Distribué avec
Limonov ravi d’être le trublion des lettres La vie de l’ancien poète « underground » a inspiré un romancier français. P. 7
Le Lion de Venise pour Sokourov Quel dictateur se cache derrière le « Faust » du réalisateur russe le plus hermétique ?
Publié en coordination avec The Daily Telegraph, The Washington Post et d’autres grands quotidiens internationaux
P. 7 AP/EASTNEWS
Ce supplément de huit pages est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Russie), qui assume l’entière responsabilité de son contenu Mercredi 21 septembre 2011
Urbanisme Le Kremlin veut relocaliser les grandes institutions politiques hors des murs de la capitale
POLITIQUE & SOCIÉTÉ
Moscou va se donner de l’air
Inquiétudes sur la sécurité aérienne
Dmitri Medvedev souhaite bousculer le train-train des hauts fonctionnaires et désengorger le centre de la capitale. Du coup, Moscou va radicalement s’agrandir.
REUTERS/VOSTOCK-PHOTO
ANTON MAKHROV
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
La Russie détient cette année le record mondial des victimes d’accidents d’avions. La presse évoque la vétusté du matériel des petites compagnies. PAGE 2
Une nouvelle vie pour le parc Gorki
SUITE EN PAGE 2
La future cité administrative, qui accueillera les fonctionnaires dans la banlieue de Moscou, permettra de désengorger la capitale.
Viticulture Un entrepreneur produit un « champagne » russe
PHOTO DU MOIS
Un mousseux bien de « chez nous » !
199 ans après Borodino
Le « champagne » des tsars actuellement fourni au Kremlin est fabriqué dans le sud de la Russie selon des techniques françaises. VERONIKA DORMAN
SPÉCIALEMENT POUR LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
mer Noire, pour venir acheter du « champagne » Abrau-Durso et passer quelques jours dans le cadre idyllique du village viticole lové dans les collines verdoyantes de la région de Krasnodar, au bord du lac Abrau. Depuis qu’il a été repris par l’oligarque Boris Titov, le domaine Abrau-Durso, fondé en 1870 par le tsar Alexandre II, est en pleine expansion. Avec 13 millions de bouteilles par an et un chiffre d’affaires de 48 millions d’euros, le quatrième producteur de vin mousseux en Russie aspire à
aménager un petit coin de paradis champenois lucratif dans le Midi russe. En misant sur une riche histoire et le prestige de la marque, Titov est confiant dans l’avenir : « Du point de vue de la réussite, notre premier objectif est une introduction en bourse prochaine, pour le début 2012 ». L’entreprise, estimée à 70 millions d’euros, proposera 15% des parts aux investisseurs. Installé dans son vaste bureau lumineux et élégant, Titov nous reçoit entre deux réunions. Aux murs, diplômes et récompenses, des photos sépia des premiers œnologues français, la propriété avant la Révolution, à l’époque soviétique. Mais cette page est tournée. SUITE EN PAGE 5
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OPINIONS
La Russie et l’Europe face à l’immigration Le 4 septembre, la campagne autour du village de Borodino a été le théâtre d’une reconstituion historique de la bataille
de la Moskova (Borodino pour les Russes) où, en septembre 1812, l’armée napoléonienne subit d’énormes pertes.
Trop vieux à 40 ans
Alstom transfère
Délices d’antan
La discrimination envers les salariés seniors s’accentue et la course à l’emploi est perdue d’avance passé 40 ans.
Le groupe français convoite l’énorme marché de la grande vitesse russe et appâte les autorités en offrant un accès maximal à ses dernières technologies.
Le « Musée des saveurs oubliées » à Kolomna a ressuscité de succulentes friandises pré-révolutionnaires comme la pastila, à base de chair de pomme.
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PHOTOXPRESS
L’immense parc Gorki, autrefois le lieu de repos préféré des Moscovites, a gagné au fil du temps une mauvaise réputation. Un milliardaire veut lui donner une deuxième chance.
ITAR-TASS
« Chaque année depuis six ans, nous venons faire le plein de champagne pour le réveillon. C’est un rituel ». Tamara et Alexeï, la cinquantaine pétillante, ont parcouru 1 700 km, de Nijni-Novgorod vers les côtes de la
PHOTOXPRESS
AFP/EASTNEWS
Les objectifs du président tombent sous le sens : « Améliorer le développement de la mégalopole de Moscou et simplement rendre plus facile la vie d’un grand nombre de personnes ». La tâche est pharaonique : construire à partir de zéro une ville de 100 000 à 500 000 âmes. « Que la ville des fonctionnaires soit modeste, oui, mais elle doit être autonome », estime Mikhaïl Khazanov, vice-président de l’Union des architectes de Moscou. « Les organes supérieurs du pouvoir fédéral, ce ne sont pas uniquement des bureaux. Il faut aussi des logements, une infrastructure sociale, des transports et des structures commerciales offrant des services aux personnes », poursuit l’architecte. Contrairement à ce qui était attendu, les fonctionnaires ont montré une surprenante bonne volonté. Il leur avait pourtant été imparti très peu de temps.
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PAGE 8 SERVICE DE PRESSE
www.larussiedaujourdhui.fr
SOVIET KITCH : LES ICÔNES DU DESIGN
L’expert russe Vladislav Inozemtsev pointe du doigt les parallèles et les différences entre les politiques migratoires en Europe et en Russie. PAGE 6
LORI/LEGION MEDIA
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Politique & Société
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.larussiedaujourdhui.fr communiqué DE ROSSIYSKAYA GAZETA distribué AVEC LE FIGARO
Élections Ankvab, nouveau président
L’Abkhazie à l’ombre du grand frère russe
Les hauts fonctionnaires relocalisés en banlieue photoxpress
suite DE la première PAGE
Afin de préparer les options du « grand déménagement », Med vedev leur a donné moins d’un mois. Des représentants de la municipalité s’étaient plaints d’un délai trop court, mais ils sont néanmoins parvenus à le respecter. Les autorités régiona les ont d’ores et déjà accepté de transférer à la ville une zone dé limitée par les routes vers Kiev et Varsovie, et par le grand an neau de la voie ferrée de Mos cou. Y seront aménagés 105 mil lions de mètres carrés de sites, dont 45 millions de mètres car rés de bureaux et 60 millions de mètres carrés de logements. C’est à peu près le double du volume annuel de la construction dans toute la Russie. Le maire de Mos cou, Sergueï Sobianine, aura be soin de près d’un an pour ré soudre des problèmes que les experts comparent à ceux ren contrés par d’autres projets si milaires ailleurs dans le monde, et résolus, comme au Brésil. La capitale actuelle Brasilia a été créée ex-nihilo, le site choisi étant d’ailleurs loin d’être le plus confortable : au beau milieu de la jungle. C’est selon un schéma similaire qu’a opéré le président kazakh Noursoultan Nazarbaïev, lorsque la capitale a été trans férée d’Almaty à Astana. Cette démarche permet avant tout de rompre les liens corrompus entre les fonctionnaires et les re p r é s e n t a n t s d e d iv e r s e s élites. D’ailleurs, c’est une expé rience semblable qu’avait tentée au XVIIIe siècle le tsar réforma teur Pierre le Grand, en dépla çant la capitale vers les marais de Saint-Pétersbourg.
en Chiffres
La zone d’expansion de Moscou
100 millions
de mètres carrés : c’est la surface totale des différentes constructions prévues sur le nouveau territoire.
70 000
euros : c’est le prix estimé de transfert de chaque fonctionnaire dans le nouveau centre d’affaires.
x 2,4
La superficie de la municipalité de Moscou après l’expansion sera multipliée par près de deux fois et demie.
Pierre le Grand avait déplacé l’administration mais cette fois, il n’est pas question de changer de capitale Un autre dispositif a été mis en place en Birmanie et au Nigéria, où le centre du pouvoir a été im planté à partir de zéro dans un site difficile d’accès. Le rempla cement des grands commis de l’État n’était pas à l’ordre du jour. Au contraire, les autorités cher chaient à protéger les fonction naires contre d’éventuels trou bles sociaux. Enfin, une troisième option a été utilisée par les autorités de Ma laisie où a été fondée une ville ultramoderne réservée aux fonc tionnaires, à 20 km de Kuala Lumpur : Putrajaya, le nouveau
centre administratif du pays. Dans aucun de ces cas la ques tion d’un renouvellement radi cal de l’élite ne s’est posée, le processus étant principalement lié à des raisons de commodité et de gestion. À en juger par l’em placement du nouveau siège du pouvoir russe, l’option de Med vedev semble s’inspirer du mo dèle malais, car tous les sites pro posés sont faciles d’accès. Le chef de projet de la compa gnie de gestion immobilière Trin fiko, Artem Tsogoïev, reste mé fiant : « Nous faisons face à une situation où les institutions sont nominalement extraites de la capitale, mais néanmoins chacune d’elles devra conserver, outre le siège en région, une importante filiale à Moscou ». Dans tous les cas, le coût devrait être substantiel, estiment les ex
perts. « 12 à 15 mètres carrés par fonctionnaire seront nécessaires. La construction et l’équipement reviendront à environ 2 105 euros le mètre carré. Non seulement les fonctionnaires, mais aussi leur personnel a besoin d’espace. Le coût total du déménagement d’un officiel pourrait se situer entre 50 000 et 100 000 dollars (soit entre 35 000 et 70 000 euros)», calcule le partenaire gérant de l’agence immobilière Blackwood, Konstantin Kovalev. Les promoteurs du projet sont pourtant convaincus que ces dé penses seront rentabilisées. Le ministre des Finances Alexeï Koudrine estime que le transfert permettra de libérer des bâti ments dans le centre-ville. Si la vente en est bien gérée, le coût à long terme du projet pourrait être entièrement amorti.
lu dans la presse La colère après une série de catastrophes AÉRIENNES En quatre mois, quatre avions se sont écrasés en Russie, en faisant des dizaines de morts. À chaque fois, des appareils de conception soviétique. Après le crash du Yak-42 dans lequel ont péri 43 joueurs de hockey de haut niveau, le président Medvedev a exigé des mesures radicales. Mais les médias doutent de plus en plus de la capacité et des paroles du gouvernement.
