LE SOFTINTERNATIONAL 1450

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Nangaa interdit de $ Page 2

international

LE PLUS FORT TIRAGE | LA PLUS FORTE VENTE | LA PLUS FORTE AUDIENCE | DE TOUS LES TEMPS

SINCE 1989 N°1450 | JEUDI 28 MARS 2019 | 24 PAGES €7 $8 CDF 10500 | FONDÉ À KINSHASA PAR TRYPHON KIN-KIEY MULUMBA

Ligne de front www.lesoftonline.net

www.lesoft.be

L’UE

cogne

Washington attend d’agir

I

ls ont beau à gorges déployées hurler nationalisme, souverainisme, intangibilité des frontières, et..., que sais-je encore?,

le monde est un village global (The Global Village), ce fameux petit village planétaire de ce philosophe canadien visionnaire Herbert Marshall McLuhan pour qui le «message c’est le média», qui prédit avant l’heure l’Internet (World Wide Web), explique que ce qui se passe chez notre voisin vous concerne et nous concerne tous. Ce village commun que rendent

désormais si bien les réseaux sociaux... Ainsi, quand vous n’avez de cesse de vous gaver de lait, de viande et de vin et que les voisins meurent de soif et de faim, ils vous envahiront un jour ou l’autre assurément pour réclamer leur part. Quand chaque jour, vous malmenez votre épouse et vos enfants et que vous vous montrez incapable de gérer votre foyer en

bon père de famille, le jour n’est pas loin où les voisins vont pousser votre porte pour tenter d’y faire régner la paix. C’est ce qui a fait construire et prospérer le principe du droit (le devoir) d’ingérence... (humanitaire) qui prône reconnaissance du droit des États à violer la souveraineté nationale d’un autre État en état de violation massive des droits de ses citoyens ou, c’est

tout comme, l’obligation morale reconnue à un autre État de fournir l’assistance à un autre en situation d’urgence humanitaire. Lorsqu’on est un pays au cœur et au centre du Continent et qu’on a la taille du Congo avec à ses frontières neuf pays voisins, on a des responsabilités et lorsque son sol et son sous-sol recèlent de ressources aussi massives et stratégiques pour

l’avenir de l’Humanité, ces responsabilités se décuplent. La classe politique congolaise en est-elle consciente? Pas sûr! Pourquoi (comment) Patrice Lumumba, le premier Chef du Gouvernement du Congo fut assassiné sans avoir pu gouverner? Pourquoi (comment) Mobutu s’empara-t-il du pouvoir (suite en page 8). T. MATOTU n

LE SOFT INTERNATIONAL EST UNE PUBLICATION DE DROIT ÉTRANGER | AUTORISATION DE DIFFUSION EN R-DCONGO M-CM/LMO/0321/MIN/08 DATÉ 13 JANVIER 2008


news |

Ligne de front Le président de la Céni ne pourra plus faire la moindre transaction en dollars

D

ura lex sed lex, dure est la loi, mais c’est la loi. Blacklisté déjà par Washington - interdit de séjour sur le territoire américain par un acte du Département d’État américain, ministère des Affaires étrangères Nangaa a été rattrapé par le Trésor américain (ministère des Finances) qui lui interdit de toucher un dollar ($) américain et le Trésor américain interdit quiconque (privé, homme d’affaires, banque,

d’être poursuivi par la justice américaine. Il en va de même de son vice-président Norbert Basengezi Kantintima et du fils de celui-ci au nom bien sonné, Marcellin Basengezi.

Corneille Nangaa Yobeluo. Blacklisté. DR. etc.) de traiter avec Corneille Nangaa Yobeluo dans la devise US. En clair, le président de la Centrale électorale nationale indépen-

Yumbi à nouveau repoussé

D

éjà embourbé dans la crise des Sénatoriales et, du coup, de l’élection des gouverneurs de province dont nul ne sait présentement si elle aura lieu ou pas, voilà que le gouvernement lui-même prend l’initiative, mercredi 27 mars 2019, d’annoncer un nouveau report des scrutins (législatives nationales et provinciales prévues le dimanche 31 mars) dans le territoire de Yumbi (province de Maï-Ndombe), l’une des quatre circonscriptions où les scrutins de décembre dernier étaient reportés par la Commission électorale nationale indépendante. «Le retour de nos compatriotes est timide. D’où, si la CÉNI tient à organiser les élections le 31, il y aura un faible taux de participation», explique Basile Olongo, le ministre intérimaire de l’Intérieur pour qui, la CÉNI doit repousser de trois à quatre mois les scrutins à Yumbi dans l’attente du rapatrie-

ment par le HCR des populations congolaises réfugiées au Congo voisin. Pour la CÉNI, 66.223 électeurs ont été initialement répertoriés et étaient attendus pour élire un député national et un député provincial. À l’ouverture de la tripartite CNSA-Gouvernement-CENI, le vice-président de la CENI, Norbert Basengezi Kantintima a indiqué qu’il y avait encore des préalables à régler pour la tenue des élections à Yumbi. «À Yumbi, il y a encore des petites choses au niveau du ministère de l’Intérieur par rapport à l’administration mais cela n’empêche pas la tenue des élections si, encore une fois, nous sommes rassurés par notre gouvernement». Initialement prévues le 30 décembre, ces élections à Yumbi, Béni et Butembo avaient été repoussées pour raison des violences communautaires à Yumbi et d’Ebola à Beni et Butembo. ALUNGA MBUWA n

dante qui a fait disparaître 100 millions US$ au moins dans son processus électoral, n’a plus le droit de signer un chèque en US$ sous peine

INDEXÉ PAR TOUTES LES BANQUES $US. Outre cela, les avoirs Nangaa sont gelés, lit-on dans un communiqué du Département du Trésor américain tout comme ceux de Norbert Basengezi et de son fils Marcellin Basengezi mène grand train de vie. Pour Washington

dont on connaît la puissance dans la disposition d’informations ultra-sensibles, Nangaa et ses deux compères «ont gonflé de $US 100 millions les coûts du contrat de la machine à voter (...) fonds détournés et destinés à financer les opérations électorales» et à corrompre des animateurs des Institutions outre qu’une «partie de de l’argent aurait servi à l’enrichissement personnel des concernés». Conclusion immédiate: aucune banque sur terre ne saura plus jamais travailler avec ces

trois personnes. On rappelle comment des banques européennes, telle BNP Paribas, ont été ces dernières années sanctionnées par la justice américaine, condamnées à payer des sommes record et ont fini par rendre les armes. Condamnée en avril 2016 par un tribunal de New York, pour «falsification de documents commerciaux» et «collusion», BNP Paribas plaide coupable de deux chefs d’accusation avant de payer une amende de près de $US 9 milliards aux États-Unis. Quant à la Deutsche

Bank, citée dans la crise des subprimes, elle fut contrainte en septembre 2016 de payer aux autorités américaines une amende de $US 14 milliards. BNP Paribas était poursuivie pour avoir facilité des milliards de US$ de transactions avec le Soudan, l’Iran et Cuba, enfreignant ainsi l’«International Emergency Economic Powers Act», loi fédérale américaine de 1977 qui autorise le président des États-Unis à restreindre les relations commerciales avec certains pays.

T. MATOTU n

À Kigali visite pleine d’émotion

U

n moment d’émotion, le moins que l’on puisse dire. Kigali a mis les petits plats dans les grands pour accueillir Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo. Le Centre des Conférences de Kigali a été éclairé aux couleurs congolaises. Historique. Le nouveau Chef de l’État congolais veut briser les tabous. Aussitôt après son atterrissage, accueilli par le ministre rwandais des Affaires étrangères Richard Sezibera et après avoir passé les troupes en revue, il s’est rendu au Palais présidentiel, la résidence officielle de Paul Kagame où il a eu un premier tête-àtête avec le président rwandais avant de prendre part, avec lui, le lendemain, à l’ouverture de Africa CEO Forum, 7ème initiative du genre du groupe de presse Jeune Afrique. Puis, le voilà au musée du génocide. Gestes très appréciés par son homologue rwandais. Malgré des relations bilatérales histori-

«Notre ambition est de construire des ponts, pas des murs». DR. quement tendues, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo a autorisé l’ouverture et l’exploitation de la ligne Kigali-Kinshasa par Rwandair, la compagnie aérienne rwandaise, longtemps promise, jamais réalisée, par l’ancien gouvernement. «Les problèmes au Rwanda, dans de nombreux cas, deviennent des problèmes en RDC. Et l’inverse est aussi vrai. On ne peut pas résoudre ces

problèmes seuls», insiste Kagame. «Nos peuples sont déjà en avance sur nous, dans leur compréhension de l’intégration [africaine]. Ce sont les décideurs qui doivent comprendre désormais comment éliminer les conflits et faire fonctionner l’intégration régionale», poursuitil avant d’insister: «Nous avons assez de ressources pour régler nos propres problèmes». «Nous devons vous croire», lance-t-il à Félix Tshi-

sekedi après avoir salué les prises de positions du président congolais qui a promis de mettre terme à l’instabilité dans l’est de la RDC en s’attaquant aux milices qui y sévissent. «Nos pays resteront voisins pour toute la vie (…), se faire la guerre est donc une perte de temps», répond Tshisekedi, chantre d’un règlement des conflits au niveau sous-régional. «Évidemment, les conflits minent

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sérieusement le développement. Mais la résolution ne peut pas se faire d’Addis Abeba, siège de l’Union africaine. (…) Les sous-régions aujourd’hui ont acquis une influence importante en Afrique (…). Il faut accentuer leur rôle», insiste Tshisekedi. Sur la crispation des relations diplomatiques entre le Rwanda et l’Ouganda voisin, Kagame trouve «regrettables» que «les choses que nous tentons soient minées par de petites choses». Tshisekedi considère qu’il s’agit d’«un mauvais moment à passer, difficile, mais nous n’irons pas jusqu’à une escalade de violences entre les deux pays». «La RDC est là pour apporter ses bons offices. Notre ambition est de construire des ponts entre nous, pas des murs», ajoute le président congolais qui a rencontré Yoweri Kaguta Museveni, le président ougandais, le 22 mars, lors d’une visite à Kampala.

T. MATOTU n


Communication |

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news |

L’ANR désaffecte

tous ses cachots

C

cahier des charges. Olenghankoy peut désormais souffler. Le dernier prisonnier emblématique, Eugène-Diomi Ndongala, a été libéré. Aux conditions du ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba. «Le délinquant et prédateur sexuel» - ainsi que le qualifie le ministre - est interdit de se trouver près d’un lycée de filles, aux environs d’un port et d’un aéroport, ne devra pas quitter Kinshasa, devra se présenter deux fois par semaine au parquet de la Gombe, à Kinshasa, etc.

e fut sa promesse de campagne. Elle est réalisée. Il aura fallu la nomination d’un nouveau Patron des Services de Renseignements, l’Administrateur Général de l’ANR, Agence Nationale de Renseignements, Justin Inzun Kakiak, pour passer à l’exécution.

Le président FélixAntoine Tshisekedi Tshilombo n’en pouvait plus de ces «amigos» parsemés à travers la ville qui, rapporte-t-on, étaient les lieux de destination par excellence pour les combattants de l’UDPS, son parti politique, aussitôt enlevés dans la rue lors des manifestations d’opposition. Y avaitil séjourné lui-même pendant ses années de lutte? Ce n’est pas impossible... Mais le candidat Président de la République avait juré: la première décision qu’il prendrait, dès le lendemain de son élection, serait la fermeture de toutes ces cellules de l’ANR. Président du CNSA, le Conseil national du suivi de l’accord de la St Sylvestre, Joseph Olenghankoy s’est fendu mardi d’un tweet: «Je peux

TROIS CAS DE ET PRÉDATEURS SEXUELS. Dans une interview

mardi 18 mars à une radio commerciale, le ministre déclare: «Je ne sais pas si Diomi Ndongala est une priorité dans les questions de justice. M. Diomi n’est rien d’autre qu’un délinquant, un prédateur sexuel. Il m’a été demandé de lui accorder une libération conditionnelle. Il aura la libération conditionnelle avec d’autres qui sont dans la même situation. Il est exclu qu’il sorte tout seul. Il le sera dans des conditions très strictes: il ne pourra pas quitter Kinshasa, se présentera devant le parquet général de la Gombe tous les lundis et tous les vendredis pour pointer, ne devra pas se trou-

ver à 500 m d’une école de jeunes filles (...) et dans le cas où il ne respecterait pas ces conditions, on le reprendrait et on le jetterait à nouveau en prison à Makala». En clair, le ministre Thambwe invoque l’égalité des Citoyens devant la loi, le ministre ayant instruit ses services de voir des cas similaires de personnes civiles et militaires qui pourraient bénéficier de cette liberté conditionnelle. Les réactions n’ont pas tardé. Au moins une... Un courrier venant d’un porte-parole du Collectif des détenus politiques d’opinions et assimilés non emblématiques, signé Philippe

Nouvel Administrateur Général de l’ANR Justin Inzun Kakiak a exécuté l’ordre présidentiel de fermeture de ses «amigos». DR. me permettre d’attester que tous les cachots de l’Agence nationale de rensei-

gnements en sigle ANR sont désormais fermés». Ce fut dans son

non Tshibala a refusé - c’est désormais l’affaire de la recette de la vente de la 4G qui aurait rapporté près de US$ 1 million au ministre de tutelle Emery Ukundji qui l’aurait aussitôt mise dans sa poche sans distribuer une part à son personnel.

empoché la recette sans penser à son personnel (politique de cabinet mais aussi administratif). Certes, certaines catégories de personnel se sont vu remettre l’équivalent en CDF de US$200 voire de US$100. Par ces temps-ci où des scandales sont à éviter, le ministre des PTNTIC a, trois jours plus tard, tenté de désamorcer la crise en réunissant ses agents. «Non, le ministre n’a pas pris l’argent. Non, il va falloir revoir à la hausse ce qui revenait à chacun...».

4G: US$900.000 de rétrocession se volatilisent

A

aux PTNTIC, aux scandales succèdent des scandales... C’est désormais courant. Après l’affaire de l’arrêté transversal signé par le seul ministre Émery Ukundji qui lui a rapporté des millions de US$, alors qu’il aurait dû solliciter la signature de son collègue des Finances, et après la polémique née de la demande d’annulation d’un décret du Premier ministre réclamée par le DirCab du président Tshisekedi, Vital Kamerhe - ce que le Premier ministre Bru-

LANCEURS D’ALERTE. Mais c’était sans compter avec la vigilance des lanceurs d’alerte infiltrés au sein de l’administration publique. L’un d’eux, sur une radio, a balancé le ministre Émery Ukundji qui aurait

ALUNGA MBUWA n

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Ngoma Massundu. L’homme fait état de trois cas: Joseph Ndia Amsini, ancien ministre provincial de l’Environnement, province de l’Ituri. Condamné pour tentative de viol à 2 ans de SPP par la Cour Suprême de Justice. Le second est Tathy Bikamba Ngbale, ancien vice-gouverneur de la province de l’Équateur, condamné por viol par Cour Suprême de Justice à 36 mois de SPP. Le dernier cas est celui de Franis Delize, condamné en 2014 à 15 ans de SPP. à l’heure où nous allons sous presses, nul ne sait si ces autres «délinquants et prédateur sexuel» ont retrouvé l’air libre.

ALUNGA MBUWA n


enquête |

Comment Bobo rentre dans ses frais à l’Équateur

I

l est incontestablement un opérateur économique notable du cheflieu de la province de l’Équateur, Mbandaka. La candidature de Dieudonné Boloko Bolumbu alias Bobo élu mi-décembre 2018 cinquième gouverneur à Mbandaka fit l’objet d’un vif échange au sein du bureau politique de l’ex-majorité présidentielle. Le débat opposa les membres de l’élite politique locale aux caciques du pouvoir.

Le gouverneur Dieudonné Boloko Bolumbu alias Bobo et les ouvrages de l’État spoliés. DR.

Les premiers estimaient que cela souillait une province débordant d’intellectuels que de penser pouvoir désigner un homme d’affaires d’«aussi bas niveau intellectuel». Devant la controverse, l’homme fut testé en live, sans qu’il ne sache rien, ayant été piégé de devoir répondre en français sur un téléphone portable au micro ouvert. BOBO PASSE AU TEST. Délit d’initié? L’homme s’attendaitil à cette épreuve et avait-il, en l’espèce, été préalablement coaché? Contre toute attente, le test ne parut pas si peu concluant... et on accorda unanimement la mention «satisfaction». N’empêche! Connue pour son discours électrique, l’élite Mongo n’en démordait pas, tenant mordicus à déloger Bobo! Il fut même envisagé un véritable affrontement et, à terme, d’une mobilisation de la province... Une vidéo diffusée sur internet au lendemain de l’élection de Bobo Boloko Bolumbu à son retour d’une

visite dans la Capitale Kinshasa auprès de son ViPi ministre de l’Intérieur et à la veille de la campagne électorale pour la Présidentielle et les Législatives, visionnée des centaines de fois par des internautes, expose finalement le niveau intellectuel de ce gouverneur. Insignifiant... Mais, au fond, à l’ex-majorité pré-

sidentielle, il n’y a jamais eu de débat. La partie est toujours perdue pour ceux qui ne rallient pas des positions préalablement arrêtées dans une cellule d’étude stratégique où siègent quatre ou cinq individus qui font d’office leur position «celle de l’Autorité Morale à ne jamais remettre en cause sauf crime de lèse majesté».

