Architecture pour des êtres pensants.

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RAPPORT D’ETUDES ECOLE NATIONALE SUPERIEURE D’ARCHITECTURE DE GRENOBLE





ARCHITECTURE POUR DES ÊTRES PENSANTS Julie Brun . 2013


Dessin

Modern Jazz Poterie Equitation

Tunisie Etats-Unis

Photographie

Couture

Benin

Animatrice en séjour pour handicapés - Vac’hands Espagne/Italie/Croatie/Allemagne/Turquie Serveuse au FCG Crète

Angleterre


Naissance à Lyon

1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002

Entrée à l’Institution Saint Joseph de Tassin

2003 2004 2005 2006 2007

Stage chez ATELIER 13 ARCHITECTURE

Membre actif du BDA de l’ENSAG

Entrée à l’ENSAG

2008 2009 2010

Trésorière du BDA de l’ENSAG

Stage chez VINCI

2011

Présidente de l’association LACHARETTE

Stage chez AGC, Agence Giovanni Cappai

2012 2013



PREAMBULE



L’architecture est une discipline complexe et multiple. Mon interet pour cet art de bâtir me semble aujourd’hui être évidence. Pourtant, je suis encore loin d’avoir trouvé toutes les pièces du puzzle complexe qui constituent la propre vision de l’architecte en devenir, que je suis. Je me vois encore, enfant, dessiner mon habitat idéal : une maison, un jardin, un arbre et une famille. Vision simpliste et propre à la culture occidentale que l’on a à 6 ans. D’ailleurs, j’aurais aimé collecter les dessins de la parfaite maison des enfants de chaque pays de notre planète Terre, pour voir se composer une mappe monde à travers ces œuvres enfantines. Entre questionnement et gain de maturité, l’évolution de mes pensées donne le vertige. Il m’est presque difficile de me souvenir de ma vision de l’architecture trois ans auparavant, à mon entrée à l’ENSAG. Née dans un quartier résidentiel, je réduisais l’architecture à l’habitat individuel. L’aspect esthétique de l’architecture m’apparaissait comme un point primordial. J’appréciais l’architecture dite contemporaine, sans même connaitre la définition précise de cette qualification et ma maigre culture architecturale s’édifiait sur quelques grands noms d’architectes occidentaux tels que LeCorbusier, Mies Van Der Rohe ou encore Franck Lord Wright.


Aujourd’hui, ma vision de l’architecture n’est définitivement plus la même. Bien que j’apprécie la beauté d’un édifice, cette notion, si subjective, ne me semble pas être l’enjeu premier de l’architecture. J’ai tout d’abord pris conscience de l’étroit lien des périodes de l’histoire et des politiques qui les accompagnent avec l’évolution des formes architecturales, pour m’interroger sur l’impact de l’environnement bâti et planifié par l’esprit et la main de l’Homme sur la société. La puissance de cet impact, d’un point de vue social, économique, politique, et environnemental, m’a frappé lorsque j’ai réalisé les nombreuses répercussions que peuvent avoir une maison individuelle de banlieue comme celle dans laquelle j’ai grandi et que je dessinais étant enfant. Ma culture architecturale s’édifie au fil de mes enseignements et de ma curiosité. Aujourd’hui je parlerais plutôt de TYIN Architects ou de Renzo Piano pour l’importance qu’ils portent à la société pour laquelle ils conçoivent un édifice ou encore de Tschumi qui intègre l’usager dans son architecture et leur complémentarité. Je suis aujourd’hui plus sensible à la vocation humaniste de l’architecture. J’associe la puissance de l’architecture à la multiplicité de ses formes liée à la diversité des cultures des habitants de la Terre. Les différents modes de vie et coutumes, qui se rattachent à une


société, se traduisent à travers leur manière de fabriquer l’espace. La conception architecturale est devenue à mes yeux un ensemble complexe qui doit s’inscrire dans un contexte naturel et urbain et offrir des usages spécifiques répondant aux attentes de bien-être de l’homme qui l’habite. Cette dimension culturelle qui participe à fonder l’architecture me parait essentielle et se ressent à toutes les échelles, du grand territoire à l’espace intime de l’Homme. Depuis que j’ai compris ce lien fort entre les cultures et l’architecture, mon regard sur les villes est radicalement différent. Je n’ai d’ailleurs jamais autant voyagé que depuis mon entrée à l’ENSAG. J’accorde énormément d’importance à la richesse du voyage pour mon apprentissage. L’architecte est concepteur du lieu, base de la vie sociale. J’ai réellement pris conscience de l’importance du rôle social de l’architecte durant ces trois années de licence, une étape pleine de découvertes, d’enseignements, de voyages, de rencontres, de pensées, de changement. J’aime définir l’architecture d’action de l’Homme pour l’Homme et j’apprends jour après jour à dévoiler les dimensions multiples de la conception architecturale qui jouent sur les milieux que nous vivons et transformons.


Entre dimension paysagère, urbaine, culturelle, historique et symbolique, deux entités sont liées: l’Homme et les milieux. Renzo Piano définit l’architecture comme étant un « phénomène local en ce qu’elle est liée aux traditions, aux cultures, à l’histoire, aux croyances religieuses, mais elle est aussi universelle, parce que les idées de protection et de religiosité sont universelles : de la cabane à la maison, à l’église »*. Cette pensée m’intrigue. L’architecte conçoit l’espace vécu, l’espace perçu. La question de réponse universelle dans un monde aux milieux si multiples se pose alors. L’Homme est à la fois universel et unique. L’architecte ne travaille pas seul, il est à l’écoute des usagers, mais aussi de leur milieu. L’architecture n’est pas qu’objet. C’est un ensemble cohérent entre le territoire, l’individu et son mode de vie. L’Histoire démontre que les réponses architecturales n’ont pas toujours été les bonnes. Les modes de vie ont évolué, des progrès s’opèrent de jour en jour, la nature se transforme, et l’homme reste toujours insatisfait. Cette notion de temps dépasse l’éventualité de réponse universelle, la qualifiant alors d’intemporelle. Ainsi, parmi cette complexité mêlant cultures, histoires, et temporalité, l’architecte peut-il prétendre donner une réponse architecturale pérenne, satisfaisante pour l’Homme ? * Renzo PIANO, La désobéissance de l’architecte, Paris, Arléa, 2007.


