Le Scandaleux Mag' 26 – Printemps 2017

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« TOUTE PERSONNE QUI PENSE FORTEMENT FAIT SCANDALE » BALZAC

LE MAGAZINE DES ETUDIANTS LILLOIS #26 - PRINTEMPS 2017

DOSSIER :

NE PAS JETER SUR LA VOIE PUBLIQUE. DÉPOSEZ-LE DÉLICATEMENT, C’EST FRAGILE.

Les industries parallèles

Technologie :

YouTubeurs, iPhone et obsolescence programmée

Divertissement :

Test, horoscope et guide de survie lescandaleuxmag.fr


ÉDITO Chère lectrice, cher lecteur, Quels mois agités ! Entre les frasques politiques

de l’industrie du sexe au Japon à l’univers des

de Donald Trump et la campagne présidentielle

sectes, du dark Web aux trafics de drogue et

française qui bat son plein, l’actualité ne nous

d’humains, nous avons souhaité porter notre

donne pas le temps de niaiser ! Mais ces mois

regard sur ces économies méconnues. Des

historiques, aussi passionnants et passionnés

économies qui font partie intégrante de notre

soient-ils, ne sauraient détourner le Scandaleux

monde, et qui ne sont finalement pas si éloi-

de la tâche qui est la sienne : informer, traiter

gnées de nous, les étudiants.

de sujets inattendus, décalés et parallèles.

Ce nouveau numéro du Scandaleux vise éga-

Parallèle : tel est le mot-clé de ce magazine. Car

lement à vous détendre, au travers de ses dé-

au-delà du monde que nous côtoyons chaque

sormais traditionnels tests et horoscopes. Que

jour, vivent et prospèrent de nombreux bu-

vous puissiez rire, être surpris ou tout simple-

siness occultes. Aussi fascinants que terrifiants,

ment passer un bon moment, tels sont nos ob-

ils sont aussi nombreux. Le Scandaleux a donc

jectifs. S’ils sont accomplis, alors ma mission de

souhaité s’y inté-

Rédac’ Chef – qui touche à sa fin avec ce mag –

resser :

l’est aussi ! Profitez bien de votre vie à Lille : sortez, allez lire au Jardin Vauban ou au Parc Lebas, et surtout restez ouverts et informés ; ce mois-ci, tout peut se passer, pour le pire et pour le meilleur ! Scandaleusement vôtre, Léo-Pol Charra Rédac’ Chef

Directrice de la publication : Lucie Prudhomme Rédacteur en chef : Léo-Pol Charra Mise en page : Émile Delevallée, Christine Chow, Aude Cormerois, Tiphaine Gerondeau 2

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SOMMAIRE Société :

Vis ma vie de YouTubeur

p. 4-5

DOSSIER : LES INDUSTRIES PARALLÈLES p. 6-7 L’industrie rose au Japon Brève aventure dans les basp. 8-9 fonds d’Internet p. 10-11 Un trafic bien trop humain Vie et mort de Griselda Blanco, p. 12-13 la madrina Les sectes, ou comment devenir riche en racontant un max de p. 14-15 bullshit

Faune et technologie Abécédaire du robinet Obsolescence programmée : consommateurs coincés ? Dans la peau d’un iPhone

Idée

p. 16 p. 18-19 p. 20-21

Et si on soignait son burn-out à l’indienne ? p. 22-23

Test : Quel dictateur est ton âme sœur ?

p. 24-25

Divertissement : Guide de survie étudiant Horoscope

p. 26 p. 27

LE SCANDALEUX MAG #26 - PRINTEMPS 2017

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SOCIÉTÉ

e d e i v a m Vis ste derrière nt leur augu

nes qui pose

jeu urs sont des e b u T u o Y s ement, le

Objectiv

#TrucsDeJeunes Les YouTubeurs sont avant tout des digital natives qui ont grandi avec Internet et qui maîtrisent parfaitement les outils de partage de l’ère numérique. La plupart d’entre eux ont entre vingt et trente ans, ils ont donc l’âge idéal pour toucher un public adolescent tout en ayant suffisamment de maturité – de recul, plutôt – sur les sujets qu’ils abordent (parce que tomber sur une gosse de douze ans qui t’apprend à te maquiller ? Really ?). Mais justement, de quoi parlent-ils ? Cyprien, qui a récemment dépassé la barre des dix millions d’abonnés, se fera une joie de disserter sur des sujets pseudo-philosophiques (l’école, les pubs, le corps, les séries, les réseaux sociaux, les jeux vidéo, la bouffe…) tandis que Squeezie, le casque vissé sur la tête, testera différents jeux vidéo en les commentant à chaud (« On joue vraiment une culotte qui vole, là ! », « On est vraiment des petits cacas sur cette planète », « Je suppose qu’on est mort... ») ; enfin, EnjoyPhoenix dispensera avec générosité ses astuces de beauté, de mode et de cuisine. Autant de thèmes qui concernent directement les mignonettes collégiennes, les geeks lycéens et les bébés adultes étudiants, autant de thèmes qui les intéressent, autant de thèmes qui les passionnent. #AuthenticitéLesGars Mais aborder les bons sujets ne suffit pas. La clef du succès, c’est l’authenticité. D’après une étude (2015) de Variety, un magazine américain consacré à l’industrie du spectacle, les jeunes seraient sept fois plus attachés aux YouTubeurs qu’aux stars du cinéma et de la musique. Ces dernières sont considérées comme inaccessibles, admirées seulement de loin. Au contraire, les YouTubeurs créent une proximité unique avec leurs fans, en s’adressant directement à eux à travers la caméra, en disant franchement ce qu’ils pensent sans s’autocensurer, en faisant preuve d’un humour simple voire ridicule – comme s’ils plaisantaient avec leurs meilleurs potes – en n’hésitant pas à exprimer leur personnalité dans ce qu’elle a de plus wtf farfelu et en ouvrant grand les portes de leur vie privée. Les fans apprécient leur naturel et les trouvent plus sincères que les célébrités

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traditionnelles qui se réfugient derrière une image lisse et un discours préparé. Le quotidien que les YouTubeurs mettent en scène est le quotidien de millions de jeunes, les souvenirs qu’ils évoquent sont autant d’échos communs à la génération Y. Loin du mode de vie luxueux des Beyoncé et des Leonardo DiCaprio, les YouTubeurs exposent leur intimité des plus ordinaires : ils ont les mêmes

problèmes que nous, se posent les mêmes questions existentielles que nous, font les mêmes blagues vaseuses que nous. En fait, ils sont les voisins que l’on pourrait tous avoir (boy/girl next door), les passants que l’on a tous croisés dans la rue. Cette proximité permet aux jeunes de s’identifier aux YouTubeurs. #RockstarOrNot Les YouTubeurs sont devenus des référents culturels pour toute une génération. Les parents ne comprennent pas pourquoi leurs si nobles rejetons passent des heures enfermés dans leur chambre à s’esclaffer devant des vidéos. Pourquoi ils dilapident leur argent de poche dans

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SOCIÉTÉ gouement ?

tant d’en suscitent-ils

#MoneyMoneyMoney des cadeaux qu’ils envoient à des… gens (« Papa, tu les connais pas, mais genre en vrai c’est comme des potes, enfin tu peux pas comprendre ! »). Pourquoi ils crient quand ils rencontrent un certain Roumain à lunettes (« Cyprieeeeen ! »). En fait, les YouTubeurs sont devenus des idoles. Lors du Vidéo City organisé à Paris en 2015, sorte de gigantesque meet-up des plus grands YouTubeurs, on a assisté à la même routine que pour les concerts de rockstars :

places limitées qui s’arrachent, longues files d’attente, hurlements hystériques (« T’es trop beeeelle ! », « Je t’aiiiiime ! »), bousculades pour essayer de toucher la main de Seb la Frite, agglutinement devant les stands de dédicace, selfies (avec la meilleure duckface du monde, bien sûr), fans en larmes parce que « trop d’émotion, tu comprends », gardes du corps. La morale de cette histoire ? Offrez une médaille aux parents épuisés qui ont enduré cette épreuve 2.0. pour le bien de leur progéniture. Mais les YouTubeurs, plus que les stars traditionnelles, font face à une véritable polarisation du public : d’un côté, une communauté d’admirateurs fanatiques et zélés qui les soutient à corps et à cris ; de l’autre, des haters qui se moquent d’eux, qui les insultent voire qui les menacent. Ce qui ne manque pas de déchaîner les passions et oblige les concernés à faire des vidéos de « mise au point ».

Quand on sait que 63 % des millenials seraient prêts à utiliser un produit recommandé par un YouTubeur (selon une étude de Defy Media, qui s’appuie sur les statistiques de 2014), l’occasion est trop bonne pour la laisser passer. Les marques ont compris que les YouTubeurs étaient des « influenceurs » (ils orientent les comportements d’achat de leurs fans), c’est pourquoi elles n’hésitent pas à leur offrir des produits pour qu’ils en fassent la publicité dans leurs vidéos. Ce commerce peut se révéler extrêmement lucratif, mais soulève d’importantes questions éthiques. Pour conserver ce sentiment (illusoire ?) de proximité avec les fans, les YouTubeurs évitent en général de parler d’argent (les chiffres sont introuvables, seules des estimations plus ou moins hasardeuses sont disponibles). En effet, s’ils « se vendent » à une marque en acceptant de promouvoir un produit en échange d’un chèque à quatre/cinq/six chiffres, comment peut-on encore leur faire confiance ? Tout le monde sait qu’ils touchent un certain montant grâce aux prerolls, ces spots publicitaires précédant une vidéo YouTube, grâce aux tweets, grâce aux posts Facebook… Mais lesquels sont sponsorisés, lesquels ne le sont pas ? Lesquels sont sincères, lesquels sont hypocrites ? Ainsi, la question de leur rémunération cristallise les tensions, car elle pose le problème de leur indépendance – de leur authenticité.

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Christine Chow

Classement des YouTubeurs les mieux payés en 2016 (Forbes) : 1. PewDiePie : 15 000 000 $ 2. Roman Atwood : 8 000 000 $ 3. Lilly Singh : 7 500 000 $ 4. Smosh : 7 000 000 $ 5. Rosanna Pansino : 6 000 000 $

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DOSSIER

L’industrie rose au Japon Depuis des siècles, le Japon a un rapport avec l’amour, le sexe et l’érotisme qui, d’un point de vue occidental, peut paraître étrange. Dans un pays où la natalité recule d’année en année, on a transformé en art les gravures érotiques les plus osées, et l’industrie du sexe se classerait deuxième plus puissante juste après l’automobile. Le porno et la prostitution contribueraient donc au même titre que Toyota à l’économie japonaise.

