Nautic 2014

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COUPLÉ AVEC L’APPLI CABOTAGES

CABOTAGES LE NAUTOURISTE CATALOGNE

10 escales à l’essai

QUÉBEC

8 jours Côte Nord

FRANCE

pli p a ’ l e d o Dém 45 hall 1 L d n a st

30 balades à terre GRATUIT, NE PEUT ÊTRE VENDU


L’Hérault, département marin ! Plus de 10 000 anneaux répartis dans 19 ports, près de 90 km de littoral, 1 000 marins-pêcheurs, 450 conchyliculteurs, la mer est au cœur du patrimoine et de la culture héraultaise.

Le Département est propriétaire de 8 ports départementaux dédiés à la pêche, la conchyliculture et le nautisme. Il s’engage également pour le développement de la plaisance, le soutien aux filières professionnelles, la préservation de l’environnement, le tourisme. crédit photo : conseil général de l’Hérault

L’Hérault, une identité forte, côté mer !

Pour le développement maritime,

le Département est là ! herault.fr


ÉDITO Nautouriste ? 9-24 ’est quoi, un Nautouriste® ? Un plai-

C

sancier curieux de tout ce que la navigation lui donne à découvrir, la nature et les villes d’escale, car c’est le mélange des univers terrestre et maritime qui fait le charme du cabotage, du nautourisme. Passer ses vacances en bateau est un choix radical : le terrien change d’apparence, de langue, de véhicule, d’identité. Il est marin. Marcher, oui, pédaler, pourquoi pas ? Un scooter, parfois. Une voiture ? Les embouteillages ? Adieu l’aventure ! Le rayon d’action du nautouriste se limite à la proximité du port, aux rues ombragées riches en découvertes patrimoniales, en surprises festives, en délices de la mer et des terroirs où il ira peut-être une autre fois quand il ne sera plus navigateur.

30-39

Cabotages = le papier + l’appli Le premier média des plaisanciers qui associe le numérique à l’imprimé : avec notre Appli tous supports, accédez à 600 articles, 1 000 photos, les adresses des professionnels du tourisme et du nautisme, les fiches de toutes les capitaineries, les documents obligatoires à bord, la météo... en partenariat avec la cartographie marine Navionics® Directeur du développement : Alain Pasquet alain.pasquet@cabotages.fr

Rédactrice en chef : Djinn Naigeon redaction@cabotages.fr

Directeur de publication : Christophe Naigeon christophe.naigeon@cabotages.fr

Assistante de direction : Julia Chaine julia.chaine@cabotages.fr

Studio technique Emmanuelle Grimaud studio@cabotages.fr

Cabotages décembre 2014 - 3

Photos : Cabotages (sauf autre mention) Correspondance : contact@cabotages.fr Imprimeur : Giesa - Barcelone - Espagne ISSN 2276-5832 Parution novembre 2014 Dépôt légal à parution

Publicités-Partenariats contact@akajoumedia.com

Destination

Cabotages / Bastaque Éditions 16 rue Garenne, 34200 Sète

Après nos numéros de l’été distribués dans les capitaineries de la Méditerranée et consacrés au cabotage en France, ce spécial Nautic de Paris prend le parti de voguer vers l’étranger : l’Espagne où nous avons testé dix escales catalanes et vers le Canada en suivant la Côte Nord du Saint-Laurent à bord d’un cargo mixte qui ravitaille des villages sans route. Bons voyages ! Christophe Naigeon - Alain Pasquet


Sauveteurs en Mer, je suis solidaire. Je fais un don.

Les Sauveteurs en Mer de la SNSM sont bénévoles mais les bateaux de sauvetage ont un coût. Depuis toujours, la solidarité

des gens de mer a puissamment soutenu cette Association et contribué à subvenir aux dépenses engendrées par cette mission. Grâce à elle, des moyens, des bateaux, des équipements, des sauvetages : des vies sauvées. Comme moi, soyez l’un des maillons indispensables de cette chaîne de solidarité, ancrée dans cette tradition maritime. Donnez pour l’Association

Photo Fabian CEVALLOS

des Sauveteurs en Mer.

Sauveteurs en Mer, je suis solidaire. SNSM - 31, Cité d’Antin - 75009 Paris -

www.snsm.org 4 - Cabotages décembre 2014


CATALOGNE : 10 escales à l’essai

L’an dernier, nous avions proposé une croisière sur la côte ligure, de Menton à Gênes. Cette année, nous sommes allés naviguer vers l’autre grande cité de la Méditerranée occidentale, Barcelone. Un aller-retour en dix escales en évitant les grandes stations balnéaires pour nous concentrer sur des ports plus originaux. Conclusion de cette balade ? Pour les ports, il n’y a pas de doute, c’est en Catalogne que le service et les équipements sont au plus haut niveau. L’italie juste derrière, et la France... a encore des efforts à faire. Pour le niveau des prix, l’Espagne est aussi au plus haut, et de loin (voir notre encadré en fin de dossier). C’est d’autant plus ennuyeux que, contrairemnt à l’Italie, on ne compense pas par des économies à terre. Les restaurants, même les bistrots à tapas, sont généralement chers et de qualité... très touristique. Pour le charme des escales, il faut savoir que le désir d’oublier le passé qui a accompagné la sortie des années noires de l’Espagne a entraîné des modernisations urbanistiques un peu sauvages. Heureusement, il y a de très belles perles que les lignes qui suivent vous feront découvrir. Le podium ? Numéro un, Llafranc, n’offre hélas que très peu de places, Port de la Selva vient juste après, avec l’avantage d’être très près de la France, ex-aequo avec l’Estartit, son arrière-pays qui mérite le déplacement et sa réserve marine. Barcelone hors-concours : chic, spectaculaire, moins cher. Mais pas fréquentable l’été.

Textes et photos Djinn et Christophe Naigeon

PORTBOU Des cigarettes et l’air des montagnes Venant du golfe du Lion, le temps de passer la frontière au cap Cerbère - redoutable par mauvais temps - et de hisser le pavillon espagnol, la première crique abrite Portbou, notre première escale catalane. Portbou signifie “port des pêcheurs”, mais pour des raisons qui diffèrent : “bou” peut désigner soit les barques, soit les boules qui font flotter les filets, soit les bœufs qui tirent les barques sur les plages... Un souvenir d’Hercule qui traversa les Pyrénées avec un troupeau de bious noirs dont certains, plus loin sur son chemin, sont restés en Camargue. La baie très fermée de Portbou est un bon abri par tous les vents sauf marins. Il y a là de bons mouillages par beau temps. Quant au port, il est tout à fait moderne, costaud. Mais nous préférons le mouillage, dans la partie Est de la petite baie. Soyons clairs : Portbou n’est pas une ville Cabotages décembre 2014 - 5

touristique pour les plaisanciers, contrairement aux amateurs de promenade en montagne pour qui le massif des Albères est une très belle alternative à la mer. Pour atteindre le Parc naturel, il faudra prendre un car ou un taxi pour la marche d’approche, mais, sans aller jusque-là, les escarpements qui se trouvent juste derrière la ville sont déjà consistants. La gare de Portbou est un monument par sa taille dans un aussi petit bourg. Comme En arrière-plan de la petite baie de Port-Bou, le massif des Albères de l’autre côté de la frontière à Cerbère, elle est chargée d’histoire, au vous assassinera pas encore avec l’additemps où les incompatibilités d’écartement tion. des voies entre France et Espagne rendaient Et aussi, pour les intoxiqués, un peu de indispensables les transbordements de mar- contrebande de cigarettes car les prix – chandises d’un train à l’autre. sans être ceux de la principauté d’Andorre Sans aller jusque-là, il est intéressant un peu plus loin au-dessus – sont attractifs de se promener dans les ruelles, de sentir pour les Français. l’ambiance déjà très espagnole alors qu’on Mais attention aux quantités importées sur vient à peine de quitter la France, de flâner votre bateau si vous n’avez pas un go-fast sur les petites places et de s’arrêter aux ter- de trafiquant professionnel… Et encore, le rasses de petits cafés populaires où on ne sémaphore de Béar vous remarquera !

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PORT DE LA SELVA Des moines, des arts et des thons

Photo Club Nautic Estartit

En haut, le monastère de Sant Pere de Rodes, en bas, l’ancienne pêche à l’“art”

Pour la première fois, nous faisons l’expérience de l’accueil à l’espagnole. Ici, c’est parfait. Le canal 9 répond presque tout de suite, en français si nécessaire, les places sont faciles à trouver et un bosco attend pour les amarres et les formalités. Port de la Selva est un très bon abri de belle saison. Après, trop exposés aux intempéries hivernales, les pontons d’accueil sont vidés. De tous les ports du cap de Creus, c’est le site le plus exposé à la tramontane. Quand le vent du nord monte à 150 ou 180 km/h, il y a tellement d’embruns que les maisons du bord de mer et les bateaux sont blancs de sel. Port de la Selva est un port de pêche depuis longtemps, grâce à un phénomène bien curieux découvert au XVIe siècle par

les moines du monastère de Sant Pere de Rodes, situé sur les hauteurs. Venus du Golfe du Lion, des bancs de poissons longeaient la côte vers Cerbère, entraient dans la baie d’El Port de la Selva et ensuite filaient tout droit vers les Baléares. Les bancs de sardines et d’anchois, suivant cet itinéraire, entraînaient derrière eux leurs plus féroces prédateurs, les thons. Les moines eurent l’idée de capturer les thons au passage. Ils financèrent la confection d’un grand filet communal pour organiser une pêche collective. Ce filet est un art : il part du bord de l’eau et, tiré vers le large par une barque à rame, décrit une boucle et revient au bord après avoir encerclé une partie du banc. Ensuite, les pêcheurs ramènent le filet sur la plage et se partagent le butin sous l’œil du patron. Cela a duré jusque dans les années 1950. Aujourd’hui, la pêche à l’art a été abandonnée. Les installations portuaires semblent gêner la ronde des thons dans la baie. En tout cas, il n’y viennent plus.

L’ESTARTIT Une ville, des îles et des pirates Cap sur les îles Medes. Ces îlots escarpés entre lesquels on peut mouiller par temps maniable, ont longtemps été des repaires de pirates qui trouvaient là un poste avancé pour attaquer les villages de la côte. Les nombreuses fermes fortifiées que l’on trouve dans toute la plaine racontent bien le danger permanent des razzias. Pas rancunière, l’Estatrit consacre aux pirates une grande fête populaire en septembre.

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L’arrivée au port de l’Estartit, excellent. Une petite ville qui a gardé son caractère même si elle ne possède pas de monument remarquable. Peu importe, c’est plutôt une ambiance tranquille et bon enfant qui en fait le charme. Page de droite : le marché de Toroella et l’une des multiples sculptures qui en ornent les maisons.

Seules les bouées blanches sont disponibles aux bateaux de plus de 9 mètres et les rouges pour les plus petits. Les vertes et les jaunes sont pour les clubs de plongée. Le port, géré par le Club Nàutic Estartit, s’ouvre sur un premier bassin abrité derrière le brise-lames. Des coffres permettent de mouiller là en sécurité, à deux coups de rame de la ville. Viennent ensuite les pontons où on est accueilli dès le premier coup de radio sur VHF, puis la capitainerie et le club-houserestaurant très chic avec un menu de la mer d’une fraîcheur totale.

L’Estartit a fait le pari de devenir une escale de premier plan. La moitié des places sont réservées aux visiteurs et une jeune française a été recrutée pour en faire la promotion en France. Agréable et tranquille, la ville n’est pas d’un pittoresque renversant. C’est une station moderne, propre, avec des immeubles bas, pleine d’espaces verts en bordure de mer et de restaurants et de commerces comme partout. La proportion touristes autochtones y est tout à fait supportable. Nous recommandons la place de l’église Santa Anna, avec des petits cafés-ta6 - Cabotages décembre 2014


Dans les petits bistrots de ce joli bourg pas abîmé par le tourisme et où il fait bon se promener, on trouve bien entendu les légendaires tapas. Mais attention, ici et partout, il y a du meilleur et du pire. Très souvent du pire car la gastronomie catalane n’a pas résisté au tourisme de masse.

À Port de la Selva, on vous recommande cependant un grand café populaire, sans chichis mais bien placé, la Bella Vista, qui sert des plats parfaitement frais et bien cuisinés “famille”, à se partager pour picorer à deux, y compris les paellas prévues pour un.Car il faut comprendre qu’en Espagne le rituel entrée-plat-dessert n’est pas un dogme. Et le Vin de la casa, pas cher, est souvent acceptable. Dernière chose, on peut manger presque à n’importe quelle heure du jour et fort tard dans la nuit.

El Port de la Selva, un bourg qui a échappé à la folie de l’urbanisme touristique

pas sympathiques, un grand espace où s’ébrouent les enfants en toute sécurité. En juin, profitez du festival international des images sous-marines et, en juillet, du très bon festival de jazz. Mais une autre idée est de prendre le bus vers l’ancien village de Torroela de Montgris. Il y a là un quartier ancien tout à fait pittoresque, surtout si on a la chance de tomber un lundi, jours de marché. Allez sur la place de la mairie : superbe architecture, produits épatants, terrasses de cafés... tout y est pour regarder vivre ce bourg authentique. À observer de près, des enseignes et des devantures Belle Époque vraiment intéressantes, ainsi que quelques entourages de fenêtres sculptés remarquables. Si vous n’allez pas en ville, plongez ! La réserve marine des Mèdes est le troisième site de plongée d’Europe : 900 “ploufs” par jour ! De nombreux clubs vous équiperont et vous guideront pour la plongée. Attention, il faut un brevet de plongée ! En tout cas, le tour des Mèdes vaut le coup. Les roches découpées font penser que les pirates y mouillaient étaient des sacrément bons marins. La réserve absolue permet de rassembler une faune marine exceptionnelle, habituée à la présence de ces drôles de poissons en combis qui nagent si mal et font des bulles bruyantes. Cabotages décembre 2014 - 7

Quand nous repasserons à Port de la Selva au retour, nous aurons l’occasion de constater que la bonne impression laissée par cette première escale était la bonne et que c’est ici l’un des meilleurs endroits de la Costa Brava.

Les Medes, paradis de nature

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PALAMOS Des pêcheurs et des bouchons Après avoir passé la baie de Llafranc, qui fait envie mais qu’on se réserve pour le retour, avoir doublé les îlots Formigas, (ne serrer ni à gauche ni à droite, attention aux roches affleurantes !), nous arrivons en vue de Palamos. Un premier port récent s’ouvre d’abord à nous, côté Est de la presqu’île. Mais notre goût nous porte vers les vieux ports en centre-ville. On fait donc le tour de la pointe et de son joli phare, et on entre dans le bassin du port qui commence par une très longue digue où accostent les navires de commerce. Du coup, parfaitement à l’abri, il est possible d’amener les voiles et de préparer les pare-battages en toute tranquillité. Aujourd’hui, viennent plutôt accoster des navires de croisière, le commerce se faisant un peu plus rare. Pourtant, il fut ici très prospère, grâce à une région de France connue pour ses vins, la Champagne. Palamos a été le plus grand port d’exportation de bouchons d’Europe à cause des caves de Dom Pérignon qui avaient apprécié la qualité des lièges espagnols et le savoir-faire local pour les fabriquer. Le port de plaisance du Club Nautico Costa Brava est d’autant plus tranquille qu’il se trouve protégé par deux autres digues. La première accueille les grands yachts, la seconde reçoit le canot de sauvetage et une belle flotte de pêche. Palamos est une escale faite pour les amateurs de poisson et de pêche. Ne rater sous aucun prétexte le marché aux poissons ouvert tous les jours de la semaine sur le port.

