Livre « Istanbul, Kilim des sept collines », Michel Ménaché et Josette Vial (La passe du vent, 2014)

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Istanbul – Kilim des sept collines

ISTANBUL Kilim des sept collines

ISBN 978-2-84562-253-1

20 €

Michel Ménaché − Josette Vial

Patchwork amoureux d’Istanbul. Du roman d’une vie à la poésie d’une ville. Constantinople et ses fantômes, après un exil sans retour. Istanbul, ville-monde, saisie dans le tourbillon de son effervescence quotidienne d’aujourd’hui. Les mots déshabillés en poèmes – de l’autre côté du miroir – font écho à la générosité du regard à nu de la photographe.

Textes de Michel Ménaché Photographies de Josette Vial


ISTANBUL Ouvrage réalisé avec la collaboration de l’Espace Pandora 7 place de la Paix 69200 Vénissieux

Kilim des sept collines

Textes de Michel Ménaché Photographies de Josette Vial

Ménaché (Michel).- Vial (Josette).- Istanbul. Kilim des sept collines.© Genouilleux, Éditions La passe du vent, mai 2014.112 p., ill., 20 x 21 cm.- ISBN 978-2-84562-253-1.- http://www.lapasseduvent.com


ISTANBUL Ouvrage réalisé avec la collaboration de l’Espace Pandora 7 place de la Paix 69200 Vénissieux

Kilim des sept collines

Textes de Michel Ménaché Photographies de Josette Vial

Ménaché (Michel).- Vial (Josette).- Istanbul. Kilim des sept collines.© Genouilleux, Éditions La passe du vent, mai 2014.112 p., ill., 20 x 21 cm.- ISBN 978-2-84562-253-1.- http://www.lapasseduvent.com


à Jeanne à mes filles Myriam et Yaël, à ma petite-fille Alice, à mes neveux Serge et Céline M. M.

et à mes enfants, Élisabeth M. et Bertrand M. J. V.


à Jeanne à mes filles Myriam et Yaël, à ma petite-fille Alice, à mes neveux Serge et Céline M. M.

et à mes enfants, Élisabeth M. et Bertrand M. J. V.


Hanouka – Lyon, décembre 1943

Chico miò, C’est la fête des lumières mais n’y sont, ni les cœurs ni les lumignons des chandeliers à sept et neuf branches abandonnés à la poussière des années. Le couvre-feu imposé aux Juifs nous enfonce dans notre nuit intérieure… Le 17 octobre 1928, un décret nous accordant la nationalité française réalisait notre rêve. Douze ans plus tard, un décret contraire le brisait ! Nous sommes partout sans patrie. La valse des décrets nous fait tourner les sangs… Le gouvernement de Vichy s’est complètement soumis à l’envahisseur. Nous voilà terrés au fond de notre boutique, sous tutelle, sans autre droit que celui de nous faire un peu oublier si nous voulons survivre… Je t’écris du fond d’un gouffre dans lequel un jour peut-être tu chercheras toi-même les fossiles d’encre et de sang de ce que furent nos vies d’errances et de souffrances… À bord du paquebot qui me ramenait à Constantinople, je pensais à nos ancêtres qui avaient fui l’Espagne au XVe siècle. Étions-nous condamnés pour toujours à l’appel forcené du large ? La « tevah » (la chaire) de la plus vieille synagogue de Constantinople, Ahrida, en forme de vaisseau, rappelait selon la légende sépharade comment les Juifs en disgrâce au prétexte de « la limpieza de sangre » s’étaient embarqués pour sauver leurs vies et la Torah. Cette synagogue fut édifiée dès la conquête ottomane dans le quartier de Balat. Fuyant les autodafés, ces naufragés de la foi apportaient avec eux leurs derniers biens, leur savoir-faire, leurs précieux textes et la clé de leur maison dans l’espoir d’un prochain retour en Espagne. Moi, chico miò, traversant les mers, je n’avais plus guère la foi mais je croyais encore à ma bonne étoile. Mes gains rapportés de Buenos Aires fondirent comme neige au soleil. Le démon du jeu ne m’avait plus quitté… Au mirage des cartes, j’ai joué, rejoué, rejoué encore, perdu plus que de raison, perdu jusqu’à la raison. J’avais trahi la

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Au fil du Kilim « Et je me réveille. Pas de cité dans la cité. Pas d’ici sinon ailleurs. Et pas d’ailleurs sinon ici. N’était le mirage, je n’aurais pas marché vers sept collines... N’était le mirage ! » Mahmoud Darwich « Par la parole, un ancêtre respire en moi » Bruno Doucey

À l’origine de ce livre, la transmission brisée...

Errer dans Istanbul pour faire parler des cendres mêlées, dispersées en Pologne. Arracher des mots perdus à cette ville qui, avant que je ne m’y perde moi-même avec bonheur, m’a habité longtemps... Je n’ai pas connu mon grand-père Marcos. Marcos et Rébecca m’ont vu naître. J’ai été privé du son de leurs voix. Exil multiplié jusqu’au piège terrifiant de la mort nazie. Ce sont des lettres d’outre cendres qui rêvent la voix de Marcos, restituent des lambeaux de vie tramés dans le kilim des visages vivants d’Istanbul. Les photographies de Josette Vial, motifs à vif du kilim, captent avec justesse la vie aujourd’hui autour du Bosphore. Elles réactivent aussi un monde, du temps perdu au temps retrouvé, inscrit dans le

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mouvement perpétuel de la ville mythique dont déborde ma mémoire familiale. Les images renouent ainsi dans ces pages le lien interrompu par l’absence. Les mots déshabillés en poèmes – de l’autre côté du miroir – font écho à la générosité du regard à nu de la photographe. Ce livre est un patchwork amoureux d’Istanbul. Istanbul effervescente d’aujourd’hui. En mémoire de toi, Marcos... Constantinople et ses fantômes, à plus d’un siècle d’écart. Dans des trous de mémoire...

À chacun de se risquer, se repérer à la croisée féconde des destins et des pas perdus.

Lyon, 15 juillet 1943

Chico miò, Tu as deux ans aujourd’hui. J’écris pour toi dans l’urgence. Pour plus tard. Quand tu auras appris à lire. Réfugié à Genève, par miracle tu es éloigné du malheur qui nous accable. De l’horreur qui nous menace. Tu vivras mais si je dois mourir sans te revoir, chico miò, je veux te dire ce que fut ma vie jusqu’à ce jour. Évoquer pour toi la ville illustre où je suis né. Je veux t’offrir Constantinople… Aujourd’hui, une moustache d’un pouce fait trembler le monde. L’incendie ravage les villes. Un vent de folie attise la rage. Jamais, les persécutions contre nous n’ont atteint ce degré de barbarie. Ma sœur Myriam, son mari Haïm Mizrahi et leurs enfants, arrêtés dans une rafle en mars à Paris. Déportés en Pologne. Nous sommes depuis sans nouvelles et craignons le pire. Fanny, la sœur de Rebecca qui vit à Marseille, elle, a été sauvée par sa peur. Elle tremblait tellement quand les Allemands sont venus l’arrêter qu’une voisine a crié qu’elle avait la typhoïde. Les Allemands ont préféré s’éclipser ! Tu dois savoir. La chasse à l’homme est partout ouverte. Ils nous accusent de tous les maux… En ces temps de haine, je vis à l’envers. Un cauchemar ancien me hante. Une première fois, quelques mois après ma Bar Mitzvah, j’ai cru mourir. Le 10 juillet 1894, la terre trembla à Constantinople. L’Empire vacillait, perdait bras et jambes. Les occidentaux l’appelaient « l’homme malade de l’Europe. » La Russie avait vaincu les Ottomans et repoussé les frontières. L’ennemi exigeait en outre d’extravagantes indemnités. Abdulamid II, le Sultan rouge, avait pris prétexte de la défaite pour suspendre la constitution. Les Ulémas et la police contrôlaient les journaux, répandaient la terreur parmi les minorités religieuses et les opposants politiques.

