NUMÉRO HORS SÉRIE
Attenant à la cathédrale Notre-Dame, l’ancien évêché devenu musée
L’ancien évêché, un musée au cœur de la cité Créé en 1998 par le Conseil général de l’Isère, le musée de l’Ancien Évêché est tout à la fois un musée de site et un lieu dédié à l’histoire et au patrimoine de l’Isère. Les collections prennent place dans l’ancien palais des évêques de Grenoble, élément majeur du groupe cathédral. De la campagne de construction du 13e siècle, dont proviennent les parties en briques, aux audaces du cardinal Le Camus, illustrées par l’escalier d’honneur du 17e siècle, ce monument historique garde la trace des quatre-vingt-quatre prélats qui s’y sont succédé. La salle des évêques, qui abrite leur trésor, les portraits de certains d’entre eux ainsi que des maquettes architecturales témoigne de cette occupation constante et des évolutions du palais.
rues Très-Cloîtres et du Fer-à-Cheval. À la fois espace vert au cœur de la vieille ville et lieu d’animation du musée, il offre également à voir des éléments patrimoniaux remarquablement restaurés, tel le chevet fortifié de la cathédrale qui prend appui sur la muraille antique.
L’ancienne façade aux baies géminées, 13e siècle
L’aménagement du jardin du palais, attenant à la cour d’honneur, fait le lien entre les L’escalier d’honneur du palais, 17e siècle
La crypte archéologique du baptistère, sous la place Notre-Dame
Enceinte gallo-romaine : vestiges d’une tour et de la courtine
Le baptistère de Grenoble À partir de 1989, des fouilles menées place Notre-Dame, à quelques mètres du musée, révèlent des vestiges exceptionnels, dont ceux d’un baptistère paléochrétien datant du 4e siècle de notre ère. L’aménagement d’une crypte archéologique en sous-sol du musée permet aux visiteurs de le découvrir. En longeant le rempart qui protégeait la ville à partir du 3e siècle, on s’immerge dans la vie gallo-romaine au milieu d’objets du quotidien et une stèle funéraire portant la mention Cularo, le nom antique de Grenoble. Après une douzaine de mètres, un passage piéton, la poterne, permet d’entrer à l’intérieur de l’enceinte fortifiée. Les ruines du groupe épiscopal primitif se présentent alors à nous avec, au centre, le baptistère dont la cuve, bien conservée, témoigne des évolutions liturgiques du baptême durant le haut Moyen Âge. Une scénographie soignée accompagnée de maquettes en facilite l’interprétation.
Stèle funéraire avec la mention de Cularo
L’Isère en histoire
Une exposition permanente À l’échelle des 55 000 ans de présence humaine dans les Alpes, l’histoire de l’Isère ne représente rien. Pour autant, ce département né en 1790 se prête à l’écriture d’une histoire, celle du rapport de l’homme à son environnement. En un parcours chronologique qui met en scène les plus belles collections départementales, L’Isère en histoire dévoile quelques jalons dans la longue durée, comme autant de clés de compréhension de cette aventure humaine. La visite débute par une rencontre avec Alexandre, le plus vieux fossile humain trouvé dans notre région, et se termine 11 000 ans plus tard par une évocation de la vie de nos contemporains. Une muséographie volontairement dépouillée favorise tout au long du parcours une double lecture de l’exposition et du bâtiment qui l’abrite.
L’Isère en histoire, salle 18e siècle
Les visiteurs ont la possibilité de s’équiper du guide interactif du musée afin de les accompagner durant le parcours. Cette petite tablette tactile permet de manière instinctive de décrypter un objet, d’approfondir une notion, d’explorer une maquette… Intégrant aussi un audioguide, il est le compagnon idéal le temps d’une visite ! Le guide est disponible en français et en anglais. L’Isère en histoire, salle gallo-romaine
Poignard en silex découvert à Charavines, 3e millénaire avant Jésus-Christ
Un territoire lentement humanisé De la préhistoire à l’âge des métaux (55000 - 121 avant Jésus-Christ) Les périodes glaciaires ont longtemps empêché toute occupation humaine dans nos contrées. L’homme de Néandertal s’y aventure tout de même autour de –55000 à la faveur d’un réchauffement, laissant derrière lui de minces traces de son passage, tels des éclats de silex débités. À la fonte des glaciers, vers –15000, l’Homo sapiens s’installe durablement dans notre région. Il enterre ses morts, comme Alexandre, avec du mobilier funéraire, orne des os de dessins figuratifs ou abstraits et domestique des chiens, parfois même des ours. Excellent chasseur, ses armes évoluent progressivement de la sagaie vers l’arc aux minuscules pointes de flèches. Vers –5000, les habitudes des Alpins connaissent de profonds bouleversements. La période néolithique voit ainsi la diffusion d’une culture méditerranéenne centrée sur l’élevage et l’agriculture, qui sédentarise les populations. D’abord bergers, comme à la Grande Rivoire, à Sassenage, les hommes développent progressivement des cultures de céréales et de légumineuses, conservées et cuites dans de la céramique,
Os gravé d’une tête de bison, Saint-Nazaire-en-Royans, 13 000 avant Jésus-Christ
comme l’atteste le village des Baigneurs, à Charavines. L’âge des métaux, période de transition entre préhistoire et Antiquité, voit la métallurgie du bronze puis du fer révolutionner progressivement la vie des communautés humaines. Au deuxième millénaire, armes, outils et bijoux en bronze permettent le développement d’une élite princière, inhumée dans des sépultures richement ornées. À l’âge du fer, des tribus celtes, tels les Allobroges, viennent fonder des bourgs dans les vallées, où ils frappent des monnaies gauloises.