Pour trouver une réponse à cette question, s’il y en a une, je cherche à comprendre plus profondément ce lien entre l’architecture et les cultures sous sa dimension universelle et locale. La notion temporelle qui l’accompagne m’amène à me rediriger vers la posture que je devrais acquérir en tant qu’architecte pour connaitre et comprendre le passé afin de penser et agir aujourd’hui. Ma vision de l’architecture trouve ses bases sur mes expériences et les enseignements que j’ai reçus. Faire le point dans le cadre du rapport d’études, ce moment de retour personnel sur l’évolution de mes pensées, mes connaissances, mes envies et mes projets me permet d’avancer vers la direction que je souhaite prendre en tant qu’architecte de demain.



ARCHITECTURE, REFLET D’UNE CULTURE



Le monde est un puzzle. Il se compose de territoires, sur lesquels vivent de multiples sociétés, créatrices de villes et d’espaces. La société s’articule avec le terme culture. Cet ensemble d’êtres humains vit selon un système qu’il a lui même élaboré, devenant alors une civilisation. J’ai pris conscience depuis le commencement de mes études supérieures de l’important lien qui existe entre l’architecture et la culture. Celle-ci fait partie intégrante de ce métier. Elle est indissociable de la fabrication des villes et des territoires du monde. Construire des espaces pouvant être vécus et perçus par l’homme, c’est bâtir en réponse à des modes de vie d’une société qui participe à un même système.Je m’interroge aujourd’hui sur la portée de ce terme, la culture. A-t-elle la même définition à toutes les échelles ? Pouvons nous parler d’une culture universelle ou au contraire locale ? Qu’est ce que ce terme englobe et que doit en tirer un architecte pour édifier la ville, l’espace public, l’habitat ? Il me semble difficile pour un architecte de comprendre une culture qui n’est pas la sienne, de dissocier les différences et les similitudes qui existent entre les différentes sociétés de notre monde. En tant que future bâtisseuse, j’ai cette envie de pouvoir construire un environnement répondant au bien être de chacun et pour tous.


Habiter (v.i) : avoir son domicile quelque part, y séjourner de manière relativement permanente, y VIVRE. *

* GARNIER Y. et VINCINGUERRA M., Le Petit Larousse illustré , 2007, Paris, Larousse.


A ce jour, j’ai cette impression étrange que je m’épanouirais plus encore en travaillant sur des terres inconnues. Apprendre de nouveaux modes de vie, de nouvelles croyances et symboliques pour m’enrichir tout en travaillant. Chaque projet est comme une rencontre, on découvre un nouveau système de société et une multitude de réponse architecturale.

De l’universalité à la spécificité de la culture de l’habiter. Cette notion de séjourner et vivre durablement dans un même lieu trouve sa dimension universelle à travers la capacité de l’homme à culturaliser son instinct de s’abriter. Cette transformation des données naturelles par l’Homme est ce qui nous différencie des animaux. La maison est donc le propre de l’humain et est induite d’une organisation de la société. Il existe ainsi une culture de l’habiter. Elle est spécifique à chaque société, selon ses valeurs, ses pratiques et sa localisation. Selon moi, la culture de l’habiter est tout d’abord un phénomène social. Elle évoque l’universalité à première vue, tout comme dans la définition du verbe habiter, mais se décline en de multiples représentations selon le groupe d’individu qu’elle touche. Elle devient donc locale.


La Piscine . Fabrique de solutions pour l’habitat


C’est en deuxième année, à travers l’enseignement de La Grande Ville comme état d’esprit de Céline Bonicco, que j’ai pris conscience de l’universalité des répercussions sociales de l’habitat. L’habitat répond à un besoin de repères qui est propre à l’Homme. L’individu trouve du réconfort et se sent protéger chez lui car il a connaissance de ce lieu et y retrouve ses marques. Le sentiment de cafard de l’enfant lorsqu’il est loin de chez lui illustre bien cette dimension. L’habitat apporte également un sentiment de reconnaissance sociale à l’Homme. Il trouve sa place dans la société à travers son habitat. Il fait ainsi parti d’un groupe d’individus et y trouve ses repères. Cela explique ainsi la difficulté d’insertion sociale d’un SDF. Dans le cadre de mes cours d’anglais, je me suis d’ailleurs intéressée à l’association La Piscine, fabrique de solution pour l’habitat, qui est un lieu d’expérimentation, de bricolage, de réflexion, de croisement de connaissances et de mise en mouvement autour du logement, de la ville et de la précarité. J’ai été sensible à cette association de Grenoble qui vise à lier d’un coté les gens de la rue, leur pouvoir de s’organiser, leur savoirs faire et les architectes, les travailleurs sociaux, les bénévoles et des militants prêts à apporter leurs compétences et leurs connaissances. Cela m’a poussé à imaginer un habitat mobile à l’attention des personnes sans domiciles.


C’est un espace qui leur permettrait de s’abriter pour répondre à leur besoin primaire mais c’est également un moyen de trouver une certaine reconnaissance puisque la société les prend en compte en leur offrant un espace qui leur est dédié mais également en les intégrant dans la conception de cet espace. Ce besoin de reconnaissance sociale de l’Homme à travers son habitat est l’objet du documentaire Women are heroes, de l’artiste JR. Du Brésil, au Cambodge en passant par l’Inde, le Kenya, il parcoure le monde entier pour rendre hommages aux femmes qui occupent un rôle essentiel dans la société mais qui sont victimes de guerres, viols et pauvreté. Témoignages de modes de vie et de culture, l’action de JR trouve sa forme dans l’exposition illégale de portraits immense de ses femmes qui habillent les murs des favelas du Brésil, et les toits en tôles ondulés des bidonvilles du Kenya. Ces portraits de femmes sont une revendication de leur existence et de leur dignité parfois perdue. Cette exposition artistique prend pour support ces mêmes villages précaires.