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Le port de Palamos, entre grands yachts et bateaux de pêche. En bas, l’école de cuisine annexe au musée de la pêche.

Dans une grande halle sont vendues les pêches à peine arrivées dans les bateaux. Tous les poissons de la Méditerranée sont là, d’une fraîcheur absolue, certains encore frétillants. C’est déjà un régal de couleurs et de parfums de mer. La présentation est superbe mais les prix atteignent aussi des sommets !

Juste à côté, il y a le musée de la Pêche. Une perfection de pédagogie et de muséographie. En navigation, peu aiment s’enfermer dans les musées. Faites exception pour celui-ci. Et pour les mômes, une école de cuisine ! Chaque jour, pour 12€ (50 € le forfait-semaine) ils sont pris en charge par un vrai chef qui leur apprend à reconnaître les poissons, à les préparer (écailler, vider, sortir les filets et les arrêtes...) et à les cuisiner. Ils sont ravis. Quant à la ville, elle ne présente pas vraiment d’intérêt touristique et il est fort difficile d’y trouver un restaurant acceptable. En tout cas, nos expériences ont été très décevantes.

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BLANÈS En travaux, mais bonne surprise ! Blanès est le dernier port des “Pyrénéessur-Mer” avant que le trait de côte ne s’abaisse jusqu’à Barcelone et au-delà. L’anse où se trouve la petite ville balnéaire est de taille raisonnable, surmontée de belles hauteurs avec château, tours... Entre un cap et un promontoire rocheux qui coupe la plage en deux anses, il y a là un petit ensemble agréable vu de la mer, sans immeubles hideux. Le port est protégé par une double diguemur en béton impressionnante. Il faut tourner loin vers la plage quand on vient du Nord pour embouquer le chenal d’entrée. Ne suivez pas les plans des guides nautiques, ils sont désormais obsolètes. En entrant, on laisse les petits métiers de la pêche à droite et on arrive… dans un vaste chantier qui laisse voir de beaux pontons tout neufs mais aussi pas mal de béton brut, des gaines de câbles et des tuyaux apparents, des machines et des ouvriers qui s’affairent. Le chantier sera achevé pour la saison 2015. Le Club de Vela de Blanès, gestionnaire du port, a signé une nouvelle concession de 20 ans et investit lourdement pour le mettre aux normes actuelles de service et de confort. Le but est de faire de Blanès l’escale préférée des Français qui traversent en direction des Baléares.

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L’arrivée dans le port, bien abrité par un escarpement rocheux. En bas, la “promenade”.

Bonne stratégie. Le lieu est bien placé, l’escale est sympathique et le port, d’après ce que nous avons pu en voir, sera à la hauteur, avec 39 places d’accueil. Un joli restaurant club-house, un personnel souriant... ça devrait aller. D’autant plus que la petite cité balnéaire offre tout ce qu’il faut pour avitailler et se détendre avant le grand saut vers le large.

Un front de mer très large offre une belle rangée de palmiers à l’ombre desquels se retrouvent des joueurs d’échecs, sur table ou sur des grands échiquiers au sol. Rien de clinquant, une offre ludique qui tient compte de toute la population, touristes ou indigènes, jeunes et vieux. Évidemment des cafés, mais aussi des bancs très larges où des centaines de personnes se retrouvent en famille le soir pour manger des glaces, bavarder, jouer de la guitare et chanter. Ambiance 90% espagnole et familiale. Pas de boum-boum, vous dormirez tranquilles. Au bout, vers le rocher qui sert de lieu de promenade, un excellent restaurant de produits de la mer, le Malica, à des prix très raisonnables et quasiment les pieds dans l’eau. Et, pour finir la soirée, juste à côté, un bar à Mojitos, le Can Tirol. Pour une escale un peu plus longue, on recommande le jardin botanique, à un quart d’heure à pied du port, créé par un allemand, Karl Faust, mort en 1952 à Blanès. Comme nombre d’hivernants qui venaient sur les bords de la Méditerranée avant-guerre, ce nordique s’est passionné pour la flore de notre Mare nostrum. L’été prochain, quand les travaux seront terminés, tentez cette jolie escale.

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BARCELONE Pour ceux qui peuvent naviguer hors-saison

L’entrée du vieux-port de Barcelone par le pont tournant. En haut, la place des Ducs de Medinacelli. En bas, la place Sant Felip, bien agréable mais de triste mémoire, à droite, une ruelle du Bari Gothic.

Bien que l’on puisse rester des heures dans son cockpit à contempler la ville vue du vieux-port, vient le moment d’aller faire quatre pas à terre, de se mêler au monde des piétons. Le premier matin, bien évidemment, on commence par le plus proche : la Rambla principale qui va de la statue de Colomb à la place de Catalogne. Le but : se balader dans cette ville à l’architecture un peu folle (parfois complètement) où l’on comprend que Gaudi a pu construire une chose aussi incroyable (belle ??) que la cathédrale de la Sagrada Familia. Mais l’été, cette rambla de légende n’est plus un boulevard où flâner le nez en l’air pour en apprécier les constructions, mais un fleuve lent où coule à double-sens une masse épaisse de touristes. On ne voit rien, on slalome entre des gens qui ne regardent qu’à travers leurs téléphones portables pour s’entre ou s’auto-photographier et se poster immédiatement sur les réseaux... Ainsi, non seulement ils déambulent dans une ville où 80% des gens sont des touristes et où 80% des 20% restants sont des employés étrangers, mais encore la regardent-ils sur un écran minuscule...

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Tout le centre de Barcelone est ainsi une immense cohue étrangère qui navigue entre les marchands de souvenirs et les restaurants-usines-à-tapas avec rabatteurs qui vous abordent avec des menus-photos comme dans Pigalle de la grande époque... Horreur des horreurs ! Un peu moins grave, le marché couvert. Bondé lui aussi, et très cher, mais il est possible sur certains étals d’y trouver des choses un peu originales (comptoir bio, par exemple). Évitez les restos sous les ar-

cades, surtout le soir. Pourtant, comme à Venise, il suffit de faire quelques centaines de mètres à gauche ou à droite de ces autoroutes piétonnes pour découvrir des quartiers autrement plus sympas et tranquilles. Nous avons particulièrement aimé le Bari Gothic, qui raconte une grande partie de l’histoire de la ville, de l’Antiquité à la Renaissance. Ruelles étroites, architectures mélangées dans un joli bric-à-brac de souvenirs pieux et laïcs. Plus gai, partout des petits bars à vin, à tapas, à toutes sortes de choses, infiniment meilleures et moins chères. On a retenu en particulier l’Oviso, sur la place George Orwell (c’est pas beau, ça ?), très agréable, aérée, avec une aire de jeux pour les enfants et de jolies maisons autour. Ce bar chaleureux offre de très bons et très frais produits. On y dîne pour moins de 15 €. Autre endroit, plus près du port, place Duc de Medinaceli, Le Grand Torino Garage café. Un endroit original, au calme devant un beau jardin. Et, pas loin de là, 19 rue Josep Anselm, le Guru, délicieux bar à cocktails qui sert aussi des petits plats pour ne pas tomber raide saoul. En somme, Barcelone est une magnifique escale qui mérite mieux qu’une visite rapide, surtout en pleine saison. Il faut y prendre son temps, dans les beaux jours de l’arrière ou de l’avant-saison. Ceux qui ont la chance de pouvoir naviguer en dehors de juillet-août seront récompensés d’avoir affronté une météo moins estivale.

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Deux clubs royaux pour escale de princes Bien entendu, nous avons choisi le Vieux Port plutôt que le port olympique, plus moderne mais moins en centre-ville. Dans le bassin, il y a deux clubs nautiques, le RCMB et le RCNB, “royaux” tous les deux, l’un est Maritimo, l’autre Nautico. C’est au second que nous avions réservé par téléphone. Inutilement, car pendant tout notre séjour de quatre jours, il y a eu des places libres dans les deux bassins. Nous attendons l’ouverture de la passerelle piétonnière (à l’heure et à la demie) qui donne accès au vieux port. Après, tout est facile, on est attendus, aidés... comme toujours, club royal ou pas. Une place en bout de ponton côté chenal et c’est le paradis : vue sur la Rambla del Mar, assez loin pour la tranquillité des oreilles, assez près pour le bonheur des yeux. Au fond, la statue de Christophe Colomb que les Barcelonais revendiquent autant que les Génois, alors que seuls les Portugais lui ont donné sa chance... Puis les superbes bâtiments des autorités portuaires de la haute époque de Barcelone. Un tour à la capitainerie. Ambiance Newport Yacht Club : salons avec chemi-

ARENYS DE MAR Chalutiers, lamparos et chantiers navals Arenys de Mar est, en plus petit que Palamos, un beau port de pêche. Nous y entrons en même temps que des chalutiers qui débarquent aussitôt à la criée. Mais on ne se gène pas, le bassin du port est large, facile à manœuvrer, très abrité. Le soir, de la terrasse du restaurant de la halle aux poissons, dans le même bassin que la plaisance, nous avons pu voir partir les lamparos. Ils sont revenus à l’aube. Pour aller en ville, il faut emprunter des passages souterrains pour rejoindre la rue principale, perpendiculaire, plutôt sympathique sans être d’un immense intérêt touristique. Et, ici, il y a 90% d’Espagnols, ce qui change de Barcelone. Cabotages décembre 2014 - 11

Deux choses à voir cependant en se promenant dans la rue principale : une jolie place de l’église et une belle halle couverte qui se trouve aussi être très bon marché, ce qui change également de la capitale. Et aussi quelques maisons de style balnéaires du siècle dernier autour du port, un endroit pour passer un bon moment dans son cockpit. C’est aussi simple que cela. Et on aime caboter ainsi. Sur cette côte de vacances où il est bien difficile de trouver une zone technique d’importance et où on cherche souvent en vain un shipchandler, il faut signaler que le port d’Arenys de Mar dispose de plusieurs chantiers dotés d’immenses hangars, de travelifts, de grues, de

nées pour les retours de mer en hiver, collections de maquettes, de demi-coques, de tapes de bouches et de guidons de clubs prestigieux, photos anciennes, bar cosy... Mais pas de pantalons blancs ni de blazers bleus à écusson en vue. Cela est réservé aux cérémonies officielles, pas imposé aux visiteurs. Polos, shorts et docksides salés acceptés. Tenues de bain fluo et tongues, un peu moins. C’est un peu vieux-jeu, mais il est bon de trouver des lieux où le beau, le raffiné, le respect des valeurs marines réunissent des propriétaires de somptueux coursiers des mers du siècle dernier et de jeunes navigateurs fauchés sur des bateaux bricolés. Deux types d’embarcations qui se côtoient dans le bassin. Et, de plus, ce port est trois fois moins cher que les autres que nous avons connus ces derniers temps. Vous êtes dans le saint des saints de Barcelone, au calme et avec une vue imprenable, tout cela pour un prix inférieur à celui d’un port-garage français.

slips, de motoristes, de voileries, de quincailleries de marine, de professionnels... bref, de tout ce qu’il faut pour caréner ou sortir son bateau en cas d’avarie.

C’est bon à savoir mais on espère bien que vous n’en aurez pas besoin !

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SANT FELIU DE GUIXOLS Des trésors cachés C’est pourtant l’heure d’affluence pour les retours, mais au premier appel radio à la pétillante Chris (qui parle français) les boscos arrivent à toute vitesse en vélo (sans freins !) pour prendre les amarres. Ici, c’est toujours la grande classe espagnole, pour les services comme pour les équipements. Mais aussi un record de prix... Trois fois Porquerolles ! Quatre fois Barcelone ! Entre les pontons et le club-house d’une belle architecture de pierre prise dans la falaise, un curieux hangar : c’est l’ancien terminal ferroviaire du port. Dedans, trône une locomotive à vapeur et une voiture en bois. Quito Pi, ancien président du Club nautique, se souvient de son enfance quand ce tortillard faisait la liaison avec la capitale régionale, Girone et nous dira : «le train allait tellement lentement que dans les montées on pouvait descendre faire pipi dans les bosquets et rattraper le wagon en courant !». La route a tout changé. Le Club Nàutic est le plus ancien de la Costa Brava. Il gère le port depuis 1945. La plaisance est née ici alors qu’il n’y avait pas de pontons, juste un bout de jetée à côté du seul bâtiment qui existait, celui

Sant Feliu en est un parfait exemple. La ville regorge de témoins de toutes les époques, du plus pur Roman à l’avantguerre civile et aux années soixante-dix, il suffit d’ouvrir les yeux, de se balader le nez en l’air (ici pas de crottes de chiens, c’est 200 € d’amende !) pour se faire raconter mille ans d’histoire : un hôpital début du XVIe siècle, immense pour l’époque, parle des grandes épidémies, un cloître fortifié roman primitif raconte la peur des Barbaresques, un casino baroque fait entendre les fiestas des Années folles et pleins de détails accrochés aux façades sont un livre d’images (imaginaire), pour qui aime observer.

Le bassin du port où évoluent beaucoup de clubs .et de voiliers de sport. En bas, la “Porta Ferrada”, monastère fortifié.

de la barque des sauveteurs en mer. Maintenant, c’est un port de taille moyenne, construit à l’époque du boom économique de l’Espagne de l’après-Franco. On en voit les traces architecturales dans la ville, vue de la mer. Comme nous a dit encore Quito Pi, «quand l’Espagne est passée du quasi sous-développement au quasidéveloppement en quelques années, on n’a plus voulu voir ce qui nous rattachait au passé».

Sinon, on ne voit plus que cet hideux immeuble où il vaut mieux habiter pour ne pas le voir et regarder seulement la mer, et d’autres choses plus modestes comme les années des Trente glorieuses ont su si bien en faire, ici comme en France en un temps où, trop souvent, nouveauté tenait lieu de beauté. Pour voir le meilleur de cette ville, il faut marcher jusqu’à la partie à l’opposé du port, vers le cloître, son château et son église, mais aussi la place de la Mairie avec un marché très coloré, des petites rues avec des architectures surprenantes. À voir aussi, en haut de la Rambla, un joli musée du jouet avec une boutique du genre qu’il vaut mieux avoir oublié sa carte de crédit dans le bateau...