Le décor de ce vase trouvé à Seyssinet-Pariset indique une production du Sud-Ouest de l’Allemagne, 1500 avant Jésus-Christ.
L’épanouissement d’une société raffinée La période gallo-romaine (121 avant Jésus-Christ – 476 après Jésus-Christ) Conquis par les Romains en 121 avant Jésus-Christ et intégré à la Narbonnaise, le territoire des tribus allobroges s’organise en cité autour de Vienne. Véritable petite Rome, la ville se pare d’un théâtre, d’un cirque et de nombreux temples dédiés aux dieux romains. Une maquette en restitue le centre monumental. Des objets trouvés partout en Isère témoignent d’une romanisation intense des populations gauloises : statuettes de divinités, épitaphes latines, éléments d’architecture… Grâce à la stabilité de l’Empire, cette civilisation gallo-romaine prospère aussi dans les campagnes, où de riches villae proposent un confort sans précédent : mosaïques, bains et même chauffage par le sol ! De plus petits objets, tels des fioles en verre soufflé, des stylets d’écriture ou des miroirs en bronze, témoignent d’un raffinement nouveau. Mais les incursions des peuples dits barbares annoncent la fin de la domination romaine. Les villes se replient à l’intérieur de leurs remparts, tel Cularo à la fin du 3e siècle, et certains habitants enterrent leurs économies. Vienne est finalement mise à sac à la fin du 5e siècle. Parallèlement, le christianisme se diffuse peu à peu, de la vallée du Rhône vers le Sillon alpin.
La mosaïque aux perruches, datant du 2e siècle, est un bel exemple des œuvres qui décoraient sols et murs des riches villae romaines, comme à Saint-Romain-en-Gal (Vienne antique).
Vénus, déesse de l’amour et de la beauté, est une des nombreuses divinités romaines adoptées par les Gaulois, 1er ou 2e siècle.
Les mille ans du Moyen Âge sont marqués du sceau du christianisme. La religion est partout : en ville, comme à Grenoble avec le pouvoir de l’évêque en sa cathédrale, dans les campagnes couvertes d’un « blanc manteau d’églises », et jusque dans les monastères coupés du monde telle la Grande Chartreuse. L’émouvante sculpture romane s’inspire alors du culte de saints protecteurs (tel saint Roch, contre la peste) ou de la Vierge, comme à Bressieux. Sceau équestre du dauphin Humbert II
Une principauté féodale, le Dauphiné Le Moyen Âge (476 - 1492) L’effondrement de l’Empire romain encourage l’émergence de royaumes barbares. Burgondes et Francs s’affrontent pour la domination des terres alpines à la bataille de Vézeronce, où le fils de Clovis perd la vie. Mais ni eux ni plus tard le royaume de Bourgogne ou le Saint Empire romain germanique n’empêchent l’émancipation de puissants propriétaires terriens qui assurent leur domination, depuis leur château, sur les communautés villageoises. Ce régime seigneurial basé sur la féodalité entraîne de nombreuses rivalités entre familles nobles : Sassenage, Alleman, Aynard… L’une d’entre elles, les comtes d’Albon, s’installe au 11e siècle à Grenoble et y concurrence le pouvoir de l’évêque. Surnommés les « dauphins », ils convertissent leur principauté du Dauphiné en un État fort et indépendant, en lutte contre la Savoie voisine. Ruiné, le dauphin Humbert II le vend au fils du roi de France en 1349.
Pièce majeure du musée, ce casque a été trouvé sur le site de la bataille de Vézeronce (524). Sa riche ornementation laisse penser qu’il a appartenu à un personnage important.
À découvrir au rez-de-chaussée du musée, une présentation vidéo des plus belles pages de la bible de Notre-Dame de Casalibus, réalisée par les moines chartreux entre 1084 et 1132.
