Mercredi, 18 novembre 2009
Culture
Monsieur Alto Bashmet starifie son instrument PAGE 8
ITAR -TASS
Publié en coordination avec The Daily Telegraph, The Washington Post et d’autres grands quotidiens internationaux
Distribué avec
Ce supplément de huit pages est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Russie), qui prend l’entière responsabilité de son contenu
La France-surMoskova
Cette création d’une jeune couturière locale a été présentée cet automne à Moscou. Derrière le clin d'œil aux Babouchki, la modernité du style est ancrée dans une conception très russe de l'élégance.
Ce n'est pas de la dernière neige que sont nés les Français de Moscou. Depuis le milieu du XVIIIème siècle, la colonie qu'ils forment donne à la cité russe ses commerçants, percepteurs, tailleurs, parfumeurs, la langue et le ton, la gastronomie et l'élégance. Ça, c'est de l'histoire. Pour ce qui est de l'actualité, la capitale russe reste une destination singulièrement attirante pour les natifs de France. Le contingent augmente, tout en se renouvelant depuis la fin de l'URSS. Hommes d'affaires, journalistes, étudiants, jeunes actifs, amoureux et autres aventuriers du monde moderne, nombreux sont les Français qui ont choisi de partir s'installer à Moscou pour quelques mois, quelques années, et plus si affinité. En trouvant mille façons de vivre et bien vivre dans une ville gigantesque, parfois familière et pourtant si étrangère.
DESSIN DE DMITRI DIVINE
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Retour vers l'élégance.... Depuis dix ans, s’il est une industrie en pleine expansion qui a explosé aux quatre coins du globe, c’est bien celle des Fashion Weeks. Moscou ne fait pas exception! Tout comme une démocratie indépendante a besoin d’édifier un imposant Parlement, tout pays qui se respecte se doit désormais d'avoir sa Fashion Week pour affirmer son droit à l'élégance. GODFREY DEENY
SPÉCIALEMENT POUR LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
Il faut bien l'admettre, nous avons affaire à une “saison sans fin”... N’importe quel critique de premier ordre vous le dira, chaque jour de l’année, à part peut-être Noël, un rendez-vous de la mode a lieu quelque part entre Riga et Reykjavik ou entre Rio et Erevan. Une journaliste que j’avais envoyée couvrir le défilé de Medellin – vous savez, la capitale mondiale de la cocaïne – m'a raconté à son retour que les mannequins déambulaient presque au sprint sur le podium! Bref, le mois dernier, c’était au tour de
Moscou. La Russian Fashion Week (RFW) a présenté 58 défilés en sept jours, soit le plus gros show à l'Est de Berlin. Depuis ses débuts en 2005, la RFW est devenue une manifestation fort respectable, soutenue par la réputation mondiale de Moscou. C'est un réseau culturel à part, une scène nocturne très hype, une culture du shopping en pleine effervescence, l'accès facile à un marché immense de clients avides de mode et des sponsors aux poches profondes. Vous noterez d'ailleurs les embouteillages de limou-
À LIRE EN RUBRIQUE SOCIÉTÉ, PAGE 6
OPINIONS DMITRY KOSTYUKOV _AFP
sines (Jaguar et Bentley, of course!) à tous les défilés. Comme le tennis ou le golf de haut niveau, les saisons se répartissent en grands tournois. Dans la mode, le Grand Chelem c’est Londres, Milan, New York et Paris. Mais la lutte pour une place dans le “top 10” demeure ouverte. Aujourd’hui, Moscou défie des métropoles aussi prestigieuses que Berlin, Pékin, Tokyo, Sydney, Rome, São Paolo ou Rio de Janeiro. La RFW joue l’ouverture et prend exemple sur Paris, dont la politique, pour rester en tête des saisons internationales, consiste à accueillir les principaux talents étrangers. LA SUITE EN PAGE 4
Mikhaïl Gorbatchev : En finir avec la “Guerre froide” Le dernier président de l'URSS lance un appel aux Européens dans l'espoir qu'ils feront à l'avenir plus grand cas du point de vue de la Russie. PAGE 7
Staline hante les esprits Notre revue de presse s'intéresse au débat récemment ravivé autour de la figure du Petit père des peuples. PAGE 7
Billet de l’amitié
Sauveur de l'automobile russe ? Renault au secours d'AvtoVAZ
L'appel du gaz sibérien Poutine entrouvre Yamal aux étrangers
Mikhaïl Chvydkoï : Vous aimez Dodine, nous aimons Ozon !
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PHOTOXPRESS
Economie
RIA NOVOSTI
Entreprises
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Entreprises
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.rbth.ru communiqué DE ROSSIYSKAYA GAZETA distribué AVEC LE FIGARO
Industrie automobile Un partenaire russe en sérieuse perte de vitesse et au bord du gouffre
Renault, roue de secours d'AvtoVAZ ? Une longue série de défis pour le constructeur français
En grande difficulté à cause d'une chute de 60% de ses ventes cette année, le premier constructeur automobile russe quémande désespérément l'aide de l'Etat et de ses actionnaires. Mais Renault, qui détient 25% du capital d'AvtoVAZ, hésite beaucoup à engager des capitaux supplémentaires en dépit des injonctions du Kremlin.
L’entreprise Renault produit en Russie sa Logan (vendue en France sous la marque Dacia) depuis 2005 dans son usine moscovite Avtoframos. En inondant le marché de petites cylindrées, Renault a commencé à être associé, dans l’esprit du consommateur russe, à une automobile bon marché. Ce qui rend plus difficile le positionnement sur le marché local de modèles plus haut de gamme de la marque française. En Russie, le segment des voitures d’entrée de gamme est à l’heure actuelle déjà bien fourni: les Logan et les Lada (principale marque de voitures d’AvtoVAZ) le partagent avec les Daewoo, Chevrolet et autres Hyundai, ainsi qu’avec les produits d’une industrie automobile chinoise en plein essor.
Alexeï Knelz
AvtoVAZ a besoin d'1,5 milliard d'euros pour survivre et l'Etat russe ne veut plus supporter le fardeau seul. Début octobre, le premier ministre Poutine a mis Renault au pied du mur en lui demandant d'injecter 406 millions d'euros, faute de quoi sa part des actions d'AvtoVAZ serait ramenée à 6%. Un mois plus tard, la tactique changeait radicalement. Le vice-premier ministre Chouvalov invitait le constructeur français à monter au capital... Pressé de toutes parts, Renault campe sur ses positions: contribution à la restructuration d'AvtoVAZ par des apports de technologie, d'équipements, de savoir-faire et de plateformes, mais pas de nouvel apport de capitaux. La marque au losange avait acquis une minorité de blocage d’AvtoVAZ en février 2008 pour 1 milliard de dollars. AvtoVAZ reste la plus grande entreprise russe, qui vend chaque année plus de 300.000 voitures et représente 1% du P.I.B. russe.
Des dettes pour attirer les investisseurs
La dette d’AvtoVAZ représente près de 37 milliards de roubles (850 millions d’euros). Le 19 octobre, la direction
valeriy melnikov_kommersant
La Russie d’Aujourd’hui
"Lada. Poursuis sur ta lancée!" Publicité d'AvtoVAZ. Le russe espère atteindre en 2010 son seuil de rentabilité.
d’AvtoVAZ a annoncé qu’elle n’excluait pas une mise en faillite sans arrêt de la production. Mais 100.000 personnes travaillent chez AvtoVAZ, soit un sixième des habitants de la ville de Togliatti où l'automobile fait aussi vivre, indirectement, le reste de la population. La fermeture de l'usine entraînerait une catastrophe sociale dont le spectre fait trembler le Kremlin. Pas question, donc, d'abandonner le “Detroit russe” (Le Kremlin envisageait au départ de faire appel aux plus grandes banques d’Etat). AvtoVAZ a besoin d’argent non seulement pour rembourser ses dettes, mais aussi pour réaliser un programme d’in-
vestissement de 965 millions d’euros. Ce programme prévoit en 2012 la mise en production de cinq nouveaux modèles assemblés sur une plateforme Renault, qui investit à cet effet 240 millions d’euros. Deux de ces nouveaux modèles seront commercialisés sous la marque Lada, deux autres sous Renault, et le dernier sous Nissan.
Renault : dernière chance pour AvtoVAZ ?
La question se pose d’elle-même: AvtoVAZ survivra-t-elle? La firme russe traverse une crise beaucoup plus profonde que les autres constructeurs mondiaux. Et si les autorités n’avaient pas
imposé de taxes à l’importation de véhicules d’occasion en provenance des marchés européens et asiatiques, les Lada auraient depuis longtemps disparu.
Avtoframos Co-entreprise entre Renault et la mairie de Moscou (93% contre 7%) fondée en 1998. La production des Renault Logan a démarré depuis avril 2005 dans l'usine de Moscou. Renault y a déjà investi 250 millions de dollars et a créé 2.300 emplois.
Un marché russe malgré tout prometteur
La clé des problèmes d’AvtoVAZ pourrait reposer sur trois axes d'action: la localisation de la production et la création d’une base de fournisseurs, l’introduction de nouvelles technologies dans la production, et leur gestion en utilisant les compétences françaises. Jacques Sapir soutient ce point de vue, en supposant que Renault compte, en Russie, non seulement produire des véhicules,“mais encore, très probablement, fournir des pièces de rechange et des moteurs, en particulier, pour les automobiles d’AvtoVAZ. Cette opération permettra à Renault d’augmenter ses volumes de production et de diminuer ses coûts”, assure l’expert.
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Economie
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Projet Poutine invite de nouveau les majors étrangères dans ses gisements gaziers
En bref
Vous reprendrez bien du Yamal ?
RusAl à la Bourse de Paris ?