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mouvement perpétuel de la ville mythique dont déborde ma mémoire familiale. Les images renouent ainsi dans ces pages le lien interrompu par l’absence. Les mots déshabillés en poèmes – de l’autre côté du miroir – font écho à la générosité du regard à nu de la photographe. Ce livre est un patchwork amoureux d’Istanbul. Istanbul effervescente d’aujourd’hui. En mémoire de toi, Marcos... Constantinople et ses fantômes, à plus d’un siècle d’écart. Dans des trous de mémoire...

À chacun de se risquer, se repérer à la croisée féconde des destins et des pas perdus.

Lyon, 15 juillet 1943

Chico miò, Tu as deux ans aujourd’hui. J’écris pour toi dans l’urgence. Pour plus tard. Quand tu auras appris à lire. Réfugié à Genève, par miracle tu es éloigné du malheur qui nous accable. De l’horreur qui nous menace. Tu vivras mais si je dois mourir sans te revoir, chico miò, je veux te dire ce que fut ma vie jusqu’à ce jour. Évoquer pour toi la ville illustre où je suis né. Je veux t’offrir Constantinople… Aujourd’hui, une moustache d’un pouce fait trembler le monde. L’incendie ravage les villes. Un vent de folie attise la rage. Jamais, les persécutions contre nous n’ont atteint ce degré de barbarie. Ma sœur Myriam, son mari Haïm Mizrahi et leurs enfants, arrêtés dans une rafle en mars à Paris. Déportés en Pologne. Nous sommes depuis sans nouvelles et craignons le pire. Fanny, la sœur de Rebecca qui vit à Marseille, elle, a été sauvée par sa peur. Elle tremblait tellement quand les Allemands sont venus l’arrêter qu’une voisine a crié qu’elle avait la typhoïde. Les Allemands ont préféré s’éclipser ! Tu dois savoir. La chasse à l’homme est partout ouverte. Ils nous accusent de tous les maux… En ces temps de haine, je vis à l’envers. Un cauchemar ancien me hante. Une première fois, quelques mois après ma Bar Mitzvah, j’ai cru mourir. Le 10 juillet 1894, la terre trembla à Constantinople. L’Empire vacillait, perdait bras et jambes. Les occidentaux l’appelaient « l’homme malade de l’Europe. » La Russie avait vaincu les Ottomans et repoussé les frontières. L’ennemi exigeait en outre d’extravagantes indemnités. Abdulamid II, le Sultan rouge, avait pris prétexte de la défaite pour suspendre la constitution. Les Ulémas et la police contrôlaient les journaux, répandaient la terreur parmi les minorités religieuses et les opposants politiques.

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Au fil du Kilim « Et je me réveille. Pas de cité dans la cité. Pas d’ici sinon ailleurs. Et pas d’ailleurs sinon ici. N’était le mirage, je n’aurais pas marché vers sept collines... N’était le mirage ! » Mahmoud Darwich « Par la parole, un ancêtre respire en moi » Bruno Doucey

À l’origine de ce livre, la transmission brisée...

Errer dans Istanbul pour faire parler des cendres mêlées, dispersées en Pologne. Arracher des mots perdus à cette ville qui, avant que je ne m’y perde moi-même avec bonheur, m’a habité longtemps... Je n’ai pas connu mon grand-père Marcos. Marcos et Rébecca m’ont vu naître. J’ai été privé du son de leurs voix. Exil multiplié jusqu’au piège terrifiant de la mort nazie. Ce sont des lettres d’outre cendres qui rêvent la voix de Marcos, restituent des lambeaux de vie tramés dans le kilim des visages vivants d’Istanbul. Les photographies de Josette Vial, motifs à vif du kilim, captent avec justesse la vie aujourd’hui autour du Bosphore. Elles réactivent aussi un monde, du temps perdu au temps retrouvé, inscrit dans le

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« Cette ville ressemble à la Sérénissime, mais dans des proportions fabuleuses, où tout serait multiplié par cent. Une Venise envahie par les sept collines et la puissance de Rome. » Mathias Énard (Parle-leur de batailles de rois et d’éléphants)


« J’ai semé du millet, il a poussé de l’orge… » Nâzim Hikmet

Le maître de ballet transcende les fulgurances des mouettes au-dessus des vagues tandis que le vapur unit d’un sillage d’écume toujours recommencé l’Europe à l’Asie

16

Hüzün À l’aune de la brume infinie le gris à l’âme se noie dans la déréliction en miroir Un placenta marin se déroule comme un linceul de fin des temps

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« J’ai semé du millet, il a poussé de l’orge… » Nâzim Hikmet

Le maître de ballet transcende les fulgurances des mouettes au-dessus des vagues tandis que le vapur unit d’un sillage d’écume toujours recommencé l’Europe à l’Asie

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Hüzün À l’aune de la brume infinie le gris à l’âme se noie dans la déréliction en miroir Un placenta marin se déroule comme un linceul de fin des temps

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Lyon, 24 septembre 1943

Chico miò, Rebecca a cinquante-quatre ans aujourd’hui. On ne fête plus rien… L’inquiétude ici grandit tandis que j’écris pour toi. Les mots me portent loin de cet enfer d’énigmes. Les amis disparaissent du jour au lendemain, même les enfants ne sont pas épargnés. Les rafles se multiplient. « Nettoyage racial », proclament ces enragés qui nous haïssent. C’est miracle que le passeport suisse de ta mère vous ait arrachés tous deux à la Gestapo quand celle-ci s’est présentée rue Désirée, à votre domicile. Ceux de la rue Sainte-Catherine, à deux pas de chez vous, et tout près de notre boutique de la Grande Côte, n’eurent pas cette chance… Comment savoir ce qui adviendra dans l’heure qui suit ? Où serons-nous demain ? Dans huit jours ? Le piège se referme… Je ne me sens plus de taille à affronter l’impossible… Au retour de Marseille, mon libraire était mort. Sa boutique, saccagée par les Jeunes-Turcs… Je suis retourné voir du côté du Marché aux livres, place Beyazit. Mais le Grand Bazar, reconstruit tant bien que mal, avait changé depuis les ravages du tremblement de terre. Les commerçants juifs rasaient les murs… Peu de temps après, tandis que je flânais à l’étal de romans français d’une librairie proche du Lycée Galatasaray, une jeune fille s’est attardée. Elle a tout de suite attiré mon attention. Sous prétexte de la conseiller, de lui faire découvrir Balzac, Hugo ou Maupassant, je lui ai dit ma passion des auteurs français. Elle aussi avait étudié le français dans une école de l’Alliance israélite, celle des filles à Hasköy… Mon amour des livres s’est rapidement porté sur ses yeux, sur sa voix, la courbe délicate de ses lèvres, sur tout son être. Elle souriait avec mélancolie. Une angoisse l’habitait, obscurcissait son regard... C’est ainsi que j’ai rencontré Rebecca, ta grand-mère.