Préparé par Veronika Dorman
Pavel Nikouline
specialement pour La russie d’aujourd’hui
L’Abkhazie est un coin subtro pical du Caucase, situé sur les rives de la mer Noire. Prisé pour ses stations balnéaires du temps de l’URSS, ce petit bout de pa radis est aujourd’hui à l’aban don. La région a été durement touchée durant le conflit mené en 1992-93 contre la Géorgie dont elle voulait se séparer. La majorité des Abkhazes dé tiennent un passeport russe et, par conséquent, sont en droit de voter aux élections présidentiel les en Russie. Mais c’est leur propre scrutin présidentiel qui a animé la saison estivale. Pour un touriste de passage, la procédure électorale peut pa raître étrange. Dès l’aurore, les gens se pressent aux bureaux de vote, bien avant l’ouverture of ficielle du vote. « Il y a encore une semaine, j’ai appelé Ankvab et je lui ai dit que je voterais pour lui », raconte Evgueni, un rapatrié né à Soukhoumi, la capi tale de l’Abkhazie, et rentré au bercail au moment de sa retraite. Cette accessibilité du pouvoir n’est pas une nouveauté en Abkhazie. Sergueï Bagapch, le prédécesseur d’Ankvab, aimait aller à la rencontre de la popu lation locale. D’ailleurs, de nom breuses réunions informelles se tenaient dans un petit café du bord des quais, non loin de l’ad ministration présidentielle. Le président s’asseyait à une table, commandait une tasse de café turc, allumait une cigarette. N’importe quel visiteur pouvait s’asseoir à sa table et discuter avec lui. Ce café présidentiel est appelé, aujourd’hui encore, la brekhalovka (du verbe russe brekhat, qui signifie tenir une conversation légère). La Russie apporte une aide élec torale à l’Abkhazie en contri buant à l’organisation du travail du centre de presse et à l’accueil des observateurs. Après le scru tin, les Abkhazes se rassemblent autour des bureaux de vote, se hissent aux fenêtres, et suivent attentivement le dépouillement. Les résultats officiels sont an
AP/eastnews
Le nouveau centre administratif doit permettre de désengorger les artères surchargées de la capitale.
L’ancien vice-président Alexandre Ankvab est devenu, le 26 août dernier, le troisième président de cette république qui s’est séparée de la Géorgie et rapprochée de la Russie.
Ankvab succède à Bagapch.
noncés le jour suivant, à midi, mais dans les quartiers généraux, les résultats sont connus à peine cinq heures après la fermeture des bureaux de vote. Evgueni est satisfait : son favo ri, Alexandre Ankvab, l’a empor té au second tour le 26 août. Le président de la Fédération de Russie, Dmitri Medvedev, a fé licité le nouvel élu dans lequel les Abkhazes sont nombreux à voir, ironiquement, leurVladimir Poutine. Mais il revenait à Med vedev de souhaiter « un renforcement des relations russoabkhazes ». Issu de la police, Ankvab cultive l’image d’un homme dur (il a sur vécu à quatre tentatives d’élimi nation au cours de sa carrière politique) et ferme, qui sera ca pable de remettre de l’ordre dans un pays dont la survie dépend du soutien économique de Mos cou. Le nouveau président, qui estime que l’Abkhazie a besoin de l’injection de liquidités rus ses pendant encore 5 à 10 ans, a « confirmé le cap sur le partenariat stratégique avec la Russie ». La Russie a été la première, dès 2008, à reconnaître la sou veraineté de l’Abkhazie à l’issue d’une guerre éclair avec la Géor gie. Pour sa part, l’Union éuro péenne maintient son soutien à l’intégrité territoriale de la Géor gie. Seuls trois autres pays, dont deux îles minuscules du Pa cifique, ont depuis emboîté le pas à Moscou. À défaut de reconnaissance di plomatique, l’Abkhazie a obtenu celle de la Fédération interna tionale de... domino ! Le mois prochain, sa capitale Soukhou mi accueillera les championnats du monde de cette discipline où sont représentés tous les pays membres des Nations Unies !
en bref photoxpress
la sécurité dans deux mois
catastrophe ordinaire
Des têtes doivent tomber
vedomosti
gazeta.ru
kommersant fm
Medvedev a chargé le gouverne ment d’élaborer d’ici le 15 novem bre une série de mesures pour li miter l’activité des « compagnies incapables d’assurer la sécurité des passagers ». Toutes les catas trophes de cette année ont impli qué des avions de petits transpor teurs, sur des lignes locales, ou des charters. Medvedev a annoncé la création d’un réseau moderne de compagnies qui couvriraient le pays entier en subventionnant les lignes intérieures et régio nales. Les directives du président attirent aussi l’attention sur le per sonnel navigant comme facteur clé de la sécurité des vols, sur sa formation et son niveau de quali fication.
Le matériel aéronautique rus se est dans un état moribond. Après chaque catastrophe, les fonctionnaires répètent les mê mes formules de circonstance sur la sécurité, la modernisation et le développement du parc aéro nautique. Mais les déclarations sur la nécessité de moderniser ne sont pas suivies d’effet. L’état des routes, des avions, des hôpitaux ou des centrales électriques est tel que le pays vit en permanence au bord de la catastrophe, devenue ordinaire. Le pouvoir doit radicale ment changer sa manière de gérer la vie du pays, qui ressemble dan gereusement à un avion fatigué et obligé d’atterrir d’urgence, avec des conséquences imprévisibles.
Quand est-ce que le ministre des Transports sera limogé ? Je n’ai rien contre lui, c’est sûrement un type bien, un bon père de famille. Mais si nous voulons, comme le répète souvent notre président, devenir un état de droit et une so ciété civile, nous devons élaborer quelques règles de bienséance. En premier lieu, un code de com portement des fonctionnaires. Il faut absolument qu’il y ait des li cenciements, car c’est un indica teur de la responsabilité de l’État face au peuple. Dans une société normale, le ministre de la Sécurité donne sa démission après une sé rie d’attentats. Chez nous, il reçoit une médaille et se rapproche en core des cimes du pouvoir.
Anastasia Dagaeva
Éditorial
Stanislav Koutcher
nouvelle Loi anti-tabac la méthode du tour de vis progressif Selon l’Organisation mondiale de la santé, 40% des Russes fument. Mais dès 2013, les cigarettes devront avoir disparu des kiosques de rue, et leur vente ne sera autorisée que dans les grands magasins. À la place des paquets : des listes de marques et de prix. À partir de 2014, l’interdiction de fumer s’étendra aux transports publics, aux bars et restaurants. Et dans les cages d’escalier, les fumeurs devront obtenir le consentement de tous les habitants de l’immeuble...
Politique & Société
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO
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Marché du travail La discrimination contre les seniors est une pratique qui se généralise et intervient de plus en plus tôt
Emploi : plus de 40 ans s’abstenir Pour de nombreux salariés de 40 ans et plus, perdre son emploi signifie pré-retraite forcée. Les recruteurs refusent de voir en eux des éléments productifs sauf cas particuliers.
