SYLVIE ROCHE
Ce hors-série ne peut être vendu séparément Le Temps Samedi 27 février 2016
BEAUTÉ PARFUMS GOURMANDS ON EST ADDICT!
QUAND LA MÉDECINE ESTHÉTIQUE RÉPARE BEAUTÉ UNISEXE
Beauté
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Le Temps l Samedi 27 février 2016
ÉDITO
Belle si je veux SOMMAIRE
GSTAAD PALACE
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FRÉDÉRIC LUCA LANDI
4 Spas privés
Par Emilie Veillon
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Cosmétiques d’un autre genre
A l’instar de la mode, l’univers de la beauté brouille toujours plus les frontières entre les identités sexuelles et offre de nouvelles façons d’affirmer son individualité. Par Séverine Saas
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Dans les années 2000, on a vu émerger des femmes qui avaient l’air d’avoir dix ans de moins que l’âge indiqué par leur passeport, certaines plus figées que d’autres, effet botox oblige, certaines plus naturelles que d’autres. Comme si le temps, dans un ultime acte de bienveillance, avait décidé d’arrêter le curseur sur leurs 40, 45, ou leurs 50 ans. Le temps n’a bien sûr rien à voir dans
Il n’a jamais été aussi facile aujourd’hui d’améliorer une apparence: un nez cassé, une paupière qui s’affaisse, une ride du lion trop prononcée qui durcit le regard, un bourrelet disgracieux que l’on ne saurait voir. D’oublier ce coup de poing qui a brisé ce nez, d’effacer ce pli d’amertume né d’un deuil, d’une rupture, d’un amoncellement de douleur pour pouvoir enfin tourner la page.
Fontaines de jouvence
La profusion récente de suppléments à boire suggère que lutter contre le vieillissement serait aussi simple que de siroter une boisson sucrée. Peau plus lumineuse, cheveux plus brillants et surtout rides en moins, les potions d’acide hyaluronique ou les shots de collagène sont-ils réellement les nouveaux combattants de l’âge? Par Isabelle Campone
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12 Tapis rouge
La maîtrise du geste
De plus en plus appréciée – les professionnels parlent d’une croissance annuelle à deux chiffres – la médecine esthétique ne cesse d’évoluer. Transformation des mœurs et de la demande oblige, elle évite ces résultats inesthétiques qui militaient en sa défaveur et s’offre aussi une palette de nouveaux traitements bluffants. Dont l’harmonisation du visage. Par Marie-France Longerstay
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50 nuances de gris
Les cheveux gris ont le vent en poupe. Pour une transition en douceur et sans faute, le hair designer genevois Christophe Durand livre quelques précieux conseils. Par Alexandre Lanz
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Dans les années 90, on a vu émerger les femmes métamorphiques, femme-chat, femme-poisson, femme-panthère, femmeserpent, femme-mamelle, bref, des êtres à mi-chemin entre le règne animal et le règne humain. Dans ces années d’excès, la chirurgie esthétique avait atteint des sommets dans l’art de la transformation, effaçant tout lien d’appartenance à la confrérie des humains. Mais cela, les femmes en métamorphose n’en avaient pas conscience, tout entières emportées dans leur folie.
l’histoire: arrêter les pendules, c’est là tout l’art des médecins esthétiques. Grâce à la maîtrise de certains produits de comblement, ceux-ci ont appris à réaliser des actes allant bien au-delà du simple rajeunissement, des interventions qui relevaient autrefois de la chirurgie réparatrice, mais sans les narcoses nécessaires, les risques et les effets secondaires.
20 Palettes de printemps
Et paradoxalement, il n’a jamais été aussi facile, également, d’afficher sa beauté au naturel, d’accepter, d’embrasser tout ce que l’on est comme s’il s’agissait de l’un de ces derniers luxes que l’on peut s’octroyer. On a tous lu le Portrait de Dorian Gray – d’Oscar Wilde donc – et l’on sait bien qu’un beau visage n’est pas forcément l’expression d’une belle âme. Alors il s’agit de s’aimer, s’aimer très fort, se vouloir du bien, ayant compris que l’amour de soi est le plus puissant de tous les élixirs de beauté.
Secrets de beauté sur tapis rouge
Le 28 février à Hollywood, les stars défileront sur tapis rouge, inspirant dans le monde entier des millions de commentaires au sujet de leur apparence. En quête de perfection absolue, les actrices font appel à des équipes d’experts qui, rodés à l’exercice, ont chacun leurs rituels. Par Isabelle Campone
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Comment les parfums sont devenus des gourmandises
La Vie est Belle, de Lancôme, caracole en tête des palmarès du parfum. Catégorie: parfums gourmands. Cette famille est née en 1992 avec la création Angel de Thierry Mugler. Des parfums addictifs et régressifs qui font référence aux souvenirs d’enfance les plus doux. Et en plus, ça ne fait pas grossir. Mais comment expliquer cet engouement? HAJIME WATANABE FOR IFF
Dans les années 70, on a vu émerger des femmes qui semblaient toutes nées du même lit, avec leur même nez. Toutes étaient passées par la case chirurgie esthétique, section rhinoplastie. Il y avait celles qui n’aimaient pas leur nez trop long, trop fin, trop large, trop pointu, trop bossu. Toutes ces mécontentes nasales ont reçu le petit nez retroussé du moment, tellement à la mode et banalisé qu’il fut baptisé «à la parisienne». Ce nouvel appendice les a mises toutes d’accord, effaçant ainsi tout lien d’appartenance à une famille donnée. Mais cela, peu leur importait, à l’époque…
MARC PIASECKI/GETTY IMAGES
Par Isabelle Cerboneschi
SYLVIE ROCHE
Un spa pour deux
Réserver un écrin confidentiel au sein d’un espace bien-être est une invitation lancée par de plus en plus d’hôtels de luxe. Deux tables de massage, un bassin, un hammam et des banquettes de repos suffisent pour lâcher prise en toute intimité.
