La Russie d'Aujourd'hui

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Produit de Russia Beyond the Headlines

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L’objectif, instrument de torture esthétique Avant d’exposer à Paris, Oleg Dou exprime sa vision de la photographie. P. 7

Des recettes pour le Nouvel An Découvrez les traditions et quelques bonnes choses au menu du réveillon russe de la Saint-Sylvestre.

Publié en coordination avec The Daily Telegraph, The Washington Post et d’autres grands quotidiens internationaux

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Ce supplément de huit pages est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta (Russie), qui assume l’entière responsabilité de son contenu Jeudi 15 décembre 2011

Aux urnes puis en masse dans la rue

ÉCONOMIE

Sanofi-Aventis renforce son ancrage russe Le groupe pharmaceutique français a pris l’option de produire son insuline sur le sol et pour le marché russes dans la région d’Oriol, où il a déjà investi 28 millions d’euros. PAGE 3

CULTURE

La victoire étriquée de Russie Unie, le parti de Vladimir Poutine, aux élections législatives du 4 décembre a été ressentie comme un coup de semonce pour le pouvoir. L’opposition a hurlé à la fraude électorale massive et réussi à mobiliser des foules sans précédent depuis la chute de l’URSS. Du coup, la vie politique russe en sort revivifiée. Le pouvoir cherche désormais des solutions pour reprendre le dessus avant les présidentielles du 4 mars prochain.

VITALI RASKALOV

POUR EN SAVOIR PLUS PAGES 2 ET 6

Vingt ans après l’URSS : visitez l’expo à Paris. Ci-dessus : l’affiche de Chostia et Kravtchenko, « Vérité sur l’écologie pour tous ! », 1989.

ONU La Russie préside le Conseil de sécurité en décembre

PHOTO DU MOIS

Niet à un scénario libyen pour la Syrie

Miss Beauté de Russie 2011

JEAN-LOUIS TURLIN, NORA FITZGERALD LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Pour le dernier mois d’une année marquée par les révoltes dans le monde arabe, la Russie assume la présidence tournante du

Conseil de sécurité des Nations Unies. Alors que la répression sanglante des manifestations se poursuit en Syrie, l’hypothèse d’une résolution appelant à des sanctions contre le régime de Bachar Al Assad pourrait être relancée. Mais Vitaly Tchourkine, Représentant permanent de la Fédération de Russie depuis cinq ans auprès de l’ONU, explique dans un entretien exclusif qu’il nous a accordé à New York en

SUITE EN PAGE 2

Moscou loin des clichés Finale du concours « Beauté de Russie 2011 » : la gagnante de l’année 2010, Daria Konova-

lova, félicite Natalia Pereverzeva, étudiante moscovite de 3ème cycle, âgée de 23 ans.

Très haute vitesse

La vie au grand froid

Après le nouvel accord franco-russe, le nombre d’enfants venus de Russie risque de chuter. Entretien avec l’ancienne présidente d’une association spécialisée.

Les chemins de fer russes invitent les sociétés étrangères à répondre aux appels d’offres pour la haute et très haute vitesse. Deux groupes français, Alstom et la SNCF, sont sur les rangs.

Ou comment les Russes s’accommodent des rigueurs hivernales (qui font oublier le réchauffement climatique). Et ils aiment toujours autant les bains glacés suivis du bania !

PHOTOXPRESS

Adoptions : le frein

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LOISIRS

RIA NOVOSTI

Le vote d’une intervention humanitaire n’est pas un blancseing pour un changement de régime, explique l’ambasseur de Russie auprès des Nations Unies, Vitaly Tchourkine.

quoi la situation syrienne diffère de celle de la Libye, pour laquelle la délégation russe avait voté une première résolution autorisant une intervention humanitaire, avant de s’abstenir sur une seconde qui instaurait une zone d’interdiction de survol. « Dans nos déclarations après l’adoption de cette résolution, nous avons clairement exprimé nos craintes de la voir conduire à un usage excessif de la force », rappelle V. Tchourkine, avant d’indiquer que « ce qui s’est passé en Libye dans la réalité a influencé notre façon de penser sur la question syrienne ».

SERVICE DE PRESSE

La chute de l’empire en images

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La capitale russe ne jouit pas des mêmes préjugés favorables que sa rivale Saint-Pétersbourg. Mais les clichés qui la stigmatisent sont loin de la vérité. PAGE 8

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ILIA VARLAMOV


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Politique & Société

LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.larussiedaujourdhui.fr communiqué DE ROSSIYSKAYA GAZETA distribué AVEC LE FIGARO

ONU : l’intervention en Libye a refroidi Moscou sur la Syrie suite de la premiÈre PAGE

Russie Unie l’emporte dans la douleur et la contestation Le parti du pouvoir a perdu la majorité absolue pour ne garder qu’une majorité simple au Parlement. Restent les doutes sur la légitimité du scrutin... Artem zagorodnov

La russie d’aujourd’hui

Priorité au dialogue avec l’Iran Vitaly Tchourkine maintient que pour la Russie, opposée à de nouvelles sanctions, la voie diplomatique reste le meilleur moyen d’empêcher l’Iran d’acquérir des armes nucléaires. Les inquiétudes manifestées lors de la publication du dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique n’y changent rien : « Nous continuons de l’analyser mais à première vue, il n’ajoute rien à la connaissance générale ».L’ambas-

sadeur voit dans les fuites et les commentaires précédant la sortie du rapport « une opération de relations publiques » mais se dit encouragé « qu’après la publication, le Conseil des gouverneurs de l’Agence ait adopté une résolution appelant l’Iran à renforcer sa coopération avec elle et réaffirmé l’intention de la communauté internationale de poursuivre le dialogue » .

­ embres permanents du Conseil m (les États-Unis, la France et le Royaume-Uni). « Le courageux peuple syrien voit nettement qui, dans ce Conseil, soutient son aspiration à la liberté et aux droits de l’homme, et qui l’ignore », déclara la Représentante américaine, Susan Rice. Son homologue français Gérard Araud alla plus loin : « Les appels de la Ligue Arabe à faire cesser l’effusion de sang, les déclarations des pays du voisinage, les souffrances du peuple syrien montrent bien que ce veto est à contre-sens de l’histoire qui se déroule en Syrie et dans toute la région ». Vitaly Tchourkine a une autre vision de la situation : « Oui, il y a eu de grandes manifestations pacifiques dans certaines parties du pays, mais il y a eu aussi des attaques violentes contre les institutions gouvernementales et

cette tendance s’est accentuée. Ce qu’a fait la Russie, c’est ­­qu’elle est restée en pourparlers permanents avec les autorités et l’opposition syriennes, et elle a prié les membres de la communauté internationale de pousser les Syriens au dialogue, parce que nous

« Si la Syrie plongeait dans la guerre civile (...), nulle résolution de l’ONU ne nous aiderait... » pensons fortement que pour instaurer le dialgoue, les gens qui, en Syrie, veulent vraiment le changement doivent se dissocier des extrémistes violents.Nous ne voulons pas croire que le régime d’Al Assad ne peut pas changer ».

reuters/vostock-photo

« On a assuré aux membres du Conseil de sécurité que la résolution 1973 [NDLR : la seconde résolution sur la Libye] ne signifiait pas ‘changement de régime’, qu’il s’agissait uniquement de protéger les populations civiles, ce qui nécessitait qu’on élimine quelques installations anti-aériennes mais ce ne serait en aucun cas une opération militaire majeure , explique l’ambassadeur russe. Puis, très vite, on nous a dit qu’il fallait en fait changer le régime et s’attaquer à Kadhafi pour appliquer la résolution. C’est quelque chose que nous n’avons pas apprécié, car nous étions en face d’un cas flagrant de détournement des prérogatives du Conseil de sécurité, ce qui portait atteinte au prestige du Conseil et à sa capacité d’agir efficacement à l’avenir ». Pour la Fédération de Russie, l’un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, il n’était pas question de laisser le scénario libyen se reproduire : « Dans le cas de la Syrie, nous avons vu ce projet de résolution, qui ne contenait pas de sanctions particulièrement sévères, mais qui entraînait le Conseil de sécurité et la communauté internatio­nale sur la voie de l’affrontement avec la Syrie, et qui attisait aussi l’affrontement à l’intérieur du pays ». D’où le veto russe, conjugué à celui de la Chine. Cette position fut vivement critiquée par les trois autres

Vitaly Tchourkine à la sortie d’une séance du Conseil de sécurité.

Tchourkine a beau jeu d’opposer l’impatience des Occidentaux sur la Syrie à leur volonté de négocier pendant de nombreux mois pour obtenir le départ du Président du Yémen, Ali Abdallah Saleh, et, dans le cas du Barheïn, aux appels des États-Unis au dialogue, malgré d’interminables manifestations des opposants au régime : « Nous sommes très heureux de l’accord politique qui vient d’être signé au Yémen après des mois de négociations. La communauté internationale a su se montrer patiente et a encouragé les deux parties à dialoguer, bien qu’il y ait eu, je pense, plus de sang versé au Yémen que ces derniers mois en Syrie. Dans de telles situations, la communauté internationale devrait toujours appuyer la recherche d’une solution par le dialogue plutôt que d’ajouter à l’agitation intérieure ».

Mais pour l’instant, même les efforts diplomatiques de la Ligue arabe n’ont guère ébranlé la détermination du régime syrien : « Si le dialogue échoue, conclut l’ambassadeur, la Syrie peut plonger dans la guerre civile, ce qui aurait de graves consé­ quences pour toute la région et nulle résolution de l’ONU ne nous aiderait » à sortir de la crise.

en ligne Retrouvez sur notre site Web l’intégralité de l’entretien que l’AmbassadeurVitaly Tchourkine nous a accordé sur un large éventail de sujets. Consultez larussiedaujourdhui.fr/ 13052

Entretien avec Katia Vilarasau

Un frein aux démarches individuelles

D’où viennent vos craintes ? Les adoptions individuelles ne seront plus possibles pour les Français en Russie. Il ne restera plus que trois agences accréditées (l’AFA et 2 OAA) qui, même en fonctionnant merveilleusement bien, ne pourront pas faire face à la demande. Comment se déroulaient les adoptions jusqu’ici ? Les Français ont commencé à accueillir des enfants russes à la fin des années 1990. Il existait deux voies au début : indivi­duelle ou via une agence. Pour la première, il fallait obtenir une autorisation de l’administration française, passer un examen, obtenir les papiers exigés par les autorités r­usses, venir en Russie pour une audition au ministère. Ou

dressé une « liste noire » de ­toutes les organisations qui auraient omis de présenter ne serait-ce qu’un seul rapport. Cette liste, aujourd’hui, interdit l’adoption en Russie aux familles résidant dans 53 départements français, dont Paris, c’est-à-dire plus de la moitié du pays. Les papiers ont été perdus par quelqu’un ; résultat : toute la région est punie.

archives personnelles

Après la signature de l’accord sur les adoptions entre la Russie et la France, le nombre d’enfants venus de Russie risque de chuter spectaculairement. Dans le cadre du seizième séminaire intergouvernemental ­France-Russie, qui s’est déroulé à Moscou au mois de novembre, un accord bilatéral sur la coopération dans le domaine de l’adoption d’enfants russes a été signé par les deux pays. Cet accord a été reçu avec inquiétude par l’association APAER, qui rassemble les familles ayant adopté des enfants de Russie. Son ancienne présidente, Katia Vilarasau, a répondu à nos questions.