Le regard de ses femmes tapisse les murs pour mettre au grand jour ces sociétés face à ceux qui gardent les yeux fermés. JR, photographe de formation et artiste colleur d’affiches, JR n’a pas réalisé ce projet pour sublimer un cadre de vie misérable et rendre ces lieux jolis, mais nous propose l’idée surprenante de s’intéresser autrement à ces villages. Ces yeux représentent l’existence de ces Hommes, femmes, et enfants qui habitent sous ces toits et derrière ces murs.

« C’est un projet fait de bric et de broc, comme la favela elle-même. On s’est adapté à l’environnement dans cet univers où les toits des maisons sont en plastique et les revolvers des enfants en acier. On s’est débrouillé malgré les rues en pentes, les maisons chancelantes, les câbles électriques imprévisibles et les échanges de tirs qui traversent parfois plusieurs maisons »*

* JR, Women are heroes, documentaire, 2011.


Les regards tapissent les murs de Favelas du BrĂŠsil


Women are Heroes . JR



Quel lien existe-il entre les milieux et les modes de vie ?

La façon de vivre d’une société est liée au milieu dans lequel elle vit. Par le biais de l’enseignement de Aysegül Cankat, Cultures de l’habiter, en première année de Licence, j’ai pris connaissance de ces différents modes de vie qui définissent les multiples sociétés du monde.


Ces civilisations sont parfois reconnaissables à travers leur architecture. En effet, on ne vit pas de la même manière à Hanoï, qu’à Ouagadougou, ou encore au Cambodge. Et je n’en cite, ici, qu’un infime échantillon. J’aime découvrir ces environnements si différents et la façon qu’ont les Hommes de se les approprier, les transformer, les habiter. Tout en respectant leurs croyances, leurs pensées, leurs pratiques, cet ensemble d’être humains vit dans un milieu qu’il a dû transformer pour s’y installer. Je me pose alors la question de la nature du lien qui existe entre les Hommes et les territoires qu’ils habitent. L’Homme est il supérieur à la nature ? Construit-il son environnement, sa ville, en fonction du milieu ? Bien que nous disions devoir respecter la nature, l’édification des villes n’a pas toujours eu lieu en symbiose avec la nature quelle s’approprie. Bien que nous soyons influencés par un contexte naturel, les contraintes qu’il pose ne sont pas toujours simples à prendre en compte et l’Homme, de nature paresseuse, peut très facilement se tourner vers la simplicité pour imposer sa force et ses machines, laissant alors de coté les spécificités et le potentiel du territoire qu’il construit.


Augustin Berque, géographe, orientaliste et philosophe français, constate cette évolution du rapport entre l’homme et la nature de façon assez pessimiste. Il propose en réaction à cela, une nouvelle forme de comportement que devrait avoir l’Homme envers la nature. Il revient aux sources de l’identité d’un milieu, mêlant subjectivité de la perception, ressentis des individus sur celui-ci et objectivité phénoménale de l’action de l’homme sur la nature. Selon lui, l’individu n’a plus conscience de la nature qui l’entoure. Il souhaite faire ressurgir en l’Homme cette conscience des milieux, qui n’existe d’ailleurs qu’à travers lui même. Qualifiant l’action de l’homme de misanthropique, Augustin Berque aimerai rappeler à celui-ci que « la nature en soi n’a de sens ni par, ni pour l’Homme, mais a un sens dans l’Homme et autour de l’Homme »*. C’est cette complémentarité d’existence de l’Homme et de la nature qui permet l’édification d’un territoire. En lien avec cette approche théorique du contexte naturel par la lecture, j’ai pu faire l’expérience de la nature dans la conception en cours d’Arts Plastiques en deuxième année de Licence. Nos mains devenant branches et feuilles, nous laissions libre court à notre imaginaire pour représenter notre vision du monde à travers quelques taches et traits sur une feuille. Notre objet de représentation * BERQUE Augustin, Médiance de milieux en paysages, Paris, Editions Belin, 2000.


Projet d’Arts Plastiques . 2ème année


Firmanent . La nature comme outil de dessin


Nous avons pris conscience de la nature et choisi l’outil le plus approprié pour traduire nos idées. Bien que très abstrait, l’imagination et la créativité trouvent une grande force dans les formes que la nature nous a fait dessiner. Je ne parlerai pas de supériorité de la nature, mais plutôt de subordination de la

nature à l’homme.

J’ai retrouvé ce rapport hierarchique entre l’homme et la nature lors de la conception du projet d’une école et d’un jardin à Vizille, en studio de deuxième année, sous l’enseignement de Patrick Chedal-Anglay. Situé sur les hauteurs d’un rocher, dans les jardins du roi de Vizille, ce projet d’école devait réussir à lier le village en contrebas, le château de Vizille accroché au rocher, et les plaines agricoles à l’opposé. Ce rocher étant un espace de promenade pour les habitants, il paraissait impossible de mettre en place une route pour accéder à l’école. A travers la promenade, les vues et les usages, ce projet est un exemple premier de la prise de conscience du contexte dans lequel concevoir, et des modes de vie qu’a généré cet environnement. Ces contraintes de la nature étaient finalement des pistes pour la conception. Le milieu a dirigé le projet dans certaines directions, réduisant, certes, les possibilités de projet mais permettant une réponse cohérente pour l’environnement et l’homme.


Vizille . Projet 2ème année . Studio Chedal


27 Cubes . Projet 1ère année . Studio Putz


J’en viens alors à l’importance qu’a le contexte pour la conception architecturale. Je pourrais illustrer cela à travers un projet de première année, en studio Putz, les 27cubes. Sans programme, ni contexte, nous devions réussir à concevoir des espaces dans une trame régulière de 27 cubes. L’objectif était de créer des formes et une direction en les poussant jusqu’au maximum. Cet exercice m’est apparu assez difficile. Bien que je n’avais pas encore pris conscience de cette importance des milieux et des usagers, je n’ai pu pousser mon intention architectural jusqu’au bout, pensant instinctivement au bien être que cet espace procurerait à l’Homme. L’architecture devenait seulement objet et non espace vécu. Il me semble aujourd’hui inconcevable de faire un projet dans cette optique de forme et d’esthétique sans prendre en compte tout ce qu’il génère d’un point de vue social, environnemental, symbolique, culturel dans un temps continu. Aujourd’hui mes quelques expériences me permettent d’agir et de concevoir en mêlant contexte et usages, milieux et modes de vie pour permettre aux individus de vivre l’espace et de l’appréhender de manière positive, tout en respectant et prenant conscience du milieu dans lequel il vit.