Statistiques
ALEXEÏ BOÏARSKI
En Russie, l’âge limite pour travailler ne se situe pas autour de 60 ans, mais plutôt deux décennies plus vite. Pour la majorité des emplois, y compris les postes de cadre supérieur, les entreprises ne recrutent en effet qu’en dessous de la barre des 40 ans. La cinquantaine passée, trouver du travail relève de la gageure. « Entreprise recrute directeur général, âge maximum 40 ans... Directeur des ventes, âge maximum 35 ans... ». Dans la base de données du portail de recherche d’emploi Superjob.ru, 54% des offres affichent un âge maximum pour postuler. Selon le chef de projet du site de recrutement Rabota.ru, Evguenia Chatilova, dans 75% des cas, le recruteur indique l’âge souhaité du candidat. Et même quand l’âge n’est pas précisé, dans la plupart des cas, le critère existe implicitement. « J’ai trois diplômes supérieurs », témoigne Lioudmila. « Actuellement à la recherche d’un emploi, j’ai déjà répondu à 34 offres. Mais je n’indique pas mon âge. 19 employeurs m’ont contacté. En apprenant que j’ai 55 ans, 14 des recruteurs ont admi qu’ils avaient des restrictions d’âge ». Les rares offres destinées aux 45-50 ans sont pour des postes sans perspective d’évolution. « Les principaux problèmes auxquels se heurte l’ancienne génération : connaissance insuffisante de l’économie moderne, faible connaissance des langues étrangères, difficultés à adopter la culture de l’entreprise moderne et à s’adapter à un nouveau style de management. Par exemple, la limite d’âge pour un cadre moyen de la finance se situe entre 35 et 38 ans. On consi-
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KOMMERSANT
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La recherche d’un emploi se fait surtout par relations
dère que si le candidat a plus de 40 ans et qu’il n’est pas encore directeur financier, c’est que quelque chose ne tourne pas rond. Soit il n’est pas assez professionnel, soit il manque d’ambition », admet le directeur général des ressources humaines de l’entreprise Antal Russia, Mikhaïl Germershausen. Autre obstacle : un manque de maturité de la part
des jeunes recruteurs qui ont tout simplement peur des seniors : « Ils ne savent pas comment établir les liens, confondent l’activité professionnelle avec leurs propres conflits familiaux non résolus... C’est pourquoi il leur est plus facile et plus sûr de s’adresser à des personnes plus jeunes », estime la chef de projet du cabinet de recrutement
commercial de la société d’investissement Solid, Alexeï Zaïkine. Dans certains métiers, l’âge est synonyme d’expérience : comme le prouvent les statistiques, on préfère voir des personnes de 35-50 ans à des postes de directeur général, et des ingénieurs en chef de 35-45 ans. Quant aux femmes d’âge mûr, on leur confie
Consort Group Olga Rybakova. Il reste cependant un secteur d’activité où non seulement l’âge ne représente pas un obstacle, mais où être senior peut même constituer un avantage. « Par exemple, un candidat de 50 ans postulant à un poste de gestionnaire d’actifs, avec toute sa clientèle », souligne le directeur général adjoint du développement
Loisirs L’oligarque Roman Abramovitch veut recréer la magie du parc Gorki
LA RUSSE D’AUJOURD’HUI
Planifié par le célèbre architecte soviétique constructiviste Konstantin Melnikov dans les années 1920, le parc Gorki avait été conçu pour être un lieu de détente, mais aussi de culture, avec un théâtre et un cinéma. Il attirait alors une foule de Moscovites qui, à l’époque, ne disposaient que de peu de possibilités de loisirs. Puis, au fil des années, le parc était devenu malade de ses attractions négligées, de ses bouis-bouis illégaux, de
Chelsea, Tchoukotka et... un parc Mondialement connu comme propriétaire du club de football anglais de Chelsea, Roman Abramovitch est l’un des hommes les plus riches de Russie. Son dernier projet en date : un investissement dans la région de Tchoukot-
ka (en face de l’Alaska) dont il a été gouverneur. Il peut compter sur ses succès et ses appuis politiques pour le mener à bien. Sa compagne, Daria Joukova, prévoit d’y déménager sa célèbre galerie d’art contemporain « Garage ».
Un concours sera organisé pour désigner l’architecte chargé de restaurer le parc. Quelques changements symboliques sont déjà perceptibles. L’entrée du parc est désormais gratuite, avec wi-fi disponible sur tout le territoire. Une piste de skateboard a été aménagée, tandis que la surface
globale de goudron sera considérablement réduite. Une plage estivale a également été créée, et une longue promenade permettra bientôt de relier le parc Gorki au Mont des Moineaux. Autre nouveauté : un réseau de bars gérés par un collectif très en vogue à Moscou.
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GALINA MASTEROVA
ses infrastructures défaillantes et de quelques faits divers criminels, dont le plus retentissant a donné lieu à un livre et un film célèbres (Parc Gorki) : il avait acquis une fort mauvaise réputation. Mais tout va changer grâce au projet de rénovation, chiffré à 1,4 milliards d’euros, de l’un des plus grands espaces verts du centre-ville (environ 120 hectares). Une initiative due au milliardaire Roman Abramovitch et soutenue par le maire de Moscou Sergueï Sobianine. C’est un proche collaborateur d’Abramovitch, Sergueï Kapkov qui a été désigné pour diriger la manœuvre. Il a promis de remplacer les attractions foraines décaties par une roue panoramique semblable au London Eye.
Article publié dans Kommersant
Voir notre diaporama sur larussiedaujourdhui.fr
1,4 milliards d’euros pour transformer « Moscou plage » Le parc Gorki fut longtemps le lieu de promenade favori des habitants de la capitale. Laissé à l’abandon et mal géré depuis 20 ans, il est tombé dans un piteux état. Mais il va renaître...
volontiers les tâches ménagères et la garde des enfants : mieux vaut avoir entre 30 et 50 ans. « Souvent, la gestion des entreprises étrangères (en particulier allemandes ou japonaises) est confiée à des seniors », indique Mikhaïl Germershausen. « Ainsi, une compagnie internationale a, pour un poste de consultant juridique senior, fixé la limite d’âge minimale à 36 ans ». La directrice des ressources humaines du groupe financier BKS Olga Savosko estime qu’« après 50 ans, il est possible de trouver un bon emploi sous réserve d’une carrière réussie, lorsque vous êtes familier au marché et avez travaillé comme cadre supérieur dans des entreprises de renom. Ou bien lorsque vous êtes expert dans un domaine rare, ou enfin, si vous possédez d’excellentes relations commerciales utiles à l’entreprise. Sinon, les chances de trouver un emploi décent sont minces. À un certain âge, le recrutement s’effectue en général par recommandation ». Or, le modèle d’affaires de nombreuses entreprises est conçu de telle façon qu’il n’y a même pas besoin de recruter de bons professionnels. Au final, le plafond d’expérience pour des postes de subordonnés dans les secteurs les plus divers tourne autour des 30-35 ans. Selon le portail Superjob.ru, la courbe des salaires moyens des différents groupes d’âges en 2011 croît au fur et à mesure que l’âge avance, et atteint un pic aux alentours des 40 ans. Ensuite, les revenus n’augmentent plus, et dans certains secteurs, ils baissent. Si la situation ne change pas, en Russie comme en France, les trentenaires d’aujourd’hui entendront bientôt ce même triste refrain : « Nous voulons former une équipe jeune, vous ne nous convenez pas ».
Le parc Gorki est plus vaste que Hyde Park à Londres.
« Le parc Gorki est plus grand que Hyde Park, et peut-être mieux », fanfaronne Ilya Oskolkov-Tsentsiper, consultant à l’institut d’architecture et de design Strelka, en répétant la citation devenue célèbre de Medvedev. Une chose est certaine : le public du parc va
changer. En attirant la jeunesse branchée à solides revenus, les investisseurs se débarrassent aussi des prolétaires accourant aux attractions foraines. Reste une question : le nouveau Gorki saura-t-il parler au cœur des Moscovites ou seulement à une élite ?
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Économie
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.larussiedaujourdhui.fr communiqué DE ROSSIYSKAYA GAZETA distribué AVEC LE FIGARO
Armement Les grandes commandes de l’armée relancent le secteur
L’« Alligator » jaillit hors de la taïga d’extrême-orient Le monopole d’État Hélicoptères Russes vient d’ouvrir pour la première fois aux journalistes étrangers les portes de l’usine Progress fabriquant l’hélicoptère d’attaque Ka-52.
Les pétrodollars du budget russe sont activement réinvestis dans la construction d’armes modernes
Paul Duvernet
ria novosti
La russie d’aujourd’hui
« Je suis très impressionné. Les Russes investissent lourdement. On ne voit plus cela en Europe », explique Claude Planchamp, un expert en métallurgie français qui aide depuis un an l’usine Progress à se moderniser. Helicoptères Russes a investi 72 millions d’euros dans l’usine et en investira en core le double dans les toutes prochaines années, souligne son patron Dmitri Petrov. Claude Planchamp note, admiratif : « Ils ont clairement choisi le meilleur équipement du marché », faisant référence aux robots de l’italien IMF dans l’atelier fonderie. « Ce sera l’une des cinq meilleures fonderies au monde. Ils peuvent sortir des pièces de magnésium de 100 kg », un exploit dans l’ aéronautique. Des outillages automatisés de l’allemand DMG et du japonais Mazak complètent l’arsenal flambant neuf de Progress. Et tout cela au beau milieu de la
devrait en principe équiper le porte-hélicoptères Mistral vendu par la France. « Entre 8 et 16 Ka-52 par navire », précise Dmitri Petrov, le patron d’Hélicoptères Russes. L’armée russe vient de passer la semaine dernière une commande de près de trois milliards d’euros pour sa société. Dmitri Petrov ajoute que « des négociations ont déjà eu lieu » pour l’exportation du Ka-52, seul au monde dans sa catégorie à être doté de rotors contrarota-
Le hangar de montage final du Ka-52, sur le site de l’usine Progress, à Arséniev.
En Chiffres
250 milions
de dollars seront investis cette année dans la conception d’hélicoptères.
18%
C’est la marge bénéficiaire que fait le groupe, une des plus hautes dans l’industrie.
2,38 milliards
de dollars. C’est la valorisation optimiste estimée en avril pour Hélicoptères Russes.
taïga, dans l’extrême-orient russe, à 250 km au nord de Vladivostok. Ce sont naturellement les pétrodollars du budget et les com mandes de l’armée russe qui tirent Hélicoptères Russes, et particulièrement l’usine Progress, hors du marasme après 20 ans de grosse déprime. L’Alligator
tifs et de sièges éjectables. Il a en outre l’avantage d’être deux à trois fois moins cher que son concurrent Tigre d’Eurocopter. Progress démarre également la production d’hélicoptères civils. Cinq Mi-34C1 étaient assemblés dans le même hangar. Cet appareil léger (un pilote et trois passagers) doit concurrencer le Robinson américain pour un prix sensiblement inférieur. « Nous comptons en produire au moins 200 exemplaires par an », lance Dmitri Rodin, qui dirige le programme Mi-34C1. « Nous sommes par contre septiques sur la motorisation à turbine proposée par Turboméca, trop lourde et coûteuse pour ce type d’appareil. D’ailleurs les ventes médiocres du 120 d’Eurocopter ne nous en-
couragent pas dans cette direction », conclut Rodin. À partir de 2014, l’usine produira aussi l’hélicoptère de gabarit moyen Ka-62, celui-ci avec une motorisation Turboméca. Hélicoptères Russes va dépenser cette année 250 millions de dollars (soit 183 millions d’euros) en recherche et développement sur de nouveaux modèles d’hélicoptères. « Environ la moitié proviendra de nos fonds propres, l’autre viendra du budget fédéral et de crédits bancaires », explique Dmitri Petrov. En début d’année, la société avait annoncé une introduction en bourse à Londres et à Moscou pour 2011 afin de lever 500 millions de dollars (366 miliions d’euros) destinés à rembourser la dette et racheter les parts minoritaires des filiales du groupe. Le groupe a changé d’avis face au manque d’intérêt des investisseurs et à l’instabilité des marchés. Andreï Reus, directeur d’OboronProm, la holding d’État détenant 100% des actions d’Hélicoptères Russes, affirme que le groupe est financièrement à l’aise. « La dette n’est pas un problème car nous avons un vaste carnet de commandes. Les banques d’État russes et même privées comme Alfa nous proposent des crédits bon marché. D’ailleurs, la valeur de Hélicoptères Russes a considérablement augmenté depuis le moment où nous avons annoncé notre intention d’aller en bourse. L’offre publique d’achat aura lieu en 2012 », glisse-t-il avec un sourire confiant.
