ARCHITECTURE ENTRE ENSEIGNEMENT,
RECHERCHE ET PRATIQUE MISE EN PLACE D’UNE RECHERCHE EN ARCHITECTURE PLUS PROCHE DE LA PRATIQUE
MÉMOIRE DE MASTER INITIATION À LA RECHERCHE Bouille Leslie_M1_Gilles Desevedavy
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SOMMAIRE P.
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/Avant-propos
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/Introduction
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/LA RECHERCHE DANS LES ÉCOLES D’ARCHITECTURE : MISE EN PLACE D’UNE COMMUNAUTÉ SCIENTIFIQUE 1. La recherche scientifique 2. La recherche dans les écoles d’architecture entre 1968 et 2005 3. La recherche dans les écoles d’architecture depuis 2005 4. La recherche architecturale commence à exister dans le système universitaire français. 5. Retour sur l’histoire de la recherche en architecture : vers quels objectifs aujourd’hui.
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//RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET PRATIQUE ARCHITECTURALE : L’ENJEU DU DOCTORAT EN ARCHITECTURE 1. La recherche et la discipline de l’Architecture 2. La pratique de l’Architecture 3. Le doctorat en architecture : quelle dépendance autorisée entre recherche et profession ? 4. Étude de cas : ENSA de Lyon
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///UNE RECHERCHE APPLIQUÉE PLUS PROCHE DES ENJEUX DE LA PRATIQUE ARCHITECTURALE : EXPÉRIMENTATION ET PROCESSUS DE CONCEPTION 1. Recherche hors école : une pratique expérimentale 2. Recherche institutionnalisée : une recherche appliquée proche du processus de conception
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/Conclusion
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/Annexes
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/Glossaire
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/Bibliographie
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/Avant-propos
En tant qu’étudiante, l’école m’apparaît comme le clivage de deux mondes. D’un côté les architectes et de l’autre les chercheurs. Ces derniers, calfeutrés dans leur grotte intellectuelle sous de grandes arches de béton, semblent faire de grandes choses. Les autres, ces grands praticiens et penseurs de l’architecture brillent à nos yeux comme la parole divine. La curiosité mène toujours au plus discret.
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Les perspectives d’évolution de la recherche doctorale Dans leurs différences et leurs complémentarités, ces contributions expriment qu’il y a bien plusieurs manières d’envisager l’institutionnalisation d’un doctorat en architecture. Elles soulignent même qu’il y a plusieurs manières d’envisager les contenus de la thèse en architecture. En la matière, on le sait, les convictions sont parfois éloignées les unes des autres. Mais une vérité s’impose : l’évolution de la recherche doctorale en architecture doit permettre d’affirmer davantage la spécificité des thèses soutenues, l’identité des doctorants encadrés et la réalité d’une communauté scientifique dont les productions ne sont pas — et le seront peut-être de moins en moins — à confondre avec celles des établissements universitaires. A la base de la concertation se posait en effet la question suivante : pourquoi la communauté scientifique nationale devrait-elle valider l’émergence d’un nouveau dispositif doctoral consacré à l’architecture ? Sans détours, la réponse s’est imposée d’elle-même en soulignant qu’il y avait matière à reconnaître la qualité des productions doctorales actuelles et la nécessité des productions doctorales futures. Mais les textes qui se succèdent dans la présente publication se font également l’écho d’une appréhension collective qui se fait parfois inquiète. La recherche doctorale en architecture en quête d’une identité plus affirmée pourrait-elle évoluer jusqu’à s’extraire d’une communauté scientifique aux limites arrêtées ? Certes non, mais rien n’empêche cette communauté scientifique d’évoluer jusqu’à modifier son propre périmètre et produire des travaux de recherche directement connectés avec les enjeux d’une « culture de la transformation ». Ainsi faut-il considérer que le maillage interdisciplinaire de la recherche doctorale en architecture est l’avenir même de la recherche scientifique dans les écoles d’architecture. Il devra bien entendu refléter la richesse actuelle des productions issues des unités de recherche habilitées. Mais il devra aussi — et peut-être surtout — ne pas oublier qu’il a un coeur et que ce coeur, forcément lié aux pratiques conceptuelles du projet, n’est pas de nature scientifique. C’est pour cette raison que la structure intellectuelle de ce maillage interdisciplinaire ne ressemble à aucune autre et justifie, à partir d’objets de recherche particuliers, la création prochaine d’un doctorat en architecture. Éric Lengereau Chef du bureau de la Recherche architecturale, urbaine et paysagère (BRAUP) Recherche architecturale urbaine et paysagère, Vers un Doctorat en Architecture, 2005 Ministère de la Culture et de la Communication Direction de l’Architecture et du Patrimoine Sous-direction de l’enseignement de l’architecture, de la formation et de la recherche Bureau de la recherche architecturale, urbaine et paysagère
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/Introduction L’héritage des Beaux-Arts fait du praticien de l’architecture un créatif et un artiste. Il transforme l’espace et le monde par des projets toujours plus ambitieux. L’émancipation de la formation d’architecte de cette institution, amène l’architecte à s’interroger sur ses propres pratiques et remettre en question les doctrines architecturales qui les dirigeaient jusqu’à présent. La recherche en Architecture s’est développée depuis cette époque revendicatrice pour renouveler l’enseignement de l’architecture. Les premières thèses relèvent donc de l’histoire. En remettant en cause les discours passés, la recherche a souvent été en désaccord avec la pratique. Souvent vus comme des adversaires, notamment entre théoriciens et scientifiques, chercheurs et concepteurs vivent en autarcie. Mais faisant partie d’une même culture architecturale, tous deux rêvent de transformer le monde. Ce clivage relève pour de nombreux auteurs, comme Philippe Boudon, d’une confusion entre ces termes : art/science, théorie/doctrine, projet/conception. L’architecture est un art ; par la création, ce dernier prétend rechercher un idéal esthétique, l’art est propre à l’artiste qui produit un objet fini. On attribue souvent au processus artistique celui de la doctrine, comme pensée figée ne pouvant être réfutée. On confond souvent celle-ci avec la théorie qui, elle, prédit un comportement ou une connaissance sans prétendre une finalité et pouvant être réfutée. Elle répond à l’exigence scientifique par son niveau de généralité. La connaissance rassemble en elle l’ensemble des théories, elle-même englobée dans la science. Dans l’enseignement comme pour la recherche, il est important de faire la différence entre conception et projet, le premier étant objet de connaissance tandis que le second objet de pratique. Maintenant que nous discernons bien la différence entre tous les termes que nous serons amenés à employer, attaquons nous à la discipline de l’architecture. En effet, celle-ci a du mal à être reconnue en tant que telle, tant elle englobe un ensemble de disciplines. Ces caractéristiques font qu’elle ne peut être appréhendée comme une autre et qu’elle demande un intérêt dans sa définition pour comprendre ses enjeux. Selon le CNRS, une discipline a pour définition : « Science, matière pouvant faire l’objet d’un enseignement spécifique », ce que confirme le dictionnaire de l’Académie Française : « Branche de la connaissance, domaine d’activités, matière d’enseignement et d’étude ». On suppose alors qu’une discipline doit remplir au moins quelques critères : un thème (objet), une connaissance (un savoir) et des activités (un savoir-faire, une recherche, un enseignement). Caractériser la discipline de l’Architecture permet la détermination des compétences de chacun dans ce domaine. Nous nous appuyons sur l’ouvrage de Stéphane Hanrot, À la recherche de l’architecture : Essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturale (Cf. Annexe 1). L’objet architectural Tout d’abord, l’objet de l’architecture s’est peut être caractérisé des objets concrets, comme les bâtiments, et abstraits, comme les outils de la conception spatiale tels que les logiciels. La définition de cet objet est souvent difficile car il relève d’une complexité et d’une diversité dans un tout, l’architecture étant souvent assimilée à un système. Ainsi, s’intéresser à l’architecture c’est faire le choix d’une partie et de son ensemble, c’est d’ailleurs la définition qu’en fera S.Hanrot : « L’objet architectural réunit une architecture et l’ensemble des objets qu’elle met en jeu dans les mondes réel ou virtuel, concret ou abstrait. Divers sousensembles d’objets architecturaux peuvent être reconnus. Parmi eux, les objets, ou édifications, du cadre de vie de l’Homme »1. Son propos est caractérisé par une organisation hiérarchique des objets architecturaux du plus générique au plus spécifique.
Stéphane Hanrot, À la recherche de l’architecture : essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturale, édition L’Harmattan p.56
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La pratique architecturale Le savoir-faire architectural, aussi nommé pratique, est facilement associable à l’activité de l’architecte. En effet, l’architecte est vu comme un acteur dominant de l’Architecture car il a la capacité d’ « architecturer », soit l’idée de donner une architecture a ce que l’on conçoit, c’est ce que cette définition montre « Construire, agencer quelque chose comme un tout organisé; donner un caractère architectural à quelque chose »2. On reconnaît ainsi cette compétence et ce savoir-faire à l’architecte qui agit sur l’objet architectural, son intervention le mettant en relation avec l’Homme et la société. Le savoir architectural comme connaissance Le savoir en architecture vient de l’idée qu’on se fait d’elle comme une science ou une théorie. C’est-à-dire qu’on admet son domaine de connaissances plus ou moins objectives, à savoir si elles tendent plus vers l’objet ou vers le savoir-faire architectural. On admet alors ici que l’objet architectural et la pratique architecturale sont porteurs de savoirs, qui forment les connaissances de l’Architecture. La recherche Si l’on reconnaît un savoir architectural porteur de connaissances, pouvant être objectives, alors on admet une activité de recherche qui les produit. S. Hanrot nous donne ainsi la définition : « la recherche architecturale regroupe toutes les activités qui consistent à structurer, fonder, évaluer et développer le savoir architectural et en particulier la science de l’architecture. Ses objets d’étude sont, principalement, les objets architecturaux et la pratique architecturale, en eux-mêmes et en interaction avec l’Homme et ses sociétés »3. L’enseignement Le champ de la discipline implique la notion d’enseignement et donc de transmission de connaissances. Nous pouvons facilement l’identifier au sein des écoles d’architecture, où la formation s’adresse exclusivement aux futurs architectes et de chercheurs. La notion d’enseignement pose la question de la transmission du savoir architectural. Ayant clarifié la différence entre l’activité de chercheur et celle de l’architecte, nous pouvons des à présent nous interroger sur l’orientation de ce mémoire. En effet, par une méthode d’investigation, il s’agit de rendre compte des tendances que développe aujourd’hui la recherche en Architecture. Dans une logique de « culture de transformation », chaque protagoniste est acteur sur le monde. Dans quelle mesure la recherche et la pratique ne s’opposent pas dans cette logique ? Qu’est ce que la recherche en Architecture induit dans la pratique conceptuelle de cette dernière ? Le monde de l’action, celle de l’architecte, développe des codes et un savoir-faire auxquels le chercheur ne peut prétendre. Mais de quelle manière ce dernier peut-il s’y accrocher pour prétendre, lui aussi, transformer le monde ? Nous développerons dans un premier temps une partie historique de la mise en place d’une recherche scientifique en Architecture, puis dans un second temps les tendances et les enjeux de cette dernière par différents points de vue. Le doctorat en architecture sera le prétexte pour discerner ce à quoi chaque partie aspire pour une recherche efficace à la conception architecturale. Investir le débat, nous permettra, dans un dernier temps, de rendre compte de pratiques innovantes qu’induit l’esprit de recherche, soit l’expérimentation, laquelle est liée au praticien, à l’étudiant et plus largement au le monde de la construction. Ce qui permet enfin d’interroger la recherche expérimentale comme lien entre une recherche appliquée et fondamentale. L’enjeu de ce mémoire étant de discerner des moyens que peut mettre en œuvre la recherche en Architecture pour se rapprocher du monde de l’action.
Définition du site internet du Centre national de ressources textuelles et lexicales Stéphane Hanrot, À la recherche de l’architecture : essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturale, édition L’Harmattan p.65
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//RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET PRATIQUE ARCHITECTURALE
: L’ENJEU DU DOCTORAT EN ARCHITECTURE
La confusion qui règne entre théorie et doctrine, connaissance et culture, est le fruit de la confusion générale, en Architecture, des termes science et art. En effet, cette difficulté qu’a la discipline à prendre du recul sur elle-même, conduit à la perte de son identité justement située au croisement de ces termes, mais dont la distinction est primordiale pour prétendre à une activité à la recherche scientifique. Nous prendrons donc le temps avant de nous intéresser aux interactions qui existent entre la pratique et la recherche, pour bien définir cette dernière dans l’essence de ce qu’est une recherche scientifique, l’histoire laborieuse pour sa reconnaissance et ce à quoi elle aspire aujourd’hui. 1. La recherche scientifique Il est important dans un premier temps de définir ce qu’est la recherche scientifique. Il serait bien difficile de résumer les débats historiques d’une définition propre de la science car elle fait l’objet de nombreuses controverses. Nous nous arrêterons donc sur la définition du dictionnaire Le Robert, qui définit la science de « ce que l’on sait pour l’avoir appris, ce que l’on tient pour vrai au sens large. L’ensemble de connaissances, d’études d’une valeur universelle, caractérisées par un objet et une méthode déterminés, et fondées sur des relations objectives vérifiables ». Ainsi, elle désigne la forme la plus haute de savoirs et de connaissances _ qui peut être associée à la vérité _ d’où le terme de vérité scientifique qui se base sur des faits observables (preuves) mais aussi sur d’autres critères moins factuels que l’on nommera théorie scientifique4. Contrairement aux dogmes5 et aux doctrines, les théories et connaissances scientifiques, ainsi que les méthodes peuvent être contredites et révisées.
Selon René Thom _ mathématicien français et fondateur de la théorie de catastrophe _ la vérité scientifique viendrait d’une vertu explicative et une fécondité à engendrer d’autres vérités dont ne dispose pas une vérité fondée uniquement sur les faits : « Je crois que l’expérimentation par elle-même ne peut guère conduire à des progrès (…) La théorisation, pour moi, est liée à la possibilité de plonger le réel dans un virtuel imaginaire, doté de propriétés génératives, qui permettent de faire des prévisions » (Prédire n'est pas expliquer, R.Thom). 5 Affirmation fondamentale, incontestable et intangible (dans le but de le faire affirmer et adhérer) 4
Ainsi, la recherche scientifique désigne l’ensemble des actions entreprises (spécifiées pas leur cadre social, économique, institutionnel et juridique) en vue de produire et de développer les connaissances scientifiques. Elle fait donc ainsi l’objet d’enjeux, d’organisation et de méthodes bien définis. 1.1. Production de connaissances et de savoirs : prospective et spéculation. Dans la plupart des domaines, la recherche scientifique, et nous le verrons encore plus en architecture, explore des éventualités, des idées, des méthodes et des raisonnements variés, contradictoires, nouveaux et parfois risqués ne pouvant les vérifier. C’est ici que ce situe ce que nous appellerons la spéculation scientifique. En effet, légitimement un chercheur émet des hypothèses qui seront considérées comme telles jusqu’à ce qu’elles deviennent théories puis connaissances par des critères de scientificité. On ne peut donc pas condamner cette méthode, paraissant pourtant dangereuse, car la science est le fait de chercher à comprendre ce que l’on ne sait pas. Oser et être audacieux permet de faire fonctionner et avancer la science. C’est pour cela que la possibilité de réfutation évoquée plus haut est largement défendue dans la profession de chercheur comme nous le montre Karl Popper 6: « Des idées audacieuses, des anticipations injustifiées et des spéculations constituent notre seul moyen d’interpréter la nature, notre seul outil, notre seul instrument pour la saisir. Nous devons nous risquer à les utiliser pour remporter le prix. Cependant, ne participent vraiment au jeu de la science que ceux qui exposent leurs idées et prennent le risque de la réfutation. 7» Il est important de rappeler que depuis toujours, l’Homme tente de comprendre le monde et la société qui l’entourent. La recherche scientifique est sûrement née de cette curiosité. Mais l’histoire nous montre que les principaux demandeurs d’une telle connaissance sont le monde académique, l’État et les entreprises. En effet, la recherche permet de
Karl Popper (Autrichien) est l’un des plus influents philosophes des sciences du XXème siècle. Il critique la théorie vérificationniste de la signification et invente la réfutabilité comme critère de démarcation entre science et pseudo-science. 7 Karl Popper, La Logique de la découverte scientifique, 1935 6
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comprendre le monde dans son aspect fondamental par des prévisions justes et des applications fonctionnelles. En rendant certains aspects de la société maîtrisables, la recherche devient un enjeu de contrôle et de pouvoir. C’est après la Seconde guerre mondiale, dans une période de reconstruction, que l’on voit apparaître une politique de recherche qui tend à prévenir et provoquer des changements dans la société. La production de connaissances et l’innovation permettent de prendre le contrôle sur la société et son devenir. Nous dressons là le portrait d’enjeux économiques et politiques d’une spéculation scientifique. On peut alors se demander quels sont les critères de scientificité pour éviter les abus de cette dernière ? A l’épreuve de ce que pourrait être la justice, la recherche de la vérité relève de nombreuses investigations par la recherche de preuves et de rhétoriques permettant de vérifier une hypothèse de départ. Pour Karl Popper, il n’y a qu’une seule façon de prétendre à la validité scientifique. Lorsqu’une hypothèse réussie, c’est une autre qui échoue. De ce fait, il est important de mettre en concurrence différentes théories dans un même domaine. Autrement dit, la scientificité d’une théorie est admise lorsqu’on arrive à réfuter son inverse. Il met ainsi en évidence trois principes à mettre en œuvre. Le premier étant le principe « faillibiliste », c’est-à-dire partir du fait qu’aucune connaissance n’est définitive ; puis le principe criticiste, les hypothèses doivent être soumises à la critique car les sciences progressent par élimination des erreurs ; et enfin, le principe « falsificationniste », qui consiste à fournir les
éléments d’une théorie réfutée. L’auteur admet donc qu’il n’est pas nécessaire qu’une théorie soit vraie pour être scientifique, car elle produit des connaissances, la réfutabilité rendant objective la théorie. Car en effet, la reconnaissance et la construction d’une communauté scientifique se basent la recherche de connaissances objectives. L’objectivité de théories est valorisée par la publication d’articles ou de rapports de recherche, support principal de discussion et de mise en relation. La recherche universitaire étant garante d’un lieu de partage pour la connaissance et la reconnaissance. 1.2. Découpe en sections : le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) L’évaluation et la valorisation de ces connaissances objectives passent par la mise en évidence d’expertises. Pour cela, le Centre National de Recherche Scientifique fait le choix d’un découpage en sections des différents thèmes de la Recherche. C’est en 1985, sous le Ministère de l’Équipement, qu’il est créé la section interdisciplinaire n°49 « Architecture, urbanisme, société » qui comprenait des membres élus au sein de trois départements du CNRS : sciences de l’homme et de la société, sciences de l’ingénieur et sciences de la vie. En 1991, elle est remplacée par la section 39 « Espaces, territoire et société ». Nous remarquons ici, la reconnaissance tardive de la discipline Architecture, et dont l’institution pilote reste aujourd’hui les Sciences Humaines et Sociales.
