LE JASEUR
BORÉAL
DÉCEMBRE 2019
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VOL.8 NO.1
LE MOT DU COMITÉ Chers lecteurs et lectrices, Ce que vous tenez entre vos mains (qu’il soit en version papier ou électronique) est un exemplaire du Jaseur Boréal, journal des étudiants de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique. Eh oui, après une longue absence, le Jaseur Boréal renaît, tel le phénix, et est particulièrement fier de pouvoir porter votre voix pour au moins deux sessions (cette session-ci comprise…). Au programme cette année : des articles portant sur toute une diversité de thèmes tels que l’environnement, la foresterie, l’économie, la politique, mais aussi des poèmes, des jeux, etc. Il y aura aussi quelques chroniques régulières telles que « Dans les obscurs étages supérieurs du ABP et/ou Kruger », « Cuisto-forestier ; votre chronique culinaire », et bien plus encore (oh yeah ! ! !). Bonne lecture, et merci à tou.te.s celles et ceux qui contribuent de près ou de loin à la réalisation de ce journal. Le comité du Jaseur Boréal.
COMITÉ CO-COORDINATEURS
Anne Voyer
Antoine Harel COLLABORATRICES &
COLLABORATEURS Ann-Julie Lévesque Corentin Laviale
Tristan Clermont GRAPHISTE
Dominique Adam PHOTO DE LA PAGE COUVERTURE
Antoine Harel ÉDITION
Vol 8, n° 1, Décembre 2019 TIRAGE
40 exemplaires DISTRIBUTION
Pavillons Abitibi-Price et Gene-H.-Kruger . La
réalisation du journal est rendue possible grâce à la contribution des associations étudiantes de la FFGG. Merci !
Imprimé sur du papier Rolland Enviro100
TABLE DES MATIÈRES L’AÉFEUL, VOTRE ASSOCIATION Raphael Marcotte
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POUR L’ÉPILOBE Anne Voyer
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PRODUCTIVITÉ = F(DHP) Samuel Jalbert
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POÈMES SYBYLLINS kDc
P. 11
CUISTO-FORESTIER, VOTRE CHRONIQUE CULINAIRE: Évelyne Thiffault
CARI DE LENTILLES ET CHILI AUX HARICOTS
P. 12
LE CASSEUR DE GLACE PhillipBD
P. 14
SOLS FORESTIERS BORÉAUX: UN PIÈGE À CARBONE Véronique Rouleau
P. 15
DANS LES OBSCURS ÉTAGES SUPÉRIEURS DU ABP ET/OU DU KRUGER: Antoine Harel
MARINE DUPERAT
P. 20
LA SEMAINE DES SCIENCES FORESTIÈRES (SSF) Claudelle Bourque
P. 23
LA PAUSE CAFÉ : HANJIE, SUDOKU Dominique Adam et PhillipBD
ET CIE
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L’AÉFEUL, Votre association
RAPHAEL MARCOTTE VP aux communications de l’AÉFEUL
On a tous, en foresterie, entendu ce sigle à un moment ou à un autre. Par contre, beaucoup de ceux qui connaissent le nom ne savent pas ce qu’est l’AEFEUL ni ce qu’elle fait. Comme son nom l’indique, l’Association étudiante de foresterie et environnements de l’UL regroupe tous les étudiants et étudiantes des programmes d’aménagement, d’opérations, de génie du bois et d’environnements dans le but de protéger leurs droits et de représenter leurs intérêts. En pratique, les rôles joués par l’association sont variés et vont de l’organisation d’événements jusqu’à l’aide aux comités comme le Jaseur Boréal ou le P’tit Caaf en passant par la représentation de ses membres au caucus de la CADEUL. L’asso est dirigée par 16 exécutants, élus par et parmi les membres lors d’assemblées générales, qui doivent diriger selon la volonté des membres. Pour mieux comprendre ce que l’association étudiante fait pour vous et pour bien comprendre le rôle de chaque exécutant, voici la liste des exécutants, leur poste et ce qu’ils peuvent faire pour vous. VICKI BOURQUE - PRÉSIDENTE: La présidente a pour mandat de diriger tous les autres exécutants en plus d’assister à diverses rencontres avec l’administration. Elle est l’ultime responsable de l’association. MOÏSE SAMSON — VP EXÉCUTIF: Son rôle officiel est celui d’assister la présidente dans ses tâches, mais en pratique, il aide tous les exécutants dans leurs projets et prend en charge les projets qui ne sont pas attitrés à un poste en particulier. DAVID NORMANDEAU — VP FINANCE : David doit s’assurer que les finances de l’association restent dans le vert, sans toutefois que l’association fasse du profit sur le dos de ses membres. Son rôle serait donc plus spécifiquement de s’assurer que tous les fonds de l’association sont utilisés judicieusement pour les membres. Il est aussi responsable de tout ce qui est lié à l’argent. THOMAS BRETON — VP INTERNE : Son rôle est d’assurer la coordination et la communication entre le comité exécutif et les sous-comités de l’association comme le Ptit Caaf, l’IFSA et la SSF. Thomas préside aussi le comité des finissants. JONATHAN CHAMPAGNE — VP EXTERNE : Jonathan doit représenter les étudiants à l’extérieur de l’association, notamment lors du caucus mensuel de la CADEUL ; une rencontre de toutes les associations pour diriger les projets et les positions de la CADEUL.
