Baptiste Roux

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ĂŠditions joca seria ISBN 978-2-84-09-91-7

Diffusion/distribution Les Belles Lettres



Texte de Christian Gattinoni Texte de Fabienne Fulchéri Lexique Fabienne Fulchéri / Baptiste Roux Textes de Charles Pennequin Exposition au Transpalette, Bourges Exposition à la Lune en Parachute, Epinal Exposition au centre d'art Passages, Troyes Pièces récentes et expositions de groupe Biographie


Un peintre de batailles

A battle painter

Je hais les dégringolades de mon regard que je ne peux retenir de ripper sur les froides surfaces des peintures prétendues numériques parce qu’elles singent la fluidité asexuée des formes logicielles. J’ai besoin d’accroches en résistance, de points d’impacts pour tendre les lignes de mire critiques que j’organise en surface d’œuvre ou dans leur latéralité. En ce domaine je préfère avoir à me forcer à marquer au poil quelque bête ballonnée, à sa bedaine de matière boursouflée comme à son petit bedon de mauvaise bouffe fluo. Dans ses micro-ondes picturaux Baptiste Roux concocte ses recettes de fooding acrylo-plastique, je le soupçonne d’assaisonner en gibelotte pixellisées les lapins fluos des basses-cours d’Eduardo Kac , à vérifier en exposition.

I hate the sliding plunges and the cold surfaces of supposedly digital paintings (so called because they imitate passionless numerical forms.) I need a grip, points of anchorage, from which my regard is torn in all directions. I want to be roped, wrapped, tied, and gagged like a hog-tied gaz-boated beef. An explosive belly of bad food, fluo. In his micro-wave oven Baptiste Roux concocts his recipes of an acryloplastic fooding, seasoned and gamey. Pixelized fluo rabbit from the kitchen garden of Edwardo Kac (to be verified at the exposition).

Analysant la pensée de Vilem Flusser , Jean Louis Poitevin évoque la coupure dadaïste en écrivant que « le verbe et l’image sont crucifiés, déchirés et les appareils vont tenter de réparer cette déchirure ». Ce type de crise se trouve ici rejouée sur la peau des images tendues sur les murs et marouflés sur les matières obscènes de la logo-bouffe mondialisée qui se répand dans toutes ses dimensions. De telles pratiques plurielles se sont détachées des illusions scabreuses de sauver les coulisses de la post-histoire, non plus que de réécrire plastiquement l’évangile écolo du no-logo. Pas plus d’incarnation possible dans les arrièrecuisines chimiques des pétro-organismes. Les logos sont recuits à la sauce glocal à la mode Virilio en français dans le texte mais en capitales 56 points qui bavent de leur colorisation flash et pasteurisation des reprises

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Analyzing the thought of Villem Flusser, Jean-Louis Poitevin evokes the dadaist cut, writing : “the word and image are crucified, torn, and work is going to try to repair the tear.” We find there types of crises replayed on the skin of the images on the walls, marouflaged on the obscene material of the global word-food spreading in every direction. Such plural practices are detached from scabrous illusions conserved in the wings of post history museums. Nor are they a plastic re-write of the evangelical ecolo of the non-logo. Nor are they the possible incarnation of back-kitchen chemistries of petroorganisms. The logos are recooked in the glocal, “à la mode de Virilio”, in French in the text but in capitals (56 points) which drool their color flash and pasturisations as giant repairs labelled “Déhanchement Cerebral.” Just as the import/export crates crowd the scene of the Flemish Koen Augustinien, Company C of the B, for a battle of identities choreographed by


géantes sous le label des « déhanchements cérébraux ». De même que les caisses « d’Import/Export » surchargent la scène flamande de Koen Augustinen, Compagnie C. de la B., pour une bataille des identités chorégraphiées par delà « le cauchemar de Darwin » , les produits de base débarquent directement sans autre forme de transit commercial de Nagaland avec les concours freestyle de visages ou de corps ennemis, dans la logorrhée des grands corps malades de leur propre médiatisation.1 Une topologie en extension anamorphique brouille et rénove les codes picturaux. Formes et images glissent des murs aux surfaces au sol et se dégradent de la 2D dessinée en PAO peinte à une 3D froissée dans la masse. Cette cartographie de catastrophe démarque les nouveaux terrains des conflits pour lesquels Baptiste Roux se fait peintre de nos batailles, il se donne toutes les qualités que Diderot dans le « Salon de 1761 » en exigeait. « C’est qu’il faut être un grand coloriste, un grand dessinateur, un savant et délicat imitateur de la nature, avoir une prodigieuse variété de ressources dans l’imagination, inventer une infinité d’accidents particuliers et de petites actions, exceller dans les détails posséder toutes les qualités d’un grand peintre et cela dans un haut degré pour contre-balancer la froideur, la monotonie et le dégoût des ces longues files de soldats (et la symétrie de notre tactique) ». En repérage dans cette « zone d’activité passagère » Baptiste Roux agit en hacker du désir pour un body op art post pop, logotomisé par la société du fooding plastifié – Martin Parr en a constitué le catalogue photographique de