Tableau des sections de recherche du CNRS 1 → Mathématiques et interactions des mathématiques 2 → Théories physiques : méthodes, modèles et applications 3 → Interactions, particules, noyaux du laboratoire au cosmos 4 → Atomes et molécules, optiques et lasers, plasmas chauds 5 → Matière condensée : organisation et dynamique 6 → Matière condensée : structures et propriétés électroniques 7 → Sciences et technologies de l'information (informatique, automatique, signal et communication) 8 → Micro et nano-technologies, électronique, photonique, électromagnétisme, énergie électrique 9 → Ingénierie des matériaux et des structures, mécaniques de solides, acoustique 10 → Milieux fluides et réactifs : transports, transferts, procédés de transformation 11 → Systèmes supra et macromoléculaires : propriétés, fonctions, ingénierie 12 → Architectures moléculaires : synthèses, mécanismes et propriétés 13 → Physicochimie : molécules, milieux 14 → Chimie de coordination, interfaces et procédés 15 → Chimie des matériaux, nanomatériaux et procédés 16 → Chimie du vivant et pour le vivant : conception et propriétés de molécules d'intérêt biologique 17 → Système solaire et univers lointain
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18 → Terre et planètes telluriques : structure, histoire, modèles 19 → Système Terre : enveloppes superficielles 20 → Surface continentale et interfaces 21 → Bases moléculaires et structurales des fonctions du vivant 22 → Organisation, expression et évolution des génomes 23 → Biologie cellulaire : organisation et fonctions de la cellule ; pathogènes et relations hôte/pathogène 24 → Interactions cellulaires 25 → Physiologie moléculaire et intégrative 26 → Développement, évolution, reproduction, vieillissement 27 → Comportement, cognition, cerveau 28 → Biologie végétale intégrative 29 → Biodiversité, évolution et adaptations biologiques : des macromolécules aux communautés 30 → Thérapeutique, médicaments et bio-ingénierie : concepts et moyens 31 → Hommes et milieux : évolution, interactions 32 → Mondes anciens et médiévaux 33 → Mondes modernes et contemporains 34 → Langues, langage, discours 35 → Philosophie, histoire de la pensée, sciences des textes, théorie et histoire des littératures et des arts 36 → Sociologie, normes et règles 37 → Économie et gestion 38 → Sociétés et cultures : approches comparatives 39 → Espaces, territoires et sociétés 40 → Politique, pouvoir, organisation Source : Site internet du CNRS http://www.cnrs.fr/comitenational/sections/intitsec.htm
1.3. Méthodologie de connaissances scientifiques
production
de
La production de connaissances scientifiques répond à de nombreuses méthodes qui se basent sur cette quête historique de la vérité, dont la finalité serait la découverte ou la justification par des preuves. Les quatre méthodes les plus utilisées pour y parvenir sont : - la méthode déductive dont le raisonnement va du général au particulier, du principe à la conséquence, dans une relation de causes à effets. - la méthode inductive dont le raisonnement va du particulier au général, des faits aux lois. - la méthode analytique qui va de la décomposition de l’objet d’étude en allant du plus complexe au plus simple - la méthode expérimentale dont les expériences en laboratoires ou sur le terrain permettent de dégager des lois. Selon, l’Institut de sciences et de technologies, la méthode recherche scientifique doit répondre à des étapes successives. La première est d’avoir une question de départ pertinente, claire et faisable. La deuxième phase consiste à prendre le sujet en main par des lectures comparatives et de prendre les premiers contacts avec le terrain, l’objet
d’étude ou les différents acteurs à rencontrer. Cette seconde phase est indispensable pour passer à la suivante, celle de la mise au point d’une problématique, d’hypothèses et de d’établissement d’une méthode pour les vérifier. Pour enfin expérimenter ou analyser les différentes données engagées pour la vérification de ces hypothèses. La communication des résultats est la dernière étape de la production de connaissances8. La méthode scientifique est avant tout une rigueur accordée à une méthode pour amener la preuve qu’une théorie est porteuse de connaissances (objectivables) scientifiques (qui fait avancer la science). Pour cela, de nombreuses méthodes sont propres à chaque discipline et ne restent pas figées, elles évoluent dans le temps et dans l’espace. Bien que les sciences dures doivent répondre à un mode opératoire ou des méthodes expérimentales strictes, d’autres sciences comme les sciences humaines sont plus libres et font évoluer leurs méthodes selon l’espace-temps qu’elles étudient. La méthode scientifique en architecture serait donc au carrefour entre une méthode stricte ou novatrice, l’enjeu étant la
cf. Portail techno-sciences.net http://www.techno-sciences.net/?onglet=glossaire&definition=747 8
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rigueur de sa mise en œuvre et de l’assiduité qu’on lui accorde. 2. La recherche dans les écoles d’architecture entre 1968 et 2005 L’enseignement de l’architecture n’est plus en lien avec le terrain. En effet, l’architecte ne peut plus être un simple dessinateur d’espace tant il a un rôle dans le cadre de vie des français. C’est ce qu’André Malraux9, suite au décret de décembre 1968 sur l’organisation provisoire de l’enseignement de l’architecture10, énoncera à la radio, soit l’ampleur de sa méconnaissance des questions concrètes soulevées par l’architecture contemporaine (Cf. Annexe 2). Les événements de 68 tendent à rendre compte de revendications sociales pour la reconnaissance d’une société en pleine mutation. En mettant en place une politique scientifique dans le domaine de l’architecture, nous remarquerons la volonté de l’État de mettre en place une logique pluridisciplinaire à l’échelle urbaine. En mettant en relation l’architecture, l’urbanisme et les sciences sociales, les objectifs sont de rendre compte du cadre de vie. À la base, la recherche architecturale se veut ainsi revendicatrice d’une culture architecturale au service d’une société. Elle cherche sa reconnaissance en tant que telle. Au début des années 70, les chercheurs de cette jeune communauté scientifique imposent une critique permanente de la formation d’architectes. La crise de l’enseignement fait son apparition avec un corps architectural revendicateur et novateur face à une politique éducative française conservatrice. La recherche architecturale doit renouveler les connaissances en Architecture et donc sa formation. Les pouvoirs publics développent une recherche architecturale et urbaine pour répondre à de nouveaux enjeux sociaux de la société : celle de la connaissance urbaine. C’est dans ce domaine que se manifeste la plus grande nécessité d’une recherche sur un phénomène encore inconnu de l’État : comment gérer le cadre de vie des Français lorsque celui-ci est soumis à de nombreuses transformations encore inconnus et rapides ? Éric Lengereau parlera de réveil de conscience et pense que désormais « le
André Malraux, écrivain, politicien et intellectuel français, est ministre de la Culture de 1959 à 1969, sous la présidence du Général De Gaulle. 10 Suite à l’émancipation de l’enseignement de l’architecture de ceux des Beaux-Arts, le décret décrit les modalités transitoires de présentation au diplôme d’architecture. 9
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cadre de vie des Français est soumis à une somme de transformations si rapides et si radicales que nul ne peut plus désormais faire l’économie d’une réelle production de connaissance en la matière »11. Dés à présent, les enjeux des pouvoirs publics deviennent ceux de la recherche scientifique. Les problèmes rencontrés de l’espace habité conduisent au développement de la recherche urbaine et architecturale. Ainsi, les événements passés conduisent à un courant de pensée qui tend à mettre en relation les compétences d’expertise avec celles des décisions, autrement dit, de rapprocher l’expert des politiques publics. La recherche scientifique est, à ce moment, vue d’un nouvel angle. Dans une conjoncture qui prône des changements radicaux profonds du fonctionnement de la société, le savant et le politique doivent travailler ensemble. Ce rapprochement a pour but de créer de vraies solutions aux problèmes sociaux qui font rage en France. Investir dans la recherche devient la priorité stratégique des pouvoirs publiques, il se rend ainsi compte que la recherche peut changer le monde. Elle doit analyser mais aussi produire les outils pour agir sur les nouveaux problèmes de société. On mettra ici en avant les étapes de développement de la politique scientifique dans le domaine de l’architecture : - Entre 1972-1982, l’État développe une politique incitative visant à mobiliser, à thématiser, à construire les fondations d’une communauté scientifique promus par l’action du CORDA. - Entre 1982-2002, une politique institutionnelle est mise en œuvre en imposant la structuration d’un paysage pérenne d’unités de recherche habilitées, évaluées et soutenues. On met en place deux systèmes de financements qui ont pour but de lutter contre l’immobilisme des objets, des méthodes, des terrains et des résultats de la recherche architecturale. C’est ainsi que l’on remarque que dans cette période 1981-1982, un tournant fondamental est mis en place au sein de la recherche architecturale française : on passe d’une recherche incitative à une recherche institutionnelle, des appels d’offres aux programmes pluriannuels et de chercheurs « hors statuts » à des chercheurs « sur contrat ».
Périodique n°122-123, Culture er Recherche, 1959-2010 La recherche au ministère de la Culture, p.47, printemps été 2010. 11
Attributions ministérielles : directives étatiques
1978 Les attributions relatives à l’architecture sont transférées au Ministère de l’Equipement et du Cadre de vie. 1981 L’expérience du Ministère de l’Equipement et du Cadre de Vie s’achève avec le retour d’un Ministère traditionnel de l’Equipement. 1995 Les attributions ministérielles de la politique de l’architecture sont à nouveau transférées au Ministère de la Culture et de la Communication (1996 : création d’une direction de l’architecture au sein du ministère).
Statut établissements formation Architecture
des Valorisation de la de recherche en architecturale : mise en place d’une communauté scientifique 1979 1972 Certaines unités Une directive des affaires pédagogiques culturelles du Ministère de d’architecture (UPA) la Culture crée le Comité deviennent des écoles de la recherche et du d’architecture avec le développement en statut d’établissement architecture (CORDA). public administratif (EPA). Démarrage officiel de la recherche architecturale. 1986 1984 Les UPA qui ne sont pas La réforme de encore Écoles l’enseignement de d’Architecture obtiennent l’architecture consacre la le statut d’EPA. proximité de la formation des architectes avec 2005 système universitaire et Les EPA devient ENSA confirme sa place dans la (École Nationale recherche scientifique. Supérieure d’Architecture) 1985 suite à la mise en place Le CNRS crée la section de la réforme LMD interdisciplinaire n°49 (Licence Master « Architecture, Doctorat). urbanisme, société » qui comprenait des membres élus au sein de trois départements du CNRS : sciences de l’homme et de la société, sciences de l’ingénieur et sciences de la vie (dont des chercheurs des écoles d’architecture). Remplacée en 1991 par la section 39 « Espaces, territoires et sociétés »
Évolution de l’enseignement et de la formation
Années 80-90 Crise de l’enseignement de l’architecture. 1992 Nouvelle réforme de la formation des architectes : accorder une priorité pédagogique à l’enseignement du projet d’architecture. 1993 Les enseignants des écoles d’architectures sont progressivement titularisés et recrutés sur concours. 1997 Nouvelle réforme des études d’architecture instaure un cursus de formation initiale composé de trois cycles de deux ans.
Source : Analyse du Périodique n°122-123, Culture er Recherche, 1959-2010 La recherche au ministère de la Culture, p.52-53, printemps été 2010
3. La recherche dans les écoles d’architecture depuis 2005 Depuis le début des années 70, l’État soutient la recherche architecturale en mettant tout d’abord en place une politique incitative, puis en créant des laboratoires, pour enfin affirmer la recherche dans les écoles par la mise en place du Doctorat en Architecture. En mettant en place une communauté scientifique pluridisciplinaire, l’État renforce les liens
entre recherche, pratique et enseignement. Car, en effet, le constat que l’on peut faire sur ces quatre décennies est l’incapacité de ses acteurs à organiser des relations triangulaires efficaces. Ce fut l’handicap majeur jusqu’à la mise en place de la réforme LMD de 2005 qui permit de légitimer l’enseignement de l’architecture au rang d’enseignement supérieur et de rendre compte de sa capacité à produire des connaissances au service des
autres sciences et des praticiens. En étant habilitées à délivrer des doctorats, les ENSA peuvent concrétiser l’espace de ces relations triangulaires qui auraient pour enjeux de réconcilier les compétences scientifiques et celles qui ne le sont pas. Autrement dit, de créer un réel lien légitime et reconnu entre le praticien et le chercheur de l’Architecture, pour la reconnaissance d’une véritable culture architecturale à la fois sur le terrain mais aussi en tant que savoir. Désormais, des finances publiques et privées délivrent des appels d’offre mais aussi des bourses accordées aux thèses des futurs doctorants. La communauté scientifique se concrétise par la mise en place de la nouvelle Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur qui vérifie la cohérence de l’ensemble des thèses pour maintenir un haut niveau d’enseignement et de la recherche. La mise en place du doctorat porte ainsi la reconnaissance de l’architecture comme discipline d’enseignement supérieur au sein de la communauté académique française et son intégration dans le dispositif universitaire européen, dont l’origine se trouve dans la Déclaration de Boulogne. « L’enseignement français de l’architecture s’inscrit également dans un processus d’évaluation de la qualité académique des formations dispensées et de leur reconnaissance au plan international, dont un des éléments majeurs d’appréciation de leur niveau est, sans conteste, la capacité à délivrer le doctorat en architecture »12. Le doctorat a donc pour rôle d’installer la discipline architecturale au sein d’une communauté scientifique en activité et de faire collaborer l’enseignement, la recherche et la pratique pour des objectifs communs. La tâche étant sujet de controverse, toujours dans la même idée de confusion que suscite la recherche en Architecture, cette dernière a encore du mal à s’installer au sein du système universitaire. Mise en place du doctorat en Architecture : valorisation du lien pratique, recherche et formation 2005 Harmonisation européenne des cursus de formation conduit à la mise en place de la réforme LMD au sein
Plan 2007-2012 pour l’enseignement supérieur et la recherche en architecture, octobre 2007 (Collège des directeurs des ENSA/DAPA/DA/Sous-direction de l’enseignement et de la recherche architecturale), Ministère de la Culture et de la Communication. p.12
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des écoles d’architecture. 2006 Le Bureau de la Recherche Architecturale, Urbaine et Paysagère publie l’ouvrage collectif « Vers un doctorat en Architecture » et l’appel d’offres de la première des quatre sessions annuelles du programme interdisciplinaire sur « L’architecture de la grande échelle ». 2007 Après la publication de l’arrêté du 7 août 2006 relatif à la formation doctorale, la réforme LMD permet la création institutionnelle du doctorat en architecture dans les ENSA. 2008 Le BRAUP conçoit et coordonne la consultation internationale de recherche et développement sur « Le grand pari de l’agglomération parisienne ». 2009 La nouvelle Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES) est sollicitée par le BRAUP pour procéder désormais aux évaluations scientifiques des unités de recherche des ENSA. Source : Analyse du Périodique n°122-123, Culture er Recherche, 1959-2010 La recherche au ministère de la Culture, p.52-53, printemps été 2010
4. La recherche architecturale commence à exister dans le système universitaire français. L’Histoire de la recherche architecturale peut se traduire par quarante ans qui ont structuré progressivement les sources intellectuelles de l’enseignement de l’architecture et donc la future pratique de celle-ci. Car on peut le rappeler, l’enjeu principal de la mise en place de cette recherche scientifique a été l’émancipation (libération) progressive de l’enseignement identifié de l’architecture. Notamment de sa dépendance aux écoles des Beaux-Arts. Depuis la recherche et l’enseignement, étant « génétiquement liés »13, tentent d’effacer la doctrine au profit de connaissances. Nous remarquerons facilement que les nombreux changements, que provoque la mise en place d’une recherche en Architecture, ont dans le même temps modifié l’enseignement et les écoles d’architecture. On connaît depuis toujours le lien vertical qui existe
Périodique n°122-123, Culture er Recherche, 1959-2010 La recherche au ministère de la Culture, p.47, printemps été 2010. 13
entre l’enseignement et la pratique architecturale, notamment par l’enseignement de projet. Mais ce qui semble nouveau depuis quelques années, c’est le lien horizontal qui s’est mis en place entre étudiant et chercheur, remarquable notamment dans les universités. Nous pouvons le voir aujourd’hui par une plus grande importance donnée aux cours théoriques alimentés par les laboratoires d’écoles, mais aussi, et c’est là la grande évolution, la valorisation d’un parcours recherche qui tend à alimenter l’apport doctoral au sein des écoles. Avec une relation toujours très délicate avec l’enseignement du projet, les chercheurs sont devenus incontournables. Ils ont su prouver leur nécessité. Aujourd’hui, ils incarnent la position de la formation d’architectes au sein de l’enseignement supérieur français. Les premiers doctorats en Architecture font leur apparition depuis quelques années et représentent la concrétisation d’un long chemin pour la mise en place de la reconnaissance d’un savoir architectural au même titre qu’une discipline universitaire. Le programme pluriannuel 2002-2005 du Bureau de la recherche architecturale, urbaine et paysagère met au point les enjeux et les objectifs de la recherche et de l’enseignement au sein de l’école d’architecture. Nous remarquerons notamment cet attachement à vouloir se rapprocher de l’Université pour garantir la place de l’architecture comme discipline fondamentale dans la gestion spatiale de la société. C’est d’ailleurs l’ambition du doctorat à s’harmoniser avec les diplômes universitaires, reconnaître une production scientifique et sa capacité à se diversifier pour répondre à la complexité du champ d’action de l’architecture. La formation d’architectes a donc ainsi évolué en instaurant une initiation à la recherche dans la formation initiale, en favorisant un parcours recherche vers le doctorat, et en instaurant au sein des écoles une véritable politique scientifique. Pour répondre à ces objectifs, le BRAUP favorise des évolutions structurelles pour renforcer les laboratoires les plus performants, comme des alliances avec le tissu universitaire, exiger des ouvertures scientifiques vers l’étranger et imposer la formation doctorale dans les écoles d’architecture. Il est même annoncé que « les unités de recherche les plus fragiles qui n’auront pas intégré ces paramètres de développement se verront directement affectées par tels ou tels réajustements structurels ». Ainsi, la reconnaissance universitaire et internationale est une manière de pérenniser la place d’une activité de recherche au sein de la communauté scientifique de l’architecture. Est-ce pour cette réponse que, récemment, l’École Nationale Supérieure
d’Architecture de Lyon a développé ses échanges avec l’étranger et créé une nouvelle unité de recherche14 en partenariat avec l’INSA de Lyon, instauré par Jean-Yves Toussaint ? Aujourd’hui, faire partie d’un pôle reconnu de recherche et d’innovation permet d’acquérir plus de financements et donc de garantir sa place au sein de l’Enseignement Supérieur. Est-ce une manière de rendre productif la recherche architecturale au sien d’un pôle de compétitivité, que pourrait être l’ensemble des ENSA ? 5. Retour sur l’histoire de la recherche en architecture : vers quels objectifs aujourd’hui. De ce fait, nous pouvons aujourd’hui dire que la Recherche en Architecture tend à continuer le combat en mettant en place au sein des écoles une politique incitative du parcours Recherche pour les étudiants, et permet de trouver des budgets pour donner plus d’importance aux laboratoires en augmentant leur capacité de doctorats et leurs participations à des appels d’offre. Réconcilier et valoriser le lien entre Enseignement, Recherche et Pratique est la priorité des écoles pour montrer la force et la nécessité d’un tel lien pour répondre aux enjeux du terrain de l’architecture dans la société. On peut aujourd’hui se demander, si depuis sa mise en place, la recherche a répondu aux espérances de 1968 ? Soit la mise en place d’une recherche scientifique qui aurait pour but de créer un savoir aux services du cadre de vie des français. La réponse de cette nouvelle communauté a donc été de renforcer le lien entre recherche, pratique et formation. On peut ainsi rendre compte de quelques expériences singulières d’architectes révélés dans les années 80 ayant intégré les résultats de recherche ou encore ayant un passé de chercheur. L’ouvrage Architecture et construction des savoirs : quelle recherche doctorale questionne des grands prix nationaux de l’architecture ou de l’urbanisme sur quels objectifs du futur doctorant. Ce qui est commun à l’ensemble des discours c’est la nécessité d’un apport de l’ensemble des acteurs de l’architecture. La dimension pluridisciplinaire du doctorat en architecture permet l’adaptation permanente de la connaissance au terrain. Car en effet, l’ambition principale de la mise en place du doctorat est de placer les professionnels de la recherche scientifique près de ceux de la maîtrise
Le laboratoire EVS-EDU (Environnement, Ville, Société – Environnement et Dispositif Urbain) dans le cadre de l’UMR CNRS n°5600 « Environnement, Ville, Société » 14
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d’œuvre qui ont besoin de ces connaissances objectives pour « ne pas être prisonniers des pressions, des modes et des tendances »15. Mais nous verrons plus loin que les opinions concernant l’intérêt et la mise en place du doctorat sont parfois contradictoires. Il importe donc ici de rendre compte ce que la recherche a apporté à deux postures singulières d’architectes qui ont pourtant des parcours différents. Si on prend l’exemple de Philippe Panerai16 et de Paul Chemetov17, l’un Grand Prix de l’urbanisme et l’autre Grand Prix de l’architecture, sont des représentants de la réussite de la mise en place d’une recherche architecturale. En effet, on voit apparaître des chercheurs qui construisent et des architectes qui cherchent. Ce sont des trajectoires et des attitudes qui tendent à rompre avec la posture académique de l’architecte artiste et qui tendent à créer une véritable communauté scientifique de l’architecture pour la reconnaissance d’une discipline à part entière18. Voilà les valeurs que souhaitent développer la recherche et les écoles aujourd’hui : assoir l’Architecture dans l’enseignement supérieur pour garantir son avenir dans la production d’un savoir, au service des autres sciences et de la société, reconnu dans le pays et à l’étranger. Aujourd’hui, la recherche en architecture a produit de nombreuses connaissances au sein de ses laboratoires « d’école », pour alimenter ce savoir. On regroupe au sein des ENSA en France 50 laboratoires, ateliers ou groupes de recherche (Cf. Annexe 3) sur des thèmes différents : histoire,
patrimoine, conception, informatique, ambiance, construction et les sciences humaines. Le renouvellement des savoirs, ainsi évoqué dans les revendications des années 60 se traduit par de nouvelles éditions comme Les Annales de la recherche urbaine (PUCA, création en 1998) ou encore Les cahiers de la recherche architecturale parus depuis la fin des années 70. Ce système a montré son efficacité. La recherche architecturale a été, depuis cette époque, le grand lieu de la recherche urbaine. Les recherches historiques comme celles qui ont porté sur les théories, et non les doctrines, ont contribuées à redonner à la discipline ses fondements intellectuels et son assise théorique. La recherche en architecture à ainsi formé des hommes et lancé de nouveaux thèmes et préoccupations de l’architecture qui viennent caractériser la création d’institution comme celle de l’Institut Français d’Architecture19. L’enjeu étant maintenant de développer de nouveaux thèmes, installer la recherche architecturale au sein de l’enseignement et de la recherche scientifique universitaire, et de développer des débouchés professionnels pour le récent grade de doctorat en architecture. L’État a été l’élément déclencheur d’une recherche en architecture. De ce fait, il rend compte que celle-ci peut agir sur le monde et sa société. Ballotée entre Équipement, Culture et Cadre de vie, l’architecture peine à trouver sa place et son identité, étant toujours au milieu d’un conflit d’intérêt entre héritage des Beaux-Arts et perspective d’avenir.
