02. Analyse / "Cutting holes into the trash and other stories."

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Andrea Zanderigo & Pier Paolo Tamburelli (BAUKUH)

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Studio de projet/sĂŠminaire Jean-Marc Chancel - ENSAM S8 - 2017


Carnet de référence #2 Texte

04. Metlaine Léa Pilarczyk Cécile

«Cutting holes into the trash and other stories», «Faire des trous dans le bordel et autres histoires»

Pier Paolo Tamburelli & Andrea Zanderigo Revue 2G no. 63, 2012, p. 19 - 25

Ce texte a été publié en 2012 dans la revue 2G n°63 consacrée au travail d’OFFICE KGDVS. Il est accompagné de deux autres textes introductifs du critique anglais Ellis Woodmanet et de l’historien américain Joan Ockman, ainsi que des textes des architectes eux-mêmes, et d’une interview avec Enrique Walker. L’article « Faire des trous dans le bordel et autres histoires » a été écrit par Pier Paolo Tamburelli et Andrea Zanderigo. Ils sont deux des six architectes associés de l’agence italienne Baukuh (basée à Milan et Gênes depuis 2004), connue pour allier réflexion critique et démarche pragmatique. « Ils se veulent éloignés de tout formalisme, dont chaque grand principe et projet découlent d’études de cas. » 1 Pier Paolo Tamburelli (né en 1976) a étudié à l’université de Gênes et à l’institut The Berlage de Rotterdam, où il a également enseigné. Il a aussi transmis son savoir dans de nombreuses villes du monde telles que: Alep en Syrie, Munich, Porto, Chicago et Milan. Il est l’un des fondateurs et éditeurs du magazine d’architecture San Rocco, où il travaille en collaboration avec Kersten Geers et Andrea Zanderigo.

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Ce dernier, (né en 1974), a étudié l’architecture à Venise. Il enseigne en collaboration avec Kersten Geers à l’académie d’architecture de Mendrisio, au Columbia University à New-York, et à l’EPFL de Lausanne. Il y a donc des liens très étroits entre les auteurs de l’article « Faire des trous dans le bordel et autres histoires », et OFFICE KGDVS. Le choix de la revue 2G, de demander à ces deux auteurs italiens de présenter le travail de cette agence belge n’est donc pas le fruit d’un hasard. San Rocco est une revue qui apporte à la critique d’architecture un regard transversal en proposant des grands thèmes et des sujets polémiques pour débattre de ce qu’est cette discipline aujourd’hui. En ce sens, selon Tamburelli et Zanderigo, le travail de KGDVS entre en accord avec les questions que peut soulever San Rocco, et leur travail est remarquable dans le fait de penser une nouvelle manière de faire de l’architecture dans un contexte post-moderne.

1- AA L’architecture d’aujourd’hui, n°381, 2011, p.31

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Le texte « Faire des trous dans le bordel et autres histoires » se compose de 9 parties bien distinctes: Faire des trous dans le bordel, cynisme bouddhiste, aura, pièces, carré, identité à soi-même, isolation, couleurs, et ignorance. Chaque partie est traitée avec un grand thème, et les auteurs le présente comme une boîte à outils pour décomposer et comprendre la méthode de travail de KGDVS. Dès lors, en ressort alors un glossaire.

GLOSSAIRE FAIRE DES TROUS DANS LE BORDEL: « les espaces tirent leur pouvoir du bordel qui les environne » CYNISME BOUDDHISTE: « attitude radicale et indifférente à la ville », « urbanisme égocentrique » AURA: « contexte post-moderne, l’aura est perdue mais aussi la conscience de sa perte » PIECES: « une pièce qui connecte des fragments choisis (l’inclus, l’entre-deux, l’exclu) » CARRÉ: « un outil, usage systématique »

COULEURS: « la saleté est essentielle à l’architecture » IGNORANCE: « condition fondamentale (et aussi problème fondamental) de l’architecture contemporaine »