RAPHAEL MARCOTTE — VP COMMUNICATIONS : Raphael a pour rôle d’assurer la communication entre l’association et les membres. Il s’occupe des réseaux sociaux de l’association, de la messagerie, du tableau dans la cafétéria et il écrit présentement sa description à la troisième personne. Il trouve que c’est bizarre. STÉPHANIE TOUSIGNANT — VP PÉDAGOGIQUE : Elle doit assurer la communication avec les professeurs, faire imprimer toutes les notes de cours, s’occuper des évaluations de cours et elle prend en charge tous les dossiers d’ordre pédagogique. Stéphanie s’occupe aussi de la formation des comités de programmes. SANDRINE PAQUIN — VP SOCIOCULTUREL : Sandrine s’occupe de l’organisation d’événements sociaux, comme les Saoul-Bois ou culturels comme la cabane à sucre. La longueur de la description de son poste ne rend toutefois pas justice à la quantité phénoménale de travail qu’elle doit faire. FRÉDÉRIQUE BERGERON — VP SPORTS : Frédérique s’occupe de l’organisation d’activités sportives pour les membres. EMMANUEL JEAN – VP FESTIF : Emmanuel doit s’assurer du bon déroulement de toutes les activités auxquelles la délégation FORGEO participe lors du festival de sciences et génie et lors des jeux inter facultaires. Il est le motivateur officiel lors de ces événements, mais il continue d’avoir une mauvaise influence sur les membres toute l’année. LAURENCE BERGERON — VP INSTITUTIONNELLE : Laurence s’assure de la communication entre l’association et les institutions. Elle a un rôle de greffière et elle s’occupe de remplir une foule de documents nécessaires au bon fonctionnement de l’association. Son poste est sans doute le plus sousestimé en termes d’importance. MONICA GAGNIER - VP DÉVELOPPEMENT DURABLE : Le rôle de Monica est d’assurer que les événements de l’AEFEUL soient en phase avec les principes du développement durable. Elle organise aussi des activités de sensibilisation et de confection écologique. SIMON SAINT-LAURENT (OPÉ), ALEXIS OUELLET (AMÉNAGEMENT), MAXIME PARADIS (GÉNIE DU BOIS) ET JÉRÉMIE BOUTIN (ENVIRONNEMENTS) — VP RECRUES : Les VP recrues sont des représentants de première année de chaque programme. Leur présence permet une représentation des intérêts des étudiants de première année puisque les élections pour l’année suivante se font à la fin de la session d’hiver. Pour connaitre plus personnellement les exécutants, visitez la page Instagram de l’AEFEUL où un portrait de chaque exécutant est dressé. Pour ne rien manquer des événements de votre association, suivez les pages Facebook de l’AEFEUL et Abitibi-Price FFGG. Si vous avez des questions ou que vous voulez discuter avec nous, venez au local d’association au fond du salon étudiant adjacent à la cafétéria !
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Pour l’épilobe Tu prends naissance dans un sol froid T’y dresses lentement, incertaine Tu virevoltes et tu vivotes Tu vis un peu
ANNE VOYER
Étudiante à la maîtrise en sciences forestières
Puis, viennent les chaudes journées Viennent les rayonnantes caresses Elles donnent courage à ton corps nu Longuement nu À force d’amour, tu grandis Et bientôt, tu donnes naissance À de ravissantes fleurs Pourpre-éphémère L’automne emporte tes couleurs Te revoilà tige fragile Tu couvres ton corps d’une laine Fantomatique La béance est lourde et tu ploies Mais tu ne t’essouffleras pas Car même en plein cœur de l’hiver Tu gardes espoir Car même en plein cœur de l’hiver Je te sais belle
Productivité = f(DHP) Les entrepreneurs forestiers du Québec sont soumis à de nombreuses tensions dans la gestion de leur entreprise. L’un de ces éléments est leur vulnérabilité face aux peuplements qu’ils doivent récolter. La qualité du peuplement à traiter influence la rentabilité de leur entreprise de manière drastique. Je me fais aujourd’hui le messager de leur impuissance. SAMUEL JALBERT Étudiant en aménagement et environnement forestiers samuel.jalbert.1@ulaval.ca
Mise en contexte Les opérations de récolte en forêt boréale publique au Québec sont majoritairement effectuées par des abatteuses multifonctionnelles (système en bois court). Ces équipements sont majoritairement opérés par de petites entreprises familiales, dirigées par des québécois qui sont souvent peu scolarisés. Ils passent la majeure partie de l’année à travailler pour un seul donneur d’ouvrage (client), dont ils sont économiquement dépendants. Il faut lire l’excellent ouvrage de Luc Lebel de 2010 (L’entrepreneur forestier – véritable propriétaire-dirigeant de PME) à ce sujet, pour en avoir un portrait global. Le pouvoir de négociation de ces petits entrepreneurs a certes augmenté à la suite de la crise forestière, à cause de la rareté de ceux-ci. Cependant, ils restent largement impuissants face à de grandes entreprises, parfois multinationales, un ministère hautement bureaucratisé, et une forêt souvent de piètre qualité. Ces petites entreprises sont le premier maillon d’une chaine de mise en valeur des produits du bois, filière qui est tributaire de leur santé économique. En termes d’ordre de grandeur, pour la forêt résineuse, le coût pour le service d’abatage, de façonnage et de débardage oscille autour de 20 $ par mètre cube solide, alors que le coût total pour amener le bois à l’usine oscille entre 40 et 60 $ par mètre cube solide. Les opérations de récolte, à elles seules, peuvent donc représenter entre 33% et 50% du coût de revient du bois à l’usine. C’est dire toute l’importance économique de l’étape de récolte, qui est trop souvent négligée.
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D’autre part, les calculs des gestionnaires sont trop souvent basés sur une moyenne par mètre cube, sans beaucoup d’égard à la variabilité des coûts pour chacun de ces mètres cubes, considérés individuellement. Le volume par tige a un impact très important sur la productivité d’une abatteuse multifonctionnelle, et donc sur le coût réel des opérations de récolte. Cet élément, quoi que soulevé à l’occasion par les professeurs de la faculté et les différents intervenants du milieu, est tout de même insuffisamment compris, du point de vue des entrepreneurs. Nous n’arriverons jamais à avoir une vraie foresterie intelligente au Québec sans tenir compte de leur réalité complexe et de l’importance qu’ils ont dans l’industrie du bois. Voilà pourquoi je vous propose aujourd’hui une petite étude théorique de l’impact du diamètre à hauteur de poitrine (DHP) des arbres sur la productivité d’une abatteuse multifonctionnelle, et donc sur le coût de revient des opérations de récolte. On abordera aussi au passage le bilan carbone et l’impact sur la possibilité forestière.