Le numéro un mondial de l’aluminium a discrètement déposé fin octobre un dossier auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Un événement significatif pour la place parisienne, où il n’y a pas eu d’opération supérieure à 1 milliard d’euros depuis octobre 2007. Si elle se réalise, l’entrée du géant russe RusAl fera grand bruit. Ce serait la première fois que Paris coterait une entreprise russe d’une telle envergure. Selon une source bancaire, RusAl veut une double cotation à Paris et à Hong Kong, espérant lever entre 1,5 et 2,5 milliards de dollars (soit entre 10 et 20% du capital). Le double placement a aussi pour intérêt de donner une meilleure visibilité au groupe et d’avoir une cotation 24 heures sur 24. Paris, via Euronext, permettrait à RusAl d’avoir une cotation en euros et d’entrer dans le champ d’étude de nombreux analystes du secteur. Le groupe russe compte dans un premier temps réserver ses actions aux investisseurs institutionnels qualifiés. RusAl,qui affiche 15,7 milliards de dollars de chiffre d’affaires, est plombé par une dette estimée à 16,8 milliards de dollars.
Les géants internationaux du gaz rêvent depuis longtemps de pouvoir exploiter les immenses réserves enfouies dans le nord de la Sibérie. Moscou donne des signes de vouloir partager... pour mieux avoir accès au marché de la distribution en échange. Ivan Rubanov
Comme des abeilles sur le miel
Aujourd’hui, une seule usine de GPL, sur les côtes de l’Alaska, opère dans un climat sub-arctique. C’est pourquoi, comme l’a expliqué le ministre russe de l’Energie, les projets de GPL requièrent de nouvelles solutions technologiques, d'où la nécessité d'entamer sans atten-
reuters
Magazine Expert
Selon Alexeï Miller, le PDG de Gazprom, la production de gaz àYamal devrait passer de zéro a 360 milliards de mètres cubes d’ici 20 ans. Ces chiffres placentYamal en compagnie du golfe Persique, parmi les principaux gisements de gaz mondiaux avec 177 trillions de mètres cubes de réserves prouvées. Pourtant, la nouvelle manne se situe dans un environnement difficile pour son développement: un climat hostile et une région éloignée de ses marchés, qui ne sont accessibles qu'au prix de longs trajets encombrés de glace. Mais tout cela n’empêche pas les compagnies étrangères de se bousculer aux portes de ce “bout du monde”. L’importance du Gaz de Pétrole Liquéfié (GPL) est l’autre grand atout pour la région. Selon Alexeï Miller, le marché du GPL devrait doubler d’ici à 2020, et sa part dans ce business florissant passer à 25%, alors qu’il n’occupe qu’une place marginale dans le gazoduc vers l’Europe actuellement.
La technologie du GPL (LNG en anglais) sera très sollicitée dans le développement de Yamal.
dre des discussions avec les partenaires étrangers.
Gaz contre technologies
Presque tous les présidents des grandes compagnies pétrolières mondiales ont participé au Sommet deYamal en 2008. Les Européens étaient en force. Dmitri Lutyagin, un analyste chez Veles Capital, note que ”la production en Europe diminue de 5% à 7% par an et la part de la production européenne dans la fourniture du gaz va passer de 41% aujourd’hui à 20% en 2025; dans ce contexte, les compagnies européennes ne peuvent pas passer à côté de la chance d’accéder à ces réserves géantes”.
Pourquoi le Kremlin a-t-il besoin de faire entrer des étrangers dans le jeu? La crise financière offre une première réponse évidente: la chute récente des prix du pétrole et la baisse des entrées de pétrodollars ont forcé le gouvernement russe à demander de l’aide aux compagnies étrangères. Mais d'autres facteurs sont intervenus dans une situation plus complexe qu'il n'y paraît. L’une des principales raisons justifiant l'entrée des majors du pétrole est le déficit technologique des compagnies locales habituées à un gaz jadis aisément accessible mais aujourd'hui déclinant. Même l’absence de techno-
La crise place les petites banques russes entre le marteau et l'enclume Le gouvernement s’est précipité à la rescousse des grosses banques mais a abandonné les établissements de second et de troisième plans à leur sort. Le ministre des Finances Alexei Koudrine a déclaré récemment que près de 200 banques commerciales pourraient cesser leur activité. DENIS KUCHKIN
Trésorier en chef, UGLEMETBANK
«La seconde vague de la crise [bancaire] est là, mais nous ne l’avons pas remarquée». Dixit Pavel Teploukhine, directeur de Troika Dialog, la principale banque d’investissement russe. Les particuliers n’ont rien perdu, grâce aux assurances, et le secteur réel n’en
est pas bouleversé: l’emprunt reste aussi inabordable qu’avant, et les taux d’intérêt s’élèvent au-dessus de 20%. Selon Sergei Sobyanin, premier ministre adjoint et secrétaire général du gouvernement, quelque 11,55 milliards d’euros ont été prélevés sur le budget fédéral et les réserves de la Banque centrale pour affronter cette nouvelle vague. La première vague de la crise bancaire en automne 2008 a coûté au budget 69,3 millions d’euros. Elle a surtout concerné les grandes banques, dont certaines ont été nationalisées. A l’instar de ses homologues américains et européens, le gouvernement russe s’est précipité à la rescousse du système fi nancier, en injectant de l’argent dans les banques (surtout celles dans
Affaires à suivre 16ème Forum bancaire international de Russie 30 novembre - 3 décembre, Grange City Hôtel, Londres Cette grande manifestation annuelle est destinée aux principaux acteurs du secteur bancaire russe. Au menu: échanges d'idées sur des stra-
lesquelles il détient des parts). Ces efforts ont permis d’enrayer un marasme encore pire. Néanmoins, le fl ot de capitaux n’a pas résolu le problème des emprunts à taux élevé, drame de l’économie russe pendant la crise. Il allait de soi que les banques de second et de troisième plans seraient affectées elles aussi. La diminution du nombre total de banques sur le marché aura un impact négatif sur la qualité et le prix des services. Selon les différentes agences de notation, les emprunts non remboursés des entreprises atteindront 74 milliards d’euros vers la fi n de l’année, soit 20% du total des prêts, et l’augmentation prévisible des défauts de rembourse-
tégies face à la crise et sur le développement du secteur dans le cadre des nouvelles conditions économiques. C'est aussi un rendez-vous à ne pas manquer pour les relations d’affaires. http://www.adamsmithconferences.com
Investir en Russie: rendez-vous annuel au Sénat 10 et 11 décembre, Paris, Sénat - Palais du Luxembourg Ce séminaire sur 2 jours débutera par un atelier d'information et une réflexion collective sur les principaux sujets d’interrogation du moment, en présence de personnalités et de professionnels russes de tout premier plan. Le 11, un forum d'affaires rassemblera plusieurs dizaines de
logies lourdes de production d’équipement pour l’extraction du GPL est un handicap pour les compagnies russes engagées dans la fabrication et l'installation de gazoducs offshore ou l'exploitation des gisements profonds. Autre facteur essentiel qui se cache derrière l’invitation généreuse de Gazprom: son besoin de partager les risques et les coûts. Le développement de Yamal nécessite un investissement sans précédent à l'aune des normes post-soviétiques. Dmitri Lutyagin estime à 200 milliards de dollars le coût total de Yamal, ce qui est bien au-dessus des moyens de Gazprom.
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ment pourrait toucher 35 à 50% des portefeuilles. Une solution possible serait la création d’une banque spéciale pour les emprunts irrécouvrables. Les efforts anticrise pourraient renforcer la position des banques publiques dans le secteur, ce qui, selon de nombreux experts, serait le pire scénario possible. En effet, les banques publiques et les banques détenues partiellement par l’État disposent de ressources administratives et fi nancières leur permettant de concurrencer leurs rivales plus modestes pour attirer dépôts fiables et clients prêteurs. On peut imaginer un scénario moins redoutable selon lequel les petites banques seraient absorbées par les plus grandes. En attendant, c’est le bon moment pour les acteurs étrangers d’investir le marché bancaire russe sans avoir à monter des établissements de toutes pièces, évitant ainsi une procédure longue et compliquée.
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Sanofi-Aventis s’offre un fabricant russe d’insuline
Le géant français de l’industrie pharmaceutique a versé 28 millions d’euros au groupe polonais Bioton pour une part de 38% dans une usine de la région d’Oriol (sud-ouest de Moscou).SanofiAventis devrait recevoir dans le futur une part supplémentaire de 12% plus une action, et obtenir ainsi la majorité dans le capital de l’usine, a indiqué un porte-parole du groupe français. Selon le magazine russe Expert, Sanofi aurait déjà discrètement racheté en outre une part de 36% à l’homme d’affaires russe Sergueï Dokoutchaïev.
EDF se rapproche de Gazprom
EDF poursuit des négociations avec le géant gazier pour une participation minoritaire dans le gazoduc South Stream qui transportera du gaz russe à travers la Mer Noire puis les Balkans, principalement à destination du marché italien. L’objectif du gazoduc est de contourner l’Ukraine (pays par lequel transitent aujourd’hui 80% du gaz russe destiné à l’Europe) mais aussi de concurrencer le projet paneuropéen Nabucco. EDF affirme qu’un accord final sera signé dans un “proche futur” avec Gazprom. En attendant, les deux groupes se sont déjà mis d’accord pour échanger des volumes afin de faciliter la pénétration du groupe russe sur le marché des Etats-Unis. EDF a accepté de fournir 0,5 milliards de m² de gaz par an à Gazprom sur ses opérations nord américaines et cela pour 5 ans, en échange des mêmes volumes fournis par Gazprom à EDF à destination du Royaume-Uni.
prestataires privés et d’institutionnels installés en Russie et qui partageront leur expérience du terrain. Des rendez-vous individuels pour des contacts directs et opérationnels seront organisés par l’Agence UBIFRANCE et la Mission économique à Moscou, en partenariat avec la Chambre de Commerce et d’Industrie Française en Russie, la Section Russie des Conseillers du Commerce Extérieur de la France et de nombreux opérateurs privés implantés en Russie
évolutions potentielles de l’industrie. L’impact des restrictions des importations sur les marchés mondiaux des métaux fera l’objet d’une analyse des menaces protectionnistes. Une présentation de projets visant à améliorer l'efficacité de l'industrie ponctuera la manifestation.
