La transmission comme outil de construction.

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LA TRANSMISSION COMME OUTIL DE CONSTRUCTION

DESI Center, Anna Heringer, Rudrapur, Bangladesh, 2007 1


S4 TP CE / ENSA-Marseille / Juin 2015 / BENBELAID Lilia, METLAINE Léa, SALOMON Viridiana-Jade Enseignants BELMAAZIZ Mohamed, DEL AMO Pablo, LENOBLE Carole 2


SOMMAIRE / INTRODUCTION

IV / PROTECTIONS

ANNA HERINGER

1- DISPOSITIFS CONTRE LA PLUIE

a- Démarche architecturale b- Réalisations / Projets

a- La toiture b- Système anti-ruissellement

2- DISPOSITIFS CONTRE LE VENT

I /UN PROJET AVEC DE MULTIPLES ENJEUX

3- DISPOSITIFS CONTRE LE SOLEIL

1- CONTEXTE: Le Bangladesh

a- La toiture b- Les volets c- Les fenêtres

a- Localisation et description b- Climat et enjeux environnementaux

2- ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ

/ CONCLUSION

a- Le vernaculaire b- L’action des ONG

/ BIBLIOGRAPHIE

3- LE DESI CENTER

a- Aspect social b- Répartitions des espaces

/ ANNEXES

II/ ESPACES MASSIFS 1- LA TERRE

a- Un matériau, une multitude de techniques b- En quoi le matériau terre est-il performant?

2- EXPÉRIMENTATION

a- Collaboration b- Contact avec la matière

3- COMMENT HABITER LA TERRE?

a- Un matériau à fortes contraintes b- Un matériau adapté au mode de vie local

III/ ESPACES AJOURÉS 1-LE BAMBOU

a- Un matériau qui compose l’espace b- Des éléments structurels

2- EXPÉRIMENTATION

a- La contribution des bengalis b- Des maquettes pour comprendre

3- MAÎTRISE DES ÉLÉMENTS NATURELS a- La ventilation b- Luminosité

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/ INTRODUCTION

ANNA HERINGER

a- Démarche architecturale

Anna Heringer est née en 1977 à Laufen, en Allemagne. Elle fait un voyage humanitaire à ses 19 ans au Bangladesh, et y vivra durant un an. Cette expérience de vie la marquera et elle décidera alors d’entamer des études dans le domaine de l’architecture. Elle étudiera à l’Université de Linz en Autriche, avec un cursus orienté sur les approches écologiques et une formation sur les constructions en torchis.

Elle travaille aussi avec les contraintes naturelles telles que le climat et la culture du pays où elle construit. Sa conception est liée à l’environnement et au développement durable.

Elle met également l’architecture au service des habitants de la région par leur participation. Cela permet la transmission de savoirs et génère une fierté chez eux. L’habitant est alors créateur avant même d’être un consommateur. Les populations s’appro Une fois diplômée, prient alors le bâtiment et la jeune architecte a pour la notion de bien commun ambition de lier architec- apparaît. ture et enjeux sociaux. Elle agit avec la volonté de réactiver certaines méthodes traditionnelles de régions refoulées aujourd’hui par la modernité ambiante. Pour se faire, elle mise sur un réapprentissage de techniques anciennes tout en utilisant des matériaux locaux.

«Le langage des matériaux. Le processus de découverte d'un matériau efface la distinction entre l'artisan, l'architecte et le sculpteur et ouvre les nouveaux champs de formation»

«La soutenabilité va de pair avec la simplicité. Elle est également synonyme de beauté, d'harmonie avec l'environnement naturel, mais aussi avec l'environnement social.»

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/ INTRODUCTION

ANNA HERINGER

b- Réalisations / Projets

Anna Heringer a construit principalement au Bangladesh et en Afrique. Elle collabore bien souvent avec l’architecte Martin Rauch (connu pour ses constructions en terre), et l’ingénieur Eike Roswag. Elle a fondé BASEhabitat qui organise des workshops sur l’écoconstruction avec des étudiants en architecture.

La question qui se pose donc est de savoir en quoi le projet du DESI Center réunit-il architecture vernaculaire et architecture savante.

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Ses projets sont construits avec des matériaux locaux que produit la nature, bien souvent la terre et le bambou sont employés.

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A Rudrapur (1), dans la région de Dinajpur, au Nord Est du Bangladesh, elle a construit trois projets, deux écoles, dont le DESI Center notre bâtiment d’étude et des maisons. Ces bâtiments étant des initiatives d’une ONG appelée Dipshika, qui se consacre à aider les enfants issus des zones rurales à lire et à écrire.

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1- Localisation des projets sur plan masse de Rudrapur, Bangladesh. (www.annaheringer. com) 2- DESI Center

3 - METI school, Bangladesh, 2005-2006. (projet ayant reçu le prix de l’Aga Khan Prize of Architecture en 2007) 4- maison Rihani, Bangladesh, 2007-2008.

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5- maison Sepal, Bangladesh, 2007-2008. 6- maison Hamonto, Bangladesh, 2007-2008.

7- centre d’eco-construction, Maroc (projet en cours).


I/ UN PROJET AVEC DE MULTIPLES ENJEUX

1- CONTEXTE: Le Bangladesh a- Localisation et description

Le Bangladesh est un pays d’Asie, limitrophe avec l’Inde et la Birmanie. Il est situé de part et d’autre du tropique du Cancer, dans un delta plat et bas. Ce dernier étant formé par la confluence de deux fleuves: le Gange et le Brahmapoutre, qui représentent à eux seuls 90% de l’hydrographie du pays.

Au XIX ème siècle, le pays connait de nombreuses crises d’épidémies et de famine, faisant alors des millions de mort, ce qui entraîne une crise économique du pays. En 1947, le Bangladesh est divisé en deux pour des idéologies religieuses. La partie occidentale appartiendra à l’Inde et la partie orientale au Pakistan. Les guerres de religions sé La capitale du pays vissent depuis le XII ème est Dacca. La population siècle. totale s’élève à plus de 152 millions d’habitants (se- Concernant la polon une source datant de litique de ce pays, elle est 2012) et la densité serait tout aussi instable. Les de 1059 hab/km². partis se sont succédés On y parle le bengali et la (socialistes, radicaux isreligion d’État est l’islam. lamistes) créant de nombreux conflits. La corruption est omniprésente entraînant attentats et violences. En 2006, les élections sont même reportées, mettant en place une gouvernement par intérim en attendant d’organiser de nouvelles élections.