à une entrée pour le sapin baumier à la Forêt Montmorency, qui a été produit par Jean Bégin. La production horaire d’une multifonctionnelle, en arbres par heure, a été estimée et ajustée en fonction du DHP par moi-même, ayant près de dix ans d’expérience comme opérateur. Cette valeur a volontairement été fixée à un niveau raisonnable, car il ne faut pas baser une étude de productivité sur la performance des meilleurs opérateurs seulement. La production journalière est basée sur un horaire de 10 heures machine productive par quart de travail en moyenne. L’horaire de travail est établi à 8,5 quarts par semaine, c’està-dire du lundi matin au vendredi midi, 24h/24h. Le montant forfaitaire versé à l’entrepreneur est de 20 $ par mètre cube solide. La consommation de carburant moyenne est estimée et ajustée en fonction du DHP, pour une Ponsse Scorpion King avec une tête H7, qui est une abatteuse économe en carburant et très performante. Enfin, j’ai pris pour acquis qu’un entrepreneur forestier, qui possède une multifonctionnelle et un transporteur, doit générer un revenu d’environ 25 000 $ par semaine pour atteindre le seuil de rentabilité. Cette Hypothèses de calcul donnée est basée sur mon expérience passée comme entrepreneur et mes J’ai posé plusieurs hypothèses de calcul discussions avec mon père, Jean-Guy que je présente en rafale. Le volume d’un Jalbert, qui est entrepreneur forestier arbre étant fonction du diamètre et de depuis 25 ans. la hauteur, j’ai utilisé le tarif de cubage
Résultats et analyse On constate que le DHP a un impact énorme sur le coût de revient de la récolte (tableau 1 et figure 1). Il est inutile de préciser qu’aucun industriel n’est intéressé à débourser plus de 90 $ par mètre cube pour faire récolter un peuplement résineux. Si on se place du point de vue de l’entrepreneur, le seuil de rentabilité pour la récolte d’un peuplement théorique Figure 1: Coût de revient de la récolte en fonction du DHP dont les arbres auraient tous le même DHP, se situe à la classe de 16 cm. Évidemment, de tels peuplements n’existent pas. Cependant, on peut facilement déduire qu’un peuplement dont la majorité des tiges ont 16 cm de DHP ou plus est rentable pour l’entrepreneur. À l’inverse, à mesure que le diamètre moyen d’un peuplement diminue en bas de 16 cm, la rentabilité diminue de manière catastrophique. À titre d’exemple, les revenus d’un entrepreneur forestier peuvent être en dessous de 20 000 $ par semaine (production < 1000 mètres cubes) pendant plusieurs semaines, lorsqu’il opère dans des secteurs où la forêt est peu productive ou prémature. Ces mêmes revenus peuvent dépasser 40 000 $ / semaine (production > 2000 mètres cubes) quand il a la chance de bûcher de la « talle », comme on dit Tableau 1: Étapes de calcul et résultats: coût réel de la récolte et consommation de carburant par mètre cube en fonction du DHP des arbres
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La rentabilité des opérations n’est évidemment pas le seul élément à considérer en aménagement forestier. J’aimerais attirer votre attention sur la quantité de carburant consommée par l’abatteuse pour récolter un mètre cube de bois, lorsque le diamètre des arbres diminue en bas de 16 cm (tableau 1). Dans un contexte où l’on prêche que les produits du bois peuvent contribuer à lutter contre les changements climatiques, il faut absolument que les décideurs aillent plus loin que la simple ligne politique. Les mètres cubes qui sont récoltés dans des peuplements de petites tiges marchandes provoquent des émissions de gaz à effet de serre qui portent à réflexion sur le bilan total de cette opération. Je ne présente pas la consommation de carburant du transporteur, car cette valeur varie en fonction d’autres variables que le DHP. Un autre élément que je trouve très important d’aborder est le lien avec la possibilité forestière. Lorsqu’on récolte des strates prématures en coupe totale, on récolte un volume à l’hectare qui est inférieur à celui d’un peuplement mature, tel que considéré dans les hypothèses du calcul de possibilité forestière. Ce phénomène peut entrainer un effet de cercle vicieux sur la possibilité forestière, car en récoltant plus de superficie aujourd’hui pour atteindre le volume ciblé, on hypothèque les superficies qui étaient destinées à être récoltées à des périodes ultérieures, et ce avec plus de volume à l’hectare. J’ai bien peur que des unités d’aménagement où l’on peine à trouver suffisamment de peuplements matures pour atteindre les possibilités calculées, puissent entrer dans ce genre de cycle regrettable, ce qui pourrait grandement compromettre la possibilité forestière dans les prochaines décennies.
