#MesWe
Retrouvez-nous sur
ekendsEn
Box nds Week-e LoireAtl
e tlantiqu Loire-A
antique
Retrouvez-nous sur
ivité #MesAct
sEnLoireA
Box és Activit tlantique
e tlantiqu Loire-A
at e r i o l x bo de Local et
Qualité
28 activités au choix Bien-être • Expérience • Sensation Date de validité : 31 octobre 2018 box.tourisme-loireatlantique.com n° immatriculation : IM044140006
A_2017_18_3000
de Local et
Qualité
24 week-ends au choix Nature • Sérénité • Gourmandise Date de validité : 31 octobre 2018 box.tourisme-loireatlantique.com n° immatriculation : IM044140006
WE_2017_18_1000
10/11/2017
Retrouvez-nous sur
1
de Local et
Retrouvez-nous sur
nd 17x17 specimen HD.pdf
box activites 15x15 specimen HD.pdf
de Local et
1
10/11/2017
m o c . e u lantiq
Qualité
16:11
Qualité
16:11 LOIRE-ATLANTIQUE DÉVELOPPEMENT 2 BD DE L’ESTUAIRE 44 200 NANTES / SIREN 793 866 443 RCS NANTES – © PHOTOS : LAD/A. LAMOUREUX ; V. BAUZA ; J. DAMASE – GRAPHISME : ANIMAPRODUCTIONS
ret ff o c n U cal o l u a e cad ël o N r u po
K T FA C E À FA C E
Vincent igne Maca view recto... l’inter
INTERVIEW ET PHOTOS / R MATTHIEU CHAUVEAU POUR KOSTA
Au cinéma comme au théâtre, votre actualité est riche. Seriez-vous, en réalité, un gros bosseur ?
n C’est une question qu’on
me pose souvent (sourire). J’aime bien travailler mais je ne le vis pas comme un travail. En ce moment, je suis très actif, c’est vrai… Un moment qui dure depuis 10 ans !
Cinéma ou théâtre ? n En tant qu’acteur,
je préfère vraiment le cinéma. Au théâtre, la prise de parole est très autoritaire. Alors qu’au cinéma, j’ai l’impression de pouvoir tenter plus de choses.
Votre film Pour le réconfort a été tourné en 2013. Pourquoi un montage aussi long ? n Quand
Vous êtes artiste associé au TNB. Heureux ? n Très.
j’ai tourné, je m’étais dit que j’en ferais une sorte de labo. J’ai presque réécrit le film au montage. Bizarrement, cela m’a pris beaucoup de temps pour faire un film qui a l’air brut, simple.
Arthur Nauzyciel, le directeur, a toujours été présent au moment où il me fallait de l’aide pour mes projets. J’espère créer des choses sur le terrain à Rennes : intervenir auprès d’élèves, faire des coprod’ avec le TNB.
Films d’auteur ou films grand public ? n Je ne me
Dans votre film comme dans vos pièces, le désenchantement de la jeunesse semble une obsession… n Je pré-
pose pas la question. Le sens de la fête était une super aventure. Ce qui change par rapport à d’autres films plus indépendants c’est, pour être un peu vulgaire, le salaire et la cantine. Mais Nakache et Toledano ont une vraie exigence dans leur travail.
fère parler d’un rêve cassé. Ça a rapport à la France et à l’héroïsme. Comment agir et prendre en main un territoire ? Je suis d’origine iranienne et j’ai grandi avec l’idée de révolution, de résistance. n
EN MANQUE - VINCENT MACAIGNE, 7 AU 9 FÉVRIER, LIEU UNIQUE, NANTES
PA G E 0 3
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
S R
K T
S R
K O S TA R PA R L E M E N U
recto n Vincent Macaigne / P3 Sommaire n / P4 Ours n / P6 Cover team n FagoStudio / P8 le k de kostar n Albin de la Simone / P10
actus n / P12 Business Classe n Le beurre Bordier / P16 Chef oui chef n Kazumi Hatakenaka / P18
actus n / P22 Entretiens n Johann Le Guillerm / P24 Agnès Varda / P44 Têtes de série n Cabazi / P40 Abuse, Columbine, Laura Perrudin, The Midnight Revolution, Le Groupe Obscur, Smooth Motion aux Trans Musicales / P54 Festivals n Trajectoires / P32 Premiers plans / P47 Portefeuille artistique n Les façades taguées par Philippe Cognée / P54 Le moi dernier n par Pierrick Sorin / P60 une ville ailleurs n Vienne / P62 verso n Vincent Macaigne / P66
PA G E 0 4
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
Q U I F A I T Q U O I ?
Merci à tous ceux qui ont participé à ce numéro
KOSTAR est édité par Médias Côte Ouest, SARL de presse au capital de 30 794,70 euros Directeur de la publication et de la rédaction n Patrick Thibault Graphisme et maquette n Damien Chauveau Développement n Patrick Thibault. Publicité n pub@kostar.fr SECRÉTAIRE DE RÉDACTION n Cécile You COMPTABILITÉ n Bénédicte Da Costa Rédaction n redaction@mcomedia.fr Studio graphique n damien@mcomedia.fr
PA G E 0 6
K O S TA R
Rédacteurs n Vincent Braud, Matthieu Chauveau, Fédelm Cheguillaume, Antonin Druart, Christophe Martin, Pierrick Sorin, Patrick Thibault. Photographes n Matthieu Chauveau, Tangui Jossic, Christophe Martin, Gildas Raffenel, Pierrick Sorin. GRAPHISTES / Illustrateurs / artistes plasticiens n Philippe Cognée, FagoStudio (couverture, ours, sommaire, custom des titres), Pierrick Sorin. Remerciements n Charlie Mars, tous nos lecteurs, partenaires et annonceurs Imprimé en CEE n Dépôt légal à parution n © Kostar 2017
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
KOSTAR est adhérent au SPG2I (Syndicat de la Presse Gratuite Indépendante d'Information Imprimée) www.kostar.fr Tous droits de reproduction réservés. Le contenu des articles n’engage que leurs auteurs. Les manuscrits et documents publiés ne sont pas renvoyés. n Abonnement annuel 30 euros Médias Côte Ouest, 2 ter rue des Olivettes, CS33221, 44032 NANTES CEDEX 1 n + 33 (0)2 40 47 74 75. ISSN : 1955-6764
Nos lecteurs et internautes sont informés que l’envoi à la rédaction, par leurs soins, de photographies représentant leur image et destinées à être publiées au sein de la rubrique « Sur son 31 », entraînent de facto leur acceptation : pour diffusion au sein du magazine « KOSTAR » édité par la société « Médias Côte Ouest », pour diffusion au sein des plateformes numériques « www.kostar.fr » et « www.facebook.com». Cette autorisation est valable sans limitation de durée. La rédaction s’engage en contrepartie à ce que les éventuels commentaires ou légendes accompagnant la reproduction ou la représentation de ces photographies ne portent en aucune façon atteinte à leur réputation ou à leur vie privée.
NICOLAS RÉGNIER L’HOMME LIBRE 1ER DÉCEMBRE 2017 / 11 MARS 2018
www.museedartsdenantes.fr
#MuseedartsdeNantes
Cette exposition est reconnue d’intérêt national par le ministère de la Culture /Direction générale des patrimoines/Service des musées de France. Elle bénéficie à ce titre d’un soutien financier exceptionnel de l’Etat.
Musée d’arts de Nantes - Nantes Métropole - 2017 - Nouvelle Vague - Nicolas Régnier, Le Camouflet. Stockholm, Nationalmuseum © droits réservés
[v.1588-1667]
K T
S R
K O S TA R H A B I L L É PA R …
Couverture / P01 n Sommaire / P04 n Ours / P06 n Tendances / P12 n Cultures / P22 n Une ville ailleurs / 62 Custom des titres / P08, 10, 16, 18, 25, 32, 40, 45, 47, 54, 61. PHOTO / TANGUI JOSSIC POUR KOSTAR
On avait remarqué le Fago Studio en découvrant l’affiche de À l’heure bleue, les nocturnes musicales du Jardin des Plantes de Nantes. On avait déjà noté qu’ils maîtrisaient la création d’atmosphères à travers l’illustration et la typographie. n Ils sont trois, Léna, Axel et Baptiste et Axel. Après des études en commun à l’AGR, l’École de l’Image de Nantes, ils décident de créer une entité commune. Avec un goût immodéré pour l’illustration, ils s’adonnent volontiers au graphisme et ont déjà de belles références. Une première exposition au printemps 2017 a permis de créer un style, une singularité commune aux illustrateurs. C’était un pari car ils travaillent vraiment tous les trois sur toutes leurs images. n L’habillage de Kostar ? « Nous avons repris les codes des façades, des enseignes, en donnant une atmosphère hivernale ». À l’arrivée, c’est un peu comme un soleil d’hiver dans lequel on perçoit l’effervescence des fêtes. Dans un style “rétro-futur”, le studio Fago a voulu créer une narration, ajouter de la poésie et de l’onirisme sans tomber dans l’hystérie des fêtes. Avec eux, nous vous souhaitons de bonnes fêtes. n WWW.STUDIOFAGO.COM PA G E 0 8
K O S TA R
SAISON 11 / NUMÉRO 54
FÉVRIER-MARS 2017
MADE IN FRANCE & EUROPE
KOSTPARIS.COM • Nantes . SCOTT / Rennes . SCOTT / Angers . UNIVERSAL JACKSON
K T
S R
U N E P E R S O N N A L I T É À L A M O D E PA R L E D E M O D E
“ÊTRE À LA MODE A À VOIR AVEC LE FAIT DE VOULOIR ÊTRE JEUNE” INTERVIEW / MATTHIEU CHAUVEAU
PHOTO YANN RABANIER
Vous êtes quelqu'un de stylé, depuis quand faites-vous attention à votre look ? n Depuis la 5e, quand je me suis vu avec une veste en jean, des santiags et un écusson géant du groupe Kiss dans le dos et que j’ai compris que ce n’était pas moi. Pensez-vous avoir le costume de l’emploi ? n Oui. La musique est un peu à la voix ce que le costume est au corps. La voix et le corps, on ne les choisit pas mais, ensuite, on trouve la bonne musique et le bon costume qui vont avec. Comment choisissez-vous un costume de scène ? n C’est une rencontre. Là par exemple, j’ai un costume bleu turquoise de chez agnès b. Je trouvais la coupe un peu trop estivale, du genre “je bois des cocktails sur un ponton”. Je l’ai fait entièrement reprendre. Quels rapports entretenez-vous avec la mode ? n Je m’intéresse aux fringues, aux couleurs mais la mode en tant que collections qui changent tous les ans, je m’en fous. Pensez-vous être à la mode ? n C’est rigolo parce que de jeunes Belges ont récemment fait une petite vidéo très drôle sur moi et l’un d’eux dit que je suis habillé comme le patron de son père. Donc non, je ne pense pas être à la mode (sourire). Être à la mode, c’est quoi pour vous ? n Quelque chose qui a à voir avec le fait de vouloir être jeune. Avez-vous déjà retourné votre veste ? n Politiquement ou en amitié, non. Sinon, oui souvent. C’est en essayant de mettre sa veste à l’envers pour voir si elle n’est pas un peu mieux qu’on avance. Avez-vous pris des vestes ? n Plein. Des vestes amicales, amoureuses, professionnelles et artistiques. Ce n’est pas ce que je préfère mais c’est important d’en prendre. Qu’y a-t-il dans votre valise quand vous partez en tournée ? n Elle est très structurée, remplie de plusieurs tote bags contenant chacun une chose différente : des gourdes sans BPA pour moi et mes PA G E 0 1 0
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
musiciens pour ne pas utiliser de bouteilles en plastique jetables, mon matériel de scène, mon costume, un steamer pour le défroisser, ma paire de chaussures El Ganso, des crayons et mon iPad sur lequel je dessine beaucoup. À qui voudriez-vous tailler un costard ? n À l’industrie agro-alimentaire qui pourrait d’ailleurs être symbolisée par un gros mec en costard. Quel est le comble du chic ? n Un très grand vin servi dans une carafe toute simple. Le truc excellent mais pas démonstratif. Le comble du mauvais goût ? n Je ne pourrais pas l’exprimer, ni donner d’exemple précis mais je le ressens très souvent. Comme la connerie, le mauvais goût nous entoure. Quelle personnalité voudriez-vous relooker ? n Les hommes politiques en général. Ils sont tous habillés pareil. S’ils avaient des habits un peu plus expressifs, ça me les rendrait plus humains. Qui rêveriez-vous de déshabiller ? n Cette question m’amène à l’idée d’un homme qui déshabille une femme et je crois que c’est ce dont on parle en ce moment… L’image exprime un truc un peu violent qui ne m’inspire pas trop. Votre premier tee-shirt de groupe ? n Ce qui est marrant, c’est la différence entre mon premier et mon dernier. Le premier, c’était Kiss. Le dernier, les Frères Jacques. Des groupes opposés mais tous les deux hyper lookés dans leurs genres. n TNB, RENNES, 20 DÉCEMBRE. LE GRAND LOGIS, BRUZ, 25 JANVIER. ATHANOR, GUÉRANDE, 23 MARS. THÉÂTRE ANNE DE BRETAGNE, VANNES, 24 MARS. ARTH MAËL, PLOËRMEL, 5 AVRIL. THÉÂTRE DE CORNOUAILLE, QUIMPER, 6 AVRIL. SALLE ROTZ, VAL-D'ANAST, 7 AVRIL. JARDIN DE VERRE, CHOLET, 13 AVRIL.