Architecture et construction des savoirs : quelle recherche doctorale, direction Éric Lengereau, Ministère de la Culture et de la Communication, p.16, 2008 16 Il est connu pour sa carrière de chercheur spécialisé dans l’histoire des équipements, de la ville et de l’îlot urbain. Notamment l’ouvrage Formes urbaines, de l’îlot à la barre écrit par ce dernier avec Jean Castex et Jean-Charles Depaule, traduit en plusieurs langue, qui fut un livre majeur dans l’enseignement de l’urbanisme dans les écoles d’architecture. Et qui, depuis les années 90, est devenu un architecte/urbaniste de haut niveau, notamment par la réhabilitation remarquable du grand ensemble Teisseire à Grenoble. 17 Il est fondamentalement un architecte praticien et enseignant réputé, est aussi remarqué par des épisodes de chercheur. Notamment avec Familièrement inconnues … architectures, Paris, 1848-1914 (avec B. Marrey, 1976) fut un travail de recherche remarquable qui a probablement nourri sa conception d’un habitat populaire de qualité dans ses projets. 18 Rappelons ici, les étudiants en architecture des années 60 qui ont revendiqué une émancipation des Beaux-Arts pour rompre avec le simple geste artistique du maître d’œuvre, au profit d’une autre compétence de l’architecte, celle de penser la conception architecturale et de théoriser. 15
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L'Institut français d'architecture est un organisme créé en 1981 pour assurer la promotion de l'architecture contemporaine française, longtemps localisé rue de Tournon à Paris, l'IFA est aujourd'hui l'un des trois départements de la Cité de l'architecture et du patrimoine au Palais de Chaillot. 19
//RECHERCHE SCIENTIFIQUE ET PRATIQUE ARCHITECTURALE
: L’ENJEU DU DOCTORAT EN ARCHITECTURE
Nous avons vu dans un premier temps l’histoire assez longue de la mise en place d’une communauté scientifique pour la reconnaissance d’une discipline, mais aussi de connaissances et de démarches objectives. Pour cela, il est important dans cette partie de donner le point de vue de l’ensemble du corps architectural : praticiens, enseignants et chercheurs. Nous interrogerons ici la discipline, la recherche et pratique architecturale, pour enfin définir quelles sont les interactions qui subsistent entre la recherche scientifique et la pratique architecturale. Cette dernière étant basée sur des théories et des doctrines alors que l’autre tente de rétablir une connaissance véritable de l’objet Architecture. Pour y voir plus clair, nous nous arrêterons sur un débat qui a commencé au début de l’émancipation de l’architecture et qui continue aujourd’hui à animer les discussions : le doctorat en Architecture. Celle-ci répond au nouvel enjeu de l’Architecture, celle d’une « culture de transformation »20, permettant une recherche plus proche de la pratique architecturale et de ses enjeux. 1. La recherche et la discipline de l’Architecture 1.1 La discipline de l’architecture : entre doctrine et recherche scientifique Comme on a pu le voir en introduction, la discipline de l’architecture selon S. Hanrot, l’architecture se définirait par un ensemble de trois activités, la pratique, la recherche et l’enseignement. Il est clair que dorénavant, l’architecture est considérée comme discipline, et plus comme une branche de l’art, de la sociologie ou encore de l’histoire. Elle possède ses propres connaissances. Mais c’est par ses différentes interactions qu’elle entraine de nombreuses interrogations sur ce qui fait son identité propre. Selon la charte de l’AEEA, la discipline de l’architecture engloberait la création, la transformation et l’interprétation de l’environnement bâti. Elle impliquerait donc l’acte de conception de l’architecte à agir sur l’espace vécu. Comment percevoir l’identité de la discipline architecturale dans un environnement si englobant. La pratique de la recherche a donc ce rôle, mais nous le verrons plus loin.
20
Cf. Texte introductif du mémoire.
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Pour clarifier la position de la discipline de l’architecture par rapport aux autres disciplines, l’enjeu a été de la placer au plus proche de la conception, propre à la pratique architecturale. Historiquement, le savoir architectural est basé sur des doctrines ou des théories historiques pour expliquer certains phénomènes, dont la plupart relèvent de démarches intellectuelles d’architecte/praticien à réfléchir sur leur propre production. Aujourd’hui, la mise en place d’une recherche scientifique perturbe le lien, pourtant historique, entre pratique et savoir. Certains auteurs vont revendiquer la nécessité d’une recherche scientifique essentiellement lié au savoir, comme C. Lecourtois qui ne conçoit plus ce lien qui viendrait rapprocher la recherche scientifique des enjeux professionnels, car l’activité du chercheur reviendrait à produire un ensemble de réglementations ou de directives à suivre pour une bonne mise en œuvre de l’architecture, comme une « recette de cuisine ». C’est un schéma d’application que l’on pourrait retrouver dans d’autres sciences comme les mathématiques, la chimie ou l’ingénierie. L’auteur voit plutôt l’architecture comme un domaine, non comme une discipline ou une profession. Sa spécificité serait son enchevêtrement de savoirs (« contenus énonçables produits d’une pratique de recherche ») et de savoirfaire (« compétence pratique de conception spatiale acquise par l’apprentissage et l’expérience du projet »). La dualité de ce domaine se vérifie par l’enseignement qui se fracture en deux formes les théories / connaissances (histoire, sociologie, anthropologie, etc.) et le projet d’architecture. Dans un tel contexte, la fracture entre théorie et projet est flagrante. La recherche scientifique, étant considérée pour certains au même titre que les théories, a du mal à exister et à être reconnue, non seulement au sein de l’enseignement mais aussi sur le terrain, car elle tend à remettre en question la scientificité des doctrines mise en place par des « praticiens penseurs » auparavant. Face aux nombreuses fractures que l’on peut mettre en avant au sein du corps architectural, on peut se demander quel rapport la recherche peut entretenir avec le projet architectural pour espérer un rapprochement avec la pratique, mais surtout avec les praticiens.
1.2 La recherche en Architecture : quel rapport avec le projet d’architecture ? Avant de savoir quelle pourrait être une recherche en architecture plus proche de la pratique architecture, il est important de rappeler quelques définitions concernant les différents types de recherches scientifiques. Une première recherche, dite pure ou fondamentale, comprend des travaux entrepris pour l’avancement de la science sans aucune application pratique en vue. Tandis que la recherche appliquée représente les travaux entrepris pour l’avancement de la science mais avec application pratique en vue. Toutes deux ont pour but l’avancement de la science contrairement aux recherches expérimentales qui ont pour seul objectif principal le progrès technique et technologique, lié à la production. Aujourd’hui, l’enjeu de la recherche en Architecture tend à casser ou condamner les discours doctrinaux passés de l’architecture pour produire à de véritables connaissances scientifiques. Le chercheur vise par différentes méthodes à constituer une connaissance sur le champ qu’il choisirait suivant ses objets d’étude. Ainsi, selon C. Lecourtois, les enjeux de la recherche architecturale sont d’éclairer quelques « réalités ». Ils visent la production d’une connaissance « théorique et générale et non doctrinale »21. L’architecturologie, selon Philippe Boudon et Philippe Deshayes, serait le fondement d’une recherche fondamentale en architecture. Celle-ci s’interroge sur les spécificités des compétences liées à la conception architecturale. Autrement dit, s’intéresser à l’architecture de l’architecture pour en développer des connaissances scientifiques organisées et validées de l’activité de conception architecturale. En interrogeant directement la conception architecturale, nous pouvons supposer que celle-ci est au plus proche de l’activité d’architecte. Cependant, elle ne peut espérer intervenir sur le monde car, comme nous l’avons vu plus haut, une recherche fondamentale n’aspire pas à une application. L’architecturologie a pour rôle d’analyser pour éclairer. Ce recul avec le projet architectural est nécessaire pour son objectivité. Reconnaissant l’architecturologie, C.
le savoir Lecourtois
que produit propose de
Site internet de l’encyclopédie des internautes http://www.linternaute.com/citation/10827/la-bouse-de-vache-estplus-utile-que-les-dogmes-victor-hugo/
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développer une recherche appliquée alimentée par cette dernière. Le contenu de ses théories serait la nébuleuse (amas au contour imprécis) scientifique qui installerait une recherche appliquée au service des pratiques actuelles du métier et de connaissances nouvelles en architecturologie ou d’autres domaines. Cette recherche fondamentale prend ici le rôle d’un support heuristique adapté aux praticiens, aux chercheurs et aux étudiants. En lui appliquant une recherche appliquée à l’architecturologie, celle-ci s’inscrit dans un espace-temps en accord avec celui de la pratique architecturale. En résumé, la recherche en architecture devrait être une recherche appliquée qui expérimente les contenus scientifiques des disciplines (Architecturologie ou autres sciences) sur des objets d’étude de l’Architecture par des études de cas, pour dévoiler des complexités et des connaissances sur l’espace qui deviendront support heuristique et didactique pour l’enseignement et la pratique. L’expérimentation, l’expérience d’applications, étant mis en avant, la recherche appliquée en architecture est à distinguer du développement expérimental, qui vise la seule application sans forcément faire avancer la science. Son seul intérêt est la transformation du monde dans l’immédiat. La spécificité de la recherche en architecture est telle que sa mise en place ne peut suivre les méthodes classiques et universitaires, lesquelles imposent une flexibilité dans les démarches, les méthodes et les résultats. Dans son rapport, le BRAUP admettra sans réserve que la recherche en architecture n’a pas le même objet, terrain, technique ou méthode que les autres recherches. Le doctorat a pour rôle la reconnaissance de cette singularité au sein de la communauté scientifique. 2. La pratique de l’Architecture 2.1. Conception spatiale La conception est la façon que l’on a de concevoir une chose, car elle répond à un processus créatif, elle peut se découper en plusieurs phases. La première pourrait être celle de l’analyse et du diagnostic de l’ensemble de la commande (contraintes du client et des acteurs décisionnels liés). Après avoir localisé les problèmes que l’on va rencontrer, la deuxième phase consiste à générer des solutions en confrontant la pensée avec sa représentation du réel (dessin, informatique, maquette, etc.). La dernière phase reviendrait alors à produire des documents graphiques de communication du projet pour les
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clients et les constructeurs (dessins techniques, détails de construction, perspectives, etc.). L’acte de conception est donc l’ensemble des compétences et des connaissances de l’architecte à se confronter au réel par des méthodes de représentation. Objet d’étude de l’architecturologie, la conception, selon P. Boudon, rassemble « à tort, l’organisation de l’objet telle qu’elle a été conçue (le résultat de cette conception) et les opérations de la conception comme acte, comme processus (le travail qui y mène). Comme si l’objet, dans sa conception, reflétait… la conception qui l’a engendré ». Pour l’auteur, la conception n’est donc pas le reflet de l’objet, mais ce qui a été fait en amont de sa construction. 2.2. Profession L’architecte est le garant de l’activité de conception architecturale et de ce fait possède un savoir-faire. Venant du grec Architektôn (Arkein, commander ; Tektôn : ouvrier travaillant le bois, la charpente), l’architecte trouve son sens originel dans celui d’un responsable d’équipe. Aujourd’hui, le mot prend beaucoup de sens, surtout parce que la profession s’est diversifiée et spécialisée (naval, historique, ingénieur, etc.). Mais résumons ce mot a celui qui pratique l’architecture, ou plus généralement, selon H. Sanrot, l’architecte « celui qui sait architecturer »22. 2.3. Liens entre le praticien et le chercheur Aujourd’hui, le métier d’architecte est diversifié, pour chacun la question de la recherche se pose. Souvent le métier d’architecte se voudrait d’une forme de recherche doctrinale avec une légitimité dans des publications professionnelles. Cela est légitime car tout au long de son activité de conception, il est amené à faire des recherches lui-même pour nourrir un projet, pour développer une certaine rationalité sur l’ensemble de ses projets en s’interrogeant sur sa propre production ou encore pour développer de nouvelles compétences (comme l’informatique). Travailler avec des chercheurs pourrait initier les praticiens à formaliser et s’inspirer des méthodes de la recherche pour développer des connaissances exploitables et justifiables.
Stéphane Hanrot, À la recherche de l’architecture : essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturales, édition L’Harmattan, 2002, p.42
De ce fait, le chercheur, s’il a une autonomie nécessaire envers la pratique et un rythme de progression dans son travail qui lui est propre, ne peut pas être indifférent au monde du praticien. Celui-ci est une source de savoir et d’expertise qu’il peut s’employer à formaliser en une connaissance. En retour, il doit s’assurer que les connaissances qu’il produit provisionnent le monde de la pratique. Bien que l’on différencie ces deux professions par leurs positions intellectuelles et opératoires, on remarque que l’association chercheur/praticien forme des individus parfois remarquables comme on a pu le voir plus haut avec Philippe Panerai et Paul Chemetov. Pour Robert Prost, la difficulté de liaison entre la connaissance et l’action se porte sur deux difficultés propres à chaque entité. Pour l’homme «de science», la difficulté est d’effectuer ce saut dans le normatif pour définir la réflexion de ses orientations par rapport à la possibilité d’action, par peur de la procédure et de son instrumentalisation ; pour l’homme « d’action » ce serait la difficulté de construire des outils intellectuels capables de valider la pertinence de l’orientation qu’ils adoptent dans un contexte pour garantir son efficacité. On remarque alors facilement quels pourraient être les enjeux de leur combinaison pour combler leur lacune. 2.4. Enjeux de la liaison recherche et pratique architecturale La conception architecturale relève, pour Robert Prost, d’un lien entre connaissance et action. Pour comprendre les enjeux et les fondements de ce lien, intéressons nous tout d’abord à la mutation qu’à subi le monde des connaissances scientifiques. La recherche scientifique a subi des avancées conceptuelles, théoriques et méthodologiques notamment en incluant dans ses travaux le contexte, le local ou encore la confrontation entre l’objectivité et la subjectivité de l’acteur qui pousse à s’interroger sur la dichotomie entre la réflexion et l’action. La recherche scientifique ne se base plus seulement sur la compréhension du monde (« ce qui est »), elle porte un nouvel intérêt aux connaissances relatives aux conditions et modalités de sa transformation (« ce qui devrait être »)23. Dans son ouvrage Concevoir, Inventer, Créer, Réflexions sur les pratiques, l’auteur prend l’exemple de la jambe cassée, où la connaissance relèverait de la description de la fracture, et l’action de la pause d’un plâtre comme solution et transformation. On remarque alors le lien
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27
Robert Prost, Concevoir, Inventer, Créer, Réflexions sur les pratiques, édition L’Harmattan, 1995, p.24. 23
nécessaire entre connaissance et action, où la pose du plâtre relèverait d’une connaissance normative, celle de la bonne santé, et qui justifierait une telle action. Cette mutation de la pensée scientifique tend à démontrer l’interdépendance entre la connaissance et l’action. Cette dernière étant induite par la connaissance, tandis qu’elle n’aurait pas d’aboutissement sans l’action qu’elle évoque. D’un autre côté, le monde de l’action a subi aussi une mutation, notamment ces dernières décennies où l’on remarque une augmentation de l’instabilité du système socio-économique et technologique qui tend à rendre la pratique de l’action plus difficile à mettre en œuvre. Jusqu’à présent, pour pallier à ces difficultés, l’expérience était la meilleure réponse pour appréhender, élaborer et mettre en œuvre la réalisation d’une action clairement définie, par des savoir-faire acquis. Cependant, la conjoncture changeante ne permet plus cette analogie. L’expérience ne suffit plus et les praticiens doivent élaborer de nouveaux outils pour interpréter et évaluer leurs propres travaux. Autrement dit, l’évolution du monde réel induit, pour la mise en place d’actions définies, une nécessaire augmentation de l’apport en connaissances. C’est un nouveau lien que l’on voit apparaître ici, qui n’est plus unilatéral, mais montre que les deux parties travaillent les unes pour les autres. L’adaptation aux nouveaux contextes socioéconomiques implique la mise en place d’un rapprochement entre connaissance et action pour appréhender au mieux la transformation du monde. Cette nouvelle alliance vient déstabiliser le lien simplifié que l’on pouvait remarquer par le passé entre théorie et pratique. Il n’y a plus deux clivages entre « ceux qui pensent mais qui ne peuvent prétendre à l’action » et « ceux qui agissent mais qui n’accèdent pas à la connaissance »24. Cependant, ce lien, bien qu’il soit en augmentation, n’est pas acquis dans tous les domaines. Notamment en Architecture où certains semblent sceptiques face à ces nouvelles façons d’appréhender ce nouveau lien entre praticien et chercheur au sein de l’enseignement. R. Prost dénonce les discours anti-intellectualistes de certains architectes/praticiens. Aussi, nous pouvons facilement revenir sur un tel discours face aux besoins exposés plus haut concernant l’appréhension d’un monde changeant : le besoin de connaissances (nourrissant les nouvelles demandes de l’action). L’auteur parlera ainsi de la nécessité de modalités
« d’acculturation »25, soit la mise en contact de la connaissance et de l’action pour induire des modifications dans leur culture propre initiale. L’une prenant chez l’autre. Pour conclure, il énoncera la nécessité d’instaurer ce modèle d’approche de la transformation du monde au sein d’une recherche adaptée à ce nouveau lien, mais principalement au sein de la formation pour former au mieux les futurs « raisonneurs pratiques »26. Si nous nous sommes intéressés au lien Connaissance/Action et Homme de science/Homme d’action avec un point de vue très théorique, intéressons nous maintenant à des faits plus actuels, notamment avec les points de vue du Ministère de la Culture et de la Communication. Dans la continuité de ce qui a été dit plus haut, il exprime le besoin d’adapter l’enseignement et la recherche avec le monde de l’action : le terrain. Les besoins du terrain : des maîtres d’œuvre < Aujourd’hui le BRAUP met en avant que la plupart des recherches menées et sollicitées viennent principalement du manque de connaissance concernant la mutation rapide de nos sociétés contemporaines, vecteur d’une grande complexité. En effet, la maîtrise du terrain passe par la connaissance qu’on en a. Cependant, dans une conjoncture qui fonctionne à court terme, les situations sur rarement pérennes. Tirer des connaissances sur des répétitions ou des généralités, comme on le faisait auparavant, semble difficile, de nouvelles méthodes d’investigation ou d’approche semblent nécessaires. De ce fait, nous voyons apparaître des demandes principalement issues des sciences humaines et des sciences de l’ingénieur, notamment pour répondre aux questionnements que pose le développement durable et de nouveaux outils pour la conception architecturale (logiciel, connaissances de matériaux, de la thermique etc.). Mais aussi de nouvelles perspectives de la recherche architecturale vers une culture d’intervention dans le cadre de vie qui devrait venir répondre aux lacunes souvent pointées par l’histoire contemporaine. Adapter l’enseignement aux demandes du terrain < Selon un rapport mis en œuvre par le Ministère de la Culture et de la Communication27,
Ibid, p. 27 Ibid, p. 26, note de bas de page 27 Plan 2007-2012 pour l’enseignement supérieur et la recherche en architecture, octobre 2007 (Collège des directeurs des 25 26
Robert Prost, Concevoir, Inventer, Créer, Réflexions sur les pratiques, édition L’Harmattan, 1995, p.26.