LLAFRANC Trois ports en un... mais peu de places Notre statut de periodistas y a sans doute fait beaucoup, mais, quand même, une place – une seule – était libre dans ce port de 140 anneaux dont à peine 20 pour des bateaux au dessus de 10 mètres. Pourtant, relativement, ce ne sont pas les bateaux qui manquent : il y en a partout où c’est possible. Dans le vrai port, bien sûr, géré par le Club Nàutic Llafranc, bien à l’abri d’un môle-promenade qui se referme vers la plage. Mais aussi dans le mouillage organisé dans la baie avec une centaine de bateaux de moins de 8 mètres, et même sur la partie de la plage la plus à l’abri. Là, pour bien serrer les bateaux au sec, ont été installés des treuils pour les faire monter sur des rampes et les ranger en épi. Ainsi, trois sociétés privées gèrent chacune son cheptel de bateaux et de barques, dont une grande majorité de Llaguts, les pointus, anciens et modernes, qui vont se nicher au mouillage dans les calanques et les recoins de rochers. Du 1er juin au 30 septembre, la baie de Llafranc triple ainsi sa capacité et les Zodiacs qui font la navette entre le quai du port et les mouillages n’arrêtent pas de charger-décharger des passagers. Mais, dès le 30 septembre, les bateaux quittent les mouillages et la plage pour aller dans les ports à sec de l’arrière-pays. La baie est mal abritée et seuls les baCabotages décembre 2014 - 13

Les Llaguts qui font le charme de l’Espagne nautique, tirés sur la plagette. En bas, l’entrée du petit port et son bassin bien encombré. Le chemin se côte qui mène à Calella de Palafrugell, et une des maisons de ce village.

teaux qui ont un anneau au port peuvent ne pas souffrir des gros coups de vent de Sud et d’Est. Si cela vous arrive, ne tentez pas de rentrer là : il faut passer si près de la plage, dans à peine plus de trois mètres d’eau, que c’est un bon moyen de se retrouver directement à la terrasse des cafés de la promenade... avec son épave. Ici, peu de plaisanciers de passage : 70 pour la saison ! Ils sont si rares que c’est le gardien du port qui détient seul la clé des douches-toilettes et vous la donne quand vous en avez besoin... Dès qu’on s’est approchés par la mer, on a compris que ça allait nous plaire. La petite baie de Llafranc, en bas d’un escarpement de roches rouges couvertes de pinèdes luxuriantes qui cachent les villas et de petits immeubles, donne envie de passer rapidement les amarres aux taquets et de se balader. Chose amusante, les maisons et les appartements de plain-pied sur la promenade ont installé leurs tables et chaises de terrasse entre celles des restaurants et des bistrots. Les habitants dînent là, à peine séparés du flot des badauds par trois pots de fleurs. Du bout du village, il faut absolument prendre l’escalier qui mène au chemin de ronde : vingt minutes de marche facile entre pinèdes et rochers qui mène à l’autre perle de l’escale : Calella de Palafrugell. Oubliez là aussi la plage façon “sardines à l’escabèche”, et regardez plutôt l’harmonie de l’architecture de ce gros bourg qui a su garder son cachet : tout est blanc et bleu, sans enseignes ni constructions hideuses. On pourrait se croire dans une île grecque ou un village de Tunisie. On a adoré.

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La baie de Port Lligat, bien abritée, offre un mouillage organisé qui permet d’attendre une météo favorable pour passer le cap de Creus. En bas, l’entrée de la baie de Cadaquès, plus grande mais très houleuse.

PORT LLIGAT Alias port Dali, le beau mouillage L’une des rares escales qui porte ici le nom de port n’en est pas un : Port Lligat est un mouillage organisé sur coffres. Le plus beau de Port Lligat se voit du cockpit. La baie est superbe. Les rochers déchiquetés qui en font un excellent abri sont autant de sculptures et restanques

Ensuite, il suffit de marcher vingt minutes pour passer de l’autre côté de la presqu’île et se retrouver à Cadaquès. Que dire de Cadaquès qui n’ait été dit ? Que c’est une parfaite carte postale ? Que les styles des maisons sont étonnants et que chacune raconte une histoire ? Que ceux qui y sont venus il y a vingt ou trente ans seront encore une fois déçus par la marchandisation universelle ? Tout est vrai. Vu de la mer, c’est tout aussi beau. Mais la large baie de Cadaquès, si elle offre un beaucoup plus grand nombre d’amarrages, est largement ouverte au vent de mer. Pendant que nous nous y promenions, le SudEst s’est brusquement levé et à voir danser les bateaux, on se demande comment on aurait pu y tenir debout. Ou couchés ! L’histoire se termine là. Demain, retour à Sète avec plein de bons souvenirs, quelques déceptions, mais en tout cas des idées à méditer par les ports français...

encore entretenues et plantées d’oliviers font une belle géométrie en dégradés de verts. L’eau est transparente et plonger du bateau est le meilleur plan car la petite plage est faite de cailloux. À terre, la curiosité touristique du lieu est bien sûr la maison de Salvador Dali, au fond de la petite rade.

MAIS POURQUOI LES PORTS CATALANS SONT-ILS SI CHERS ? Jusqu’à 110 € pour un bateau d’un peu moins de 11 mètres. Le plus souvent autour de 70 €. Avec des mouillages très encombrés, cela fait un joli budget de croisière. Pourquoi de tels prix alors que des ports français aussi prestigieux de Cannes Port Canto ou Porquerolles demandent entre 30 et 40 € ? LES SERVICES

Les ports espagnols ont monté l’offre d’équipements et de services à un niveau qu’on ne retrouve que très rarement en France. Pontons presque toujours ouverts mais surveillés et même gardés, boscos en quantité suffisante pour ne jamais attendre ou rester sans réponse sur le canal 9, sanitaires irréprochables, machines à laver, Wifi gratuite, salons confortables et club-houses, restauration sur le quai d’honneur… Quasiment rien à dire dans les dix ports que nous avons fréquentés. Et pour cela, il faut du personnel.

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LA FISCALITÉ

La Generalitat de Catalunya, la région Catalogne, d’un jour à l’autre, a multiplié par 7 la redevance que les ports doivent lui payer. Pour un port d’environ 450 places, le montant annuel qui était de quelques 25.000 € est passé à 180.000 € ! Les Pouvoirs publics ont besoin d’argent, ils taxent les riches, les propriétaires de bateaux. Du coup, les plaisanciers sont forcément de plus en plus des gens riches… LE STATUT

La quasi-totalité des ports de Catalogne sont privés, la plupart du temps associatifs, équivalent de la Loi 1901. Mais ce sont de vraies entreprises. Les sociétaires ont collectivement investi et emprunté pour faire les études et construire les ports, les gérer, en faire des outils rentables à défaut d’être lucratifs. Avec des concessions de 20, 25 ans, il faut amortir l’in-

vestissement sur la période. Avec, par exemple à Sant Feliu de Gixols, 6 millions d’euros investis. On comprend pourquoi les ports cherchent des sous-contractants : restaurant, école de voile, plongée, activités diverses… L’EXCEPTION FRANÇAISE

En France, le coût du port ne se calcule pas ainsi. Intégré au territoire, il n’a pas de telles limites de temps pour son amortissement et encore celui-ci tient-il compte des retombées indirectes, bien au-delà du territoire du port lui-même : emplois dans le nautisme et le tourisme, dépenses des plaisanciers à l’escale, activités culturelles, gain d’image et arguments d’attractivité pour la ville, le département, la région… Chez nous, un port est intégré dans une économie et une politique plus globales. Ceci explique sans doute cela. Barcelone est la seule exception à ce tableau.

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QUÉBEC

La Côte Nord du Saint-Laurent de Rimouski à la frontière du Labrador à bord du Bella Desgagnés un cargo mixte qui ravitaille des villages isolés

Textes et photos Djinn et Christophe Naigeon

Huit jours à bord d’un cargo mixte en cabotage le long de la côte Nord du Saint-Laurent, fleuve à l’estuaire immense qui devient peu à peu la mer entre la ville de Québec et les confins du Labrador, face à Terre Neuve. Le Bella Desganés, dernier né de la compagnie de navigation canadienne spécialisée dans les missions difficiles dans les mers froides de l’Atlantique Nord, répond ici à une mission de service public : relier et ravitailler des ports et des villages isolés, souvent sans aucune route, coupés du monde par la neige et de grandes distances dans des paysages splendides et sauvages, presque vides d’habitants. Cette côte doit faire face à la crise de la pêche et au ralentissement de l’exploitation minière, connaît la désertification et le vieillissement de sa population blanche, tandis que les communautés Innues (indiennes) voient leur population exploser en même temps que le chômage. Alors, avec l’aide d’associations soucieuses de préserver la nature et les cultures locales, se développe timidement une forme de tourisme respectueux des sites, des gens et des cultures, reposant sur l’immense potentiel de la côte : chasse, pêche en rivière et en mer, observation des animaux sauvages, canoë-kayak, randonnées, raids et bivouacs en forêt, motoneige et ski de fond, connaissance de la culture innue, plantes médicinales, artisanats... Ici, tout est possible. En suivant la tournée du Bella Desgagnés, nous avons voulu rendre compte de la beauté de cette région, de la richesse de ses habitants, des problèmes et des espoirs de cette côte qui se découvre d’escale en escale. C’est ce voyage que nous vous invitons à suivre, jour après jour. Cabotages décembre 2014 - 15


Premier jour

RIMOUSKI Avant de traverser l’estuaire

Du haut du vieux phare, aujourd’hui désaffecté, on a une idée de la largeur de l’estuaire du Saint-Laurent, pourtant encore relativement étroit à la hauteur de Rimouski

QUÉBEC

Tout a commencé par la route. Avec deux trains par semaine, mieux valait faire en voiture les quelque 350 kilomètres de Québec-ville à Rimouski. Temps radieux. L’ancienne ville en bois a presque totalement brûlé dans les années cinquante à cause d’in incendie dans une forêt un peu trop proche, mais la ville reconstruite a tout de même un charme tout droit sorti de notre imaginaire nord-américain : rues larges, végétation omniprésente, maisons en briques peintes de vif, ou en bois avec terrasses à rocking-chair, petits immeubles, petites galeries marchandes abritées pour les rigueurs de l’hiver... La marée qui descend dans l’estuaire laisse découvrir une berge plate couverte d’herbiers marins et une impressionnante quantité de cailloux affleurants qui

font froid dans le dos à tout navigateur. Mais le Bella Degagnés qui s’approche reste bien dans le chenal. En attendant notre embarquement prévu vers 20 heures, avec Suzie, notre guide de Québec Maritime, nous poussons à quelques kilomètres de là vers l’aval, à la Pointe-au-Père, haut-lieu de l’histoire maritime québécoise. D’abord, un phare qui se visite et offre une belle vue sur la baie de Rimouski et l’estuaire, et une Maison de la corne de brume, mini-musée qui montre les moyens employés pour envoyer des signaux sonores aux bateaux aveugles : canon, explosifs, énormes cornes que l’on sonne avec des compresseurs impressionnants. UN PHARE, UNE CORNE, TROIS MUSÉES Un musée tout neuf, inauguré pour le 100e anniversaire de la Grande Guerre, raconte la vie dans les provinces maritimes dans ces années-là, mais, pour les marins, le plus impressionnant est sans aucun doute le musée consacré au Empress of Ireland, qui fit naufrage devant Rimouski quelques mois avant le déclenchement de la guerre de 1914. Éperonné par un cargo un soir de brume, ce “Titanic canadien” a coulé en moins de deux minutes, faisant un millier

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de ­victimes. Mais l’Histoire allait offrir aux journaux d’autres événements. Et ce navire sombra une seconde fois, dans l’oubli. Des recherches d’archéologie sous-marine ont permis re recueillir assez d’objets pour faire une exposition passionnante. L’autre curiosité est un sous-marin de 90 mètres, le Onondaga désarmé dans les années 2000 après avoir joué son rôle dans la Guerre Froide. La visite audio-guidée en vaut la peine pour confirmer que la vie à la surface de la mer est nettement préférable : promiscuité, étroitesse de toute chose, confinement, silence absolu dans les moments de danger... Il faut aimer.

­Desgagnés, mis en service il y a un an et demi, peut embraquer 381 passagers dont 160 en cabine. Les autres voyagent dans des salons à sièges-couchettes pour une nuit ou deux, ce qui est souvent le cas, dans cet autobus maritime. On regarde les lumières de Rimouski s’éloigner. Le Bella glisse dans un silence total sur une eau à peine agitée par un petit vent de sud-ouest qui suit le cours du Saint-Laurent. C’est parti pour 11 h 30 de traversée jusqu’à Sept-Îles, première escale de la Côte Nord du Saint-Laurent, sur les traces de Jacques Cartier.

En haut : le Bella Desgagnés arrive au port de Rimouski. En bas : une rue de la ville

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QUÉBEC

Destination

UN BATEAU TOUT NEUF Le soir venu, il est temps de nous rendre sur le quai d’embarquement. Sous les projecteurs oranges, la grande grue du Bella Desgagnés charge les conteneurs sur la moitié arrière du bateau réservée à la cargaison. Il va ravitailler les ports de la Côte Nord du Saint-Laurent, dont certains villages qui n’ont pas de route d’accès. Jusqu’à Blanc-Sablon, son terminus à la frontière du Labrador, à deux pas de Terre-Neuve, il est – sauf pendant trois mois de gel intense qui rend la navigation impossible entre janvier et fin mars – il est partout attendu avec impatience, une fois à l’aller, une fois au retour, dans sa rotation d’une semaine. Les passagers embarquent par la coupé. Nous sommes moins de dix, sur ce bateau tout neuf, qui remplace un prédécesseur mythique, le Nordik Express, folklorique mais bien fatigué. Le Bella


Première nuit

LE BELLA DEGAGNÉS

S

ur la passerelle, il fait nuit, dedans, dehors. D’un côté de la baie vitrée des écrans – radar, cartographie, contrôles du navire... – et de l’autre, la nuit, la pluie, la brume. Autant dire qu’on ne voit rien. Pourtant, pour le commandant en second, Jean-Charles Le Blanc, de quart quand nous montons après minuit, c’est le trajet le plus tranquille. À part quelques minéraliers qui longent la côte Nord, le coeur de l’estuaire est vide. Cet homme tranquille a fait mille cinq cents fois le trajet en 46 ans de carrière. Il en connaît chaque caillou dirait-on si tous les cailloux étaient connus,car, dit-il « chaque année les services hydrographiques en découvrent de nouveaux qu’ils ajoutent sur les cartes. La Basse-Côte Nord est trop peu fréquentée par les navires de commerce pour avoir intéressé les cartographes... ». Les récifs cachés sont le premier danger. ROCHE, GLACE, VENT, TROIS DANGERS Lui, qui a commencé sans les instruments modernes d’aide à la navigation, a appris peu à peu, en ouvrant les yeux. Toutes les navigations près des côtes et les approches se font à vue. Surtout en hiver quand le courant du Labrador fait descendre vers le sud les énormes glaçons venus de l’Arctique et que les vents d’Est les poussent vers ce dédale d’îlots et de récifs où ils se coincent, ajoutant encore des pièges aux obstacles permanents. Robin Kelleher directeur de la compagnie raconte « la première fois que j’ai navigué ici l’hiver, je me suis demandé comment ils faisaient. On ne voit que du blanc. Blanc clair et blanc foncé ! » . Les deux ports les plus difficiles sont La Romaine et Harrington Harbour. Nous aurons l’occasion de nous en apercevoir. Surtout quand il y a du vent. Et ici, la météo est très changeante, nous avons eu l’occasion de nous en apercevoir dès ce premier soir. Des coups de vent à 50 nœuds peuvent se lever brusquement. Dans ces cas-là, impossible d’approcher des ports. « On fait des huit au large en attendant une accalmie » explique François Nadeau, le capitaine. Et pourtant, le Bella est équipé pour les manœuvres délicates. François Nadeau précise : « il possède un système de propulsion que l’on retrouve seulement sur certains très grands navires de croisière qui craignent d’entrer dans des ports trop petits ». Pas de gouvernail, mais quatre propulseurs (des pods,

QUÉBEC

“jets d’eau”, pour faire court), capables de tourner à 180°. Si on ajoute deux puissants propulseurs d’étrave, le Bella peut virer sur place, se déplacer en crabe, en diagonale avant et arrière... Tout ça, sans barre à roue, juste un genre de joystick. Il y a même un système automatique qui permettrait de laisser faire l’électronique pour atterrir. Tenant compte du vent et du courant, il peut vous mettre votre bateau à quai pendant que vous dormez. À condition d’avoir une couverture GPS avec la précision militaire, ce qui n’est pas le cas ici. En fait, on préfère avoir quelqu’un à la passerelle ! VISITE DES PROFONDEURS DU NAVIRE Il y en a un autre qui veille avec son équipe, c’est Simon Leblanc, chef mécanicien. Il nous fait visiter son domaine : le clou du spectacle, c’est quatre générateurs diesel neuf cylindres auxquels sont associées quatre turbines qui produisent de l’électricité pour les moteurs des propulseurs. Avec ça, on manœuvre avec très peu d’inertie et on avance souplement à 12 nœuds de croi-

sière. Pas la peine d’aller plus vite avec de si courtes escales, la plupart du temps. Simon a fait le convoyage du bateau d’Italie où il a été fini (après une construction en Croatie). « On s’est pas mal fait brasser pour la traversée de l’Atlantique, mais ça a permis de guérir presque toutes les maladies de jeunesse du Bella et de se rendre compte que c’est un bon bateau » raconte-t-il. Nous ne l’avons pas testé dans des conditions très difficiles, mais avec 30 nœuds de vent et des creux de deux à trois mètres, les stabilisateurs antiroulis maintenaient le Bella presque à plat. L’équipe de Simon contrôle tout dans le bateau : la ventilation, la climatisation, la circulation de tous les fluides, la station d’épuration (pas de rejets d’eaux usées), le désalinisateur (7.000 litres d’eau par jour, sans aucun goût désagréable)... Le Bella est écologique et autonome.

