Mercredi 1 octobre 2014
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C E S U P P L É M E N T D E S I X P A G E S E S T É D I T É E T P U B L I É P A R R O S S I Y S K AYA G A Z E T A ( R U S S I E ) , Q U I A S S U M E L ’ E N T I È R E R E S P O N S A B I L I T É D E S O N C O N T E N U
Énergie Moscou multiplie les grands projets gaziers et pétroliers avec son voisin oriental
La Chine prend le pas sur l'Europe © GETTY IMAGES/FOTOBANK
Gazprom prévoit de signer en novembre un contrat visant à doubler ses livraisons vers la Chine. Le monopole gazier a du même coup refusé d’accroître ses livraisons vers l'UE. ALEXEÏ LOSSAN RBTH
Le contrat prévoyant la fourniture de gaz à la Chine par l’Ouest sera signé dans le cadre du sommet de l’APEC qui se déroulera en novembre prochain à Pékin. C’est ce qu’a déclaré au cours du Forum international d'investissement de Sotchi le ministre russe de l’Énergie, Alexandre Novak. Selon le mi-
nistre, le tracé du gazoduc fait encore l’objet de discussions, mais la version préliminaire prévoit d’effectuer les livraisons de gaz à travers l’Altaï. Au total, la délégation russe entend signer un contrat portant sur la livraison de 30 milliards de mètres cube de gaz par an sur 30 ans, bien que des volumes plus importants aient déjà été mentionnés au cours des négociations, a indiqué au président Vladimir Poutine le patron de Gazprom, Alexeï Miller. Selon ce dernier, il s’agirait de 60 milliards, voire même 100 milliards de mètres cube. À titre de comparaison, en 2013, Gazprom a livré
161,6 milliards de mètres cubes de gaz en Europe, dont 41 milliards vers l'Allemagne, le principal consommateur de gaz sur le continent européen. Aujourd'hui, le géant russe de l'énergie représente le principal fournisseur de gaz sur le marché européen et assure plus d'un quart de la consommation totale sur le vieux continent.
Sanctions contre l'Europe Autrement dit, le marché européen demeure essentiel pour Gazprom. Le volume de ses livraisons de gaz naturel en Europe représente près du tiers du volume total de ses li-
vraisons et, surtout, fournit près de la moitié des bénéfices du groupe. En outre, Gazprom possède des réserves gazières souterraines en Autriche, en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Serbie. La capacité active de ces dernières s'élève à 4,5 milliards de mètres cubes. L'Europe est un marché clé pour Gazprom pour des raisons historiques. Les premières livraisons de gaz russe à l'exportation ont démarré au milieu des années 40 en Pologne. Puis, en 1968, suite à un accord avec l'entreprise autrichienne OMV, les premières fournitures de gaz russe sont ar-
rivées en Europe de l'ouest. Pourtant, sur fond de conflit ukrainien, les relations du géant gazier avec ses clients européens ont commencé à se dégrader. Mi-septembre 2014, Gazprom a refusé d'augmenter ses livraisons en Europe. La société a en particulier rejeté la demande de la société polonaise PGNiG portant sur un accroissement des livraisons de gaz, indique un communiqué officiel de la compagnie polonaise. Selon cette dernière, le moins-perçu représenterait près de 20 % des besoins polonais en gaz. La Pologne a en conséquence été forcée le 10 septembre de sus-
Internet Les nouveaux instruments de la société civile
La démocratie russe passe au format électronique Les réseaux grâce auxquels les citoyens dialoguent avec les autorités se développent rapidement. Reste que 40% des Russes n'ont toujours qu'un accès très limité à l’Internet. GALIA IBRAGUIMOVA RBTH
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Les technologies de l’information modernes commencent à directement influencer le développement de la démocratie en Russie. Les citoyens entreprenants s’adressent aux autorités via les plateformes sociales sur Internet. En quelques mois, les différents sites de pétitions, plaintes et appels aux autorités ont permis aux Russes de mettre fin au démontage de la célèbre tour Choukhov à Moscou, de faire fermer une entreprise dangereuse – l’usine d’incinération
de déchets Ekolog – et de sauver de la fermeture un orphelinat de l’oblast de Saratov. Ce ne sont que les cas les plus retentissants, des milliers de pro-
blèmes moins importants des Russes ordinaires sont résolus au quotidien, indique la statistique des sites sociaux Yopolis et Angry Citizen. Toutefois, les communications électroniques ne marchent pas à tous les coups. Le 15 juin, le militant web Sergueï Molostov a transmis aux instances concernées un message les informant que les rames de métro sur la ligne bleue étaient fortement secouées. « Tous les jours, je traversais les stations où l’accident [de juillet] s’est ensuite produit. Le voyage n’était pas confortable pour les passagers, leurs téléphones leur tombaient des mains, mais ils ne disaient rien », nous a raconté Molostov. SUITE EN PAGE 2
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pendre ses livraisons de gaz russe en flux inversé à l’Ukraine. Auparavant, la compagnie PGNiG avait revendu à la société ukrainienne Naftogaz 4,2 millions de mètres cube de gaz achetés par la Pologne. Au cours des derniers jours, Gazprom a par ailleurs réduit ses livraisons de gaz naturel à travers l’Ukraine et la Slovaquie. Si depuis le début du mois, les livraisons dépassaient les 60 millions de mètres cube, depuis le 12 septembre, ces dernières ont commencé à baisser jusqu’à 50 ou 55 millions de mètres cube par jour. SUITE EN PAGE 3
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Politique & Société
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La démocratie russe passe au format électronique © RIA NOVOSTI(3)
SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE
Le 8 juin, en réponse à son message, les employés du métro lui ont expliqué que, par endroit, les voies étaient déformées, mais que cela restait conforme aux normes. Puis, le 15 juin, un accident qui a coûté la vie à 24 personnes s’est produit sur ce tronçon.
Crise de croissance Les experts interrogés par RBTH estiment que la démocratie électronique en Russie est confrontée à deux problèmes majeurs. Le premier : seuls 60% de la population disposent d’un accès permanent à internet. Le second est la méfiance des Russes quant à la volonté des autorités de les entendre et à décider en fonction. Auparavant, pour s’adresser aux instances du pouvoir, les Russes devaient écrire des lettres aux journaux, agences et ministères, se rendre à la poste pour les envoyer, puis patienter longtemps avant d’obtenir une réponse. La situation a commencé à changer en 2010-2012, période à laquelle la Russie a connu un pic d’activité politique civique. En 2010, Alexeï Navalny, l’un des leaders de l’opposition, a lancé le portail RosYama ("fossé russe") permettant aux internautes d’envoyer une photo et l’adresse d’un défaut sur la route. Le site proposait automatiquement de remplir un for-
mulaire au nom du plaignant et de transmettre sa plainte à la police de la circulation. Si la plainte était négligée, RosYama la transférait au bureau du procureur. Les fonctionnaires étaient contraints de réagir rapidement et de corriger les défauts sur les routes russes. Le succès de RosYama a incité Alexeï Navalny et son équipe à créer d'autres sites. Le web russe s’est enrichi de portails devenus populaires, tels que RosZkh (spécialisé dans les problèmes de logement et de services communaux), RosPil (surveille les commandes publiques importantes), RosVybory (détecte des irrégularités aux élections), et "La bonne machine de la vérité" (informations sur les irrégularités commises par les fonctionnaires et les entreprises publiques). Dmitri Kokh, directeur général d’Intelligent Social Systems qui développe le projet Angry Citizen, estime que les portails de Navalny sont des instruments politiques qui irritent les autorités. Les projets de l’opposant ont à leur tour inspiré d'autres initiatives indépendantes. Les raisons de ce développement rapide résident dans l’organisation complexe et peu structurée des interactions entre la population et les autorités, ainsi que dans l’absence de la société civile hors ligne, explique Dmitri Kokh.