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l’enjeu principal de la réforme LMD, après celle d’installer l’enseignement de l’architecture dans l’enseignement supérieur, est d’ordre professionnel. Non seulement de renforcer la formation du praticien mais aussi de préparer la diversification professionnelle des diplômés en architecture, dont les compétences ne seraient plus consacrées à la seule maîtrise d’œuvre, mais ouvertes à d’autres domaines (« repositionner la profession d’architecte dans le champ de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme et du paysage, pour favoriser une approche qui en respecte la dimension culturelle et 11 environnementale » ). Le premier objectif s’est vu mis en œuvre dans le cursus initial de la formation d’architecte par la mise en place de stages et de suivis de chantier, des cours d’informatique sur des logiciels plus en accord avec le travail d’agence, avec de nouvelles techniques de communication, une augmentation des cours d’urbanisme et de construction. La mise en place d’une formation spécifique post diplôme d’État d’architecte pour préparer à l’habilitation à l’exercice des responsabilités liées à la maîtrise d’œuvre (HMONP : Habilitation à la Maîtrise d’œuvre en son Nom Propre) est également importante. Le second objectif d’adaptation de l’enseignement à la pratique architecturale est comme on l’a vu plus haut, la diversification professionnelle. Notamment par la spécification des compétences des écoles, par des associations avec d’autres écoles ou en développant la recherche, qui la plupart du temps débouche sur des formations innovantes notamment en DSA (Diplôme de Spécialisation et d’Approfondissement), DPEA (Diplôme Propre des Écoles d’architecture), ou encore en doctorats. Le décret de 2005 devient un acte fort de l’adaptation et la modernisation de la formation d’architecte pour répondre aux exigences nouvelles de l’exercice de la profession et pour répondre aux besoins d’une demande sociale en matière de spécialistes de l’aménagement de l’espace. La mise en place du doctorat permet la reconnaissance et une appréciation favorable du niveau d’enseignement des ENSA au niveau européen et international. Les ENSA font maintenant partis de l’Association européenne de l’architecture (AEEA) : organisation qui réunit quelques 130 écoles d’architecture en Europe. Celle-ci agit comme une plateforme à travers laquelle il est possible de suivre l’information sur les évolutions dans le domaine de l’enseignement de l’architecture et
ENSA/DAPA/DA/Sous-direction de l’enseignement et de la recherche architecturale), Ministère de la Culture et de la Communication. p.12
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qui permet d’échanger sur les meilleures pratiques. Elle représente aussi le point de vue du secteur de l’enseignement à propos des initiatives législatives ou politiques qui ont un impact sur les écoles d’architecture, conformément à son objectif d’encourager des normes élevées et la qualité des qualifications dans la profession d’architecte. Un groupe de travail mixte (JWP) entre le Conseil des Architectes d’Europe et l’AEEA est en place depuis 2005 avec un mandat d’existence indéfinie. Ainsi la collaboration entre la profession et les écoles d’architecture est assurée et assure un équilibre entre les besoins du terrain et des écoles. D’autre part, L’AEEA a mis en place en 2010 une charte de la recherche en architecture qui serait le document de référence pour toutes institutions, écoles ou professionnels qui seraient engagés dans la recherche architecturale. Adapter la recherche aux demandes du terrain < Dans la même continuité, le BRAUP met en avant certaines actions incitatives qui tendent à croiser les compétences scientifiques proches du projet d’architecture, d’urbanisme ou de paysage, notamment par un programme qu’il a mis en place pour soutenir des démarches innovantes dans le programme interdisciplinaire « Art, Architecture et paysages »28, ou encore par des travaux de recherche instaurés dans la conception de projets urbains mis en place par le Plan Urbanisme, Construction et Architecture (PUCA). Pour enfin valoriser le travail qui se fait aux Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau par l’expérimentation, mais nous y reviendrons plus tard. L’AEEA, bien qu’elle ne soit pas une institution scientifique reconnue, a le mérite de réunir l’ensemble des écoles européennes d’architecture pour un débat sur l’enseignement, la recherche et la profession. En ce qui concerne la recherche, l’association « reconnaît comme valable en tant que tels, outre les résultats écrits et graphiques, des installations, des projets expérimentaux, des propositions, des maquettes et des constructions réelles ». La liberté des recherches est donc sans limites, sauf peut-être une conscience intellectuelle propre à chacun. La mise en place du doctorat en architecture serait une manière de faire reconnaître des méthodes de recherches pouvant paraître alternatives, et ainsi
Cette action incitative de recherche mobilise des compétences venues des écoles d’architecture, des universités, des écoles d’art, des écoles de paysage, des organismes de recherche tels que le CNRS et des milieux professionnels de la maîtrise d’œuvre. BRAUP 28
légitimer et faire reconnaître des recherches qui ne répondraient pas aux méthodes scientifiques déjà en place. 3. Le doctorat en architecture : quelle dépendance autorisée entre recherche et profession ? Depuis longtemps en France, un clivage se forme entre les compétences scientifiques et celles qui ne le sont pas. Les praticiens de la recherche scientifique et ceux de la maîtrise d’œuvre ont pris l’habitude de vivre indépendamment et s’ignorent. C’est ce qu’on peut observer notamment au sein des écoles et encore plus sur le terrain. Le doctorat en architecture a pour but de réconcilier ces deux parties qui gâchent des potentialités intellectuelles à ne pas collaborer. La mise en place commune du doctorat est la prémisse d’une entente. 3.1. Le lien Recherche, Enseignement et Pratique : transmission de connaissance Le rôle principal évoqué par Éric Lengereau dans l’ouvrage La recherche en art(s) est tout d’abord de réorganiser le passage générationnel des chercheurs au sein des unités de recherche. Afin de former efficacement et avec rigueur les futurs chercheurs en architecture qui, par leurs travaux, participeront à la formation des futurs architectes, « nous sommes tous convaincus que l’architecture française a besoin d’hommes et de femmes de culture »29. L’enseignement supérieur a cet intérêt, comme on peut le voir dans les universités, à soutenir le lien naturel entre recherche et praticien par la transmission de connaissances. Le contenu de l’enseignement forme les futurs praticiens, ceux qui sont appelés à transformer l’espace et le monde. Les chercheurs doivent ainsi formaliser leurs résultats dans un langage partagé par les protagonistes du projet. Car l’aboutissement d’une recherche se fait par l’efficacité de transmission vers les acteurs de l’action. Les écoles sont donc un moyen pour les chercheurs de produire indirectement une action sur l’espace. L’ensemble du corps architectural est lié dans le temps et dans l’espace au sein de l’école, ce qui permet ce renouvellement générationnel de l’ensemble des acteurs de l’Architecture. Le transfert de connaissances passe par une recherche qui enrichit le champ intellectuel de l’enseignement, actualise et perfectionne les modalités de formation.
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Jehanne Dautrey, La recherche en art(s), éditions mf, p. 239.
3.2. Que pourrait être le doctorat en architecture : point de vue de chercheurs et de praticiens Aujourd’hui, l’AEEA préconise des liens plus forts entre la recherche scientifique et la pratique, soit entre le monde universitaire et la profession, pour l’installation d’un domaine élargi de la recherche architecturale. La plupart des praticiens s’accordent avec cette idée que la recherche doit produire les outils nécessaires à la pratique, plus concrets et moins théoriques, comme des recherches sur la construction, les matériaux, les moyens de représentations et encore les outils pour un développement durable, au profit des recherches historiques et sociologiques qui jusqu’à présent, ne sont pas produits que des analyses sans prospection sur le réel. Les praticiens reprochent à ce type de recherche d’analyser sans donner des points de vue ni de solutions. Où doivent se situer les recherches doctorales ? À l’époque des revendications des années 60, la jeunesse prônait l’intellectualisme au profit de l’acte de construction. Déjà à cette époque, beaucoup d’architectes ressentaient le besoin d’être mieux armés intellectuellement pour appréhender le monde. Pour Christian de Portzamparc, la recherche architecturale prend plus de temps à analyser le passé que le présent, ce qui cristallise l’avancée de l’architecture. Il préconise une recherche progressive en rapport direct avec la production architecturale : « La recherche architecturale serait donc plus ou moins contre le projet, le progrès et l’avant-garde … alors qu’un architecte doit inventer »30. Cependant, la recherche doctorale ne pourrait se situer sur l’acte de conception de l’architecte car il relève du résultat d’un instant subjectif, propre au praticien. Elle aurait donc pour rôle de former des chercheurs aux pratiques scientifiques sur des thèmes permettant le progrès de l’architecture. Il compare la thèse en Architecture à celle de la politique, comme un ensemble de compétences de domaines différents qui n’auraient pas la prétention d’être les seules vérités mais une possibilité. Cela donne ainsi la matière nécessaire au choix de réponses aux questions que se poseraient les praticiens lors de leur acte de conception. En effet, un doctorat ne peut être déconnecté du réel. Pour Rudy Ricciotti, il se doit d’être au fait des enjeux de l’industrie, de l’économie de l’architecture. Il dénonce, pour illustrer ses propos, l’exemple de Greg Lynn qui, par ses formes ‘Blob’, ne prend aucun risque
Sous la direction d’Érie Lengereau, Architecture et construction des savoirs : quelle recherche doctorale ?, éditions Recherche, 2008, propos de Christian de Portzamparc, p.145. 30
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dans ses pratiques expérimentales, il ne prend aucun risque avec le réel, il en reste déconnecté. Pour lui, les thèses en architecture doivent être utiles à l’architecture et aux architectes dans un temps donné. Il remet ainsi en cause le décalage qui s’opère entre les réalités socio-économiques du terrain et du temps d’une recherche scientifique. « Les délais de productions d’un projet d’architecture sont très tendus et la réflexion s’opère toujours dans une situation d’urgence. Les chercheurs, eux, ne sont jamais dans l’urgence »31. Mais il s’accorde à dire que l’instrumentalisation des thèses doctorales par les agences serait légitime dans le sens où elle devrait produire des résultats pour le peuple, en lien direct avec la production, car les gens la finance par leurs impôts, dans un contexte de recherche/innovation. « La recherche appliquée est le fruit de la rencontre des experts et des ‘sachants’ »32. Cependant, certains s’accordent à dire que la recherche doit rompre le lien direct qu’elle a avec l’action. Autrement dit, pour un apport cohérent des connaissances en architecture, il ne faut pas instrumentaliser la recherche au profit d’une pratique, d’une production : « une pratique qui voudrait induire une théorie, ne produirait qu’une doctrine »33. Une distance est donc à faire entre la recherche et le terrain de la production architecturale. P. Boudon préconise la mise en place de champs d’expérimentation bien que se posent des problèmes méthodologiques. C’est ce que s’accorde à penser aussi Bruno Fortier qui voit en la recherche architecturale un moyen d’outre passer les thèmes traditionnels universitaires, comme l’histoire, pour inventer de nouvelles pistes plus spécifiques à l’architecture comme la structure et la construction qui seraient plus proches de la pratique mais qui garderaient une distance par l’expérimentation. Puis il justifierait cette dernière par le fait que « les plus grands universitaires avouent qu’ils sont désemparés pour parler de l’espace ». En effet, l’expérimentation est un bon moyen pour mettre de la distance avec le projet architectural, qui est peu objectivable, et permet dans le même temps de garder ce lien avec l’existant, l’espace, vecteur de la pratique. Ainsi, la recherche doctorale devrait être une recherche théorico-pratique,
Sous la direction d’Érie Lengereau, Architecture et construction des savoirs : quelle recherche doctorale ?, éditions Recherche, 2008, propos de Rudy Ricciotti, p.145. 32 Sous la direction d’Éric Lengereau, Architecture et construction des savoirs : quelle recherche doctorale ?, éditions Recherche, 2008, propos de Rudy Ricciotti, p.179. 33 Paroles de Philippe Boudon, Acte du colloque « Rencontres, Recherche, Architecture », La recherche en architecture : un bilan international, édition Parenthèses, 1986, p.112. 31
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comme on pourrait le voir dans les recherches sur les Cultures Constructives qui prennent plus d’ampleur aujourd’hui (sujet repris plus loin). Pour développer, la recherche doit s’ouvrir intellectuellement en ouvrant le doctorat aux autres disciplines universitaires mais aussi en mettant en place de nouvelles collaborations. On pourrait par exemple imaginer un doctorat en architecture de l’ENSAL en collaboration avec l’ENTPE, dont la spécialité serait l’ingénierie et la construction. C’est ce que Bruno Fortier et Philippe Panerai préconisent en d’interrogeant de ce fait sur la place du projet d’architecture dans la thèse en architecture. La plupart s’accordent sur le fait que la thèse ne peut s’appuyer sur un seul projet d’architecture mais sur une partie de la conception qui peut être mise en avant à un moment donné pour réfléchir par exemple sur les capacités thermiques d’une façade. Mais l’ensemble de la conception architecturale ne peut être objective et ne peut donc faire l’objet d’une recherche scientifique. Nous avons vu que l’expérimentation est une bonne méthode de recherche pour prendre du recul avec le projet lui-même. Elle ne peut faire l’objet d’une copie de l’objet fini, mais révéler des connaissances techniques ou sensibles. 3.3. Quelle profession pour le doctorant : point de vue de chercheur et de praticien Tout d’abord, le doctorant, selon Bruno Fortier, a tout d’abord sa place au sein de l’enseignement. En effet, il doit réinstaller une pédagogie au sein des écoles d’architecture. Car aujourd’hui, les écoles sont dirigées par un ensemble d’enseignants, pour la plupart praticiens, qui enseignent en même temps que leur travail de maîtrise d’œuvre. N’ayant pas de formation en pédagogie et peu de temps, leur engagement au sein de l’enseignement est parfois moindre. La mise en place du doctorat doit rétablir un ordre en formant des chercheurs statutaires avec une formation pédagogique qui viendrait prendre la place des enseignants déjà en place, les maîtres d’œuvre devenant ainsi des intervenants. Ce dispositif permettrait une meilleure mobilité des praticiens et une pédagogie installée par les chercheurs/docteurs. Pour diversifier les apports intellectuels permanents des écoles, l’accès au doctorat serait ouvert aux autres disciplines universitaires avec une formation de base de la conception architecturale. Mais l’auteur reste sceptique sur l’impact du doctorant s’il intervient directement au niveau de la profession de maîtrise d’œuvre, où l’ouverture intellectuelle est moindre. Ainsi, le doctorant peut modifier l’enseignement et la
formation d’architecte mais ne modifiera pas le marché des praticiens car il ne sera pas un meilleur maître d’œuvre. Comme on a pu le voir plus haut, Christian de Portzamparc nous montre que les activités du chercheur et celles du praticien sont radicalement différentes, un doctorant ne pouvant prétendre être un meilleur praticien, tout comme ce dernier ne pouvant prétendre faire de la recherche scientifique. Les deux professions restent complémentaires mais ne peuvent s’unir. Pour lui, un architecte/docteur qui aurait des compétences scientifiques serait un bon maître d’ouvrage ou un bon interlocuteur auprès de politiciens, car il possède un savoir, des facilités pour l’écriture et le diagnostic. Il serait donc de bon conseil. Il serait en quelques sortes un représentant, une autorité légitimée par un doctorat, un savoir reconnu. Il serait donc le meilleur interlocuteur pour garantir les intérêts d’une architecture réfléchie auprès des politiques pour lutter contre les pressions, les effets de mode ou le scepticisme à l’innovation. Pour Rudy Ricciotti, un chercheur pourrait aussi choisir la voie de la recherche appliquée pour rencontrer le réel, le faire parler et le transformer mais pas par la maîtrise d’œuvre. Il travaillerait pour des industries ou pour des groupes de BTP, comme Lafarge. Pour lui, ce serait répondre aux vraies questions de l’architecture et de la production. Pour Paul Chemetov, au contraire, le doctorant est un praticien spécialisé et mieux formé aux aléas de la conception de projet car il est capable de gérer des situations complexes et ainsi de montrer une figure qui luttera contre l’ « anti-intellectualisme profond du milieu architectural ». Philippe Panerai imagine alors le doctorant sur le terrain comme une figure d’intelligence et de rigueur. On pourrait imaginer que des grandes agences d’architecture développent un pôle recherche, à l’image des industries. Ainsi, que ce soit au sein du lien naturel Recherche/Pratique ou directement sur le terrain, le doctorant doit être formé pour pouvoir former l’ensemble des acteurs de l’architecture. « Former à la recherche, c’est former des gens qui répondront à des questions que l’on ne connaît pas encore ». Qu’il fasse l’objet de débats, montre son importance et les enjeux qu’il implique. Peu importe la forme qu’il prendra, fondamental ou appliqué, nous remarquons ici l’avancée qu’il a déjà produit par l’intérêt qu’il suscite pour les chercheurs et les praticiens, qui ont déjà commencé à se rencontrer sur ce thème commun.
4. Étude de cas : ENSA de Lyon Selon le plan 2007-2012 pour l’enseignement supérieur et la recherche en architecture du Ministère de la Culture et de la Communication, sur les 20 écoles d’architecture en France, 12 proposent des masters recherche ou des masters professionnels cohabilités par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, accueillant à ce titre 257 étudiants. Le personnel enseignant est largement composé de praticiens : 990 enseignants, dont plus de 800 titulaires et 155 associés, plus de 70% sont des praticiens. Mais le rapport tend à relativiser ce constat en énonçant qu’un « nombre croissant d’enseignants exercent en outre des activités de recherche ». Autrement dit, une part croissante des enseignants a le statut de chercheurs. Qu’en est-il de l’ENSA de Lyon ? Quelle est la composition de ses enseignants, quels statuts, et qu’est ce que cela implique dans les cours proposés dans la formation ? Comment se composent les laboratoires et quelles interventions ont-ils au sein des cours ? Quels types de masters sont proposés en vue du diplôme d’architecte, quel parcours professionnel est préconisé ? Existe-t-il au sein de l’école des alliances entre praticiens et chercheurs ? Si oui, comment sont-elles perçues ? Innovation ou alternative ? Nous admettrons que les trois années de licence sont basées sur les techniques de la conception architecturale et les réflexions que l’étudiant porte sur ses propres pratiques. « Ces trois années sont consacrées à l’acquisition des bases d’une culture architecturale, des processus de conception, de la compréhension et de la pratique du projet 34», le parcours scientifique étant peu représenté. Se concentrent en licence, des cours transversaux à la pratique du projet, restant très majoritaires, des cours d’histoire, d’art, de sociologie, de philosophie, de construction, de géométrie, d’informatique, de droit, etc. Un ensemble d’apports théoriques interférant le domaine de l’architecture. Ces cours théoriques n’interviennent que très rarement avec les cours de projet. C’est d’ailleurs une scission que nous remarquons spatialement dans l’école où l’enseignement théorique reste en rez-dechaussée, tandis que l’enseignement pratique de projet occupe l’intégralité des ateliers à l’étage. Ce n’est qu’à partir des années de Master que le mélange
Ministère de la Culture et de la Communication, Les études supérieures d’architecture en France, novembre 2009, p.7. 34
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commence à opérer, c’est ce que nous allons voir à présent.
cours de projet d’architecture, qui jusqu’à présent vivait en autarcie.
4.1. Les laboratoires
Le Laboratoire d’analyse des formes (LAF), créé en 1988 est sous la direction scientifique de François Tran et comporte un effectif de dix chercheurs permanents. Leur orientation scientifique est l’identification morphologique de corpus architecturaux, la morphogénèse des agglomérations bâties et la méthodologie de l’analyse morphologique. Le laboratoire tend à diversifier son équipe qui devient transdisciplinaire, et permet la mise en place d’une morphologie appliquée aux phénomènes architecturaux, en appliquant des méthodes d’analyse et des instruments morphométriques spécifiques.
Aujourd’hui, l’ENSAL développe ses partenariats en ce qui concerne ses unités de recherche, notamment avec la création récente d’un laboratoire de recherche EVS-EDU en partenariat avec l’INSA de Lyon. Mais nous nous intéresserons ici, au laboratoire déjà installé depuis 1988 pour découvrir quelles sont ses orientations et comment il influe dans l’enseignement, notamment au sein des
TABLEAU : Liste des chercheurs du LAF qui interviennent dans l’enseignement de Second Cycle à l’ENSAL. Enseignants Chercheurs François TRAN Stéphan COURTEIX François FLEURY (HDR)
Özlem LAMONTREBERK Christian MARCOT Antonella MASTRORILLI (HDR en cours) Suzanne MONNOT Remy MOUTERDE
Activités d’enseignement à l’ENSAL en Master >Sémiotique de l’espace (M1 et M2), Départ. « Héritage architectural ». >Projet (M1et M2) Départ. « Héritage architectural » >encadrement de TD en sciences humaines (L1 et L3, M1 en FI, L2 en FPC), >Enseignement du projet (M1 en FI) >Coordinateur UE FI Master 1, ue7PPe « Situations de handicap et Environnement bâti », depuis 2005 >Auscultation des bâtiments (M1) >Modélisation en mécanique des structures (M1, M2) >Encadrement des mémoires de séminaire (M1, M2) >Analyse structurelle, cours en ligne : « Methods for architectural morphology analysis », dispensé dans le cadre du projet européen « virtual campus » >Département Héritage Architectural Atelier Projet PFE M2 >Encadrement des mémoires de séminaire M1 Projet « héritage architectural » (M2) >Construction, Histoire de la Résistance des Matériaux > « Intervention en bâti existant » (M1-M2)
> Responsable des stages >Projet construction (M1) >Construction et matériaux anciens (M1 et M2) >Initiation à la recherche outils et méthodes du diagnostique technique (M1). >Encadrement des mémoires de séminaire (M1 et M2) Brigitte SAGNIER- >Département Héritage Architectural >Atelier Projet (M1) MINGUET >Atelier Projet PFE (M2) >Encadrement des mémoires de >Séminaire (M1 et M2) Sources : site internet du LAF, http://www.laf.archi.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=40&Itemid=4&lang=fr
Le laboratoire Modèles et simulations pour l’architecture, l’urbanisme et le paysage (MAP-ARIA, UMC CNRS-MCC 694), dont la direction scientifique se fait par Hervé Lequay, comporte un effectif de neuf chercheurs. L’orientation scientifique de l’équipe comporte les problématiques portant sur les applications de l’informatique à l’architecture avec comme objectif la « production d’outils et de méthodes
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d’aide à la décision pour les professionnels de l’aménagement de l’espace »35. L’association avec des architectes, des ingénieurs, des historiens, des géographes et des informaticiens permet la mise en place d’une équipe pluridisciplinaire. Leurs travaux
Direction de l’architecture et du patrimoine, Ministère de la Culture et de la Communication, Recherche architecturale, urbaine et paysagère : Répertoire des unités de recherche, Programme pluriannuel 2006-2009. 35
portent sur l’élaboration de modèles et d’outils de simulation (notamment la modélisation) en
architecture, considérée comme « pratique et objet de connaissance ».
TABLEAU : Liste des chercheurs de MAP-Aria qui interviennent dans l’enseignement de Second Cycle à l’ENSAL. Enseignants Chercheurs Hervé LEQUAY
Philippe MARIN
Activités d’enseignement à l’ENSAL en Master >Coordinateur du cycle Master >Co-responsable avec François Fleury, Philippe Marin, Denis Plais du domaine d’étude de master 1 « Architecture, Processus et Pratiques de l’Innovation ». >Co-responsable avec Christophe Widerski, Walter Piccoli et Philippe Marin du domaine d’étude de master « Stratégies et Pratiques Architecturales Avancées ». >Responsable des enseignements d’informatique >Président de la Commission de la Pédagogie et de la Recherche de 2004 à 2010, membre de droit du Conseil Scientifique de l’ENSAL. >Co-responsable avec François Fleury, Hervé Lequay, Denis Plais du domaine d’étude de master 1 « Architecture, Processus et Pratiques de l’Innovation ». >Co-responsable avec Christophe Widerski, Walter Piccoli et Hervé Lequay du domaine d’étude de master « Stratégies et Pratiques Architecturales Avancées ».