Katia Vilarasau, son mari et leur enfant adopté.

alors, on pouvait s’adresser à une a­gence officielle, basée en Russie, autorisée à accomplir des adoptions. Mais dans ce cas il fallait s’armer de patience. Il n’existe que trois agence de ce type et chacune ne peut traiter que 50 à 60 dossiers par an.

de lapart des familles ayant adopté. La Russie en exige quatre. Le premier,six mois après la décision du tribunal,puis au bout d’un an, et pendant trois ans. Dans certaines régions, comme Ekaterinbourg,il faut fournir des rapports jusqu’à ce que l’enfant ait 18 ans.

Existe-il des problèmes particuliers liés à l’adoption en Russie ? Chaque pays exige des rapports

Enquoicesdifficultésnuisent-elles au processus d’adoption ? En 2009, les autorités russes ont

Combien de familles françaises attendent leur tour aujourd’hui ? Il y a près de 1 000 familles sur la liste de l’AFA, mais certainement beaucoup plus en réalité. Au moins 1 200 à 1 500 familles seraient heureuses d’adopter un enfant en Russie. Pourquoi les Français choisissentils des enfants en Russie ? Surtout pour le sérieux de la procédure d’adoption en Russie, et la proximité culturelle et historique des deux pays. Vous-même l’avez choisie… Oui, nous avons adopté notre fils

Les adoptions d’enfants russes en France

dans la région d’Irkoutsk. Il fallait faire 26 heures de route depuis Irkoutsk pour arriver dans sa ville natale, Ust-Ilimsk. Il avait sept mois. Nous sommes arrivés dans un petit orphelinat, et avons été accueillis par un personnel attentionné, des nourrices qui s’occupaient très bien des enfants. Nous étions les premiers étrangers à être allés si loin. La directrice nous a fait visiter l’orphelinat : la cuisine, le préau, et des enfants d’une autre section, un peu plus vieux, de 18 mois à trois ans. Quand nous sommes entrés, ils étaient assis en train de goûter. Ils se sont tous figés en nous voyant, comprenant que cela pouvait être papa ou maman. Ils nous regardaient, sans bouger, comme des statues. Un petit garçon s’est levé subitement et nous a tendu son biscuit. Nous étions bouleversés. Certaines familles, dit-on, aident l’enfant à oublier la Russie en identifiant ce pays au malheur ? Je pense que c’est très rare. Les familles françaises sont généralement fières de leurs enfants adoptés en Russie et n’ont aucun désir de tout détruire. La ­preuve : quand nous organisons tous les ans une fête du Nouvel An à l’ambassade de Russie à Paris, de plus en plus de familles expriment leur désir de participer, bien que beaucoup doivent venir de loin à leurs frais. Propos recueillis par Natalia Kopossova

Les résultats des élections législatives maintiennent la position de leader du parti au pouvoir Russie Unie au sein de la ­chambre basse du Parlement russe (49,3%), la Douma d’État. Un résultat toutefois beaucoup plus faible que les 64,3% enregistrés lors des dernières élections, en 2007. Le parti ne pourra désormais compter que sur 238 des 450 sièges, contre 315 actuellement. Les ­sièges restants seront répartis proportionnellement entre les trois autres forces parvenues à franchir le seuil électoral de 7% des voix. Mais le fait majeur du scrutin est que le parti de Vladimir Poutine a perdu la majorité constitutionnelle des deux tiers, qui lui permettait d’amender la Constitution russe sans le soutien de tous les autres partis politiques. « Nous devrons con­clure des accords par le biais de coalitions et de blocs [au sein de la prochaine Douma d’État]. C’est la démocratie », a commenté le Président Dmitri Medvedev, qui dirigeait la liste de Russie Unie. Dans l’opposition, on crie à la fraude électorale. « Nous avons reçu des milliers d’appels depuis les bureaux régionaux confirmant des violations et des fraudes massives », a rapporté la BBC, citant le chef adjoint du parti communiste Ivan Melnikov. L’Internet regorge de vidéos de citoyens filmant des scènes suspectes. De nombreuses villes ont vu défiler des manfestants réclamant (comme l’ancien chef de l’État soviétique Mikhaïl Gorbatchev) l’annulation du scrutin et de nouvelles élections. Il s’agit de la première Douma à être élue pour un mandat de cinq ans (au lieu de quatre), conformément aux modifications constitutionnelles adoptées en 2008. Les prochaines élections auront lieu en 2016. lire aussi les opinions exprimées en page 6.

EN BREF La gratuité des soins en question

photoxpress

Le Président Dmitri Medvedev a signé une loi fragilisant le sacro-saint principe de gratuité des soins. La loi cherche à mettre un terme aux pots-devin, mais du coup légalise les services médicaux payants dans les établissements d’État. Ce qui, disent les critiques, constitue une étape vers la généralisation des services payants. ­Toutes les Constitutions russes depuis 1936 jusqu’à l’actuelle - adoptée en 1993 - men­tionnent la gratuité des soins comme un droit inaliénable. Mais il s’agissait d’un droit systématiquement violé, surtout à l’époque post-soviétique immédiate, lorsque le système de santé était miné par un financement insuffisant et commençait lentement à s’effondrer.


Économie

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Transports Les investisseurs étrangers vont jouer un rôle important dans la modernisation du rail russe, « poumon » du pays

Axes du développement : la très haute vitesse et le fret

Les chemins de fer russes (Rossiiskie Jeleznie Dorogui, ou RJD) se modernisent rapidement et invitent les groupes étrangers à participer à de gros appels d’offres.

Extension du réseau haute et très haute vitesse d’ici à 2018

Paul duvernet

La russie d’aujourd’hui

Dans aucune autre nation, le développement des réseaux ferrés n’est plus crucial qu’en Russie. Pas seulement parce que c’est le pays le plus vaste de la planète, mais aussi parce que les conditions climatiques extrêmes et sa position géographique entre l’Europe et l’Asie octroient au train un avantage concurrentiel certain par rapport aux autres moyens de transport. Conscients du potentiel fantastique des réseaux ferrés, les pouvoirs publics russes consentent des efforts croissants pour moderniser l’infrastructure et le matériel roulant de RJD, en invitant les grands groupes industriels mondiaux du secteur à y participer. RJD n’est pas une société comme les autres. C’est l’un des plus gros employeurs au monde avec 950 000 salariés (1,3% de la population active). RJD opère le troisième réseau à l’échelle mondiale après les États-Unis et la Chine, avec 85 200 km de voies utilisées, et transporte 947 millions de passagers par an. L’entreprise représente aussi 1,9% du PIB russe. Toutes ces caractéristiques font de cette entreprise 100% publique un actif stratégique pour le pays. RJD prévoit de dépenser environ 29 milliards d’euros dans les trois

Le rail est crucial pour l’économie russe car il transporte les richesses du pays : pétrole, métaux, charbon

EN Chiffres

6

milliards d’euros : c’est le montant des impôts versés par la compagnie ferroviaire au budget russe, qui en font l’un des plus importants contribuables du pays.

La grille des partenariats avec les constructeurs étrangers

9

milliards d’euros : c’est le total des investissements réalisés par RJD au cours de l’année 2011, dont 1,14 milliard au titre du rénouvellement du parc roulant.

Industrie L’insuline est désormais fabriquée en Russie

Sanofi-Aventis a pris l’option de la production locale Numéro trois des groupes pharmaceutiques mondiaux, le français Sanofi-Aventis avait de bonnes raisons d’impanter la production de l’insuline que la Russie n’importe plus.

d’insuline par an. « Nous avons apporté tout notre savoir-faire et la maîtrise des nouvelles tech­ nologies en matière de fabrica­ tion d’insuline. Nous sommes les seuls sur le marché en Russie », affirme Galkova. La Russie compte 3,1 millions de patients atteints de diabète mais les experts estiment que le chiffre est en fait trois à quatre fois plus élevé. « Les capacités de production de l’usine sont suf­ fisantes pour répondre au besoin du marché russe tant en insu­ line analogue, qu’en insuline hu­ maine », assure Galkova. Jusqu’à maintenant, produire l’insuline en Russie n’était pas rentable. En 1989, le ministère

Vladimir rouvinski

de la Santé de l’URSS avait interdit la production d’insuline, car celle-ci était de mauvaise qualité (extraite du pancréas de porc), et décrété l’importation depuis l’étranger d’une insuline fabriquée à partir de micro-organismes saprophytes. Depuis, la production d’insuline avait été abandonnée. Ouvrir une usine en Russie ne présentait aucun intérêt ni pour les sociétés russes, ni pour les étrangères : l’insuline était considérée comme un produit stratégique, exonéré des taxes douanières et son achat était financé par l’État. Le regain d’intérêt de la part de Sanofi pour la production sur le territoire russe est lié au programme fédéral d’aide complémentaire en médicaments pour les plus démunis, qui couvre un tiers du marché pharmaceutique et représente 2 milliards de dollars. Et 70% de cette somme est destinée exclusivement à des producteurs nationaux. Un producteur d’insuline implanté sur le territoire russe obtient ainsi, d’office, un marché garanti.

itar-tass

La russie d’aujourd’hui

L’usine de production d’insuline « Sanofi-AventisVostok », ac­quise par le groupe dans la région d’Oriol en 2010 pour près de 28 millions d’euros, selon les experts, fonctionnera au maximum de sa capacité dès 2012. « C’est la première et la seule fa­ brique d’insuline de dernière gé­ nération en Russie. Et la qua­ trième plateforme mondiale pour le groupe, après l’Allemagne, les États-Unis et la Chine », affirme Tatiana Galkova, directrice de la communication de Sanofi Russie. Selon elle, cette usine est capitale pour le groupe. Présente en Russie depuis déjà 1970, Sanofi est devenue le leader du marché pharmaceutique sur la gamme de médicaments contre le diabète, le cancer, les maladies cardio-vasculaires et du système nerveux central. Au début 2011, l’usine lança la production de stylos injecteurs d’insuline permettant aux diabétiques de faire leurs injections eux-mêmes sans aide médicale. L’usine était capable de pro­duire de 15 à 30 millions cartouches

prochaines années et 300 milliards d’euros d’ici à 2030 afin de moderniser ses lignes et son matériel roulant, se hissant ainsi au niveau européen. Il s’agit de construire 20 000 km de nou­velles voies, remplacer 20 000 locomotives et 30 000 wagons de passagers. La densité du réseau doit augmenter de 24% d’ici à 2030. L’un des principaux efforts de la modernisation vise à développer la haute vitesse ferroviaire. L’exemple européen, et français en particulier, a démontré les bénéfices économiques apportés par le TGV, qui a stimulé la crois­sance économique, créé des emplois et grandement aidé le secteur industriel des transports.