22 Dominique Ropion
Par Isabelle Cerboneschi
Sacre du printemps 20 Le Du bleu aux yeux et du rose aux joues. Les palettes printa-
nières rendent grâce à une nature éblouissante, lumineuse et tendre à la fois. Par Estelle Lucien
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Dominique Ropion et ses rêves d’enfant
Plongée dans le monde imaginaire du parfumeur. Par Isabelle Cerboneschi
En backstage du défilé Atelier Versace Automne-hiver 2015-2016.
Editeur Le Temps SA Pont Bessières 3 CP 6714 CH – 1002 Lausanne Tél. +41 21 331 78 00 Fax +41 21 331 70 01
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Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
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BIEN-ÊTRE
Un spa pour deux
L’immense Day Spa Suite de l’hôtel Le Mirador, l’une des plus belles du genre, profite d’une vue époustouflante sur la Riviera.
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asser quelques heures dans un spa est devenu une routine aussi essentielle que le sport. Depuis trente ans, la demande n’a cessé de croître, au point que les hôtels misent désormais sur ces espaces bien-être et les soins qui y sont prodigués pour rester dans la course aux étoiles. Mais si l’expérience du spa était une découverte dans les années 1990, elle s’est quelque peu banalisée. Victimes de leur succès, les spas sont de plus en plus fréquen-
tés. «Les gens ont moins le sentiment d’être dans un cocon privilégié, d’où leur quête d’une version plus intimiste dans laquelle ils se sentent comme à la maison», analyse Patricia Pegoraro, créatrice de spa, qui a notamment imaginé l’espace bien-être du Ritz, à Paris, en 1988, et douze ans plus tard, le premier spa urbain de Genève After the Rain. Pour répondre à cette envie d’un retour à une expérience plus exclusive du bien-être, de plus en plus d’hôtels créent des bulles privatives dissimulées
dans leur spa, à louer avec ou sans soins, pour une heure, deux, voire toute la journée. Au bout du Spa Givenchy qui s’étend sous l’hôtel historique Le Mirador, à Chardonne, une porte s’ouvre sur le plus beau de ces espaces hors du commun. L’immense Day Spa Suite (90 m² au total) profite de larges baies vitrées qui se passent bien de voilage, l’intimité étant totale puisqu’il n’y a aucun vis-à-vis. En contrebas de la colline qu’elle surplombe, on reconnaît la ville de Vevey, puis le
lac Léman, tout en longueur, dominé par la cime des Alpes entre ciel et terre. Un tableau splendide, vertigineux même, qui s’admire depuis la baignoire surdimensionnée à remous ou l’un des transats attenants. Derrière une porte coulissante, deux tables de massage invitent à se laisser choyer le temps d’un soin à la carte, après avoir sué dans le sauna ou hammam répartis autour d’un îlot verdoyant et dansé sous la pluie des douches. Les tons sombres, les persiennes et les touches de bois
évoquent un cabanon luxueux en Asie. A louer à partir d’une heure, la suite est aussi proposée dans le cadre d’un scénario de luxe ultime qui comprend une heure de détente dans la suite, un massage Givenchy, puis l’accès au vaste spa réservé aux clients de l’hôtel et un déjeuner au restaurant italien Le Patio, au prix de 715 francs par couple. «Même les membres de notre fitness spa tiennent à s’y ressourcer quelques fois par année. Ils y ont leurs habitudes, comme dans une suite d’hôtel
qu’ils retrouveraient à chaque séjour, et trouvent entre ses murs une plénitude à laquelle ils sont très attachés», relève Charlotte Renaud Boutilly, codirectrice de l’hôtel avec son époux.
Orient
Ailleurs, c’est le thème de l’Orient qui est évoqué en huis clos. Au sein du CBE Concept Spa du Lausanne Palace, la discrète Spa Suite dévoile une baignoire ronde monumentale en cuivre datant des années 1930, que la
directrice des lieux, Emeline Gauer, a fait venir d’Angleterre. Toute la robinetterie en laiton, de style néoclassique, contribue à rendre l’espace éclatant et unique. Autour du bain, un hammam et un sauna complètent le rituel. L’idéal est de suivre à la lettre la tradition marocaine. En commençant par un hammam traditionnel au gommage détoxifiant, suivi d’une immersion à l’huile précieuse dans le bassin puis d’un massage à l’onguent d’argan, une boisson et quelques mignardises orientales
La suite privative du Gstaad Palace invite à prendre un bain au lait d’ânesse enrichi aux huiles essentielles.