Sources : site internet de Map-Aria, http://www.aria.archi.fr/index.php/equipe/
Comme on peut le voir, dans un premier temps, les laboratoires de recherche développent leurs partenariats et leur équipe pour diversifier leur domaine d’étude et leur transdisciplinarité. En s’ouvrant à des alliances, notamment avec d’autres ENSA, écoles d’ingénieurs ou d’autres disciplines universitaires, les laboratoires pérennisent leurs unités de recherche dans des thématiques toujours plus proches de l’architecture, celle d’un agglomérat de connaissances. Nous remarquons dans un second temps que les laboratoires alimentent les apports théoriques en marge des cours projets, mais qu’ils tendent de plus en plus à les intégrer, notamment dans les domaines d’études de second cycle. 4.2. Spécialités et statuts des enseignants / Composition des domaines d’étude (Cf. Annexe 4) Le tronc commun à l’ensemble de la formation Licence-Master, donnant droit au diplôme d’État d’architecte conférant au grade de Master, s’organise autour du projet architectural. Des champs disciplinaires sont abordés dans les cours magistraux et des ateliers encadrés ; ils portent sur : > Le projet architectural : conception des structures, des enveloppes, détails d’architecture, économie du projet, réhabilitation. > Le projet urbain : approche paysagère, environnementale et territoriale
> L’histoire et les théories de l’architecture et de la ville > La représentation de l’architecture : maquettes, informatique > Les sciences et techniques pour l’architecture : mathématique, géométrie, connaissance des matériaux et des structures, techniques de maîtrise des ambiances. > Expression artistique et histoire de l’art > Les sciences humaines et sociales > Les théories de l’urbanisme et du paysage > Langues étrangères Le rapport du Ministère de la Culture et de la Communication met l’accent dans la formation des architectes « les enjeux du développement durable, la prise en compte de risques majeurs, la qualité d’usage et l’accessibilité des bâtiments, la réhabilitation et les interventions sur le bâti existant ». Nous admettrons que l’ensemble de la formation en tronc commun répond aux contraintes des praticiens de la maîtrise d’œuvre. Le deuxième cycle, soit les deux années de master, doit assurer la maîtrise des problématiques propres à l’architecture en permettant de se préparer aux différents modes d’exercice et domaines professionnels de l’architecture. Bien que l’on évoque différentes professions liées à l’architecture, nous remarquons bien que la formation initiale conduit
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essentiellement à la profession de la maîtrise d’œuvre d’architecte. Pour cela, depuis peu de temps, une initiation à la recherche a été mis en place durant le second cycle, avec comme prévu un parcours spécifique permettant d’approfondir la préparation à la recherche. Soit une mention « recherche » associée au diplôme d’État. Cette formation est gérée par des chercheurs de l’école, et un stage de pratique de la recherche permet d’alimenter les laboratoires de l’école pour une durée de deux mois. Le but recherché est d’accueillir ces futurs doctorants. Intéressons nous maintenant aux spécialisations du projet architectural proposé au second cycle. En effet, les nouveaux programmes pédagogiques, qui ont pris effet depuis la rentrée universitaire 2010-2011, conduisent à remplacer les départements en domaines d’études, l’idée étant de diversifier l’apport de chaque spécialité du projet choisi par l’étudiant. « Un domaine d’étude du master est une thématique architecturale développée par une équipe pluridisciplinaire partageant des objectifs communs »36. Ainsi, l’étudiant peut choisir un parcours spécifique de la conception de projet, ou une équipe pédagogique qui peut « représenter une posture, une doctrine, un champ de pratique de l’architecte, un champ d’investigation spécifique »37. Les principes fondateurs du domaine d’étude sont de rendre les équipes pluridisciplinaires qui articuleraient l’enseignement de projet ; « un DEM doit être porté par un enseignant TPCAU et au moins un enseignant d’un autre champ disciplinaire »38. Il doit pouvoir être possible pour l’étudiant de changer de DEM durant le deuxième cycle, de ce fait, il peut choisir trois DEM différents sur deux ans. Ces derniers doivent opérer un changement de fond par rapport aux départements en terme de cohérence et de lisibilité. L’accueil de nouveaux enseignants responsables en master doit permettre l’actualisation de thèmes offerts en rapport avec le contexte et les pratiques actuelles de l’architecture. Pour la mise en place de ces DEM, un appel à proposition est ouvert pour permettre à des équipes pédagogiques de créer un domaine d’études sur un semestre à condition qu’elles s’appuient sur des enseignants-chercheurs, des structures de recherche et des partenariats. Suite à cette démarche, huit domaines d’étude ont été retenus dont la durée couvre 1 à 3 semestres contigus ou non.
Programme pédagogique de Master 2011-2012, École Nationale Supérieure d’Architecture de Lyon. 37 Ibid. 38 Ibid. 36
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Quatre DEM sont installés en deuxième année : - Stratégie et Pratiques Architecturales Avancées : Composé d’enseignants de projet (TPCAU) et s’appuyant sur le laboratoire MAP-Aria, notamment par la présence d’enseignants chercheurs. - Ambiances Architecturales, Cultures Constructives et Éco-habitat : composé d’enseignants de projet (TPCAU), en partenariat avec l’ENSA de Grenoble et ses laboratoires, ainsi que par les Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau. - Architecture, Villes, Périphéries : composé d’enseignant de projet (TPCAU), de Sciences Humaines et Sociales (SHSA) et de Ville Territoire et Paysage (VT). - Architecture, Formes, Transformations : composé d’enseignants de projet (TPCAU), d’enseignants de Histoire et Théorie de l’architecture (HCA) et s’appuyant sur le laboratoire d’Analyse des formes (LAF), par les présences d’enseignants chercheurs. Tandis que quatre autres sont proposés en complément en première année : - Histoire, Patrimoine, Architecture : Composé d’enseignants de projet (TPCAU) et d’autres spécialisés dans l’histoire et la théorie de l’architecture (HCA). - La fabrique in situ : composé d’enseignant de projet (TPCAU), d’enseignant d’Art et Techniques de Représentation (ATR), et de Sciences et Techniques pour l’architecture (STA). - Architecture, Processus et Pratique de l’Innovation : composé d’enseignants de projet (TPCAU) et d’enseignants STA, qui explorent le management de l’innovation. - Concevoir pour Construire, Éthique et Technique : composé d’enseignants de projet (TPCAU) et d’enseignants STA, en partenariat avec l’école d’ingénieurs de l’INSA de Lyon. Nous remarquons que l’école développe des démarches pluridisciplinaires alliant le projet d’architecture à des pratiques théoriques plus diversifiées, en rapport avec les nouvelles contraintes du métier de la maîtrise d’œuvre en développant des méthodes nouvelles d’approche du projet. En étant confronté à des chercheurs et des praticiens, l’étudiant développe de nouvelles perspectives d’avenir dans la profession d’architecte.
4.3. Quelle formation prédomine entre praticien et chercheur Alors qu’il y a encore quelques années la formation d’architecte se résumait principalement à la pratique de conception de projet, aujourd’hui les écoles sont contraintes à revoir leur programme pédagogique. En effet, comme on a pu le voir précédemment, le ministère tend à rendre compte des différents débats autour de l’enseignement et de la recherche en architecture. En effet, la recherche s’est développée jusqu’à présent en autarcie par rapport à la pratique de la maîtrise d’œuvre, qui jusqu’à présent avait le monopole sur l’enseignement. Hors, ne pouvant fermer les yeux sur une société en mutation et une fracture entre recherche et pratique toujours plus grande, l’institution en charge de l’architecture a bien conscience de l’enjeu de l’enseignement pour soigner ses problématiques. Dans un premier temps, comme on a pu le voir avec l’exemple de l’ENSA de Lyon, la recherche doit se diversifier et mettre en place des équipes pluridisciplinaires pour des thèmes de recherche cohérents avec un ensemble de problématiques liées au terrain de l’architecture. Des unités de recherche auraient notamment pour but de mettre en place les connaissances sur ce monde mutant toujours plus complexe et rapide. Aussi, dans un même temps, des outils ou de méthodes qui aideraient le praticien dans son métier pourraient être mis en place. Cependant, nous remarquons très vite que la mise en place d’une recherche plus proche de la pratique, ne peut se faire si le clivage persiste entre les deux entités. Les connaissances produites seront moins pertinentes si elles sont déconnectées du praticien car elles n’auront aucun impact si elles restent inconnues de ce dernier. La première solution serait de faire travailler des chercheurs et des praticiens sur le terrain mais ces démarches sont encore très rares et souvent en désaccord dans leur fonctionnement, le rythme de production de connaissances n’étant pas les mêmes que celui de la production d’objets architecturaux, comme Rudy Ricciotti a pu nous l’énoncer plus haut. En d’autres termes, le véritable enjeu d’une recherche plus proche de la pratique se situe au sein de l’enseignement : en développant la rencontre entre architectes praticiens et chercheurs, notamment dans les domaines d’études, mais aussi en développant chez l’étudiant des capacités de conception architecturale, de méthodes de recherche et une conscience des enjeux de chacune de ces entités. L’idéal étant que l’étudiant ait conscience qu’il ne faut plus de barrière entre recherche et pratique, mais que dans la future
profession qu’il choisit, ces deux casquettes lui permettent d’être mieux armé. Les domaines d’étude on donc évolué dans ce sens là, pour ne plus avoir à faire un choix entre les deux activités professionnelles. 4.4. Une pratique de recherche initiée dans l’enseignement : l’expérimentation. Le nouveau programme pédagogique, des domaines d’étude de Master, tente de mettre en œuvre cette armature de l’étudiant. Nous avons vu des domaines d’études alliant conception de projet urbain ou architectural, liés à l’histoire et la théorie, l’ingénierie et la technique de construction, l’informatique et les méthodes de représentation, les sciences humaines et ses méthodes d’analyse, la morphologie et ses méthodes épistémologique, les techniques scientifiques et ses empreintes sensibles, etc. Mais les démarches novatrices les plus significatives, notamment en lien avec le terrain, sont celles qui nous intéressent le plus ici, car elles sont la véritable alliance entre la pratique du chercheur et celle du praticien confronté au terrain. Car nous le verrons plus loin, certaines démarches, hors ou non du cadre scientifique, tendent à se rapprocher du terrain de maîtrise pour capter de nouvelles connaissances à la fois techniques et sensibles. Notamment, avec la mise en place de l’expérimentation dans les domaines d’études de La Fabrique in situ ou d’Ambiances Architecturales et Cultures Constructives dont le processus est mis en avant, comme producteur de connaissances au service de la conception architecturale et non le résultat final, car la finalité du projet ne serait plus l’objet livré, mais l’usage, l’ambiance, la thématique du sensible. L’expérimentation a ici un rôle d’interactions entre l’étape de conception et l’objet final qui expérimente lui même le réel. De ce fait, le processus de conception est élaboré en lien avec la transformation qu’il peut produire sur le réel. L’expérimentation finale in situ délivre alors des connaissances nouvelles que l’étudiant découvre seul. Ce procédé encore peut reconnu fait de l’objet expérimental un support didactique efficace à l’ouverture d’esprit de l’étudiant sur les pratiques de recherche qu’il pourrait entreprendre en temps que futur chercheur ou futur praticien. La mise en place, au sein de l’enseignement, de démarches expérimentales encadrées par des praticiens et des chercheurs en architecture, sont des démarches à mettre en avant non seulement pour légitimer celles qui se situent déjà sur le terrain _ notamment nous le verrons avec l’architecte Patrick Bouchain _ ou dans des établissements spécialisés
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de l’expérimentation _ notamment au sein des Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau, où se développe le thème de recherche Cultures Constructives, en lien avec différentes disciplines de l’enseignement et de professionnels de la construction. Bien que nous remarquions une avancée vers une recherche et un enseignement plus proche de la pratique architecturale, cette démarche suscite encore des problèmes d’ego du projet architectural. Certains voient d’un mauvais œil des enseignements qui ne conçoivent pas la pratique du projet comme objet final, ce sont pourtant des nouvelles thématiques que l’architecte peut rencontrer, la profession allant de plus en plus vers des projets d’auto construction ou de rénovation, sa capacité d’adaptation à l’existant et aux acteurs étant un nouvel enjeu. C’est pour cela que les institutions en charge de l’architecture tendent de plus en plus à soutenir des démarches pédagogiques ou de recherches novatrices qui développeraient cette ambition d’une recherche plus proche de la pratique architecturale. C’est ce que nous verrons dans cette dernière partie, où nous mettrons en avant dans un premier temps, des démarches expérimentales
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proches de la production architecturale, n’étant pas reconnues par des institutions scientifiques propre à l’architecture, et, dans un deuxième temps, des démarches de recherche plus proches de la pratique architecturale, proche de l’enseignement, et étant reconnue par le ministère de la culture et de la communication. Aujourd’hui, la recherche en Architecture répond à une tendance, non dans un effet de mode, mais dans sa propension, à développer un esprit critique chez le praticien pour développer de nouvelles méthodes de conception, et à orienter de nouvelles recherches scientifiques plus appliquées et expérimentales pour se rapprocher des enjeux professionnels de la maîtrise d’œuvre. C’est cette tendance, instaurée par l’histoire et les interactions qui perdurent au sein du couple recherche/pratique, qui a conduit à des exemples de nouvelles méthodes expérimentales dans l’ensemble du monde de la construction. Comme une revendication globale à vouloir rompre avec cette dichotomie entre la raison et la passion.
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///UNE RECHERCHE APPLIQUÉE PLUS PROCHE DES ENJEUX DE LA PRATIQUE ARCHITECTURALE
: EXPÉRIMENTATION ET PROCESSUS DE CONCEPTION
Entre mouvement expérimental historique, approche alternative du projet d’architecture et développement expérimental industriel, quel corps donner à une recherche appliquée en architecture qui produirait à la fois des connaissances fondamentales et de nouveaux outils pour répondre aux enjeux de la profession de maitrise d’œuvre. C’est ce que nous nous attarderons à démontrer dans cette partie, à savoir quelles pratiques expérimentales développent le monde de la construction pour pallier à ses nouvelles difficultés. Enfin, nous découvrirons une recherche qui tente d’investir à la fois l’enseignement, les chercheurs et les professionnels dans une démarche centralisatrice de compétences novatrices, scientifiques, manuelles et applicables. 1. Recherche hors école : une pratique expérimentale Expérimenter, c’est soumettre à des expériences, qui signifient les connaissances acquises par la pratique. Appliquer, essayer, pratiquer, rechercher, tester sont les termes que nous allons retrouver maintenant pour définir ce que pourrait être une recherche appliquée en architecture basée sur l’expérimentation. Cette partie interroge des pratiques expérimentales n’étant pas reconnues par les écoles d’architecture. Ces exemples sont l’analogie d’un monde en mutation qui tend à trouver des solutions dans la pratique expérimentale en faisant appel aux acteurs de la conception de l’espace. 1.1. Mouvement expérimental historique : l’avantgarde, remise en question du projet d’architecture La collection du FRAC, Centre sur l’expérimentation architecturale, met en avant des pratiques avant-gardistes des architectes. Elle concentre les projets emblématiques de l’architecture radicale des années 60 aux créations les plus actuelles. Dans une dimension prospective, elle met en exergue des utopies et des expérimentations qui interrogent les procédures de conception de l’architecture, soit une remise en question permanente à la fois critique et créatrice. « L’utopie ne signifie pas ici un déni de la réalité, mais, dans la crise de l’ordre rationnel qu’elle implique, permet une échappée
critique vers la création et sa dimension parfois visionnaire »39. Nombreux architectes reconnus par cette collection, montrent un intérêt pour l’activité théorique et conceptuelle du projet, ce qui pousse ces derniers à introduire dans leur projet une dimension critique de leur propre production pour aller vers des réalisations expérimentales qui justifient leurs propos. Le processus et le concept sont exprimés par des maquettes et par des textes. Le mouvement radical, parce qu’il a su poser les bonnes questions à son époque, suscite cette posture provocatrice aujourd’hui, mais l’intérêt à nos jours n’est pas l’objet final mais le comportement de l’architecte face à une situation. Ce mouvement a contribué à l’émancipation de la conception architecturale qui réfléchit sur sa propre production. En remettant en question l’ensemble des doctrines qui dirigeaient la conception architecturale, cela conduit au développement d’une pensée moins universelle, mais porteuse d’innovation en architecture. Est-ce qu’aujourd’hui le mouvement radical opère toujours ? Cette question relève ici d’un autre sujet car ce qui nous intéresse, c’est cette posture nouvelle de l’architecte à produire de nouvelles directions de l’architecture par une expérimentation intellectuelle qu’il fait de lui même et de l’espace. Est-ce que développer une recherche scientifique plus proche de la pratique architecturale reviendrait à être radical et inverser tous les codes déjà en place pour produire de nouvelles connaissances ? Aujourd’hui, de nombreuses agences d’architecte prétendent pratiquer l’expérimentation dans leurs projets. Mais cette expérimentation ne peut pas être considérée comme une recherche scientifique, étant donné qu’on pratique sur un objet fini. La commande n’étant jamais la même, transposer une expérience sur une autre est illusoire pour la recherche scientifique. L’expérimentation architecturale relève de principes innovants propres à la conception architecturale et délaisse en contrepartie l’ensemble des autres disciplines que forgent l’architecture. De ce fait, l’apport de connaissances en est réduit à la simple pratique architecturale. Inverser les codes ne pourrait être la solution de nos jours, tant l’architecture s’inscrit déjà dans de nouveaux codes.
Ouvrage du Frac Centre, Architectures expérimentales 19502000, collection du Frac Centre, 2003, p.7. 39
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L’extraire de son environnement reviendrait à produire des connaissances peu applicables, l’enjeu étant de répondre au changement, faut-il pour autant être radical ? 1.2. Approche alternative du projet : prospection, la recherche / action et la démarche participative La prospective se définie par « la démarche qui vise, dans une perspective à la fois déterministe et holistique, à se préparer aujourd’hui à demain »40. Autrement dit, nous nous intéresserons ici à une démarche qui cherche à être reconnue aujourd’hui pour coller avec les nouvelles exigences de demain. Notons que déjà en 1986, lors du colloque international sur la recherche architecturale, JeanClaude Ludi mettait déjà en avant une nouvelle fonction de l’architecte, celle de construire avec l’utilisateur, ce que l’on appelle aujourd’hui la participation41. Beaucoup se posent la question de la place de l’architecte dans ce type de construction. Les habitants (le tiers participant) et l’architecte ne partage pas le même langage, ni la même sensibilité face à l’espace. De ce fait, ce tiers nous confronte à des « idées qui sont des représentations que des individus ou des groupes d’individus se font d’eux-mêmes, ceci dans une circonscription spatiale relativement définie et fondatrice d’identité ». L’enjeu pour l’architecte est donc de combiner leurs connaissances du site et les sienne, des connaissances professionnelles de l’espace [C’est ce que tente de développer le domaine d’étude de La Fabrique de l’ENSAL en faisant travailler les étudiants sur un projet d’autoconstruction d’un groupe d’individus]. Cette action directe entre architectes et usagers pose de nombreuses questions et de problématiques organisationnelles que des recherches pourraient pallier, notamment sur l’organisation du projet participatif, mais ce type de projet peut aussi mettre en exergue des connaissances liées à de nouveaux processus de conception. C’est ce nouveau statut d’architecte qu’expérimente Patrick Bouchain en nous disant dans son ouvrage Construire Autrement42, « aujourd'hui, ce qui m'intéresse, c'est de comprendre le besoin. Je
http://fr.wikipedia.org/wiki/Prospective#Prospective_urbaine « La participation des habitants ne peut exister sans un projet et, affirmons-le aujourd’hui : le Projet ne peut exister sans la participation des habitants… » Paroles d’un nouvel atelier (atelier 13) spécialisé dans la maîtrise d’usage : « Le maître d’œuvre remet au maître d’ouvrage un projet partagé avec la maîtrise d’usage ». 42 Patrick Bouchain, Construire autrement, édition Actes Sud, coll. « l'Impensé », septembre 2006, 190 p. 40 41
crois à l'explication, à la vision collective des problèmes et à la décision individuelle. (...) C'est exactement comme un travail de metteur en scène ». Dans ses projets, l’architecte se confronte à sa propre conception du projet en tant qu’architecte et interroge ses limites face à des opinions, des maîtres d’ouvrage ou encore des politiques. Par son expérience, il « joue » ainsi avec les habitants et les décideurs pour réinterroger le projet d’architecture et son propre rôle. Les chantiers et les avant-projets deviennent lieu de participation et d’expérimentation. Pour cela, Patrick Bouchain s’entoure d’une équipe pluridisciplinaire au sein de son agence Construire, où il valorise les savoir faire, alliant ainsi artistes et architectes. Son équipe alimente ainsi ses projets qui en deviennent si singuliers. L’équipe répond depuis quelques années à une demande sociale, celle des logements sociaux. En effet, elle intervient dans différentes villes de France pour expérimenter le renouvellement urbain des quartiers défavorisés. Suite à leur intervention à la Biennale de Venise en 2006, où il transforme le pavillon de France en lieu d’habitation et de débat durant toute la durée de la manifestation (3 mois), il décide de répondre à cette demande sociale dans quatre villes différentes. Notons par exemple celle de Boulogne-sur-Mer, où une stagiaire y fit sa HMONP en venant vivre pendant 2 ans sur le site à réhabiliter. En effet, le principe de Patrick Bouchain était d’installer dans le quartier une permanence architecturale, par la présence de Sophie Ricard. Cette pratique est totalement expérimentale et l’architecte ne sait pas où cela va mener. Elle est le lien, le relais entre les différents acteurs, elle travaille avec les habitants sur ce que pourrait être leur maison en confectionnant des maquettes, des dessins. Cela a donné lieu à la localisation des savoir-faire du quartier puis au chantier, où tous les habitants participaient dont l’architecte. Cette démarche pose la question de la place de ce dernier, alors qu’il ne construit pas. Dans chacune des villes, ils mettent en place des démarches d’avant-projet d’analyse et de participation des habitants. Inclure l’habitant dans la conception ou simplement le sensibiliser sont des démarches nouvelles en architecture. L’architecte a sa place au sein de cette nouvelle pratique, celui de transformateur indirect : « Il y a une voie nouvelle dans la pratique de l’architecture qui est très complexe, plus modeste, moins spectaculaire, moins honorifique »43.