En réalité, ces positions sont millimétrées et représentent des intérêts politiques à sauvegarder pour tel ou tel individu. Question de vie ou de mort... Ainsi, contre l’avis unanime de l’élite provinciale, Bobo et son colistier Thaty Bikamba levèrent l’investiture à la candidature et, la machine politique PPRD étant déployée, firent

carton plein: 21 voix sur 22 votants. DÉPUTÉS PRÉCARISÉS. Ce succès s’explique-t-il par le fait que Bobo est un natif de la ville de Mbandaka? Pas sûr... L’homme de l’immobilier qui dispose de chambres froides dans une ville noyée par les eaux poissonneuses du fleuve, fabrique

et livre des blocs de glace dans une contrée où la température est torride sur toute l’année, misait, depuis longtemps, sur ce poste et s’y était préparé. Alors que le versement de leurs émoluments arrive généralement en retard quand les élus locaux vivent dans des conditions extrêmes, l’opérateur économique se met au service d’aide et d’assistance, octroyant généreusement des avances ou livrant des paquets repas. Mais quand les précieux émoluments finissent par atterrir, peu d’élus surendettés passent à la caisse de l’homme d’affaires, remettre les comptes à zéro. Du coup, ils restent redevables... à vie. L’un des deux gouverneurs du grand Équateur - avec Pancras Boongo de la Tshuapa (capitale Boende) - à avoir été proclamés élus par la CÉNI à la Chambre basse aux élections du 30 décembre, Boloko Bolumbu ne souhaite pas s’arrêter en si bon chemin. Il se demande en réalité ce que lui, Mongo, viendrait faire dans cette ville de Kinshasa où il ne serait qu’un homme parmi d’autres alors qu’il est, le long du fleuve, «le roi de PiliPili Libende», autre nom de Mbandaka. Bobo veut rempiler à la tête de sa province. Pour cela, il compte sur ses paquets cadeaux distribués aux élus mais, cette année, à en croire des originaires, il a misé spécialement, sur des maisons qu’il aurait fait construire comme dons à offrir à un grand électeur contre un bulletin vote. À Mbandaka comme dans tout le Grand Équateur ou ailleurs au Congo, les candidats à un scrutin au second tour savent parfaitement comp-

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ter. Ils ne rechignent pas à mobiliser US$ 500.000 voire US$ 1 million pour se garantir une victoire. À Lisala, province de La Mongala, Grand Équateur, le porte-parole de la Majorité présidentielle sortante et Président du Conseil d’administration de l’entreprise publique d’électricité Snél, André-Alain Atundu Liongo dénonce avec force auprès du procureur général de la Cour d’appel de Lisala, l’offre de prix qu’il aurait reçue de quatre députés provinciaux s’il espérait être élu Sénateur. Les Députés? LA RÉCUP DE FONDS. Célestin Matili, Pacheco Mayombe, Mosala et Aimé Bokungu. Chacun lui réclamait chacun US$ 10.000 et US$ 15.000. De n’y avoir pas répondu favorablement explique la nouvelle débâcle électorale du très élitiste porte-parole. Qui, écrit-il, dans cette correspondance dont l’objet est on ne peut plus clair («dénonciation de faits de corruption à charge de quatre députés provinciaux de la Mongala»), «compte sur l’autorité» du Procureur général «pour mettre fin à ces faits de corruption». Atundu qui, samedi 16 février 2019, déclarait que le président Joseph Kabila «laisse au Président Tshisekedi un pays en état parfait de gouvernabilité», que «sur le plan moral, le peuple est dans un état de grande cohésion nationale; sur le plan spirituel, le peuple garde intacte sa foi à l’avenir du pays; sur le plan intellectuel, le peuple est décidé à poursuivre sans complexe sa lancée vers l’émergence économique». Faut-il s’en prendre (suite en page 6).


enquête |

À Mbandaka, la Société civile accable le gouverneur Bobo

(suite en page 5). à ceux qui s’investissent ainsi? «Dans le secteur politique, avec le système de scrutin au second degré, la corruption des députés provinciaux pour l’achat de leurs voix lors du vote des gouverneurs et des vice-gouverneurs est devenue une preuve de puissance financière pour plusieurs candidats qui ne se gênent même pas, d’étaler sur la place publique leurs taux de corruption à proposer aux députés provinciaux. Une fois élus et installés à la tête de la Province, le Gouverneur et le Vice-Gouverneur s’emploient d’abord à utiliser les ressources publiques pour recouvrer d’importantes sommes d’argent dépensées pour l’achat des consciences des élus provinciaux et ensuite pour étouffer tout au long de leur mandat toute tentative des députés provinciaux de contrôler leur gestion de la Province. Dans de telles conditions, nous pouvons affirmer que les ressources générées par les provinces ne profitent pas aux

populations qui continuent jusqu’aujourd’hui de croupir dans la misère», dénonçait lundi 11 mars à son domicile de la Gombe, à Kinshasa, l’ancien président du Conseil judiciaire Joseph N’Singa Udjuu Ungwankebi Untube, autorité morale du système judiciaire national pour avoir été également deux fois ministre de la Justice sous Mobutu. En clair, à la suite d’un système électoral pervers, comment s’en prendre à Bobo - et à d’autres - qui, aussitôt parvenus à la fonction convoitée, se chargeront de travailler, nuits et jours, à rentrer dans leurs frais, le fameux retour sur investissement, le ratio financier qui mesure le montant d’argent gagné ou perdu par rapport à la somme misée au départ. MAIS BASSE SUR L’ÉQUATEUR. N’est-ce pas pour ça que le gouverneur Bobo de l’Équateur a fait main basse sur tout ce qui bouge à Mbandaka et dans la province? Dans une lettre datée du 1er mars (réf. 001/SC/EQ/2019)

adressée au Conseiller Spécial du Chef de l’État en matière de bonne gouvernance, de lutte contre la corruption et de blanchissement des fonds et du terrorisme, la Société civile de l’Équateur porte des accusations graves au gouverneur PPRD Dieudonné Boloko Bolumbu Bobo, candidat à sa propre succession à Mbandaka. Accusé de «spoliation à outrance du patrimoine de l’État», de «gestion calamiteuse de la Régie Financière de la Province de l’Équateur, DGRPEQ», de «détournement des biens destinés à la prison centrale de Mbandaka». Une autre lettre adressée cette fois au ministre national de l’Intérieur datée du 5 mars 2019 (Réf. 002/SC/ EQ/2019) porte sur «la dénonciation de la mauvaise Gouvernance et des cas des violations des droits de l’homme dans la Province de l’Équateur). Si, dans cette seconde lettre, les signataires exigent la démission de «l’actuel gouverneur de province avant les élections prochaines du gouverneur et du

vice-gouverneur de province pour son incompétence et sa manque de vision transformationnelle afin de permettre à la province de décoller», dans les deux correspondent, ces acteurs de la société civile de l’Équateur appellent à l’envoi d’une «équipe d’experts» en vue de «mettre de l’ordre dans la province de l’Équateur» qui serait aujourd’hui en situation de «danger sans précédent». Bobo Boloko se serait offert tout ce qui compte à Mbandaka: groupe électrogène, écran géant, kit complet d’instruments de musique, jeu de ballons, etc. Tout comme des motos arrivées de Kinshasa destinées à la campagne de riposte contre la maladie à virus Ebola, de même que la paie des «prestataires de riposte contre la maladie à virus Ebola au profit des prestataires fictifs». Certains de ces biens auraient été distribués à certains de ses amis politiques, en vue de consolider sa base électorale. Ainsi, un élu, le Dép. Efoloko aurait bénéficié d’un terrain du

ministère de l’Agriculture outre d’une moto de la riposte Ebola; le président sortant de l’Assemblée Provinciale, Lofandje Kulube aurait reçu une moto, tout comme le Dép. Buka, le Dép. Elodji, le Secrétaire Provincial, le Secrétaire du Cabinet du Gouverneur, la grosse part (5 motos) revenant à l’ex-ministre provincial de la Santé. LES ACCUSATIONS PLEUVENT. D’autres accusations pleuvent: disparition de véhicules ASF laissés à la Province ainsi, disparition de deux véhicules Nissan Patrol servant à la suite du cortège des gouverneurs, ingérence active au projet PDSS afin de tirer profit, imposition par l’exécutif provincial d’achat des médicaments à la pharmacie IndaDaphar avec des rétro commissions, abandon de la résidence officielle du gouverneur mise en location au bénéfice sa résidence privée louée par le trésor public et, last but not least, «incompétence notoire de l’actuel Gouverneur de Province ne lui permet-

tra pas de briguer un autre mandat de cinq ans à la tête de la province». Outre ces accusations, la société civile de l’Équateur charge le gouverneur de faits de violations des droits de l’homme (arrestations arbitraires en cascade, tortures corporelles, cas du journaliste Steve Mwanyo Iwewe de la radio Sarah ou du président de l’association des taxis-vélos, menaces, agressions et préméditations à l’endroit des acteurs de la Société civile, violation de liberté d’expression, de manifestation et d’opinion), nomination d’agents de l’État en violation de l’instruction du Chef de l’État interdisant tout mouvement des Fonctionnaires de l’État). Copie de ce courrier adressée à une multitude de personnes, au Président de la République, aux deux présidents des Chambres, au procureur général près la Cour de Cassation, au président de l’Assemblée Provinciale de l’Équateur et, pour qu’il n’en ignore rien, à Dieudonné Bobo Boloko Bolumbu,

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gouverneur de la province de l’Équateur. Les acteurs de la Société civile de l’Équateur appelle à l’envoi dans la province d’une équipe d’experts en charge de «mettre de l’ordre dans la province de l’Équateur» qui serait aujourd’hui en situation de «danger sans précédent», écrivent les acteurs de la société civile de la province. Que sont Barnabé Bongambo, vice-président du Cadre de Concertation Provincial de la Société civile de l’Équateur, Cyril Yango, coordonnateur Adjoint de la Nouvelle Société Civile Congolaise et membre du Cadre de Concertation Provinciale de la Société Civile de l’Équateur, Daniel Lokuli, conseiller du Conseil d’administration de la Nouvelle Société Civile Congolaise et membre du Cadre de Concertation Provinciale de la Société Civile de l’Équateur, Jean Inonga, président de l’ONG La Sentinelle et membre de la Socipeq/ Membre du Cadre de Concertation Provinciale de la Société Civile de l’Équateur. D. DADEI n


conjoncture économique |

ÉVOLUTION DU SOLDE BRUT D’OPINIONS EN 2018 ET 2019 2018 Secteur

2019 Novem- Décembre bre

Janv.

Févr,

Mars

Avril

Mai

Juin

Juillet

Août

Septembre

Octobre

Solde global

12,5

9,4

17,6

17,9

10,9

26,4

5,9

1,8

.1,0

-3,1

.5,4

-2,3

6,2

Industries manufacturières

.10,2.

11,4

.1,2

49,1

-4,0

0,1

11,0

12,3

13,0

21,2

13,6

23,3

33,4

E!ectricité et Eau

34,2

44,7

43,6

52,1

2,0

19,5

37,7

33,3

10,7

20,0

58,7

45,9

41,9

Industries extractives

20,0

11,8

26,7

23,6

27,5

40,5

12,4

5,0

5,9

5,3

.2,7

.5,3

7,8

Construction

-33,3

.25,6

.11,9

.40,7

.41,9

.22,9

5,3

.5,5

-47,0

.13,0

.86,9

.7,9

.68,2

Services

-48,4

-22,7

-33,1

-59,9

-34,9.

-56,4.

-65,4

-45,3

-50,7

-51,1

.-49,9

.28,2

.16,5

Janvier

PLAN DE TRÉSORERIE DE LA BCC AU 28 DÉCEMBRE 2018 (EN MILLIARDS DE CDF) RUBRIQUES

CUMUL ANNUEL FIN DECEMBRE

AU 28 DECEMBRE 2018

2017

2018

VARIATION en %

PROGRAM MENSUELLE.

EXECUTION MENSUELLE

TAUX D’EXEC. En %

ENCAISS.

279,123

445,935

59,8

34,136

44,231

129,6

DECAISS.

283,032

445,863

57,5

34,136

44,226

129,6

RESULTAT

-3,910

0,073

101,9

-

0,005

Source BCC

ÉVOLUTION DU TAUX DE CHANGE Taux de change CDF/I USD Taux Indicatif

Var. hebdo en %

Taux parallèle acheteur

vendeur

moyen

Taux Indicatif

Var. en % par rapport à fin déc 2018

Taux parallèle acheteurl

vendeur

moyen

Taux Indicatif

Taux parallèle acheteur

vendeur

moyen

31-déc.-18

1635,62

1668,33

1681,67

1675,00

31-janv.-19

1636.95

1651.67

1664.33

1658.00

0.02

1.25

1.04

1.15

- 0,08

1.01

1.04

1.03

28-lévr.-19

1637.01

1656,00

1665,67

1660,83

0.05

- 0.04

-0.20

- 0.12

- 0,09

0,7 4

0.96

0,85

7-mars-19

1639.36

1660.00

1670.00

1665.00

0.02

-

-0.10

- 0.05

- 0,23

0,50

0.70

0,60

8-mars-19

1639.54

1660,00

1670,00

1665,00

0,00

0.00

-

-0,24

0.50

0.70

0;60

II-mars-19

1639.74

1657.67

1668.00

1662.83

- 0,01

0.14

0.12

0,13

- 0.25

0.64

0,82

0.73

12-mars-19

1639,46

1657,67

1666,33

1662,00

0,02

-

0,10

0,05

- 0.23

0.64

0.92

0,78

13-mars-19

1639.60

1656.67

1665.67

1661.17

- 0.01

0.06

0,04

0.05

- 0,24

0,70

0.96

0.83

14-mars-l9

1639,79

1657,00

1667,67

1662,33

- 0.01

- 0,02

-0.12

- 0.07

-0.25

0,68

0.84

0,76

15-mars-19

1639.81

1658.67

1669.33

1664.00

- 0.00

- 0.10

-0.10

- 0.10

-0.26

0,58

0.74

0,66

18-mars-l9

1639,70

1660,00

1668,00

1664.00

0,01

- 0.08

0.08

-

- 0.25

0,50

0.82

0.66

19-mars-19

1639,70

1658,33

1670.00

1664,17

0.00

0.10

-0.12

- 0,01

- 0,25

0.60

0.70

0,65

20-mars-l9

1638,81

1660,67

1671,00

1665.83

0,05

- 0.14

-0.06

- 0.10

-0,19

0,46

0.64

0.55

21-mars-19

1639.93

1662.00

1671,00

1666.50

- 0. 07

- 0.08

0.00

- 0.04

- 0.26

0.38

0.64

0,51

. 0,01

- 0,30

- 0.20

-0,25

variation hebdo Source: Banque Centrale du Congo.

EXÉCUTION DU BUDGET EN DEVISES AU 14 MARS 2019 ‘ ., 31 dec-18

Cumul 2018

31-Janv-19

28-fevr-19

14-mars-19

Cumul 2019

Stock initial

1005,36

844,02

879,48

913,67

971,89

1. FLUX EN RECETTES

114,70

1786,38

151,42

115,69

69,92

337,83

A. Recettes d’exploitation

54,39

419,35

49,19

42,65

2,31

94,95

1. Redevance de Contrôle de Change

5,01

63,36

5,49

4,36

1,67

11,53

B. Opérations de change

60,30

1367,03

102,23

73,04

67,61

242,88

1. Rachats recettes fiscales et non fisc.

60,30

1367,03

102,23

73,04

67,61

242,88

2. Rachats Financements extérieurs

-

-

-

-

-

­

3. Achats interbancaires/Adjudications’

-

-

-

-

-

­

II. FLUX EN DEPENSES

240,58

1750,92

117,67

57,43

36,09

211,18

A. Dépenses du Trésor

206,84

1508,89

96,72

41,72

. 34,34

172,77

1. Service de la dette extérieure

2,58

124,22

7,15

7,08

1,34

15,57

2. Paiements diverses créances

-

2,88

-

-

-

­

3. Fonctionnement

204,26

1381,79

89,57

34,63

33,00

157,20

- Fournisseurs étrangers

22,17

251,76

16,28

3,15

17,23

36,66

- CEN 1

94,83

513,83

27,72

5,90

-

33,62

B. Dépenses de la BCC

33,74

242,03

20,95

15,71

1,75

38,41

-

6,00

-

-

-

­

~ 125,88

35,46

33,75

58,26

33,83

126,66

879,48

879,48

913,23

971,93

1005,72

1005,72

Ventes interbancaires BALANCE! 1-11) Stock final (SI+REC-DEP) Source: Banque centrale du Congo.

