on entre et dont on sort de manière régulière, avec des espaces de plus en plus cloisonnés en fonction de l’évolution des techniques et des thérapeutiques. L’hygiène hospitalière va rapidement prendre de l’importance, pour devenir une préoccupation cruciale telle que nous la connaissons aujourd’hui. Un essor marqué par l’importance grandissante de la technologie et des savoirs : rapport technique au corps du patient, explication scientifique des différents phénomènes de la maladie… Le mariage parfois mouvementé des origines religieuses de l’hôpital à l’ancienne et des aspirations scientifiques de l’hôpital moderne se transforme en intégrant des notions comme les « microbes », ce qui va exercer une influence déterminante sur la façon dont les proches seront désormais tolérés dans le bâtiment hospitalier.
1760
Création du premier véritable hôpital lausannois. Les proches des malades peuvent leur apporter de la nourriture.
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Retourner dans la ville « La question de la déshospitalisation a également agité – et agite toujours – le monde médical, continue Vincent Barras. Accompagnant l’amélioration de nos connaissances, toute une liste d’hôpitaux spécialisés ont été créés : maternité, gériatrie, orthopédie, hôpital des aveugles… Le monde hospitalier est aujourd’hui une longue série de cas particuliers. Et derrière l’évolution des traitements, c’est aussi le visage de l’hôpital qui est modifié pour tenir compte des questions d’aération, de nettoyage et d’accès. La situation sanitaire actuellement liée au covid apporte également son lot de nouvelles mesures. L’hôpital est, et demeurera, un lieu à risque pour le développement des infections. ». Mais il serait faux de penser que l’histoire de l’hôpital est une lente progression, linéaire et régulière. « Au contraire, il s’agit plutôt d’un processus par discontinuités, argumente Vincent Barras. L’hôpital actuel pense bien sûr à l’importance des visites des proches. Mais nous assistons aujourd’hui à un retour partiel vers la situation d’avant l’hôpital moderne, avec l’augmentation des consultations sur le terrain, ou encore les soins à domicile. Telle est la logique qui prévaut aujourd’hui : garder le contact avec ses proches et son environnement, et réduire au minimum le temps d’hospitalisation pour que le malade puisse retourner rapidement chez lui. »
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2020
Le CHUV interrompt temporairement les visites des proches pour des raisons sanitaires liées au covid.
Un phénomène toujours étudié Les répercussions positives liées aux visites de proches (sauf cas particulier) font aujourd’hui la quasi-unanimité au sein de la communauté médicale. Et puisque les connaissances scientifiques se sont améliorées, il est possible d’adoucir plus rapidement qu’auparavant – mais toujours progressivement – les conditions de visite, en faisant mieux circuler les informations au sein de la communauté scientifique. Depuis le mois d’octobre 2020, les conditions de visites aux patients en soins intensifs ont pu être réintégrées, tout en respectant scrupuleusement les règles sanitaires. « Nous ne procédons pas à un arrêt complet des visites. Celles-ci restent cependant en règle générale limitées en nombre (1 personne par patient) et en durée (environ 1 heure), avec une attention particulière portée au respect des gestes barrières, explique Thierry Szostek, infirmier-chef de service au Service de médecine intensive adulte du CHUV. En fonction de certaines situations (fin de vie, gravité de la situation, durée de séjour longue), les critères sont moins restrictifs. »
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Depuis la première vague, les outils technologiques ont également été mis à contribution pour maintenir le lien entre les patients – le plus souvent âgés – et leurs proches. Les tablettes tactiles ont ainsi été utilisées pour envoyer des images aux proches en soins intensifs, et certaines d’entre elles ont même été prêtées à des seniors dans le cadre d’une étude*. Menée entre autres à l’Unité de soins aigus de gériatrie, dirigée par la Dre Patrizia D’Amelio, l’étude devrait livrer ses premiers résultats au moment où nous bouclons le magazine. « Nous allons évaluer l’anxiété moyenne, le ressenti de la douleur et la peur de mourir des personnes privées de visites qui utilisent les appels vidéo pour garder le contact, et faire de même avec ceux qui n’utilisent que le téléphone », expliquait Patrizia D’Amelio dans le journal 24 Heures. Le processus est toujours en marche…/ *« Fighting against Social Isolation in times of pandemic Covid-19 : the role of technology in Elderly patients ». Plus d’informations sur www.invivomagazine.ch
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LABO DES HUMANITÉS
RECHERCHE
Dans ce « Labo des humanités », In Vivo vous fait découvrir un projet de recherche de l’Institut des humanités en médecine (IHM) du CHUV et de la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL.
TEXTE : ELENA MARTINEZ
CHRISTEL GUMY
Historienne des sciences et de la médecine, chercheuse associée à l’IHM.
La Direction générale de la santé (DGS) du canton de Vaud vient de mandater l’Institut des humanités en médecine pour effectuer une recherche historique sur la gestion au quotidien de la pandémie de Covid-19 par les autorités sanitaires. Cette étude, menée par les historiens Christel Gumy et Vincent Barras, vise à établir l’anatomie des décisions, communications et autres données factuelles ponctuant la période de début janvier à fin avril 2020.
tableau, en donnant vie et sens aux données factuelles. L’éthique est également convoquée. L’Académie suisse des sciences médicales vient de financer une recherche sur les aspects éthiques de la réponse politique à la pandémie, en particulier l’utilisation de données digitales de santé (SwissCovid), supervisée par Caroline Brall de l’Université de Zürich et à laquelle participe Ralf Jox de l’IHM.
L’expérience vécue de cette pandémie a suscité par ailleurs de nombreuses recherches au sein d’Unisanté, faisant appel aux sciences humaines et sociales en médecine. Mentionnons les études d’Ingrid Gilles et Isabelle PeytremannBridevaux sur la compréhension et les croyances liées au Covid-19 par le grand public, ainsi que sur l’expérience des Documenter de façon rigoureuse les faits, professionnels de santé, celle également les placer dans leur contexte politique et de Joan-Carles Suris et ses collègues sur juridique spécifique, permet de produire le vécu des ados et de leurs parents une description approfondie de ce durant la pandémie, ou encore le projet moment de crise et de prendre une FNS mené par Nolwenn Bühler, anthropodistance critique pour appréhender une logue et chercheuse associée à l’IHM, période marquée par l’instabilité, sous la supervision de Patrick Bodenmann l’accélération et l’incertitude tant épidémio- et Murielle Bochud, sur les expériences logique que politique. quotidiennes de Covid-19 au prisme des conditions de vie de populations « Cette recherche d’histoire immédiate particulièrement vulnérables dans le permet de créer une narration à partir canton de Vaud. d’une multitude de chiffres et de graphiques souvent sans légendes », explique Parce qu’elle exacerbe à des degrés Christel Gumy, docteure en histoire des divers les risques de difficultés pour sciences de l’UNIL. Des entretiens avec chacun et chacune sur le plan social, les principaux protagonistes de la gestion psychique ou encore économique, la crise de la crise (médecin cantonal, directrice pandémique mobilise les humanités en de la santé, etc.) viendront compléter ce médecine, à Lausanne comme ailleurs. / 48
ISTOCK, DR
Le Covid-19 vu par les sciences humaines en médecine
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CHRONIQUE
ÉLOI LAURENT Professeur d’économie à l’Université Stanford (Californie)
Faire converger santé et environnement
Comment remettre la santé des personnes au cœur des politiques publiques ? D’abord, en reconnaissant que le but ultime du système économique n’est pas la croissance de long terme, déterminée par le produit de la population et du progrès technique, mais la santé de long terme, déterminée par le produit de la population et de son espérance de vie. Ensuite, en inscrivant cet objectif général dans la réalité chaque jour plus tangible de notre siècle de l’environnement, ce qui suppose de passer d’un rapport instrumental et utilitariste aux écosystèmes et aux êtres de nature à une relation d’interdépendance et de coopération. Pour cela, une première démarche consiste à faire évoluer la discipline économique de l’analyse coûts-bénéfices à l’analyse co-bénéfices. (…)
humaine sont prépondérants parmi ces co-bénéfices. Si la France décidait enfin de baisser drastiquement ses émissions de carbone en développant les énergies renouvelables en lieu et place des énergies fossiles, elle gagnerait sur les deux tableaux, climat et santé (…). Étant donné que les facteurs de risque environnementaux, tels que la pollution de l’air, de l’eau et du sol, les expositions aux produits chimiques, le changement climatique et les rayons ultraviolets, contribuent à plus de 130 maladies humaines, la notion de co-bénéfices santé-environnement est intuitive pour tous les habitants de la planète : l’amélioration de l’environnement (ou le coup d’arrêt mis à sa dégradation) est un levier pour améliorer la santé. (…)
Selon les données de l’Université de Chicago Les co-bénéfices sont définis dans la littéra- (projet AQLI), la Chine aurait réussi, entre ture environnementale comme des avantages 2013 et 2018, à réduire la pollution urbaine de collatéraux liés à la réduction des émissions de 40% (représentant à elle seule près des trois gaz à effet de serre en vue de l’atténuation du quarts de la réduction de la pollution aux partichangement climatique, tels que l’amélioration cules fines dans le monde sur la période). Tandis de la qualité de l’air, l’innovation technologique que les émissions de carbone se sont stabilisées, ou la création d’emplois. Les gains pour la santé les Chinois pourraient voir leur espérance de vie augmenter de deux ans du fait de ces efforts.