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
PA G E 0 1 1
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
CONTRIBUTEURS DU CAHIER TENDANCES VINCENT BRAUD, CHRISTOPHE MARTIN, PATRICK THIBAULT
Osez Joséphine
© GILDAS RAFFENEL
Activiste de la mode à Rennes et en région, Joséphine Gravis organise à nouveau Le Cool Club. Une réunion d’acteurs de la scène alternative de la mode, l’illustration, l’édition, le design et la musique. Maxime Roy, Arnaud Aubry, ParisRennes, Caroline Calloc’h, Atelier à quatre, Phénüm… On y court. Créatrice de mode, Joséphine Gravis en profitera pour présenter sa prochaine collection pour laquelle elle a travaillé sur des couleurs primaires. C’est son grand retour après une pause bébé. Comme d’habitude, elle fabriquera à la main, sur commande, à l’unité, à la taille de chacune. n
PA G E 0 1 2
LE COOL CLUB, HÔTEL PASTEUR, RENNES, 16 ET 17 DÉCEMBRE. JOSEPHINEGRAVIS.COM K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
CO LLIA U X O P T ICIE N S, 1 1 R UE MAR ÉC HAL JOFFR E, 3 5 0 0 0 R ENNES WWW.COLLIAUX-OPTICIENS.FR 02 99 78 24 66 W W W.C HANTALC OLLIAUX .FR COL LI A UX OPTICIENS, 1 1 RUE MA RÉCH A L J O F F RE, 35000 REN N ES 0 2 9 9 7 8 2 4 6 6 WWW.CH A N TA L CO L L IA U X .F R
iaux__165x230.indd 1
OP-RS15-WRK122_Colliaux__165x230.indd 1
1 11/6/14 4:49 PM
S R
DR
Gentlemen only L’élégance et le raffinement s’invitent Chez Monsieur. La boutique angevine est un genre de paradis pour ceux qui veulent ajouter quelques touches de chic à leur style. Cravates, pochettes ou nœuds papillons Pellens & Loick, écharpes foulards et cravates Anthime Mouley, bretelles Vertical, accessoires divers et variés. Mais on craque surtout pour les chaussures. Forts du succès de PimpMyStrap, façonnage de bracelets-montres patinés, Alexis et Ronan ont décidé de s’essayer aux souliers avec des modèles Carlos Santos en cuir blanc, qu’ils mettent en couleur au gré de vos envies, dans la plus pure tradition. n CHEZ MONSIEUR, 23 RUE DES LICES, ANGERS. #CHEZMONSIEUR #PIMPMYSTRAP
C’est cadeau Outre nos boutiques préférées qui se mettent en quatre pour proposer des idées originales, c’est le retour des marchés de créateurs. Le Cool Club à Rennes (voir ci-contre), le Garage de Noël occupé par Accestory et By Méliana à la galerie Le Garage (rue Scribe, Nantes, jusqu’au 22 décembre). Le marché de Leön, qui fête ses 10 ans, (place Sainte-Croix, Nantes), L’autre marché qui la joue éthique et solidaire. On note aussi le marché de Noël de la rue Drouet, toujours à Nantes, le 16 décembre, qui réunit éditeurs, illustrateurs et designers. Sans oublier un petit dernier, Kristmas avec un K puisque ça se passe chez Kiosko qui joue aussi la carte des brunchs électro. C’est au 31B rue de la Tour d’Auvergne, à Nantes, pour ceux qui ne connaissent pas encore l’adresse. n PA G E 0 1 4
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
DR
K T
Chorégraphie aérienne Salle 5 du musée
création De Johann Le GuiLLerm 05.12.17 > 25.02.18
9 RUE SCRIBE NANTES 02 40 69 32 57 14 RUE BOILEAU NANTES 02 40 48 64 01
K T
S R
BUSINESS CLASSE
UNE SIGNATURE TEXTE / VINCENT BRAUD
PHOTO / DR
Depuis plusieurs générations, chez les Bordier, on fait son beurre. Une tradition d’abord et une affaire de famille qui a joliment prospéré. Si le beurre n’est pas né en Bretagne, on peut dire qu’il y a pris de belles couleurs. La réputation de la maison Bordier a aujourd’hui franchi les frontières de l’Hexagone, Jean-Yves Bordier assurerait presque qu’il n’y est pour rien. Pas de stratégie de développement, d’études de marché, de démarchage commercial, de campagnes de pub… Depuis toujours, c’est le bouche-à-oreille qui a fait la réputation de la maison. n Une fois oublié le rêve d’une vie de marin, c’est auprès de son père, lui-même fromager, que Jean-Yves Bordier apprend son métier. C’est d’abord une fromagerie à Lannion avant de PA G E 0 1 6
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
jeter son sac à Saint-Malo, en 1985, où la Maison du beurre est à vendre. Pas question de révolutionner l’institution : la vieille faïence est sauvegardée. Jean-Yves Bordier va juste lui apporter “son” beurre et “ses” fromages. n Le beurre peut en voir de toutes les couleurs : il est blanc pour accompagner un brochet ou des Saint-Jacques, ou bien roux, noisette et même noir… Mais le beurre est, bien souvent, l’ami du petit déjeuner, le compagnon indéfectible de la tartine. Le beurre, ici, est d’abord nature. On le malaxe à l’an-
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
BUSINESS CLASSE
cienne, une étape essentielle, on le tape, on le façonne… Doux, demi-sel ou salé, c’est du beurre de baratte bien sûr. Et si la baratte en bois des anciens a disparu, le procédé reste identique. n Puis le beurre a pris d’autres couleurs. Sont venus s’y ajouter des parfums d’ici (algues, sel fumé, sarrasin, ail et fines herbes…) et d’ailleurs (piment d’Espelette, poivre de Sichuan, yuzu, vanille de Madagascar…). Des parfums d’été aussi avec la framboise ou le fenouil. Pas ques-
LE BEURRE A PRIS D'AUTRES COULEURS
1985 JEAN-YVES BORDIER DÉCOUVRE LA VALEUR AJOUTÉE GUSTATIVE DU MALAXAGE DU BEURRE À L’AIR LIBRE EN REPRENANT LA MAISON DU BEURRE À SAINT-MALO. 1995 RENCONTRE AVEC FRANÇOISE CLANCHIN ET LA LAITERIE TRIBALLAT QUI LUI FOURNIT UNE MATIÈRE PREMIÈRE D’EXCELLENTE QUALITÉ. 1999 LE CHEF DU PLAZA ATHÉNÉE ERIC BRIFFARD REPÈRE LA QUALITÉ DU BEURRE BORDIER. IL EST LE PREMIER À FAIRE VENIR CE BEURRE À PARIS, D’ABORD POUR LE PLAZA, ENSUITE POUR LE GEORGE V. 2003 JEAN-YVES BORDIER, MEILLEUR FROMAGER AU GUIDE PUDLOSWSKI. 2011 OUVERTURE DU BISTRO AUTOUR DU BEURRE À SAINT-MALO, OÙ LES BEURRES DE JEAN-YVES BORDIER PEUVENT S‘EXPRIMER DANS LA CUISINE.
tion, pour autant de faire n’importe quoi. Pas de beurre à la truffe, par exemple, car « on n’a pas trouvé le bon équilibre ». n Pas de beurre non plus sans lait. Collecté par une laiterie familiale, il vient de Bretagne et de la Normandie voisine, produit dans des fermes bio ou en agriculture raisonnée. « C’est un gage de qualité. C’est aussi un choix d’accompagner et d’encourager les producteurs de la région… » La même exigence est portée aux fromages. n Jean-Yves Bordier se définit volontiers comme « choisisseur-finisseur » de fromages. Sept caves d’affinage permettent à chaque fromage de “vieillir” à son rythme pour atteindre sa plénitude. Retournement, croutage, morgeage, frottage sont autant de termes techniques des étapes d’affinage. Chaque variété bénéficie de soins spécifiques, en température et hygrométrie. Et les pâtes dures sont “oubliées” sur des planches d’épicéa du Jura et de nulle part ailleurs. n Si c’est à Saint-Malo que tout (ou presque) a commencé pour Jean-Yves Bordier, avec l’acquisition de la Maison du beurre, il a bientôt fallu pousser les murs. Ou plutôt en trouver d’autres. Trois adresses à Saint-Malo (plus le déjà fameux Bistro autour du beurre) mais aussi à Vitré, Douarnenez, Dol de Bretagne et dans les halles du marché de Rennes. Même SaintMaur-des-Fossés (94) sacrifie désormais “aux traditions fromagères”. n Mais ce dont Jean-Yves Bordier est peut-être le plus fier, ce n’est pas de voir ses produits sur les meilleures tables, en France et dans vingthuit pays au monde, ou d’avoir ouvert cinq boutiques (et le Bistro), c’est d’avoir au total créé 75 emplois. Et s’il peut être fier de ses produits, il rappelle que sa production ne représente que 0,01 % du beurre produit en France. De là, toutefois, à compter pour du beurre… n PA G E 0 1 7
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
K T
S R
C H E F, O U I C H E F
EN BELLE HARMONIE INTERVIEW + PHOTOS
CHRISTOPHE MARTIN POUR KOSTAR
C’est un chef hors norme, loin des conventions de la gastronomie française. Là où certains chefs singent la cuisine japonaise, Monsieur Kazumi Hatakenaka décompose les racines classiques de notre cuisine. Il livre en live et sans ambages une interprétation « fusion » déroutante de sobriété et d’épure. Le restaurant porte votre prénom, celuici a t-il une signification particulière? n Kazumi signifie “belle harmonie”, un prénom plutôt féminin. Mon nom, lui, vient de mes ancêtres et peut se traduire par “du milieu des champs”. PA G E 0 1 8
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
Comment êtes-vous arrivé à Angers ? n Originaire de Kyoto, j’ai toujours rêvé de découvrir la France. Je suis arrivé pour la première fois en 1981, à l’âge de 25 ans, pour un stage de cuisine à l’Hôtel de France, tout près d’ici. Je suis reparti au Japon avant
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
C H E F, O U I C H E F
de revenir à plusieurs reprises pendant des périodes d’inactivité, pour m’imprégner de l’esprit français. C’est ici que j’ai rencontré ma femme. Vous avez aussi fait un détour marquant par Lyon… n Quand je suis revenu définitivement en 1998. J’ai découvert la cuisine de Paul Bocuse, très reconnu au Japon, celle de Georges Blanc aussi en travaillant avec son second. Puis j’ai ouvert l’Auberge de Corcelles, dans le Beaujolais, avec une cuisine traditionnelle, poulet à la crème, coq au vin… Une cuisine qui a du goût mais très loin de celle que je pratique aujourd’hui. Dix ans plus tard, après le décès de ma femme, j’ai eu besoin de revenir à l’essentiel, retrouver des racines fortes, ici à Angers près de ma belle famille.
PA G E 0 1 9
K O S TA R
Pourquoi avoir choisi la cuisine teppanyaki ? n Le teppanyaki, c’est la plancha japonaise. On ne peut pas tricher avec cette technique, les découpes, les cuissons se font devant le client. J’avais aussi besoin de retrouver ce contact avec les clients, certains se prêtent facilement au jeu, échangent, me posent des questions. C’est un peu comme un cours de cuisine, une table d’hôtes. À 60 ans, je voulais pouvoir terminer ma carrière en travaillant seul, à mon rythme, être l’unique responsable de mon travail. Peut-on dire que vous avez une cuisine humble, franche et directe ? n Oui, j’essaie avec un minimum de travail de sortir le maximum de chaque produit, de les assembler justement et de concentrer les goûts. C’est ça l’esprit japonais… J’ai la chance de travailler de bons produits. Gérard Bossé (res-
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
K T
S R
C H E F, O U I C H E F
taurant Une île, NDLR), mon voisin avec qui j’ai eu l’occasion de travailler avant d’ouvrir, n’a pas hésité à me communiquer ses bonnes adresses. Concise, la carte affiche poisson ou viande en intitulé de plat. Où va votre préférence ? n Sous influence bouddhiste, les Japonais ont dû attendre l’ouverture à d’autres religions et cultures pour découvrir la viande, il y a seulement 150 ans. Le poisson reste majoritaire, même si aujourd’hui nous avons le bœuf de Kobe. Je ne peux pas encore le proposer à la carte à cause de son prix mais je cuisine du Black Angus…
ENTRÉE SAINT-JACQUES, CUISSES DE CAILLES CONFITES ET FOIE GRAS FUMÉ.
Vous affichez complet à chaque service, la réservation est incontournable, que peut-on vous souhaitez de mieux ? n Je dois encore pousser les choses, mon dernier rêve serait de travailler pour un client unique. Concentration maximum ! n
VINS TRINQU’ÂMES, CORALIE ET DAMIEN DELECHENEAU, TOURAINE-AMBOISE SAUVIGNON 2016.