LE SOFT INTERNATIONAL | ÉDITION NATIONALE N° 1450 | PAGE 7.


spotlight |

Ligne de front

L’UE

cogne Washington fait le guet, attend d’agir (suite de la page 1). suprême et pourquoi (comment) se maintint-il trente ans à la tête du Congo? Pourquoi (comment) Laurent-Désiré Kabila vînt-il au pouvoir à Kinshasa, pourquoi (comment) tira-til tôt sa révérence, comme Lumumba, comme dans la loi des séries? Pourquoi (comment) son fils Joseph Kabila lui succéda-t-il? Pourquoi l’avènement de celui-ci fut unanimement salué dans tous les palais du monde où il fut accueilli dès le lendemain de sa prise de fonctions? Pourquoi son élection en 2011 mit du temps à être reconnue? Pourquoi fut-il forcer d’abandonner le pouvoir quand d’autres Chefs d’État, plus anciens en poste, de loin plus âgés, sont... autorisés à s’y maintenir, allant de mandat à mandat, réalisant des scores électoraux staliniens sans que cela n’émeuve aucun

Dirigeant du monde, bien au contraire? DES PRÉTENTIONS LÉGITIMES. En décembre 2007, sous le titre «Cet homme est dangereux», Le Soft International (n°934 daté 26 déc. 2007) rendait compte des résultats d’une recherche scientifique un tantinet révisionniste d’un universitaire congolais, Me Gabriel Banza Malale Makuta. Ces années-là, alors qu’il mettait la dernière main à son ouvrage, l’universitaire ne s’éloignait plus des chancelleries occidentales, fut l’invité de toutes les Capitales pour des conférences organisées dans des cercles fermés d’états-majors, était l’objet d’une incroyable sollicitude. Son texte vaut le détour. Aux origines de nos tragédies... Ce pays le Congo ne nous appartient pas en propre, articule le chercheur, à

haute et intelligible voix. Il appartient à 14 puissances occidentales, ÉtatsUnis, Allemagne, Royaume Uni, Italie, Autriche-Hongrie, Pays Bas, Espagne, France, Russie, Suède-Norvège, Portugal, Belgique, Danemark, Turquie. À Berlin, le Congo avait déjà sa nature propre défendue - une Société, une Association - quand tous les autres pays d’Afrique étaient des États reconnus. Les Grands de ce monde avaient confié un statut spécial à notre Congo - berceau de la mondialisation avec liberté de commerce pour toutes les nations du monde et neutralité perpétuelle de son Administration. De ne l’avoir pas compris explique et justifie les freins à son avancement et les guerres que le monde - États et ses partenaires, les multinationales - imposent au pays. Afdl, Rcd-G, Mlc, Nkunda, etc., et même, bien avant,

Tshombé et autres. À ce jour, seul Mobutu sut comprendre cette réalité. D’où sa durée au pouvoir. Toute tentative de nationaliser le Congo a été vaine, comprise comme une escroquerie, une spoliation des droits, réprimée avec force par ces 14 propriétaires: Lumumba assassiné, Mobutu et son authenticité vite refrénés, Kabila Père assassiné, Kabila Fils révoqué... Thèse révolutionnaire de ce Banza, un Mulubakat et fier de l’être. Ou cet homme est un sauveur ou c’est un dangereux personnage... Donc, le Congo - notre Congo - se trouve au centre d’un conflit de prétentions légitimes. Les cas de force majeure ayant empêché les partenaires à jouir paisiblement de leurs droits (notamment, la Première Guerre Mondiale 1914-1918, la 1ère crise économique mondiale de 1927-1932, la IIème Guerre Mondiale

1940-1945, les combats politiques pour le Panafricanisme vers les années 60, la Guerre froide entre Socialistes et Capitalistes, les conflits politiques issus de la Perestroïka 1990), la valeur combien importante aussi bien des richesses minières que de la position géostratégique du territoire congolais intéresse les Puissances mondiales. ILS FRAPPENT LÉGITIMEMENT. Les Puissances ainsi que les Sociétés multinationales ont adopté le langage des sourds pour s’exprimer en faisant usage des voies de fait comme moyens adéquats pour (faire) prévaloir leurs revendications, pourtant légitimes, auprès des Populations congolaises. La thèse explosive de l’avocat Gabriel Banza Malale Makuta peut être résumée comme suit: «C’est parce que l’élite

politique nationale r-dcongolaise a littéralement violé les droits légitimes de terre des Occidentaux depuis 1960 et soucieux de se faire entendre par tous les moyens qu’ils recourent aux voies de fait pour faire prévaloir leurs revendications légitimes et bloquent notre marche en avant même si leur conscience peut être chargée face aux effets déplorables imputables aux moyens utilisés. À ceux qui ne comprennent pas ou font mine d’arrogance, les propriétaires occidentaux et leurs alliés, les sociétés multinationales les rappellent à l’ordre et, en cas de récidive, les frappent. «Légitimement». Les personnalités congolaises (dans le cas de figure Évariste Boshab Mabuj, Alex Kande Mupompa, JeanClaude Kazembe Musonda, Lambert Mende Omalanga, Muhindo Akili

LE SOFT INTERNATIONAL | ÉDITION NATIONALE N° 1450 | PAGE 8.

Mundos, Éric Ruhorimbere, Emmanuel Ramazani Shadary et Kalev Mutondo) ont beau maugréer ou ronger leur frein, face aux Occidentaux, en l’espèce les Gouvernement des pays membres de l’Union Européenne qui les ont condamnés à tort ou à raison, ils auront eu tort d’avoir contesté les droits des Occidentaux propriétaires. Du coup, la loi du plus fort s’applique impitoyablement. Quant à l’Amérique, sa puissance de frappe est tellement atomique qu’elle préfère le plus souvent rester en réserve, observer de loin les événements avant de venir et, d’un seul coup, d’anéantir. Elle n’a cessé de lancer des signaux sans équivoque. Avec l’accueil du nouveau Président congolais Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo à Washington, l’impitoyable machine de guerre va frapper.

T. MATOTU n


spotlight |

L’UE cogne fort

C

i-après, l’arrêt rendu le 26 mars 2019 par trois juges d’appel d’un Tribunal de Luxembourg dans l’affaire T 582/17 opposant huit Personnalités congolaises qui sollicitaient l’annulation du règlement d’exécution (UE) 2017/904 du Conseil de l’Union européenne du 29 mai 2017. Les Congolais qui avaient présenté eux-mêmes leurs moyens de défense, étaient représentés au tribunal initialement par Mes P. Chansay Wilmotte, A. Kalambay Ndaya et P. Okito Omole, puis par Mes T. Bontinck, M. Forgeois, P. De Wolf et A. Guillerme, le Conseil de l’Union Européenne représenté initialement par Mme M. Veiga et M. B. Driessen, puis par MM. Driessen et J.-P. Hix. LE TRIBUNAL (neuvième chambre), composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise et R. da Silva Passos (rapporteur), juges, greffier : Mme M. Marescaux, administrateur, vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 13 décembre 2018, rend le présent Arrêt Antécédents du litige. 1. Les requérants, M. Évariste Boshab et les autres personnes dont les noms figurent en annexe, sont des ressortissants de la République démocratique du Congo. 2. La présente affaire s’inscrit dans le cadre des mesures restrictives imposées par le Conseil de l’Union européenne en vue de l’instauration d’une paix durable en République démocratique du Congo et de l’exercice de

De g. à dr., de haut en bas, à l’époque des faits, le VPM Intérieur Évariste Boshab Mabudj, le VPM Intérieur Emmanuel Ramazani Shadary, le ministre des Médias Lambert Mende Omalanga, le Gouverneur du Kasaï Central Alex Kande Mupompa, le gouverneur du Haut-Katanga Jean-Claude Kazembe Musondaa Nzenzhe. DR. pressions sur les blique démocratique vités militaires de cet 29 TUE, la décision fiant le règlement no personnes et entités du Congo (JO 2003, L État. 2010/788/PESC, 1183/2005 (JO 2016, L agissant en violation 249, p. 5). 7. Le 18 juillet 2005, concernant l’adop336 I, p. 1). de l’embargo sur les 5. Le 13 juin 2005, le le Conseil a adopté, tion de mesures res13. Les considérants armes imposé à cet Conseil a adopté la sur le fondement 2 à 4 de la décision trictives à l’encontre État. position commune des articles 60, 301 et de la République 2016/2231 se lisent 3. Le 21 octobre 2002, 2005/440/PESC, 308 CE, le règlement démocratique du comme suit : le Conseil a adopté concernant l’adop(CE) n° 1183/2005, Congo et abrogeant «(2) Le 17 octobre la position commune tion de mesures resinstituant certaines la position commune 2016, le Conseil a 2002/829/PESC, trictives à l’encontre mesures restrictives adopté des conclu2008/369 (JO 2010, concernant la fourde la République spécifiques à l’enL336, p. 30). sions faisant état niture de certains démocratique du contre des personnes 10. Le 20 avril 2015, d’une profonde préCongo et abrogeant équipements à desagissant en violation le Conseil a adopté occupation quant à tination de la Répula position commune de l’embargo sur les le règlement (UE) la situation politique blique démocratique 2002/829 (JO 2005, L armes imposé à la 2015/613 (JO 2015, L en République démodu Congo (JO 2002, 152, p. 22). République démo102, p. 3), qui a modi- cratique du Congo L 285, p. 1), qui a 6. À la même date, cratique du Congo fié le règlement n° (RDC). En particulier, interdit la fourniture le Conseil a adopté (JO 2005, L 193, p. 1). 1183/2005 et abrogé il y condamnait viveet la vente à destinale règlement (CE) 8. Le 14 mai 2008, le le règlement no ment les actes d’une tion de cet État, par n° 889/2005, insConseil a adopté la 889/2005. extrême violence qui les ressortissants des tituant certaines position commune 11. Le 12 décembre ont été commis les États membres ou mesures restrictives 2008/369/PESC, 2016, le Conseil a 19 et 20 septembre à depuis le territoire à l’encontre de la concernant l’adopadopté, sur le fonKinshasa, indiquant des États membres, République démotion de mesures resdement de l’article que ces actes ont end’armements et de cratique du Congo trictives à l’encontre 29 TUE, la décision core aggravé la situamatériels connexes et abrogeant le règle- de la République (PESC) 2016/2231, tion d’impasse dans de quelque type que ment n° 1727/2003 démocratique du modifiant la décision laquelle se trouve ce soit. (JO 2005, L 152, p. Congo et abrogeant 2010/788 (JO 2016, L le pays du fait de la 4. Le 29 septembre 1), qui a introduit un la position commune 336 I, p. 7). non-convocation des 2003, le Conseil a ensemble de mesures 2005/440 (JO 2008, L 12. À la même date, électeurs à l’élection adopté le règlement sur l’interdiction de 127, p. 84). le Conseil a adopté, présidentielle dans le (CE) n° 1727/2003, fournir une assis9. Le 20 décembre sur le fondement de délai constitutionnel imposant certaines tance technique et 2010, le Conseil a l’article 215 TFUE, fixé au 20 décembre mesures restrictives financière ayant un adopté, sur le fonle règlement (UE) 2016. à l’égard de la Répurapport avec des acti- dement de l’article 2016/2230, modi(3) Le Conseil a LE SOFT INTERNATIONAL | ÉDITION NATIONALE N° 1450 | PAGE 9.

souligné que, afin d’assurer un climat propice à la tenue d’un dialogue et des élections, le gouvernement de la RDC doit clairement s’engager à veiller au respect des droits de l’homme et de l’État de droit et cesser toute instrumentalisation de la justice. Il a également exhorté tous les acteurs à rejeter l’usage de la violence. (4) Le Conseil s’est également déclaré prêt à utiliser tous les moyens à sa disposition, y compris le recours à des mesures restrictives contre ceux qui sont responsables de graves violations des droits de l’homme, incitent à la violence ou qui font obstacle à une sortie de crise consensuelle, pacifique et respectueuse de l’aspiration du peuple de la RDC à élire ses représentants.» 14. L’article 3, paragraphe 2, de la décision 2010/788, tel que modifié par la décision 2016/2231, prévoit ce qui suit : «2. Les mesures restrictives prévues à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 5, paragraphes 1 et 2, sont instituées à l’encontre des personnes et entités : a) faisant obstacle à une sortie de crise consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en RDC, notamment par des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, ou des actions portant atteinte à l’État de droit ; b) contribuant, en les planifiant, en les dirigeant ou en les commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits en RDC ; c) associées à celles visées [sous] a) et b), dont la liste figure à (suite en page 11).


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L’UE a une

mémoire

(suite de la page 10).

l’annexe II.» 15. Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la décision 2010/788, tel que modifié par la décision 2016/2231, «[l]es États membres prennent les mesures nécessaires pour empêcher l’entrée ou le passage en transit sur leur territoire des personnes visées à l’article 3». 16. L’article 5, paragraphe 1, de la décision 2010/788, tel que modifié par la décision 2016/2231, établit que «[s]ont gelés tous les fonds, autres avoirs financiers et ressources économiques que les personnes ou entités visées à l’article 3 possèdent ou contrôlent directement ou indirectement, ou qui sont détenus par des entités que ces personnes ou entités ou toute personne ou entité agissant pour leur compte ou sur leurs instructions, qui sont visées aux annexes I et II, possèdent ou contrôlent directement ou indirectement». Selon le paragraphe 2 du même article, tel que modifié par la décision 2016/2231, «[a]ucun fonds, autre avoir financier ou ressource économique n’est mis directement ou indirectement à la disposition des personnes ou entités visées au paragraphe 1 ou utilisé à leur profit». 17. L’article 6 de la décision 2010/788, tel que modifié par la décision 2016/2231, prévoit ce qui suit : «1. Le Conseil modifie la liste figurant à l’annexe I sur la base des décisions prises par le Conseil de sécurité des Nations unies ou le comité des sanctions. 2. Le Conseil, statuant sur proposition d’un État membre ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécu-

rité, établit et modifie la liste qui figure à l’annexe II.» 18. Le règlement 2016/2230 a modifié le règlement no 1183/2005. Selon son considérant 3, «[u]ne action réglementaire au niveau de l’Union est dès lors nécessaire pour donner effet à la décision [...] 2016/2231, en particulier afin de garantir son application uniforme par les opérateurs économiques dans tous les États membres». 19. L’article 2 du règlement n°1183/2005, tel que modifié par le règlement 2016/2230, prévoit ce qui suit : «1. Sont gelés tous les fonds et ressources économiques qui appartiennent à une personne physique ou morale, à une entité ou à un organisme figurant sur la liste de l’annexe I ou de l’annexe I bis, qui sont en leur possession ou qui sont détenus ou contrôlés par ceux-ci, directement ou indirectement, y compris par un tiers agissant pour leur compte ou sur leurs instructions. 2. Aucun fonds ou ressource économique n’est mis directement ou indirectement à la disposition des personnes physiques ou morales, entités ou organismes figurant sur la liste de l’annexe I ou de l’annexe I bis ni utilisé à leur profit.» 20. L’article 2 ter du règlement no 1183/2005, inséré dans ce dernier par le règlement 2016/2230, établit ce qui suit: «1. L’annexe I bis comprend les personnes physiques ou morales, les entités ou les organismes désignés par le Conseil pour l’un des motifs suivants : a) faisant obstacle à une sortie de crise consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en RDC, notamment par

des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, ou des actions portant atteinte à l’État de droit ; b) préparant, dirigeant ou commettant des actes constituant de graves violations des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits en RDC ; c) étant associés aux personnes physiques ou morales, entités ou organismes visés [sous] a) et b). 2. L’annexe I bis indique les motifs pour lesquels les personnes et entités figurant sur la liste y ont été inscrites. 3. L’annexe I bis contient également, lorsqu’elles sont disponibles, les informations nécessaires à l’identification des personnes ou entités concernées. En ce qui concerne les personnes physiques, ces informations peuvent comprendre les noms et prénoms, y compris les pseudonymes, la date et le lieu de naissance, la nationalité, les numéros du passeport et de la carte d’identité, le genre, l’adresse si elle est connue, et la fonction ou la profession. En ce qui concerne les entités, ces informations peuvent comprendre la dénomination, le lieu et la date d’enregistrement, le numéro d’enregistrement et l’adresse professionnelle.» 21. L’article 9 du règlement n°1183/2005, tel que modifié par le règlement 2016/2230, prévoit ce qui suit : «1. Si le Conseil de sécurité des Nations unies ou le Comité des sanctions désigne une personne physique ou morale, une entité ou un organisme, le Conseil ajoute cette personne physique ou morale, cette entité ou cet organisme à l’annexe I. 2. Le Conseil établit et modifie la liste des personnes physiques

et morales, des entités et des organismes figurant à l’annexe I bis. 3. Le Conseil communique sa décision, notamment les motifs de l’inscription sur la liste, à la personne physique ou morale, à l’entité ou à l’organisme visé aux paragraphes 1 et 2, soit directement, si son adresse est connue, soit par la publication d’un avis, en lui donnant la possibilité de présenter des observations.» 22. Le 29 mai 2017, le Conseil a adopté, sur le fondement notamment de l’article 31, paragraphe 2, TUE, et de l’article 6, paragraphe 2, de la décision 2010/788, la décision d’exécution (PESC) 2017/905, mettant en œuvre la décision 2010/788 (JO 2017, L 138 I, p. 6). 23. À la même date, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) 2017/904, mettant en œuvre l’article 9, paragraphe 2, du règlement n°1183/2005 (JO 2017, L 138 I, p. 1). 24. Le considérant 2 du règlement 2017/904 et de la décision 2017/905 se lit comme suit : «Le 12 décembre 2016, le Conseil a adopté la décision (PESC) 2016/2231 en réponse aux entraves au processus électoral et aux violations des droits de l’homme qui y sont liées en République démocratique du Congo (RDC). Le 6 mars 2017, le Conseil a adopté des conclusions dans lesquelles il s’est déclaré gravement préoccupé par la situation politique en RDC provoquée par le blocage dans la mise en œuvre de l’accord politique inclusif du 31 décembre 2016, ainsi que par la situation sécuritaire dans plusieurs régions du pays, où un usage disproportionné de

la force a été observé.» 25. Le nom de chacun des requérants a été ajouté par la décision 2017/905 à la liste des personnes et entités figurant à l’annexe II de la décision 2010/788, telle que modifiée par la décision 2016/2231. 26. Le nom de chacun des requérants a été ajouté par le règlement 2017/904 à la liste des personnes et entités figurant à l’annexe I bis du règlement no 1183/2005. 27. Dans l’annexe II de la décision 2010/788, telle que modifiée par la décision 2017/905, et dans l’annexe I bis du règlement no 1183/2005, telle que modifiée par le règlement 2017/904, le Conseil a justifié l’adoption des mesures restrictives visant les requérants par la mention des motifs suivants : ç M. Évariste

Boshab: «En sa qualité de vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité de décembre 2014 à décembre 2016, Évariste Boshab était officiellement responsable des services de police et de sécurité ainsi que de la coordination du travail des gouverneurs provinciaux. À ce titre, il s’est rendu responsable de l’arrestation de militants et de membres de l’opposition, ainsi que d’un recours disproportionné à la force, notamment entre septembre 2016 et décembre 2016, en réponse à des manifestations organisées à Kinshasa, pendant lesquelles de nombreux civils ont été tués ou blessés par les services de sécurité. Évariste Boshab a donc contribué, en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en

RDC.»