1. Action de soutien pour sauver la tour Choukhov à Moscou. 2. Jeunes activistes travaillant sur des projets d'aménagement de Moscou. 3. Les participants au projet "Angry Citizen" signalent un trou sur la chaussée dans le cadre de l’opération "fossé russe".
Les portails créés par l'opposant Navalny sont des instruments politiques qui irritent les autorités Toute initiative civique recueillant au moins 100 000 signatures sera étudiée par le parlement
Par ailleurs, le groupe de Kokh, comme le portail international populaire de pétitions change.org, parviennent à gagner de l’argent grâce à l’activisme civique des citoyens. Toutefois, si change.org gagne de l’argent grâce à la publication de pétitions financées par des entreprises privées, les technologies utilisées par Angry Citizen sont ensuite proposées aux agences et organisations gouvernementales sur une base commerciale. Par exemple, depuis peu, l’Administration du président russe utilise des instruments du système d’Angry Citizen pour recueillir des informations analy-
Artiom Guerasimenko, militant web et leader du mouvement SocioBeg, estime que la nature de la plateforme n’est pas importante. Elle peut être publique ou civique, l’important est qu’elle marche. « Les plateformes publiques obtiennent plus rapidement des résultats pour les pétitions, car elles disposent d’une ressource administrative. Alors que les ressources sociales des entreprises privées sont plus dynamiques et utilisent des technologies intéressantes d’implication des citoyens », nous a expliqué Guerasimenko.
tiques supplémentaires, explique Kokh.
L’État suit la tendance L’État a, en effet, saisi la tendance. En 2013, l’Initiative publique russe a été lancée (ww.roi.ru). Le présidentVladimir Poutine a personnellement annoncé que toute initiative civique qui parvient à recueillir 100 000 signatures sur ce site serait étudiée par l’une des chambres du Parlement russe. Peu après, un portail similaire destiné aux Moscovites www.gorod. mos.ru a été lancé, des portails de ce type sont créés dans d’autres régions et villes russes.
Ressources humaines La fuite des talents russes à l'étranger appartient au passé
Solutions pour garder les meilleurs cerveaux à la maison La société Changellenge comble le fossé entre les entreprises et les brillants diplômés débarquant sur le marché de l'emploi. PAUL DUVERNET RBTH
mé du MGIMO, l’une des écoles les plus prestigieuses du pays. Peu à peu, grâce à son talent de négociateur et au bouche-à-oreille, Changellenge commence à convaincre quelques grands groupes russes comme RZD (chemins de fer) et les banques Alfa et Gazprombank. « C’est aussi grâce au fait que les directeurs des ressources humaines passent d’un groupe à l’autre et nous recommandent à chaque fois », précise Aliassov. Il note au passage qu’il existe un très fort turnover dans le monde du travail russe : « Je ne connais personne qui travaille plus de trois ans dans la même entreprise. C’est lié à notre appétit bien russe de risque et de changement ». La conjoncture actuelle difficile, à cause des sanctions et du ralentissement économique, impose une grande adaptabilité à des entreprises comme Changellenge. « Tous nos clients ont ré-
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La crise est riche d’opportunités pour les entreprises souples et innovantes. Changellenge en est l’illustration. Quand la plupart des entreprises resserrent leurs budgets, réduisent les effectifs, Changellenge recrute, trouve de nouveaux clients, change de stratégie. L’idée motrice est contenue dans le nom de l’entreprise, un jeu de mot exprimant le défi du changement. Dirigée par Andreï Aliassov, à peine 25 ans, la société fondée en 2010, occupe une niche depuis longtemps vacante entre les grandes écoles russes et le monde de l’entreprise. Les premières offrent une formidable formation théorique, mais restent loin à la
traîne de leurs consœurs occidentales en matière de formation pratique. Les secondes n’ont ni le temps ni les moyens d’établir des partenariats fructueux avec le monde de l’enseignement. L’idée est d’attirer les plus brillants cerveaux, ceux qui deviendront demain des dirigeants d’entreprises, vers des formations et des championnats de "business cases", au cours desquels ils seront repérés par les chasseurs de têtes des grands groupes. Changellenge aide ces derniers à élaborer des cas d’affaires adaptés à leurs besoins, organise les championnats, et bat la campagne pour trouver la matière première : la matière grise. « Au début, nos clients étaient essentiellement des multinationales présentes en Russie. Ils ont tout de suite compris notre fonctionnement et l’intérêt que nous représentions pour eux », explique Andreï Aliassov, lui-même diplô-
Vainqueurs d’un championnat organisé par Changellenge.
duits leurs budgets. Nous sommes forcés de changer de stratégie et de fournir de nouveaux services », souligne le jeune homme d'affaires. Changellenge se lance aujourd'hui dans deux nouvelles directions. La première vise à faire connaître les concepts de cas d'af-
faires et de championnats sur le marché européen. La seconde consiste à lancer des partenariats avec les grandes écoles et universités russes. « Nous disposons aujourd'hui d'un vaste catalogue de cas d'affaires dont nous aimerions faire profiter les enseignants ». En
gros, il s'agit de populariser et de démocratiser la formation pratique des futurs dirigeants d'entreprises en amont. Les grandes entreprises restent toutefois le cœur du métier de Changellenge, pour la simple et bonne raison que ce sont elles qui génèrent le chiffre d'affaires. Universités et étudiants profitent gratuitement des services de Changellenge. Changement ne rime pas avec émigration. Pour lui, la fuite des cerveaux, c'est fini. « Aujourd’hui, les meilleurs salaires sont en Russie. Beaucoup de ceux qui ont émigré reviennent. C’est ici que se trouve la croissance, même si elle est moins forte que dans les années 2000 », assure Aliassov. Une étude réalisée par Changellenge montre que ce qui attire le plus les surdiplômés, c'est le salaire (51,5%), une ascension rapide dans l'entreprise (30,8%). Seuls 2% rêvent de travailler dans une entreprise étrangère.
LES SUPPLÉMENTS SPÉCIAUX ET SECTIONS SUR LA RUSSIE SONT PRODUITS ET PUBLIÉS PAR RUSSIA BEYOND THE HEADLINES, UNE FILIALE DE ROSSIYSKAYA GAZETA (RUSSIE), DANS LES QUOTIDIENS INTERNATIONAUX : • LE SOIR, BELGIQUE • LE FIGARO, FRANCE • THE DAILY TELEGRAPH, GRANDE BRETAGNE • HANDELSBLATT, ALLEMAGNE • EL PAÍS, ESPAGNE • LA REPUBBLICA, ITALIE • DUMA, BULGARIE • POLITIKA, GEOPOLITIKA, SERBIE • THE WASHINGTON POST, THE NEW YORK TIMES ET THE WALL STREET JOURNAL, ÉTATS-UNIS • THE ECONOMIC TIMES, INDE • MAINICHI SHIMBUN, JAPON • HUANQIU SHIBAO, CHINE • LA NACION, ARGENTINE • FOLHA DE S. PAOLO, BRÉSIL • EL OBSERVADOR, URUGUAY • SYDNEY MORNING HERALD, THE AGE, AUSTRALIE • ELEUTHEROS TYPOS, GRÈCE • JOONGANG ILBO, CORÉE DU SUD • GULF NEWS, AL KHALEEJ, ÉMIRATS ARABES UNIS • NOVA MAKEDONIJA, MACÉDOINE • NATION, PHUKET GAZETT, THAÏLANDE. EMAIL : BE@RBTH.COM. POUR EN SAVOIR PLUS CONSULTEZ BE.RBTH.COM. LE SOIR EST PUBLIÉ PAR SA ROSSEL ET CIE. RUE ROYALE. 100 - 1000 BRUXELLES - BELGIQUE . TÉL: 0032/2/225.55.55. IMPRESSION : ROSSEL PRINTING COMPANY SA. DIFFUSION : 94 800 EXEMPLAIRES
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Économie
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Gaz : la Chine au lieu de l'Europe SUITE DE LA PREMIÈRE PAGE
Suite à l'augmentation par Gazprom du prix de ses livraisons de gaz à l'ukrainien Naftogaz, passé de 209 à 379 euros le m3, l'Ukraine a bénéficié de livraisons "en flux inversé" de gaz russe en provenance de Pologne et de Hongrie. Chez Gazprom, l’on indique que la déclaration concernant la nonfourniture de gaz ne concerne que les volumes supplémentaires, Gazprom honore donc l’ensemble de ses obligations contractuelles. La société n’est pas en mesure d’accroître ses livraisons à destination des consommateurs européens en raison de l’accroissement des livraisons de gaz dans les installations souterraines de stockage gazier destinées à couvrir les besoins de la Russie. Selon les prévisions des services météorologiques, l’hiver prochain sera plus froid que d'habitude. Pour
cette raison, la société a porté le stockage de gaz dans ses complexes souterrains en Russie jusqu’à 72 milliards de mètres cube.
