Le Fil 9 novembre 2017

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À l’écoute des yeux p10

L’art d’enseigner p8-9

Volume 53, numéro 9 9 novembre 2017

photo Marc Robitaille

Ensemble vers l’avenir

Animée par la rectrice Sophie D’Amours, la quatrième et dernière consultation publique sur l’avenir de l’Université s’est déroulée sur le thème « Ensemble ». p3


recherche Jacques Simard et Angelo Tremblay honorés par l’Acfas

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Les deux lauréats des prix de l’Acfas, Jacques Simard et Angelo Tremblay. photos Marc Robitaille

L’Association francophone pour le savoir – Acfas décerne des prix pour l’ensemble de leur carrière aux deux chercheurs de la Faculté de médecine par Jean Hamann Les professeurs Jacques Simard et Angelo Tremblay, de la Faculté de médecine, ont été honorés le 8 no vembre à Montréal lors de la traditionnelle cérémonie annuelle de remise des prix de l’Association francophone pour le savoir – Acfas. Depuis 1944, l’Acfas décerne des prix qui récompensent des chercheurs pour leur apport exceptionnel à l’avancement des connaissances dans leur domaine. Jacques Simard, du Département de médecine moléculaire, a reçu le prix Léo-Pariseau, récompensant un chercheur dont les travaux et les actions ont fortement influencé le do maine des sciences biologiques ou des sciences de la santé. Membre du Centre de recherche du CHU de Québec – Université Laval, le professeur Simard est surtout connu pour sa contribution à l’avancement des connaissances dans le do maine de la génétique des

cancers du sein et de l’ovaire. Ses travaux ont conduit, entre autres, à la découverte des gènes BRCA1 et BRCA2, qui augmentent le risque des cancers du sein et de l’ovaire ayant une composante héréditaire. La découverte de ces gènes de susceptibilité a ouvert la voie au développement d’un test de dépistage de la prédisposition à ces cancers qui est maintenant utilisé partout dans le monde. Au cours des dernières années, le chercheur et son équipe ont joué un rôle majeur au sein d’un consortium international dont les travaux ont mené à la dé couverte de 179 va riations génétiques qui in fluencent le risque de cancer du sein. Ces travaux ont conduit à une définition plus précise des profils génétiques prédisposant à ce cancer (pour plus d’info, voir www.lefil.ulaval.ca/ risque-genetique-de-cancersein-se-precise).

Angelo Tremblay, du Département de kinésiologie, a reçu le prix Jacques-Rousseau, récompensant un chercheur dont les travaux transcendent les frontières scientifiques. Détenteur d’un baccalauréat en éducation physique, d’une maîtrise en nutrition et d’un doctorat en physiologie, le professeur Tremblay mène des recherches qui marient activité physique, alimentation et équilibre énergétique.

Chercheur imaginatif toujours à l’affût de nouvelles idées à tester, il n’hésite pas à sortir des sentiers battus pour étudier, sous des angles d’attaque parfois insolites, l e s qu e st i o n s t o u ch a n t l’équilibre énergétique. Parmi l’éventail d’éléments dont il a mesuré l’influence sur la prise ou la perte de poids, mentionnons le pi ment fort, le café, le thé vert, l’alcool, les produits laitiers, les probiotiques, la durée et la qualité du sommeil, les signaux de satiété, la baisse de la thermogénèse concomitante à une perte de poids, les fringales nocturnes et le travail intellectuel.

On peut le lire en ligne à lefil.ulaval.ca et s’abonner gratuitement à un avis de parution électronique.

Le journal de la communauté universitaire Fondé en 1965, Le Fil est un hebdomadaire publié 29 fois par an par la Direction des communications de l’Université Laval et distribué gratuitement sur le campus.

Vous désirez proposer un sujet d’article ? Écrivez-nous à l’adresse le-fil@dc.ulaval.ca au plus tard le mercredi midi précédant la prochaine parution. Les textes soumis doivent comporter le nom et le numéro de téléphone de leur auteur. Écrivez-nous ! Le Fil accueille vos idées avec plaisir. Le contenu de ce journal peut être reproduit à condition de mentionner la source et l’auteur.

Depuis 1944, l’Acfas décerne des prix qui récompensent des chercheurs pour leur apport exceptionnel à l’avancement des connaissances

Rédaction Éditeur : Jacques Villemure, directeur des communications Rédactrice en chef : Claudine Magny Journalistes : Matthieu Dessureault, Jean Hamann, Yvon Larose Collaborateurs : Jenny Aumais, Pascale Guéricolas, Stéphane Jobin, Mathieu Tanguay Collaborateurs au Web : Carl Bélanger, Thierry Mellon Rédactrice-réviseure : Manon Plante Agente de secrétariat : Sophie Leroux

Production Infographie : Geneviève Bolduc, Service de reprographie de l’Université Laval Impression : TC Imprimeries Transcontinental, Québec (Québec)

Placements publicitaires Claudine Trudel 418 656-2131 poste 6415 Dépôt légal Bibliothèque nationale du Québec, ISSN 022-1-1965

Pour nous joindre 2325, rue de l’Université, local 3108 Québec (Québec) G1V 0A6 Téléphone : 418 656-2131 poste 4687


actualités UL

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Je souhaite que la communauté universitaire soit fière de ses réalisations et qu’elle ait toujours envie d’aller plus loin

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«

L’événement a attiré plus de 175 personnes, en particulier des étudiants et des employés.

Ensemble avec audace La quatrième et dernière consultation publique sur l’avenir de l’Université s’est déroulée sur le thème « Ensemble » par Yvon Larose Que pouvons-nous faire ensemble pour que l’Université se distingue avec des propositions uniques ? Comment favo­ riser les partenariats avec les milieux ? Et comment mobiliser les membres de la communauté universitaire autour d’objectifs communs ? Ces questions ont servi à alimenter les échanges, nombreux, qui se sont déroulés le mardi 7 novembre, à l’atrium Jean-Guy-Paquet du pavillon Alphonse-Desjardins, à l’occasion du quatrième et dernier forum de consultation publique sur l’avenir de l’Université. Les résultats de ces forums contribueront à la réalisation du prochain plan stratégique de l’établissement, le Plan stratégique UL 2022, lequel sera dé­­posé d’ici quelques mois au Conseil d’administration. L’exercice de consultation du 7 no­­ vembre s’est déroulé sur le thème « Ensemble ». Il a attiré plus de 175 personnes, en particulier des étudiants et des employés. L’animation avait été confiée à la rectrice Sophie D’Amours. L’accompagnaient les cinq vice-recteurs et vice-rectrices ayant animé les forums de consultation précédents. Il s’agit de Robert Beauregard, vice-recteur exécutif et vice-recteur aux études et aux af­faires étudiantes, de Rénald Bergeron, vice-­recteur aux affaires externes, internationales et à la santé, de Lyne Bouchard, vice-rectrice aux ressources humaines, d’Eugénie Brouillet, vice-rectrice à la recherche, à la création et à l’innovation, et d’André Darveau, vice-recteur à l’administration. Était également présente la secrétaire générale, Monique Richer.

Durant deux heures, une vingtaine d’intervenants ont abordé une diversité de sujets. Le tout premier commentaire portait sur la reconnaissance de l’Université Laval comme la plus universitaire des universités du troisième âge au monde. Un intervenant a dit souhaiter que l’Université devienne le porteur du rêve d’un Québec en santé durable. Une intervention a porté sur l’arrimage du numérique avec l’humanisme, de la technologie avec les sciences humaines. On a aussi parlé de l’intégration des étudiants étrangers sur le plan de la pédagogie, de la création d’un service de règlement des différends, de la reconnaissance de l’apprentissage par l’erreur, et de la création de forums virtuels avec

Les résultats de ce quatrième forum, animé par la rectrice Sophie D’Amours, contribueront, tout comme ceux des trois premiers, à la réalisation du prochain plan stratégique de l’établissement.

les quelque 150 000 diplômés UL, actifs ou retraités, de la région de Québec. « Ce qui me rendrait très fière de l’Université, très clairement, c’est qu’un jour le succès

Les cinq vice-recteurs et vice-rectrices ayant animé les forums de consultation précédents étaient présents. photos Marc Robitaille

de notre établissement, celui de l’étudiant, celui de l’employé, soit notre succès à tous, a déclaré la rectrice en guise de conclusion. Je souhaite que la communauté universitaire devienne une grande équipe qui soit fière de ses réalisations et qui ait toujours envie d’aller plus loin. On peut aller plus loin et nous sommes appelés à le faire. La vie des universités n’est pas figée dans le béton. Il y a des me­­­naces autour de nous. Et il y a des opportunités. Ce à quoi nous sommes appelés, c’est capturer les opportunités. Et de faire en sorte que l’on devienne une grande université et que l’on continue dans cette quête, dans ce grand engagement qu’on a envers nos étudiantes et nos étudiants de tous âges, envers les milieux, la diversité, l’inclusion et l’international. » Au nom du comité de direction, la rectrice a chaleureusement remercié tous les membres de la communauté universitaire pour leur participation aux quatre forums. À noter que les personnes intéressées ont jusqu’au 17 novembre pour soumettre leurs idées et commentaires sur la plateforme ulaval.ca/ensembleUL.


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vie étudiante

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en bref

J’apprécie par-dessus tout l’indépendance intellectuelle de la recherche universitaire. J’aime avoir la liberté de choisir mes problèmes.

Invitation à rencontrer le sous-ministre pour le Sommet du G7 de 2018 L’Université Laval sera l’hôtesse du premier grand dialogue public où les participants seront invités à partager leurs points de vue sur les enjeux à privilégier lors de la présidence canadienne du G7. Peter M. Boehm, sous-ministre pour le Sommet du G7 de 2018 et représentant personnel du premier ministre du Canada, participera à la discussion, le jeudi 16 novembre, de 9 h 30 à 11 h 30, à l’atrium Jean-Guy-Paquet du pavillon Alphonse-Desjardins. De plus, les Hautes Études internationales (HEI) invitent les étudiants à prendre part, le 15 novembre, à 10 h 30, au local 2830 du pavillon Alexandre-Vachon, à une présentation de Peter M. Boehm, qui rappellera le rôle joué par le G7 pour répondre aux grands enjeux planétaires. Entrée gratuite. Inscription obligatoire à l’adresse suivante : https://fr.surveymonkey.com/r/G72018 photo Marc Robitaille

« Le domaine des systèmes complexes met à notre disposition de nouveaux outils pour étudier des questions auxquelles nous ne parvenons pas à répondre avec les approches traditionnelles », souligne Jean-Gabriel Young. photo Edward Laurence

L’univers complexe de Jean-Gabriel Young L’étudiant-chercheur décroche une bourse de 200 000 $ US pour explorer les mystères des systèmes complexes par Jean Hamann

La conférence Arctic Change 2017 L’Arctique subit une transformation sans précédent de son couvert de glace, de son pergélisol et de ses écosystèmes sous l’effet conjugué des changements climatiques, de l’industrialisation et de la modernisation. Les incidences de telles pressions se reflètent notamment sur la sécurité alimentaire et énergétique, la navigation, la souveraineté, la santé des communautés nordiques, le développement durable et l’exploitation des ressources. Pour discuter de ces défis, la conférence Arctic Change 2017 rassemblera à Québec, du 11 au 15 décembre, d’éminents chercheurs et des étudiants issus de domaines très variés, des représentants des communautés nordiques ainsi que des partenaires du gouvernement et de l’industrie. Avec plus de 1 500 participants attendus, cet événement sera l’une des plus importantes conférences internationales sur la recherche arctique jamais tenues au Canada. photo ArcticNet /