AGENCE ANNE & ARNAUD
PROFIL
Éloi Laurent, né en 1974, est un économiste français. Il enseigne à Sciences Po Paris et à l’Université de Stanford (Californie). Il est l’auteur de nombreux ouvrages, notamment de « Et si la santé guidait le monde ? L’espérance de vie vaut mieux que la croissance » paru en 2020 aux ÉDITIONS Les liens qui libèrent (LLL), dont est extrait le texte ci-dessus.
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Cette convergence entre santé et environnement doit figurer au premier rang des plans de réponse à la crise économique actuelle. L’OMS évoque à cet égard la nécessité d’une « reprise saine » : « Tenter d’économiser de l’argent en négligeant la protection de l’environnement, la préparation aux situations d’urgence, les systèmes de santé et les filets de sécurité sociale, s’est avéré être une fausse économie. » Non, décidément, il n’y a pas d’arbitrage entre santé et économie. /
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TEXTE : ANDRÉE-MARIE DUSSAULT
FAUT-IL VRAIMENT CRAINDRE UNE INVASION DES MALADIES TROPICALES ? L’APPARITION DANS NOS RÉGIONS DU MOUSTIQUE-TIGRE PEUT SUSCITER DES CRAINTES DE PROPAGATION DU CHIKUNGUNYA EN SUISSE. LES EXPERTS EN ÉPIDÉMIOLOGIE SE VEULENT CEPENDANT RASSURANTS.
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n 2017, l’Italie a été confrontée à une mauvaise surprise : une épidémie de chikungunya, infectant quelques centaines d’individus en Émilie-Romagne, à Anzio, en Calabre et à Rome. De tels risques de voir apparaître des maladies tropicales existent-ils CORPORE SANO
en Suisse également ? Une des conséquences du réchauffement climatique est effectivement la multiplication des terrains chauds et humides, qui sont favorables aux moustiques, observe Christoph Hatz, professeur à l’Institut tropical et de la santé publique suisse (Swiss TPH) à Bâle. « Mais les cas de transmission autochtones du chikungunya et de la dengue demeurent rares dans le sud de l’Europe. » Certes, le moustique-tigre (Aedes albopictus), originaire d’Asie du Sud-Est, vecteur potentiel d’une vingtaine de virus dont ceux de la dengue, de Zika et du chikungunya, est importé depuis une vingtaine d’années au sud de l’Europe, et un peu au Tessin, reconnaît-il.
Il est venu par camion, bateau et avion, en raison de la mobilité et des échanges commerciaux internationaux accrus. « Au Tessin, sa densité reste cependant mineure, et le risque qu’il soit à l’origine d’une épidémie est très faible. Pour l’instant, même s’il a récemment été identifié à Genève et à Monthey, on ne l’a pas vu s’installer au nord des Alpes. » Selon Swiss TPH et le groupe de travail qui monitore le moustique-tigre au Tessin, il est clair que cet insecte s’est adapté au climat européen et s’est répandu en Suisse, affirme le professeur, mais il n’y a aucun signe de transmission. Il rappelle que le moustique n’est pas en soi porteur du virus
EYE OF SCIENCE/SCIENCE PHOTO LIBRARY
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Un moustique-tigre (Aedes albopictus) photographié de face.
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PROSPECTION
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« Il y a très peu de danger pour
de la dengue, du chikungunya ou du Zika ; il ne peut le transmettre que s’il a piqué une personne déjà infectée. PAS D’INVASION EN VUE À l’heure actuelle, tous les cas de maladies tropicales en Suisse sont importés, soutient-il. « Il y a très peu de danger pour la population locale ; il n’y a pas ici les conditions requises pour leur propagation, notamment les moustiques ou des conditions d’hygiène précaires. Il y aura certainement des transmissions dans notre pays un jour, dans quelques années, mais pas en mode endémique. » S’il y avait des cas de transmission en Suisse, ça se saurait très rapidement, considère-t-il. Donc pour l’instant, l’idée selon laquelle les risques de transmission en Suisse s’amplifient à cause du changement climatique est une interprétation toute théorique, estime-t-il, admettant toutefois qu’avec l’élévation de la température, il y aura plus de moustiques et donc plus d’infections. « Mais nous avons des moyens efficaces pour les supprimer. Pas seulement afin d’éviter les maladies qu’ils peuvent transmettre, mais aussi leur nuisance. Ces moustiques-tigres sont plus agressifs que nos bestioles autochtones. » Les conditions climatiques qui changent peuvent éventuellement CORPORE SANO
la population locale. Il y aura certainement des transmissions dans notre pays un jour, dans quelques années, mais pas en mode endémique. » Christoph Hatz
favoriser certaines maladies et en défavoriser d’autres, explique Serge de Vallière, médecin infectiologue au CHUV et à Unisanté. « Il est très difficile de prédire les effets de l’augmentation de la température. » Par exemple, un climat plus sec veut dire moins de points de collecte d’eau, et donc moins d’endroits pour le dépôt des œufs de moustique. Au contraire, plus de pluies entraînera une prolifération de leur reproduction. « Certaines régions – là où sévissent les sécheresses – vont voir disparaître certaines maladies à cause du recul de la densité des populations de moustiques, tandis que d’autres vont en voir apparaître de nouvelles. » Qu’en est-il de l’impact de la diminution de la biodiversité ? « Je n’ai pas connaissance que cela puisse favoriser l’émergence d’épidémies », avance le médecin. Il signale par contre la concentration démographique dans les grandes PROSPECTION
agglomérations où les gens vivent en promiscuité, ainsi que le manque d’hygiène comme éléments favorisant l’émergence de maladies infectieuses et leur mutation éventuelle en des formes plus virulentes. « Globalement, dans les pays pauvres, la démographie explose, les grands centres urbains grossissent et les populations rurales migrent en ville ; ce sont là des facteurs qui favorisent l’incubation de maladies infectieuses. » Il souligne que certaines maladies infectieuses sont plus prévalentes dans les pays pauvres, comme la tuberculose ou la rougeole, plus pour des raisons socio-économiques que liées au climat ; les habitants n’ont pas accès à la prévention, aux soins, aux vaccins, à des conditions hygiéniques favorables, à de l’eau potable. « Des millions de personnes n’ont pas d’eau propre, ce qui est source de maladies gastro-intestinales que l’on attrapait encore chez nous il y a cent ans. »
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QUAND LA MALARIA SE TRANSMETTAIT EN SUISSE La malaria (aussi appelée « paludisme », dérivé de « palud » qui signifie « marais », où les œufs des moustiques se concentrent), a sévi en Europe, notamment en France, en Espagne, en Italie et en Roumanie. En Suisse, elle était encore active jusque dans les années 1860–1870.
Selon lui, la malaria aurait peut-être disparu spontanément en Suisse. Il a remarqué, tant dans le Valais que dans le canton de Vaud, et dans d’autres régions du pays, qu’elle avait disparu malgré la persistance générale des agents capables de transmettre cette maladie.
Parmi les causes qui ont favorisé sa disparition, les médecins citent les travaux d’endiguement des cours d’eau et l’assainissement des plaines, ainsi que l’amélioration de l’hygiène en général, renforçant la résistance immunitaire de la population. Bruno Galli-Valerio (1867–1943), médecin et parasitologiste italien, a analysé le paludisme dans la vallée du Rhône, en Suisse et en Italie.
Il avance encore que la modification de la température, en très légère augmentation, ainsi que l’amélioration des moyens de transport, notamment grâce aux chemins de fer qui ont rendu moins chères les denrées alimentaires, améliorant l’état de santé de la population, auraient pu contribuer à l’éradiquer. Il indique aussi que la quinine aurait joué un rôle décisif, rendant moins fréquente l’infection des moustiques et la transmission de leurs parasites aux humains.