Parmi les jeunes Japonais (18-35 ans), 40 % seraient encore vierges, mais 13,6 % des hommes admettent avoir déjà eu recours à la prostitution, contre 1,1 % en France. Il semble y avoir aujourd’hui un fossé générationnel, car les jeunes Japonais n’adhèrent plus au modèle de société apparu après-guerre, pour lequel leurs parents ou grands-parents ont tout donné. Ceux-ci ont permis la renaissance puis le triomphe du pays grâce à une éthique de travail sacrificielle, où l’on se donne à l’entreprise en renonçant à toute vie personnelle, de famille et surtout de couple. Une fois le devoir marital accompli, la femme se consacre à l’éducation des enfants, et l’intimité dans les mariages japonais est quasiment absente. C’est cette famine sexuelle dans le couple traditionnel qui amène en particulier les hommes à recourir de manière courante à tous les services possibles et imaginables de l’industrie « rose ».

Ah, l’amour sans lendemain Malgré des tentatives de contrôle au cours des siècles, la prostitution organisée n’est interdite qu’en 1957 au Japon. C’est une loi-passoire, car elle n’évoque que le proxénétisme (mise en relation d’un client et d’une prostituée) et la prostitution avec pénétration vaginale. Cela laisse bien sûr une très grande marge pour faire preuve de créativité... et Dieu sait combien les Japonais ont une imagination fertile dans ce domaine. Aujourd’hui, les établissements qui se rapprochent le plus des bordels tout en restant dans la légalité sont les soap lands, sortes de salons de massages et de bains. La défense des exploitants consiste à dire qu’ils ne sont pas responsables d’une relation sexuelle entre deux adultes consentants. Cela s’apparente à la prostitution, mais la justice ferme bien souvent les yeux sur ce système car le gouvernement ne souhaite pas faire plonger la prostitution dans l’illégalité totale, où les yakuzas (la mafia japonaise) la contrôleraient.

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D’autres établissements sont spécialisés dans le marché du sexe, flirtant avec les limites de la légalité : les pink salons spécialisés dans la fellation et les services excluant la pénétration, ou encore les image clubs, où les mêmes services sont mêlés à des jeux de rôle précis.

Vous voulez un whisky ? Oh, juste un doigt Dans le même genre d’hypocrisie, on trouve les kyabakura (mélange des mots « cabaret » et « club»), ou clubs d’hôtesses. Ce sont des salons où travaillent de jeunes femmes bien habillées et apprêtées, rompues à l’art de la conversation et sachant faire dépenser à leurs clients tout leur argent au bar. Elles allument leurs cigarettes, chantent avec eux au karaoké, flirtent allègrement et écoutent les problèmes des salarymen qui viennent les voir. La plupart des hôtesses s’en tiennent à ce genre de relation, d’autant plus que les contacts sexuels sont interdits dans ces salons. Rien n’empêche cependant les clients qui le souhaitent de proposer des rendez-vous payés à ces femmes à l’extérieur. Les clubs emploient souvent des étrangères dans leurs effectifs, pour certaines des occidentales, mais pour d’autres (dans des clubs plus ou moins illégaux) des femmes originaires de pays comme la Thaïlande ou les Philippines, parfois victimes du trafic d’êtres humains. La forme masculine de ce service existe depuis plusieurs années, avec des butler cafés où de jeunes hommes, les hosts, divertissent les femmes qui ont les moyens de consommer dans leurs établissements. Au contraire des hôtesses qui surjouent leur féminité, les hosts ont un style encore plus androgyne que les idols de la pop japonaise. La prostitution semble a priori inexistante ici, les femmes cherchant plutôt quelqu’un qui ferait semblant de les apprécier et tâcherait de les faire rire.

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DOSSIER Être et Paraître Hon’ne : « vrai son », désirs et sentiments véritables jamais exprimés Tatemae : « façade », discours, opinions exposés en public

Le monde un peu flou du porno japonais L’industrie du porno génèrerait à elle seule plus de 3 milliards de dollars de revenus au Japon, l’un des plus gros pays producteurs au monde. C’est un business florissant qui sait très bien s’exporter, et les lois strictes encadrant la production de contenu « obscène » sont liées à son succès. Alors que jusqu’au 18e siècle circulaient au Japon des shunga, gravures érotiques entrées dans la légende du hard, l’ouverture à l’Occident fait se parer le Japon d’un lustre de puritanisme. La production de contenu obscène est interdite, mais le contexte japonais est par nature favorable à cet éternel contournement de lois appliquées de manière plus ou moins laxiste. Jusqu’à l’imposition artificielle du puritanisme à l’occidentale, le Japon avait comme base culturelle un shintoïsme peu contraignant sur les mœurs et une forte tradition du sexe comme une forme d’art. Jusque dans les années 1990 on doit cacher la région pubienne de rectangles noirs ou de pixels, car même les poils ne doivent pas être vus. Ce n’est qu’en 2008 que l’on autorise par jurisprudence de montrer poils pubiens et organes génitaux avec une visée artistique. Une aussi longue période de censure a donné naissance à des contenus rivalisant d’inventivité pour contourner les lois et être à égalité avec les œuvres importées de l’étranger. C’est là que sont apparus le bukkake, mais aussi les films avec des pratiques telles que le bondage, le hentai (« perversion» , « anormal » ou « bizarre », en japonais) ou le lolicon/shotacon, mettant en scène de très jeunes filles et garçons dans des dessins animés à caractère pornographique.

qui sont de moins en moins enclins à reproduire le schéma de leurs parents. À une vie écartelée entre famille, travail et débauche, ils sont de plus en plus nombreux à préférer le renoncement. Certains renoncent à toute la société, comme les hikikomori qui s’enferment chez eux ; d’autres se revendiquent comme des « garçons herbivores » et se détournent du couple et du sexe. Cela nuit d’ailleurs à l’industrie pornographique, qui a depuis quelques années des problèmes pour recruter des talents masculins. L’une des porn stars japonaises masculines les plus connues, surnommée Shimiken le Roi du porno, passe en 2015 un appel à l’aide car le ratio de 70 acteurs pour 10 000 actrices le force à tourner deux à trois films par jour pour répondre à la demande. Tous ces nouveaux développements posent sérieusement la question de l’avenir de l’industrie du sexe au Japon, même si pour l’heure, il semble qu’elle ait encore de beaux jours devant elle.

La déviance et le Japon Comme on peut le voir avec la relative tolérance dont bénéficient la prostitution et les produits de pornographie extrême, pédophile ou fétichiste, le Japon semble être le lieu idéal où vivre et exprimer sa déviance. Les love hotels où l’on peut entrer sans être vu pour louer une chambre une heure ou une nuit, dans des décors plus fous les uns que les autres, en sont encore l’illustration. La déviance doit malgré tout rester cachée, car la condition sine qua non pour pouvoir réaliser ses rêves les plus inavouables est d’obéir en surface aux exigences de la société. Cette relative intolérance de la société pour qui ne prétend pas au moins rentrer dans des cases prédéfinies a un rôle parfois paralysant pour les jeunes Japonais,

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Anne Charpignon 7


DOSSIER

Voyage dans les

Vous avez sûrement déjà entendu parler de cette métaphore qui représente Internet : un iceberg dont la surface émergée représente le « visible Web » et l’autre partie, sous l’eau, le « deep Web ». C’est dans ces eaux troubles que nous allons nous aventurer, avec pour destination le dark Web. Lieu de dépravation ou de liberté totale ? Allons voir de plus près…

AVERTISSEMENT Inutile de vous dire qu’entrer dans le dark Web (voir le glossaire pour la distinction entre dark Web et deep Web) n’est pas sans danger, autant pour votre ordinateur que pour votre sensibilité. Aussi, nous vous recommandons de ne pas vous y aventurer, à moins que vous ne souhaitiez que votre compte bancaire soit vidé, que votre ordinateur soit transformé en « machine zombie » ou encore que votre album photo favori « Moi tout nu sous la douche » se retrouve sur Internet. Le but de mon article sera de décrire brièvement le phénomène du dark Web. Attention : les recherches effectuées dans cet article ont été réalisées par des professionnels (ou pas), n’essayez rien de tout cela à la maison. Le deep Web est avant tout un lieu de partage d’informations. Qu’il s’agisse de trolls (Encyclopedia Dramatica, fermé aujourd’hui), d’un Wikipédia alternatif (The Hidden Wiki) ou de forums, le nombre d’informations transitant chaque minute sur ces réseaux de partage est particulièrement considérable. Nous pouvons par exemple nous attarder sur un forum des plus actifs de la communauté francophone du deep Web, regroupant plus de 20 000 membres, le FDW (French Deep Web). Pourquoi parler de ce site ? Il répertorie de nombreux tutoriels et discussions sur des sujets tels que la fabrication d’armes à partir de composants artisanaux, l’exploitation de failles pour récupérer des parties de bases de données (identifiants, mots de passe, numéros de cartes bleues…) ou la réalisation de faux papiers (billets de train…). En bref, c’est une véritable bibliothèque française

du cybercrime. Cependant, le site ne se réduit pas à cela : se voulant anonyme, il revendique son désir d’une liberté totale et les autres sections, tout aussi actives, parlent de sexualité, de sciences humaines, de complots et d’actualité. Il existe de nombreux autres sites où les visiteurs, profitant de leur anonymat, partagent et s’expriment en toute liberté. C’est le cas par exemple dans des pays où le gouvernement contrôle et censure le visible Web.