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C

’est dans la grisaille que nous découvrons au loin la côte Nord de l’estuaire du SaintLaurent. La nuit a vu le ciel se couvrir et le pont est trempé d’un grain dont nous n’avons pas eu conscience. Les premières des sept îles apparaissent, laissant voir des rochers ronds, usés par les vagues et la glace, des forêts de conifères et de bouleaux, quelques maisons de bois au bord de plages de sable rougeâtre. Nous apprendrons plus tard que cette couleur est due à la présence de minerai de fer. Ceci expliquant cela, la ville de Sept-Iles se signale d’abord par les tapis transbordeurs de son port minéralier, couleur rouille dans la brume froide. Quand on aime les ports, on aime aussi ces ambiances à la Simenon, à mille milles de La Croisière s’amuse...

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SEPT-ILES Le fer et les fourrures En haut : une épave de cargo sur la plage de SeptIles atteste la dangerosité de ces côtes. Ci-contre : les tapis transbordeurs du terminal minéralier.

QUÉBEC

Destination

LE CHEMIN DE FER DU FER En arrière du quai de chargement, des rails et des wagons, le point d’arrivée d’une ligne de chemin de fer mythique, construite en 1954 quand fut découvert le gisement ferrugineux de Shefferville, à 576 kilomètres à l’intérieur des terres, à la limite du Labrador. C’est le plus grand gisement de fer du Canada, riche en minerais de toutes sortes. En quatre ans, 7 500 ouvriers ont posé les rails de ce train qui a bouleversé la vie alentour, tant le long de la ligne qu’à ses deux extrémités. (suite page 20)

Second jour


En bas : Le comptoir de traite et une tente collective innue en écorces de bouleau, reconstitués par les archéologues et les anthropologues comme Steve, notre guide. À droite : Une carte de la baie de Sept-Iles telle qu’on en faisait à l’époque des colons anglais, en 1760. Page de droite : La première construction à l’entrée du port de Natashquan

QUÉBEC

La mine, au bout du monde, en pleine nature de bois, de lacs et de rivières à truites, a créé une ville à partir de rien et, sur la côte, le petit village de SeptIles, qui n’avait que quelques centaines d’habitants, s’est enrichi de 27 000 Septîliens. Parmi eux, 3 000 Innus, nom des “Premières Nations” (on ne dit plus Indiens, ni même Amérindiens) dans cette région du Québec. LE VIEUX POSTE DE TRAITE Car, bien entendu, l’arrivée soudaine et massive de l’ère industrielle dans les forêts où les Innus (prononcez Innous) vivaient de la chasse, principalement au caribou, et de la pêche, a été un bouleversement. La métallurgie a connu des crises mais aujourd’hui le train est toujours un lien précieux entre la côte et l’intérieur, même s’il ne va plus aussi loin qu’avant. Les Québécois qui ont des chalets sur son tracé indiquent l’endroit où ils veulent descendre sur leur ticket qu’ils remettent au contrôleur. Et, au retour, ils font du “train-stop” en bord de voie. À cinquante à l’heure de moyenne, le convoi s’arrête facilement... Nous débarquons pendant que la grue du Bella transborde ses conteneurs dont certains contiennent des voitures. À côté du port de commerce, un grand terre-plein où se côtoient navires de pêche et bateaux de plaisance en hivernage à sec. Ici, la pêche dure trois mois. Les derniers bateaux qui travaillent encore en cette mi-septembre sont ceux qui pêchent la crevette d’automne et le crabe des neiges, sorte d’araignée de mer. Bientôt, ils vont eux aussi se mettre à terre, la neige va les recouvrir et, plus au nord, la mer va geler. Marion, notre guide du bureau de tourisme de Sept-Iles, nous conduit au Musée Régional de la Côte Nord où nous rencontrons Steve, grand pêcheur de truites, coureur de bois et de lacs, mais surtout anthropologue, spécialiste des Innus. Il va nous raconter une autre histoire, bien antérieure à l’âge du fer de Sept-Iles et nous conduire

au grand marché de la fourrure, le vieux poste de traite, à la sortie de la ville sur un petit promontoire en bord de mer. MONNAIE DE CASTOR ! Celui de Sept-Iles a été un très important lieu d’échanges depuis 1673 et a connu son apogée dans les années 1840. Cette période florissante a été choisie pour reconstituer le poste, là où les archéologues en ont retrouvé les vestiges. C’est un petit village, avec église, entrepôts et maison du commis (chef de poste), boutique où s’échangeaient les peaux contre les produits alimentaires venus d’ailleurs et les objets manufacturés : couteaux et racloirs de fer, plus efficaces que les silex taillés pour préparer les peaux ; mousquets, plomb, moules à balles, poudre à fusil pour la chasse ; haches, scies et ustensiles pour la vie quotidienne dans les forêts de l’intérieur ; pipes, cartes à jouer, bijoux (perles de verre de Murano !) étoffes, etc. Les échanges se faisaient sans monnaie. L’unité de valeur – la monnaie étalon – s’appelait une “plue” (déformation de pelure, pelage...), c’était une belle peau de castor, la fourrure préférée. Une peau de ragondin pouvait valoir un huitième de plue, deux peaux de renard une demi-plue, etc. Le commis, expert en la matière, était le juge qui évaluait la valeur des peaux. En été, les Innus venaient passer quelques mois au bord de la mer pour pêcher ou chasser le phoque. Ce n’étaient pas des marins, mais avec leurs canoës en écorce, ils pagayaient parfois fort loin, jusqu’à la rive en face, au-delà de l’horizon, avec une halte dans l’île d’Anticosti où, le Bella Desgagnés, n’arrivera que huit heures plus tard, à 12 nœuds. Pas navigateurs ?

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Troisième jour - matin

NATASHQUAN Chez Gilles Vigneault

A

près une courte descente à quai de nuit à Port-Menier, dans l’île d’Anticosti, nous avons abordé à nouveau la côte Nord juste avant l’aube à Havre Saint-Pierre. Pas d’escale pour nous qui n’avons jeté qu’un œil par le hublot pendant que l’autre dormait encore. Au vrai réveil, le temps était radieux pour parcourir les 72 milles nautiques jusqu’à Natashquan. Joli nom “indien” pour ce port minuscule où le Bella accoste après avoir embouqué un étroit chenal entre les roches affleurantes. Les heures passant, le vent s’était levé jusqu’à 30 nœuds. La mer, qui moutonnait sévèrement, était marbrée de longues veines d’écume. Ici, pas de doute, on est vraiment dans le Nord. La première maison de bois, minuscule et seule à la pointe de granite rose que nous contournons, est blanche et rouge écarlate dans la lumière coupante dont ce vent sec nous fait le cadeau. D’autres sont vertes, bleues, jaunes... comme nous en verrons maintenant à chaque escale. L’hiver, quand tout est blanc, elles deviennent les fleurs vives de ce paysage en uniforme.

(Suite pages suivantes)

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Voyage Destination

LA NEIGE, MÊME À LA TÉLÉ ! Nous n’avons que peu de temps. Sur le quai où les dockers ont immédiatement commencé à s’affairer, nous accueille Léonard Landry. Un sacré personnage. Dans la voiture qui nous conduit faire un rapide tour de ville, il raconte : « à Natasquan, on a la route depuis 1996, l’électricité depuis 1958, le téléphone depuis 1975. J’ai eu mon premier poste de télé en 1969, j’étais le premier, mais sur l’écran, il n’y avait que de la neige ! Comme si on avait besoin de ça ici ! L’image est arrivée en 1976 ». Léonard, aujourd’hui en retraite, avait une épicerie, un magasin général, comme on dit ici avec plus d’exactitude. Il commandait tout par le télégraphe, en morse, et ça arrivait deux semaines après, par bateau ou par avion. Il nous montre l’église blanche, « d’origine, elle n’a jamais brûlé », et l’école ancienne où les enfants étudiaient à la lampe à pétrole. Plus jeune, il n’y a pas usé ses fonds de culotte en même temps que Gilles Vigneault, son aîné, célèbre enfant du pays, fils de l’institutrice et d’un marin-pêcheur. Gilles Vignault est la fierté du village. Léonard nous montre sa maison d’enfance, à côté de celle de son grand père, tout près de la plage et des “galets”.


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Autrefois espaces où l’on faisait sécher la morue (les “vigneaux”) aujourd’hui, les galets sont des cabanes en bois posées sur une péninsule de roches arrondies, assez haut pour rester à sec aux plus hautes marées. Mais pas dans les tempêtes. Les pêcheurs y rangeaient leur matériel. Il y en avait trente, il n’en reste que douze, mais le chanteur « les a rendus célèbres dans le monde entier, c’est notre Tour Eiffel à nous autres » dit Léonard Landry qui ajoute avec fierté, « Vignault, c’est un cousin germain. Ça prend un Landry pour faire un poète chez les Vignault ! ».

À

Kegaska, la route s’arrête. Au bord de la plage qui arrondit le fond de la baie, un panneau met fin à la Route 138 qui relie ce village de 130 habitants au reste de la Province et permet d’aller plus facilement chercher du travail à Sept-Îles ou Québec. Là, sur le quai où nous abordons à la fin d’une journée ventée, restent encore deux bateaux armés de ces grandes nasses en cloche pour attraper les crabes des neiges. Ici, contrairement aux ports plus au Sud, la mer sera gelée. La neige viendra aussi, parfois cinq ou six mètres d’épaisseur, et le Bella Desgagnés interrompra ses rotations, généralement fin janvier. DES TRÉSORS D’ENFANCE Gary et Chandra nous attendent dans une voiture taillée pour l’adversité. Ils sont anglophones, comme toute la communauté de Kegaska et la plupart des villages plus au nord sur cette partie de la Basse-Côte Nord du Saint-Laurent. On plaisante : « la France ne va pas plus loin que la route ! ». Ils aiment leur pays, ces deux-là. Nés ici, ils en connaissent tous les recoins. Ils voudraient bien nous les faire tous partager mais l’escale est courte. Alors, ils sortent leurs trésors. À un kilomètre, une crique où les sapins s’accrochent aux rochers. C’est presque un petit lac de mer, avec, au fond, les îles entre lesquelles le Bella a slalomé pour venir jusqu’ici. La paix totale. Un lieu qu’on sent habité de souvenirs d’enfance, de baignades, de sorties en canoë, de pêche et de chasse aux phoques, aux oiseaux migrateurs quand ils viennent au printemps envahir l’estuaire et la baie du Saint-Laurent et nicher sur la mousse qui couvre les rochers. Des coins comme ça, il y en a des centaines, sans doute de plus secrets, qu’on garde pour soi, comme les coins à champignons ou les bassins à truites.

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Page de gauche : Le village de Natashquan et les forêts maritimes qui se maintiennent sur cette côte, encore relativement méridionale. Ci-dessous : L’épave du petit caboteur échoué sur les récifs typiques de la région, usés par les glaciations successives.

Troisième jour - après-midi

KEGASKA Là où finit la route 138

une sculpture de fer rouillé, une épave de caboteur échoué là – on dit que le capitaine était ivre – et que le temps a réduit en esquisse de navire : une proue percée d’un hublot, un mât de charge, quelque haubans. C’est tout, mais tout est dit, c’est un bateau. Tourné vers la mer, il n’y retournera pas. Un monument à la mémoire des centaines d’autres navires coulés entre la cailloux affleurants, ronds comme des dos de baleines mais dévoreurs de coques. Gary et Chandra aimeraient que le tourisme se développe un peu, que les gens comme nous qui passons sur le Bella puissent s’arrêter un jour ou deux, que quelque chose soit fait pour que la route ne serve pas qu’aux marchandises ou à l’exil, mais aussi aux visiteurs car « c’est si beau, ici ». Nous ne nous arrêterons pas davantage. Le Bella fait une nouvelle fois la manoeuvre délicate pour s’arracher à ce quai trop petit entre les récifs trop serrés et s’en va vers ces contrées où il n’y a plus de route, là où est sa véritable vocation. Le lien avec le monde.

QUÉBEC

Destination

UNE ÉPAVE COMME UNE SCULPTURE Le second trésor se trouve à l’autre extrémité du village, au bout d’un chemin qui devient vite trop étroit pour la voiture toute grinçante des branches qui grattent la peinture comme les ongles sur le tableau noir. Stop. On ouvre les portes comme on peut et on s’engage à pied en direction du bord de mer. Là, juchée sur l’un de ces rochers de granite rose,

À regret, nous repartons vite de Natashquan, le Bella va appareiller. On serait bien restés une nuit dans l’un des petits gîtes qui se montent depuis que, timidement, le tourisme fait son apparition. Ici, grâce à un microclimat, l’eau avoisine les 25° pendant un mois ou deux l’été... De quoi faire venir des jeunes dans ce hameau de 250 habitants dont la moyenne d’âge est de 53 ans. Mais micro-climat ou pas, le vent a encore monté quand nous repartons et, pour la première fois, le bateau se fait arroser d’embruns.


Quatrième jour - matin

HARRINGTON HARBOUR La Grande séduction

T

ous à bord nous l’avaient dit, il ne faut pas rater l’approche de Harrington Harbour. Avant 6 heures, nous sommes sur le pont. On ne regrette pas. Pile au moment où l’archipel se dessine plus précisément dans la première grisaille, la lumière s’allume, apportant la couleur sur l’écran. Le blanc de l’écume des vagues révèle les centaines de récifs affleurants, invisibles naufrageurs par mer plate, le rose des roches polies par les glaciations dessine des îles aux murs infranchissables, et le vert du manteau végétal troué fait apparaître ce qui, au printemps, sert de matelas aux nids des migrateurs et, en automne, de gisements de baies à confiture...

En bas : L’arrivée dans la baie de Harrington Harbour, étroit couloir où le Bella Desgagnés doit se faufiler À droite : Le village et les rues de bois de Harrington Harbour, à la fin de l’été.