Transports Visite de l’usine de Novotcherkassk, où le groupe français Alstom modernise la production de locomotives
Signaux de transferts technologiques en vue Paul Duvernet
La russie d’aujourd’hui
Principal objectif : remporter le mirifique contrat pour la construction du train à très grande vitesse qui doit relier avant la fin de la décennie Moscou et Saint-Pétersbourg à une allure de 400km/h. L’infrastructure ferroviaire en Russie laisse à désirer, et une modernisation est urgente. Début septembre, le patron des chemins de fer russes (RJD), Vladimir Iakounine, annonçait que 313 milliards d’euros seraient dépensés d’ici 2030 pour remettre à niveau quelque 20 000 km de lignes ferroviaires. La par-
tie qui intéresse le plus les constructeurs étrangers – dont Alstom – est celle des 2 500km de lignes à grande vitesse qui doivent être construites en Russie d’ici 2018, date à laquelle le pays organisera la Coupe du monde de football.
Le marché répond positivement aux efforts conjoints des deux groupes, avec de grosses commandes Alstom multiplie les signaux aux autorités russes pour signifier qu’il est prêt à localiser la production et transférer ses technologies, ce qu’il fait déjà avec TMH. Vingt-deux de ses ingé-
service de presse
Alstom Transport élargit rapidement son partenariat avec TransMachHolding (TMH) à tous les segments ferroviaires.
Assemblage d’une locomotive EP20 à l’usine de Novotcherkassk.
nieurs travaillent en permanence sur le site industriel de Novotcherkassk (sud de la Russie) pour former des équipes russes. « La conception des nouvelles locomotives est entièrement réalisée ici », précise Pietro Silvestro, directeur général de TATrans, filiale d’Alstom et de TMH. « Nous avons complètement changé la manière dont les ingénieurs travaillaient. Désormais, tous utilisent le logiciel Catia [de Dassault Systèmes] et l’on met en place une chaîne de commande à l’occidentale ». TATrans vient de présenter au public sa première locomotive passager EP20, au terme d’une conception qui a pris à peine 7 mois. TATrans emploie 170 personnes au total et va dans quelques mois mettre sur le marché une nouvelle
locomotive fret baptisée 2ES5. Le marché, et plus particulièrement RJD, répond positivement à ces efforts, puisque depuis 2008, l’alliance TMH Alstom a reçu des commandes pour 700 locomo tives totalisant 3,5 milliards d’euros. Thierry Best, directeur commercial d’Alstom Transport, note qu’il n’y a « pas exemple de pays où Alstom ait connu une croissance aussi forte qu’en Russie ». L’alliance TMH et Alstom Transport a également répondu à de gros appels d’offres comme le métro d’Omsk (Sibérie) et les tramways de Saint-Pétersbourg et de Moscou. Afin de se positionner face aux besoins russes, les deux groupes envisagent de lancer avec Promelectronica une société spécialisée dans la signalisation ferroviaire.
Énergie Le gazoduc de la Baltique fonctionne, mais Bruxelles retarde la progression d’une liaison plus importante à travers la mer Noire
Moscou ouvre de nouvelles capacités gazières Le premier tube du gazoduc Nord Stream est prêt à livrer le gaz russe en Europe du nord, mais la construction de South Stream a été mise en attente. NIKITA DULNEV
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
Achevé début septembre, le gazoduc Nord Stream transportera du gaz russe vers l’Allemagne, la France, la Hollande, le Danemark et le Royaume-Uni. L’Union européenne (UE) voit avec soulagement diminuer les risques d’interruption du transit de pétrole et de gaz, car la Biélorussie et l’Ukraine auront moins de moyens de pression sur Moscou. Nord Stream acheminera 55 milliards de mètres cubes de gaz
vers l’Europe - environ 36% du gaz que les pays de l’UE achètent à la Russie. Afin de mieux satisfaire la demande croissante de l’Occident, celle-ci envisage de construire le gazoduc South Stream à travers la mer Noire, via l’Italie, afin de livrer 65 milliards de mètres cubes de gaz aux pays d’Europe méridionale d’ici 2014. Mais le troisième paquet énergie de l’Union européenne, un ensemble de règlements qui régissent le prix et la fourniture de gaz vers l’Europe, récemment entré en vigueur, suscite la controverse en raison du con trôle qu’il offre aux pays se trouvant sur l’itinéraire du transport. Certains experts estiment
qu’à moins qu’une exception au troisième paquet ne soit accordée pour le projet South Stream, le gazoduc ne sera pas construit. « Le gazoduc South Stream n’ira de l’avant que s’il obtient le statut de projet prioritaire », explique l’analyste d’une société d’investissement Vitaly Kryukov. Mikhaïl Kroutikhine, un partenaire de RusEnergy, juge peu probable que l’Europe fasse une exception spécialement pour le transport de gaz russe : « Cela n’a aucun sens. En vertu des lois européennes, les pipelines transfrontaliers au sein de la Communauté européenne doivent se conformer aux principes du troisième paquet énergie ».
Les gazoducs South, Nord Stream et Nabucco
Régions
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO
Un mousseux russe haut de gamme au goût des élites
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EN BREF Quel avenir pour les zones touristiques ?
En chiffres 2 000 hectares, dont 534 de vignes actives et 500 de terres prêtes à être plantées. 1, 5 millions de bouteilles de champagne classique « champenoise » produites par an. 20 millions de bouteilles par an produites selon la technologie « Charmat ». Plus de 2 milliards de roubles comme chiffre d’affaires. 212 millions de roubles : le résultat net d’exploitation.
LORI/LEGION MEDIA
L’organisation Zones économiques particulières constate que des zones touristiques hier en danger de fermeture sont finalement épargnées : le financement a enfin été trouvé pour la côte sud-ouest du lac Baïkal et le parc Isthme de Courlande, dans la région de Kaliningrad, serait déplacé sur un site plus avantageux pour les investisseurs. Néanmoins, il est toujours question de fermeture d’une station balnéaire dans la région de Stavropol. On reproche aux fonctionnaires de choisir des sites sans connaître les besoins des investisseurs.