KAZUMI, 3 RUE D'ANJOU, ANGERS. PA G E 0 2 0
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
PLAT FILET DE MERLU ET LÉGUMES DE SAISON. DESSERT TULIPE D’ORANGE (FLAN ET COULIS D’ORANGE, SUPRÊME ET SORBET).
LES GRILLONS, NICOLAS RENAUD, CÔTES-DU-RHÔNE 2016.
HOLLYWOOD VAMPIRES / DR
RÉDACTEURS DU CAHIER CULTURES VINCENT BRAUD, MATTHIEU CHAUVEAU, FEDELM CHEGUILLAUME, ANTONIN DRUART, PATRICK THIBAULT
Johnny, tu n’es pas un ange Les superstitieux vont adorer puisque le Hellfest attaque sa 13e édition. Bienvenue en enfer, en plein champ, comme chaque année pour ceux qui ont réservé tôt car c’est sold out. Si le public y va les yeux fermés pour le rituel, l’état d’esprit ou l’ambiance, il a déjà noté la présence cette année de Iron Maiden, Avenged Sevenfold, Judas Priest, Marilyn Manson… Mais, comble du chic, on y retrouvera l’acteur star d’Hollywood, Johnny Depp himself avec son groupe Hollywood Vampires qui réunit aussi Alice Cooper et Joe Perry. De l’enfer au paradis, il n’y aurait donc qu’un (faux) pas. n HELLFEST, CLISSON, 22 AU 24 JUIN. PA G E 0 2 2
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
SHANZHAI ARCHEOLOGY © SEBASTIEN MOITROT
ACTUS
Sens critique En invitant le collectif disnovation.org, Stereolux se retrouve (et nous aussi !) au cœur de la réflexion sur l’innovation. Les artistes présentent trois installations d’art contemporain originales. Un algorithme de prédiction et de subversion des tendances artistiques émergentes, un annuaire papier contenant des millions d’adresses Internet restreintes à travers le monde, une collection d’objets technologiques hybrides. La face cachée de nos technologies, source inépuisable de constats, regards critiques et clés de compréhension. n DISNOVATION.ORG, STEREOLUX, NANTES, 1ER AU 17 DÉCEMBRE.
Folle journée en exil
OLAFSSON VIKINGUR © DR
Intitulée Vers un monde nouveau, La Folle Journée 2018 est consacrée aux compositeurs exilés. Rachmaninov, Prokofiev, Stravinsky, Bartók, Schönberg, Granados, Chopin… Des exilés volontaires aussi comme Lulli, Haendel, Scarlatti ou Dvorák. Notez que la billetterie ouvre le 16 décembre et que la réservation se fait sur le net. Consultez le programme en ligne pour établir le vôtre. Préférez les projets originaux, les œuvres rares et les nouveaux artistes invités. n VERS UN MONDE NOUVEAU, NANTES, 31 JANVIER AU 4 FÉVRIER 2018. LAFOLLEJOURNEE.FR PA G E 0 2 3
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
S R
INTERVIEW
L'ALCHIMISTE INTERVIEW / PATRICK THIBAULT
PHOTO / JOANNE AZOUBEL
Toute une saison avec Johan Le Guillerm, c’est le défi du Grand T avec les acteurs du territoire métropolitain nantais. Entre spectacles et installations, rencontre avec l’artiste protéiforme. Une tentative d’approche d’un univers singulier pour voir les choses différemment, du moins au-delà du visible. Dans le spectacle Le pas grand chose, vous commencez par dire “Je cherche le chemin qui ne mène pas à Rome.” L’avez-vous trouvé ? n Je ne sais pas si je suis arrivé au bout du chemin mais j’espère continuer à éprouver le ou les chemins qui ne mènent pas à Rome. Tout mon travail tourne autour de la recherche des choses qui n’existent pas. J’ai beaucoup travaillé sur la piste et sur le fait d’avoir des points de vue différents, voire opposés.
« L’ESSENTIEL, C’EST TOUJOURS DE CRÉER DE LA PERTURBATION. » Que ça soit sur la piste ou dans les différentes expositions ou installations, vous tenez d’ailleurs à ce que le public ait plusieurs points de vue… n Dans Monstration, mes objets sont toujours appréhendables de tous côtés. On peut tourner autour et il y a toujours différents sens de lecture. J’y suis attaché car je ne cherche pas à montrer une chose exacte mais qui peut avoir de multiples entrées et lectures. Sous un chapiteau, la réunion de tous les publics permet d’avoir toutes les expressions. Celle d’un enfant, d’une personne plus âgée, d’une culture plus élaborée et une plus populaire. Les réactions des uns influencent le regard et la réflexion des autres. Peut-on dire que votre démarche, c’est d’abord d’ouvrir les yeux pour voir audelà ? n L’essentiel, c’est toujours de créer de la perturbation, apporter des repères nouveaux par rapport à ceux installés. C’est la fonction de l’art mais on confond souvent PA G E 0 2 5
K O S TA R
l’art et la décoration. Perturber permet de se poser des questions, de se remettre en question. Ça induit une forme de chaos mental car ces nouveaux repères déstabilisent l’ensemble des repères et de ses propres connaissances. Je pense que ce temps du réajustement crée l’émotion. Vous arrive-t-il d’avoir peur de pas grand chose ? n Sûrement mais je ne vois pas. Dans mes recherches, pas grand chose m’intéresse toujours mais ça n’est pas là que j’ai des peurs. J’ai certainement peur de plein de choses. Et souvent, une peur est faite de pas grand chose ou de rien. Faut-il être autodidacte pour voir plus loin ? n Pour voir autrement oui. Ça permet d’avoir son propre chemin et ne pas prendre les sillons existants qui vont comme une ornière vous emmener dans les sillons déjà exploités. Lorsque je me lance dans un nouveau sujet, je m’interdis d’aller voir à droite à gauche ce qui a déjà été fait. D’ailleurs, si c’est déjà exploité, ça ne m’intéresse plus.
Secret, est-ce que c’est le spectacle de votre vie ? n Dans le sens où il est toujours en mutation. Chaque fois que je le reprends, la moitié est nouvelle mais je garde un quart du précédent et un quart d’avant. J’ajoute de la matière à la matrice. Elle grandit en fonction de mes recherches, des expositions, des performances. Ce pas grand chose est une matière rhizomatique toujours plus grosse. C’est toute cette recherche et l’ensemble qui me prend la vie. Est-ce que c’est obsédant ? n Pas plus que la vie de chacun. C’est ma vie.
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
K T
S R
INTERVIEW
Continuerez-vous à reprendre Secret jusqu’au bout ? n Tant que j’arriverai à bouger. Pas du tout dans une idée de perfectionnement mais de mutation. Je ne fais pas un nouveau spectacle pour l’améliorer. Abandonner quelque chose, taire un numéro, c’est toujours une douleur. Le public de Secret est d’abord fasciné et émerveillé avant de se poser des questions. Est-ce que ça vous gêne cet “effet wouah” avant les questions ? n L’effet wouah n’est-il pas provoqué parce que le spectateur vient de voir quelque chose qu’il ne pensait pas possible ? Secret ouvre le champ des possibles de l’homme. Ça a toujours été le credo du cirque d’ouvrir les possibles des capacités des hommes, montrer des pratiques minoritaires traditionnelles.
« SECRET OUVRE LE CHAMP DES POSSIBLES DE L’HOMME. »
LES SERPANTANTS, JARDINS DU MUSÉE DOBRÉE, NANTES, JUSQU’EN JUIN 2018. LES IMAGINOGRAPHES, LES IMPERCEPTIBLES, L’OBSERVATOIRE, MUSÉE DOBRÉE, NANTES, JUSQU’AU 28 JANVIER. SECRET (TEMPS 2), PARC DES CHANTIERS, NANTES, 25 NOVEMBRE AU 19 DÉCEMBRE. L’APLANATARIUM, CHÂTEAU DES DUCS DE BRETAGNE, NANTES, 5 DÉCEMBRE AU 25 FÉVRIER. ARCHITEXTURE, LES BROGLIOS, L’INSUCUBE, JARDIN DES PLANTES, NANTES, PRINTEMPS-ÉTÉ 2018. LES DROLIQUES, JARDIN DES PLANTES, NANTES, ÉTÉ 2018. WWW.ATTRACTION2017-18.COM PA G E 0 2 6
K O S TA R
Vous venez du cirque mais vous touchez à l’invention, à la performance et aux arts plastiques. Où vous situez-vous ? n Je me définis comme praticien de l’espace des points de vue. Je ne me sens pas vraiment plasticien, plus vraiment circassien, pas vraiment non plus performeur. Tout ce qui regroupe mes activités, c’est bien la recherche autour du point et la diffusion du focus central. Pour moi, c’est essentiel. Les différents points de vue qu’on a sur un spectacle présenté sur piste, c’est bien plus riche que le regard frontal sur scène. Tout ça nourrit des savoir-faire qu’on finirait par oublier. Quel regard portez-vous sur le cirque aujourd’hui ? n On parle de cirque par rapport à une imagerie collective, tout ce qui se rapporte au clown, à l’acrobate, c’est-à-dire à l’apparence mais jamais au fond. En n’ayant jamais défendu la spécificité du cirque, le cirque, c’est aujourd’hui tout ce qui ne rentre pas ailleurs. Le fond n’est donc pas pointé comme une chose essentielle historiquement. Même au niveau social, l’endroit où on réunit les hommes sous différents points de vue, ça me paraît relativement important dans une société. Surtout aujourd’hui. Chacune de vos œuvres ou création doitelle être un défi technique ? n Non pas du tout. Ce qui m’intéresse, c’est de montrer l’idée, que la technique ne vienne jamais recouvrir l’idée et surtout pas la technologie. Je veux montrer les choses les plus simples SAISON 12 / NUMÉRO 58
mais c’est complexe car la simplicité est le mariage de choses qui doivent être compatibles en un même point. La nature sait faire ça, mais l’homme moins. Vous êtes sorti du cirque pour monter sur scène, pourriez-vous sortir de l’artistique pour entrer en science ? n Me confronter à l’institution scientifique, non, pas aujourd’hui. Je la trouve trop figée. C’est un meuble trop compliqué à bouger. D’ailleurs, je n’ai pas la prétention de le faire bouger. Je n’en ai ni les compétences intellectuelles ni les connaissances. Mais je trouve que l’installation a une lourdeur qui entrave la connaissance. Des tas de choses devraient avancer plus vite en science et en médecine. Mais vous devez avoir des influences, des rencontres avec des œuvres qui ont été déterminantes ? n Je ne pense pas avoir vraiment d’influence artistique. Je n’ai pas de mentor. D’ailleurs l’idée du mentor me dérange. On a aboli les dieux, alors… n Je lis peu. Jamais des romans. Mais j’ai toujours dit que lorsque je serai vieux, je lirai. Et ça commence à venir. Vous avez un univers très personnel que vous avez créé, comment se fait-il qu’il rencontre le public ? n Parce qu’il y a des programmateurs qui s’y intéressent. Et parce que je suis très bien entouré par des gens qui ont eu l’intelligence et la ténacité de faire en sorte que mon travail aille jusqu’au public. Des artistes intéressants, il y en a plein mais s’ils ne sont pas accompagnés, ils peuvent crever dans leur coin. Il y en a tellement qui restent dans l’ombre. Au cours de cette année sur le territoire nantais qui vous fait passer par le Musée Dobrée, le Château des Ducs, le Jardin des Plantes, le parc des Chantiers, des salles, vous nourrissez-vous du territoire ? n Forcément puisque je vais vivre ici. Nantes a fait et va faire partie de ma vie et de mon chemin. Je me nourris de la ville. Il n’y a pas que dans mon observatoire que j’élabore les choses. À la fin de cette année nantaise d’Attraction, est-ce qu’on saura qui est vraiment Johann Le Guillerm ? n J’espère pas car j’aurai déjà changé. Forcément changé mais peut-être de manière imperceptible comme mes Imperceptibles exposés à Dobrée. Et le monde aussi aura changé. n
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
MESH
proposé par
www.festival-trajectoires.com
CCNN le lieu unique Théâtre ONYX TU-Nantes Le Grand T Stereolux Musique et Danse en Loire-Atlantique
S R
SCÈNE
LES OS NOIRS - CIE NON NOVA © PHIA MÉNARD
Black is beautiful Phia Ménard est une femme en lutte. Et Les os noirs en sont un nouveau témoignage. Tout commence par un souffle et un léger clapotis. Le vent gonfle bientôt les vagues, noires, qui se jouent bientôt de la femme dont il ne reste que les vêtements à la surface. L’image est forte, comme celles qui suivent, car le combat n’est jamais terminé. Si cette nouvelle création parle de la disparition, du suicide… c’est davantage l’énergie qu’on en retient. Chloé Sanchez, comédienne qui danse, est cette femme en lutte. Et elle est magnifique. n LES OS NOIRS LE MANÈGE, LA ROCHE-SUR-YON, 12 ET 13 DÉCEMBRE. LE GRAND T, NANTES, 26 ET 27 JANVIER. LE THÉÂTRE, SAINT-NAZAIRE, 13 MARS. LE CARGO, SEGRÉ, 16 MARS. LE QUAI, ANGERS, 19 AU 21 AVRIL.
