Les sorties
Mémo Vocal sortait à la rentrée. Sept morceaux nappés de guitares acoustiques, de Cuba au single Peter Pan en passant par une Dépression, qui n’est pas sans rappeler Stromae, et un univers plus proche de la chanson que des eaux urbaines. – NC
Manuel Hermia, Christine Ott, Allysen Callery Sans Soleil OST Freaksville Records
Ce sont deux longues plages où s’entremêlent musique, ambiances et bribes de dialogues du film Sans Soleil, une dystopie traitant du dérèglement climatique. Le film, écrit et réalisé par Banu Akseki, conte l’histoire de Joey, perturbé par les éruptions solaires qui affectent la terre. La musique est composée par Manu Hermia qui a mis à profit ses recherches Rajazz (fusion entre jazz et raga indien basée sur des modes stricts) pour créer un univers singulier. Le bansuri plonge l’auditeur dans une visite intérieure de lui-même, car il s’agit ici principalement de sensations et d’évocations d’humeurs, même si, à la fin, une mélodie se dessine. Mais il n’y a pas que la flûte dans ce projet : on y entend aussi Allysen Callery qui, l’espace d’un moment, vient déposer sa voix et sa guitare folk pour un morceau désabusé. Et puis, raffinement ultime, on a fait appel à Christine Ott pour diffuser ici et là ses ondes Martenot – vous savez, ce sifflement venu d’ailleurs que l’on entendait, entre autres, dans Ne me quitte pas de Brel. Sans les images, cette musique vous plonge dans un abîme étrange. Imaginez l’ensemble réuni. – JP
Lous and the Yakuza Ioata Columbia/Sony
Porte-parole antiraciste, égérie Louis Vuitton, traductrice de la poétesse américaine Amanda Gorman et icône féminine dont le parcours de vie traumatique a nourri un premier album (Gore) finalement plus remarqué et streamé qu’acheté, Marie-Pierra Kakoma se dévoile au naturel sur son nouvel album Iota. S’éloignant de l’image “intello glamour” que certains ont voulu lui coller à la peau, la jeune femme se montre ici plus introspective. « Gore évoquait mon expérience par rapport à la guerre, au racisme, au viol ou à la prostitution. C’étaient des chansons personnelles qui ont déclenché des débats de société. Iota parle toujours de moi, mais il touche davantage à l’intime et au sentiment amoureux. Il y a plusieurs déclinaisons de cette thématique sur l’album car je suis passée par toutes les phases émotionnelles ces deux dernières années. Des coups de foudre, des brisures de cœur, des amitiés trahies, des passions, des réconciliations avec ma famille… », précise la jeune femme. Musicalement, son mélange de pop, de R’n’B, de néo-soul et de trap s’étoffe de vrais instruments. Lous collabore toujours avec le surcoté El Guincho (Rosalia) mais elle réussit à lui imposer plus de diversité dans les sons et les tons. Une bonne chose. Rencontre au sommet, son duo Lubie avec Damso est ainsi rythmé par une boucle de guitare acoustique alors que le single Hiroshima montre qu’on peut flirter avec la pop mainstream tout en réfutant les codes du genre. Ailleurs, c’est son flow singulier (Kisé), sa passion pour la culture japonaise (le magnifique Yuzu où les cordes de violon se marient à celles d’une guitare sèche) et son sens de la métaphore (Monsters, Interpol) qui font la différence. Au final, Iota nous montre une artiste moins en colère et plus apaisée malgré les tourments du quotidien. Et comme si elle voulait souligner cette métamorphose, c’est sans le moindre effet d’Auto-Tune qu’elle nous susurre au milieu du disque : « J’ai envie de te dire je t’aime ». Message bien reçu. – LL
Larsen
Novembre, décembre 2022
Sïan Able Veni Vidi Sensi Take-Off Record
Âme sensible, Anaïs Elba dévoile sa véritable nature sous l’anagramme Sïan Able. Les doigts en mouvement sur son piano, la musicienne met aujourd’hui le cap sur Veni Vidi Sensi, un premier album concocté à la lisière de la soul, du jazz et d’une fibre néo-classique parfaitement maîtrisée. Nettement plus convaincante en anglais que sur ses trois tentatives en français (Sobre, Amour Sec et Osmose), Sïan Able (en)chante ses émotions et combat ses démons avec passion. Failles émotionnelles ou santé mentale se déclinent ainsi à travers dix morceaux délicats et sophistiqués. Imprégné d’une saine mélancolie, l’univers de la pianiste belge ravive l’esprit de Nina Simone et s’invite, sur la pointe des pieds, dans le sillage d’artistes comme Agnes Obel, Frida Hyvönen ou Alice Boman. Bordées de chœurs féminins et de chants d’enfants, les compos de Sïan Able recyclent les mauvaises ondes en énergies durables. De quoi passer l’hiver au chaud. – NA
Cléo Mémo vocal La Chambre d’Amandine
Cela fait un bail que Cléo promène ses envies de mots et de mélodies de Bruxelles à Paris. C’est dans les rangs d’une chorale bruxelloise qu’elle fait ses premières gammes ado. Dans la foulée de reprises R’n’B en anglais, elle foule le terrain de jeu du rap et se met à rimer en français. S’ensuivent des années de galère qui mettent les nerfs de Cléo à l’épreuve, baladée sans résultat de maisons de disques en producteurs (dont on retient néanmoins des duos avec Kery James, Gandhi ou Pitcho). En 2018, elle aménage chez elle un home studio, devient auteure-compositrice et se lance en solo. Après la publication d’Éponyme en 2020, son 2e EP
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