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Lyon, 24 septembre 1943

Chico miò, Rebecca a cinquante-quatre ans aujourd’hui. On ne fête plus rien… L’inquiétude ici grandit tandis que j’écris pour toi. Les mots me portent loin de cet enfer d’énigmes. Les amis disparaissent du jour au lendemain, même les enfants ne sont pas épargnés. Les rafles se multiplient. « Nettoyage racial », proclament ces enragés qui nous haïssent. C’est miracle que le passeport suisse de ta mère vous ait arrachés tous deux à la Gestapo quand celle-ci s’est présentée rue Désirée, à votre domicile. Ceux de la rue Sainte-Catherine, à deux pas de chez vous, et tout près de notre boutique de la Grande Côte, n’eurent pas cette chance… Comment savoir ce qui adviendra dans l’heure qui suit ? Où serons-nous demain ? Dans huit jours ? Le piège se referme… Je ne me sens plus de taille à affronter l’impossible… Au retour de Marseille, mon libraire était mort. Sa boutique, saccagée par les Jeunes-Turcs… Je suis retourné voir du côté du Marché aux livres, place Beyazit. Mais le Grand Bazar, reconstruit tant bien que mal, avait changé depuis les ravages du tremblement de terre. Les commerçants juifs rasaient les murs… Peu de temps après, tandis que je flânais à l’étal de romans français d’une librairie proche du Lycée Galatasaray, une jeune fille s’est attardée. Elle a tout de suite attiré mon attention. Sous prétexte de la conseiller, de lui faire découvrir Balzac, Hugo ou Maupassant, je lui ai dit ma passion des auteurs français. Elle aussi avait étudié le français dans une école de l’Alliance israélite, celle des filles à Hasköy… Mon amour des livres s’est rapidement porté sur ses yeux, sur sa voix, la courbe délicate de ses lèvres, sur tout son être. Elle souriait avec mélancolie. Une angoisse l’habitait, obscurcissait son regard... C’est ainsi que j’ai rencontré Rebecca, ta grand-mère.

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De sa lanterne la jeune captive la nuit guidait son amant qui nageait jusqu’à elle Une tempête fatale souffla la flamme America America Depuis que les navires U S jettent l’ancre à Istanbul Elia Kazan à l’improviste fait un retour hors champ

Léandre cette nuit-là se noya La jeune captive l’a-t-elle rejoint dans les flots Comment savoir

36

Autre destin autre drame Un empereur byzantin y aurait enfermé sa fille pour l’éloigner d’un amant Un serpent dans un panier de fruits à l’idylle mit fin Chaque tour a son secret Kiz Kulesi la tour de la Jeune Fille chaque soir s’illumine pour les amants à fleur de légende…

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De sa lanterne la jeune captive la nuit guidait son amant qui nageait jusqu’à elle Une tempête fatale souffla la flamme America America Depuis que les navires U S jettent l’ancre à Istanbul Elia Kazan à l’improviste fait un retour hors champ

Léandre cette nuit-là se noya La jeune captive l’a-t-elle rejoint dans les flots Comment savoir

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Autre destin autre drame Un empereur byzantin y aurait enfermé sa fille pour l’éloigner d’un amant Un serpent dans un panier de fruits à l’idylle mit fin Chaque tour a son secret Kiz Kulesi la tour de la Jeune Fille chaque soir s’illumine pour les amants à fleur de légende…

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Lyon, le 16 novembre 1943

Chico miò,

Spleen stambouliote la nausée longe le caniveau traînée de blues des nuits perdues à perdre pied sur l’échiquier du néant

38

Quel monde ! La guerre continue de s’étendre sur terre et sur mer. On entend les choses les plus contradictoires. Tantôt c’est l’Union Soviétique qui écrase les armées allemandes, tantôt c’est Staline qui ne pourra pas résister à Hitler. De l’Ouest, on espère, mais les stratèges lointains s’occupent d’autres fronts, d’autres horizons en feu. On m’a dit que Nantes a été bombardée par les Anglo-américains. Des morts, beaucoup de morts mais les Allemands ne reculent pas… Ma chère Constantinople est aujourd’hui épargnée. Là-bas, je me souviens bien, au risque de te lasser par ce souvenir ressassé, quand la terre a tremblé, c’était comme si des bombes étaient tombées sur la ville. La gloire de notre grande cité ottomane tenait beaucoup à deux dômes parmi les plus majestueux de l’Orient, celui d’Hagia Sophia, « la Sagesse Divine », celui de Sultanhamet, « la Mosquée bleue ». Pas une faille dans les coupoles, pas de dégâts majeurs. Même leurs minarets ont tenu. Les mosaïques pourtant ont souffert. Ce qu’avaient épargné les iconoclastes, ce qui subsistait de Byzance s’effritait comme les peaux mortes des temps anciens. À nous autres Juifs, ces lieux étaient étrangers, bien sûr, mais les gravures et les photographies partout présentes nous les rendaient familiers. Rien de la grandeur de Constantinople ne nous était indifférent. La beauté de notre capitale ottomane était un bien commun, chacun revendiquant toutefois son signe exclusif de privauté avec l’au-delà : le croissant, la croix et l’étoile verrouillaient les esprits ! La Turquie est aujourd’hui à l’écart des massacres. Pour combien de temps encore ? Quand ici tombent les bombes, toute l’humanité perd son sang et sa mémoire…

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Lyon, le 16 novembre 1943

Chico miò,

Spleen stambouliote la nausée longe le caniveau traînée de blues des nuits perdues à perdre pied sur l’échiquier du néant

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Quel monde ! La guerre continue de s’étendre sur terre et sur mer. On entend les choses les plus contradictoires. Tantôt c’est l’Union Soviétique qui écrase les armées allemandes, tantôt c’est Staline qui ne pourra pas résister à Hitler. De l’Ouest, on espère, mais les stratèges lointains s’occupent d’autres fronts, d’autres horizons en feu. On m’a dit que Nantes a été bombardée par les Anglo-américains. Des morts, beaucoup de morts mais les Allemands ne reculent pas… Ma chère Constantinople est aujourd’hui épargnée. Là-bas, je me souviens bien, au risque de te lasser par ce souvenir ressassé, quand la terre a tremblé, c’était comme si des bombes étaient tombées sur la ville. La gloire de notre grande cité ottomane tenait beaucoup à deux dômes parmi les plus majestueux de l’Orient, celui d’Hagia Sophia, « la Sagesse Divine », celui de Sultanhamet, « la Mosquée bleue ». Pas une faille dans les coupoles, pas de dégâts majeurs. Même leurs minarets ont tenu. Les mosaïques pourtant ont souffert. Ce qu’avaient épargné les iconoclastes, ce qui subsistait de Byzance s’effritait comme les peaux mortes des temps anciens. À nous autres Juifs, ces lieux étaient étrangers, bien sûr, mais les gravures et les photographies partout présentes nous les rendaient familiers. Rien de la grandeur de Constantinople ne nous était indifférent. La beauté de notre capitale ottomane était un bien commun, chacun revendiquant toutefois son signe exclusif de privauté avec l’au-delà : le croissant, la croix et l’étoile verrouillaient les esprits ! La Turquie est aujourd’hui à l’écart des massacres. Pour combien de temps encore ? Quand ici tombent les bombes, toute l’humanité perd son sang et sa mémoire…

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« La nostalgie y est plus ardente que le feu et les retrouvailles y sont plus douces que le plus profond des sommeils. Et l’absence demeure plantée dans le corps comme un poignard rouillé. » Nedim Gürsel (Le Roman du Conquérant) Byzance Constantinople Istanbul Trois noms qui chantent et enchantent L’arthrose gagne les murs comme les corps des béquilles en façade des dos qui se voûtent des cannes qui ploient sous le fardeau des ans

Lui tirer les vers du nez quand le crâne est désert fertilité en creux stérilité en bosse Au barbier d’y mettre de l’ordre qui comme moi sur le clavier essaie de voir plus loin que mon nez en travaillant à coups de ciseaux

44

J’entends Nâzim Hikmet debout pour vivre comme un arbre « comprendre ce qui s’en va et ce qui vient »

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« La nostalgie y est plus ardente que le feu et les retrouvailles y sont plus douces que le plus profond des sommeils. Et l’absence demeure plantée dans le corps comme un poignard rouillé. » Nedim Gürsel (Le Roman du Conquérant) Byzance Constantinople Istanbul Trois noms qui chantent et enchantent L’arthrose gagne les murs comme les corps des béquilles en façade des dos qui se voûtent des cannes qui ploient sous le fardeau des ans

