Russia Beyond The Headlines (Luxembourg)

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JEUDI 12 NOVEMBRE 2015 Distribué avec

Ce cahier de quatre pages est édité et publié par Rossiyskaya Gazeta, qui assume l’entière responsabilité se son contenu PA R M I L E S A U T R E S PA R T E N A I R E S D E D I S T R I B U T I O N : T H E D A I LY T E L E G R A P H , T H E N E W YO R K T I M E S , L E F I G A R O , L A R E P U B B L I C A E TC .

L’OPÉRATION EN SYRIE L’opinion publique russe envers l‘engagement a basculé de l’indifférence au soutien

Syrie : les Russes entre soutien et confusion

EPA

mer d’emblée une position tranchée à l’égard de cette intervention, tout s’est passé beaucoup trop vite, soulignent les sociologues. Sur internet, dans les forums de discussions, beaucoup de commentaires disaient : « Pour le moment, EKATERINA SINELCHTCHIKOVA nous ne savons pas ce que nous devons RBTH en penser, car nous n’avons aucune inÀ peine 5 heures ont séparé, fin septembre, formation ». l’autorisation donnée au président d’uti- Une dizaine de jours plus tard, les deux liser les troupes à l’étranger et la pre- principaux services d’études sociolomière attaque aérienne russe en Syrie. giques du pays, VTsIOM et Levada, ont En Russie, la population n’a pu expri- publié des sondages montrant qu’une Les réactions populaires au premier engagement militaire russe hors de l‘ex-URSS penchent vers le soutien. Mais les experts et sociologues notent l‘existence d‘un malentendu.

majorité de Russes approuvaient globalement la campagne militaire. Dix jours plus tard, la cote de popularité deVladimir Poutine a battu son maximum historique, pour atteindre près de 90%. Mais certains s’interrogent : les Russes comprennent-ils réellement aux côtés de qui et contre qui se battent les militaires de leur pays ? Saisissent-ils les objectifs et les enjeux de cet engagement ? Les sondages semblent indiquer que la réponse est négative.

Ce n’était que la Syrie Il y a un an, la guerre civile en Syrie était un sujet secondaire dans les bulletins d’information russes. Parmi ceux qui se disaient au courant des événements en Syrie, plus de la moitié affirmaient ne soutenir aucune des parties du conflit. La menace posée par l’EI (organisation interdite en Russie) était perçue comme secondaire, certains sondés considérant même l’organisation comme un allié potentiel dans l’arène géopolitique, rappelle l’ex-

pert du centre Levada Stepan Gontcharov. « Cette situation a persisté jusqu’à la fin de l’été dernier, jusqu’à ce que les premières informations sur le transfert des troupes vers les bases russes en Syrie ne commencent à être publiées par la presse. Le grand public n’a été rattrapé par le conflit que plus tard encore, quand l’agenda des chaînes de télévision fédérales a commencé à changer », explique-t-il. SUITE EN PAGE 2

RÉFUGIÉS La Russie doit-elle résoudre la crise ?

Faire étape ou plus en Russie Les réfugiés et les organisations qui les aident s‘interrogent sur le rôle de l‘État russe. Devrait-il se montrer plus actif dans l‘une des plus graves crises migratoires de l‘histoire récente ? PAVEL KOCHKINE RBTH

La tragédie de la guerre civile syrienne, qui dure depuis 2011, a jeté sur les routes d’innombrables réfugiés. Et tous ne se dirigent pas vers l’UE. Ahmad, un robuste musulman chiite de 40 ans, a fui son pays pour atterrir dans un appartement douillet du sud-ouest de Moscou. Avant la guerre civile, il vivait en Syrie avec sa femme et leurs deux enfants dans la ville d’Al-Mleha, à quelque six kilomètres de Damas. Après avoir travaillé 5 ans en tant que chef cuisinier dans un restaurant moyen-oriental de Londres, il est retourné en Syrie et a utilisé l’argent qu’il avait gagné pour ouvrir une boutique de prêt-àporter et un élevage de poulets. À la suite de la guerre qui a frappé le pays en 2011, son élevage de poulets a été détruit et son appartement confisqué par des extrémistes qui le consi-

déraient comme un infidèle. Il a dû déménager à la périphérie de Damas, mais son nouveau quartier est rapidement devenu la cible des bombardements. Quand les obus se sont mis « à siffler au-dessus de nos têtes, maisons et écoles et tuer des civils pacifiques », il a décidé de fuir pour sauver sa famille. Ahmad a fui en Russie en 2013 avec un visa touristique. Il y a obtenu un asile temporaire dans un second temps. Pourtant, en 2014, le Service fédéral russe des migrations (FMS) a refusé de prolonger son statut et a ordonné la déportation de sa famille. « Les papiers sont un grand problème pour moi », dit-il. « Je n’ai pas besoin de l’aide du gouvernement, je veux simplement vivre comme une personne normale – je veux pouvoir travailler et pourvoir aux besoins de ma famille ». L’avenir de ses enfants est une autre source de soucis. Ils se sont facilement adaptés à leur nouvelle vie en Russie – ils parlent correctement le russe et ont récemment commencé à étudier dans une école russe ordinaire. Mais c’est l’incertitude qui préoccupe Ahmad :

lu.rbth.com/opinion

YURI KOZYREV / NOOR

il ne sait simplement pas combien de temps ils pourront continuer à vivre en Russie. Interrogé sur l’éventualité d’un déménagement de sa famille vers l’UE, Ahmad répond qu’il essaiera d’abord d’y trouver un emploi. « Je n’ai pas l’intention de déménager dans un camp de réfugiés », souligne-t-il. « Je parle l’anglais, j’ai une profession, je chercherai donc de meilleures options ». Deux semaines après l’entretien, RBTH a appris qu’Ahmad avait quitté la Russie pour l’UE.

Les attentes frustrées Muez Abu Al-Jadael, journaliste syrien et militant des droits de l’homme, aborde la crise sous un angle différent. Il est luimême réfugié politique, ayant obtenu la

protection de la Suède. Diplômé de l’Université russe de l’amitié des peuples, il a tenté à plusieurs reprises, en vain, d’obtenir l’asile en Russie. Aujourd’hui, il aide à distance ses compatriotes à s’adapter à la vie en Russie, en leur apportant une assistance juridique, par le truchement d’ONG et d’associations de défense des droits de l’homme telles que le Comité d’assistance civile caritative, basé à Moscou. Les deux principaux défis auxquels il a été confronté sont « la corruption et la bureaucratie ». Selon lui, de nombreux réfugiés sont déçus et préfèrent quitter la Russie pour l’Europe. La Russie est également utilisée comme pays de transit. SUITE EN PAGE 3


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