Ces différentes notions nous permettent de comprendre qu’OFFICE KGDVS ont établit un protocole de travail bien définit. Pour chaque projet, ils usent de cette méthode systématique; que ce soit par leur attitude orgueilleuse face à un territoire, ou combinant un agencement de pièces dans des pièces, créant ainsi un univers déconnecté du contexte. D’où, le titre de l’article « Faire des trous dans le bordel ». Dans le paragraphe « PIECES », Pier Paolo Tamburelli et Andrea Zanderigo parlent du fait que: « le jeu conserve une certaine cruauté: dans un paysage continu d’additions, ‘‘ça + ça’’, apparaît soudain un minuscule ‘‘soit l’un, soit l’autre’’».2 Où « le jeu » équivaut au processus systématique du projet, « le paysage continu d’additions » serait le bordel (pour reprendre leur terme), et le « soit l’un, soit l’autre » s’apparenterait à la construction, donc au choix qu’a fixé KGDVS pour leur projet. Tout est une question de systématisme, de protocole et de choix finaux. Tels sont les termes qui pourraient définir la manière de travailler de cette agence.

IDENTITÉ A SOI-MÊME: « réduction et répétition d’une gamme limitée d’éléments » ISOLATION: « couteux détail, capable de convoquer et résumer toute la complexité du bâtiment »

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2- 2G, n°63, Office Kersten Geers David Van Severen, Editorial Gustavo Gili, 2012, p.21

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Carnet de référence #2 Texte

Afin d’agrémenter ce texte qui prend l’apparence d’une « boîte à outils », et de continuer « les autres histoires » dont parle le titre, il serait intéressant d’y ajouter deux parties, telles que: projets théoriques, pour la première, et stratégie pour la suivante. Cela permettra d’ajouter deux outils de compréhension au processus de travail d’OFFICE KGDVS. PROJETS THEORIQUES Le travail de Kersten Geers et David San Severen s’est tout d’abord fait remarqué pour leurs projets théoriques, ceux restés au stade de papier. Ces types de projets sont, notamment, ceux qui leur ont permis de se faire connaître et reconnaître par leurs pairs. C’est au cours de ces réflexions que s’est forgée leur position sur le travail de la limite, du périmètre, de l’enclos. En interrogeant différents aspects de l’architecture et de l’espace, KGDVS s’est construit une identité au travers de ces projets. Par leur travail théorique, une attitude formelle s’est dégagée, qu’ils adopteront lors de projets construits.

murs représentent un cadre, une inertie spécifique contre l’instabilité de la vie en elle-même. C’est une clôture figée à l’intérieur de laquelle la vie peut se faire. Ce projet théorique est important, car tout comme la pensée que Dogma essaie de développer: un projet de papier est tout aussi important qu’un projet construit, il impactera, à sa manière, la société dans laquelle nous évoluons, nous vivons. Le processus de soulever des questions d’urbanisme, d’architecture et de mode de vie est alors en marche pour le travail de KGDVS. La question de la limite et du périmètre est également traitée dans ce projet, qui restera un élément conducteur de leur travail par la suite.

OFFICE 19, A GRAMMAR FOR THE CITY Conception d’une nouvelle capitale administrative Concours international, 1 er prix en collaboration avec Dogma. Il s’agit d’une ville conçue pour accueillir 500 000 habitants. Ce projet monumental est organisé comme une séquence de pièces mais à l’échelle de la ville, et qui forme de grands espaces délimités par des murs habités. Ces derniers, constituent les deux tiers de la masse construite de la ville. Les espaces entre les murs sont des espaces sans contenu, ouverts au développement urbain. Ces 04.Metlaine Léa & Pilarczyk Cécile

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OFFICE 19, Grammar for the city, Corée du Sud, 2005 Studio de projet/séminaire Jean-Marc Chancel - ENSAM S8 - 2017


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OFFICE 15, BORDER GARDEN Projet de passage de frontière entre les états unis et le Mexique.

à interroger des maux de notre société, à savoir les flux migratoires. D’autant plus, OFFICE 35 s’inscrit dans la lignée de leur processus de travail avec l’usage du carré comme outil pour penser le projet.