15ème sommet “Les Métaux de la CEI” 17-19 février 2010, Moscou
Tous les détails et bien davantage sur notre site www.rbth.ru
http://www.ubifrance.fr
Les participants tireront les leçons de la crise économique internationale et évoqueront les
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editor.france@rg.ru
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Mode
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Moscou rêve d'être La Fashion Week à la mode russe SUITE DE LA PAGE 1
À commencer par les stars commeYohji Yamamoto et Issey Miyake, il y a trente ans, et par la suite, une déferlante venue d’Angleterre, d'Italie, et plus récemment de Chine, d'Inde et de Russie – la Chambre syndicale trouve toujours dans son calendrier de la place pour les jeunes génies. On peut dire la même chose de Moscou, où le fondateur et PDG de la RFW, Alexandre Choumsky a invité des stylistes talentueux en grand nombre. En octobre, la RFW a exhibé onze stylistes étrangers, dont le Malaisien Sonny San, l’Espagnole Agatha Ruiz de la Prada et, lors d’une journée italienne, Ennio Capasa. Choumsky collabore même avec la Camera della Moda (Chambre Syndicale) de Milan, qui a envoyé à Moscou un nouveau groupe de stylistes émergents,
L'optimisme est de retour à Moscou, alors que les prix du pétrole remontent et que l’économie est en voie de rétablissement. Cette bonne tendance était particulièrement perceptible lors du défilé de Julia Sarkisova, épouse d’oligarque. Le premier rang était garni de filles tout aussi bien financées... Sa collection devait beaucoup aux marques occidentales Roberto Cavalli et Balmain, mais Sarkisova a injecté suffisamment de mordant moscovite pour qu'on lui accorde le droit de revendiquer l’originalité. En Europe, on couvre les jeans de cristal depuis un bout de temps déjà. Sarkisova, elle, utilise de véritables diamants. Ses jeans et manteaux sont si chers – jusqu’à 70.000 euros – que tout un groupe d'agents de sécurité financé par son époux arménien, Nikolaï Sarkisov, veillait en coulisse. Chez le très impétueux duo féminin Shumila & Elagina, le thème du défilé était“Mariage de stars de rock russe”, avec une nette influence du style punk chic. Les deux créatrices ont envoyé sur le podium des filles en robes de cocktail sexy de soies et cotons cireux, finies aux bretelles sport ou pattes d’éléphant immenses, idéales pour un choriste de James Brown. Mais le clou
les “Incubatore della Moda”, réunis en un défilé commun. Mais laissons un peu les chiffres parler d'eux-mêmes: la RFW a présenté 58 défilés, contre 30 pour Berlin, 40 pour Rio de Janeiro, 43 pour Sydney, et 54 pour Londres. Cette performance peut-elle s'interpréter comme une nouvelle manifestation du maximalisme russe? “Notre but a toujours été de faire de la RFW un événement rivalisant avec les semaines de la mode de New York et d’Europe occidentale. Je pense que les visiteurs de notre saison ont pu constater que nous y sommes parvenus”, se rengorge Choumsky, qui a lançé la RFW il y a dix ans. C’est la RFW qui a révélé de nombreux stylistes russes, devenus par la suite célèbres en Occident, comme Igor Chapurin, Alena Akhmadullina, Tatiana Parfionova, Svetlana Tegin, et la saison a contribué à développer le marché pour les stylistes russes en Russie, alors qu’il y a dix ans, les consommateurs de mode russes n’achetaient que des marques occidentales. Il y a cinq ans, les sondages montraient que seulement 2% des amateurs moscovites de haute couture possédaient des marques russes. Cette année, ils sont passés à 20%.
du défilé fut un quartette de demoiselles de choc, idéalement imaginées pour le prochain mariage de Johnny Halliday. D’autres créateurs ont préféré l’ironie, comme chez Dom Stili Bouton, où un nouveau tissu imprimé a été inventé, avec le portrait de Poutine sur les dollars et celui d’Obama sur les roubles. Le maillot de bain dans cette matière qui ouvrait le défilé a créé un “buzz” sans précédent et déclenché les applaudissements des 800 invités. Toute cette bonne humeur avait quelque chose de prémonitoire. Et de fait, le lendemain du défilé, les chiffres officiels annonçaient que l’économie a progressé de 0,6% au troisième trimestre de 2009, après une chute record de 10,9% au deuxième trimestre. Le rouble s'est raffermi régulièrement contre le dollar ces dernières semaines, et le baril de pétrole a dépassé les 80 dollars. “Nous sortons d'une année très difficile, pour les créateurs comme pour les revendeurs. Mais les choses s’arrangent, et rapidement”, s'est félicité Choumsky, qui fait désormais figure de tsar de la mode.
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ALEXANDER AZAROV POUR ARTEFACT COMMUNICATIONS AGENCY
Citations
Portrait Saison après saison, Slava Zaitsev tisse la tendance
Il conjugue le bariolé et l'épuré A 71 ans et plus de 50 ans de carrière, Slava Zaitsev, célébré par Paris Match dès 1965 comme le "Dior Rouge", conserve son statut de précurseur de la mode russe. Belle revanche pour ce fils d’ennemi du peuple qui fut, dans sa jeunesse, interdit d’études dans les meilleurs instituts du pays. Olga Baldina
La Russie d’Aujourd’hui
Sa carrière démarre dans le bruit et la fureur en 1963, quand il présente sa première collection, déchaînant aussitôt une tempête d’émotions parmi les dignitaires soviétiques et la presse occidentale, témoin fortuit. Ses modèles défilent sur le podium en douillettes et jupes légères cousues de châles à fleurs, chaussées de valenki (bottes de feutre). La commission qui devait valider cette collection s’est trouvée en état de choc. Résultat, Zaitsev reçut un blâme et n’eut pas la possibilité de présenter ses collections suivantes. Pendant ce temps, Paris-Match publiait six pages consacrées à l’expérimentation courageuse d’un jeune créateur russe. Le mystère reste entier sur la manière dont son journaliste s’était introduit au défilé. Zaitsev obtient son titre de “Dior Rouge”, ainsi que le Grand Prix, pour une robe pourpre, sobrement appelée “Russie”, qu’il présente en 1967 au concours des créateurs du Festival Mondial de jeunesse à Mos-
cou. Il est le premier couturier soviétique à avoir eu l’honneur de présenter sa collection à la Semaine de la mode à Paris (ville dont, soit dit en passant, il est aussi citoyen d’honneur). C’est justement à l’issue de cet événement qu’il est élu Homme de l’année du monde de la mode. Comme il l’avoue lui-même, il a toujours eu peur du consensuel: “J’étais l'homme des situations extrêmes et j’aimais être en contradiction avec l’époque”. L’un des tournants décisifs a eu lieu en 1979, quand Zaitsev a fondé son modeste atelier, qui deviendra par la suite sa légendaire Maison de la mode. Aujourd’hui, il prépare deux collections par an. En collaboration avec L’Oréal en France, il produit son parfum “Maroussia”. Il dessine du mobilier pour une entreprise belge. Le mois dernier, comme d’habitude, il a inauguré à Moscou la Russian Fashion Week. Cette fois, le célèbre coloriste a présenté une collection somptueusement légère, de drapés cintrés, baptisée “En dépit de!” “Nous ne nous rendons pas, en dépit de la crise dans le monde et dans notre pays!”,confie Slava Zaitsev à La Russie d’Aujourd’hui.“En dépit de tout, je crée. Pour être honnête, j’ai dû faire plus simple et plus léger. J’ai décidé d’abandonner le luxe pour l’instant. Mes silhouettes sont plus épurées cette saison”. Zaitsev est depuis longtemps synonyme de la haute couture et du luxe russes. Pour sa visite à la Reine d’Angleterre, Ludmila Poutine, épouse du premier ministre, a arboré un chapeau signé Zaitsev qui aurait épaté n’importe quel sang bleu. Mais avec sa dernière collection, Zaitsev s’est départi de son exubérance habituelle. Inspiré par ses récents voyages en Asie, c'est un nouveau message à ses disciples qu'il a offert pour le printemps et l’été 2010.
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archive personnelle
ALEXANDER AZAROV POUR ARTEFACT COMMUNICATIONS AGENCY
Alexandre Choumsky PDG de la Russian Fashion Week
“A l’heure actuelle, la mode russe est trop jeune pour pouvoir espérer des succès commerciaux significatifs. Nous avons un grand nombre de maisons vraiment vieux jeu et incapables de produire autre chose que des robes de mariées. Quelques-unes continuent à sortir des collections, mais sans identité. Finalement, ce n’est pas qu'une question de mode”. alexei kudenko_kommersant
“Pour l’année prochaine, nous travaillons sur le projet de la Journée française à Moscou. J.-C. de Castelbajac, qui a présenté un fantastique défilé cette saison dernière, m’a promis qu'il amènerait avec lui à Moscou les jeunes créateurs français les plus talentueux”. “La première Russian Fashion Week avait présenté seulement 20 défilés. L'industrie ne produisait pas plus. Désormais, la RFW, c'est 50-60 nouveaux défilés à chaque saison et entre 15 et 20 de recalés!”