Second contrat En parallèle, Gazprom envisage activement d'augmenter les livraisons de gaz russe en Chine. Les discussions autour de la livraison de gaz russe à la Chine transitant par l’ouest se sont intensifiées suite à la signature en mai 2014 d’un contrat d’une valeur de 400 milliards de dollars entre Gazprom et la compagnie chinoise CNPC portant sur la livraison de 38 milliards de mètres cube de gaz par an, sur une durée de 30 ans et suivant l’itinéraire oriental. Les livraisons seront réalisées grâce au gazoduc Force de Sibérie, dont la construction a débuté en septembre 2014 et qui sera alimenté par les gisements de Sibérie orientale.
Toutefois, les experts sont persuadés que le marché européen restera essentiel pour Gazprom. « Le marché européen reste prioritaire pour la Russie, car dans tous les cas, c’est sur ce dernier que Gazprom réalise ses marges les plus importantes et livre ses plus gros volumes. Dans un tout autre domaine, il est aujourd’hui indispensable d’apporter une solution à un ensemble de problèmes d’importance stratégique sur le marché européen », indique l’analyste en chef d’UFS IC, Ilia Balakirev. Selon ce dernier, ce nouveau contrat prévoyant la fourniture de gaz à la Chine par l’itinéraire occidental sert en pratique à indiquer à l’Union européenne que Gazprom est réellement prêt à rediriger ses exportations de gaz de l’Europe en direction de la Chine. « Il s’agit d’une démonstration de force à destination de l’UE en prévision des prochaines étapes des négo-
ciations sur la question gazière ukrainienne et le sort du gazoduc South Stream », indique M. Balakirev. « Gazprom a à maintes reprises répété qu’en dépit du fait que la société soit active dans le monde entier, le marché européen constitue pour elle une priorité, la compagnie n’a pas l’intention d’y cesser ses activités. Même sur un plan purement théorique, un tel développement est impossible », indique l’analyste en chef de la société de gestion Finam Management, Dmitri Baranov. Selon ce dernier, si Gazprom cesse de livrer du gaz à l’Europe, la société sera contrainte de réduire de manière significative l’ampleur de ses activités. « La société dispose d’opportunités et de réserves de gaz suffisantes pour lui permettre de travailler simultanément en direction de l’est et de l’ouest, de sorte que sa stratégie n’a pas changé et ne devrait pas évoluer au cours des prochaines années », ajoute M. Baranov. Selon lui, « si l’Europe ne cesse pas de son fait d’importer du gaz et du pétrole russes, la Russie n’interrompra en aucun cas ses livraisons à destination des consommateurs européens ». Par ailleurs, selon Ilia Balakirev, « les prix du gaz livré à l’Europe vont probablement être réduits, mais seulement après que Gazprom soit parvenu à enregistrer des progrès sur ces questions considérées comme cruciales ».
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Marché Pas de sanction pour le houblon
La bière européenne coule à flot vers l'Est Les importations de bière depuis les pays de l’UE au premier semestre 2014 ont crû de plus de 50%. Les brasseurs tchèques et belges profitent de la dégringolade des Ukrainiens. DENIS POUZYREV RBC DAILY
Même si la bière n'est pas concernée par les sanctions, le climat politique influence ce marché. Les brasseurs ukrainiens font les frais du refroidissement avec la Russie. Il y a trois ans, ces derniers fournissaient 80% des importations russes. Au premier semestre 2014, leur part était tombée à 52%. Et la chute s'accélère, car depuis le 15 août, Moscou a banni du marché russe les deux principaux brasseurs ukrainiens Obolon et Sun InBev Ukraine. Motif invoqué : le mauvais étiquetage des produits, ainsi que le non-respect des exigences en matière de valeur énergétique... Autre phénomène curieux : l’offre russe diminue depuis 2010, à cause du brutal relèvement de 200% des taxes payées par les brasseurs du cru. Conséquence, le prix des bouteilles a doublé depuis 4 ans et le marché se contracte de 3% à 7% annuellement. Le prix moyen de la bière importée s’élève à 4,6 euros le litre contre 1,8 pour la bière russe. L’écart des prix se réduit et grignote la compétitivité des brasseurs russes. Les grandes chaînes de supermarché constatent aussi une demande croissante pour la bière étrangère. La part de la bière importée dans le chiffre d’affaires des magasins Х5 Retail Group atteint déjà 16% de l’ensemble de la catégorie, explique le directeur des relations publiques du groupeVladimir Rousanov. « Nous enregistrons une croissance constante des ventes de la bière importée depuis 2011. Elle atteint environ 4,1% en termes réels », explique-t-il. Pour la chaîne Metro Cash&Carry, la part de la bière étrangère s’élève à 12% des ventes de bière, explique la directrice des relations clientèle Oksana Tokareva. Selon elle, ce
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segment a cru de 9,5% cette année. La croissance dynamique de ce secteur pousse les principaux acteurs du marché russe, qui auparavant pariaient sur le développement de la production locale, à se lancer dans l’importation. La division russe d'Anheuser-Busсh InBev, le groupe Sun InBev, préférait jusqu’ici produire localement ses marques de bière. Dans la catégorie « bière allemande », le groupe misait sur la marque Lowenbrau qu’il a récupérée en 2003 suite au rachat de la compagnie Spaten-Löwenbräu-Gruppe. Ses autres marques — Spaten et Franziskaner — étaient importées par des sociétés tierces depuis l’Allemagne.
Le nouveau régime fiscal imposé aux brasseurs russes les a pénalisés face aux producteurs étrangers Mais au printemps 2014, Sun InBev a annoncé qu’elle allait importer les marques Spaten et Franziskaner en Russie directement et a complété le portefeuille des bières importées par la marque mexicaine Corona. Cette année, le brasseur Baltika a également lancé son programme d’importation : le groupe a d’abord annoncé l’importation de la bière danoise Jacobsen, détenue par sa maison-mère Carlsberg, et de la marque belge Grimbergen. « Le segment de la bière importée poursuivra sa croissance, même si la situation dépendra de la stabilité du rouble et de l’économie russe », explique le copropriétaire de Moscow Brewing Company Evgueni Kachper [qui importe la bière allemande Krombacher et la marque tchèque Budweiser Budvar, ndlr]. « Après l’adhésion à l’OMC, les droits de douane sur la bière ont commencé à diminuer, alors que l’intérêt vis-à-vis de ces produits a crû ». Kachper précise que les produits importés représentent actuellement un quatre du chiffre d’affaires du groupe.