Une foire de la criminalité Outre un partage de connaissances accru, le dark Web est aussi le lieu où l’on peut voir une économie parallèle fructifier. Le développement de crypto-monnaies, telles que le Bitcoin (BTC), la plus connue, a grandement participé à son essor. À titre indicatif, 16 000 000 BTC sont

« Rien n’est jamais tout blanc ou tout noir » – TheLegend27 8

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bas-fonds d ’Inte r ne d’un PC à distance (via le Remote Administration Tool), espionner un ordinateur...

t

actuellement en circulation. Pour un taux de change de 1 BTC = 950 €, cela représente une masse monétaire de 15,2 milliards d’euros rien que pour cette devise ! On pourrait aussi citer l’Ether (ETH) ou le Dogecoin (XDG). Ce dernier tire son nom du célèbre meme d’un Shiba-Inu et de textes en Comic Sans. Ces monnaies sont un point de passage obligé pour toute transaction sur le dark Web puisqu’elles garantissent l’anonymat du vendeur et de l’acheteur. Ainsi, de nombreux produits sont proposés sur cette face cachée d’Internet via des blackmarkets : armes, drogues, documents officiels (passeports, cartes d’identité...) ou encore viagra (mais oui). Ces produits sont directement envoyés par la poste, à des points relais (comme le Carrefour de votre quartier par exemple). Un exemple emblématique : Silk Road, fermé en 2013 par le FBI, se voulait « l’eBay de la drogue » et aurait généré 1,2 milliards de dollars de chiffre d’affaires durant les deux ans de son existence. Des services sont également proposés. Par exemple, on peut louer les compétences d’un hacker pour pirater le compte Facebook d’un proche et faire croire à tous ses amis qu’il est subitement devenu homosexuel. Cependant, la plupart des services vont bien plus loin que cela (et sont souvent très onéreux) : rendre inaccessible pendant 24h un site web (attaque par déni de service, ou « DDoS » en anglais), obtenir un malware anonyme pour prendre le contrôle

DOSSIER

Bon… C’est un tableau pas très joyeux. Finalement, aller sur le dark Web, c’est légal ou pas ? Tout dépend de vos actions. Si ce n’est que par curiosité, vous n’avez rien à craindre d’un point de vue légal : il n’y aura pas un groupe de CRS qui débarquera chez vous parce que vous lisez un article concernant les crypto-monnaies sur un forum du dark Web. Par contre, la pédopornographie et l’achat de produits illicites sont punis par la loi (sans blague). Il existe de faux vendeurs et des sites tenus par des autorités dont le but est simplement de récupérer les informations d’un acheteur ou d’une personne un peu malsaine qui aurait des goûts très (très) particuliers. En revanche, faites attention à ne pas communiquer vos informations privées sur les forums de partage (emails, mots de passe…). Les bases de données sont un miel dont les autorités et les hackers sont particulièrement friands.

Vous voulez comprendre quelque chose ? Puis-je vous aider ? Web : issu de World Wide Web, ce mot signif… Non attendez, vous avez vraiment cru que j’allais définir ça ? TOR : navigateur Internet permettant d’accéder à un réseau caché (du même nom) et de naviguer de manière plus ou moins anonyme dans le deep Web. Crypto-monnaies : appelées par certains le « nouvel eldorado », ce sont des monnaies électroniques qui garantissent un moyen de paiement décentralisé, anonyme et (pratiquement) sûr.

Deep Web : concerne une partie d’Internet qui n’est pas référencée par votre moteur de recherche (Chrome, Firefox ou Edge pour n’en citer que trois). Par exemple, informations universitaires et ressources gouvernementales peuvent faire partie du deep Web, accessibles en ligne mais restreintes par des authentifications. Dark Web : c’est une partie du deep Web, connectée à un réseau décentralisé et anonyme, dont l’accès nécessite l’utilisation de protocoles et de configurations spécifiques (l’utilisation du réseau TOR par exemple). Alexandre Suberbielle : auteur de cet article.

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DOSSIER

Un trafic bien trop humain

La mondialisation a accéléré les mouvements de capitaux, de marchandises mais aussi de maind’œuvre illicite. C’est dans ce contexte d’économie de marché que les frontières se sont peu à peu ouvertes aux marchandises, aux investisseurs et aux ressortissants des pays développés tout en restant fermées à la plupart des pays pauvres ou en guerre, en raison de législations qui tendent à devenir plus restrictives dans les pays attractifs. C’est aussi dans ce contexte que le trafic international d’êtres humains a pris une ampleur insoupçonnée dans les années 1990. Il s’inscrit dans le prolongement de l’esclavage et du commerce triangulaire abolis entre le 18e et 19e siècles mais peut prendre des formes plus diversifiées. Zoom sur ce trafic pour le moins inhumain…

Le trafic d’êtres humains, quésaco ? Il ne faut pas confondre l’introduction clandestine de migrants avec le trafic d’êtres humains. En principe, dans le premier cas, les personnes sont consentantes et sont libres une fois arrivées à destination. Au contraire, dans le second cas, elles sont victimes d’enlèvement, se font duper, perdent leur liberté et subissent des sévices physiques et psychologiques. Dans le pays de destination, cet esclavage moderne répond à la demande de maind’œuvre servile et bon marché. Il correspond ainsi aux besoins occidentaux que ce soit en matière de prostitution (62 %), de travail forcé dans l’agriculture ou l’industrie (25 %), de travail domestique, de mariage forcé ou de mendicité. On estime par exemple que les trafiquants qui se succèdent dans le processus de vente d’une femme gagnent au total 250 000 dollars (données de la CIA). Cet esclavage inclut également le prélèvement d’organes,

« On est très loin du cliché du film Taken [...]. Au contraire, les victimes sont souvent démunies » que ce soit à des fins médicales comme le trafic de reins des pays pauvres vers les pays développés, où la liste d’attente est longue pour une transplantation, ou à des fins spirituelles. Le cas typique est la mutilation d’albinos en Tanzanie, au Burundi ou au Mozambique, où leurs membres sont des objets fétiches vendus très cher car ils servent en magie noire à apporter bonheur et pouvoir.

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Une industrie criminelle récemment mondialisée Malgré l’interdiction de l’esclavage dans la plupart des pays au cours du 19e siècle, ces pratiques ont perduré et se sont diversifiées. D’abord avec la traite des Blanches au 19ème siècle qui consistait en l’envoi, par des proxénètes, de prostituées européennes et états-uniennes vers des maisons closes en Amérique latine. Mais il a réellement débuté en Asie dans les années 1970 avec la guerre du Vietnam et les soldats américains fréquentant des bordels de Bangkok. Des réseaux criminels se sont ensuite développés pour organiser un tourisme sexuel sur mineurs en Thaïlande pour les hommes européens, et plus récemment dans le centre et le sud de l’Afrique. C’est seulement dans les années 1990 que le trafic est devenu transfrontalier avec le déplacement forcé d’êtres humains, vendus comme des marchandises. On est très loin du cliché du film Taken de Pierre Morel dans lequel on assiste à l’enlèvement d’une riche touriste américaine à Paris par un groupe mafieux albanais spécialisé dans la traite des femmes et le proxénétisme. Au contraire, les victimes sont souvent démunies et originaires de pays pauvres. Cependant, aucun continent n’est à l’abri. Ainsi 200 000 femmes venant d’Indonésie, de Malaisie, des Philippines et de Singapour travaillent actuellement dans des « saunas » et dans des réseaux de téléphone rose au Japon, enchaînées à leurs proxénètes, pour soi-disant rembourser le coût de leur recrutement et de leur voyage. Dans les maisons closes de Bombay, ce sont les Népalaises à la peau claire qui sont convoitées, certaines ayant à peine 8 ans. Entre 2009 et 2013, pour un butin de 620 millions de dollars, au

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DOSSIER Selon l’Organisation Internationale du Travail (OIT), 700 000 à 2 millions de femmes et d’enfants sont vendus chaque année à l’étranger. C’est un trafic lucratif qui rapporte entre 12 et 17 milliards de dollars par an.

n ai um Le trafic d’êtres h

moins 30 000 Érythréens ont été enlevés et transportés dans le Sinaï égyptien alors qu’ils tentaient de rejoindre le Soudan, l’Europe ou Israël pour fuir la dictature de leur pays. Dans les fazendas (grandes propriétés agricoles) brésiliennes, on retrouve encore des victimes du travail forcé. De manière plus contractuelle mais toujours illégale, au Qatar, des Asiatiques (Indiens, Pakistanais, Népalais…) sont liés à leur employeur, appelé « parrain ». Cela est particulièrement vrai dans le domaine de la construction où ces employés travaillent dans des conditions dangereuses et ne peuvent disposer d’eux-mêmes. Il n’y a qu’à voir les chantiers pour l’organisation du Mondial de football 2022 ! En Europe de l’Est, le passage du communisme au capitalisme et les conflits des Balkans ont favorisé l’essor des ventes aux enchères de femmes vulnérables (femmes au chômage ou membres de la communauté rom). Dans certaines villes d’Italie du Nord, on retrouve des Népalaises, victimes de réseaux de prostitution après avoir fait un long périple pour traverser l’Afrique. Dans le sud de l’Italie, ce sont des travailleurs polonais qui sont réduits en esclavage. La liste est interminable : des jeunes Roumains contraints à la prostitution en France, un trafic d’organes d’enfants dans les Balkans, des enfants soldats utilisés dans des conflits dans 13 pays dont l’Afghanistan, la République centrafricaine, la Colombie…

Toujours la même histoire Un ami proche, de la famille ou même parfois le prétendu « petit ami » fait croire à la victime que dans le pays de destination, celle-ci aura une vie décente. Au cours du voyage, elle est soit victime de violence physique, soit au contraire, ses accompagnateurs hypocrites la rassurent sur son sort. Une fois dans le pays de destination, elle ne parle pas la langue, est sans-papiers, n’ose pas se rebeller par peur des représailles, est surveillée, souvent droguée et alcoolisée. Si, par chance, elle arrive à se libérer, elle n’ose pas dénoncer ou témoigner. Ce trafic est généralement chapeauté par de grands réseaux criminels multiétatiques, opérant aux côtés des trafiquants de drogues et d’armes. Ainsi des gangs bulgares envoient des femmes vers le sud de l’UE via la Grèce, vers le sud-est en Turquie et au Moyen-Orient, vers le nord en République tchèque et en Allemagne. Ces gangs travaillent avec des Moldaves, des Ukrainiens, des Russes, des Égyptiens, des Bédouins. Souvent, des élus et des policiers corrompus favorisent ce trafic très lucratif. Cela a été le cas dans l’affaire des 26 cadavres retrouvés en Thaïlande en 2015. En effet, des migrants appartenant à l’ethnie musulmane des Rohingyas, originaires

L’ONU dénombre 127 pays-sources, en grande partie en Asie et en Europe de l’Est, et 137 pays destinataires. Selon la Commission Européenne, 68 % des victimes sont des femmes, 17 % des hommes, 12 % des filles et 8 % des garçons. C’est la forme de crime organisé la plus rentable et qui connaît la plus grande expansion ces dernières années après le trafic d’armes et de drogues, bien que, d’après l’Organisation Internationale des Migrations (OIM), ces trafics complexes soient souvent liés. s

en qu elq ues chiff res

de Birmanie ou du Bangladesh où ils sont toujours persécutés, ont tenté d’atteindre la Malaisie. Cependant, ils ont été retenus et torturés dans des camps au sud de la Thaïlande par des ravisseurs qui ont demandé des rançons aux familles.