ç M. Alex Kande Mupompa : «En tant que gouverneur du Kasaï Central, Alex Kande Mupompa est responsable du recours disproportionné à la force, de la répression violente et des exécutions extrajudiciaires, qui sont le fait des forces de sécurité et de la PNC au Kasaï Central depuis 2016, y compris les assassinats illégaux présumés de miliciens Kamuina Nsapu et de civils à Mwanza Lomba, Kasaï Central, en février 2017. Alex Kande Mupompa a donc contribué, en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en RDC.» ç M. Jean-Claude

Kazembe Musonda: «En tant que gouverneur du Haut-Katanga jusqu’en avril 2017, Jean-Claude Kazembe Musonda a été responsable du recours disproportionné à la force et de la répression violente qu’ont exercé les forces de sécurité et la PNC dans le HautKatanga, notamment entre le 15 et le 31 décembre 2016, période pendant laquelle 12 civils ont été tués et 64 blessés en raison d’un usage de la force létale par les forces de sécurité, notamment des agents de la PNC, en réponse à des protestations à Lubumbashi. JeanClaude Kazembe Musonda a donc contribué, en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en RDC.» çM. Lambert Mende: «En tant que ministre des Communications et des Médias depuis 2008, Lambert Mende est respon-

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sable de la politique répressive menée envers les médias en RDC, politique qui viole le droit à la liberté d’expression et d’information et compromet une solution consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en RDC. Le 12 novembre 2016, il a adopté un décret limitant la possibilité pour des médias étrangers de diffuser en RDC. En violation de l’accord politique conclu le 31 décembre 2016 entre la majorité présidentielle et les partis d’opposition, en mai 2017 la diffusion d’un certain nombre de médias n’avait toujours pas repris. En sa qualité de ministre des Communications et des Médias, Lambert Mende est donc responsable d’avoir fait obstacle à une solution consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en RDC, notamment par des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, ou des actions portant atteinte à l’État de droit.» ç M. Muhindo Akili

Mundos : «Muhindo Akili Mundos était le commandant des FARDC, dans le cadre de l’opération Sukola I, responsable d’opérations militaires contre les Forces démocratiques alliées (ADF) d’août 2014 à juin 2015. Il a recruté et équipé d’anciens combattants d’un groupe armé local pour participer à des exécutions extrajudiciaires et à des massacres à partir d’octobre 2014. (...). çM. Éric Ruhorim-

bere: «En tant que commandant adjoint de la 21e région militaire depuis le 18 septembre 2014, Éric Ruhorimbere s’est (suite en page 11).


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Elle frappe

pour l’exemple (suite de la page 10). rendu responsable du recours disproportionné à la force et des exécutions extrajudiciaires perpétrées par les FARDC, notamment contre les milices Nsapu, ainsi que des femmes et des enfants. Éric Ruhorimbere a donc contribué, en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en RDC.» ç M. Ramazani Sha-

dary: «Dans ses fonctions de vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité depuis le 20 décembre 2016, Ramazani Shadary est officiellement responsable des services de police et de sécurité ainsi que de la coordination du travail des gouverneurs provinciaux. À ce titre, il est responsable de la récente arrestation d’activistes et de membres de l’opposition, ainsi que de l’usage disproportionné de la force depuis sa nomination, tel que les mesures de répression violente prises contre des membres du mouvement Bundu Dia Kongo (BDK) au Kongo Central, la répression à Kinshasa en janvier et février 2017 et le recours disproportionné à la force et à la répression violente dans les provinces du Kasaï. À ce titre, Ramazani Shadary contribue donc, en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en RDC.» ç M. Kalev Mutondo: «Depuis longtemps directeur de l’Agence nationale du renseignement (ANR), Kalev Mutondo est impliqué dans l’arrestation arbitraire et la détention de membres de l’oppo-

sition, de militants de la société civile et d’autres personnes, ainsi que dans les mauvais traitements qui leur ont été infligés, et en porte la responsabilité. (...). 28. Le 30 mai 2017, le Conseil a publié au Journal officiel de l’Union européenne un avis à l’attention des personnes faisant l’objet des mesures restrictives prévues par la décision 2010/788, mise en œuvre par la décision 2017/905, et par le règlement no 1183/2005, mis en œuvre par le règlement 2017/904, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la République démocratique du Congo (JO 2017, C 169, p. 4, ci-après l’«avis du 30 mai 2017»). Par cet avis, le Conseil a notamment attiré l’attention des personnes figurant sur la liste publiée en annexe à la décision 2017/905 et en annexe au règlement 2017/904 (ci-après les «listes litigieuses») sur la possibilité de présentation aux autorités compétentes de l’État membre concerné, selon les indications figurant sur les sites Internet énumérés à l’annexe II du règlement no 1183/2005, d’une demande visant à obtenir l’autorisation d’utiliser des fonds gelés pour couvrir des besoins fondamentaux ou procéder à certains paiements. Par le même avis, les personnes concernées ont également été informées du fait qu’elles pouvaient adresser au Conseil, avant le 1er octobre 2017, une demande de réexamen de la décision par laquelle elles avaient été inscrites sur les listes litigieuses, en y joignant des pièces justificatives, ainsi que du fait qu’il était possible de contester la décision du Conseil devant la Cour de justice de l’Union européenne, dans les conditions

prévues à l’article 275, deuxième alinéa, et à l’article 263, quatrième et sixième alinéas, TFUE. Procédure et conclusions des parties 29. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 août 2017, les requérants ont introduit le présent recours. (....) 32. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 13 décembre 2018. À cette occasion, les requérants ont confirmé leur décision de se désister complètement des troisième, quatrième et cinquième moyens, ce dont il a été pris acte au procès-verbal de l’audience. 33. Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal : - annuler le règlement 2017/904 et la décision 2017/905 (ci-après les «actes attaqués»), pour autant que ces actes les concernent ; - condamner le Conseil aux dépens. 34. Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal : - rejeter le recours ; - condamner les requérants aux dépens. 35. Dans la duplique, le Conseil demande à ce qu’il plaise au Tribunal, conformément à l’article 264, deuxième alinéa, TFUE, de maintenir, dans le cas où il déciderait d’annuler partiellement la décision attaquée en ce qu’elle vise un ou plusieurs requérants, les effets de la décision attaquée jusqu’à l’expiration du délai de pourvoi ou, si un pourvoi est introduit, jusqu’au rejet de celui-ci. En droit 36. À l’appui de leur recours, les requérants invoquent, en substance, cinq moyens, tirés, le premier, de la violation de l’obligation

de motivation, le deuxième, d’erreurs manifestes d’appréciation, le troisième, de l’absence de notification individuelle des actes attaqués, le quatrième, de l’absence de communication préalable des éléments à charge et, le cinquième, de la violation du droit d’être entendu et du droit à une protection juridictionnelle effective. 37. Ainsi que cela a été mentionné aux points 31 et 32 ci-dessus, par lettre du 11 décembre 2018, les requérants se sont désistés des troisième, quatrième et cinquième moyens, ce qu’ils ont confirmé lors de l’audience. Dès lors, il y a lieu d’examiner uniquement les premier et deuxième moyens. Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation 38. Il convient de rappeler que l’obligation de motiver un acte faisant grief, ainsi prévue à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte. L’obligation de motivation ainsi édictée constitue un principe essentiel du droit de l’Union auquel il ne saurait être dérogé qu’en raison de considérations impérieuses. Partant, la motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que l’acte lui faisant grief, son absence ne pouvant être régularisée par le fait que l’intéressé prend connaissance des motifs de l’acte au cours de la procédure devant le juge de l’Union

(arrêt du 7 décembre 2011, HTTS/ Conseil, T 562/10, EU:T:2011:716, point 32). 39. Ensuite, en ce qui concerne les mesures restrictives adoptées dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), il y a lieu de souligner que, dans la mesure où la personne concernée ne dispose pas d’un droit d’audition préalable à l’adoption d’une décision initiale d’inscription, le respect de l’obligation de motivation est d’autant plus important, puisqu’il constitue l’unique garantie permettant à l’intéressé, à tout le moins après l’adoption de cette décision, de se prévaloir utilement des voies de recours à sa disposition pour contester la légalité de ladite décision (arrêt du 15 novembre 2012, Conseil/ Bamba, C 417/11 P, EU:C:2012:718, point 51). 40. Partant, à moins que des considérations impérieuses touchant à la sûreté de l’Union ou de ses États membres ou à la conduite de leurs relations internationales ne s’opposent à la communication de certains éléments, le Conseil est tenu de porter à la connaissance d’une personne ou d’une entité visée par des mesures restrictives les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles il considère qu’elles devaient être adoptées. Il doit ainsi énoncer les éléments de fait et de droit dont dépend la justification légale des mesures concernées et les considérations qui l’ont amené à les prendre (arrêt du 9 juillet 2009, Melli Bank/Conseil, T 246/08 et T 332/08, EU:T:2009:266, point 144). 41. Par ailleurs, la motivation doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été

adopté. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre les raisons et la portée de la mesure prise à son égard (arrêts du 15 novembre 2012, Conseil/ Bamba, C 417/11 P, EU:C:2012:718, points 53 et 54, et du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/ Conseil, T 390/08, EU:T:2009:401, point 82). 42. L’obligation de motivation à laquelle le Conseil est tenu porte, d’une part, sur l’indication de la base juridique de la mesure adoptée et, d’autre part, sur les circonstances qui permettent de considérer que l’un ou l’autre des critères d’inscription est satisfait dans le cas des intéressés (arrêt du 18 septembre 2014, Central Bank of Iran/Conseil, T 262/12, non publié, EU:T:2014:777, point 86). À cet égard, la motivation d’un acte du Conseil imposant une mesure restrictive doit non seulement identifier la base juridique de cette mesure, mais également les rai-

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sons spécifiques et concrètes pour lesquelles le Conseil considère, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’appréciation, que l’intéressé doit faire l’objet d’une telle mesure (arrêts du 15 novembre 2012, Conseil/ Bamba, C 417/11 P, EU:C:2012:718, point 52, et du 25 mars 2015, Central Bank of Iran/ Conseil, T 563/12, EU:T:2015:187, point 55). 43. Il importe, à cet égard, de rappeler que l’omission de la référence à une disposition précise ne peut constituer un vice substantiel lorsque la base juridique d’un acte peut être déterminée à l’appui d’autres éléments de celui-ci. Une telle référence explicite est cependant indispensable lorsque, à défaut de celle-ci, les intéressés et le juge de l’Union sont laissés dans l’incertitude quant à la base juridique précise (arrêt du 18 septembre 2014, Central Bank of Iran/Conseil, T 262/12, non publié, EU:T:2014:777, point 87). 44. Par conséquent, il y a lieu d’examiner si la motivation du règlement attaqué contient des références explicites au critère litigieux et si, le cas échéant, cette motivation peut être regardée comme suffisante pour permettre à la partie requérante de vérifier le bien-fondé de l’acte litigieux, de se défendre devant le Tribunal et à ce dernier d’exercer son contrôle (voir, en ce sens, arrêt du 18 septembre 2014, Central Bank of Iran/Conseil, T 262/12, non publié, EU:T:2014:777, point 88). 45. En l’espèce, les requérants font valoir que les actes attaqués sont motivés de façon manifestement trop vague et imprécise pour que cette motivation puisse (suite en page 12).


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Elle rejette les recours

(suite de la page 11).

être regardée comme suffisante. Ils soutiennent que lesdits actes, en n’indiquant pas de faits précis qui leur seraient imputables et en utilisant des expressions telles que «gravité de la situation» ou «il s’est rendu coupable de l’arrestation de militants et de membres de l’opposition, ainsi que d’un recours disproportionné à la force» les privent de la possibilité d’exercer utilement leurs droits de la défense. 46. Le Conseil conteste ces arguments. 47. À cet égard, premièrement, au considérant 2 de chacun des actes attaqués, mentionné au point 24 ci-dessus, le Conseil a exposé le contexte général l’ayant conduit à étendre le champ d’application personnel des mesures restrictives instaurées à l’encontre de la République démocratique du Congo. Il en ressort que ce contexte général portait, d’une part, sur la gravité de la situation liée aux entraves au processus électoral et aux violations des droits de l’homme en République démocratique du Congo et, d’autre part, sur le blocage dans la mise en œuvre de l’accord politique inclusif du 31 décembre 2016 et à la situation sécuritaire dans plusieurs régions du pays, où un usage disproportionné de la force avait été observé. Ce contexte était nécessairement connu de tous les requérants, au regard de leur position de responsables politiques dans ce pays, s’agissant de MM. Boshab, Kande Mupompa, Kazembe Musonda et Shadary, de commandement au sein des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), s’agissant de MM.

Akili Mundos et Ruhorimbere, et de haut responsable dans l’Agence nationale du renseignement (ANR), s’agissant de M. Mutondo. 48. Deuxièmement, selon l’article 3, paragraphe 2, sous a) à c), de la décision 2010/788, les mesures restrictives prévues à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 5, paragraphes 1 et 2, de ladite décision sont instituées à l’encontre des personnes et entités, dont la liste figure à son annexe II, «a) faisant obstacle à une sortie de crise consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en RDC, notamment par des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, ou des actions portant atteinte à l’État de droit», «b) contribuant, en les planifiant, en les dirigeant ou en les commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme ou des atteintes à ces droits en RDC» ou «c) associées à celles visées [sous] a) et b)». De même, selon l’article 2 ter du règlement no 1183/2005, l’annexe I bis de ce dernier comprend les personnes ou entités désignées par le Conseil par l’un des motifs qui y sont indiqués et qui sont identiques à ceux mentionnés à l’article 3, paragraphe 2, sous a) à c), de la décision 2010/788. 49. Troisièmement, il convient de constater que la motivation, mentionnée au point 27 ci-dessus, invoquée par le Conseil dans les actes attaqués pour l’inscription de chacun des requérants, identifie les éléments spécifiques et concrets, en matière de fonctions professionnelles respectives et de type d’acte visé, qui traduisent, pour le Conseil, une implication, premièrement, de MM. Boshab,

Kande Mupompa, Kazembe Musonda, Akili Mundos, Ruhorimbere, Shadary et Mutondo dans des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en République démocratique du Congo, et, deuxièmement, de MM. Mende et Mutondo dans des actes faisant obstacle à une solution consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en République démocratique du Congo, notamment dans des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence ou des actions portant atteinte à l’État de droit. Cette motivation permet, en effet, de comprendre les raisons ayant conduit le Conseil à adopter des mesures restrictives à l’encontre de chacun des requérants. 50. En premier lieu, quant à M. Boshab, la motivation invoquée par le Conseil dans les actes attaqués pour son inscription porte sur la prétendue responsabilité de ce dernier, en tant que vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité de décembre 2014 à décembre 2016 et, par conséquent, en tant que responsable des services de police et de sécurité ainsi que de coordination du travail des gouverneurs provinciaux, dans l’arrestation de militants et de membres de l’opposition ainsi que d’un recours disproportionné à la force, notamment entre septembre et décembre 2016, en réponse à des manifestations organisées à Kinshasa (République démocratique du Congo), pendant lesquelles de nombreux civils ont été tués ou blessés par les services de sécurité. La lecture de cette motivation permet de comprendre que le Conseil se fonde sur des élé-

ments spécifiques et concrets l’ayant conduit à adopter des mesures restrictives à l’encontre de M. Boshab, en raison de la responsabilité de ce dernier, au titre de sa fonction de vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité de décembre 2014 à décembre 2016, pour les actes susmentionnés. M. Boshab ne pouvait donc raisonnablement ignorer que, en faisant allusion, dans les actes attaqués, à ses fonctions de vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité qu’il avait exercées et, par conséquent, de responsable des services de police et de sécurité ainsi que de coordination du travail des gouverneurs provinciaux, le Conseil a mis en exergue que, eu égard à ses fonctions, il disposait d’un pouvoir de fait d’influencer de façon directe les services de police et de sécurité, lesquels avaient été responsables des actes susmentionnés. (...) 53. En quatrième lieu, quant à M. Mende, la motivation invoquée par le Conseil dans les actes attaqués pour son inscription porte sur la prétendue responsabilité de ce dernier, au titre de ses fonctions de ministre des Communications et des Médias depuis 2008, dans la politique répressive envers les médias en République démocratique du Congo, en violation du droit à la liberté d’expression et d’information, notamment en adoptant, le 12 novembre 2016, un décret limitant la possibilité pour des médias étrangers de diffuser en République démocratique du Congo et en violant l’accord politique du 31 décembre 2016 entre la majorité présidentielle et les parties de l’opposition, dans la mesure où, en mai

2017, la diffusion d’un certain nombre de médias n’avait toujours pas repris. La lecture de cette motivation permet de comprendre que le Conseil se fonde sur des éléments spécifiques et concrets l’ayant conduit à adopter des mesures restrictives à l’encontre de M. Mende, en raison de la responsabilité de ce dernier, au titre de sa fonction de ministre des Communications et des Médias depuis 2008, pour les actes susmentionnés. M. Mende ne pouvait donc raisonnablement ignorer que, en faisant allusion, dans les actes attaqués, à ses fonctions de ministre des Communications et des Médias, le Conseil a mis en exergue le fait que, eu égard auxdites fonctions depuis 2008, il disposait d’un pouvoir de mettre en œuvre une politique répressive envers les médias, ce qui, selon le Conseil, avait été le cas. (...) 56. En septième lieu, quant à M. Shadary, la motivation invoquée par le Conseil dans les actes attaqués pour son inscription porte sur la prétendue responsabilité de ce dernier, en tant que vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité et, par conséquent, en tant que responsable des services de police et de sécurité ainsi que de coordination du travail des gouverneurs provinciaux, dans l’arrestation d’activistes et de membres de l’opposition, ainsi que dans l’usage disproportionné de la force depuis sa nomination le 20 décembre 2016, tel que les mesures de répression violente prises contre des membres du mouvement «Bundu Dia Kongo» (BDK) au Kongo Central, la répression à Kinshasa en janvier et en février 2017 et le recours dispro-

portionné à la force et à la répression violente dans les provinces du Kasaï. La lecture de cette motivation permet de comprendre que le Conseil se fonde sur des éléments spécifiques et concrets l’ayant conduit à adopter des mesures restrictives à l’encontre de M. Shadary, en raison de la responsabilité de ce dernier, au titre de sa fonction de vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité depuis le 20 décembre 2016, pour les actes susmentionnés. M. Shadary ne pouvait donc raisonnablement ignorer que, en faisant allusion, dans les actes attaqués, à ses fonctions de vicePremier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité et, par conséquent, de responsable des services de police et de sécurité ainsi que de coordination du travail des gouverneurs provinciaux, le Conseil a mis en exergue le fait que, eu égard à ses fonctions, il disposait d’un pouvoir de fait d’influencer de façon directe les services de police et de sécurité, lesquels avaient été responsables des actes susmentionnés. 57. En huitième lieu, en ce qui concerne M. Mutondo, la motivation invoquée par le Conseil dans les actes attaqués pour son inscription porte sur la prétendue responsabilité de ce dernier, au titre de ses fonctions de directeur de l’ANR, dans l’arrestation arbitraire et la détention de membres de l’opposition, de militants de la société civile et d’autres personnes, ainsi que dans les mauvais traitements qui leur ont été infligés. La lecture de cette motivation permet de comprendre que le Conseil se fonde sur des éléments spécifiques et concrets l’ayant conduit à

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adopter des mesures restrictives à l’encontre de M. Mutondo, en raison de la responsabilité de ce dernier, au titre de sa fonction de directeur de l’ANR, pour les actes susmentionnés. M. Mutondo ne pouvait donc raisonnablement ignorer que, en faisant allusion, dans les actes attaqués, à ses fonctions de directeur de l’ANR, le Conseil a mis en exergue le fait que, eu égard à ses fonctions, il disposait d’un pouvoir de fait d’influencer de façon directe les effectifs de l’ANR, lesquels avaient été responsables des actes susmentionnés. 58. Par les indications fournies dans les actes attaqués, et à la lumière de la jurisprudence mentionnée aux points 38 à 44 ci-dessus, les requérants étaient donc en mesure de connaître les raisons de leur inscription sur les listes litigieuses et de contester utilement le bienfondé des mesures restrictives adoptées à leur encontre, ce qu’ils ont d’ailleurs fait dans le présent recours. 59. Il s’ensuit que la motivation des actes attaqués était suffisante pour permettre à chacun des requérants d’en contester la validité et au Tribunal d’exercer son contrôle de légalité. 60. Par ailleurs, la question de savoir si la motivation est fondée ne relève pas de l’appréciation du présent moyen, mais de celle du deuxième moyen. À cet égard, il convient de rappeler que l’obligation de motiver un acte constitue une forme substantielle qui doit être distinguée de la question du bienfondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’un acte consiste à exprimer formellement les motifs sur (suite en page 13).