300 CAS CHAQUE ANNÉE EN SUISSE De nombreuses idées fausses circulent à propos des risques d’épidémies, fait valoir le médecin. « Une épidémie d’une maladie tropicale ne pourrait pas se déclencher ici ; les conditions de leur transmission n’existent pas », explique-t-il, ajoutant que ces pathologies ne sont pas comme le SARS-CoV-2, qui peut émerger n’importe où. Dans son travail d’infectiologue du CHUV, Serge de Vallière observe que « les maladies tropicales sont rapportées par des voyageurs, essentiellement d’Afrique ». Il en sait quelques chose ; son lot quotidien est la malaria (paludisme), les virus Zika, de la dengue, du chikungunya, et les maladies gastro-intestinales causées par des parasites, des virus et des CORPORE SANO
bactéries, transmis par l’eau ou des aliments contaminés. C’est pour une part la migration qui est à l’origine de ces maladies tropicales diagnostiquées en Suisse. « Par exemple, sur les quelque 300 cas de malaria recensés chaque année (sauf en 2020), environ la moitié arrive via des personnes migrantes et réfugiées. » D’autre part, ses patients sont des résidents qui ont contracté une maladie exotique en séjournant dans une région tropicale. « Cela va du baroudeur à la femme d’affaires, de la touriste au chercheur », détaille-t-il. Souvent, ces personnes ignoraient les risques ou elles les connaissaient, mais n’ont pas respecté les règles. « Ça peut être difficile de porter des habits longs lorsqu’il fait 40 °C et qu’on souhaite aller à la plage », convient-il. PROSPECTION
Les résidents suisses s’aventurent beaucoup dans les zones endémiques. En règle générale, ils sont plus d’un million à s’exposer à ces maladies dans des régions à risque chaque année. En 2020 cependant, à cause des restrictions de voyage imposées par la pandémie de Covid-19, le nombre de voyageurs a chuté et celui des maladies tropicales aussi. L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) a enregistré une fraction des cas recensés habituellement. Entre le 1er janvier 2020 et fin décembre, 11 cas de chikungunya, 73 de dengue et 126 de malaria ont été rapportés, contre respectivement 41, 257 et 286 à la même période l’année précédente. /
Lire aussi l’article sur l’émergence des virus en p. 21
TEXTE : AUDREY MAGAT IMAGE : GUILLAUME PERET / LUNDI13
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SAUVEGARDER LA FERTILITÉ Les femmes qui souhaitent avoir des enfants plus tard peuvent recourir à la congélation de leurs ovocytes. Une méthode efficace mais coûteuse.
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n Suisse, l’âge moyen du TÉMOIGNAGE premier enfant « C’est un moyen recule : selon de gagner du l’Office fédéral temps, de repousde la statistique ser la pression de l’horloge biolo(OFS) en 2019, gique. » Marie* a les femmes toujours souhaité avaient 32 ans en avoir des enfants, moyenne lors de mais lorsqu’elle divorce, ses plans leur première grossesse, alors sont bouleversés. À 36 ans, elle que cet âge était choisit donc de 29 ans en 2000. Physiologiquement, de congeler ses ovocytes. « Je ne le pic de performance reproductive des voudrais pas être femmes demeure cependant autour de coincée plus tard, 25 ans. Il chute ensuite à partir de 35 ans, à regretter de ne puis, après 43 ans, les chances naturelles pas avoir pris cette précaution quand sont faibles. « Il y a aujourd’hui une c’était possible, désynchronisation entre le moment idéal explique la Suisse pour avoir un enfant du point de vue de la romande. Dans fertilité et celui de la situation économique l’idéal, j’aimerais ne jamais les utiliet sociale », constate Nicolas Vulliemoz, ser et concevoir de médecin responsable de la médecine de manière naturelle. la fertilité et endocrinologie gynécologique Mais c’est une au CHUV. Pour lutter contre l’implacable forme d’assurance, horloge biologique, les femmes sont donc qui enlève aussi de plus en plus nombreuses à recourir à la l’angoisse de devoir trouver quelqu’un congélation de leurs ovocytes. Le principe : au plus vite. » les ovules sont prélevés puis conservés pour *nom d’emprunt servir en cas d’une infertilité future. CORPORE SANO
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« UN CADEAU POUR L’AVENIR » La préservation des ovocytes peut être préconisée en cas de cancer, de maladie auto-immune voire d’endométriose sévère, lorsque les médecins savent que le traitement ou la maladie va dégrader la fertilité de la patiente. L’autre raison est la congélation dite « à but social », aussi appelée « social freezing ». Cela concerne les femmes non malades qui souhaitent congeler leurs ovocytes, idéalement avant leur dégradation naturelle due à l’âge. En Suisse, toutes raisons confondues, ce sont près de 400 femmes qui ont fait congeler leurs ovocytes en 2017, selon la Fondation pour l'évaluation des choix technologiques TA-Swiss. La majorité des femmes qui ont opté pour la congélation ont plus de 35 ans, sont célibataires et ont un haut niveau d’instruction. Mais contrairement aux idées reçues, ce n’est pas forcément en raison de leur carrière. « La plupart sont des femmes seules, qui n’ont pas trouvé un partenaire parce qu’elles sont professionnellement très occupées ou viennent de vivre la rupture d’une longue relation, parfois justement à cause de la question des enfants, explique Dorothea Wunder, spécialiste en médecine reproductive au Centre pour la procréation
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Marie (nom d'emprunt), 36 ans, a choisi de faire congeler ses ovocytes. « C'est une forme d'assurance », dit-elle.
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LA VITRIFICATION
médicalement assistée (CPMA) à Lausanne. Elles ont pris conscience de leur fertilité décroissante, éprouvent un désir d’enfant important parallèlement à un désespoir profond d’être seules, et veulent s’assurer d’avoir le temps de retrouver un partenaire. La congélation libère ces femmes de la pression biologique et beaucoup d’entre elles ont finalement des enfants de manière naturelle. » Anna Raggi, cofondatrice du centre de fertilité Fertisuisse ouvert en 2014 à Olten (SO), estime ainsi que pour le moment, seulement 10% des femmes qui ont fait congeler leurs ovocytes les utiliseront par la suite. Selon la loi fédérale sur la procréation médicalement assistée (LPMA), la période de conservation est limitée à cinq ans, renouvelable une fois pour cinq ans, la durée totale maximale étant de dix ans. Plus généralement, la pratique se démocratise dans les pays occidentaux. En Grande-Bretagne, la demande pour la cryoconservation a triplé entre 2008 et 2013 selon une étude scientifique anglaise. « C'est un cadeau que l'on se fait pour son avenir, considère Anna Raggi, qui constate une augmentation des demandes d’information. Les chiffres suisses sont encore indisponibles puisque l’enregistrement du nombre de cryoconservations d’ovocytes à but social est effectif seulement depuis 2020 dans le registre Fivnat, registre national qui collecte les données concernant la FIV en Suisse.
Le procédé de cryoconservation des ovocytes consiste à stimuler le développement de follicules au niveau des ovaires par des injections afin d’obtenir des ovocytes mûrs. Ils sont prélevés sous échographie grâce à une ponction par voie transvaginale sous anesthésie, puis isolés de leur liquide et congelés instantanément par vitrification. Ils sont ensuite stockés dans de l’azote liquide à -196° C. Leur taux de survie après décongélation est supérieur à 90%. « La technique de vitrification est révolutionnaire et peu délétère sur les ovocytes, explique Nicolas Vulliemoz responsable de la médecine de la fertilité et endocrinologie gynécologique au CHUV. Mais les chances de succès vont dépendre du nombre d’ovocytes prélevés et de l’âge de la patiente au moment de la congélation. » L’idéal, physiologiquement, est de congeler des ovocytes jeunes.