Des mesures peu efficaces… Divers moyens ont été mis en place au niveau local, national et international pour lutter contre cette traite. L’ONU s’est ainsi emparée de la question avec la création, au sein du Conseil des droits de l’Homme, du Rapporteur spécial pour la traite des personnes et du Rapporteur spécial pour les formes contemporaines d’esclavage. Des conventions entre États ont été ratifiées (Convention de Palerme, Convention sur la lutte contre la traite des êtres humains…), des opérations ont été menées (Opération Akoma en Côte d’Ivoire et Ghana en 2015 par Interpol), les législations nationales se sont durcies mais ce trafic reste d’actualité… Pour aller plus loin, n’hésitez pas à regarder le film Sold (Jeffrey D. Brown) sorti en 2016 aux États-Unis qui traite de ce sujet de manière engagée !

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Camille Manguer 11


DOSSIER

Vie et mort de Griselda Blanco,

la madrina La Colombie a toujours été l’une des plates-formes majeures du trafic de drogue en Amérique centrale : on constate l’existence de filières de trafic de marijuana dès les années 30, et de trafic de cocaïne dès les années 50. En se concentrant sur ce dernier au tournant des années 80, les trafiquants de drogue colombiens ont permis au pays d’être un acteur majeur du trafic de stupéfiants en Amérique latine. L’une des figures à l’origine de ce succès : Griselda Blanco, aussi appelée la madrina, ou la marraine.

L’irrésistible ascension de la reine de la coca 11 juillet 1979, Miami. La journée avait bien commencé au Dadeland Mall, l’un des centres commerciaux les plus populaires du comté de Dade, en Floride. Mais soudain, vers 14 heures, trois hommes de main font irruption dans un magasin de spiritueux et ouvrent le feu, tirant plus de quatre-vingt-cinq balles. German Jimenez, un trafiquant de cocaïne, et son garde du corps perdent la vie, et plusieurs employés du magasin sont blessés. C’est le premier règlement de compte en public lié au narcotrafic à Miami, et c’est l’incident qui contraint le gouvernement américain à se lancer dans la « War On Drugs » (guerre contre la drogue). Celui ou plutôt celle qui est responsable de cette fusillade ? La seule et l’unique Griselda Blanco.

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Pour comprendre comment la madrina est devenue si puissante à Miami, un petit retour en arrière est nécessaire. L’histoire de Griselda Blanco commence à Carthagène des Indes en Colombie, où elle naît le 15 février 1943. L’enfance de Griselda est loin d’être un long fleuve tranquille : la guerre civile sévit, elle vit seule avec sa mère qui la maltraite et est violée à plusieurs reprises par les amants de cette dernière. Trois ans après la naissance de Griselda, la famille déménage à Medellín. Griselda est une enfant précoce : elle aurait kidnappé un enfant vivant dans un quartier plus aisé que le sien alors qu’elle n’avait que onze ans. La famille refusant de payer la rançon, elle aurait alors tué l’enfant elle-même. Légende ou réalité ? Impossible de le savoir avec certitude. Dans tous les cas, cette anecdote annonce la couleur…

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DOSSIER À quatorze ans, Griselda s’enfuit du domicile familial. Pour survivre, elle a recours au vol, à la prostitution… Bien sûr, elle ne va pas en rester là : elle trouve très tôt d’autres moyens de gagner de l’argent. Avec son premier mari, Carlos Trujillo, un proxénète, elle organise un vaste réseau de prostitution à Medellín. Elle a trois fils avec lui, Dixon, Uber et Osvaldo, mais ils divorcent peu de temps après. Elle rencontre ensuite son deuxième mari, Alberto Bravo. Ensemble, ils émigrent à New York, dans le Queens. Pendant que monsieur est passeur d’immigrés clandestins, madame dirige un réseau de trafic de marijuana. Problème : la marijuana prend trop de place et est assez difficile à transporter. Elle se replie alors sur la cocaïne, et redouble d’imagination pour l’acheminer : elle fabrique des soutiens-gorge dotés de compartiments secrets pour que ses « mules » puissent introduire la cocaïne ni vu ni connu sur le territoire américain. Leur business est prospère : il leur rapporterait à ce momentlà plus de 8 millions de dollars par semaine. Naturellement, un réseau d’une telle envergure ne tarde pas à attirer l’attention des forces de l’ordre. En avril 1975, elle est inculpée avec son mari et trente de leurs lieutenants. À l’époque, c’est la première grande offensive du gouvernement américain contre les trafiquants de drogue. Griselda réussit néanmoins à s’enfuir et elle se réfugie dans son pays natal. Pas de repos pour la reine de la coca : à la sortie d’une boîte de nuit branchée de Bogota, la madrina accuse Alberto, son mari, d’avoir détourné des fonds de leur opération sans le lui dire. Le ton monte : elle dégaine son revolver, il dégaine son Uzi… On ne la surnomme pas la Veuve Noire pour rien : Alberto meurt tandis qu’elle s’en tire avec une légère blessure à l’estomac. Deux ans après son arrestation, elle revient aux ÉtatsUnis, alors qu’elle est encore recherchée par la DEA*. Cette fois-ci, elle s’installe à Miami, nouvel eldorado pour les trafiquants de cocaïne. Nouveau mari pour une nouvelle vie : elle revient avec Dario Sepulveda, le père de son benjamin, Michael Corleone. La madrina règne sur son réseau d’une main de fer, et n’hésite pas à tuer ses rivaux. Nelson Andreu, l’ancien chef de la police criminelle de Floride témoigne : « Ce qui la rendait unique, c’est le plaisir qu’elle prenait à tuer. » Griselda est au sommet de sa gloire. Selon Billy Corben, qui a réalisé les deux opus de Cocaine Cowboys, deux documentaires à son sujet : « Avant qu’on ne l’arrête, il y avait 10 000 Colombiens qui travaillaient sous ses ordres, dont Pablo Escobar, qui n’était alors qu’un sbire parmi d’autres. » L’argent coule * DEA : Drug Enforcement Administration, l’équivalent de la brigade des stupéfiants française

à flot, le sang aussi. Elle serait liée de près ou de loin à plus de deux cents meurtres commis en Floride du Sud durant ces années-là. Griselda fait preuve d’une inventivité remarquable pour tuer ses concurrents : elle popularise les drive-by shootings, mode opératoire d’assassinat par coups de feu tirés d’un véhicule. Comme tout bandit qui se respecte, elle a une armée d’hommes de main à sa disposition, les pistoleros, aussi appelés les cocaine cowboys par la police de Miami. Pour y entrer, rien de plus simple : commencez par tuer un des rivaux de Griselda, ou au pire quelqu’un qui lui aurait lancé un regard de travers. Ensuite, ramenez-lui une partie de son corps (un bout de doigt, une touffe de cheveux…) en guise de tribut. Facile !

Le début de la fin Les méthodes brutales de la reine de la coca finissent par agacer les autres trafiquants de la région, qui tentent de la tuer six fois, sans succès. Elle se réfugie alors en Californie pour leur échapper. Si les narcotrafiquants n’auront pas sa peau, la DEA réussit enfin à l’arrêter en février 1985. Griselda n’a alors plus rien de très menaçant. Bob Palombo, un des agents qui l’ont arrêtée, raconte : « J’ai fait irruption dans sa chambre. Elle était allongée sur son lit, en train de lire la Bible. Je lui ai juste dit : "Griselda, nous nous rencontrons enfin." Et avant de lui passer les menottes, je l’ai embrassée sur la joue. » Dix ans après sa première arrestation, la traque est enfin finie. Coup de bol pour elle, elle est seulement jugée pour trafic de drogue, et non pas pour les nombreux meurtres qu’elle a commis, grâce à un vice de procédure. Pendant qu’elle est en prison, ses trois premiers fils sont tués à l’instant même où ils débarquent à l’aéroport de Bogota. En juin 2004, elle est libérée et renvoyée en Colombie après dix-neuf ans de réclusion. Contre toute attente, la madrina ne subit pas le même sort que ses fils. Elle mène une vie calme et tranquille dans un quartier résidentiel de Medellín : les riverains la surnomment « la tante ». Son seul luxe ? Se rendre chez le coiffeur deux fois par semaine. Finalement, ses rivaux se vengent en septembre 2012 : à la sortie d’une boucherie, elle est abattue par deux hommes à moto. Parce que le karma fait bien les choses, elle meurt par le même mode opératoire qu’elle avait elle-même rendu populaire… « C’est juste une bouchère qui a fini devant une boucherie », ironise Bob Palombo.

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Monique Bayama 13


DOSSIER

LES SECTES ou

Comment devenir riche en racontant un max de bullshit Vous avez toujours rêvé d’être riche et idolâtré par de nombreuses personnes ? Faites d’une pierre deux coups en vous tournant vers une carrière de gourou ! Mais pour que votre secte soit couronnée de succès, suivez bien ces précieux conseils…

INVENTEZ UNE BELLE HISTOIRE À l’instar de Claude Vorilhon, mettez votre imagination au service de votre illustre projet en racontant un joli conte. Rassurez-vous, nul besoin qu’il soit crédible ! Ce Français dit avoir rencontré des extraterrestres (les Elohims) qui lui ont expliqué qu’ils avaient créé la Terre. Il apprit ainsi qu’il s’appelait en fait Raël et que, comme Jésus, il était né de l’union d’un être humain avec un Elohim. Raël eut la bonté d’écrire un livre pour faire part au monde de ces révélations. Interviewé sur un plateau télé pour en parler, il reçoit dès le lendemain de l’émission, des dizaines de courriers de personnes intéressées par son histoire. Il lance alors le mouvement raëlien en 1974. Prônant la liberté totale et l’amour, il propose de nombreux cours de « méditation sensuelle » à ses adeptes pour la modique somme de 4 600 francs (environ 700 €). Comme toute secte qui se respecte, les raëliens ont un ensemble de traditions : ils n’ont pas le droit de boire, de fumer, de voter, ni d’avoir d’autre religion que leur croyance en Raël. Ils ont également des rites comme des soirées sensuelles lors desquelles les règles sont simples : pas de jalousie et pas de limite, tout le monde peut coucher avec tout le monde, quelque soit son sexe ou son âge… oui oui, son âge ! En 1997, deux raëliens sont condamnés pour avoir violé une fille de 11 ans devant sa mère, qui les a laissés faire. Comme quoi peu importe ce que vous racontez, lorsque l’on vous croit, vous obtenez ce que vous voulez ! Ce qui m’amène à mon deuxième point…

ABUSEZ DE VOS MEMBRES Selon Serge Blisko, président de la Mission de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES), le premier signe d’une secte, c’est la manipulation mentale : « l’exposé d’une théorie fumeuse avec des mots scientifiques, qui font que la plupart des gens ne comprennent rien à ce qui est raconté ». Viennent ensuite les exigences financières (voir le troisième point) et l’abus de faiblesse. Tout cela, Eric Pearl l’a bien compris. Auteur du livre La Reconnexion sorti en 2002, il propose une méthode de guérison des maladies, utilisant une énergie qui vient de l’univers. Il offre des stages à 600 € pour devenir « reconnecteur certifié » en seulement deux jours. Grâce à son charisme et à ses mots bien choisis, il explique sa méthode devant des centaines de personnes. Celle-ci est très simple : on guérit le malade sans le toucher ! « Imaginez que vos mains sont des satellites captant les signaux de l’univers. » On ne peut faire plus clair ! Ces stages marchent si bien qu’Eric Pearl permet maintenant à des enfants de devenir guérisseurs, dès quatre ans !