PHOTO 5 HD FABIENNE RAPPENEAU©
K T
Playtime Avec Bigre, le metteur en scène Pierre Guillois renoue avec un humour décapant et subtile, proche du burlesque de Jacques Tati. Récompensé par un Molière en 2017, ce spectacle ne tranche jamais entre clown, théâtre et pantomime. Il présente les aventures catastrophiques de trois voisins grandiloquents, hébergés dans des chambres de bonne à l'allure de débarras colorés. Dans cette vie urbaine étriquée, souvent insensée, une mélancolie drolatique pointe son nez et participe à créer un univers beckettien, traversé d'un fatalisme étrangement réconfortant ! n BIGRE CENTRE DE CONGRÈS LES ATLANTES, LES SABLES D’OLONNE, 22 DÉCEMBRE. TNB, RENNES, 10 AU 20 JANVIER. CENTRE CULTUREL JACQUES DUHAMEL, VITRÉ, 24 JANVIER. LE GRAND T, NANTES, 30 JANVIER AU 3 FÉVRIER. L’AIRE LIBRE, ST JACQUES-DE-LA-LANDE, 7 ET 8 FÉVRIER. LE THÉÂTRE, LAVAL, 17 FÉVRIER. LE CARRÉ MAGIQUE, LANNION, 25 MAI. LE QUARTZ, BREST, 29 MAI. PA G E 0 2 8
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
SCÈNE
Secret de famille en live
© JAMES KERWIN
Après s'être attaqué au (nouveau) monde du travail dans Nobody, Cyril Teste et le (vaste) collectif MXM s'interrogent sur la mémoire. Avec Festen, une fête de famille qui tourne au drame sous le coup d'une révélation choc. Le chef d'œuvre cinématographique du Dogme95 – mouvement qui impose à ses membres des conditions de tournage ultra-réalistes – repasse ici par une série de contraintes qui sont autant d'outils pour parvenir à faire de cette performance filmique un live éblouissant où le spectateur voit naître la fable visuelle en direct. Dispositif impressionnant et sensible, le sujet n'en est pas moins bouleversant d'intimité et de violence ! n FESTEN LE QUAI, ANGERS, 10 AU 12 JANVIER. TNB, RENNES, 20 AU 24 FÉVRIER. THÉÂTRE DE CORNOUAILLE, QUIMPER, 3 ET 4 AVRIL.
Mythologie rebelle
© ARNAUD BERTEREAU-AGENCE MONA
Spécialiste des grandes fresques théâtrales explosives (Lucrèce Borgia en 2014), le jeune metteur en scène David Bobée s'empare de la pièce iconique d'Ibsen. Il en fait une épopée contemporaine déconstruite au cœur de laquelle trône un drôle de personnage tragique. Peer Gynt, à l'autorité qu'il réfute, oppose une volonté émancipatrice égoïste qui se traduit par un tour du monde. Sur scène, les changements se font à vue et les structures composent un organisme vivant qui emporte le spectateur ! n PEER GYNT DAVID BOBÉE, LE GRAND T, NANTES, 10 AU 18 JANVIER. LA PASSERELLE, SAINT-BRIEUC, 20 ET 21 MARS. SCÈNES DU GOLF, VANNES, 19 AVRIL. PA G E 0 2 9
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
S R
SCÈNE
Humains, dites-vous C’est le grand retour de Nathalie Béasse. La poésie du titre, on la retrouve dès le début du spectacle avec la chorégraphie d’une bâche qui occupe la totalité du plateau sur la Symphonie n°3 de Mahler associée à Mort à Venise. Un prologue, une plage qui simule le monde tel qu’il est, séduisant mais tourmenté. Les éléments, terre, eau, arbre, tissu… s’invitent ensuite pour un jeu avec les comédiens qui ne ménagent pas leur énergie. On est tour à tour surpris, amusé, agacé, ému… On ressort chamboulé par cette variation sur la nature, humaine ou pas, et le monde tel qu’il va ou pas. n LE BRUIT DES ARBRES QUI TOMBENT LE THÉÂTRE, SAINT-NAZAIRE, 16 ET 17 JANVIER. LA PAILLETTE, RENNES, 24 ET 25 JANVIER. LE CANAL, REDON, 1ER FÉVRIER. LE QUAI, ANGERS, 15 ET 16 FÉVRIER. THÉÂTRE, LORIENT, 21 ET 22 FÉVRIER.
© J.BLIN
K T
et aussi SCÈNE ORFEO LE QUARTZ, BREST, 5 ET 6 DÉCEMBRE. LE GRAND T, NANTES, 15 AU 17 DÉCEMBRE. L’AVARE LUDOVIC LAGARCE, LE QUAI, ANGERS, 13 AU 15 DÉCEMBRE. YAMA SCOTTISH DANCE THEATRE / DAMIEN JALET, TNB, RENNES, 13 AU 15 DÉCEMBRE. P.P.P. LES TROIS DERNIÈRES REPRÉSENTATIONS, LE LIEU UNIQUE, NANTES, 19 AU 21 DÉCEMBRE. D’APRÈS UNE HISTOIRE VRAIE CHRISTIAN RIZZO, TNB, RENNES, 9 AU 13 JANVIER. ESPÆCE LE MANÈGE, LA ROCHE-SUR-YON, 10 ET 11 JANVIER. FUCK AMERICA ONYX, SAINT-HERBLAIN, 15 AU 18 JANVIER. THV, SAINT-BARTHÉLÉMY D’ANJOU, 9 FÉVRIER. QUARTIER LIBRE, ANCENIS, 27 MARS. PROJET LOUP DES STEPPES LIEU UNIQUE, NANTES, 16 ET 17 JANVIER. ÇA IRA (1) FIN DE LOUIS LE QUARTZ, BREST, 11 ET 12 JANVIER. THÉÂTRE, LORIENT, 19 ET 21 JANVIER. À VIF, KERY JAMES/JEAN-PIERRE BARO THÉÂTRE ET HIP-HOP, TNB, RENNES, 22 AU 27 JANVIER. SCÈNES DU GOLF, VANNES, 20 FÉVRIER. LE QUAI, ANGERS, 21 ET 23 FÉVRIER.
PA G E 0 3 0
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
2017 / 2018
CIE LOBA Waynak CTACLES E P S A B C N n ascensio le ib t is s Ui La ré d’Arturo NOVA CIE NON irs Les Os No ROCK CIE OSTEO tiag n Sœurs Sa RT CIE S’POA r Crossove
Les Os Noirs - Cie Non Nova © Jean-Luc Beaujault
IE
IE
cles 9 specta alles dans 19 s es partenair en Pays e de la Loir
Toute l’info sur WWW.CULTURE.PAYSDELALOIRE.FR
C D.A.D.R. Sacre RT LE SONA / Fantaisie Sopranic dscapes n a L l a n Emotio S DU RICTU THÉÂTRE rica Fuck Ame
S R
SCÈNE
LE SYNDROME IAN, CHRISTIAN RIZZO © MARC COUDRAIS
K T
BATTEMENTS DE CORPS TEXTE / VINCENT BRAUD
Qui a dit que la culture était mal en point ? Voilà un nouveau festival qui se propose d’embrasser (et d’embraser) Nantes et l’agglomération. Une trentaine de propositions, en treize lieux… Un festival qui invite à se bouger et à découvrir (aussi) de nouvelles esthétiques. Trajectoires, c’est un peu un état des lieux de la danse en ce début d’année 2018. Avec, du 20 au 28 janvier, des spectacles mais aussi des performances, des retrouvailles, des découvertes… Avec des créations et des pièces de répertoire : Ashley Chen qui rêve d’un monde à l’unisson où la danse de l’un rejoindrait celle de l’autre, où l’harmonie naîtrait du métissage, Ambra Senatore qui entraîne le public à la découverte de l’exposition Nicolas Régnier au Musée d’Arts de Nantes, ou le duo Audrey Bodiguel/Julien Audujar pour un rêve délirant, la tête dans les étoiles. n La danse, comme la musique, est plurielle. DeLaVallet Bidiefono a eu un peu de mal à faire accepter son travail dans son Congo natal. La danse se confronte aussi aux questions d’aujourd’hui ou se frotte à d’autres expressions artistiques. Comme le fait Yui Kawaguchi explorant, au-delà des PA G E 0 3 2
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
langues, les connexions possibles entre les humains. Comme le fait aussi Phia Ménard dont Les os noirs est (au fond) une lutte et un refus de la disparition. n On brûle de découvrir le travail de Christian et François Ben Aïm, celui de Roberto Castello qui a inspiré Ambra Senatore, l’étrange confrontation complice entre Yui Kawaguchi et Yoshimasa Ishibashi, le ballet des clubbers de Christian Rizzo, la performance immobile (ou presque) de Yann Marussich. n Un parcours dans la ville, une nocturne au Musée, une fête au Château… et des trajectoires à inventer. Un programme concocté par Ambra Senatore, l’équipe du CCNN, mais aussi le lieu unique, Onyx, le Grand T, le TU, Stereolux pour une semaine de battements de corps. n TRAJECTOIRES FESTIVAL DE DANSE, 20 AU 28 JANVIER.
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
CROWD GISÈLE VIENNE MAR 06 02 – VEN 09 02 2018
Théâtre National de Bretagne Direction Arthur Nauzyciel T-N-B.fr
S R
TÊTES DE SÉRIE / MUSIQUE
TEXTES / ANTONIN DRUART
Cette année, on ne vous refait pas le couplet sur la richesse et l’importance des Trans qui, année après année, défrichent l’inconnu. On y va les yeux fermés et les oreilles grandes ouvertes. Nous avons choisi de vous présenter notre sélection de talents de la zone Kostar, pour la plupart made in Rennes et programmés au festival. 39 E TRANS MUSICALES RENNES, 6 AU 10 DÉCEMBRE.
© M ELC HIO R T ERS EN
© P ATR ICE POC H
K T
ABUSE-GUEULE Que ce soit dans les couloirs du métro ou dans les coulisses hollywoodiennes, on parle beaucoup d'abus aujourd'hui, mais pas assez d'Abuse. Abuse, c'est du punk qui porte bien son nom, rien à voir avec ces niais de Green Day. Abuse, c'est un super-groupe composite fait de personnalités brutes officiant dans la scène rock rennaise. Abuse, c'est un son étiqueté pour les pubs anglo-saxons qui résonne dans les bistros bretons. Abuse, c'est produit par Poch Records et Primator Crew et c'est plutôt un bon signe (obscène de préférence). Abuse clôture la journée d'étude autour de la thématique : « Punk Is Not Dead ». n ABUSE 9 DÉCEMBRE, MAISON INTERNATIONALE. ABUSEABUSEABUSE.BANDCAMP.COM PA G E 0 3 4
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
LA COUR DECOLLE Les enfants terribles du fond de la classe, idoles des prépubères libérés, étaient déjà programmés l'année dernière, date annulée pour d'obscures raisons mais corrigée pour cette session. Un collectif de grands gamins unis comme “les huits doigts de la main”, qualifié par l'émission Tracks de troisième degré du rap français alors que, pour nous, il évoque surtout son avenir. Le collectif sert du salace à toutes les sauces (cf Lorenzo) comme du sublime dans toutes ses rimes. Il narre une vie post-adolescente faite d'ennui comme de coups de folie, le tout toujours fort bien produit. n COLUMBINE 7 DÉCEMBRE, PARC EXPO-HALL 8. SOUNDCLOUD.COM/COLUMBINEOFFICIAL DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
© J B M ILL OT
TÊTES DE SÉRIE / MUSIQUE
© G UIL LAU ME LEH AGR E
FEMME A BARDE Certains la comparent à Bjork. Mais est-ce vraiment faire honneur à cette jeune artiste tant l'elfe des fjords, jadis génie incontestable, déçoit depuis facilement 10 ans ? Certes son dernier (excellent) album, Poisons&antidotes est produit à Reykjavik, sa voix est atypique et son instrument inédit dans le paysage sonore, et alors ? Quid de ce timbre en provenance des peuplades celtes, ce flow parfois folk, parfois hip-hopéthique (le morceau Inks), cet éclectisme tout sauf ecclésiastique et ce talent pour la bidouille qui brouille les pistes ? Diantre, il semblerait que la Rennaise assume la filiation en reprenant un morçeau de l'Islandaise. Qu'importe, nous on la préfère elle. n
Jacobins de minuit Sensation solaire dans la stratosphère renno-malouine, à peine ponctuée par de vaporeux nuages nostalgiques : The Midnight Revolution est en marche, comme dirait l'autre. Minuit pile, il est grand temps de considérer que l'heure de la révolution a enfin sonné. Mais attention, une révolution qui se regarde dans le rétroviseur, pleine de fleurs, non pas au fusil mais dans les cheveux, et d'avant-hier qui chantent et qui (ré) enchantent. Révolte laconique qui mêle mélancolie suivie et temporalité augmentée. Nouvelle formation pour ce jadis duo qui devient un entêtant quintet. n
LAURA PERRUDIN 6, 7 ET 10 DÉCEMBRE, L'AIRE LIBRE. LAURAPERRUDINMAUSIC.COM
THE MIDNIGHT REVOLUTION 8 DÉCEMBRE, L'ÉTAGE. FACEBOOK.COM/THEMIDNIGHTREVOLUTION.MUSIC
PA G E 0 3 5
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
TÊTES DE SÉRIE / MUSIQUE
© D AMI EN JOU RNÉ E
S R
Point Orgue
© L ISE DUA
K T
Obscur objet du délire L'intitulé sonne sombre mais leur son ne l'est pas. Bienvenue dans l'univers pop et éblouissant des Rennais Le Groupe Obscur. Les intentions du groupuscule sont limpides : onirisme compulsif à tous les étages, la nostalgie pétarade, anti-manichéenne magie noire et blanche. Toujours pas éclairés ? Sachez que leur musique l'est, elle, éclairée. Scintillante même. Sachez aussi qu'ils aiment jouer avec la nourriture, citer des James Bond girls, inventer un dialecte et les costumes qui vont avec. Ils habitent une île à nulle autre pareille mais ont été découpés dans des vraies tranches de réel. Vous voilà initiés. n LE GROUPE OBSCUR 9 DÉCEMBRE, L'ÉTAGE. LEGROUPEOBSCUR.BANDCAMP.COM
PA G E 0 3 6
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
Erratum : le rock progressif anglo-saxon des années 70 serait né à Paimpol en 2011, sous la houlette de la formation Smooth Motion. Hommage à l'album de Supertramp Slow Motion, qui, bien que sorti en 2002, renouait alors avec leurs productions de la décennie suscitée ? Possible, pour ce groupe de potes qui lorgne aussi du côté de Led Zeppelin et Deep Purple tout en abordant des thématiques actuelles dans les textes. Smooth Motion se traduit mot à mot par mouvement mou par chez nous, mais rassurez-vous, c'est une fausse piste. n SMOOTH MOTION 8 DÉCEMBRE, L'ETAGE. SOUNDCLOUD.COM/SMOOTH-MOTION
Stan Douglas
Luanda
Kinshasa
ENTRÉE GRATUITE
INSTALLATION DE STAN DOUGLAS DU 10/10/17 AU 07/01/2018
MUSIQUE
Le roi nu Dans ses tenues (costumes à paillettes bienvenus) comme dans sa musique (la reprise folle d’un concert mythique de Judy Garland), Rufus Wainwright n’est pas réputé pour donner dans la sobriété. Avec ses deux premiers albums comme avec le génial All days are nights : songs for Lulu (2010), le chanteur à la voix d’or nous a pourtant prouvé qu’un peu de retenue rendait ses compositions sans âge encore plus déchirantes. Autant dire que la tournée solo du Gay Messiah s’annonce comme immanquable. n RUFUS WAINWRIGHT TNB, RENNES, 11 DÉCEMBRE. VANNES, 12 DÉCEMBRE.
