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Rétablissement

Et si les médicaments ou la thérapie n’aident pas ?

La dépression majeure est l’un des troubles psychiatriques les plus courants. Malheureusement, nombre de patients ne sont pas soulagés par les médicaments ou les traitements psychothérapeutiques disponibles. On estime que 40 % des personnes souffrant de dépression développent une « résistance au traitement », même si elles ont reçu une médication adéquate par un antidépresseur de première ligne. Plus de 1 patient sur 10 reste résistant après plusieurs traitements médicamenteux. Et pourtant, il faut continuer à tout mettre en œuvre pour parvenir au rétablissement. En tant que patient souffrant de dépression, vous courez jusqu’à 85 % de risque de rechuter, et en moyenne 20 % de risque d’entrer en dépression chronique. Si les traitements médicaux ou psychothérapeutiques ne donnent pas les résultats escomptés, il est peut-être temps de chercher d’autres solutions.

L’électroconvulsivothérapie (ECT)

Professeur Dr Pascal Sienaert, psychiatre, troubles de l’humeur UPC KU Leuven

ECT est l’abréviation d’électroconvulsivothérapie, que l’on connaît mieux dans la langue populaire sous le terme d’« électrochocs ». Lors de l’ECT, une impulsion électrique est administrée sous anesthésie générale, provoquant une décharge ou une convulsion dans le cerveau. L’ECT est utilisée dans les cas de dépression sévère. Comme beaucoup de médicaments sont disponibles aujourd’hui, l’ECT n’est généralement utilisée que lorsque le traitement médicamenteux ou les séances de psychothérapie n’ont pas eu un effet suffisant. Si certains médicaments ne peuvent pas être utilisés ou si un effet très rapide est nécessaire, une ECT peut être un choix salvateur. L’ECT peut également être une alternative sûre pour certains patients âgés ou pendant la grossesse, si le traitement par médicaments n’est pas toléré ou est contreindiqué.

Rééquilibrer les neurotransmetteurs Dans les troubles psychiatriques, y compris la dépression, l’équilibre de certaines substances chimiques dans le cerveau est perturbé. Ces substances, les neurotransmetteurs, assurent la transmission des signaux d’une cellule nerveuse à l’autre. La décharge électrique associée à l’ECT rétablit l’équilibre de ces substances chimiques. L’ECT stimule également la sécrétion d’hormones dans le cerveau, lesquelles ont un effet régulateur sur notre humeur et nos pensées. Il a également été démontré que l’ECT induit la production de nouvelles cellules cérébrales. C’est également vrai en cas de traitement médicamenteux, mais l’ECT a un effet beaucoup plus puissant et plus rapide.

Comment se déroule le traitement ? L’ECT est réalisée par un psychiatre, un anesthésiste et une infirmière. Les traitements ont généralement lieu le matin. C’est pourquoi vous ne pouvez rien manger ni boire à partir de minuit avant le traitement. Vous pouvez cependant encore prendre vos médicaments du soir. Le matin, vous prenez seulement des médicaments pour le cœur et pour la tension artérielle avec une petite gorgée d’eau. Les traitements sont réalisés sous anesthésie générale. Vous ne sentez donc absolument rien. Dans la salle de traitement, l’anesthésiste vous administre une injection dans le bras qui vous endormira en une minute. Dès que vous dormirez, on vous injectera également un relaxant musculaire. Le psychiatre tiendra alors deux électrodes contre votre tête et vous administrera un courant électrique court et mesuré avec précision. Ce courant provoque une décharge générale des cellules nerveuses dans le cerveau. Cela entraîne également de légers spasmes musculaires dans tout le corps qui durent entre 20 et 60 secondes, mais vous ne vous rendrez compte de rien. Vous vous réveillerez quelques minutes plus tard, peut-être un peu confus. Vous resterez un moment en salle de réveil, où vous pourrez vous reposer. Votre tension artérielle et votre fréquence cardiaque seront mesurées à plusieurs reprises.

