Le poids de mur

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LE POIDS DES MURS 30 mars 2011 Rapport d’étude : Licence 3 Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Lyon Professeur référant : Sandra FIORI

Leslie BOUILLE La situation des prisons en France est porteuse de nombreuses accusations européennes. En tant que citoyen et bâtisseur, l’architecte doit prendre position dans le débat. S’interroger sur le poids d’une simple épaisseur de trait dans une vie devient essentiel. L’expérience de la prison est peut-­‐être la plus significative.

The situation of prisons in France carries numerous charges in Europe. As a citizen and builder, the architect must take sides in the debate. Wonder about the weight of a single line width in a lifetime is essential. The experience of prison is perhaps the most significant.

Mots clés : Architecture pénitentiaire / Milieu carcérale / Symbolique du mur


POURQUOI LE CHOIX DES PRISONS

Avant de connaître l’architecture je ne voyais que des toits, maintenant je ne vois que des murs. L’enjeu d’un rapport d’étude est de s’interroger. Face aux nombreuses questions auxquelles on est confronté due à notre jeune âge, l’enjeu est de trouver un sujet qui nous touche en tant qu’étudiant en architecture. Dans notre discipline, on est amené à tirer des traits en imaginant que dans la troisième dimension, on pourrait faire un monde vivable et qui plus est meilleur ! Mais est-­‐ce qu’on s’est déjà posé la question de savoir quel pourrait être l’impact d’un simple trait sur une vie ? Nos études se basent sur une image de l’homme heureux vivant d’une certaine manière entre quatre murs. A quel moment a-­‐t-­‐on décidé que le mur plutôt qu’un toit pouvait devenir source de bonheur ? Le mur est-­‐il porteur d’art ou de gérance ? Plus qu’un trait d’architecte, est-­‐il simplement une barrière ? L’architecture n’est-­‐elle pas au final qu’une restriction de notre liberté ultime : celle de déambuler sans limites ? Il est clair de constater qu’au cours de l’Histoire, nombres d’architectures ont été abandonnées au profit de « meilleures ». Cela pour répondre à une civilisation qui ne cesse d’évoluer et surtout d’augmenter. La multiplication des murs permet d’assurer la gérance de ses flux. Ainsi en englobant, ceux-­‐ci uniformisent et hiérarchisent les espaces où l’on vit. Peut-­‐être est-­‐ce ce constat qui me pousse à m’interroger sur le poids de ses barrières installées depuis toujours autour de l’homme. Car tout en compartimentant, ils conditionnent la vie en société : l’établissement d’une norme universelle de bonne conduite. Mon choix s’est porté sur la prison, car elle est l’architecture qui à la fois conditionne un échec en amont d’un processus de socialisation, mais qui devient en même temps l’expérience la plus subite en terme de spatialité.

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COMMENT APPROCHER UNE TELLE ARCHITECTURE : ÉTABLISSEMENT D’UNE PROBLÉMATIQUE Mon but est d’essayer de retranscrire le poids des murs : comment celui-­‐ci devient à la fois l’expérience d’une vie à la fois passée, présente et qui marque le futur. Comment parler d’une situation opaque ? Ça ne peut qu’attisé une certaine curiosité, il ne s’agit pas d’une architecture à visiter mais à cacher. Comment, avec ce qui nous est proposé à l’extérieur, parler d’un sujet aussi difficile ? On très vite tenté pas les statistiques, la presse, le cinéma, mais comment discerné la réalité ? L’expérience carcérale est tellement cachée et censurée que l’on tombe très vite dans le stéréotype. Chacun à son point de vue et son analyse, au final ceux qui en parlent peut-­‐être le moins, c’est surement ceux qui en font l’expérience. Mon enjeu est donc de me faire ma propre vision d’un monde que je ne connais pas, tout en ayant conscience que le poids de ces murs doit être vécut pour être vraiment réel. J’en viens alors à me poser la question : est-­il possible de percevoir le poids des murs d’une prison tout en étant à l’extérieur ?

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INTRODUCTION : LA CHRONOLOGIE D’UN FIL CONDUCTEUR

Dans une première partie, à travers les faits historiques qui ont donné naissance à la prison, je découvre que les murs sont les vecteurs d’une société qui les a voulut. Ils deviennent symbole d’une hiérarchisation de l’espace, plus que l’idée de constituer un abri, ils sont la lecture d’un plan de barrières. C’est dans une seconde partie que je découvre leurs poids à travers des débats. Ceux-­‐ci sont le signe d’un profond disfonctionnement. A-­‐t-­‐on donné trop de responsabilités aux murs ? Ce qui m’amènent enfin à ma dernière partie, où le poids des murs est exprimé à travers leur expérience même. Les murs tout en se personnifiant deviennent le symbole d’un profond mal-­‐être. La chronologie de ma recherche me pose enfin la question de savoir si j’ai réellement ma place en tant qu’interlocuteur car est-­‐il possible d’aborder une réalité que l’on ne peut pas toucher ? Ainsi, mon rapport d’étude est à l’image de livre Le monde de Sophie de Jostein Gaarder. J’établis des chapitres qui suivent la chronologie d’une recherche pour qu’au final la seule réponse soit une invitation à s’interroger. C’est surement le fruit du hasard qui fait que l’on découvre 13 chapitres, comme si la prison était le treizième invité à la table de la société.

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SOMMAIRE POURQUOI LES PRISONS ? 2 PROBLÉMATIQUE 3 INTRODUCTION 4 HISTOIRE Chapitre 1 : Le contrôle de la misère par le souverain 6 Chapitre 2 : Les pensées humanistes à l’origine de la naissance des prisons 7 disciplinaires 8 Chapitre 3 : L’apparition des sciences humaines : la mise en observation du corps 9 Chapitre 4 : Le Panoptique de Bentham 10 Chapitre 5 : Un constat assimilé DES INTERFÉRENCES PORTEUSES DE DÉBAT Chapitre 6 : La tentation du cinéma 12 Chapitre 7 : La tentation des statistiques 14 Chapitre 8 : Ma rencontre avec M. Thuilleaux 14 Chapitre 9 : Ma rencontre avec le GÉNÉPI 15 RENTRER DANS LES MURS Chapitre 10 : Ma rencontre avec Karim 18 Chapitre 11 : La découverte des longues peines 20 Chapitre 12 : La symbolique des espaces de la prison à travers les écrits 20 Les frontières Les murs comme garant d’un passé carcéral Le monde extérieur pour garder des repères Identité Le retour à l’enfance Le détenu comme objet Le détenu comme animal Le détenu face à la mort Chapitre 13 : Conclusion d’un monde appart 26 27 ANNEXES 35 RETOUR D’EXPÉRIENCE REMERCIEMENTS 36 BIBLIOGRAPHIE ET SOURCES 37

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HISTOIRE Il est important d’examiner dans un premier temps la définition que l’on en fait de la prison dans le langage courant. Le terme vient du latin « prensio », qui signifie l’action de prendre. Le Petit Larousse nous offre cette signification : « établissement où sont détenus les personnes condamnées à une peine privative de liberté ou en instance de jugement / Lieu quelconque où quelqu’un est ou se sent séquestré, enfermé ». On remarque que ce type d’architecture est à la fois synonyme d’une condamnation mais elle représente aussi dans certaines situations, l’action de perdre sa liberté associée à la sensation de souffrance. L’enfermement souvent associé à l’idée de se retrouver entre quatre murs est une expérience qui universellement ne relève pas de l’agréable. Pour punir, la prison devient alors la meilleure architecture. Je me suis dirigée dans un premier temps vers une lecture de Michel Foucault qui retrace l’Histoire d’un concept d’enfermement. Il est important de discerner tout d’abord les logiques de la société qui on conduit à la naissance de la prison pour que dans un second temps je puisse comprendre comment aujourd’hui cette architecture à tant de mal à évoluer. Lecture de Michel Foucault, Surveiller et Punir

Chapitre 1 : Le contrôle de la misère par le souverain Le système pénal français évolue selon chaque temps historique et social, ainsi il élabore différentes formes de condamnations et de peines selon les délits commis. Au XVIème siècle, on voit apparaître des établissements qui serviront dans un premier temps à incarcérer les populations les plus pauvres comme les mendiants ou les vagabonds, ainsi que les crimes commis par des femmes, des vieillards ou des malades. Pour les criminels masculins, ils sont condamnés par le souverain à des châtiments corporels ou envoyés aux galères. Les châtiments corporels ont une dimension de supplice et sont accompagnées du spectacle : pilori, carcan, marque … De plus les corps condamnés sont frappés d’un sceau indélébile : les lettres GAL sont gravés à même la peau pour ceux qui sont passés par la galère, et la lettre V au fer rouge pour les voleurs. A cette époque, le corps est supplicié afin de créer un « cérémonial judiciaire » pour faire éclater en plein jour la vérité du crime. ((1)_ Partie 1 L’éclat des supplices) « En France, comme dans la plupart des pays européens_ à la notable exception de l’Angleterre_, toute la procédure criminelle, jusqu’à la sentence, demeurait secrète : c’est-­‐à-­‐dire opaque non seulement au public mais à l’accusé lui-­‐même. Elle se déroulait sans lui, ou du moins sans qu’il puisse connaître l’accusation, les charges, les dépositions, les preuves. Dans l’ordre de la justice criminelle, le savoir était le privilège absolu de la poursuite » (1)

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Le corps est par la suite montré, promené, exposé et supplicié. L’acte de la Justice jusque ici resté dans l’ombre, est à présent l’objet lisible d’une condamnation. Et doit faire l’écho de la puissance du souverain, celle du droit de vie ou de mort sur ses sujets. Ainsi, le but étant de sensibiliser le peuple afin de prévenir le crime. Ce n’est qu’à l’approche de la Révolution Française, dans ce contexte des Lumières et des philosophes humanistes que les souffrances infligées par ces châtiments corporels deviennent aussi insupportables que « l’absolutisme royal ». Notons l’exemple de Cesare Beccaria qui en 1784 écrivit Des délits et des peines dans lequel il condamne la barbarie et l’incohérence des châtiments infligés au corps du condamné. « L’assassinat que l’on nous représente comme un crime horrible, nous le voyons commettre froidement, sans remords », l’exécution publique est perçue maintenant comme un foyer où la violence se rallume.