Technologies Les innovations permettent de faire face à d'éventuels déficits liés aux bouleversements politiques
Crise énergétique : la solution nucléaire russe Les technologies développées par les scientifiques nucléaires russes peuvent aider à résoudre les problèmes liés au fonctionnement des réacteurs nucléaires, mais aussi à leur déclassement. HENRY KENNETT RBTH
© RIA NOVOSTI
Le gouvernement belge a commencé à se préparer à une crise énergétique potentielle. En cause, l’arrêt de trois des sept réacteurs des deux centrales nucléaires du pays. La réserve énergétique du pays sera complétée par deux centrales électriques classiques, actuellement à l'arrêt. Mais cela ne suffira peut-être pas. Le groupe russe Rosatom et ses filiales sont prêts à répondre aux problèmes énergétiques émergeants et proposent à leurs partenaires étrangers, y compris européens, des réacteurs nucléaires, le combustible ainsi que des services d’enrichissement d’uranium. Le groupe dispose également de développements originaux
utilisés lors du déclassement des sites nucléaires, ainsi que pour le traitement du combustible irradié et des déchets radioactifs. Ces propositions sont déjà demandées. À l’issue de l’appel d’offres pour le traitement des déchets radioactifs accumulés par la centrale nucléaire Fukushima suite à son accident, le ministère japonais de l’Économie a arrêté son choix sur un système original russe qui permet de purifier les déchets radioactifs liquides du tritium qu’ils contiennent. Le gouvernement japonais est déjà prêt à allouer un milliard de yen (environ 8 millions d’euros) au vainqueur du concours pour la création d’un prototype. Si l’efficacité annoncée est confirmée, le gouvernement japonais s’engage à immédiatement financer la construction de l’installation industrielle. Si, dans le cas du Japon, le développement des nouvelles technologies est encore au stade du projet, dans d’autres pays, la mise en œuvre le travail conjoint
En dépit des sanctions, la Finlande ne renoncera pas à son projet en partenariat avec la Russie
avec Rosatom se poursuit et se développe. Ainsi, par exemple, le Conseil d’État finlandais a soutenu, à dix voix contre sept, la construction de la nouvelle centrale nucléaire Hanhikivi-1 sur les côtes du golfe de Botnie dans la mer Baltique, à proximité de la ville d’Oulu,
cinquième plus grande ville finlandaise. Un nouveau bloc énergétique doit y être installé, il sera équipé d’un réacteur de la génération III+. Outre Rosatom, seuls la France et les États-Unis sont prêts à proposer des réacteurs nucléaires de cette génération. Les réacteurs III+ se distinguent par leur système de sécurité qui protège les blocs énergétiques des tremblements de terre, des tsunamis, des ouragans et des accidents d’avion. La salle du réacteur est protégée par une double enceinte. La durée de vie du bloc énergétique est portée à 60 ans. Outre ce projet de réacteur, la Russie a également remporté l’appel d’offres pour la construction de 4 blocs de la centrale nucléaire turque Akkuyu. Par ailleurs, ses réacteurs seront utilisés pour la construction des blocs énergétiques de la centrale nucléaire de Tianwan en Chine. Dans un entretien avec Radio Suomi, le Premier ministre finlandais Alexander Stubb a dé-
claré qu’en dépit des sanctions européennes et américaines, la Finlande ne renoncerait pas au projet conjoint avec la Russie portant sur la construction de la nouvelle centrale nucléaire équipée de réacteurs III+. Le projet de construction de la centrale est très important pour l’économie du pays, a expliqué le Premier ministre, « il ne doit pas être mélangé avec la politique ». La coopération de la compagnie énergétique finlandaise Fennovoima avec Rosatom « n’ébranlera pas la réputation internationale de la Finlande », estime Alexander Stubb. Quelque 15 compagnies locales ont déjà décidé de se joindre au projet. Leurs noms ne sont pas encore divulgués. En juin 2014, l’administration de la ville d’Oulu a également annoncé sa participation au projet. Le dernier mot revient désormais au Parlement finlandais. Cette étape doit s’achever cet automne, la construction de la centrale devrait démarrer en 2018.
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Sports
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Formule 1 L’avenir du Grand Prix de Russie, qui se déroule à Sotchi, dépendra du succès de la première course
Sous la neige, le bitume JAMES ELLINGWORTH POUR RBTH
Depuis les tribunes de la course de Formule 1 à Sotchi le 12 octobre, les fans découvriront une vue sur un grand espace ouvert et un mince ruban d’asphalte serpentant entre les merveilles architecturales du parc olympique. Derrière le volant, à deux cent kilomètres à l’heure, la vue est pourtant très différente. Pour un pilote de F1, la piste ressemble à un tunnel sinueux de murs en béton dans lequel chaque erreur pourrait mener à la catastrophe.
La piste compacte suscite beaucoup d’enthousiasme À la fin septembre, la première course a eu lieu à l’Autodrome de Sotchi où le championnat national de Russie a pris la piste. Les enregistrements réalisés à bord montrent un environnement compact, presque claustrophobe, sans commune mesure avec la vue étendue depuis le parc olympique qui s’ouvrira aux spectateurs dès le mois prochain. La piste est toute neuve, mais pour les pilotes, la course sera encore plus ardue. Une nouvelle piste signifie que l’asphalte est propre, sans la couche adhérente de caoutchouc formée par les courses régulières, comme l’a souligné le champion en titre Sébastian Vettel de l’équipe Red Bull après avoir été le premier pilote de F1 à tester la piste le mois dernier. « L’adhérence sera très faible, car tout est neuf, le revêtement est parfaitement neuf », a-t-il déclaré. « Il est très lisse. Nous avons des tronçons à grande vitesse, le tronçon principal est très long. Cela devrait être une course amusante ».