L’ECT a-t-elle des effets secondaires ? Oui, comme tout autre traitement. Les effets secondaires les plus fréquents de l’ECT sont les maux de tête le jour du traitement et les effets secondaires cognitifs. Grâce à un équipement moderne et à une technologie sophistiquée, le risque de troubles graves de la mémoire a été considérablement réduit. Plus de la moitié des patients constatent qu’ils sont moins capables de se souvenir de nouvelles choses pendant la période de cure par ECT, laquelle dure habituellement quelques semaines. Par exemple, vous oublierez plus facilement un rendez-vous fixé auparavant. Habituellement, ce problème disparaît en quelques jours ou quelques semaines après l’arrêt du traitement. Environ un patient sur dix éprouve des difficultés à se souvenir d’événements datant de la période qui précède le traitement. Il souffre ainsi de « trous de mémoire » qui sont parfois permanents. Ces problèmes n’affectent généralement pas la vie quotidienne, mais ils sont très gênants.

Pr Dr Chris Baeken, Service de psychiatrie, UZGent, UZBrussel

Qu’est-ce que la SMTr ?

La stimulation magnétique transcrânienne répétitive (SMTr) est une technique par laquelle le cortex cérébral est stimulé par des champs électromagnétiques. Pour générer ces champs, on maintient à proximité du crâne du patient une bobine de cuivre enfermée dans un boîtier. Les champs électromagnétiques sont suffisamment puissants pour stimuler le cortex cérébral à travers le cuir chevelu et le crâne. En stimulant de façon répétée les impulsions magnétiques, l’activité cérébrale peut être modifiée.

Navigation contrôlée par ordinateur dans le cerveau Un traitement par SMTr se déroule à raison de séances quotidiennes, pendant au moins quatre semaines. Un système de navigation commandé par ordinateur crée une reconstruction tridimensionnelle du cerveau, de sorte que la stimulation peut être effectuée avec une précision millimétrique. Le patient se voit équipé d’une protection auditive pour étouffer le son de la bobine. La stimulation magnétique transcrânienne répétitive (SMTr) n’est pas remboursée en Belgique pour le moment. Mais cette technique a depuis longtemps dépassé le stade expérimental. Dans le monde anglo-saxon en particulier, la SMTr est proposée comme traitement de première ligne. Il y a relativement peu de contreindications, la procédure est sans danger et les effets secondaires sont limités à de légers maux de tête, qui sont même plutôt rares. Il n’y a pas d’autres médicaments associés et le traitement peut se faire en consultation externe, il ne nécessite donc pas d’hospitalisation. Le patient est assis sur une chaise et la bobine est maintenue contre sa tête. Le traitement n’a donc rien d’invasif et il ne faut pas être sous anesthésie comme pour l’ECT (électroconvulsivothérapie). Cependant, la SMTr est un traitement aigu dont les effets cliniques ne devraient se manifester qu’au bout de quelques semaines. Cela signifie que vous ne devez pas immédiatement arrêter le traitement si le résultat est favorable, car le risque de rechute reste réel. D’où la nécessité de séances de suivi, qu’elles soient ou non proposées en association avec d’autres formes de traitement.

La SMTr ne convient pas ou convient moins aux patients déprimés qui : • portent des implants métalliques dans la tête • portent un pacemaker • ont eu un infarctus du myocarde • présentent ou ont présenté des crises d’épilepsie • ont subi une intervention de neurochirurgie

Qu’est-ce que la STCC ?

L’abréviation STCC signifie stimulation transcrânienne à courant continu ou stimulation transcrânienne à courant direct.

Dans la STCC, un courant électrique est envoyé entre deux électrodes, dont au moins une est fixée au crâne. La différence avec les formes « classiques » de stimulation électrique du cerveau est la faible intensité du courant (jusqu’à ± 2 mA, un courant des centaines de fois plus faible que celui utilisé pour l’ECT). La stimulation n’est donc pas douloureuse et, dans certains cas, passe même inaperçue. Comme dans le cas de la SMTr, les effets de la STCC persistent quelque temps après la stimulation. Ils ont un un effet sur les processus cérébraux.

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Pensées suicidaires

4%

des personnes atteintes de dépression se suicident.

50%

des personnes qui décèdent des suites d’un suicide présentaient auparavant des symptômes dépressifs.

Le risque de suicide est le plus élevé :

• Dans les premiers mois suivant le diagnostic • Dans les premières semaines suivant l’hospitalisation en psychiatrie • Chez les personnes souffrant de dépression modérée

Facteurs de risque supplémentaires

• Tentatives de suicide antérieures • Problèmes psychiatriques dans la famille • Sentiment de désespoir • Pensées suicidaires aiguës • Abus de substances (drogues, alcool, médicaments) • Troubles anxieux • Troubles de la personnalité

Pensez-vous parfois au suicide ?