“The nightmare of Darwin”, the raw products are unloaded directly from the ground drawn on pac painted paper crumpling and wrinkling into a 3D mass without an other form of commercial transit from Nagaland with the participation of freestyle faces or enemy bodies in a logorhea of large sick self-mediatization. Painterly codes an extention of topological anamorphic. And scrambled. And renewed. Forms and images slide from the wall on PAO painted paper and accumulate in a crumpled wrinkled mass. This cartography of catastrophe marks new spaces of conflict for which Baptiste Roux has had our battles painted. He gives himself all the qualities that Diderot demanded in the 1761 Salon : “What makes a great colorist, a great draughtsman, a knowledgeable and sensitive imitater of nature who has a prodigious variety of imagination and invention of an infinity of particular accidents and subtle gestures, and excels in the details and posseses all the qualities of a great painter, to counterbalance the coldness, the monotony and the disgust of these long lines of soldiers (and the symmetry of our tactic.” 1 Locating the “zone of passing activity”, Baptiste Roux acts as a hacker of desire for a body-op art-post pop “logophied” by a society of plastic fooding (Martin Parr constituted the photographed catalogue from England and Japon.) B.R. added, in edition the “Erratum alimentaire” on wall drawing and plastified painting as well as detachable wall drawings for cultivated consumers, an operation which brings together other forms of design such as those that Jennifer Morton evokes in

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l’Angleterre au Japon. Il y ajoute en édition de tête ses « erratum alimentaires » et les walls drawing et papiers plastifiés comme autant d’avertissements à blanc pour un consommateur cultivé. Opération qui rejoint d’autres formes de design désirant comme celle que Jennifer Morton évoque à propos de l’objet « Huitième ciel » de Matali Crasset. Si la forme empruntait les chemins de l’imagination, était capable non plus de satisfaire à une fonction, mais en révélant de nouvelles satisfactions dire que l’objet est toujours une utopie active » 2 Ce genre de pratique flirte à distance par un humour corrosif avec les nouvelles sciences du corps en kit , lignes charnelles et membranes plus ou moins translucides tracent les « Petroorganes » et les « Hypercarnes » des écorchés cybernétiques d’une biotechnographie. Tandis que les dessins muraux se décalquent comme autant de projections mentales organiques façon ombre de l’échelle d’Hiroshima assistée par impression graphique. Baptiste Roux est un peintre de batailles des cyber-biotechnographies

Christian Gattinoni

Christian Gattinoni est membre de l’association internationale des critiques d’art. Enseignant à l’ENSP d’Arles 1. voir site www.labelroux.org 2. Aréa revue)s( n°15 « Design no design », automne 2007

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relation to the object “Huitième ciel” de Matali Grasset : “If the form took roads of imagination and wasn’t capable to satisfy a function, but on realizing new dissatisfaction, we can say that the object in still an active utopia.” 2 This kind of work flirts at distance by a corrosive humor with the new kits of body sciences, carnal lines and membranes, more or less translucid, trace the “Patroorganes” et “Hypercarnes” of scalped cybernetics and biotechnography. While the wall drawings imprinted, as are the organic mental projections, giving the impression of the scale of Hiroshima assisted by graphic impression. Baptiste Roux is a painter of cyberbiotechnic battles.

1. www.labelroux.org 2. Aréa revues)s( n°15 « Design no design » Autumn 2007


Communication interne, 168x200cm, impression sur bâche- 2008

Aussi brillantes et pimpantes, que l’écran d’ordinateur qui les a vues naître, les images de Baptiste Roux semblent vous considérer de prime abord avec l’orgueil de ceux qui se savent parfaits, auréolés de mots tels que nouvelles technologies, logiciel ou modélisation. Reproduit sur des plaques de polyester extrudé (plastique transparent), un motif central, sorte d’atome hybride, s’impose à la vue bien que souvent revêtu d’une tenue de camouflage. Si l’on croit déceler dans ces œuvres les univers de la science-fiction, du jeu vidéo, ou des logotypes, il est généralement impossible de s’y raccrocher, la forme comme en perpétuel mouvement se plaît à éluder toute identification. Mais chassez le naturel, il revient au galop : Baptiste Roux n’aime définitivement pas se laisser bercer par une sereine mais illusoire perfection. Comme une feuille de papier que l’on aurait arrachée à sa matrice, l’artiste maltraite son support, le froisse, le distend, le tord, le perfore et le dilate jusqu’à faire sortir la forme de ses gonds. Cette autonomie rudement acquise est d’ailleurs en train de gagner du terrain. La forme conquiert la peau des murs, se faisant tour à tour papier peint ou tatouage, directement réalisée sur la paroi, elle se répand du sol au plafond à l’image des mousses dont les contours informes semblent échapper à toute contrainte.