UN COUP DE FOUDRE IMMÉDIAT La passe la plus large est jonchée d’écueils. Le Bella Desgagnés prend la plus étroite, longeant à dix mètres à peine une falaise qui impressionne, mais promet au moins un bord accore. Au sortir de ce couloir, Harrington Harbour nous saute à la figure. Le soleil dans notre dos polarise les jaunes, rouges, bleus, jaunes, verts, blancs des maisons de bois serrées en arc de cercle autour de la baie, totalement

abritée par ce chapelet d’îles qui masque l’horizon. Et là – bon Dieu, mais c’est bien sûr ! – on revoit les images du film La Grande Séduction (Jean-François Pouliot, 2003) dans lequel un village coupé du monde invente toutes sortes de stratagèmes pour attirer un médecin. Nous, on n’a pas eu besoin de ça. Un coup de foudre. Alors que beaucoup de bourgs de cette côte ont un habitat très dispersé, des maisons avec des jardins sans clôtures et pas de véritable centre ville, Harrington Harbour est, en lui-même un centre ville. Les roches qui l’entourent, l’étroitesse de l’île, obligent à ce resserrement. Et, particularité de charme, pour aller d’une maison à l’autre au milieu de toutes ces boursouflures de roche en pente, les Portharringtoniens (sic) ont construit des rues de bois sur pilotis qui serpentent à travers les bâtiments. Du port, le hameau apparaît comme un enchevêtrement de maisons, de hangars à bateaux et de barques au mouillage, de plots de bois sur lesquels sont juchées les rues, les terrasses, les bâtiments. Ici, à part la mer par pétole, l’horizontale n’existe pas et il faut partout mettre des cales pour que les bipèdes que nous sommes restent debout, assis ou couchés sans risque de rouler vers l’eau glacée... Au bout du quai, la coopérative de fruits de mer, principale activité de Harrington Harbour. Amarré à côté, le taxi-bateau attend ceux qui vont rejoindre les quelques maisons dans les îlots, fréquentées surtout l’été. Une barque à moteur remplie de sacspoubelles fonce vers un caillou, plus loin et sous le vent, où les ordures sont brûlées.

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Du port, les rues de bois incitent à la balade. Nous passons les deux heures d’escale – bien trop court ! – à les arpenter jusque sur les hauteurs, vers l’école, vers l’unique bar, jusqu’au port à sec où une belle dalle de pierre en pente recouverte d’un plancher permet de remonter les bateaux avant que la mer ne gèle. Le linge sèche partout sur de longues cordes en vaet-vient qui partent des seuils des maisons et vont tourner autour d’une poulie fixée, vingt mètres plus loin, sur un poteau électrique ou la maison du voisin. Pendant les longues soirées d’hiver, certains s’adonnent à la fabrication de miniatures, maisons, phares, bateaux... qui vont rejoindre dehors des nains de jardin du plus bel effet.

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Destination

QUADS ET NAINS DE JARDIN À pied, à bicyclette ou au guidon des dizaines de quads (seuls tout-terrains adaptés aux ruelles de bois), les Portharringtoniens, en anglais mais parfois en français, saluent l’étranger en visite. Nous redescendons par l’église et les deux magasins généraux qui s’activent à engranger ce qui vient d’arriver par le Bella. Les quads tirent des remorques à roue, mais aussi des traîneaux. Pendant trois mois, à partir de janvier, le bateau ne viendra plus, il faut tout stocker, de la boîte de clous au bourbon canadien, des couches pour bébé aux boîtes de conserve. La visite de ces deux magasins raconte à sa manière la vie de la communauté.


Quatrième jour - après-midi

TÊTE À LA BALEINE - LA TABATIÈRE Pourvu que les touristes viennent !

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En haut : Le ponton flottant de Tête-à-laBaleine, démontable à la fin de l’été, construit par les habitants pour leurs barques de pêche. Page de droite en haut : Le port à sec de La Tabatière où les pêcheurs et les rares plaisanciers remisent leurs bateaux pour l’hiver. Page de droite en bas : Une maison au bord d’un lac intérieur près de La Tabatière, seule marque de couleur quand tout sera gelé et enneigé.

QUÉBEC

e vent a tourné à 180° et un air marin bien chargé a apporté les premières gouttes à peine remontions-nous la coupé À Harrington Harbour. Crachin d’abord, puis franche pluie aux deux escales, Tête-à-la-Baleine qui tient son nom d’un rocher en forme de cétacé (ne l’ont-ils pas tous ?) et La Tabatière, dont le toponyme n’est pas issu de J’ai du bon tabac, mais de Tchakar, un sorcier indien. Plafond bas, crachin. Il n’y a pas que du rose à ces deux escales coupées du monde. À Tête-à-la-Baleine, Gilles, l’ancien professeur de français et de mathématiques de la communauté, nous fait passer tout naturellement devant l’endroit où il a enseigné : 14 élèves jusqu’au 4e degré de collège. En 1970, il y en avait 130. C’est le chiffre actuel de toute la population, contre 500 quand on a construit cette belle et grande école avec vue sur la forêt et un lac. Delima, notre accompagnatrice à La Tabatière en dira plus encore sur la désertification et le vieillissement de la population : il ne reste que cinq élèves, tous niveaux confondus. La cause ? Les jeunes, pour faire des études et trouver du travail s’exilent à Sept-Îles, à Québec, à Mon-

tréal et ne reviennent plus. La pêche est en déclin partout, il ne reste que trois pêcheurs de crabes des neiges – contre vingt – à La Tabatière où l’usine à poissons (surgélation) a fait faillite. À Tête-à-la-Baleine, la pêche au flétan et au homard ne va guère mieux. Voilà pour les mauvaises nouvelles. UN PARADIS DE NATURE Pour les bonnes, ces deux villages ont un atout majeur : la nature superbe et infinie qui les entoure. La mer, avec les “mille îles” de Tête-à-la-Baleine et certainement pas beaucoup moins à La Tabatière, autant de coins de pêche, de balades en kayak. Les rivières et les lacs à saumon et à truite. Les forêts d’où le célèbre caribou qui a migré vers le Sud est peu à peu remplacé par le non moins mythique orignal, presque gros comme un cheval, qui lui, migre d’Ouest en Est. Si on ajoute des castors, des lièvres et toutes sortes d’oiseaux des bois ou de mer, la chasse, bien qu’elle soit réglementée, est un plus qu’un sport, c’est, avec la pêche, une culture, un mode de vie. Et aussi une forte attraction touristique... pourvu que les touristes viennent. MAIS ÇA VIENT QUAND, LE TOURISME ? La région est une succession de vallons et de promontoires rocheux. De n’importe lequel d’entre eux, on ne voit que lacs et bois. Ici, ce n’est pas encore la toundra rase que l’on trouvera plus au Nord. La forêt est dense et presque partout intouchée. On peut y croiser des ours. En bord de route, un nid d’aigle pêcheur, à peine inquiété par les voitures. Le tourisme vert a ici l’un de ses paradis. 26 - Cabotages décembre 2014


Delima a ouvert des gîtes et attend du monde. Elle se demande pourquoi le gouvernement a investi trois millions et demi de dollars pour construire un stade de hockey au lieu d’aider au développement touristique. Gilles nous montre le ponton flottant, la

Voyage Destination

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“marina” des barques à moteur qu’ils ont construite, et se souvient des étés où toute la population quittait le village dans de petites embarcations pour rejoindre les cabanons dans les îles. Une belle migration que celle qui se limite aux vacances !


Cinquième jour

BLANC SABLON La tentation du Labrador

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De gauche à droite : La seule route qui va vers l’Ouest, à travers la toundra. Le petit port de pêche de Brador

QUÉBEC

ous sommes arrivés au bout de la route maritime. La route terrestre, elle, reprend son cours. Blanc Sablon, comme tous les ports depuis Kegaska, n’est pas relié au reste de la Basse-Côte Nord du Saint-Laurent dont il est le dernier maillon québécois, mais se trouve rattaché au réseau routier de la province du Labrador qui commence à quelques kilomètres. Certes, la route est longue pour rejoindre Québec par le Labrador (30 heures en voiture), mais c’est toujours plus court qu’en bateau et, avec des camions, sans rupture de charge. Du coup, ici, tout ou presque vient via la province anglophone, la voisine riche de pétrole et de gaz. L’influence anglophone est très forte pour ce confin du Québec qu’est le Canton de Brest.

Réjean Dumas, notre guide, directeur général des services de la communauté de communes, nous raconte que les Français installés ici sont allés chercher des femmes à Terre-Neuve. Des anglophones. Et souvent, pour les enfants, la langue “maternelle” a prévalu, bien que la seule école soit l’école française. Cela, Réjean Dumas y est d’autant plus sensible qu’il annonce avec fierté être de la lignée du grand Alexandre. Farouche partisan de la construction d’une route vers l’Ouest au-delà des 70 kilomètres existants, Réjean y voit des arguments économiques et sociaux, mais aussi culturels. Le goudron au service de la langue...

VOS GUEULES, LES BALEINES !

Ce bout de route vers l’Ouest, nous le prenons avec lui. Nous traversons plusieurs bourgades à l’habitat dispersé le long de la mer autour de belles pelouses : Blanc Sablon, Lourdes-Blanc Sablon, Brador, Middle Bay... 1300 habitants au total. Il y a ici un grand hôpital, un centre dentaire et tous les services qu’on peut attendre d’une cité moderne. Le Bella y conduit souvent des passagers des autres ports moins chanceux qui n’ont pas de médecins, de dentistes, de radiologie ou d’hôpital. Pour les urgences, il n’y a que du personnel infirmier.

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Réjean nous montre la maison où il a grandi, tout au bord de l’eau. « L’été, les baleines viennent tout près, en suivant les bancs de krill. Quand j’étais petit, dans cette maison, pour pouvoir dormir, on fermait les fenêtres la nuit tellement ça chialait et ça piaulait fort ! Vos gueules les baleines, on veut dormir ! Il y en avait parfois une centaine, plus les rorquals à bosse, les marsouins, les thons...».

LA TAÏGA, POUR BOTANISTES GOURMANDS

Mais on se console avec le paysage. La Taïga. Finies les forêts de bouleaux et de sapins, ici la roche du bouclier canadien (qui couvre 90% du territoire de la province et près de cinq millions de kilomètres carrés en Amérique du Nord) ne porte aucun arbre, sauf dans des creux abrités, près des lacs. Le plateau érodé par les glaciers là où il y avait autrefois (précambrien) des volcans, est couvert d’un tapis très dense – et fort doux aux pieds – de mousses, de lichens et de multiples plantes à baies (confitures !!) entremêlées, presque tissées entre elles pour mieux résister au vent et au froid. Si l’on n’a pas peur de se noircir les doigts et les dents, il fait bon herboriser à plat ventre en profitant de ces délices offerts par la nature depuis les premiers humains. Avec le temps radieux dont la météo nous gratifie

LA RIVIÈRE DES BELLES AMOURS

Mais nous reprenons la route, longeons une plage sur laquelle on dirait qu’il a plu des pierres énormes, peuplée d’oiseaux (parmi eux des macareux superbes), puis passons devant le petit port de pêche de Brador, seule communauté vivant encore de la mer. Le ruban d’asphalte monte et descend parfois vertigineusement (jusqu’à 19% !), tantôt longeant des baies où s’abritaient les navires des marins pionniers, grimpant sur les hauteurs pour découvrir, au fond du paysage, le dernier pli des Appalaches, ou traversant des rivières comme celle des Belles Amours, en souvenir d’une jeune fille noble amoureuse d’un matelot, rejetée par sa famille et installée ici. Nous n’irons pas au bout des 70 kilomètres de cette route, il est temps de revenir au Bella pour embarquer. Un dernier coup d’œil à l’îlot Bremen où atterrirent en catastrophe en 1928 les aviateurs allemands Huenenfeld, Koelh et Fitz-Maurice sur un Junker W-33. Notre bateau rebrousse chemin, nous portant vers les escales où nous n’avions fait que des arrêts nocturnes et qui nous restent à découvrir de jour.

De gauche à droite : La Rivière des Belles Amours Paysage et flore de la toundra, là où plus aucun arbre ne pousse.

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Destination

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après la grisaille d’hier, le spectacle infini de cette nature brute laisse rêveur.


N

ous arrivons à Saint-Augustin alors que le soleil commence à baisser sur l’horizon et repeint tout en doré. Ce qui s’offre à nos yeux alors que nous entrons dans un long chenal entre deux reliefs boisés n’est pas un spectacle. C’est un mythe. Tous les films (Oh !, La Rivière du Sixième Jour), quelques bons vieux westerns et des films de trappeurs, nos lectures d’enfance (même Davy Crocket...) sont dans ce paysage : des montagnes douces, des forêts épaisses, des chutes d’eau, des cascades de sapins qui descendent jusqu’à l’eau, des rochers où s’échouent des bois flottés, des rapaces qui tournent dans le ciel. On ajoute un canoë, un feu de camp avec un saumon qui grille et quelques chemises à carreaux (non, pas la guitare !) et on y est. On a envie de revenir, d’entrer dans l’image. Sauf que, dans l’image de Saint-Augustin, le trappeur blanc est absent. Pakua Shipi, le nom innu, est un communauté des Premières Nations. ON PEUT SE CONTENTER DU BONHEUR Le “port” est minuscule : une jetée deux fois plus courte que le bateau, un hangar, deux grands réservoirs de fioul. De là part une route de terre qui s’enfonce dans la forêt vers Pakua Shipi. Tout à fait exceptionnellement, personne ne nous attend. Alors, nous optons pour quelques pas sur la berge, entre roches et troncs blanchis, et écoutons le bruit de l’eau, de la forêt et de ses habitants. Il faudrait être une brute pour ne pas rêver. Une heure, assis sur un tronc, pieds dans le sable mouillé, à regarder le soir venir. On a même droit à un arc-en-ciel qui jaillit de la colline, comme une éruption, alors qu’un grain s’abat un peu plus loin. Demain, à La Romaine, nous chercherons à en savoir plus sur les communautés innues. Ici, nous nous contentons du bonheur. Parfois, ça suffit. LA “RÉSERVE DES INDIENS” Le bonheur, est un peu moins au rendez-vous de La Romaine, alias Unamen Shipu, un village qui paraissait semblable aux autres, avec des maisons de bois, dispersées, avec leur pelouse sans clôture, la voiture, le quad et le motoneige garés devant. Mais notre guide Innu, Alexis, nous conduit jusqu’à la “réserve indienne”. Il n’emploie pas les mots politiquement corrects pour désigner le quartier réservé autogéré par les anciens coureurs de forêts sédentarisés ici depuis 1956. La différence avec le quartier des Blancs tient à des maisons plus uniformes et des herbes folles autour. Autrement, il y a une école équipée de tableau électroniques, un bel hôpital, des services publics, une maison communautaire (mairie), le tout flambant neuf et généreusement dimensionné, une maison des jeunes, une radio locale... et même un aéroport géré par le groupe et son chef de bande, Abélard Bellefleur, élu pour un an, selon des lois propres aux Premières Nations auxquelles l’état fédéral a permis cette exception. Voilà pour l’approche communautariste propre aux pays anglo-saxons. Ci-dessus : le port et les environs de Saint-Augustin

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Sur la route en revenant de l’aéroport, des traces de pneus en zig-zag. Souvenirs des slaloms en voiture auxquels se livrent des jeunes désœuvrés alcoolisés. Le vif du sujet. Ennui, chômage, alcool, drogue. Pourtant, une loi spéciale interdit toute vente d’alcool (a fortiori de drogue...) dans la Réserve. Même le Bella Desgagnés ne vend pas de bière, et le vin est réservé au restaurant des “pensionnaires” comme nous. Comme dans toute prohibition, les produits illicites arrivent quand même et enrichissent des trafiquants. La contrebande vient par bateau ou par avion. Les passeurs sont connus, mais la communauté ne dénonce pas les siens. MÉTABOLISME OU DÉSESPOIR ? Pourquoi les Innus sont-ils particulièrement victimes de l’alcool (l’eau de feu qui décimait les Indiens dans Lucky Luke...) ? Un métabolisme différent ? C’est une thèse qui va aussi à la prévalence du diabète, de l’hypertension et de l’obésité. L’alimentation des Blancs, fort différente de celle des chasseurs-pêcheurs-cueilleurs qu’ils étaient ici il y a peu de temps, y est sans doute pour quelque chose. Mais d’autres y voient le déracinement physique et culturel, le sentiment d’être sorti des bois pour tomber dans une trappe. Dans un livre fait par des membres de la communauté de La Romaine et exposé à la bibliothèque du Bella, il est question du “piège” dans lequel sont pris les Indiens de la Réserve : enfermement territorial, dans le groupe qui a perdu de sa raison d’être hors du nomadisme et de la pleine nature, dans les paradis artificiels, y compris la télé et les jeux vidéo, autres addictions. « Les parents n’ont pas l’habitude de contrôler leurs enfants » dit Alexis. « Dans notre culture, la nature était un éducateur exigeant. Ici, ils ne savent pas quelles valeurs inculquer ».