Lui tirer les vers du nez quand le crâne est désert fertilité en creux stérilité en bosse Au barbier d’y mettre de l’ordre qui comme moi sur le clavier essaie de voir plus loin que mon nez en travaillant à coups de ciseaux

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J’entends Nâzim Hikmet debout pour vivre comme un arbre « comprendre ce qui s’en va et ce qui vient »

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« Cette ville ressemble à la Sérénissime, mais dans des proportions fabuleuses, où tout serait multiplié par cent. Une Venise envahie par les sept collines et la puissance de Rome. » Mathias Énard (Parle-leur de batailles de rois et d’éléphants)


Hanouka – Lyon, décembre 1943

Chico miò, C’est la fête des lumières mais n’y sont, ni les cœurs ni les lumignons des chandeliers à sept et neuf branches abandonnés à la poussière des années. Le couvre-feu imposé aux Juifs nous enfonce dans notre nuit intérieure… Le 17 octobre 1928, un décret nous accordant la nationalité française réalisait notre rêve. Douze ans plus tard, un décret contraire le brisait ! Nous sommes partout sans patrie. La valse des décrets nous fait tourner les sangs… Le gouvernement de Vichy s’est complètement soumis à l’envahisseur. Nous voilà terrés au fond de notre boutique, sous tutelle, sans autre droit que celui de nous faire un peu oublier si nous voulons survivre… Je t’écris du fond d’un gouffre dans lequel un jour peut-être tu chercheras toi-même les fossiles d’encre et de sang de ce que furent nos vies d’errances et de souffrances… À bord du paquebot qui me ramenait à Constantinople, je pensais à nos ancêtres qui avaient fui l’Espagne au XVe siècle. Étions-nous condamnés pour toujours à l’appel forcené du large ? La « tevah » (la chaire) de la plus vieille synagogue de Constantinople, Ahrida, en forme de vaisseau, rappelait selon la légende sépharade comment les Juifs en disgrâce au prétexte de « la limpieza de sangre » s’étaient embarqués pour sauver leurs vies et la Torah. Cette synagogue fut édifiée dès la conquête ottomane dans le quartier de Balat. Fuyant les autodafés, ces naufragés de la foi apportaient avec eux leurs derniers biens, leur savoir-faire, leurs précieux textes et la clé de leur maison dans l’espoir d’un prochain retour en Espagne. Moi, chico miò, traversant les mers, je n’avais plus guère la foi mais je croyais encore à ma bonne étoile. Mes gains rapportés de Buenos Aires fondirent comme neige au soleil. Le démon du jeu ne m’avait plus quitté… Au mirage des cartes, j’ai joué, rejoué, rejoué encore, perdu plus que de raison, perdu jusqu’à la raison. J’avais trahi la

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Au commencement était le Verbe L’encre coulait-elle de source ou du sang des prophètes De naufrages en échouages l’exil après l’Exode certains sont repartis très loin d’autres en fumée d’autres encore sont venus d’ailleurs

Au pied de la lettre Lamed tranche chaque verset nulle pensée sans faille la transcendance est le fumet du désir de l’œil la musique de l’âme La Thora feu noir sur feu blanc est restée comme deux bras ouverts en attente

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Regard objectif au dehors introspectif au revers des vitres deux aspects du voyage double visage des prémisses du métier de vivre

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Au commencement était le Verbe L’encre coulait-elle de source ou du sang des prophètes De naufrages en échouages l’exil après l’Exode certains sont repartis très loin d’autres en fumée d’autres encore sont venus d’ailleurs

Au pied de la lettre Lamed tranche chaque verset nulle pensée sans faille la transcendance est le fumet du désir de l’œil la musique de l’âme La Thora feu noir sur feu blanc est restée comme deux bras ouverts en attente

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Regard objectif au dehors introspectif au revers des vitres deux aspects du voyage double visage des prémisses du métier de vivre

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Captifs les tapis volants ne décollent plus

OROPA tes reflets s’égarent en ombres chinoises

Leurs larmes de rue en rue roulent vers la mer

La route de la soie change de boussole au gré des mannequins qui posent en vitrine imposent en sourdine les canons du jour

Le fil des nuits s’est perdu Shéhérazade est aux abonnés absents

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Captifs les tapis volants ne décollent plus

OROPA tes reflets s’égarent en ombres chinoises

Leurs larmes de rue en rue roulent vers la mer

La route de la soie change de boussole au gré des mannequins qui posent en vitrine imposent en sourdine les canons du jour

Le fil des nuits s’est perdu Shéhérazade est aux abonnés absents

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Lyon, 5 mars 1944

Chico miò, J’ai soixante-trois ans aujourd’hui. En me rasant ce matin, j’avais l’impression d’en avoir quatre-vingts. La présence de l’occupant nous ronge et nous détruit à petit feu. Quand je n’en peux plus, je ferme les yeux. Je vois, je sens, je respire Constantinople. Aucune autre ville ne m’apparaît comme Constantinople le cœur du monde. C’est dans Stamboul que je me suis senti citoyen de partout, en ce carrefour des continents et des civilisations. Mais le destin, tu l’auras compris, en a décidé autrement. Dans ma précédente lettre, j’évoquais l’apaisement que nous avions ressenti en arrivant à Montpellier. Nous pensions enfin connaître là, sinon l’opulence, au moins une vraie douceur de vivre… Illusion ! « La Méditerranée est un lac français » nous disait-on souvent depuis notre arrivée. Les rives de ce lac allaient, à nos yeux, se rétrécir brutalement, s’assombrir soudain. Les lieux de hasard sont parfois trompeurs et le climat un jour y bascule sans qu’on ait vu venir ni les nuages, ni la foudre, ni la tempête…

À Beyöglu la rue pond de nuit les œufs du jour

64

En juin 1914, l’Archiduc François-Ferdinand est assassiné à Sarajevo. La foudre ! Dès le mois d’août de cette même année, l’Europe tout entière entrait en guerre et les armées allemandes défonçaient les lignes, s’engouffraient par la Belgique. La tempête ! Le continent tout entier était secoué, même au-delà ! À Montpellier, bien sûr, la guerre était tenue à distance, le front semblait loin de nous. Voilà que la Turquie, elle aussi, venait d’entrer en guerre. Dans le camp des adversaires de la France. Moi, Isaac Marcos, je devenais donc sujet d’un pays ennemi ! Je me suis présenté dans un commissariat de police pour déclarer ma volonté de m’engager dans les rangs français. « Pas question, m’a répondu le commissaire. D’ailleurs, vous êtes indésirable dans ce pays. » Une fois encore, il a

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Lyon, 5 mars 1944

Chico miò, J’ai soixante-trois ans aujourd’hui. En me rasant ce matin, j’avais l’impression d’en avoir quatre-vingts. La présence de l’occupant nous ronge et nous détruit à petit feu. Quand je n’en peux plus, je ferme les yeux. Je vois, je sens, je respire Constantinople. Aucune autre ville ne m’apparaît comme Constantinople le cœur du monde. C’est dans Stamboul que je me suis senti citoyen de partout, en ce carrefour des continents et des civilisations. Mais le destin, tu l’auras compris, en a décidé autrement. Dans ma précédente lettre, j’évoquais l’apaisement que nous avions ressenti en arrivant à Montpellier. Nous pensions enfin connaître là, sinon l’opulence, au moins une vraie douceur de vivre… Illusion ! « La Méditerranée est un lac français » nous disait-on souvent depuis notre arrivée. Les rives de ce lac allaient, à nos yeux, se rétrécir brutalement, s’assombrir soudain. Les lieux de hasard sont parfois trompeurs et le climat un jour y bascule sans qu’on ait vu venir ni les nuages, ni la foudre, ni la tempête…