Les projets d’Anna Heringer à Rudrapur se construisent à cette même époque. Le climat à la capitale et dans de nombreuses zones du pays est alors tendu. La politique au Bangladesh est une filière importante dans la vie étudiante. Nombreuses sont les branches universitaires actives, et certains étudiants sont même déjà élus au Parlement. Ce dernier, est situé à Dacca et fut construit par l’architecte Louis Kahn (9). Ce bâtiment possède une influence moderne occidentale avec une influence islamique comprenant des formes courbes.

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Le président actuel est Abdul Hamid, mais le contexte politique et économique du Bangladesh est toujours instable.

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10 8- localisation du Bangladesh. 9- carte du Bangladesh (source: wikipedia.fr)

10- parlement Jatiyo Sangshas, Bangladesh, Louis Kahn, 1982.

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I / UN PROJET AVEC DE MULTIPLES ENJEUX

1- CONTEXTE: Le Bangladesh b- Climat et enjeux environnementaux

Ces nombreux épisodes climatiques ont un impact sur les populations du Bangladesh car beaucoup périssent durant ces évènements, mais aussi sur le bâti. En effet, les habitats sont bien souvent détruits et il faut reconstruire dans l’urgence et selon les moyens de chacun.

Le pays du Bengale, a un climat de type tropical. Les hivers sont doux (d’octobre à mars), les étés sont chauds et humides (de mars à juin). La provenance des vents varie selon le Sud Ouest et l’Est. Durant cinq mois, de juin à octobre, c’est la période des moussons, qui représente 80% des précipita Le Bangladesh est tion annuelles. un pays où la montée des Si l’on compare les eaux sévit, il est exposé à données météorologiques voir ses terres s’immerannuelles de la station la ger, il est donc important plus proche du bâtiment aujourd’hui de penser des durables étudié avec celles de Mar- constructions et résistantes aux évèneseille, on s’aperçoit que les précipitations au Ban- ments climatiques. gladesh sont plus importantes, mais que le pourcentage d’humidité pour les deux villes est similaire. La différence est que le Bangladesh a connu et connait encore de grands problèmes liés à l’eau, provoquant alors de grandes catastrophes naturelles (inondations, cyclones, tornades, séismes).

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11- étude climatique comparative entre Rudrapur (Bangladesh) et Marseille (France)

S’ajoute à cela le réchauffement climatique, entraînant le dégel des pentes de l’Himalaya situé au nord du pays, ayant pour conséquence de grandes arrivées d’eau.

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12- Rose des vents, Ecotect.

13- Photographie issue du catalogue de l’exposition: «Biodiversités, Cultures constructives, Développement local: la réduction des risques naturels au Bangladesh».


I / UN PROJET AVEC DE MULTIPLES ENJEUX

2- ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ a- Le vernaculaire

Les constructions vernaculaires sont par définition, propres à un pays, à ses habitants. Elles permettent une identification culturelle et ont le rôle de lien commun dans une nation. Au Bangladesh, il n’y a pas d’habitat typique mais plutôt différentes stratégies d’adaptation selon les régions d’implantation. Grâce à des siècles de pratique, chaque communauté va développer ses propres savoirs-faire traditionnels afin de se constituer des abris. Abris, car en effet c’est le but premier. 83% de la population vit dans des habitats non normés. Si les modèles architecturaux diffèrent, l’harmonie naturelle entre matériaux, environnement et culture est une valeur partagée. Les réponses architecturales sont simples mais intelligentes et donc appropriées à chaque contexte.

Ces derniers construisent avec les ressources locales disponibles à proximité du site: bois, bambous, pierres, terre, fibres végétales pour les toit de chaume. Ces éléments de construction sont facilement récupérables en cas de catastrophe naturelle afin de les réutiliser pour un nouvel habitat.

A la ville, les bâtiments ont des styles architecturaux avec des influences historiques, contrastant avec la ruralité des alentours. 14

Dans les zones rurales, la vie domestique est organisée entre les espaces intérieurs et extérieurs. Les maisons de village sont généralement rectangulaires avec une véranda à l’avant. Anna Heringer reprendra ce dispositif spatial pour le DESI Center qui est donc basée sur un mode de vie traditionnel. Les maisons sont dépouillées de décoration intérieure et ont peu de meubles. Les bangalis ont pour habitude de dormir sur des nattes en bambou.

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14- Construction avec matériaux de récupération après un cyclone. 15- Habitat en terre. 18

16- Construction sur pilotis pour lutter contre la montée des eaux.

17- Exemples de sur-élévation de bâtiments. (source: www.everyculture. com/A-Bo/Bangladesh.html) 18- La capitale Dacca

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I / UN PROJET AVEC DE MULTIPLES ENJEUX

2- ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ b- L’action des ONG

Pour aider les bengalis à se reconstruire après les catastrophes naturelles, de nombreuses ONG agissent de manière ponctuelle et permanente. Elles fournissent les fonds nécessaires à la reconstruction mais toujours dans un respect de l’environnement et de la culture locale. Le laboratoire de recherche CraTerre, de l’école nationale supérieure d’architecture de Grenoble intervient aussi avec ses étudiants lors de workshop. Ces multiples actions ont notamment permis une amélioration de l’assainissement du Bangladesh. En effet, l’hygiène est un réel problème dans ce pays, où 62 % de la population n’a pas accès à l’assainissement amélioré. Par exemple, dans les écoles, en zone rurale on a 1 toilette pour 91 enfants, alors qu’en zone urbaine: 1 toilette pour 9 enfants (source: UNICEF). De ce fait, s’en suit la déscolarisation des filles à l’école. Par honte et pudeur, n’ayant pas accès à des sanitaires lors de leurs menstruations, elles préfèrent ne plus se rendre sur le lieu d’apprentissage.

Les ONG engagent alors des campagnes de sensibilisation à l’hygiène en organisant des chantiers pour montrer aux populations les plus démunies comment construire des toilettes à moindre coût.