Chasse aux faux médicaments Pour Abrau-Durso il s’agit de créer et d’imposer une culture de champagne. MIKHAIL MORDASOV/FOCUSPICTURES (5)
SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE
L’autre but de l’entrepreneur est de créer un « cluster » de tourisme vinicole de standing européen avec hôtels, station thermale et spa, haute gastronomie, loisirs balnéaires, et même un complexe immobilier de résidences secondaires. Le site accueille déjà 130 000 visiteurs par an. Homme d’affaires, mais avant tout amateur de bon champagne, Titov se sent investi d’une mission civilisatrice : « Le vin, c’est avant tout une passion. Nous allons (re)fonder une tradition, promouvoir notre vision de la consommation du vin, éduquer les goûts ». À cette fin, un parcours a été mis en place, de la visite des vignes et des caves à la dégustation. Les demi-doux et demi-secs, généralement prisés par les Russes, sont délaissés au profit des bruts. « Nous allons les obliger à boire du brut, imposer une authentique culture du champagne, contre cette mauvaise habitude du ‘’sucré qui pétille’’ », rigole Titov, en regrettant que la tenue vestimentaire des visiteurs – shorts et tongs – jure radicalement avec la noblesse du breuvage et la solennité du rite de dégustation. En pénétrant dans la cave, Pacha, en bermuda, frissonne. Son père Sergueï s’occupe de son « éducation esthétique », pour qu’il préfère le « vrai champagne à la mauvaise vodka ». Magnétisé, Pacha suit la guide dans les chais, 5 km de tunnels où reposent 9 millions de bouteilles. Il écoute avec fascination les explications sur les procédés d’assemblage et de remuage des vins « classical », alliances de pinot blanc, pinot noir, chardonnay et riesling, dont 1,5 millions par an sortent d’Abrau-Durso, contre 20 millions de bouteilles de mousseux fabriqué avec la technologie « Charmat » (cuve close). Le ma-
tériel – cuverie, chaînes de dégorgement et d’habillage, gyropalettes – flambant neuf, vient de France, d’Espagne ou d’Italie. La plus grande fierté du domaine, c’est son enracinement dans la tradition française. Au XIXème siècle, Abrau-Durso servait de potager à la table impériale, avant que le terroir ne soit déclaré propice à la fabrication de grands crus. En 1905, le chef de cave Victor Dravigny, à la tête d’une équipe de spécialistes français, est invité à quitter sa Champagne natale pour parfaire le vin pétillant russe. Jusqu’à la Révolution, la cour et l’aristocratie se délec-
teront du « champanskoïe » made in Russia, élaboré selon la méthode champenoise de double fermentation, avec une durée de vieillissement de deux ou trois ans. Un siècle plus tard, Hervé Jestin, consultant champenois lui aussi et ancien chef de caves de DuvalL e r o y, c h a p e r o n n e l a production. « Nous utilisons des technologies françaises, mais évidemment nous restons un mousseux. Sans prétendre concurrencer le champagne, nous défions les
des Jeux Olympiques de Sotchi, en 2014, en s’engageant à fournir 75 000 bouteilles et former du personnel dans ses « master classes » pour les besoins de l’événement. Cette aubaine ne doit pas surprendre : Abrau-Durso, qui approvisionne déjà le Kremlin en vin à bulles, est un lieu prisé des stars et des hommes politiques ; Boris Gryzlov, le président de la Douma, ou encore le réalisateur Pavel Lounguine y sont des invités d’honneur, tandis que le Premier ministre Vladimir Poutine possède un casier personnel assorti d’une collection de bouteilles, tout comme le patriarche Kirill. Voir notre diaporama sur larussiedaujourdhui.fr
ITAR-TASS
L’Internet russe attire les investissements
Champagne russe à boire en France Le propriétaire d’Abrau-Durso, Boris Titov, retourne à l’origine de de la vénérable boisson pétillante en investissant dans la région de Champagne. Le projet est ambitieux : produire une marque russe en France, séduire les spécialistes champenois mais aussi ouvrir un hôtel de luxe avec dégustation et haute gastronomie, créer une ligne de cosmétiques à base de raisin, exploiter les sites de loisirs locaux déjà existants et relancer
ainsi le tourisme vinicole dans la région. Vu les atouts de cette destination naturelle, et le succès imbattable de la marque sur le site d’Abrau-Durso dans la région de Krasnodar, Titov a toutes les raisons d’être optimiste : il prévoit l’inauguration de son projet champenois en 2015. Lisez davantage sur larussiedaujourdhui.fr/ 12720
DANS LE PROCHAIN NUMÉRO
SS ITAR-TA
autres vins pétillants. D’ailleurs, nous tenons tête à l ’ E s pagne », assure non sans réelle fierté Andreï Koboyan, le directeur-adjoint. Les vins Abrau-Durso ont été médaillés plusieurs fois à la Wine & Spirit competition de Londres ce qui devrait, comme l’espère Koboyan, leur valoir une sortie prochaine sur le marché international. En attendant, Abrau-Durso gagne des galons à la maison. Au mois de juin, le domaine est devenu le fournisseur officiel
L’ i n d u s t r i e p h a r m a c e u tique place beaucoup d’espoir dans l’un des plus grands laboratoires dédiés au contrôle des médicaments en Russie. Pendant la période d’essai du nouveau centre qui vient d’être inauguré à Rostov-sur-le-Don, sur près de 1 000 médicaments analysés, des contrefaçons ont été détectées dans 6% d’entre eux. En comparant ce résultat à la moyenne générale de 1%, on peut apprécier l’impact potentiel du laboratoire de Rostov. Des centres d’expertise existent déjà à Goudermes, Krasnoiarsk, Ekaterinbourg, tandis que d’autres sont prévus à Khabarovsk, Saint-Pétersbourg, Kazan et Moscou.
Les femmes russes en politique : potiches, pasionarias ou simples technocrates ?
Depuis le XIXe siècle, Abrau-Durso suit la méthode champenoise.
Ozon.ru, l’équivalent russe de Amazon.com, a recueilli 100 millions de dollars auprès de quatre fonds d’investissement de Russie, de Suisse et du Japon. C’est la plus grosse levée de fonds dans le domaine de l’eeconomie en Russie. Le précédent record était détenu par kupiVIP.ru, avec 55 millions de dollars en avril dernier. Ozon. ru, qui vend principalement des livres, des DVD et des équipements électroniques, va réinvestir la quasi-totalité des fonds dans le développement du groupe en diversifiant ses produits, en améliorant ses services de livraison et éventuellement en procédant à l’acquisition de concurrents.
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Opinions
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.larussiedaujourdhui.fr communiqué DE ROSSIYSKAYA GAZETA distribué AVEC LE FIGARO
des problématiques migratoires communes Vladislav Inozemtsev
SpÉcialement pour la russie d’aujourd’hui
J
usqu’où peut on comparer les problèmes rencontrés par Moscou et Bruxelles dans la formation de sociétés polyethniques ? L’intensification des flux migratoires est l’un des signes de la mondialisation. Dans certains cas, ce processus est stimulé par les États eux-mêmes ou par des formations méta-étatiques. Il est alors vu comme l’un des éléments de la formation d’une nouvelle identité. Tel était le cas en URSS, où l’on rêvait d’un peuple soviétique conçu comme « une nouvelle communauté historique », et c’est ce qui se passe aujourd’hui au sein de l’Union européenne qui a doté les États membres d’un espace économique et législatif commun. Toutefois, la migration procède beaucoup plus souvent d’un choix individuel effectué par des personnes désireuses d’améliorer leurs conditions de vie et/ou de fuir la violence. Ces deux processus mènent à la formation de sociétés multiculturelles. De ce point de vue, la Russie et les pays de l’Union européenne d’aujourd’hui se ressemblent sur bien des plans. Au sein de la Fédération de Russie, les Russes, nationaux en titre, constituent 80% de la population, sans compter près de 3% de personnes issues de peuples slaves proches. Depuis plusieurs années, la Russie accueille jusqu’à 600 000 migrants par an. Leur nombre total atteint, selon les différentes estimations, de 7 à 12 millions de personnes, soit 5 à 8% de la population du pays. Dans les grands pays de l’UE, on compte 80 à 86% de nationaux, 2 à 4% de résidents provenant d’autres pays européens et 6 à 10% d’immigrants venant de pays hors Union europénne. En Russie comme en Europe, une part significative des migrants vient de pays et de régions qui diffèrent sensiblement du point de vue ethnique et confessionnel, ce qui provoque parfois de sérieuses tensions sociales. Bien évidemment, cela engendre de nombreux problèmes, en Russie comme dans l’Union euro-
Les migrants en Russie sont temporaires : ils n’ont presque aucune chance de recevoir la nationalité russe péenne. Du point de vue économique, il s’agit surtout du caractère illégal d’une grande partie de l’immigration, une clandestinité qui réduit la collecte d’impôts et offre un terrain favorable à la corruption. Du point de vue social, c’est l’émergence de diasporas et de communautés fermées assorties de liens interpersonnels spécifiques et d’un rapport souvent dédaigneux aux lois et traditions locales. Du point de vue politique, le problème se traduit par le caractère ethnique et religieux des conflits sociaux. En Russie, « l’ État social » est beaucoup moins développé que dans l’UE. L’immigration y revêt donc un caractère plus temporaire. En règle générale, les migrants rentrent dans leurs pays après une période de travail en Russie puisque les perspectives d’obtention de la nationalité russe sont très limitées et les aides sociales inexistantes. De surcroît,
le statut légal d’un migrant est le plus souvent très précaire, et le taux d’extorsions de la part des forces de l’ordre envers les migrants est élevé. Dans l’UE, les mouvements migratoires sont au contraire orientés vers l’ancrage et vers le regroupement familial. Plus de 45% des arrivants en France (et seulement 7% des migrants aux États-Unis), se font enregistrer en tant que chômeurs ou font enregistrer des membres de leur famille au bout de la première année de résidence légale. En outre, une partie importante des migrants diffère sensiblement des autochtones par son identité religieuse. Par conséquent, les aides économiques de l’ État et le refus de respecter les traditions et les institutions du pays d’accueil provoquent une tension sociale importante, plus visible au sein de l’Union européenne qu’en Russie. Cela s’explique partiellement aussi par le fait que la Russie et l’Union soviétique, pendant des décennies, se développaient « par nature » comme des pays multinationaux, alors que dans l’UE, les États se sont formés sur une communauté d’histoire, de culture, de langue et de traditions. En son sein, l’immigration massive venant de l’extérieur du continent est un phénomène encore récent.