Site internet de La maison de Sophie à Boulogne-sur-Mer ; http://strabic.fr/Ma-voisine-cette-architecte-1-2.html 43
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Les projets de Patrick Bouchain posent aujourd’hui des questions : les nouvelles compétences que doit avoir l’architecte face à ces nouvelles demandes d’ordre participative, cette dernière étant une alternative à la démolition. On s’interroge aussi sur le fait que ce genre de pratique expérimentale n’est pas encore reconnu, notamment au sein de l’enseignement. Comme on peut le voir avec le département La Fabrique In Situ souvent vue comme une simple alternative du projet architectural, dont le fondement est remis en question car il ne porte pas sur le projet d’architecture. Hors, les expérimentations de Patrick Bouchain intrigue la communauté scientifique, qui prend conscience de l’intérêt de ses pratiques, porteuses d’enseignements et donc de connaissances. Non seulement sur les méthodes de conception du projet mais aussi des relations avec la maîtrise d’ouvrage et des usagers. L’architecte est souvent invité ces dernières années à des colloques ou des débats organisés par des laboratoires, entre autre le 3 avril dernier à Paris, pour un débat Questions/Objections avec un intervenant du Laboratoire GERPHAU (Philosophie Architecture Urbain). Le problème que rencontrent les scientifiques pour produire des connaissances de ces pratiques, est de les rendre objectives et scientifiques. Faire un rapprochement avec la rechercheaction est peut-être possible. Dans ses études sur cette méthode de recherche venue des sciences humaines, André Morin justifie, déjà en 1985, sa scientificité de telles démarches expérimentales en envisageant « la science de façon analogique pour favoriser la production de savoir pratique »44. La recherche-action est une forme de recherche incitée par le PUCA, pour répondre à un problème de société précis par la fabrication de prescriptions qui seraient applicables pour améliorer l’action. En intervenant sur le terrain lors du processus de conception, Patrick Bouchain peut discerner de nouvelles connaissances sur son rapport au réel, qui pourraient être ré-applicables dans le même type de situation pour améliorer son action. Hors, les critères de scientificité d’une recherche action sont encore assez ambigus et sa mise en place demande à être strict dans les interrogations qu’on applique au terrain. Car on se doute bien que les résultats obtenus ne seront jamais universels, généraux et intemporels, à l’image de la recherche scientifique.
Article : Critères de « scientificité » de la recherche-action, André Morin, Revue des sciences de l'éducation, vol. 11, n° 1, 1985, p. 31.
44
41
Dans leur ouvrage La recherche-action : Ambitions, pratiques, débats, les auteurs Christophe Albaladejo et François Casabianca admettent que les connaissances qui émergent de la recherche-action ne viennent ni du Vrai ni du Faux, « il s’agit d’explorer le « possible », qui ne peut être mis en évidence que dans l’action ». Les résultats d’une telle recherche action sur le projet de Boulogne-sur-Mer reviendrait à faire l’investigation de la satisfaction des différents acteurs, hors il est clair que cela ne serait pas pertinent car le projet ne peut convaincre tout le monde, et le principal résultat se passe en chacun. D’autre part, les connaissances que l’on voudrait tirer de cette pratique ne pourraient faire état d’une reproduction, tant ces démarches dépendent du lien, des acteurs et d’un temps donné. Patrick Bouchain dit lui-même que chaque projet est différent, car les résultats finaux en terme de constructions n’amènent jamais le même projet. L’idée étant alors de transposer l’action des rechercheactions en des lieux différents pour capter justement leur intérêt dans une nouvelle situation étudiée : le contexte prenant ainsi toute son importance. Historiquement, la recherche-action est opposée aux techniques des sciences « dures ». Ce type de recherche a donc pour objectif de modifier le réel et de tirer des connaissances de ces transformations. Face à l’évolution de certaines commandes, notamment participatives, la rechercheaction est une bonne compagne pour alimenter les connaissances d’une nouvelle profession qui s’ouvre à l’architecte. En quelques sortes, Patrick Bouchain pourrait faire de ses expérimentations un lieu de recherche pour élaborer et valoriser des connaissances relatives à ses pratiques novatrices du projet architectural. 1.3. Développement expérimental industriel : Lafarge, pôle de recherche et de compétitivité45 Aujourd’hui, Lafarge est le leader mondial des matériaux de construction, il est implanté dans 64 pays dans le monde. L’entreprise dispose d’un pôle technologique près de Lyon, elle est composée de chercheurs, d’ingénieurs, d’experts et de techniciens.
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Initiés par le gouvernement français, les pôles de compétitivité sont des regroupements, sur une zone géographique définie, d'industriels, d'universitaires et d'établissements de recherche publique. Leur objectif est de promouvoir l'innovation, et surtout son passage en phase industrielle, en rassemblant les différents acteurs concernés autour de projets structurants. » Site internet Orange Cf :http://www.orange.com/fr_FR/innovation/partenariats/competiti vite/definition.jsp
Un centre de recherche y est intégré où les chercheurs étudient les matériaux et conçoivent des solutions pour les systèmes de construction de demain. Des laboratoires sortent des solutions de ciment, béton et plâtre à haute valeur ajoutée en matière de résistance et de durabilité, ainsi que l’isolation thermique, d’esthétique, de maîtrise acoustique et de pérennité des surfaces. Face aux enjeux écologiques des matériaux produits par Lafarge (énergie grise et consommation énergétique élevées), l’entreprise développe ses recherches (soit 50%46) autour de la construction durable. Le pôle technologique abrite aussi des chercheurs « nomades » qui jouent le rôle d’interface entre le site de recherche et le terrain. Ils participent au transfert des produits et les suit durant les premiers temps sur le terrain pour analyser la mise en œuvre et voir comment ils réagissent dans le projet et dans le site. Pour ne pas enliser ses recherches, l’entreprise développe de nombreux partenariats pour développer ses expertises : des centres de recherche, des grandes écoles, des instituts universitaires ou d’autres entreprises du monde entier. En France, Lafarges collabore avec l’École polytechnique, l’École des ponts et chaussées, l’université de Paris VI et plusieurs laboratoires du CNRS. Puis il développe de nombreuses collaborations internationales aux EtatsUnis par exemple47. Proche du terrain, mais aussi de ses clients, Lafarge entretient une relation particulière avec les architectes. En effet, depuis toujours les architectes stimulent l’innovation dans ses entreprises, car elles doivent trouver des solutions techniques pour la réalisation de projets toujours plus ambitieux. Mais le groupe développe des nouvelles technologies constructives qui développent dans le même temps l’imagination des architectes, en leur offrant plus de possibilités d’action. De grands noms de l’architecture, ont notamment contribué aux développements de nouveaux matériaux, notamment l’utilisation du béton Ductal par Rudi Ricciotti, dans son projet de la
Rapport de Lafarge, Le pôle technologique : Anticiper la construction de demain, http://www.lafarge.fr/20100929-Lafarge-The_technology_centerfr.pdf 47 « Aux États-Unis, il travaille avec le prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT), le pôle Georgia Tech et les universités de Berkeley ou de Princeton. Ailleurs dans le monde, il s’est rapproché de l’Imperial College de Londres (Royaume-Uni), de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (Suisse), des universités de Toronto, de Sherbrooke et Laval (Canada), de l’Académie des matériaux de construction de Pékin (Chine) ou de l’Institut de technologie de Roorke (Inde). » cf. Le Grand Journal de l’Innovation, Lafarge, p.4. http://www.lafarge.fr/11092009press_themabook-innovation_review-fr.pdf 46
passerelle de la paix à Séoul. D’autre part, Lafarge soutient des projets avant-gardistes en particulier concernant le développement durable, citons l’exemple du projet Hypergreen de Jacques Ferrier ou encore les ponts habités de Marc Mimram. Lafarge développe ses partenariats avec des écoles, non seulement pour promouvoir ses produits, mais surtout pour investir dans de nouveaux talents qui seront formés pour utiliser ses produits. L’entreprise s’associe ou organise de nombreux concours ouverts à l’Europe ou à l’Internationale pour découvrir, suivre et soutenir les futurs talents de l’architecture. L’architecte n’étant pas le seul client, l’entreprise organise des rencontres avec les maîtres d’ouvrage et des bureaux d’études où ils discutent du thème de l’innovation et découvrent les nouveaux produits. A travers les méthodes de recherche et la manière dont il entretient ses relations avec l’ensemble des acteurs de la construction, Lafarge s’inscrit dans un processus remarquable d’innovation. « Ces collaborations permettent à Lafarge de mieux comprendre comment un architecte ou un ingénieur de bureau d’études choisit un matériau et l’utilise, et ainsi définir de nouvelles pistes de recherche »48. Les interactions qui existent entre le groupe et les concepteurs sont remarquables dans le sens ou chaque partie contribue à l’innovation de l’autre. Ici, le développement expérimental industriel (DEI) se finalise dans l’objectif d’inventer, de produire ou de développer de nouveaux outils facilitant notre existence. Nous ne sommes plus dans la dynamique d’une recherche-action qui tend à transformer le monde, le véritable enjeu du DEI est la production à but lucratif. L’innovation dans toutes entreprises est de produire de nouveaux produits pour le terrain, pour le professionnel. L’enjeu n’est pas de faire avancer les connaissances globales sur l’architecture mais de répondre essentiellement aux besoins de la conception. Bien que l’Entreprise investisse dans l’Université, beaucoup craignent que la « prise de pouvoir » des connaissances à but lucratif, détruise celles qui ont pour seul but de faire avancer la science et la culture. Beaucoup d’universitaires craignent que les grandes entreprises prennent le monopole sur les universités, enfin d’instrumentaliser les chercheurs à leur propre intérêt. La recherche scientifique en architecture ne peut être uniquement productive aux yeux des praticiens mais doit servir l’ensemble de la culture architecturale. Bien que Lafarge développe des méthodes expérimentales efficaces, l’appliquer
Le Grand Journal de l’Innovation, Lafarge, http://www.lafarge.fr/11092009-press_themabookinnovation_review-fr.pdf 48
p.5.
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pour une recherche en Architecture serait rompre avec l’idéologie universitaire, à savoir, nourrir la culture avant la production. 1.4. Reconnaissance d’une pratique expérimentale de terrain : Lacaton & Vassal En 2011, les architectes Anne Lacaton, JeanPhilippe Vassal et Frédéric Druot reçoivent l’Équerre d’Argent pour leur projet de réhabilitation de la tour Bois-le-Prêtre à Paris. Il s’agit là d’une distinction particulière, car ce prix est attribué chaque année en France depuis 1983 par un jury composé d’architectes, de critiques d’architecture et de promoteurs, mis en place par la revue Le Moniteur. Ce prix marque la reconnaissance de ces architectes pour une réhabilitation (c’est la première année que ce prix est discerné à un projet de réhabilitation) qui contribue à l’avancée de la construction en France. Reconnus par l’ensemble du corps professionnel de la pratique architecturale, les architectes se distinguent dans la profession. Leur réalisation à la Cité Manifeste de Mulhouse, lancée par Jean Nouvel, au côté de Duncan Lewis, Shigeru Ban et Matthieu Poitevin est la reconnaissance d’une architecture personnifiée et remarquable. Cet ambitieux projet manifeste de l’innovation architecturale et technique appliquée pour l’amélioration du logement social, livré en 2005. En amont de cette reconnaissance, il faut noter que depuis des années Lacaton et Vassal mettent en place dans leurs projets une idéologie qui fait de chacune de leur réalisation une expérimentation de celle-ci. En effet, ils ont appris avec le temps, notamment par des maisons individuelles49, à gérer les contraintes d’une commande pour expérimenter à chaque fois une manière de concevoir et d’habiter. « Même si les commanditaires, les budgets ou les programmes sont différents, la démarche reste la même. Dans les maisons individuelles que nous avons construites, notre objectif n’était pas de faire des contenants hermétiques où l’occupant aurait des sensations uniformes et se figerait dans des définitions étroites. Il doit absolument avoir un rôle actif à jouer, et même des contraintes à gérer. Nous cherchons à exprimer des choses sensibles, diverses, en mettant en œuvre des solutions pragmatiques et intuitives au service de
La maison Lapatie est une de leur réalisation de maison individuelle qui expérimente une manière d’habiter, toujours plus d’espace, en analysant et gérant toutes les contraintes de la commande. Cette réalisation est le concept expérimental qui va définir la démarche à suivre pour l’ensemble de leur projet.
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l’architecture ». Ainsi, les architectes, par leurs expérimentations sur leurs maisons individuelles, développent leurs réalisations sur le même principe de conception. Souvent nommés les « maisons-serre », leurs projets se retrouvent chez des maîtres d’ouvrage significatifs comme l’école d’architecture de Nancy, nommée dans de nombreuses revues spécialisées, ou la nouvelle maison du Frac Nord Pas de Calais, nommée comme « avant-gardiste »50 dans le Journal des Arts. Dilater l’espace tout en restant économique est le seul mot d’ordre dans l’ensemble de leurs projets. Bien que les architectes s’expriment peu sur leur production, de nombreux journaux spécialisés font l’éloge de leur pratique, toujours plus proche de l’usager. Ainsi, depuis quelques années, ces architectes sont étudiés et référencés comme exemples dans les écoles d’architecture françaises. Conscient de leur savoir-faire, le Ministère de la Culture et de la Communication leur demande en 2004 un ouvrage de consultation, d’analyse et de solutions concernant la démolition qui s’opère depuis la mise en place du plan de rénovation urbaine en France. De ce fait, on leur demande de s’interroger sur la démolition vue jusqu’à présent comme la seule solution dans les quartiers sensibles. Ainsi, le trio d’architectes produit un ouvrage manifeste en 200651 qui montre la posture des architectes sur la question : ne jamais raser pour préserver l’héritage moderne, rechercher des qualités à la construction existante, donner plus d’espace au logement, et déranger le moins possible en agrandissant par l’extérieur. L’ouvrage se présente d’apports théoriquement sur les enjeux de la démolition puis il présente des alternatives justifiées par des preuves techniques, économiques et sociales. Les principes évoqués dans l’ouvrage sont appliqués au projet de réhabilitation de la tour Bois-le-Prête. La reconnaissance de leur pratique par la profession et par le Ministère en charge de l’architecture, témoignent de l’importance de telles démarches alternatives que l’architecte peut mettre en œuvre pour faire évoluer le regard que l’on a sur l’architecture, et notamment dans cette exemple de changer le regard que porte les maîtres d’ouvrage sur la rénovation urbaine.
« Mêlant innovation, défi technologique et développement durable, respect du patrimoine industriel, espace avant-gardiste et multi-fonctionnel s’inscrivant dans le paysage portuaire de Dunkerque, ce projet a trouvé une place évidente sur ce site ». cf, Article 2013 : une nouvelle maison le Frac Nord-Pas de Calais à l’AP2 !, LeJournaldesArts.fr 51 Cours oral Master ENSAL, Vincent Veschambres, « Politiques urbaines et logement social » 50
Conscient du terrain et de ses enjeux futurs, notamment le développement durable et social, les architectes ont su expérimenter dans leurs projets de nouvelles méthodes et ainsi trouver des solutions efficaces pour une conception architecturale en accord avec leur idéologie qui se veut dans l’air du temps. Porteur d’innovation dans l’instant, ce type de projet ne pourrait se réclamer du titre d’avant-garde tant elle répond aux nouveaux enjeux de la construction française. La reconnaissance scientifique de ce type de démarches expérimentales ferait l’objet d’une production de connaissances considérables du terrain mais aussi de solutions pour répondre à ses enjeux. La recherche architecturale doit-elle les prendre comme objet d’étude ou s’interroger sur sa propre méthode expérimentale transposable ? L’expérimentation est-elle la solution pour une recherche scientifique plus proche de la pratique architecturale ? 2. Recherche institutionnalisée : une recherche appliquée proche du processus de conception Dans l’ouvrage Architecture et construction des savoirs : quelle recherche doctorale, on constate que le demande de professionnels vis-à-vis de la recherche architecturale porte principalement sur des travaux d’ordre technique. Quelques laboratoires s’y intéressent (le Centre de recherche en architecture et ingénierie et le SILA (Structures légère en architecture)) en développant des travaux applicables nourrissant l’enseignement de contenus nouveaux. L’intégration de ce type de recherche au sein de l’enseignement permet de développer le volet technique dans les phases de conception du projet architectural. Dans le dossier Vers un doctorat en architecture lancé en 2005 par le BRAUP, l’enseignant/chercheur/praticien Olivier Balaÿ, met en avant l’évolution du métier d’architecte à devoir répondre aux futurs cahiers des charges qu’on lui demandera d’établir concernant l’expérience des constructions et des ambiances concernant son projet d’architecture. Dans ce cas, il est important de développer des outils permettant ces expérimentations pour justifier ou développer les décisions qui seront prises en termes d’habitabilité de l’espace du projet qu’il envisage. Les Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau sont un site déjà en place pour répondre à ce problème. Il s’agit ainsi pour développer la fin de ce mémoire, d’interroger une méthode au service de la formation et de la profession : celle du prototype
expérimental en architecture. Soit l’interaction entre une recherche appliquée et une autre fondamentale. 2.1. Réseau de recherche Cultures Constructives : Une recherche appliquée au service de la recherche fondamentale. Le réseau Cultures Constructives rassemble quelques équipes de recherches ou d’enseignants d’architecture qui partagent un souci commun portant sur l’importance de la notion de « construction » dans le champ de l’architecture, dans le projet, dans l’économie, dans la technique et dans l’environnement. C’est une définition du réseau que nous livrera Cyrille Simonnet lors d’un séminaire sur le sujet en 1997. Ce réseau justifie son intérêt car il est en accord avec ce qui fait la société aujourd’hui. « Dans nos sociétés occidentales, le facteur technique – les poids des choses, le coût des choses – sont des données primordiales, incontournables, fondatrices à bien des égards de nos valeurs modernes ». Il s’agit là en effet de la réalité de l’architecture qui bâtit et qui mobilise. La construction prend donc un rôle important dans le monde à partir du moment où elle élève et dresse des éléments dans l’environnement mais aussi parce qu’elle exerce une activité permanente dans la société, travaux et métiers. Le réseau justifie la notion de « cultures » constructives car bien que le domaine technique soit primordial de l’objet architectural, la technicité répond à de nombreux paramètres qui démontrent que la construction n’est pas la même selon l’époque et le pays. Ce qui fait que la construction devient un problème culturel géré par une exigence technique ou scientifique que le réseau définit selon ses modalités. Pour résumer, le réseau Cultures Constructives interroge la place de la construction dans le projet architectural. Cette question relève de références historiques mais aussi d’un potentiel théorique considérable tant il est pour le moment peu existant. Pour mener à bien leur projet, les membres actifs du réseau tentent, par le biais de ses équipes de recherche, de mettre en place des outils pédagogiques et innovants au service de l’enseignement. Notamment par l’intermédiaire de l’organe de recherche des Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau, outils d’expérimentation qui a pour rôle de transformer l’enseignement et la réflexion sur le thème de la construction en France. Le réseau Cultures Constructives gravite autour de ce projet par des apports intellectuels et s’interroge sur le terme d’expérimentation, comme objet pédagogique et sur ses retombées sur la société.