Conclusion Évidemment, il s’agit ici d’une analyse superficielle, sans revue de littérature, qui est loin de prendre en compte tous les éléments pertinents dans la prise de décision de l’aménagiste. Le but n’est pas de présenter une réflexion complète, mais bien de stimuler la réflexion, et surtout de passer un message sur un élément bien précis : l’impact majeur de la récolte de peuplements composés de petites tiges marchandes sur les entrepreneurs forestiers, et sur
la filière bois dans son ensemble. Je laisse à d’autres qui s’y connaissent plus que moi le souci d’évaluer les impacts du diamètre des billes sur la rentabilité de la transformation. On peut aussi lire entre les lignes une proposition à établir un système de rémunération complètement différent pour les entrepreneurs forestiers du Québec. Le Bureau de mise en marché des bois (BMMB) a pour mission de refléter la juste valeur d’un peuplement dans les échanges entre les industriels et le gouvernement. Les grands oubliés du nouveau régime forestier sont les entrepreneurs, qui, dans la majorité des cas, reçoivent le même montant forfaitaire par mètre cube, indépendamment de la qualité du peuplement. Si les aménagistes jugent qu’un peuplement donné doit être récolté malgré sa faible rentabilité au niveau opérationnel, ce n’est certainement pas le problème des entrepreneurs. Les entrepreneurs forestiers doivent être rémunérés pour les services qu’ils fournissent réellement, indépendamment des enjeux qui peuvent imposer des choix d’aménagement particuliers. Il faut aussi voir cette prise de parole comme un plaidoyer en faveur d’un traitement sylvicole qui est généralement très bien vu par les entrepreneurs : la coupe avec protection des petites tiges marchandes (CPPTM). Ce traitement, lorsqu’il est bien utilisé, avec toutes les considérations sylvicoles qu’il implique, est un formidable outil pour concilier les enjeux de l’aménagement écosystémique avec les enjeux économiques. Au lieu de la coupe totale (CPRS et CPHRS), la CPPTM devrait être le traitement « par défaut » pour tous les peuplements résineux de structure irrégulière. J’oserais même avancer qu’à mes yeux, le diamètre marchand pour les tiges résineuses devrait peut-être passer de la classe de 10 centimètres à la classe de 12 centimètres. Il me semble que l’on devrait faire une distinction entre le diamètre minimal à partir duquel on calcule le volume d’une tige donnée (9,1 cm), et le DHP minimal à partir duquel on considère qu’un arbre est marchand. Comme dirait mon père, avec un mélange de frustration et d’amour pour la forêt ; « Si on veut en avoir d’la belle forêt un jour, y faut ben en laisser deboutte des petits arbres! »
Les érables et les charmes chuchotent doucement Agitent leurs feuilles sous la caresse du vent Penchant leurs branches au dessus de la route
humides
Sur le front du voyageur ils projettent quelques gouttes Ses bottes régulièrement martèlent la terre boueuse Une ombre le suit, discrète et silencieuse La pluie est passée, elle a laissé en souvenir Son odeur d’humus qui le fait sourire La nuit est belle, et tandis qu’il foule La piste humide, de calme et de beauté son cœur se saoule.
kDc, Poèmes Sibyllins
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Cuisto-Forestier Votre chronique culinaire ÉVELYNE THIFFAULT
Professeure adjointe à la faculté FFGG
Cari de lentille & chili aux haricots Ingrédients principaux: - Canne de 540 ml de lentilles vertes - Canne de 450 ml de haricots mélangés Note : Pour le groupe d’Excursion en écologie forestière, je me fie au barème suivant pour déterminer la quantité de cannes à acheter, en fonction de la composition du groupe :
***Alternativement, le nombre de cannes peut être déterminé par la quantité maximale de cannes que la prof est « willing » de charrier de l’épicerie jusqu’au coffre de son char, puis de son char à sa cuisine.
Cari de lentille 1.
Dans une grande casserole à fond épais, faire revenir à feux doux un gros oignon coupé en morceaux. S’interroger sur l’expression « faire revenir ». Ne pas en revenir.
2.
Avec l’ouvre-boîte dysfonctionnel offert par ta mère quand tu est partie vivre en appartement pour la première fois en 1997, mais que tu n’as jamais pris la peine de remplacer par un fonctionnel, ouvrir les cannes en sacrant. Quand la moitié des annes est ouverte, décider que c’est suffisant et que les étudiants n’auront qu’à manger plus de riz pour compenser.
3.
Égoutter les lentilles en vidant le contenu des cannes dasn une passoire et les rincer. Perdre une partie des lentilles à travers les trous de la passoire.
4.
Avoir un remords de conscience et ouvrir le reste des cannes (en sacrant aussi). Les égoutter, les rincer et en perdre encore une partie à travers la passoire. Se faire une note mentale d’aller voir sur le site de Ricardo comment il fait pour les lentilles. Oublier de le faire.
5.
Mettre les lentilles dans le chaudron avec l’oignon (qui lui, doit en être revenu).
6.
Ajouter deux cannes de pâte de tomates (156 ml).
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9.
Ajouter des cannes de lait de coco (400 ml) jusqu’à ce que le contenu du chaudron atteigne à peu près 8 sur l’Échelle de décomposition de Von Post (ça va varier entre 3 et 5 cannes). Ajouter de la poudre de cari et de la coriande jusqu’à ce que le contenu du chaudron atteigne 10 YR 6/4 sur la charte des couleurs de Munsell (la charte est disponible au prêt d’équipement du département des sciences du bois et de la forêt). Laisser mijoter assez longtemps pour pouvoir écouter 2 vieux épisodes de la série « Friends » (« Pivot! Pivot! Pivot!»)
Chili aux haricots 1.
2.
3.
Faire les étapes 1 à 5 de la recette de cari, mais avec les cannes de haricots. Ajouter 2 cannes de tomates étuvées (796 ml); 1 pot de salsa (418 ml) douce, moyenne ou piquante selon votre feeling du moment; 1 canne de mandarines dans leur sirop (284 ml); poudre de chili, paprika et poivre de cayenne. Le contenu du chaudron devrait atteindre 5 ou 6 sur l’Échelle de décomposition de Von Post et 2.5 YR 3/4 sur la charte de Munsell. Laisser mijoter assez longtemps pour pouvoir écouter 2 autres vieux épisodes de la série « Friends » (« Just so you know, it’s not that common, it doesn’t happen to every guy and it’s a big deal! »).