À Beyöglu la rue pond de nuit les œufs du jour

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En juin 1914, l’Archiduc François-Ferdinand est assassiné à Sarajevo. La foudre ! Dès le mois d’août de cette même année, l’Europe tout entière entrait en guerre et les armées allemandes défonçaient les lignes, s’engouffraient par la Belgique. La tempête ! Le continent tout entier était secoué, même au-delà ! À Montpellier, bien sûr, la guerre était tenue à distance, le front semblait loin de nous. Voilà que la Turquie, elle aussi, venait d’entrer en guerre. Dans le camp des adversaires de la France. Moi, Isaac Marcos, je devenais donc sujet d’un pays ennemi ! Je me suis présenté dans un commissariat de police pour déclarer ma volonté de m’engager dans les rangs français. « Pas question, m’a répondu le commissaire. D’ailleurs, vous êtes indésirable dans ce pays. » Une fois encore, il a

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Combat d’amour des livres d’ailes en plein vent Colombe ou épervier l’élégie chante en noir et blanc l’embrasure de l’aube De la fontaine ou des pigeons quel roucoulement touche l’âme du promeneur solitaire

Salomé s’est fanée La danse des sept voiles n’agite guère que les pigeons peu enclins à perdre la tête

La nostalgie se répand en bouquets de larmes en poèmes de plumes

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Combat d’amour des livres d’ailes en plein vent Colombe ou épervier l’élégie chante en noir et blanc l’embrasure de l’aube De la fontaine ou des pigeons quel roucoulement touche l’âme du promeneur solitaire

Salomé s’est fanée La danse des sept voiles n’agite guère que les pigeons peu enclins à perdre la tête

La nostalgie se répand en bouquets de larmes en poèmes de plumes

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Lyon, 28 mai 1944

Chico mío,

« Le mot est l’homme sa mémoire et son devenir » Edmond Jabès

La langue hébraïque survit dans un théâtre d’ombres Tant de livres ont brûlé Tant de cris se sont perdus dans les cendres

La pierre se souvient elle signe le passage d’une main amie au bord d’une pierre tombale Le tympan d’une synagogue n’est pas tout à fait sourd au regard qui creuse au-delà de l’alphabet des mystères…

78

Hier et avant-hier, nous avons cru que c’en était fini de nous. Pendant deux jours, la ville de Lyon a été bombardée par les Alliés qui veulent gêner les mouvements de l’occupant allemand. Les ponts sont principalement visés mais aviateurs américains et anglais prennent le moins possible de risques. Les bombes sont lâchées à haute altitude et tombent parfois loin des cibles. À chaque alerte les habitants de la Guillotière se précipitent dans les caves les plus sûres. Par trois fois nous avons fui le passage du Chapeau rouge où s’ouvre notre boutique pour gagner au plus vite dans l’affolement la cave voûtée et profonde du bureau de tabac, juste avant la rue Sébastien Gryphe. Des immeubles ont été détruits au début de notre rue tout près de la place du Pont. Des incendies se sont propagés tout autour… Même la Mairie de notre arrondissement proche de la voie ferrée a été endommagée. Mais j’ignore le nombre de victimes et l’ampleur des dégâts ; nous évitons tout déplacement inutile et quittons rarement le magasin sous la sinistre surveillance de nos préposés aux affaires juives. Bien sûr la peur grandit parmi les juifs de la Guillotière d’autant que les rafles se multiplient dans le quartier en dépit de l’avancée des Libérateurs… Avec ces horribles bombes et tous ces morts par centaines en deux jours, une petite lueur d’espoir nous redonne courage mais le pire est toujours possible… Nos ennemis sont partout et, accidentellement, ces lointains amis venus du ciel sèment la mort sans discernement... Les immeubles en feu et l’âcre fumée ont réveillé des souvenirs affreux pour ta grand-mère et moi. Après mon retour d’Argentine, l’été à Constantinople a été marqué par de violents incendies dans plusieurs quartiers, principalement sur les deux rives de la Corne d’Or. C’était en juillet 1911. Rebecca et moi venions de célébrer à la hâte notre mariage. Dans Hasköy, le quartier de notre enfance, le feu se communiqua très rapidement de rue en rue. Les maisons de bois des ruelles étroites bâties adossées les unes aux autres

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Lyon, 28 mai 1944

Chico mío,

« Le mot est l’homme sa mémoire et son devenir » Edmond Jabès

La langue hébraïque survit dans un théâtre d’ombres Tant de livres ont brûlé Tant de cris se sont perdus dans les cendres

La pierre se souvient elle signe le passage d’une main amie au bord d’une pierre tombale Le tympan d’une synagogue n’est pas tout à fait sourd au regard qui creuse au-delà de l’alphabet des mystères…

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Hier et avant-hier, nous avons cru que c’en était fini de nous. Pendant deux jours, la ville de Lyon a été bombardée par les Alliés qui veulent gêner les mouvements de l’occupant allemand. Les ponts sont principalement visés mais aviateurs américains et anglais prennent le moins possible de risques. Les bombes sont lâchées à haute altitude et tombent parfois loin des cibles. À chaque alerte les habitants de la Guillotière se précipitent dans les caves les plus sûres. Par trois fois nous avons fui le passage du Chapeau rouge où s’ouvre notre boutique pour gagner au plus vite dans l’affolement la cave voûtée et profonde du bureau de tabac, juste avant la rue Sébastien Gryphe. Des immeubles ont été détruits au début de notre rue tout près de la place du Pont. Des incendies se sont propagés tout autour… Même la Mairie de notre arrondissement proche de la voie ferrée a été endommagée. Mais j’ignore le nombre de victimes et l’ampleur des dégâts ; nous évitons tout déplacement inutile et quittons rarement le magasin sous la sinistre surveillance de nos préposés aux affaires juives. Bien sûr la peur grandit parmi les juifs de la Guillotière d’autant que les rafles se multiplient dans le quartier en dépit de l’avancée des Libérateurs… Avec ces horribles bombes et tous ces morts par centaines en deux jours, une petite lueur d’espoir nous redonne courage mais le pire est toujours possible… Nos ennemis sont partout et, accidentellement, ces lointains amis venus du ciel sèment la mort sans discernement... Les immeubles en feu et l’âcre fumée ont réveillé des souvenirs affreux pour ta grand-mère et moi. Après mon retour d’Argentine, l’été à Constantinople a été marqué par de violents incendies dans plusieurs quartiers, principalement sur les deux rives de la Corne d’Or. C’était en juillet 1911. Rebecca et moi venions de célébrer à la hâte notre mariage. Dans Hasköy, le quartier de notre enfance, le feu se communiqua très rapidement de rue en rue. Les maisons de bois des ruelles étroites bâties adossées les unes aux autres

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« Pour certains les étoiles sont des blessures qu’on a ouvertes. » Breyten Breytenbach

Épilogue Le 21 juin 1944, une camionnette de la Gestapo s’est arrêtée devant la boutique « Aux travailleurs », 47 Grande rue de la Guillotière. Marcos et Rebecca ont été conduits à la sinistre prison du Fort Montluc. Marcos a été enfermé dans le « baraquement juif » construit à la hâte en raison des arrivées massives. On y entassait les « israélites » provisoirement détenus suite aux dernières rafles à répétition, comme déchaînées par la défaite annoncée du nazisme. Une dizaine de jours plus tard, ils étaient acheminés au camp de Drancy. Parti le 31 juillet, le convoi 77 a mis quatre jours dans des conditions indescriptibles, pour livrer à Auschwitz, les 1300 déportés, suffoquant dans les wagons plombés. À l’arrivée, nombreux étaient déjà morts d’épuisement et de soif. À la rampe terminale, sans retour, parmi les 700 victimes immédiatement désignées, Marcos et Rebecca, au seuil de l’enfer, furent aussitôt gazés… Miroir mémoire des vieilles lunes Constantinople s’y mire tandis que derrière le tain se trame le tohu-bohu des gloires nouvelles au pied des tours de verre et de béton