Sixième jour

SAINT AUGUSTIN - LA ROMAINE Pakua Shipi & Unamen Shipu

Le quai de débarquement et la réserve innnue de La Romaine où vit notre guide Alexis et sa famille

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Destination

CHACUN SON ENFERMEMENT « La réserve devait nous protéger. Elle nous enferme. Notre espoir, c’est de nous mélanger aux Blancs. Il n’en était pas question au début. Maintenant, on commence à se fréquenter, c’est bien. Il faut que nous sortions de notre cercle, que nous voyons le monde, pas seulement celui de la télé » poursuit-il avec passion. Une centaine de Blancs, plus de mille Innus à Unamen Shipu. Cela suffira-t-il à faire que les enfants de la Réserve retournent à l’école qu’ils désertent ? En tout cas, lui, il se démène pour rendre à ses frères la « fierté perdue » dans ces mornes cités où ils ne sont que locataires des maisons uniformes qui leur sont allouées. Ce n’est pas non plus leur mode de vie. Contraste. Là même où la route est marquée par les gymkhanas, Alexis nous arrête en bord de forêt. Là, une tente de tissu montée sur des branches. Dedans, un tapis de rameaux de sapin frais, un poêle à bois. « Chaque année, dans ces tentes que nous construisons dans la forêt, nous cherchons à nous ressourcer, à renouer avec ce que nous sommes, à retourner chasser ». Deux semaines, un mois, à revenir aux fondamentaux sociaux et spirituels des Innus.


Septième jour

PORT MENIER Chevreuil et la chocolaterie

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ous ne ferons décidément pas escale à Havre Saint-Pierre. À l’aller comme au retour, le Bella Desgagnés est arrivé au port à 4 h 15 du matin et reparti à 6 h 15. Notre chronique quotidienne aura donc raté une marche... Cap, donc, direct sur l’île d’Anticosti. Après les centaines d’îlots que nous avons vus au cours de cette croisière, elle fait figure de géante : aussi grande que la Corse ! Et 230 habitants ! Tous regroupés à Port Menier, où nous atterrissons au bout d’une digue immense (1 200 mètres), la plus longue d’Amérique du Nord. Pourquoi ? C’est que le reef (ou rif), la bande côtière immédiate, est une chaussée de cailloux qui ont déjà causé plus de 500 naufrages autour d’Anticosti.

Ci-dessus : La maison du roi du chocolat, dite “château Menier”, volontairement incendié en 1953. Henri Menier était propriétaire de l’île depuis 1895.

Page de droite : Des chevreuils dans les rues de Port Menier Un renard gris à moins de cent mètres des habitations Des oiseaux de mer et des bernaches au milieu d’un rond-point.

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850 CHEVREUILS PAR HABITANT Sur le môle en “U” qui termine cette longue digue routière, le Bella s’amarre à côté d’un remorqueur et d’une grande barge chargée de troncs de sapins. L’odeur de la mer est masquée par un fort parfum de résine. Anticosti, extrêmement boisée, exporte ses arbres. Nous partons avec Danièle, spécialiste de la faune, tombée en amour de cette île qu’elle ne quitte plus depuis 30 ans. Il faut dire que la faune, ici, est toute particulière. Dans la ville, dans les rues, des chevreuils paissent tranquillement, viennent voir si vous n’avez pas quelque friandise à leur donner et repartent brouter les plates-bandes du voisin. Anticosti en a recensé environ 200 000. Plus de 850 par habitant ! 25 au kilomètre carré ! Moins farouches que des chèvres, ils en ont la voracité et l’agilité pour grimper partout où ils peuvent pour se nourrir. Sans grillage autour, une plante, un arbuste n’ont aucune chance de pousser. Le nombre de chevreuils est tel que l’écologie s’en trouve bouleversée, des espèces d’arbres sont en train de disparaître. OUTARDES, RENARDS & CIE Ici, pas question de replanter les forêts éclaircies par l’exploitation du bois. Pour avoir une chance, il faut se servir des arbres de la périphérie pour solidement enfermer et tuer autant de ces bêtes voraces que l’on peut trouver à l’intérieur. Des battues sont organisées pour limiter le nombre de chevreuils, mais leur population augmente. Autre rencontre à proximité des habitations : deux renards noirs. Tranquilles également, au point de se laisser approcher à une dizaine de mètres. Eux aussi ont de quoi manger. À un carrefour, un groupe d’ou-

tardes (ou bernaches, des oies brunes à tête noire) se balade en cacardant sans souci. Et encore, au bord de l’eau, cent espèces d’oiseaux, en forêt, des lièvres, des ragondins, des martes, des castors et, bien entendu, de grands orignaux qui commencent à manquer de nourriture, les seuls dont la population est en baisse. Avec ces gîtes de forêt et des maisons de gardiens de phare aménagés pour accueillir les visiteurs, Anticosti a de beaux atouts pour la chasse et la pêche, les raids et les bivouacs en forêt. Sur le quai d’embarquement du Bella, le commissaire de bord, Roberto, collecte les fusils des passagers pour les mettre à l’abri dans le bateau, pendant que la grue charge les 4x4 maculés de boue au retour de la chasse. LE CHOCOLATIER PATERNALISTE L’autre particularité de cette île immense est d’avoir appartenu à Henri Menier, héritier des chocolateries françaises fondées en 1816 qui inventèrent en 1856 les tablettes de chocolat et devinrent la plus grande entreprise du secteur au monde jusqu’en 1914. Anticosti, où les traces humaines remontent à 3 500 ans, fut d’abord la propriété d’un certain Louis Jolliet qui l’avait reçue en cadeau de Louis XIV. Elle a été achetée en 1895 par le magnat du chocolat. Henri Menier est l’archétype de l’industriel richissime, un peu fou et totalement paternaliste du XIXe siècle. Il construit un premier port, bâtit le début d’une ville. On voit encore sur le front de mer des maisons de bois construites sur le modèle savoyard, avec des toits largement dépassant pour la neige et, au rez-de-chaussée, une écurie censée contribuer à chauffer la maison. Il n’y a que peu de neige à Anticosti et jamais de chevaux. Peu importe, il creuse des canaux pour drainer les marécages, fait des routes, crée une salle des fêtes avec le cinéma. C’est lui le seul employeur, le maître des lieux. Entre 1900 et 1905, iI se fait construire une immense villa de bois, avec piscine, générateur pour produire de l’électricité, chauffage central, tour à télescope, jardin à l’anglaise, dans un luxe absolu. Il y vient avec ses amis et des personnalités influentes qu’il conduit dans les rivières à saumon et à la chasse. Aujourd’hui, il ne reste rien du “château Menier” volontairement incendié en 1953. DES GISEMENTS D’HYDROCARBURES L’île, après avoir été vendue à une société forestière et papetière anglaise puis à d’autres entreprises, a été finalement acquise en 1974 par le gouvernement du Québec qui a revendu des parcelles aux habitants. Exportant bon an mal an 50.000 mètres cubes de bois, l’île cherche à développer son tourisme de pêche et de chasse. Mais une autre forme d’économie, moins douce, se profile à l’horizon : des études sont actuellement menées pour y explorer des gisements d’hydrocarbures. Compatible, incompatible ? L’avenir le dira, mais on peut espérer que les chevreuils resteront pour longtemps le plus grand fléau d’Anticosti. 32 - Cabotages décembre 2014


Huitième jour

LA FIN DU VOYAGE Du service public au tourisme

A

près un nouveau passage nocturne à SeptÎles, le Bella a fait sa dernière traversée. Onze heures et demie pour parcourir les 133 milles nautiques qui séparent les deux rives. Le fleuve commencé à se resserrer mais notre cap en biais nous fait parcourir une distance équivalente à la traversée des île d’Hyères au Cap Corse. Pour cette soirée d’adieu, nous dînons avec Robin Kelleher, directeur général de la desserte Côte Nord de la compagnie,. Le Bella Desgagnés, « c’est le bateau des habitants de la Côte. Nous avons une mission de service public, la continuité du territoire, pour laquelle Transports Canada (Ndlr : le ministère) nous subventionne en partie. C’est cela notre première raison d’être. Certains disent que nous sommes contre l’idée d’une route. Pas du tout. Plus la Basse-Côte Nord se développera, plus nous aurons de travail », explique-t-il. UN CHAÎNAGE TOURISTIQUE DES VILLAGES Un travail qui changera un peu sans doute, plus tourné vers la croisière classique et le développement touristique. Dès à présent, la compagnie Desgagnés réfléchit à contribuer, éventuellement avec d’autres opérateurs, à une sorte de chaînage des villages de la côte qui permette à chacun de développer des formes de tourisme adaptées. D’autres y pensent aussi. Alberte Marcoux, directrice générale d’une association de développement touristique “durable”, la coopérative Voyages CoSte, fait partie de ces partenaires solidement ancrés dans le territoire : « L’industrie touristique est à ses premiers balbutiements sur la Côte-Nord plus particulièrement en Minganie et en Basse-Côte-Nord. Notre objectif est de faire du tourisme une industrie durable en respect avec notre culture et notre environnement et ce, non pas sur une période de 6 à 8 semaines d’été mais à l’année longue. L’objectif n’est pas d’amener des autobus de 46 personnes toutes les semaines mais plutôt de petits groupes conscientisés sur l’authenticité du milieu lesquels veulent vivre des expériences en lien direct avec qui nous sommes ». UN CHAÎNAGE TOURISTIQUE DES VILLAGES Pendant ces huit jours, nous nous sommes pris à penser à une sorte de tourisme qui, ici, ne détruirait pas ce qu’il admire ni les gens qu’il rencontre. C’est bien le sentiment que nous gardons après cette tournée qui n’était pas une croisière. Elle le deviendra peut-être peu à peu, sans jamais perdre sa vocation de relier au monde les villages les plus petits et les plus isolés.

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GÉNÉRIQUE DE FIN Pour en savoir plus sur cette région du Québec et la navigation sur la côte Nord du Laint-Laurent : Voyages Coste Coopérative de solidarité en tourisme équitable 22 Rue de l’Église Rivière-au-Tonnerre Québec +1 877-573-2678 www.voyagescoste.ca Tourisme Québec www.bonjourquebec.com www.tourisme.gouv.qc.ca Compagnie de navigation du Bella Desgagnés www.groupedesgagnes.com Régions maritimes du Québec www.quebecmaritime.ca Nos remerciements à toutes celles et tous ceux qui, sur place, à terre ou à bord nous ont apporté leur aide. Ils se reconnaîtront : Suzie, Alberte, Robin, François, Jean-Charles, Simon, Roberto, Guy, Jean, Marion, Steve, Léonard, Gary, Chandra, Gilles, Delima, Réjean, Alexis, Danièle, Cynthia, Yvonne.

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L’HérauLt, des kiLomètres de Liberté !

© Christophe Cambon

© Christophe Cambon

© Cathy Agrinier

© Christophe Cambon

© Phovoir

Les Héraultais citent le sport et la promenade dans la nature en tête de leurs activités de loisirs.

Que vous soyez randonneurs, vététistes, cavaliers, des cartes pour découvrir l’Hérault sont à télécharger sur herault.fr

Pour répondre à cette envie, le Département a créé et entretient : – 1 300 km de chemins de randonnée pédestre, – 550 km d’aménagements cyclables, par ailleurs, il soutient le fonctionnement des comités départementaux des sports de nature et l’aménagement des sites de pratique pour : – plus de 1 350 voies d’escalade, – 3 sites de vol libre sur le massif de la Serrane, à Lauret et au Saut de Vézoles, – 2 centres de vol à voile au pic Saint-Loup et à Bédarieux, – 5 parcours de randonnée palmée dans l’étang de Thau au départ de Bouzigues, Mèze, Sète, Marseillan et Balaruc-les-Bains, – 1 base de canoë-kayak à Réals, – 10 sites VTT proposant 2 400 km de parcours balisés et labellisés par la Fédération Française de Cyclisme, – 700 km de chemins de grande randonnée dont le GR de Saint-Jacques de Compostelle, – 4 spots de kite-surf à Villeneuve-les-Maguelone, Carnon, Palavas et la Grande-Motte.

Pour vos loisirs,

le Département est là ! 34 - Cabotages décembre 2014


8 escales 4 pas à terre 30 idées de balades Port-la-Nouvelle

Agde

Bouzigues

Mèze

Palavas

Cabotages décembre 2014 - 35

Saint-Mandrier FRANCE

Destination

Les Embiez

Port-Saint-Louis


Port-la-Nouvelle Commerce, pêche, plaisance bien à l’abri Port-la-Nouvelle, c’est un long couloir où se côtoient tous les genres de bateaux. Les plaisanciers sont tout au fond, bien à l’abri, mais doivent le respect au “pros“ qu’ils croisent. C’est aussi cela, être marin. N-D de Bon Voyage Son clocher à tour carrée abrite trois cloches de volée que l’on peut entendre tinter joyeusement le dimanche matin avant l’office. La construction néo-gothique, achevée en 1876, possède un très bel orgue, une œuvre de la manufacture toulousaine Puget &

Fils et nous vous invitons à vous tenir informés du programme de concerts. Autre scène culturelle, le Théâtre en Garrigue et ses gradins de pierres sèches vous propose en pleine nature des soirées Jazz, danse, lecture de contes, théâtre.

Une baleine dans une 2cv et dans un chai !

La Vieille Nouvelle Au Nord du port se trouvent les ruines d’une ancienne redoute de surveillance construite en 1742 qui veillent sur le Grau de la Vieille Nouvelle. Ce grau qui sert d’écoulement à l’étang de Gruissane, identifié par Ptolémée comme l’embou-

Photo OT de La Nouvelle

chure de l’Orobius, est un lieu paisible et idéal pour la pêche à pied ou à la ligne. L’ancienne tour à signaux, en tronc de pyramide et à base carrée, a la particularité d’être construite en pierres de Sainte-Lucie, exploitée pour son calcaire coquiller.

Jean-Louis Fabre, un viticulteur épris de naturalisme, expose dans son chai le squelette d’une baleine échouée sur la plage de Port La Nouvelle en 1989. Il a lui-même dépecé le Baléonoptera-physalus de 20 mètres, numéroté puis transporté dans sa benne de vendange et la 2cv familiale plus de quatre tonnes d’ossements avant de reconstituer sur ses terres cet immense puzzle qui vous regarde avec son œil préservé grâce à un procédé chimique resté secret. Ce musée singulier est accessible par le “petit train”. Coup de Cœur

Le canal de la Robine

FRANCE

le canal pour arpenter la petite île calcaire de 825 hectares et territoire d’oiseaux nicheurs (plus de 30 espèces). Vue paradisiaque sur les étangs d’Ayrolles et de BagesSigean, informations sur la flore et la faune. Passage par les “caves” et la “cantine”.