Cassandra Elphinstone

Du 11 au 15 décembre, au Centre des congrès de Québec. Pour plus d’info : www.arcticnetmeetings.ca/ac2017/index-fr.php. Pour s’inscrire : www.arcticnetmeetings.ca/ac2017/ pages/registration-fr.php

Qu’il s’agisse de l’expression d’un visage, de la silhouette d’un oiseau ou du profil d’un arbre, notre cerveau analyse continuellement les formes pour interpréter notre environnement. Le doctorant Jean-Gabriel Young, lui, comme d’autres physiciens qui s’intéressent aux systèmes complexes, utilise la forme des réseaux d’interactions entre des éléments, qu’il s’agisse des relations entre les espèces de fleurs et leurs pollinisateurs, entre les gènes et les maladies humaines ou entre les victimes, les suspects et les témoins de crimes commis dans une grande ville, pour décoder le monde. L’étudiant-chercheur du Département de physique, de génie physique et d’optique aura la chance de poursuivre en toute liberté sa quête du décryptage du monde par le prisme des réseaux d’interactions puisqu’il vient d’obtenir une bourse de 200 000 $ US de la Fondation James S. McDonnell pour mener des études postdoctorales dans le domaine des systèmes complexes. Mise sur pied en 1950 par le fondateur de la compagnie d’aviation McDonnell Aircraft, cette fondation accorde 10 bourses par année à des doctorants des quatre coins du monde

intéressés par cette jeune discipline scientifique. Cette bourse, qui donne une liberté totale aux lauréats quant au sujet qu’ils étudieront et au lieu où ils mèneront leurs travaux, rejoint les intérêts et les valeurs de JeanGabriel Young. « J’aime la vie de chercheur, dit-il. Je nourris une saine obsession pour la science, une fascination pour la complexité de la recherche sur la complexité et j’apprécie par-dessus tout l’indépendance intellectuelle de la recherche universitaire. J’aime avoir la liberté de choisir mes problèmes. » L’étude des systèmes complexes niche à l’interface de plusieurs sciences. « Nous étudions les systèmes constitués d’un grand nombre d’éléments qui interagissent entre eux et avec leur environnement et qui s’influencent mutuellement », rappelle l’étudiant-chercheur dont les travaux de doctorat sont supervisés par les professeurs Louis J. Dubé et Patrick Desrosiers. À l’opposé du réductionnisme qui tente de comprendre un phénomène en isolant ses composantes, l’étude des systèmes complexes repose sur la représentation numérique, la description mathématique et la modélisation de l’ensemble

des liens qui unissent les éléments du système. « Nous pouvons, par exemple, déterminer si ces liens sont le fruit du hasard ou s’ils cachent une structure qui révèle le mode de fonctionnement de ce système et qui permet de faire des prédictions », ajoute-t-il. La science des réseaux complexes se pratique sans équipement autre qu’un ordinateur et des idées. « Ce qui m’attire vers ce domaine est qu’il met à notre disposition de nouveaux outils pour étudier des questions auxquelles nous ne parvenons pas à répondre avec les approches traditionnelles, souligne le doctorant. Les problèmes que nous étudions sont toutefois bien réels et très concrets, par exemple quelle est la meilleure stratégie de vaccination contre une maladie infectieuse. » C’est la deuxième fois en quatre ans qu’un étudiant de l’équipe de Louis J. Dubé remporte une bourse de la Fondation James S. McDonnell. La chose n’est pas le fruit du hasard, mais bien le résultat du réseau d’interactions entre les mem bres du labo, estime Jean-Gabriel Young. « Le professeur Dubé croit que les étudiants de son équipe doivent profiter d’une indépendance guidée. Chaque nouveau venu est jumelé à un étudiant-chercheur plus ancien qui agit comme mentor. On se familiarise progressivement avec le do maine et, à partir des questions non résolues, nous

choisissons notre propre projet et nous le développons. Tous les membres de l’équipe mettent la main à la pâte pour aider les autres. Cette mise en commun se fait de façon informelle, souvent autour d’un café. C’est la manière de faire du labo. » Le résultat de cette collaboration est une productivité scientifique hors du commun : la liste de publications de Jean-Gabriel Young compte déjà 11 articles et 5 autres sont en préparation. « Un autre élément important de notre formation est que le professeur Dubé nous encourage à sortir du labo et à participer à des ateliers ou à des congrès à l’étranger. On revient la tête remplie d’idées », raconte l’étudiantchercheur qui a vu Santa Fe, Indianapolis, Ann Arbor, B e r ke l e y, S é o u l , Tu r i n , Zaragosa et Copenhague pendant ses études. La destination géographique qu’il entend choisir pour ses études postdoctorales n’est pas encore arrêtée, mais l’environnement qu’il cherche est clair. « Je veux me retrouver dans un milieu où je vais pouvoir choisir mon sujet d’étude et développer mon propre programme de recherche. J’aimerais faire partie d’une équipe multidisciplinaire où les problèmes concrets guident le travail théorique pour en assurer la pertinence. Enfin, je souhaite collaborer avec des personnes qui partagent cette vision de la recherche et qui aspirent à une indépendance partagée. »


sur le campus

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Plongée dans les eaux usées du campus Un équipement industriel de taille réelle permet aux étudiants en génie des eaux de combiner formations pratique et théorique sans sortir de leur pavillon par Pascale Guéricolas Peu de gens le savent, mais le pavillon Adrien-Pouliot abrite, dans sa nouvelle section, une usine-pilote. Sa fonction ? Per­ mettre aux étudiants et aux chercheurs de disposer à portée de main d’un outil de formation et de recherche unique qui traite en temps réel les eaux usées d’une centaine d’usagers du campus. Administrée par modelEAU, le groupe de recherche de la Chaire de recherche du Canada en modélisation de la qualité de l’eau dirigé par Peter Vanrolleghem, cette infrastructure de 2 M $ a été mise en place en 2015. La Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) y a largement contribué. « On l’oublie souvent, mais le traitement des eaux usées sauve da­­ vantage de vies à travers le monde que les soins médicaux », note Peter Vanrolleghem, directeur de modelEAU. Passionné par les technologies réduisant le plus possible les sources de pollution, ce professeur en génie des eaux a entièrement conçu cette usine-pilote. Ces installations se rapprochent grandement d’une bonne partie des stations traitant les eaux usées situées

un peu partout sur la planète, à une différence près cependant : l’ensemble de bassins, de pompes, de capteurs et de stratégies de con­ trôle dispose de la capacité d’évoluer. Autrement dit, cette structure flexible peut intégrer d’autres technologies dernier cri dans un futur proche. Installés dans un vaste local, deux bassins de 6 m3 accueillent 24 heures sur 24 les eaux usées en provenance du pavillon AgatheLacerte et de deux garderies du campus. Tandis qu’une grande partie des déchets solides vont directement dans le réseau d’égout de la Ville de Québec, les eaux usées entament un ballet à vitesse variable, selon la vitesse des pompes. « Les étudiants peuvent changer la température de l’eau, le niveau d’oxygène, le temps que l’eau reste dans le système pour le traitement, le tout à distance grâce à l’automa­t isation du système. Cela leur ­permet d’observer l’influence de différents facteurs sur l’écologie microbienne », s’enthousiasme Peter Vanrolleghem, le regard fixé sur une mousse brune bouillonnante.

L’usine-pilote est composée de bassins anoxiques munis d’agitateurs mécaniques et de trois bassins aérés par diffuseur, suivis d’un décanteur secondaire. C’est d’ailleurs ici que l’écologie microbienne joue son rôle en dégradant la pollution avec une efficacité remarquable.

Ces installations se rapprochent grandement d’une bonne partie des stations traitant les eaux usées situées un peu partout sur la planète

Peter Vanrolleghem, directeur de ModelEAU, veille au bon fonctionnement de l’usine-pilote en compagnie de Sey-Hana Saing, technicien de laboratoire.

Étudiant à la maîtrise en génie des eaux depuis janvier 2017, Romain Philippe n’avait jamais eu la chance de travailler avec un équipement de cette taille durant ses études en génie de l’environnement en France. Il a découvert l’usine-pilote à l’occasion d’un stage de quelques mois à l’Université Laval. Par la suite, l’étudiant français a entamé des études de deuxième cycle sous la direction du directeur de modelEAU. « Mes recherches portent sur la qualité des données recueillies par l’usinepilote, explique le jeune homme. Il faut trouver des moyens efficaces pour détecter rapidement les moindres défaillances des capteurs. À mon retour en France, je pense que l’expérience acquise ici va me permettre de me démarquer sur le marché du travail. » Gamze Kirim, une étudiante au doctorat, espère, elle aussi, tirer parti des travaux menés à l’usinepilote une fois rentrée chez elle en Turquie. Ingénieure en design industriel, elle s’intéresse aux différents moyens d’optimiser l’énergie consacrée au traitement des eaux. « On peut réduire les apports énergétiques nécessaires, mais également produire du biogaz à partir des boues produites par l’usine, par exemple », note la jeune fille. L’utilisation de certains liquides tirés des eaux usées permet, par exemple, à un fabriquant suisse de commercialiser de l’azote comme fertilisant. Il s’agit d’une expérience pas si éloignée de celle menée à l’usine-pilote. En effet, les eaux usées traitées par modelEAU ne contiennent plus cette sub­stance, contrairement à celles qui passent par les équipements de la Ville de Québec.

C’est dans ce grand bassin tampon que sont d’abord pompées les eaux usées en provenance du pavillon Agathe-Lacerte, avant d’être refoulées vers le décanteur primaire, pour un prétraitement qui élimine la plupart des particules. photos Louise Leblanc

« Désormais, on ne parle plus de stations d’épuration, mais de stations de récupération des res­sources de l’eau, ou StaRRE », explique Peter Vanrolleghem. Ailleurs dans le monde, l’utilisation de digesteurs pour traiter les boues facilite la production de méthane alimentant le chauffage de bâtiments, tandis que le papier de toilette filtré peut être transformé en carton. Pour

l’instant, les eaux traitées par l’usine-pilote du pavillon AdrienPouliot partent à la fin du cycle vers le réseau municipal. On pourrait cependant imaginer qu’un jour les jardiniers les utiliseront pour arroser les platebandes du campus ou que les boues seront traitées sur place. Déjà, le directeur de modelEAU rêve à cette phase 2 de l’usine-pilote.