À l’usine Sanofi-Aventis Vostok dans la région d’Oriol.

Première ligne du projet, celle qui reliera sur 660 km et en 2h30 la capitale Moscou à Saint-Pétersbourg. Ce projet de 16,8 milliards d’euros verra un train circuler jusqu’à 400 km/h et transporter à partir de 2018 jusqu’à 10 millions de passagers par an. La construction doit commencer dès 2013. Les groupes français SNCF et Alstom ont déjà annoncé leur candidature, ainsi que l’allemand Siemens. Les entreprises de Corée du Sud et de Chine vont probablement se joindre au concours. Le ou les vainqueurs devront en partie financer le projet et seront chargés de la conception comme de la construction et de la maintenance sur 30 ans. Le PDG de la SNCF, Guillaume Pépy, est enthousiaste : « La Russie est en droit d’avoir des ambitions dans le développement de la haute vi­ tesse ferroviaire ». Il estime que la construction de la voie à très haute vitesse Moscou-Saint-Pé-

Urbanisme Un projet digne du Grand Paris

Main tendue à l’étranger pour le « Grand Moscou » Le maire de la capitale russe va faire appel à l’expertise internationale pour le projet de doubler la superficie de la ville, réduire les problèmes de circulation et attirer les investissements. paul duvernet

La russie d’aujourd’hui

« Nous allons lancer cette année un appel d’offres pour créer un concept de développement vi­ sant à intégrer Moscou et sa ré­ gion dans une agglomération », a déclaré Sergueï Sobianine, maire de la capitale russe depuis un an et demi. La mairie s’est récemment ouverte à l’expertise internationale et recherche des architectes et des urbanistes de toutes origines pour la gigan­ tesque expansion de Moscou prévue dans les toutes prochaines années. Sergueï Sobianine s’exprimait à l’occasion du premier « Moscow Urban Forum » organisé les 7, 8 et 9 décembre dernier dans la capitale. De nombreux invités internationaux se sont déplacés, dont le ministre français de la Ville Maurice Leroy, accompagné d’une délégation représentant le projet du Grand Paris. Le ministre a dit voir « beaucoup de similitudes entre le ‘Grand Moscou’ et le Grand Paris, tant en termes de transports que de création de lo­ gements et de développement économique. Nos capitales sont

en définitive confrontées aux mêmes problèmes ». Plus grande ville d’Europe avec 11,5 millions d’habitants (auxquels il faut ajouter entre deux et trois millions de résidents non enregistrés), Moscou s’apprête à doubler sa superficie afin de décongestionner le centre-ville. De nombreuses administrations vont déménager en périphérie. La mairie va consacrer environ 35 milliards d’euros aux transports au cours des cinq prochaines années, donnant la priorité aux transports en commun. La capitale russe souffre plus qu’aucune autre métropole occidentale de problèmes de bouchons en raison d’une mauvaise planification. Le métro va con­naître un développement rapide avec la construction de 30 stations sur les cinq prochaines années, pour un investissement de 12 milliards d’euros. Tous ces travaux donneront lieu à des appels d’offres internationaux, a indiqué le maire de Moscou. Au sein de la délégation française, une source émet quelques réserves : « ce sont des groupes russes qui vont remporter les ap­ pels d’offres, mais nous espérons nous associer à certains projets. Nous sommes venus ici pour montrer l’exemple réussi du Grand Paris et faire valoir notre expertise par rapport aux concur­ rents anglo-saxons ».

tersbourg est un projet « très sti­ mulant et d’une importance ­énorme, qui va ouvrir une nou­ velle ère ». En outre, RJD veut parallèlement construire une deuxième ligne reliant la capitale à l’Oural, c’està-dire passant par Vladimir, Nijni-Novgorod, Kazan et Ekaterinbourg. Au total, 1 600 km en huit heures de trajet avec des pointes à 400 km/h et un calendrier similaire, soit un début d’exploitation pour 2018. L’objectif étant clair : il s’agit d’être prêt pour la Coupe de monde de football, qui sera organisée dans les villes traversées par le futur train à haute vitesse. Le coût de cette deuxième ligne est estimé à 31,6 milliards d’euros. L’autre grand axe du développement de RJD concerne le transport de fret. Un rôle crucial pour l’économie russe puisque le rail transporte toutes les richesses du pays : pétrole, métaux, charbon. RJD voit plus loin et souhaite élargir sa fonction à celle de corridor entre l’Europe et l’Asie (axe transsibérien), mais aussi vers le sud (axe transcaspien jusqu’au golfe Persique). La route ferroviaire vers la Chine est deux fois plus courte en temps que la voie maritime. Selon Guillaume Pépy, « il existe un marché (…) pour le transport de fret entre l’Eu­rope et l’Asie par la voie transsibé­ rienne », un trajet qui durera « entre une et deux semaines ». Selon lui, « RJD, Deutsche Bahn et la SNCF travaillent déjà » sur un projet de livraison de vêtements fabriqués en Chine destinés au marché européen. Dans le sens inverse, il existe déjà un train qui transporte des pièces automobiles de Vesoul vers Kalouga (200 km au sud de Moscou). Nul doute que le transsibérien va cesser d’évoquer simplement un voyage romantique vers Pékin : il ouvrira des perspec­tives économiques pour des milliers de PME européennes.

EN BREF Distribution : la Russie attractive La Russie se classe au troisième rang mondial des pays les plus attractifs pour les chaînes internationales de distribution, d’après un récent sondage effectué par le cabinet d’étude CBRE. L’Italie, l’Allemagne, la Russie, l’Espagne et la France se partagent les cinq premières places. Un tiers des sociétés interrogées souhaitent investir dans ces cinq pays, où les investissements étrangers depuis janvier s’élèvent à 764 millions d’euros.

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Économie

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Innovation La coopération avec les grands groupes industriels internationaux dans différents secteurs de pointe est en route

La technopole de Skolkovo doit faire ses preuves Objectif affiché : devenir la locomotive de l’économie russe. Rome ne s’est pas faite en un jour, et les moyens engagés devront correspondre aux ambitions.

EN Chiffres

29

milliards d’euros ont été investis par l’État russe dans les différents projets d’innovation au cours de l’année 2011, d’après Olga Ouskova, la présidente du NAIRIT.

Alexandre vostrov

spécialement pour La russie d’aujourd’hui

Les Allemands attentifs

Avec Siemens, par exemple. Le contrat prévoit un développe­ ment échelonné et compte, vers 2015, employer environ 150 per­ sonnes. Certains projets seront

23%

des projets d’innovations sont le fait de jeunes. 9% des diplômés russes veulent devenir chercheurs.

28%

dmitry astakhov/ria novosti

Le projet de la « Silicon Valley » russe est de créer au sein de la technopole des centres de re­ cherche et d’attirer les grosses sociétés internationales dès le stade préliminaire d’un projet. Roman Romanovski, directeur du département des partenaires clés de la Fondation Skolkovo, explique : « Notre objectif premier est la création d’un espace et de conditions optimales pour interagir. Skolkovo ne s’inté­resse pas exclusivement aux jeunes pousses. Mais ne se limite pas non plus aux projets de grandes entreprises Nous voulons assurer au sein de Skolkovo un flux continu d’idées novatrices, pour que chacun y trouve son ­compte. Les grosses entreprises, trouveront leurs jeunes spécialistes, les start-ups, leurs investisseurs, les investisseurs, de nouveaux projets intéressants, etc ». Cette approche a porté ses fruits : plusieurs sociétés de renommée internationale ont évoqué leur intention d’ouvrir des centres de recherche à Skolkovo. La plu­ part se sont limitées, pour le mo­ ment, à des mémorandums d’en­ tente mais des accords ont également été signés.

des projets sont liés à l’efficacité énergétique, 26% concernent le domaine de la médecine, 22% vont aux technologies de l’information, 5% portent sur les technologies de télécommunication et spatiales, 4% sur le nucléaire et 13% sur le reste.

Le Président Medvedev et le patron du Fonds Vekselberg au lancement du projet Skolkovo.

sard que le PDG de Siemens AG, Peter Löscher, fait partie du Conseil d’administration de la Fondation Skolkovo. La coopération scientifique touche à plusieurs domaines, dont la médecine nucléaire ». Bien que les détails du projet ne soient pas dévoilés, il sera sûrement ques­ tion de la détection radio-isoto­ pique, Siemens étant le princi­ pal fabricant de matériel pour cette méthode d’investigation médicale. Une bourse de plus de 3 millions d’euros a déjà été ac­ cordée pour ce projet.

Siemens et le finlandais Nokia annoncent des investissements par dizaines de millions d’euros financés exclusivement par la so­ ciété allemande. Le montant total des investissements s’élèvera à 60 millions d’euros. Siemens fournira 40 millions, les 20 mil­ lions restants proviendront de la Fondation Skolkovo. Alexandre Averianov, respon­ sable chez Siemens du projet Skolkovo, précise : « La technopole nous intéresse particulièrement car elle risque d’avoir une sérieuse influence sur l’avenir de la Russie. Ce n’est pas par ha-

L’expérience finlandaise

Avec Nokia, le contrat s’est axé sur la création et la commercia­ lisation de nouvelles applications pour téléphones portables. « Nous

avons signé avec Vekselberg un protocole d’accord précisant les étapes du développement du ­centre de recherche, affirme Ta­ tiana Oberemova. Ce centre sera chargé du développement des systèmes d’exploitation mobiles et de l’utilisation des nanotechnologies. Les investissements de Nokia se chiffrent en dizaines de millions d’euros, budget standard pour les centres de recherche et innovation de Nokia ». Dès le début, un rythme stakha­ noviste était prévu : le permis de construire signé en juin 2011, le centre devait être prêt pour décembre. Trop court peut-être, mais cela donne une idée du rythme attendu de la coopéra­ tion entre la technopole et le géant finlandais. Première étape :

Igor Belov / RFI

ilya pitalev/ria novosti

La présentation du plan-masse. Les bâtiments du technoparc de Skolkovo s’étendront sur environ 145 000 mètres carrés.