L’architecte peut il concevoir en territoire inconnu ? Dorénavant, je ne peux dissocier la connaissance des modes de vie des individus et du contexte dans lequel ils vivent avec la conception architecturale. Je remets donc en question les capacités d’un architecte à concevoir en territoire inconnu. Pour la conception d’une Halle de Marché, au sein du studio Chedal-Anglay, en deuxième année, le site étant fictif, nous n’avions comme document qu’un simple plan masse d’une parcelle vide entourée de quelques bâtiments de différentes hauteurs et d’un jardin public. Nous n’avions aucune information sur la localisation géographique du site, de laquelle nous aurions pu en déduire les conditions naturelles à prendre en compte dans notre projet ou bien des matériaux locaux que nous aurions pu utiliser. Il me semble difficile de concevoir un projet sans pouvoir le mettre en lien avec le contexte qui l’entoure, ni connaitre la société qui l’habite. J’ai donc imaginé tous ces facteurs en faisant mon propre scénario sur les habitants de ce lieu. J’ai replacé ce site dans des


conditions telles que Grenoble, connaissant bien les conditions et les modes de vie occidentaux. Si nous faisons la comparaison avec un architecte qui doit concevoir un édifice sur une terre inconnue, est il capable de ne pas se laisser influencer par sa propre culture. Bien qu’il prenne connaissance des facteurs sociaux et naturels lié à un site, peut il répondre correctement à un programme ? Avec le Centre Culturel Tjibaou de Nouméa, Renzo Piano a relevé un challenge de respect des cultures et des traditions en 1991. En concevant cette lignée d’édifices qui devient paysage dans un horizon océanique, il crée un lien entre la culture locale et universelle, entre tradition et modernité. Devenant explorateur, il a pris connaissance de la culture kanake accompagnée d’un anthropologue, Alban Bensa, afin de répondre de façon la plus juste à cette société. Ce projet transforme les perceptions d’échelle. Une culture locale devient la référence principale d’une œuvre architecturale reconnue internationalement. En plus de prendre connaissance des pratiques et des valeurs d’une société qui lui était inconnue, il a même réussi à concilier

deux cultures au sein d’une même œuvre architecturale. Ce projet construit avec des outils et des techniques universels permet de placer la culture kanake au rang de civilisation moderne. Ce n’est pas un projet européen assaisonné à la culture kanake mais un édifice résolument kanak qui utilise les outils de son temps.


Centre Culturel Tjibaou . NoumĂŠa . Renzo Piano


Renzo Piano est un architecte auquel je suis très sensible car il apporte beaucoup d’importance au travail qui précèdent la conception et le dessin d’un projet, c’est-à-dire l’analyse du contexte dans lequel nous concevons. Il utilise le terme d’ architectureiceberg. Je trouve cette image très juste. En effet, nous voyons en premier lieu qu’un édifice lorsque nous observons une œuvre architecturale, mais la plus grande force de cette architecture réside dans le travail d’analyse antérieur à sa conception. Dans le cadre du studio Loiret, en 3ème année, j’ai pris beaucoup de plaisir à réaliser une analyse très poussée et détaillée sur le quartier de Berriat à Grenoble afin de savoir comment répondre un à programme de logements, et d’espace public. L’analyse se décline en 3 étapes, le constat, c’està-dire un état des lieux du site, le diagnostic, soit le bon et le mauvais de l’organisation existante, pour pouvoir définir les stratégies possibles afin d’améliorer ce lieu. Nous avons réalisé un projet urbain à l’échelle du quartier établissant un plan avec les axes à réhabiliter, les portes du quartier à améliorer ou concevoir, les équipements publics à transformer ou insérer dans le quartier, mais aussi les activités à promouvoir et les espaces verts à introduire ou améliorer.


Ce projet urbain s’édifie sur des informations que nous avons recueillis par la lecture de documents, l’analyse sur la place, et la discussion avec les habitants du quartier. Cette analyse donne lieu à un diagramme complexe, c’est a dire une

représentation visuelle et structurée des relations entres les concepts, les pratiques, la temporalité, les données statistiques se conférant à l’activité humaine, dans le but de

visualiser et clarifier les enjeux du programme. Je n’aurais jamais imaginé l’importance de cette analyse au début du semestre lorsque nous avons commencé ce travail, pensant que la culture occidentale était la même qu’importe le quartier d’une ville. J’ai finalement totalement découvert ce quartier de Grenoble qui se situe pourtant à quelques patés de maisons de chez moi. J’ai réalisé la différence qu’il peut y avoir entre les quartiers d’une même ville et la manière qu’ont les habitants d’y vivre.


ANALYSE ET OBSERVATION

URBAINE

CONSTATS

DIAGNOSTICS

STRATEGIES

NOMBREUX COMMERCES DE PROXIMITES ET AUTRES GRANDES CHAINES COMMERCIALES SONT IMPLANTES DANS LE QUARTIER.

CONTEXTE

PROGRAMMATIQUE

PROJET LOGEMENT COLLECTIF POLARITES THEMATIQUES AMENAGEMENT URBAIN USAGERS

COMMERCES DE PROXIMITE

CONTEXTE SITOLOGIQUE

CHAINES COMMERCIALES

CONTEXTE PHYSIQUE CLIMATOLOGIE BIOLOGIE TOPOGRAPHIE HYDROLOGIE GEOLOGIE CONTEXTE ANTHROPOLOGIQUE HISTORIQUE

ACTUEL REPARTITION DES USAGES COMMERCES

REFERENCES

ANALYSE ET

OBSERVATION

URBAINE

CONSTATS

DIAGNOSTICS

NOMBREUX COMMERCES DE PROXIMITES ET AUTRES GRANDES CHAINES COMMERCIALES SONT IMPLANTES DANS LE QUARTIER.