GSTAAD PALACE
ADRIAN HOUSTON / LE MIRADOR
Réserver un écrin confidentiel au sein d’un espace bien-être est une invitation lancée par de plus en plus d’hôtels de luxe. Deux tables de massage, un bassin, un hammam et des banquettes de repos suffisent pour lâcher prise en toute intimité. Visite indiscrète. Par Emilie Veillon
Beauté
(410 francs par personne, 180 minutes). L’ambiance est tamisée, la musique agréable, tout comme les accessoires (sèche-cheveux) et les crèmes mis à disposition pour se faire une beauté avant de rejoindre la lumière du jour. «S’accorder une pause dans ce cocon dépaysant, en plein centre-ville, est un luxe que s’offrent de plus en plus de couples», confirme Delphine Hammel, spa manager assistante. A Genève, le spa de l’Hôtel des Bergues, inauguré il y a deux ans sous les toits, dispose d’une suite privée au décor contemporain avec baignoire, hammam, deux tables de massage et fauteuils avec bassin pour le bain de pieds qui précède les soins sur mesure. Quant à la Suite de Félicité à deux, décorée dans des tons chaleureux (lie-de-vin, bois de cèdre et sol en chêne), du Spa Cinq Mondes au Beau-Rivage Palace de Lausanne, elle pousse le voyage jusqu’en Asie grâce à un bain japonais double et un patio privé. Plus marginal dans les stations de ski, le spa intimiste est toutefois magnifié au Gstaad Palace. Inspiré de la pierre calcaire des Alpes, le spa privé (dès 290 francs pour deux heures), dans les tons gris anthracite du sol au plafond, est équipé d’un sauna, hammam, douche pluie et chute d’eau, un espace de repos oriental et un grand bassin dans lequel est versé un lait d’ânesse enrichi en huiles essentielles. Au spa du Baron Tavernier, créé en 2013, c’est toute la surface qui peut être privatisée. De petite taille, il est parfait pour un couple ou un groupe d’amis à la recherche d’une piscine saline chauffée à 31 degrés, quelques installations de fitness, sauna et hammam, ainsi qu’un bain glacé dans le patio. En été, les soins peuvent être prodigués dans le jardin, sous une tonnelle, pour profiter de la vue étourdissante qui fait la force de ce petit hôtel et de son fameux deck dominant le Lavaux et le lac. «Tout le scénario est défini sur mesure, d’un cours d’aqua zumba aux massages spécifiques, en passant par les collations», explique Patricia Pegoraro qui accompagne actuellement le développement du lieu. Et c’est ça qui fait la force de ces nouveaux spas pour deux. Ils rendent accessible une détente bienheureuse hyperpersonnalisée, teintée de moments complices, à l’écart du monde.
LAUSANNE PALACE
Le Temps l Samedi 27 février 2016
Dissimulée au sein du CBE Concept Spa du Lausanne Palace, une salle pensée pour deux dispose d’une baignoire ronde monumentale en cuivre des années 30.
Sous les toits luxueux > Rêves de nuit en spa suite
PHOTOS FABRICE RAMBERT / BEAU-RIVAGE PALACE
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La vaste spa suite du BeauRivage Palace de Lausanne lie les plaisirs des soins Cinq Mondes à ceux de la nuit.
En Suisse, elles se comptent encore sur les doigts d’une main. Mais les spas suites créées en prolongement d’une chambre d’hôtel ont sans doute de belles nuits devant elles. Car elles déroulent la quintessence du spa pour deux, auquel aspirent toujours plus d’amateurs de bienêtre privilégié. L’une des plus récentes est dissimulée au sixième étage du Beau-Rivage Palace, à Lausanne. Juste sous la toiture en zinc, elle se compose d’un salon, d’une chambre à coucher et d’une immense salle de bains en marbre blanc aux nuances dorées, une rareté, comprenant un hammam, un bain à remous, ainsi que deux tables de massage chauffantes. Les larges baies vitrées s’ouvrent sur un balcon véranda au premier plan, et au-delà, sur les Alpes et le lac. On s’y sent comme sur un paquebot de luxe. Là-haut, à l’écart de l’agitation sereine du palace, le lâcher prise est immédiat. Décorée par l’architecte d’intérieur parisien Pierre-Yves Rochon, elle a été pensée comme un écrin solaire, dominé par les tons sable, jaunes, dorés, en écho avec la toile réalisée sur commande par le peintre Olivier Saudan et la cheminée où dansent des flammes. Aux quatre coins des pièces, des orchidées et des arrangements floraux somptueux. Au moment défini, deux thérapeutes Cinq Mondes rejoignent la suite pour accompagner le rituel choisi. Si carte blanche est laissée aux hôtes, à l’exception des massages thaï et aux pierres chaudes inadaptés au lieu, il est bon de profiter du hammam et de sa chromathérapie pour un gommage purifiant au savon noir, tout en prenant le thé, puis de s’abandonner lors d’un massage traditionnel oriental, sous une pluie de fleurs d’oranger ou de pétales de rose. EV
Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
PHOTOS: DR
MALAVAL/MADAME FIGARO/LAIF
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SANS LIMITE
Cosmétiques d’un autre genre
Les produits de beauté unisexes prennent de l’ampleur et séduisent une clientèle de plus en plus large. De g. à dr. et de h. en b.: Base de teint crème, Peter et Harry Brant pour MAC; set d’huiles pour le visage «Super Facial Oil», VERSO; projet BASIK de Saana Hellsten, une ligne de packagings au graphisme neutre qui mettent l’accent sur la fonction du produit plus que sur le genre auquel il s’adresse; eau de toilette «ck2», Calvin Klein; eau de parfum «Santal 33», LE LABO.