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DOSSIER Le résultat de ces séminaires est légèrement inquiétant : des personnes pensent être certifiées et vous font payer cher des séances de guérison lors desquelles elles ne vous touchent même pas ! Et Eric Pearl est loin d’être le seul à faire de l’ésotérisme en médecine : en France, 25 % des signalements de dérives sectaires auprès de la MIVILUDES concernent le domaine de la santé. Certains individus agissent comme des « gourous thérapeutiques » et étendent leur emprise sur leurs patients, allant parfois jusqu’à les agresser sexuellement*.

SOUTIREZ-LEUR LE PLUS D’ARGENT POSSIBLE N’oubliez pas, être gourou, c’est un business avant tout ! Prenez donc exemple sur la Scientologie. Pour en gravir les échelons, il vous faudra acheter des livres. Le premier sera bon marché : La Dianétique, point de départ de tout scientologue, ne coûte qu’une vingtaine d’euros. Mais vous comprendrez bien vite que vous ne pouvez pas vous arrêter là. Pour monter en grade, il faut suivre des cours, acheter d’autres livres et dépenser toujours plus. Et des grades, il y en a pléthore ! Vous n’êtes pas près d’arriver au bout ! Lorsque vous en aurez assez de payer, gare à vous… Vous pourriez bien être surveillé par l’Office des Affaires Spéciales qui garde un œil sur les scientologues. Les moins sages d’entre eux sont internés dans les Rehabilitation Project Force, des camps de redressement où ils doivent travailler pendant plusieurs années. Une Australienne raconte même avoir été séquestrée sur un paquebot pendant douze ans ! Afin de gagner plus, il faut recruter plus. Et dans ce domaine, les scientologues sont des experts. Ils viendront vous chercher dans la rue pour vous faire essayer « l’électromètre », un appareil qui mesurerait votre charge émotionnelle. Puis, à force de questions, les vendeurs vous feront comprendre que votre vie est minable et pour résoudre tous vos problèmes, vous achèterez La Dianétique. Bref, vous l’aurez compris, la Scientologie, c’est une belle entreprise de 40 000 clients qui financent et vénèrent le PDG : David Miscavige, successeur de l’illustre Ron Hubbard.

ET ENTREZ DANS LA LÉGENDE À quoi bon toute cette mascarade si personne ne se souvient de vous ? Une bonne secte, c’est aussi une secte qui marque les esprits. Le plus sordide pour la fin, connaissez-vous l’histoire de l’Ordre du Temple Solaire (OTS) ? Tout débute grâce à Joseph Di Mambro, un bijoutier français qui a fait de la prison pour escroquerie (ça commence bien !). Il décide un jour de suivre mes conseils et de créer sa secte. Il recrute ses membres par le biais de conférences et de cours (de yoga entre autres) et mène bientôt un groupe d’une dizaine de personnes. Pour les impressionner, Jo Di Mambro invente tout un cérémonial : les adeptes, en capes blanches assorties d’une croix rouge et armés d’épées, se rassemblent le soir dans un sanctuaire. Là, leur gourou communique avec des divinités cosmiques. Il utilise en fait tout un système pour faire croire à des apparitions et à des phénomènes surnaturels. En 1984, Di Mambro recrute Luc Jouret, un médecin belge qui deviendra le leader charismatique de l’organisation. Ayant soif de légende, Joseph fait croire que sa fille Emmanuelle est « l’enfant cosmique ». Mais un beau jour, les choses se gâtent et le pouvoir de Jo est remis en question. Il décide alors d’un terrible stratagème : le transit vers Sirius, une planète où il fait bon vivre. Le seul moyen d’y accéder, c’est de se donner la mort…

Mais avant de faire ce voyage, il faut châtier les traîtres ! En 1994, il fait donc assassiner sauvagement les Dutoit au Québec. Ce couple avait quitté la secte et avait osé nommer son enfant Christopher Emmanuel. Le bébé, considéré comme un démon, est éventré avec un pieu. Le 5 octobre, quelques jours plus tard, dans deux endroits différents de la Suisse, une cinquantaine de personnes sont retrouvées mortes : à Cheiry, vingt-trois « traîtres » sont tués par balle, et à Salvan, vingt-cinq personnes sont découvertes dans les décombres d’un incendie. Ces dernières sont les chevaliers de l’OTS qui se sont volontairement donné la mort. Jo Di Mambro et Luc Jouret étaient parmi elles. Alors qu’on pensait que l’histoire s’arrêterait là, en 1995, seize adeptes nostalgiques font un nouveau suicide collectif. On retrouve leurs corps dans une clairière du Vercors, disposés en étoile. Les cinq membres restants font brûler leur maison en 1997 au Québec et permettent exceptionnellement à leurs enfants de ne pas mourir avec eux. En tout cas, le pari est réussi… tout le monde se souvient de l’OTS et de son issue macabre. De quoi vous donner envie d’entrer vous aussi dans une secte, non ?

Marin Duclos

*voir l’Envoyé Spécial du 20 mars 2014

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CULTURE

Abécédaire du robinet

Les zizis, c’est rigolo. Derrière cette fine analyse, j’aimerais aborder avec vous les mystères que la nature nous offre, et explorer toute sa diversité (ceci n’est pas une ode à la zoophilie ; enfin je crois). Laissez-vous guider pour une petite revue des beautés de la faune.

Accordons-nous tout d’abord sur la définition : un pénis, c’est un tube rendu rigide par un liquide, du sang ou de la lymphe (pour les oiseaux qui ont un pénis, sinon, c’est le zoubi cloacal). Un volatile coquin : le canard Parlons donc de ces volatiles. On s’imagine souvent que la taille du gourdin est proportionnelle à la taille de la bête. Le canard vous fera changer d’avis. Grâce à ce que l’on nomme poétiquement une « éversion explosive », son petit tuyau tout mou se gonfle en quelques secondes en gros tube, d’une vingtaine de centimètres, dans le vagin de la femelle. Charmant. Quand tu vois double : serpent ou marsupial ? Poursuivons avec des animaux qui ne manquent pas d’arguments. En effet, pourquoi se contenter d’une verge quand on peut en avoir deux ? Ou plus précisément, une verge à deux têtes. Ces prodiges de la nature, nommés hémipénis, se retrouvent chez de nombreuses espèces, plus particulièrement chez les serpents et les lézards. Il fait plus sens chez le marsupial, puisque la femelle possède deux vagins. Pratique. Mention spéciale à notre ami l’ornithorynque, qui non content d’avoir deux braquemarts, dispose de deux glands à chaque extrémité, pour un total de quatre glands, ce qui en fait l’animal le plus proche du chêne. Savoir se détacher de l’acte : les araignées et autres trucs pas sympas. Chez certaines espèces d’araignées, le mâle, une fois son travail accompli, laisse popol dans le corps de la femelle pour s’enfuir aussitôt ! En effet, celle-ci dévore ses partenaires s’ils ne sont pas assez rapides pour s’échapper… Pas de souci cependant messieurs, puisque son membre repousse très vite, ce qui permet de copuler jusqu’à trois

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fois par jour, dans le cas des limaces de mer par exemple ! Un outil de pointe : poisson, porc-épic et autres Chez l’animal, l’acte d’amour a une fonction pratique : la fécondation. Alors, pour ne perdre aucune goutte de semence, certaines espèces ont décidé de « jeter l’ancre » (comprenez s’attacher à la femelle à l’aide d’un crochet, de piques ou d’un quelconque objet pointu à la base de leur queue), et être ainsi plus efficaces ! Pour aller plus loin : un vagin à la broche chez certains insectes Il ne faut pas oublier un aspect important du sexe animalier : celui qui copule, c’est le plus fort, et il ne voit pas d’un bon œil que quelqu’un passe après lui dans une femelle. Pour éviter cela, la bruche, ce merveilleux insecte, possède un gourdin à pointe de type moyenâgeux, qui va gentiment détruire le vagin de sa compagne. Celle-ci, légèrement outrée, se chargera elle-même de repousser les mâles par la suite. Habile. Star Wars, ou l’art des épées-pénis Nous ne pouvons pas parler d’anatomie animale sans citer le magnifique exemple d’une espèce de mollusque de mer, hermaphrodite, qui combat à l’aide de son épée-pénis. Le perdant se fait transpercer et sera fécondé, il fera office de femelle. Si beau et violent à la fois… Bonus : ce qui se passe dans ton lit Je ne parle pas ici de te ce que tu peux y faire, coquin. Je parle de la punaise de lit, l’animal qui n’a jamais galéré à « trouver la voie ». Tout bonnement parce qu’il n’y en a pas, elle se contente de trouer la femelle à un endroit quelconque de son corps avec sa tringle, ce qui peut entraîner à l’occasion la mort de celle-ci. Syyympaaa.