(1) Michel Foucault, Surveiller C’est d’ailleurs lors de la Révolution que les corps les plus et Punir, 1975, susceptibles d’être condamnés (les démunis) se voient se lever Gallimard contre le souverain.

Chapitre 2 : Les pensées humanistes à l’origine de la naissance des prisons disciplinaires

N.Andry. L’orthopédie ou l’art de prévenir et de corriger dans les enfants les difformités du corps, 1749

« Il y a eut, au cours de l’âge classique, toute une découverte du corps comme objet et cible de pouvoir. On trouverait facilement des signes de grande attention portée alors au corps ; au corps qu’on manipule, qu’on façonne, qu’on dresse, qui obéit, qui répond, qui devient habile et dont les forces se multiplient. » ((1) _partie 3 Discipline) Le corps est maintenant vu comme un être penseur et productif, il ne s’agit plus de le punir mais de le redresser en cas de défaillance (cf. image ci-­‐contre). Le but étant dés à présent d’établir des châtiments qui seraient plus simplement d’empêcher que le condamné ne reproduise de dommage. Il s’agit d’établir des peines gradées qui soient les plus efficaces et les plus durables pour marquer les esprits et plus le corps. « Le corps s’y trouve en position d’instrument ou d’intermédiaire : si on intervient sur lui en l’enfermant, ou en le faisant travailler, c’est pour priver l’individu d’une liberté considérée à la fois comme un droit et un bien » (1) C’est l’article VII de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 qui conduisit à la progressive suppression des châtiments et au développement de la prison légale (« nul homme ne peut-­‐être accusé, arrêté, détenu, que dans les cas déterminés

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(2) Philippe Combessie, Sociologie de la prison, 2004, La découverte. (3) Michel Foucault, Génèse du bio pouvoir et dispositifs de sécurité, édition 2006, Automne

par la loi »). Lors de l’élaboration des projets d’enfermements pénitentiaires, les risques de contagion et d’insalubrité sont mis sous réserve. Pour y remédier, les politiques préconisent l’encellulement individuel pour éviter la contagion entre les détenus, et l’amélioration des conditions de vie en ce qui concerne l’insalubrité. Mais il est mis en avant aussi que d’intégrer la pénibilité de l’enfermement et l’inconfort sont tirés de principes chrétiens de pénitence et de rédemption : souffrir pour racheter sa faute. Cette réforme du droit pénal, présentant des lois égales à tous, devait être porteur d’une plus grande humanité. (2) Les idéaux de ses réformateurs sont donc à cette époque a volonté de discipliné le corps par l’adoucissement des peines, la protection de la société et la pédagogie d’une punition. Mais ce mythe fondateur permet de masquer l’essentiel : l’enfermement est un dispositif pratique, assez bon marché, assez discret mais dont les valeurs ont été mises de côté par la suite que se soit durant la Terreur, l’époque napoléonienne, sous la Restauration ou encore le Second Empire. Chapitre 3 : L’apparition des sciences humaines : la mise en observation du corps Dans un premier temps, le Code Pénal de 1810 permet à la prison de devenir la forme essentielle du châtiment. En 1795, l’Administration pénitentiaire est créée au sein du ministère de l’intérieur. Elle se dote par la suite de spécialistes comme des éducateurs, des surveillants, des aumôniers et des médecins. Ceux-­‐ci vont observés, surveillés et assujettir les détenus. Les corps deviennent des objets d’étude et de connaissance de la part des dirigeants. C’est dans cette analyse de la privation de la liberté que l’on peut observer ses corps dont on domine les gestes, les attitudes, les discours. La psychiatrie, la psychologie, la criminologie et la médecine sont les premiers spectateurs de cette nouvelle forme de conditionnement. C’est l’émergence de ces disciplines qui permettent, par les mêmes moyens que les sciences dures, de réunir des connaissances sur l’homme dans la société (3) (comme par exemple le concept de dangerosité, mais nous y reviendrons plus tard). Ces disciplines sont maintenant appelées à agir lors des jugements afin d’obtenir une peine juste et individuelle en prononçant «scientifiquement » le degré de responsabilité d’un prévenu. Ces savoirs nouveaux permettent d’apprécier la normalité. Il est donc clair de constater que le condamné est considéré comme anormal et que le but de la prison est de rendre normal. Il s’agit là d’un constat très réducteur mais assez clair pour m’interroger par la suite sur la

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Le Panopticon de Bentham.

responsabilité et la confiance données à un simple établissement de murs ! Cette nouvelle approche face aux corps de la population conduit à son analyse mathématique. Ainsi, les statistiques deviennent la nouvelle science du conditionnement humain. C’est alors que naît un certains fantasmes des dirigeants en terme de prévention et donc de contrôle d’une population qu’il semble de plus en plus connaître. La dualisation la normalité et la déviance deviennent nettes et l’enjeu est de protéger et prévenir cette partie de la population. C’est la surveillance qui permet la canalisation de la population, c’est à cette époque que l’on voit apparaître l’utopie de la forme architecturale du panoptique. Chapitre 4 : Le panoptique de Bentham

« À la périphérie un bâtiment en anneau ; au centre , une tour ; celle-­‐ci est percée de larges fenêtres qui ouvrent sur la face intérieure de l’anneau ; le bâtiment périphérique est divisé en cellules, dont chacune traverse toute l’épaisseur du bâtiment ; Exemple de plan elle ont deux fenêtres, l’une vers l’intérieur, correspondant aux radial, prison de fenêtres de la tour ; l’autre, donnant sur l’extérieur, permettant à Saint Paul à la lumière de traverser la cellule de part en part. il suffit alors de Perrache. placer un surveillant dans la tour centrale, et dans chaque cellule, d’enfermer un fou, un malade, un condamné, un ouvrier ou un écolier. Par l’effet du contre-­‐jour, on peut saisir de la tour, se découpant exactement sur la lumière, les petites silhouettes captives dans les cellules de la périphérie. » ((1), p.233) Cette forme architecturale est le système utopique d’un nouveau pouvoir qui tend à rendre compte de sa capacité à diriger et conditionner les gens. En un point, le surveillant peut tout voir. Ce système ne fait pas seulement l’économie de personnel mais produit chez le détenu une « auto-­‐surveillance » car il est doit avoir la sensation de toujours être observé. D’autant qu’il a un Un détenu dans sa impact sur l’extérieur, car c’est un lieu public ou les gens « bons, cellule fait sa notables » peuvent venir visiter la prison. Le panoptique se veut prière devant la lisible afin de prévenir l’arbitraire longtemps condamné. Les tour centrale individus sont assujettis et ce système permet de redresser toute une population anormale comme les fous, les délinquants et les criminels. Foucault élargit son idée de « machines à connaître, surveiller et modeler » à celui des hôpitaux, du travail ou encore de l’école. Bien que le panoptique de Bentham n’est pas été la forme architecturale construite en France, il faut constater qu’il est la référence des bâtisseurs. La forme la plus développée en Europe au XIXème siècle est la forme radiale qui découle complètement du principe panoptique. Il est basé sur la convergence de plusieurs « branches » de bâtiments vers un même point de

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surveillance. Cela accompagné de nombreux dispositifs de contrôle et de sécurités comme, les barbelés, les barreaux, les murs… et qui aujourd’hui joint la généralisation de la surveillance comme l’installation de caméra dans les lieux publics, les bracelets électroniques pour certaines peines, le fichage automatique … Chapitre 5 : Un constat assimilé Aujourd’hui, l’Histoire nous laisse le sévère constat d’un patrimoine immobilier vétuste et déshumanisant suite à la montée considérable de Justice pénale. Les tentatives de restructuration n’interviennent que sur le plan architectural et souvent de manière éphémère. La destruction de la plus grande partie du parc pénitentiel a conduit à la reconstruction d’établissement d’une plus grande capacité d’accueil, plus moderne et plus médicalement vivable. Mais elle ne cesse de faire polémique. Face à une promiscuité qui est de plus en plus intense dans les prisons alors que les plans de constructions pénitentiaires de cesse de s’additionner, on peut se demander quel est le véritable rôle de cette punition ? Comment de l’extérieur nous légitimons cette augmentation pourtant significative de la promiscuité en prison ? La prison apparaît comme la forme la plus immédiate et la plus civilisée de toutes les autres peines passées. On reconnaît tous les inconvénients de la prison mais on ne saurait en faire l’économie, Foucault explique cette attachement en posant une question : « comment la prison ne serait-­‐elle pas immédiatement acceptée puisqu’elle ne fait, en enfermant, en redressant, en rendant docile, que reproduire, quitte à les accentuer un peu, tous les mécanismes qu’on trouve dans le corps sociale ? » Il est important de noter que les discours humanistes sur la prison apparaissent à une époque où le développement et donc la crainte de la criminalité sont faibles. Ce qui n’est pas le cas depuis l’industrialisation, qui a conduit au dépeuplement des campagnes (là où le contrôle social était fort) pour peupler les villes où vient une masse anonyme, il a fallut des règles et des normes pour permettre l’encadrement. (2) « En même temps que les théories humanistes préparaient les bouleversements politiques, les nouvelles élites qui prônaient la démocratie ont trouvé à leur disposition la peine de prison pour régler, d’une façon qui pouvait sembler humaine tout du moins juridiquement acceptable, les nouveaux risques sociaux engendrés par les bouleversements économiques. » ((2), p.13)

Le problème des prisons ne relève peut-­‐être pas d’une simple augmentation de la criminalité, l’Histoire ouvre les yeux sur une société entière qui la crée et qui ne voit pas d’autres alternatives. L’idée n’est peut-­‐être pas de savoir si la prison doit être correctrice

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ou non, si les humanistes auront plus de pouvoir que les politiques de contrôle ou même de savoir si elle doit être abolis ou non ; le réel enjeu est peut-­‐être de savoir si toute cette mise en place conduit à la destruction physique et psychologique d’une partie de la population. Comment vit-­‐on dans une architecture de contrainte qui vient gérer non seulement le contrôle des détenus mais aussi leur quotidien, leur intimité, leur besoin, leur envie… Je poursuit maintenant ma recherche pour essayer de pénétrer ces murs qui portent déjà de grandes responsabilités : intercepter, discipliner, rendre normal et meilleur. Ce fut dans un premier temps le cinéma, des images et des rencontres. Différents acteurs qui viennent satelliser les murs.