Mode
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.rbth.ru communiqué DE ROSSIYSKAYA GAZETA distribué AVEC LE FIGARO
tendance
ALEXANDER AZAROV POUR ARTEFACT COMMUNICATIONS AGENCY
Haute couture Ressusciter l'élégance de la Russie blanche
Madeleine Leroyer
Spécialement pour La Russie d’Aujourd’hui
Cette nuit d'hiver 1924, le Tout-Paris n'a d'yeux que pour la princesse Irina Romanova, nièce du dernier tsar Nicolas II, qui ouvre dans les salons du Ritz le premier défilé de sa maison de couture, Irfé. A ses côtés, son époux, Félix Youssoupoff, enflamme les esprits qui devinent sous les exquises manières du prince la sauvagerie de l'assassin de Raspoutine. Irfé, mariage de leurs deux noms, connaît un succès fulgurant. Les clientes insistent pour rencontrer le prince. Une riche Améri-
caine se pâme: “C’est donc vous! Vous n’avez pas l’air d’un meurtrier. Je suis bien heureuse que vous ayez pu fuir ces sales Bolcheviques”.Mais le krach boursier de 1929 ruine les clients d’Irfé. L’atelier ferme en 1931. Près de huit décennies plus tard, Olga Sorokina, jeune mannequin biélorusse, découvre, sous la plume du décorateur de théâtre Alexandre Vassiliev, le destin de cette première émigration blanche. Sitôt achevée la lecture de Beauty in Exile, elle décide de ressusciter Irfé. Elle a à peine 23 ans. Son audace séduit la comtesse Xenia Sfiris-Sheremeteva, petite-fille des fondateurs d’Irfé et unique descendante de Nicolas II. En quelques mois, Olga Sorokina dessine des robes inspirées des modèles des années 1920 pour une première collection en forme d’hommage dévoilée en juillet 2008 au Palais de Tokyo. Hors de question pour autant de s’enfermer dans un style suranné. Dès la collection suivante, la créatrice arrime Irfé au XXIème siècle.“Je reprends les motifs et les obsessions de l’Empire
Evgeniy Kirillov & Artem Parfenov pour Artefact Communications Agency (2)
Rêves réalisés Olga Sorokina est un phénomène encore méconnu de la mode. Cette toute jeune roturière biélorusse est parvenue presque seule à ressusciter une prestigieuse maison de couture fondée par d'illustres aristocrates russes réfugiés à Paris.
comme l’aigle à deux têtes, la couronne, la croix de l’ordre de Malte, ou encore le violet, couleur préférée d’Irina, mais je les détourne, par petites touches. Le résultat est très moderne”, affirme la jeune femme. Seule concession à la tradition d’Irfé: l’exigence de la qualité.“Nous choisissons les meilleurs fournisseurs et les meilleurs ateliers, en France et en Italie. Il faut faire le maximum ou ne rien faire du tout”. Résultat: de Tokyo à Saint-Tropez, du Bon Marché au Koweït, Irfé affiche pour la saison printemps-été 2010 un carnet de commandes à faire pâlir d’envie les créateurs russes: “Il y a en Russie des couturiers de talent mais pas de système, pas d’acheteurs. Ça n’a pas de sens de créer de beaux vêtements si l'on ne peut pas assurer les commandes. C’est pour ça que j’ai voulu une véritable maison, une équipe et c’est pour ça que notre showroom est installé rue du Faubourg Saint-Honoré”. Carla Bruni-Sarkozy n’a d’ailleurs eu que quelques centaines de mètres à parcourir pour venir choisir un sac à main
Irina Romanova et son mari incarnent le nec plus ultra des années 20.
80 ans plus tard, la fougueuse Olga Sorokina replace Irfé sur les podiums.
Irfé – “elle nous a écrit une lettre de remerciements”, glisse, non sans fierté, la créatrice. Regard bleu invincible, à peine maquillée, elle prend un malin plaisir à conjuguer la délicatesse d’Irina et la fougue de Félix. Négligeant les obstacles, elle échafaude mille projets: ouvrir une boutique à Paris –“mais on ne trouve rien au Faubourg et je veux y rester” –, percer le marché new-yorkais, ou encore relancer les parfums Irfé en
retrouvant les formules Youssoupoff. Combien de destins brisés pour un succès comme le sien, combien de jeunes beautés devenues hôtesses plutôt que mannequins? Elle n’y pense pas: “La force des mannequins de l’Est, c’est qu’elles gardent leur rêve chevillé au corps, qu’elles encaissent les coups sans faillir. Elles se considèrent comme des stars, et ça marche. Moi je n’ose plus rêver, car tout ce dont je rêve se réalise”.
Musée Comme Paris, Moscou s'offre son musée de la mode
L'immortel destin de l'éphémère 2010 verra l'ouverture du premier musée russe entièrement consacré à la mode – une institution richement dotée grâce au fonds du Musée des arts décoratifs et populaires, et qui accueillera plus de 30 000 pièces de collection. Vladimir Semenov
Spécialement pour La Russie d’Aujourd’hui
On en parlait depuis dix ans. Mais les divers projets de création d’un musée de la mode à Moscou tournaient en rond: certains des concepteurs avaient le bon endroit mais pas les collections, pour d'autres, c'était le contraire. Le Musée national des arts décoratifs et populaires a mis tout le
collaboration de la nouvelle génération de créateurs russes pour ajouter à son fonds les plus belles pièces de leurs collections. “Pour la fin de l’année, nous prévoyons d’ouvrir quelques salles d’exposition”, explique Margarita Barjanova, directrice du Musée des arts décoratifs et populaires. “Salles qui seront ensuite mises à la disposition du Musée de la mode pour ses expositions permanentes”,après son inauguration en 2010. Le premier projet d’envergure du nouveau musée sera l’exposition “La Russie des indiennes”,consacrée à l’histoire de ce tissu peint ou imprimé en vogue entre le XVIIème siècle et le XIXème siècle. Objectif recherché: une présentation du tissu comme matériau artis-
monde d'accord. Les Arts déco possèdent une vaste collection, remontant à 1885, de croquis, de lithographies, de costumes, de robes et d'accessoires: de quoi faire un vrai musée, sur le modèle – à Moscou, on le cache pas – du Musée de la mode et du textile du Louvre. Pour l'inauguration dont la date n'est pas encore fixée, une exposition spéciale, “Le noir et le blanc”, va retracer l’histoire du costume urbain de la fin du XIXème siècle au début du XXème. Au programme: des croquis d’accessoires exécutés par les peintres russes des années 1920 pour les maisons de mode françaises, dont Hermès, des lithographies de costumes de scène du XIXème siècle et des photos de défilés des années 1950. Le musée mise sur la
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tique à part entière, de son évolution jusqu’en 1917, et des innovations qu'il a connues dans les années 1920-1930. L’exposition mettra en vitrine des pièces uniques de la fin du XIXème-début du XXème siècle; des tissus imprimés de coton et de lin des XVIIème-XVIIIème siècles; du lin imprimé paysan de la fin du XIXème-début du XXème siècle, où domine le bleu indigo qui rappelle le denim d'aujourd'hui, avec des motifs laconiques, parfois naïfs, mais extrêmement expressifs; ainsi que des costumes citadins et paysans en tissus imprimés; enfin, partie moderne de l’exposition: la mode de propagande, composée de tissus et de foulards des années 19201930. Bref, les styles passent comme les époques, mais à Paris comme à Moscou, la mode s'offre un podium pour l'éternité.
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Vladimir Semenov est écrivain et commissaire du Musée russe de la mode.
84 % des vêtements présents sur le marché russe ne sont pas fabriqués sur le territoire de la Russie. En valeur monétaire, plus de 80 % des importations vestimentaires viennent de Chine et des pays du Sud-Ouest asiatique, ce qui explique la domination de la marchandise d’origine chinoise sur le marché russe. Une des particularités les plus frappantes du marché russe, c'est la répartition très inégale des parts de marché dans les différentes régions et villes de Russie. Jusqu’en 2004, la part des deux villes de Moscou et Saint-Pétersbourg pesait pour plus de 65% du total. Cette disproportion depuis les cinq dernières années a tendance à se réduire petit à petit. Aujourd’hui, Moscou et Saint-Pétersbourg représentent environ 30
à 40% du marché vestimentaire russe. En outre, le volume du marché moscovite est deux fois supérieur à celui de Saint-Pétersbourg. La ville d’Ekaterinbourg arrive en troisième position. Cette disparité s’explique par l’inégalité de la répartition de la population et des revenus entre les différentes régions. Autre particularité: l'établissement des prix. Le même produit se vend plus cher en Russie qu’en Europe. Au prix de la marchandise, il faut ajouter les coûts de transport, les frais de douanes – plus élevés que dans les autres pays – et la majoration du distributeur russe. En moyenne, le prix de vente au détail en magasin dépasse de 15 à 30% celui pratiqué en Italie ou en France. Le volume des ventes au détail du marché du prêt-à-porter en 2008 a atteint
34,2 milliards d’euros. Un marché constitué pour plus de moitié par la vente de vêtements féminins. Sa part en 2008 en représentait 58%, soit 19,5 milliards d’euros. Le masculin ne constitue que 24% des ventes. Il représente 8,2 milliards d’euros. Les vêtements pour enfants pèsent 18%, soit 6,2 milliards d’euros. La vente de linge représente 10% du marché (3,5 milliards d’euros). La part des vêtements de soirée et de mariage est de 6% (2,2 milliards d’euros), et celle des ventes d'accessoires, sans compter les chaussures ni les sacs, de 5% (1,7 milliards d’euros). Les experts sont optimistes quant à l'évolution du secteur: la croissance devrait suivre – voire précéder – fidèlement l’amélioration des indicateurs économiques du pays.
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Préparé par
Fashion Consulting Group pour Artefact Communications Agency
PIERRE VERDY_afp
En chiffres
Les dessous du vêtement russe
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Défilé parisien de la collection Alena Akhmadullina printemps/été 2009.