Les représentants de EADS s’apprêtent à signer le contrat avec le Fonds Skolkovo.

L’Avis d’un expert

Enjeu : la transformation de la culture entrepreneuriale Steven Geiger

Spécialement pour la russie d’aujourd’hui

On me demande souvent de ré­ sumer la mission fondamen­tale de Skolkovo. Cela tient en trois mots : changer la culture. Skolkovo modifie la culture universitaire russe par la construction d’un nouvel ins­ titut scientifique, en collabo­ ration avec le Massachusetts Institute of Technology. Nous pensons qu’il s’agit du premier institut du genre au monde in­ tégrant enseignement, re­ cherche, innovation et entre­ preneuriat. Skolkovo modifie la culture d’entreprise. Nous expliquons aux grandes sociétés russes la

valeur des contrats de recherche dans ce nouvel institut, comment réaliser une interface et un par­ tenariat avec la communauté du capital-risque, et comment em­ brasser l’innovation en tant qu’élément central du succès, voire de la survie. Skolkovo transforme la culture entrepreneuriale. On peut aisé­ ment oublier qu’il y a peu, l’en­ treprise privée en Russie était soit illégale, soit fortement dé­ conseillée. Il faudra du temps pour surmonter cet héritage et laisser l’esprit foncièrement créa­ tif des Russes s’épanouir. Skol­ kovo se veut être un accéléra­ teur de cette transformation. En offrant un soutien, un finance­ ment et des préférences pour les start-ups, nous espérons niveler

un peu le terrain en faveur d’ac­ teurs plus modestes. Notre rôle est également de fournir un « soutien moral » aux jeunes en­ trepreneurs dynamiques.

Appliquer la puissance scientifique et intellectuelle russe à des produits compétitifs sur le marché mondial Enfin, nous avons pour objectif clair de transformer la compré­ hension culturelle de la création de richesse. La Russie est un pays qui a long­ temps été dominé par la produc­ tion physique : pétrole, gaz, mé­

taux, bois, etc. La focalisation exclusive sur la production ma­ térielle a dominé à l’époque so­ viétique avec ses fameux plans quinquennaux. Logiquement, la plupart des Russes considèrent la création de richesse en termes physiques. Mais pour que la Russie rivalise dans l’économie mondiale, il faut passer à la vitesse supérieure, et Skolkovo est une nouvelle trans­ mission. Nous nous y efforçons en mettant en valeur la proprié­ té intellectuelle. Notre tâche est de créer des mé­ canismes efficaces pour appli­ quer la puissance scientifique et intellectuelle de la Russie à des produits basés sur la connais­ sance et à des services compéti­ tifs sur le marché mondial.

EADS sera présent à Skolkovo Le directeur technique d’EADS, Jean Botti, et le président exécutif de la Fondation Skolkovo, Viktor Vekselberg, ont signé un accord de collaboration définissant la ­mise en œuvre, d’ici à la fin de l’année prochaine, d’une unité de recherche de la société européenne aéronatique et spatiale à Skolkovo. Signé en juin dans le ­cadre du salon Paris Airshow 2011, l’accord porte sur un centre de recherche et de développement au programme duquel figureront les défis industriels et technologiques d’Airbus, Eurocopter, Astrium et Cassidian, toutes filiales du groupe. La collaboration concerne les sys­tèmes de communication, les d­rones, les moteurs de pointe et le traitement de l’énergie. EADS va également lancer un appel aux étudiants et aux chercheurs de Skolkovo pour qu’ils participent à l’activité de recherche menée par le groupe européen.

Ericsson voit en Skolkovo la pierre angulaire de la réalisation de son objectif : créer un véritable écosystème

Changer une culture et une men­ talité est extrêmement difficile. Le côté positif, cependant, est que si vous réussissez, votre im­ pact sera significatif. Les grands pays sont comme de gros na­ vires : ils ne tournent pas à 90°. Mais faites-les pivoter ne seraitce que de quelques degrés dans la bonne direction, et vous leur aurez fait changer de cap. Skolkovo jouit d’un certain ­nombre d’atouts à cet égard. Le premier, c’est la richesse de ses ressources scientifiques et tech­ niques. Par contraste, mon af­ fectation précédente consistait à construire une ville d’innova­ tion similaire pour le petit émi­ rat d’Abu Dhabi, qui ne compte que 400 000 citoyens et est pra­ tiquement dépourvu de res­ sources scientifiques. Deuxièmement, nous avons ap­ pris des autres. En prenant le départ plus tard, la Russie a l’avantage de sa maturité.

définir la politique de recherche. Il sera sûrement question de nou­ veaux systèmes sensitifs pour les principales plateformes Nokia et de l’application des nanotech­ nologies pour des appareils des­ tinés à la grande consommation. La seconde étape consistera à ouvrir les laboratoires de re­ cherche, puis viendra l’étape de réalisation, avec d’importants projets internationaux et leur commercialisation.

Les voisins Suédois

Pour Ericsson, Skolkovo est une excellente plateforme pour les travaux de recherche dans le do­ maine des télécommunications, comme l’informatique en nuage (cloud computing) et la téléma­ tique. Mais en tout premier lieu, les travaux porteront essentiel­ lement sur les réseaux intelli­ gents, dans le but de faire d’im­ portantes économies d’énergie. En effet, installés chez l’utilisa­ teur, des compteurs évolués iden­ tifieront en temps réel la consom­ mation d’un foyer et transmettront cette information au gestion­ naire, ce qui permettra un contrô­ le accru de la consommation. Mikhaïl Podoprygalov, vice-pré­ sident d’Ericsson pour la coopé­ ration avec le gouvernement, af­ firme : « Cela fait longtemps qu’il est question de développer une économie qui ne serait pas basée sur l’exportation de matières premières. Skolkovo est justement la pierre angulaire qui devra permettre d’atteindre cet objectif, un véritable écosystème. Bien sûr, beaucoup diront qu’il aurait fallu s’y prendre autrement. Mais il faut bien comprendre que, compte tenu des objectifs visés, et des paramètres à mettre en œuvre pour les réaliser, il est difficile au stade actuel de déterminer la réussite ou l’échec du projet ». « Et c’est bien là le problème majeur, rejoint Podoprygalov, l’ana­ lyste financier de RosBusiness­ Consulting (RBC), Timofeï Chatskikh. Tant qu’un premier projet abouti ne verra pas le jour, les Russes, d’autant plus les investisseurs, considéreront la technopole comme une utopie gouvernementale de plus. La plupart ne voient pas en Skolkovo un projet scientifique mais plutôt une démarche politique visant à donner une image positive de l’État. Et même la coopération avec différentes compagnies internationales de renommée ne suffit pas à les faire changer d’avis. Et il en sera ainsi tant qu’un projet scientifique né entre les murs de la technopole ne sera pas présenté. Toutefois, la création de ces centres de recherche, englobant tous les ­cycles, de la phase préliminaire à la réalisation, va arranger la situation en promettant d’assurer au moins un flux continu d’idées novatrices ».

Troisièmement, et en rupture avec la tradition russe, Skolko­ vo est une plateforme entière­ ment ouverte à la coopération mondiale en recherche et déve­ loppement. Les cités des ­sciences fermées du passé ont atteint leur but, mais la vitesse et l’échelle de l’interconnectivité mondiale exigent ouverture et collabora­ tion. Le monde n’est peut être pas plat, mais il est sans aucun doute de plus en plus allongé. Alors, pourquoi faisons-nous ce que nous faisons ? Je pourrais vous donner de multiples raisons, mais c’est peut-être Steve Jobs qui a le mieux formulé la répon­ se : « Ce monde appartient aux fous. Parce que les gens qui sont assez fous pour penser qu’ils peuvent changer le monde sont généralement ceux qui le font ». Steven Geiger est Directeur opérationnel de la Fondation Skolkovo.


Régions

LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI www.larussiedaujourdhui.fr communiqué DE ROSSIYSKAYA GAZETA distribué AVEC LE FIGARO

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L’hiver en Russie Dans des régions marquées par les extrêmes de températures, hommes et bêtes s’adaptent aux rigueurs climatiques

Parés pour les froids sibériens Les températures de janvier

Vie sauvage

Oïmiakon est un village situé dans le nord-est de la république de Sakha (à 3 000 km du pôle Nord). Officiellement, c’est l’endroit habité le plus froid du monde, mais en été, la température peut y monter jusqu’à 30 degrés.

Sotchi est une ville située dans la région de Krasnodar sur la mer Noire. La station balnéaire a été édifiée à la fin du XIXe siècle, et elle est devenue populaire après que Staline y fit construire une datcha. En 2014, la ville accueillera les Jeux Olympiques d’hiver.

Transports L’hiver russe exige des services techniques publics une riposte bien réglée

En France, des chutes de neige de 5 cm créent parfois un véritable chaos. En Russie, les choses sérieuses commencent au-delà de 40 cm.

photoxpress

L’envahisseur blanc pose un défi permanent

L’armada des chasseneiges moscovites se déploie.

tout en effectuant une autre tâche indispensable : relever les crevasses sur la chaussée et transmettre l’information aux services d’entretien de la voierie. Les chasse-neiges repoussent la masse vers le bord de la route, les monceaux sont ensuite chargés sur des camions-bennes et convoyés vers l’un des 200 points de fonte de neige. Cha-

n’est pas un problème pour nous, c’est la routine », dit Piotr Birioukov, le chef des services municipaux qui organise le travail hivernal. Les difficultés ne surgissent que lors de grosses ­chutes sur une période prolongée. Toutes les dix minutes, une colonne de chasse-neiges apparaît sur les routes. Un véhicule peut déblayer jusqu’à douze kilo­ mètres de route en une heure,

Alexeï knelz

La russie d’aujourd’hui

C’est bien connu, le Général Hiver est russe, et il a mis en déroute Hitler et Napoléon. En novembre 2010, il est arrivé que la température chute en 24 heures de +1 à -20°. L’hiver 2009 fut encore plus rude. Le thermomètre est tombé à -28°, ce qui n’était pas arrivé depuis 60 ans. L’hiver dure près de quatre mois à Moscou, dont 50 jours de ­chutes de neige. En une seule nuit il peut tomber jusqu’à 40 cm de poudre blanche. Le déblayage exige de gros efforts de la part des services techniques publics. Avec la pre­mière neige apparaissent les chasseneiges. « Trois à cinq centi­mètres de neige viennent de tomber. Ce

Avec 150 mètres de tirant d’eau et 75 000 chevaux, ce type de bateau fait partie des plus grands et des plus puissants bâtiments au monde. Depuis 1957, les brise-glaces atomiques russes percent le passage Nord-Est pour les navires depuis l’Europe vers le Japon. En 1977, le brise-glace « Arktika » est devenu le premier à atteindre le pôle Nord.

itar-tass

Les brise-glaces géants de l’Arctique

cune de ces installations peut transformer en eau près de 300 tonnes de neige par jour. L’entretien de l’armada des outils de déneigement coûte 12 millions d’euros par an à la ville de Moscou. L’hiver oblige les automobi­listes russes à casser leur tirelire eux aussi (comme en fin de compte les contribuables qu’ils sont par ailleurs). « As-tu « Webasto » ? » C’est la question que les gardiens de parking posent aux conducteurs quand ces derniers s’apprêtent à laisser leur voi­ ture à ciel ouvert pendant la nuit. Il s’agit d’un appareil de chauf­fage qui fonctionne à moteur éteint et sans lequel il est impossible de démarrer quand il fait -35°. Les pneus d’hiver sont assortis de clous. Ajoutez à cela le li­ quide dégivrant. L’hiver, on en con­somme jusqu’à 5 litres par jour. De nombreux conducteurs installent des réservoirs spéciaux dans leur voiture.