Pour le DESI Center, Anna Heringer a mis en place un bloc technique qui comporte des équipements d’assainissement amélioré (toilettes, douches, lavabos), permettant alors une bonne hygiène de vie. L’architecte a aussi préconisé l’installation d’équipements modernes tels que des panneaux solaires, permettant ainsi une autonomie électrique au bâtiment en tirant partie d’un élément naturel constant: le soleil.

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21 19- Équipements modernes du DESI Center 20-21 - «Water and sanitation program» Constructions de toilettes

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I / UN PROJET AVEC DE MULTIPLES ENJEUX

3- LE DESI CENTER a- L’aspect social

Le projet d’Anna Heringer est une école d’apprentissage pour électriciens. L’électricité étant un réel enjeu au Bangladesh. En effet, il est important de former des gens, car la distribution électrique n’est pas assurée régulièrement (il peut y avoir des coupures allant de 5, à 8h par jour), la demande énergétique étant supérieure à l’offre. Le bâtiment fut construit avec des matériaux locaux se situant à proximité du site, et avec les artisans et les habitants du village. Le coût total est d’environ 25 000 dollars. Le bilan énergétique de la construction est minime, car pour le chantier ils eurent besoin d’un seul tracteurs, le reste étant effectué par des buffles et la main d’oeuvre humaine.

Les femmes au Bangladesh n’ont pas une grande importance dans la société. Par exemple, elles n’ont pas le drot de toucher à l’argent, c’est alors l’homme qui se rend au marché pour les achats. Ils considèrent aussi qu’elles sont incapables d’apprendre. Anna Heringer va alors donner une importance au rôle de la femme dans ses projets. Pour la construction du DESI Center, elle va leur apprendre la technique du tadelakt afin de recouvrir d’un enduit les murs en terre crue. Ces femmes obtiennent alors satisfaction et reconnaissance. D’autant plus qu’elles détiennent un savoir-faire qui permet l’entretien du bâtiment en cas de dégradation (eaux pluviales par exemple), leur assurant un statut légitime et durable dans le projet.

Cette architecture atypique pour l’occident, montre l’implication des occupants dans le projet et la contribution de toute la communauté. Anna Heringer a dû comprendre le fonctionnement de la région afin de répondre aux contraintes du site. Elle a voulu rendre cette zone rurale dynamique et prometteuse.

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22- Participation collective lors de la construction. 23- Malaxage de la terre crue par des buffles et des hommes. 24- Femmes bengalis participant au chantier.


I / UN PROJET AVEC DE MULTIPLES ENJEUX

3- LE DESI CENTER

b- Répartition des espaces

Le bâtiment se compose de «trois blocs». Un étant collectif, un servant de lieu de vie privatif pour les instituteurs et le dernier est le bloc technique. Le RDC est constitué d’une structure dite lourde en terre, et l’étage d’une structure légère en bambous.

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Les espaces extérieurs sont tout autant utilisés, servant aux temps de pause tout en étant protégé du soleil.

24- Vue générale du DESI Center

Le plan se compose de deux salles de classes superposées, où l’utilisation de l’une ou de l’autre varie selon les saisons. Deux bureaux, deux chambres et deux salles de bain privatives.

25- Croquis de répartition des espaces Blocs sanitaires

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Circulations

Espaces privés

Salles de classe

26- Vue depuis la véranda des blocs sanitaires

27- Vue depuis la véranda de la salle de classe 28- Chambre d’un professeur

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29-Salle de classe du R+1

30- Vue des blocs techniques RDC

31- Espace extérieur sous la véranda vers les blocs sanitaires 32- Espace extérieur sous la véranda vers la salle de classe

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33- Salle de classe RDC


II/ ESPACES MASSIFS

L’espace massif a pour caractéristique d’être fermé et d’offrir la sécurité. En architecture, il constitue un espace déterminé par ses limites épaisses et son repli sur l’intérieur. L’aspect massif est perceptible par des ouvertures creusées en son épaisseur. C’est un lieu où la température et l’ensoleillement sont maîtrisés. Dans le cas de ce bâtiment les espaces massifs sont définis par les murs en terre crue et constituent le niveau bas des salles de classe ainsi que les blocs d’habitation et technique.

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R+1 1:100

R+1 1:100

RDC 1:100

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RDC 1:100

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34- Distinction des éléments en terre lors du chantier du DESI Center 35-36- Distinction des éléments en terre en plan


II/ ESPACES MASSIFS

1- LA TERRE

Dans le cas du DESI Center, les espaces enclos sont caractérisés par la terre qui les constituent. La terre est le matériau le plus disponible au monde donc le moins cher, il est également le plus ancien. Il est généralement utilisé dans l’hémisphère sud, localisant les populations les plus pauvres. Ses utilisations sont diverses, allant d’ustensiles à la structure d’un édifice. De manière générale, la terre est prélevée sur le site de construction.

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37- Répartition des habitats en terre dans le monde.

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II/ ESPACES MASSIFS

1- LA TERRE

a- Un matériau, une multitude de techniques

Il existe quatre principales techniques traditionnelles de mise en œuvre de la terre crue. - La bauge est un mélange terre à l’état plastique et de fibres végétales qui permettent ‘‘d’armer’’ la terre afin d’éviter les fissures. Il faut malaxer la terre et la former en boules de manière à les empiler pour former un mur monolithique. La matière est alors empilée verticalement sur des couches successives qui doivent dépasser la largeur du mur prévu. Une fois la matière suffisamment tassée, on vient araser les côtés du mur avec un objet tranchant. La hauteur du mur réalisable en une journée est limitée, la terre à l’état plastique risque de s’effondrer sous son propre poids. Il faut donc construire par couches successives avec un temps de séchage à chaque fois.

- Le pisé est une technique qui consiste à construire des murs monolithiques par compactage de fines couches successives de terre à l’état humide à l’intérieur d’un coffrage. On compacte la terre avec un pisoir, on décoffre immédiatement après. Cette technique de mise en œuvre est la seule composée de terre, de cailloux et de graviers. Cela crée un véritable béton d’argile. 39

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38- Ensemble des techniques de mise en œuvre de la terre crue, traditionnelles et industrielles.