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langues

Du doublage made in Québec Une étude révèle à quel point il est difficile de différencier le doublage d’un film étranger réalisé au Québec par rapport à un autre fait en France par Matthieu Dessureault Vous trouvez que Tom Hanks a la même voix que Woody Harrelson et que John Goodman parle un peu comme Arnold Schwarzenegger ? Ça s’explique. Les comédiens francophones qui font du doublage au cinéma sont souvent associés aux acteurs à qui ils prêtent leur voix régulièrement. Ce qui est plus compliqué, c’est de savoir si le doublage en question a été produit au Québec ou en France. En effet, les doublages québécois sont très similaires à ceux des Français. Ils sont produits dans un français neutre qui, selon plusieurs spectateurs, ne reflète pas une langue réellement parlée. Voici l’un des constats d’une étude réalisée sous la direction de Kristin Reinke, professeure au Départe­ ment de langues, linguis­ tique et traduction. Ce projet, qui sera présenté ce jeudi durant un séminaire de la Chaire pour le développement de la recherche sur la culture d’expression française en Amérique du Nord (CEFAN), a pour but de décrire la langue du doublage fait au Québec et de vérifier si les Qué­ bécois sont en mesure de l’identifier. Dans un premier temps, les chercheurs ont déterminé une série d’éléments linguistiques permettant

doublés de ce côté-ci de la frontière. Parfois, on y retrouve même des mots ou des expressions associés à la France, comme « cassepied », « causer », « boulot », « bousiller » et « se tirer ». La professeure voit là une attitude contradictoire par rapport à la langue. « D’un côté, les Québécois sont fiers de leur langue et, de l’autre, les doublages se font dans un français neutre. Cela pourrait s’expliquer par l’argument économi­ que : selon certains, un doublage sans traits québécois est plus facilement expor­­ table dans la francophonie. On peut également y voir des traces de l’ancienne in­­ sécurité linguistique des Québécois, qui ont pendant longtemps dévalorisé leur propre façon de parler. Dans les années 1950, à une époque où l’on corrigeait beaucoup le français québécois, les doublages étaient souvent réalisés par des comédiens français. Au­­ jourd’hui, les Québécois vivent mieux avec leurs différences linguistiques, mais cette insécurité a peut-être implanté des habitudes d’écoute. » Luc Ostiguy, professeur à l’Université du Québec à Trois-Rivières, et Caroline Émond, chargée de cours au Département de langues, linguistique et traduction, ont collaboré à la réalisation de l’étude. Lors du séminaire de la CEFAN, ces chercheurs présenteront leurs observations en compagnie de deux doubleurs professionnels, Sébastien Dhavernas et Benoit Éthier.

l’identification d’un doublage québécois. Pour ce faire, ils ont analysé les versions française et québécoise de onze longs-métrages récents, soit quatre comédies, quatre films à suspense et trois films d’animation. Par la suite, ils ont invité 42 personnes à écouter 292 extraits présentés de façon aléatoire. À l’aide d’un logiciel, ces participants devaient indiquer si la phrase entendue avait été produite par un Français ou par un Québécois. En moyenne, sur les 292 extraits diffusés, seulement 72 ont été identifiés correctement. « Le test de perception démontre que les Québécois ont du mal à identifier un doublage comme étant fait au Québec. Les traits typiquement québécois ne semblent pas les aider. Ce qui semble les aider, ce sont les voix des comédiens. Les Québécois reconnaissaient la voix de certains doubleurs très connus, et ce, même si l’énoncé ne contenait aucun trait québécois », explique Kristin Reinke. Parmi ces traits typiquement québécois, la professeure donne en exemple la prononciation des noms propres anglais, qui n’est pas francisée, contrairement à ce qui est fait en France. Or, d’une façon générale, on peut dire qu’il y Pour plus d’information a très peu de marques dis- sur l’événement : tinctives dans les films bit.ly/2yoLc7q

Au Québec, le doublage des films étrangers représente un enjeu à la fois politique, économique et identitaire. Sauf exception, le Québec ne peut exporter ses doublages en France en raison de la législation française.

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sur les cibles canadiennes d’immigration Q En résumé, le Canada investit dans le recrutement d’une main-d’œuvre étrangère qui ne peut travailler à la hauteur de ses qualifications une fois sur place…

Stéphanie Arsenault

Dès 2020, le Canada devrait accueillir 340 000 immigrants par an, soit 15 % de plus que ceux et celles qui arrivent ac­­ tuellement au pays chaque année. Le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté a annoncé cette ­nouvelle la semaine passée en mettant l’accent sur le manque actuel de maind’œuvre qualifiée au pays. Devant le déclin de la population active locale, les entreprises peinent, en effet, à recruter du personnel pour assurer leur croissance. L’opinion de Stéphanie Arsenault, professeure à l’École de service social et responsable scientifique de l’Équipe de recherche en partenariat sur la diversité culturelle et l’immigration dans la région de Québec (ÉDIQ).

Q Est-ce que le modèle de sélection des immigrants selon leurs qualifications fonctionne ?

R Il ne faut pas limiter le rêve d’immi­gration des gens arrivant au Canada à leur simple force de travail. Certains peuvent profiter de leur venue au pays, par exemple, pour retourner aux études ou changer de do­­ maine d’emploi. Leurs projets évoluent et changent. Il faut reconnaître, cependant, que beaucoup des nouveaux arrivants ont un choc quand ils prennent conscience de l’ampleur des obstacles qui les attendent sur le marché du travail. L’accès aux professions réglementées ou régies par un ordre professionnel demeure difficile. Cela reste vrai même si certaines organisations, comme l’Ordre des ingénieurs du Québec, ont mis en place plusieurs mesures pour mieux intégrer les gens formés à l’étranger. Beaucoup d’immigrants se sentent frustrés en constatant qu’on les a choisis pour travailler dans un certain domaine, mais qu’ils ne parviennent pas à obtenir un emploi au niveau de leurs qualifications. En fait, le gouvernement semble faire le pari que ces personnes-là, déjà scolarisées, urbanisées et formées, vont s’intégrer sans que les pouvoirs publics n’aient à investir pour leur accompagnement. De leur côté, les em­­ ployeurs disposent d’une main-d’œuvre qualifiée qu’ils peuvent embaucher à ­moindre coût puisque souvent elle possède des diplômes qui ne sont pas reconnus.

Q Pourquoi faire venir davantage d’immigrants chaque année si, dans les faits, les nouveaux venus ne parviennent pas à s’intégrer à la hauteur de leurs R Les nouveaux arrivants se heurtent aspirations ? encore à une grande résistance des employeurs. Ces derniers hésitent à les R Depuis très longtemps, les gouverneembaucher parce qu’ils pensent que les ments canadiens et québécois successifs immigrants constituent une source de affirment que le Canada et le Québec ont problèmes ou de complications pos- besoin d’un apport étranger pour assurer le sibles. Ainsi, il existe de grands écarts renouvellement de la population et la entre le taux de chômage des salariés nés vigueur du secteur économique. Pourtant, ici et celui des salariés nés à l’étranger. En une partie de la population ne semble pas oc­tobre 2017, 10,3 % des immigrants arri- voir l’immigration d’une façon aussi posivés depuis moins de 5 ans étaient au chô- tive. En outre, les pouvoirs publics investismage contre 6,2 % des Canadiens. Au sent peu dans les programmes d’intégration, Québec, la différence est encore plus en particulier lorsqu’il s’agit de regroupegrande. Le taux de chômage s’établissait ment familial ou de personnes choisies pour à 16,7 % pour ces mêmes immigrants leurs qualifications professionnelles. De contre 5,8 % pour les Québécois. Un tel plus en plus, le Canada et le Québec sélecphénomène n’existait pas il y a une tren- tionnent des résidents permanents parmi les taine d’années, alors que les immigrants travailleurs temporaires. Cela permet de venaient surtout d’Europe. Au contraire, diminuer les coûts d’accueil. En effet, ces le taux de chômage des immigrants était immigrants-là assument eux-mêmes leurs plus faible que celui des Canadiens. Tout frais de santé. Ils n’ont pas accès à l’éducaa changé avec la diversification des pays tion subventionnée et ne sont pas couverts de provenance des nouveaux venus. par la plupart des programmes sociaux proAujourd’hui, il s’agit de minorités beau- vinciaux, même s’ils paient des impôts. Les coup plus diverses, tant sur le plan reli- gouvernements puisent donc dans ce réseau gieux que culturel. À titre d’exemple, les pour sélectionner les nouveaux immigrants. Maghrébins et les Africains subsahariens Désormais, le nombre de travailleurs temfigurent parmi les immigrants les plus poraires a dépassé celui des travailleurs discriminés sur le marché de l’emploi ­qualifiés accueillis chaque année. québécois, et ce sont pourtant des gens à majorité francophones. Propos recueillis par Pascale Guéricolas


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ils ont dit... Sur l’intelligence artificielle

Un nombre important d’étudiantes et d’étudiants de l’Université sont engagés dans des projets entrepreneuriaux.

Le Québec inc. sur le campus Les forces vives en entrepreneuriat de l’Université se mobilisent pour une semaine intense d’activités par Yvon Larose Dans quelques jours, un vent entrepreneurial soufflera sur la cité universitaire. Du 13 au 19 novembre, la communauté universitaire ainsi que le grand public se verront proposer une programmation dynamique et diversifiée lors de la Semaine mondiale de l’entrepreneuriat à l’Université Laval. Cette activité est le fruit d’une collaboration étroite entre les forces vives en entrepreneuriat du campus et divers intervenants du domaine au niveau régional. Ces forces vives comprennent notamment Entrepreneuriat Laval, le Service de placement et FSA ULaval. La Semaine se veut un positionnement clair de l’Université comme partie prenante de l’écosystème régional en entrepreneuriat. « Forte du dynamisme de sa communauté étudiante et d’un réseau d’intervenants compétents, souligne la rectrice Sophie D’Amours, notre université se positionne depuis longtemps comme un chef de file en ce qui concerne le soutien et l’accompagnement aux entrepreneurs. » Le président d’honneur de l’événement sera Georges Saad, cofondateur de la firme de développement Web et mobile Spektrum Media. Ce détenteur d’un MBA de l’Université Laval donnera une conférence sur le thème de l’entrepreneuriat responsable. La conférencière vedette de la Semaine sera Valérie Doran, PDG de BULLE bijouterie pour mamans. Cette diplômée de la maîtrise en sciences de l’orientation de l’Université Laval fera part de ses réflexions sur le lancement d’une entreprise. Le professeur Denis J. Garand, du Département de management, fera un exposé sur la sensibilisation à l’entrepreneuriat et à l’intrapreneuriat en sciences et en santé durable. Quant à Réal Vallée, professeur au Département de physique, de génie physique et d’optique, il par­ tagera le micro avec le PDG de la firme Laserax, Xavier Godmaire. Leur présentation commune aura pour titre « Un parcours entrepreneurial

“marqué au laser” ». Enfin, le doctorant en nutrition Hubert Cormier relatera les moments clés de son parcours de blogueur et d’auteur de livres à succès sur la nutrition. Il publiera sous peu un nouveau livre, son cinquième, intitulé Les conseils d’Hubert. Plus de 500 conseils et recettes pour repenser son alimentation. Hubert Cormier terminera ses études doctorales dans quelques mois. Son parcours aura été pour le moins atypique. En 2010, un stage au baccalauréat avec la nutritionniste vedette Isabelle Huot lui ouvre les yeux sur un monde de possibilités comme communicateur. Une étape clé de son parcours a consisté, pour lui, à explorer les réseaux sociaux, où il vulgarise depuis la nutrition. Aujourd’hui, quelque 65 000 abonnés (followers) suivent le nutritionniste. « Je suis sur différentes plateformes et je peux vivre de ça », indique-t-il. En 2014, Hubert Cormier franchissait une autre étape dans son parcours de communicateur avec la publication d’un premier livre. « Ce livre m’a permis d’asseoir une certaine crédibilité, dit-il. Au monde de la diète, je proposais une belle transition vers le plaisir de manger sainement, comme un vent de fraîcheur. Un passe-temps s’est transformé en passion, puis en gagne-pain. » Les livres se sont enchaînés. Cette année, son ouvrage de recettes originales basées sur le yogourt a été publié en anglais chez Penguin Random House. Ce communicateur polyvalent écrit aussi pour des magazines et des journaux. Il prononce également des conférences. Une autre activité à ne pas manquer est certes la table ronde intitulée « Nos entrepreneur(e)s sous la loupe ». La professeure Mariepier Tremblay, du Département de management, présentera les résultats d’un sondage récent sur la réalité entrepreneuriale universitaire. L’enquête a été réalisée conjointement par la Chaire en entrepreneuriat et innovation, que dirige la professeure Tremblay, ainsi que par le Service

de placement. La discussion sera animée par la professeure Sophie Brière, du même département. « Le sondage a été mené auprès de plus de 1 100 étudiants, explique Mariepier Tremblay. On constate qu’un nombre important d’étudiants sont impliqués dans des projets à différents stades : démarrage actif, entreprise en activité ou intention entrepreneuriale. Parmi les répondants, beaucoup sont des femmes. Les projets sont fortement liés au domaine d’études des étudiants. Enfin, les résultats confirment l’intérêt d’intégrer l’entrepreneuriat dans les préoccupations institutionnelles en offrant des services et de la formation. » Durant la Semaine, Entrepreneuriat Laval tiendra son gala du Concours d’idées d’entreprises. Près de 10 000 $ en prix seront remis à des idées nova­ trices susceptibles de conduire au dé­­ marrage de nouvelles entreprises. Des entrepreneurs prononceront des conférences sur l’intrapreneuriat, sur l’entrepreneuriat social et sur une entrepreneure immigrante. Des activités de réseautage seront également au programme. Pour la programmation complète de la Semaine : www.ulaval.ca/developpement-durable/axes-dintervention/ engagement-social/semaine-mondiale-de-lentrepreneuriat.html