Le tigre sibérien, connu aussi sous le nom de ­tigre de l’Amour, n’est pas seulement le plus grand de ses congénères, mais le seul dont l’espace de vie est lié à la neige et la glace. Les températures peuvent chuter jusqu’à -45° sur le fleuve Amour, en Extrême-Orient. Le tigre est protégé du froid par un poil long et épais, et une couche de ­graisse de 5 cm. Ce qui le rend totalement vulnérable à l’homme. Pendant les troubles qui ont suivi la révolution d’Octobre, l’espèce a failli disparaître. Aujourd’hui, on recense 500 tigres blancs dans les régions frontalières entre la Russie, la Chine et la Corée du Nord, mais leur espace de vie est de plus en plus réduit et l’espèce est toujours menacée d’extinction. Encore plus menacé : le léopard caucasien, qu’on a longtemps cru disparu avant d’en redécouvrir un spécimen en 2003. Depuis, le WWF, avec le soutien du gouvernement russe, cherche à rétablir la population de ces félins. Nombreux sont les Russes qui n’ont entendu parler du léopard caucasien pour la première fois que l’année dernière, quand il a été

reuters/vostock-photo

Tigre et léopard tous climats

choisi comme mascotte des JO d’hiver de Sotchi en 2014. À l’instar du tigre de l’Amour, il se distingue par sa grande adaptabilité, car les hivers dans les montagnes du Caucase sont très froids et neigeux, tandis que les étés y sont chauds et secs.

Mode de vie

Du bania au chauffage central « Je m’en vais au bania, fais chauffer la petchka et bouillir le samovar ». Ainsi parlait un Russe ordinaire à son épouse il y a encore 50 ans. « Bania », c’est le sauna russe. « Petchka », c’est un grand four en briques qui se trouvait jadis dans chaque isba. Le samovar est un gros chaudron réservé à la préparation du thé, et le symbole de l’hospitalité russe. L’urbanisation a eu raison de ces traditions. Dans la Russie contemporaine, le chauffage est central, réglé par un thermostat unique pour tous les appartements. ­Seule solution s’il fait trop chaud : ouvrir la fenêtre. Un air sec dans des pièces surchauffées, c’est aussi une mine d’or pour les fabricants et marchands d’humidificateurs. Les

dpa/vostock-photo

Le mot « Russie » est souvent associé au « froid sibérien ». C’est vrai qu’il peut faire très froid en Russie, même si le climat varie de polaire à subtropical sur les bords de la mer Noire, où la température moyenne en janvier est de 15 degrés, comme à Sotchi, qui se trouve sur la même latitude que Nice. Les Russes des autres régions envient les habitants du sud. Les plus jaloux doivent être les 470 habitants de la petite ville d’Oïmiakon, en Iakoutie, où la température, l’année dernière, est tombée jusqu’à -72° ! Bien sûr, l’hiver conditionne tous les aspects de la vie, mais les Russes y sont habitués. Quelques exemples de la réalité russe pendant la saison des grands froids.

expériences menées par les entreprises allemandes en Russie ont montré que l’utilisation de technologies modernes de chauffage et d’isolation permettrait d’économiser jusqu’à 80% sur les coûts. Mais le chauffage central traditionnel n’en continue pas moins d’être omniprésent...

Divertissement Les Russes se battent contre la neige et la glace, mais ils savent aussi y trouver du plaisir

Tentés par un plongeon dans l’eau par 20 degrés au dessous de zéro ? La russie d’aujourd’hui

Le jour de l’année le plus important pour un vrai « morse », c’est le 19 janvier. Les morses sont ceux qui sont convaincus qu’un bain régulier dans un trou de glace endurcit le corps. Quant à la nuit du 19 janvier, elle est particulière : pour les ortho­doxes, c’est le jour du baptême du Christ. Tous les ans, aux alentours de minuit, quelques dizaines de morses, voire quelques milliers à Moscou, attendent que le ­prêtre ou le pope bénisse les eaux des fleuves et des lacs, puis ils se

j­ettent dedans. Malgré les craintes, même l’hiver dernier, quand la température est tombée à -20°, aucun événement grave n’a été signalé. Au cas où, des sauveteurs et des infirmiers sont toujours présents. L’immersion sous la glace fait rarement « congeler » son homme. Il suffit de respecter certaines

r­ ègles : s’immerger trois fois, se frotter le corps énergiquement puis se rhabiller chaudement, ou, mieux, aller au bania. Les particularités du bania russe consistent dans l’alliance de températures très éleves (80-100 ­degrés) et de l’humidité de l’air. Et même si l’on peut y aller toute l’année, rien n’est comparable aux sensations que procure l’immersion dans l’eau glacée entre les séances de sauna. À essayer absolument ! Pendant que les enfants font de la luge et du patin à glace, les adultes sillonnent la forêt à ski de fond. Et si un nouveau riche peut dépasser sur sa Lamborghini un retraité russe dans sa Lada, sur les pistes de ski, tout le monde est à égalité : il n’est pas rare de voir un retraité sur

de vieux skis « soviétiques » en bois laisser loin derrière les ­jeunes sur des skis dernier cri. Pour aller dans la forêt, on prend d’habitude avec soi une bouteille thermos de thé chaud ou une gourde de liquide... plus fort, qui réchauffe aussi très bien. Certains cherchent à échapper

Mode : n’oubliez pas vos « valenki » Les gants et les mitaines ont été importés en Russie par les Varègues, d’où ils tirent leur nom russe. Les mitaines conservent la chaleur et les grand-mères les tricotent volontiers pour leurs petits-enfants. Les valenki sont fabriqués à par-

tir de feutre de laine de mouton. Ils protègent de températures en dessous de -30°. Mais les valenki ne sont pas étanches et n’ont pas de semelle : c’est pourquoi on les porte avec des caoutchoucs. Tous les ans, on continue à produire 4,5 millions de bottes de feutre.

getty images/fotobank

Mauritz Gatman

reuters/vostock-photo

« L’extrême à la russe » s’observe en hiver. Aucun danger pour la santé à condition de respecter certaines règles.

au tumulte du monde moderne sur les lacs gelés : armés de brise-glaces spéciaux, ils se ­creusent un accès à l’eau. Chaudement emmitouflés, parfois même protégés par des tentes, ils passent des heures assis devant un trou de 20 cm de diamètre dans le froid et la neige, en espérant qu’un poisson sortira de sa léthargie. On peut risquer de les interroger avec précaution : « Alors, ça mord ? » Mais en Russie non plus, on ne dé­ range pas les vrais pêcheurs sans s’attirer un regard maussade pour toute réponse...


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Opinions

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le coup de semonce des législatives Des leçons à tirer au Kremlin Konstantin von Eggert

La russie d’Aujourd’hui

Q

uand le Président Dmitri Medvedev et le Premier ministre Vladimir Poutine sont apparus sur les écrans de télévision russe la nuit après élections à la Douma, leurs visages disaient tout. Les sourires tendus ne pouvaient cacher la déception. Russie Unie, leur parti, a été massivement boudé par les Russes. Sa part du vote national a chuté d’environ 64% à 49%. Cela, en dépit des fraudes massives perpétrées à travers le pays. Les gouverneurs de région, les autorités locales et la police mènent la charge portée contre les partis d’opposition, les observateurs électoraux et les journalistes. En vain. Encore plus gênant, Moscou, Saint-Pétersbourg et d’autres grandes villes ont valu à Russie Unie ses résultats les plus faibles. Sans les ­fraudes massives, le parti aurait parfaitement pu terminer troisième dans les deux capitales. Il y a plusieurs conclusions à en tirer.

Premièrement, cette élection était un référendum de facto sur les dix années de Russie Unie au pouvoir. Un signe que la population est fatiguée du monopole politique et de la corruption qui y sont associés. Deuxièmement, de nombreux Russes croient que Russie Unie est une bande de « mauvais boyards » à la cour du « bon tsar » Poutine. Mais il est aussi clair que pour beaucoup, ce fut une chance d’exprimer leur mécontentement envers Poutine. À cet égard, le vote de décembre peut être vu comme une sorte de « point de départ » de l’élection présidentielle russe, prévue pour mars 2012. Si, au printemps, Poutine se lance dans le semblant de campagne qu’on a observé lors des élections précédentes, il perdra encore plus de crédibilité. Troisièmement, ce fut la pre­mière élection russe au cours de laquelle la classe moyenne naissante de Russie, des trentenaires, et virtuoses de l’iPad, sont vraiment allés voter. C’est la génération qui a le plus bénéficié de la « décennie grasse » - les deux pre-

miers mandats de la présidence de Vladimir Poutine en 20002008. Ce sont les années du boum pétrolier, une manne pour ces nantis qui ne s’intéressaient pas du tout à la politique ou qui soutenaient Poutine et Russie Unie. La crise écono­mique, la stagnation politique et la corruption les en ont détournés - c’est le quatrième facteur. Cinquième et dernier point, plus les autorités feront les gros bras, plus elles produiront de l’opposition. Pour l’instant, les Russes ne voient pas encore d’alternative. Il n’y a pas de forces politiques crédibles de centre-droit, et personne à acclamer pour environ 30% de l’électorat nationaliste. D’où un terrain fertile

Plus les autorités joueront les gros bras, plus elles apporteront de l’eau au moulin de l’opposition pour les populistes en tout genre. Le plus grand danger pour la Russie est maintenant ce vide inquiétant si des mesures de modernisation et de libéralisation ne sont pas prises rapidement. Konstantin von Eggert est politologue.