39- Exemple de mise en œuvre de la Bauge

40- Arasement de la Bauge à l’aide d’une pelle 41

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41- Exemple de mise en œuvre du Pisé 42- Pisé stabilisé banché


II/ ESPACES MASSIFS

1- LA TERRE

a- Un matériau, une multitude de techniques

- L’adobe consiste en la fabrication de briques de terre crue à l’état plastique, moulées ou façonnées à la main, elles peuvent être confectionnées sur le chantier ou de manière industrielle. Il faut les laisser sécher à l’air libre quelques jour avant leur assemblage à l’aide d’un mortier de terre fait d’une terre très argileuse avec du sable fin. La matière doit être fine, sans cailloux ni graviers, afin qu’elles ne fissurent pas, on ajoute du sable ou des fibres végétales. C’est la taille du moule qui conditionne la taille limite des grains de sable.

- Le torchis est une terre mélangée à de la paille ou d’autres matériaux fibreux pour constituer la matière de remplissage d’une structure porteuse réalisée en bois ou en bambous.

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43- 44- Exemples de mise en œuvre de l’Adobe

45- 46- Exemples de mise en œuvre du Torchis

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II/ ESPACES MASSIFS

1- LA TERRE

b - En quoi le matériau terre est-il performant?

On peut considérer la terre crue comme un matériau composite, en effet sa cohésion est obtenue par la combinaison d’une ossature, constituée des grains (cailloux, graviers ou sables), et d’une matrice, constituée de la pâte formée par les argiles et l’eau.

S’apparentant au béton, la terre crue, d’un point de vue mécanique, fonctionne de la même façon, uniquement en compression. En effet, les valeurs de résistance la traction, à la flexion et au cisaillement sont très faibles.

Ce moyen de construction est écologique de plus les murs en terre et végétaux isolent correctement et possèdent une grande inertie thermique.

En termes de maçonnerie, la bauge pourrait aussi désigner un mortier de terre. Cela permet de classer ce matériau dans la famille des bétons.

Bauge

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II/ ESPACES MASSIFS

2- EXPÉRIMENTATION a- Collaboration

La démarche sociale d’Anna Heringer marque la construction du DESI Center. En effet, ce bâtiment à été construit avec les habitants et pour les habitants. Il y a donc une démarche expérimentale dans le sens où les participants du chantier font l’expérience de la construction pendant son déroulement. De cette manière on à donc un échange de savoirs à travers la pratique. Le DESI Center serait le résultat d’une libre expression des artisans. Plus leur contribution à la conception est importante et plus le bâtiment sera aimé.

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47- Les femmes Bengali s’occupant des finitions des fenêtres

« Je souhaitais, par exemple, que les angles des fenêtres soient droits et l’ai expliqué à l’un des ouvriers [...], il à commencé à les couper droit. Peu après, à la vue de son travail, j’ai constaté que les formes de sa fenêtre étaient beaucoup plus jolies que les miennes et nous avons changé tous les plans des fenêtres à la faveur de ces formes courbes.»

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II/ ESPACES MASSIFS

2- EXPERIMENTATION b- Contact avec la matière

Dans la continuité de cette démarche de participation et d’expérimentation, nous avons également souhaité nous confronter à ce matériau, faire l’expérience des techniques d’assemblage. Ces essais nous ont permis de nous rendre compte de la nécessité de maîtriser l’état de la terre, chaque état correspondant à une texture n’étant pas adaptable à chaque mise en œuvre.

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51 48- 49 - Mise en œuvre et fabrication de l’Adobe

50- Mise en œuvre de la Bauge 51- Mise en œuvre du Pisé

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II/ ESPACES MASSIFS

3- COMMENT HABITER LA TERRE?

Pour le DESI Center, Anna Heringer a choisi d’employer la méthode de la bauge pour construire son bâtiment. En effet sa mise en œuvre ne nécessitant que peu de moyens sa réalisation en est donc simplifiée. La terre est malaxée sur place par des buffles puis directement empilée. Elle protège les deux logements des professeurs ainsi que les locaux de commodités situés au niveau supérieur et constitue également le niveau bas du bâtiment assurant ainsi son assise.

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52- 53- 54- Fabrication de la bauge lors du chantier du DESI center.

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II/ ESPACES MASSIFS

3- COMMENT HABITER LA TERRE? a- Un matériau à fortes contraintes

Le Bangladesh est soumis tous les ans à la mousson, or les bâtiments en terre crue n’apprécient guère l’eau en abondance. Cependant, selon certaines sources, le DESI Center serait constitué que de matériaux exclusivement locaux. Nous nous sommes demandés s’il en était de même pour les fondations.

Nous avons donc émis l’hypothèse que les fondations que nous apercevons sur les photos étaient bien réalisées en terre. La terre stabilisée est utilisée dans des milieux humides. C’est un mélange de terre crue à laquelle on ajoute de la chaux ou du ciment afin de la rendre plus résistante aux actions de l’eau. Il est donc possible de réaliser des fondations en terre stabilisée. Soit avec des blocs de terre comprimés stabilisés, soit avec du Pisé stabilisé en fond de fouilles. Dans tous les cas, il faut éviter les remontées capillaires, on élèvera donc ce système sur un hérisson de pierres, une couche de sable ou bien des briques cuites non poreuses et réalisées avec un bon assemblage.

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55- Aperçu des fondations

56- Schéma de fondations en blocs de terre comprimés stabilisés élevés sur du sable 57

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57- Schéma de fondations en pisé stabilisé élevé sur un hérisson de pierres


II/ ESPACES MASSIFS

3- COMMENT HABITER LA TERRE? a- Un matériau à fortes contraintes

Pour protéger efficacement un mur en terre contre les intempéries, il faut un soubassement. Celui-ci préserve la base du mur, il peut être constitué d’une masse d’usure, c’est à dire un excédant de matière non structurel et pouvant être remplacé facilement. Il peut également s’agir d’un matériau rapporté à la base, ce qui semble être le cas pour ce bâtiment. Il peut être composé de pisé stabilisé compressé contre le coffrage, ou bien d’un parement en briques crues stabilisées. Le soubassement doit favoriser l’aération pour éviter la condensation.

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58- Hypothèse de soubassement en pisé stabilisé 59 - Hypothèse de soubassement en briques cuites de parement 60 - Vue du soubassement en briques cuites de récupération en parement


II/ ESPACES MASSIFS

3- COMMENT HABITER LA TERRE? a- Un matériau à fortes contraintes

Cependant, un bâtiment pour pouvoir disposer de fondations en terre stabilisée doit être dans un sol le permettant, or le climat du Bangladesh fait que ce type d’installation n’est pas permise. Les fondations du DESI Center sont donc faites en béton assurant la mise hors d’eau de la terre.