La Semaine se veut un positionnement clair de l’Université comme partie prenante de l’écosystème régional en entrepreneuriat

Jocelyn Maclure, Faculté de philosophie Le Devoir, 2 novembre

L’intelligence artificielle (IA) connaît des progrès rapides. On ­prévoit qu’elle modifiera nos vies, y compris le monde du travail. Or, l’IA comporte des risques inhérents majeurs. Selon le président de la Com­mission de l’éthique en science et en technologie, Jocelyn Maclure, « il est crucial qu’un ­dialogue entre les chercheurs, les industriels, les décideurs et la so­­ ciété civile s’amorce dès maintenant pour que l’on recherche collec­ti­ vement les moyens d’assurer une atténuation des risques et une distribution juste des avan­ tages de l’IA. »

Sur les femmes en entreprise

Hélène Lee-Gosselin, Département de management Le journal du Conseiller, octobre 2017

Le sexisme est encore bien présent en 2017 dans certaines entreprises du Québec, affirme Hélène Lee-Gosselin. « J’ai été choquée par des témoi­ gnages très candides de chefs d’entreprise me disant que lorsqu’ils partent sur la route avec leur vice-président finances masculin, ils n’ont pas de problème ni au bureau ni à la maison. Ils sou­ tiennent qu’ils ne savent pas quelles seraient les conséquences s’ils voyageaient plutôt avec une femme. »

Sur la traçabilité de certains saumons

Gale West, Département d’économie agroalimentaire et des sciences de la consommation Radio-Canada, 2 novembre

Des saumons provenant d’une pisciculture de Terre-Neuve touchée par une maladie infectieuse ont été écoulés sur le marché canadien récemment. Comme cette maladie n’affecte pas les humains, l’Agence canadienne d’inspection des aliments n’impose pas la traçabilité du produit. Gale West estime que le système en place assure la salubrité des produits. « Je fais confiance aux gens de l’Agence. Ils font leur travail de façon assidue. On peut se fier à eux, on peut avoir confiance. »


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Ces passionnés de l’enseignement Neuf membres de la communauté universitaire ont été récompensés à l’occasion de la 20e cérémonie annuelle des Prix d’excellence en enseignement par Matthieu Dessureault « Pour moi, un bon professeur, c’est celui qui est soucieux du contenu qu’il a à enseigner, mais aussi de la qualité de sa relation avec les étudiants. Il s’agit d’un ingrédient incontournable pour que les apprentis­ sages se fassent mieux. Avec Internet et les nouvelles technologies, il faut également se préoccuper de comment les étudiants apprennent quand vient le temps de choisir ses stratégies pédagogiques. » Le 6 novembre, Norma Bélanger, mé­decin clinicienne enseignante titulaire à la Faculté de médecine, a reçu le prix Carrière en enseignement. Chaque année, cette récompense est remise à un professeur qui, depuis plus de vingt ans, a fait preuve de constance et d’excellence dans son travail. Elle honore également la qualité, la pertinence, la diversité et le caractère novateur de son enseignement. En tout, neuf prix ont été remis à l’occasion de la cérémonie des Prix d’excellence en enseignement. Depuis 1997, cette initiative vise à honorer des membres de la communauté

universitaire qui se distinguent par leurs pratiques pédagogiques ou par la production de matériel didactique. Première femme à recevoir le prix Carrière depuis dix ans, Norma Bélanger l’accepte avec beaucoup d’humilité. « Ce prix, dont je suis très fière, je le partage avec les nombreux collègues qui ont travaillé avec moi sur des dossiers importants. À vrai dire, c’est aussi un prix qui vient mettre un terme à ma vie professionnelle, puisque je prendrai ma retraite dans quelques mois. » Née d’une mère enseignante, Norma Bélanger n’a pas le parcours typique d’une professeure en médecine. Infirmière de formation, elle a d’abord enseigné les soins infirmiers en milieu collégial, tout en faisant une maîtrise en andragogie. Après des études en médecine, elle est devenue médecin de famille au sein de l’Unité de médecine familiale de l’Hôpital Saint-François ­d’Assise. C’est en 1992 qu’elle a rejoint les rangs de la Faculté de médecine.

En plus d’enseigner à des étudiants de divers profils, elle a occupé, au fil du temps, plusieurs fonctions de gestion. Elle a no­­tamment été directrice du secteur Déve­loppement pédago­ gique du Vice-décanat à la pédagogie et au dé­­ veloppement professionnel continu et respon­ sable du comité de démarrage de la Chaire de leadership en enseignement en pédagogie des sciences de la santé. La réalisation dont elle est la plus fière est d’avoir contribué à la révision du programme de doctorat de premier cycle en médecine. Pendant plus de sept ans, elle a dirigé ce projet visant à adapter ce programme à une approche basée sur le développement des compétences. Cette expérience de gestion, comme toutes les autres, a certai­nement nourri son travail d’enseignante. « Diriger un programme, c’est travailler pour améliorer sa qualité, et ce, en collaboration avec tous les professeurs et des con­seillers en formation. J’ai pu travailler avec des gens très compétents, de qui j’ai énormément appris », dit-elle. Dans ses cours, Norma Bélanger invite ses étudiants à placer le patient au centre de leurs priorités. Si elle avait un seul conseil à donner à ces futurs médecins, ce serait d’ailleurs celui-ci : « Il est extrêmement important d’être compétent sur le plan de l’expertise professionnelle, mais ce qui est essentiel, c’est la relation avec le patient. Le métier de médecin nécessite d’aimer passionnément les gens. Jour après jour, c’est pour eux que l’on travaille. »

LES AUTRES LAURÉATS

Patrick Turmel

P

PROFESSEUR AGRÉGÉ À LA FACULTÉ DE PHILOSOPHIE

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LAURÉAT DU PRIX DISTINCTION EN ENSEIGNEMENT POUR LES PROFESSEURS

L E L L F P

Le prix Distinction en enseignement pour les professeurs reconnaît le travail d’un enseignant qui se démarque par l’excellence de ses pratiques et des moyens qu’il utilise pour favoriser l’apprentissage des étudiants ainsi que par l’adoption d’une approche stimulante et mo­tivante au regard de la matière qu’il enseigne. Depuis 2008, Patrick Turmel entraîne ses étudiants dans l’univers de la philosophie. Pour ce faire, il privilégie des formules participatives les amenant à dis­ cuter et à travailler en équipe. Il a recours à des exemples concrets et à des enjeux d’actualité. Il a aussi organisé des séminaires et produit des documents de référence pour soutenir les étudiants dans leurs recherches.

Depuis 1997, ce concours vise à honorer des membres de la communauté universitaire qui se distinguent par leurs pratiques pédagogiques ou par la production de matériel didactique

La lauréate du prix Carrière en enseignement, Norma Bélanger, enseigne à la Faculté de médecine. D’un cours à l’autre, elle multiplie les stratégies d’apprentissage, comme la discussion de cas cliniques, les entrevues orales simulées et les groupes de discussion.

C q e l m l q s d C d d c e d s D d s e b

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C p u r d l p t f v d d n c j d p D t c q a


Prix d’excellence en enseignement

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2017

Pierre Cauchon

Laurier Turgeon

Kathleen Lechasseur

Philippe Barla

Tamarha Pierce

CHARGÉ DE COURS AU DÉPARTEMENT D’ÉCONOMIQUE

PROFESSEUR TITULAIRE AU DÉPARTEMENT DES SCIENCES HISTORIQUES

PROFESSEURE TITULAIRE ET DIRECTRICE DU PROGRAMME DE BACCALAURÉAT EN SCIENCES INFIRMIÈRES (2012-2016) À LA FACULTÉ DES SCIENCES INFIRMIÈRES

PROFESSEUR TITULAIRE AU DÉPARTEMENT D’ÉCONOMIQUE

PROFESSEURE TITULAIRE À L’ÉCOLE DE PSYCHOLOGIE

LAURÉAT DU PRIX COURS À DISTANCE

LAURÉATE DU PRIX MATÉRIEL COMPLÉMENTAIRE, NOTES DE COURS OU VOLUME PÉDAGOGIQUE

LAURÉAT DU PRIX DISTINCTION EN ENSEIGNEMENT POUR LES CHARGÉS DE COURS, LES RESPONSABLES DE FORMATION PRATIQUE ET LES PROFESSEURS DE CLINIQUE

Ce prix souligne l’apport remar­ quable d’un membre du personnel enseignant qui s’est démarqué par l’excellence de ses pratiques et des moyens qu’il utilise pour favoriser l’apprentissage des étudiants ainsi que par l’adoption d’une approche stimulante et motivante au regard de la matière qu’il enseigne. Pierre Cauchon enseigne au Département d’économique depuis 1987. Au fil des années, il a donné plusieurs cours en présentiel, à distance et en mode hybride, et ce, à la Faculté des sciences sociales, à la Faculté des sciences de l’administration et à la Direction générale des programmes de premier cycle. Poly­valent, il n’hésite pas à adapter ses cours et son enseignement afin de répondre aux besoins diversifiés des étudiants.

Maurice Gosselin PROFESSEUR TITULAIRE À L’ÉCOLE DE COMPTABILITÉ LAURÉAT DU PRIX RESSOURCE PÉDAGOGIQUE NUMÉRIQUE

Ce prix reconnaît un membre du personnel enseignant qui a conçu une ressource pédagogique numé­ rique adaptée aux besoins des étudiants. Il souligne également la qualité exceptionnelle de l’approche pédagogique et le caractère novateur de la ressource. « Maman, j’ai faim », c’est le nom d’un faux service de traiteur qui permet aux étudiants en comptabilité financière de mettre en application leurs con­ naissances. Dans cette simulation conçue par Maurice Gosselin, ils jouent le rôle d’un comptable qui doit tenir les registres de l’entreprise et préparer les états financiers. Des capsules vidéo, des documents, tels que des factures, des bons de commande et des chèques, ainsi que des courriels se succèdent pour alimenter leur expérience.

LAURÉAT DU PRIX ENCADREMENT AUX CYCLES SUPÉRIEURS

Ce prix reconnaît l’engagement et la qualité de la supervision d’un professeur dans le processus d’apprentissage et de recherche des ­étudiants aux cycles supérieurs. Spécialiste de l’ethnologie du patrimoine, Laurier Turgeon accompagne plusieurs étudiants des cycles supérieurs dans leur ­formation. Il encadre également des stagiaires d’été au premier cycle en ethnologie et des résidents en pharmacie d’hôpital. Son but est de leur offrir les meilleures con­ ditions d’apprentissage possible, que ce soit grâce à la Chaire de recherche du Canada en patrimoine ethnologique, dont il est le directeur, ou grâce à des parte­nariats avec divers organismes.