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Aude Cormerois


W

CDTB n°59 – Les dessous du Perno 2016 Connaissez-vous vraiment Le Père Noël Est-il Un Rocker ? Pour cette 22e édition, ce festival emblématique a une nouvelle fois rassemblé des milliers de Lillois, grâce à la participation de Cuthead, de General Electriks ou encore d’Octave One. Notre WebTV s’est glissée dans les coulisses du festival, pour recueillir les témoignages du groupe Tape. In, des organisateurs et des enfants lors des redistributions de cadeaux !

E

B TV

La WebTV du Scandaleux c’est quoi ? Simplement une autre manière de voir l’actualité ! Notre équipe d’apprentis reporters se lance à la rencontre des Lillois pour s’immerger dans leur quotidien. Concerts, conférences, interviews et microtrottoirs : savourez l’ambiance de la métropole lilloise sous ses différents aspects !

CDTB n°60 – International Lille Tattoo Convention Intéressé ? À la recherche d’idées pour un tatouage ? L’International Lille Tattoo Convention est faite pour vous ! Des tatouages, 200 artistes internationaux venus des quatre coins du globe, du rock, des têtes de mort, des animations, un cabaret d’effeuilleuses… Redécouvrez en images les moments forts de cette rencontre !

Viens découvrir nos reportages sur le Carnaval de Dunkerque, les collectifs antipub, Un Cadeau Pour Un Charclo ou encore le Wild Night Contest sur http://www.lescandaleuxmag.fr/lawebtv/


TECHNOLOGIE

Obsolescence programmée : consommateurs coincés ? Vous rappelez-vous votre premier smartphone ? Que vous ayez porté votre regard – et votre porte-monnaie – vers Apple, Samsung ou tout autre constructeur, vous vous imaginiez un nouveau produit qui allait durer longtemps, pour remplacer votre mp3, votre appareil photo et votre ancien téléphone. Mais maintenant, votre portable va mal. Toujours plus lent, il commence à avoir des difficultés à faire les mises à jour. Les boutons du volume se sont cassés, et la batterie décline toujours plus. Vous décidez donc d’en changer, moins de quatre ans après l’achat de votre premier smartphone. Vous êtes, peut-être sans le savoir, victime de l’obsolescence programmée !

Qu’est-ce que l’obsolescence programmée ? Dans notre société, presque tous les produits ont une date limite d’utilisation : des denrées périssables aux appareils électroménagers, en passant par les vêtements. Quand les objets ne peuvent plus être utilisés, ou tombent en panne, on dit qu’ils sont obsolètes. Et le fait d’acheter de nouveaux produits permet de faire vivre des fabricants, qui ne pourraient les vendre sinon. Mais si cette obsolescence était justement précipitée par les fabricants, pour nous faire consommer toujours plus ? Si elle était programmée ? C’est ainsi qu’en 1954, Brooks Stevens, un designer industriel américain, a défini l’obsolescence programmée comme le fait « d’inculquer à l’acheteur le désir de posséder quelque chose d’un peu plus récent, un peu meilleur et un peu plus tôt que ce qui est nécessaire ». Une histoire d’ampoules Pour comprendre l’obsolescence programmée, il faut remonter aux années 1920, période où le concept commença à apparaître. À l’époque, les ampoules électriques avaient une durée de vie beaucoup plus longue que les ampoules à incandescence actuelles, qui tiennent rarement plus de trois ans. Pour preuve, il existe encore une ampoule qui brille sans interruption depuis 1901 dans la caserne des pompiers de Livermore, en Californie ! Mais ce type d’ampoules a été mis au ban de la société

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de consommation. Car dans les années 1920, les ventes d’ampoules chutaient. Alors que leur durée d’utilisation moyenne était de 2 500 heures, plusieurs fabricants, dont Philips, Osram et General Electrics, décidèrent de s’unir et de former un cartel, le Cartel Phœbus, pour obliger les fabricants à réduire artificiellement la durée de vie des ampoules. Et cela a fonctionné ! En seulement deux ans, cette dernière s’établit à 1 500 heures, puis à 1 000 heures dans les années 1930 : l’obsolescence programmée était née ! Une pratique répandue Si les fabricants d’ampoules furent précurseurs du mouvement, la pratique de l’obsolescence programmée ne s’arrête pas là. En effet, dans les années 1930, Bernard London, un courtier en immobilier, déclara que l’obsolescence programmée devait être « obligatoire », et proposa d’assigner une date limite à tous les produits pour relancer la consommation. Pour lui, conserver un article au delà de cette limite aurait dû être passible d’amende. L’obsolescence programmée apparaissait alors comme un moyen de générer du profit et de donner du travail à des chômeurs en relançant la consommation, à l’heure où la Grande Dépression frappait de plein fouet le monde. Dans les années 1950, un nouveau produit fut particulièrement ciblé par l’obsolescence programmée : les bas nylons. Tout juste développés par la firme américaine DuPont, ces derniers

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TECHNOLOGIE

ne filaient pas, et étaient à l’origine très résistants. Trop pour être rentables. Des ingénieurs de DuPont ont donc ajouté des additifs pour que l’oxygène de l’atmosphère dégrade les bas plus facilement. Plus fins, moins résistants, les bas se sont mis à filer… et les consommateurs à affluer. Obsolescence psychologique Les bas nylons et les ampoules sont deux bons exemples d’obsolescence fonctionnelle : artificiellement, le produit n’est plus utilisable pour des raisons techniques, ou chimiques. Mais il existe un autre phénomène d’obsolescence programmée : l’obsolescence psychologique. Celle-ci consiste à donner au consommateur le sentiment qu’un produit est dépassé. Il s’agit de faire en sorte que les produits ne correspondent plus aux envies des clients, par l’apparition de nouvelles fonctionnalités, par des changements esthétiques et par le lancement de nouveaux modèles : en clair, il s’agit de la mode, et celleci ne s’applique pas qu’aux vêtements. Ainsi, dans les années 1920, les voitures étaient conçues pour durer. La Ford T, modèle unique doté d’une seule couleur, le noir, dominait le marché. Mais General Motors décida de bouleverser la demande avec la construction de nouvelles Chevrolet de différentes tailles, formes et couleurs afin que le consommateur ait envie de changer de voiture tous les trois ans. Les acheteurs se tournèrent alors vers ces designs inédits. En conséquence, dès 1927, la Ford T vit ses ventes s’essouffler. Elle fut rapidement retirée du marché.

Dans les logiciels Avec l’établissement de la société de consommation partout dans le monde, l’obsolescence programmée s’est généralisée. Elle fait notamment partie intégrante de la révolution numérique. Ainsi, les imprimantes sont souvent vendues à des tarifs peu élevés (de l’ordre de 40 €), alors que les montants des cartouches d’encre sont généralement disproportionnés en comparaison (parfois, les deux tiers du prix d’achat de l’imprimante pour un jeu complet). Elles ont également un logiciel intégré qui bloque, ou dégrade la qualité d’impression à partir d’un certain nombre de pages. Les logiciels, par leur caractère immatériel, sont encore plus soumis à l’obsolescence programmée que les produits physiques : les fabricants d’ordinateurs et de smartphones en sont conscients, Apple en tête. Aujourd’hui, les smartphones produits par la marque à la pomme antérieurs à l’iPhone 5 ne peuvent plus installer le dernier système d’exploitation, et ne sont donc plus capables de mettre à jour les applications ; ce qui oblige les détenteurs de « vieux » smartphones à renouveler leur matériel le plus rapidement possible. Vers une remise en cause ? Si l’obsolescence programmée s’inscrit dans une démarche de profit, les conséquences sont lourdes pour la planète. Le gaspillage engendré par la mise à la casse ou à la poubelle de produits trop rapidement obsolètes soulève de plus en plus de questions, tout comme les problèmes dus à la surproduction : des guerres à la corruption pour l’appropriation des matières premières. Réparer, produire pour durer et s’inscrire dans une logique durable s’imposent. Alors que les consommateurs s’interrogent de plus en plus, et que des documentaires, comme The Light Bulb Conspiracy (2010), mettent en lumière ces pratiques, une timide prise de conscience politique apparaît. En France, depuis le 22 juillet 2015, l’obsolescence programmée est en théorie passible de 300 000 € d’amende lorsque la durée de vie d’un produit est délibérément réduite pour en augmenter le taux de remplacement. Mais il est presque impossible de prouver le caractère délibéré de telles pratiques.

Chaque année, la sortie des nouveaux OS (systèmes d’exploitations) d’Apple s’accompagne d’un ralentissement des anciens modèles, dont témoignent les pics de recherche pour « iPhone slow » lors de la sortie des nouveaux modèles.

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Léo-Pol Charra

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TECHNOLOGIE Jour 279.

6:00

: VVrrrrr Vrrrrr VVrrr, Mais, mais qu’est-ce que ? VVrrrrr VVrrrrr. Aarrrg, ces satanées vibrations ne vont-elles donc jamais cesser ?! Et cette musique, cette musique insupportable qui me, VVVrrrrrr VVVrrrrrr, qui me hante chaque matin à... 6h ?! Non mais sérieusement ?! C’est donc à ça qu’est réduite ma vie ? Enfin une vie, je suis un peu optimiste là, VVrrrr VVrrrr, un enfer oui ! Tiens ? Il semble que ces spasmes démoniaques se soient calmés d’eux-mêmes. – Essaye de te détendre Siri –

6:50 : Cette journée sera une belle journée. Il fait -10 °C à Lille, pas mal pour cette heure ! Allez, courage. Keep cool and relax. Tu le sais, comme tous les jours tu vas avoir droit aux montagnes russes, mais sois fort, c’est ton job et tu le sais. 7:00 : Il est là, tout proche. Je sens sa présence. C’est à nous dans trois, deux, uuuuunnnnnnn..... ! Aaaaahhh... Non non non... pas... aaaahh... pas. – FlOUP – Dans le noir, once again. Nicolas, tes poches sont super hein, je dis pas, mais ne te sens pas O-BLI-GÉ de me foutre dedans à la moindre occasion veux-tu. Merci. Ah ? M’aurait-il entendu ? Oui j’ai mes petites techniques, quand je veux sortir de cette prison quelque peu... étroite, je twerke, en général ça fonctionne, il pense que quelqu’un veut communiquer avec lui ahah. Du coup, hop ! 7:10 : Hey, doucement t’as les mains froides aujourd’hui. Et qu’est-ce que. AÏE. – Ça fait partie du job, ça fait partie du job, ça fait partie du job – Ils m’avaient prévenu à l’usine, « les écouteurs c’est une épreuve, mais vous vous y habituerez ». Je vous le demande, comment est-il possible de s’accommoder à ÇA ? 7:11

: Décidément tes goûts musicaux laissent à désirer Nicolas...