*** Au fil du kilim, j’ai effeuillé les pages de la mémoire familiale et collective, imaginé les lettres d’outre-cendres du fantôme de Marcos pour cicatriser une plaie d’enfance jamais refermée… J’ai salué le printemps à Istanbul dans le quartier de Besiktas que j’ai habité au début du dernier séjour à Istanbul. Deux des parcs de ce quartier échappent à la plupart des visiteurs. L’un est voué à la paix et y accueille des arbres offerts par les pays amis et lointains, l’autre est dédié à treize journalistes, intellectuels et poètes assassinés dont les statues et stèles honorent la mémoire. C’est le parc de la démocratie. Deux parcs ouverts à toutes les espérances…

Istanbul est un puzzle à fragmentation multiple déconstruit chaque jour reconstruit le lendemain dans le concert mouvant des langues et des cris du monde…

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« Pour certains les étoiles sont des blessures qu’on a ouvertes. » Breyten Breytenbach

Épilogue Le 21 juin 1944, une camionnette de la Gestapo s’est arrêtée devant la boutique « Aux travailleurs », 47 Grande rue de la Guillotière. Marcos et Rebecca ont été conduits à la sinistre prison du Fort Montluc. Marcos a été enfermé dans le « baraquement juif » construit à la hâte en raison des arrivées massives. On y entassait les « israélites » provisoirement détenus suite aux dernières rafles à répétition, comme déchaînées par la défaite annoncée du nazisme. Une dizaine de jours plus tard, ils étaient acheminés au camp de Drancy. Parti le 31 juillet, le convoi 77 a mis quatre jours dans des conditions indescriptibles, pour livrer à Auschwitz, les 1300 déportés, suffoquant dans les wagons plombés. À l’arrivée, nombreux étaient déjà morts d’épuisement et de soif. À la rampe terminale, sans retour, parmi les 700 victimes immédiatement désignées, Marcos et Rebecca, au seuil de l’enfer, furent aussitôt gazés… Miroir mémoire des vieilles lunes Constantinople s’y mire tandis que derrière le tain se trame le tohu-bohu des gloires nouvelles au pied des tours de verre et de béton

*** Au fil du kilim, j’ai effeuillé les pages de la mémoire familiale et collective, imaginé les lettres d’outre-cendres du fantôme de Marcos pour cicatriser une plaie d’enfance jamais refermée… J’ai salué le printemps à Istanbul dans le quartier de Besiktas que j’ai habité au début du dernier séjour à Istanbul. Deux des parcs de ce quartier échappent à la plupart des visiteurs. L’un est voué à la paix et y accueille des arbres offerts par les pays amis et lointains, l’autre est dédié à treize journalistes, intellectuels et poètes assassinés dont les statues et stèles honorent la mémoire. C’est le parc de la démocratie. Deux parcs ouverts à toutes les espérances…

Istanbul est un puzzle à fragmentation multiple déconstruit chaque jour reconstruit le lendemain dans le concert mouvant des langues et des cris du monde…

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Postface Une résidence d’écriture à Istanbul, en avril et mai 2012, soutenue par une bourse du FIACRE INTERNATIONAL de la Région RhôneAlpes, m’a permis de mener à terme l’écriture de ce Kilim des sept collines. La mémoire familiale et mes recherches personnelles, mes rêveries sur un passé dévasté m’ont conduit à cette construction en patchwork : lettres imaginaires d’un grand-père disparu tricotées au témoignage poétique sur sa vie et sur sa ville par l’écrivain d’aujourd’hui. Des fantômes de Constantinople à la foule cosmopolite de la mégapole actuelle. De l’une à l’autre, un chemin d’émotions. Témoignages de survivants, pas perdus dans les labyrinthes des vieux quartiers autrefois habités par les judéo-espagnols de Constantinople, synagogues désertées*, étoiles de David qui s’effacent sur les façades lézardées de Balat, anciennes écoles de l’Alliance Israélite Universelle aux portes closes. Celle d’Hasköy où étudia Marcos est devenue une maison de retraite ! Des ruines enfin et la vie qui partout explose… Le droit d’inventaire et le droit à la lumière. Pour conjurer l’inadmissible. Transmuer le vide en désir de dire… Cette résidence d’écriture m’a donné l’occasion de lire et de rencontrer des écrivains (Özdemir Ince, Mario Levi, Yigit Bener, Nedim Gürsel, Ahmet Soysal…), des universitaires – lors de mes conférences sur Michel Butor dans les Universités Beyazid et Galatasaray –, l’historienne Nora Seni, qui m’a reçu dans le Centre d’Études Anatoliennes qu’elle dirige... Ces échanges m’ont incité à faire connaître en Turquie quelques poètes français qui sont traduits et publiés dans la revue Siirden que dirige Metin Cengiz et à réunir des « Voix d’Istanbul » que je présente dans la revue Europe (n° 1019, mars 2014).

*Sous chaque siège de la principale synagogue séfarade Neve Shalom dans le quartier de Galata, remise en état après le dernier attentat du 15 novembre 2003, il y a un casque et un masque à gaz en prévision d’une attaque terroriste…

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Postface Une résidence d’écriture à Istanbul, en avril et mai 2012, soutenue par une bourse du FIACRE INTERNATIONAL de la Région RhôneAlpes, m’a permis de mener à terme l’écriture de ce Kilim des sept collines. La mémoire familiale et mes recherches personnelles, mes rêveries sur un passé dévasté m’ont conduit à cette construction en patchwork : lettres imaginaires d’un grand-père disparu tricotées au témoignage poétique sur sa vie et sur sa ville par l’écrivain d’aujourd’hui. Des fantômes de Constantinople à la foule cosmopolite de la mégapole actuelle. De l’une à l’autre, un chemin d’émotions. Témoignages de survivants, pas perdus dans les labyrinthes des vieux quartiers autrefois habités par les judéo-espagnols de Constantinople, synagogues désertées*, étoiles de David qui s’effacent sur les façades lézardées de Balat, anciennes écoles de l’Alliance Israélite Universelle aux portes closes. Celle d’Hasköy où étudia Marcos est devenue une maison de retraite ! Des ruines enfin et la vie qui partout explose… Le droit d’inventaire et le droit à la lumière. Pour conjurer l’inadmissible. Transmuer le vide en désir de dire… Cette résidence d’écriture m’a donné l’occasion de lire et de rencontrer des écrivains (Özdemir Ince, Mario Levi, Yigit Bener, Nedim Gürsel, Ahmet Soysal…), des universitaires – lors de mes conférences sur Michel Butor dans les Universités Beyazid et Galatasaray –, l’historienne Nora Seni, qui m’a reçu dans le Centre d’Études Anatoliennes qu’elle dirige... Ces échanges m’ont incité à faire connaître en Turquie quelques poètes français qui sont traduits et publiés dans la revue Siirden que dirige Metin Cengiz et à réunir des « Voix d’Istanbul » que je présente dans la revue Europe (n° 1019, mars 2014).