Folle soirée Pour sa 5e édition, l’événement au nom le plus potache de la Cité des Ducs privilégie les itinéraires bis du folk aux autoroutes Dylan/Cohen/ Young. Quoique… En reprenant The Byrds, Mehdi Zannad et Sean O’Hagan joueront forcément, par ricochet, quelques classiques du Nobel de littérature 2016. Moon Gogo, lui, se penchera sur le répertoire folk-punk de Violent Femmes, aussi inclassable que celui de ce duo rassemblant la voix aride d’un French Cowboy et les arpèges hypnotiques d’une virtuose du geomungo, sorte de sitar coréenne. n LA FOLK JOURNÉE LE LIEU UNIQUE, NANTES, 15 DÉCEMBRE. © MOON GOGO
S R
© MATTHEW WELCH
K T
PA G E 0 3 8
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
le lieu unique
Scène nationale de Nantes
du 20 septembre 17 au 07 janvier 18 www.lelieuunique.com
Réalité virtuelle exposition
La Bibliothèque, la nuit
ORFEO
JE SUIS MORT EN ARCADIE
D’APRÈS L’ORFEO DE CLAUDIO MONTEVERDI ET ALESSANDRO STRIGGIO MISE EN SCÈNE SAMUEL ACHACHE ET JEANNE CANDEL ARRANGEMENTS MUSICAUX COLLECTIFS SOUS LA DIRECTION DE FLORENT HUBERT
02 51 88 25 25 / leGrandT.fr
visuel : DR
15 > 17 DÉC – LE GRAND T
© JEAN-LOUIS FERNANDEZ - LICENCES SPECTACLES 1-1075853 1-1075850 2-1075851 3-1075852
Immersion vidéo 360° dans dix bibliothèques mythiques
K T
S R
MUSIQUE
DÉCONTRACTÉ DU BLIER INTERVIEW / MATTHIEU CHAUVEAU
PHOTO CHRISTOPHE CRÉNEL
Leur nouvel album (décliné en spectacle) est conseillé même par les chroniqueurs ciné du Masque et la plume. Avec Cabadzi x Blier, le duo nantais emballe autant les fans de ses chansons électro-hip-hop-slam que ceux du réalisateur des Valseuses. Comment s’est faite la rencontre avec Blier ? n En 2015, par le biais d’amis, on lui a fait passer une première maquette qu’il a trouvée super bien. Nous sommes allés chez lui et il nous a autorisés à nous servir dans ses textes. Une première pour lui ! On s’est tout de suite trouvé des atomes crochus. Lesquels ? n Un goût pour la liberté, pour décrire l’humanité selon certains biais. Les films de Blier sont des fenêtres assez originales qui ouvrent des débats. Son travail sur la féminité et sur le genre, par exemple, avec des films comme Tenue de soirée ou Mon homme, on le trouve super moderne et très d’actualité. Quel a été le déclic pour vous dire que Blier mis en musique, ça fonctionnerait ? n Déjà, il a une écriture super rythmique, un peu en mode punchline. On m’a dit plusieurs fois que j’avais une écriture assez proche de la PA G E 0 4 0
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
sienne, assez répétitive, avec des phrases courtes. Ce projet est venu d’un essai, pour un morceau. Ce n’était pas calculé. Puis on en a fait un second, un troisième… et c’est devenu un disque et un spectacle. Comment retranscrit-on des dialogues de film en chanson ? n On les a dactylographiés pour en faire une sorte de dictionnaire dans lequel on allait piocher. Il y a eu beaucoup de réécriture. On ne pouvait pas prendre des bouts de dialogue et les inclure directement dans les morceaux. On prenait ce qui nous intéressait et on l’adaptait au carcan de la chanson. C’est un boulot super agréable, assez ludique. C’est à la fois du sample, de l’arrangement littéraire et de l’adaptation. n CABADZI X BLIER STEREOLUX, NANTES, 2 DÉCEMBRE. FUZZ'YON, LA ROCHE-SUR-YON, 8 DÉCEMBRE. JARDIN DE VERRE, CHOLET, 9 DÉCEMBRE. VIP, SAINT-NAZAIRE, 27 JANVIER.
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
ENCART KOSTAR EXPO AUTOMNE.indd 1
23/10/2017 16:00:1
The way Things faLL XXXI ATeLIeRs InTeRnATIonAuX du FRAC e
dAnILo dueñAs HeRLyng FeRLA VeRónICA LeHneR RosARIo López dAVId VéLez commissariat : ALejAndRo MARTín MALdonAdo dans le cadre de l’année France-Colombie 2017
jusqu’au 28 janvier 2018 au Frac, Carquefou
www.fracdespaysdelaloire.com
Visuel : Rosario Lopez, La terre compte, 2017. Cliché Fanny Trichet
Tenir L’écarT
RApHAëL ILIAs, juLIen LAFoRge jusqu’au 14 janvier 2018 au Frac, Carquefou
S R
MUSIQUE
VITALIC © C. LE MINDU - D. HUGONO PETIT
© HANATSU MIROIR
K T
Musée des belles musiques “Visiter la musique comme on visite un musée.” Derrière cette formule brillante, digne d’un slogan de Jack Lang, se cache un festival qui allie musique contemporaine et arts visuels en organisant des concerts dans des lieux d’exposition rennais, du Musée des beaux-arts au FRAC en passant par la Criée ou la galerie Oniris. Pour sa 4e édition, Autres mesures rappelle que la création contemporaine se nourrit aussi du passé (un trio de vielles à roue, un hommage à Schubert…) et d’ailleurs (la rencontre de l'ensemble Hanatsu miroir et du batteur Will Guthrie). n FESTIVAL AUTRES MESURES RENNES,18 AU 21 JANVIER.
et aussi
Maelström vital Le temps d'une nuit, le label electro experimental Raar créé par le Nantais Maelstrom et l’Américaine Louisahhh, attendus sur scène, invitent la tête chercheuse Paula Temple, réputée pour sa techno dark et indus. n RAAR LABEL NIGHT WAREHOUSE, NANTES, 29 DÉCEMBRE
Le festival parrainé par Yelle mise cette année sur de jeunes pousses électro-pop qui osent le romantisme avec notamment les excellents Lewis OfMan et Voyov. n CAPSULE FESTIVAL LAMBALLE, 22 DÉCEMBRE
Avec Voyager, son dernier album, Vitalic enfonce le clou d’une french touch nouvelle génération hyper-disco, forcément attendue de pied ferme en live. n VITALIC LA CARENNE, BREST, 12 JANVIER / LE LIBERTÉ, RENNES, 13 JANVIER.
MUSIQUE NOBORDER #7, FESTIVAL DES MUSIQUES POPULAIRES DU MONDE LE QUARTZ, BREST, 6 AU 10 DÉCEMBRE. RELEASE PARTY : AFTER THE BEES + MATHIAS DELPLANQUE STEREOLUX, 7 DÉCEMBRE. LOÏC NOTTET STEREOLUX, 13 DÉCEMBRE. FISHBACH LA BARAKASON, REZÉ, 14 DÉCEMBRE. LO’JO, FONETIQ FLOWERS LE CHABADA, ANGERS, 16 DÉCEMBRE. JARDIN DE VERRE, CHOLET, 20 JANVIER. VIP, SAINT-NAZAIRE, 17 FÉVRIER LES ROCKEURS ONT DU CŒUR STEREOLUX, 16 DÉCEMBRE. ALT-J ZÉNITH, NANTES, 14 JANVIER. TALISCO + INUÏT NOUVELLE VAGUE, SAINT-MALO, 19 JANVIER. CARTE BLANCHE À ERWAN KERAVEC TNB, RENNES, 23 JANVIER. MELISSMELL SALLE PAUL FORT / LA BOUCHE D’AIR, NANTES, 23 JANVIER. YOUN SUN NAH LA PASSERELLE, SAINT-BRIEUC, 23 JANVIER. BRIGITTE LE CHABADA, ANGERS, 27 JANVIER. PA G E 0 4 2
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
25 NOV > 19 DÉC PARC DES CHANTIERS
SECRET (TEMPS 2)
ABONNEZ-VOUS
JOHANN LE GUILLERM
et recevez le magazine chez vous dès sa sortie
5 NUMÉROS POUR 30 €
PHOTOGRAPHIE © PHILIPPE CIBILLE
VOTRE ABONNEMENT COMMENCERA DÈS LE PROCHAIN NUMÉRO
Envoyez un chèque à l'ordre de Médias Côte Ouest, accompagné de vos Nom + Prénom (et/ou société) + Adresse complète à MCO médias, 2 ter rue des Olivettes, CS33221, 44032 NANTES CEDEX 1
Anciens numéros en vente à la rédaction Conformément à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'Informatique, aux Fichiers et aux Libertés, vous disposez d'un droit d'accès et de rectification des données à caractère personnel vous concernant.
INTERVIEW
AGNÈS & OSCAR INTERVIEW / PATRICK THIBAULT
PHOTO / DR
Pour sa 30e édition, le festival Premiers Plans présente une rétrospective Agnès Varda. Cinq ans plus tard, retour chez elle, rue Daguerre, au lendemain de la remise de l’Oscar d’honneur à la cinéaste pour l’ensemble de sa carrière. Finalement, en faisant une carrière en marge, vous avez fini par être au tout premier plan… n De la marge ! Je suis devenue une princesse de la marge. Mais c’est comme telle que j’ai été reconnue à Los Angeles. La soirée était présentée par Steven Spielberg, il y avait dans la salle tout ce qui représente le succès et l’argent d’Hollywood. C’est un petit comité, comme un bastion cinéphilique, à l’intérieur de la société des Oscars, qui m’a tirée avec une pince à épiler. C’est une reconnaissance de mon travail de cinéma. J’ai bien dit que je n’étais pas bankable. Cet oscar n’implique pas qu’on ait eu du succès.