QUELLE EST LE LIEN ENTRE LES PETITS COMMERCES DE QUARTIERS ET LES GRANDES CHAINES COMMERCANTES ? ILY-A-T-IL UNE TENSION DEPUIS L’ARRIVEE DE CES GRANDES BOUTIQUES AVEC LES AUTRES COMMERCES ?

STRATEGIES

LINEARITE ET MISE EN TENSION

CARRE BERRIAT

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CONTEXTE

ENSAG 2012 S5 ATELIER LOIRET

PROGRAMMATIQUE

DYNAMIQUES

PROJET LOGEMENT COLLECTIF POLARITES THEMATIQUES AMENAGEMENT URBAIN USAGERS

LINAIRE COMMERCIAUX

PÔLE COMMERCIAL

CONTEXTE SITOLOGIQUE

OBSTACLES

CONTEXTE PHYSIQUE CLIMATOLOGIE BIOLOGIE TOPOGRAPHIE HYDROLOGIE GEOLOGIE CONTEXTE ANTHROPOLOGIQUE HISTORIQUE

VOIE FERREE

BOUCHAYER VIALLET : ANCIENNE USINE QUARTIER EN CONSTRUCTION

ACTUEL REPARTITION DES USAGES COMMERCES

ANALYSE ET OBSERVATION

URBAINE CARRE BERRIAT

CONTEXTE

CONSTATS

DIAGNOSTICS

NOMBREUX COMMERCES DE PROXIMITES ET AUTRES GRANDES CHAINES COMMERCIALES SONT IMPLANTES DANS LE QUARTIER.

QUELLE EST LE LIEN ENTRE LES PETITS COMMERCES DE QUARTIERS ET LES GRANDES CHAINES COMMERCANTES ? ILY-A-T-IL UNE TENSION DEPUIS L’ARRIVEE DE CES GRANDES BOUTIQUES AVEC LES AUTRES COMMERCES ?

STRATEGIES REFERENCES PROFITER DES AXES TRAVERSANTS DU QUARTIER AFIN D’APPORTER PLUS D’ACTIVITES COMMERCANTES AU SIN DU SUARTIER ET NON PLUS QU’EN PERIPHERIE. DES COMMERCES A GRANDE ECHELLE A L’INTERIEUR DU QUARTIER APPORTERA PLUS DE CONFORT AUX HABITANTS. LINEAIRE COMMERCIAUX

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ENSAG 2012 S5 ATELIER LOIRET

PROGRAMMATIQUE

AXES COMMERCIAUX TRAVERSANTS

PROJET LOGEMENT COLLECTIF POLARITES THEMATIQUES AMENAGEMENT URBAIN USAGERS

COMMERCES A GRANDE ECHELLE

CONTEXTE SITOLOGIQUE

COMMERCES DE PROXIMITE

CONTEXTE PHYSIQUE CLIMATOLOGIE BIOLOGIE TOPOGRAPHIE HYDROLOGIE GEOLOGIE CONTEXTE ANTHROPOLOGIQUE HISTORIQUE

ACTUEL REPARTITION DES USAGES COMMERCES

REFERENCES

CARRE BERRIAT ENSAG 2012 S5 ATELIER LOIRET

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Analyse d’implantation des commerces Berriat . Grenoble

COMMERCES DE CHAINE POUR PLUS DE CONFORT


ANALYSE ET

DIAGNOSTICS

CONSTATS

OBSERVATION

STRATEGIES

DE NOMBREUX EQUIPEMENTS PLUBLICS SONT PRESENTS DANS LE CARRE BERRIAT.

URBAINE CONTEXTE

PROGRAMMATIQUE

TYPES D’EQUIPEMENTS PUBLICS

PROJET LOGEMENT COLLECTIF POLARITES THEMATIQUES AMENAGEMENT URBAIN USAGERS

SCOLAIRE SPORTIF

CONTEXTE SITOLOGIQUE

ARTS & LOISIRS SANTE

CONTEXTE PHYSIQUE CLIMATOLOGIE BIOLOGIE TOPOGRAPHIE HYDROLOGIE GEOLOGIE CONTEXTE ANTHROPOLOGIQUE HISTORIQUE

LIEUX DE CULTE ESPACE VEGETALISE

ACTUEL EQUIPEMENTS PUBLICS

ANALYSE ET

OBSERVATION

URBAINE

CONSTATS

DIAGNOSTICS

DE NOMBREUX EQUIPEMENTS PLUBLICS SONT PRESENTS DANS LE CARRE BERRIAT.

SELON LEUR ECHELLE D’ATTRACTIVITE , SONT ILS BIEN REPARTIS DANS LE QUARTIER ? Y A -T- IL DES ESPACES URBAINS QUI MANQUENT DE SERVICES ? POUVONS NOUS REPERER DES ZONES SPECIFIQUES A CERTAINS TYPES D’EQUIPEMENTS ET CERTAINES ECHELLES D’ATTRACTIVITE ?

CARRE BERRIAT ENSAG 2012 S5 ATELIER LOIRET

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REFERENCES

STRATEGIES

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PROGRAMMATIQUE

ECHELLES D’ATTRACTIVITE

PROJET LOGEMENT COLLECTIF POLARITES THEMATIQUES AMENAGEMENT URBAIN USAGERS

ECHELLE NATIONALE

CONTEXTE SITOLOGIQUE

ECHELLE DE LA VILLE

CONTEXTE PHYSIQUE CLIMATOLOGIE BIOLOGIE TOPOGRAPHIE HYDROLOGIE GEOLOGIE CONTEXTE ANTHROPOLOGIQUE HISTORIQUE

ECHELLE DU QUARTIER

ACTUEL REPARTITION DES USAGES EQUIPEMENTS PUBLICS

REFERENCES

ANALYSE ET

OBSERVATION

URBAINE CARRE BERRIAT ENSAG 2012 S5 ATELIER LOIRET

CONSTATS

DIAGNOSTICS

STRATEGIES

DE NOMBREUX EQUIPEMENTS PLUBLICS SONT PRESENTS DANS LE CARRE BERRIAT.