Les plus hauts standards respectés La piste - l’une des plus longues
de la F1, avec ses 19 virages et 5853 m – a facilement obtenu sa certification F1 et a été couverte d’éloges par le directeur de la course Charlie Whiting à la FIA, l’instance dirigeante du sport automobile. « Tout est dans un excellent état. Les standards les plus élevés ont été respectés, je suis Arène « Adler » très content », nous a déclaré ce dirigeant de longue date à l’Autodrome de Sotchi le mois dernier. Palais « Iceberg » Les organisateurs pour le patinage Centre de curling se sont employés à « Ice cube » former une petite armée de commisPlace olympique saires de piste, ces « Medals Plaza » hommes et femmes courageux qui consacrent leur temps à Palais de glace Longueur du circuit : 5853 m assurer la sécu« Bolshoï » Vitesse moyenne : 216 km/h rité des conducChrono : 1 min 37,2 sec teurs, se mettant 1. Ligne de départ / arrivée en danger, s’il le 2. Tribune principale faut, pour secou3. Tribune T2 rir les pilotes 4. Tribune T4 dans les voitures Arène 5. Tribune T5 accidentées. CerStade Olympique « Shaïba » 6. Tribune T6 tains des commis« Fisht » 7. Zone de placement libre saires qui travaillent 8. Stands des équipes à Sotchi viennent de 9. Village F1 l’autre principal circuit russe de niveau international Moscow Raceway, situé © NATALIA MIKHAYLENKO à proximité de la capitale. Ce succès s'explique partiellement par le fait que la piste les qualifications du samedi. Les tailles de coulisses avec les terminées par le niveau de sucest conçue sur la base de cer- prix atteignent 1 000 euros pour équipes et aux démêlés avec la cès de la course du mois prochain. tains éléments des routes d’ac- les packages VIP du week-end. justice. Après la course d’octobre, son Pas de politique cès qui remontent à la construc- Plus de 1 000 bénévoles origition du parc olympique – un naires de Sotchi et des environs, avis pourrait être crucial pour Par le passé, la politique a pu parhéritage des projets olympiques. s’emploieront à faciliter l’expé- les espoirs des organisateurs de fois peser lourd sur la F1, notamBien sur, les organisateurs de rience pour les fans – le modèle Sotchi de passer au niveau su- ment quand la course de Bahreïn Sotchi sont confrontés à quelques s’appuie sur le programme de périeur. Le promoteur de la de 2011 a été annulée sous la presdéfis, notamment le fait que la volontaires des Jeux olympiques course Sergueï Vorobiov veut or- sion des protestations, mais la piste doive encore attirer d’autres d’hiver de Sotchi qui a rencon- ganiser une course de nuit - Ecc- course russe semble, pour le molestone pense que les lumières ment, épargnée par les questions compétitions internationales im- tré un franc succès. des arènes olympiques pourraient politiques plus larges autour du portantes outre la F1, ce qui offrir une toile de fond « fantas- pays. Malgré les rumeurs d’annulaisse planer des doutes quant à Les organisateurs tique » à la course – et de l’or- lation de l’événement sportif russe la manière d’assurer son finan- annoncent une course de nuit à venir ganiser en été pour que les spec- majeur à cause des sanctions, les cement durant toute l’année. Les organisateurs ont annon- Si la F1 est souvent comparée à tateurs puissent combiner la dirigeants du pays ne montrent cé qu’au moins 65% des 55 000 un cirque, alors le minuscule mil- course avec un séjour sur les aucun signe d’inquiétude concernant leurs projets ambitieux. Une billets disponibles ont été ven- liardaire britannique Bernie Ecc- plages de Sotchi. Toutefois, tout cela reste loin relation en particulier pourrait y dus à ce jour pour le premier lestone est son Monsieur Loyal. week-end de la course qui com- En presque quarante ans de régie dans le futur. Le calendrier de avoir eu une influence – Ecclestone prend également les sessions du manège commercial de la dis- 2015 n’est pas prêt d’être fina- se déclare être un admirateur du d’entraînement du vendredi et cipline, il a survécu à des ba- lisé et bien de choses seront dé- président russe Vladimir Poutine.
La piste de Sotchi
ENTRETIEN AVEC FRANK VERCAUTEREN
de possibilités pour un travail productif.
Comment votre vie en Russie a-telle changé au cours de ces 4 derniers mois ? Quand on part pour une nouvelle destination, on se pose, bien entendu, plein de questions. Quelles sont la vie et ses habitudes ? Je connaissais peu la Russie, mais ces derniers temps, mon regard sur ce pays a beaucoup changé en mieux. Le pays offre beaucoup
Frank, vous êtes le premier entraîneur belge de l’histoire du football russe. Est-ce que cela booste vos ambitions d'entraîneur ? J’aimerais apporter quelque chose de nouveau au processus. Mais je ne voudrais absolument pas vexer mes collègues russes. Je ne suis pas de passage et j’aimerais atteindre l’objectif qui m’a été fixé.
Vous ne regrettez donc pas d’avoir accepté la proposition russe ? Absolument pas. J’aime les équipes de football qui ont soif de victoires ! Aujourd’hui, je travaille avec une équipe qui a un potentiel non exploité et cela me fait plaisir. Cela apporte une motivation particulière à mon travail.
Votre vie à Samara est-elle très différente de votre vie habituelle ? Pas tellement, je suis quelqu’un de très peu exigeant sur ce plan. Mais je n’ai pas encore réussi à m’habituer aux échelles russes. Une distance ridicule pour les Russes est fastidieuse pour nous. Est-ce qu’on vous trouve fou en Belgique ? Vous avez raison, les Belges connaissent peu le football russe. Pour beaucoup d’entre eux, la Russie est un grand mystère. Mais j’ai remarqué que mes collègues, tout comme de simples amateurs du football, s’intéressent de plus en plus aux tournants inattendus dans ma carrière d’entraîneur. Donc, dans une certaine mesure, je fais la promotion du football russe et de Krylia Sovetov (rires).
Daniil Kviat
NUMÉRO : 26 ÂGE: 22 NÉ À: OUFA, RÉP. DE BACHKIRIE
La relève court pour Toro Rosso, qui est considéré comme l’un des jeunes les plus brillants. Kviat a livré de bonnes performances devant le public russe avec deux victoires aux World Series by Renault lors du week-end d’ouverture de Moscow Raceway il y a deux ans. Il a également eu de bons résultats sur les pistes conçues par l’architecte de Sotchi Hermann Tilke (Allemagne), particulièrement en Chine et en Malaisie.
La composante financière dans le football russe est plus importante qu’en Europe. C’est pourquoi les Russes préfèrent jouer chez eux. En Belgique, les joueurs quittent le pays dès 16 ans à la recherche d’une rémunération correcte. C’est un grand problème.
« J’aime les équipes de football qui ont soif de victoires ! » Frank Vercauteren, âgé de 56 ans, est le premier spécialiste belge dans l’histoire du football russe. Quatre mois après son arrivée, le temps de prendre ses marques en Russie, Frank a répondu aux questions du correspondant de RBTH. Le prétexte de cet entretien était tout à fait positif : son nouveau club Krylia Sovetov est devenu l’un des leaders de la deuxième division de football russe, la Ligue nationale.
NOTRE ESPOIRE
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La piste de Sotchi enchantera les pilotes par sa complexité technique. Les installations ont été louées par les dirigeants de la F1, mais le succès financier sera-t-il au rendez-vous ?
© AFP/EAST NEWS
BIOGRAPHIE NÉ À : MOLENBEEK-SAINT-JEAN ÂGE : 56
Ancien entraîneur national, il a remporté le championnat deux fois avec Anderlecht et une fois avec Genk. Il a dirigé les clubs Al-Jazeera (EAU) et le Portugais Sporting.
Quel est l’équivalent de la Ligue nationale en Belgique ? Les meilleures équipes de la Ligue nationale pourraient parfaitement jouer en première division en Belgique. De nombreux joueurs russes sont techniquement meilleurs que mes compatriotes. Le travail dans la Ligue nationale n’est pas ennuyeux. Le niveau de l’équipe a une grande marge de progression.
Le choix des joueurs correspond parfaitement aux objectifs de l’équipe. En Belgique, j’ai franchi presque tous les échelons du football : j’ai travaillé avec des équipes de différentes divisions, et même avec l’équipe nationale. Aujourd’hui, je suis ravi de pouvoir me tester dans le football russe. Récemment, Jeroen Simaeys a rejoint l’équipe. La diaspora de joueurs belges est-elle amenée à s’élargir au sein de Krylia Sovetov ? Pour le moment, il est en train de s’adapter… Mais nous miserons surtout sur les joueurs russes. Les plus grandes stars du football belge jouent, généralement, dans les meilleurs clubs européens. En Russie, c’est tout le contraire. Pourquoi ?