LAURÉATE DU PRIX DIRECTION DE PROGRAMME

Ce prix est remis à un directeur de programme qui se démarque par son leadership dans l’amélioration continue de la formation, par son esprit d’innovation et par l’encadrement des étudiants. Kathleen Lechasseur a été directrice du programme de baccalauréat en sciences infirmières de 2012 à 2016. Lors de ce mandat, elle a démontré des qualités exceptionnelles en coordonnant les travaux de révision du programme. Avec ses collègues, elle a mis en place de nombreuses mesures liées à la réussite et à la persévérance scolaires. Elle a no­­ tamment contribué à l’instauration d’un cours de mentorat par les pairs.

Ce prix reconnaît l’apport d’un membre du personnel enseignant qui a conçu un cours à distance de qualité exceptionnelle et adapté aux besoins des étudiants. Il sou­ ligne également la démarche pédagogique et l’apport de la médiati­ sation des contenus sur l’appren­ tissage. Destiné à des étudiants de programmes variés, le cours Principes de microéconomie, conçu par Philippe Barla, offre une introduction à l’analyse microécono­ mique et à ses principes de base tels que les concepts de coût d’oppor­ tunité, d’offre et de demande, d’élas­ ticité et de structure concurrentielle de marché. Afin de faciliter l’appren­­ tissage de ces notions, le professeur a développé 63 capsules narrées et 18 vidéos avec des graphiques animés.

Ce prix reconnaît un membre du personnel enseignant qui a conçu du matériel complémentaire de qualité exceptionnelle et adapté aux besoins des étudiants. Il sou­ ligne également la contribution significative du matériel aux ap­­ pren­tissages des étudiants dans un cours. Tamarha Pierce a élaboré des modules numériques pour ­bo­nifier le cours Méthodes de recherche, qui porte sur la méthodologie de la recherche en psychologie. En plus de synthétiser les notions essentielles, ces modules contiennent notamment les objectifs d’apprentissage du cours, une table des matières cliquable et une série de questions. Tamarha Pierce a également intégré aux modules des vidéos, des liens Web, des ­capsules audio et des bulles d’information.

Jean-François Lalonde PROFESSEUR ADJOINT AU DÉPARTEMENT DE GÉNIE ÉLECTRIQUE ET DE GÉNIE INFORMATIQUE LAURÉAT DU PRIX RESSOURCE PÉDAGOGIQUE NUMÉRIQUE

Ce prix est remis à un membre du personnel enseignant qui a conçu une ressource pédagogique numé­ rique adaptée aux besoins des étudiants. Il souligne également la ­qualité exceptionnelle de l’approche pédagogique et le caractère novateur de la ressource. Les étudiants de Jean-François Lalonde ont accès à une technologie qui leur permet de voir ce qui se passe à l’intérieur d’un ordinateur. Unique et simple d’utilisation, cette plateforme développée par le professeur montre ce qui se produit lorsqu’une ligne de code est exécutée dans un système ordiné. Elle permet aux étudiants de réaliser des travaux pratiques et de mieux comprendre les erreurs de programmation qui peuvent subvenir.

La cérémonie des Prix d’excellence en enseignement 2017 s’est déroulée le 6 novembre. La rectrice Sophie D’Amours et le vice-recteur exécutif et vice-recteur aux études et aux affaires étudiantes, Robert Beauregard, entourent Patrick Turmel, Norma Bélanger, Laurier Turgeon (sur la première rangée), Philippe Barla, Jean-François Lalonde, Tamarha Pierce, Pierre Cauchon, Maurice Gosselin et Kathleen Lechasseur (sur la deuxième rangée). photo Marc Robitaille


sciences en bref Quand les yeux ont des oreilles

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Journée SIG

La réaction de la pupille pourrait théoriquement servir à détecter les situations où des pilotes d’avion font montre de surdité attentionnelle

Pour une cinquième année, l’Université Laval célébrera la Journée SIG, un événement voué à l’importance de la géographie et des systèmes d’information géographique (SIG). À cette occasion, une foule d’activités touchant des thèmes aussi variés que les pyramides d’Égypte, le développement régional, le transport urbain et les drones vous sont proposées. La program­ mation comprend des conférences, des concours et des activités d’éveil à la carto­ graphie. La conférence d’ouverture intitulée « Un coup de rame à la fois » sera donnée par Mylène Paquette, première NordAméricaine à traverser l’océan Atlantique Nord à la rame. photo Bulle Plexiglass Lundi 20 novembre, de 12 h à 19 h, à l’atrium Jean-Guy-Paquet du pavillon AlphonseDesjardins et au Grand Salon du pavillon Maurice-Pollack. Entrée libre. Pour la programmation complète : www.bibl.ulaval.ca/ conferences-geospatiales-2017

Des sons inhabituels activent le système sympathique qui exerce une influence un peu partout dans le corps, notamment dans certaines zones du cerveau connectées aux muscles de la pupille. Lorsque ces connexions sont activées, le diamètre de la pupille augmente, ce qui permet le passage de plus de lumière, donc de plus d’information visuelle en situation d’alerte.

Les réactions de la pupille à des sons inhabituels pourraient servir à améliorer la sécurité à bord des avions par Jean Hamann

Marché de Noël responsable : inscriptions en cours ! Le marché de Noël de l’Université sera de retour cette année, le mardi 5 décembre, à l’atrium du pavillon Charles-De Koninck. Cet événement vise à sensibiliser la communauté universitaire à la consommation responsable durant le temps des Fêtes, tout en permettant à des associations ou groupes de l’Université d’amasser des fonds pour leurs activités. Il s’agit d’une occasion unique de découvrir une foule d’idées-cadeaux pro­ venant de la communauté universitaire ! Nouveauté cette année : le marché ouvrira comme d’habitude dès 10 h, mais il se terminera plus tard, soit à 16 h 30. Vous faites partie d’un groupe et vous désirez vendre des produits locaux et écoresponsables pour financer vos activités ? Vous avez jusqu’au 17 novembre pour vous inscrire. Pour plus d’information et pour remplir le formulaire d’inscription : www.ulaval.ca/ developpement-durable/implication/­ activites-dd.html​

Aussi curieux que cela puisse paraître, nos yeux réagissent à des sons inattendus et cette réponse involontaire pourrait un jour servir à améliorer la sécurité à bord des ­avions. Voilà l’étonnante con­c lusion qui se dégage d’une étude que des chercheurs de l’École de psychologie viennent de publier dans l’International Journal of Psychophysiology. Pour faire cette démons­ tration, les chercheurs ont recruté 30 étudiants de l’Université Laval qui ont été soumis à une tâche visant à déterminer si la dilatation de la pupille correspond à ce que les psychologues nomment une réponse ou une réaction d’orientation. « Une réponse d’orientation est la mobilisation de l’attention qui survient à la suite d’un changement soudain et inattendu dans l’environnement, explique l’étudiantchercheur Alexandre Marois. Ce bris dans la régularité entraîne plusieurs réactions physiologiques involontaires qu’on peut détecter en me­­ surant l’activité électrique du cœur ou du cerveau ou encore la conductance de la

peau. Notre étude visait à déterminer si la dilatation de la pupille répondait à tous les critères reconnus d’une réponse d’orientation à un signal sonore. » Les participants devaient accomplir une tâche visuelle qui consistait à mémoriser trois consonnes apparaissant brièvement sur un écran d’ordinateur. Ils devaient ensuite retenir ces con­ sonnes tout en faisant des cal­culs mentaux (compter à rebours par 2, 3, 4, 5 ou 10 à partir d’un chiffre de plus de 1 000) pendant près d’une minute. Pendant cette tâche de calcul, les chercheurs diffusaient des sons réguliers entrecoupés d’une série de sons inhabituels tout en mesurant le diamètre de la pupille des participants à l’aide d’un oculomètre. La tâche visuelle, la tâche de mémorisation et la tâche de calcul mental servaient uniquement à détourner l’attention des participants des signaux sonores, précise Alexandre Marois. Ces tests ont révélé que la dilatation de la pupille ré­­ pond à tous les critères d’une réponse d’orientation. Le

diamètre de la pupille augmente dès la diffusion du signal sonore régulier et diminue rapidement par la suite. Il augmente à nouveau lorsqu’un son inhabituel est diffusé ; la réponse de la pupille est alors proportionnelle à l’écart entre la fréquence du signal régulier et celle du signal inhabituel. Enfin, le diamètre de la pu­­ pille revient rapidement à sa valeur de base lorsque le signal régulier est rediffusé. « Le bris dans la régularité des sons active le système sympathique qui exerce une influence un peu partout dans le corps, notamment dans certaines zones du cerveau connectées aux muscles de la pupille, explique Alexandre Marois. Lorsque ces connexions sont activées, le diamètre de la pupille augmente, ce qui permet le passage de plus de lumière, donc de plus d’information visuelle dans une situation où le corps est en alerte. » En apparence très fondamentale, cette étude pourrait un jour avoir des répercussions dans les cabines de pilotage. En effet, lorsqu’ils sont aux commandes de leur

appareil, en particulier dans des conditions de vol dif­ ficiles, les pilotes sont exposés à une multitude de si­­ gnaux visuels ainsi qu’à des signaux sonores. Ces derniers présentent l’avantage de ne pas mobiliser leur attention vi­suelle. Toutefois, des en­­quêtes menées à la suite d’accidents aériens ont ré­vélé qu’en situation d’urgence, ces signaux sont parfois ignorés par les pilotes. « La réaction de la pupille pourrait théoriquement servir à détecter les situations où cette surdité attentionnelle se produit, avance l’étudiant-chercheur. Notre hypothèse est que s’il n’y a pas de réponse de la pupille, c’est que le pilote n’a pas entendu le signal. Un système intelligent pourrait alors générer une contre­ mesure – un signal visuel par exemple – pour capter l’attention du pilote. Le recours à un oculomètre présenterait l’avantage de ne pas entraver les mouvements des pilotes, contrairement aux appareils qui mesurent la réponse d’orientation au niveau du cœur, du cerveau ou de la peau. » L’ é t u d e p a r u e d a n s ­l ’International Journal of Psychophysiology est si­­ gnée par Alexandre Marois, Katherine Labonté, Mark Parent et François Vachon de l’École de psychologie.


arts

le fil | le 9 novembre 2017

Fragments de mémoire reconstitués Année faste pour l’auteure Sylvie Nicolas, qui termine sa thèse de doctorat et publie un nouveau roman, Le cri de La Sourde, une autofiction inspirée de sa famille place, d’où la forme d’écriture par tableaux ou par sé­­ quences que le lecteur doit rapiécer », explique-t-elle. Avec des personnages comme La Sourde, Phirin l’infirme, le Cordonnier-pasde-pattes et le grand-père barbier, son roman présente un univers qui se rapproche de celui du conte. Empreint de poésie, il nous transporte « sur l’île », un territoire isolé où s’entrecroisent les destins de tous ces protagonistes. « Sylvie Nicolas a une plume et une manière de raconter qui sont très particulières, affirme son directeur de thèse, le professeur en création littéraire Alain Beaulieu. Elle écrit par fragments, comme de petites touches. Au fil de la lecture, on fait des liens entre différents éléments du récit et on dé­couvre une galerie de personnages tout à fait savoureux et atypiques dans un coin de pays reculé. L’écriture de Sylvie Nicolas est vive et belle. À mon avis, c’est son roman le plus réussi. »