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Elle condamne

l’usage de la violence (suite de la page 12). lesquels repose cet acte. Si ces motifs sont entachés d’erreurs, celles-ci entachent la légalité au fond dudit acte, mais non la motivation de celui-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés (voir arrêt du 5 novembre 2014, Mayaleh/Conseil, T 307/12 et T 408/13, EU:T:2014:926, point 96 et jurisprudence citée). 61. Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme non fondé, le bien-fondé des motifs fournis par le Conseil à l’égard des requérants devant être apprécié dans le cadre du deuxième moyen. Sur le deuxième moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation 62. Dans le cadre de ce moyen, les requérants contestent le bien-fondé des motifs des actes attaqués pour autant qu’ils les concernent. 63. À cet égard, l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte») exige notamment que le juge de l’Union s’assure que la décision par laquelle des mesures restrictives ont été adoptées ou maintenues, qui revêt une portée individuelle pour la personne ou l’entité concernée, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur la question de savoir si ces motifs ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme étant suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (arrêt du 18 juillet 2013, Com-

mission e.a./Kadi, C 584/10 P, C 593/10 P et C 595/10 P, EU:C:2013:518, point 119). 64. Une telle appréciation doit être effectuée en examinant les éléments de preuve et d’information non de manière isolée, mais dans le contexte dans lequel ils s’insèrent. En effet, le Conseil satisfait à la charge de la preuve qui lui incombe s’il fait état devant le juge de l’Union d’un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir l’existence d’un lien suffisant entre l’entité sujette à une mesure de gel de ses fonds et le régime ou, en général, les situations combattues (voir arrêt du 20 juillet 2017, Badica et Kardiam/ Conseil, T 619/15, EU:T:2017:532, point 99 et jurisprudence citée). 65. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, l’activité de la Cour et du Tribunal est régie par le principe de libre appréciation des preuves et le seul critère pour apprécier la valeur des preuves produites réside dans leur crédibilité. En outre, pour apprécier la valeur probante d’un document, il faut vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue et tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable (voir, en ce sens, arrêt du 14 mars 2018, Kim e.a./Conseil et Commission, T 533/15 et T 264/16, EU:T:2018:138, point 224 et jurisprudence citée). 66. C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le deuxième moyen. En ce qui concerne M. Boshab 67. M. Boshab conteste, d’une part, sa responsabilité

dans l’arrestation des militants et des membres de l’opposition ainsi que dans le recours disproportionné à la force par les services de sécurité, en invoquant notamment ses efforts pour maintenir les services dans l’humanisation de leurs rapports avec les citoyens et en contestant la conclusion du Conseil selon laquelle le recours à la force par les effectifs placés sous sa responsabilité était illégal et disproportionné. D’autre part, il fait valoir que le Conseil lui impute des fonctions qu’il n’a pas eues, notamment de coordination du travail des gouverneurs de province, et observe que le pouvoir hiérarchique dont il disposait en tant que ministre de l’Intérieur et de la Sécurité sur les services de sécurité ne peut s’entendre comme une intégration à la structure de commandement de la police et se limite, en pratique, à la transmission de rapports mensuels par le commissaire général. En outre, il conteste son implication actuelle dans les faits qui fondent la décision de maintenir son nom sur les listes litigieuses, dans la mesure où il a quitté ses fonctions ministérielles le 19 décembre 2016. 68. Le Conseil conteste ces arguments. (ndlr, le Conseil cite un rapport du bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH) selon lequel, «entre le 15 et le 31 décembre 2016, le BCNUDH a pu documenter qu’au moins 40 personnes ont été tuées, dont cinq femmes et deux enfants, 147 blessées, dont 14 femmes et 18 enfants, par un usage excessif et disproportionné de la force, y compris l’utilisation de balles réelles, par les forces de défense et de sécurité, principalement par les militaires des [FARDC], afin d’empêcher la population de prendre part aux

mouvements de protestation». (...) 76. Il s’ensuit que la méthode d’élaboration de chacun de ces trois rapports, en particulier le fait que les autorités publiques concernées de la République Démocratique du Congo aient été entendues lors de la collecte et de la confirmation de l’information contenue dans chacun desdits rapports, lesdits rapports étant, au demeurant, publics, ainsi que le fait qu’ils proviennent d’une organisation internationale telle que l’Organisation des Nations unies (ONU) permettent au Tribunal de les prendre en compte et de considérer leur valeur probante comme étant suffisante, à la lumière de la jurisprudence mentionnée au point 64 ci-dessus, pour venir au soutien des motifs invoqués par le Conseil dans les actes attaqués, selon lesquels M. Boshab s’est rendu responsable de l’arrestation de militants et de membres de l’opposition, ainsi que d’un recours disproportionné à la force, notamment entre septembre et décembre 2016, en réponse à des manifestations organisées à Kinshasa, pendant lesquelles de nombreux civils ont été tués ou blessés par les services de police et de sécurité. 77. Or, en se limitant à indiquer, notamment dans la réplique, que le Conseil n’établit pas en quoi le recours à la force n’était ni légal, ni nécessaire, ni proportionné au regard, notamment, des potentiels impératifs de sécurité publique et des troubles à la paix publique auxquels a dû faire face la population congolaise les derniers mois de 2016 et, plus généralement, à la situation extrêmement sensible en République démocratique du Congo, sans apporter le moindre élément probant de nature à contredire les faits, décrits aux points 69, 70, 71 et 72 ci-des-

sus, évoqués par le Conseil sur la base de trois rapports du BCNUDH, M. Boshab n’a pas sérieusement mis en cause les accusations avancées par le Conseil à cet égard, selon lesquelles il y a eu des arrestations arbitraires de militants et de membres de l’opposition ainsi qu’un recours disproportionné à la force par des services de police et de sécurité, notamment par des agents de la PNC, dont le responsable gouvernemental au moment de ces événements était M. Boshab, entre septembre et décembre 2016, en réponse à des manifestations organisées à Kinshasa. 78. En deuxième lieu, en ce qui concerne les responsabilités de M. Boshab en tant que responsable des services de police et de sécurité en République démocratique du Congo, dans les faits évoqués par le Conseil dans les motifs des actes attaqués, il apparaît, ainsi qu’il ressort de l’ordonnance no 15/015 du 21 mars 2015, que, de décembre 2014 à décembre 2016, M. Boshab était responsable en République démocratique du Congo, en tant que vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, de la politique de sûreté nationale, intérieure et extérieure ainsi que du maintien de l’ordre public, de la sécurité publique et de la protection des personnes et de leurs biens. Il ressort également du dossier, notamment de l’article 6 de la loi organique no 11/013 du 11 août 2011, portant organisation et fonctionnement de la PNC, que celle-ci était placée, pendant cette période, sous la responsabilité du ministre ayant les affaires intérieures dans ses attributions. 79. M. Boshab prétend, toutefois, que son pouvoir hiérarchique sur la PNC et les services de sécurité se limitait, en pratique, à la réception de rapports mensuels élaborés par le com-

missaire général de la PNC. 80. À cet égard, ainsi que le Conseil le fait valoir à juste titre, ce dernier n’est pas tenu de démontrer une implication personnelle de M. Boshab dans les actes de répression visés par les mesures restrictives litigieuses. Il est suffisant que le Conseil, du fait des responsabilités importantes exercées par M. Boshab, puisse légitimement considérer que celuici faisait partie des responsables de la répression contre la population civile, d’autant plus que, dans le cas d’espèce, ce sont des effectifs appartenant à la PNC et à d’autres forces de sécurité, dont la responsabilité appartenait à M. Boshab en tant que vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, qui sont mentionnés dans les trois rapports du BCNUDH mentionnés aux points 69, 70, 71 et 72 ci-dessus, comme ayant été responsables des actes susvisés (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 3 juillet 2014, Alchaar/Conseil, T 203/12, non publié, EU:T:2014:602, point 141). 81. Par ailleurs, la lettre reproduite dans l’annexe C.23 ne met pas en question la conclusion formulée au point 80 ci-dessus. Dans cette lettre du 20 mars 2015, envoyée, notamment, au commissaire général de la PNC et à l’administrateur général de l’ANR, M. Boshab rappelle la protection des droits fondamentaux reconnus aux citoyens par la Constitution congolaise et le respect de certaines règles par les forces de l’ordre et de la sécurité. 82. Or, d’une part, cette lettre n’est pas de nature à démontrer que les forces de l’ordre et de la sécurité placées sous la responsabilité de M. Boshab ont effectivement respecté les règles qui y ont été rappelées. Au

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contraire, ainsi que cela a été conclu au point 77 ci-dessus, M. Boshab n’a pas sérieusement mis en cause les accusations avancées par le Conseil dans les actes attaqués sur la base des trois rapports du BCNUDH mentionnés aux points 69, 70, 71 et 72 ci-dessus et qui font état d’arrestations de militants et de membres de l’opposition ainsi que d’un recours disproportionné à la force par des services de police et de sécurité, notamment par des agents de la PNC, dont le responsable gouvernemental au moment des événements en question était M. Boshab, entre septembre et décembre 2016, en réponse à des manifestations organisées à Kinshasa, et donc d’un manque de respect de telles règles par lesdits services de police et de sécurité. D’autre part, cette lettre n’est pas de nature à exonérer M. Boshab de la responsabilité dans les faits décrits dans ces trois rapports du BCNUDH et ne met ainsi pas en question la conclusion formulée au point 80 ci-dessus, dans la mesure où aucun élément n’indique que M. Boshab se serait distancié, lors des événements décrits dans les trois rapports du BCNUDH susmentionnés ou à la suite de tels événements, des agissements des services de police et de sécurité susmentionnés, dont il était le responsable politique. 83. Par conséquent, il y a lieu d’écarter l’argument de M. Boshab, soulevé notamment au point 68 de la réplique, selon lequel le pouvoir hiérarchique dont M. Boshab disposait, en tant que ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, sur les services de sécurité se limitait à la réception de rapports mensuels et selon lequel le «pouvoir hiérarchique du [m]inistre de l’[I]ntérieur et de la [S]écurité sur la [p]olice nationale et (suite en page 14).


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Elle articule

ses accusations

(suite de la page 13).

les services de sécurité (...) ne peut donc s’entendre comme une intégration à la structure de commandement de la police». 84. En troisième lieu, quant aux responsabilités de M. Boshab en tant que responsable de la coordination du travail des gouverneurs provinciaux, dans les faits évoqués par le Conseil dans les motifs des actes attaqués, il ressort, d’une part, de l’article 3 de la Constitution congolaise ainsi que de l’article 2 de la loi no 08/012 du 31 juillet 2008, portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces, que, dans le cadre de la décentralisation, les provinces sont dotées de la personnalité juridique et jouissent de l’autonomie de gestion de leurs ressources humaines, économiques, financières et techniques. D’autre part, si l’article 202 de la Constitution congolaise établit une compétence exclusive du pouvoir central sur la défense nationale et sur la police nationale, son article 203 prévoit une compétence concurrente du pouvoir central et des provinces en ce qui concerne la sûreté intérieure. 85. À cet égard, selon l’article 63 de la loi no 08/012, le gouverneur veille à la sécurité et à l’ordre public dans la province. En outre, la loi organique no 11/013 prévoit, dans son article 6, que la PNC est soumise à l’autorité civile locale et placée sous la responsabilité du ministre ayant les affaires intérieures dans ses attributions. Par ailleurs, l’ordonnance no 15/015 du 21 mars 2015 prévoit que le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité coordonne les rapports entre les membres du gouvernement et les gouverneurs de province en collaboration avec le ministère en charge de la décentralisation.

86. Il s’ensuit que M. Boshab avait un rôle de coordination du pouvoir central avec les gouverneurs de province, en vue notamment d’assurer une bonne répartition des compétences concurrentes et exclusives de la province et du gouvernement central, comme d’ailleurs il l’observe au point 64 de la réplique. En effet, comme cela a été mentionné au point 85 ci-dessus, le gouverneur veille à la sécurité et à l’ordre public dans la province, la PNC étant soumise à l’autorité civile locale et placée sous la responsabilité du ministre ayant les affaires intérieures à sa charge, ce qui requiert et présuppose un travail de coordination en cette matière entre, d’une part, le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité et, d’autre part, les gouverneurs de province. 87. En outre, les compétences de M. Boshab, en tant que ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, de coordination du pouvoir central avec les gouverneurs de province sont corroborées par la lettre du 3 novembre 2016, dont une copie a été jointe au mémoire en défense en tant qu’annexe B.16 et dont l’existence et le contenu n’ont pas été contestés par M. Boshab. En effet, dans cette lettre, adressée à tous les gouverneurs de province et, par ailleurs, transmise pour information au président de la République, au premier ministre, au ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, au ministre de la Justice, garde des Sceaux et droits humains, ainsi qu’au commissaire général de la PNC, à l’administrateur général de l’ANR et au directeur général de la migration, M. Boshab a donné des instructions claires aux gouverneurs provinciaux visant à interdire dans chaque province la présence et l’activité de toute

organisation non gouvernementale n’ayant pas la personnalité juridique en droit congolais. 88. Il découle de ce qui précède que les éléments du dossier représentent, à la lumière de la jurisprudence mentionnée au point 64 ci-dessus, un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir que M. Boshab était responsable de la coordination du travail des gouverneurs provinciaux en matière de services de police et de sécurité. 89. Par conséquent, il y a lieu d’écarter l’argument de M. Boshab selon lequel ce dernier n’était pas responsable de la coordination du travail des gouverneurs provinciaux. 90. En quatrième lieu, M. Boshab conteste son implication actuelle dans les faits qui fondent la décision de maintenir son nom sur les listes litigieuses, dans la mesure où il a quitté ses fonctions ministérielles le 19 décembre 2016, et considère que les mesures restrictives litigieuses seraient par conséquent obsolètes à son égard. 91. Cependant, cet argument ne saurait prospérer. 92. Il convient d’abord de rappeler que M. Boshab a été désigné sur les listes litigieuses, puisque, lorsqu’il exerçait les fonctions de vicePremier ministre et de ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, entre décembre 2014 et décembre 2016, il aurait contribué, en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constitutifs de graves violations des droits de l’homme en République démocratique du Congo. 93. À cet égard, le fait que la désignation de M. Boshab sur les listes litigieuses se soit fondée sur des fonctions gouvernementales qu’il n’exerçait plus à la date d’une telle désignation, et qu’il n’a pas exercées de-

puis lors, ne justifie pas, en soi, l’annulation des mesures restrictives en discussion dans la présente affaire. 94. En effet, en premier lieu, dans la mesure où, comme c’est le cas en l’espèce, il n’y a pas eu de changement du régime au pouvoir en République démocratique du Congo alors que M. Boshab était membre du gouvernement, il est permis de considérer, à défaut de preuves ou d’indices en sens contraire et en tenant compte en particulier du fait que, interrogé à cet égard lors de l’audience, M. Boshab a confirmé qu’il n’avait pas pris de position se distanciant dudit régime, que, lors de la cessation de ses fonctions, il était resté associé au régime de ce pays et avait donc contribué, en les planifiant, les dirigeant ou les commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en République démocratique du Congo et que, dès lors, sa désignation sur les listes litigieuses était justifiée (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 22 avril 2015, Tomana e.a./ Conseil et Commission, T 190/12, EU:T:2015:222, point 164). 95. En second lieu, dans les circonstances propres de l’espèce, notamment une période de temps aussi courte entre la cessation des fonctions gouvernementales de M. Boshab, en décembre 2016, et sa désignation sur les listes litigieuses le 29 mai 2017, date d’adoption des actes attaqués, ainsi que le fait, mentionné au point 94 ci-dessus, que M. Boshab a confirmé qu’il n’avait pas pris de position se distanciant, lors de la cessation de ses fonctions, du régime au pouvoir en République démocratique du Congo, il convient de constater que c’est à juste titre que le Conseil a pu considérer que M. Boshab, à la date de l’adoption

des actes attaqués, devait être tenu comme responsable d’avoir contribué, en les planifiant, les dirigeant ou les commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en République démocratique du Congo et que, dès lors, sa désignation sur les listes litigieuses était justifiée. 96. Il convient également de rappeler que, dans la présente affaire, M. Boshab a uniquement contesté son inscription initiale sur les listes litigieuses, opérée par les actes attaqués. L’objet du présent recours ne porte donc pas sur les renouvellements d’une telle inscription qui ont eu lieu ultérieurement et, par conséquent, tout argument tendant à contester de tels renouvellements ou le maintien de son nom sur lesdites listes est inopérant. 97. Au vu des considérations qui précèdent, il convient d’écarter l’argument selon lequel les mesures restrictives litigieuses seraient obsolètes à l’égard de M. Boshab. 98. Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être écarté en ce qui concerne M. Boshab. En ce qui concerne M. Kande Mupompa. 99. M. Kande Mupompa fait valoir, dans un premier argument, qu’aucun fait précis n’établit que les forces de sécurité et de la PNC auraient fait usage d’un recours disproportionné à la force, de la répression violente et des exécutions extrajudiciaires, ni qu’il en serait le responsable, le Conseil n’apportant aucune précision sur son rôle précis et se fondant uniquement sur ses fonctions. Il soutient que le Conseil n’a pas établi en quoi le recours à la force n’était ni légal, ni nécessaire, ni proportionné au regard des potentiels impératifs de sécurité publique et des troubles à la paix

publique auxquels a dû faire face la population congolaise les derniers mois de l’année 2016. (...). 100. Le Conseil conteste ces arguments. (ndlr, extraits de plusieurs rapports de «Human Rights Watch», se fondant sur des informations provenant de l’ONU et d’un rapport du BCNUDH).