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DES INTREFÉRENCES PORTEUSES DE DÉBAT J’ai choisi l’expression d’interférences car elles sont venues complexifier mes recherches, en me poussant à tour de rôle vers de nouvelles interrogations. L’enjeu a donc été de faire le tri et de pointer le doigt sur les différents aspects qui sont porteurs des débats actuels. Chapitre 6 : La tentation du cinéma Le cinéma a tendance à accentuer tous les clichés et contribue à donner une image de l’inconnu en le stigmatisant. Nous avons souvent une image bien précise des prisons comme celle des séries américaines où on voit seulement ses images de « caïd ». Toutes une romance autour ou à l’intérieur des murs, de l’amour, de l’action, enfin tout d’un film à grand budget ! Mais il a le mérite de s’intéresser à la prison et malgré la prédominance du stéréotype, certains films soulèvent des questions et des sujets dont le grand publique n’aurait peut être jamais conscience. Je prendrais l’exemple de 3 films : Un prophète de Jacques Audiard _ Les passages les plus marquants du film sont les longs moments où Malik (le personnage principal) réfléchit dans sa cellule. Il doit assimiler tous les risques qui l’entourent : la pression des autres détenus, faire sa place pour survivre et ne pas devenir l’objet des détenus les plus puissants. Car comme beaucoup de détenus, il est coupé d’un soutien extérieur et est trop souvent mal accompagné pour Les cadrages sont rejoindre la sortie. La conjoncture de la prison fait que trop principalement autour de Malik qui souvent on s’enfonce plus dans la marginalisation. Il est clair que par sa « banalité » l’on peut pourrait facilement s’identifier au personnage tant il est le rend touchant touchant mais surtout car il ne donne pas cette image d’un être aux yeux des dangereux ou psychopathe qui nourrit souvent nos clichés sur les spectateurs. On n’a détenus. Il est jeune et la seule voie qui lui semble accessible est pas l’image du celle de se faire respecter en usant de ses capacités à gérer les « caïd » habituel. trafics qui se créent en prison. Ce que ce film met en avant c’est un monde dans lequel on ne guérit pas, les conditions de la prison n’offrent pas aux détenus la possibilité de changer car ils sont sans cesse ramenés à un rapport de force ; un moment qui dans leur passé les rendaient inégaux se répète à l’intérieur des murs. Le manque d’une situation dans le passé se reflète à l’intérieur même du milieu carcéral, puis se poursuit. Le film fait tomber cette barrière qui montre les condamnés comme des êtres en marge de la société, en réalité elle les a conditionnés et la prison devient une partie légitime des handicaps sociaux qu’elle crée.

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Orange mécanique de Stanley Kubrick _ « Quand un Homme cesse de choisir, il cesse d’être un Homme », ce sont les paroles de l’Aumônier de la prison qui traduit le mieux l’enjeu du film. En effet, le réalisateur tente de dénoncer une société qui ne prône pas le bien, mais qui fait en sorte que l’individu s’y conforme. La prison permet-­‐elle le choix aux détenus ? La contrainte est-­‐elle la façon de forcer le bien ? Face aux contraintes perpétuelles que l’on impose aux détenus et l’atmosphère morbide et marginale Alex est en train de subir un traitement auquel ils sont confrontés, on peut se demander si le détenu change vraiment. Par exemple, on voit le personnage principal se pour guérir de sa plier aux règles de la prison dans le simple but de se voir maladie d’ « ultra-­‐ violence » raccourcir sa peine mais en aucun cas il s’agit de changer et d’oublier son « ultra-­‐violence ». Les tentatives de la société a corriger l’être « malfaisant » sont condamnées par le réalisateur car ils ne sont que contrôle et assujettissement. Le film date de 1971, mais il est toujours d’actualité. Aujourd’hui, on voit apparaître chez les politiques, des envies de prévention du crime comme le rapport de dangerosité fait par les psychiatres (que je développe en annexe), ou encore des fantasmes comme de pouvoir déterminer chez l’enfant s’il va être dans le futur un criminel et donc le « traiter » dés son plus jeune âge. Autant de craintes que de nombreuses associations et parties condamnent comme des atteintes aux droits de l’homme et à l’individualité de chacun. C’est donc un sujet très récurrent à notre époque que l’on voit apparaître dans d’autres films comme Minority Report , ou les criminels sont enfermés avant même qu’ils aient commis leur crime.

Boy A de John Crowley _ Ce film montre l’intimité touchante d’un jeune homme qui a connut la prison toute sa jeunesse pour crime, il tente maintenant de trouver une vie normale. Il redécouvre tout. Ce film pose la question de l’identité, celle d’un crime qui le suivra toute sa vie. Il doit changer de nom, se créer un nouveau Le personnage présent en oubliant son passé. Sa dette envers la société ne sera principal est en jamais payée car il sera toujours l’assassin du passé aux yeux des train de choisir un gens. Il doit être quelqu’un d’autre pour vivre. nouveau nom pour une nouvelle vie.

Comme on a put le voir, le cinéma vient mettre en avant des sujets récurrents du problème de l’emprisonnement comme l’identité, les zones de non-­‐droit où il faut faire sa place, une société qui cherche toujours à enraciner la criminalité en mettant de côté sans penser à une réinsertion. La remise en question de la société ou du système judiciaire est souvent mis en avant : la question est peut-­‐être de savoir comment des enfants peuvent se retrouver en prison, qu’est ce qui à fait un jour qu’ils se sont retrouvés avec une arme et ont choisi la délinquance plutôt que l’éducation. Les films sont souvent romancés et stéréotypés mais ils invitent tout de même les gens à se poser des questions.

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Chapitre 7 : La tentation des statistiques Voir Annexe 1 : Toutes les statistiques sont tirées du livre Sociologie de la prison ou directement des cahiers de statistiques de la Direction de l’Administration Pénitentiaire. La tentation a été d’analyser les statistiques de la Justice pour savoir qui étaient emprisonnés, pourquoi, combien de temps, leur âge … Il est facile de dresser le profil type du détenu, par les rapports de dangerosité d’établir ceux qui sont les plus susceptibles de connaître la prison, et par l’analyse des cas de récidive ceux qui sont susceptibles d’y retourner. Le détenu est donc un homme (seulement 4% de femmes), jeune (entre 21-­‐25 ans), ayant un faible statut social (en 1999, l’Insee recense qu’un détenu sur deux est ou a été ouvrier), ayant un faible niveau scolaire et peu de liens sociaux. En « calculant », le degré de dangerosité d’un prévenus, on remarque que l’individu qui est susceptible de connaître l’incarcération car considéré comme dangereux c’est celui qui aurait des relations intimes instables, des problèmes d’emploi ou encore qui aurait eut des problèmes d’adaptation dans la jeunesse (école, environnement familial). Enfin, lorsqu’on étudie les statistiques liées à la récidive, l’individu susceptible de « retourner » en prison est un homme de moins de 25 ans, célibataire, qui a déjà été incarcéré pour délits et qui est en fin de peine. Notons que sur l’ensemble des entrées en prison, en moyenne 93 % sont pour des délits et donc 7% pour des crimes. Je constate alors que selon les statistiques l’individu qui semble être le plus touché par l’incarcération conserverait ses handicaps. Le choix de la facilité des statistiques ne peut pas être une fin en soi car il ne s’agit encore que de chiffres qui doivent être relativisés. Mais il est clair que face à des faiblesses sociales beaucoup se retrouve en marge et sont donc plus faibles aux yeux de la Justice et auront plus de chance d’être incarcérés par leur situation instable. Par exemple, un homme qui aurait un emploi lors de son jugement a moins de chance d’être incarcéré et sera plus propice à bénéficier d’un aménagement de peine. Bien souvent les magistrats les plus optimistes, imaginent que l’incarcération peut produire un « choc » bénéfique pour les plus jeunes par exemple mais pour les plus pessimistes il est clair que l’on peut y voir une fonction de neutralisation pour un temps donné. Chapitre 8 : Ma rencontre avec M. Thuilleaux_Avocat et intervenant en droit à l’ENSAL J’ai voulu revenir avec lui dans un premier temps sur la situation des prévenus, en effet selon le DAP (Direction de l’Administration Pénitentiaire) en février 2011, les prévenus représentaient 27% de la population écrouée. C’est pourquoi, les Maisons d’Arrêt qui concentrent les prévenus ayant de courtes peines sont les plus « encombrées ». Les conditions de vie dans ces établissements sont les plus déplorables car la promiscuité y est la élevée. Un présumé innocent peut être incarcéré au maximum 3 ans avant son jugement. Dans un second temps, il s’agit de savoir quelles sont les nouvelles lois qui influent sur l’évolution de la population carcérale ces dernières années. Il est important de constater que depuis les années 2000, beaucoup de faits divers montrés à la télévision ou dans les journaux ont été les moteurs de la création de nouvelles lois (l’affaire Laëticia, la montée de la délinquance, les violences conjugales et sur mineurs, la