SELON LEUR ECHELLE D’ATTRACTIVITE , SONT ILS BIEN REPARTIS DANS LE QUARTIER ? Y A -T- IL DES ESPACES URBAINS QUI MANQUENT DE SERVICES ? POUVONS NOUS REPERER DES ZONES SPECIFIQUES A CERTAINS TYPES D’EQUIPEMENTS ET CERTAINES ECHELLES D’ATTRACTIVITE ?

RECREER ET DEVELLOPPER DES POLES MULTIFONCTIONNELS EN APPORTANT DES EQUIPEMENTS PUBLICS MIXTES. METTRE EN LIEN CES DIFFERENTS POLES PAR LE BIAIS D’AXE AMENAGE. APPORT DE MOBILIER URBAIN ET CREATION DE PROMENADE VERTE POUR RELIER LES PARCS.

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CONTEXTE

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PROJET LOGEMENT COLLECTIF POLARITES THEMATIQUES AMENAGEMENT URBAIN USAGERS

PÔLE MULTIFONCTIONNEL A CREER

PÔLE MULTIFONCTIONNEL

CONTEXTE SITOLOGIQUE

LIAISONS A DEVELOPPER

LIAISONS A CREER

CONTEXTE PHYSIQUE CLIMATOLOGIE BIOLOGIE TOPOGRAPHIE HYDROLOGIE GEOLOGIE CONTEXTE ANTHROPOLOGIQUE HISTORIQUE

ACTUEL REPARTITION DES USAGES EQUIPEMENTS PUBLICS

REFERENCES

CARRE BERRIAT ENSAG 2012 S5 ATELIER LOIRET

Analyse d’implantation des équipements publics Berriat . Grenoble 0

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Je suis également très sensible aux cultures non occidentales. Cet intérêt a débuté lorsque j’ai participé à un voyage humanitaire au Bénin suite à un an de préparation et de récoltes des fonds. Ces trois semaines en immersion totale dans la culture béninoise restera l’un de mes plus beaux souvenirs, et a été un facteur très important pour mon évolution personnelle. J’ai appris à vivre de manière totalement différente qu’en France. J’ai du m’adapter à un contexte et des modes de vie qui m’ont permis de sortir de mon cocon familial français privilégié. Ce voyage était une découverte permanente. Vivre dans une culture différente m’a permis de dépasser mes limites, et j’ai pu prendre conscience de ce bonheur que procurent la rencontre et le changement.


BĂŠnin 2009



J’ai été très sensible au récit de voyage des deux amis, Nicolas Bouvier écrivain, journaliste et Thierry Vernet, peintre, qui partent de la Yougoslavie pour aller jusqu’en Afghanistan entre juin 1953 et novembre 1954. A travers le témoignage de Nicolas Bouvier dans son œuvre L’usage du monde, j’ai ressenti une véritable invitation au voyage, à me rendre disponible et ouverte au monde pour me laisser évoluer au fil des découvertes. Cette lecture n’a fait que raviver ma soif de découverte et de voyages, mais m’a également permis de réaliser que si le voyage pouvait me forger c’est également par les difficultés de l’inconnu.

« Le voyage ne vous apprendra rien si vous ne lui laissez pas aussi le droit de vous détruire. C’est une règle vieille comme le monde. Un voyage est comme un naufrage, et ceux dont le bateau n’a pas coulé ne sauront jamais rien de la mer. »*

* BOUVIER Nicolas, L’usage du monde, Genève, Payot, 2001.



ARCHITECTURE, TRACES DU PASSE, CONSTRUCTIONS DE DEMAIN.


Depuis mon entrée à l’ENSAG, mon regard sur les villes a changé. J’aime regarder la ville et lire son histoire. Jamais je n’aurai imaginé, trois ans auparavant, pouvoir passer des journées seule dans une ville, m’arrêtant à chaque coin de rues pour sortir mon Canon et fixé ce moment, cet espace, ces habitants. La photo reste image du passé. Elle devient Histoire, dès que l’objectif s’est fermé. C’est également à travers ces images que nous pouvons lire l’Histoire des villes, des constructions mais également des modes de vie. Je m’étonne moi-même lorsque je reste des heures durant sur la terrasse d’un café à regarder les passants, noter leurs moindres mouvements qui représentent la vie qui se dégage dans cet espace. L’Histoire d’une ville se lit à travers l’architecture, qui elle-même traduit les différents modes de vie et les changements. Tout est lié. L’architecture a peut être la même définition depuis la Renaissance, mais ne se pratique pas de la même façon face à la transformation des savoirs faire et des modes d’habiter. L’architecte doit être sensible au passé associé à chacun de ses projets. Quel est la bonne posture à prendre pour concevoir l’espace social et sensible de demain ? Comment les traces du passé peuvent-elles agir sur les constructions de demain ?


Crète 2011


plan grenovle vieux

Carte de Grenoble . XXème siècle . Extension de la ville . Construction du nouveau quartier de la Villeneuve


Comment prendre en considération les changements de modes de vie ? Une des notions fondamentales de l’architecture est la durée. L’édifice s’inscrit dans une temporalité et transforme le territoire durablement. Ces transformations de l’espace s’effectuent à un moment donné de l’Histoire accompagné de son contexte politique et social. L’architecture est un art qui reste dans un temps long mais qui fait référence à une époque, un contexte et des modes de vie. L’architecture est trace du passé et pleine d’Histoire. L’enseignement que j’ai reçu durant ces trois années de Licence à l’ENSAG m’ont permis de comprendre le lien entre les époques d’une ville et sa morphologie urbaine. Dans le cadre de l’enseignement de Patrick Thépot, j’ai pu étudier la ville de Grenoble et traduire son évolution par le dessin. Lorsque nous lisons le plan de cette ville, les traces de son passé sont très rapidement reconnaissables. La ville s’est construit à partir d’un point stratégique, au bord de l’Isère, axe de communication. La typologie de la ville nous raconte la suite de son histoire. On discerne bien le quartier de la vieille-ville du Moyen Age, au pied de