Fabienne Fulchéri

As brilliant and clean as the computer screen that generated them, Baptiste Roux’s images at first seem to confront the viewer with the desire for plastic perfection that words like new technology, software or modelisation suggest. The works reproduced on transparent sheets of extruded plastic with an often camouflaged central motif, while related and nourished by the world of science fiction, video games, or logotypes, it is generally impossible to pin down and identify these perpetually moving forms. Baptiste Roux has no affection for the illusion of perfection digital tools can fabricate. As one crumples a sheaf of paper, the artist mistreats his support. He wrinkles it, stretches it, twists it, perforates it and dilates it. This brutal autonomy conquers the smooth skin of the walls, transforming itself into tattoo or wallpaper sometimes realized directly on the wall themselves. The forms can extend both to floor and ceiling, in the shape of what seems to be arbitrary irruptions of foam.

Fabienne Fulchéri est commissaire indépendante et critique d'art

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exposition 2004

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Série « Faussaire » 280x405 cm impression sur papier, 2004 / Vue d'ensemble


Bulles de balles à blancs, 320x458cm, wall painting, 2004

Télévision de masse à boire, 245x258cm, wall painting, 2004


Organe à drapeau, 251x598cm, techniques mixtes, 2001-04 Déhanchement cérébral, 500x645cm, techniques mixtes, 2004


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Série « Hypercarne », 230x205 cm, impression sur papier, 2004

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Petroorgane, 258x263 cm, impression sur papier, 2004

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Quoi, 230x183 cm, impression sur papier, 2004

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Écusson, 183x230 cm, impression sur papier, 2004

Vue d'ensemble de l'installation Épinal VS Vegas

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Série « Hypercarne », 258x210 cm, impression sur papier, 2004

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trop d’images, trop de pensées dedans, trop de viande qui s’agitent, et ça s’agite dans la pensée, ça s’éparpille dans comment ça pense les images, ça s’emmèle dans trop de pas assez de vie, pas assez du vivant dans l’image, trop de mort donc, images trop suffisamment mortes, images suffisantes donc souvent trop mortes de pas assez, pas suffisamment de pensées, ou alors des pensées suffisantes, je veux dire d’images, images suffisantes, tout un tas d’images qui font que ça pense en plus, ou en moins, l’image en moins peut plus penser plus, car il y trop de plus dans son moins, mais pas en surplus le plus, un juste plus, des petits plus pour un grand moins, et elle dégueule, l’image peut plus que dégueuler son image, c’est-à-dire le trop plein de mort qui voudrait la vie, pas assez de vie, toute la vie ratatinée dedans, dans la limite, alors qu’il n’y a pas de limites à l’écrasement, ça déborde, le cadre demande le débordement, le cadre appelle le débordé, le dégueulé, la soupe, la viande de concept l’image demande ça, qu’on gobe tous ses concepts, que toute image soit concepétée, que toute image soit une bidoche à être, que toute image soit et que tout image fut, un fut de pensées dans un trop plein de viandes qui la remue

Charles Pennequin 24


De la tête aux pieds plats, 280x325 cm, impression sur bâche, 2005 (réalisé à partir d'une performance à base de tête et de pieds de veaux et de colorants alimentaires)

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il est de plus en plus délicat de vivre vivre est délicat il est de plus en plus dur de se maintenir en c'est chaud c'est chaud de vivre aujourd'hui il est de plus en plus impossible car on est cerné on est entouré on est contraint la vie nous contraint à ne pas vivre ou alors ou alors faut pas être délicat faut pas vouloir se planquer il est de plus en plus difficile de se planquer dans la vie de se murer de se calfeutrer vivant de plus en plus dur de planquer ses moignons dans du vivant son moi et ses moignons ses petits moi gnons dedans bien au chaud il est de plus en plus délicat de planquer ses moignons bien au chaud dans la vie

Charles Pennequin 26


Confort nocturne 189x142 cm impression sur PVC, 2005 (collection privĂŠe)