Premier prix d’une compétition internationale. Un mur de 9m de haut clôture un espace rectangulaire qui interrompt la frontière, fait office d’oasis dans ce paysage désertique. Un appel à un espace rêvé, désiré. On trouve une grille de palmiers à l’intérieur, cela devient un point de référence dans le paysage. On retrouve la simplicité du dessin, de la forme. Bien que le projet soit d’une simplicité apparente, il n’en reste pas moins fort dans son concept, son propos et sa forme. OFFICE 35, CITE DE REFUGE Projet pour la Biennale d’architecture de Rotterdam, mention spéciale. La ville de Ceuta est une enclave espagnole sur le sol marocain. Le projet représente un passage frontalier, un espace de réfugiés dans le no man’s land entre deux villes (Ceuta et Tanger), mais aussi entre deux pays et deux continents. Cette ville est formée par un grand carré de 480mx480m entouré d’une structure en colonnades comme un rempart épais. A l’intérieur du mur on trouve les infrastructures du poste frontalier. La place est laissée intacte, sans programme. Ce projet reflète l’impuissance à trouver des solutions aux problèmes qui se posent sur cette frontière. Il étudie aussi la ville sous sa forme la plus radicale, comme un acte délibéré, une décision politique. Avec ce projet, KGDVS prend un réel parti pris et montre la puissance que peut avoir un projet théorique 04.Metlaine Léa & Pilarczyk Cécile

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OFFICE 15, Border Garden, Mexique / USA, 2005

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OFFICE 35, Cité de refuge, Ceuta, Espagne / Maroc, 2007 Studio de projet/séminaire Jean-Marc Chancel - ENSAM S8 - 2017


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STRATEGIE Kersten Geers et David San Severen usent de diverses stratégies pour se faire remarquer ou se démarquer. Par exemple, pour OFFICE KGDVS, l’usage de la couleur est: « juste l’absence désespérée de raison fondamentales à l’architecture, l’arbitraire total d’une décision sans raison »3. Cette pensée s’applique dans des projets tels que OFFICE 61 « Chamber of commerce », où les cages des escaliers sont peintes d’un rouge ou jaune éclatants. Mais bien plus qu’un acte injustifiée, cela permet au bâtiment de se voir de loin. En effet, l’enveloppe de ce projet s’apparente à une cage de verre. Ainsi, la couleur se remarque à une certaine distance de l’édifice, contrastant avec le paysage environnant (bien souvent enneigé, et donc blanc), créant alors un écho avec l’intérieur de celui-ci. Lors de la biennale de Venise de 2008, dans le pavillon belge « After the party », l’usage de la couleur via des confettis disposés au sol, leur a permit d’injecter une notion de « saleté, qui est essentielle à l’architecture »4. Selon Pier Paolo Tamburelli et Andrea Zanderigo, la saleté amène de la vie à un projet. Cela amène à faire un parallèle avec le travail des architectes français Lacaton et Vassal, qui prennent en photos leurs projets qu’une fois que les usagers ont pris possession des lieux. Cela ajoute de la vie à un espace qui originellement a été livré vide. Ce qui n’est pas le cas d’OFFICE KGDVS, où il y a un réel contrôle de leur image. Mais avec le pavillon « After the Party », KGDVS est allé au delà du fait d’intégrer de la vie à leur projet: ils ont déplacé la vie de leur projet dans toute la biennale, et ce de manière calibrée, pensée dès le début. En effet, les visiteurs en parcourant le pavillon d’OFFICE, se retrouvaient avec des confettis collés aux semelles de leurs chaussures, et en se déplaçant vers d’autres pavillons, ils y amenaient 04.Metlaine Léa & Pilarczyk Cécile

et y déposaient quelques confettis. Cela leur a alors permis de faire un réel acte de communication, où des traces de leurs projet se retrouvaient dans toute la biennale. La couleur et la saleté dans ce projet a marqué les esprits des visiteurs et a impacté sur tous les pavillons de la biennale de cette année là. Avec cette idée des confettis, qui demande peu d’efforts, OFFICE KGDVS ont su se démarquer, ils étaient partout.

3- 2G, n°63, Office Kersten Geers David Van Severen, Editorial Gustavo Gili, 2012, p.24 4- ibid. 8


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OFFICE 61, Chamber of commerce, Kortrijk, Belgique, 2008-2011 Studio de projet/sĂŠminaire Jean-Marc Chancel - ENSAM S8 - 2017


Carnet de référence #2 Texte

Propagation des confettis déposés au sol du pavillon belge dans tous les pavillon de la biennale.