la Chartreuse, un quartier très dense, aux rues courbes et étroites, des bâtiments à deux ou trois étages. L’ère industrielle provoque un grand bouleversement dans la construction de la ville qui éclate et sort de ces enceintes. Apparaissent alors les quartiers haussmanniens, de grands axes rectilignes et larges donnent les grandes directions de la ville, l’alignement sur rue permet une harmonie et une cohérence de la ville. Les quartiers des grands ensembles d’après guerre font apparaitre la ville du vide et non plus du plein, le quartier de la Villeneuve. Les progrès techniques permettent d’avoir des édifices de plus de 10 étages. La politique de relogement génère la standardisation des logements, pour construire vite et pas cher. Les époques se juxtaposent telles un puzzle, et on discerne bien les étapes de construction de la ville de Grenoble depuis le fort de la Bastille. Le lien entre l’architecture et les modes de vie se lit très facilement. Les modes de vie évoluent dans le temps mais l’architecture reste au long terme. La question que je me pose alors est de savoir comment faire évoluer la ville aujourd’hui en prenant en compte son passé et en réussissant à l’associer à la ville nouvelle pour ne pas faire des quartiers voisins sans lien entre eux. Lors de la conception du projet urbain du quartier Berriat en studio Loiret lors de ma troisième année de licence, l’analyse de l’histoire du quartier et de ses habitants ont fait ressortir des activités respectives au lieu tels que l’artisanat et


nous ont permis de prendre connaissance du tracé historique du canal qui passait à travers le quartier. L’aménagement des espaces publics et la création d’un cheminement au sein même du quartier s’est basé sur ces traces historiques du canal, le faisant apparaitre par portions avec la conception de bassins. Concevoir dans la durée signifie donc de respecter les modes de vie et l’histoire qui l’accompagne pour s’en servir dans la conception architecturale et urbaine.

Comment le passé est il actif sur les constructions d’aujourd’hui ? L’enseignement artistique de première et deuxième année de licence m’a sensibilisé au dessin et à la photographie. Je trouve un lien avec l’architecture dans ces deux disciplines. La photographie est le moyen de figer un espace, un paysage, une architecture, et le dessin, bas d’un concept architectural, contribue au travail de l’architecte dans son dessein.


La photo est devenue une activité qui me tient à cœur. J’ai l’impression d’immobiliser le temps en prenant une photo, qui devient alors trace du passé. La photo est un outil pour l’architecte. En effet, nous devons concevoir un édifice dans un environnement existant et la photographie est un moyen de projeter nos idées en les intégrant à celle-ci. Nous vérifions la forme de l’espace que nous créons et sa bonne insertion dans un contexte. Les constructions de demain sont liées à un territoire existant et à son histoire que nous pouvons découvrir à travers des documents écrits tout comme par la photographie. La conception d’un projet est indissociable au territoire dans lequel il s’inscrit. L’architecture ne peut être conçue en tant qu’objet et peut trouver sa justification dans l’histoire qui l’accompagne. J’ai fait face à plus de difficultés pour concevoir un projet lorsque je n’avais pas de contexte auquel me référer. Certains parleraient de contraintes de respect de l’Histoire du lieu, je dirai plutôt qu’elle permet de nous donner une direction et de nous guider. Il ne suffit pas de faire une forme, il faut réussir à l’adapter à son contexte. Le dessin est l’outil originel de l’architecture. Un architecte a toujours un carnet et un crayon sur lui pour dessiner quelques lignes ou faire un croquis d’un espace qui l’a interpellé et lui a procuré quelques émotions.


Vérone 2012

Gènes 2011


Souvenirs personels . Mouvements et horyzontalitĂŠ . 2012


Au cours de ma deuxième année, dans le cadre de l’enseignement d’Agnieszka Karolak en Arts Plastiques, j’ai dessiné 50 souvenirs. Le dessin n’a pas été la tache la plus difficile, en revanche il m’apparu plus compliquer de trouver la signification profonde de chaque souvenir et leur évocation. Ce fût un travail personnel très enrichissant duquel j’ai pu faire ressortir les grands thèmes de ma vie qui me tiennent à cœur. Le plus surprenant dans cet exercice est de trouver les liens inconscients que j’ai faits entre les formes et les émotions auxquelles elles se réfèrent. Le but était de trouver notre « patte » d’architecte en herbe. Il n’y a donc pas seulement le passé du lieu qui influe sur la conception architecturale mais aussi le passé de l’architecte lui-même. Tout être humain ressent des émotions liées à un moment de sa vie, dans un lieu, un espace qu’il a vécu et perçu. Il me semble que nous lions ces deux éléments de manière inconsciente. Le passé joue sur les mentalités, le caractère et les émotions de l’Homme. Ainsi, l’architecture est également subordonnée par les émotions de l’homme. Elle est liée au passé des individus.


« C’est le désir d’innocence des allemands qui a fait ce désert, ce grand trou noir. Ils ont voulu effacer, oublier. Mais une ville est comme un livre d’Histoire : il ne sert à rien d’en arracher une page parce qu’elle ne nous plaît pas. La ville a une mémoire très longue, comme celle des éléphants. Elle peut effacer, elle n’oublie pas. »*

* PIANO Renzo, Penser la ville heureuse, Paris, Editions La Vilette, 2005.


Renzo Piano, en travaillant à la reconstruction d’un cœur de la ville de Berlin détruit par la guerre, doit faire face à l’Histoire tragique d’un pays entier et d’une ville coupée en deux lors de la guerre froide. Pour redonner de la vie à ce désert berlinois, il est allé plus loin que dans l’analyse du lieu et de l’évolution de la société. Il a réussi à comprendre le caractère berlinois et ses attentes, suite à l’apprentissage de son histoire. Les berlinois, selon Piano, ont une façon de vivre spécifique, celle de vivre dans la passé et dans la souffrance : « presque tous les berlinois ont cette double attitude face à la vie, cette double identité : le désir d’oublier jusqu’à l’amnésie, d’effacer ce qui a été et, en même temps, cette grande nostalgie du passé, lui aussi divisé entre un passé glorieux et un autre terrible »*. Ils restent pour autant des hommes, à la recherche de lien social et de communication. « ce désir de normalité est en nous tous. Rester là, ainsi, avec l’envie d’être liés aux autres, avec une sorte de désir de vivre »*. Aujourd’hui Berlin est une ville heureuse et qui appartient à tous par le dynamisme du bâti qui est généré par la pénétration de failles, de la transparence et de tracés en biais sans manquer aux jeux de retraits qui allègent les volumes.