En ce qui concerne M. Kazembe Musonda. 127. M. Kazembe Musonda observe, dans un premier argument, qu’aucun fait précis n’établit que les forces de sécurité et de la PNC dans la province du Haut-Katanga auraient fait usage d’un recours disproportionné à la force et à la répression violente, dont la responsabilité lui incomberait. (...). 128. Le Conseil conteste ces arguments. (ndlr, un rapport du BCNUDH a documenté la mort de 12 personnes, et 64 blessés, pour la plupart résultant de l’utilisation de la force létale par les forces de défense et de sécurité). (...) En ce qui concerne M. Mende. 157. M. Mende affirme n’avoir jamais mené une politique répressive envers les médias en violation de la liberté d’expression et, au contraire, affirme avoir toujours milité en faveur de la liberté de presse. Tout d’abord, il fait valoir que le «décret» du 12 novembre 2016, auquel il est fait référence dans les motifs d’inscription de son nom sur les listes litigieuses, est, en réalité, un arrêté ministériel portant réglementation de l’exploitation de la radiodiffusion sonore et de la télévision par des personnes physiques et morales étrangères, en exécution de la loi no 96-002 du 22 juin 1996, fixant les modalités de l’exercice de la liberté de

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presse en République démocratique du Congo. Cette dernière prévoit, selon lui, que «[l]es personnes physiques ou morales de nationalité étrangère peuvent être autorisées à créer une entreprise de communication audiovisuelle sous réserve de réciprocité et moyennant une participation majoritaire en faveur des Zaïrois dans le capital de 1’entreprise». Ensuite, il met en exergue qu’il lui est reproché d’avoir violé, le 12 novembre 2016, un accord signé ultérieurement, le 31 décembre 2016, ce qui alourdirait, selon lui, le bilan des erreurs manifestes d’appréciation du Conseil. Enfin, il fait remarquer, d’une part, que la reprise de la diffusion des médias de radiodiffusion et de télévision a bien eu lieu, ce qui d’ailleurs démontrerait l’inexistence de toute implication actuelle de sa part dans les faits fondant les actes attaqués et l’obsolescence de ces derniers en ce qu’ils le concernent, le Conseil établissant une présomption en sa défaveur du seul fait de ses fonctions et, d’autre part, que la non-reprise de la diffusion de certains médias serait due au fait que ces derniers faisaient l’objet d’enquêtes judiciaires, indépendamment de toute implication de sa part et dans le cadre desquelles les signaux de leurs stations avaient été coupés par des instances judiciaires. À cet égard, M. Mende fait valoir que la mise en œuvre de ladite réglementation a été proportionnelle aux impératifs de sécurité publique et aux troubles à la paix publique auxquels a fait face la population congolaise les derniers mois de 2016. 158. Le Conseil conteste ces arguments. 159. Premièrement, quant aux arguments de M. Mende tendant à mettre en cause les (suite en page 15).


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Ces personnalités

que l’UE accable (suite de la page 14). motifs de sa désignation dans les actes attaqués, selon lesquels il aurait mené une politique répressive envers les médias en violation de la liberté d’expression et d’information et qui compromettrait une solution consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en République démocratique du Congo, il convient de constater, en premier lieu, que, à l’annexe B.3, à la page 24, il est indiqué ce qui suit : «Le 14 décembre 2016, le gouverneur de la province du Kasaï Oriental a annoncé, lors d’une déclaration sur les chaînes de télévision et les stations de radio locales, une interdiction à titre préventif des débats politiques sur tous les canaux médiatiques de la province, invoquant des raisons de sécurité. Le 15 décembre 2016, l’Autorité de régulation des postes et des télécommunications (ARPTC) a ordonné aux fournisseurs d’accès Internet de restreindre l’accès à tous les réseaux sociaux à partir du 18 décembre 2016 à 23 h 59’. L’accès aux réseaux sociaux a ainsi été coupé en RDC du 20 décembre au 28 décembre 2016. Certains fournisseurs d’accès Internet ont même dû couper entièrement l’accès à Internet pendant la même période. Le 19 décembre, alors que les réseaux sociaux fonctionnaient encore, le BCNUDH a noté que la chaîne de télévision Canal Congo (CCTV) et Radio Liberté Kinshasa ont été fermées. Les deux signaux ont été rétablis le 23 janvier 2017, conformément aux dispositions de l’accord politique du 31 décembre. Le signal de Radio France Internationale (RFI), qui a été suspendu le 5 novembre 2016, qui a continué à être bloqué tout au long des événements des 19 et 20 décembre, restait encore bloqué au moment de la rédaction du présent rapport.» 160. En deuxième lieu, toujours à l’an-

nexe B.3, aux pages 26 et 27, il est indiqué ce qui suit : «Les journalistes et autres travailleurs des médias ont continué d’être victimes d’actes d’intimidation ou de harcèlement au cours de la période considérée [entre les 15 et 31 décembre 2016], y compris des arrestations arbitraires et des détentions illégales, prétendument dans le but de les empêcher de rendre compte de la situation sécuritaire dans les principales villes de la RDC. À Kananga, province du Kasaï, le 17 décembre, à 7 h 30, un journaliste de la Radiotélévision Espérance (RTE) a été arbitrairement arrêté et battu par deux éléments de la Police Militaire alors qu’il rentrait chez lui. Les auteurs l’ont accusé d’avoir violé un couvre-feu et lui ont extorqué 83 000 francs congolais, ainsi que son microphone. À Kinshasa, un journaliste de l’Agence France Presse (AFP) et son assistant ont été arrêtés le 19 décembre par des agents de la Police universitaire alors qu’ils couvraient la situation sécuritaire près de l’Université de Kinshasa. Les deux ont ensuite été interrogés par des agents de l’ANR, et l’un d’eux a vu les données de son téléphone mobile fouillées. Ils ont été libérés le même jour dans la soirée. Le 20 décembre, un journaliste de Vision Info a été arrêté, a eu les yeux bandés et a été interrogé par des agents de l’ANR, qui l’auraient accusé de se référer aux événements du 19 décembre lors d’un spectacle en ligne auquel il avait participé. Il a été libéré trois heures plus tard. Le 21 décembre, à Goma, province du Nord-Kivu, un journaliste étranger, qui couvrait l’arrestation des membres de LUCHA manifestant devant le gouvernorat, a été arrêté par des agents de la PNC, transféré au poste de police P2 et libéré le même jour. À Mbuji-

Mayi, province du Kasaï Oriental, le 22 décembre, un journaliste de la Radiotélévision nationale congolaise (RTNC) a été battu par des agents de la PNC affectés à la sécurité du gouverneur. Ils l’auraient accusé de ne pas couvrir une marche qu’ils avaient menée dans toute la ville pour observer les activités de la population dans le contexte des événements du 19 décembre. Les mêmes agents de police ont également menacé un autre journaliste de la RTNC, ainsi qu’un journaliste de Radiotélévision Océan pacifique (RTOP).» 161. En troisième lieu, à l’annexe B.4, à la page 44, il est mentionné que «[d]es atteintes à la liberté de la presse, notamment l’arrestation de huit journalistes, et des destructions de biens, notamment de locaux de partis politiques, de commissariats de police et de magasins, ont également été documentées » et que « [c]es violations ont conduit à la réduction encore plus grande de l’exercice des droits civils et politiques dans le pays». 162. En quatrième lieu, à l’annexe B.5, à la page 69, il est indiqué ce qui suit : « Des médias et des journalistes ont été des cibles d’abus et d’intimidation de la part des autorités congolaises et quelques stations de radio ont été fermées. Par exemple, le signal de Radio France internationale (RFI) a été suspendu pendant toute la journée du 16 février 2016 [...] ; et a été suspendue encore depuis le 5 novembre 2016. Le 19 septembre 2016 à Kinshasa huit journalistes et d’autres membres du personnel de médias nationaux et internationaux ont été victimes d’attaques et de détentions arbitraires par des forces de sécurité lors de manifestations. En outre, le 12 novembre 2016, le ministre des Communications et des

Médias a adopté un décret limitant de facto la possibilité d’opérer en RDC.» 163. Il convient de constater à cet égard, d’une part, que M. Mende reconnaît que les émissions de plusieurs médias ont été interrompues en République démocratique du Congo. Par ailleurs, il donne l’exemple de la reprise de diffusion de Radio France International le 10 août 2017 sans pour autant donner une explication convaincante sur l’interruption d’émission de cette chaîne jusqu’à une date aussi tardive, notamment au regard des événements des derniers mois de 2016 qui, selon lui, avaient justifié des restrictions à la liberté d’expression. Dans la réplique, M. Mende reconnaît également que certains médias restent toujours bloqués dans le cadre de procédures judiciaires en cours, sans toutefois expliquer, comme le fait valoir le Conseil à juste titre, la raison pour laquelle des poursuites judiciaires empêcheraient la reprise des émissions de ces médias. 164. D’autre part, M. Mende ne fournit aucune explication concernant les arrestations et agressions de journalistes les derniers mois de 2016 en République démocratique du Congo, décrites dans les annexes B.3, B.4 et B.5 et mentionnées aux points 159 à 162 ci-dessus, et qui sont de nature à démontrer l’existence d’une politique répressive envers les médias, ainsi qu’il est mentionné dans les motifs de sa désignation sur les listes litigieuses. Interrogé à cet égard lors de l’audience, M. Mende s’est limité à affirmer que, en tant que ministre des Communications et des Médias, il ne serait pas responsable de ces arrestations. Toutefois, à supposer même que M. Mende n’ait pas eu cette responsabilité, il n’en demeure pas moins que de telles arrestations, dont M. Mende

ne conteste pas par ailleurs l’existence, sont, en soi, de nature à confirmer des atteintes au droit à la liberté d’expression et d’information en République démocratique du Congo. Or, M. Mende, en tant que ministre des Communications et des Médias, est responsable, au sein du gouvernement congolais, de la mise en œuvre d’une politique garantissant ces droits, ainsi qu’il ressort du point 6 sous le titre B, intitulé «Attributions spécifiques aux ministères» de l’ordonnance no 15/015 du 21 mars 2015. 165. Il résulte de ce qui précède que les éléments du dossier représentent, à la lumière de la jurisprudence mentionnée au point 64 ci-dessus, un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir que M. Mende était responsable, en tant que ministre des Communications et des Médias, d’avoir fait obstacle à une solution consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en République démocratique du Congo. 166. À cet égard, contrairement à ce que soutient M. Mende, le Conseil n’est nullement tenu de démontrer son implication personnelle dans les actes de répression visés par les mesures restrictives litigieuses. Il est suffisant que le Conseil, du fait des responsabilités importantes exercées par M. Mende, puisse légitimement considérer que celuici faisait partie des responsables de la répression contre la population civile, d’autant plus que, dans le cas d’espèce, ce sont des médias et des journalistes qui ont fait l’objet d’une politique répressive, alors que M. Mende exerçait, et exerce toujours d’ailleurs, les fonctions de ministre des Communications et des Médias (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 3 juillet 2014, Alchaar/Conseil, T

203/12, non publié, EU:T:2014:602, point 141). 167. Par ailleurs, à supposer même que les faits qui sont venus au soutien des motifs des mesures restrictives prises à l’égard de M. Mende ne soient plus d’actualité, comme il le fait valoir, une telle circonstance ne serait en tout état de cause pas de nature à remettre en question son inscription sur les listes litigieuses. 168. Il convient en effet de rappeler que M. Mende a été désigné sur les listes litigieuses au motif que, dans l’exercice de ses fonctions de ministre des Communications et des Médias, fonctions qu’il exerce toujours, il aurait été responsable d’avoir fait obstacle à une solution consensuelle et pacifique en vue de la tenue d’élections en République démocratique du Congo, notamment par des actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, ou des actions portant atteinte à l’État de droit. 169. Il convient également de rappeler que, dans la présente affaire, M. Mende a uniquement contesté son inscription initiale sur les listes litigieuses, opérée par les actes attaqués. L’objet du présent recours ne porte donc pas sur les renouvellements d’une telle inscription qui ont eu lieu ultérieurement et, par conséquent, tout argument de M. Mende tendant à contester de tels renouvellements ou le maintien de son nom sur lesdites listes est inopérant. 170. Deuxièmement, l’argument de M. Mende selon lequel il lui serait reproché par le Conseil d’avoir violé, le 12 novembre 2016, un accord signé ultérieurement, le 31 décembre 2016, est manifestement non fondé. 171. En effet, cet argument résulte d’une lecture manifestement erronée de la part de M. Mende des motifs de sa désignation sur les listes litigieuses, laquelle se lit comme suit :

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«Le 12 novembre 2016, il a adopté un décret limitant la possibilité pour des médias étrangers de diffuser en RDC. En violation de l’accord politique conclu le 31 décembre 2016 entre la majorité présidentielle et les partis d’opposition, en mai 2017 la diffusion d’un certain nombre de médias n’avait toujours pas repris.» 172. Comme le Conseil le fait valoir à cet égard à juste titre, entre les deux phrases il y a un point final, ce qui indique clairement que le Conseil a reproché à M. Mende, d’une part, d’avoir adopté, le 12 novembre 2016, un décret limitant la possibilité pour des médias étrangers de diffuser en République démocratique du Congo et, d’autre part, le fait que, en violation de l’accord politique conclu le 31 décembre 2016 entre la majorité présidentielle et les partis d’opposition, en mai 2017, la diffusion d’un certain nombre de médias n’avait toujours pas repris. 173. Cet argument doit donc être écarté. 174. Troisièmement, quant aux arguments de M. Mende concernant le décret du 12 novembre 2016, mentionné dans les motifs de sa désignation dans les actes attaqués comme limitant la possibilité pour les médias étrangers de diffuser en République démocratique du Congo, le Conseil fait valoir que, bien qu’il s’agisse, comme M. Mende le souligne, d’un «arrêté ministériel» et non d’un «décret», cet instrument a effectivement limité la diffusion des médias et, partant, la liberté de la presse. (...) 178. Au vu des considérations qui précèdent, il convient d’écarter le deuxième moyen en ce qui concerne M. Mende. En ce qui concerne M. Shadary. 211. M. Shadary conteste, d’une part, l’accusation du Conseil concernant (suite en page 16).


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Elle articule

ses accusations

(suite de la page 15).

sa responsabilité dans l’arrestation d’activistes et de membres de l’opposition, qui ne serait étayée ni par des indications sur les circonstances de temps et de lieu ni par des indications sur l’identité des victimes et des auteurs et qui se fonderait uniquement sur les fonctions qu’il a exercées. D’autre part, s’agissant de l’usage disproportionné de la force au Kongo Central, à Kinshasa et au Kasaï, il affirme que la police s’est limitée à riposter aux menaces existantes, notamment de la part des membres de la milice «Kamuina Nsapu», qui utilisaient des armes de guerre et qui avaient commis des atrocités envers des civils et les forces de l’ordre. À cet égard, il fait remarquer que, concomitamment, des négociations ont été menées par le ministère de l’Intérieur et de la Sécurité et que plusieurs enquêtes judiciaires ont été ouvertes afin de déterminer les responsabilités dans les événements au Kasaï. Il fait valoir que la PNC est obligée par la loi de respecter la Constitution et, notamment, de ne recourir à la force qu’en cas de nécessité absolue et uniquement pour atteindre un objectif légitime, et en tout état de cause dans le respect du «principe de proportionnalité et de progressivité». Il souligne que s’il y a pu avoir une utilisation excessive de la force par des officiers de police, ceux-ci ont été poursuivis devant des juridictions militaires. En outre, en se référant à la Constitution de la République démocratique du Congo de 2006 et à la loi portant principes fondamentaux de libre administration des provinces, il conteste avoir les fonctions, qui lui sont attribuées par le Conseil, de coordinateur du travail

des gouverneurs provinciaux, en affirmant que la gestion des provinces est assurée de manière autonome par les gouverneurs respectifs, et observe que le pouvoir hiérarchique dont il disposait en tant que ministre de l’Intérieur et de la Sécurité sur les services de sécurité ne peut s’entendre comme une intégration à la structure de commandement de la police et se limite, en pratique, à la transmission de rapports mensuels par le commissaire général. Il fait valoir, dans la réplique, qu’il a entrepris différentes démarches, en tant que ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, en vue de trouver des solutions politiques durables au Kongo Central. Il souligne que, le 26 février 2018, il a quitté toutes fonctions gouvernementales. Par ailleurs, M. Shadary observe que le Conseil vise une période temporelle passée, ne permettant pas de retenir une quelconque implication actuelle de sa part. 212. Le Conseil conteste ces arguments. 213. En premier lieu, quant à la responsabilité de M. Shadary dans l’arrestation d’activistes et des membres de l’opposition, ainsi que de l’usage disproportionné de la force depuis sa nomination en tant que vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, il ressort de plusieurs documents, auxquels il est fait référence dans différents liens Internet fournis par le Conseil dans l’annexe B.14, à la page 236, au paragraphe 3, qui sont des documents accessibles au public dont le contenu est connu de M. Shadary, ainsi qu’il l’a confirmé lors de l’audience, et a pu être vérifié par le Tribunal, qu’il existe un faisceau d’indices suffisamment concrets, précis et concordants permettant d’établir, à la lu-