« JE SUIS DEVENUE UNE PRINCESSE DE LA MARGE. » Mais vous avez eu du succès… n Un grand succès dans la marge. J’ai la chance que les cinéphiles, les étudiants, les enseignants de cinéma, les critiques soient des défenseurs de mon cinéma. Et qu’ils le maintiennent vivant. À partir de Les Glaneurs et la glaneuse, j’ai été très comprise par les jeunes qui sont, plus que les autres, concernés par le gâchis, le recyclage et la planète. Ils ont été curieux de ce que j’avais fait d’autre. Une nouvelle génération a découvert mes films. Ils ont été sensibles à votre intérêt pour les gens modestes… n Les gens à la rue, c’est quelque chose qui nous occupe tous. Ce qu’ils veulent, c’est manger, dorPA G E 0 4 5
K O S TA R
mir et avoir chaud. Je ne parle même pas des migrants. On est dans un monde de grands malheurs et nous, artistes, sommes privilégiés. On veut témoigner du fait qu’on est dans ce monde mais faut-il ajouter une couche de plus au malheur des autres ? C’est ce que nous avons évité avec JR. Avec le film Visages villages… n On s’est dit qu’il fallait proposer ce qui fait du bien partout au monde, c’est-à-dire l’empathie, le partage, les moments privilégiés où les gens s’expriment, prennent la parole. Nous, on essaie d’obtenir d’eux quelque chose qui les rend uniques. Et ils sont uniques. Regardez la scène chez les dockers du Havre. La féministe en moi a demandé “où sont vos femmes ?” On s’est rendu compte qu’on a obtenu des hommes qu’ils nous aident à mettre leurs femmes en valeur. Car elles ne le seront que si les hommes sont d’accord. Ne pensez-vous pas que les femmes sont enfin en train de prendre le pouvoir ? n Ça n’est pas du pouvoir. Elles sont mises en lumière et en valeur. Les dockers ont dit “ça fait bouger les clichés, les préjugés”. Que les hommes, les dockers disent eux-mêmes que ça faisait bouger les choses, c’est pour moi une réussite. L’art est un partage d’idées, on réinvente la vie. Par cette réinvention, cette mise en place d’une sorte de jeu que tout le monde prend au sérieux, on pousse un peu les idées. Et nous sommes restés liés avec ceux qu’on a rencontrés.
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
K T
S R
INTERVIEW
Que représente Premiers Plans pour vous ? n J’y suis allée souvent. J’aime le fait qu’il y a énormément de jeunes, de propositions faites aux jeunes. J’adore le festival. J’ai même été présidente du jury. J’ai admiré le travail de Jeanne Moreau, sa présence et son implication, son dévouement autour des ateliers. Elle va manquer. Avec Claude-Éric Poiroux dont j’apprécie le travail depuis longtemps, nous allons lui rendre un hommage. J’ai recherché des photos que j’ai faites d’elle, dont certaines remontent à 1949-50, au festival d’Avignon. Qu’est-ce qui vous importe le plus aujourd’hui ? n Ne pas décevoir ceux qui me soutiennent et qui m’aident. Je ne vois pas comment je pourrais changer de point de vue sur ce que le cinéma peut faire. Depuis 2000, j’ai abandonné la fiction. Je la maintiens dans mes installations, un travail d’artiste parallèle au cinéma. Et je tourne des documentaires.
« MOI, JE SUIS BIEN DANS LA COUR DES PETITS. » Envisagez-vous toujours un nouveau projet comme un premier film ? n Maintenant, je dirais plutôt comme le dernier (rire). Je ne pensais plus faire de long métrage pour les salles après Les plages d’Agnès. Ces hommages et ces prix, est-ce que ça ne finirait pas par vous tourner la tête ? n Pas du tout. J’ai accumulé les prix à partir de 80 ans… il fallait déjà tenir jusque là. Ce sont des prix de reconnaissance de mon travail, pas des prix de succès. Aucun de mes films n’a cassé les vitres. Les plages d’Agnès et Visages villages, ça marche mais on fera peu d’argent. C’est incomparable avec les films qui marchent. C’est comme si on ne jouait pas dans la cour des grands. Et moi, je suis bien dans la cour des petits. Alors oui, les prix me font plaisir mais ma tête est heureuse dans des projets de création. Et des projets de création, vous en avez toujours… n La création, ça me nourrit et j’ai des idées. J’ai la chance d’avoir la tête claire même si ma santé n’est pas très bonne. J’ai choisi de privilégier les rencontres et le travail, le plaisir du partage du cinéma. Je fais encore un film. On va filmer ce qu’on me demande de faire partout, des dites master class. Je vais raconter ce que j’ai essayé de faire dans mes films. Avec un co-réalisateur, Didier Rouget. PA G E 0 4 6
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
De quoi êtes-vous la plus fière ? n Peutêtre de ne pas avoir trahi certaines notions. Comme préférer les gens qui n’ont pas de pouvoir à ceux qui en ont. Ne pas fréquenter les riches et les nantis, ne pas faire de publicité. Avoir la chance d’être aimée par mes enfants, petits enfants et mon entourage professionnel. Ils m’aident à travailler et à vivre. Je ne tiendrais pas sans eux. Ce mythe de l’artiste malheureux, seul et tourmenté ne s’applique pas à moi : je me sens artiste soutenue. Si vous aviez un conseil à donner aux jeunes cinéastes, est-ce que ça serait de rester soi-même ? n Je ne crois pas. C’est bien d’être curieux des autres. On apprend, on se construit par les autres. Je dirais plutôt qu’il faut rester ouvert, être à l’écoute. Avoir de l’humour, être capable de se moquer de ce qu’on apprend. On se découvre peu à peu par tout ça, par les rejets aussi. Chacun a sa personnalité mais vous voyez, dans Les plages d’Agnès qui est un autoportrait, j’ai surtout parlé des autres. Vous qui n’êtes pas dans la nostalgie, qui avait connu l’argentique, le 35 mm et le numérique, comment voyez-vous l’évolution du monde ? n J’ai le sens du recyclage, ça ne peut pas être de la nostalgie. Nous avons quitté le 35 mm. Avec toutes ces copies devenues inutiles, j’ai construit des cabanes avec la pellicule. Je vais bientôt en exposer une faite avec les pellicules de mon film Le Bonheur. On y voyait des tournesols et des fleurs. Ça sera une serre faite avec une ou deux copies du film. On y verra pousser des tournesols. La mélancolie existe. Le dimanche, quand je suis seule, je suis mélancolique et j’en profite. Comme je perds la mémoire doucement, ça ne fait que confirmer que c’est ce qu’on fait maintenant qui nous fait vivre. Votre compte Instagram, vous avez l’air de prendre ça très au sérieux… n Pas vraiment. C’est JR qui m’a mise là dedans alors j’ai dit “oui d’accord”. Mais je ne poste pas plus qu’une fois par semaine. Tenez, vous avez vu ce que j’ai mis hier pour la journée internationale d’élimination des violences faites aux femmes ? Parce qu’on s’est battues contre cela depuis toujours. On s’en occupait activement. Tiens… déjà 51.400 abonnés sur mon compte Instagram. J’aimerais bien qu’ils aillent voir mes films ! n
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
F E S T I VA L C I N É M A
GROS PLAN SUR LES PREMIERS... INTERVIEW / VINCENT BRAUD
PHOTO / SANDRINE JOUSSEAUME (CÉRÉMONIQUE DE CLÔTURE 2016)
On ne change pas une formule qui gagne. Alors, à l’occasion de cette 30e édition, ne comptez pas sur l’équipe du festival Premiers Plans pour faire son cinéma. L’objectif reste inchangé : c’est la découverte des nouveaux talents du cinéma européen. L’histoire est belle et peu banale. Dès ses débuts, Premiers plans entendait révéler les jeunes réalisateurs, faire découvrir le patrimoine du 7e art, former un nouveau public et accompagner cinéastes et réalisateurs dans leurs travaux d’écriture. n Qu’ont en commun l’Allemand Fatih Akin, l’Espagnol Fernando Leon de Aranoa, l’Irlandais Jim Sheridan et Mathieu Amalric, Yvan Attal ou Abdellatif Kechiche ? Le cinéma bien sûr mais aussi d’avoir rencontré leur premier public à Angers. Avant de parvenir au premier plan, ils étaient invités à… Premiers Plans. n Mission accomplie si on en juge aussi par le public du festival, souvent jeune et passionné, toujours curieux. Pour cette édition, on leur PA G E 0 4 7
propose près d’une centaine de premiers films mais aussi une “rétro” Almodovar, les films d’Agnés V, des histoires de famille et des moments de folie avec les Monty Python. n Jamais de nostalgie mais, tout de même, un hommage à Jeanne Moreau, si attachée à Angers et à Premiers Plans. Et puis, comme chaque année, des rencontres, des échanges, une table ronde sur les glaneurs et collectionneurs de films… Un festival qui, grâce à la détermination de Claude-Éric Poiroux continue à faire ses 400 coups. Et rappelle, si besoin était, que la lumière peut jaillir des salles obscures. n FESTIVAL PREMIERS PLANS 12 AU 21 JANVIER, ANGERS
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
S R
EXPOS
Afrodisiaque
© STAN DOUGLAS
1970 et des poussières d'étoiles : un couloir sombre, d'où nous parviennent déjà des motifs syncopés. Une chaleur qui détonne en plein mois de novembre à New York. Des basses épaisses bousculent les murs. Encore quelques pas feutrés et nous y sommes : une formation jazz-funk habite littéralement le studio de la Columbia Records. On en ressort transis d'émotion, transportés par ces rythmes afro, sur le parvis rennais. n LUANDA-KINSHASA, STAN DOUGLAS LES CHAMPS LIBRES, RENNES, JUSQU’AU 7 JANVIER.
Chaissac en propos Entre ici, Gaston Chaissac. Non, le taiseux vendéen n'aura pas sa place au Panthéon tant son œuvre ne s'appréhende pas comme l'on rentre dans un moulin. Le pape d'une peinture “rustique moderne”, entourant tous ses personnages vivement colorés de cernes noirs comme on en trouve sur les vitraux, aurait sûrement bondi en lisant ces lignes, anticlérical qu'il était. Comme de se savoir exposé dans une abbaye. Cette rétrospective revient sur le parcours de l'homme que l'on savait aussi poète accompli. n
"VISAGE AUX HACHOIRS", 1946 (GOUACHE SUR PAPIER) © PHILIPPE ROCHER
K T
GASTON CHAISSAC, CHRONIQUES MUSÉE DE L’ABBAYE SAINTE-CROIX, LES SABLES D’OLONNE, JUSQU’AU 14 JANVIER. PA G E 0 4 8
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
S R
EXPOS
MARCEL DUCHAMP, LA BOÎTE VERTE, 1934, FAC-SIMILÉS SUR PAPIER ET EMBOÎTAGE DE CARTON AVEC APPLICATION DE CUIVRE ET PLAQUE DE VERRE. ENSEMBLE DE 93 FAC-SIMILÉS DE PHOTOGRAPHIES, DESSINS ET NOTES, 2,2 X 28 X 33,2 CM. © ALBERT / © ASSOCIATION MARCEL DUCHAMP / © ADAGP, PARIS, 2017
K T
COLLECTIONNEUR NÉ TEXTE / PATRICK THIBAULT
Angers a invité des collectionneurs à exposer au sein du Musée des beaux-arts. Nous sommes donc partis à la rencontre d’Alain Le Provost afin de savoir ce qui se cachait derrière la collection, le désir inachevé. Éléments de réponse. Alain Le Provost collectionne depuis toujours : « Dès 14 ans, je me suis privé pour m’acheter un livre de reproductions de peintres surréalistes. J’ai toujours eu envie d’acheter. Collectionner me paraît aussi naturel que respirer. » Il n’hésite pas à dire que c’est une maladie, une addiction, sa psychanalyse. Il évoque Julie C. Fortier, artiste à qui il avait commandé un parfum de sa collection qui en a créé un qui ne tient pas. Toutes les dix minutes, on doit renouveler l’opération, ce qui traduit le besoin permanent d’acheter autre chose. n Sa collection doit beaucoup à Christophe Viart mais il ne veut pas la définir : « c’est juste de l’amour. J’aime les artistes. Duchamp est un pilier. Si on veut qu’elle ait un sens, je suis obligé d’évoquer les artistes qui manquent, tels Niele Torony et PA G E 0 5 0
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
Alan Charlton ». Ne pouvant plus faire la collection dont il rêvait, l'opticien nantais a cessé de vouloir lui donner un sens : « J’achète maintenant ce qui me plait, hors collection. » n Ses œuvres, il vit avec, « c’est mon oxygène ». Il se défend d’avoir acheté en pensant que ça prendrait de la valeur : « dans ce cas, il faut arrêter tout de suite. On se dit surtout qu’il faut acheter avant de ne plus pouvoir parce que c’est trop cher. » n L’exposition d’Angers, il en est fier dans la mesure où elle fait entrer des artistes au musée : « Je finance aussi des éditions parce qu’il faut absolument rendre les artistes visibles ». n COLLECTIONNER, LE DÉSIR INACHEVÉ, MUSÉE DES BEAUX-ARTS, ANGERS, 18 NOVEMBRE AU 18 MARS.