ENCORE LOIN DE LA SOLUTION MIRACLE La technique de vitrification (voir encadré) des ovocytes peut sembler une solution quasi miraculeuse pour les femmes, mais la technique n’est pas infaillible, notamment parce que le nombre d'ovocytes que possède une femme est compté. À la naissance, une femme a près d’un million CORPORE SANO
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d’ovocytes immatures. À 30 ans, il ne reste plus que 12% de ce stock, à 40 ans plus que 3% selon une étude menée en 2017 par la Commission nationale d’éthique dans le domaine de la médecine humaine (CNE) instaurée par le Conseil fédéral. Ainsi, à 35 ans, pour 15 ovocytes congelés, les chances futures d’avoir un bébé sont de 83%. À 43 ans, les chances de succès chutent à 20%, d’autant plus qu’il est alors difficile d’obtenir 15 ovocytes en un prélèvement avec une seule stimulation. L’âge diminue donc la fertilité et ainsi les chances de grossesse. « On voit beaucoup de couples où la patiente a plus de de 40 ans, mais passé cet âge, quelle que soit la technique, les chances de succès sont faibles, explique Nicolas Vulliemoz responsable de la médecine de la fertilité au CHUV. La qualité des ovocytes diminue avec l’âge, que ce soit pour une grossesse naturelle ou pour la FIV. Le risque d’aneuploïdie, soit le risque d’anomalie chromosomique de l’embryon, est alors plus élevé, augmentant notamment le risque de fausse couche. » Ainsi, statistiquement, les femmes qui ont 40 ans lors du prélèvement des ovules ont un risque de fausse couche 25 à 30% plus élevé que les femmes de 25 ans, relève l’étude de la CNE. La qualité du sperme diminue aussi en fonction de l’âge mais l’effet sur la fertilité est bien moindre que la baisse de qualité des ovocytes. La Suisse n’a pas fixé d’âge maximum pour les femmes qui souhaitent avoir un enfant, contrairement à d’autres pays voisins qui fixent la restriction en général à 50 ans. La réglementation suisse estime plutôt qu’étant donné qu’une femme ne peut plus avoir d’enfant à partir de ses 45 ans en moyenne, la limitation se fait naturellement, d’autant plus en sachant que le don d’ovocytes n’est pas autorisé. Pour fixer
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DON DE GAMÈTES ET TOURISME MÉDICAL
néanmoins un âge adéquat, la loi fédérale sur la procréation médicalement assistée (LPMA) stipule que les parents doivent en principe être encore en vie à la majorité de leur enfant. Au centre Fertisuisse, l’âge maximal pour démarrer une FIV est 45 ans, et pour la seule récolte d’ovocytes pour une congélation à but social (sans raison médicale), elle devrait généralement être effectuée avant 40 ans. LES OBSTACLES À LA CONGÉLATION « On reçoit de plus en plus de demandes, notamment parce que le sujet de la fécondation in vitro n’est plus tabou et fait partie de la vie de beaucoup de familles, de près ou de loin, remarque Nicolas Vulliemoz du CHUV. Mais après les explications du processus et surtout des coûts, de nombreuses patientes renoncent. » En effet, cette préservation de la fertilité se révèle particulièrement onéreuse. Il faut compter entre 5000 et 6000 francs pour le processus de cryocongélation, puis dès la deuxième année environ 250 francs de frais annuels de conservation en laboratoire. Pour être utilisés, ces ovocytes devront ensuite être décongelés puis fécondés in vitro pour être réimplantés dans l’utérus, opération chiffrée à environ 3000 francs. Sachant qu’il faut globalement trois tentatives, l’étude du CNE estime le coût total minimum à 20 000 francs. Pour Nicolas Vulliemoz, « la prochaine étape serait déjà de rembourser la FIV en cas d’infertilité, mais sachant que même la contraception ne l’est pas, je crains que nous soyons encore loin pour le cas de la cryoconservation d’ovocytes à but social ». De plus, l’utilisation des ovocytes congelés doit répondre à des critères précis. Il est ainsi requis d’être un couple hétérosexuel avec une infertilité déclarée, c’est-à-dire qui aura essayé de manière naturelle pendant CORPORE SANO
La Suisse accepte le don de sperme, mais, contrairement aux autres pays européens, pas le don d’ovocytes. L’aspect invasif de ces interventions est généralement l’argument mis en avant pour justifier ce refus. « D’un point de vue éthique, cette différence de traitement constitue une discrimination en Suisse, regrette Nicolas Vulliemoz, responsable de la médecine de la fertilité et endocrinologie gynécologique au CHUV. Les risques actuels de la stimulation ovarienne sont mineurs et la question du danger est devenue caduque. » Selon lui, « il faut également élargir les conditions du don de sperme, notamment aux couples non mariés ». Pour assouvir leur désir d’enfant, certains couples partent à l’étranger pour pratiquer les inséminations artificielles, attirés par les prix compétitifs et des législations moins strictes. « Ce tourisme médical est regrettable. Nous aimerions avoir un cadre clair qui nous autorise à pratiquer ces interventions et à prendre soin de nos patients, ici, en Suisse. »
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douze mois sans résultats. Une femme seule ne pourrait ainsi pas faire appel à un don de sperme pour féconder ses ovocytes décongelés (le don de sperme en Suisse est réservé aux couples hétérosexuels mariés), de la même manière qu’une femme de 40 ans ne pourrait pas privilégier ses ovocytes préservés dix ans plus tôt si elle n’est pas cliniquement infertile, même si ces derniers seraient physiologiquement plus efficaces parce que plus jeunes. UNE SOLUTION CONTROVERSÉE En 2014, Facebook et Apple proposaient à leurs employées de payer pour la congélation de leurs ovocytes. L’idée a alors suscité une vague de polémiques, accusant ces entreprises d’instaurer un climat insidieusement défavorable aux grossesses pour les collaboratrices. « Repousser les limites de la fertilité est une option intéressante mais ce n’est malheureusement pas une solution aux problèmes sociétaux sousjacents, précise Dorothea Wunder, spécialiste en médecine reproductive au CPMA à Lausanne. Cela ne fait que retarder les problématiques existantes. Le changement doit aussi être sociétal pour offrir aux femmes les conditions qui leur permettent d’être mères en concordance à leur fertilité sans que cela freine leur carrière professionnelle. » /
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« QUAND LE SUICIDE FAIT BOULE DE NEIGE » TEXTE : PATRICIA MICHAUD
Lorsqu’une célébrité se donne la mort, le taux de suicide augmente. Un phénomène appelé « effet Werther », qui touche particulièrement les adolescents. Les médias ont un rôle à jouer dans sa prévention.
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u XVIIIe siècle, l’Europe a été le théâtre d’une épidémie un peu particulière. Après la parution du roman Les souffrances du jeune Werther, on assista à une triste vague de suicides imitant celui du héros de Goethe. Trois siècles plus tard, ce phénomène de contagion suicidaire
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– désormais baptisé « effet Werther » – n’a malheureusement pas disparu. D’après une compilation d’études internationales, le passage à l’acte de célébrités est généralement suivi d’une hausse significative du taux moyen des suicides dans une population donnée. Après le décès de l’acteur Robin Williams, qui s’était donné la mort en 2014, les suicides auraient par exemple augmenté de 10% aux États-Unis. Le suicide de l’icône Marilyn Monroe en 1962 aurait pour sa part entraîné une augmentation de 40% des cas à Los Angeles. Quant à la mort du musicien Kurt Cobain en 1994, elle aurait fait gonfler la moyenne de près de 12% en France. « Les mécanismes sous-tendant le suicide mimétique sont encore relativement mal élucidés, explique la pédopsychiatre Carole Kapp. En revanche, on connaît bien les facteurs qui favorisent l’effet Werther. » L’un des plus importants d’entre eux est la glorification de l’acte de la personne décédée par les médias sensationnalistes, qui mettent en avant le suicide comme la seule fin possible à ses souffrances. La spécialiste met par ailleurs en avant le grand rôle que joue l’identification dans la reproduction d’un suicide. « Souvent, la personne qui imite l’acte d’une célébrité a au moins un point commun avec elle. » Une recherche a ainsi montré que la majorité des personnes qui se sont suicidées peu après Robin Williams
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aux États-Unis étaient des hommes de 33 à 40 ans (l’âge qu’avait l’acteur dans ses rôles les plus connus). EFFET PAPAGENO « De façon générale, ce sont les adolescents qui sont les plus vulnérables face à l’effet Werther, car ils se trouvent dans une phase de recherche d’identification et de repères », note Carole Kapp. Elle cite notamment le risque de contagion dans les cas d’un suicide survenu à l’école ou dans l’entourage. Sans surprise, les personnes présentant un trouble psychique ou ayant déjà fait une tentative de suicide sont elles aussi plus exposées. « Mais il est important de rappeler que le suicide est toujours multifactoriel. Une personne ne va pas mettre fin à ses jours uniquement parce qu’elle lit un article décrivant le suicide d’une célébrité à laquelle elle s’identifie ; il faut plutôt parler de facteur précipitant. »
recommandations concernant le traitement médiatique des suicides. « D’une part, il est conseillé d’éviter de valoriser le suicide comme un acte glorieux et de donner le moins de détails possibles sur la méthode et le lieu de l’acte », indique Carole Kapp. « D’autre part, il est judicieux de faire intervenir des experts et, idéalement, de présenter les témoignages de personnes ayant trouvé d’autres issues que le suicide. » Les médias sont par ailleurs invités à faire figurer les numéros d’aide à destination des personnes à risque. Même s’ils ont un rôle privilégié à jouer, les journalistes – tout comme les spécialistes de la prévention du suicide – ne sont pas les seuls à être en mesure de contrer l’effet Werther. « Il est important que davantage de personnes se positionnent comme des acteurs de la prévention du suicide. » Et la psychiatre de citer les autres professionnels de la santé, les enseignants ou encore les travailleurs sociaux. /
Il est possible d’éviter de nombreux suicides en mettant des ressources à la disposition des personnes concernées et en leur montrant qu’il existe d’autres options pour lutter contre la souffrance. On parle alors d’« effet Papageno », du nom du personnage de La flûte enchantée de Mozart. Malheureux en amour, il est sauvé du suicide par des amis lui présentant une autre voie que la mort. RECOMMANDATIONS DE L’OMS Du fait qu’ils constituent une véritable caisse de résonance, les médias ont un rôle clé à jouer. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a d’ailleurs édicté une série de CORPORE SANO
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CANCER DU CÔLON, UN MAL QUI FRAPPE TOUJOURS PLUS TÔT Lié au mode de vie sédentaire, le cancer colorectal est de plus en plus fréquent chez les patients de moins de 50 ans. D’où l’importance de l’examen coloscopique, qui réduit de 60% le risque de décès. TEXTE : ERIK FREUDENREICH
l’écran, Chadwick Boseman a connu la consécration en incarnant le super-héros de Black Panther dans plusieurs films à grand spectacle. L’acteur américain a cependant mené un combat autrement plus difficile contre le cancer du côlon alors qu’il gravissait les marches d’Hollywood. Diagnostiqué en 2016 au stade le plus avancé de la maladie, il n’en a jamais parlé publiquement. Raison pour laquelle l’annonce de son décès le 28 août 2020 a provoqué un nombre record de réactions sur les réseaux sociaux.