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61- Schéma de fondations en semelle filante en béton 62- Aperçu des fondations en béton dans le DESI center

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II/ ESPACES MASSIFS

3- COMMENT HABITER LA TERRE? b- Un matériau adapté au mode de vie local

Dans la conception de ce bâtiment, la terre est utilisée pour le bloc sanitaire, le logement et le niveau bas de la salle de classe.

Cette distinction des fonctions est en relation avec les propriétés physiques de la terre. Elle possède une forte inertie thermique lui permettant d’emmagasiner la chaleur durant la journée, puis de la restituer la nuit.

Ce fonctionnement cyclique du matériau induit alors également une occupation saisonnière des différents espaces ce qui est traditionnel dans le mode d’habiter de la population au Bangladesh et dans les pays tropicaux.

Type de matériau

Mur en brique de terre cuite creuse Mur monolithique de terre crue Parpaing de ciment

Masse volumique kg/m3 650 / 800

Capacité Thermique Wh/m3.K 202

Épaisseur de la paroi m 0.20

Inertie de la paroi Wh.m².K I= 40.4

850 / 950

250

0.20

I= 50

1770 / 1900

785

La terre mise en œuvre de manière monolithique (pisé, bauge) admet: un σ(c de 2MPa. un ρ de 1 500kg/m³ un λ de 0.75 W/m.°C un Cp de 900J/kg.°C Sa Capacité thermique est de 1350 kJ/m³.°C un Ef de 1/√1350.m².°C

23

0.20

I = 157


II/ ESPACES MASSIFS

3- COMMENT HABITER LA TERRE? b- Un matériau adapté au mode de vie local

De plus, on peut voir sur ces diagrammes de confort que l’hiver les températures basses rentrent dans la zone de confort grâce à l’inertie thermique du bâtiment. L’habitat en terre constitue donc un abri pour l’hiver alors que l’habitat en bambous correspond plus à un usage estival.

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63- Diagramme de confort thermique du printemps en fonction de l’inertie et de la ventilation naturelle

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64- Diagramme de confort thermique d’été en fonction de l’inertie et de la ventilation naturelle 65- Diagramme de confort thermique d’automne en fonction de l’inertie et de la ventilation naturelle 66- Diagramme de confort thermique d’hivers en fonction de l’inertie et de la ventilation naturelle

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II/ ESPACES MASSIFS

3- COMMENT HABITER LA TERRE? b- Un matériau adapté au mode de vie local

Ce fonctionnement cyclique permet de s’adapter au climat rude du pays où les températures sont très variables. Lorsqu’il fait chaud, les usagers utilisent la partie haute du bâtiment, la ventilation est permise par la structure légère en bambous qui est ajourée; en revanche, lorsque les températures baissent, ils habitent l’épaisseur de la terre pour bénéficier de son inertie. Ce fonctionnement est valable pour le bloc de salles de classe et les espaces intermédiaires (véranda), concernant les logements et les espaces sanitaires, il est préférable de construire en terre. En effet, l’utilisation de ces espaces est principalement la nuit ou le matin, de ce fait, les température étant toujours plus basses qu’en journée, il est préférable de favoriser la chaleur engendrée par la terre.

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67- Utilisation de la partie haute du bloc de salles de classes pour bénéficier de la ventilation naturelle

68- Utilisation de la partie basse du bloc de salles de classes pour bénéficier de la de l’inertie de la terre

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III / ESPACES AJOURÉS

1- LE BAMBOU

Le bambou est un des plus anciens matériaux de construction. Utilisé depuis des siècles en Asie, ce matériau se répand peu à peu dans la plupart des pays comme une alternative à l’emploi d’autres matériaux. Il appartient à la famille des plantes graminées et est nommé aussi «herbe géante». De plus, celui-ci est présent sur tous les continents et s’adapte à de nombreux climats (notamment tempérés et tropicaux).

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Dans la région de Rudrapur, une forêt de bambous est présente à proximité du projet permettant ainsi, lors de la construction un acheminement rapide et peu coûteux du matériau.

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Ce matériau naturel possède des propriétés techniques qui le rendent parfois plus performant que des matériaux issus de l’industrie. Il est composé d’un rhizome (partie souterraine), d’une chaume (tige principale) et de feuilles qui se développent à même la tige . Pour la construction du DESI Center, c’est la chaume qui a été utilisée. Celle-ci est de section circulaire creuse, composée de fibres de cellulose et de lignine. On compare souvent cette dernière composante au béton armé, où la lignine serait le béton tandis que la cellulose serait les barres d’acier, résistantes et rigides.

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69- Composition d’un bambou

70- Plan de localisation des forêts de bambous à proximité du DESI Center 73 70

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71- Abri traditionnel en Afrique

72- Vo Trong Nghia, Vietnam, 2010 73- Un chalet en Europe

74- Bureaux de la BBC de Monicat Donati aux États-Unis

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75 - The Bug Dome de Marco Casagrande à la Biennale urbanistique de Hong Kong, 2010


III / ESPACES AJOURÉS

1- LE BAMBOU

a- Un matériau qui compose l’espace

Concernant le projet, les différents assemblages de ces chaumes ont servis à créer des poutres et des poteaux, pour la structure, composant ainsi également l’espace. Il en ressort une trame de portiques espacés d’environ un mètre (76).

La salle de classe de l’étage est composée de neuf portiques fixés au plancher lui aussi en bambous. Ce dispositif poteaux/poutres est posé sur la terre du RDC, pour le fixer, on viendra ensuite le recouvrir avec 80cm de terre.

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La véranda comporte huit poteaux fixés aux fondations et allant jusqu’au toit.