Société
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.rbth.ru communiqué DE ROSSIYSKAYA GAZETA distribué avec LE FIGARO
Expatriés Comment se laisser glisser dans le bain russe
Ces sacrés Français... Déjà indigène au bout de 10 jours Natalia Gevorkian
archive personnelle
Un ami londonien m’amène à la gare
Natalia Gevorkian est correspondante a Paris du journal Kommersant
Nikolai Dolgopolov
On peut avoir choisi la Russie, ou pas. Il y a des Français qui s'expatrient pour suivre un(e) Russe de leur cœur, ou simplement à force d'avoir lu Dostoïevski ou mangé des pilméni chez leur copain d'enfance Micha. Il y a ceux qui ont appris la langue au lycée ou à la fac, et pour qui la Russie est devenue une deuxième patrie professionnelle ou affective.
Spécialement pour La Russie d’Aujourd’hui
La Russie d’Aujourd’hui
victor vasenin_rg
Paris, pour moi, c’était comme un
veronika dorman
La Russie d’Aujourd’hui
ne fera de compliments gratuits et les reproches sont clairement formulés”,s’accordent les Français. En fait, il suffit de peu: beaucoup d'humour et autant de patience. Sans oublier quelques petits trucs simples comme “privet”, qu'on apprend très vite, pour affronter les distances infinies, les commerçants maussades, voire les frimas. Les“taxis sauvages”vous mènent d'un bout à l'autre de la mégalopole pour trois roubles six kopeks, un sourire désarmant transforme les Charybde et Scylla du rayon Fromages en bonnes fées, et, bien sûr, rien ne réchauffe tant qu'un bon petit verre de vodka, en chaleureuse compagnie.
dessin de dmitri divine
Et puis il y a des gens qui s'y retrouvent par hasard, sans préméditation. Comme ces jeunes, frais émoulus d’écoles et d’universités, à la recherche de travail et d'émotions fortes. De Moscou, ils ne savent rien. On leur aurait dit Mexico, ils y seraient allés de la même façon. La Russie, pour eux, c’est avant tout l’ailleurs, une destination lointaine, qui permet de fuir l’inertie et la saturation du marché de l’emploi français.“C’est l’inconnu. En plus c’est loin, c'est grand, ça fait un peu peur, parfait pour une expérience à l’étranger”,raconte Guillaume, rédacteur web d’un journal local. Au premier abord, Moscou apparaît comme une cité infinie, chaotique, peuplée de gens bourrus et violents, semée d’embûches administratives. A l’abord suivant, “c’est une ville qui vit à 200 à l’heure, qui ne dort jamais, où il se passe toujours quelque chose, et les Russes ont un sens démesuré de la fête”, dit Clément, venu travailler dans la filiale russe de Michelin. Sûr, c'est une cité infernale. Immense, assourdissante, aux artères bouchées par le trafic et la pollution, avare en bistros, restos et rues piétonnes. Mais, pour Guillaume,“ Moscou n'est ni hospitalière, ni inhospitalière. Elle ne te souhaite pas la bienvenue, mais pas la malvenue non plus. Il faut juste entrer dans la cadence”. Et dénicher un café cossu et un supermarché avec une modeste mais respectable sélection de bordeaux. Malgré la barrière de la langue,
les rencontres sont faciles et les amitiés se nouent. Il est d'ailleurs de plus en plus fréquent de rencontrer des Moscovites parlant anglais, ou même français, ouverts et curieux de l'étranger. “Les Russes sont entiers, francs et très directs. On peut être heurté au début, avec notre sens des convenances à nous, mais les relations sont saines, au boulot comme dans la vie privée. Personne
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Muriel Rousseau directrice de création à l'agence de communication “Lieu commun”
“La Russie, c’est un endroit où les projets les plus fous se réalisent, alors que les choses les plus simples, normalement, non. Il faut savoir être un peu héroïque tous les jours”. Muriel Rousseau, diplômée des Arts déco de Paris, est entrée en Russie d’abord par la littérature, puis en suivant son mari. C'est en 1988 qu'elle déménage à Moscou. L’agence de communication “Lieu commun”, qu’elle a fondée au milieu des années 1990, travaille surtout avec les entreprises françaises implantées en Russie – Total, Givenchy, Président, parmi tant d’autres. “C’est parce que c’était le Far East pendant mes premières années de vie ici que j’ai pu accomplir tout cela. On n’était pas à l’étroit, on n’était pas obligé de correspondre à des cases, tout était à construire”. Elle est aussi à l’origine du célèbre restaurant français de Moscou, le “Jean-Jacques”, conçu comme un bistro parisien, avec une carte des vins exhaustive et un bar en zinc. “Mon objectif est de traduire cette culture qui m’est si chère dans un langage compréhensible pour les Russes, de leur transmettre nos goûts et coutumes”.
editor.france@rg.ru
Jacques der Megreditchian partenaire à la banque Troika Dialog et président du Conseil de la bourse RTS
“Je ne suis pas venu à Moscou par choix mais un peu par hasard”, reconnaît Jacques der Megreditchian. C'était en 1993. Il ne l'a jamais regretté et énumère sans peine les avantages de la vie en Russie. “Ce n'est qu'à trois heures et demie de vol de Paris et pour ce qui est de la mentalité, c'est assez proche. Et il y a aussi le fait que des impôts à 13%, ce n'est pas pour me déranger! Ce qui me plaît, c'est que la Russie est en mutation. J'aime bien le caractère national, je trouve les Russes sympathiques et amusants. Le sens de la mesure n'est pas leur première qualité, ce sont des gens entiers, pas des calculateurs”. Il y a les “moins”, bien sûr : “Le temps évidemment: plafond nuageux et six mois de grisaille. Les bouchons sont terribles, bien pires qu'à Paris ou à Londres”. Quant aux loisirs, ils sont limités, à cause du boulot. “Je travaille plus de 70 heures par semaine. Je finis rarement avant 22h, donc pour moi, les théâtres, c'est raté! Mes loisirs, ce sont les dîners avec les copains. Mais en réalité, pour bien décompresser, je pense qu'il faut partir assez souvent à l'étranger!”.
NIKOLAY KOROLEV
“En immersion” depuis plus de quinze ans, trois Français racontent
archive personnelle
pour le dernier train Paris-Londres. - Dis, c’est quoi ton histoire avec Paris? - C'est-à-dire? - Qu’est ce qu’il y a là-bas pour que tu aies si hâte d’y retourner? Tu pourrais rester encore deux jours de plus. T’as une nouvelle histoire d’amour, ou quoi? C’est ça. Une histoire d’amour. Ressemblant presque à un mariage. Mon histoire avec Paris a commencé il y a près de dix ans. De nombreux compatriotes ne comprennent pas ma fidélité. Londres, c’est mieux que Paris, disent les Russes. Et je sais même pourquoi. Il y a trois raisons à cela: la langue, que mes compatriotes connaissent plus souvent que le français. Le système fiscal britannique, qui (au moins jusqu’à récemment) leur convenait mieux que le système français. Et le fait que l’Angleterre soit devenue un refuge, au sens littéral du terme. Londres aurait été plus logique pour moi car je parle anglais depuis l’enfance. Mais c’est Paris qui est arrivée, et j’ai cessé de m’en étonner le dixième jour de ma vie dans cette ville. Premièrement, ce jour-là, des Français pure souche m’ont demandé en français authentique où se trouvait le musée Picasso. Et ce même jour, le patron du café en face de chez moi, en levant la tête vers mes fenêtres, m'a dit, en passant: “Tu devrais t’occuper de tes géraniums, ils font peine à voir”. Bizarrement, il m'a soudain reclassée de la catégorie “étranger” à la catégorie “indigène”. Parfois je me surprends à réagir aux événements en France en tant que citoyenne, et non en journaliste étrangère censée évaluer l’actualité avec un regard impartial d’observateur. Par exemple, en apprenant la vague inhabituelle de suicides à France Telecom, j’ai failli commencer mon papier ainsi: “France Telecom peut pousser n’importe qui au suicide, y compris ses clients!” Tant il est vrai que quelque chose n’y tourne pas rond. Depuis quatre mois, mon téléphone ne marche plus bien que je paie toujours mes factures. On me répond que la raison en est inconnue, et que personne ne peut se déplacer pour régler le problème. - Tu pourrais te fixer une fois pour toutes: tu vis en France ou tu y travailles? interroge une amie moscovite quand je lui raconte tout cela. Elle pense que si je prends conscience du caractère temporaire de mon séjour dans un autre pays, ma vie sera plus simple. Mais là est toute l’ironie du sort d’un correspondant étranger. Tu partages le destin du pays dans lequel tu travailles. Ton cœur saigne quand des événements tragiques s’y produisent. Tu as ton favori dans la course présidentielle mais tu dois le cacher à des lecteurs qui exigent l'impartialité. Tu as ton propre avis sur l’affaire Jean Sarkozy. Mais ta mission est de raconter ce qu’en pensent les Français. Tu peux te dire: je suis un hôte dans le pays dans lequel je vis, mais si tel est ton sentiment après y avoir vécu dix ans, c’est que tu n’as absolument rien cherché à comprendre au pays, ni à toi-même. Et ce n’est qu’exceptionnellement, ayant enfreint le code de circulation routière, que tu joues à l'étrangère. Les policiers français réagissent avec indulgence, et me laissent repartir avec un seul avertissement. Pour ma propre sécurité!