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Sa disparition prématurée, à l’âge de 43 ans, a également fait réagir la Colon Cancer Foundation. « La mort de Chadwick Boseman démontre tragiquement l’augmentation de la proportion de jeunes de 20 à 49 ans chez qui on diagnostique un cancer colorectal », a souligné l’institution américaine dans un communiqué. CORPORE SANO
L’incidence de cette affection a progressé de 2,2% par an chez les patients américains âgés de moins de 50 ans, selon une étude de l’American Cancer Society portant sur les années 2011 à 2016. Dans le même temps, la tendance inverse a été observée chez les personnes de 65 ans et plus (-3% par an). Un recul qui s’explique en grande partie par le nombre de personnes qui se soumettent aux tests de dépistage, dont le recours est recommandé une CONSEILS DE fois par décennie dès l’âge de 50 ans. PRÉVENTION L’activité physique, La même étude indique un poids normal et une qu’aux États-Unis, 12% alimentation riche en des cas de cancer fibres (légumes, fruits) colorectal sont désormais diminuent le risque diagnostiqués chez des de cancer colorectal. Certaines études ont aussi personnes de moins de mis en évidence un rôle 50 ans, soit environ bénéfique du calcium 18 000 cas pour la seule et de l’aspirine. année 2020. Le phénomène n’est pas limité au continent américain. « Même si cela demeure rare, nous observons toujours davantage de cas de cancers digestifs
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L’acteur américain Chadwick Boseman, héros du film « Black Panther » sorti en 2018, est décédé en 2020 après quatre ans de combat contre le cancer du côlon.
chez des patients plus jeunes, explique Anna Dorothea Wagner, responsable de la consultation spécialisée en oncologie gastroentérologique au CHUV. Je me rappelle par exemple d’une réunion européenne récente au cours de laquelle plusieurs experts ont rapporté des cas de patientes enceintes. »
MARIO ANZUONI
LES MÉFAITS DE LA SÉDENTARITÉ
LE CÔLON EN QUESTION Le côlon mesure environ 1,5 m de long (pour 4 cm de diamètre) et constitue l’avant-dernière partie du système digestif. Il a pour fonction d’absorber l’eau et certaines vitamines, tout en transportant les selles vers le rectum, où elles sont retenues jusqu’à évacuation.
En Suisse, le cancer du côlon représente environ 10 à 11% des cas de cancers. Il est le troisième plus fréquent tant chez l’homme que chez la femme. Environ 5 personnes sur 100 vont CORPORE SANO
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développer ce type d’affection avant l’âge de 80 ans. Chaque année, cela représente 4000 nouveaux cas, ainsi que 1600 décès.
Le premier facteur de risque pour le cancer colorectal demeure l’âge, suivi par des questions d’ordre génétique ou environnemental. « Nous savons qu’environ 5 à 7% des cancers du côlon ont des causes héréditaires, indique Anna Dorothea Wagner. L’augmentation du nombre de patients dits à « déclenchement précoce » est donc à chercher du côté de causes liées à leur mode de vie et il est essentiel de mieux les identifier. »
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POLYPE Il s’agit d’une excroissance anormale du tissu muqueux. Il en existe de différents types au niveau du côlon : hyperplasiques, hamartomateux, inflammatoires et adénomateux. Ces derniers sont susceptibles de développer des cellules cancéreuses.
Sédentarité, obésité, tabagisme mais aussi consommation excessive d’alcool et de viande rouge et transformée comptent parmi les principaux facteurs de risque. Les patients atteints de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin comme la rectocolite hémorragique ou la maladie de Crohn sont aussi plus susceptibles de développer ce type de cancer.
muqueuses, les polypes. Certains d’entre eux peuvent se développer en cancer en fonction de leur taille et de leurs caractéristiques. Lorsqu’un cancer se déclare dans une de ces excroissances, il peut se propager à travers les parois du colon ou du rectum. La présence de ces tissus anormaux se manifeste dans un premier temps à travers de minuscules quantités de sang dans les selles, et que l’on ne peut pas observer à l’œil nu.
Des recherches menées par l’American Institute for Cancer Research montrent qu’une adaptation de son alimentation, la conservation d’un poids sain ainsi que la pratique régulière d’une activité physique sont autant de facteurs qui permettent de diminuer le risque de développer cette affection.
Lorsqu’ils sont détectés suffisamment tôt, les polypes problématiques peuvent être retirés grâce à une ablation endoscopique ou chirurgicale. Dans le cas contraire, ils peuvent se transformer en une tumeur maligne. Celle-ci se développe d’abord dans la paroi de l’intestin, avant que ses cellules migrent éventuellement dans d’autres parties de l’organisme. « Ce stade plus avancé de la maladie nécessite alors une prise en charge à l’aide de la chimiothérapie, souvent en combinaison avec la chirurgie ou la radiothérapie. »
SENSIBILISER LES MÉDECINS DE FAMILLE
La doctoresse Anna Dorothea Wagner souligne le rôle primordial des médecins de famille dans cette lutte. « Le problème que nous remarquons chez les jeunes patients réside dans le délai trop important entre l’apparition des premiers symptômes et le diagnostic. C’est pourquoi il est très important de sensibiliser les médecins traitants à proposer un examen dès la première observation de symptômes typiques : changements dans le rythme intestinal, par exemple des constipations inhabituelles, des douleurs abdominales ou la présence de sang dans les selles. » Le cancer du côlon survient à partir de petites lésions au niveau des CORPORE SANO
CAMPAGNES DE DÉPISTAGE
Le canton de Vaud s’est montré précurseur en la matière. Il est le premier canton suisse à avoir instauré un programme de dépistage. Mis sur pied en 2015, il invite tous les résidents vaudois âgés de 50 à 59 ans qui ne présentent pas de risque élevé de cancer du côlon à se soumettre soit à une coloscopie, soit à un test immunochimique de recherche de sang occulte dans les selles, aussi appelé test FIT. Ces tests sont disponibles dans les pharmacies participant aux
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programmes cantonaux, sur recommandation du médecin traitant. Parfois redoutée en raison de son exploration d’une partie intime du corps, la coloscopie demeure l’examen le plus précis pour poser un diagnostic. Réalisée en une dizaine de minutes, sous anesthésie générale, elle consiste en un examen visuel du côlon à l’aide d’une sonde insérée par l’anus. « L’usage de cette méthode de détection réduit actuellement de 60% le risque de décès d’un cancer colorectal, indique Sébastien Godat, médecin adjoint au sein du Service de gastroentérologie du CHUV et responsable du secteur d’endoscopie digestive. La coloscopie présente aussi un avantage thérapeutique, puisqu’elle permet de traiter immédiatement les lésions précancéreuses, des cancers superficiels ou de réaliser un prélèvement de tissu. »
invasives. L’expert cite la dissection sous-muqueuse (ESD) et la technique FTRD (« full thickness resection device »). « C’est une approche qui permet de retirer certains polypes situés au-delà de la paroi muqueuse, avant de procéder à la suture de la plaie. » Grâce aux avancées réalisées dans les domaines de la chirurgie et des chimiothérapies, le taux global de survie a fortement progressé ces dernières années, et s’établit à 60% à cinq ans. Une évolution encourageante qui devrait se poursuivre grâce à de nouveaux progrès en matière de traitements, tels que l’immunothérapie, mais aussi à la mise au point de méthodes de dépistage encore plus précoces. Car lorsque la maladie est détectée à son premier stade, les chances de survie à cinq ans des patients sont de 90%.