François de Bonne, seigneur de Lesdiguières (1543 – 1626) s’illustre durant les guerres de Religion avec notamment la prise de Grenoble. Son titre de connétable de France vient couronner, en 1622, une glorieuse carrière militaire. Anonyme, 17e siècle
La province du Dauphiné, une lente intégration au royaume de France La période moderne (1492 - 1789) Panneau du retable de la chapelle du château de Bon Repos, à Jarrie. Tourné vers ses bons fils, le patriarche Jacob prédit la venue du messie, tandis que Dan, son fils maudit, prophétise l’avènement de l’antéchrist. Fin 15e ou début 16e siècle
Le 16e siècle est cruel pour le Dauphiné. Les expéditions militaires contre l’Italie s’y approvisionnent en denrées et en hommes : le chevalier Bayard en est le meilleur exemple. Plus douloureuses encore, les guerres de Religion voient protestants et catholiques rivaliser de cruauté et de violence, à l’instar du terrible baron des Adrets. À l’aube du 17e siècle, le duc de Lesdiguières pacifie la province puis la dirige
durant trente ans, lançant de grands projets de construction, à Grenoble notamment. En réaction à la Réforme protestante, l’église implante des couvents dans toute la province : dix-huit pour la seule ville de Grenoble ! Si au 18e siècle la majeure partie de la population vit dans des zones rurales, Grenoble connaît une grande activité grâce à son parlement qui attire une noblesse de robe et une bourgeoisie fortunée. Amateurs de mobilier de luxe, ils assurent la prospérité des faïenceries de La Tronche ou des ébénistes de la dynastie Hache. Ouverte aux sciences et aux idées des Lumières, l’élite grenobloise crée une académie, un théâtre ainsi qu’une bibliothèque publique grâce à des érudits tels Condillac, Vaucanson ou Dolomieu. Dans ce contexte intellectuel, le Dauphiné fait naître l’étincelle révolutionnaire en s’opposant par deux fois à l’absolutisme royal : par son peuple d’abord, lors de la Journée des Tuiles, puis par son parlement, rassemblé au château de Vizille.
Au 18e siècle, Grenoble vit au rythme de sa rivière. P.- A. Parizot, 2nde vue de Grenoble vers la porte de la Graille (détail), bibliothèque municipale de Grenoble
Gourde en faïence de 1760 provenant des ateliers de La Tronche
La naissance d’un département, l’Isère La période contemporaine (19e et 20e siècles) Le département de l’Isère, né en 1790, en même temps que la Drôme et les HautesAlpes, de l’éclatement de l’ancienne province du Dauphiné, est représentatif des profonds changements qu’a connus la France pendant ce siècle. Trois révolutions, six régimes politiques et de grands bouleversements économiques et sociaux comme la naissance de la grande industrie, le début de l’exode rural, le développement des villes… C’est aussi le siècle des révolutions artistiques autour de l’émergence de nouveaux courants esthétiques dans la littérature, la musique,
la peinture, et de la naissance d’un intérêt nouveau pour le patrimoine. Peintures, objets et iconographies réunis en une présentation qui évoque un cabinet de curiosités témoignent de cette histoire. Le choix d’une muséographie pour témoigner du 20e siècle est ardu. Le musée de l’Ancien Évêché a pris le parti de ne pas exposer d’objets trop familiers au regard des contemporains que nous sommes. Elle propose plutôt à ses visiteurs d’appréhender ce siècle par un média qui l’a traversé de part en part : l’image animée, le cinéma. Sous le regard et le décryptage d’un artiste, Denis Vedelago, le musée propose une chronique cinématographique, entre mémoire et histoire, évoquant la vie quotidienne mais aussi les bouleversements sociaux, économiques, environnementaux… qu’ont connus les Isérois au cours de ce siècle. Bonne toile !
Photogramme extrait du film réalisé par la société A. Lumière, à Uriage, entre 1899 et 1900. Séquence à voir dans la chronique cinématographique projetée dans la salle consacrée au 20e siècle
Exposition permanente Entrée gratuite Musée ouvert Lundi, mardi, jeudi et vendredi de 9 h à 18 h Mercredi de 13 h à 18 h Samedi et dimanche de 11 h à 18 h Fermé les 1er janvier, 1er mai et 25 décembre Jardin ouvert Lundi, mardi, jeudi et vendredi de 9 h 30 à 17 h 30 Mercredi de 13 h 30 à 17 h 30 Samedi et dimanche de 11 h 30 à 17 h 30 Fermeture à 17 h en hiver (du dernier dimanche d’octobre au dernier dimanche de mars) Fermé les 1er janvier, 1er mai et 25 décembre
Le jardin du musée
Le Petit Journal Numéro hors-série Directeur de la publication : Isabelle Lazier Coordination : Cécile Sapin Textes : Vincent Seban Photographies : © Musée de l’Ancien Évêché, D. Vinçon (p. 1 à 12) ; © G. Dépollier (p. 2) ; © F. Crispin (p. 2) ; © Bibliothèque municipale de Grenoble (p. 10) ; © Société A. Lumière (p. 11) Carte : T. Lemot Conception et réalisation graphique : Jean-Noël Duru Visuel de couverture : d’après le retable de la chapelle du château de Bon Repos à Jarrie, peinture (détail) Impression : Imprimerie Grafi, Fontaine (38)
Guide interactif du musée Gratuit, disponible à l’accueil (français/anglais) Pour découvrir le musée et son jardin Visites guidées pour le public individuel et les groupes Conférences Ateliers pour enfants Concerts Et un programme à destination des scolaires Renseignements et réservation au 04 76 03 15 25 Pour en savoir plus www.ancien-eveche-isere.fr
Musée de l’Ancien Évêché 2, rue Très-Cloîtres à Grenoble Tél. 04 76 03 15 25 www.ancien-eveche-isere.fr