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
FELICE VARINI, QUATRE CERCLES À CINQ MÈTRES, ROUGE, N°1 PARIS, 1992. COLLECTION FRAC BRETAGNE. © ADAGP, PARIS 2017. CRÉDIT PHOTO : COURTESY GALERIE JENNIFER FLAY COURTESY THE ARTIST AND FRAC BRETAGNE
EXPOS
Visibles cibles D'un certain point de vue, l'anamorphose fait souvent son petit effet mais qu'est-ce-que-c'est ? Un procédé pictural permettant d'intégrer une image en deux dimensions dans la réalité, visible dans son ensemble seulement d'un certain point de vue et dont Felice Varini a fait sa spécialité. Le mieux est d'aller voir sur place, et d'en profiter pour contempler le travail de Ivan Liovik Ebel, fait de visuelles anaphores. Mais qu'est-ce-quec'est ? Allez-y on vous dit. n
FRAC DES PAYS DE LA LOIRE / DR
FELICE VARINI, QUATRE CERCLES À CINQ MÈTRES / IVAN LIOVIK EBEL, DE TEMPS EN TEMPS, ART & ESSAI UNIVERSITÉ RENNES 2, CAMPUS VILLEJEAN, JUSQU’AU 19 JANVIER.
Échanges et match Le Frac des Pays de la Loire a eu la bonne idée d’inviter des artistes colombiens pour ses ateliers internationaux. Un commissaire… colombien, Alejandro Martín Maldonado, a donc coordonné une résidence de deux mois pour cinq artistes sur le thème de la chute de la pesanteur. Ils se sont particulièrement bien emparé de la grande salle, avec des œuvres différentes et complémentaires qui se répondent. Des œuvres qui portent en elles des questions sur la culture colombienne, l’art en général, notre monde et les allers-retours entre les cultures. Danilo Dueñas, Herlyng Ferla, Verónica Lehner, Rosario López, David Vélez terminent en beauté l’année France-Colombie. n THE WAY THINGS FALL (AINSI TOMBENT LES CHOSES), FRAC DES PAYS DE LA LOIRE, CARQUEFOU, JUSQU’AU 28 JANVIER. PA G E 0 5 1
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
EXPOS
Régnier, c’est royal ! Une première mondiale au Musée des arts de Nantes. Jamais une exposition n’avait été consacrée à l’œuvre de Nicolas Régnier. Un artiste du XVIIe qui bouscule les frontières (et pas que celles de l’art !) et une œuvre qui traduit la démarche d’un homme libre, inspiré par le sulfureux Caravage. Après l’aérienne et superbe installation de Susanna Fritscher, c’est un autre fil que propose de suivre le Musée. Artiste européen, flamand d’origine mais francophone et italien d’adoption, Nicolas Régnier fut aussi un important marchand d’art à Venise. C’est son parcours que permet de retracer cette exposition en trois espaces. On y découvre les œuvres de ce “poète du quotidien” mais aussi l’étrange dialogue qu’elles peuvent engager avec des peintres des collections nantaises (de Simon Vouet à Guido Reni). n NICOLAS RÉGNIER, MUSÉE D’ARTS, NANTES, 1ER DÉCEMBRE AU 11 MARS. LUCIANO CASTELLI ET RAINER FETTING, ROOM FULL OF MIRRORS, 1982_COLLECTION PARTICULIÈRE, SUISSE © ADAGP, PARIS 2017
S R
NICOLAS RÉGNIER, AUTOPORTRAIT AU CHEVALET, CAMBRIDGE, FOGG ART MUSEUM, HARVARD UNIVERSITY ART MUSEUMS © MRS. ERIC SCHROEDER
K T
Fan des arts nés en 80 Vivre libre ou mourir ! Ivre, libre, plein d'humour et de rire : dans les années 80, l'art s'affranchit de ses marges et ce, partout dans le monde. Les frères Di Rosa et Robert Combas concassent le réel en France. La frange marginale des graffeurs s'invite à la fête de l'art aux States, Basquiat et Keith Haring en tête. Les couleurs franches s'affichent partout de la Russie à l'Afrique. Le poulaire art est digéré, place à l'internationale figuration libre. n LIBRES FIGURATIONS – ANNÉES 80 FONDS HÉLÈNE & ÉDOUARD LECLERC, LANDERNEAU, 10 DÉCEMBRE AU 2 AVRIL. PA G E 0 5 2
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
et aussi
EXPOS
FARIDA LE SUAVÉ, LA PART DES ANGES CHAPELLE DES CALVAIRIENNES, MAYENNE, JUSQU’AU 17 DÉCEMBRE. UN CHOIX DE SCULPTURE COLLÉGIALE SAINT-MARTIN, ANGERS, JUSQU’AU 7 JANVIER. LIBRES COMME L’ART, XI E TRIENNALE INTERNATIONALE DES MINI-TEXTITES MUSÉE JEAN LURÇAT ET DE LA TAPISSERIE CONTEMPORAINE, JUSQU’AU 7 JANVIER. LA BIBLIOTHÈQUE, LA NUIT, ALBERTO MANGUEL, ROBERT LEPAGE, EX MACHINA LIEU UNIQUE, NANTES, JUSQU’AU 7 JANVIER. KOMOREBI, UNE EXPOSITION D’ART BRUT JAPONAIS LIEU UNIQUE, NANTES, JUSQU’AU 14 JANVIER. INSTANTANÉ (95), JULIEN LAFORGE ET RAPHAËL ILIAS, TENIR L’ÉCART FRAC PAYS DE LA LOIRE, CARQUEFOU, JUSQU’AU 21 JANVIER. 327 PAS DE L’UNE À L’AUTRE, RÉFLEXIONS D’ARTISTES ÉGLISES TOUSSAINTS ET SAINT-GERMAIN, RENNES, JUSQU’AU 28 JANVIER. SAISONS, PEINTURE, MIROIRS – ISABEL DUPERRAY MUSÉE, LA ROCHE-SUR-YON, JUSQU’AU 3 FÉVRIER. JULIE C. FORTIER MUSÉE DES BEAUX-ARTS, RENNES, JUSQU’AU 4 FÉVRIER. PASCAL RIVET, RASE CAMPAGNE FRAC BRETAGNE, RENNES, 16 DÉCEMBRE AU 18 FÉVRIER. ALORS QUE J’ÉCOUTAIS MOI AUSSI SIMON, ZIN, VIRGINIE, ETC. LA CRIÉE, RENNES, 16 DÉCEMBRE AU 18 FÉVRIER.
SORTEZ DE L’ORDINAIRE OS • EXPOS • LOISIRS • CINÉMA CONCERTS • SPECTACLES • BARS/REST
#suivezleguide magazine papier web • mobile
Photo © Kaspars Grinvalds / Fotolia
ne cherchez plus, wik a choisi le meilleur
K T
S R
CARTE BLANCHE À UN ARTISTE
LES FAÇADES TAGUÉES PAR
TEXTE / PATRICK THIBAULT
PORTRAIT / DR
Philippe Cognée a toujours revendiqué la peinture. Depuis les années 90, il s’applique à décliner une technique et un univers très personnels. Son travail est désormais exposé et reconnu dans le monde entier. Ses maisons taguées, Philippe Cognée a bien voulu les présenter dans Kostar alors que se bousculent les projets. Une expo en cours à Bruxelles et une autre, colossale, en Corée au printemps. Et puis un chantier pour les Archives départementales à Grenoble. Ces maisons taguées restent, comme souvent, un projet en évolution. L’artiste garde, sous le regard, des dizaines de toiles, souvent des grands formats, qu’il aime retoucher, gratter pour voir ce qui se dégage… Ainsi en est-il de ces maisons repérées aux États-Unis ou ailleurs. n Philippe Cognée voulait être architecte et l’architecture le fascine. Qu’il s’agisse de maisons, d’immeubles, de tours, vus de face ou du ciel, l’architecture est très présente dans son œuvre. Ces façades ont pour lui une force verticale ou horizontale. Ce qui l’amuse ici, c’est de peindre des maisons dejà peintes. « Je fais entrer le tag dans les galeries sans être dans le street art qui, lui, doit rester dans la rue. » n « Je n’aime pas les beaux tags, j’aime ceux qui ont vécu et qui sont des marquages de territoire. » Peintre du réel, Philippe Cognée s’est souvent inspiré de photos qu’il prenait lui-même avant de les récupérer sur Google. « Je suis un peintre abstrait utilisant une forme de figuration », mais il ne veut pas raconter d’histoire : « Beaucoup d’artistes figuratifs ont un aspect narratif, ma peinture raconte simplement le monde tel qu’il est. » n Depuis les années 90, PhiPA G E 0 5 4
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
lippe Cognée utilise la même technique. Un savant mélange où la peinture et la cire sont amenées à fusionner : « Ça s’ancre dans la toile et ça a pour effet d’effacer le geste du peintre, de révéler autre chose… » Dans son atelier de Vertou, l’odeur de la cire enivre. La lumière naturelle souligne son clin d’œil à Vermeer. « Je ramène ces maisons dans le champ de l’histoire de l’art, j’aime faire vibrer ces briques dans le vrai bonheur optique, c’est un jeu de reconstruction. » n Nantes vient d’ouvrir sa nouvelle École des beaux-arts, vaisseau amiral flambant neuf dans les anciennes halles Alstom restaurées sur l’Île de Nantes. Ce fut l’occasion de parler de quelques étudiants aujourd’hui célèbres, parmi lesquels Philippe Cognée. L’artiste, contre courants et marées, reste fidèle à la peinture : « Elle n’a rien de réactionnaire ou de ringard. J’écris avec des pinceaux plutôt qu’avec un appareil photo ou un crayon. » Et de citer Baselitz, Richter, Polke, Jasper Jones, Rauschenberg, Wharol… n La peinture reste son langage : « Pour moi, c’est comme un défi, une fuite en avant. Il faut jeter de l’énergie sur la toile, et tous les jours. Le spectateur doit ressentir cette énergie lorsqu’il est face à l’œuvre. » Et ce, jusqu’au bout du monde. n
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
PHILIPPE COGNÉE
PORTFOLIO
K O S TA R 5 8
PHILIPPE COGNÉE
PORTFOLIO
K O S TA R 5 8
PA G E 0 6 0
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
par
pierrick sorin
LE TRAVAIL DU NANTAIS PIERRICK SORIN EST MONDIALEMENT CONNU. DEPUIS NOVEMBRE 2006, IL NOUS RACONTE SON QUOTIDIEN DE CRÉATEUR. SIGNÉ SORIN, NATURELLEMENT. PHOTO / P. SORIN
PHOTOMONTAGE / CHARLIE MARS
« Y’a l’feu dans la baignoire ! Viens m’aider ! » J’ai lancé ça en direction de la chambre – porte fermée – de mon fils, pour le motiver à sortir de son lit, pour qu’il me donne un coup de main, pour le sensibiliser à une forme de recherche créative “low-tech”… Il a rappliqué. Il n’a pas cru au danger (Il sait que je fais parfois des expériences plastico-illusionnistes saugrenues), mais il éprouvait toutefois une légère appréhension (Il sait que j’ai réellement mis le feu à la baraque, en 2002, en tournant une scène comique. Il sait qu’en
MON FILS (...) ÉPROUVAIT TOUTEFOIS UNE LÉGÈRE APPRÉHENSION (IL SAIT QUE J’AI RÉELLEMENT MIS LE FEU À LA BARAQUE, EN 2002, EN TOURNANT UNE SCÈNE COMIQUE). 1995, j’ai provoqué l’évacuation d’un musée : mille personnes à la rue lors d’une inauguration. Je terminais tout juste d’installer une œuvre “holographique” dans laquelle des toiles contemporaines étaient dévorées par sept flammes virtuelles. L’installation achevée, je jetai un coup d’œil à la composition finale. Je remarquai la présence d’une huitième flamme. Cela m’intrigua un peu mais, pressé d’aller acheter des cigarettes avant le début du vernissage, je quittai le musée sans me poser trop de questions… À mon retour, pompiers et gros savon pour ma pomme : j’avais laissé sur le sol, au cœur même de l’œuvre, une lampe halogène allumée, sous des feuilles de journal froissées. La huitième flamme n’était pas très virtuelle…). Enfin bref, il sait, mon fils, que ça peut déraper, donc, “be careful, quand même”. En débarquant dans la salle de bain, il a cru une seconde que la PA G E 0 6 1
K O S TA R
baignoire brûlait vraiment mais, très vite, il a vu que les flammes n’étaient que des images venant d’un projecteur suspendu au plafond. Elles traversaient l’eau du bain, s’affichaient sur la blancheur de l’émail. Je lui ai demandé de brasser l’eau en y plongeant ses pattes, tandis que je grimpais sur une échelle, appareil photo en main, pour shooter, en “vue d’oiseau”, l’image des flammes brisées-menues, en multiples facettes, par l’effet prismatique des remous ; ça m’amusait de traiter le thème de l’eau et du feu, de manière littérale, de faire en sorte que les deux éléments fusionnent en une matière unique. L’idée m’est venue lors d’une exposition personnelle, à Nice, à l’Hôtel Windsor, lieu chaleureux “habité”, aux chambres “décorées” par des artistes. Le jardin est magnifique ; rien d’ostentatoire, juste ce qu’il faut de liberté végétale pour que l’on s’y sente bien. J’ai apprécié la piscine, bordée d’un vieux mur et d’herbes folles. J’ai eu envie de jouer avec elle, de l’habiller de flammes. J’ai imaginé quelques touristes américains à la retraite s’immerger en elle comme dans un bain de napalm incandescent. n En rentrant chez moi, j’ai alors préparé cette petite expérience, dans ma salle de bain… Pas sûr que ce soit vraiment intéressant mais ce n’est pas trop nul quand même. J’ai libéré le fiston. Le souvenir d’une sorte de dialogue philosophique m’est venu à l’esprit. Avant qu’il reparte dans sa chambre, je lui ai dit : « Un jour, quelqu’un demanda à un poète : Si votre maison brûlait, quelle est la première chose que vous emporteriez avec vous ? Ce dernier répondit : le feu.» n Mon fils opina du bonnet avec un petit sourire condescendant et disparut dans l’escalier. n
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