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2.2. Les Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau (GAIA) Les Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau sont un pôle de recherche d’expérimentation pour la construction et le renfort de son enseignement. On peut analyser cette augmentation pour l’intérêt constructif, car depuis quelques décennies, l’architecte délaisse cette question. Cependant, face à la concurrence et à la place décroissante de l’architecte dans le milieu de la construction, celui-ci ce doit maintenant pallier cette désaffectation. À la base conçue comme un outil pédagogique d’expérimentation, cet atelier est un atout pour la profession et la recherche en Architecture, comme un forum d’expérience destiné à l’ensemble du corps architectural. Il regroupe six écoles d’architecture (Lyon, Grenoble, Saint-Étienne, Clermont-Ferrand, Montpellier et Paris Villemin), trois écoles d’art de la région Rhône-Alpes, deux écoles d’ingénieurs de Lyon (ENTPE et INSA), le CSTB52 et le centre de recherche de matériaux de Grenoble. On retrouve ainsi sur un même site, étudiants, chercheurs, enseignants, praticiens et industriels. Les missions des GAIA sont la pédagogie, la recherche/expérimentation et la diffusion. Expérimenter et innover dans chacune de leurs missions en proposant une pédagogie active moins académique, en mettant en relation la pensée et la matière, en imaginant de nouvelles pratiques de recherche et en développant la diffusion des cultures constructives sur les nouvelles techniques de communication (comme le prototype à l’échelle 1 du Solar Décathlon, méthode innovante de la communication du projet). Ces trois missions, dont sont garantes les GAIA, travaillent ensemble pour développer une relation étroite entre les chercheurs et les enseignants pour l’élaboration des formations pratiques aux ateliers et la transmission des connaissances nouvelles. « En inventant de nouvelles pratiques de recherche, portant notamment sur les mixités et les assemblages, sur les matériaux qui n’ont pas encore trouvé leur architecture, et en créant des équipes mixtes (rassemblant chercheurs et concepteurs de divers métiers) capables d’apporter un regard différent sur ces matériaux et leurs
Centre Scientifique et Technique du Bâtiment est un Etablissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), placé sous la tutelle du ministère du Logement, Direction Générale de l'Urbanisme, de l'Habitat et de la Construction. Quatre métiers et huit départements structurent son activité : la recherche, la consultance, l'évaluation et la diffusion du savoir. Associés à ses domaines d'expertise, ils lui permettent une approche globale du bâtiment élargie à son environnement urbain, aux services et aux nouvelles technologies de l'information et de la communication.
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assemblages, en menant une politique volontaire de diffusion des outils d’enseignements et de valorisation des acquis de la recherche, enfin en mettant en œuvre une réflexion didactique permanente sur la manière d’enseigner, pour faire des Grands Ateliers un laboratoire d’expérimentation et de recherche pédagogique »53. En Alliant laboratoires d’ingénierie et d’architecture, des équipes spécialisées et des centres de recherche industriels, les GAIA sont une alliance de compétences pouvant critiquer et créer des axes de recherches originaux et innovants, devenant ainsi un pôle d’incitation à la recherche à la fois pour les étudiants, les chercheurs et les professionnels de la conception ou industriel.
2.3. Le Solar décathlon : prototype expérimental producteur de connaissances et vecteur de rencontres Le domaine d’études Ambiances Architecturales et Cultures Constructives mis en place par la collaboration ENSA de Lyon, ENSA de Grenoble et les GAIA, s’interroge sur le concept d’habiter. Ses enjeux sont de définir et construire de manière culturelle et durable, les grandes options d’aménagement spatial de notre milieu de vie aux thèmes de l’architecture, du paysage, de l’urbanisme, des matériaux de construction, de l’économie, du confort et de la santé. Pour cela, le domaine met en place des travaux d’études, dont la participation au concours International du Solar Decathlon. Il s’agit d’une compétition universitaire biennale internationale organisée depuis 2002 par le département de l’Énergie du gouvernement des EtatsUnis. Son objectif est de développer la recherche et la transmission des savoirs sur les énergies renouvelables, et notamment l’énergie solaire. Le principe est simple : les équipes d’étudiants architectes et ingénieurs encadrées par des enseignants et des chercheurs d’universités du monde entier doivent concevoir et construire un prototype d’habitat passif avec le soleil pour seule source d’énergie. L’objectif des équipes participantes est la conception et la construction de maisons qui consomment le moins de ressources naturelles, et de produire un minimum de déchets au cours de son cycle de vie. Les prototypes sont construits en cinq
Site des GAIA : http://www.lesgrandsateliers.fr/infospratiques/les-missions/les-missions/ 53
jours et exposés au public pendant dix jours. Durant cette période, ils subissent dix épreuves qui permettent de désigner la maison la plus performante. Le Solar Decathlon est devenu un rendez-vous médiatique majeur qui accueille plus de 100 000 visiteurs. Les intérêts de ce type d’événement sont multiples : -
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Les étudiants apprennent à travailler en équipes multidisciplinaires, sont confrontés aux défis de l’avenir du bâtiment, découvrent la formation scientifique de mise en place de solutions innovantes. Le public prend conscience des possibilités réelles d’allier réduction de l’impact écologiques avec confort et esthétiques. Les scientifiques analysent les données de performance des prototypes avec les solutions innovantes proposées. Les professionnels se confrontent aux nouvelles possibilités de conception face à l’enjeu du développement durable.
L’évaluation des prototypes s’effectue en dix épreuves évaluées par une équipe d’experts scientifiques. Pour répondre à toutes les épreuves, il faut réunir de nombreuses compétences parfois différentes. 1 _Architecture 2 _Ingénierie et construction 3 _Efficacité énergétique 4 _Bilan d’énergie électrique 5 _Confort 6 _Équipement et fonctionnement 7 _Communication et sensibilisation du public 8 _Industrialisation et viabilité du marché 9 _Innovation 10 _Durabilité TOTAL
120 PTS 80 PTS 100 PTS 120 PTS 120 PTS 80 PTS 80 PTS 80 PTS 80 PTS 100 PTS 1000 PTS
Ce qui nous intéresse maintenant, est de s’interroger sur l’intérêt de la mise en œuvre d’un prototype car il entraine de nombreux investissements intellectuels, pédagogiques et financiers. Le Solar Decathlon de 2012 regroupe une équipe pluridisciplinaire de plusieurs universités, des laboratoires, qui forment le support intellectuel et scientifique pour les étudiants, des entreprises publiques et privées (industriels, villes, ministère, PUCA etc.). Cet apport de connaissances et de compétences pluridisciplinaires donne son intérêt au
prototype comme objet pensé et garant d’une démarche fédératrice pour les acteurs de la construction. Le prototype expérimental devenant un thème de recherche, actif et diffusé à l’ensemble des acteurs de la construction (Cf. Annexe 5). Comme on a pu le voir, le Solar Decathlon reprend les enjeux du réseau de Cultures Constructives dans une démarche innovante comme celle des Grands Ateliers, dont il est le partenaire, pour s’ouvrir au grand public et aux professionnels de la conception. L’étape la plus importante d’une recherche plus proche des enjeux professionnels est sa capacité à diffuser ses connaissances, et cela passe peut-être par des méthodes innovantes de communication, celles du prototype expérimental. On peut alors se demander comment passe-t-on de la maquette à l’échelle 1 au prototype architectural, quelle différence pour la conception et la communication du projet d’architecture.
2.4. La maquette et le prototype Historiquement, la maquette s’inscrit dans le processus de conception des architectes, non seulement dans une phase expérimentale du processus créatif, mais aussi pour communiquer l’objet final. L’intérêt de la maquette en architecture se porte sur la volumétrie de formes dépouillées pour percevoir un effet d’ensemble, moteur de représentation pour la conception architecturale. La maquette se différencie déjà du prototype car elle aurait des difficultés à entreprendre le lien entre la pensée et l’architecture. Dans son rôle de mimétisme d’un futur projet, la maquette ne peut répondre à des problèmes bien précis comme la construction, la matière, l’ambiance etc. qui ne se font que par l’expérience elle-même du projet. Le prototype prend ainsi ce rôle tout en développant une dimension encore contradictoire avec la maquette architecturale, celle de ne pas être vue comme un objet fini. Aujourd’hui, la maquette n’est plus l’objet d’expérience réel de l’espace, elle est devenue objet de médiation. La maquette est conçue comme un objet fini qui ne traduit qu’une atmosphère du projet, une partie de celui-ci ou un concept. Objet isolé de son contexte, la maquette est une expression artistique et un objet « fermé », au simple service de la communication. Le prototype, lui, se développe depuis les années 60, avec l’industrialisation des habitats en plastique, pour devenir un objet de
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démonstration technique, technologique et d’industrialisation du projet architectural. Le prototype architectural s’inscrit dans l’échelle immédiate du construit, qui intègre et visualise l’anticipation même. Il est à la fois : -
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moyen de représentation et de diffusion support pour l’usager dans son rapport au mode d’habiter support scientifique dans sa capacité à produire des connaissances sur des thèmes qui lui sont propres comme la construction et l’ambiance support scientifique dans sa capacité à innover et à produire des produits industrialisables support pédagogique dans sa capacité à toujours être changeant et dans l’expérience sensible et technique que l’on fait de lui en le construisant. un objet critiquable à l’infini
2.5. La capacité de l’expérimentation à répondre aux enjeux de la profession d’architecte Comme on a pu le voir plus haut, les enjeux professionnels tournent de plus en plus autour de la question technique et sensible de la conception architecturale. Produire des connaissances et des objets qui pourraient servir aux étudiants et aux praticiens reviendrait à ouvrir la recherche architecturale à l’expérimentation (notamment en sein de la thèse en architecture), soit de produire un objet expérimental ouvert aux praticiens et aux étudiants. Former les futurs architectes au savoir-faire du concepteur qu’il sera, et sensibiliser celui qui choisira la recherche architecturale basée sur la conception architecturale. C’est ce que démontre Bruno Fortier qui met en avant le fait que « beaucoup d’universitaires avouent qu’ils sont désemparés quand il s’agit de parler d’espaces ». Pour lui, expérimenter par des recherches théorico-pratiques sont des champs à développer par le chercheur ou le doctorant pour se rapprocher de la pratique. C’est ce que le réseau Cultures Constructives ou la démarche de l’enseignement Ambiances Architecturales et cultures constructives tentent de mettre en place au sein de l’enseignement. Les grands ateliers tentent de sensibiliser étudiants, chercheurs, enseignants et professionnels à cette question de l’expérimentation. La mise en place de tels réseaux conduit à développer une diffusion de connaissance efficace
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vers le terrain construit. L’objet expérimental est un outil de connaissance efficace, développant à la fois des questionnements mais aussi la possibilité de la modifier, car il n’est pas conçu comme un objet final à l’image du projet d’architecture. Notamment, à l’inverse du processus industriel, le prototype expérimental en architecture n’est pas la copie d’un objet final visé. Car même au stade d’évaluation, celui-ci produit des connaissances qui serviront au prototype suivant, qui sera toujours plus innovant et porteur de connaissances. Il serait donc à l’image d’un modèle probatoire qui se répète en répondant à chaque fois à l’intérêt des hypothèses scientifiques mises en place en amont. C’est ce que nous pouvons voir notamment à la construction du premier prototype du Solar Décathlon qui rend compte des difficultés et des questions qu’il pose encore. De ce fait, chaque année il est réinterrogé et développé. Processus à la fois créatif et constructif, le prototype expérimental en architecture permet d’acquérir, d’associer, de former et d’utiliser des connaissances et des techniques scientifiques à des fins pédagogiques mais aussi pour produire des procédés, des matériaux, des systèmes et des services pour une conception de projet modifiée, nouvelle ou améliorée. À l’inverse du développement expérimental industriel, celui de l’architecture doit prendre en compte les modifications périodiques du monde de l’architecture pour permettre une évolution du prototype en accord avec l’environnement qu’il analyse. Des nouvelles technologies ou les enjeux de la profession sont des données à prendre en compte dans l’évolution du prototype. Si on prend l’exemple d’un prototype qui révèlerait les questions d’ambiances dans le projet architectural, alors celui-ci devra, au fil du temps, avancer avec les évolutions du contexte de la maîtrise d’œuvre. Il produit ainsi des connaissances applicables, en s’appuyant sur des recherches fondamentales qui feraient foi d’expertise de l’environnement qui entoure les enjeux du prototype dans un espace-temps donné. Si cette rigueur scientifique est maintenue dans la mise au point d’un prototype « immortel », alors ce dernier deviendrait un objet fédérateur du lien Recherche, Pratique et Enseignement car il serait un outil exploitable par tous à un moment donné.
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/Conclusion
L’institutionnalisation de la recherche en Architecture est née d’une revendication de la jeunesse à formaliser le contenu théorique qui entoure la conception architecturale. Le renouvellement des connaissances en Architecture a permis l’expression d’une discipline complexe, pluridisciplinaire et multimodale. Sa singularité conduit à éclairer son rapport au réel et au monde si spécifique. Aujourd’hui, les attentes de la recherche ont changé. Il serait peut-être réducteur de parler de crise de la profession, mais il est clair que les architectes sont demandeurs de nouvelles connaissances. Face à un monde de plus en plus complexe et dont les commandes sont brouillées, les perspectives sont limitées. La recherche a maintenant pour rôle d’éclairer cet inconnu et d’apporter de nouveaux outils à la profession. La tendance, l’orientation que les institutions emploient, est de rapprocher la recherche plus près de la pratique pour qu’elle incite l’innovation, à la fois dans ses thèmes de recherches, mais aussi dans ses méthodes. L’enseignement a tendance à suivre le même chemin. En d’autres termes, on observe, à travers l’histoire récente, une démocratisation de la recherche scientifique en Architecture qui tend à la rendre plus proche de l’action. Dans les points de vue que nous avons identifiés, comme chercheur et praticien, chacun s’accorde à dire qu’aujourd’hui la recherche architecturale doit innover dans ses méthodes et ses questionnements pour pouvoir apporter des réponses efficaces aux nouveaux enjeux de la maîtrise d’œuvre. C’est une perspective évoquée par Éric Lengereau dans le texte introductif, celle d’une logique de « culture de transformation ». La pratique amène à la recherche de nombreux thèmes de recherche qui tendent à refléter leurs lacunes ou leurs difficultés du terrain, notamment dans le processus de conception (aide à la conception informatique, matériaux, ambiances, thermique, social etc.), ou de nouvelles compétences que doit avoir l’architecte (négociation, cahier des charges en ambiance, justification thermique ou des matériaux (énergie grise etc.), etc.). De ce fait, la pratique amène dans le même temps de nouveaux objets d’étude, comme l’architecte lui même et les pratiques innovantes qu’il peut mettre en place. Ainsi, la recherche alimente et s’inspire du monde l’action. Dans une dynamique de réciprocité, si on cherchait à savoir ce que la recherche induit dans la pratique de l’architecture on pourrait dire qu’elle a cette force d’unir dans un débat commun, celui de son rapport avec l’enseignement. Les écoles d’architecture se rangent de plus en plus dans des partenariats universitaires où l’enseignement du savoirfaire ne serait pas la formation prioritaire. Dans ces lieux, de plus en plus d’enseignants pratiquent des activités de recherche ou entreprennent des travaux théoriques. En règle générale, la recherche architecturale induit chez le praticien ou l’étudiant une pensée critique et un « esprit de recherche ». À l’image du « raisonneurs penseurs » évoqué par Robert Prost.
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L’état tient un rôle essentiel dans la nouvelle ambition d’une recherche efficace et collaborative, il soutient des initiatives comme des programmes interdisciplinaires alliant art, conception et profession, c’est ce que l’on découvre à travers le programme Art, Architecture et Paysages (Ministère de la Culture, PUCA), ou encore avec le programme pluridisciplinaire Architecture de la Grande Échelle (Ministère de la Culture, PUCA) où les équipes sont constituées de chercheurs habilités et de praticiens au sein d’établissement scolaires spécialisés dans le projet territorial. Ce projet ambitieux et innovant dans sa méthode d’organisation a conduit à la conception et la coordination de la consultation internationale de recherche et développement sur « Le grand pari de l’agglomération parisienne ». Ce dernier est encore aujourd’hui porteur de débat dans les écoles mais aussi des pouvoirs publics qui peinent à maître en œuvre les grands principes évoqués, notamment avec la démission récente du secrétaire d’État à l’Aménagement de la Région Capital, principal porteur de l’avenir du projet. L’État joue donc un rôle essentiel dans la mise en œuvre de projets de telle ampleur pour une rencontre productive de la recherche au plus proche de la pratique. Mais on pourrait imaginer des principes à l’échelle de la recherche qui légitimerait des pratiques expérimentales d’individus de la profession, porteurs d’une nouvelle façon de faire l’architecture. Bien qu’il soit difficile d’objectiver ces méthodes, elles ne sont pas moins porteuses de connaissances. C’est ce qu’Éric Lengereau nous évoque lorsqu’il parle d’un « cœur » en Architecture, « forcément lié aux pratiques conceptuelles du projet, n’est pas de nature scientifique ».
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« Rien ne vaut l’expérimentation quand on se met à douter du réel ce qui revient, assez paradoxalement, au même qu’à douter de la fiction » de Yolande Villemaire
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/Annexes
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ANNEXE 1 : LA DISCIPLINE DE L’ARCHITECTURE
Objet architectural
Source :Hanrot Stéphane, À la recherche de l’architecture : Essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturale, éditions l’Harmattan, 2002, p. 57.
La pratique architecturale
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Source :Hanrot Stéphane, À la recherche de l’architecture : Essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturale, éditions l’Harmattan, 2002, p. 59.
Le savoir architectural 55
Source :Hanrot Stéphane, À la recherche de l’architecture : Essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturale, éditions l’Harmattan, 2002, p. 61.
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La recherche
Source :Hanrot Stéphane, À la recherche de l’architecture : Essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturale, éditions l’Harmattan, 2002, p. 63.
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L’enseignement
Source :Hanrot Stéphane, À la recherche de l’architecture : Essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturale, éditions l’Harmattan, 2002, p. 69.
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ANNEXE 2 : TRANSCRIPTION D’UN ENTRETIEN RADIOPHONIQUE ACCORDE PAR ANDRE MALRAUX A YVES MOUROUSI (antenne d’Inter Opinion le 6 décembre 1968 à 8H30) « L’architecte des siècles derniers était un individu qui construisait un objet, un palais ou une maison, pour un client qui était également un individu, fût-il le roi. L’architecte d’aujourd’hui, dans ses travaux les plus importants, est inséparable d’un groupe de spécialistes qui travaille pour une collectivité. Voilà évidemment la base de tout. Il y a un individu qui travaille pour un individu ; il y a une collectivité qui travaille pour une collectivité. Alors plus vous aviez à faire à l’individu, plus vous aviez à faire à ce que nous allons appeler, pour simplifier, une architecture ornementale (…). C’était la communauté de l’Institut et un enseignement qui trouvait son expression majeure dans les prix de Rome. Est-ce que ces prix ont aujourd’hui plus de sens en architecture qu’en peinture ? Je ne le crois guère. Rome n’a rien d’essentiel à enseigner à nos architectes. De même que nous devons réformer la profession, nous devons remplacer les prix de Rome par des bourses de voyage dans les pays où se crée l’architecture moderne ; la Finlande, les Etats-Unis, le Brésil, peut-être le Japon. Alors l’enseignement de l’architecture doit subir une transformation radicale. (…) Il s’agit aujourd’hui de savoir si nous pouvons avoir une architecture moderne française qui soit la rivale de l’architecture américaine ; la rivale et non la disciple. (…) N’oublions pas que le fond de tout, c’est que – raison de ce que je vous ai dit tout à l’heure – nous sommes arrivés à un enseignement dont le niveau, appelons-le artistique (j’entends par là le dessin etc.) était un niveau assez élevé mais dont le niveau général était un niveau très faible. Or, ce qui obsède les étudiants, c’est qu’ils veulent absolument – et là, je pense qu’ils ont raison – un enseignement de niveau universitaire. En France, l’État a certainement un rôle à jouer parce qu’il ne faut pas oublier qu’il est un grand constructeur (…). Pensez que dans le problème des Halles, à l’heure actuelle, on est dans une hypothèse où il n’y a pas de plan masse et c’est seulement la société qui prendra en main l’affaire, qui se mettra à concevoir ce plan masse. C’est-à-dire qu’il peut ne pas y en avoir du tout. Bon. Il n’est sera pas ainsi. Certainement, il va y avoir des décisions, et, certainement, il va y avoir un plan masse. Mais disons que la France st un pays où on a toujours une très grande tendance à refaire le quartier, à refaire la rue. Par conséquent, je crois que l’État a son importance chaque fois qu’il y a quelque chose de réellement très étendu, un grand projet. Le danger, c’est que les Finances suivent lentement. Une chose comme la Défense : si elle avait été fait à sa date – pensez que cette Défense a mis 20 ans – elle aurait été certainement très saisissante. Finie, maintenant, elle devient un ensemble parmi d’autres. » Source : Lengereau Éric, L’état et l’architecture, 1958-1981 une politique publique, éditions Picard, Comité d’histoire du ministère de la culture, 2001, 559 pages, p. 149-150.