Souvenirs, souvenirs... Mon Paris à moi
Moscou, ville ouverte
archive personnelle
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Pierre-Christian Brochet entrepreneur et collectionneur d’art contemporain russe
Venu en Russie à la veille de la chute de l’URSS, Pierre Brochet s’est d’abord occupé des beaux livres de Flammarion à l’international, avant de s’associer à la publication des guides Le Petit Futé en russe. Surtout, marié à l’artiste Annouchka, il a commencé, dès son installation en Russie, à accumuler les œuvres des artistes qui n’avaient jamais quitté le pays, fondant ainsi une collection qui englobe pratiquement tous les principaux acteurs de l’art contemporain russe des vingt dernières années. Cette collection unique a fait de Pierre Brochet un pilier du milieu. Son objectif, désormais, consiste paradoxalement à faire connaître cet art russe... aux Russes! Pendant deux ans, une exposition à tourné dans les grandes villes de province. “Ce serait inimaginable en France, qu’un Russe débarque pour montrer l’art français aux Français, alors que j’ai été accueilli partout à bras ouverts”, s’exclame-t-il. “La vie en Russie est chaotique, compliquée, mais tellement plus intéressante. Il faut juste savoir rester zen. Et n’avoir peur de rien... pour ne pas avoir peur de tout!”.
mauvais conte. Cette ville tant vantée, mille fois célébrée, qui s’enorgueillit de sa culture, de son patrimoine et de ses – beuark! – cuisses de grenouilles... Je voyais en Paris un vieux héros guindé, crânant avec sa Tour Eiffel et son Edith Piaf farfelue que je ne supportais plus depuis l’enfance. Et puis ce mythe sur les relations si particulières entre la France et mon pays que je devais, moi, en tant que journaliste soviétique envoyé sur place par un grand journal, faire mousser... Pendant les premiers mois, alors que je devais m’accréditer au Quai d’Orsay et faire les démarches interminables pour la carte de séjour, Paris n’était pour moi qu’un ramassis terrifiant de fonctionnaires sans âme, que seules les boîtes de caviar faisaient réagir. Et quand un collègue aîné, qui a détesté cette ville toute sa vie, déclara: “Il faudrait vider Paris de tous ces Français, quelle ville ce serait alors!”, j’ai failli applaudir. Phrase idiote, absurde, blasphématoire, parce que même avec mon mauvais français de débutant je comprenais progressivement que Paris était véritablement magnifique. Au Musée d’Orsay (non, pas au Quai), j’étais toujours attendu par mes amis impressionnistes. Même la Tour Eiffel, à sept minutes de marche de chez moi, était, je ne sais comment, devenue mienne. Plongé dans mes pensées, je sortais sur mon minuscule balcon, avenue de Suffren, et, scrutant ses contours limpides comme le jour, j’y puisais des forces mystérieuses. Le métro parisien, avec son odeur aigrelette, m’est devenu aussi familier que celui de Moscou, mais en plus pratique et plus courtois. J’ai vite saisi les concepts, d'abord incompréhensibles, de “quartier” et de “gens du quartier”. C’est le pharmacien, qui s’enquiert de la santé de mon fils et me conseille les meilleurs remèdes. C’est aussi la vendeuse de journaux, qui me met de côté mes titres favoris: Le Figaro, L’Équipe et l’inévitable “Huma” pour le journaliste soviétique. Oui, la bureaucratie est terrible. Oui, parfois, on sent une inimitié envers les étrangers. Mais c'est un autre esprit qui domine ici. C'est De Gaulle qui, du haut des ses deux mètres, a pu tenir tête aux Américains. C'est le sage Mitterrand qui jamais n’a repoussé son voisin éloigné. C'est Chirac, qui a traduit “Eugène Onéguine” de Pouchkine. Et c'est le nouveau gars de l'UMP, toujours dressé sur ses talons et qui, avec son étrange nom de Sarkozy, a prouvé aux tenants de la pureté du sang qu’un immigré de la deuxième génération pouvait devenir le chef des Français. Ah, diable! Paris m’a converti à sa foi, simplement et sans demander mon avis. Franchement, quelle est la ville la plus attrayante au monde (Moscou ne compte pas)? Qelles sont les voitures les plus confortables? Les françaises, c’est clair. Vous me demanderez peut-être quelle cuisine et quels vins sont les meilleurs? Ne soyez pas naïfs. Les vêtements? Tout, mais pas ça. Je m’habille depuis 22 ans (ça fait peur) dans un immense magasin, un dépôt où plusieurs générations de vendeurs se sont succédées mais le bon goût est demeuré. C'est d’ailleurs l’enseignement du grand Cardin qui nous a mis sur le chemin de la vérité en 1987: “Choisissez-vous un style et un bon magasin pour toute la vie, et ne pensez plus à la mode. Elle restera d’elle même avec vous”. Nikolaï Dolgopolov est le rédacteur-enchef adjoint de Rossiyskaïa Gazeta. Il fut correspondant à Paris de la Komsomolskaïa Pravda entre 1987 et 1993.
Opinions
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.RBTH.RU COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO
EN FINIR AVEC LA “GUERRE FROIDE” MIKHAÏL GORBATCHEV
SPÉCIALEMENT POUR ROSSIYSKAYA GAZETA
Pendant l’été 1989, lors de ma visite en RFA, les journalistes nous interrogeaient, le chancelier Kohl et moi-même sur la possibilité d’une réunification de l’Allemagne. Je répondais que ce problème avait une origine historique et qu’il serait réglé au cours de l’histoire à venir. Quand? Certainement au XXIème siècle, disions-nous tous deux. On peut nous accuser d’avoir été de piètres prophètes. En effet, la réunification eut lieu beaucoup plus tôt, selon la volonté du peuple allemand. Et pas parce que Gorbatchev ou Kohl l’ont décidé. Aux États-Unis, on cite souvent l’appel du président Reagan: “Monsieur Gorbatchev, abattez ce mur!”Mais ce n’était pas l’affaire d’un seul homme. D’autant plus qu’une autre position existait:“Sauvez ce mur!” Après la réunification, tout ne s’est pas pour autant passé comme nous l’aurions voulu. Y compris en Allemagne. Une division longue de quarante ans entre deux États allemands a débouché sur des ruptures, dans les domaines spirituel et humain, plus difficiles à surmonter que dans l’économie. Les Allemands de l’ex-RDA ont vite compris que tout n’était pas idéal en République fédérale, surtout dans le système de la sécurité sociale. Mais en dépit de tous les problèmes de “soudure”, les Allemands sont parvenus à faire de l’Allemagne unie un membre digne, puissant et pacifique de la communauté internationale. Cependant ceux qui, dans ces années-là, façonnaient la politique mondiale – et européenne en particulier –, ont beaucoup moins bien géré les possibilités qui s’offraient à eux. Au lendemain de la fin de la “Guerre froide”,nous avons évoqué la création de nouveaux mécanismes de sécurité sur notre continent. Il s’agissait d’un Conseil de sécurité pour l’Europe ou d’un
genre de “directoire”, investi de pouvoirs réels et étendus. Malheureusement, les événements se sont déroulés selon un tout autre scénario. Ceci eut des conséquences pour toutes les institutions européennes, et ralentit l’édification d’une Europe unie. De nouvelles lignes de démarcation ont remplacé les anciennes. Des guerres ont éclaté en Europe, du sang a coulé. La méfiance et les stéréotypes caduques ont survécu. La Russie est soupçonnée d’intentions néfastes, voire même agressives et impérialistes. J’ai été sidéré par la lettre que les hommes politiques d’Europe centrale et orientale ont adressée au pré-
Le modèle des relations avec les autres pays, fondé sur une “absorption” rapide au sein de l'UE, tout en laissant les relations avec la Russie dépérir, a fait long feu. sident Obama. C’était pratiquement un appel à refuser toute interaction avec la Russie. Il est honteux que ces politiciens n’aient pas pensé aux conséquences catastrophiques que pourrait avoir une nouvelle confrontation. En même temps, en Europe, s’impose un discours sur la responsabilité du déchaînement de la Seconde Guerre mondiale. Et l’on veut comparer l’Allemagne nazie à l’Union soviétique. De telles tentatives sont vicieuses. Elles contredisent la vérité historiquement et éthiquement. Ceux qui veulent élever en Europe un nouveau mur de méfiance et d’animosité mutuelles ne rendent pas service ni à leur propre pays, ni à l’Europe dans son ensemble. Cette dernière ne pourra devenir un facteur puissant du développement
Billet de l'amitié
mondial qu’à la condition de devenir une véritable maison commune pour tous les Européens, à l’Est comme à l’Ouest. Comment poursuivre un tel objectif? Au début des années 1990, l’orientation choisie était un élargissement de l’Union européenne. Je ne remets pas en question les acquis de ce processus. Ils existent réellement. Mais tout n’a pas été soigneusement pensé. L’idée selon laquelle tous les problèmes du continent seraient réglés par la construction de l’Europe par l’Ouest s’est avérée excessive. Mais il semble que tout le monde en Europe ne soit pas prêt à l’admettre. Nous pouvons légitimement nous poser la question suivante: cette indécision n’est-elle pas liée au refus de participer à la renaissance de la Russie? De quelle Russie avez-vous besoin? Forte, vraiment autonome, ou simplement d’un fournisseur de ressources qui “sait rester à sa place”? En Europe, malheureusement, de nombreux politiciens voudraient appeler ce modèle inégalitaire de relations avec la Russie “enseignant-élève”, “procureur-accusé”.La Russie ne peut pas accepter un tel modèle. Elle voudrait être comprise. Nous sommes pour une collaboration d’égal à égal, mutuellement avantageuse. Pour surmonter les nouvelles épreuves historiques – la sécurité, la crise économique, l’écologie, les migrations –, il est indispensable de transformer la politique et l’économie mondiales, et européennes avant tout. J’appelle par conséquent tous les Européens à étudier de manière impartiale et constructive la proposition du président de la Russie sur un nouveau traité de sécurité européenne. Si elle résout ce problème, l’Europe pourra parler à pleine voix.
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Mikhaïl Gorbatchev est le dernier président de l’URSS.