mière de la jurisprudence mentionnée au point 64 ci-dessus, l’existence d’un lien suffisant entre M. Shadary et les faits qui lui sont imputés par le Conseil et décrits dans les motifs des actes attaqués. 214. En effet, premièrement, dans la note du BCNUDH de janvier 2017, il est mentionné que, «[d]urant le mois de janvier 2017, le BCNUDH a documenté 427 violations des droits de l’homme sur l’étendue du territoire de la RDC» et que, «[p] armi ces violations, au moins 66 sont des atteintes au droit à la vie dont 12 exécutions extrajudiciaires par des agents de l’État ayant fait 26 victimes». Selon ce même document, «[p]armi les agents de l’État, les principaux auteurs des violations des droits de l’homme documentées au mois de janvier 2017 sont [...] les agents de la PNC, qui sont responsables de 108 violations des droits de l’homme». Le même document fait valoir que, «[d] ans les territoires affectés par le conflit armé, un total de 319 violations des droits de l’homme a été enregistré par le BCNUDH ayant causé la mort d’au moins 44 civils», que, «[p]armi ces violations [...] 134 [...] ont été commises par les agents de l’Etat (causant la mort d’au moins 13 civils)», que «le BCNUDH a documenté 42 violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales liées à des restrictions de l’espace démocratique sur l’ensemble du territoire congolais» et que, «[l]es auteurs présumés des violations documentées pendant le mois de janvier 2017 sont, à l’instar des mois précédents, les agents de la PNC (26 violations), suivis par les combattants des groupes armés (six violations), les agents de l’ANR (cinq violations) et des militaires des FARDC». 215. Deuxièmement,

dans la note du BCNUDH de février 2017, il est mentionné que, au cours de cette période, «les militaires des FARDC ont été responsables de 183 victimes d’exécutions extrajudiciaires - dont 71 enfants et cinq femmes - [...] principalement dans la province du Kasaï Central (151 victimes, dont 60 enfants), mais aussi au Tanganyika (20 victimes dont cinq femmes et huit enfants), au Nord-Kivu (10 victimes dont un enfant) et au HautUélé (deux victimes mineures)». Le même document indique que «[l]es agents de la PNC ont [...] été responsables de l’exécution extrajudiciaire d’au moins 23 personnes» au cours de la même période, lors de laquelle le BCNUDH a également «documenté 57 violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales liées à des restrictions de l’espace démocratique sur l’ensemble du territoire congolais», dont les principaux auteurs «sont, à l’instar des mois précédents, les agents de la PNC (32 violations), suivis par les militaires des FARDC (18 violations), les agents de l’ANR (deux violations), les autorités politico-administratives (deux violations) et les combattants des groupes armés (deux violations) ». D’après ce document, les violations en question « ont été commises principalement dans les provinces de Kinshasa (16 violations) et du Kongo Central (13 violations)». 216. Troisièmement, dans la note du BCNUDH de mars 2017, il est mentionné que, au cours cette période, il a été rapporté l’existence de «101 victimes d’exécutions extrajudiciaires par des agents de l’État», notamment de la part d’agents de la PNC et des FARDC. Selon le même document, au cours de cette période, le BCNUDH a pu constater que «les agents

de la PNC [...] [avaie] nt été les auteurs de l’exécution extrajudiciaire d’au moins 10 personnes, dont deux femmes et quatre enfants, dont la moitié commise au Kasaï Central», et que «73 violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales liées à des restrictions de l’espace démocratique sur l’ensemble du territoire congolais » avaient été commises par des « agents de la PNC (33 violations), suivis des agents de l’ANR (12 violations) et des militaires des FARDC (11 violations)». Selon ce même document, «[l]es membres de partis politiques (21 victimes) et d’organisations de la société civile (13 victimes), ainsi que deux journalistes, [avaie]nt été particulièrement visés». 217. Or, le fait que les trois notes mentionnées aux points 214, 215 et 216 ci-dessus proviennent d’une organisation internationale telle que l’ONU permettent au Tribunal de les prendre en compte et de considérer leur valeur probante comme étant suffisante pour venir au soutien des motifs invoqués par le Conseil dans les actes attaqués, concernant la responsabilité de M. Shadary dans l’arrestation d’activistes et des membres de l’opposition, ainsi que de l’usage disproportionné de la force par des agents de l’État, y compris de la PNC et de l’ANR. 218. Quant aux allégations de M. Shadary à cet égard, il a indiqué, notamment dans la réplique, que le Conseil n’établit pas en quoi le recours à la force n’était ni légal, ni nécessaire, ni proportionné au regard, notamment, des potentiels impératifs de sécurité publique et des troubles à la paix publique auxquels a fait face la population congolaise depuis 2016. Il a également indiqué que, au mois d’avril 2017, il aurait effectué une

mission dans les provinces du Kasaï Central et du Kasaï, à la suite de laquelle un dialogue entre les parties en conflit aurait été instauré, et que, en septembre 2017, une conférence sur la paix au Kasaï aurait eu lieu, afin de trouver des solutions pour le conflit dans cette région et de dégager des schémas de relance économique. 219. Or, il convient de constater, d’une part, que les faits ainsi allégués par M. Shadary ne sont pas de nature à remettre en question ceux évoqués par le Conseil, concernant l’arrestation d’activistes et des membres de l’opposition, ainsi que de l’usage disproportionné de la force, notamment entre janvier et mars 2017, et la responsabilité de M. Shadary dans ces événements. D’autre part, il convient également de constater que M. Shadary n’a pas apporté le moindre élément probant de nature à contredire lesdits faits évoqués par le Conseil sur la base des trois notes du BCNUDH mentionnées aux points 214, 215 et 216 cidessus et n’a donc pas sérieusement mis en cause les accusations avancées par le Conseil contre lui. 220. Le Conseil ayant apporté des éléments de preuve permettant au Tribunal de constater l’existence d’un lien suffisant entre M. Shadary et les faits qui lui sont imputés par le Conseil quant à sa responsabilité dans l’arrestation d’activistes et des membres de l’opposition, ainsi que dans l’usage disproportionné de la force depuis sa nomination en tant que vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, tel que la répression ayant eu lieu à Kinshasa en janvier et en février 2017 et le recours disproportionné à la force et à la répression violente dans les provinces du Kasaï, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres

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motifs invoqués par le Conseil pour la désignation de M. Shadary sur les listes litigieuses, notamment concernant l’allégation de l’usage disproportionné de la force dans le cadre des mesures de répression contre des membres du mouvement BDK au Congo Central. 221. En effet, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, eu égard à la nature préventive des mesures restrictives en cause, si, dans le cadre de son contrôle de la légalité des actes attaqués, le juge de l’Union considère que, à tout le moins, l’un des motifs mentionnés est suffisamment précis et concret, qu’il est étayé et qu’il constitue en soi une base suffisante pour soutenir cette décision, la circonstance que d’autres de ces motifs ne le seraient pas ne saurait justifier l’annulation de ladite décision (arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./ Kadi, C 584/10 P, C 593/10 P et C 595/10 P, EU:C:2013:518, point 130). 222. En deuxième lieu, en ce qui concerne les responsabilités de M. Shadary, en tant que responsable des services de police et de sécurité en République démocratique du Congo, dans les faits évoqués par le Conseil dans les motifs des actes attaqués, il est constant, ainsi qu’il ressort de l’ordonnance no 15/015 du 21 mars 2015 que, depuis le 20 décembre 2016, M. Shadary était responsable en République démocratique du Congo, en tant que vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, de la politique de sûreté nationale, intérieure et extérieure, ainsi que du maintien de l’ordre public, de la sécurité publique et de la protection des personnes et de leurs biens. Il ressort également du dossier, notamment (suite en page 17).


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Rapports MONUSCO (suite de la page 16).

de l’article 6 de la loi organique no 11/013 du 11 août 2011, portant organisation et fonctionnement de la police nationale congolaise, que la PNC était placée, pendant cette période, sous la responsabilité du ministre ayant les affaires intérieures dans ses attributions. 223. M. Shadary prétend, toutefois, que son pouvoir hiérarchique sur la PNC et les services de sécurité se limitait, en pratique, à la réception de rapports mensuels élaborés par le commissaire général de la PNC. 224. À cet égard, ainsi que le Conseil le fait valoir à juste titre, et à l’instar de ce qui a été mentionné au point 80 ci-dessous à propos de M. Boshab, prédécesseur de M. Shadary dans les fonctions de vicePremier ministre et de ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, le Conseil n’est pas tenu de démontrer une implication personnelle de M. Shadary dans les actes de répression visés par les mesures restrictives litigieuses. Il est suffisant que le Conseil, du fait des responsabilités importantes exercées par M. Shadary, puisse légitimement considérer que celui-ci faisait partie des responsables de la répression contre la population civile, d’autant plus que, dans le cas d’espèce, ce sont des effectifs appartenant à la PNC et à d’autres forces de sécurité, dont la responsabilité appartenait à M. Shadary en tant que vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, qui sont évoqués dans les trois notes du BCNUDH mentionnés aux points 214, 215 et 216 ci-dessus, comme ayant été responsables des actes susvisés (voir, en ce sens et par analogie,

arrêt du 3 juillet 2014, Alchaar/Conseil, T 203/12, non publié, EU:T:2014:602, point 141). 225. Par conséquent, il y a lieu d’écarter l’argument de M. Shadary, notamment au point 200 de la réplique, selon lequel le pouvoir hiérarchique dont il disposait, en tant que ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, sur les services de sécurité se limitait à la réception de rapports mensuels et selon lequel son «pouvoir hiérarchique [...] sur la [p]olice nationale et les services de sécurité [...] ne p[ouvai]t s’entendre comme une intégration à la structure de commandement de la police». 226. En troisième lieu, quant aux responsabilités de M. Shadary en tant que responsable de la coordination du travail des gouverneurs provinciaux dans les faits évoqués par le Conseil dans les motifs des actes attaqués, ainsi que cela a été conclu au point 86 ci-dessus à propos de M. Boshab, et pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 84 et 85 ci-dessus, M. Shadary avait effectivement un rôle de coordination du pouvoir central avec les gouverneurs de province, en vue notamment d’assurer une bonne répartition des compétences concurrentes et exclusives de la province et du gouvernement central, comme d’ailleurs M. Shadary l’observe. 227. Par conséquent, il y a lieu d’écarter l’argument de M. Shadary selon lequel ce dernier n’était pas responsable de la coordination du travail des gouverneurs provinciaux. 228. En quatrième lieu, M. Shadary observe qu’il a quitté toutes fonctions gouvernementales le 26 février 2018, et considère que les me-

sures restrictives litigieuses seraient par conséquent obsolètes à son égard. Par ailleurs, M. Shadary observe que le Conseil vise une période temporelle passée, ne permettant pas de retenir une quelconque implication actuelle de sa part. 229. Il convient d’abord de rappeler que M. Shadary a été désigné sur les listes litigieuses au motif que, lorsqu’il exerçait les fonctions de vice-Premier ministre et de ministre de l’Intérieur et de

la Sécurité, depuis le 20 décembre 2016, il aurait contribué, en les planifiant, en les dirigeant ou en les commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l’homme en République démocratique du Congo. Par ailleurs, il n’est pas contesté que, le 29 mai 2017, date de l’adoption des actes attaqués, M. Shadary exerçait lesdites fonctions. 230. Il convient également de rappeler que, dans la présente affaire, M. Shadary a

uniquement contesté son inscription initiale sur les listes litigieuses, opérée par les actes attaqués. L’objet du présent recours ne porte donc pas sur les renouvellements d’une telle inscription qui ont eu lieu ultérieurement et, par conséquent, tout argument de M. Shadary tendant à contester de tels renouvellements ou le maintien de son nom sur lesdites listes est inopérant. 231. Au vu des considérations qui précèdent, il convient

d’écarter l’argument de M. Shadary selon lequel les mesures restrictives litigieuses seraient obsolètes à son égard. (...) En ce qui concerne M. Mutondo. 233. M. Mutondo conteste les accusations portées contre lui par le Conseil. Il considère que les comportements qui lui sont reprochés ne lui sont imputés que sur la base de ses fonctions, aucune incrimination précise ne lui ayant été attribuée. Il fait valoir

que les effectifs de l’ANR peuvent, comme cela est prévu par la loi, procéder à des arrestations et des détentions conformément au code de procédure pénale congolais. (...). 234. Le Conseil conteste ces arguments. (ndlr, rapports BCNUDH ont «documenté 1.102 violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales liées à des restrictions de l’espace démocratique sur l’ensemble du territoire national)» (...).

Washington ronge son frein et attend de frapper

Ci-haut, le Président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo accueille en grande pompe un homme blackliste longtemps à Kinshasa par l’ancien régime, l’Américain Peter Pham. Ci-contre, le secrétaire d’État adjoint US pour les Affaires africaines Tibor Peter Nagy Jr., qui, comme tout Américain, n’a pas sa langue dans sa poche. DR.

A

près avoir sillonné la sousrégion - de l’Ouest à l’Est en passant par le Sud (sauf l’Afrique du Sud mais il a déjà rencontré le président sud-africain Cyril Ramaphosa à plus d’une occasion lors des sommets africains) et le centre et amassé une belle moisson de conseils auprès de ses pairs,

cap sur le pays de l’Oncle Sam d’où deux envoyés, celui des États-Unis pour les pays des Grands lacs, Peter Pham, un ami de longue date, longtemps persona non grata à Kinshasa et le secrétaire d’État adjoint pour les Affaires africaines Tibor Peter Nagy Jr., sont venus et ont été accueillis dans la Capitale chaleureusement par le Président FélixAntoine Tshisekedi Tshilombo. Tibor

Peter Nagy Jr. a dit, avant de fouler le sol congolais, tout ce qu’il et l’administration américaine, pensaient du Congo, de son nouveau Chef de l’État et des dirigeants... d’hier. «CE QUE JE RETIENS». Début mars, Tibor Peter Nagy Jr. se trouvait sur le Continent et, à son escale parisienne, après s’être arrêté à Bruxelles, capitale de l’ex-métropole, il

avait multiplié des déclarations dans des médias français captés sur le Continent, Rfi et France 24 notamment, insistant sur ce que les États-Unis d’Amérique retiennent le plus du processus électoral congolais bien qu’émaillé d’irrégularités. «Ce que je retiens, c’est que Kabila n’est plus au pouvoir», déclare-t-il, bille en tête, mercredi 6 mars 2019, dans son interview

LE SOFT INTERNATIONAL | ÉDITION NATIONALE N° 1450 | PAGE 17.

à Rfi. Une réplique à l’autre candidat malheureux à la Présidentielle Martin Fayulu Madidi qui continue de contester son échec du 30 décembre et soutient dans tous les médias, en Europe comme désormais aux États-Unis, que «Monsieur Tshisekedi n’a aucune légitimité, aucun contrôle du pays et que c’est Kabila qui contrôle tout. (suite en page 18).


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Washington attend quel signal viendra de Kinshasa avant de se déterminer (suite de la page 17). Le système Kabila demeure, Monsieur Tshisekedi n’est qu’un masque, une marionnette». Puis, le 6 mars, dans une interview à la chaîne de télévision France 24 (version anglaise), il se lâche unçpeu plus, expliquant que les sanctions annoncées par les États-Unis à l’encontre d’un groupe de personnalités congolaises accusées de corruption, de fraudes, de violences lors du processus électoral, «ne sont pas les dernières». Des prochaines salves de sanctions étaient attendues cette fois-ci, fait-il entendre à demi-mot sur le plateau de France 24 lorsque la question lui a été posée, elles pourraient directement toucher Kabila et sa famille. LE DROIT DE VETO DU PRÉSIDENT. «L’hypothèse fait son chemin. C’est, de toute façon, dans la logique des choses», rapportent plusieurs sources au sein de l’administration Trump. Selon lesquelles, d’une part, «les proches de M. Kabila ont déjà été sanctionnés. Il est donc normal que ces sanctions finissent par le viser, lui et sa famille proche, directement». D’autre part, «il est clair pour les ÉtatsUnis que le responsable n°1 de la fraude lors des élections du 30 décembre n’est autre que M. Kabila. Il en est le commanditaire et le principal bénéficiaire». Ces sanctions seraient aussi, pour Washington, un moyen de mettre la pression sur le président Tshisekedi. Si celui-ci veut pouvoir

compter sur le soutien des États-Unis, il devra s’émanciper de la tutelle encombrante de l’ex-président. Peu avant l’étape de Kinshasa, précisément le 12 mars, lors d’une vidéoconférence de presse rapportée par le Département d’État américain sur son site state.gov, Tibor Nagy lâche une nouvelle bombe mais cette fois à fragmentation sous forme de dernier avertissement. «Au Congo, je serai très clair parce que je sais que nous n’avons presque plus de temps. Le Congo est une dynamique politique en pleine évolution. Il est très important de voir cela comme un processus en cours et ne pas se contenter d’examiner des questions de personnes. Nous devons inclure ces événements dans le processus. Comme nous le savons tous, des négociations se tiennent en coulisses. Des coalitions se forment entre partis présents au sein de l’Assemblée nationale. Nous savons comment le Gouvernement est constitué. Il n’est pas constitué par le Président mais le Président a essentiellement un droit de veto. Et c’est ce qui devrait se passer. Nous continuerons d’avoir des discussions très franches, ouvertes et honnêtes avec le Président Tshisekedi. Nous faisons entendre notre voix et nous espérons seulement que dans un an et demi, nous pourrons parler de la RDC de façon positive, tout comme nous parlons de l’Angola aujourd’hui». Signe que Washington attendra avant d’agir (aller plus loin dans la frappe contre ceux qui chercheront

Ci-haut, de g. à dr., Aubin Minaku, les deux têtes de la CÉNI, Corneille Nangaa et Norbert Basengezi et le président de la Cour constitutionnelle, Benoit Lwamba Bindu. DR.