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ANNEXE 3 : LABORATOIRES ET EQUIPES DE RECHERCHE DES ECOLES D’ARCHITECTURE A.B.C. - Ambiances bioclimatiques et construction parasismique - Ecole d'Architecture de Marseille-Luminy. A.C.S. - Architecture, culture et société - Ecole d'architecture de Paris-Malaquais. A.P.B. - Architecture du patrimoine bâti - Ecole d'Architecture de Toulouse. A.P.M. - Architecture paysage montagne - Ecole d'architecture de Grenoble. A.R.I.A. - Applications et recherches en informatique et architecture - Ecole d'architecture de Lyon. A.R.I.A.M. - Atelier de recherche en informatique, architecture et modélisation - Ecole d'Architecture de Paris-La Villette (voir aussi les pages de la plaquette). A.R.T.O.P.O.S. - Equipe de recherche - Ecole d'Architecture de Marseille-Luminy. A.V.H. - Architecture ville et histoire - Ecole d'architecture de Lille. C.E.P.A.G.E. - Centre de recherche sur l'histoire et la culture du paysage - Ecole d'Architecture et de Paysage de Bordeaux. C.E.R.M.A. - Centre de recherche méthodologique d'architecture - Ecole d'architecture de Nantes. C.H.D. - Centre habitat et développement - Equipe de recherche - Ecole d'Architecture de Marseille-Luminy. Conception architecturale, design industtriel, création artistique : analyse cognitive et approche didactique - Equipe de recherche - Ecole d'Architecture de Marseille-Luminy. Conception et enseignement de la conception - Ecole d'architecture de Lille. C.R.A.I. - UMR MAP 694 - Centre de recherche en architecture et ingénierie - Ecole d'Architecture de Nancy. C.R.A.Terre - Centre international de la construction en terre - Ecole d'architecture de Grenoble. C.R.E.S.S.A.C. - Centre de recherche sur les sciences et les savoirs de l'architecture et de la conception - Ecole d'Architecture de Paris-La Défense. C.R.E.S.S.O.N. - Centre de recherche sur l'espace sonore - Ecole d'architecture de Grenoble. C.R.H. - Centre de recherche sur l'habitat - Ecole d'architecture de Paris-La Défense. C.R.I.T. - Centre de resources et d'informations techniques - Ecole d'architecture de Nancy, école d'architecture de Strasbourg. DESIGN - Equipe de recherche - Ecole d'architecture de Normandie. D.I.P.A.U. - Didactique du projet architectural et urbain - Ecole d'architecture de Bretagne. Etudes de la ville régulière - Equipe de recherche - Ecole d'architecture de Normandie. E.V.C.A.U. - Espace Virtuel de conception en Architecture et Urbanisme - Equipe de recherche - Ecole d'architecture de Paris-Val de Seine. G.A.M.S.A.U. - Groupe d'études pour l'application des méthodes scientifiques à l'architecture et à l'urbanisme. Ecole d'Architecture de Marseille-Luminy. G.E.R.P.H.A.U. - Groupe d'études et de recherche en architecture, philosophie et urbanisme. Ecole d'architecture de Clermont-Ferrand. G.E.V.R. - Groupe d'Etude de la Ville Régulière - Ecole d'architecture et de paysage de Bordeaux. G.R.A.I. - Groupe de recherche architecture et infrastructure - Ecole d'architecture de Versailles. G.R.E.C.O. - Groupe de recherche environnement conception - Ecole d'Architecture de Toulouse G.R.E.C.A.U. - Groupe de Recherche Environnement Conception Architecturale et Urbaine - Ecole d'architecture de paysage de Bordeaux. G.S.A. - Géométrie, structure et architecture - Ecole d'architecture de Paris-Malaquais. I.I.S.S. - Istitut International des Structures Spatiales - Ecole d'architecture LanguedocRoussillon.
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IMAGINE - Equipe de recherche - Ecole d'Architecture de Marseille-Luminy. I.N.A.M.A. - Ecole d'Architecture de Marseille-Luminy. I.P.R.A.U.S. - Institut parisien de recherche architecture urbanistique société - Ecole d'architecture de Paris-Belleville. Jardins, Paysages, Territoires. Ecole d'architecture de Paris La Villette. L.A.A. - Laboratoire architecture anthropologie. Ecole d'architecture de Paris La Villette. L.A.D.R.H.A.U.S. - Laboratoire de recherche histoire architecturale et urbaine société Ecole d'architecture de Versailles. L.A.F. - Laboratoire d'analyse des formes - Ecole d'architecture de Lyon. L.A.M.U. - Laboratoire d'acoustique et musiques urbaines. Ecole d'architecture de Paris La Villette. L.A.R.E.A. - Laboratoire d'architecturologie et de recherche épistémologique sur l'architecture - Ecole d'architecture de Nancy. L.A.U.A. - Laboratoire architecture usage altérité. Ecole d'Architecture de Nantes. L.E.T. - Laboratoire espaces travail - Ecole d'Architecture de Paris-La Villette. L.H.A.C. - Laboratoire d'histoire de l'architecture contemporaine - Ecole d'Architecture de Nancy. L.I.2A. - Laboratoire informatique appliquée à l'architecture - Ecole d'Architecture de Toulouse. M.A.P.-A.S.M. - Modèles et simulation pour l’Architecture, l’Urbanisme et le Paysage. UMR 694 CNRS-MCC - Ecole d'Architecture de Toulouse. Métiers de l'histoire et de l'architecture - Ecole d'architecture de Grenoble. O.C.S. - Observatoire de la condition suburbaine - Ecole d'architecture, de la ville et des territoires de Marne-La-Vallée. P.A.V.E. - Profession de l'Architecture, de la Ville et de l'Environnement - Ecole d'Architecture et de Paysage de Bordeaux et Ecole d'Architecture de Toulouse P.V.P. - Production ville et patrimoine - Ecole d'Architecture et de Paysage de Bordeaux. P.V.P. - Production ville et patrimoine - Ecole d'Architecture de Toulouse. S.I.P.A. - Equipe de recherche - Ecole d'architecture de Normandie. SOURCES : http://www.ramau.archi.fr/recherche/sites/sites-recherche.html (RAMAU : Réseau Activités et Métiers de l’Architecture et de l’Urbanisme).
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ANNEXE 4 : COMPOSITION ENSEIGNANTE DES DOMAINES D’ETUDE SELON LEUR SPECIFICITE ET LEUR STATUT
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ANNEXE 5 : ÉQUIPE ET PARTENAIRES DU SOLAR DECATHLON Nominations
Spécialités dans les épreuves de la compétotion ÉCOLES UNIVERSITAIRES _ ÉQUIPE SOLAR 2012 ENSA de Grenoble >Conception et construction 1 / 2 / 5 / 6 / 9 / 10 du prototype >Coordination du projet ENSA de Lyon >Conception et construction 1 / 2 / 5 / 6 / 9 / 10 du prototype >Coordination du projet Grenoble École de >Industrialisation et viabilité 8/7 Management économique du projet >Communication du projet avec l’Institut National de l’Énergie Solaire Haute Ecole >Analyse de durabilité du 10 d’ingénierie et de projet (impact gestion du environnemental et énergie Canton de Vaud grise) Ecole nationale >Études techniques 3/4/5 supérieure Eau, électroniques Energie, >Gestion de l’énergie Environnement (ENSE3) de l’Institut polytechnique de Grenoble IUT1 - Grenoble >Réalisation et mise en 3/4/5 électrique et service des systèmes informatique électroniques industrielle (GEII) de l’Université Joseph Fourier Polytech Annecy>Ingénierie thermique et 3/4/5/6 Chambéry, de structurelle l’Université de Savoie Université de >Conception du système de 3 / 4 / 5 / 6 Genève déphasage passif. Ecole nationale des >Développer des recherches 2 / 5 travaux publics de sur le matériaux bio sources l’Etat et des systèmes d’éclairage artificiel. LABORATOIRES DE RECHERCHE CRATerre >Construction en terre 1/2 > Aide au développement de techniques renouvelables et abordables avec ce matériau de construction local CRESSON >Contrôle des ambiances 1/2/5 > Expertise acoustique et
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Rôle dans l’équipe
Localisation
Grenoble Lyon Grenoble
Canton de Vaud Suisse Grenoble
Grenoble
Chambéry
Genève Suisse Lyon
Grenoble
Grenoble, Lyon
Institut F.-A. Forel Laboratoire d’énergétique solaire du bâtiment Laboratoire d’optimisation de la conception et ingénierie de l’environnement Équipe de recherche de GEM G2ELab
Génie civil de l’ENTPE
Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau
Institut National de l’Énergie Solaire (INES)
Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB)
perception des ambiances >Conception des systèmes thermique passifs >Expertise dans les études d’impact environnemental avec les logiciels ECOBAT >Expertise dans les études de simulation thermique dynamique et la science du bâtiment. >Recherches de management de l’innovation >Expertise dans le domaine de l’ingénierie électronique, l’énergie électronique, les matériaux, les systèmes et les processus d’innovation, les méthodes de conception et de modélisation.
3/4
Genève
3/4 2/3/4
Canton de Vaud Suisse Chambéry
7/9
Grenoble
1/2/3/4/5/6/ 10
Grenoble
>Caractérisation des 1/2/5 matériaux naturels et des technologies de lumière artificielle. INSTITUTIONS SCIENTIFIQUES >Le Solar Decathlon s’inscrit >Construction dans une activité de expérimentale en recherche conduisant à être amont de la un premier vecteur pour que construction le site devienne la Cité de la définitive Construction Durable initier >Plateforme par le gouvernement FR technique où le pour développer les prototype sera recherches et construit l’expérimentations dans le domaine de l’architecture 1/2/7/8/9 durable. > Diffusion scientifique >Soutien technique et 2/3/4/9 scientifique sur les technologies solaires et des technologies de stockage de l’énergie. >Coordination des partenariats industriels > Diffusion scientifique >Soutien scientifique global 1 / 2 / 3 / 4 / 9 / 10 concernant la conception de bâtiment à énergie positive >Solutions techniques en accord avec la loi de régulation RT2012 et RT2020. > Diffusion scientifique
Lyon
Villefontaine
Savoie Technolac _ Bourget-duLac
Grenoble
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Ministère de la Culture de la Communication Ministère de l’Écologie, du Développement durable, des transports et du Logement. PUCA Région RhôneAlpes Conseil Régional de Savoie OPAC du Rhône Ville de Lyon Ville de Grenoble Total Industrie du pétrole et du gaz naturel Schneider electonic Spécialiste mondial de la gestion de l’énergie Bouygues Immobilier Maître d’ouvrage Opérateur engagé dans la ville durable depuis 2006. VINCI Construction Leader de la construction dans les domaines du bâtiment, du génie civil, des travaux hydrauliques et des métiers de spécialité associés à la construction. Serge Ferrarri Groupe industriel leader de la filière Textiles Techniques Finnforest Industriel reconnut pour ses solutions bois Rexel
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SOUTIEN FINANCIER PUBLIQUE >Financement 1/2/3/4/5/6/ >Diffusion 7 / 8 / 9 / 10 >Financement >Diffusion
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>Financement 1/2/3/4/5/6/ >Diffusion 7 / 8 / 9 / 10 >Financement 1/2/3/4/5/6/ >Diffusion 7 / 8 / 9 / 10 >Financement 1/2/3/4/5/6/ >Diffusion 7 / 8 / 9 / 10 >Financement 1/2/3/4/5/6/ >Diffusion 7 / 8 / 9 / 10 >Financement 1/2/3/4/5/6/ >Diffusion 7 / 8 / 9 / 10 PARTENAIRE FINANCIER PRIVÉ >Financement 9 >Diffusion
RHÔNEALPES SAVOIE
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RHÔNE LYON GRENOBLE MONDE
Distributeur de matériel électronique Nilan Spécialisé dans le ventilation Archiwizard Esquisse Entreprise R&D Logiciel au service des concepteurs, notamment par la simulation énergétique 3D. RayCréatis Entreprise R&D Logiciel au service des concepteurs, notamment par la simulation énergétique 3D. Somfy Automatisation des ouvertures et des fermetures des bâtiments. Innove en terme d’économies d’énergie. Vicat Producteur de Ciment, Béton, Granulat BUDENDORFF Volet roulant électronique aluminium Groupe SMAbtp Assurance des professionnels du BTP Swiss HAWA Système de ferrures Groupe SAMSE Négoce de matériaux de construction Energissimo Spécialiste régional en énergies renouvelables et économies d'énergie Léon Grosse
>Diffusion >Financement >Diffusion
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BTP Cuisinella Concepteur de cuisine Paragraph Logiciel de conception CAO et 3D Lansard Génie énergétique et climatique. Installation et maintenance.
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Peu importante l’échelle ou le statut des membres impliqués dans le prototype S D, ce qui importe est de montrer ici une équipe pluridisciplinaire et dont l’influence de ces membres participent à la diffusion d’un nouveau mode de conception, ce communication et de connaissances.
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/Glossaire ARCHITECTUROLOGIE : recherche fondamentale qui prend comme objet d’étude la conception architecturale, science de la conception. « L’architecturologie est alors naturellement inscrite dans le champ des sciences de la conception : « Celui [le point de vue scientifique] de l’architecturologie, outre que, comme le nom l’indique, il porte d’abord sur la conception architecturale, pourrait être dit cognitif dans la mesure où l’investigation se limite méthodologiquement à viser une connaissance des opérations auxquelles se livre l’architecte au travail de la conception et en restreignant délibérément ce terme de « conception » au travail intellectuel par lequel est généré un objet [Boudon, 1992] ». Stéphane Hanrot, À la recherche de l’architecture : essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturales, 2002. RECHERCHE : recherche scientifique, elle regroupe les recherches fondamentale, appliquée et expérimentale. Une science en architecture englobe ce qui peut relever de la formation d’une connaissance scientifique, raisonnée et objectivée. RECHERCHE FONDAMENTALE : la recherche fondamentale est entreprise principalement en vue de produire de nouvelles connaissances indépendamment des perspectives d’application. RECHERCHE APPLIQUÉE : la recherche appliquée est dirigée vers un but ou un objectif pratique. RECHERCHE EXPÉRIMENTALE : la recherche expérimentale répond à la méthode scientifique expérimentale. Elle consiste à tester par des expériences répétées la validité d’une hypothèse en obtenant des données nouvelles, qualitatives ou quantitatives, conforme ou non à l’hypothèse initiale. RECHERCHE/DÉVELOPPEMENT EXPÉRIMENTAL : les activités de développement consistent à l’application de ces connaissances pour la fabrication de nouveaux matériaux, produits ou dispositifs. En ce basant sur des prototypes ou des installations pilotes, le développement expérimental doit « réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décessions, en vue de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle ». Cf. Site internet InnoviSCOP : http://www.innoviscop.com/definitions/developpementexperimental SYSTÈME : Assemblage d’éléments formant un ensemble régit par une loi, une doctrine, une théorie / Ensemble de procédés pour produire un résultat / Ensemble cohérent de notions. CORPS ARCHITECTURAL : le corps architectural signifie l’ensemble des acteurs en Architecture, soit le praticien, le chercheur et l’étudiant. PRATIQUE : la pratique architecturale représente l’activité d’architecte et le savoir-faire qu’il possède, notamment en terme de conception de projet. RECHERCHE-ACTION : « Il s'agit de recherches dans lesquelles il y a une action délibérée de transformation de la réalité ; recherches ayant un double objectif : transformer la réalité et produire des connaissances concernant ces transformations » (Hugon et Seibel, 1988, p.13), Cf : Wikipédia.
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DÉMARCHE PARTICIPATIVE : À l’image de la démocratie participative en politique, qui désigne l'ensemble des dispositifs et des procédures qui permettent d'augmenter l'implication des citoyens dans la vie politique et d'accroître leur rôle dans les prises de décision, la démarche participative en architecture consiste à impliquer l’habitant ou l’usager dans le projet mais aussi dans les prises de décisions. CONNAISSANCE : nous admettons deux formes de connaissances, celles scientifiques et d’autres non, comme le savoir-faire. La conception architecturale développe deux types de connaissances : l’architecturologie, dites scientifique, et le savoir faire de l’architecte (compétences). CULTURE : ensemble des connaissances, des coutumes et des savoir-faire d’un groupe d’individus qui la partage. SCIENCE : la science en générale est un ensemble de méthodes systématiques pour acquérir des connaissances scientifiques. THÉORIE : la théorie est un ensemble de connaissances spéculatives, on lui reproche parfois de manquer de connaissances scientifiques. DOCTRINE : une doctrine est une théorie qui affirme que sa vérité est définitivement prouvée, et réfute tous les démentis du réel.
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/Bibliographie Livres Acte du colloque « Rencontres, recherche, architecture », La recherche en architecture : un bilan international, Marseille, Nancy, Nantes, Paris, 12-13-14 juin 1984. Dautrey Jehanne, La recherche en art(s), éditions mf, 2011, 349 p. Druot Frédéric, Lacaton Anne & Vassal Jean-Philippe, + Les grands ensembles de logements, Territoire d’exception, Ministère de la Culture et de la Communication, Direction de l’Architecture et du Patrimoine, 2006, 171 p. Frac Centre Collection, Architecturales expérimentales 1950-2000, 2003. Hanrot Stéphane, À la recherche de l’architecture. Essai d’épistémologie de la discipline et de la recherche architecturale, éditions l’Harmattan, 2002, 253 p. Lengereau Éric, La recherche architecturale, une biographie (matériaux pour l’histoire) ; mise en place de la recherche architecturale (rapport préliminaire), Ministère de l’Équipement, du Logement, des Transports et du Tourisme, 1996, 159 p. Lengereau Éric, Architecture et construction des savoirs : quelle recherche doctorale, éditions Recherches, 2008, 227 p. Lengereau Éric, L’état et l’architecture, 1958-1981 une politique publique, éditions Picard, Comité d’histoire du ministère de la culture, 2001, 559 p. Prost Robert, Concevoir, Inventer, Créer : Réflexion sur les pratiques, éditions l’Harmattan, 1995, 337 p. Simonnet Cyrille, Réseau de recherche « Cultures Constructives », compte-rendu du séminaire de Castries, Enseignement, construction, expérimentation : les expériences européennes, juillet 1997.
Dossier Dossier du BRAUP, Vers un doctorat en architecture, Ministère de la Culture et de la Communication, Direction de l’Architecture et du Patrimoine, Sous-direction de l’enseignement de l’architecture, de la formation et de la recherche, 2005 Dossier du BRAUP, Ministère de la Culture et de la Communication, Direction de l’Architecture et du Patrimoine, Programme interdisciplinaire de recherche : l’Architecture de la grande échelle, session 2006-2009. Dossier du BRAUP, Ministère de la Culture et de la Communication, Direction de l’Architecture et du Patrimoine, Évaluation du programme pluriannuel 2002-2005/Habilitation du programme pluriannuel 2006-2009. Dossier du BRAUP, Ministère de la Culture et de la Communication, Direction de l’Architecture et du Patrimoine, Programme pluriannuel 2006-2009. Dossier de l’ENSAL, Programme pédagogique de master 2011-2012, septembre 2010
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Dossier du Ministère de la Culture et de la Communication, les études supérieures d’architecture en France, novembre 2009 Dossier du Ministère de la Culture et de la Communication, plan 2007-2012 pour l’enseignement supérieur et la recherche en architecture, octobre 2007 Dossier du Ministère de la Culture et de la Communication, L’architecture de la grande échelle, programme interdisciplinaire de recherche, bilan de l’appel à proposition, partenariat avec le BRAUP et le PUCA, 2009 Dossier du PUCA, Lecture des 10 projets du Grand Paris, analyses synthétiques et remarques transversales, Olivier Gaudron, Marie-Flore Mattei, François Ménard, Nicole Rousier et Bertrand Vallet, juin 2009
Revue Revue n°122-123 Culture et Recherche, Ministère de la Culture et de la Communication, 1959-2010, la recherche au Ministère de la culture, printemps été 2010 Revue Le moniteur Architecture AMC, numéro spécial, Le grand pari(s), consultation internationale sur l’avenir de la métropole parisienne, avril 2009. Revue n°6 Criticat, septembre 2010. Revue Art press n°275, janvier 2002.
Article Association Européenne pour l’Enseignement de l’Architecture, Charte Européenne de le Recherche en Architecture, 2010, 2 p. Boudon Philippe, Recherche fondamentale en architecture, Arch. & Comport. /Arch. Behav., Vol 5, no. 3, p. 207-214, Laboratoire d’Architecturologie et de Recherches Epistémologique sur l’Architecture, 1989. Lecourtois Caroline, Recherche fondamentale et/ou pratique architecturale : une recherche appliquée propre à l’architecture, Laboratoire d’Architecturologie et de Recherches Epistémologique sur l’Architecture, ?, 7 pages. Lengereau Éric. L'architecture entre culture et équipement (1965-1995). In: Vingtième Siècle. Revue d'histoire. N°53, janvier mars, 1997. pp. 112-123.
Thèse Sallé Nadia, Conception de la matérialisation en architecture : l’expérimentation comme facteur d’innovation industrielle, Doctorat de l’Institut National Polytechnique de Lorraine, novembre 2007.
Site internet CNTRL : Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, http://www.cnrtl.fr/ BRAUP : http://www.culturecommunication.gouv.fr/ CNRS : http://www.cnrs.fr/ Ministère de la Culture et de la Communication : http://www.culturecommunication.gouv.fr/ Portail techno-science : http://www.techno-science.net/
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PUCA : http://rp.urbanisme.equipement.gouv.fr/puca/ Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Wikipédia:Accueil_principal Site internet de Le grand Ensemble de Patrick Bouchain : http://www.legrandensemble.com/ Site internet de Lafarge et des diverses entreprises citées Site des Grands Ateliers de l’Isle d’Abeau :http://www.lesgrandsateliers.fr/
Entretien Luc Bousquet, directeur de la recherche et des partenariats, ENSA de Lyon.
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