Servir les deux plats avec des pains naan et pita : s’assurer de calculer le nombre de pains de manière à en avoir soit trop peu (été 2017) ou beaucoup trop (été 2019), de la crème sure, et du riz. Pour le riz : changer d’idée 8 fois sur la quantité à acheter; finir par acheter le plus gros sac disponible à l’épicerie, plus 2-3 petits sacs au cas ; jeter l’emballage avant de noter les indications de cuisson ; confier la gestion du riz à son auxiliaire d’enseignement. Se rendre compte que son auxiliaire d’enseignement n’a jamais cuit de riz de sa vie. Laisser son auxiliaire d’enseignement trouver une excuse pour expliquer la mauvaise cuisson du riz. Pendant la cuisson du riz, rajouter de l’eau pendant que personne ne regarde parce que vous trouvez qu’il en manque ; jouer l’innocent quand quelqu’un s’aperçoit que le surplus d’eau ralentit la cuisson ; s’assurer d’utiliser un chaudron au fond suffisamment mince pour que le riz colle au fond et nécessite 90 minutes de frottage intense). Pour la recette de pain de maïs, vous pouvez la trouver ici : https://www.budgetbytes.com/sweet-potato-cornbread/ VOL.8 | NO.1
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Le casseur de glace
Sols forestiers boréaux: un piège à carbone VÉRONIQUE ROULEAU Étudiante à la maîtrise en sciences forestières
Dans le cadre de ma maîtrise en sciences forestières, je fais en ce moment un stage de recherche au Center for Ecology & Hydrology à Lancaster, au Royaume-Uni. Afin de comprendre pourquoi je suis là-bas, je dois d’abord vous expliquer sur quoi porte mon projet de maîtrise : le carbone. D’abord, c’est quoi du carbone? Il s’agit d’un élément chimique très abondant dans l’environnement naturel qui peut prendre plusieurs formes (solide, liquide, gazeux). Lorsqu’on parle de séquestrer du carbone, cela signifie que l’on souhaite diminuer sa quantité sous forme de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère et augmenter ses stocks sous forme de carbone organique (i.e. fabriqué par un organisme) dans des puits naturels, tels que les océans et les sols terrestres. Le cycle du carbone dans l’atmosphère est un cycle fermé ; cela signifie qu’en augmentant la quantité de carbone que l’on séquestre dans les sols cela engendre une réduction de la quantité de carbone dans l’atmosphère. Plus précisément, les sols des forêts boréales représentent un énorme puits de carbone, car il s’agit du biome terrestre séquestrant les plus grands stocks de carbone à l’échelle planétaire (174 Gt de carbone) (Pan et al., 2011). Il n’est pas seulement intéressant de séquestrer du carbone dans les sols uniquement dans une optique de lutte aux changements climatiques, mais aussi, car le carbone est un élément fondamental de la fertilité et de la santé des sols (Brady and Weil, 2008). Mais comment ça marche? Tout d’abord, tout le carbone organique dans les sols dérive de la photosynthèse des plantes. Ces dernières captent le CO2 atmosphérique, l’intègrent sous forme de carbone organique dans leur propre biomasse (et sera intégré au sol sous forme de litière) ou l’envoient vers leurs racines. De là, soit le carbone est intégré dans la biomasse des racines, soit il est déposé dans les horizons profonds du sol par rhizodéposition, soit il est alloué aux microorganismes associés aux racines des plantes (principalement des champignons et des bactéries) qui eux-mêmes vont soit l’intégrer dans leur VOL.8 | NO.1
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propre biomasse, soit le relâcher dans le sol. Ainsi, il est estimé que 50 à 70% du carbone stocké dans les sols boréaux dérive des racines vivantes et des microorganismes qui leur sont associés (Clemmensen et al., 2013; Kögel-Knabner, 2002). Conséquemment, plus on descend dans l’horizon de sol et plus une grande quantité de carbone sera stockée. Aussi, le temps de séjour du carbone est quatre fois plus long dans la matrice de sol minérale, c’est-à-dire de 30 à 100 cm de profondeur environ, que dans la couche de sol organique, d’environ 0 à 30 cm de profondeur (Chenu et al., 2019).
Tout d’abord, la stabilisation chimique est inhérente à la composition de la matière organique; il s’agit de molécules qui sont dites « récalcitrantes », c’est-à-dire qui sont résistante à la décomposition par les microorganismes. C’est le cas par exemple de certains tanins et de la lignine.
(J.D Jastrow and R.M Miller, 1997)
(Kögel-Knaber, 2017) À noter : on parle souvent du contenu en matière organique dans les sols et du contenu en carbone organique de façon interchangeable, car la matière organique du sol est majoritairement composée de carbone. Stabilité du carbone Néanmoins, si l’on souhaite que la séquestration de carbone dans les sols soit efficace afin de lutter contre les changements du climat, il est nécessaire que ce carbone y soit pour longtemps. Ce qui m’amène à la notion de « stabilité » du carbone dans les sols : cela réfère à sa protection contre la décomposition par les microorganismes, c’est-à-dire comment la matière organique peut se protéger pour ne pas être « mangée » par eux. En effet, si ce carbone est « mangé » par les microorganismes, ces derniers vont en réémettre une partie sous forme de CO2 à l’atmosphère. Il existe 4 mécanismes connus de stabilisation de la matière organique dans les sols :
La stabilisation physique fait référence à la protection de la matière organique par occlusion dans un agrégat de particules de sol minéral. Ainsi protégé, ce carbone est inaccessible pour les microorganismes du sol.
(J.D Jastrow and R.M Miller, 1997) La stabilisation physico-chimique concerne l’adsorption de la matière organique sur une particule de sol minéral. En d’autres mots, il s’agit d’une liaison intime très forte entre une particule de sol minéral et de la matière organique et beaucoup d’énergie est nécessaire afin de les dissocier.
(J.D Jastrow and R.M Miller, 1997)
Enfin, le carbone organique peut aussi être stabilisé dans les sols qui sont gelés en permanence; le pergélisol. Ce mécanisme de stabilisation est toutefois moins pertinent pour l’étude de la stabilisation du carbone dans les sols aménagés.