VERS UNE DÉTECTION PLUS PRÉCOCE L’entreprise américaine Freenome, La méthode a bénéficié de nombreux spécialiste des biomarqueurs, a ainsi progrès en termes publié il y a quelques techniques. « Il existe semaines des résultats désormais des colosprometteurs concernant copes équipés d’un un nouveau type de test système d’analyse des sanguin. Il présente une images à l’aide de sensibilité presque deux l’intelligence artificielle. fois plus élevée pour DÉPISTAGE Cette dernière permet la détection des polypes Il est recommandé d’effec- adénomateux (voir de déceler en direct tuer un test de dépistage encadré) que les tests la présence de lésions tous les dix ans dès l’âge de selles FIT existant sur suspectes et aide à de 50 ans, et plus tôt identifier le risque. » le marché. La société en cas d’antécédents Plusieurs approches californienne vient familiaux. Le plus précis innovantes ont été d’entamer le processus consiste à examiner le côlon à l’aide d’un endos- réglementaire pour faire développées ces dernières cope. Il peut être précédé approuver le test par les années par les médecins d’une coloscopie virtuelle, autorités sanitaires. / et chercheurs du CHUV, qui établit une visualisanotamment en matière tion en 3D du côlon avec de techniques miniun scanner. CORPORE SANO
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LES SEINS VERS LA LIBÉRATION SEINS Le mouvement « pas de soutien-gorge » a gagné de l’ampleur lors de la crise sanitaire. De tout temps, le rapport à la poitrine féminine a révélé les valeurs et l’imaginaire de l’époque. Flash-back historique. Le confort prendrait-il le dessus sur les conventions sociales ? Les jeunes femmes sont toujours plus nombreuses à libérer leur poitrine. Une enquête Ifop (Institut français d’opinion publique) réalisée après le premier confinement a révélé à quel point le mouvement « no bra » (« pas de soutien-gorge ») avait gagné en importance : aujourd’hui, près de 18% des femmes de moins de 25 ans ne portent plus de soutiengorge. Cette évolution du rapport à la poitrine, au fil des époques, a été analysée par la philosophe Camille FroidevauxMetterie dans son livre Seins, en quête d’une libération. L’auteure y évoque différentes perspectives comme la naissance des seins, la séduction et le plaisir sexuel, l’allaitement, mais aussi le poids des normes esthétiques, jusqu’à la transformation chirurgicale plus ou moins consentie. Ni trop gros ni trop petits, fermes sans être refaits, sensuels mais pas vulgaires, les seins n’échappent pas aux conventions de l’époque. Il en a, semble-t-il, toujours été ainsi. Tour d’horizon historique.
1/L’image du sein en tant MYTHOLOGIE
qu’organe nouricier remonte à la nuit des temps. Cette statue de l’Égypte antique, datant de -330 avant J.-C., présente la reine Isis allaitant son fils Horus. CORPORE SANO
EN IMAGES
ISIS ET HORUS / THE METROPOLITAN MUSEUM OF ART
TEXTE : LAURENCE JAQUET
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3/L’été dernier, le port de RÉPUBLIQUE
t-shirts jugés trop osés dans les écoles de France a incité le ministre de l’Éducation, JeanMichel Blanquer, à demander aux élèves de respecter une « tenue républicaine ». De nombreux internautes ont saisi cette occasion pour partager, ironiquement, une peinture considérée comme un véritable symbole républicain, La Liberté guidant le peuple. Cette œuvre peinte par Delacroix en 1830 présente une poitrine largement découverte.
2/On ne connaît pas l’auteur PEINTURE
GABRIELLE D’ESTRÉES ET UNE DE SES SŒURS, EUGÈNE DELACROIX - LA LIBERTÉ GUIDANT LE PEUPLE
de cette étrange toile de 1594, caractéristique du style de l’école de Fontainebleau et exposée au Louvre. Selon l’interprétation dominante, il s’agit d’un geste par lequel la duchesse de Villars suggère la maternité de sa sœur Gabrielle d’Estrées en pinçant le mamelon de son sein droit.
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4/Banni par certains MANIFESTATION
mouvements féministes occidentaux à partir des années 1970, le soutien-gorge devient le symbole d’une société bourgeoise, liberticide et misogyne. Les militantes n’hésitent pas, dès lors, à le brûler ou à le jeter dans des « poubelles de la liberté ».
5/En 2019, soit trois siècles PUDEUR
et demi après la fameuse tirade du Tartuffe de Molière (« Couvrez ce sein que je ne saurais voir ; par de pareils objets les âmes sont blessées, et cela fait venir de coupables pensées »), la direction d’un parc touristique en périphérie de Djakarta, en Indonésie, a recouvert d’un tissu doré la poitrine de deux statues de sirènes au nom du respect des « valeurs orientales ».
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6/En février 2021, le chanteur
Justin Timberlake a réitéré publiquement ses excuses à Janet Jackson pour lui avoir arraché une partie de son soutien-gorge lors du Super Bowl de 2004, dévoilant son bijou « nipple-shield » à des millions de téléspectateurs. C’est ce célébrissime incident télévisuel qui avait donné à l’entrepreneur Jawed Karim l’idée de créer YouTube.
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DR, ADEK BERRY / AFP, PATRICK SCHNEIDER
« NIPPLEGATE »
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7/Les seins
MILITANTISME
AMAURY CORNU / HANS LUCAS, BURGER/PHANIE, PIXOLOGICSTUDIO/SCIENCE PHOTO LIBRARY
peuvent aussi être revendiqués comme armes d’affirmation et d’émancipation contre la sexualisation et le « male gaze » (regard masculin), comme ici lors de la Marche des Fiertés à Paris, en juin 2019.
9/Souvent partagée sur les BIOLOGIE
réseaux sociaux, cette représentation des canaux lactifères a de quoi surprendre et émerveiller. En effet, de nombreuses personnes n’ont qu’une connaissance limitée du corps féminin, les images d’anatomie privilégiant presque systématiquement le corps masculin comme modèle.
8/La liberté de disposer CHIRURGIE
de son corps et de ses seins, pour laquelle les femmes se battent toujours, c’est aussi la liberté de les modifier, par exemple dans le cas d’une chirurgie esthétique ou reconstructive de la poitrine. CORPORE SANO
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etit poisson originaire du Mozambique et du Zimbabwe, le killifish a dû s’habituer aux grandes périodes de sécheresse caractéristiques de sa région d’Afrique australe. Au cours de l’évolution, il a développé un cycle de vie spécialement bref, de trois à six mois, adapté aux saisons de ses contrées natales. En cela, ce vertébré aquatique constitue un modèle révolutionnaire offrant de nouvelles possibilités pour les sciences biomédicales, en particulier pour l’étude du vieillissement.
Le laboratoire de recherche d’Alejandro Ocampo et son équipe, basé à l’UNIL au sein du Département des sciences biomédicales, bénéficie désormais de ces caractéristiques avantageuses afin de faire avancer la recherche sur le vieillissement, facteur aggravant des maladies dégénératives. Depuis janvier 2020, ils ont en effet établi la première colonie de killifish de Suisse. Calida Mrabti, doctorante à Ocampo Lab, se CORPORE SANO
NOM NOTHOBRANCHIUS FURZERI TAILLE 6,5 CM CARACTÉRISTIQUE SES ŒUFS SONT RÉSISTANTS À LA SÉCHERESSE ET PEUVENT SUBSISTER PLUSIEURS MOIS
Poisson de labo Arrivé à l’UNIL il y a peu, le killifish, animal au cycle de vie très court, pourrait bien révolutionner la recherche. TEXTE : LAURENCE JAQUET
FAUNE & FLORE
réjouit de travailler avec le poisson. « De par sa durée de vie courte, le killifish permet de réduire sensiblement le temps d’expérience et présente une belle alternative aux souris et autres animaux de laboratoire. » En effet, l’animal permet d’obtenir les résultats d’expérimentations plus rapidement tout en diminuant les coûts liés à son entretien. « De plus, à l’heure où les questions éthiques sont plus importantes que jamais concernant l’expérimentation animale, l’utilisation du killifish s’intègre parfaitement dans la règle dite des trois R : réduire, raffiner, et remplacer peu à peu ces tests. » L’Ocampo Lab possède 80 aquariums pouvant accueillir cinq poissons chacun. Actuellement, les chercheurs sont en train d’optimiser l’élevage des animaux afin de développer et régulariser les lignées. Les premiers tests afin de découvrir des médicaments antivieillissement devraient commencer au cours des mois à venir. /
DANOLSEN (EN ILLUSTRATION, LE NOTHOBRANCHIUS RACHOVII BLUEFIN, TRÈS PROCHE DU FAMEUX NOTHOBRANCHIUS FURZERI UTILISÉ À L’UNIL)
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RACHID AKROUR
Infirmier clinicien spécialisé au Service de gériatrie et de réadaptation gériatrique du CHUV
Les personnes âgées n’ont pas été abandonnées
Depuis l’apparition de l’épidémie en 2019, plus de 90 millions de cas d’infection ont été enregistrés au moment d’écrire ces lignes, et 2 millions de décès. Alors que l’ensemble de la population court le risque d’infection par le coronavirus, l’issue est particulièrement incertaine pour les personnes fragiles. La population âgée, et notamment celle vivant en EMS, est affectée de manière disproportionnée. En plus d’un risque de mortalité élevé, cette population doit affronter l’exclusion, la privation, l’isolement, la culpabilité, la stigmatisation et on observe chez elle une augmentation de la tendance suicidaire.
Pour rétablir les liens entre les personnes âgées institutionnalisées et leurs proches, par exemple, des trésors d’ingéniosité ont été déployés avec l’aide des technologies digitales, tablettes et smartphones. Autre exemple, celui des équipes mobiles venues en renfort dans les EMS. Il s’agissait de soutenir des professionnels eux-mêmes frappés par les quarantaines et les isolements, et davantage habitués à la promotion de la santé en milieu de vie qu’aux situations extrêmes provoquées par le virus. En appui, des experts de la gériatrie et des soins palliatifs ont pu aider à prendre soin des résidents malades et partager leurs expertises avec les soignants sur place.