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montée du racisme, la généralisation des trafics de drogue…). On voit donc apparaître de nouvelles lois qui tendent à créer de nouvelles sanctions pénales autrefois amendables, à allonger les peines de prison et parfois à transformer des délits en crime. (Voir annexe 2).Celles qui touchent le plus l’évolution de la population carcérale, c’est la loi sur la récidive en 2007 et celles qui ponctuent les années 2000 concernant les circonstances aggravantes. C’est ici que porte un débat concernant l’augmentation de la population carcérale ces dernières années, à savoir si certaines condamnations sont réellement à l’échelle du délit commis et si elles ne tendent pas à stigmatiser une population qui est perpétuellement confronté à l’incarcération. Enfin, le dernier point qui a retenu mon attention c’est le budget de la Justice. En effet, beaucoup d’avocats et autres juristes pensent que le véritable problème se situe aux fonds accordés à la Justice. D’un côté, on remarque que la plupart du budget de l’administration pénitentiaire est consacré à la multiplication des dispositifs de sécurité pour prévenir des évasions, puis d’un autre côté, des restrictions de budget concernant les jugements, qui tendent déjà à être très longs face à l’augmentation des arrestations. Trop de dossiers pour trop peu de juristes, le jugement d’un individu pouvant durer des années. M. Thuilleaux me fait ainsi remarquer qu’en effet, un politique qui prône l’augmentation du budget de la Justice est peu vendeur électoralement car il est difficile pour un citoyen de voir une partie de ses impôts augmentés pour pallier à une meilleure condition de vie d’un prisonnier. Chapitre 9 : Ma rencontre avec le Génépi (Groupe Étudiant d’Enseignement aux Personnes Incarcérées) Je les ai rencontré lors d’une campagne de sensibilisation qu’ils organisaient à l’ENTPE. Il s’agit d’une association indépendante regroupant des étudiants bénévoles travaillant en collaboration avec l’effort public depuis 1976. Ils interviennent toutes les semaines en milieu carcéral pour du soutien scolaire et des activités culturelles. Il faut aussi des campagnes de sensibilisation dans les écoles sur la réalité de l’incarcération et ils s’impliquent au niveau politique en organisant des réflexions concernant les lois. Ce qui leur tient à cœur c’est de montrer que l’incarcération ne doit pas être un sujet tabou car il peut un jour ou l’autre nous toucher. Pour eux la détention est une privation de liberté mais ne doit pas être une privation de dignité, ce doit être un temps d’utilité publique. La crainte que l’on doit avoir serait de se retrouver dans le cas des Etats-­‐Unis qui compte à l’heure actuelle un million de détenus, en France on en est déjà à 62000 personnes. Mais ce qui va retenir mon attention ce sont ces quelques points qui me semblent être des plus importants concernant les conditions de détention : -­‐

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Il est proposé tous les jours aux détenus un repas de base qu’ils peuvent compléter en cantinant (ces produits s’achètent à la prison grâce aux mandats car le détenu ne doit pas posséder d’argent à l’intérieur de la prison, les prix sont souvent beaucoup plus cher qu’à l’extérieur). Pour pouvoir accéder à un travail en prison, il faut faire une demande écrite et avoir un bon comportement. Le détenu touche en moyenne 3 euros de l’heure soit 30% du Smic. Le code du travail ne s’applique pas en détention, il s’agit d’un contrat entre le demandeur privé et

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l’Administration, le détenu ne cotise donc pas pour sa retraite. (quel valeur peut-­‐on alors donner au travail ?) Des psychologues se sont réunis pour dire qu’une sanction disciplinaire au mitard supérieur à 40 jours atteint les neurones du détenu, ainsi elle peut entrainer des troubles psychologiques graves (cette durée n’est pas toujours respectée). Comme on peut le voir dans les images interdites sorties de la prison de Fleury-­‐Mérogis, la violence est un état de fait. La cours de promenade devient un lieu de non-­‐droit où les règlements de compte sont quotidiens. Les surveillants ne sont pas présents lors des promenades, ils interviennent en masse en cas d’extrême urgence (on peut voir sur les images un homme rué de coups par une vingtaine de détenus puis laissé pour mort durant le temps de la promenade). Le budget de l’Administration pénitentiaire est surtout consacré à créer des dispositifs humain et matériel de sécurité et trop peu consacré à la réinsertion (SPIP). En moyenne pour 100 détenus, on aura 40 surveillants et 1 travailleur social. On peut être incarcérés dés l’âge de 13 ans dans des quartiers mineurs ou des établissements réservés.

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Lors des parloirs, la famille passe des portiques puis patiente dans une salle. Dans un même temps, les détenus subissent une fouille intégrale avant et après le parloir (3 parloirs par semaine pour les détenus et 1 pour les condamnés). Notons que les parloirs doivent se faire en français, sinon il peut être interdit. (l’accueil des familles est souvent très mal vécut et contribue à une atmosphère très difficile car elles se sentent considérées comme complice et les deux interlocuteurs vont avoir du mal à justement parler des « sujets qui fâchent » et être souvent déçut de leur parloir).

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En prison, rien n’interdit le sexe mais rien non plus ne l’autorise. Le contact avec une femme de l’extérieur est impossible alors comme pour acheter une paix sociale, l’Administration va fermer les yeux sur la pornographie à la télévision (souvent pour les mineurs l’acte sexuel sera identifié à celui la pornographie dans le futur). D’autres part, l’homosexualité est pressenti comme une nécessité bien qu’elle n’implique un changement réel de la sexualité. L’administration ferme de temps à autre les yeux sur des viols qui pourraient se produire intramuros.

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Pour calmer les anxiétés des détenus, les médecins vont souvent prescrire des calmants, ce qui conduit le plus souvent à une dépendance. Certains détenus semblent inertes.

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Le problème de l’écriture est un réel problème, beaucoup de détenus ne savent ni lire ou écrire alors que toutes les demandes se font par lettres (parloirs, demande de transfert, médecin…). Les détenus concerner deviennent alors dépendants du bon vouloir d’un codétenu ou d’un travailleur social.

On remarque qu’en prison on est confronté à une véritable culture. Elle s’alimente de l’importation des différentes cultures des milieux de la délinquance. Elle n’est qu’un cadre d’expression, voir de renforcement et d’adaptation, de cultures importées de l’extérieur. Un processus d’assimilation des valeurs carcérales se met alors en route à travers les modes de vie propres aux prisons comme le fait de ne plus ouvrir les portes, de ne prendre aucune initiative … Ainsi, à a libération, beaucoup de ces habitudes acquises vont devenir des handicaps pour le détenu. (2) En effet de nombreux acteurs viennent satelliser la prison : ceux qui la dénonce, ceux qui la nourrisse en la cachant et ceux qui essaie de la rendre visible. Tous sont porteurs de débats et ont un rôle à jouer sur l’avenir de la Prison. Car la neutralisation ne peut être une réponse quand elle est sans cesse répétée. Il faut rendre compte qu’une situation difficile dans le passé d’un détenu ne peut qu’alimenter chez lui un sentiment de dégoût envers la prison et la société qui l’a conduit. Cette partie ne peut pas me satisfaire car je ne peux rendre compte de l’intérieur de la prison. Bien que de nombreux problèmes soit levés comme l’identité, les faiblesses sociales, le manque de contact avec l’extérieure … Ce sont autant de constats qui me poussent à croire que les murs sont porteurs d’un sentiment d’injustice, de dégoût et doivent être sensiblement mal vécues. Mais mon but est de rentrer bien plus personnellement dans la recherche.

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RENTRER DANS LES MURS DÉTENTION Dans cette partie, j’ai tenté d’obtenir une image réelle de l’expérience de la prison de l’intérieur ; tout commence par une rencontre. Chapitre 10 : Ma rencontre avec Karim Nous nous sommes rencontrés par l’intermédiaire d’un ami lors d’une soirée. J’en suis venu à parler de mon rapport qui me causait quelques soucis car je n’arrivais à me faire une idée précise de ce que pouvait être l’expérience personnelle de la détention. En effet, de nombreux films pouvaient me permettre de voir quelques images mais je n’avais pas de témoignages qui pouvaient venir légitimer ses images. Nous reviendrons plus tard sur l’analyse de la prison faite à travers le cinéma dans le dernier chapitre concernant le cinéma. Puis j’ai appris par la suite que Karim avait fait de la prison l’an passé. J’étais d’ailleurs loin de m’en douter tellement, justement, au pouvait être nourris du stéréotype du « taulard » avec son air dur et son tempérament tourmenté ! En effet Karim était comme la plupart de mes fréquentations, jovial et sûr de lui. Après plusieurs rencontres amicales, je lui ai donc proposé de l’interroger sur son expérience ; il a trouvé ça à la fois étrange et flatteur, car il n’imaginait pas que c’était un sujet qui intéressait les gens et surtout les étudiants. Peut-­‐être parce qu’on donne trop l’impression d’être nombrilistes ! Karim a 26 ans et a été écroué de juillet 2009 à juillet 2010 à la Maison d’Arrêt de La Talaudière à Saint-­‐Étienne ; il est actuellement en attente de jugement. Les maisons d’arrêt regroupent à la fois des condamnés de courtes peines (moins de deux ans ) et des prévenus ( en attente de jugement, ils sont jusqu’à leur jugement « présumés innocents). La maison d’arrêt de la Talaudière compte 445 détenus pour 281 places, soit un taux d’occupation de 150%. L’entretien se déroule chez moi et d’une manière peu scolaire. Il ne s’agit pas de l’accabler de questions mais de discuter, pour que de temps en temps, j’intervienne pour des précisions. Je lui demande de dessiner sa cellule, puis la prison ; je lui offre une feuille blanche, et ce qui est remarquable, comme pour faire l’économie de papier, il n’en utilise que le quart. Une grande page blanche pour une petite cellule, tout est assez bien proportionné, sauf la cellule qui est toujours minimisée. (voir Annexe 3) Concernant l’organisation de la prison, j’apprends qu’il existe une réelle organisation sociale : des groupes se rassemblent par leurs points communs et ceux-­‐ci ne se mélangent que pour des actes intéressés, comme du commerce (les anciens, les « évadés » (dépendant de drogue ou des médicaments), les sportifs). Il ne semble pas y avoir de véritables rapports de force entre les détenus ou du moins ce n’est pas une généralité. Ce qui semble lier les détenus, ce sont des habitudes, une situation qui fait que, de toute façon, ils sont tous dans la même « galère ». Karim m’avoue que la grande partie de la peine est passée à « gamberger », et que si on ne trouve pas un intérêt particulier pour se changer les idées, on sort de prison dans un plus mauvais état psychologique que quand on y est rentré. C’est pour cela que beaucoup de détenus sombrent dans la drogue ou les médicaments que prescrivent les médecins ; cela leur