révolutions arabes : la russie reste sur le quai Konstantin von Eggert
Spécialement pour La Russie d’Aujourd’hui
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’en suis encore perplexe : comment le Kremlin a-t-il pu commettre une erreur de jugement aussi gros sière ? Dès le moment où Moscou a choisi de ne pas opposer son veto à la résolution 1973 du Conseil de sécurité, Kadhafi était fichu. Il avait la plus puissante alliance militaire du monde sur le dos et pratiquement aucun appui. La Jordanie, le Qatar et les Émirats arabes unis ont soutenu militairement l’OTAN. Si la Russie avait envoyé une frégate symbolique vers les côtes libyennes, elle se serait assuré une place d’honneur parmi les futurs vainqueurs. Mais au lieu d’être cohérent, Moscou s’est presque immédiatement empressée de condamner l’opération menée par l’OTAN. Or, le dictateur avait perdu confiance en la Russie suite
à son vote à l’ONU (abstention) tandis que les rebelles voyaient en elle un ennemi. Au final, se livrant à une marche arrière humiliante, Moscou a dû reconnaître, sur le tard, que les rebelles étaient le gouvernement légitime de la Libye. Alors pourquoi un aussi mauvais calcul ? Les racines de cette erreur sont à rechercher dans la situation intérieure de la Russie et
sa mentalité. Les humiliations de l’après-guerre froide, certaines réelles, d’autres fantasmées, ont créé des réflexes anti-occidentaux. Les décideurs et l’opinion publique russe voient la politique mondiale comme un jeu à somme nulle, où le gain de l’un fait la perte de l’autre. Cela rend les Russes instables et les place sur la défensive. Ils vénèrent la souveraineté - comprise comme une
La Russie et l’Europe unifiée sont obligées de rechercher de nouvelles formules pour ré soudre le problème des mouvements migratoires. Ce problème s’aggrave du fait qu’il existe depuis longtemps en Russie des régions (les républiques du NordCaucase) ayant des populations musulmanes prédominantes envers lesquelles les habitants des métropoles gardent certains préjugés et, en ce qui concerne l’Europe, de telles zones apparaîtront inéluctablement (la Bosnie-Herzégovine, l’Albanie voire la Turquie). C’est pourquoi le problème de la construction d’une société polyethnique stable en Russie et en Europe ne se réduit pas aux défis engendrés par l’immigration. La Russie et l’UE devront faire de gros efforts en faveur du dépassement des préjugés nationalistes, ce qui n’est réalisable que dans le cadre d’un équilibre équitable entre les droits et les responsabilités des citoyens et des résidents, se conjuguant raisonnablement avec l’affirmation de l’État laïque au service d’une nation unifiée. Vladislav Inozemtsev est docteur des sciences économiques, chef de la Direction exécutive du Forum politique mondial.
sorte de droit des gouvernements à faire ce qu’ils veulent à l’intérieur de leurs frontières nationales. Ils sont incapables d’accepter, et peu enclins à le faire, des concepts tels que l’« intervention humanitaire » et la « responsabilité de protéger », sur lesquels reposait l’intervention en Libye. Cela conduit à une situation récurrente dans laquelle la Russie se retrouve du mauvais côté de l’histoire, s’efforçant de venir au secours de dictateurs ayant atteint leur date de péremption depuis longtemps. Cela a été le cas avec Milosevic, Saddam, Kadhafi, et l’on se demande si cela ne se répétera pas une nouvelle fois avec Bachar el-Assad. La politique mondiale est aujourd’hui une interaction entre intérêts et valeurs, opportunisme et idéalisme. Rejetant l’évidence, les Russes croient que tout événement qu’ils ne maîtrisent pas - comme les révolutions arabes - est par défaut une sinistre conspiration, généralement occidentale et liée au pétrole. Les dirigeants russes sont en mesure soit d’aggraver ce réflexe, soit de l’abandonner. Konstantin von Eggert est un ancien correspondant au Moyen Orient.
ces sacrés Russes
Les clés de la réussite François Perreault
J
Spécialement pour la russie d’aujourd’hui
ean-Pierre vient d’être chargé de retourner en Russie le temps d’une mission pour un très gros client potentiel, le groupe militaire d’État GromProm. Il doit visiter l’usine du fournisseur exclusif de tournevis pour l’armée russe. Jean-Pierre est ravi car l’usine est située au Kam tchatka : « Je vais enfin voir ces fameux volcans ! ». GromProm affrète spécialement un avion pour lui et une délégation d’industriels russes. Il est conduit à l’aéroport militaire et on le fait grimper dans un avion, sans contrôle ni des papiers, ni des bagages. « La classe ! » s’émerveille JeanPierre. Au bout de deux heures, les industriels russes arrivent dans une armada de BMW aux vitres teintés. Après 10 minutes de vol surgit Igor, le contact de Jean-Pierre au sein de GromProm. « Neuf heures de vol, c’est long. Mais nous avons une méthode russe pour passer le temps », susurre-t-il en brandissant une vodka. Interloqué, Jean-Pierre accepte. Une forte odeur de cigarettes vient simultanément frapper ses narines.
Dix heures plus tard, Jean-Pierre est porté par deux nouveaux camarades dans sa chambre d’hôtel. Décalage horaire oblige, il ne reste que dix minutes avant la visite de l’usine. Arrivé devant le portail, le car marque un arrêt et deux hommes montent. « JeanPierre, viens par ici ! », jappe Igor. « Écoute, en fait tu ne peux pas rentrer dans l’usine, elle est top secrète et tu es étranger. On va te faire visiter notre musée et tu vas discuter avec le chef de la sécu ». Abasourdi, Jean-Pierre se retrouve seul face à un moustachu qui l’observe avec suspicion. Au bout de quelques « je l’ignore » et « pourquoi voulezvous savoir cela ? », il renonce à en savoir plus. Il s’endort sur la table de la cantine, où Igor le réveille : il faut rentrer illico à Moscou car un cyclone menace de bloquer l’aéroport pour toute une semaine. Juste avant de décoller, Jean-Pierre reçoit un coup de fil de son boss : « Tu as été formidable ! Ils veulent signer pour 15 machines ! Comment as-tu fait ? » « Je connais la méthode russe », gémit Jean-Pierre, dont les éruptions gastriques lui rappellent qu’il n’a pas vu un seul volcan. François Perreault est basé à Moscou depuis cinq ans.
ces sacrés français
Familier ou obséquieux ? Natalia Gevorkyan
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Spécialement pour la russie d’aujourd’hui
ur le seuil d’un restaurant dont je suis une habituée, le serveur Antoine m’embrasse et nous invite à nous asseoir, une amie moscovite et moi. - Pourquoi laisses-tu le serveur t’embrasser ? jette-t-elle avec sévérité. Je n’ai pas eu le temps de répondre que le chef surgit et me lance : - Natacha, comment ça va ? Tu as réussi à te reposer ? Et ma Moscovite : « Celui-là t’appelle familièrement par ton prénom ! » Je sens la colère qui monte : - On va arrêter tout de suite cet interrogatoire absurde. Moi aussi je les appelle par leur prénom, le chef et le serveur. Nous nous connaissons depuis longtemps. Depuis quand ça te dérange que j’embrasse et tutoie une connaissance ? - Une connaissance, oui, mais pas un serveur ! Il y avait tant de snobisme dans cette remarque que j’en ai perdu la voix. Mon père m’avait dit un jour : « Parler de haut avec un serveur est un signe indéniable de larbinisme ». Surtout en observant quelqu’un qui ve-
nait de traiter avec dédain un serveur et se mettait à faire des courbettes devant une célébrité ou un supérieur. En y réfléchissant un peu, je me suis rendue compte qu’effectivement, à Moscou, on imagine mal les clients d’un café ou d’un restaurant entretenir des relations aussi simples avec le personnel. J’ai informé la dame moscovite qu’Antoine n’était pas seulement serveur mais accessoirement le patron de l’établissement, même s’il trime en salle du matin au soir. Elle l’a regardé avec stupeur. À Paris non plus, tous les propriétaires ne mettent pas les mains dans le cambouis. Tout le charme est précisément dans le fait que chaque serveur se comporte comme si le bistro lui appartenait, comme si ça dépendait de lui que le client s’y plaise ou non, et comme s’il était personnellement responsable du succès de l’affaire. Ce n’est pas insignifiant dans une ville de 40 000 restaurants, sans compter les bouis-bouis, cafés et bars. La concurrence produit de la qualité, pas seulement côté nourriture, mais également en ce qui concerne le style de la relation au client. Natalia Gevorkyan est correspondante à Paris du journal en ligne gazeta.ru.
Le courrier des lecteurs, les opinions ou dessins de la rubrique “Opinions” publiés dans ce supplément représentent divers points de vue et ne reflètent pas nécessairement la position de la rédaction de La Russie d’Aujourd’hui ou de Rossiyskaya Gazeta.
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Culture
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CHRONIQUE LITTÉRAIRE
Cinéma Le film du réalisateur russe a remporté le Lion d’Or au 68ème festival de Venise
Quel dictateur se cache sous le « Faust » de Sokourov ? Faust, le film très attendu, tourné en allemand, d’Alexandre Sokourov, qui vient d’être couronné à la Mostra, avait été spontanément et bizarrement soutenu par les autorités russes.
Six mois de cabane
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GALINA MASTEROVA
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
TITRE : DANS LES FORÊTS DE SIBÉRIE AUTEUR : SYLVAIN TESSON ÉDITION : GALLIMARD
SERVICE DE PRESSE
Sokourov en bref
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Si Sokourov est allé à Venise, ce n’était pas par goût de l’agitation autour des grands festivals. « Je n’aime pas y être. Je n’aime pas le système de compétition », nous déclarait avant coup le réalisateur, 60 ans, dans un parc à proximité de son domicile de Saint-Pétersbourg. « Comment pouvez-vous affirmer que je suis meilleur qu’un autre ? Les cinéastes qui se sont déjà fait un nom ne devraient pas rivaliser avec les jeunes », estime-t-il. « Nous devons faire place aux jeunes ». Le franc-parler de Sokourov concernant le festival n’a rien d’étonnant : le cinéaste est connu pour ne pas avoir la langue dans sa poche. Ses premiers films ont été interdits par les autorités soviétiques. Sokourov affirme que son obsession pour les dictateurs, comme Faust lui-même, qui constitue l’aboutissement d’un quadriptyque de films, remonte à 30 ans. « C’est incroyable qu’on accorde si peu d’attention à «Faust», déclare-t-il. Si n’importe quel politicien lit «Faust», tout y est. C’est comme si cela avait été écrit au XXIe siècle, pas au XIXe ». Mais sans dire quel personnage réel est visé... De nombreuses recherches historiques ont été intégrées au film, qui a été tourné en Espagne et
Sokourov n’en revient pas que Faust ait reçu le soutien de Poutine.