Femme de lettres accomplie, Sylvie Nicolas est romancière, poétesse, écrivaine pour la jeunesse et traductrice littéraire. photo Marc Robitaille

Empreint de poésie, le roman nous transporte « sur l’île », un territoire isolé où s’entrecroisent les destins de différents protagonistes

en bref

Mosaïque musicale

par Matthieu Dessureault L’histoire familiale de Sylvie Nicolas recèle des mystères. Comment sa mère, née en Alberta, s’est-elle retrouvée à grandir en Gaspésie ? Com­ ment son grand-père est-il devenu le barbier du célèbre Al Capone ? Et pourquoi estil disparu aux États-Unis durant quelques années ? Pour Sylvie Nicolas, ces ­tranches de vie sont autant d’histoires à relier par le fil de l’écriture. Avec Le cri de La Sourde, fruit de sa thèse en recherche-création, elle raconte des épisodes de sa famille, sans autre ordre que celui de son imagination et de ses souvenirs qui remontent à la surface. « Ce roman relève d’un travail de reconstruction de fragments d’histoire et de mémoire. Jusqu’à son décès, ma mère me parlait très peu de son enfance. Son histoire, qui est aussi celle de gens aux surnoms étranges d’un petit coin de terre où elle a été élevée, m’a échappé. Avec ce livre, j’ai tenté de remettre des morceaux manquants en

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Le compositeur et guitariste Claude Gagnon présente un nouvel album qui plaira assurément aux amoureux de musique classique. Produit par Les Productions d’OZ, Patchwork réunit 18 pièces enregistrées au cours des 30 dernières années dans différents lieux, dont le LARC et la salle Henri-Gagnon, au pavillon Louis-Jacques-Casault. Le montage et le mixage de l’album ont été réalisés par Serge Samson, technicien en travaux d’enseignement et de recherche à la Faculté de musique. Professeur de guitare classique au Cégep de Sainte-Foy de 1982 à 2014, Claude Gagnon a joué sur plusieurs scènes et a publié une quarantaine d’ouvrages, en plus d’arranger et de composer des pièces pour Angèle Dubeau et La Pietà. Pour consulter le site Web de l’artiste : www.claude-gagnon.com

Nouvelle voix poétique Avec ce récit campé en Matanie, écrit quelque temps avant le décès de sa mère, l’auteure tente de sauver de l’oubli des parcelles de mémoire. L’ouvrage est publié aux Éditions Druide.

Le compliment n’est pas anodin considérant le parcours impressionnant de l’auteure. Femme de lettres accomplie, Sylvie Nicolas compte à son actif près d’une trentaine d’ouvrages, particulièrement en littérature jeunesse et en poésie. Elle a été deux fois finaliste au prix du Gouverneur général et a été la première lauréate du prix Jean-Noël Pontbriand, créé par le Printemps des poètes et l’Université Laval en 2013. Son livre Les variations Burroughs, écrit durant sa maîtrise en études littéraires, avait conquis la critique et le public. Si elle a poursuivi ses études au doctorat, c’est pour réfléchir à sa pratique. Après plusieurs années consacrées aux romans et à la poésie, une question l’obsédait : pour­quoi écrire ? « J’avais besoin de comprendre ce qui motivait ce besoin. Ces années d’études m’ont permis d’avoir une meilleure compréhension des éléments qui composent mon écriture. On pourrait croire que cette approche théo­ rique modifierait ou colorerait ma façon d’écrire, mais

ce n’est pas le cas. L’étrange configuration de mon écriture a trouvé ses réponses dans les recherches. » Pour cela, sa rencontre avec le professeur Alain Beaulieu, lui-même auteur prolifique, a été déterminante. « Il est un directeur de création absolument exceptionnel. Alain Beaulieu a une capacité de lecture très forte et un flair incroyable pour trouver les zones qui doivent être éclairées. Il n’impose pas sa vision, mais reste à l’écoute et demeure attentif aux voies qui s’annoncent. C’est un privilège d’avoir été accompagnée par ce professeur », dit l’étudiante, qui a soutenu sa thèse à la fin août. Comme un projet n’attend pas l’autre, elle termine en ce moment la traduction d’un roman de Drew Hayden Taylor, Funny, You Don’t Look Like One. Le lancement aura lieu à l’occasion du prochain Salon du livre des Premières Nations, du 23 au 26 novembre. Par la suite, l’auteure entreprendra un retour vers la poésie. Elle prévoit aussi rassembler certains textes déjà écrits pour constituer un recueil.

Il n’existe jamais que la moitié du ciel, c’est le titre du premier essai poétique de Laetitia Rascle Beaumel, lauréate du prix Piché de poésie de l’Université du Québec à TroisRivières. Ce concours, qui vise à encourager la relève, a reçu cette année 36 propositions. La doctorante en études littéraires a marqué le jury par son « écriture poétique très maîtrisée, sensuelle et engagée, révélant une grande lucidité et une conscience qui harnache et harangue le Monde ». Ce jury était composé de Claude Lamy, professeur au Cégep de Trois-Rivières, Stéphane Despatie, poète et directeur de la revue Exit, et Manon Brunet, professeure à l’Université du Québec à Trois-Rivières. Pour plus d’information : www.fiptr.com/laureat_piche2017.html

À vos pinceaux ! Vous souhaitez promouvoir votre événement ou votre association étudiante de manière créative ? Pourquoi ne pas réaliser une fresque dans les couloirs souterrains du campus ? Le Bureau de la vie étudiante offre cet espace de diffusion aux membres de la communauté universitaire. Il suffit de faire une demande et de remplir un formulaire sur le site de ­l’association. Acheminez ce document et une esquisse de la fresque que vous souhaitez réaliser à l’attention de Ricardo Codina. La procédure d’autorisation, les critères d’admissibilité et les informations ­techniques sont disponibles à l’adresse www.bve.ulaval.ca/projets-parascolaires/ fresque-promotionnelle.


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actualités UL

en bref

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L’Université ouvre ses portes aux futurs étudiants

Alexandre St-Jean continue d’accumuler de très bons résultats scolaires dans ses études de doctorat en médecine dentaire. Il continue également de se distinguer sur les patinoires du circuit international dans les épreuves de patinage de vitesse longue piste. Il y a quelques semaines, à l’occasion d’une activité de la Fondation de l’athlète d’excellence du Québec, l’étudiant-athlète a reçu une bourse de 4 000 $ du Programme de bourses Saputo dans la catégorie « Bourses d’excellence académique ». En classe, Alexandre St-Jean maintient une moyenne de 3,15 sur 4,3. En 2017, il a obtenu la deuxième place au 1 000 m lors du Championnat canadien. La même année, il terminait septième au 1 000 m à la Coupe du monde du Japon. Né en 1993, l’étudiant-athlète s’adonne au patinage depuis l’âge de 5 ans. À pleine vitesse, il dépasse les 60 km/h. Rapide et efficace, il vise une place au sein de l’équipe canadienne pour les Jeux olympiques d’hiver de 2018 en Corée du Sud. photo Oscar Van den Bosch

Avis de convocation ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ANNUELLE Aux membres de la communauté universitaire, Prenez avis que l’assemblée générale annuelle des membres de l’Université, prévue à l’article 15 de la Charte de l’Université Laval, aura lieu le 29 novembre 2017, à 14 heures, au Cercle, au local 4512, 4e étage du pavillon Alphonse-Desjardins.

ORDRE DU JOUR 1. Présentation par la secrétaire générale 2. États financiers de l’Université Laval – Marie-France Poulin, présidente du Conseil d’administration

3. Rapport des activités de l’Université Laval – Sophie D’Amours, rectrice et présidente du Conseil universitaire

4. Questions des membres Monique Richer Secrétaire générale Le 8 novembre 2017

photo Louise Leblanc

Alexandre St-Jean, boursier Saputo

L’invitation est lancée aux futurs étudiants de profiter de la Journée portes ouvertes pour venir se renseigner sur les quelque 500 programmes et les nombreux services de l’Université Laval, échanger avec le personnel enseignant et des étudiants actuels, assister à l’une des nombreuses conférences et, même, déposer sur place une demande d’admission. La tenue de cette activité phare de l’Université est

possible grâce au soutien du Bureau du recrutement étudiant, des différentes facultés et des divers services. Bienvenue à cette journée spéciale sur le campus ! Samedi 11 novembre, de 10 h à 15 h, au pavillon AlphonseDesjardins. Pour plus d’information : www.ulaval.ca/ futurs-etudiants/rencontrez-lul/portes-ouvertes.html

Prix du jury au concours La preuve par l’image Nelly Manéglia, qui vient de terminer une maîtrise en sciences de la Terre au Département de géologie et de génie géologique, a remporté le prix du jury au concours de photographie La preuve par l’image de l’Acfas. La lauréate a étudié les minéraux in dicateurs de gisements d’or dans une région du Nunavut. Ses travaux ont contribué à la caractérisation chimique de certains minéraux, entre autres la scheelite et la tourmaline, présents sous forme de grains dans du sable glaciaire. L’image qui lui a valu le Prix du jury montre un grain d’épidote qui, au microscope, prend la forme d’un papillon multicolore. Son œuvre s’intitule d’ailleurs Migrations des minéraux.


société

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Le crime moderne par excellence Dans sa thèse, Cynthia Courtois explore le processus derrière l’adhésion à la culture de la déviance en matière de fraude par Yvon Larose

Les stagiaires auront comme mandat d’aider la compagnie à lutter contre l’intimidation, l’exploitation sexuelle et la radicalisation en ligne.

Scruter les méandres du Web Une entente entre l’Université et l’entreprise Two Hat Security permettra à des étudiants de s’attaquer au problème du contenu toxique dans les conversations en ligne par Matthieu Dessureault Grâce à Internet, jamais il n’a été aussi facile de communiquer. Les réseaux sociaux, les forums de discussion, les jeux en ligne et les applications de messagerie permettent d’échanger avec des gens aux quatre coins de la planète. Mais force est de constater que ces outils servent aussi des quêtes obs­ cures : l’intimidation, la radicalisation, la prédation sexuelle sur les enfants et plusieurs autres comportements déviants. L’entreprise Two Hat Security, en Colombie-Britannique, est spécialisée dans la détection de conversations à haut risque. Chaque jour, son logiciel Community Sift identifie et filtre ­quatre milliards de messages dans près de 200 pays. « La technologie de Two Hat Security fonctionne très bien – l’entreprise est même un chef de file international dans ce domaine, mais elle souhaite être encore plus efficace », explique Richard Khoury, professeur au Dé­­partement d’informatique et de génie logiciel. L’entreprise a approché l’équipe dont il fait partie au Centre de recherche en données massives (CRDM) pour ­mettre sur pied des stages dans ce domaine. En tout, 118 stages seront offerts à une trentaine d’étudiants à la maîtrise ou au doctorat, principalement en informatique, en génie logiciel, en génie informatique et en systèmes d’information organisationnels. Dans un premier temps, ces stagiaires travailleront à l’amélioration du logiciel Community Sift. Ils participeront aussi à plusieurs autres projets visant, par exemple, à développer de nouveaux outils de détection et à mettre au point des algorithmes d’agrégation d’information sur

les utilisateurs toxiques. Chaque stage, qui se déroulera en partie dans les bureaux de l’entreprise, sera d’une durée de six mois. Ce projet, auquel participe également l’Université Simon Fraser, est financé à parts égales par l’organisme Mitacs et Two Hat Security. Pour Richard Khoury, l’Université Laval est le partenaire idéal pour aider l’entreprise à mener à bien sa mission. « Ce projet nécessite une grande diversité d’expertises. Plusieurs universités canadiennes ont des centres de recherche en données massives, mais le nôtre est très fortement multidisciplinaire. Plutôt que d’être spécialisé dans un domaine ou une seule technique, le CRDM compte une quarantaine de chercheurs dans cinq facultés. Selon moi, c’est cette polyvalence dans nos expertises qui a attiré Two Hat Security vers l’Université Laval. » L’annonce du partenariat d’une valeur de 1,7 million de dollars a été faite à l’occasion du colloque Objectif numérique 2017 : vers des sociétés numériques et durables. Cet évé­n e­m ent, qui se déroulait du 30 octobre au 1er novembre sur le campus, a réuni plus de 300 participants, dont des re­­présentants de Google Brain, de Thales Research & Technology et de l’ONU. Plusieurs sujets étaient abordés, telles les données massives, l’intelligence artificielle et les villes intelligentes. L’événement est une initiative de l’Institut Technologies de l’information et Sociétés, du CRDM, de l’Institut Hydro-Québec en environnement, développement et société, du Centre de recherche en géomatique et de l’Unité mixte de recherche en sciences urbaines.

