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Haïti : l’éprouvante expérience des experts en identification

Recherche de victimes par la sécurité civile

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Cinq praticiens du Service de santé des armées (SSA) ont participé à la mission d’identification des victimes du séisme qui a frappé Haïti en janvier dernier. De retour en France, ils racontent les difficultés de leur mission. Cette mission est la plus éprouvante que l’on ait jamais effectuée, à cause du contexte dramatique et dangereux qui régnait sur l’île » témoignent les médecins et « chirurgiens-dentistes, d’active et de réserve, en exercice en métropole et en Martinique. Ils ont rallié en urgence Port-au-Prince en Haïti, le 14 janvier 2010, pour armer l’Unité nationale d’identification des victimes de catastrophe (UNIVC) regroupant des personnels de la police technique scientifique et de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN). Sur le terrain, les experts ont examiné tous les corps sortis des décombres sur des sites sélectionnés. Cette mission s’est effectuée dans un contexte difficile

© CDC Rateau

Activités opérationnelles Haïti : l’éprouvante expérience des experts en identification

et chaotique. La première raison en est la forme même de la mission. La coordination des équipes médicolégales n’était pas supervisée par l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL) et les données s’échangeaient au gré des rencontres entre professionnels.

Instabilité sur tous les fronts

Mais surtout, il a fallu prendre en compte la fragilité géologique de la zone. Durant les quinze jours de mission, de nombreuses répliques du tremblement de terre ont menacé. Par ailleurs, nous avons dû également composer avec l’instabilité politique. Après les effondrements de bâtiments officiels, anéantissant les dirigeants de la Mission de stabilisation de l’ONU en Haïti (MINUSTAH) ainsi que de nombreux responsables haïtiens, plus aucune structure de commandement n’était en place. Et, que dire de l’insécurité au sein d’une population livrée à elle-même ? La tension était palpable dans les rues, c’est pourquoi tout déplacement s’effectuait sous escorte armée.

Dans ces conditions, difficile de trouver le sommeil au rythme des fusillades et des répliques du tremblement de terre, sur fond d’incantations vaudou d’une population meurtrie. Nous étions regroupés dans les jardins de la résidence de l’ambassadeur de France avec les autres militaires français, les journalistes, les ONG et les familles haïtiennes en instance de départ. Notre village improvisé de tentes, rassemblait près de 900 personnes, dans des conditions d’hygiène précaire.

Sciences et humanité, indissociables

Au total, les trente-cinq ressortissants français disparus, ont été retrouvés et identifiés en grande partie grâce aux odontogrammes ante mortem établis par les chirurgiens-dentistes et récupérés par la mission. Les corps ont pu être restitués aux familles sur place ou en métropole, leur permettant de démarrer le travail de deuil. Mais, en marge du processus d’identification humaine, nous ne sommes pas prêts d’oublier cette mission particulière. Au-delà des morts, c’est le contact avec les familles rescapées présentes sur place, leur stress, leur désespoir, dans un contexte permanent de dangerosité, qui a rendu les identifications plus pénibles et plus difficiles que jamais.

Médecin en chef Florent Ducrettet Chirugien-dentiste en chef (R) Dominique Berger Chirugien-dentiste en chef Henri-Philippe Rateau

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