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permet d’atténuer leur stress. Bien sûr, il ne s’agit pas là de faire une généralité car, comme Karim, certains trouvent un sens à leur détention et se réfugient plutôt dans le sport. Ce qui est remarquable, c’est qu’il faut une véritable force d’esprit pour pouvoir justement trouver un sens et un intérêt en ces lieux car peu de dispositifs sont mis en place pour faire oublier les conditions de détention. Le premier but du détenu est d’oublier qu’il est enfermé. Le quotidien du détenu passe par les sons de la « carouble » et la « décarouble », c’est-­‐à-­‐ dire l’ouverture et la fermeture de la cellule pour la nuit. Dans les deux cas, il s’agit d’un moyen de vérifier que le détenu n’est pas mort car les suicides sont devenus monnaie courante dans les prisons françaises. C’est d’ailleurs pour cela que de nombreux objets du quotidien sont interdits, comme les objets tranchants, le chauffe plats, les balais, les oreillers… autant de contraintes qui obligent le détenu à s’adapter ou à inventer de nouveaux dispositifs comme pour « cantiner » (utilisation d’un bol d’huile alimenté d’une flamme pour chauffer les aliments, il faut souvent deux heures pour se faire à manger !). Ce retour à un quotidien normal assimilé dans le passé est la principal lutte pour le détenu, c’est peut-­‐être une manière de se sentir encore libre. Le reste du temps (car il faut noter que dans les maisons d’arrêt un détenus est en moyenne 21 heures sur 24 dans sa cellule) est consacré à rythmer le temps par des indicateurs concrets comme une émission télévisé (l’émission « Plus belle la vie » prend une place très importante par exemple pour Karim), une visite (soit 3 fois 30 minutes par semaine pour un prévenu), les séances de sport (2 à 3 heures par semaine, sur inscription). En ce qui concerne la cohabitation avec les codétenus, il est évident qu’il vaut mieux que l’entente soit cordiale, vu le nombre d’heures passées en cellule. Il s’agit aussi de partager son intimité avec une personne que l’on ne connaît pas forcément ; l’intimité nécessaire pour chaque personne devient naturellement impossible en prison. Dans le même temps, à tout moment un surveillant est amené à rentrer ou à regarder le mirador alors il n’y a jamais de tranquillité. Ces derniers peuvent entrer à chaque instant et venir fouiller les affaires. Le détenu fait en sorte de se trouver un coin personnel, mais dans une cellule de 9 m2, partagée avec un codétenu, et avec une constante sensation d’être observé, la tâche n’est pas facile. L’expérience de Karim est très touchante ; parler de la prison avec quelqu’un qui l’a connue, c’est toucher à une part d’intimité, bien que certains sujets mériteraient d’être plus approfondis. L’intimité et les sensations touchent trop la personne pour non seulement la comprendre mais aussi l’aborder. On peut parler de bruit, tenter de relativiser, se dire qu’au final on préfère oublier cette expérience, qu’elle soit bonne ou mauvaise, car dans les mœurs, la prison ne sera probablement jamais l’image de la rédemption. Les murs sont arrivés dans la vie de Karim précipitamment, je ne le connais pas assez pour savoir si cette parenthèse dans sa vie l’a changé, mais j’ai pu sentir cette sensibilité qui marque une vie. C’est comme lorsqu’on parle d’une expérience douloureuse passée, on a tendance à relativiser et dire que c’est du passé ; on préfère garder pour soi ce moment-­‐là de la vie, car en parler c’est se remémorer des choses difficiles. Dans la lecture de Paroles de détenus de Jean –Pierre Guéno, je retrouve la même sensibilité que Karim mais démultipliée, les discours sont gorgés d’images et de métaphores comme pour sublimer ou rendre accessibles des sentiments. Cette pudeur

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est différente car Karim voulait me rendre service en me racontant son histoire, alors que ce livre est l’expression même de vouloir rendre compte d’une vie que l’on oublie. Il est difficile de comparer ces deux sources, car les peines et l’anxiété sont différentes ; Karim s’avait qu’il allait en sortir (bien que depuis bientôt un an, il ne sait pas s’il va devoir retourner en prison après son jugement !), alors que les détenus du livre ont de longues peines (parfois même à perpétuité). Chapitre 11 : La découverte des longues peines Les longues peines sont des expériences à part entière, à la différence des autres, le temps est le vecteur le plus important. L’idée de vivre sans liberté est un véritable paradoxe qui ne peut être supporté ou assimilé. Face à ce constat, le poids des murs en devient insupportable. Les peines sont plus faciles à supporter lorsqu’elles sont temporaires et courtes. Quelle serait alors la façon de supporter le temps ? Chaque détenu vit de manière différente ce temps à passer en prison, c’est une question de perception de chacun. L’idée est de faire passer le temps plus facilement. Certains vont avoir recours à des mécanismes d’adaptation pour pallier à ce stress associé à la peur de la dégénérescence. D’autres vont se refuser des perspectives d’avenir et ne parler que de leur passé. Pour trouver un but à leur journée, ils vont établir une sorte de routine carcérale en rythmant leur temps à travers d’indicateurs concrets comme une émission TV (routine journalière) ou une visite, séance de sport (routine hebdomadaire). Pour les courtes peines, l’enjeu est plus de penser à la sortie, ce qui permet d’avoir un objectif pour patienter. Qu’en est-­‐il des longues peines ? (Voir annexe 4) Chapitre 12 : La symbolique des espaces de la prison à travers les écrits Lecture de « Parole de détenus » de Jean-­‐Pierre Guéno. Ce livre est le recueil de témoignages de détenus de longues peines. On ne connaît pas leur histoire, ils nous délivrent simplement quelques lignes de leurs vécus. Dans le Chapitre 12, il s’agit d’analyser ces textes (toutes les citations sont tirées du livre). Les frontières « Se battre pour rester en contact avec la réalité du dehors, se battre pour garder un pied dehors, se battre pour trouver tous les jours la force de se lever et de trouver du soleil dans cet univers gris froid ! » (Voir texte en entier en annexe 5)(p.21)

Lors de ma lecture je vois apparaitre une forte opposition entre deux monde : celui de l’homme libre et celui de l’homme détenu. De nombreuses images viennent caractériser la dialectique du dedans et du dehors comme le livre « La poétique de l’espace » de Bachelard l’explique. En effet, de nombreuses métaphores viennent aveugler la dialectique simple du oui et du non qui vient tout régir. Et cette rupture radicale entre les deux mondes montre que tout ce qui se rattache à l’un est forcément contraire à l’autre. Le dedans et le dehors deviennent alors ici et ailleurs, la prison est le côté négatif et l’autre est justement le monde extérieur. « Du fond de cette cage, de cette prison ou d’une autre, d’ici ou d’ailleurs … »(p.63)