à enfreindre l’action du nouveau Président ou, autre hypothèse, dans l’appui ou non au nouveau régime). Ainsi, par exemple, le Républicain Herman Cohen, secrétaire d’État adjoint aux Affaires africaines de 1989 à 1993, connu pour avoir mis fin à la guerre entre l’Érythrée et l’Éthiopie en 1991, ainsi que les conflits en Angola et au Mozambique, a, dans un tweet, écrit que les récentes sanctions américaines prises à l’encontre des personnalités proches de l’ancien pouvoir, étaient un avertissement afin que des membres de l’ancienne majorité présidentielle n’entravent pas la gouvernance du président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo. Après les sanctions diplomatiques, Washington a, en effet, imposé des

sanctions financières au président de la Centrale électorale nationale indépendante Corneille Nangaa Yobeluo, à son vice-président Norbert Basengezi Katintima et au fils de celui-ci, Marcellin Basengezi, conseiller de Corneille Nangaa qui avait en charge le délicat dossier sudcoréen de la machine à voter acquise auprès de la firme Miru System. NANGAA DÉTOURNE $US 100 MILLIONS. Washington accuse les trois individus de corruption et d’entraves au processus électoral. Les avoirs du président de la CÉNI Nangaa sont gelés par Washington, lit-on dans un communiqué du Département du Trésor américain tout comme ceux de Norbert Basengezi et de son fils Mar-

cellin Basengezi. Ces sanctions s’ajoutaient à l’interdiction de séjour aux États Unis décrétée un mois auparavant contre ces trois individus mais aussi contre d’autres, le secrétaire général de l’ex-Majorité présidentielle Aubin Minaku Ndjalanjoku également président sortant de l’Assemblée nationale, celui qui disait vouloir transformer le Parlement en «un temple de la démocratie» et le président de la Cour constitutionnelle, Benoit Lwamba Bindu. Selon les États-Unis, Corneille Nangaa Yobeluo, son viceprésident Norbert Basengezi Katintima et le fils de ce dernier, Marcellin Basengezi, «ont gonflé de $US 100 millions les coûts du contrat de la machine à voter». Nangaa, Basengezi et Basengezi Jr., «auraient aussi détourné de fonds destinés à financer les opérations électorales». D’après Washington, «une partie de l’argent aurait servi pour l’enrichissement personnel des concernés, une autre pour des potsde-vin, notamment versés à des juges de la Cour constitutionnelle pour qu’ils valident le report des élections». Le reste

de l’argent aurait financé la campagne électorale d’Emmanuel Ramazani, le candidat présenté par l’ex-président Joseph Kabila. Corneille Nangaa et ses collaborateurs sont accusés d’avoir «pris des mesures qui ont ralenti l’inscription des électeurs, facilitant ainsi le retard des élections». Le Trésor américain estime que l’élection du 30 décembre 2018 «n’a pas réussi à garantir la volonté du peuple congolais». Extraits d’une interview de Tibor Nagy sur Rfi. «Depuis les élections, nous avons annoncé des sanctions contre des personnes, soit pour avoir fait obstacle au processus démocratique, soit pour corruption, soit pour avoir incité à la violence. Évidemment, d’énormes problèmes ont marqué ces élections. En même temps, ce qui m’intéresse, au Congo et ailleurs en Afrique, c’est le processus à plus long terme. Ce que je retiens, c’est que Kabila n’est plus au pouvoir. Il s’est peutêtre agi du scrutin le plus démocratique qu’ait jamais connu au Congo. Un nouveau président, issu

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des rangs de l’opposition, a désormais l’occasion de faire avancer les choses. Au final, c’est le principal résultat de cette élection». «La situation politique est encore mouvante. Le parti de Kabila est une coalition de partis politiques. On peut s’attendre à ce que ces partis cherchent à nouer de nouvelles alliances pour obtenir des portefeuilles au Conseil des ministres. C’est pourquoi, la politique est aussi mouvementée en ce moment». «Il faut retenir que le président Tshisekedi est arrivé au pouvoir il y a très peu de temps. Il faut prendre un peu de recul et examiner le processus dans son ensemble, ne pas attacher trop d’importance à un événement en particulier. Il faut garder à l’esprit le processus. Prenons le cas de l’Angola. Lorsque le nouveau président est arrivé au pouvoir, tout le monde a dit qu’il serait asservi à l’ancien chef de l’État. Force est de constater qu’il a fait faire à son pays beaucoup de progrès. Je suis porté à croire que la même chose se produira au Congo». ALUNGA MBUWA n


côté rose |

Quelle sexualité

de demain C asque de réalité virtuelle, hologramme X, robot sexuel… la série Future Sex explore l’avenir de notre sexualité augmentée par le fabuleux pouvoir des nouvelles technologies. Conçue pour un visionnage uniquement sur mobile, cette production signée Blackpills offre une fiction incisive et addictive, qui interroge sur les évolutions de notre sexualité. La jouissance solitaire en réalité augmentée pourrait-il devenir le nec plus ultra du sexe, au-delà des seules relations physiques? Quelques éléments de réponse avec Cécilia Commo, psychanalyste, sexologue, spécialisée dans la cyberdépendance.

SEXUALITÉ NARCISSIQUE. Dès les premières images, Cécilia Commo ressent un profond malaise. Le slogan qui apparaît à l’écran lors d’un épisode résume confirme sa réaction: «Vous n’avez besoin de personne d’autre que vous!». Le ton est donné! Dans ce futur, la technologie alimente vos désirs. Le virtuel se joue des limites qui ne demandent qu’à être dépassées: la jeunesse est éternelle, un potentiel orgasmique illimité et fantasmagorique… La série Future Sex joue sur les codes d’un parfait fantasme narcissique et d’idéalisation. Il suffit de brancher son casque, pour être sublime, désirant et jouissant! C’est immédiat et illimité: exit les préliminaires, les pannes, les bons ou les mauvais coups; les scénarios sont infinis, à 2, à 3, vous pouvez être blonde, jeune, ou encore un homme, une déesse de Pole danse, ou de la fellation… Le fantasme réalisé sans chirurgie esthétique, ni dépas-

L’imperfection ne trouve plus aucun espace, n’a plus aucune légitimité, dixit un expert. DR. sement de budget, ou crainte de rupture de stock de menottes, ou autres gadgets pour pimenter la relation. Fascinant ou effrayant? L’ÉCONOMIE DE L’AUTRE. «À notre époque, du ‘tout’, tout de suite, quand je veux où je veux, aisément et sans risque, la technologie nous libère de la complexité du rapport à deux» résume Cécilia Commo. Ainsi, la sexualité décrite se vit souvent seul, avec son casque virtuelle ou de son robot. «C’est résolument effrayant!» répond la spécialiste «Tous ces codes vont à l’encontre de la véritable sexualité, qui repose sur une intimité même éphémère entre deux individus». La réalité virtuelle peut être fascinante si l’altérité, l’estime de soi ou entrer en relation pose problème. Mais l’érotisme procède de cette friction de la différence, du contact entre deux singularités. Attraction/répulsion, l’autre est au cœur du processus du désir! Le hic? Pour notre spécialiste: «Il y en a un et de taille: le retour au réel». Dans la série, par exemple, l’héroïne ne supporte plus son reflet dans la glace. Et le couple qui passe par la réalité virtuelle pour leurs jeux érotiques ne se désire

qui consultent sont jeunes, ils ont du mal à se situer dans ce domaine, leurs attentes, celles du

partenaire, les diktats de la société… «La série Future Sex raconte nos difficultés à nous rencontrer, à nous désirer, nous aimer, avoir du plaisir ensemble! Elle souligne, en augmentant le trait, notre tendance à rechercher le partenaire idéal, une sorte de moi en mieux, et de ce fait à refuser son humanité imparfaite ainsi que la nôtre» décode Cécilia Commo. Nous sommes de plus en plus connectés, mais de moins en moins en lien, en relation. La technologie est un vecteur de facilité. Ainsi, Tinder est devenue la norme… Les jeunes ne veulent plus

prendre le risque du râteau. C’est également ce qu’évoque la série: pourquoi prendre le risque du refus ou du mauvais coup, alors qu’il existe des technologies pour que vous passiez une bonne soirée sexe?

PAS DE RÉELS PROGRÈS? Quant aux vertus positives du virtuel sur notre capacité fantasmagorique, Cécilia Commo reste très mitigée. «Cela n’a pas plus d’impact qu’une BD, une vidéo ou un roman X… D’ailleurs, tout existe déjà sur Internet pour fantasmer sans fournir le moindre effort imaginatif».

pas davantage, au contraire! La seule issue est donc… de retourner dans le monde virtuel.

plus aucun espace et n’a plus aucune légitimité» observe notre spécialiste. Son constat: Les couples

DÉSHABILLÉE D’ANIMALITÉ. Par ailleurs, se profile également la victoire du sexe aseptisé. Avec le virtuel, plus d’odeurs, ni de poils ou de sueur. «Alors que la sexualité est pulsionnelle et va de pair avec nos fluides, nos cris, notre transpiration, la propreté devient la norme. Le virtuel nous débarrassent de tout ce qui est ‘gênant’ dans la sexualité». Ce qui va de pair avec une abrasion de l’agressivité érotique, une composante pourtant incontournable de la pulsion sexuelle. «La série Future sex met en avant une technologie qui débarrasse l’individu de son animalité pour la transférer à son avatar. Le dilemme humanité/ animalité face à la pulsion sexuelle est ainsi évacué». Une tendance que notre sexologue a notée dans le cadre de ses consultations: «Certains jeunes garçons évoquent leur aversion pour le cunnilingus par exemple, à cause des odeurs, des poils et du goût… Comme si nous ne supportions plus ce qui fait le sel même de la sexualité». «La sexualité est devenue complexe! L’imperfection ne trouve

L’incapacité à atteindre le sommet durant les rapports

CATH. MAILLARD n

N

e pas parvenir à atteindre l’orgasme durant les rapports sexuels. Cette incapacité est qualifiée d’anorgasmie. De nombreuses femmes en souffrent. D’où vient ce trouble? Comment y remédier? QU’EST-CE QUE L’ANORGASMIE? «L’anorgasmie désigne le fait pour une femme, de ne jamais avoir eu d’orgasme durant un rapport sexuel», définit Caroline Le Roux, psychologue et sexologue à Longjumeau (Essonne). Certaines de ces femmes y arrivent toutefois «par diverses caresses dans la masturbation et avec partenaire, mais n’y parviennent pas dans la pénétration», précisent Lise Desjardins et Mélanie Tremblay, sexologues cliniciennes et psychothérapeutes à Montréal (Canada). Sans compter que

«L’orgasme s’apprend et se travaille dès le plus jeune âge». DR. pour celles qui l’atteignent malgré tout avec un partenaire, «cela est tellement long et laborieux qu’elles préfèrent laisser tomber la plupart du temps». Cette situation semble en tout cas fréquente puisque «presque 2 consultations sur 3» y ont trait, souligne Caroline Le Roux. D’OÙ VIENT LE BLOCAGE? «L’orgasme s’apprend, s’acquiert et se travaille dès le plus jeune âge», indique Caroline Le Roux. «Ainsi, nous comprenons mieux quand les petites filles commencent à

explorer leur corps vers 2 ou 3 ans. Ensuite, c’est réellement à la période de l’adolescence que la masturbation à proprement dite commence». Objectif, mieux connaître son corps et identifier ce qui permet de parvenir à la jouissance. Mais d’autres blocages peuvent également expliquer l’incapacité d’accéder à la jouissance. «Il peut s’agir de traumatismes sexuels durant l’enfance de la petite fille […] du tabou qui entoure la sexualité, de l’éducation des parents et de leur propre rapport à la sexualité».

LE SOFT INTERNATIONAL | ÉDITION NATIONALE N° 1450 | PAGE 19.

QUAND CONSULTER? Si vous êtes concernée, la consultation d’un spécialiste peut vous aider. «Le rôle du sexologue sera de déterminer dans un premier temps les causes possibles du trouble, afin d’agir au mieux et d’être le plus adaptée à la situation», explique Caroline Le Roux. Quelle que soit l’âge ou la cause du trouble, «une femme peut ‘apprendre’ à avoir des orgasmes grâce à une sexothérapie comportementale adaptée et respectueuse», assure-telle.


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À Caracas, Trump

menace Poutine

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ike Pence, viceprésident américain a dénoncé mercredi une «provocation» de la Russie après que deux avions russes eurent atterri à Caracas. Washington pourrait prendre des mesures si les troupes russes restaient au Venezuela. «La Russie doit partir», a jugé Donald Trump. Un jugement sans appel qui préfigure un possible regain de tension entre Washington et Moscou sur le dossier vénézuélien. Le président américain a appelé la Russie à quitter le Venezuela. les avions russes transportaient des militaires et du matériel. Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a prévenu son homologue russe Sergueï Lavrov que les États-Unis ne resteraient pas les bras croisés si la Russie continuait «d’exa-

Tension entre Washington et Moscou après que des avions militaires russes eurent atterri à Caracas avec matériel et soldats. DR. cerber les tensions au Venezuela». «Les ÉtatsUnis appellent la Russie à cesser tout soutien au régime [du président Nicolás] Maduro», a-t-il martelé Mike Pompeo. Les deux avions russes transportant une centaine

de militaires et 35 tonnes de matériel sont arrivés à Caracas, selon l’agence russe Sputnik. Moscou, qui accuse Washington de tenter d’organiser un «coup d’État» dans ce pays, revendique le droit de «renforcer sa coopéra-

tion avec le Venezuela en accord avec la Constitution de ce pays et dans le cadre de la loi». L’opposant Juan Guaidó s’est autoproclamé président par intérim du pays le 23 janvier. Deux mois plus tard, le

Venezuela reste confronté à la plus grave crise de son histoire, avec une économie au ralenti, une monnaie naufragée et des pénuries de tout. Nicolás Maduro met en avant le soutien de la Russie et de la Chine, les

Pourquoi Bouteflika a été lâché par son fidèle général Gaïd

E

n proposant mardi le départ du président Abdelaziz Bouteflika comme solution à la crise née d’un mois de contestation inédite en Algérie, le puissant patron de l’armée algérienne a finalement lâché le chef de l’État, dont il était jusqu’à peu un soutien indéfectible. Pourquoi une telle proposition du chef d’étatmajor de l’armée? En fonctions depuis près de 15 ans - un record à ce poste-, le général Ahmed Gaïd Salah doit à Abdelaziz Bouteflika d’être aujourd’hui un des hommes les plus puissants d’Algérie. Comme le reste du camp présidentiel, il a d’abord soutenu sa candidature à un 5e mandat et ses propositions pour tenter d’apaiser la contestation. Mais son soutien se faisait récemment moins appuyé. «On n’est pas passé d’un coup du soutien absolu au

Le président algérien Abdelaziz Bouteflika et Idai, le Chef de l’Armée Ahmed Gaïd Salah. DR. lâchage», note Louisa Dris-Aït Hamadouche, enseignante en Sciences po à l’université Alger 3, «il y a eu un fléchissement de sa position au fil des semaines (...) jusqu’à la demande de mise en oeuvre de l’article 102» de la Constitution, applicable en cas de démission ou de maladie du président. Le général Gaïd Salah faisait face à une

contestation qui ne faiblit pas, un entêtement du clan présidentiel, un chef de l’État dont le mandat expire dans un mois et les craintes au sein de l’armée que les manifestations dégénèrent. «Il a considéré que son alliance avec le président de la République n’était plus viable» et l’a «sacrifié pour préserver le régime», estime l’uni-

versitaire algérienne.En intervenant, Gaïd Salah «agit au nom de tous les corps militaires» et sa décision montre «un consensus» au sein de l’appareil militaire et sécuritaire, estime Abed Charef, écrivain et chroniqueur politique algérien. L’intervention du chef d’état-major est-elle légale? «Constitutionnellement, le chef d’étatmajor n’est pas dans ses prérogatives quand il appelle à appliquer l’article 102», souligne Louisa Dris-Aït Hamadouche, qui voit dans son intervention «une symbolique très lourde (...) de supériorité du militaire sur le politique». Il ne s’agit en revanche aucunement d’un coup d’État militaire. L’armée est dans ses casernes, le général Gaïd Salah a invoqué la Constitution pour sortir de la crise et M. Bouteflika n’est pas démis de ses fonctions. En Algérie, «l’armée prend beaucoup de place

en période de crise», rappelle Abed Charef, «elle prend les grandes décisions une fois tous les dix ou 20 ans». «Il y aura un peu plus de discrétion (de la part de l’armée) une fois que la gouvernance se mettra en place», estime-t-il. Le président Bouteflika peut-il encore se maintenir? Constitutionnellement, rien ne l’empêche, au moins jusqu’au 28 avril, date à laquelle expire son actuel mandat, selon la Constitution. Personne ne peut non plus obliger le Conseil constitutionnel - dont le président est également un fidèle du chef de l’Etat- à actionner l’article 102. Mais Bouteflika est désormais sous pression. D’autant qu’il «est difficile de penser que le chef d’état-major ait lancé son appel sans avoir de garanties» du Conseil constitutionnel, selon Mme Dris-Aït Hamadouche.

principaux créanciers du pays, qui prennent systématiquement son parti dans les instances internationales, comme au Conseil de sécurité des Nations unies. FINANCE PRESS GROUP. RCCM KIN/RCCM/15-A-27926 Id. Nat. 01-93-N00932M FONDATEUR Tryphon Kin-kiey Mulumba. Le Soft International Kin’s Global site www.lesoftonline. net/www.lesoft.be LeSoftConcept LeWebSoftConstruct InterCongoPrinters Radio Télé Action kkmtry@lesoft.be info@lesoft.be SIP-AFRIMAGES B-1410 Belgique. Tél 00-32-488205666. Fax 00-322-3548978. eFax 00-1-707-313-3691 DIRECTEUR GÉNÉRAL Alain Bubu Kiese. Phone +243-815302583. DIRECTEUR ADMINISTRATIF & COMMERCIAL Yerkis Muzama. Phone +243-818371479. Directeur associé Yves Soda. Marketing: Sophia Ahmadi Somji. Phone +243817780000. Directeur de la publication. Munyonga Mubalu. AMP Agences et Messageries de la Presse belges. Accords spéciaux. Belgique. Trends. Trends, Tendances. Le Vif/ L’Express. Knack. © Copyright 2017 FINPRESS. Imprimé à Kinshasa InterCongoPrinters THE NEWSPAPER LE SOFT INTERNATIONAL IS PUBLISHED BY FINPRESS GROUP | DIFFUSION MONDE PRESSHOP.

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LE SOFT INTERNATIONAL EST UN JOURNAL DE DROIT ÉTRANGER | AUTORISATION DE DIFFUSION EN R-DCONGO M-CM/LMO/0321/MIN/08 DATÉ 13 JANVIER 2008.


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