76- Trame du bâtiment 77

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77- Aperçu de la jonction RDC et R+1 dans la salle de classe 78- Aperçu des poteaux de la véranda


III / ESPACES AJOURÉS

1- LE BAMBOU

b- Des éléments structurels

Nous avons émis l’hypothèse que la nature des liaisons entre les différents éléments étaient des articulations. En effet, les bambous sont assemblés grâce à la technique du brelage et par des chevilles, il ne peut donc pas être question d’encastrements. Nous avons porté nos études sur la partie haute du bloc des salles de classes. Nous étudions donc les liaisons poteaux/poutres et poteaux/plancher. Une fois les portiques construits, la triangulation de ces derniers assure leur équilibre statique. 79

Stabilité du système transversal d=n-3e d=28-3x9 d=1

-> Structure hyperstatique de degré 1

Stabilité du système longitudinal d=n-3e d=34-3x11 d=1

-> Structure hyperstatique de degré 1

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79- Localisation des liaisons étudiées


III / ESPACES AJOURÉS

1- LE BAMBOU

b- Des éléments structurels

Le bambou possède des caractéristiques mécaniques lui permettant de travailler aussi bien traction qu’en compression. Sa section creuse lui permet d’avoir une plus grande inertie. La structure en bambous parvient donc à supporter les charges du bâtiment tout en favorisant l’économie de matière. En effet, les poutres sont constituées de deux (pour le plancher) ou quatre (pour le toit) bambous empilés et assemblés de manière verticale. Cet assemblage agit comme un IPN, assurant également une meilleure résistance à la flexion. La réflexion concernant la stratégie d’économie de matériau et d’allègement de la structure combiné à l’utilisation de matériaux locaux caractérise les enjeux de l’architecte.

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83 80- 81- Etude comparative entre le bambou et différentes essences de bois des contraintes admissibles en traction et en compression

82- Disposition des poutres qui soutiennent le plancher 83- Disposition des poutres qui soutiennent la toiture

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III / ESPACES AJOURÉS

1- LE BAMBOU

b- Des éléments structurels

D’après les informations dont nous disposons, nous pouvons en déduire les descentes de charge qui s’exercent dans la structure. On peut alors comprendre que concernant le bloc de salles de classe, chaque élément est structurel.

Charges Toiture Barre bi-articulée

Poteau Mur 1

Plancher

Poutre

Mur 2 Fondations

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83- Tableau des descentes de charges

84- Illustration des descentes de charges

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III / ESPACES AJOURÉS

2- EXPÉRIMENTATION

a- La contribution des populations

Les constructions en bambous et en terre sont traditionnelles au Bangladesh. On y trouve cependant pas de bâtiments à étages. Avec le projet du DESI Center, Anna Heringer a démontré aux populations les réelles performances physiques et mécaniques du matériau. Habitués à utiliser le bambou pour des systèmes poteaux-poutres , la mise en œuvre d’un échantillon de plancher a été nécessaire pour que les habitants de Rudrapur puissent tester la résistance à la flexion du dispositif (87). Grâce à la pratique, ils ont pu ainsi se rendre compte de la performance de ce type d’assemblage. Grâce à la contribution des populations sur le chantier, Anna Heringer a su convaincre et transmettre son savoir tout en utilisant des matériaux traditionnels du pays.

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85- Exemple d’utilisation du bambou dans un échafaudage en bambou, Dacca, Bangladesh 86- Dispositif poteau/poutre dans le DESI Center

87- Échantillon test d’un plancher en bambou testé par les habitants

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III / ESPACES AJOURÉS

2- EXPÉRIMENTATION

a- Des maquettes pour comprendre

Dans la compréhension de ce bâtiment, les maquettes ont eu une grande importance. En effet, elles nous ont permit de comprendre de nombreux aspects de l’édifice tels que les techniques d’assemblage des différents éléments et le contreventement. Selon diverses échelles nous avons pu entrer en contact avec les procédés de constructions, nous amenant à manipuler le bambou. Nos recherches théoriques ont alors pris sens avec la pratique. Les maquettes reprenant le système de clayonnage et de brelage (assemblage avec la corde en nylon, technique traditionnelle au Bangladesh), ne sont pas que la simple imitation des systèmes constructifs de l’édifice, mais de réels outils de compréhension.

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88- Étude d’assemblage d’une articulation d’un poteau. Cheville

89- On voit qu’avec seulement une cheville le moment n’est pas bloqué

90- Avec la corde et la cheville, le moment et les translations sont bloquées

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III / ESPACES AJOURÉS

2- EXPÉRIMENTATION

a- Des maquettes pour comprendre

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91- Solution retenue pour le contreventement longitudinal

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92- Maquette au 1/25 ème avec assemblage en fil de couture (pas de colle)

93- Assemblage d’un portique

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III / ESPACES AJOURÉS

2- MAÎTRISE DES ÉLÉMENTS NATURELS a- La ventilation

Le DESI Center ne possède pas un dispositif de ventilation mécanique contrôlée (VMC). La ventilation de la totalité du bâtiment s’effectue de manière naturelle. C’est une démarche peu coûteuse et en harmonie avec la nature. La salle de classe est ventilée de manière transversale grâce à l’inclinaison de la toiture et de sa structure ajourée. Les espaces séparant les différents blocs sont aussi laissés ouverts avec un simple bardage en bambous afin d’améliorer la ventilation de cet étage.

94

Le moucharabieh de la véranda contribue à améliorer la ventilation. Le principe du Moucharabieh est un dispositif de ventilation naturelle forcée fréquemment utilisé dans l’architecture traditionnelle des pays arabes. En effet, la réduction de la surface produite par le maillage du moucharabieh accélère le passage du vent.

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94- Croquis du flux de ventilation dans la salle de classe.

95- Bardage entre les différents blocs 96- Localisation des ouvertures entre les blocs 97- Photo de maquette montrant le moucharabieh

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III / ESPACES AJOURÉS

2- MAÎTRISE DES ÉLÉMENTS NATURELS a- La ventilation

Ces diagrammes de confort mettent en relation l’inertie thermique et le ventilation naturelle du bâtiment. On voit alors que l’inertie thermique correspond à un confort d’hivers alors que la ventilation naturelle permet un usage d’été.

Ainsi, la salle de cours de l’étage est utilisée au printemps et en été alors que la salle du bas correspond d’avantage à une utilisation d’hivers et d’automne. Cela instaure un certain nomadisme au sein du bâtiment typique du mode de vie traditionnel des habitants du Bangladesh.