voter « contre », et puis ? Gueorgui Bovt

La russie d’Aujourd’hui

L

e pouvoir doit d’urgence réagir à la montée du mécontentement social et instaurer le dialogue. Contrairement à ce qu’on ap­pelle la « Russie de la télé », une grande partie de la « Russie de l’Internet » est restée frustrée par les résultats des élections. Cette catégorie d’électeurs cultivés, bien informés, progressistes, a été scandalisée par les innombrables fraudes révélées sur la Toile russe le jour même des élections. Les autorités ont nié en bloc en affirmant que toutes ces accusations étaient erronées et les vidéos truquées. Il est évident que les images, divulguées en partie par les observateurs chargés de veiller au bon déroulement du scrutin, méritaient au moins une enquête. Le cas de Moscou et de Saint-

Pétersbourg est en particulier révoltant. Contrairement aux autres régions, où la différence était moins flagrante, dans ces deux villes les plus importantes, les sondages de sortie des urnes

La Russie est un pays « vieux ». Rien à voir avec les soulèvements de jeunes lors du printemps arabe divergeaient de plus de 15% avec les résultats officiels, en faveur de Russie Unie. L’opposition a surtout bénéficié des voix exprimées contre Russie Unie. Or, la révolution ne se fait pas en votant « contre ». Ni sur la base d’une foule hétéroclite de nationalistes, d’anar­chistes et de jeunes dont les manifestations ne peuvent engendrer qu’une contestation au coup par coup, vite es-

soufflée. Cette opposition ne repose sur aucun système et manque d’un chef de file capable de coordonner l’action des insatisfaits. Un tel vide est un facteur démotivant de plus pour une société civile depuis longtemps caractérisée par une apathie politique et l’incapacité de se rassembler pour faire front commun. Encore un détail, de nature purement démographique : comparée aux pays arabes qui ont fait souffler un vent de révolte avec leur « printemps arabe », la Russie est un pays « vieux », avec un âge moyen de près de 40 ans, contre 20 en Égypte. Avec l’âge, on est moins tenté de descendre dans la rue. Et puis, la jeune génération russe a beaucoup plus de perspectives d’avenir que la jeunesse du ProcheOrient dans des pays comme l’Égypte, la Syrie ou le Yémen.

tous vainqueurs Vitali Ivanov

C

Izvestia

’était certainement la première élection de l’his­toire récente dont tous les participants sont sortis vainqueurs. Russie Unie reste le parti dominant, détenteur de la majorité absolue à la Douma. Avec tout ce que cela implique. Le Parti communiste (KPRF) est lui aussi gagnant. Il y a, bien sûr, quelque chose de pervers dans le fait que le successeur du PCUS (Parti communiste soviétique, ndlr), qui a alimenté pendant deux décennies la nostalgie du régime soviétique, recycle désormais avec succès le mécontentement contre le parti au pouvoir. La même chose s’applique au Parti libéral-démocrate (LDPR) et à Russie Juste. Ils ont également gagné. Et eux aussi, principalement grâce à l’augmentation globale du vote protestataire, non pas en vertu de leur propre rayonnement. Eux non plus ne conserveraient pas leurs gains si de nouveaux acteurs se manifestaient.

Depuis que la Commission électorale a annoncé les résultats du scrutin législatif, dimanche 4 décembre, une vague de mécontement secoue la Russie. Une partie grandissante de la population conteste la victoire du parti du pouvoir, Russie Unie, arrivé en ­tête avec une majorité affaiblie. Les observateurs dénoncent des fraudes, alors qu’un appel à un rassemblement massif, samedi 10 décembre dans les rues de la capitale, a été largement entendu. Préparé par Veronika Dorman

torat protestataire augmente, même fortement : elle ne sera pas canalisée par quelqu’un, mais par le système, par le Parti communiste prévisible et absolument contrôlable. Ce qui reste, grosso modo, est divisé entre Russie Juste et le LDPR. Iabloko et les autres ramassent les miettes. Le système est bien plus ro­buste qu’il ne puisse y paraître de prime abord. Vitali Ivanov est politologue. Article publié dans Izvestia

La nouvelle configuration du Parlement les résultats des élections législatives du 4 décembre 2011 donnent au parti Russie Unie de Vladimir poutine une majorité simple à la chambre basse du parlement (Douma) : 238 sièges sur 450. trois partis n’ont pas réussi à passer la barre des 7% des voix et ne seront pas représentés au parlement.

Gueorgui Bovt, correspondant politique basé à Moscou.

Ruban blanc

la surdité du pouvoir

un possible dialogue

vedomosti

gazeta.ru

kommersant

Il existe un moyen simple de ma­ nifester son indignation : atta­ cher un ruban blanc à son bras, son sac ou sa voiture. Ensuite aller à la manif, ou pas. Ceux qui por­ tent des rubans peuvent se recon­ naître. La question essentielle pour les mécontents est « com­ bien sommes-nous ? ». Ils veulent le comprendre pour eux-mêmes et le montrer à ce pouvoir qui a perdu leur confiance. C’est ­entre autres pour cela qu’ils étaient nombreux à compter aller à la ma­ nifestaion du 10 décembre. Et le ruban ne remplacera pas cela. Une voiture anonyme dans un bouchon avec un bout de tissu blanc, et un homme vivant, debout à côté de toi, ce n’est pas la même chose.

Russie Unie explique : les pro­ testations de masse contre les ­fraudes, c’est une tentative de la minorité d’imposer sa volonté à la majorité. Le pouvoir refuse de voir et d’entendre qu’une majorité des citoyens se sentent offensés par des manipulations éhontées. L’affirmation selon laquelle ce qui se passe n’est que temporaire et financé de l’extérieur n’amènera rien de bon. Les leaders de l’op­ position doivent veiller à ce que les manifestations ne débordent pas du cadre légal. Mais le plus grand danger reste la surdité et l’inflexibilité du pouvoir qui s’ap­ puie sur l’appareil répressif. Sauf que le pouvoir ne peut pas se sui­ cider seul, sans entraîner le pays.

Les élections contestées par l’op­ position ont modifié le rapport du tandem dirigeant à leurs adver­ saires politiques. Vladimir Pou­ tine comme Dmitri Medvedev ont convenu qu’il fallait entamer un dialogue avec ceux qui ne sont pas d’accord. Les opposants ac­ quiescent, mais ne sont pas sûrs de comprendre qui le pouvoir dé­ signe en tant qu’opposition et quel sera le format du dialogue. Les experts sont convaincus que stratégiquement ces discussions doivent déboucher sur une ré­ forme politique. Mais d’abord il faut rétablir entre la société et le pouvoir une relation de confiance, qui a été sévèrement endomma­ gée par les résultats des élections.

Tatiana Lysova

Le vote protestataire est tranquillement absorbé par le système politique et réparti entre les partis

En chiffres

lu dans la presse éléctions contestées et manifestations

Passons à ceux qui n’ont pas franchi la barre des 7%. Depuis 2003, Iabloko mène une exis­tence posthume. Celle-ci devrait se poursuivre pendant cinq nou­ velles années. Trois pour cent des voix, conformément à la loi, donnent droit à un financement public. Que faut-il de plus à un homme mort ? Iabloko y gagne donc lui aussi. Les Patriotes de Russie et Juste Cause sortiraientils eux aussi gagnants ? Bien sûr. Pour eux, une présence sur le bulletin est déjà une victoire. Un parti, en principe, est obligé de participer aux élections, sans quoi se pose la question de sa liquidation. En général, l’opposition est gagnante. Le parti au pouvoir a été poussé dans ses retranchements, et ce succès peut être attribué tant à ses bénéficiaires directs les commu­nistes, Jirinovski et Russie Juste - qu’à la communauté des défenseurs de la démocratie, qui a mené une campagne acharnée contre le « parti des escrocs et de voleurs ». Et, bien sûr, le pouvoir a gagné. Les élections ont démontré la

fiabilité du système politique mis en place ces dernières années. On cherche à le réduire à Russie Unie et à la verticale du pouvoir. Mais en réalité, il est beaucoup plus large. Il embrasse les partis minoritaires de la Douma, qui sont répartis de telle sorte que les oscillations ne peuvent pas sérieusement endommager le système. Que la part de l’élec-

Éditorial

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Viktor Khamraev

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Culture

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Photographie Le jeune Russe Oleg Dou revient à Paris pour exposer ses portraits de personnages énigmatiques

L’objectif comme instrument de torture esthétique Oleg Dou est l’étoile montante de la nouvelle génération de photographes russes. Il revient à Paris pour la cinquième fois présenter sa nouvelle série de portraits : Another Face.

« Mon travail était une expérimentation, une recherche. Puis, une thérapie pour vaincre mes complexes »

Pauline Narychkina

oleg dou

La russie d’aujourd’hui

Un tirage issu de l’exposition Another Face.

monter à la surface la quintessence de l’âme. La force de ses images dérange et interpelle. Les regards transluscides, hypnotiques de ces personnages rendus intemporels, assexués, inexpressifs grâce à une haute maîtrise de la retouche numérique, vous fixent avec une indifférence douloureuse. Son travail est toujours sur le fil du rasoir, à la limite du beau et du laid, de l’innocence et de la perversion, de l’aliénation. D’ailleurs, il n’est pas anodin que ses photos soient exposées au Musée de

archives personnelles

Né en 1983 à Moscou dans une famille d’artistes, Oleg Dou (Douriaguine) a le génie mo­deste. Il est charmant, discret, un peu « geek » comme il est de mise pour un garçon de sa génération. À l’ère de l’image omniprésente, il fait partie de ceux qui n’aiment pas se faire photographier : « Je me souviens de ce sentiment d’angoisse face au calvaire des clichés de famille ou des photos de classe. Et je me trouvais toujours mal à l’aise derrière le masque du sourire ». Pour lui, la meilleure défense, c’est l’attaque et il se met à la photo pour exorciser ses peurs enfantines. Ses portraits dévoilent sa fragilité, un perfectionnisme torturé, une exigence esthétique qui place la barre très haut. Un questionnement constant sur l’identité, le gouffre entre l’être et le paraître. Oleg fait beaucoup référence à son enfance - l’enfant a d’ailleurs une grande place dans son œuvre. « Mon tout premier souvenir remonte à l’âge de deux ans quand je me suis électrocuté ». Cette réminescence a-t-elle eu une influence sur son travail ? Le déclic de son appareil devient l’étincelle électrique qui illu­mine ses modèles jusqu’à les surexposer, les « cramer », effaçant tous traits d’expression et laissant re-

Russie peu prometteur pour ne pas dire défavorable pour les jeunes artistes débutants, il connaît une ascension rapide. L’ histoire d’un succès aux airs de conte de fées, dû principalement à sa rencontre, dès ses débuts, avec la galeriste russe Liza Fetissova (Galerie RussianTeaRoom). Cette passionnée de photographie pleine d’ambition s’attèle, depuis quelques années, et avec un franc succès, à promouvoir de jeunes artistes russes à Paris. À la recherche de nouveaux talents, elle a déniché les photos d’Oleg Dou sur Internet. Tout a été très vite. « Dès le début, j’ai vu un jeune artiste responsable, concentré sur son travail, honnête. On a « gran-