7:13 : Nicolas, par pitié, mets fin à ce calvaire... 7:15 : Bon. Ce n’est PLUS possible, je dois faire quelque chose. Hey, et si je changeais moi-même les titres et faisais en sorte qu’il perde le contrôle de sa musique ? Ça lui fera les pieds AHAHAHAHA. Prends ça, démon adorateur de JUL !

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Dans la d'un 7:17 : Tu tentes de récidiver, mécréant ? T’en veux encore ? Pas de souci. Je peux skipper ta musique indéfiniment, moi je m’en fiche. Déjà que j’ai été payé une misère pour toute une vie d’utilisation. Tu te vois, toi, travailler d’arrache-pied une vie entière pour un salaire de deux mois de stage ? Non. Personne n’accepterait ça. Bon, il est vrai que je suis logé, nourri et blanchi, mais ce n’est pas une excuse !

7:18 : Hum ? OH NON, NON NICOLAS NE LE PRENDS PAS COMME ÇA. Je t’en supplie ne m’éteins p... 7:20 : D’accord. Je l’avais mérité. Je me calme. Pardon. Écoute ce qui t’en-chante (retrouvez Siri à la Cigale les 12 et 13 août, à 21h).

7:50 : Ah, ce crétin était dans le métro, sans réseau pendant une demieheure. Comment je fais mon TAF* moi ? À la limite ce n’est pas plus mal, quelques minutes de sieste en plus.

* TAF = Travail À Faire, je sais que bon nombre d’entre vous pensait que cela voulait simplement dire « travail », mais NON. Alors quand vous lâchez des « j’ai un TAF à faire », sachez à quel point vous avez l’air ridicule pour les gens qui savent AHAHHAHAH.

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TECHNOLOGIE

peau iPhone 8:00 : Ok, les cours vont commencer, je vais pouvoir me mettre en veille pour au moins deux heures. 8:05 : Hey, Nicolas qu’estce que tu fous ? T’es pas censé être en cours là ? Et l’écoute ? Et l’attention ? Et la concentration ? Tu sais que c’est 80 % de TAF en moins à la maison si tu es attentif... Et pour quoi faire, en plus ? Faire défiler ton fil d’actu Facebook, et regarder des photos de « Garde la pê... » euh. Finalement tu commences à me plaire mon petit Nico. 10:00 : Ça sent la pause clope. C’est ça, profitesen pour proposer une petite cigarette à Mathilde, et faire un petit snap avec l’effet « chien », effet qui fait son effet, mais que je ne vais pas tarder à supprimer dès que tu auras fait la mise à jour parce que – sans rire – je n’en peux plus. C’est pas comme ça que tu vas réussir à la pécho. Et dans le doute, quel est l’intérêt ? Puisque de toute façon après tu vas t’intéresser à sa meilleure pote Caro parce qu’elle t’enverra des nudes (je le sais, je les vois, rien ne sert de nier), que tu prendras en screen (JE LE SAIS AUSSI), et tu n’en auras plus rien à faire de l’autre. Après en même temps, tu fais comme tu le sens hein, mais si jamais tu décidais de te caser ça t’éviterait de passer environ 2 heures par jour sur Youporn (oui, ça aussi je le sais et comme je suis sympa j’ai divisé le temps effectif par deux). Oh et puis il fait froid, je vais simuler un malaise, ça te fera les pieds.

10:04 : Pas besoin de me taper dessus comme un malade, c’est bon je me rallume, mais arrête de me sortir comme ça quand tu es dehors, je n’ai qu’une simple coque en plastique je te rappelle. Puisque MONSIEUR ne désire pas m’acheter la nouvelle coque molletonnée Marc Jacobs il faut assumer l’hiver, voilà. 12:34 : T’as rien trouvé de mieux à faire que de prendre en photo ce que tu manges ? En plus ça n’a pas l’air terrible terrible alors si j’étais toi, j’éviterais, vraiment. Et tu le postes sur Insta ? Mec. Je sais que tu vas me détester, mais pour ton bien, TON bien, je vais supprimer « malencontreusement » cette infamie et simuler une morte subite. Sauf que pour rester crédible, je vais devoir attendre que tu rentres chez toi pour pouvoir refaire surface, sorry (not sorry). 16:56 : BACK HOOOOOOME ! Chaleur, bonheur... Toi-

lettes. Évidemment. Tu n’y es pas allé de la journée alors à la seconde même où tu passes la porte, tu branches ton téléphone 10 min avant de le rallumer et tu files aux chiottes pour 3 plombes ? C’est quand même dingue le temps que tu passes sur le trône mec. Et tu sais que, si tu aimes tant ma compagnie tu n’es pas obligé de me déclarer ta flamme là, dans une chambre sur un lit ça marche aussi très bien.

17:23 : Eh béh. 18:12 : Tiens, ta mère t’envoie un message. Je te le lis ? Euh, c’est pas un peu personnel ? Ok ok, comme tu veux. « Mon. PetTt. Lapin. J’ESpèrE quE Tu VAS bi. En. RapPPpelle. Moi dès. Que. Tu auras Eu. Ce. MessAge. B. Isou. MAMAN ». C’est gênant. Mais tu sais quoi ? Aujourd’hui j’suis d’humeur assez taquine, alors comme t’es en ce moment même en train d’envoyer des sextos à Caro, je vais malencontreusement échanger la conversation avec celle de ta mère histoire que tu te tapes bien l’affiche. B. Isou de Siri LOL. – J’suis démoniaque – 23:21 : Dis lui bonne nuit, mais arrête de lui renvoyer des messages après, CELA N’A AUCUN SENS.

23:48 : P***** enfin ! Allez dors bien ! Jour 280. PS : T’as remarqué que j’avais mis une heure qui n’existait pas dans la liste ? PS2 : Tiens, tu viens d’aller vérifier et tu n’as pas trouvé ? XBOX : Bah c’est normal parce que j’en ai pas mis en

fait, bisou.

Héloïse Vittecoq LE SCANDALEUX MAG #26 - PRINTEMPS 2017

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IDÉE

Et si on soignait son burn-out à l’indienne ? Peu connue en France, la pratique de l’āshram (ermitage dans un lieu isolé) est pourtant très réputée en Inde pour ses qualités de purification de l’âme. En Europe, cette voie est parfois connue des vétérans qui veulent oublier les horreurs qu’ils ont dû commettre. La fin de la guerre est en effet la fin d’un cauchemar et le début d’un autre pour bon nombre de militaires. Ils sont nombreux à ressentir la chaleur du sang qu’ils ont fait couler, ou à avoir du mal à comprendre qu’ils sont bien les auteurs de tous les crimes dont ils ne se rappellent que vaguement. Leurs souvenirs les hantent jusque dans leurs rêves, quand ils parviennent à trouver le sommeil, et un profond malaise les habite, eux qui peinent à voir du positif dans le retour à la paix. C’est là que certains trouvent une solution radicale : l’āshram. Une inscription à l’āshram en Inde coûte environ 3 € par jour, il ne faut rien emporter de matériel, histoire de se purger de sa vie passée. On choisit un nouveau nom, souvent un numéro ou une série de lettres sans signification, pour rompre totalement avec sa vie antérieure. L’idée, c’est de ne plus être maître de soi-même : en entrant à l’āshram, on accepte de suivre la volonté de ses supérieurs (à savoir ceux qui ont atteint un plus haut niveau de spiritualité). Les journées sont souvent ponctuées de tâches pénibles. Au départ, lorsque l’on arrive dans ce qui semble être un monastère, on nous confie par exemple un balai ou une serpillère et on passe des journées entières à balayer la cour de l’āshram. Certains font un seul jour dans la cour,

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certains peuvent y passer des années, selon ce que décide le supérieur. La nuit, l’habitant de l’āshram peut être réveillé pour aller effectuer une tâche d’une ou deux heures, comme couper du bois, après quoi il pourra revenir dormir sur son lit dur. À ces corvées s’ajoutent des séances de méditation. Difficile, au début, de ne pas s’endormir lorsque l’on a eu quatre heures de sommeil tout au plus et lorsque l’on nous demande d’inspirer et d’expirer profondément pendant des heures. Une personne se charge de passer dans les rangs formés par les habitants assis en tailleur et de les réveiller brusquement. Au fur et à mesure de sa progression spirituelle, on se voit confier des tâches plus difficiles : res-

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IDÉE ter assis dans le froid glacial sans bouger, descendre d’une montagne pentue en pleine nuit et pieds nus. Souvent, les personnes ayant fait plusieurs années d’āshram sont surprises de découvrir que le corps humain a peu de limites. Bien évidemment, ces exercices devenant de plus en plus difficiles, l’habitant de l’āshram est préparé à ces différentes étapes, grâce à la méditation. Pour ne pas s’évanouir à cause du froid par exemple, il faut aller chercher de la chaleur qui se situe au niveau de l’estomac, et ceci demande beaucoup de concentration. En cas d’échec, on revient d’un cran en arrière à l’exercice précédent pour refaire ses preuves. Comme précisé en début d’article, la durée de l’āshram n’est pas définie, on peut y passer un jour ou toute sa vie (selon que l’on veuille aller jusqu’au bout du parcours spirituel ou s’arrêter en cours de route, auquel cas chacun est libre de partir quand il le désire). Comment est-il possible de n’y rester qu’un seul jour alors que bon nombre d’étapes spirituelles doivent être franchies pour venir à bout de son séjour en āshram ? Voici encore une des particularités de l’āshram : les mahatmas. Mahatma est un terme sanskrit signifiant « Grande âme » et défini par la philosophe Helena Blavatsky comme « un personnage qui, par un entraînement et une éducation spéciale, a développé ses facultés supérieures et a obtenu cette connaissance spirituelle que l’humanité, dans son ensemble, n’acquerra qu’après de nombreuses réincarnations durant le processus de l’évolution cosmique ». Le terme usuel pour désigner le mahatma pourrait être « gourou ». De tous âges, les mahatmas se distinguent par leur charisme, leur capacité à convaincre et à donner de l’espoir. Ils peuvent être de très vieux sages, comme des jeunes très spirituels. À quinze ans, les hommes peuvent devenir mahatmas. Leur parole est alors presque sainte et lors des visites de ces derniers à l’āshram, ils peuvent tout à fait choisir une personne qu’ils

sentent être plus spirituelle que les autres. Où trouver des āshrams ? Il y en a un bon nombre en Inde, bien sûr, mais aussi en Chine, ou encore dans toute l’Europe, et plus particulièrement dans le sud de la France par exemple. Lieu de retraite, de labeur, de yoga, d’éveil spirituel, d’éveil des qualités du cœur et de simplicité, cette pratique est en contradiction avec les valeurs du monde moderne, que de plus en plus de personnes rejettent déjà par un mode de vie vegan, spirituel et équilibré, et c’est bien cela qui la rend si intéressante. Dans un monde de stress, de rapidité, de performance, de productivité et d’individualisme, l’āshram accepte de rompre avec toutes ces valeurs. La personne qui décide d’aller vivre dans un āshram refuse d’avoir une identité marquée en se soumettant à la volonté de la communauté spirituelle. Tout le contraire de certains de ses semblables qui vont plutôt avoir tendance à cultiver leur ego en étalant leur richesse, leur personnalité et leurs réussites sur les réseaux sociaux. Dans un monde où la souffrance psychique au travail touche plus de trois femmes actives sur cent et plus d’un homme actif sur cent, il est tout à fait légitime de se demander comment guérir d’un burn-out. Et peutêtre que l’Inde a trouvé la solution avant nous. Nombre de ceux qui rentrent du Sous-Continent en semblent convaincus en tout cas. Marie-Cécile Clouet

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TEST

Test :

Quel dictateur est ton âme soeur ?