Photo OT de La Nouvelle

adresses

En bateau, en kayak, à vélo ou à pied sur son chemin de halage, le canal de la Robine est une remarquable voie douce entre lagunes et marais salants vers Narbonne. À 3 km de la mer, l’écluse Sainte Lucie et sa Maison Éclusière (1872) invitent à une halte et l’on traverse

Location de vélos : Sportguida 340 rue Georges Clémenceau roland.bisman@orange.fr www.sportguida.com 04 68 58 68 15 06 88 29 03 05

Maison éclusière de Sainte-Lucie : 04 68 42 23 70 Chai de la baleine : Visite gratuite Accès par le “petit train” Château de Jugnes 04 68 48 00 39

36 - Cabotages décembre 2014


PANORAMAS SUR LA CLAPE ET LES CORBIÈRES

LA MÉDITERRANÉE PRÉSERVÉE DE L’ESTUAIRE DE L’AUDE AUX FALAISES DE CAP LEUCATE Et si vous accostiez cet été en Narbonnaise Surprenante Méditerranée ? Les Cabanes de Fleury, Narbonne-plage,Gruissan, Port-la-Nouvelle, et Port Leucate, cinq ports de plaisance et autant de points de départ pour découvrir les paysages préservés du Parc naturel régional et le patrimoine millénaire de Narbonne. Laissez-vous porter par les vents et parcourrez les massifs classés de La Clape ou de Fontfroide, le Plateau de Leucate, le Canal du Midi et la halte du Somail.

Séjour Escapade bien-être 1 nuit en chambre d’hôte en vignoble, entrée spa et dégustation de vins.

Conditions et réservations au 04 68 11 40 76 - www.sudfrance.fr - n°IM011100002

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A partir de

47€ / pers.

La Narbonnaise Surprenante Méditerranée

Cabotages décembre 2014 - 37

FRANCE

Destination

ot-somail@legrandnarbonne.com


Le Cap d’Agde Un port de voileux et de curieux Ce qui frappe en entrant dans le bassin du Cap d’Agde, c’est la quantité de voiles : voici un port d’où on sort les bateaux ! Et, quand on a mis pied à terre, il y a bien des choses à faire ! Et Agde n’est pas loin. 20 cm sous les mers... Au pied des falaises de la Grande Conque, un parcours de 400 mètres (aller retour) est balisé en surface par des bouées jaunes numérotées au départ de la Plagette. Vous partagerez un territoire composé de cinq types de paysages et milieux sous-marins,

jardin d’algues colorées et d’anémones, avec les sars, saupes et oursins. En plongée libre ou la taille dans l’eau, muni du Guide des espèces méditerranéennes submersible et d’un appareil photo, l’accès est libre. Accompagnement possible par un animateur.

Coup de Cœur

©Pierre-Arnaud

Musée de l’Éphèbe et d’archéologie sous-marine Une plongée fascinante dans 26 siècles d’histoire de la cité d’origine grecque. Ses collections exceptionnelles d’archéologie sousmarine regroupent notamment une série d’amphores gréco-romaines, des éléments d’architectures de navires antiques et la plus belle collection d’œuvres d’art et d’objets usuels trouvés in situ par des plongeurs amateurs et des archéologues chevronnés. Le Musée inauguré en 1987 fête cette année les 50 ans de la découverte, dans le fleuve Hérault, de la statue de l’Ephèbe dont il tient son nom. Sans oublier d’autres chefs d’œuvres antiques (photo). Ouvert tous les jours 10 h -18 h (sam et dim 17 h). Tarif 11-18 ans (RSA, demandeurs d’emploi, handicapés) : 1,80 € Plein tarif 4,80 € / avec audioguide 6,90 €. Gratuit le 1er dimanche du mois. Visites commentées pour groupes.

Le musée agathois

adresses

Abrité par l’ancien Hôtel de la Charité, fondé en 1699 par l’évêque d’Agde Louis Fouquet, et contrairement à son frère le Musée de l’Ephèbe qui jouit d’une muséographie contemporaine, le Musée Agathois Jules-Baudou (1932) est délicieusement kitsch... Il donne une belle idée de la vie Musée Agathois des Arts et Traditions 5 rue de la Fraternité 04 67 94 82 51 Musée de l’Éphèbe : Pinède de la Clape (près du port) 04 67 94 69 60 www.museecapdagde.com

FRANCE

bourgeoise et maritime des XVIIe et XIXe siècles. Les personnages de cire, les reconstitutions de salons, de cuisines, d’ateliers et de cabines de bateaux et de la salle des voyageurs du relais des postes sont aussi très attractifs pour les enfants. Mêmes tarifs que pour l’Éphèbe.

Sentier sous-marin : La Plagette-Vieux Port 06 79 46 78 31 Location de vélo : - Cap Aventure. 19 rue des Sergents 04 67 26 36 00 - Cyclo du mail. Mail de Rochelongue 04 67 26 90 61

Photo Arnaud Dupuy de la Grandrive / OT d’Agde

À vélo : canal et St Loup Entre le Canal du Midi, le fleuve Hérault et la mer, 34 kilomètres de voies douces et de pistes cyclables sont sécurisées pour vous permettre de découvrir les quartiers historiques, les berges du fleuve jusqu’à la criée NotreDame de l’Agenouillère, le marché au poissons et le village de pêcheurs du Grau d’Agde ou bien encore la pinède bicentenaire de

la Tamarissière. L’ascension du Mont Saint-Loup est récompensée par la vue sur le golfe du Lion, la chaîne des Pyrénées, l’Étang de Thau, les falaises volcaniques, le port, les dix quartiers du Cap et une belle descente vers les plages. N’oubliez pas non plus la visite du Fort Brescou, avec la navette car l’approche est piégeuse !

38 - Cabotages décembre 2014


Destination

Cabotages dĂŠcembre 2014 - 39


Présent au Nautic du 6 au 14 décembre. Retrouvez nous Hall 1 Stand K22

Liste des revendeurs, nous consulter Hyères Espace Plaisance

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1504, av de l’Aéroport - 83400 HYÈRES


Bouzigues Un petit port, mais un grand cru Heureux les villages qui ont donné leur nom à un produit célèbre ! Bouzigues est un tout petit port où les péniches sont souvent à couple, mais c’est une escale superbe, au calme, ouverte sur le bassin.

Le musée de l’Étang de Thau

Un tour sur les quais

Les parcs conchylicoles

Tentez le tour de l’étang de Thau à pied ou à vélo, sur enrobé lisse entre Bouzigues (départ au Musée) et la crique de l’Angle, proche de Balaruc le Vieux. Six kilomètres de pur plaisir le long de l’étang au milieu des roseaux et des vignes. Vous observerez les habitats naturels d’une faune délicate sur laquelle règnent nombre d’espèces dont l’aigrette et le flamant. Au loin, les tables d’huîtres, les pieds dans l’eau puis l’anse bordée d’une prairie humide (la sansouire) de vasière et de prés salés où se jettent l’Agau et la Vêne. Cette dernière amène l’eau douce de la source d’Issanka. Et, en poussant un peu plus loin, la visite de Balaruc-le-Vieux et de sa circulade vaut la peine.

Bouzigues a donné son nom à cette huître dont Philippe Vaudo et Simon Julien, nos préférés, vous conteront l’histoire depuis l’huître plate endémique, en passant par l’invention de Louis Tudesq jusqu’à ces tables qui dessinent la géométrie parfaite de l’étang. Vous dégusterez sur place une huître au goût de noisette, la Philémons, que nos deux experts, producteurs et associés, sauvent des dents de la dorade et de celles des autres routoutou perceurs. Comptez deux heures pour cette visite dégustation, un joli privilège. Au départ du port de Bouzigues, un opérateur touristique vous emmène aussi à bord d’un bateau, le Bleu Marin, pour faire le tour des mas conchylicoles.

Coup de Cœur

adresses

L’idée, née en 1981, de conserver et de mettre en valeur les instruments traditionnels des conchyliculteurs et des pêcheurs avait donné lieu à un exposition dans le foyer rural. Son succès fut tel qu’en 1991 ouvrait le Musée de l’Étang de Thau. De la cueillette indigène des coquillages au collage sur les palétuviers, du magasin de pêcheur aux aquariums, une remarquable scénographie, complétée par un fonds de documentations et de films, nous confrontent à la mémoire conservée de la lagune et des hommes qui la font vivre.

Musée de l’Étang de Thau : Quai du port de pêche 04 67 78 33 57 Ponton pour les petites embarcations. Simon Julien / Philippe Vaudo : 06 15 55 73 48 huîtres-bouzigues .com

Fiche voie verte AF3V : www.af3v.org. Loc vélos et bateaux SINAUE : Av. Louis Tudesq 06 14 87 68 87

Pomponius Mela, géographe romain, évoqua les lieux, en l’an 31: « une jeune et petite cité barbare appelée Polygium ». Une “terre en friche“ car si la cité pêchait, elle ne cultiva que bien plus tard la vigne. Aussi pouvez-vous découvrir maisons vigneronnes et maisons de pêcheurs dans ce charmant village. Flânez le long des quais et sur la rive, vers les remparts et lorsque la cloche de Saint-Jacques sonne la fin de matinée, parcourez les ruelles pour gagner l’une des tables de dégustation d’huîtres.

Cabotages décembre 2014 - 41

FRANCE

Destination

Bateau Bleu Marin : Balade d’une heure environ adulte 12€, 8€ de 3 à 16 ans 06 03 31 44 90

Raffinés barbares...


Mèze Une cité ouverte sur le monde De Mèze s’exportaient autrefois des milliers de barriques. Mais de Mèze les voix du monde se font entendre de multiples manières : la musique universelle et celles qui plaident pour les générations futures.

Mèze aime la musique Mèze aime la musique et les musiciens le lui rendent bien. Pierre Vasiliu, que l’on a la joie de rencontrer à Sète ces dernières années n’y fut-il pas pendant longtemps un heureux résident ? On se souvient qu’on lui doit la découverte de Cesaria Evora pour son premier concert en France, ici, sur le port de Mèze !! Le Festival de Thau prendra comme chaque été sa place sur le port en juillet 2015. Outre sa program-

mation World Music et Nouvelle Scène française, l’événement est aussi citoyen, éco-esponsable et vous propose expositions, conférences, rencontres et débats... Quand on regagne le bord, le plaisir est de s’endormir doublement bercé par la mer et la musique.

Jurassique Mèze Afin de protéger son gisement paléontologique remarquable, un des plus grands d’Europe, Alain cabot a conçu en 1997, sur site, ce Musée/parc dédié aux monstres de l’ère secondaire. Il en retrace toute l’histoire, jusqu’à leur disparition. Muséographie de plein air entre pinèdes et

garrigue, sentiers pédagogiques bordés de vitrines où s’exposent des fossiles (dents, ossements, œufs, griffes..) reconstitutions en taille réelle de Brachiosaure, Triceratops, Gigantausaurus et aménagement d’une zone de fouille sur six hectares vraiment fantastiques. On y va en bus depuis la ville de Mèze. De quoi passer un après-midi quand le vent est trop violent sur le bassin...

L’amer Saint-Hilaire

adresses

On a vu de loin sa tour clocher émerger des toits, celle de l’église Saint-Hilaire. Allez admirer la nef unique à quatre travées de ce très ancien édifice érigé en collégiale dès 446, remanié au XVe siècle d’où ce style gothique méditerranéen. Vous verrez à l’entrée, au dessus du bénitier, un palindrome grec ainsi traduisible : « il faut laver les péchés ainsi que la figure ». Musée Parc des Dinosaures : Montagnac (15 mn en bus). 04 67 43 02 80 Festival de Thau : www.festivaldethau.com “Message“ et Pierre Chastan : 06 81 96 25 41 www.F6FOZ.free.fr Marché et halles centrales : Marché jeudi et dimanche. Les Halles en centre ville ouvertes tous les jours sauf le lundi.

FRANCE

Coup de Cœur

“Message“ comme une bouteille à la mer Vous ne manquerez pas de remarquer au fond du bassin ce ketch de 11 mètres à coque bleue et mâts rouges, appelé Message. C’est sur ce bateau, construit au port avec l’architecte Amiet, que Pierre Chastan, alias F6FOZ, marin et vert citoyen du monde, traversa l’Atlantique en 1999 pour porter à Kofi Annan, Secrétaire général de l’ONU, la pétition (9 millions de signataires), initiée par PierreYves Cousteau en faveur “des Droits des Générations Futures“ à une terre indemne et non contaminée. Il vous en parlera, avec la même passion que celle qui l’a conduit en 2006 à l’Elysée pour défendre l’organisation des Nations Unies pour l’Environnement.

42 - Cabotages décembre 2014


Longitude 3°,42 E - Latitude 43°,22 N VHF 9

SÈTE cité maritime

le numéro gagnant du golfe du Lion Un port tout temps entièrement rénové : Brise-clapot de 450 mètres, 35 places d’accueil passagers 1000 anneaux en cœur ville, bateaux < 15 mètres 31 postes moyenne et grande plaisance de 18 à 50 mètres 8 à 10 postes pour multicoques > 18 mètres Vidéo surveillance / WIFI Certifié Port Propre et ISO 14001

Cabotages magazine décembre -2014 1 - 43

Destination

Port-Saint-Clair - Môle Saint-Louis, 34200 Sète Capitainerie : 04 67 74 98 97 - Fax : 04 67 74 15 57 p o r t s t c l a i r @ p o r t s u d d e fra n ce - s e te . fr


© Photo : Patrick EOCHE

43°31’ N - 3°56’ E VHF Canal 9

‘ ENTRE MER ET úETANGS

L’ESCALE ‘ A‘ DECOUVRIR

FRANCE

Labels : Ports Propres, Pavillon bleu Capitainerie du Port de Palavas-les-Flots 34250 PALAVAS LES FLOTS Téléphone : +33 (0)4 67 07 73 50 Fax : +33 (0)4 67 50 61 04 accueil.port@palavaslesflots.com 44 - Cabotages décembre ots.com 2014 www.palavaslesfl


Palavas-les-Flots Des Barbaresques aux congés-payés Palavas-les-Flots dont le nom fleure bon les vacances à la Doisneau - ou à la Dubout ! - a eu une vie bien avant les congés-payés. Une escale ici conduit le voyageur au plus profond du Moyen Âge.

Coup de Cœur

Le phare de la Méditerranée

adresses

Le Phare de la Méditerranée, un ancien château d’eau r­ econverti en restaurant panoramique tournant, vous offre à 43 mètres de hauteur, une jolie carte et un tour d’horizon magique à 360° (compter une heure). Mais c’est aussi un musée dédié à l’artisanat des Poilus de Quatorze qui réunit 750 pièces, en métal, en bois, en os, en pierre, matériaux fournis par le champ de bataille. Les soldats de 14-18 ont sculpté ces objets pour tromper le temps de l’horreur et les vendre afin d’améliorer leur ordinaire : vases, coupe-papiers, bracelets, plus de cent briquets mais aussi des cendriers, modèles réduits d’avions...

Redoute de Ballestras : accessible en bateau à aubes de mars à mi-sept. Gratuit. Embarcadère quai Paul Cunq. 04 67 68 56 41 Le Phare : 04 67 68 61 16

Cabotages décembre 2014 - 45

Maguelone : Accès par le petit train des plages (4km) depuis le parking du Prévost. Audio-guides à l’accueil de l’Esat des Compagnons de Magelone. 04 67 50 63 63 esat@compagnons-de-maguelone.org

Le musée Dubout C’est dans cette ancienne redoute de Ballestras, une des huit tours de guet (1743) bâties entre le Grau du Roi et le Cap d’Agde, que s’est installé le musée humoristique Albert Dubout (photo ci-dessus). Si l’aspect de la petite tour nous ferait douter de son authenticité c’est qu’elle a été démontée et reconstruite sur l’Étang du Levant.