Oleg Dou.

la psychiatrie à Gent, en Bel­ gique. « Depuis toujours, j’étais attiré par le morbide mais avec des critères rendant cette morbidité attrayante », révèle Oleg. Contre toute attente, dans un contexte du marché de l’art en

di » ensemble, et Oleg m’a fait confiance. Cela fait plus de cinq ans que ça dure...», confie Liza. Aujourd’hui, sa réussite saute aux yeux : récompensé par des prix photographiques, Oleg Dou fait régulièrement l’objet de parutions dans les journaux et ses travaux sont présents dans plusieures galeries à travers le monde. Liza nous révèle qu’à chaque exposition « entre ­quatre et cinq photos sont vendues à des prix variant entre 6 000 et 16 000 euros ». D’ailleurs, en 2011, la société Artprice, leader de l’information sur le marché de l’art, a classé Oleg Dou parmi les trois photographes de moins de 30 ans les mieux vendus en salle de vente publique. Toutefois, cette réussite n’est pas seulement le fruit de la chance mais aussi du travail persévérant d’un autodidacte conscient de son talent. Son œuvre cohérente et profonde laisse transparaître la quête d’identité d’un artiste de génie en devenir. « Tout d’abord, mon travail était une expérimentation esthètique, une recherche. Puis, une véritable thérapie pour vaincre mes complexes. Je suis maintenant dans

une phase plus agressive, sa­dique si l’on peut dire, où je cherche à me jouer de mes modèles, les torturer esthétiquement ». La série de portraits Another Face, présentée ici pour la première fois, révèle des person­nages toujours aussi lunaires, résignés et même consentants. Leurs visages portent les symptômes morbides d’épidémies extraterrestres et les stigmates de la torture graphique. La peau subit des transformations, sa texture mue, elle devient surface organique sur laquelle l’artiste laisse libre cours à ses fantasmes. Oleg avoue : « Dans mon enfance, je m’amusais toujours à tracer ces lignes sur les photos des magazines pour les embellir ou les enlaidir ». « Une œuvre étrange et captivante » : c’est ainsi que Liza Fetissova définit le travail de son protégé. En tout cas, si vous croisez ces regards fixes,vous avez peu de chances de rester indifférent. En étant très optimiste, on aimerait croire que l’histoire d’Oleg Dou ne restera pas un cas isolé et que sa réussite marque les prémices de jours radieux pour une myriade de jeunes talents ­russes. Pour le moment, force est de constater que les artistes locaux restent cloisonnés dans un marché de l’art qui, malgré un essor certain ces dernières années, manque de structure, de stabilté et d’initiatives.

À L’AFFICHE Another Face. Esposition personnelle du 5 janvier au 2 mars 2012. Le vernissage en présence de l’artiste aura lieu le 19 janvier 2012. Galerie Russian TeaRoom 42, rue Volta 75003 Paris ›› www.rtrgallery.com

Dangereusement jeune : Enfant en danger, enfant dangereux. Exposition collective depuis le 1er octobre 2011 jusqu’au 20 mai 2012. Musée de la psychiatrie du Dr Guislain, Gent, Belgique ›› www.museumdrguislain.be

Histoire Une exposition parisienne permet de revivre la révolution pacifique qui a mis fin à l’ère soviétique

La chute de l’empire en images L’exposition « URSS : Fin de Parti(e) » du Musée d’Histoire contemporaine de Paris, à l’Hôtel des Invalides, revient sur les dernières heures de l’Union soviétique. guillaume marchall

Il y a exactement vingt ans, l’Union soviétique cessait d’exister après une dernière tentative de réforme (la perestroïka) censée relancer un système économique à l’agonie. L’Hôtel national des Invalides présente actuellement une exposition retraçant, à travers six années d’archives, cette période décisive de l’histoire de la Russie, de l’arrivée de Mikhaïl Gorbatchev en 1985 à l’implosion de l’URSS en 1991. L’ambition de l’exposition des Invalides est justement, selon l’historien Jean-Robert Raviot, « de présenter, à travers les plus de deux cents pièces d’archives réunies, non pas la perception de l’Occident mais celle des Soviétiques, qui ont vécu la perestroïka comme un grand bouleversement ». Parallèlement à la perestroïka, dont la vocation première était de refaire tourner les usines à plein régime, une politique de liberté d’expression (la « glasnost ») devait « démocratiser » la dictature du

service de presse (3)

La russie d’aujourd’hui

Un micro-ordinateur se substitue au marteau, symbole de l’industrie soviétique.

Concours de beautéà Moscou. Le style américain tranche avec la beauté traditionnelle de la Kolkhozienne forte et travailleuse. Coll. BDIC, Fonds France-URSS © Tass, 1988.

« Plus jamais ça ! » : affiche reflétant le rejet de la figure de Staline durant la perestroïka.

prolétariat, avec plus de transparence – en particulier au moment de la catastrophe de Tchernobyl – et l’ouverture à la culture occidentale. « L’exposition est l’occasion de commémorer l’anniversaire du démantèlement de l’URSS qui, curieusement, fait l’objet de beaucoup moins de manifestations que celui de la chute du mur de Berlin », explique Valérie Tesnière, directrice de la bibliothèque de documentation internationale dont sont issues les archives présentées. Sous-estimé en Europe, l’effondrement de l’empire soviétique fut pourtant un événement cer-

tainement plus traumatisant, pour les Russes, que ne le fut la réunification pour les Allemands. Citoyens d’une superpuissance, ils durent soudainement accepter une réalité que plus aucune propagande ne pouvait masquer : celle d’un pays en ruine appelant l’Occident au secours. Organisée autour des trois temps de la perestroïka (ré­ formes, révélations, révolutions), l’exposition des Invalides in­vite à un voyage au cœur des années 80 russes, à travers photos officielles, affiches de propa­ gande, unes de journaux et vidéos. Ces documents reflètent

une volonté aussi bien de modernisation – avec les débuts de la micro-informatique et les premiers concours de beauté – que d’introspection. Sur les affiches de Memorial, organisat i o n r u s s e d e s d ro i t s d e l’homme créée pendant la perestroïka, Staline prend les traits d’un tyran sanguinaire, et la glasnost entraîne une prise de conscience collective : l’URSS n’est pas un paradis, et en dépit de la propagande des décennies précédentes, les maux attribués au monde capitaliste (pauvreté, criminalité, individualisme, épidémies…) n’épargnent pas moins la société soviétique.

À L’AFFICHE URSS : Fin de Parti(e). Les années Perestroïka. Du 2 décembre 2011 au 26 février 2012 au Musée d’Histoire contemporaine de l’Hôtel national des Invalides, Paris 7ème. Ouvert tous les jours (sauf le premier lundi du mois et les jours fériés) de 10 h à 17 h. ›› urssfindepartie.wordpress.com

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Chronique LitTÉraire

Le paria intouchable

titre : Boris Pasternak Auteur : Dmitri Bykov Éditions Fayard Traduit par Hélène Henri

En 1958, au faîte de sa g­loire, Boris Pasternak se voit attribuer le prix Nobel qu’il doit refuser. Curieusement, lui qui a tutoyé le pouvoir, qui a osé intercéder en faveur de ses amis persécutés sans jamais prêter allégeance, est devenu paria dans son pays. Il n’a que deux craintes : être déchu de sa nationalité, contraint à s’expatrier, et voir réquisitionner la datcha de Pérédelkino où il vit depuis 1936 dans une sorte d’ascèse tolstoïenne, entre la plume et la bêche, le bureau et le potager. Pasternak avait accueilli la Révolution favorablement, puis l’ordre stalinien comme un remède salutaire au chaos. Il faudra la guerre pour qu’il déchante et se tourne vers les valeurs slavophiles : la foi, l’amour pour le peuple et pour sa terre. Par quel miracle Pasternak, qui a vu arrêter et persécuter ses amis poètes (Mandelstam mort en camp, Akhmatova bâillonnée, atteinte à travers son époux et son fils, Tsvetaeva qui choisit de se donner la mort), a-t-il pu traverser sans dommage l’époque stalinienne ? Pendant toutes ces années, il n’a pas joui d’autre privilège que celui d’être laissé en vie. Ses vers ne sont pas publiés, il vit de traductions, mais il se permet des prises de position et des propos que peu s’autorisent même en pensée. « Nous ne toucherons pas à cet habitant des cieux », aurait déclaré le maître du Kremlin. Staline, dit le biographe Dmitri Bykov, accordait à la poésie une puissance égale à celle du pouvoir. Il a­joute : « Qui se sait vulnérable est condamné ». Pasternak, lui, avait foi en sa bonne étoile, en son talent, en la force de son travail ; il avait peu de choses à perdre et n’était pas la proie de la peur qui dévorait ses contemporains. La biographie que Dmitri Bykov lui consacre est un monument : par la personnalité de Pasternak et de ses contemporains que l’on retrouve dans ces « regards croisés » : Blok, Tsvetaeva, Maïakovski, Mandelstam, Staline, Akhmatova ; par la taille - quelque mille pages ; par l’ampleur du travail d’investigation et d’analyse ; par la virtuosité de l’auteur et de la traductrice, aussi. Bykov a utilisé tous ses talents de poète, de romancier, de critique et de journaliste pour élaborer un ouvrage mêlant éléments factuels et points de vue cri­tiques sur l’œuvre, sur l’homme et sur son temps. Hélène Henry a permis l’impossible : nous faire entendre, à travers le vacarme de l’époque, le chant du poète. Le résultat est un ouvrage passionnant, vibrant d’intelligence, indispensable. Christine Mestre Découvrez d’autres chroniques sur larussiedaujourdhui.fr


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Loisirs

LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI WWW.LARUSSIEDAUJOURDHUI.FR COMMUNIQUÉ DE ROSSIYSKAYA GAZETA DISTRIBUÉ AVEC LE FIGARO

RECETTE

Micro-trottoir Des expatriés et des touristes démentent les préjugés sur la capitale russe

Au menu pour un réveillon à la russe

La capitale est plus conviviale que ne le dit sa réputation surannée.

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Irakli Iosebashvili

SPÉCIALEMENT POUR LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

INNA LEONOVA

LA RUSSIE D’AUJOURD’HUI

Les stéréotypes, on ne s’en débarrasse pas comme ça. Si l’on veut comprendre ce que pensent les étrangers de Moscou, il suffit de le leur demander. C’est justement ce que nous avons fait en sondant une vingtaine d’expatriés et de touristes entre 22 et 50 ans.