GILLES WEBER
Les réponses apportées en période de crise sont probablement imparfaites et propres à chaque contexte mais elles ont le mérite d’être immédiates et de réduire la souffrance. Elles dessinent aussi les contours d’une manière différente et innovante de collaborer, en faveur Plusieurs voix se sont élevées pour dénoncer des soignés. Ce que l’on voit émerger dans le sort réservé aux personnes âgées durant ce contexte constitue la graine de laquelle cette pandémie. Certaines parlent d’abandon. germeront les modèles de soins aux seniors de Mais la réalité est tout autre. D’abord, demain. Des modèles qui reconnaissent que le rappelons que cette crise est inédite et qu’elle partage du savoir et des expériences est plus que confronte les systèmes de gouvernance, jamais nécessaire, et qui construisent les ponts de santé et d’économie du monde entier entre les aînés et leurs proches, entre les institutions à leurs limites. Dans ce contexte, des solutions et la communauté, entre les professionnels de innovantes ont dû être trouvées pour toutes les disciplines engagées pour le bien-être répondre aux besoins les plus urgents, et cela et la santé de la population. Un proverbe africain a été fait. dit : « C’est pendant que le vieux seau est encore là qu’il faut en fabriquer un neuf. » /
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CHRONIQUE
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ACICLOVIR C 8H 11N 5O 3
C 8H 11N 5O 3 UNE MOLÉCULE, UNE HISTOIRE TEXTE : YANN BERNARDINELLI
Bactéries, champignons et virus mettent à mal la santé humaine depuis toujours. Suite à la découverte des antibiotiques, les scientifiques ont appris comment combattre les pathogènes avec des molécules. Si le premier antibiotique, la pénicilline, remonte à 1928, le premier traitement efficace contre un virus est arrivé seulement quarante ans plus tard. Ce long délai révèle toute la difficulté de la recherche sur les antiviraux. Une différence de taille explique ce fait : les virus sont en effet 100 à 1000 fois plus petits que les bactéries. « Pour pouvoir bien les étudier, il a fallu attendre l’apparition de la microscopie électronique dans les années 1930. Les bactéries, elles, sont observées depuis le XVIIe siècle », précise Thierry Buclin, médecin-chef du Service de pharmacologie clinique du CHUV. Autre
Barrer la route aux virus : l’aciclovir balise une voie sinueuse différence, les virus ne sont pas des organismes vivants autonomes, mais des gènes parasites. De ce fait, ils présentent moins de cibles accessibles aux traitements. « Les virologues ont longtemps tenu pour acquis qu’aucun produit ne ferait succomber un virus. C’était avant la découverte de l’idoxuridine à la fin des années 1950, un composé capable de stopper la reproduction du virus de l’herpès. » En effet, les virus sont composés de quelques gènes —l’ADN ou l’ARN viral—, entourés d’une enveloppe de protéines. Leur stratégie d’infection consiste à s’attacher aux cellules hôtes, à y introduire
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ZOOM
leurs gènes afin d’exploiter la machinerie cellulaire pour les traduire et se reproduire. Pour dupliquer leur ADN, ils ont besoin d’une enzyme appelée ADN-polymérase, codée par leur propre ADN. L’idoxuridine bloque cette enzyme et, de ce fait, la reproduction du virus. Malheureusement, l’idoxuridine est toxique pour l’organisme et peut uniquement être appliquée localement sur des muqueuses infectées. Les virologues ont donc recherché d’autres molécules utilisables par voie générale. Une substance dérivée d’une éponge des Caraïbes, dotée de propriétés comparables à l’idoxuridine est découverte
en 1970 : l’aciclovir. « Une étape majeure de la lutte contre les virus est alors franchie ! vingt-cinq ans seront encore nécessaires pour obtenir un dérivé facilement absorbé par voie orale contre les cas graves d’herpès et de varicelle. Son mécanisme d’action a inspiré la délicate mise au point des quelques dizaines d’antiviraux connus à ce jour. » Ainsi, des antiviraux efficaces ont vu le jour ces dernières années pour contrôler le sida et l’hépatite C. « Une étonnante complexité reste néanmoins liée au développement d’antiviraux, comme l’indiquent les récents échecs du remdésivir, de l’hydroxychloroquine et de l’ivermectine dans la recherche d’une molécule active contre le coronavirus à l’origine de la pandémie du Covid-19 », conclut Thierry Buclin. /
CURSUS
ÉCLAIRAGE
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Texte : Arnaud Demaison, Simon Faraud Photo : Eric Déroze, Heidi Diaz
ÉCLAIRAGE
Le vaccin covid en 10 questions Le canton de Vaud a lancé le 11 janvier sa campagne de vaccination Covid-19 dans quatre centres répartis sur tout son territoire, dont un situé au CHUV. Ce dispositif n’a cessé de s’étoffer afin de vacciner aussi rapidement que possible la population qui le désire. Explications.
Les conseillères d’État Rebecca Ruiz et Béatrice Métraux étaient présentes au CHUV le lundi 11 janvier pour lancer la campagne de vaccination contre le Covid-19, qui s’accélère chaque semaine et s’étendra jusqu’à l’été. La présence conjointe des responsables des départements de la Santé et de l’Action sociale (DSAS) et de l’Environnement et de la Sécurité (DES) dans l’hôpital témoigne du très fort investissement du CHUV et de ses équipes non seulement dans la lutte au quotidien contre la pandémie, mais aussi dans la mise sur pied du plan cantonal de vaccination. Pourtant, ce vaccin suscite aussi le scepticisme au sein d’une partie de la population. Chaque personne devra donc choisir, de se faire vacciner ou non.
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OLIVER PETERS directeur général adjoint du CHUV, chef du comité de pilotage du Plan vaudois de vaccination
Quels sont les objectifs du plan cantonal de vaccination ? oliver peters L’objectif initial était d’effectuer environ 5000 vaccinations par jour. Mais suite à l’émergence du nouveau variant britannique du virus, l’objectif est rapidement passé à 7000 ou 8000 vaccinations par jour.
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ÉCLAIRAGE
Quels sont les principaux défis auxquels vous avez dû faire face ? op Plusieurs structures ont dû être mises sur pied rapidement : dans un premier temps, nous avons ouvert des centres de vaccination et formé des équipes mobiles. Un grand centre de vaccination va aussi être rajouté au dispositif à Beaulieu avec un soutien important de la PCi. Nous étendrons ensuite la possibilité de vacciner aux cliniques privées, aux cabinets médicaux et aux grandes pharmacies. Enfin, les vaccinations pourront être effectuées chez les médecins et les pharmaciens indépendants. Le CHUV est très impliqué dans le plan cantonal de vaccination. Comment expliquezvous cela ? op Le CHUV a une certaine force de frappe institutionnelle pour ce genre d’opérations. Je pense que c’est à cause de ces compétences concentrées chez nous, et de notre capacité à les déployer rapidement, qu’on nous a donné ces responsabilités. Je tiens à saluer la solidarité et l’enthousiasme qui animent les membres de toutes les équipes impliquées dans ce plan de vaccination. On parle souvent de fatigue dans l’institution, mais il y a aussi beaucoup de plaisir, de la bonne humeur et le sentiment d’accomplir quelque chose d’important pour la population. C’est une incroyable source de motivation.
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À votre avis, le personnel de santé va-t-il répondre positivement à la possibilité de se faire vacciner ? op Nous savons que les personnes qui se savent vulnérables sont très disposées à se faire vacciner. Il y a davantage de réticences chez les personnes plus jeunes car le vaccin est nouveau. Néanmoins, les connaissances s’accumulent pour démontrer que sa dangerosité est faible, tandis que celle du virus est importante, même pour les populations jeunes. Je pense donc que l’intérêt va grandir pour la vaccination, mais nous n’exercerons aucune pression sur noscollaboratrices et collaborateurs. Nous allons juste les informer sur la situation. Quand vous en aurez la possibilité, allez-vous vous faire vacciner ? op Bien sûr. Mais je ne vais pas prendre la place d’une personne vulnérable dans la file d’attente !
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PROF. GIUSEPPE PANTALEO chef du Service d’immunologie et d’allergie du CHUV
La technologie ARN est-elle plus risquée que celle utilisée pour les vaccins « classiques » ? prof. giuseppe pantaleo Non. Les vaccins à ARN messager sont considérés comme des vaccins génétiques car ils transfèrent des codes génétiques pour déclencher la fabrication de protéines. Il n’y a pas de raison de considérer qu’il y a plus de risques. Il est notamment impossible que le code génétique des personnes vaccinées soit modifié. Est-elle plus ou moins efficace ? Les données que nous avons suggèrent que ces vaccins sont extrêmement efficaces, entre 90 et 95%. Nous manquons par contre de recul sur la pérennité de cette efficacité. En outre, le vaccin a été testé sur des personnes avec un système immunitaire sain. Il faudra voir s’il est aussi efficace sur les personnes dont le système immunitaire est compromis.