Quels joueurs de l’équipe nationale russe pourraient-ils concurrencer les stars européennes ? Tous, sans exception, pourraient jouer dans des clubs étrangers. Leur niveau technique le leur permet parfaitement. Mais les clubs russes sont souvent plus riches que les clubs étrangers. Un tiers du championnat de la Ligue nationale est derrière nous. Avez-vous la certitude que l’objectif – le retour de Krylia Sovetov en première division – sera atteint ? J’essaie de ne pas trop y penser et j’enjoins les joueurs à ne pas trop regarder le tableau de classement. Mon objectif est de construire un jeu d’équipe. Aujourd’hui, le processus est bien plus important que le résultat final. Il faut créer un groupe soudé. Je dois travailler avec ce que j’ai. Mais la rotation au sein de l’équipe est amenée à se poursuivre. C’est un processus normal. Nous devons hisser la barre de l'équipe toujours plus haut. Propos recueillis par Sergueï Volkov pour RBTH
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Opinions
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LES PAYS DIVORCENT AUSSI Nikolaï Gorshkov POLITOLOGUE
ême si l’Écosse est restée britannique, la question soulevée par ses habitants – celle de l’indépendance et de la souveraineté – résonne auprès de nombreux pays européens, de l’Espagne à la Belgique. Les Russes, qui ont vécu, il y a près de 20 ans, la division d’un pays ayant longtemps formé un seul État, connaissent les conséquences du séparatisme.
M
L’histoire se répète Le souvenir du traumatisme et de l’angoisse ressentis par mes compatriotes soviétiques est encore vif dans ma mémoire. En décembre 1991, Boris Eltsine, le dirigeant de la Russie, république faisant partie de l’Union soviétique, se rendit dans une cabane de chasse dans une forêt biélorusse et décida, avec les dirigeants biélorusse et ukrainien, de dissoudre l’URSS. Les dirigeants des autres entités qui formaient l’Union soviétique, et il y en avait un certain nombre, surtout si l’on compte les républiques dans les républiques, ne furent pas avertis. À l’époque, le monde entier applaudit la disparition rapide et pacifique de ce que le monde voyait souvent comme un monstre. Mais que pensaient les gens sur place ?
Dure réalité Il faisait très froid, la blancheur de la neige vierge était aveuglante, et les lieux étaient étrangement déserts. J’étais à la gare de Chop,
à la frontière entre la Hongrie et l’URSS. Ce 3 janvier 1992, nous étions sur le retour de nos vacances de Noël et de Nouvel an à Prague. Lorsqu’à l’aller nous eûmes traversé la frontière une semaine plus tôt, la gare fourmillait d’agents d’immigration et de petits commerçants proposant des collations et des souvenirs. Cette fois, personne ne s’approcha du train. Nous comprîmes alors : la frontière soviétique n’existait plus. Nous étions désormais à la frontière ukrainienne, seulement les autorités ukrainiennes n’avaient pas encore pris possession des lieux. Nous avions quitté l’Union soviétique mais retournions dans la Communauté des États indépendants. Les autres passagers semblaient choqués et confus, et ce sentiment de confusion ne les quitta pas jusqu’à l’arrivée à Moscou. Certains Russes l’éprouvent encore aujourd’hui.
Une nouvelle frontière Cet été de 1992, nous envoyâmes notre fils, âgé de neuf ans, chez nos proches en Crimée. Il avait passé de nombreux étés en Ukraine, dans notre famille à Sébastopol ou à Kharkiv. Mais cette fois, il avait besoin d’un tas de papiers pour traverser la frontière. Une frontière qui coupait désormais presque chaque famille en Russie et en Ukraine. Un sentiment d’irréel, comme dans un mauvais rêve, régnait à la gare de Moscou où les passagers à bord du train pour Sébastopol vérifiaient frénétiquement s’ils avaient les documents nécessaires pour entrer en Crimée.
La désunion soviétique La dissolution de l’Union soviétique fut entamée en 1989, avec les « défilés des souverainetés ». Quand les pays baltes déclarèrent leurs lois prioritaires par rapport aux lois de l’Union en 1988-1989, d’autres républiques emboîtèrent le pas. La Russie déclara sa souveraineté en juin 1990, l’Ukraine un mois plus tard. Mais contrairement aux pays baltes et aux États du Caucase qui souhaitaient l’indépendance totale, les deux plus grands membres de l’Union semblaient se contenter d’une transformation à l’Européenne. Pourtant, une fois qu’il se libéra de la bouteille, le génie de la séparation vola vite de ses propres ailes. En juin 1990, je travaillais pour une chaîne de télévision et une radio soviétiques, je me rendis à Kiev pour couvrir la visite du Premier ministre Margaret Thatcher. Un fonctionnaire du ministère ukrainien des Affaires étrangères naissant m’annonça sévèrement qu’ils n’accréditait pas les « Moscovites » (un terme qui s'employait dans le sens négatif pour désigner les Russes). Ainsi, le journaliste soviétique que j’étais, obtint son accréditation auprès de … l’ambassade britannique.
Référendum Il y eut des tentatives de transformer ce glissement vers la dissolution totale en un processus ordonné. Pour la toute première fois, un référendum fut organisé au sujet de l’avenir de l’Union soviétique. Le 17 mars 1991, les citoyens du pays furent invités à répondre à la question : « Pen-
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En 1991, 70% des Russes voulaient préserver l'URSS sous la forme d'une union fédérale
La logique du divorce, après un long mariage, est difficile à comprendre et à digérer
sez-vous qu'il est essentiel de préserver l'URSS sous forme d'une fédération renouvelée de républiques souveraines et égales où les droits et les libertés de chacun, quelle que soit la nationalité, seront pleinement garanties ? ». Le taux de participation était de 80% et 70% votèrent « oui ». Les pays baltes et les états du Caucase, ainsi que la Moldavie, boycottèrent le référendum, mais des entités autonomes en Géorgie et en Moldavie - l’Abkhazie, l’Ossétie du Sud, la Transnistrie et la Gagaouzie – participèrent à la consultation pour massivement soutenir la préservation de l’Union. Plus tard, cela conduisit à des conflits armés, lorsque les autorités de ces républiques tentèrent d’étouffer les « sépara-
tistes » qui insistaient sur le respect de leur vote. Les répercussions tragiques de ces conflits se font encore sentir.
Coup de grâce Le référendum sur l’avenir de l’URSS fut suivi de nombreuses manœuvres des élites de l’Union et des républiques constituantes qui marchandaient pour obtenir une meilleure place dans la nouvelle Union. La situation s'envenima le jour de mon anniversaire, le 19 août 1991, quand un coup d’État à Moscou chercha à mettre fin à la signature du traité de la nouvelle Union. Le monde vit alors des images tragiques de Moscovites tenant tête aux blindés et aux parachutistes. J’étais alors àYalta, où
les locaux n’avaient aucune idée de ce qui se tramait à Moscou et à Foros, où Mikhaïl Gorbatchev était placé en résidence surveillée. Cette réaction instinctive de ceux qui souhaitaient « sauver » l’URSS porta un coup mortel à l’Union.
Valeurs relatives Il fallut longtemps pour que les Russes et les Ukrainiens acceptent le fait de vivre dans des pays séparés. Pendant au moins une décennie après la séparation, lors de mes voyages à Kiev, je parvenais à payer en roubles russes dans les magasins locaux. Les fermiers ukrainiens gardèrent leurs étalages dans les marchés de Moscou et dans d’autres villes russes. La langue russe est toujours utilisée en Ukraine. Qui aurait pu prédire que cela se terminerait ainsi ? Hélas, la logique du divorce, après un long mariage, est difficile à comprendre et à digérer. Après tout, c’est l’émotion qui prend les commandes une fois que les papiers sont signés. Nicolaï Gorchkov est journaliste indépendant basé à Londres.