LE CARBURANT DE LA DÉMAGOGIE ANDREÏ KOLESNIKOV
VEDOMOSTI
La cote de popularité du tandem Medvedev-Poutine a un peu baissé mais il est trop tôt pour parler d’une tendance. Il faut bien comprendre que la cote ne traduit pas le degré d'un soutien réel, mais plutôt l’indifférence de la société à l’égard de ce qui ce passe "en haut". Lorsqu'elle baisse, cela signifie que les citoyens deviennent moins indifférents aux événements. Des prix élevés paralysent l’économie et ses acteurs, ralentissent les réformes, atrophient le pouvoir et le peuple. Une cote de popularité élevée des dirigeants décourage l’activité politique, rend superflue la démocratie, et favorise l’apathie des citoyens. Les cotes actuelles transforment nos dirigeants en créatures célestes. En politique, il existe un "seuil de réalité": si l'indice descend vers la barre des 50%, nos dirigeants commencent à se sentir ramenés au rang de simples politiciens. Pour échap-
per à ce sentiment de vulnérabilité désagréable, deux solutions: visser les boulons ou entrer dans le jeu de la concurrence politique. C'est-à-dire faire ses preuves devant des auditoires très larges, concevoir des tactiques cohérentes, adopter une stratégie, non plus seulement déclarative, mais réelle, afin de maintenir son rang dans l'arène politique. La faiblesse des prix du pétrole et celle de la popularité du pouvoir sont propices à la création d’un environnement concurrentiel et à la diversification économique et politique. La première est l'indice d’une économie de marché saine, la seconde, le signe de l’existence d’une concurrence démocratique. Au fond, les deux conditions sont à l’avantage du gouvernement, des entrepreneurs, des hommes politiques et du peuple russe. La concurrence politique n'exclut la possibilité d'une forte popularité de tels ou tels hommes politiques. Mais elle les oblige à ne pas se contenter de pratiquer l’autopromotion et le populisme, à agir concrètement et efficacement.
C’est la même chose dans le cas du pétrole: si les prix sont bas, le vendeur doit se démener et améliorer son efficacité pour dégager des bénéfices dans un marché où règne la loi de la demande. C’est ce qui caractérise le contrat social de la période des prix faibles du pétrole, qui est aux antipodes d’une conjoncture où le cours du baril s'envole. Dans ce dernier cas, le contrat est le suivant: laissez-nous gouverner à notre guise et en échange, vous obtiendrez une petite part de notre rente gigantesque. Lorsque le baril est au plus bas, la rente est faible, elle doit par conséquent être distribuée de manière plus équitable. L'Etat veille alors au bien public, sans démagogie ni intervention excessive dans nos vies. Vous nous laissez travailler normalement et nous vous payons des impôts en contrepartie.
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Andreï Kolesnikov est un journaliste indépendant. Il a collaboré notamment avec les Izvestia.
Lu dans la presse
UN PASSÉ QUI NE PASSE PAS
Le “problème Staline”
une figure déstabilisante. On n’empêchera jamais la guerre d’être sanctifiée, il faut donc absolument régler “le problème Staline”. Sauf qu’à la place d’un personnage historique réel, nous avons le choix entre deux caricatures: le maniaque paranoïaque ou le chef infaillible.
Vadim Nesterov
Pas d’excuse pour les bourreaux
La victoire dans la Seconde Guerre mondiale est le seul élément de notre histoire qui nous unisse tous, et le Jour de la Victoire est la seule fête nationale célébrée à l’unanimité. Face à toutes sortes d’accusations, la société russe a démontré avec véhémence que la sacralisation de la Guerre pour nous n’est pas une prescription, mais un instinct. La moindre tentative d’en réviser les représentations canoniques rencontre une résistance farouche, non pas dans l’État, mais au sein de la société. Cette sacralisation a fini par entrer en contradiction avec l’image du début des années 90 qui fait de Staline une sorte de vampire. Tout simplement parce que Staline a réellement pris part à la victoire, et de manière conséquente. On peut contester l’importance de sa contribution, mais on ne peut nier le fait que c’est lui qui dirigea le pays et l’armée pendant la guerre. Le véritable problème aujourd’hui, c’est que Staline est
La mémoire des tragédies nationales est aussi sacrée que celle des victoires. Le 30 octobre, c’est le jour de la mémoire des millions de vies brisées, de gens fusillés sans procès, envoyés en exil et dans les camps, victimes de ne pas avoir la bonne origine sociale ou la bonne profession. Mais on entend dire encore aujourd’hui que des raisons d’État supérieures justifiaient la répression. Je suis convaincu qu’aucune ambition nationale ne peut se réaliser au prix du malheur humain. Rien ne peut être placé au-dessus de la valeur de la vie humaine. Rien ne saurait justifier les répressions quelles qu'elles soient. En rétablissant la justice historique, il est essentiel de ne pas disculper ceux qui ont massacré leur peuple. Il est vrai aussi que les crimes de Staline ne doivent pas minimiser l'exploit du peuple russe, qui a gagné la Seconde Guerre mondiale.
Dmitri Medvedev
DESSIN DE DMITRI DIVINE
Staline ne cesse de semer la discorde parmi les Russes. Pour les uns, il a fait la gloire de l’URSS, et pour les autres – son malheur. L’opinion s’est récemment enflammée au sujet de la restauration de sa statue dans le métro moscovite.
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“Et vous, Staline, vous l’auriez mis où?” Nikolaï Drozdov, présentateur de télévision: "Dans les manuels. Staline est une figure historique et il faut en donner une représentation objective, au lieu de semer la discorde dans la société". Vladimir Jirinovski, vice-président de la Douma: "Sur le banc des accusés d’un tribunal militaire. Et de là, sur l’échafaud, pour les répressions". Alexandre Prokhanov, rédacteur en chef du journal Zavtra: “Au Kremlin. Quand les leaders forts et intelligents manquent, les Russes se tournent instinctivement vers le passé glorieux du pays et ses chefs, véritables pères du peuple”. Ludmila Alekseeva, présidente du groupe Helsinki à Moscou: "Moi, je le chasserais de partout. Sa réapparition, c’est une insulte à toutes ses victimes et leur descendance".
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Préparé par Veronika Dorman
Vous aimez Dodine, nous aimons Ozon ! MIKHAIL CHVYDKOÏ SPÉCIALEMENT POUR LA RUSSIE D'AUJOUD'HUI DESSIN DE DMITRI DIVINE
En 2009, la Russie et la France fêtent le centenaire des saisons Diaghilev à Paris. Il y a cent ans, Serguei Diaghilev, un génial producteur, comme on aurait dit de nos jours, précipita sur le public français l’avalanche de la variété et de la richesse de la culture russe de la fin du XIXème-début du XXème siècle. On le sait, les novateurs de la scène française ont étudié très attentivement l’art de Stanislavski et de Nemirovitch-Dantchenko, qui ont pour la première fois étonné Paris en 1904, avec les spectacles du Théâtre d’art de Moscou. Leurs méthodes de formation de l’acteur passionneront des magiciens du théâtre français comme Copeau, Villard, Mnouchkine ou Brook, ce metteur en scène britannique qui s’est installé à Paris au milieu des années 70 du siècle dernier. Cela dit, le théâtre français possède sa propre tradition, inébranlable et conservée par la langue française, laquelle porte la mémoire à la fois historique et esthétique. Bien qu’elle soit très largement ouverte aux influences extérieures, la culture française, comme d'ailleurs la russe, prend seulement ce que lui est nécessaire, ni plus ni moins. C'est pourquoi, quelles que soient nos attirances et nos répulsions mutuelles, sur une durée plus que millénaire, nous conservons nos identités respectives. La relation négative à la version stalinienne, et soviétique en générale, du socialisme, qui s’est solidement ancrée en France depuis les années 1920, n’a pu être ébranlée même par notre lutte commune contre le nazisme. Et ce rapport est en grande partie projeté aussi sur la nouvelle Russie, que la France ne connaît pas assez bien, à mon avis, peut-être avant tout parce que des stéréotypes du temps de la Guerre froide on survécu dans la société française (comme dans la russe, au demeurant). C’est pour cela que la plupart des Français ne s’intéressent qu’aux œuvres qui ont toujours symbolisé la production artistique russe: les théâtres Bolshoï et Mariinsky, le Cirque de Moscou, l’avant-garde russe du début du XXème, l’iconographie et, bien entendu, Tolstoï, Dostoïevski, Tchekhov. Alors que la France et la Russie entretiennent des liens séculaires, alors que nos chefs d’État actuels s’entendent, aussi bien politiquement que personnellement, les Russes et les Français ont une représentation plutôt approximative les uns des autres, qui se plie aux clichés forgés dans les siècles passés, mais qui de toute évidence sont dépassés au XXIème siècle. On ne peut pas dire que nous soyons indifférents les uns aux autres. Il suffit de nommer le travail collectif des ballets du Bolchoï et de l’Opéra Garnier; l’immense succès de la tournée à Paris (jusqu’au 7 décembre) du Théâtre d’Europe de Saint-Pétersbourg, sous la direction de Lev Dodine; ou bien l’incontestable excitation que provoque dans le public russe la sortie d’un roman de Houellebecq ou d’un film d’Ozon, tout comme l’investissement de l’entreprise française Renault dans l’industrie automobile russe. Mais il est clair que cet intérêt mutuel mérite bien mieux. Michail Chvydkoï est Commissaire du Comité d’organisation pour la Russie de l’Année FranceRussie et ancien ministre de la Culture.
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Culture
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.RBTH.RU COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO DMITRI LEKAY_KOMMERSANT
Cuisine Fusion imposée !