Généralement, les scientifiques les divisent en 3 fractions :
On comprend ainsi que certains mécanismes de stabilisation sont plus forts que d’autres, ce qui affecte le temps de résidence moyen du carbone dans les sols. Ce dernier est à court terme pour la stabilisation chimique (quelques années), à moyen terme pour la stabilisation physiques (des décennies) et à long terme pour la stabilisation physico-chimique (des siècles) (Kögel‐Knabner et al., 2008).
2. Une fraction stable qui cycle lentement;
Comment le mesurer? C’est la grande question que la communauté scientifique internationale se pose actuellement! Traditionnellement, on mesure les stocks de carbone dans le sol, c’est-à-dire la quantité de carbone qui s’y trouve. Cette mesure ne nous informe cependant pas sur la stabilité de ce carbone, donc s’il va y demeurer pour longtemps ou pas. En mesurant la stabilité du carbone dans les sols, on cherche en fait à quantifier les différents « pools » de carbone. Les pools de carbone représentent les différents temps de résidence du carbone dans les sols.
1. Une fraction labile qui cycle rapidement, donc le carbone est rapidement retourné sous forme de CO2 à l’atmosphère;
3. Une fraction très stable dont le carbone cycle très très lentement et qui peut y demeurer pendant des millénaires. Puisque différents mécanismes sont responsables des différents temps de résidence du carbone dans les sols, il est nécessaire d’utiliser des méthodes qui tentent de représenter chacun de ces mécanismes. En bref, il est nécessaire d’utiliser une combinaison de différentes approches afin de caractériser chacune des fractions de carbone pour avoir un portrait complet de la stabilité du carbone dans les sols. L’étude de la stabilité du carbone est néanmoins difficile en raison de la complexité des processus impliqués, des difficultés associées à la mesure des changements et au nombre de facteurs qui affectent les stocks de carbone organique du sol (Clarke et al., 2015). Si le sujet vous intéresse, von Lützow et al. (2007) ont publié une revue de littérature très complète sur le sujet!
(David Paré, Service canadien des forêts)
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Mon projet L’objectif de mon projet de maîtrise est de mieux comprendre les phénomènes qui régissent la stabilisation du carbone à long terme dans les sols forestiers boréaux afin d’améliorer en ce sens les pratiques sylvicoles actuellement utilisées au Québec. Plus précisément, mon site d’étude est la forêt Montmorency. Je cherche donc à quantifier la stabilité du carbone dans les sols en fonction de différentes pratiques sylvicoles (i.e. coupe totale, coupe partielle, récolte de biomasse après coupe, peuplements témoins de seconde venue et vieilles forêts) et d’identifier les facteurs favorisant la séquestration à long terme de carbone dans ces sols. Pourquoi aller au Royaume-Uni? Parce qu’ils ont de gros problèmes de carbone! Le Royaume-Uni a perdu 84% de ses sols fertiles depuis 1850 en raison de la production agricole intensive et de la pollution industrielle et continue d’en perdre 0,4% par année (Emmett et al. 2010). Les pratiques agricoles actuellement utilisées dans ce pays contribuent grandement à la dégradation du carbone dans les sols et beaucoup d’argent est investi en recherche afin de contrer ces pertes (£5 millions par année en date de 2009, soit plus de 8 millions en dollars canadiens) (Defra, 2009). Un acteur important de ces activités de recherche est le Center for Ecology & Hydrology. En effet, le CEH est un organisme de recherche de classe mondiale qui s’intéresse aux écosystèmes terrestres et d’eau douce et à leurs interactions avec l’atmosphère (CEH, 2019). Plus précisément, mes activités de recherche s’inscrivent dans le cadre du projet qui s’intéresse au rôle des interactions biotiques et abiotiques dans la stabilisation et la persistance du carbone organique du sol (CEH, 2019). Je profite donc de leur expertise et de leurs infrastructures afin de procéder à certaines analyses sur mes propres échantillons de sols provenant de la Forêt Montmorency. En somme, les phénomènes régissant la stabilisation du carbone dans les sols forestiers sont encore mal compris et beaucoup de recherche demeure à faire sur le sujet. Plusieurs scientifiques au Québec et ailleurs dans le monde s’y intéressent déjà et une compréhension plus claire devrait sans doute émerger au courant des prochaines années. J’espère que mon projet permettra de faire avancer nos connaissances sur le sujet, plus particulièrement en milieu forestier québécois.