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La prison est décrite comme une entité, un tout. Elle isole du reste du monde (« univers », « monde », « armure »), et donne l’impression d’être ignorés et oubliés. Ces mots sont représentatifs d’un ensemble, toutes les prisons procure ce même sentiment, elle exclut. « C’est comme un puits du fond duquel vous regardez vers le haut, vers le ciel, vers la terre, et là, dans l’ombre, vous attendez … » (p.49-­‐50) L’attente dont parle le détenu est caractéristique de deux mondes bien distincts et dont le seul repère est celui que l’on retrouvera un jour. « La prison, cette mère porteuse artificielle et dégénérée qui hait tant la vie dans ses embryons qu’elle ne souhaite qu’enfanter des monstres »(p.24) La prison est présentée ici comme le corps d’un « monstre » qui « étouffe », qui « broie » et qui « digère ». La « cage » montre cette captivité en son « ventre ». Elle est la mère porteuse d’une certaine animalité. Ce qui montre qu’elle déshumanise. « Au grincement sinistre et significatif de la lourde porte se refermant sur moi succède peu à peu un silence de fin du monde … »(L’envolée, N°25) Les détenus emploient de nombreuses métaphores obscures et morbides, c’est une « pénombre », un « enfer ». On ressent aussi le sentiment d’enfoncement (« tunnel », « trou », « gouffre »). « Ce mot RIEN comme une main morte, un corps sans chair, figé là entre quatre murs, en attente, dans le vide et l’abîme de soi » (p.74) Ce qui est le plus choquant, c’est l’extrême solitude, un détenu parle même de son enfermement dans un « tombeau » comme pour qualifier une « mort lente ». « Le temps me fait penser à l’eau… Il devient fluide, il devient insaisissable, on croit le tenir, se l’approprier mais il s’écoule ailleurs». (p.144) Le temps semble être la notion qui gère toute la vie carcérale, cependant il semble leur échapper, et dans ce passage, ce sont les murs qui portent le temps. On y voit retranscrite leur peur, surtout celle de ne plus maîtriser leur vie. Les murs deviennent la plus importante des symboliques de leur enfermement : ils sont les témoins de leur quotidien. Les murs deviennent les témoins du temps qui s’écoule et le symbole physique de la barrière avec l’extérieur qui les écrase dans leur monde. On peut aussi se rendre compte que les barreaux, les portes, les cloisons se personnalisent et deviennent des compagnons de leur vie carcérale. Les contraintes physiques liés à la prison font que les détenus sont très proches de ce qui les entoure, au point que souvent elles leurs confèrent des facultés humaines : les murs « parlent », « transpirent », sont « tristes » puis ils « écoutent » et « tolèrent » la vie dans ses lieux. On remarque le paradoxe entre le fait que le prisonnier exprime, d’un côté la menace d’une structure qui le tue, puis d’une autre la personnalisation les lieux en leur donnant une grande importance dans sa vie carcérale. Est-­‐ce une fatalité pour garder un semblant d’équilibre dans ces lieux ? À la fois haïr et aimer : l’un pour ne pas légitimer cette fatalité et l’autre pour la rendre vivable ?

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Les murs comme garant d’un passé carcéral « Murs, murs, vous auriez tant à dire si vous pouviez parler, Exprimant les soupirs de tous les enfermés Faisant entendre au-­dehors les regrets étouffés Les souvenirs perdus de tous les condamnés ». (p.175) Beaucoup de détenus parlent de graffitis ou de tâches laissés d’un ancien détenu (« toutes ces lettres effacées… »), ainsi que le matériel comme les couvertures ou les oreillers, certains sentent la présence du passé. « D’autres avaient souffert, gravé leur désespoir, crachés leur haine … étaient morts … avant moi. » (L’envolée N°25) Une collectivité carcérale se crée autour de ces souvenirs, en plus de la présence des murs, les traces qui y sont inscrites rappellent les souffrances ressenties par tous, de façon comparable, que ce soit dans le présent ou le passé. Le sentiment de ne pas bouger, que les choses se répètent inlassablement sont d’autant plus accentués. Ainsi, le détenu a l’impression de faire déjà partie des murs et du passé, et ils doivent vivre avec cette crainte. Le monde extérieur pour garder des repères Le monde extérieur représente un temps passé mais aussi un temps présent qui s’écoule sans eux. On ressent beaucoup que le fait de vivre se s’attribue qu’au monde de dehors et le détenu doit vivre dans ce « manque perpétuel ». « On est comme des fantômes qui attendent que la vie veuille bien les rependre ». (p.34) Ainsi les regards vers l’extérieur leur permettent d’atténuer ce manque et de garder des repères dans leur propre monde. Chaque élément qui rentre dans leur cellule, comme des lettres ou des photos, sont les garants d’une vie à l’extérieur. Tout est démultiplié : l’attachement à ces objets, leur importance vitale… La fenêtre est la seule ouverture, bien que le présence des barreaux rappelle sans cesse la situation d’enfermement ; elle est aussi la seule vision vers ce monde de vie : le ciel est « immense », et elle leur rappelle la petitesse de leurs corps. Ce qui marque la souffrance de l’impuissance face à un monde dont le détenu n’est plus l’acteur (« assistant impuissant à leur déchéance, ils me ressemblent »). Le besoin de voir l’extérieur est sans cesse exprimé, ils mettent leurs corps à contribution : il « s’écartèlent », se « compriment » pour pouvoir accéder à des images de dehors. (voir texte en annexe 5 ) Cela semble leur permettre d’échapper à cette réalité carcérale, ce sont les grilles et les murs qui leurs disent sans cesse qu’ils sont reclus physiquement et psychologiquement. « Je mange debout devant ma glace, pour voir quelqu’un, pour ne pas manger seul » (p.38)

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La recherche de l’extérieur marque un manque de repères sociaux acquis dans le passé, ce qui engendre chez le détenu le besoin de se créer des repères matériels et temporels. C’est pour cela qu’il personnifie les espaces qui deviennent les symboles de leur quotidien, au point que l’on pourrait penser que l’architecture devient le prolongement de leur corps, le reflet de leur souffrance. Ainsi parler des murs revient à parler du détenu. Identité Le retour à l’enfance « Les prisonniers finissent par tous se ressembler entre eux comme des galets que le flot a longuement roulés les uns contre les autres » (p.112) En prison, on assiste à l’homogénéisation des comportements individuels. En effet, les contraintes spatiales et la réglementation stricte ne laissent guère de liberté aux détenus, ainsi les comportements sont souvent les mêmes. Nous pouvons parler de retour à l’enfance car le détenu ne prend plus aucune initiative, il devient complètement dépendant d’une administration et des contraintes spatiales. Beaucoup d’entre eux disent suivre à la lettre les règles pour éviter le quartier disciplinaire, mais on remarque que la plupart se posent la question de savoir quelle est leur place dans ce perpétuel acquiescement. Ils ont l’impression de perdre, au fil du temps, leur humanité (sachant que la liberté individuelle est peut-­‐être de dire « non »). (Voir annexe 6 relative à la promiscuité) Le détenu comme objet « Sensation d’être délestée de toute possession, d’être dépouillés de mes particularités d’individu. Je n’étais plus qu’un nom, un prénom ; bien pire, un numéro d’écrou » (p.18) Le fait d’être des individus considérés dans un tout, montre qu’au fil du temps les détenus ne se reconnaissent plus en tant que personne, avec leur propre identité ; ils se voient comme des objets d’un organisme qui les manœuvre. Au final, ils se retrouvent toujours face à la dure réalité de leur vie carcérale, celle de n’être que des numéros d’écrous personnifiés par des délits commis. L’individu est réduit à un numéro ou un dossier (pour lui-­‐même et les surveillants, travailleurs sociaux …). Par exemple les mandats de dépôts (argent que le détenu possède) deviennent la marque d’une certaine hiérarchisation à l’intérieur des murs. Certains auront plus accès à des biens que d’autres, ce qui conditionne une nouvelle inégalité. Le regard des uns sur les autres montre par la même occasion lors condition, les détenus ont l’impression de n’être que des « automates ». Un des faits marquants de ce sentiment est lorsqu’un prisonnier parle de son transfert, il se voit comme une « marchandise » et à l’impression de ne rien contrôler, il devient le simple objet d’une administration.

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Le détenu comme animal « Les anomalies particulières qui les distinguent peu à peu des hommes libres sont surtout une espèce de réserve craintive, d’hésitation sournoise dans les gestes et les paroles, une sauvagerie rancunière. » (p.112) Dans ce passage, le détenu montre que non seulement le fait d’être en prison transforme l’individu en animal aux yeux de l’ « homme libre », mais aussi que la prison le conditionne pour qu’il assimile ce sentiment. La rancœur face à ses conditions de vie imposées transforme l’individu. L’extrême isolement amène le détenu à devenir sauvage. Il tente donc de lutter pour contrer ces « transformations » qui le sépareraient encore plus du monde libre. Il doit lutter quotidiennement contre la sensation d’agression pour ne pas devenir lui-­‐même agresseur. Le détenu face à la mort Comme on a pu le voir plus haut, beaucoup de détenus utilisent des termes morbides et comparent la prison à l’ « enfer » comme s’ils étaient déjà morts. Ils se comparent à des « fantômes », des « morts vivants ». « Est-­ce la vie ? Quel triste sort de se voir séparé du monde… De se sentir à l’étroit comme dans une tombe ! Cloîtré. J’ai trop de mal à gérer l’angoisse que l’incarcération finit par engendrer. Je touche du front, des joues, des mains, le mur le plus imprévu, le plus sourd ! J’ai beau regarder en l’air, histoire de changer d’air, je ne vois que ces murs gris, celui de la souffrance que l’on m’a infligée, à moi, « inapte à ce monde ». » (p.67) La prison procure une mort lente aux détenus ; le constat morbide qui les entoure ne cesse de leur rappeler. La vie et le mort sont souvent confondus car la remise en question de l’une implique l’autre. Le silence et la solitude nourrissent leur peur de mourir et d’être oubliés. Cette peur de l’oubli est conditionnée par la diminution des liens sociaux, car même s’ils partagent leur cellule avec des codétenus, ces derniers ont les mêmes sentiments qu’eux et ne peuvent donc pas les rassurer. Ce constat renvoie toujours à un contexte de déshumanisation. « Tout homme a besoin de la reconnaissance de l’autre pour se reconnaître soit même » (Sartre), et dans le cas présent, en étant coupés totalement du regard extérieur, ils se sentent inutiles et à peine vivants : « Je ne suis personne car personne ne me voit. » Est-­‐ce finalement le fait de côtoyer la mort au quotidien qui rappelle que la vie est encore là ? Triste atmosphère !