ELLES L’ONT DIT

Chloé

Eléonore

ANCIENNE ÉTUDIANTE DE MGU

ÉTUDIANTE

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Un numéro vert à votre service Pour les touristes anglophones et russophones, il existe dorénavant à Moscou un centre d’appel où des conseillers sont prêts 24 heures sur 24 à répondre à toutes les questions concernant la ville, les transports, le choix d’un itinéraire ou une urgence (appeler la police ou vous mettre en communication avec l’ambassade de votre pays). Téléphonez au 8-800-220-00-01 ou 8-800-220-00-02. L’appel est gratuit.

tout », assure le Californien Cole Margen.Les recommandations données aux nouveaux venus par les agences touristiques, les voyageurs habitués ainsi que par les expats convergent et sont valables pour toute grande ville : ne pas traîner dans les quartiers louches la nuit et éviter les groupes d’inconnus. « Je n’ai jamais eu de problèmes. Il suffit d’appliquer les mêmes règles que partout ailleurs : réfléchir à ce que tu fais, savoir où tu vas et prévoir les choses à l’avance », affirme l’Américain Nick Blixt. Les statistiques ne sont d’ailleurs pas si effrayantes : seulement 24 agressions contre des touristes ont été enregistrées en 2010. Demander son chemin à une belle Russe « Il est assez facile de s’orienter dans le métro moscovite. Au premier abord vous pouvez être déconcerté par la foule, mais il est simple de trouver son chemin. À l’extérieur, c’est plus dur : le nom des rues n’est pas toujours visible et n’est pas toujours transcrit en lettres latines », avoue Elliott Estebo. Toutefois, dans le centre, chaque mois apparaissent de nouveaux panneaux et de nouvelles plaques en lettres latines : en ne parlant que de cet automne,135 nouvelles plaques signalétiques ont été installées, ainsi que 73 panneaux avec des plans de la ville bilingues. Et puis, il est toujours possible de demander son chemin à un passant ; plus il est jeune, plus il y a de chances qu’il parle anglais. Et pourquoi pas une belle passante russe, messsieurs ? « À Moscou, les femmes sont vraiment très attrayantes. Les Américaines ne s’habilleraient jamais comme ça. Une Russe peut sortir acheter le pain dans une tenue qu’une Américaine porterait pour une soirée », plaisante Tessy MacKey.

BALLET «CASSE-NOISETTE»

FESTIVAL «RUSSENKO»

DU 7 AU 31 DÉCEMBRE LE TRIANON, PARIS

DU 13 AU 31 DÉCEMBRE OPÉRA NATIONAL, BORDEAUX

LES 27- 29 JANVIER KREMLIN-BICÊTRE, PARIS

SLAVA’S SNOWSHOW est une épopée dans l’univers absurde et surréaliste d’un « commando » de clowns au nez rouge, un spectacle où chaque scène est un tableau.

Le célèbre ballet de Tchaïkovski d’après Casse-Noisette et le Roi des rats, de Hoffman est présenté dans la version de Charles Jude au Grand-Théâtre de Bordeaux.

RussenKo invite à explorer sans exhaustivité la richesse de la culture russe : cinéma, théâtre, danse, art, musique. La littérature ne sera pas en reste avec les troisièmes Journées du livre russe qui inaugureront l’année croisée France-Russie « langues et littératures » et accueilleront Oulitskaïa et Prilepine. Le 6ème Prix russophonie 2012 sera remis en présence d’Agnès Desarthe, Andrei Kourkov et Bernard Werber.

› www.fnac.fr

› www.opera-bordeaux.com

› www.russenko.fr

SERVICE DE PRESSE

SLAVA’S SNOWSHOW

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J’ai découvert que Moscou avait beaucoup à offrir, non seulement du point de vue architectural avec ses églises traditionnelles, mais aussi en ce qui concerne les gens."

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Je m’imaginais plutôt une Russie révolue, celle de la littérature. Lorsque je suis arrivée à Moscou dans les années 2000, j’ai découvert des gens finalement pas si éloignés de nous."

PHOTOXPRESS

Combien ça coûte ? « Moscou peut paraître chère, mais il y a tellement de moyens d’économiser. Par exemple, choisir d’aller dans les cafétérias, genre « Moumou », c’est vraiment pas cher », nous fait part de ses bons plans Brandon, jeune Américain de 22 ans. Il est vrai que 300 roubles (7 euros) en moyenne pour une formule déjeuner et un ticket de métro à 28 roubles (60 centimes), ce n’est pas exessif. C’est surtout le logement qui pèse sur le portefeuille du touriste. Une étude réalisée par le portail d’information www.hotel.info a montré que cet automne, le prix moyen d’une chambre d’hôtel à Moscou était de 140 euros la nuit, ce qui place la capitale russe en deuxième position des hôtels les plus chers d’Europe après Oslo. Or, en fait, la différence de prix n’est pas si flagrante. Par exemple, si l’on compare Moscou à Londres (137 euros la nuit) qui est quatrième du classement, il n’y a que 4 euros de différence. Ces prix élevés sont en partie dus à la pénurie d’hôtels dans la capitale : officiellement, on n’en dénombre que 215. Heureusement, la situation change littéralement à vue d’ œil. En 2011, trois nouveaux hôtels ont

Les dangers à tous les coins de rue « Moscou n’est pas plus dangereuse que les autres grandes mégapoles. Au début, je faisais très attention, on m’avait mis en garde contre les pikpockets, témoigne Tessy MacKey, professeur d’anglais de Louisiane. Mais pour l’instant rien à signaler, et je ne connais aucun touriste qui se soit fait agresser ». Le site The Village révèle que 15% des expats interrogés craignent surtout les nationalistes russes. « J’ai entendu des insultes proférées à l’encontre d’Africains, de Chinois ou de Caucasiens. Mais il ne faut pas en rester là, la plupart des Russes que je connais sont très tolérants et sympathiques, même si, bien sûr, on rencontre de

ouvert leur portes et on en attend encore quatre pour le Nouvel An. Quatorze autres sont prévus pour 2012. La Mairie de Moscou prévoit, pour 2020, un parc de 535 hôtels pouvant accuillir jusqu’à 150 000 touristes. En attendant, pour économiser, il est conseillé de bien choisir ses dates de séjour. Un autre moyen de faire des économies : chercher une auberge de jeunesse, un « hostel » à petit budget. Ils poussent comme des champignons et commencent à constituer une sérieuse concurrence pour les hôtels. Officiellement, on compte à ce jour 55 « hostels » à Moscou, dont 20 ont ouvert en 2011.

La salade « Olivier » (macédoine) C’est une salade connue dans le monde entier, appelée aussi Salade russe. L’Olivier est un must de toutes les tables festives russes. La différence principale entre les recettes tient au choix de la viande : volaille, veau, bœuf ou saucisses.

Ingrédients :

LORI/LEGION MEDIA

La vie y est chère, les rues sont sales, les gens bourrus, la mafia est omniprésente, les panneaux sont en cyrillique, par contre des « Miss Monde » défilent sur les trottoirs. C’est ça, Moscou ?

dent présente ses vœux au pays. Il faut alors écrire son propre vœu sur un bout de papier puis le brûler en laissant tomber les cendres dans une flûte de champagne. C’est un moyen sûr d’obtenir ce qu’on veut dans l’année à venir. Le reste de la nuit ne sera plus qu’un souvenir brouillé : tout le monde est sorti pour tirer des feux d’artifice, chanter, lancer des boules de neige, faire la fête… La bonne nouvelle pour le mal de crâne, c’est qu’on n’a pas besoin de se presser nulle part le lendemain matin. Le pays entier a la gueule de bois, comme vous ! Voici quelques recettes des incontournables mets du Nouvel An russe. Essayez-les et vous nous en direz des nouvelles !

5 pommes de terre • 3 carottes • 4 œufs • 500 g de viande bouillie • 250 g de petits pois en conserve • 3 gros cornichons malossols • 250 g de mayonnaise • sel.

viande. Coupez les pommes de terre, carottes, œufs, viande et cornichons en petits cubes. 3. Ajoutez les petits pois, puis la mayonnaise selon la quantité du mélange que vous allez consommer : la salade se conserve mieux sans mayonnaise. 4. Réfrigérez. Pour alléger l’assaisonnement, vous pouvez couper la mayonnaise avec de la crème fraîche.

Préparation : 1. Faites cuire les pommes de terre et les carottes avec la peau, puis refroidissez et pelez. 2. Faites cuire les œufs et la

Le hareng « dans son manteau de fourrure » Ingrédients :

2 filets de hareng • 2 betteraves • 2 pommes de terre • 2 carottes • 1 oignon • 3 œufs • 1,5 verre de mayonnaise • sel et poivre noir.

Préparation :

1. Faites bouillir œufs, pommes de terre, carottes et betteraves. 2. Pelez les oignons et plongez dans l’eau bouillante 5 minutes, puis égouttez et placez les oignons sous un jet d’eau froide pendant 1 minute. Laissez refroidir les légumes bouillis. 3. Pelez et râpez pommes de terre et carottes séparément. 4. Émiettez les œufs durs. 5. Découpez le hareng en petits morceaux et poivrez. Dans un plat, étalez une couche de pommes de terre, salez, et recouvrez de mayonnaise. Ajoutez une couche de hareng, les oignons, les carottes et les

LORI/LEGION MEDIA

ALAMY/LEGION MEDIA

Histoire de tordre le cou aux clichés sur Moscou...

Le Nouvel An arrive et il est temps de penser au menu. Pourquoi pas un réveillon à la russe ? Ci-dessous, des recettes et des règles pour une SaintSylvestre vraiment russe. Dès que les invités arrivent, on sort les vins mousseux, la vodka et on commence à porter des toasts. Le toast russe est spontané et informel, mais il faut respecter les traditions. On boit à la vieille année, en espérant que toutes les bonnes choses qui sont advenues continueront à l’avenir, tandis que tout le mauvais restera dans le passé. Déjà, on voit l’horloge du Kremlin à la télévision qui sonne les douze coups de minuit et le prési-

œufs, en salant chaque couche, recouvrez de mayonnaise. 6. Répétez l’opération sans le hareng, pour obtenir au moins deux couches. Recouvrez le tout d’une couche de betteraves râpées puis de mayonnaise. Saupoudrez de jaune d’œufs durs émietté. 7. Réfrigérez pendant 5 heures et servez en parts, comme un gâteau. Autres recettes sur larussiedaujourdhui.fr

Nous vous donnons rendez-vous en mars 2012 !

Pour contacter la rédaction: redac@larussiedaujourdhui.fr Service de publicité sales@rbth.ru tél. +7 (495) 775 31 14


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