La vie palavasienne, croquée par Albert Dubout (1905-1976) durant plusieurs décennie s’y dévoile, irrésistiblement truculente et tendre. Le Musée du Train qui expose la locomotive de l’ancien et regretté Tortillard Palavas Montpellier (1872), une cinquantaine d’illustrations de Dubout ... est installé au cœur du parc du Levant.

Oh, les belles barques !

Maguelone, belle île

À l’estuaire du Lez, les anciennes Cabanes de Ballestras, nom premier de Palavas, ont amarré sur les quais, avec la complicité de Bruno Jeanjean (Trophée Jules Verne) des bateaux de bois, un patrimoine maritime exceptionnel fait de pointus et d’une douzaine de catalanes (mât incliné à l’avant) joliment restaurées et entretenues . Sur ces “hirondelles de mer“, embarquaient les pêcheurs de thons et du poisson qu’ils allaient vendre à Montpellier, distante de 10 km. Gustave Courbet y réalisa quelques marines bien avant la construction de la jetée à enrochement qui prolonge le grau. Le long du canal, où se regroupent les petits métiers, se tient chaque matin un marché aux poissons d’une incomparable fraîcheur.

Haut lieu de la Chrétienté en Languedoc, la cathédrale forteresse de Maguelone, émerge sur un îlot arboré (micocouliers, palmiers de Chine, Acanthe) relié aujourd’hui au continent par un cordon littoral. Cet ancien évêché (VIe siècle) devenu Port Sarrasin au temps des Barbaresques, détruit par Charles Martel en 737 et reconstruit trois siècles plus tard par l’évêque Arnaud était relié à Villeneuve par un pont d’un kilomètre, une prouesse pour l’époque. Embellie et fortifiée au XIIe et XIIIe siècles (portail magnifique, nef romane, tours de défense) la cathédrale Saint-Pierre dont l’acoustique est si belle sera vendue comme bien national à la Révolution puis classée monument historique en 1840. N’y ratez pas un concert de l’été !

FRANCE


Port Saint-Louis Plein d’histoire, en pleine rénovation Port Saint-Louis mérite le détour par le golfe de Fos. C’est un port multiple en train de devenir l’un des plus grands sites techniques, mais c’est aussi une escale dont nous aimons le charme particulier. Un tour en ville

La ferme du Tadorne

Devenue commune en 1904, alors que le port est officiellement créé en 1881, la ville accueille une population d’hommes. Ils sont trois pour une femme, des italiens pêcheurs, saliniers et pour beaucoup, ouvriers de la Compagnie Générale de Navigation. La construction du canal Saint Louis a été entreprise au milieu du XIXe siècle pour faciliter la liaison directe avec le port de Marseille. Le transbordement des marchandises entre péniches, chalands et navires, longtemps effectué de bord à bord avant la construction des quais, s’exerce ici depuis l’Antiquité, dans une rencontre intime du Rhône et de la mer. L’entrepôt portuaire Bonnardel (1880) comme tous ceux construits en front de quai, possède une maison d’habitation, face à la tour royale, des magasins et deux autres bâtiments d’habitation, le tout ceinturant une cour intérieure.

Le tadorne, un anatidae que l’on dit de Belon, du nom d’un zoologiste français de la Renaissance (1517-1562) et que Pline l’Ancien considérait comme une oie-renard est un intermédiaire entre l’oie et ...le canard. Si vous l’entendez vocaliser ses Ak ak ak ou Ark ark (il n’a que ces deux registres) c’est qu’il est en période de reproduction. Mais la ferme pédagogique agréée par l’Éducation nationale est une chorale permanente avec ses 500 animaux en liberté. On visite, sur ses quatre hectares, trois sites : un parc animalier, un marais et la ferme proprement dite.

La tour carrée

adresses

Le plus vieil établissement public de Port Saint-Louis est militaire : une tour qu’un impôt sur le sel a permis de construire en 1737. C’était déjà par un impôt royal sur le sel que vingt-cinq ans plus tôt avait été financé l’endiguement du nouveau bras du fleuve, le futur canal de Launes. Une puissance extrême avait sorti le Rhône de son lit sur les derniers 25 kilomètres lui permettant de rejoindre la mer. La Tour abrite aujourd’hui, avec 168 oiseaux naturalisés, une des plus belles collections ornithologiques de Camargue. Au rez-de-chaussée est installé l’Office de tourisme.

FRANCE

Découvrir Port Saint-Louis : Pour mieux connaître son histoire : Association Écoute Voir 54 plage de Carteau / 04 42 48 55 41 La ferme du Tadorne : Avenue Pierre Gabrielli Route de la Petite Vitesse 06 31 26 70 56 3 € de 3 à 12 ans. 4 € 13 ans et + lafermedutadorne@hotmail.fr

Conserverie Ferrigno

Cou p Cœ de ur

Entreprise familiale depuis trois générations et unique conserverie de poissons de la façade méditerranéenne, la spécialité est la sardine haut de gamme mais les conserves de thon et de maquereaux ou d’anchois feront aussi l’objet d’un savoureux avitaillement. Les poissons sont “travaillés” et mis en conserves sur place. Frédéric Mistral partageait avec Alphonse Daudet un goût immodéré pour le cartigot d’anguilles, un ragoût populaire local aux vertus thérapeutiques. Alors pourquoi pas ne pas se laisser tenter par les plats cuisinés de la marque dont ces lingots de mer, le dernier né...

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Port Saint-Louis-du-Rhône Le port de plaisance de Port Saint Louis du Rhône a rejoint le club très fermé des “ports labellisés PORT PROPRE” en mai dernier. Pas question de s’arrêter en si bon chemin, les projets 2015 sont nombreux et un accent particulier sera donné en terme de partenariats et d’animations sur la thématique “environnementale” et respect de la mer. La ville qui fait partie du Parc Régional Naturel de Camargue a l’intention de développer des actions en lien avec la mission “littoral, milieu marin et ressources halieutiques” du Parc, tout à la fois pédagogiques et festives. L’occasion de faire aussi la promotion des “moules de Carteau” et de mettre en lumière le dynamisme des conchyliculteurs. Des opérations “coups de poing” pour collecter les déchets le long du littoral, des opérations de communication menées par les élèves du Lycée Henri Leroy, des opérations de sensibilisation auprès des plaisanciers, des opérations de promotion pour valoriser les produits de la mer de notre territoire, le Port de Plaisance sera sur tous les fronts pour faire progresser le respect de la mer, du littoral. Rendez-vous en 2015 !

Capitainerie Port St-louis-du-Rhône

Tél. 00 33 (0)4 42 86 39 11 portdeplaisance@portsaintlouis.fr www.portsaintlouis-plaisance.fr


Crédits photos Sté PAUL RICARD S.A © Copyright

Bienvenue sur Les Îles Paul Ricard L’île de Bendor à Bandol (Var) L’île de Bendor, plus petit port-abri de Méditerranée. Entrepreneur, visionnaire, Paul Ricard qui a acheté l’île en 1950, était aussi bâtisseur et mécène. Il a façonné cette île dont il a dessiné les plans et fait surgir un véritable hameau, avec ses plages, ses boutiques et son petit port-abri. Séparée de Bandol par un filet de mer, l’île de Bendor dispose de l’emblématique et majestueux hôtel DELOS, des restaurants, des musées de l’île et des petites boutiques des créateurs. De nombreuses manifestations artistiques y rassemblent peintres et sculpteurs.

A Bendor en saison, l’amarrage de votre bateau est réservé pour tout séjour à l’hôtel DELOS. Les petites villas, dépendances du DELOS, disposent chacune d’un jardin privatif et d’un accès direct à la marina.

L’île des Embiez à Six-Fours les plages (Var) L’île des Embiez est une étape idéale pour se reposer et avitailler sur la route de la Corse. Ou encore un but de croisières pour tout ceux qui aiment la terre ferme et qui peuvent profiter des infrastructures de loisirs estivals proposés sur l’île de Paul Ricard. Le port des Embiez garantit une qualité d’accueil que tous les plaisanciers savent reconnaître et dont profitent les 700 chanceux qui ont une place à l’année. Pavillon Bleu, Label Port propre, le Port St Pierre des Embiez est le premier du Var a avoir la certification ISO 14 001 grâce à sa politique environnementale.

Le port des Embiez est à 10 milles de la Ciotat et de 4 milles de Bandol. Attention en prenant le raccourci entre les Embiez et l’île du Grand Rouveau, le chenal est étroit entre les cailloux. En approche, joindre la capitainerie canal VHF 9 (24/24 – 365) ou au 04 94 10 65 21. Longueur maxi : 40 m tirant d’eau maxi : 3 m.

www.lesilespaulricard.com

48 - Cabotages décembre 2014


Sanary & Les Embiez On y conserve les pointus et la nature Sanary est connu pour avoir été l’un des premiers ports à mettre en valeur le patrimoine maritime et Les Embiez pour avoir créé un espace insulaire éco-exemplaire. Alors, n’hésitez pas à y faire escale.

La chapelle des pêcheurs

© Guy Brevet

Les pointus de Sanary Pointus et barquettes donnent à Sanary son cachet d’antan. Ce patrimoine maritime exceptionnel (plus de 100 bateaux) mis en valeur depuis 2005 est accueilli au quai d’honneur, selon la volonté du maire de l’époque portée par l’action de l’Association des Pointus de Sanary. Sur les quais, le patrimoine architectural restauré, avec son église, l’hôtel de ville et ses fontaines allé-

adresses

Rien à voir avec le grand port dans l’estuaire de la Loire. SaintNazaire dans le Var, plus connu sous le nom de Sanary, n’a jamais construit que de belles barquettes. Port de pêche, Sanary a été très tôt un port de plaisance comme on les faisait au début du XXe siècle : des mouillages au milieu du bassin (voir photo ci-dessus).

À l’abri de sa tour romane, Saint Nazaire (San-Nari jusqu’en 1890) se développe vers le XIIIe siècle. Les restes de Saint Nazaire, martyrisé sous Néron, ne furent transférés de Milan qu’en 1650, un siècle après la construction de la chapelle Notre-Dame de Pitié, dédiée à la Vierge. Sa garde et son entretien étaient confiés à un ermite qui complétait sa mission par celle de vigie, allumant un feu, sonnant la cloche et hissant pavillon en cas de danger. Ils furent nombreux, souvent venus de la mer. Chapelle des gens de mer, elle possède douze ex-voto anciens classés. On y accède par le Chemin de la Colline jalonné de quatre oratoires.

Sanary Insolite : Promenade contée dans le village : Le circuit des exilés allemands et autrichiens, Aldous Huxley et le Meilleur des Mondes. Se renseigner à la maison du tourisme . Coup de Cœur

Sublime île verte des Embiez

Cabotages décembre 2014 - 49

Bon pied, Gros Cerveau Le Gros Cerveau, du nom d’un grand cerf légendaire local du XVIIIe siècle est un des 7 “balcons“ toulonnais. Le massif boisé, culmine a 443 mètres et vous ouvre 20 kilomètres de sentiers et le GR 51 (balisage rouge et blanc). Panorama saisissant sur les îles d’Hyères, les calanques et la Sainte-Beaume. Un sentier botanique d’un kilomètre permet une initiation à la flore avec une trentaine de bornes identifiant ciste de Montpellier, genévrier cade, euphorbe et cyste cotonneux, non loin de la Forêt de la Jeunesse plantée régulièrement de jeunes arbres depuis 1996, pour reboiser le massif incendié.

FRANCE

Destination

Le tour de la Tour Fondue, île principale de l’archipel, à pied ( 1 h 30) ou à vélo est un incontournable. «L’île aux fleurs» qui est aussi, pourrait-on dire, l’île aux enfants, est jardin multiple et sauvage. À partir de la plage des Salins, (vers le Yacht Club) vous passez devant l’ancien Fort Saint-Pierre qui abrite l’Institut océanographique (que vous viendrez visiter plus tard). Rendez -vous jusqu’à la Pointe du Coucoussa et sa Tour Vigie, royaume de quelques chèvres qui veillent sur la tombe de Paul Ricard. En surplomb de ces falaises et des petites criques où la baignade est souverainement tonique, on découvre une mosaîque de vignes, d’anciennes salines, de bois de pin d’Alep, et côté mer Toulon et Marseille...sublime.

goriques, Marine et Agriculture affiche de toutes aussi réjouissantes couleurs provençales façon Belle Époque. Promenez vous dans les ruelles animées et n’oubliez pas une visite à la Tour Romane et le musée historique de la plongée sous-marine qui retrace l’aventure initiée à Sanary, des Mousquemers, Frédéric Dumas, Philippe Tailliez et Jacques Yves Cousteau. (www.lespointus de sanary.fr)


Saint-Mandrier Un beau balcon sur la rade de Toulon Voici un nom qui dit bien qu’on est dans l’antichambre d’un grand port militaire. Avec les deux vieux bateaux gris qui en ferment l’entrée, on entre ici dans un domaine à la fois très secret et très convivial. St-Mandrier, beau havre Dès qu’on entre dans la rade de Toulon, un 90° sur bâbord vous amène dans un port facile, accueillant, calme, au coeur d’un bourg sympathique et vivant avec une vue splendide sur Toulon et son arrière-plan, le Faron. Du port, il y a quelques balades à faire (le très beau cimetière...) en montant vers le sémaphore (dire la vigie, de Cépet, sur la colline). Avec le coche d’eau régulier qui dessert toute la rade, rien de plus facile aussi que d’aller à Toulon, à la Seyne, dans la baie du Lazaret. Si vous restez là à regarder passer les ferries jaunes de la Corsica, sachez que, vers 1670, fut construit ici par des bagnards l’hôpital Saint-Louis, destiné à accueillir les équipages des navires mis en quarantaine (photo ci-contre). Le bâtiment est resté un hôpital jusqu’en 1936, date à laquelle il fut affecté à l’École des Mécaniciens, Chauffeurs et Scaphan-

FRANCE

driers de la Marine nationale. Aujourd’hui, la Base Aéronavale de Saint-Mandrier accueille ici sur

plus de 80 hectares le plus grand centre de formation de la marine, le Centre d’Instruction Naval.

En remontant encore dans le temps, sachez qu’ici, il y a très longtemps, la presqu’île était formée d’une île L’Isle de Sépet, elle-même formée auparavant de trois îles très rapprochées mais distinctes. Des Phéniciens, autour de 1200 avant J.-C., aux Goths dans les années 400 de notre ère en passant par les Romains, de nombreux navires et peuples voyageurs se sont abrités dans la baie dite du Creux Saint-Georges qui ne s’appellera Saint-Mandrier qu’au VIe siècle. Ce nom vient du patronyme de l’un des deux soldats saxons de l’armée des Ostrogoths, Mandrianus et Flavianus, qui s’installèrent dans l’Isle de Sépet. Entre 1630 et 1657, l’isthme des Sablettes se forma, réunissant les trois îles. Ce qui fait de la rade un si bon abri. La même année, un lazaret est réalisé où les navires suspects de véhiculer des maladies exotiques demeurent en quarantaine. De grands travaux sont réalisés au XIXe siècle : des forts, un mausolée, l’hôpital maritime et la vigie, nom donné à un sémaphore dans un port de guerre.

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