Musique Par la magie de son archet, Yuri Bashmet a transformé à jamais le violon alto en le plaçant au premier rang de l'orchestre
JENNIFER EREMEEVA
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
DMITRI LEKAY_KOMMERSANT
SVETA TAYLOR
Monsieur Alto ELENA FISHER
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
Chef d’orchestre ou soliste, il joue avec les meilleures formations symphoniques de la planète. L’alto occupait une place modeste parmi les instruments de musique, jusqu’à ce que Bashmet, à la tête du département d’alto expérimental au Conservatoire de Moscou, fasse œuvre de pionnier en lui donnant ses "notes" de noblesse. L’alto est désormais prisé, et le mérite de cette métamorphose revient à Bashmet. L'homme n'est pas avare de déclarations choc, telles que cette remarque sur ses camarades d'étude au département alto du Conservatoire de Moscou où "les garçons étaient des crétins et les filles... des grosses!" Yuri Bashmet est devenu un label, une figure culte, de l’or pour le box-office: il se produit dans les salles les plus prestigieuses; il préside à l’un des plus élégants festivals de musique de Moscou, les Soirées de décembre, jadis le fief du
célèbre pianiste Sviatoslav Richter; il dirige avec poigne l’orchestre de chambre Les Solistes de Moscou et le Nouvel Orchestre symphonique russe. Le public le suit quelle que soit l’œuvre interprétée, sa participation garantit un spectacle à guichets fermés et ses émissions de télévision connaissent une audience grandissante. C'est ainsi qu'a eu lieu, fin octobre à Moscou, le concert des Solistes de Moscou, sous la direction deYuri Bachmet, qui a rassemblé douze violons, altos, et violoncelles fabriqués par les grands maîtres italiens Stradivari, Guarneri, Ruggieri. Cet événement exceptionnel, sans précédent dans l'histoire orchestrale, concluait la tournée en Russie d'une collection d'instruments rares, appartenant au gouvernement. "Je pense qu'il faudrait enregistrer un dis-
Le concert à Paris Gidon Kremer a réuni pour la soirée du 1er décembre trois “fidèles”: l’altiste Yuri Bashmet, la jeune violoncelliste allemande Marie-Elisabeth Hecker, Premier Grand Prix du Concours Rostropovitch en 2005, et le pianiste Oleg Maisenberg, concertiste international et pédagogue réputé (il enseigne depuis 1998 à l’Université de Vienne).
que avec ces instruments de la collection nationale pour que le reste du monde puisse les entendre", dit Bachmet; "et puis, ce serait bien de partir en tournée dans les capitales européennes". Bashmet est ouvert à tous les genres, du répertoire académique aux expérimentations d'avant-garde. Aujourd'hui encore, il n'hésite pas à se produire en duo avec des chanteurs. Ou, recouvert d'une cape, à accompagner à la batterie un chant cosaque fougueux. Il a récemment fait ses débuts au cinéma dans le film Assa-2 de Serguei Soloviev. Mais il revient toujours à la musique classique traditionnelle, dans laquelle, selon ses propres paroles, on peut lire "des messages d'éternité". Pour lui, jouer n'est pas une façon de fuir la réalité mais d'élargir son univers, et la musique classique n'est pas un musée mais une force vivante. Il a une vision simple de son art: "si tu étudies la musique, ton seul dieu est le compositeur". Et dans la vie, Bashmet a besoin de revenir à son "chez soi", refusant de poser sa valise dans un quelconque paradis terrestre. "Je veux être libre, garder le droit de choisir", dit-il. "Si je partais, j’aspirerais à rentrer. Moscou est le centre créatif. Paris et Munich sont des villes dans lesquelles il est agréable d’arriver, et dont il est bon de repartir".
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"RussoFolies" au Kremlin... Bicêtre! Les Russes ont leur équivalent de la francophonie: la russophonie. La ville du Kremlin-Bicêtre a été choisie comme terre d’accueil pour un festival offrant les 29, 30 et 31 janvier 2010 au public parisien un festival de théâtre et de peinture, de musique et de danses, d’échanges sur les sciences et les techniques. MARIA AFONINA
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Qui se pique de connaître les lettres ne peut pas ne pas vouer un culte aux auteurs russes. La littérature sera donc en toute logique l’un des axes de ces rencontres placées dans le cadre de l’Année croisée France-Russie, avec la présence de plusieurs plumes célèbres de la littérature russophone actuelle, notamment Lioudmila Oulitskaïa et Andreï Kourkov ou le poète diplomate Aljas Souleïmenov, un salon du livre russe avec de nombreuses présenta-
A l'affiche Le 17ème Festival du cinéma russe à Honfleur 25-29 novembre, Calvados, BasseNormandie
Toutes les meilleures nouveautés russes à deux heures de Paris. Il y en a pour tous les goûts: longs et courts métrages, documentaires et films d’animation, répartis en différentes sections (Compétition, Panorama, Rétrospective, Documentaires, Jeune public). "Palata N°6" de Karen Chakhnazarov et "Tsar" de Pavel Lounguine, les deux grands films russes
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Le 1er décembre, la Salle Pleyel de Paris accueillera la musique d’un homme que l’on surnomme désormais "le nouveau Paganini". Yuri Bashmet est le premier joueur d'alto à donner des concerts en solo dans les capitales culturelles du monde entier. Quelque cinquante pièces ont été composées pour lui, ou lui ont été dédiées.
tions nouvelles, des lectures d’Agnès Desarthe, des tables rondes et la remise du 4ème prix Russophonie le 30 janvier, pour la meilleure traduction du russe en français. "Le fait qu’elles se déroulent au Kremlin-Bicêtre ne doit rien au hasard ni du point de vue médiatique ni du point de vue historique, puisque le nom de cette ville vient d’un cabaret tenu part un ancien grognard, à proximité de l’hospice des anciens combat-
tants où se sont repliés les rescapés de l’armée napoléonienne, après la retraite de Russie", explique Dimitri de Kochko, inventeur du "festival" et président de l’Association FranceOural. "Le Révizor" de Nicolas Gogol sera monté au théâtre municipal dans une mise en scène inédite de Nikolaï Kolyada, originaire d’Ekaterinbourg (Oural). Moins connue, la pièce "Les Métamorphoses" du Théâtre "Tien’" ("Ombre" en russe) sera présentée dans une mise en scène de Maïa Krasnopolskaïa et Ilia Epelbaum.
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de l'année, seront présentés pour la première fois au public français. Autre moment fort du festival: du ciné-concert avec la projection du film de Boris Barnet "La Jeune fille au carton à chapeau" (1927), sur une musique originale composée par Vadim Sheret et interprétée par Vadim Sher (piano) et Marie Grémillard (violon).
dans leur chorégraphie d’origine. Au programme: "Le Tricorne", "Le Spectre de la rose", "L’Après-midi d’un faune" et "Petrouchka". Les ballets sont présentés par Les Étoiles, les Premiers Danseurs et le Corps de Ballet, Orchestre de l’Opéra national de Paris sous la direction musicale de Vello Pähn.
Les Ballets Russes de Diaghilev ont 100 ans 12 - 28 décembre, Palais Garnier/Opéra de Paris, Paris
Envoyez-nous vos suggestions à
http://www.festival-honfleur.fr
Quatre oeuvres qui ont marqué le 20ème siècle en réunissant l’élite artistique de leur temps – choréographes, peintres et musiciens –, sont présentées
http://www.operadeparis.fr
editor.france@rg.ru
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Pour les Américains, la très regret-
tée Julia Child est synonyme de "French cuisine", et le plus célèbre cordon-bleu de la télévision américaine, son livre Mastering the Art of French Cooking ("Maîtriser l’art de la cuisine française") à l’appui. L’ouvrage est redevenu un best-seller: une nouvelle génération lutte pour désosser des canards, trouver trois jours pour la préparation d’un authentique cassoulet et perfectionner l’art impossible de transformer des œufs, du beurre et du fromage en un majestueux soufflé. Julia était aussi le meilleur exemple de ce qu’une expatriée devait être: aventurière, grégaire, prête à prendre le meilleur de son pays d’adoption pour le fusionner avec sa propre culture. Un exemplaire fatigué et graisseux de son livre a traversé l’Atlantique avec moi il y a 17 ans, quand je me suis lancée dans ma vie d’expat, ainsi que dans la fondation d’un ménage débutant avec mon HMR ("horrible mari russe"). Je ne connaissais pas la Russie mais n’avais aucun doute quant à la possibilité de trouver facilement crème fraîche, bouquet garni ou mangetouts dans mon épicerie de quartier. Mais la Russie des années 1990 était tout sauf un centre gastronomique. Le dollar avait inondé le marché, les importations de nourriture se limitaient à des cuisses de poulet et de l’Amaretto d’Italie, et croyez-moi sur parole, ils ne vont pas bien ensemble. Les magasins d’alimentation du coin offraient des réserves insuffisantes et un service revêche. La première année, en m’échauffant pour un dîner, je feuilletais le livre de Julia en quête d’inspiration, seulement pour le refermer violemment, avec frustration, quand elle m’enjoignait joyeusement de "demander à mon boucher de fendre le gigot d’agneau en deux et enlever l’os". Quel boucher? La seule viande que je pouvais trouver était congelée et vendue par des femmes effrayantes dans des magasins toujours sur le point de fermer. Toutefois, la bonne nourriture est universelle. Lentement, mais sûrement, j’ai trouvé mes marques en Russie. Je dépensais tout mon argent en cornichons français et vinaigre balsamique de Modène dans des magasins outrageusement chers pour diplomates et homme d’affaires. Et puis j’ai découvert les merveilleux marchés moscovites, emplis d’estragon, basilic, thym et romarin aromatiques, vendus par des femmes azéries souriantes, avec des dents en or et des yeux noirs pétillants. Je suis devenue amie avec Pacha, un vendeur de porc et d’agneau de Vologda, qui non seulement pouvait désosser un gigot, mais m’a même appris à le faire. Et je me suis arrangée avec Tania, une époustouflante fermière de volaille ukrainienne pour qu’elle me laisse de côté des filets de poulet tendre tous les samedis. En Russie, je suis devenue une cuisinière très confiante et inventive. J’ai appris à expérimenter, substituer et adapter. Le "salo" ukrainien (du lard) fait parfaitement l’affaire pour le Bœuf en daube, les groseilles russes donnent une excellente sauce aux airelles et rien ne bat la crème fraîche fermière russe pour épaissir et enrichir n’importe quelle sauce française. "Les bons Américains, quand ils meurent, vont à Paris", dit l’adage. Je suis sûre que Julia y est, mais je crois aussi qu’elle a relevé avec délectation le défi de m’accompagner en Russie. Je suis heureuse qu’elle l’ait fait. Bon appétit!
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