en Islande, où le réalisateur a fait construire des répliques de villes allemandes du début du XIXe siècle (son Faust emprunte à celui de Goethe et au Doctor Faustus de Thomas Mann). Sokourov n’a demandé aucune subvention pour produire son film. Mais l’argent est apparu après que le Premier ministre Vladimir Poutine a manifesté son soutien au tournage de Faust. La raison en reste un mystère pour Sokourov. « Je ne sais pas s’il [le film] va l’intéresser, bien que la culture allemande lui soit chère,
explique-t-il. Je ne comprends pas pourquoi une telle aide m’a été accordée, car je ne suis pas de ceux qui soutiennent la culture politique russe ». D’ailleurs, Sokourov, qui a longtemps milité pour la préservation du patrimoine architectural historique de sa ville, a été un adversaire féroce des autorités de Saint-Pétersbourg, ce qui lui a valu l’annulation de la représentation d’un opéra. Il n’avait pas hâte de parler de Faust aux critiques à Venise : « Personne n’est plus dur que moi-même dans la cri-
Avec Faust, Sokourov clôt sa tétralogie sur les dictateurs. Moloch (Hitler), Taurus (Lénine) et Le Soleil (Hirochito) lui ont valu une renommée mondiale. Son film l’Arche russe, tourné à l’Ermitage, est le seul long métrage fait sans montage.
tique de mes films. Je sais mieux que quiconque ce que je voulais faire et ce qui n’a pas fonctionné. Une fois que je commence à parler des défauts de ‘Faust’, il est impossible de m’arrêter ». Le jury en a décidé autrement.
Théâtre Des ombres fantasmagoriques d’une époque - heureusement - révolue
Fantômes communistes sur scène Le Théâtre de la Colline présente à Paris jusqu’au 8 octobre et à Dijon du 11 au 15 octobre La Conspiration des sentiments, de Iouri Olecha. ALEXANDRA REGNIER
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
Le poète Nicolaï Kavalerov souffre de ne pas trouver sa place (celle d’un héros, évidemment !) dans le nouveau monde soviétique. Dix années se sont écoulées depuis la Révolution, et « la nature de la gloire a changé » dans ce XXe siècle qui dévore le pré-
cédent. Nicolaï se révolte devant la réussite d’Andreï Babitchev (Pascal Bongard, très juste), inventeur de la cantine de masse où deux mille travailleurs pourront dévorer « la soupe aux choux sur fond de musique de Wagner ». Ce « faiseur de saucisson » est le héros des nouveaux temps, et Kavalerov le poète est devenu un « homme inutile ». Dans le siècle rationalisateur, les « passions anciennes » – l’amour, la haine, l’ambition – deviennent elles aussi inutiles. Le frère d’Andreï Babitchev, Ivan (magnifique John Ar-
EN BREF
nold), se proclame « chef des sentiments » et cherche à en orchestrer un dernier éclat dans un « complot pacifique ».Tiraillée entre ces trois personnages,Valia, fille adoptive d’Ivan, est courtisée à la fois par Nicolaï et par Andreï. Dans une tentative d’assimiler collectivisme et capitalisme, Bernard Sobel aimerait interpréter le texte d’Olecha comme une critique de la société de consommation de masse. Cette dernière serait alors le lieu où se rejoignent l’individualisme prôné
LA SAISON RUSSE EN PAYS D’AIX VIKTORIA LOMASKO, ANTON NIKOLAÏEV
DU 1 OCTOBRE AU 16 DÉCEMBRE AIX EN PROVENCE
FESTIVAL DE BD BOOMFEST REND JUSTICE À L’ART INTERDIT Depuis le 16 septembre et jusqu’au 10 octobre, Saint-Pétersbourg reçoit pour la cinquième fois le festival de la BD BOOMFEST. Au programme cette année : une exposition Corto Maltèse dans le cadre de l’année croisée Italie-Russie, le projet français Le Monde diplomatique en bande dessinée illustrant des questions politiques et sociales, la BD judiciaire dans le cadre du procès Art Interdit sur l’exposition des œuvres censurées par des musées russes...
par Ivan et le collectivisme prôné par Andreï. Le conflit pourtant central entre l’art et la société rationnelle s’en trouve affaibli et le spectateur, confus, car une telle relecture, privée de soutien dans le texte, aurait mérité d’être davantage défendue dans la mise en scène. Seule l’enseigne lumineuse « MarxDonald » sur laquelle s’ouvre la pièce, matérialise le dessein du metteur en scène, alors que notre époque ne manque ni de faiseurs de saucisson ni de poètes inutiles…
À L’AFFICHE
Comme chaque année, Datcha Kalina propose dans le cadre de ce festival récitals de chants, expositions de photos, conférences, ateliers de polyphonie et spectacles divers. › www.datcha-kalina.com
LE CHANT DES FRÊNES : TOURGUÉNIEVVIARDOT SUR SCÈNE DU 20 SEPTEMBRE AU 13 NOVEMBRE THÉÂTRE DE L’ÎLE SAINT-LOUIS, PARIS
française Pauline Viardot, est un hommage à l’amour, au génie artistique, à l’intelligence du cœur et de l’esprit de ces deux personnes. Avec Michael Lonsdale, Catherine Fantou-Gournay et Marc Zviguilsky. › www.lechantdesfrenes.blogspot.com
L’ORCHESTRE NATIONAL DE RUSSIE EN TOURNÉE LE 17 OCTOBRE (PARIS), LE 19 OCTOBRE (DIJON)
L’Orchestre national de Russie interprétera des œuvres de Sibelius, Tchaïkovski, Korngold. Direction musicale de Mikhaïl Pletnev. Au violon, le soliste David Grimal. › www.russianarts.org/rno/ontour.cfm
Ce spectacle poétique et musical, qui met en scène la correspondance entre l’écrivain russe Ivan Tourguéniev et la diva
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Nous étions habitués à suivre Sylvain Tesson sur les routes du monde, farouche mangeur de kilomètres que la fatigue déposait parfois à l’endroit même où s’arrêtait sa course, comme un enfant fauché par le sommeil. Nous savions de lui que cette course effrénée et éreintante, en faisant de chaque journée un millefeuille de moments de vie intenses et mémorables, était le prix à payer pour tenter de fausser le mécanisme de la grande horloge. Une traversée de la Sibérie à pied lui avait fait découvrir les cabanes éparpillées sur les rives du Baïkal et les paysages magiques du lac. Il eut envie de s’y installer le moment venu pour jouer contre le temps une autre partition et mettre en accord ses paroles et ses actes : vivre au cœur de la nature en l’impactant le moins possible. Là, au bord du Baïkal, dans une cabane de trois mètres sur trois, les jours s’égrainent au rythme des tâches essentielles : couper le bois pour le poêle,
nourrir les mésanges qui frappent à la fenêtre, préparer les repas, pêcher, écrire, lire, glisser dans une douce ivresse et surtout, observer les bêtes, les paysages grandioses du Baïkal, écouter la vie, les gémissements ou les craquements terribles des glaces. Il y a les moments qui se donnent dans la contemplation et ceux que l’on mérite, arrachés à coup de piolet le long de parois enneigées, à coups de rame au milieu des eaux glaciales du lac ou dans des marches forcées par moins 30°. Le bonheur naît du contact avec la nature, de l’immensité et de la solitude, de la liberté qu’elles génèrent. Dans ce sentiment de plénitude souveraine et d’immense liberté, rien ni personne ne lui manque. Il y a bien sûr les moments de doute, de dégoût de soi, de chagrin lorsqu’un message annonce l’abandon par l’être aimé, mais l’impression dominante est celle de l’unité presque retrouvée. Il est des lieux et des environnements qui répondent à ce que l’on est au plus profond de soi. Pour Tesson, ce sont les forêts de Sibérie et les hommes que l’on y croise, des taiseux, dotés d’une incroyable énergie vitale. Ivres de vodka, d’espace et de liberté, ils vivent l’instant présent avec d’autant plus d’intensité qu’ils n’attendent rien du lendemain. En ce sens, Sylvain Tesson est leur frère. Dans sa solitude de la taïga, il réussit le miracle d’instaurer un dialogue entre eux et des auteurs, des penseurs, des scientifiques, des sages. Christine Mestre Découvrez d’autres chroniques sur larussiedaujourdhui.fr
Biographie Le trublion répond à Carrère
Limonov, enchanté d’être le voyou de la rentrée littéraire La vie de l’ancien poète underground, personnage sulfureux et ennemi intime de Poutine, a inspiré un romancier français. Mais Édouard Limonov n’est guère impressionné... DARIA MOUDROLIOUBOVA LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
Stupéfaction chez les lecteurs russes de Limonov : à quoi bon publier la biographie d’un personnage qui ne fait qu’écrire des autobiographies depuis 30 ans ? Mais pour les Français, c’est autre chose. C’est la saga d’un aventurier si extravagant qu’à la fin, peu importe s’il existe vraiment : Limonov, le nouveau livre d’Emmanuel Carrère, s’appellerait Le Rouge et le Noir, les Français n’y verraient que du feu chez ce Julien Sorel « parachuté dans la jungle avec sa bite et son couteau » tel que le décrit le romancier français. Limonov acquiesce : « Il n’y a pas si longtemps, il y a eu, en France, des écrivains de mon type : Camus ou Genet. Je suis donc un type facilement identifiable pour les Français, « l’homme révolté ». Le politiquement correct stérile qui est de rigueur aujourd’hui en France a supprimé jusqu’à la possibilité même que de revoir de tels héros. Voilà pourquoi les Français ont choisi un étranger ». Au-delà d’un roman d’apprentissage, les Français trouvent dans Limonov un récit sur la Russie des 60 dernières années.