Si oui, c’est comme pour la dépression : sachez que vous êtes loin d’être un cas isolé. C’est encore plus vrai en Belgique, un pays où les taux de suicide sont malheureusement fort élevés depuis des années. Bien sûr, tous les suicides ne peuvent pas être attribués à la dépression. Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles les gens décident de quitter la vie. Mais si vous avez des pensées suicidaires, il est crucial de les exprimer et d’obtenir de l’aide à temps.

Comment reconnaître les signaux ?

Afin de prévenir le suicide ou les tentatives de suicide chez les personnes présentant des symptômes dépressifs, il faut reconnaître précocement les signaux qui peuvent indiquer des pensées suicidaires et oser aborder ce sujet et en discuter.

Changement de comportement : problèmes de concentration, consommation d’alcool ou de drogues, comportement imprudent, excitation, agitation, irritabilité, anxiété excessive, problèmes d’alimentation, troubles du sommeil... Soyez surtout vigilants si ce comportement est nouveau, s’aggrave manifestement ou est lié à un deuil, un événement douloureux ou un autre changement majeur.

Changement émotionnel : manifester plus souvent de l’agacement ou de la colère, être beaucoup plus apathique, pleurer plus facilement, avoir des sautes d’humeur alternant rapidement. Le désespoir est un sentiment fortement lié aux pensées suicidaires.

Repli sur soi : s’isoler du monde extérieur, réduire les rencontres avec amis et famille, être plus silencieux, être plus introspectif et sortir plus rarement de chez soi.

Exprimer verbalement son mal-être : dire que l’on ne va pas bien, par exemple avec des phrases comme : « Je n’en peux plus » ou « C’est fini, je ne peux plus continuer ainsi ». Ou au contraire en éludant les questions concernant son propre bien-être : « Oui, ça va… » ou « Je ne veux

pas t’ennuyer avec mes problèmes ». Il faut surtout être attentif lorsque plusieurs de ces signaux sont présents en même temps et qu’ils se manifestent pendant une période prolongée : cela peut indiquer un besoin d’aide chez la personne dépressive. Mais gardez à l’esprit que ces signaux sont également fréquents chez les personnes déprimées n’ayant aucune pensée suicidaire. Afin de pouvoir offrir le soutien le plus approprié, il est donc important d’aborder explicitement le sujet des pensées suicidaires. www.preventionsuicide.be

Comment en parler avec les autres ?

Parler de suicide est un grand tabou. L’anxiété et la honte jouent souvent un rôle décisif. « Ils vont penser que je suis fou (folle) / faible / stupide. » « Ils vont me faire interner. » « J’ai peur des réactions embarrassantes ou des reproches. » « Ils vont le répéter à tout le monde. » « J’ai honte de mes problèmes/pensées. »

D’autres éléments qui peuvent constituer un obstacle sont les expériences négatives connues précédemment avec des services d’aide ou bien l’idée que vous devez pouvoir vous en sortir seul(e) :« Les autres ne peuvent pas m’aider de toute façon. » « Je dois résoudre mes propres problèmes. » « Je ne veux pas être un fardeau pour les autres. »

Cependant, il est important de demander de l’aide si vous vous sentez incapable de remonter la pente seul(e). Parler ouvertement de ce qui vous angoisse le plus peut vous soulager et vous aider à clarifier vos pensées. Votre interlocuteur peut vous encourager à prendre du recul, ce qui permet de mieux voir les choses, d’établir des connexions et parfois même de trouver des solutions auxquelles vous n’auriez pas pu penser par vous-même. Le fait de parler de vos problèmes avec quelqu’un en qui vous avez confiance peut vous aider à vous sentir moins seul(e) et à écourter la phase de l’aide professionnelle. Réfléchissez bien à qui vous voulez parler. Trouvez une personne en qui vous avez confiance et dont vous estimez qu’elle sera disposée à discuter de vos problèmes. Préparez bien cette conversation. Structurez ce que vous voulez raconter, rendez votre récit aussi concret que possible, réfléchissez à ce que vous attendez de cette personne. Choisissez un moment tranquille où vous avez tous les deux le temps de dialoguer. Il est important que vous puissiez parler ouvertement et

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