*Sous chaque siège de la principale synagogue séfarade Neve Shalom dans le quartier de Galata, remise en état après le dernier attentat du 15 novembre 2003, il y a un casque et un masque à gaz en prévision d’une attaque terroriste…

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Remerciements

Que tous ceux qui ont contribué à ce parcours soient ici remerciés :

– Abraham Bengio, Directeur Général Adjoint de la Région RhôneAlpes, – Isabelle Arnaud-Descours, attachée culturelle, – FIACRE INTERNATIONAL, direction de la Région Rhône-Alpes, – Geneviève Villard, responsable du Livre, direction de la Région Rhône-Alpes, – Bérénice Gulmann, Directrice de l’Institut Français d’Istanbul, – Nora Seni, Directrice du Centre d’Études Anatoliennes d’Istanbul, – Mlle Lizzy, Grand Rabbinat de Turquie, – Nedret Östokat, Directrice du Département de Littérature française de l’Université Beyazid, – Osman Semenoglu, Doyen de l’Université Galatasaray, – Engin Beczi, professeur de Littérature française à l’Université Galatasaray, – Yigit Bener, écrivain, – Özdemir Ince, poète, – Mario Levi, écrivain, auteur de Istanbul était un conte, – Jacques et Marie-Hélène Zambernardi, – Sabine Buchmann, peintre, créatrice du site « Couleurs d’Istanbul » et Erkan Karakus, qui furent des amis précieux et deux guides prévenants au cours de mon séjour à Istanbul, – Aurélie Cherasco.

Marcos et Rebecca à Barcelone, 1918. (L’enfant au cerceau est le père de l’auteur).

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Remerciements

Que tous ceux qui ont contribué à ce parcours soient ici remerciés :

– Abraham Bengio, Directeur Général Adjoint de la Région RhôneAlpes, – Isabelle Arnaud-Descours, attachée culturelle, – FIACRE INTERNATIONAL, direction de la Région Rhône-Alpes, – Geneviève Villard, responsable du Livre, direction de la Région Rhône-Alpes, – Bérénice Gulmann, Directrice de l’Institut Français d’Istanbul, – Nora Seni, Directrice du Centre d’Études Anatoliennes d’Istanbul, – Mlle Lizzy, Grand Rabbinat de Turquie, – Nedret Östokat, Directrice du Département de Littérature française de l’Université Beyazid, – Osman Semenoglu, Doyen de l’Université Galatasaray, – Engin Beczi, professeur de Littérature française à l’Université Galatasaray, – Yigit Bener, écrivain, – Özdemir Ince, poète, – Mario Levi, écrivain, auteur de Istanbul était un conte, – Jacques et Marie-Hélène Zambernardi, – Sabine Buchmann, peintre, créatrice du site « Couleurs d’Istanbul » et Erkan Karakus, qui furent des amis précieux et deux guides prévenants au cours de mon séjour à Istanbul, – Aurélie Cherasco.

Marcos et Rebecca à Barcelone, 1918. (L’enfant au cerceau est le père de l’auteur).

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Josette Vial – Photographe Michel Ménaché – Auteur


Josette Vial – Photographe Michel Ménaché – Auteur


Josette Vial – Photographe

J’ai vécu mon enfance et mon adolescence rue du 1er film dans les usines Lumière. Avoir été formée tôt à l’image dans les structures éducatives du quartier a certainement eu de l’importance dans mes engagements et le voyage m’entraîne à la photo… avec le besoin de témoigner, de faire se rencontrer… En 1968, j’occupe l’entreprise Delle à Villeurbanne. Fin octobre 1969, je pars sac à dos pour un voyage qui va duré un an (train, bus, stop, bateau) de Lyon à Chittagong. Au retour, je réalise pour Travail et Culture (association culturelle du monde ouvrier) un montage audiovisuel avec le peintre René Munch, Impressions de voyage en Inde, suivra Persépolis puis avec le peintre Georges Manillier Les peintures extérieurs des monastères roumains et L’art de l’ancienne Égypte ou l’art de l’anti-mode. En 1972, je suis photographe bénévole à la Voix du Lyonnais.

Années 2000 J’expose avec le collectif Photographies Rencontres (l’Œil des mots, Rhône fleuve multiple et Septembre de la photographie 2009 à Lyon). Puis viendront les ateliers d’écriture/photos en milieu scolaire (Oullins, Vénissieux). Alain Pouillet, peintre et poète, écrit sur mes photos autour du lac Pavin, lecture et exposition à la galerie JeanLouis Mandon, Lyon. 2009-2010-2011 Salon des Artistes de Lyon et du Sud-Est. Photos du lac Pavin, vitrail madrilène, hommage à Oran Pamuk. Parution aux éditions Corps Puce de Copeaux des Saisons avec des textes d’Anne-Lise Blanchard. 2012-2013 Salon des Artistes du Sud Est, Nuits byzantine à Venise puis Requiem pour Antoinette et Laurent (Thiers). Exposition avec les amis de la galerie Jean-Louis Mandon au château de Rochebonne (Theizé-enBeaujolais). Des Dieux et des Djinns (Montpezat-sous-Bauzon), cinquante portraits d’habitants d’un quartier en rénovation aux Minguettes.

En 1973, je deviens reporter à la mairie de Vaulx-en-Velin puis à celle de Vénissieux (69) en 1977. Dans ces années, nombreuses expositions à Lyon et Villeurbanne. À la fin de 1970, je participe à l’exposition de la jeune photographie lyonnaise au centre commercial de la Part-Dieu. En 1983, première collaboration avec un poète, Alain Wexler (revue Verso) pour un travail sur le « Bread and Puppet » dans l’usine abandonnée d’Amtec, finalisé par une exposition au théâtre des Ateliers. Années 90 Je réalise, guidée par Sylviane Crouzet et Thierry Renard (Aube Magazine) des portraits d’écrivains lyonnais pour des parutions dans la Voix du Lyonnais. Ce travail sera exposé à Vénissieux. Les poètes Stéphane Juranics et Mohammed El Amraoui écrivent en regards de mes photos. Le tout fera l’objet d’expositions à Lyon, Pierre-Bénite et Vénissieux.

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Josette Vial – Photographe

J’ai vécu mon enfance et mon adolescence rue du 1er film dans les usines Lumière. Avoir été formée tôt à l’image dans les structures éducatives du quartier a certainement eu de l’importance dans mes engagements et le voyage m’entraîne à la photo… avec le besoin de témoigner, de faire se rencontrer… En 1968, j’occupe l’entreprise Delle à Villeurbanne. Fin octobre 1969, je pars sac à dos pour un voyage qui va duré un an (train, bus, stop, bateau) de Lyon à Chittagong. Au retour, je réalise pour Travail et Culture (association culturelle du monde ouvrier) un montage audiovisuel avec le peintre René Munch, Impressions de voyage en Inde, suivra Persépolis puis avec le peintre Georges Manillier Les peintures extérieurs des monastères roumains et L’art de l’ancienne Égypte ou l’art de l’anti-mode. En 1972, je suis photographe bénévole à la Voix du Lyonnais.

Années 2000 J’expose avec le collectif Photographies Rencontres (l’Œil des mots, Rhône fleuve multiple et Septembre de la photographie 2009 à Lyon). Puis viendront les ateliers d’écriture/photos en milieu scolaire (Oullins, Vénissieux). Alain Pouillet, peintre et poète, écrit sur mes photos autour du lac Pavin, lecture et exposition à la galerie JeanLouis Mandon, Lyon. 2009-2010-2011 Salon des Artistes de Lyon et du Sud-Est. Photos du lac Pavin, vitrail madrilène, hommage à Oran Pamuk. Parution aux éditions Corps Puce de Copeaux des Saisons avec des textes d’Anne-Lise Blanchard. 2012-2013 Salon des Artistes du Sud Est, Nuits byzantine à Venise puis Requiem pour Antoinette et Laurent (Thiers). Exposition avec les amis de la galerie Jean-Louis Mandon au château de Rochebonne (Theizé-enBeaujolais). Des Dieux et des Djinns (Montpezat-sous-Bauzon), cinquante portraits d’habitants d’un quartier en rénovation aux Minguettes.