A l’instar de la mode, l’univers de la beauté brouille toujours plus les frontières entre les identités sexuelles et offre de nouvelles façons d’affirmer son individualité. Par Séverine Saas
B
leu ou gris pour les garçons, rose ou doré pour les filles. Bois et cèdre pour eux, jasmin et ylang-ylang pour elles. La douceur et la fragilité d’un côté, la force et la bestialité de l’autre. Ainsi va le monde au rayon beauté de la plupart des grands magasins. Un monde où des individus complexes sont amenés à se définir de façon binaire, c’est-à-dire en fonction de leur sexe. Ou plutôt, si l’on adopte une approche genrée, en fonction des rôles masculins et féminins qui leur sont assignés sur la base de leur sexe. Des normes sociales qui impriment les corps, les esprits. Et l’ensemble de l’industrie cosmétique. Ce paradigme atteindrait-il son crépuscule? A l’instar de l’univers de la mode, où les vêtements unisexes et les mannequins LGBT sont les nouveaux créatures-objets du désir, la beauté s’est emparée de la question aussi polémique que tendance du brouillage des identités sexuelles. Au milieu des effluves et des emballages stéréotypés, une nouvelle génération de crèmes, lotions, maquillages et autres parfums au packaging et odeurs neutres, «asexués», émerge depuis deux ans. Un troisième genre qui n’en est pas un puisque les architectes de ces soins ne proposent pas une image préexistante à laquelle adhérer, mais une page blanche
sur laquelle esquisser sa propre identité, sa propre histoire. Chez Aesop, Kiehl’s, Comme des Garçons, Helmut Lang, Diptyque, Byredo ou encore Le Labo, le genre n’est d’ailleurs pas un sujet de communication, comme si ce concept ne méritait plus que l’on s’y attarde. Et cela fonctionne. Bien qu’ils restent de niche, ce type de marques «unisexes» prend de l’ampleur et séduit une clientèle toujours plus importante. Soucieux d’être dans l’air du temps et de rester désirables, les acteurs traditionnels du luxe se laissent aussi tenter par la philosophie «no gender». L’été passé, Prada lançait ses «Infusions», une ligne d’eaux de toilette «opposées aux stéréotypes masculin/ féminin». Autre exemple, en septembre dernier, avec l’apparition chez MAC d’une ligne de maquillage unisexe signée Harry et Peter Brant, fils de l’ex-top modèle Stephanie Seymour. Calvin Klein vient même de sortir «ck2», parfum célébrant «la relation de deux êtres qui ne se définissent pas par leur sexe mais par leur personnalité».
Genre fluide
Dans les années 1990, Calvin Klein est l’une des premières marques à commercialiser des produits de beauté estampillés «unisexes». Qui a oublié «ck one» et son slogan «we are one » (nous ne faisons qu’un)? Mais si ce parfum
se joue des codes de l’époque, il reste un cas isolé. Aujourd’hui, la question du brouillage des identités sexuelles s’est répandue dans toute la consommation. «A Paris, Londres ou New York, les grands magasins ne veulent par exemple plus faire de différence entre les jouets pour filles et pour garçons, expose Alexandra Jubé, responsable Insight & Digital pour le bureau de tendance Nelly Rodi, à Paris. Il y a un an, le grand magasin anglais Selfridges inaugurait même «Agender», un espace shopping éphémère dédié à la mode et aux produits de beauté «sans définition». Si ces stratégies sont purement commerciales, elles sont rendues possibles par l’ouverture des mentalités. «Depuis plus de quinze ans, le thème du genre est sans cesse débattu, questionné dans l’ensemble de la société. Actuellement, on parle beaucoup de fluidité de genre, soit l’idée que les identités sont multiples, évolutives. L’hétérosexualité n’est plus la norme par défaut», analyse Stéphanie Pahud, maître d’enseignement et de recherche à l’Ecole de français langue étrangère de l’Université de Lausanne et auteure de LANORMALITÉ (Editions L’Age d’Homme). Très attentifs à la dimension du paraître, les adolescents – les jeunes gens nés entre 1995 et 2003, surnommés la génération Z – sont les premiers à rejeter la ségrégation sexuelle. Selon
une étude menée par l’agence de pub J. Walter Thompson Intelligence sur 1000 ados âgés entre 12 et 19 ans, 81% affirment que le genre ne suffit plus à définir un individu. Saana Hellsten en est tellement convaincue que dans le cadre de son diplôme de master, cette designer et graphiste finlandaise a développé BASIK, une ligne de packagings neutres mettant l’accent sur la fonction du produit plutôt que le sexe auquel il est destiné. «Les emballages rose et bleu me rendent malade. Ce sont des codes couleurs qui ont été choisis juste après la Seconde Guerre mondiale! Je ne dis pas qu’ils doivent disparaître, mais il devrait y avoir des options pour tout le monde. Je crois qu’au final, c’est surtout la qualité du produit qui importe.»