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Overdrive Charlot a trouvé les traces d’une grosse bête dont on a dit qu’elle est morte il y a fort longtemps et dont on n’a plus de nouvelles depuis la naissance du nous. Overdrive Charlot dit que depuis nous tout petit on n’a pas de nouvelles à part des traces repérées par lui. Lui c’est Overdrive Charlot qui nous dit qu’il a repéré des sortes de détritus de vies sonores d’avant la vie à nous et ça faisait boum. Boum quand mon cœur fait boum dit Charlot Overdrive. Boum quand la vie fait boum d’avant la vie et qu’on entend encore des bouts de chansonnettes qui viennent du son d’avant qu’on fasse du son, d’avant qu’on fasse des bruits il y a le bruit d’une grosse bête qui marche ou qui fait boum tout le temps, et on a retrouvé les traces de ça et donc on pense que bientôt, grâce à Overdrive Charlot, on pourra devant nous recréer la bête immense qui fait boum quand mon cœur fait boum bien avant qu’on soit né. Boum aussi d’avant toute naissance il y a le boum de la naissance d’avant tout et Charlot sait précisément où ça se situe c’est-à-dire nulle part, il reste juste à reconstituer quelques chaînons manquants, disons une bonne grosse chaîne à chaînons qui manquent à l’histoire de boum, mais peu importe, j’ai des munitions ici, et puis j’ai toute la vie pour ça, pour réécouter la bande originale du film de ce n’est qu’un début continuons le combat de l’étrangeté toute bizarre, la bande sonore de comment c’est venu le pourquoi de quelque chose qui serait. Et dans la chanson, dit le Charlot Overdrivé, le premier couplet est facilement reconstituable car c’est l’histoire d’une bête grosse et on voit qu’un magma ou un bout de bête et ça boue dedans (dans le bout de bête). Un bon gros bout de bête en magma qui boue et ça chauffe et puis ça diminue au fur et à mesure jusqu’à atteindre des températures normales (un peu moins d’un million de degrés) et puis là le chaud et le froid rentrent en confusion, une vieille querelle, un conflit fluctuant à vous couper le souffle, etc. Donc : boum. C’est aussi bête que ça, dit le Charlot qui n’en est pas à son premier coup d’essai dans l’étude du Bizarre. Charles Pennequin 28


En stock, 303x286 cm, impression sur b창che, 2005

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Meta-motor, 152x158x31 cm, impression sur polyester extrudĂŠ, 2005 (collection privĂŠe)

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Vues d'ensemble

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Re-Ubu, 320x380 cm, wall drawing, 2005

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En haut : Vue d'ensemble En bas : Sans titre, 155x182cm, wall drawing, 2005

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Série « Attraction plastiquée », 200 cm, impression sur PVC, 2005

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Série « Attraction plastiquée », 200 cm, impression sur PVC, 2006

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Série « Attraction plastiquée », 200 cm, impression sur PVC, 2006

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c’est rigolo la vie. nous sommes dans le rire. en plein dedans. nous sommes dedans les mains tendues les gorges avec. les gorges déployées les mains tendues les doigts étirés. hé hé. nous sommes dans le rire les pieds devant. nous sommes raplatis. nous sommes dans le rire nous tirons. ça tire le rire. c’est rigolo la vie on fonce mains pieds doigts tout devant. c’est une force. nous tournons. nous tassons. nous creusons. nous sommes au fond du fond. c’est le rire. c’est rigolo. nous sommes rigolos car la vie est rigolote. c’est rigolo de vivre les pieds devant.

Charles Pennequin 42


Multiservice, 200x214 cm, impression sur bâche, 2005 (collection privÊe)

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L'UN L'UNE L'UNI VERS L'UNE L'UN UNIVERS EST L'UN OU EST L'UNE

IVRE ERE

C'EST

OU UNIL

VER EST OUEST

OU OU

ES TUNE

CHATTE CHARTER CHARTTE CHARLET CHATLES CHALRES RACHA CHARRA TTE TRAH SHA RTL RATE TACHE ETAT

ET CHATTE FAIT RIRE ?

Charles Pennequin 44


Langue passante, 42x38x58 cm, technique mixte, 2007

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À vendre, 155x175x37 cm, impression sur polyester extrudé, 2006 (collection privée)

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Wanted, 35x35x12 cm, impression sur polyester extrudĂŠ, 2005 (collection privĂŠe)

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il faut vider le trou qui nous sĂŠpare

Charles Pennequin 52


Un grand pas pour l'homme, 192x148 cm, impression sur PVC, 2005 53


ArachnĂŠplast, 182x154x65 cm, impression sur polyester extrudĂŠ, 2008

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Série « Attraction plastiquée », 200 cm impression sur PVC, 2006

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ĂŠditions joca seria ISBN 978-2-84-09-91-7

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