En 1973, je deviens reporter à la mairie de Vaulx-en-Velin puis à celle de Vénissieux (69) en 1977. Dans ces années, nombreuses expositions à Lyon et Villeurbanne. À la fin de 1970, je participe à l’exposition de la jeune photographie lyonnaise au centre commercial de la Part-Dieu. En 1983, première collaboration avec un poète, Alain Wexler (revue Verso) pour un travail sur le « Bread and Puppet » dans l’usine abandonnée d’Amtec, finalisé par une exposition au théâtre des Ateliers. Années 90 Je réalise, guidée par Sylviane Crouzet et Thierry Renard (Aube Magazine) des portraits d’écrivains lyonnais pour des parutions dans la Voix du Lyonnais. Ce travail sera exposé à Vénissieux. Les poètes Stéphane Juranics et Mohammed El Amraoui écrivent en regards de mes photos. Le tout fera l’objet d’expositions à Lyon, Pierre-Bénite et Vénissieux.

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Michel Ménaché – Auteur

Ectoplasme à plumes rouges et bonnet de nuit, La Bartavelle éditeur, 1991 Célébration de l’œuf, encres de Christian Deplante, éditions OrageLagune-express, 2002

Né à Lyon, le 15 juillet 1941. Professeur de Lettres au Lycée Gabriel Fauré d’Annecy jusqu’en 2001. Poète, chroniqueur, collaborateur de la revue Europe. Publié dans de nombreuses anthologies (Livre de poche Jeunesse, Le Cherche-Midi, Bruno Doucey, etc.) et revues (Aube Magazine, Bacchanales, Cahier Critique de Poésie, Coup de Soleil, Décharge, Europe, Foldaan, L’arbre à paroles, Les Lettres françaises, Lieux d’être, Nouvelle Revue Moderne, NU(e), La Polygraphe, PoésieEurope, Poésie-Rencontres, Poésie 1, Racines, Résonance Générale, Utopia, Verso, etc.). Fonde en 1973 le collectif de poètes et plasticiens ARPO 12 qu’il anime jusqu’en 1985 et, en 1977, la revue et le collectif IMPULSIONS, en collaboration avec Jean-Louis Jacquier-Roux. Crée des poèmes-objets. Livres d’artiste en collaboration avec Roudneff, Didier Devos, Fabrice Rebeyrolle, Mylène Besson, etc. A participé à plusieurs ouvrages collectifs sur la poésie à l’école et réalisé une douzaine de livres avec ses ateliers d’écriture.

Rue Désirée, une saison en enfance, éditions La Passe du Vent, 2004 Mélancolie baroque, d’après une exposition de Fabrice Rebeyrolle, éditions Mains-Soleil, 2005 Ellis Island’s Dreams, peinture de Roudneff en couverture, éditions, Carnets du Dessert de Lune, 2007 Venise hors champ, photographies de Didier Devos, avec un poème de Michel Butor, éditions La passe du vent, 2009 Archéologie de l’enfer, photographies de Grégoire Zibell. Coédition trilingue L’Amourier, La Passe du Vent, Verlag Im Wald, 2010 La Tentation de Saint-Antoine d’après Jérôme Bosch, Collection Ekphrasis, éditions Invenit, 2010

Une anthologie de ses poèmes a été enregistrée par Alain Carré : CD Excès de Naissance, éditions Autrement dit, 2004

Principales publications : Pavés et Fenêtres, éditions Pierre-Jean Oswald, 1971 Fable des matières, illustrations de Christian Biancardini, éditions du Dé Bleu, 1983 Claquemuraille, avec une encre de Kaviiik en couverture, éditions Fédérop, 1985 Léman, expressions sans rivages, éditions La Manufacture, 1986 (Maître d’œuvre de cet ouvrage pluridisciplinaire) Entrée de Secours, éditions La Fontaine de Siloé, 1991. (En collaboration avec Jean-Louis Jacquier-Roux, anthologie réunissant cinquante-trois poètes contemporains sur la fin du XXe siècle).

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Michel Ménaché – Auteur

Ectoplasme à plumes rouges et bonnet de nuit, La Bartavelle éditeur, 1991 Célébration de l’œuf, encres de Christian Deplante, éditions OrageLagune-express, 2002

Né à Lyon, le 15 juillet 1941. Professeur de Lettres au Lycée Gabriel Fauré d’Annecy jusqu’en 2001. Poète, chroniqueur, collaborateur de la revue Europe. Publié dans de nombreuses anthologies (Livre de poche Jeunesse, Le Cherche-Midi, Bruno Doucey, etc.) et revues (Aube Magazine, Bacchanales, Cahier Critique de Poésie, Coup de Soleil, Décharge, Europe, Foldaan, L’arbre à paroles, Les Lettres françaises, Lieux d’être, Nouvelle Revue Moderne, NU(e), La Polygraphe, PoésieEurope, Poésie-Rencontres, Poésie 1, Racines, Résonance Générale, Utopia, Verso, etc.). Fonde en 1973 le collectif de poètes et plasticiens ARPO 12 qu’il anime jusqu’en 1985 et, en 1977, la revue et le collectif IMPULSIONS, en collaboration avec Jean-Louis Jacquier-Roux. Crée des poèmes-objets. Livres d’artiste en collaboration avec Roudneff, Didier Devos, Fabrice Rebeyrolle, Mylène Besson, etc. A participé à plusieurs ouvrages collectifs sur la poésie à l’école et réalisé une douzaine de livres avec ses ateliers d’écriture.

Rue Désirée, une saison en enfance, éditions La Passe du Vent, 2004 Mélancolie baroque, d’après une exposition de Fabrice Rebeyrolle, éditions Mains-Soleil, 2005 Ellis Island’s Dreams, peinture de Roudneff en couverture, éditions, Carnets du Dessert de Lune, 2007 Venise hors champ, photographies de Didier Devos, avec un poème de Michel Butor, éditions La passe du vent, 2009 Archéologie de l’enfer, photographies de Grégoire Zibell. Coédition trilingue L’Amourier, La Passe du Vent, Verlag Im Wald, 2010 La Tentation de Saint-Antoine d’après Jérôme Bosch, Collection Ekphrasis, éditions Invenit, 2010

Une anthologie de ses poèmes a été enregistrée par Alain Carré : CD Excès de Naissance, éditions Autrement dit, 2004

Principales publications : Pavés et Fenêtres, éditions Pierre-Jean Oswald, 1971 Fable des matières, illustrations de Christian Biancardini, éditions du Dé Bleu, 1983 Claquemuraille, avec une encre de Kaviiik en couverture, éditions Fédérop, 1985 Léman, expressions sans rivages, éditions La Manufacture, 1986 (Maître d’œuvre de cet ouvrage pluridisciplinaire) Entrée de Secours, éditions La Fontaine de Siloé, 1991. (En collaboration avec Jean-Louis Jacquier-Roux, anthologie réunissant cinquante-trois poètes contemporains sur la fin du XXe siècle).

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© Photographies Josette Vial

© Photographie de quatrième de couverture Archives familiales

Maquette et mise en page Myriam Chkoundali

Relecture et corrections Michel Kneubühler

Ouvrage publié avec le soutien de la Région Rhône-Alpes

Achevé d’imprimer


© Photographies Josette Vial

© Photographie de quatrième de couverture Archives familiales

Maquette et mise en page Myriam Chkoundali

Relecture et corrections Michel Kneubühler

Ouvrage publié avec le soutien de la Région Rhône-Alpes

Achevé d’imprimer


Istanbul – Kilim des sept collines

ISTANBUL Kilim des sept collines

ISBN 978-2-84562-253-1

20 €

Michel Ménaché − Josette Vial

Patchwork amoureux d’Istanbul. Du roman d’une vie à la poésie d’une ville. Constantinople et ses fantômes, après un exil sans retour. Istanbul, ville-monde, saisie dans le tourbillon de son effervescence quotidienne d’aujourd’hui. Les mots déshabillés en poèmes – de l’autre côté du miroir – font écho à la générosité du regard à nu de la photographe.

Textes de Michel Ménaché Photographies de Josette Vial


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