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ÉCLAIRAGE
Vais-je devoir me faire vacciner tous les ans comme pour la grippe ? p.gp Il est important que nous mettions en place des plans de surveillance immunologique pour évaluer combien de temps l’effet immunitaire persiste. Il faudra aussi rester attentif à de possibles mutations importantes du virus qui rendraient le vaccin inefficace, comme c’est le cas pour la grippe. Quels sont les effets secondaires à court et long terme ? p.gp Les effets secondaires à court terme documentés sont extrêmement légers et ne posent pas de problèmes de sécurité : rougeurs autour du site d’injection, symptômes grippaux mineurs, plus importants chez de rares sujets. Pour 99% des personnes, ces symptômes devraient disparaître après trois ou quatre jours. Nous devons faire attention aux personnes qui ont des allergies sévères. Des mécanismes de surveillance ont déjà été mis en place. Nous manquons encore de recul sur les effets à long terme, rien n’indique cependant une évolution dans ce sens. Allez-vous vous faire vacciner ? Bien sûr ! Dès que j’en ai la possibilité. /
p.gp
Lire aussi en p. 28
Infos pratiques → coronavax.unisante.ch → ou hotline du canton de Vaud au 058 715 11 00, de 8h à 20h30.
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LE PORTRAIT DE
PARCOURS
Sabrina Urbinati Moinat Pionnière d’un nouveau master infirmier, Sabrina Urbinati Moinat exerce depuis octobre comme infirmière praticienne spécialisée : une première au CHUV et en Suisse. TEXTE : ARNAUD DEMAISON PHOTO : HEIDI DIAZ
« Je me réjouis de contribuer à l’implémentation de ce nouveau rôle, qui permettra de conjuguer des soins infirmiers avec des actes médicaux comme le diagnostic et la prescription en collaboration avec le médecin. »
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PARCOURS
1979–1998
Prémices d’un appétit Née en 1979, Sabrina Urbinati Moinat passe son enfance en Isère. Bercée entre lacs et montagnes, elle rêve de devenir vétérinaire. À ses heures perdues, elle nourrit et prend soin de Coco, l’âne de sa voisine, avec un besoin manifeste de s’impliquer pour le bien-être de ceux qui l’entourent.
1998–2009
Une soif de soins Un bac général dans le sac, elle suit une formation d’assistante dentaire qui la laisse sur sa faim. Après une courte hésitation pour une carrière de dentiste, elle se décide pour l’Université de Bruxelles et son cursus en soins infirmiers. Quatre ans plus tard et un bachelor en poche, elle alterne missions de courtes durées et voyages aux quatre coins du monde.
2009–2012
Le goût de l’Helvétie En cherchant à se rapprocher de ses parents, Sabrina Urbinati Moinat se retrouve en mission temporaire à l’Hôpital ophtalmique de Lausanne. Séduite par les étés rythmés par les festivals, elle goûte aussi au système de santé suisse : les moyens engagés dans les soins et une vision holistique du patient la décident à poser ses valises sur Vaud.
2012–2018
À la table du CHUV Après un passage en Pédiatrie sur le site de l’Hôpital de l’enfance, c’est en Diabétologie que se produit le coup de foudre. Elle choisit de s’engager dans cette branche en raison du contact développé avec les patients et de son affinité naturelle pour l’éducation thérapeutique. Insatiable, elle sent qu’il lui manque encore certaines connaissances afin d’exceller dans son domaine. Si beaucoup de compétences s’acquièrent sur le tas, la nécessité de formaliser ses outils pour amener une véritable plus-value dans la gestion des maladies chroniques se fait sentir.
2019–2020
Un master cinq étoiles Sous l’impulsion notamment de la directrice des soins du CHUV Isabelle Lehn, le master d’infirmière praticienne spécialisée (IPS) voit le jour. Encouragée par ses cadres Thierry Penseyres et Teresa Gyuriga, Sabrina Urbinati Moinat se lance dans cette aventure, en coordination avec un médecin partenaire, le Dr Michael Hauschild. Elle espère ainsi ouvrir la voie à une nouvelle pratique, plus proche et encadrante pour le patient et son entourage. Orienté clinique et centré sur les soins, ce master représente l’aboutissement d’une carrière entamée il y a plus de vingt ans. /
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BACKSTAGE TÉLÉTRAVAIL En raison des mesures sanitaires et d’une actualité Covid qui évoluait de jour en jour, ce numéro d’In Vivo n’a pas été facile à réaliser. Mais grâce à la vidéoconférence, les responsables de projet, graphistes, iconographes et journalistes ont réussi à raconter le virus tout en s’en protégeant.
ILLUSTRATION Quand l’équipe d’In Vivo a demandé à l’artiste Ana Yael d’illustrer l’article sur les jeunes hommes qui n’ont pas de relations sexuelles (p. 42), l’artiste a proposé quatre excellents croquis. Le choix a été difficile. Ci-contre, les trois projets qui ont été écartés.
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CONTRIBUTEURS
ARNAUD DEMAISON
HÉLÈNE KRÄHENBÜHL
Après dix ans passés chez RTSinfo , Arnaud Demaison a rejoint le Service de communication et de création audiovisuelle du CHUV comme responsable éditorial en mars 2020. Il est responsable de la cohérence éditoriale des différents contenus de communication interne et externe. Issu d’un cursus littéraire à l’Université de Lausanne, il apporte son soutien et sa plume en renfort pour l’élaboration du magazine.
Diplômée de l’Académie du journalisme et des médias, Hélène Krähenbühl est une journaliste de 26 ans basée dans le canton de Vaud. Pour ce numéro d’In Vivo, elle s’est interrogée sur la problématique du terme « variant sud-africain » d’un point de vue scientifique.
RÉMI CLÉMENT, DR
CLÉMENT ETTER Biologiste de formation, Clément Etter rédige des articles de sciences et santé pour différents médias romands. À travers ses textes ou au théâtre, son autre passion, il aime raconter des histoires qui s’adressent à tout le monde. Dans ce numéro d’In Vivo, il s’est intéressé aux nombreux virus qui nous entourent, les dangereux comme les bénéfiques (p. 19).
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IN VIVO
Une publication éditée par le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) et l’agence de presse Large Network www.invivomagazine.com
ÉDITION
CHUV, rue du Bugnon 46 1011 Lausanne, Suisse RÉALISATION ÉDITORIALE ET GRAPHIQUE T. + 41 21 314 11 11, www.chuv.ch Large Network, www.largenetwork.com redaction@invivomagazine.com T. + 41 22 919 19 19 ÉDITEURS RESPONSABLES
Béatrice Schaad et Philippe Eckert DIRECTION DE PROJET ET ÉDITION ONLINE
Bertrand Tappy (ad interim)
RESPONSABLES DE LA PUBLICATION
Gabriel Sigrist et Pierre Grosjean DESIGN
Large Network, Mónica Gonçalves et Sabrine Elias
REMERCIEMENTS
RÉDACTION Alessandro Sofia, Alyssia Lohner, Amélie Kittel, Large Network (Yann Bernardinelli, Andrée-Marie Dussault, Clément Etter, Daphné Giaquinto, Diane De Saab, Erik Freudenreich, Robert Gloy, Laurence Jaquet, Hélène Krähenbühl, Dominique Savoia Diss, Élise Méan, Francine Billote, Audrey Magat, Sylvain Menétrey, Patricia Michaud, Antonio Rosati, Alexandre Wälti), Jessica Scheurer, Joelle Isler, Katarzyna Gornik, Arnaud Demaison, Simon Faraud, Elena Martinez, Bertrand Tappy Manuela Palma de Figueiredo, Mélanie Affentrager, Muriel Faienza, Nicolas Berlie, Nicolas Jayet, Sarah Iachini, Simone Kühner, Sonia Ratel Tinguely, RECHERCHE ICONOGRAPHIQUE Virginie Bovet et le Service Sabrine Elias de communication du CHUV. MISE EN PAGE
PARTENAIRE DE DISTRIBUTION
Mónica Gonçalves
BioAlps
COUVERTURE
Illustration : Ana Yael Design : Large Network IMAGES
CHUV (Rémi Clément, Eric Déroze, Heidi Diaz, Gilles Weber), Guillaume Perret / Lundi13, Ana Yael IMPRESSION
PCL Presses Centrales SA TIRAGE
15 000 exemplaires en français Les propos tenus par les intervenants dans In Vivo et In Extenso n’engagent que les intéressés et en aucune manière l’éditeur.
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L’INFORMATION EN CONTINU Tout savoir sur les Sciences de la vie et l’innovation. Des rubriques pour vous: Agenda, Innovation, People, Science, etc. L’actualité de nos entreprises, de nos hautes-écoles, de nos organismes de soutien à l’innovation sur un seul site.
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