PAS DE COOPÉRATION SANS CONFIANCE Guevorg Mirzayan POLITOLOGUE
a coopération russo-américaine en matière de lutte contre le terrorisme est confrontée à un problème majeur : l’absence de confiance. Chacun soupçonne l’autre d’utiliser les terroristes pour ses propres intérêts. Même nos interprétations du mot « terroriste » diffèrent. « De nombreux attentats commis en Russie ne sont pas inscrits sur la liste des plus gros attentats, qui comprend le 11 septembre aux États-Unis, le 7 juin à Londres, etc. La Russie, en revanche, est inscrite dans une autre catégorie, car ici, comme en Israël, le terrorisme est perçu comme la réponse aux répressions de la part du gouvernement », écrit Dmitri Trenine, directeur du Centre Carnegie de Moscou. Aujourd’hui encore, les terroristes utiles aux intérêts américains, sont appelés « combattants de la liberté » (par exemple, les combattants de l'Armée syrienne libre). Il n’en a pas toujours été ainsi. Par exemple, lors de la planifica-
L
tion de la campagne d'Afghanistan, les services secrets russes (comme, d’ailleurs, les Iraniens) ont transmis les informations sur les sites militaires des Talibans aux agents de renseignement américains. En outre, la Russie a toujours transmis aux renseignements américains tous ses contacts dans l'Alliance du Nord – les chefs de guerre tadjiks et ouzbeks à qui Moscou a longtemps permis de conserver leurs positions dans le Nord de l’Afghanistan. Enfin, la Russie a donné son feu vert pour la création de bases militaires américaines en Asie centrale et a accepté que les troupes américaines en Afghanistan soient ravitaillées à travers son territoire. Bien entendu, il ne s’agissait pas de pure charité – Moscou comprenait que la radicalisation des talibans présentait une menace sérieuse pour les intérêts russes dans les pays d’Asie centrale et était prêt à collaborer avec les États-Unis. « La courte période qui a suivi le 11 septembre 2001 a montré que Moscou et Washington peuvent avoir et ont des intérêts communs », explique
© ALEXEY IORSH
le président du Comité des affaires internationales du Conseil de la Fédération Mikhaïl Marguelov. Pourtant, cette période a, en effet, été courte, Moscou estimant que les États-Unis refusent de prendre en compte ses intérêts. Ainsi, Washington a vivement réagi aux objections de Moscou concernant l’invasion en Irak. Il a également violé la seule condition que la Russie imposait en échange de la suppression de ses objections à l’égard des bases
américaines en Asie centrale : leur caractère temporaire. Quand Moscou a compris que la base américaine au Kirghizstan y resterait longtemps, il a essayé de convaincre le gouvernement kirghize d’expulser les Américains. Cette décision, comme les conflits successifs (affaire Snowden, position russe sur la Syrie et l’Iran...), ont définitivement détruit l’atmosphère de confiance qui se formait, mais aussi les conditions mêmes de cette confiance. C'est vrai, après cela, les deux pays ont
continué à collaborer sur certaines questions, et le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a reconnu que les États-Unis et la Russie « disposaient d’un mécanisme bilatéral assez efficace qui réunissait différentes agences impliquées dans la lutte contre le terrorisme ». Toutefois, cette coopération n’avait qu’un caractère purement tactique. Après les événements en Crimée et dans le sudest de l’Ukraine, les États-Unis ont renoncé, de facto et de jure, à leur collaboration avec Moscou en matière de lutte anti-terroriste. Cette décision démonstrative a été très mal perçue en Russie. Cela ne signifie pourtant pas que Moscou ne participe pas à la lutte anti-terroriste au bénéfice des intérêts américains – simplement, il le fait sans le soutien américain. En outre, la Russie, contrairement aux États-Unis, a rapidement fourni des armes aux troupes irakiennes pour qu’elles puissent affronter les troupes de l’État islamique (EI) qui avançaient sur Bagdad. Les avions d’attaque russes ont beaucoup aidé les autorités irakiennes. Moscou est prêt à soutenir la
lutte contre l’EI à l’avenir, mais il ne participera pas aux opérations en Syrie qu’il juge illégitimes sans l’accord du gouvernement syrien. La Russie exige des ÉtatsUnis une parfaite transparence de l’opération, son aval par le gouvernement syrien (soit le respect de toutes les formalités juridiques) et des garanties que cette opération ne conduira pas aux bombardements des troupes de Bachar el-Assad. Washington ne semble pas prêt à apporter ces garanties. « Le secrétaire d’État américain m’a plusieurs fois annoncé que les États-Unis s’apprêtaient à proposer un format permettant aux États-Unis, à la Russie et aux pays de la région d’évaluer la situation et de tenter de trouver un équilibre des intérêts afin de se consacrer à l’élimination de la menace terroriste », explique Sergueï Lavrov. « À chaque fois, je lui ai confirmé que nous étions prêts pour un tel contact, mais cela n’est jamais allé au-delà des paroles ». Guevorg Mirzayan, journaliste et chargé de recherches à l'Académie des sciences de Russie.
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Musée Une vue « chatoyante » sur la collection d’art de l'Ermitage
Ces félins veillent sur la pérennité des chefs d'œuvres L'un des plus grands musées au monde célèbre ses 250 ans cette année. Il est plus que temps de rendre hommage aux chats qui protègent l'illustre collection artistique de l'Ermitage ! JOY NEUMEYER RBTH
Le musée de l’Ermitage de SaintPétersbourg est le coffre au trésor de la Russie. Fondé par l’impératrice Catherine la Grande, ce palais situé au bord de la Neva contient une des collections d’art les plus renommées au monde. Mais cette grandeur baroque cache aussi un sous-sol composé de conduits de chauffage et de locaux d’entreposage. Ses murs ne sont pas couverts de Rembrandt et de Caravage, mais de photos de chats. L’histoire de ces derniers a accompagné cette institution, en y veillant pendant des siècles, de la splendeur à la pauvreté, avant de faire leur retour. « C’est une véritable symbiose entre l’animal et l’humain », raconte à RBTH Maria Haltunen, assistante du directeur et porteparole officielle des chats. Ces derniers habitent dans le palais d’Hive r d e p u i s l ’ é p o qu e d e l’impératrice Élisabeth Ière de Russie. En 1747, elle a promulgué un décret demandant à un chauffeur d’amener au palais « des chats domestiques capables de chasser ». Une voiture pleine de bleus russes est ainsi arrivée à toute allure de Kazan dans la résidence impériale à Saint-Pétersbourg. C’est l’héritière d’Élisabeth, Catherine la Grande, qui a transformé le palais en une des plus
extraordinaires institutions artistiques du monde. « Elle a très rapidement réalisé que l’art était un symbole de prestige parmi les dirigeants européens», indique Geraldine Norman, auteure de The Hermitage : Biography of a Great Museum et conseillère du directeur du musée. En 1771, Catherine ramène la première peinture en Russie. Huit ans plus tard, elle acquiert une collection de près de 200 pièces du Premier ministre britannique Robert Walpole, qui comprend des tableaux de Rubens et Velazquez. En tout, Catherine a acquis près de 4 000 toiles de maîtres et un ensemble stupéfiant de 10 000 gravures que Norman décrit comme son « grand amour ». La hausse du prestige de la collection de Catherine, devenue premier musée public du pays en 1852, se reflétait dans le statut accordé à ses gardes. Sous Catherine, le palais a commencé à distinguer les chats domestiques de ceux de la cour, qui étaient libres de se promener dans les couloirs. Leur travail était plus important que jamais. Catherine avait même écrit dans une lettre : « Les galeries accueillent très peu de visiteurs : juste moi et les souris ». En 1917, la révolution d’Octobre a chassé le tsar Nicolas II du palais d’Hiver. Selon Haltunen, les derniers Romanov avaient un faible pour les animaux et possédaient plusieurs chiens et chats. Alors que les chiens ont été fusillés en même temps que leurs maîtres, les félins ont été abandonnés dans le palais, échappant ainsi à ce funeste destin. Les bolchéviques ont nationa-
© LEGION MEDIA(2)
« Attention aux chats ! »
© PHOTOXPRESS
L’Ermitage n’est pas le seul musée russe qui possède des gardienschats. En 1913, lors de la cérémonie d’ouverture du musée des BeauxArts de Simféropol, lorsque le gouverneur s’apprêtait à couper le ruban rouge et pénétrer en premier dans l’enceinte du bâtiment, il a été devancé par un chat noir. Depuis, celui-ci est considéré comme le porte-bonheur du musée. Un concours a été lancé pour sélectionner Béhémoth, du nom d'un personnage du roman Le Maître et Marguerite que le musée Boulgakov souhaitait « employer ». © KOMMERSANT
lisé l’Ermitage, ouvrant une période douloureuse pour le musée qui durera pendant plus de trente ans. Dans les années 1930, Staline a commencé à revendre certaines œuvres du musée pour financer l’industrialisation soviétique.