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Chapitre 13 : Conclusion d’un monde à part « Cette inaptitude à réaliser plus loin que l’instant. Vision de clichés en clichés, de plus en plus grossiers. Régression de la taule. Comme des animaux inaptes à revivre dans leur ancien environnement. C’est d’ailleurs ainsi qu’on justifie l’existence des zoos : les animaux captifs ne peuvent être rendus à la liberté. Ils crèveraient, rejetés par leurs congénères, incapables de redevenir des animaux libres. » (p.151) Personne ne peut savoir réellement ce qui se passe derrière les murs d’une prison ; vivre l’expérience d’un détenu serait la meilleure expertise. Mais il est important de voir sortir des témoignages, des images, car la prison reste depuis trop longtemps dans l’ombre, et cela contribue à l’oubli d’une population dont la pire crainte est justement que nous les oubliions. Ces recherches m’ont permis de découvrir une partie de l’intérieur des murs ; relever l’intégralité d’un quotidien demeure impossible, car il faudrait « vivre » nous-­‐mêmes en ces lieux pour comprendre ces choses qui sont parfois inracontables. Qui peut dire si dans l’autobiographie certaines choses ne sont pas amplifiées ou diminuées, ou même oubliées. Dans tous les cas, l ‘expression personnelle en général ne peut se vérifier, mais elle permet de créer des témoignages. Nous pouvons dire que la réalité carcérale est un monde à part entière qui ne cesse de se renfermer sur lui-­‐même car il génère chez l’individu incarcéré des mécanismes de défense au quotidien, à la fois physiques et psychologiques. L’enjeu est d’en avoir conscience et non de se demander s’il s’agit du bon degré d’expression. A n’importe quel degré, la prison est porteuse de souffrance et renferme en elle la plus grande des incompréhensions. « Le mot clé de la philosophie de Sartre, comme pour celle de Kierkegaard, est le mot « existence ». Mais ce terme ne reflète pas uniquement le fait d’exister. Les plantes et les animaux aussi existent, ils vivent eux aussi, avec cette différence qu’ils n’ont pas à se soucier de ce que cela signifie. L’homme est le seul être vivant qui soit conscient de sa propre existence. Être un homme, ce n’est pas être comme une chose. » Le Monde de Sophie Au risque d’être frustré de ne pas en dire assez. On ne peut pas connaître la prison comme on ne peut pas connaître les mécanismes de l’Homme, mon discours devient alors illusoire car je n’ai jamais été détenu. « Cette vie ne se raconte pas ; elle est vide, elle est creuse. C’est une tranche de quelques années à rayer, à supprimer brutalement. Le corps sort de cette aventure vieillie et lasse mais il n’a pas vécu. » (p.24) Paroles de détenus

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ANNEXES

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Annexe 1 : 1. Statistiques délivrées par la Direction de l’Administration Pénitentiaire recueillit par Annie Kensey (Sociologie la prison de Philippe Combessie).

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Taux de récidive s'établit en moyenne à 34%. Selon: -­‐ +50ans:18% et les -­‐25ans: 41% -­‐ Femmes: 0% homme 35% -­‐ Mariés : 24% / Célibataires : 39% -­‐ Étranger: 22% / Français : 36% -­‐ Jamais été en prison (23%), ceux qui avait été incarcérés (61%) -­‐ auteurs de délits (48%) et auteurs de crime (26%) -­‐ Fin de peine (40%), conditionnelle (23%) Annie Kensey

2. Le concept de dangerosité : Source : Rapport d’audition de la Fédération de Psychiatrie concernant l’expertise psychiatrique pénale (1) / UNIL_Cours de Psychiatrie pénale_L’évaluation de la dangerosité _ Dr Lustenberger (DUPA Lausanne) (2).

« L’expertise psychiatrique pénale est sensée jouer un rôle de filtre entre hôpital et prison, ce statut délicat étant régi par un ensemble de règles et de précautions à prendre. Le nombre de personnes présentant des troubles psychiques dans les établissements pénitentiaires notamment dans les prisons françaises ne cesse de progresser. » (1) Historical Clinical Risk (HCR-­‐20) (2) Il s’agit dans ce cours d’établir le potentiel de dangerosité d’un individu par des facteurs historiques, cliniques et de gestion des risques. Ils tiennent en compte de l’histoire passé du patient, son appréciation clinique, et la gestion du risque probable dans le futur. En voici les facteurs historiques :

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violences antérieures premier acte de violence produit dans la jeunesse (la précocité d’un acte de violence) instabilité des relations intimes (multitudes de relations courtes, intenses conflits dans une relation de longue durée, pas de relation : un bon réseau et soutien social agissent comme modérateurs du risque de violence). Problèmes d’emploi (le chômage et un bas revenu ont démontré une association avec la récidive de violence). Problèmes liés à l’utilisation de substances psycho actives (celles-­‐ci confèrent un risque de violence plus grand que le fait de souffrir d’un autre trouble psychique). Maladie mentale grave (poids prédictif par rapport à la combinaison « homme/jeune/bas niveau socio-­‐économique ». Psychopathie (impulsivité, poly criminalité, cruauté, absence de remords et d’empathie) Inadaptation durant la jeunesse (avant 17 ans dans le domaine scolaire, familiale ou communautaire) Trouble de la personnalité (troubles de type borderline et antisocial (symptômes de colère, d’impulsivité et d’hostilité). Echec antérieur de la surveillance (capacité de changer et de contrôler son comportement à la faveur d’une période probatoire (sursis, peine suspendue ... tentatives d’évasion).

Son application dans le domaine pénal : -­‐ expertise avant jugement : soutien de l’évaluation qualitative du risque dans les conclusions de l’expertise / structure la proposition d’un plan de gestion individuel du risque. -­‐ Prise en charge carcéral : évaluation continue du risque de violence / aide à la focalisation des interventions thérapeutiques et de la préparation à la libération. -­‐ Décisions de libération ou d’assouplissements de régime : évaluation du risque résiduel, conditions de libération, plan de gestion du risque individuel accompagnant la libération.

Annexe 2 : Les lois (jurispedia.fr) 2007 loi Adati sur les peines planchers : la récidive d’un même crime ou délit est condamné par une peine double sans que le magistrat puisse diminuer la peine. Sauf en cas d’une décision « spécialement décider » invoquant « les circonstances de l’infraction, la personnalité de l’auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion ». Mais assez rare lors des comparutions immédiates. Les situations aggravantes : « Les circonstances aggravantes sont des faits dont la survenance liée à la commission d'une infraction augmente la peine dont est passible son auteur » Par exemple un viol sur mineur sera plus condamné que sur majeur, savoir si il y a préméditation. Les circonstances aggravantes peuvent tenir à la qualité de l’auteur de l’infraction (ex : qualité de fonctionnaire), à la pluralité des auteurs ou des complices de l’infraction (ex : vol en réunion). 2003 : loi visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe. 2004 : loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. 2006 : loi renfonçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs. 2007 : loi relative à la prévention de la délinquance

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Annexe 3 : relatif à l’expérience de Karim

Dessin de Karim , sa prison Image satellite de la Talaudière (Google maps)

Dessin de Karim, sa cellule. Image cellule de La Talaudière (www.reporter_photographe.com/prison.htm)

Les couloirs de la prison de La Talaudière La cour de promenade de La Talaudière (www.reporter_photographe.com/prison.htm) (www.reporter_photographe.com/prison.htm)

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Annexe 4 : Reportage délivré par le journal Le Monde. Cette vidéo traite du corps incarcéré des détenus de longues peines. Elle se découpe en différents thèmes : -­‐

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le « mitard » (cellule disciplinaire) :« Qu’est ce que je vais bien pouvoir foutre de moi-­‐même ? ». Dans cette partie on peut voir une pièce d’environ 8 m2 vide et sans miroir. Le détenu est complètement seul, il est dans l’incapacité de se mettre à la fenêtre ni pour voir l’extérieure ni pour voir passer quelqu’un. Coupé de tout contact et de vision, il s’agit de l’espace le plus porteur de rupture. Les murs deviennent la confrontation à soi-­‐même, une mise à l’écart. Il n’a même plus la possibilité de se voir lui-­‐même, plus aucune tentation ni même de « distraction », c’est l’enfermement de l’esprit. La cellule : ce qui est remarquable, c’est qu’elle est composée avec un seul miroir en hauteur. Ici se pose la question de la relation avec son propre corps. Le détenu ne peut quasiment jamais se voir dans son intégralité. Le rapport au corps change, en prison il n’a plus la possibilité d’avoir une compagne qui vous regarde et vous admire. Le regard de l’autre n’a pas d’importance en terme esthétique. La beauté du corps devient désintéressée.

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La sexualité : « Lorsque tu es seul, tu dois accepter ces mains sur ton corps ». en détention le plaisir partagé avec une femme devient inexistant. La sexualité se pratique seul et clandestinement. Se pose ici deux problématiques : celle de l’intimité absente qui pousse le détenu à être sans cesse dans la gène de ses actes, et celle de l’assimilation d’une sexualité solitaire qui est contradiction avec une sexualité normale à l’extérieur, celle qui est partagé. Le culte du corps contre la maladie : le prisonnier à peur de « pourrir », tout ce qui lui reste au final c’est son corps. Le moindre signe de maladie devient une déchéance. On peut voir qu’à terme, certains peuvent perdre leurs cheveux par anxiété, la vue diminue car on ne voit jamais au loin, l’horizon est seulement intra-­‐muros. D’autres perdent des dents, dût à une nourriture souvent peu consistante. « On ne sourit à personne donc on ne s’en pas compte ». Pour combattre la maladie, le détenu fait appel au culte du corps. Plus le corps est fort, plus il pourra combattre les infections, c’est une carapace. Mais c’est aussi ton seul argument de force face aux autres. L’esthétique n’a plus d’importance, ce qui compte c’est la protection, car ton corps devient ton seul combat. Le suicide : « Je ne gérais plus ma vie mais je pensais encore gérer ma mort », « Je sortirais d’ici même si c’est les pieds devant », « Faîtes nous mal une bonne fois pour toute et qu’on en parle plus ». Le détenu est condamné à la fatalité d’un lieu qui ne lui permet pas de vivre mais de survivre. Comme pour faire voir l’injustice d’une telle condamnation, certains détenus voient l’acte du suicide comme une dernière rébellion, de rappeler qu’il lui reste encore cette ultime liberté. La souffrance du détenu est tellement forte face à la fatalité, qu’il préfère un dernier acte plutôt que de continuer une vie sans but.