* PIANO Renzo, La désobéissance de l’architecte, Paris, Arléa, 2007.



BILAN



Ces années de licence à l’ENSAG m’ont permis de découvrir une somme de choses considérables nécessaires à l’évolution de ma propre vision de l’architecture.

dimension sociale de cette pratique me semble incontestable, bien La

qu’elle ne réussisse pas toujours à répondre aux besoins des sociétés. Je souhaite aujourd’hui réussir à comprendre les enjeux futurs de la société afin de pouvoir lui donner une réponse architecturale correcte. L’architecture, soit l’expression d’une culture, est une discipline visible aux yeux de tous. Pour autant étudiants et architectes évoluons dans notre bulle, non accessible aux autres. Il me semble important de réussir à trouver les outils pour pouvoir se faire comprendre par l’ensemble des individus. Notre métier est d’édifier une ville pour ses usagers, ce que nous sommes tous. Il est donc nécessaire de communiquer avec tous, en croisant nos connaissances, nos opinions et nos souhaits. En prenant connaissance de l’Histoire des villes, il me semble que leur évolution n’a pas suivi la bonne direction dans certain cas lorsque les politiques ont voulu mettre en place une marche à suivre pour faire évoluer la société, ou bien la diriger ou encore répondre à des problèmes économiques.


Aujourd’hui, suite à ces exemples du passé, l’architecte doit être une personne ouverte d’esprit, prête à écouter l’usager, qui sait faire preuve de modestie et d’humanisme pour réaliser ses projets. L’architecture ne peut être pensée seulement en tant qu’objet esthétique. C’est un ensemble complexe qui réunit l’Homme à la nature dans la durée. Comme le dit Heidegger, habiter est notre manière d’être au monde. La maison est l‘interface entre l’homme et la nature, elle nous permet d’exister en prenant conscience que nous appartenons au monde. L’édifice doit trouver

une dialectique entre l’Homme et les territoires. La connaissance des milieux que nous

transformons est également une notion que ne doit pas oublier l’architecte. L’erreur de l’Homme jusqu’à aujourd’hui selon Berque est de réduire la nature à un objet, de ne pas lui donner une dimension sensible et de ne plus avoir conscience de la réalité du paysage. Il faut retrouver une dialectique entre le physique des sciences et le sensible de la nature. Le travail de l’architecte se joue donc à toutes les échelles, de l’usager au territoire, de la société aux milieux.


Durant le cours de Sophie Paviol, en Introduction à l’architecture contemporaine, j’ai apprécié les intentions de Tschumi pour la conception du parc de La Vilette. Bien que l’édifice lui même ne soit pas apprécié de tous, et qu’il peut ne pas être compris, il me semble intéressant d’intégrer l’usager dans l’architecture, de lui donner un véritable rôle et de lui donner la possibilité de trouver un sens à l’édifice par lui-même. L’architecture en tant que discipline complexe, ne peut se révéler immédiatement à l’Homme. Il faut concevoir un édifice compréhensible par l’expérience des sens et permettant à l’homme d’être en symbiose avec le monde qu’il habite pour qu’il en ait conscience. Notre société est composée d’êtres pensants, dotés de ressentis et d’émotions, permettons leur alors d’appréhender leur environnement et donnons leur les moyens de le comprendre. Toute personne habite et circule, toute personne peut prendre conscience du milieu dans lequel il évolue, or aujourd’hui, peu d’entre nous prend le temps d’ouvrir les yeux et de prendre en compte ce qui l’entoure, ce qui lui permet de vivre. La ville est un lieu de circulation, de rencontres, de brassages, de partage, mais l’homme devient pourtant de plus en plus individualiste.


Martin Heidegger contemplant la montagne Sainte-Victoire, septembre 1968 (photo prise par François FÊdier)


Trois ans plus tard, je suis convaincu du caractère social de l’architecte. Il doit concevoir un bien commun assurant une fonction

sociale et s’inscrivant dans un milieu pour un temps long.

Cette dynamique sociale, culturelle et territoriale à laquelle je suis aujourd’hui sensible m’amène à porter mon choix sur le Master Aédification, Ville et Territoire pour poursuivre ma formation et approfondir l’élaboration de ma vision de l’architecture.



BIBLIOGRAPHIE Livres *Augustin BERQUE, Médiance de milieux en paysages, Paris, Editions Belin, 2000. *Nicolas BOUVIER, L’usage du monde, Genève, Payot, 2001. *LE CORBUSIER, Vers une architecture, Parix, Gallimard, 1995. *Y. GARNIER et M. VINCINGUERRA, Le Petit Larousse illustré, Paris, Larousse 2007. *Martin HEIDEGGER, «Bâtir habiter penser» dans Essais et conférences, Gallimard, Paris, 2003. *MERLEAU PONTY, L’oeil et l’esprit, collection Folio essai, Paris, 2006. *Renzo PIANO, La désobéissance de l’architecte, Paris, Arléa, 2007. * Renzo PIANO, Penser la ville heureuse, Paris, Editions La Vilette, 2005.

Films

* JR, Women are heroes, documentaire, 2011. * Renzo Piano, le chemin kanak, Gilles Dagneau, 2008.

Revues numériques * BRUZULIER Grégoire, «La culture de l’indépendance : une conquète de l’espace kanak», alterréalité.com, 14 juillet 2007, URL : http://alterrealites.com/2011/07/14/la-culture-de-linde pendance-une-conquete-de-lespace-kanak/










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