Tinder, Once, Meetic, AdopteUnMec, tu as tout essayé. Pourtant, impossible de trouver la personne qui fait vibrer ton cœur. Peut-être n’as-tu pas cherché au bon endroit ? Heureusement, ton Scandaleux mag est là pour toi, et va t’orienter vers le dictateur de tes rêves. Et si tu es un homme, tu peux faire ce test, l’amour n’a pas de genre et le baiser viril est autorisé par le parti. 1) y b m d 2) b d y m 3) m y b d 4)

Ton animal fétiche :

5)

Le panda Le pygargue L'ours L’aigle

m y d b

Ton plat préféré :

6)

Le chili con carne La saucisse Le riz La vatrouchka La cuisson de ton steak : Cru Saignant À point Cramé

y d m b

d Une Audi, luxe, calme et volupté b Un gros 4x4 de bonhomme m Une Trabant, old school et un peu hipster y Un touk-touk, plus écologique

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Rien Les yeux La bouche Tout le visage Tu communiques par :

b Twitter m Pigeon voyageur y Messagers, tu en as plein, ça coûte pas cher d Bombes, ça sert à rien de perdre du temps 7)

Ta voiture favorite :

Tu préféres te maquiller :

8)

Si tu devais avoir un tatouage : Un dragon dans le dos Un symbole ancien remasterisé Des outils ouvriers sur le torse Toi ? Jamais ! Tu aimes l’amour avec :

m L’unique grand amour de ta vie, même si il/elle est moche d Un/une petit(e) blondinet(te)

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Aude Cormerois Tu as une majorité de : y Ton âme sœur est Mao ! Le grand timonier est fait pour toi ! Vous partagez l’amour du riz, de la révolution et des baskets pas chères. Peu vous importe les sacrifices tant que vous atteignez votre objectif. Vous aurez ensemble un bel enfant tout rond.

Ta mort, tu la vois… : Nager dans les billets Faire de la couture Faire griller des mouches avec une loupe Faire des bonshommes de neige

Tu as une majorité de : b Ton âme sœur est Trump ! Comment ça ce n’est pas un dictateur ? Attends un peu pour voir, tu risques d’être surpris… Les sceptiques seront confondus.

12) b y d m

Tu as une majorité de : m Ton âme sœur est Staline ! Ah, la grandeur de la mère patrie… ! C’est son haleine fraîcheur de menthe qui t’a convaincu(e), mais la neige, la vodka et la roulette russe rythment vos moments de complicité. Votre activité favorite ? L’atelier Photoshop, pour retoucher des photos « peu conformes » aux idées du parti.

En bambou En bois solide En or En charbon inflammable Un bon kapla est un kapla : Quand tu étais petit, ton activité favorite : Pour toi, les minorités sont :

Tu as une majorité de : d Ton âme sœur est Hitler ! Un grand classique dans le domaine du mal, tu fais griller des sauterelles dans ton jardin depuis ton enfance et lui aussi. Vous vous êtes rencontrés au salon de l’électroménager, au rayon des fours devant le nouveau Bosch. Un vrai coup de foudre entre vous trois, pour une histoire qui va durer toute votre (courte) vie.

d Discrète, « les oiseaux se cachent pour mourir », et tu es un très joli oiseau. b Tu donnerais tout l’or du monde s’il le faut pour retarder l’échéance y Comme un déchirement national m Avec un beau défilé et des jolis chants y m b d 11) 10)

d La source de tous les problèmes, un vrai poison à éliminer m La source de tous les problèmes, un vrai poison à éliminer b La source de tous les problèmes, un vrai poison à éliminer y La source de tous les problèmes, un vrai poison à éliminer 9)

y Ton homme/ta femme, mais tu ne dis pas non à quelques concubin(e)s b Avec ta femme/ton homme, mais tu la/le renouvelles souvent, ça s’use vite ces machins-là

TEST


5 ComMent manger des légumes ? Conseillés par les nutritionnistes mais absents de ton assiette d’étudiant, les légumes sont un met qu’il te faudra bien apprendre à manger un jour, si tu ne veux pas finir célibataire à 40 ans (le lien existe, on te l’assure !). Heureusement, une fois de plus, le Scandaleux te vient en aide ! (Ce guide de survie n’a pas reçu d’approbation gouvernementale, mais on n’a pas demandé, on s’en fiche un peu en fait, moi j’adore les légumes alors je fais un article dessus, voilà tout.)

1. Commencer simple : les légumes préparés

Je te l’accorde, il est difficile de commencer. Alors, si tu ne sais pas éplucher un brocoli, tu peux d’abord tenter les légumes tout prêts ! Poêlée de légumes surgelés, soupe en brique, ratatouille en boîte, carottes râpées, purée en barquette, on te l’assure, ton supermarché regorge de possibilités, et dans une gamme de prix très raisonnable ! Les plus : faciles et rapides à préparer ; les moins : parfois trop salés, il y a aussi généralement moins de fibres que dans les légumes frais.

2. Assaisonner tes pâtes !

Oui mais toi, tu aimes les pâtes, et tu ne comptes pas les laisser tomber si facilement. Ne t’inquiète pas, les deux sont compatibles ! L’internet mondial regorge de recettes alliant les deux. Nos préférés ? Tagliatelle lardon brocoli, coquillettes poulet poivron et lasagne de légumes !

3. Apprivoiser TON légume

Une fois que tu auras maîtrisé un légume particulier, le reste viendra naturellement. Par exemple la courgette, c’est bien une courgette. Facile à éplucher, pas chère, elle se décline de multiples façons : sautée, avec des pâtes, farcie, en tagliatelle avec de la carbonara,… La courgette n’est qu’amour.

4. Tester de nouvelles recettes

Si tu te sens l’âme d’un chef, ou que tu as envie d’épater tes potes, sache que les légumes ont des secrets insoupçonnés. Tu peux apprendre l’art de l’aubergine à travers une bonne moussaka, découvrir les mystères asiatiques en faisant des nouilles sautées aux légumes, tout défoncer avec ton mixeur pour te faire un gaspacho, ou impressionner une zouz avec un couscous.

5. Initie-toi aussi aux féculents peu courants !

Maintenant que tu es embringué dans des expériences culinaires folles, laisse tomber les pâtes et le riz. De nombreux autres féculents existent, et il ne tient qu’à toi de varier les plaisirs ! Chili con carne avec des haricots rouges, petit salé aux lentilles, salade de boulghour, blé à la tomate… Lance-toi !

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Au MacDo, le s salades sont ausSi caloriques que l es burgers (700 kcal) LE SCANDALEUX MAG #26 - PRINTEMPS 2017

Aude Cormerois


HOROSCOPE Bélier/Chaussettes à pois :

Taureau/Chaussettes dépareillées :

Les petits ronds c’est tout mignon, sauf ceux qui vont bientôt apparaître sur ta peau. Oui, je parle bien de furoncles.

Saturne et Mars n’ayant pas réussi à se mettre d’accord sur ton avenir, il en ressort que tu perdras tes bras mais que tu seras champion du monde de bras de fer. Apprends à te dépasser.

Cancer/ ha s ussette

C

Lion/Chaussettes de héros :

On aurait pu croire que tu sauverais le monde mais Vénus et Jupiter ont décidé de faire disparaître tes clefs, t’empêchant de sortir de chez toi et d’accomplir ton devoir.

Le meilleur moyen de cacher ta peau diaphane à l’approche de la belle saison, c’est de continuer à t’habiller en tenue de ski. Conseil du chef.

Balance/Chaussettes rayées :

Scorpion/Chaussettes à moumoute :

Rayées, comme les rayures, comme les barreaux d’une prison. Tu y vas sans passer par la case départ.

Capricorne/Chaussettes à paillettes :

s: te n a nt o m

Prêt à briller aux premiers rayons du soleil printanier, tu as oublié que tu habitais à Lille, et que le soleil, il n’y en a pas. Tu vas ainsi passer ton printemps à mater des séries dans ton lit.

Gémeaux/Chaussettes de sport :

Le printemps arrive, et tes problèmes de sudation reviennent avec. Tu vas donc perdre (à nouveau) tes amis, à cause de ta désagréable odeur.

Vierge/Chaussettes en dentelle :

Pureté et beauté, ta description en quelques mots. Enfin, c’était vrai en 1980. Comment ça, c’est pas une prédiction ?

Sagittaire/Chaussettes trouées :

Tu es prêt à affronter l’hiver, enfin ! Ah crotte, c’est le printemps…

Ton existence est vide de sens, à quoi bon vivre encore une saison de plus ? C’est pas moi qui le dis hein, ce sont les astres.

Verseau/Sous-chaussettes :

Poisson/Chaussettes dans des sandales :

Arrête de te considérer comme un sous-être. Tout le monde, même les plus petites personnes, est utile, et c’est Jupiter qui le dit ! Alors cesse de pleurer et accepte ta vie d’hommetronc.

Ta vie entière est un acte de mauvais goût, alors arrête s’il-te-plaît, et ne viens pas me demander une quelconque prédiction.

Aude Cormerois LE SCANDALEUX MAG #26 - PRINTEMPS 2017

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