Le 24 novembre 2015, la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des con­­ trats publics dans l’industrie de la construction au Québec, communément appelée commission Charbonneau, déposait son rapport final. Mise en place par le gouvernement du Québec en 2011, la commission Charbonneau avait mis au jour un important scandale de collusion et de corruption. Cette fraude à grande échelle à la Ville de Montréal impliquait des élus, des employés municipaux et des entrepreneurs de l’industrie de la construction et visait le gonflement artificiel du coût des contrats de construction. Dans sa thèse sur la fraude contemporaine et l’expertise antifraude qu’elle a soutenue à la mi-octobre, la doctorante Cynthia Courtois accorde une large place à deux té­­ moins clés ayant joué un rôle considérable dans ce scandale. Il s’agit de l’ancien en­­ trepreneur en construction Lino Zambito et d’un ingénieur de la Ville de Montréal retraité depuis 2009, Gilles Surprenant. Le premier dirigeait l’une des principales entreprises impliquées dans le cartel. Le second avait considérablement influencé le gonflement artificiel du coût des contrats. « Dans ma thèse en sciences de l’administration – comptabilité, j’ai voulu mieux comprendre le processus qui conduit un individu à adhérer à une culture déviante, explique la doctorante. Peu d’études avaient alors tenté d’analyser les constructions sociales sous-jacentes à la fraude. J’ai donc fait une analyse simultanée de l’in­ dividu et du contexte. » Selon Cynthia Courtois, tous les individus subissent chaque jour des pressions quotidiennes, mais ils parviennent généralement à contrer celles-ci grâce aux facteurs de protection dont ils disposent. Néanmoins, il arrive que les pressions deviennent importantes, à un point tel que certaines personnes se retrouvent alors à un moment critique où elles doivent choisir de déroger ou non aux règles socialement acceptées. Dans le scandale

révélé par la commission Charbonneau, l’individu qui choisissait la déviance faisait l’apprentissage de ce comportement dans le plus grand secret. Il fabriquait du sens, modifiant ses référents et ses habitudes de vie, devant continuellement jongler pour trouver un équilibre entre ce qu’il est et ce qu’il fait. « Gilles Surprenant décrit très bien le moment où il s’est retrouvé à la croisée des chemins, raconte la doctorante. Il s’est fait remettre une enveloppe contenant l’argent d’un pot-de-vin. Il tâte l’enveloppe et il a dix secondes pour prendre une décision qui, il le sait, changera bien des choses dans l’avenir. Lui qui subissait des pressions depuis des années, il accepte l’argent par crainte de représailles. Lino Zambito, lui, décide d’entrer dans le cartel qui contrôlait les contrats de la Ville de Montréal pour assurer la s­ urvie de son entreprise. La culture de la déviance à la Ville de Montréal facilitait la rationalisation de la déviance. Les deux témoins ont révélé que “tout le monde jouait le même jeu”. » La recherche de Cynthia Courtois a également mis en lumière le caractère souvent illusoire des systèmes de contrôle de la fraude. Le rapport final de la commission Charbonneau a émis 60 re­­ commandations visant l’amélioration du contrôle des

fonds publics. Or, depuis 1995, le gouvernement du Québec avait déjà adopté plus de 30 lois qui ont modifié les règles sur l’octroi et la gestion des contrats publics. Selon la doctorante, cela donne l’impression que le gouvernement et les fraudeurs s’adonnent à un perpétuel jeu du chat et de la souris. « À un échec des contrôles, dit-elle, on réclame paradoxalement plus de contrôles. On en ajoute comme si cela allait changer quelque chose, mais on ne crée qu’une illusion de contrôle. Guy Chevrette, l’ancien ministre des Transports du Québec, a d’ailleurs déclaré que la commission Charbonneau était un pro­ cessus nécessaire qui allait apporter la paix sociale pendant 20 à 25 ans, tout comme la commission Cliche dans les années 1970. Celle-ci avait couvert une série de scan­ dales de collusion dans l’industrie de la construction. Elle avait également recommandé la création d’agences de contrôle. Dans ce contexte, la commission Charbonneau n’est-elle, en fin de compte, qu’un spectacle bien or­chestré par l’État afin de con­vaincre la population que la situation est sous contrôle ? Mais si tel est le cas, la question que l’on devrait vraiment se poser est “Combien de temps cela durera-t-il ?” ». Il y a quelques mois, la revue Auditing : A Journal of Practice and Theory a publié un article inspiré des travaux de recherche de Cynthia Courtois. Elle est cosignataire du texte avec son directeur de recherche, le professeur Yves Gendron, de l’École de comptabilité.

Dans sa thèse, Cynthia Courtois a voulu mieux comprendre le processus qui conduit un individu à adhérer à une culture déviante.


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société

le fil | le 9 novembre 2017

Un soignant à Unamen Shipu Pour l’infirmier et anthropologue Bernard Roy, soigner est d’abord une question de présence à l’autre, d’écoute et d’attention par Yvon Larose Il s’appelait Joseph (nom ­fictif). Dans les années 1980, ce vieillard innu habitait le village de La Romaine, Unamen Shipu en langue innue. Ses coliques hépatiques fréquentes nécessitaient des injections pour calmer ses douleurs. Malgré l’insistance du médecin visiteur, il refusait de se rendre à l’Hôpital de Sept-Îles, à environ 400 kilomètres de là, pour se faire soigner. Une nuit d’hiver, Joseph tombe dans le coma à la suite d’une crise de péritonite. Rejoint au dispensaire du village, l’infirmier Bernard Roy se rend sur place. « La famille me donne l’autorisation de transférer Joseph à l’Hôpital de SeptÎles, raconte l’infirmier. Lorsque je suis revenu avec ma civière, des dizaines d’aînés du village priaient dans la maison. Je suis resté dans l’entrée, respectueux, et je les ai écoutés prier. Joseph a été évacué le matin par hydravion sur skis. À l’hôpital, loin des siens, il est mort à peu près seul. Je n’étais pas très bien avec ma décision. J’avais le sentiment de ne pas avoir respecté la volonté de cet homme de ne jamais quitter son village. J’étais pris dans le conflit de l’infirmier qui veut à tout prix sauver la vie de son patient tout en voulant être à son écoute. Un aîné du village et le missionnaire de l’endroit m’ont conforté. »

Ce récit, Bernard Roy, aujourd’hui professeur à la Faculté des sciences infirmières, l’a fait le 17 octobre, a u p av i l l o n A l p h o n s e Desjardins, lors d’un exposé sur le thème « Parcours d’un soignant sur les eaux de Magtogoek ». Le mot algonquin « Magtogoek » signifie « le chemin qui marche » et désigne le fleuve SaintLaurent. La présentation du professeur s’est déroulée dans le cadre des Entretiens Jacques Cartier, la rencontre annuelle des communautés québécoises et auvergnatesrhônalpines de l’économie, de l’entrepreneuriat, des affaires, de la recherche et de la culture. Le thème de la rencontre de deux jours était « Laïcité et multiculturalisme dans la relation de soins : du texte à l’action ». Trois récits, tirés de l’expérience professionnelle du soignant Bernard Roy à La Romaine entre 1986 et 1991, ont émaillé la présentation du professeur. Un printemps, après le coucher du soleil, l’infirmier reçoit un appel au dispensaire au sujet d’une jeune femme du nom de Juliette (nom fictif) qui faisait une hémorragie postpartum. Elle avait accouché à l’Hôpital de Sept-Îles et elle était de retour chez elle. Après avoir consulté un médecin de Blanc-Sablon, la patiente est amenée au dispensaire pour recevoir des

Dans les années 1980, aucune route ne reliait le village innu de La Romaine au reste de la Côte-Nord. Le transport se faisait en hydravion en été et en avion équipé de skis en hiver. photo Bernard Roy

soins en attendant son transfert vers Sept-Îles, au lever du soleil, en hélicoptère. « La petite chambre du dispensaire était pleine de gens, se rappelle-t-il. Juliette a abondamment saigné toute la nuit. Nous lui avons fait de nombreuses transfusions. On prélevait du sang chez des femmes du village qui avaient le même groupe sanguin. Une vieille sage-femme innue est arrivée. Elle nous regardait travailler et manifestait son désaccord avec nos traitements. On lui a offert des gants d’examen et on l’a invitée à examiner Juliette. Son examen achevé, elle nous a autorisés à poursuivre notre travail. Toute la nuit, des membres de la famille élargie de la patiente sont demeurés à son chevet.

Au début des années 1980 à La Romaine, sur la Côte-Nord. Henry, un jeune garçon innu, tient compagnie à son père, William-Mathieu Mark, pendant que celui-ci s’adonne à une activité traditionnelle, la confection de raquettes. photo Serge Jauvin

Selon le professeur, de telles histoires n’auraient pu se déployer en milieu hospitalier Certains lui tenaient la main, d’autres priaient. Elle a toujours été en lien avec les siens. Même si souvent nous avons eu peur de la perdre, elle est demeurée vivante, comme si le fil de vie était dans ce lien. Je considère que nous avons “mal traité” cette jeune femme. Par contre, nous l’avons bien soignée. Nous étions présents pour l’autre, à l’écoute et attentionnés. » Selon le conférencier, de telles histoires n’auraient pu se déployer en milieu hospitalier. Elles n’auraient pu connaître un dénouement semblable. « Était-ce de la compétence culturelle ?, a-t-il demandé. Non, c’était de la compétence soignante. Avec la vieille sage-femme, l’infirmière et moi avons reconnu une expertise très ancienne. Nous nous ­s o m m e s m u t u e l l e m e n t ­r espectés. La compétence soignante vient de l’attention et du respect que l’on porte à l’autre. »

Un enfant innu de La Romaine écoute une histoire que lui raconte son grand-père. La photo remonte au début des années 1980. photo Serge Jauvin

Un campement innu au début des années 1980. L’automne, des familles innues de La Romaine retournaient séjourner plusieurs semaines sur le territoire. photo Serge Jauvin

Dans les plaines aux abords de La Romaine, au début des années 1980, une femme innue cueille des chicoutais. photo Serge Jauvin


sports

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photo Mathieu Bélanger

en bref

Les Harlem Globetrotters sur le campus ! La mythique équipe de basketball jouera au PEPS pour une troisième année consécutive par Jenny Aumais Les Harlem Globetrotters seront de retour au PEPS le dimanche 8 avril. Après des salles combles en 2016 et en 2017, l’équipe la plus célèbre du monde fera une fois de plus vivre une expérience sportive hors du commun aux spectateurs de Québec. Combinant la précision athlétique et un spectacle qui a su divertir et amuser des millions de fans depuis plus de 90 ans, les prestations de cette équipe sont t o u j o u r s u n é vé n e m e n t éblouissant. Avec plus de 144 millions de spectateurs dans plus de 123 pays à travers le monde, les Harlem Globe­ trotters sont assurément un événement à voir et à revoir !