Interchangeabilité
S’il n’y a pas lieu de différencier les emballages des cosmétiques, qu’en est-il des soins eux-mêmes? Au-delà des échanges qui ont lieu dans l’intimité des salles de bains, les hommes et les femmes peuvent-ils utiliser les mêmes produits de beauté? «Oui, répond André Zurn, dermatologue à Lausanne. La peau des hommes est un peu plus grasse et plus épaisse, mais comme les cosmétiques sont des produits de surface, on peut les interchanger sans risque majeur pour l’épiderme. Le fait qu’un fabricant inscrive «unisexe» sur un produit est plutôt un argu-
ment marketing pour élargir le public cible. Sur le plan médical, les crèmes de soin (hydratantes pour l’eczéma, exfoliante pour l’acné par exemple) sont destinées aux hommes et aux femmes sans distinction. Dans l’univers de la parfumerie, Daniela Andrier, le nez derrière les Infusions de Prada, souligne qu’aucune odeur n’est intrinsèquement masculine ou féminine. «Décider qu’une femme doit sentir le caramel et qu’un homme doit sentir frais est simplement quelque chose de culturel. Quand on crée un produit unisexe, cela signifie que tout le monde peut choisir ce qu’il veut, indépendamment de tout diktat. Je considère que le genre est un cliché parce qu’il n’y a rien qui sente vraiment l’homme ou la femme.» Etre enfin soi-même, tel est donc le message véhiculé par les apôtres de la cosmétique unisexe. Mais Stéphanie Pahud met en garde contre ce qu’elle nomme une injonction paradoxale. «Les marques nous disent d’être libres et indépendants, mais en imitant ce que nous montrent leurs affiches. La mode des vêtements et des produits de beauté non genrés n’annonce pas la fin de la dictature du paraître. Au contraire, celle-ci entend désormais toucher plus de gens. Mais les stéréotypes ne peuvent être éradiqués, on peut donc au mieux espérer leur diversification. Nos imaginaires s’ouvriront petit à petit.»
Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
BEAUTÉ À BOIRE
Fontaines de jouvence La profusion récente de suppléments à boire suggère que lutter contre le vieillissement serait aussi simple que de siroter une boisson sucrée. Peau plus lumineuse, cheveux plus brillants et surtout rides en moins, les potions d’acide hyaluronique ou les shots de collagène sont-ils réellement les nouveaux combattants de l’âge ? Par Isabelle Campone, Los Angeles
O
n le sait depuis longtemps, la beauté vient de l’intérieur. Si l’on s’en préoccupe actuellement beaucoup, ce n’est pas tout à fait au sens où nous l’enseignons à nos enfants. Oenobiol a initié les Européennes à la nutricosmétique dans les années 80, mais l’industrie de la beauté prend un nouvel essor en développant des breuvages qui dispensent les nutriments indispensables pour lutter contre le temps qui passe. A peine nous sommes-nous adaptés à la folie des jus qu’une nouvelle mode arrive: celle des boissons qui exploitent les actifs utilisés en cosmétique, eux-mêmes naturellement produits par notre organisme. «Ces boissons contiennent généralement des vitamines et des minéraux, des agents anti-inflammatoires, des peptides de collagène, de l’acide hyaluronique, des plantes aux propriétés antioxydantes et/ou hydratantes, parfois des probiotiques, détaille Ella Odman, nutrithérapeute à Genève. Sous forme liquide, ils sont assez efficaces pour améliorer l’état de notre peau, car plus absorbables par l’organisme.» La recherche montre en effet aujourd’hui qu’il est erroné de penser qu’une alimentation équilibrée devrait suffire à apporter à notre corps et à notre peau les nutriments dont ils ont besoin. «Il est bien sûr primordial de les obtenir par la nourriture, mais les aliments contiennent de moins en moins de nutriments. Et comme notre production naturelle de collagène ou d’acide hyaluronique décline avec l’âge, la pollution ou l’excès de sport, il peut être bon d’y remédier avec certaines de ces boissons, en particulier celles qui contiennent du collagène: elles améliorent la fonction barrière de la peau, provoquent la synthèse, comme la production, de collagène et d’acide hyaluronique.» L’acide hyaluronique retient l’eau et donne à la peau son aspect pulpeux, alors que le collagène lui apporte sa souplesse et son élasticité. En ajouter à notre diète au moment où notre corps commence à baisser sa production naturelle permet donc en théorie de ralentir le vieillissement cutané. Caroline Wachsmuth, créatrice de soins de beauté et parfums sur mesure, prône également cette nouvelle approche de la beauté: «Ces boissons auront un effet boost encore plus efficace si elles sont associées à un mode de vie équilibré: alimentation saine, exercice physique régulier, pratique spirituelle ou de relaxation et qualité du sommeil. Ce qui rend certaines de ces boissons intéressantes, c’est leur concentration en actifs. Elles agissent un peu comme des suppléments alimentaires ultra-concentrés.»
Condensé de nutriments
Parmi elles, Beauty Scoop est l’un des rares produits à associer des dosages élevés d’acide hyaluronique et de collagène, en plus d’une formule spéciale de peptides et lipides. Chirurgienne esthétique, la New-Yorkaise
«Ce qui rend certaines boissons intéressantes, c’est leur concentration en actifs. Elles agissent un peu comme des suppléments alimentaires ultra-concentrés.»
bien l’énergie ou la santé du cerveau que la beauté, avec un accent mis toutefois sur la qualité de la peau. La 10x Hyaluronic Molecule concentre des taux très élevés d’acide hyaluronique dérivé de champignons, alors que la formule Beauty Molecule associe une plus faible concentration d’acide au Resveratrol, le fameux antioxydant dosé ici en grande quantité pour prolonger la vie des cellules. La formule Phyto-Collagen Molecule est une forme concentrée de collagène et d’AH, associés au L-Gluthatione (présent également dans la formule Glow pour l’éclat de la peau), qui stimule la production de collagène.