Source Brady, N.C., Weil, R.R., 2008. The nature and properties of soils, 14th ed. ed. Pearson/Prentice Hall, Upper Saddle River. Center for Ecology & Hydrology (CEH). 2019. Center for Ecology & Hydrology, Natural Environment Research Council [en ligne]. Disponible à https://www.ceh.ac.uk/ [cité le 27-10-2019]. Chenu, C., Angers, D.A., Barré, P., Derrien, D., Arrouays, D., Balesdent, J., 2019. Increasing organic stocks in agricultural soils: Knowledge gaps and potential innovations. Soil Tillage Res. 188, 41–52. https://doi. org/10.1016/j.still.2018.04.011 Clarke, N., Gundersen, P., Jönsson-Belyazid, U., Kjønaas, O.J., Persson, T., Sigurdsson, B.D., Stupak, I., Vesterdal, L., 2015. Influence of different tree-harvesting intensities on forest soil carbon stocks in boreal and northern temperate forest ecosystems. For. Ecol. Manag. 351, 9–19. https://doi.org/10.1016/j.foreco.2015.04.034 Clemmensen, K.E., Bahr, A., Ovaskainen, O., Dahlberg, A., Ekblad, A., Wallander, H., Stenlid, J., Finlay, R.D., Wardle, D.A., Lindahl, B.D., 2013. Roots and Associated Fungi Drive Long-Term Carbon Sequestration in Boreal Forest. Science 339, 1615–1618. https://doi.org/10.1126/science.1231923 Defra. 2009. Safeguarding ou Soils, A Strategy for England [en ligne]. Disponible à https://assets. publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/69261/pb13297-soilstrategy-090910.pdf [cité le 27-10-2019]. Emmett, B.A., Reynolds, B., Chamberlain, P.M., Rowe, E., Spurgeon, D., Brittain, S.A., Frogbrook, Z., Hughes, S., Lawlor, A.J., Poskitt, J., Potter, E., Robinson, D.A., Scott, A., Wood, C., Woods, C. 2010. CS Technical Report No. 9/07, Soils Report form 2007 [en ligne]. Disponible à http://nora.nerc.ac.uk/id/eprint/9354/1/CS_UK_2007_ TR9.pdf [cité le 27-10-2019]. Jastrow, J.D. and Miller, R.M, 1997. Chapter 15 : Soil Aggregate Stabilization and Carbon Sequestration: Feedbacks through Organomineral Associations, in: Soil Processes and the Carbon Cycle. CRC Press. Kögel-Knabner, I., 2017. The macromolecular organic composition of plant and microbial residues as inputs to soil organic matter: Fourteen years on. Soil Biol. Biochem. 105, A3–A8. https://doi.org/10.1016/j. soilbio.2016.08.011 Kögel-Knabner, I., 2002. The macromolecular organic composition of plant and microbial residues as inputs to soil organic matter. Soil Biol. Biochem. 34, 139–162. https://doi.org/10.1016/S0038-0717(01)00158-4 Kögel-Knabner, I., Guggenberger, G., Kleber, M., Kandeler, E., Kalbitz, K., Scheu, S., Eusterhues, K., Leinweber, P., 2008. Organo-mineral associations in temperate soils: Integrating biology, mineralogy, and organic matter chemistry. J. Plant Nutr. Soil Sci. 171, 61–82. https://doi.org/10.1002/jpln.200700048 Pan, Y., Birdsey, R.A., Fang, J., Houghton, R., Kauppi, P.E., Kurz, W.A., Phillips, O.L., Shvidenko, A., Lewis, S.L., Canadell, J.G., Ciais, P., Jackson, R.B., Pacala, S.W., McGuire, A.D., Piao, S., Rautiainen, A., Sitch, S., Hayes, D., 2011. A Large and Persistent Carbon Sink in the World’s Forests. Science 333, 988–993. https://doi. org/10.1126/science.1201609
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Dans les obscurs étages supérieurs du ABP et/ou Kruger Marine Duperat, candidate au Doctorat en sciences forestières avec Jean-Claude Ruel (Pr., Ing. F.) et Barry Gardiner (PhD). Titre du doctorat : Effet de l’hétérogénéité du peuplement sur les __ charges imposées par le vent dans une sapinière à bouleau blanc. Et avant : Licence en Sciences du Vivant et Master Forêt Agronomie et __ Gestion des Écosystèmes à l’Université de Lorraine (Nancy, France).
C’est quoi ton sujet ? « En gros, j’étudie l’impact d’une charge de vent sur le tronc des sapins baumiers dans 3 conditions : avant éclaircie, après éclaircie et durant l’hiver. Ce qu’on regarde vraiment, c’est la flexion du tronc pour une charge de vent donnée. Pour ça, on utilise des jauges de contrainte fixées aux troncs et des anémomètres accrochés à hauteur de canopée. Le tout sert à trouver des coefficients propres au sapin baumier qu’on pourrait intégrer dans un modèle de prévision des risques de chablis. » Choix du sujet : « Ça a été un gros coup de hasard ! J’avais déjà un sujet de doctorat en France, mais toutes mes démarches pour trouver du financement sont restées vaines. Un jour, j’ai reçu un courriel d’une ancienne collègue de l’ONF qui me transférait l’offre de doctorat de Jean-Claude. J’ai tenté ma chance et la semaine suivante, j’ai reçu un courriel de Jean-Claude qui me proposait d’en discuter par Skype. » Le début du doctorat : « Je n’ai eu que 4 mois pour annoncer à ma famille que je partais vivre 3 ans au Québec, revendre toutes mes affaires et faire les démarches nécessaires pour immigrer. Avec mon chum, on est arrivés en pleine tempête fin décembre 2017. Les premiers mois ont été difficiles. Ici, la maîtrise de recherche c’est un mini-doctorat. En France, ce qu’on appelle une maîtrise de recherche ce sont des cours avec un stage de recherche de 6 mois. Donc évidemment, j’ai été totalement larguée au début. On attendait de moi que je sois quasiment tout de suite autonome et débrouillarde, dans un lieu où je n’avais aucun contact et dans un domaine qui n’était pas vraiment le mien. Mais surtout, il fallait que j’arrive à monter rapidement toute l’expérimentation du projet, dans laquelle je n’avais absolument aucune expertise. Pour sûr, c’était un gros défi, mais ça a été super formateur ! Merci d’ailleurs à Olivier qui terminait sa maîtrise quand je suis arrivée et qui m’a énormément épaulée à mes débuts, et à François Larochelle qui m’a littéralement sauvée pour la mise en place et le suivi de mon dispositif
Peux-tu me parler de ce fameux dispositif expérimental ? « On a installé le dispositif dans une sapinière de la Forêt Montmorency. Il y a une tour de 10 m en aluminium qu’on a ancrée dans la roche. Elle sert aux anémomètres et aux sondes de température. Pour suivre la flexion des troncs lorsqu’il y a du vent, on a installé des jauges de contrainte sur 15 sapins baumiers. Les arbres et la tour sont reliés à deux acquisiteurs de données qui enregistrent les données 5 fois par seconde, à longueur d’année. Ça fait un sacré paquet de données ! Vu qu’on est dans le bois et loin du pavillon d’accueil, il a fallu également installer 6 panneaux solaires et 18 batteries marines pour assurer l’alimentation de toute l’expérimentation. Une fois le tout installé et fonctionnel, il a fallu calibrer les jauges. Pour ça, on doit accrocher un câble en haut de l’arbre et treuiller l’arbre avec une force connue pour simuler une charge de vent. On doit faire ça en été et en hiver pour s’assurer que le froid et les caractéristiques internes de l’arbre ne biaisent pas notre prise de données. »
Où en êtes-vous rendus en ce moment ? : « Je termine ma troisième année. Ça a été très long de réussir à avoir nos premières données viables : on a eu un retard de quasiment un an à cause des aléas du terrain et du matériel parfois vétuste qu’on doit utiliser. Mais tout va bien maintenant, je viens de soumettre mon premier article et il me reste encore un an pour analyser mes données, rédiger mes deux autres articles, les soumettre puis mettre en forme ma thèse. Les mois passent à une vitesse folle et je ne veux pas passer ma vie au doctorat (rires) ! » Le petit moment de stress : « Dans les coups de stress positif, fin de ma première session, en juillet 2017, Jean-Claude m’a emmenée au Colorado avec lui pour assister à la 8th Conference on Wind and Trees. C’est une grosse conférence qui a lieu aux trois ans et qui réunit pas mal tous les experts mondiaux sur les interactions ventarbre (chablis, thigmomorphogenese, etc).