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98- Diagramme de confort de printemps en fonction de l’inertie thermique et de la ventilation naturelle

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99- Diagramme de confort d’automne en fonction de l’inertie thermique et de la ventilation naturelle

100- Diagramme de confort d’été en fonction de l’inertie thermique et de la ventilation naturelle

101- Diagramme de confort d’hivers en fonction de l’inertie thermique et de la ventilation naturelle

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III / ESPACES AJOURÉS

2- MAÎTRISE DES ÉLÉMENTS NATURELS b- Luminosité

La lumière naturelle n’est jamais directe à l’étage. En effet, les bardages venus se rattacher à la structure permettent ces ambiances lumineuses. Le bardage est fait en bambou: ils sectionnent la chaume en deux parties de façon longitudinale afin d’en extraire les fibres végétales permettant le tissage des ces dernières (pour la véranda). Sinon c’est le bambou lui même qui sert de panneau. Assemblés à intervalles très resserré, la pénétration de la lumière est alors diffuse.

102 103

Ces stratégies permettent de se protéger du soleil afin d’étudier et d’évoluer dans de bonnes conditions.

102- Technique de fabrication du bardage 103- Moucharabieh 104

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104- Schéma du contrôle de la lumière dans la salle de classe 105- Bardage


IV/ PROTECTIONS

1- DISPOSITIFS CONTRE LA PLUIE a- La toiture

Contre le climat tropical, le DESI Center s’est armé pour faire face aux intempéries. Etant en majeure partie en terre, il à dû se protéger à la fois des fortes moussons qui sévissent dans le pays, mais aussi du soleil omniprésent. Traditionnellement, on parle de «bonnes bottes et bon chapeau». Les bonnes bottes représentant les fondations en béton cyclopéen, le bon chapeau représenterai alors la toiture.

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106- D’après cette photo du DESI Center, on voit en effet que le débord de toiture est conséquent


IV/ PROTECTIONS

1- DISPOSITIFS CONTRE LA PLUIE a- La toiture

Nous avons tout d’abord supposé que le débord de la toiture était dimensionné en fonction du soubassement afin de protéger la terre des murs de la pluie. En effet, plus la hauteur du soubassement est importante et moins le débord de toiture a besoin d’être conséquent; à l’inverse, plus le soubassement est petit et plus le débord de toiture nécessite d’être grand.

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107- 108- Hypothèses sur le dimensionnement du débord de toiture

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IV/ PROTECTIONS

1- DISPOSITIFS CONTRE LA PLUIE a- La toiture

Cependant, la toiture ne permet pas de protéger entièrement le mur des intempéries, selon l’angle de la pluie il est inefficace. Effectivement, c’est le ruissellement des eaux qui risquent le plus d’endommager le bâtiment. De ce fait, il à été disposé un enduit de terre sur les parois extérieures. Ce dernier est facile d’application, de manière, en cas d’usures, à pouvoir le remplacer aisément. C’est ce genre de technique qui est utilisé pour la Mosquée de Djenne. La réparation de ce monument est devenu rituel, chacun amène sa part à l’édifice qui est ainsi toujours restauré. Les habitants se servent des morceaux de bois émergents de la façade pour escalader et atteindre le sommet. De plus, c’est de génération en génération, que cette transmission d’une tradition s’effectue.

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109- Les femmes bengali s’occupant de l’enduit en terre 110

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110- 111- Habitants rénovant la Mosquée de Djenne


IV/ PROTECTIONS

1- DISPOSITIFS CONTRE LA PLUIE b- Système anti-ruisselement

Afin de limiter le ruissellement d’eau sur la façade, des petites casquettes ont été disposées. Celle-ci sont faites en lamelles de bambou et agissent comme un système de «goutte d’eau». Elles sont nombreuses sur les murs n’ayant pas de débord de toiture et uniques là où il est présent.

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113

114 112- 113- «Casquettes» anti-ruissellement sur le bloc sanitaire sans débord de toiture

114- «Casquette» unique sur le bloc de salles de classes où le débord de toiture est important

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IV/ PROTECTIONS

2- DISPOSITIFS CONTRE LE VENT La question de l’arrachement

Cependant, sachant que le débord de toiture est conséquent et qu’il est en pente, il risque de s’arracher. En effet, l’air s’infiltrant dans la salle de lasse par le bardage, crée une dépression sous la toiture. Nous avons émis l’hypothèse que l’excédent de terre de 80cm par dessus la structure du plancher permettrait d’éviter l’arrachement de la toiture.

TÔLE ONDULÉE EN ACIER ρ = 7500 kg / m3 V = 13 x 13 x 1,5 x 0,003 = 0,76 m3 Pp = 7500 x 0,76 x 10 Pp = 57 037 N

POUTRES EN BAMBOU Poids d’un bambou de 10,50 m = 254,8 N Poids de 55 bambous = 14 014 N

POIDS TOTAL DE LA TOITURE P = 57 037 + 14 014 P = 71 051 N

On considère que le poids de la toiture s’appliquant à un poteau est réparti sur une surface de bauge de 0,75m par 0,75m. Soit ρbauge = 1500 Kg/m3 Pp1 = 1500 x (0,75 x 0,75 x0,80) x 10 Pp1 = 6750 N

SUPERFICIE TOTALE DE LA TOITURE S = 13 x 13 S= 169 m²

SUPERFICIE DE LA BAUGE DU R+1 S1= 0,75 x 13 S1 = 9,75 m²

On obtient donc le poids qui s’applique sur toute la longueur de la bauge du R+1 P2= 420 x 9,75 P2= 5 000 N

P1 + P2 = 11 750 N

LE VENT Pref = 0,5 x 1,25 x 25² Pref= 390 Pa soit 390 N/m²

On obtient alors : Coeff de sécurité = 11 750 / 3 802 Coeff de sécurité = 2,35

Fvent = 390 x 9,75 Fvent= 3802 N 41

POIDS DE LA TOITURE PAR M² P = 71 051 / 169 P= 420 N/m²


IV/ PROTECTIONS

3- DISPOSITIFS CONTRE LE SOLEIL a- La toiture

Puisque le débord de toiture à lui seul ne peut protéger entièrement contre la pluie, il se peut qu’il agisse comme une protection contre le soleil. En effet, le Bangladesh étant dans un climat tropical et dans une zone sans masques, le bâtiment est exposé de toutes part aux rayons lumineux et à la chaleur. Ainsi, le débord de toiture ne se situant principalement qu’au niveau du bloc de salles de classes, permettrait-il de se prémunir contre la lumière trop vive en journée?