Caroline Wachsmuth, créatrice de cosmétiques
Résultats amplifiés
PHOTOS: DR
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Michelle Yagoda constatait depuis de nombreuses années que ses patientes, même après une opération réussie, n’atteignaient pas la beauté recherchée parce qu’elles n’étaient pas en assez bonne santé. Elle a alors essayé de développer un produit qui soit réellement absorbable par le corps et, après dix
ans de recherche, a lancé en 2009 Beauty Scoop, une poudre à diluer qui concentre les nutriments d’origine naturelle et lutte contre la déshydratation. «Les consommateurs étaient encore sceptiques et ne comprenaient pas qu’une personne sur trois absorbe mal les nutriments. Depuis une année
environ, l’attitude change et nos clients intègrent notre produit dans une routine complète», note la chirurgienne. Fountain, l’élixir à diluer vendu sur Net-A-Porter, se consomme également tous les matins selon différentes formules, appelées molécules. La marque cible aussi
Certaines choisissent d’ailleurs de ne miser que sur le collagène liquide, comme les Japonaises avant nous. Avec une bouteille quotidienne, Skinade promet des résultats en un mois, sur la peau mais aussi sur les cheveux et les ongles, en dynamisant également la production d’acide hyaluronique, grâce à ses 7000 mg de collagène, extrait de poisson d’eau douce. Ce qui équivaudrait à 20 comprimés, dont le taux d’absorption est bien moins élevé. Beauty & Go, créée par les fondateurs de la très chic marque Natura Bissé, mise, elle, sur sa découverte des macroantioxydants. Plus puissants que les antioxydants classiques, ceuxci proviennent de la peau des fruits et luttent essentiellement contre les effets des radicaux libres. Les quatre formules commercialisées récemment en Angleterre ne contiennent donc ni collagène ni acide, mais d’autres actifs naturels. Plus originale encore, la recherche derrière The Beauty Chef qui promeut la beauté par la digestion. Un mélange de 24 superfoods choisies pour leurs propriétés antioxydantes, leurs vitamines, minéraux, acides gras ou aminés est boosté par un processus de fermentation qui amplifie les propriétés de chaque ingrédient et qui fabrique des probiotiques naturels. Depuis cette base sont développées des formules spéciales: Glow, Hydration ou Collagen notamment. «Ce procédé unique, précise Carla Oates, la créatrice de la marque, permet de prédigérer les nutriments qui deviennent immédiatement assimilables. Nos produits sont des antioxydants pleins de vitamines et de probiotiques. Pour avoir une belle peau, saine et lumineuse, il faut commencer par un ventre sain et équilibré.» Caroline Wachsmuth renchérit: «L’état de nos intestins et le stress jouent un grand rôle et il faut s’attaquer à ces deux éléments en premier si l’on désire avoir une belle peau! Les boissons de beauté, surtout le collagène, sont alors des alliés efficaces, mais il faut bien les choisir, connaître tous les ingrédients et leur mode de fabrication.» Sans être des remèdes miracles, ces boissons de beauté, en mariant reconnaissance scientifique et beauté naturelle, semblent donc promises à un bel avenir. Nous prendrons bientôt notre crème de jour avec notre café.
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Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
Mincir par le froid
De plus en plus appréciée – les professionnels parlent d’une croissance annuelle à deux chiffres – la médecine esthétique ne cesse d’évoluer. Transformation des mœurs et de la demande oblige, elle évite ces résultats inesthétiques qui militaient en sa défaveur et s’offre aussi une palette de nouveaux traitements bluffants. Dont l’harmonisation du visage. Par Marie-France Longerstay pensais à cette agression. Impossible de tourner la page. Lorsque cela m’est arrivé, la seule manière de réparer mon nez, c’était la chirurgie esthétique. Mais cela impliquait que le chirurgien me le casse encore une fois. Or, je ne voulais pas en entendre parler. Trop de douleur. En 2009, je me suis tournée vers le docteur Gabor Varadi, un chirurgien plasticien brillant, qui avait développé des techniques très spécifiques dans le domaine de la médecine esthétique, notamment des injections sous-musculaires. Un artiste qui est malheureusement décédé cet hiver. Il m’a proposé de m’injecter de l’acide hyaluronique dans les fractures, à la façon d’un sculpteur, et a ainsi réussi à redresser mon nez. Pour moi, cela relevait presque du miracle! D’une certaine manière, en réparant mon nez, il m’a fait réparation.»