LE PARC GORKI Tous les visiteurs du parc ont la possibilité de mettre en ligne leur selfie d’automne : un accès Wi-Fi gratuit est disponible, ainsi qu’une borne dédiée au rechargement des ordinateurs et des portables. Vous pourrez également faire l’expérience des sensations particulières procurées par ce mélange de feuilles tombantes et de danses sur les berges de la Moskova. Le parc Gorki est relié à la Colline des Moineaux par un réseau de pistes cyclables et piétonnières sur les berges hautes de la rivière, s’ouvrant sur une vue panoramique de Moscou. On peut aussi emprunter un funiculaire afin d’admirer les couleurs automnales depuis un point plus élevé.
LE JARDIN BOTANIQUE Le joyau du jardin botanique est sans conteste son jardin japonais. Une opportunité idéale de pratiquer le momijigari, une coutume traditionnelle japonaise consistant à admirer les érables : des couleurs automnales d’érables de Mandchourie, ginkgos, fusains et châtaigniers spécialement implantés ici, avec un ciel bleu se reflétant dans les mares du parc, extraordinairement belles et couvertes de feuilles. Au centre du jardin se trouve une pagode en pierre importée du Japon symbolisant un temple bouddhiste, tandis que des cérémonies du thé se déroulent à intervalles réguliers dans le salon de thé Adzoumaïa.
LE PARC KOLOMENSKOÏÉ Les anciens vergers de pommiers Diakovski, Kazanski et Voznesenski sont particulièrement dignes d’intérêt à Kolomenskoïé. Ces vergers, situés sur le point culminant du parc, offrent le plus beau point de vue sur la rivière Moskova dans sa parure d’automne. Vous pouvez vous y rendre avec vos amis, une couverture, un panier piquenique et passer la journée dans un univers totalement différent. À Kolomenskoïé, il existe encore une autre opportunité d’admirer la capitale en automne : utiliser les jumelles panoramiques gratuites situées à la place Voznessenïa.
Des gardiens à quatre pattes
Les jours les plus sombres viendront durant la Seconde Guerre mondiale, avec la mort de près d’un million et demi de personnes lors du siège de 872 jours de Leningrad. La collection de l’Ermitage fut évacuée. Dans le même temps, la ville était affamée.
MOSCOU EST L’UNE DES MÉGAPOLES LES PLUS VERTES AU MONDE. ON Y TROUVE PLUS D’UNE CINQUANTAINE DE LIEUX POUR ADMIRER LA NATURE EN AUTOMNE. VOICI UNE SÉLECTION DES PLUS SÉDUISANTS D’ENTRE EUX.
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T R AV E L 2 M O S C O W. C O M
« Tous les animaux avaient disparu de la ville, même les oiseaux », ajoute Haltunen. « Il n’y avait simplement plus rien à manger ». Les chats permettaient à leurs maîtres de survivre en servant de nourriture, marquant la seule pé-
riode durant laquelle ces animaux ont été absents de l’Ermitage. Après la guerre, l’Ermitage a recruté de nouveaux matous en provenance de villes comme Novgorod et Pskov. Avec la stabilisation du pays, le nombre de chats n’a cessé d’augmenter, à l’instar des objets exposés. En 1995, peu après ses débuts comme employée du musée, Haltunen s’est rendue dans les soussols et a été choquée de voir des dizaines de chats la dévisager. Ils étaient un peu à l’image des lieux : sales, affamés et négligés. Haltunen et un ami ont commencé à apporter de la bouillie de la cafétéria. Ils ont ensuite lancé la campagne « Un rouble pour un chat » afin de récolter de l’argent pour la nourriture et les soins vétérinaires. Ils ont bénéficié du soutien de Mikhaïl Piotrovski, directeur de l'Ermitage, pour leur offrir un endroit dans le sous-sol. Le musée connaît une seconde vie sous Piotrovski. Il y a deux ans, il a ouvert un département d’art contemporain. Pour son montage vidéo Basement, l’artiste néerlandais Erik van Lieshout a passé neuf mois à vivre avec les chats dans le sous-sol alors qu’il était en rénovation. « Les chats sont l’âme de ce bâtiment », a indiqué Lieshout à RBTH. « Ils représentent pour moi une sousculture ». Même si les chats n’errent plus dans les couloirs comme ils le faisaient à l’époque de Catherine, les plus sociables d’entre eux s’aventurent dans les cours ou au bord du fleuve, s’arrêtant pour poser leurs griffes dans la porte d’entrée. Aujourd’hui, ils ont leur propre « passeport » et peuvent se vanter d’avoir à leur service une légion de volontaires et de vétérinaires dévoués. Ils ont même une fête annuelle en leur honneur durant laquelle les visiteurs font la file pour avoir la chance de les rencontrer (ou de les adopter). Ce sont désormais moins des chasseurs que des ambassadeurs culturels, ou des « chats domestiques gâtés », comme aime à plaisanter Haltunen. Mais leur présence a toujours un effet dissuasif sur les souris. Ils restent une partie intégrante de l’histoire de l’Ermitage, certes moins essentielle que les peintures de Monet et son or ancien, ou les splendides couloirs du palais d’Hiver.
LE PARC IZMAÏLOVSKI Ce parc est l’endroit idéal pour une randonnée d’automne à l’intérieur des limites de la ville. Contrairement aux autres parcs et domaines de Moscou, le parc Izmaïlovski n’est pas aménagé, il ressemble donc à une véritable forêt, avec ses arbres aux longues branches. Ici seulement, il est possible de faire bruisser les feuilles mortes et constituer le plus beau des bouquets de feuilles d’automne. Le territoire du parc Izmaïlovski s’étend sur plus de 300 hectares, c’est pourquoi il est préférable d’y louer un vélo afin de l’explorer entièrement. Pour le contempler d’un seul regard, il est également possible de monter sur la grande roue.
TSARITSYNO Tsaritsyno est l’unique parc paysager à l’anglaise de Moscou. Ce parc à l’allure de royaume dispose d’une gamme de couleurs unique, mêlant le rouge des briques au blanc des ornements de pierre. Palais pseudo-gothiques, pavillons, arches et ponts délicats se fondent parfaitement dans le paysage automnal. La cascade des étangs y fait office de miroir, dédoublant la beauté des lieux. La nuit tombe vite en automne. Tard dans la soirée à Tsaritsyno, il est possible d’admirer et d’écouter la fontaine illuminée et sonorisée de l’île Podkov située dans les eaux de l’étang de Tsaritsyno.
LE DOMAINE DE KOUSKOVO Un parc à la française régulier, orné d’authentiques sculptures en marbre de personnages mythologiques gardant un palais d’été aux nombreux intérieurs d’époque, ainsi que d’une collection de porcelaine faisant de ce domaine un lieu unique. Il n’y a pas meilleur endroit à Moscou pour admirer un tel site géométrique en automne. Il est agréable d’y faire une visite pendant le week-end, en particulier au début de l’automne, lorsque les arbres et arbustes du domaine sont parés de leurs couleurs naturelles les plus vives.