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Annexe 5 : Extraits les plus significatifs de Paroles de détenus « À partir de ce moment, plus aucun moment d’intimité ! La promiscuité d’une existence à plusieurs dans moins de 9m2, 22 heures sur 24. Le regard permanent d’une surveillance incessante. Ce rituel qui se renouvelle régulièrement est aussi le moyen d’affirmer le statut de dominé, de soumis, de sous-­‐homme qu’est le prisonnier, même s’il n’est que « prévenu », c’est-­‐à-­‐dire « présumé innocent » . Humiliation, perte de l’identité, privation de la liberté, de l’action, du mouvement s’accompagnent d’une perte de sa conscience de citoyen, d’homme. L’individu dérive de l’homme responsable vers l’animal plein de haine et de rage, solution facile pour survivre en prison. Il se pose la question suivante : la vie en prison n’est-­‐elle pas que survie ? Peut-­‐on faire de l’épreuve de la prison une épreuve constructive dans la vie d’un homme ? Peut-­‐on ressortir grandi, renforcé, d’un passage en prison ? La prison peut-­‐elle être profitable ? Il est nécessaire de préciser que le système carcéral actuel est basé sur la notion prioritaire de sécurité. Le système se doit de maintenir enfermés les individus qui lui sont confiés. Les notions de réinsertion, d’éducation, de prise de conscience sont seulement satellites et ne doivent à aucun moment entraver l’objectif essentiel ! Vivre en prison, c’est ne jamais cesser de se battre. Conserver son identité, le respect de soi-­‐même (lié au respect général), une autonomie, un espoir, a culture de l’espérance. Se battre pour rester en contact avec la réalité du dehors, se battre pour garder un pied dehors, se battre pour trouver tous les jours la force de se lever et de trouver du soleil dans cet univers gris froid ! » Jean Paroles de détenus (p.21) « Juste au dessus de ma tête, les barbelés, infestés de petites laines bien aiguisées qui me rappellent que je passerais un mauvais quart d’heure si jamais l’idée me venait de les traverser… Le ciel, entrecoupé par les câbles de sécurité « anti hélicoptères », change de couleur. Le corbeau me regarde. Enfin, on dirait. (…) C’est un après-­‐midi idéal pour se promener au bord des falaises, le vent sur le visage, et le goût salé de la mer sur les lèvres. Et voilà, je rêvais de nouveau, et comme s’ils pouvaient lire dans mes pensées, les réflecteurs qui éclairent le mur qui entoure la prison se sont allumés. Bientôtt il fera nuit. Des mois, déjà, que je ne vois pas les étoiles. La lumière des réflecteurs est trop puissante. Peut-­‐être que … si je m’allonge par terre, sur les dalles, et que je colle mon visage contre le mur de cette cellule, juste sous la fenêtre, je pourrai chercher un angle où la lumière sera reflétée par la vitre, et … qui sait… ! je pourrai peut-­‐être voir quelques-­‐uns de ces petits points brillants qui nous font tant rêver… Mais j’avais oublié le barbelé, au-­‐dessus de la fenêtre… Ce qui brille, ce ne sont pas les étoiles. Ce sont des lames. » Idora Paroles de détenus (p.35)

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Annexe 6 : relatif à la promiscuité en prison, Psychosociologie de l’espace de Gustave-­‐ Nicolas Fischer « À l’inverse de la distance, la promiscuité peut-­‐être interprété comme signe d’absence de pouvoir. Ceux qui vivent entassés ne peuvent établir de distance (...) Vivre entassé, c’est exister comme être indifférencié, c’est-­‐à-­‐dire comme quelqu’un qui n’est ni identifié, ni identifiable. » (p.61) La perte de hiérarchisation et l’impossibilité de marquer de distance avec les autres implique le « conditionnement ou l’aliénation dans les gestes du quotidiens ». Le besoin vital de marquer un territoire devient impossible, car celui ci doit être géré par une mise à distance. Ne pas pouvoir se différencier conduit à la perte de son identité.

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RETOUR D’EXPÉRIENCE Étudier les prisons est un enrichissement personnel car il m’amène à me poser la question à savoir, qu’elle est la place de l’architecte dans la société. L’évolution des prisons dépend avant tout de notre statut de citoyen, avoir conscience du problème implique un engagement. L’enjeu est aussi politique. Mais je m’évertue à penser que le problème est en amont de la prison, car l’enlisement de la situation ne peut pas évoluer par la multiplication des murs. Nous avons vu que l’assimilation d’une culture carcérale est en complet décalage avec celle de l’extérieur. Assimiler prison à réinsertion est donc se contredire. La fermeture d’un monde par rapport à l’autre n’a qu’un rôle de punition, elle pousse à la différenciation et à la stigmatisation d’une population par rapport à l’autre, en aucun cas elle pousse au pardon réciproque. Il est clair que la solution serait l’ouverture, hors le contexte actuel ne prône que la neutralisation. Le problème vient peut-­‐être en amont, celui d’une remise en cause totale de la symbolique du mur. Je suis persuader que l’architecture à un rôle à jouer dans les dynamiques sociales, et pour prévenir la délinquance elle doit offrir des espaces de qualité : des écoles propices à l’éducation, des logements adaptés à la collectivité …C’est surement utopiste d’imaginer que l’architecture peut résoudre le problème de la délinquance car elle relève avant tout de décision politique. Mais avoir conscience que tout est lié c’est déjà faire un pas. Faire évoluer l’architecture est vitale car on se retrouve vite confronté au cas des prisons, où nous savons qu’elles ne fonctionnent pas, mais la conjoncture fait qu’on ne contrôle plus les erreurs assimilés dans le passé, la situation semble bloquée. Même de chercher à savoir ce que les détenus ressentent, si l’espace peut être modifié pour de meilleures conditions, ce n’est pas la solution car c’est le concept d’enfermement qui est à remettre en cause. Les murs restent le symbole d’une rupture : le mur entre les deux Corée comme héritage de la Guerre Froide, le mur de l’ « apartheid » en Palestine ou encore la barrière de Ceuta (détroit de Gibraltar), symbole du fossé entre l’Europe et ses voisins du Sud. « Nos réactions ne sont que les fruits du milieu, de l’heure, de l’action. Quand on est devant les autres, dans l’enfer d’un HLM ou d’un bidonville ou dans la foule anonyme, méprisante, la solution la première, abrupte, est d’abord d’agresser. J’entends démontrer sa différence, sa marginalisation ; briser en mille morceaux les règles du jeu, abattre les murs de la connerie, des lois, des préjugés, faire admettre le fait qu’on existe, le fait qu’on EST ! » (p.99, Paroles de détenus) Bien que l’expérience personnelle des murs ne puisse pas être objectivement exprimée, ce rapport d’étude m’aura permis de rendre compte que l’architecture est le prolongement de l’individu et vice versa. Cette corrélation prend alors toute son importance dans les dynamiques sociales.

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REMERCIEMENTS Je tiens particulièrement à remercier Karim pour le temps qu’il m’a consacré, bien que je regrette maintenant de ne pas lui avoir consacré plus de place dans mon rapport d’étude. Puis, Sébastien Thuilleaux pour sa sincérité et son approche pédagogique du droit pénal. Enfin, je remercierais ma sœur qui se bat pour la communauté et la rupture des barrières sociales à l’autre bout du monde.

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BIBLIOGRAPHIE Ouvrages de référence Michel Foucault, Surveiller et Punir, tel Gallimard, 1975, 360p. Philippe Combessie, Sociologie de la prison, La découverte, 2009, 130p. Sous la direction de Jean-­Pierre Guéno, Paroles de détenus, Librio, 2000, 188p. Autres ouvrages

Jostein Gaarder, Le monde de Sophie, Points, 1995, 618p. Gustave-­Nicolas Fischer, La psychosociologie de l’espace, Que sais-­‐je ?, 1981, 124p. Robert Francès, La perception, Que sait-­‐je ?, 1981, 126p. Gaston Bachelard, La poétique de l’espace, Quadrige, 2007, 214p. L’envolée, Peines éliminatoires et isolement carcéral, 2009 Revue L’envolée N°25, mars 2009 Rapport de maîtrise, Écrire pour exister, Université Paris VIII (développement social), Anne-­‐Julie Auvert (http://www.prison.eu.org/spip.php?rubrique520)

Films

Jacques Audriard, Un prophète, 2h35, 2009 Stanley Kubrick, Orange Mécanique, 2h16, 1971 John Crowley, Boy A, 1h40, 2009

Reportages en image Envoyé Spécial, France 2, reportage sur les images interdites de Fleury-­Mérogis, 2009 Récit multimédia, Le Monde.fr, Le corps incarcéré, 2009 Rencontres Entretien avec Sébastien Thuilleaux, avocat à Lyon (droit des familles, droit des mineurs, droit pénal) et intervenant en cours de Droit à l’ENSAL. Rencontre avec l’association GÉNÉPI à l’ENTPE, sensibilisation au milieu carcéral. Entretien avec Karim, retour d’une expérience carcérale. Site internet http://www.jurispedia.fr (droit pénal) http://www.justice.gouv.fr (ministère de la Justice, accès aux données du DAP) http://www.musee-­‐prisons.jusitce.gouv.fr (musée des prisons) http://prison.eu.org/ (ban public) http://www.oip.org/ (observatoire internationale des prisons) http://www.wikipedia.org/ (encyclopédie libre sur internet) lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/.../0000.pdf (la dangerosité)

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