Dispositif expérimental pour l’évaluation des charges imposées par le vent dans la Forêt Montmorency (Duperat, 2019)
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J’étais censée présenter un poster, mais la session a été annulée et on m’annoncé que je ferais une présentation à la place. Je venais à peine de finir mon proposé de recherche et je me suis retrouvée devant tous ces chercheurs internationaux, soit quasiment l’intégralité de ma bibliographie, qui était assise dans la salle, et moi qui (en bonne Française) n’étais pas du tout à l’aise en anglais. Ça a été un coup de stress énorme, mais également une expérience incroyable. »
Chablis d’un sapin baumier au tronc fourchu à la Forêt Montmorency (Duperat, 2019)
La suite : « (Rires). Vu mon état de fatigue et de « décrépitude avancée », je dirais : tenir le coup ! Mais surtout finir mon doc en dedans des quatre ans et penser à l’après doc. Je suis inscrite à la prochaine Conference on Wind and Trees qui aura lieu en février en Nouvelle-Zélande et durant laquelle je présenterai mes résultats de doctorat. Je profiterai du fait d’être sur place pour améliorer mon anglais et qui sait, peut-être magasiner un postdoc ! » D’où vient la page Facebook Maudit Chablis ? « Au départ, je cherchais juste un moyen de tenir mes proches informés de l’avancée de mon doctorat. Mais en parlant avec du monde, je me suis rendu compte que ça pouvait intéresser d’autres personnes. J’ai donc lancé une page Facebook. J’étais persuadée que mon projet n’intéresserait personne en dehors de ma famille, mais au final ça a marché plus que je ne le pensais, alors je continue de publier régulièrement sur la page. » Un conseil pour les personnes qui veulent s’orienter vers un doctorat ? « Fuyez ! Non je rigole, choisissez bien votre encadrant et prenez le temps de magasiner votre sujet en fonction de vos goûts. Vous allez être en relation pendant 3-4 ans minimum avec ce sujet et cet encadrant, alors je pense que c’est un point vraiment important. Et aussi, soyez bien entourés et interagissez avec les autres étudiants/chercheurs, c’est important pour la science, mais aussi pour votre santé mentale » Professeur, candidats à la maîtrise ou au doctorat, profesionnel de recherche ou tout simplement étudiant au PFE, vous voulez participez à cette chronique ? Contactez moi pour une entrevue de 30 à 45 min ou pour obtenir la liste des questions ! antoine.harel.1@ulaval.ca
La Semaine des sciences forestières (SSF) La SSF est un comité composé uniquement d’étudiants bénévoles de la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique. Cette initiative étudiante fêtera cette année ses 51 ans d’existence et a pour mission de vulgariser les divers enjeux de la foresterie auprès du grand public. Par le biais de plusieurs évènements organisés et concentrés lors d’une semaine au courant de l’année, la SSF fait la promotion des multiples facettes existantes de la foresterie et encourage les échanges entre les professionnels du domaine, les chercheurs, les étudiants et le grand public.
La SSF se déroulera cette année du 11 au 23 février 2020.
Voici les dates et les évènements à ne pas manquer : •
16 janvier 2020 – Party Hawaïen
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11 février 2020 – Contes et Légendes
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12 février 2020 – Génie en arbre
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18 février 2020 – Journée de la recherche
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20 février 2020 – Colloque Kruger
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22 et 23 février 2020 – Salon de la forêt
Pour plus d’informations ou pour rester à l’affût des détails à venir, consultez notre site internet et nos différents médias sociaux !
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Pause Café Hanjie,Sudoku et cie.
Format de la grille: 13 X 14 Difficulté: moyenne Indice: fréquemment utilisé au P’tit CAAF
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Fonctionnement: Chaque case doit être remplis d’un chiffre entre 1 et 9; un même chiffre doit être présent qu’une seule fois par colonne, par ligne et par carré de 9 cases. Difficulté: Moyenne Bonne chance !
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Le Jaseur est toujours à la recherche de personnes pour contribuer aux nouvelles éditions ! Tu as ... - Un article à partager ? - Une photo ou une illustration dont tu es fière ? - Une blague que tu trouves drôle ? -Un désir inassouvi de corriger des phôte d’orthaugraf ? Ou t’as simplement envie de contribuer? Contacte-nous sans plus tarder ! www.facebook.com/lejaseurboreal/ anne.voyer.1@ulaval.ca antoine.harel.1@ulaval.ca
Proposé par PhillipBD, Tiré de Les Muscinerie de Jean Faubert et Carole Beauchesne
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