U N E V I L L E V U E PA R L A R É D A C T I O N
VIENNE, LA SURPRISE DU RENOUVEAU TEXTE ET PHOTOS / PATRICK THIBAULT
Depuis quelques années, Vienne est en train de devenir une des capitales les plus dynamiques d'Europe. Le télescopage permanent entre tradition et modernité séduit le visiteur. Contre toute attente, on va à Vienne pour être surpris. Vienne évoque d’abord des images du passé. Un côté délicieusement suranné, voire désuet. On imagine la ville du XIXe, avec ses constructions et palais prestigieux du centre-ville. On pense à la ville de François-Joseph qui n’a cessé d’agrandir le palais de la Hofburg. On pense même à l’impératrice Elisabeth, la si populaire Sissi qui, dans notre imaginaire, est presque une star de cinéma. On l’imagine allant au café Demel déguster un strudel. À moins que ça ne soit une sachertorte à l’hôtel du même nom. n Cette ville-là existe bien sûr. On continue même de donner le grand bal impérial, chaque nouvel an. Et, pour que l’image d’Épinal soit complète, on peut y ajouter le culte de Mozart, sa statue devant laquelle le monde entier se fait photographier en faisant la queue. Et les chocolats à son effigie omniprésents dans les PA G E 0 6 2
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
boutiques ou à l’aéroport. n Cette Vienne-là, à laquelle il faudrait encore ajouter le château de Schönbrunn, est celle d’un tourisme de masse. Nous allons la quitter. n Car au-delà des clichés, il y a beaucoup plus intéressant à voir et à vivre à Vienne. La capitale autrichienne a beaucoup changé ces dernières années. Cette belle endormie est même devenue trépidante et branchée. Bien sur, on continue d’y dîner tôt mais les Viennois vous diront que c’est pour mieux profiter des soirées qui, si elles sont longues, sont loin d’être ennuyeuses. n Si l’imposante architecture peut paraitre pompeuse, elle traduit le poids de l’Histoire, la puissance des Habsbourg. Vienne a toujours été considérée comme la porte de l’Orient en Europe, on ne s’étonne donc pas de trouver des airs de pâtisserie orientale à l’architec-
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
PHOTOS © KOSTAR (SAUF MENTIONS)
EGON SCHIELE, SELFPORTRAIT WITH STRIPED SHIRT, 1910 © LEOPOLD MUSEUM, VIENNA
U N E V I L L E V U E PA R L A R É D A C T I O N
ture. Ce télescopage entre tradition et modernité fait la force créative de la ville. Au-delà du slogan de l’Office de tourisme, “Maintenant pour toujours”, c’est devenu une marque de fabrique. On est surpris de voir l’extrême droite progresser dans les urnes tant la populations semble vivre avec tranquillité. On a même le sentiment que la bourgeoisie installée a laissé du terrain à une jeunesse branchée. Une ballade sur les bords du canal réserve son lot de surprises. En looks comme en sons. n Vienne est une ville à vivre. Très étendue, on découvre ses quartiers, avec chacun sa personnalité et son cachet. Au-delà des larges artères impériales, la ville étale ses parcs et jardins. Les Viennois aiment se retrouver au légendaire Prater. À quelques encablures du centre, le vrai Danube, s’il n’est pas tout à fait bleu, attire promeneurs et sportifs. Fini le temps où les terrasses fermaient tôt pour ne pas déranger les voisins. Désormais, elles restent animées et font le plein jusqu’à pas d’heure. n Côté visites, impossible de passer à côté de l’incroyable richesse des musées qui, à l’image de la ville, pratiquent allègrement le télescopage des genres et des époques. Le MAK, Musée des arts appliqués, réunit dans un palais vénitien, une section Vienne 1900 et l’avant garde créative contemporaine. PA G E 0 6 3
L’Albertina, elle, dans un ancien palais des Habsbourg, comptent de prestigieuses collections qui cohabitent avec des expositions temporaires internationales d’art contemporain. Le Musée des beaux-arts est l’un des plus riches d’Europe avec la plus importante collection de Bruegel l’ancien, Dürer, Vermeer et autres grands maitres. On peut aussi vous parler du musée du Belvédère, consacré notamment à la Sécession et où l’on admire le fameux baiser de Klimt. n On en revient donc à la Vienne de 1900 que l’on célébrera en 2018. Belle époque qui a non seulement irrigué la ville mais l’Europe tout entière. On s’arrête alors au Leopold Museum pour découvrir les richesses de l’art autrichien. Klimt, Kokochka et… la plus importante collection d’œuvres d’Egon Schiele. Séquence émotion devant les autoportraits 1910 du peintre mort à l’âge de 28 ans. Juste en face de ce cube blanc, un plus récent, tout en noir, le Mumok, musée d’art contemporain et son penchant pour le pop art. n Reste le temps du shopping, à savourer en dehors du centre qui se contente d’aligner les marques internationales. Profiter d’une gastronomie qui s’est internationalisée, sans toutefois venir à bout des kiosques à saucisses. Et vivre pleinement la nuit dans la ville de Freud et de Conchita Wurst. n
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
S R
U N E V I L L E V U E PA R L A R É D A C T I O N
PHOTOS © KOSTAR
K T
MEXICO, AZTEC, EARLY 16TH CENTURYFEATHERS OF THE RESPLENDENT QUETZAL, COTINGAS, ROSEATE SPOONBILL, SQUIRREL CUCKOO, KINGFISHER; WOOD, FIBRES, PAPER, COTTON, LEATHER, GOLD, GILT BRONZEH. 116, W. 175 © KHM-MUSEUMSVERBAND
Archi Tour
Le renouveau du Welt Après trois années de travaux, Vienne vient de rouvrir en grandes pompes son musée d’ethnologie. Dans un ancien palais néo-Renaissance, il réunit d’importantes collections accumulées depuis le XVIe siècle. Très réussie, la nouvelle muséographie alterne judicieusement les espaces sur fond noir et sur fond blanc pour souligner les pièces. La nouvelle approche va jusqu’à étudier les conséquences de la mondialisation sur l’ethnologie, en évoquant notamment l’influence de l’élection d’Obama sur les populations africaines. Depuis le masque aztèque du XVIe (notre photo) jusqu’au Bodhisattva Jizo japonais, le tour du monde et des époques est complet. n PA G E 0 6 4
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
À l’opposé de l’architecture néo-classique du Ring, J. M. Olbrich a construit à la fin du XIXe le musée de la Secession qu’on aurait tort de manquer. On ne rate pas l’Hundertwasserhaus. En réalité un immeuble à l’architecture libre, construit par le plasticien qui serait une sorte de fils de Gaudi et de père de Frank Gehry. Plus récemment, Jean Nouvel a construit un Sofitel de centre ville dont le roof top chic et branché offre une vue plongeante sur la ville et la cathédrale. Dominique Perrault a, lui, construit la très élégante tour plissée dont le noir se reflète sur le Danube. Zaha Hadid a, elle, conçue, la bibliothèque de l’université d’économie. Un bâtiment anguleux à l’extérieur et courbe à l’intérieur qui suscite l’admiration. n
PHOTOS © KOSTAR
U N E V I L L E V U E PA R L A R É D A C T I O N
Circuit Kostar
Y ALLER Vols directs au départ de Nantes avec Volotea, deux fois par semaine, les lundis et vendredis. On peut donc y passer le week-end ou la semaine.
Direction Neubau, le quartier qui bouge et dont on parle. C’est maintenant qu’il faut l’arpenter pour profiter d’une belle mixité entre les populations et d’enseignes 100 % locales. On vous propose de commencer la visite de ce quartier commerçant en sortant du Mumok par la Burggasse. Un arrêt s’impose au numéro 24 qui réunit boutique de créateurs, friperie et Frühstück, un café-restaurant décalé. Les boutiques se multiplient sur Siebensterngasse et Westbahnstrasse. De la mode, des accessoires, du design, des créateurs, toujours de petites boutiques avec l sens de l’accueil. Inouïe, la boutique du verrier Robert Comploj où l’on a envie de tout acheter. Heureusement, les prix sont raisonnables (Westbahnstrasse 18). On termine par le dédale animé de Spittelbergg, des ruelles piétonnières qui donnent l’impression de replonger deux siècles en arrière dans un village. Non, vous ne rêvez pas, on est bien au cœur de la capitale : bars, restaurants et terrasses n’y désemplissent pas. n PA G E 0 6 5
Y SÉJOURNER Hôtel Sans-Souci. Si l’on veut et si l’on peut casser sa tirelire, ce 5 étoiles qui jouxte le quartier des musées est particulièrement bien situé à la porte du centre et du quartier branché de Neubau. Dans une offre importante, toutes catégories confondues, le très central Motel One Staatsoper offre un excellent rapport qualitéprix exceptionnel.
S’Y RESTAURER Si c’est un week-end de folie, on va au Palais Coburg chez Silvio Nickol. Après la visite d’une des plus riches caves du monde, c’est une expérience hors du commun chez le très créatif chef aux deux macarons. Plus raisonnable, Vestibül propose une cuisine moderne dans un cadre inouï à l’entrée du Burgtheater. La meilleure Wiener schnitzel, celle dont la panure ne se décolle pas de la viande, se déguste chez Zum Schwarzen Kameel, une institution. Enfin, si l’on veut déjeuner ou dîner comme les Viennois, on peut aller au Glacis Beisl, un bistrot contemporain à deux pas des musées. Et bien sûr, on fait étape dans l’un des multiples Würstelstand, le fameux kiosque à saucisses. n K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
K T
S R
K T
S R DOS À DOS
Vous aimez invectiver le spectateur. La scène ne suffit pas ?
tnecniV engiacaM so
n J’aime bien mettre
le spectateur dans une insécurité, qu’il ne sache pas ce qui peut arriver. C’est parce qu’il ne le sait pas qu’il est pris dans l’action. Un peu comme dans un film d’Hitchcock. Quand il y a du danger, ça réveille le specta-
... l’interview ver INTERVIEW ET PHOTOS / R MATTHIEU CHAUVEAU POUR KOSTA
Vos pièces sont souvent très longues. Savez-vous faire court ? n Elles ne le sont pas toutes et,
teur.
sincèrement, ce ne sont pas des pièces chiantes. Je ne supporte pas l’ennui. Je suis comme un enfant de 6 ans. Mes spectacles vont vite. C’est la fête, un moment de vie. Je travaille sur la longueur mais pas sur l’ennui.
Entre vos rôles de loser mélancolique au cinéma et votre théâtre révolté, vous vous y retrouvez ? n Je suis plutôt révolté
dans la vie et assez speed… Après, je rentre dans l’énergie qu’on me demande d’avoir. Mais attention, les films de Guillaume Brac, par exemple, ont une très grande violence même si elle est souterraine.
Vos pièces divisent souvent, savez-vous pourquoi ? n Ce n’est
pas si vrai ! Ça vient d’Arnaud Laporte de France Culture et d’Armelle Héliot du Figaro, qui me haïssent virulemment. Mais je ne suis pas mécontent de ne pas être aimé par ces deux-là. Politiquement, je ne suis pas sûr d’être d’accord avec eux.
Pour un révolté, vous n’hésitez pas à tourner dans Le sens de la fête, film somme toute assez « en marche ». n Je ne
Ne versez-vous pas parfois dans la provoc pour la provoc ? n Ce n’est pas
suis pas d’accord. Le jeu du film, c’est que tout le monde se réunisse à la fin. C’est le genre qui veut ça : une sorte de happy end, comme il y avait des Deus ex machina chez Molière. C’est pour faire plaisir, comme un bonbon. n
de la provoc que de distribuer de la bière pendant mes spectacles ! C’est une soirée, donc on reçoit les gens. On distribue aussi des boules Quies parce que, légalement, on est obligé. Je suis tellement contrôlé que des policiers en civil viennent parfois…
EN MANQUE - VINCENT MACAIGNE, 7 AU 9 FÉVRIER, LIEU UNIQUE, NANTES
PA G E 0 6 6
K O S TA R
SAISON 12 / NUMÉRO 58
DÉCEMBRE 2017-JANVIER 2018
US À O V Z E ATTEND RPRIS ! ÊTRE SU #DAR
EZ LE R R V U O DÉC AMME SU PROGRENNES.FR DAR.R
Du 1er décembre 2017 au 25 février 2018
SAGACITÉ RCS 622044501 - © Photo RMN - Stéphane Marechalle
Visitez 7 siècles d’histoire religieuse en Vendée à travers 230 objets d’exception
Du mardi au dimanche de 10 h à 18 h
Historial de la Vendée Les Lucs-sur-Boulogne
02 28 85 77 77 - www.sitesculturels.vendee.fr Entrée : 8 € - 18-25 ans : 5 € - Moins de 18 ans : gratuit