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OFFICE 50, After the party, Biennale de Venise, 2008 10


Par leurs documents graphiques, Kersten Geers et David San Severen sont aussi de fins stratèges. Chaque produit du bureau est considéré comme un projet à part entière (maquette, dessin, perspective), comme une oeuvre. Ils accordent tellement d’importance à leurs représentations et la communication de leurs projets, qu’ils ont d’ailleurs exposé une rétrospective de leur travail aux Beaux-arts de Bruxelles en 2016. Ils travaillent beaucoup en collages conceptuels, « cut out », comme ils les appellent. Mettant ainsi fin à l’ère des photomontages 3D réalistes (« renders »). Ils ont actualisé la manière de travailler des années 50, 60, et 70. Ils renouent avec les documents graphiques de ces années-là, comme les plans d’Alison et Peter Smithson, ou bien les collages de Superstudio, tout en utilisant les techniques du XXI ème siècle, comme par exemple le logiciel Photoshop. OFFICE KGDVS portent une réelle importance à l’impact que peut avoir une image. Ils rompent avec la tradition des images réalistes, et remettent au goût du jour, des collages simples, percutants, avec des jeux de contrastes et couleurs. Les codes de leurs documents graphiques sont bien souvent repris par les étudiants d’écoles d’architecture de nos jours. Ils ont su élever leur représentation au titre d’ « image qui fonctionne », non pas comme un modèle à suivre, mais malgré eux, ou bien comme une stratégie élaborée, ils se sont créés une identité propre à leur agence, qui sera reconnue et imitée. « Une forme achevée et close dans sa perfection d’organisme exactement calibré, ouverte au moins en ce qu’elle peut être interprétée, sans que son irréductible singularité en soit altérée ».5 5- AA L’architecture d’aujourd’hui, n°381, 2011, p.19, extrait de L’Oeuvre Ouverte, Umberto Eco, 1965

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Alison et Peter Smithson, Coventry Church Competition Design, Angleterre, 1951

Supersutdio, Microevent - Microenvironment, 1972 04.Metlaine Léa & Pilarczyk Cécile

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CONCLUSION

- BIBLIOGRAPHIE

OFFICE KGDVS est une agence qui a su au fil des années passer de leurs projets théoriques à des projets réalisés, tout en gardant les grands principes de leurs axes de recherches. Avec ce texte, Pier Paolo Tamburelli et Andrea Zanderigo, nous font l’éloge de ces deux architectes. Par la répétition d’un protocole de travail et de mise en oeuvre dans le processus du projet bien déterminés, Kersten Geers et Danvid San Severen ont mis en place des porosités visuelles maîtrisées. Leurs images de communication sont bien plus que de simples représentations, elles équivalent au projet. L’espace futur qui sera projeté est déjà présent. Bien que KGDVS, paraissent présenter des solutions justes, comme de simples évidences, leur posture orgueilleuse par rapport au contexte d’un site n’en reste pas moins critiquable. En réalité, peut être que toute l’efficacité et la beauté de leurs projets, débutent et résident dans le fait d’adopter une attitude indifférente et donc provocatrice face à un territoire, ainsi qu’une bonne communication de leur travail.

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2G, n°63, Office Kersten Geers David Van Severen, Editorial Gustavo Gili, 2012, 176 pages. El croquis n°185, editeurs Fernando Márquez Cecilia et Richard Levene, 2016, 262 pages. AA L’architecture d’aujourd’hui, n°381, 2011, 178 pages. AA L’architecture d’aujourd’hui, n°413, 2016, 144 pages.

- SITES INTERNET http://www.officekgdvs.com http://www.arcenreve.com/Pages/2016/office-kgdvs-02.html https://www.franceculture.fr/conferences/ecole-nationale-superieuredarchitecture-et-de-paysage-de-lille/office-kersten-geers https://www.architonic.com/en/project/office-kersten-geers-david-vanseveren-after-the-party-venice-biennale-2008/5100053

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