Le geste d’un peintre
Parvenue à l’âge de raison, la médecine esthétique, pour autant qu’elle soit pratiquée par des spécialistes qui maîtrisent autant les gestes que les appareils et les produits de comblement, a fait, en effet, d’incroyables progrès. «L’embellissement, résume le docteur Michel Pfulg* – chirurgien esthétique, fondateur de Laclinic à Territet, établissement également pluridisciplinaire – et le rajeunissement ne sont pas là pour révolutionner mais pour perfectionner. Apporter cette touche artistique qui illumine l’ensemble du visage en le rendant plus harmonieux, plus équilibré. Tendre la peau telle une toile cirée gomme les effets du temps, mais également les expressions indispensables qui traduisent l’âme et l’esprit.» Pour l’amateur d’art qu’il est, redonner une nouvelle jeunesse
«L’embellissement et le rajeunissement ne sont pas pour révolutionner mais pour perfectionner. Apporter cette touche artistique qui illumine l’ensemble.» Michel Pfulg, chirurgien esthétique et fondateur de Laclinic à Territet
mes patientes était complexée par un nez dont elle trouvait les narines trop larges et la forme plate. Elle ne souhaitait pas passer par la case chirurgie et en injectant dans le haut du nez, sur l’os, j’ai pu rendre la forme plus linéaire. J’ai aussi injecté dans la columelle (tissu entre les deux narines), pour favoriser une pointe. En moins d’une demi-heure, le résultat était très réussi. Elle était enchantée.» Mais, prévient le docteur, on peut aussi aboutir à un véritable ratage si on injecte trop ou mal à propos. De rhinoplastie, il est aussi question dans le témoignage d’Ilana qui souhaite rendre hommage à son chirurgien, aujourd’hui disparu. «Lorsque j’avais 28 ans, j’ai reçu un projectile qui m’a cassé le nez, expliquet-elle, âgée à présent d’une cinquantaine d’années. A 28 ans, ce nez déformé, cela donnait du caractère à mon visage. Vingt ans plus tard, mes traits paraissaient durs, presque masculins. Et surtout, chaque matin, lorsque je me regardais dans le miroir, je re-
à la peau, c’est reproduire le geste du peintre qui, à coups de petites touches de pinceau, illumine une nature morte et lui redonne vie. Avis partagé par Patrick Micheels, médecin spécialisé dans la médecine esthétique, qui évoque la demande de la majorité de ses patient(e)s: gagner en éclat, avoir bonne mine, gommer quelques rides. Aux attentes excessives, parfois farfelues des décennies précédentes ont succédé des souhaits plus réalistes et surtout moins repérables par un regard non exercé. «Pour les miracles, plaisante Patrick Micheels, je leur suggère d’aller à Lourdes. Les injections ont, en effet, changé la donne. Grâce aux acides hyaluroniques volumateurs, on peut retarder un lifting, ou le compléter, mais s’il y a déplacement des masses graisseuses ou un relâchement cutané important, on n’évitera pas le lifting.» Pour le médecin expert dans ce domaine – il fut l’un des tout premiers en Suisse, il y a vingt-cinq ans, à suivre des formations en méde-
La cryolipolyse – la congélation des cellules graisseuses – est pratiquée en Suisse depuis trois ans et rencontre de plus en plus d’adeptes convaincus. Une alternative indolore et non invasive à la lipoaspiration. Test
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irection La Réserve, puis le Spa Nescens, et au bout d’un couloir, le cabinet du Dr Valérie Leduc, spécialisée en angiologie, l’un des rares médecins à Genève à pratiquer la cryolipolyse. Enfin, à La Reserve, on parle plutôt de CoolSculpting® ou sculpture par le froid, une appellation plus explicite et un peu moins angoissante. Le docteur Valérie Leduc, spécialisée dans la beauté des jambes, est la meilleure publicité qui soit pour sa profession. On voudrait ses jambes, là, tout de suite si possible. «Cette technologie est une révolution au même titre que l’épilation laser lorsqu’elle est apparue, relève le médecin. C’est non invasif, vous pouvez reprendre votre vie tout de suite après, c’est efficace, non douloureux contrairement à la lipoaspiration. Il n’y a pas de suites difficiles comme après une intervention de chirurgie esthétique. Et on peut tout traiter, sauf les chevilles et les mollets. » Après avoir vu les résultats sur une amie, et lu tous les témoignages positifs sur les forums de discussion, j’ai eu envie d’essayer aussi. «Ce qui me dérange, c’est cette zone, et celle-là», relève le docteur Leduc en empoignant fermement mes poignées d’amour. Un avant-goût de la pression de la machine. Le médecin trace alors un signe au feutre, sur la zone à traiter et m’installe sur un lit de soin, mais en position assise «parce que cette position optimise le traitement des poignées
cine esthétique –, la qualité et la multiplicité des produits offrent au praticien un grand éventail de traitements n’entraînant pas ou peu d’éviction sociale et professionnelle. Parmi les soins récents, et très appréciés, il cite, comme le docteur Pfulg, la technologie des ultrasons focalisés conseillés pour redéfinir l’ovale du visage ou retendre la peau du cou. Et les fils crantés résorbables qui permettent, eux aussi, de retarder le moment du lifting. «On les glisse sous la peau pour retendre un peu le visage ou remonter des bajoues, précise Michel Pfulg. Le traitement se fait en ambulatoire et les effets durent entre un et deux ans. Surtout le geste ne nécessite pas de bloc opératoire.» Indiscutablement, à entendre les divers médecins et chirurgiens rencontrés, l’évolution de la médecine esthétique a rejailli sur la chirurgie dont les méthodes sont aussi devenues moins agressives, moins intrusives. «On peut même dire, relève Michel Pfulg, que le recours à la toxine botulique, capable de remonter un sourcil ou de gommer les rides du haut du visage, a quasiment supprimé le lifting frontal.» Cette même toxine qui a également permis d’éviter les excisions faites, il y a une vingtaine d’années, pour venir à bout de l’hyperhydrose. En agissant à la baisse sur l’action des glandes sudoripares, la toxine botulique a remplacé le bistouri.