UNE BELLE HISTOIRE

Fondée en 1926 à Chicago par Abe Saperstein, l’équipe débute son histoire dans la Negro American Legion League. En 1940, alors c o m p o s é e à 10 0  % d e joueurs noirs, encore bannis des ligues majeures, la formation sportive défait les Bruins de Chicago lors de la finale du Championnat du monde de basketball. En 1948 et en 1949, les Harlem Globetrotters battent deux fois les Lakers de Minneapolis, alors champions du monde. Dès lors, leur réputation commence à prendre de l’ampleur et ils sont reconnus comme la

meilleure équipe de basketball au monde, démontrant ainsi que les AfroAméricains peuvent ex­­ celler dans le sport pro­ fessionnel. Nathaniel « Sweetwater » Clifton devient d’ailleurs le premier joueur afro-­américain à signer un con­t rat avec la NBA, rejoignant les fa­­ meux Knicks de New York en 1950. Les Globetrotters lancent la même année leur première tournée internationale. En 1951, ils jouent devant une foule de 75 000 personnes au stade olympique de Berlin. En 1985, l’équipe sort encore

des sentiers battus en in­­ cluant la médaillée d’or des Jeux olympiques Lynette Woodard dans ses rangs. Cette dernière devient ainsi la première femme à jouer dans une équipe professionnelle masculine. Après une prestation pour le pape, des apparitions dans les plus gros talkshows américains et une intronisation au Temple de la renommée du basketball, l’équipe peut vraiment être qualifiée de légendaire. Pour voir les Globetrotters en chair et en os, achetez vos billets, en prévente jus­ qu’au 26 novembre, sur le site peps.ulaval.ca/harlem. Les étudiants bénéficient d’un tarif préférentiel. Bon match, ou plutôt bon spectacle !

Campus dynamique

Basketball : ouverture de la saison locale C’est ce dimanche 12 novembre que les é­ quipes de basketball Rouge et Or dis­puteront leur premier match local de la s­ aison 2017-2018. Ces matchs sont présentés par La Capitale assurances et services financiers. Fortes d’une première victoire obtenue samedi à l’Université McGill contre les championnes nationales en titre, les filles joueront, dès 13 h, contre les Stingers de l’Université Concordia. À compter de 15 h, la formation masculine affrontera, elle aussi, les Stingers. Cette année, l’Université Laval tentera de mettre la main sur un premier titre féminin québécois depuis 2011 et sur un premier titre masculin québécois depuis 2008. photo Yan Doublet

Pour information : rougeetor.ulaval.ca

Pas besoin d’attendre l’hiver pour patiner ! Le temps se refroidit et l’hiver arrivera bientôt. Pourquoi ne pas débuter son entraînement ou sa pratique du patin à glace sur l’une des deux patinoires intérieures du PEPS afin d’être fin prêt pour la saison ? L’accès aux patinoires est d’ailleurs l’un des quatre pri­ vilèges dont peuvent bénéficier, sans frais ­supplémentaires, les étudiants inscrits à 12 crédits ou plus. Il est à noter que les patineurs peuvent profiter de vestiaires ainsi que de s­ ervices de location et d’aiguisage. Le patinage libre est possible les lundi, mardi et vendredi, de 12 h 15 à 13 h 05, le jeudi, de 17 h 15 à 18 h 05, et les samedi et dimanche, de 19 h 45 à 20 h 50.

Vendredi 10 novembre Volleyball féminin | Montréal PEPS | 18 h Volleyball masculin | Montréal PEPS | 19 h 30

Dimanche 12 novembre Basketball féminin | Concordia PEPS | 13 h Basketball masculin | Concordia PEPS | 15 h

Vendredi 17 novembre Basketball féminin | Bishop’s PEPS | 18 h Basketball masculin | Bishop’s PEPS | 20 h

Dimanche 19 novembre Pour une cinquième année de suite, le Rouge et Or et les Carabins de l’Université de Montréal s’affronteront dans la finale québécoise de football universitaire. Ce sera une bonne occasion d’encourager vos favoris dans leur quête d’une 10e coupe Vanier ! Billets : 418 656-FOOT. photo Mathieu Bélanger

Volleyball féminin | Ottawa PEPS | 13 h


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au fil de la semaine

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le fil | le 9 novembre 2017

Bédéistes, à vos crayons ! Aimeriez-vous approfondir vos connaissances en BD ? Dominic Poulin, porte-parole pour une 8e année du Concours interuniversitaire de bande dessinée, offrira un atelier sur cet art. L’activité est ouverte à tous. Toutefois, elle vise aussi à donner des informations concrètes aux étudiants qui souhaitent présenter une œuvre à ce con­ cours. Divisé en trois volets, l’atelier permettra d’abord d’acquérir des connaissances théoriques et techniques sur la BD, comme la structure, l’histoire, les codes de lecture, l’ellipse, les angles de vue, les interactions entre les mots et l’image, le découpage et l’encrage. Ensuite, un volet axé spécifiquement sur le Concours interuni­ver­ sitaire de bande dessinée sera l’occasion de découvrir les exigences techniques propres à cette compétition et d’explorer les déclinaisons possibles du thème de cette année, « Héros anonyme ». Finalement, un volet pratique permettra aux participants de s’entraîner à devenir des bédéistes remarquables. Image Marie-Ève Bibeau, lauréate du 1er prix en 2017

Mardi 14 novembre, de 19 h à 21 h, au local 2310 de l’édifice La Fabrique. Activité gratuite. Pour s’inscrire : accueil@bve.ulaval.ca ou 418 656-2765. Pour en savoir plus sur le Concours interuniversitaire de bande ­dessinée : bit.ly/2hTRjar

09/11

09/11

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Produits forestiers

La nature humaine

L’Afrique du Sud Péruviennes des Personnages Véhicules en vélo régions minières féminins de la télé autonomes

L’économie forestière ne comprend pas uniquement le commerce du bois. Toute une industrie s’est également développée autour des produits forestiers non ligneux (les fruits sauvages, les champignons, les essences qui entrent dans la compo­ sition des produits phar­ maceutiques ou des huiles essentielles, etc.). Trois ­communautés anicinapek d’Abitibi-­Témiscamingue ont mis sur pied un projet économique qui allie leurs savoirs traditionnels à la cueillette des produits de la forêt, à leur transformation et à leur vente. Dans la con­ férence « La commercialisation des produits forestiers non ligneux : nature, culture et économie », Dany Bisson, chargé de projet issu de la Timiskaming First Nation, l’une des trois communautés impliquées, expliquera les étapes et les incidences de l’instauration de cette économie chez les autochtones.

« L’homme est-il violent par nature ? » C’est sur ce thème que se tiendra le premier bar des sciences organisé par la Société Provancher. Trois experts débattront de la question et répondront aux questions de l’animatrice de la soirée, Valérie Borde, journaliste scienti­ fique et chargée de cours au Département d’information et de communication. Dans une ambiance décontractée, venez donc écouter les opinions de Cyrille Barrette, professeur émérite au Département de biologie, de Félix Aubé Beaudoin, doctorant à la Faculté de philosophie, et de Luc Durocher, professeur de criminologie au Collège Ahunstic de Montréal, et faites-vous votre propre idée sur les aspects culturels ou naturels de la cruauté humaine.

Saviez-vous que l’Afrique du Sud est une destination de rêve pour les cyclotouristes ? C’est du moins l’opinion de Catherine Pinard, qui a récemment découvert ce pays en vélo. Partie du Cap, elle a longé la mer sur la Garden Route – bien connue des surfeurs – pour atteindre le cap des Aiguilles, le point le plus méridional du continent. Elle a ensuite poursuivi son périple sur la route 62, qualifiée de plus longue route des vins du monde. Ce chemin peu achalandé permet de rouler en toute quiétude à travers des villages pittoresques, des cols de montagne spectaculaires et des réserves ­na­­turelles magnifiques. Venez donc entendre la cycliste raconter ses anecdotes de voyage lors de la prochaine soirée cycliste de la Coop Roue-Libre.

Jeudi 9 novembre, à 19 h 30, à la brasserie La Korrigane (380, rue Dorchester). Pour plus d’information et pour s’inscrire : www.provancher. org/activites-speciales

Lundi 13 novembre, à 19 h, au café Fou AELIÉS au pavillon Alphonse-­ Desjardins. Entrée libre.

Jeudi 9 novembre, à 10 h 30, à la salle Lionel-Daviault du Centre de foresterie des Laurentides. Entrée libre.

photo Catherine Pinard

14/11

L’Institut Femmes, Sociétés, Égalité et Équité, le Dépar­ tement de génie des mines, de la métallurgie et des matériaux, la Chaire en développement international et l’Institut EDS s’unis­ sent pour présenter la con­ férence de Patricia Amat y Leon intitulée « Les femmes et les mines : mémoires d’un parcours de résistance dans les Andes péruvien­ nes ». Cette féministe du Pérou racontera, entre autres, l’histoire d’organi­ sations venant en aide aux femmes dans les régions minières des Andes. La conférencière souhaite surtout faire connaître des faits troublants et partager les données actuelles touchant la violence et le ­harcèlement perpétrés par les compagnies minières contre les femmes dans cette contrée du monde. Mardi 14 novembre, à 11 h 45, au local 3106 du pavillon Paul-Comtois. Entrée libre.

16/11

Le Centre de recherche ­interuniversitaire sur la ­littéra­ture et la culture québécoises vous invite à la conférence « Les transfor­ mations des personnages féminins des téléséries québécoises à l’ère des récits “postféministes” », qui sera prononcée par Stéfany Boisvert, de l’Université McGill. Cette chercheuse postdoctorale montrera que la transformation, depuis 2015, de certains modèles narratifs s’accompagne d’ambivalences idéologiques, signe d’une volonté de di­­ versification et de contestation de stéréotypes sexistes, mais aussi d’un attachement tenace à des conceptions traditionnelles, conser­va­ trices, ou du moins limitatives, du féminin. Dans cette présentation, la notion de « postféminisme » sera em­­ ployée de manière critique pour analyser, entre autres, le contre-­stéréotype du renversement des genres. Jeudi 16 novembre, à 11 h 30, au local 4433B du pavillon Louis-JacquesCasault. Entrée libre.

Consultez le calendrier complet des activités sur le campus à ulaval.ca

16/11

Le concept de véhicule routier autonome se concrétise de plus en plus. D’après les études prospectives, d’ici dix ans, il sera présent sur nos routes. Profitez de la conférence « Google Car et compagnie : comment fonctionnent les véhicules autonomes ? », présentée par l’ITIS, pour en apprendre un peu plus sur ce phénomène en émergence. Le professeur au Département d’informatique et de génie logiciel Philippe Giguère expliquera quels sont les systèmes, les algorithmes et les capteurs qui exploi­ tent les informations disponibles afin de rendre pos­­ sible la conduite autonome. Ce spécialiste de l’autonomisation de systèmes robotiques intelligents montrera également quels sont les avantages de cette technologie pour notre société. Jeudi 16 novembre, à 19 h, à la salle Gérard-­ Martin de la bibliothèque Gabrielle-Roy (350, rue Saint-Joseph Est). Entrée libre.


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