D’après ces photographies effectuées à partir du gnomon correspondant à la latitude du Bangladesh, on voit que l’incidence de l’ombre portée de la toiture met à l’ombre une bonne partie du bâtiment tout au long de l’année.

115

29°

116

117

118

38°

115- Photo de gnomon de Janvier/Novembre à 15h. On peut voir que la façade Est est totalement à l’ombre. 116- Février/Octobre à 15h.

119

117- Mars/Septembre à 15h, 118- Avril/Août 15h

119- Mai/Juillet 15h 120- 21 Juin 15h

120

121

121- 21 Décembre 12h

42


IV/ PROTECTIONS

3- DISPOSITIFS CONTRE LE SOLEIL b- Les volets

Il est possible de remarquer que dans la salle de classe de l’étage, il y a un bardage muni de volets. Ces volets permettent eux aussi de maîtriser l’apport lumineux mais aussi d’augmenter la ventilation naturelle. Cela permettant de lutter contre la chaleur. Ces moyens mécaniques simples sont additionnés avec des dispositifs plus modernes, il y a en effet des doubles vitrages pour toutes les autres fenêtres. 122

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122- Dispositif de volets vue extérieure.

123- Ambiance intérieure de la salle de classe.

124- 125- 126- Fenêtres modernes


IV/ PROTECTIONS

3- DISPOSITIFS CONTRE LE SOLEIL b- Les volets

64°

127

128

127- Coupe schématique de l’angle du masque

127- Diagramme solaire combiné aux diagramme des iso_hauteurs avec masque

44


IV/ PROTECTIONS

3- DISPOSITIFS CONTRE LE SOLEIL c- Les ouvertures des fenêtres

Cependant, l’apport trop important de lumière dans la salle de classe de l’étage est contrebalancé avec le problème de l’apport insuffisant au rez-de-chaussé. Bien qu’Anna Heringer dise que l’arrondi des fenêtres viendrai d’un artisan trouvant cela «plus joli», il se peut que cela soit un dispositif pour faire pénétrer d’avantage de lumière dans l’espace massif. Nous avons pu vérifier cette supposition à l’aide de l’analyse des diagrammes solaires. Il en ressort que la forme de l’ouverture n’a pas d’impact sur la pénétration de la lumière dans l’espace.

130

129

131

129 - Ambiances lumineuses 130- Fenêtre ébrasée

130- Fenêtre à angle droit

45


/ CONCLUSION

Au travers de l’étude du DESI Center d’Anna Heringer, nous avons pu nous rendre compte de toute la portée sociale de son œuvre. Ce bâtiment réalisé au sein d’un climat difficile avec des matériaux locaux a demandé une compréhension mutuelle entre architecte et habitants. Elle a su prendre en compte les ressources naturelles disponibles sur le site et les allier avec le savoir faire des locaux tout en apportant la touche savante inhérente à son métier. Afin de réussir cette alliance des savoirs, elle a su transmettre ses connaissances au travers de la construction de son bâtiment, pour et par les usagers. En effet, l’intérêt est de permettre aux utilisateurs de le conserver et de l’entretenir sans aide extérieure, en étant autonomes. Transmettre en construisant, ne se fait cependant pas que dans un sens, chaque artisan a ajouté sa contribution à l’édifice en apprenant d’avantage à Anna Heringer sur les techniques de construction. De même que dans notre démarche de compréhension du bâtiment, nous avons voulu expé-

rimenter les matériaux et les techniques de mise en œuvre à petite échelle. C’est à force de pratique que l’expérience vient.

Ces analyses sociales sur le DESI Center nous font nous demander ce qu’il en est pour les œuvres humanitaires en général. Bâtir pour et avec les autres c’est enrichir et s’enrichir en échangeant des pratiques et des savoirs-faire. On reproche souvent aux organismes humanitaires de construire et de repartir ensuite, laissant les habitants avec les problèmes de réparation et d’entretien, sans ressources pour y subvenir.

46


/ CONCLUSION

Construire de manière soutenable ce n’est pas seulement utiliser des matériaux locaux, c’est aussi une réflexion portée sur le futur et la pérennité de l’œuvre. Ce qui restera de l’expérience du DESI Center c’est qu’après le départ d’Anna Heringer, les locaux savent qu’ils sont désormais capables de construire par eux-même et de transmettre.

Ce projet a su allier éthique, technique et esthétique.

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/ BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages

ANGER Romain, FONTAINE Laeticia, Bâtir en terre : du grain de sable à l’architecture, éd. Belin et cité des sciences et de l’industrie, 2009, 223 pages. FREY Pierre, Velez Simon architecte :la maîtrise du bambou, Actes Sud, 2013, 253 pages.

GAUZIN-MÜLLER Dominique, Habiter écologique – quelles architectures pour une ville durable ?, Actes Sud et cité de l’architecture et du patrimoine, 2009, 400 pages. HOUBEN Hugo, GUILLAUD Hubert, Traité de construction en terre, CRATerre, éd. Parenthèses, Marseille, 2006, 355 pages. SARANO Florence, Aimer, aimer, aimer : bâtir, éd. Villa Noailles, 2013, 113 pages.

SARANO Florence, BLANC Jean-Pierre, Tyin/Anna Heringer : construire ailleurs, éd, villa Noailles, 2010, 93 pages.

RÖHLEN Ulrich, ZIEGERT Christof, Construire en terre crue : construction, rénovation, finitions, éd. Le Moniteur, Paris, 2013, 313 pages.

Revues

Sites internet

AA, achitecture d’aujourd’hui n°381, janvier-février 2011.

www.anna-heringer.com www.craterre.org

www.bambouscience.fr

www.openarchitecturework.org/projects/2946 www.sciencefrontieres.com www.solidarites.org www.unicef.org

www.everyculture.com/A-Bo/Bangladesh.html

Vidéos

Les routes de l’impossible, Bangladesh « les galériens du bambou », France 5. Conférences d’Anna Heringer, Youtube.

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/ ANNEXES

R+1 1:100

RDC 1:100 50


/ ANNEXES

Élévation Est 1/100

Élévation Ouest 1/100

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/ ANNEXES

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/ ANNEXES

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