Carrère se met à la place de ceux qui ne savent rien de l’histoire russe. Des parallèles viennent relier les lieux et personnages avec leurs alter egos français : Kasparov devient ainsi « une sorte de François Bayrou », tandis que deux semaines avec Limonov, c’est comme si on était venu « interviewer à la fois Houellebecq, Lou Reed et Cohn-Bendit ». « C’est parfois bienveillant, parfois hostile. On sent que l’auteur est un intellectuel et un bourgeois », écrit Limonov. Et note que « les intellectuels français ont toujours eu un penchant pour les voyous ». Le livre, il dit – non sans coquetterie – ne l’avoir que feuilleté. Limonov n’est pourtant pas insensible à sa nouvelle gloire puisqu’il répertorie sur son blog les critiques du livre et avoue qu’il « s’amuserait bien » si sa « biographie » par « un célèbre écrivain français » trouvait un éditeur en Russie.
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Loisirs
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO
Festivals Sur la Place Rouge, des musiques de tous pays ont sonné l’ouverture des grandes manifestations culturelles de l’automne
Les fanfares donnent le ton à Moscou
Art contemporain, cirque, il y en a pour tous les goûts !
Contenu multimédia sur larussiedaujourdhui.fr
Le Festival international des Lumières Du 20 au 23 octobre Le centre-ville se transformera en immense objet d’art grâce à Damien Fontaine, metteur en scène de la Fête des Lumières de Lyon. Les installations son et lumière refléteront tous les coloris traditionnels russes. Ce show grandiose en plein air sera visible sur la Place Rouge, au Théâtre du Bolchoï, au Musée d’Histoire, sur la Place Loubianka et la Place du Manège.
GETTY IMAGES/FOTOBANK
Le Festival international de reconstitution historique (ci-contre) et celui de la Tour Spasskaïa sur la Place Rouge (ci-dessus).
RUSLAN SUKHUSHIN
La première semaine de septembre a été marquée par deux grands événements qui ont fait la jonction entre la riche saison estivale et les manifestations culturelles automnales. ALENA LEGOSTAEVA
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
La Russie d’antan. Tel était le thème du festival « Le temps et les époques » qui a réuni à Moscou, sur 84 sites, des reconstitutions historiques. Du 2 au 4 septembre, le musée-réserve de Kolomenskoïe s’est notamment remis à l’heure médiévale et a fait revivre les tribus qui peuplaient autrefois le territoire
européen de la Russie actuelle, comme les populations finno-ougriennes. Selon un mode participatif, le public pouvait jouer le jeu et séjourner en habits d’époque, à l’ancienne, dans un campement du temps jadis installé sur les bords de la Moskova, en plein centre-ville. En cérémonie d’ouverture d’un festival qui a rassemblé plus de 50 000 visiteurs : un combat entre des centaines d’hommes vêtus et armés comme au IXe siècle et dont les « survivants » pouvaient ensuite participer aux jeux folkloriques les plus hardis. C’était l’histoire au présent. Un présent conjugué, aussi, en musique.
Parade de la Tour Spasskaïa
La Place Rouge, une heure avant minuit. Les musiciens de l’Association nationale des tireurs de Lecco, en Italie, sont entourés par la foule. Coiffés de chapeaux, décorés de bouquets de plumes noires, ils lèvent le nez de leurs trompettes et, à la grande joie du public, exécutent encore quelques airs, à l’entrée du métro. La soirée du festival international de musique militaire de la Tour Spasskaïa s’est terminée il y a à peine une demiheure, dimanche 4 septembre, ponctuant une grandiose fête de la musique prolongée, mais personne ne veut en voir la fin. Et, aux quatre coins de la Place Rouge, on entend rugir cornemuses et trombones, tambours et applaudissements. Musique militaire et populaire, démonstrations d’armes et défilés, spectacles au laser et effets pyrotechniques... Et toute cette effervescence en plein cœur de Moscou, pendant cinq jours! Les bruits sourds des ca-
IVème Biennale d’art contemporain de Moscou Du 23 septembre au 30 octobre Cette Biennale aura pour thème « Réécrire le Monde » (Rewriting World).
Vème Festival international des arts du cirque Du 30 septembre au 2 octobre Les légendes mondiales du cirque participent à un concours dans le complexe olympique Loujniki.
› www.4th.moscowbiennale.ru
› www.festival.circus.ru
Festival de dessins animés Du 28 octobre au 7 novembre 450 dessins animés provenant de 22 pays seront diffusés dans le cadre du cinquième Festival international du film d’animation.
Biennale des métiers de l’art Jusqu’au 15 octobre L’exposition-vente met à l’honneur les objets artisanaux, créations d’artisans indépendants, ainsi que de petites entreprises.
› www.multfest.ru
› www.kremlin-izmailovo.com
nons, depuis la Tour du Sauveur (Spasskaïa), ont donné le coup d’envoi, marquant l’ampleur et la solennité de l’événement. Le régiment de cavalerie, la Garde d’honneur du régiment présidentiel, l’orchestre de cors russes ont donné le ton, et ce n’était qu’un début. La fanfare des « Jaguars de la Tamayo » et l’ensemble folklorique « Tenochtitlan » (Mexique)
l’Adieu de Slavianka en russe, les cornemuses du 19ème Régiment royal d’artillerie britannique paradant sous les ovations et les tambours de l’armée suisse (Top Secret Drum Corps) hypnotisent par un jeu de baguettes exécuté à la perfection. Cette année signe la quatrième édition du festival « Tour Spasskaïa ». Ce sont plus de quinze cents jeunes musiciens venus de 15 pays différents (des régiments de Gardes d’honneur, des orchestres militaires et des collectifs du monde entier) qui ont offert au public, sous les murs du Kremlin de Moscou, une merveilleuse bataille symphonique. Et il n’y a eu que des vainqueurs !
Aux quatre coins de la Place Rouge, on entend rugir cornemuses et trombones, tambours et applaudissements mettent le feu aux poudres, l’Orchestre symphonique national d’Ukraine surprend le public avec ses airs et rythmes de jazz, le groupe folklorique She Huo, de Sanya (Chine), interprète la chanson russe Nuits de Moscou (Podmoskovnie Vetchera), l’Orchestre de la Garde royale norvégienne chante avec brio
Le Festival international de musique militaire « Tour Spasskaïa » : › www.kremlin-military-tattoo.ru.
Le Festival international de reconstitution historique « Le temps et les époques » : › www.historyfest.ru.
FLORA MOUSSA
Gastronomie Un musée proche de Moscou ressuscite une friandise d’antan
À la (re)découverte des délices pré-révolutionnaires C’est en Russie que la pomme – le fruit défendu par excellence – a connu sa vraie sublimation en garnissant la pastila. PAUL DUVERNET
LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI
La pastila était un secret mieux gardé que les sous-marins nucléaires soviétiques. Tenez-vous bien : les Russes nous avaient caché qu’ils préparaient des desserts à base de pommes aussi exquis que raffinés ! Heureusement, les touristes étrangers, comme les espions, sont désormais les bienvenus au « Musée des saveurs oubliées », situé dans la pittoresque ville de Kolomna, à une heure de route de Moscou. Un-
musée consacré à la pastila, cette fameuse friandise qui a autrefois enchanté les papilles d’Ivan le Terrible, de Catherine II, de Fiodor Dostoïevski et de Léon Tolstoï. La pastila consiste en une pâte préparée à partir de chair de pomme. Y sont ajoutés divers ingrédients comme du miel, des noix ou des baies locales. Il existe au total une cinquantaine de recettes différentes de la pastila, qui revêt des aspects, des couleurs et des consistances variant selon les ingrédients. La pastila évoque tantôt nos pâtes de fruit françaises, tantôt les fruits confits, voire des mignardises. Une fois au contact de votre palais, en revanche, leur
originalité ne fait plus de doute. Cette friandise ravira les amateurs de produits « bio » ou diététiques. Elle est riche en fibres et en pectine et se prépare exclusivement à base d’ingrédients naturels. La pastila est non seulement pauvre en calories, mais dispose en outre d’avantages qui sont très semblables à ceux du lait. Mais n’espérez pas désintoxiquer vos gamins épris de cochonneries chimiques avec la pastila, car cette dernière est malheureusement produite en quantité limitée dans une modeste fabrique artisanale fonctionnant en binôme avec le musée des saveurs oubliées. Une visite s’impose donc, d’autant
que le musée voit au-delà du simple plaisir gustatif. « Il s’agit pour nous de recréer la culture de galanterie qui existait aux 18 et 19ème siècles », explique la jeune guide Irina, vêtue d’un costume d’époque. Le musée est abrité dans une charmante maison en bois non loin de la rivière Oka. Dans toutes les pièces flotte une appétissante odeur de pomme et de cannelle. On vous y servira un thé dont la légère amertume pondère idéalement la douceur des sept variétés de pastila. Historiquement, la pastila doit
Le salon où vous sont servis les pastila avec du thé.
sans doute son apparition locale au fait que Kolomna a toujours croulé sous les pommes et qu’il fallait trouver un moyen de les conserver. En outre, le sucre était une denrée chère et rare dans le passé. La pastila répondit avantageusement à ces impératifs, jusqu’à ce que les bolcheviks mettent fin à une production prisée de la cour impé-
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riale. Après de longues années, ce complot contre le goût a été déjoué. La pastila dispose désormais de solides atouts pour concurrencer la vodka, le borchtch et les blinis parmi les titres de gloire culinaire russes. Pour en savoir plus : www.gorodmuz.ru/pastila
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