d’amour». Ce dernier dure une heure par zone, soit deux heures au total, mieux vaut emporter un peu de travail avec soi. Ensuite commencent les choses sérieuses. Le médecin place une sorte d’aspirateur doté d’une électrode qui génère le froid et dont les moteurs aspirent le bourrelet qui sera maintenu pendant une heure, à –10 degrés. Ce refroidissement entraînera une apoptose cellulaire (destruction des cellules graisseuses) sans
tiq®, la seule qui soit agréée par la FDA (Food and Drug Administration). Pendant le traitement, la machine vérifie l’état de la peau et de la température. Au moindre signe d’intolérance cutanée, elle s’arrête», souligne le médecin. Il y a peu de contre-indications, à part les patients présentant une forte réactivité au froid, une mauvaise circulation sanguine sur la zone traitée, les personnes atteintes de la maladie de Raynaud. Un traitement contre-indiqué aux
«On diminue le volume graisseux de 30% sur chaque zone.» Dr Valérie Leduc
abîmer les autres. «On diminue le volume graisseux de 30% sur chaque zone», explique-t-elle. C’est un peu froid au début, puis l’on s’habitue. Le seul inconfort que l’on ressente, c’est lorsque le médecin ôte l’appareil et masse la chair refroidie. Contrairement à ce que l’on m’avait dit, le lendemain, je n’ai aucun bleu. Juste un léger inconfort qui dure quelques jours, et le sentiment d’une peau comme anesthésiée. Il y a forcément un moment, pendant ces deux heures, où l’on se demande si la machine est sûre. «Nous utilisons la machine Zel-
femmes enceintes et aux porteurs de dispositifs électroniques. La cryolipolyse doit être exclusivement réalisée par un médecin. Quant aux résultats? Rendez-vous dans trois mois. «L’élimination des cellules se fait par le foie. Il faut être patiente», encourage le docteur Leduc. Trois mois? Parfait pour la séance honnie des essayages de maillot de bain… Isabelle Cerboneschi Contact: Dr Leduc La Réserve Spa Nescens Route de Lausanne 301, Tél. 022 959 59 99
Choisir le bon praticien
A la question récurrente: comment choisir le «bon» praticien? on serait tenté de répondre: commencez par réclamer la preuve d’une véritable formation. En faveur des établissements pluridisciplinaires consacrés à l’esthétique: la possibilité de disposer de différents médecins et chirurgiens, chacun expert dans sa discipline, ce qui offre une grande variété de traitements et empêche qu’un médecin isolé ne puisse être tenté de multiplier des gestes inadéquats. «Si l’on veut offrir le meilleur à nos patients, détaille Michel Pfulg, il est indispensable de travailler en équipe sous le même toit, sans concurrence, chacun étant spécialisé dans un domaine, de façon à dispenser le meilleur service possible.» Questionné sur la formation, Michel Pfulg évoque un apprentissage dispensé hors de Suisse et par les fabricants de lasers et d’appareils spécialisés. Détenteur de divers diplômes français, dont celui délivré par le Collège national de médecine esthétique en France et des universités parisiennes dans le domaine des injectables et des lasers, Patrick Micheels regrette cette absence. «J’aimerais qu’il y ait, en Suisse, un enseignement universitaire, comme c’est le cas en France, en Belgique ou en Espagne.» Bien sûr l’appartenance du praticien à la FMH (Fédération des médecins suisses) et à la Société suisse de médecine esthétique a de quoi rassurer, mais le bouche-àoreille n’est pas négligeable. Il permet de visualiser les résultats sur d’autres visages. Dans tous les cas, évitez les «Botox parties» où le médecin enchaîne les injections dans un hôtel ou un lieu privé. L’injection réussie est celle qui respecte la dynamique d’un visage et se fait à l’aide d’un acide hyaluronique sélectionné en fonction de la zone à traiter.
> Une panoplie de traitements Différencier chirurgie et médecine esthétique tient en un mot: bistouri. Alors que la première «pénètre» dans le corps, la seconde use de méthodes moins invasives n’entraînant pas ou peu d’éviction sociale. Liste non exhaustive des pratiques médicales. • Toujours en tête des demandes, les injections d’acide hyaluronique et de toxine botulique s’attaquent diversement aux rides. Le premier, comme on l’a vu, ne se contente plus de «remplir» rides et ridules, d’améliorer la capacité de la peau à retenir l’eau, mais permet aussi toute une harmonisation des traits. La toxine botulique, injectée dans les muscles pour en empêcher la contraction, permet d’effacer certaines rides d’expression tout en conservant une mobilité suffisante pour ne pas altérer l’expressivité du visage. • Les skin boosters: il s’agit, là aussi, d’acide hyaluronique dispensé dans le derme profond par des microcanules émoussées ou de multiples petites injections à l’aide d’une fine aiguille. Le produit reste dans le derme environ un mois avant d’être complètement résorbé. Il hydrate 24 heures sur 24 et stimule les cellules pour la production de nouveau collagène. La peau s’en trouve mieux hydratée, élastique et lumineuse. Moins ridée aussi. • Les lasers: venir à bout des troubles pigmentaires, de la couperose, corriger des lésions cutanées bénignes, atténuer les rides profondes, mais aussi traiter le relâchement du bas du visage, du cou comme le font les ultrasons focalisés (sous l’effet de la chaleur produite, les fibres de collagène se rétractent, provoquant une mise en tension) type Ulthera… La palette des lasers est très vaste et les appareils parfaitement maîtrisés.
MÉDECINE ESTHÉTIQUE
PAPER BOAT CREATIVE
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l est banal de dire que la médecine esthétique a considérablement évolué. Encore faut-il savoir ce que couvre cette assertion. Médecin esthétique, responsable du centre lausannois The Beauty Suite, le docteur Marco Cerrano est notamment spécialisé dans les corrections esthétiques du nez par injections de produits de comblement. En modifier l’apparence générale, sa forme, sa taille, retirer une bosse, affiner la base, le raccourcir ou le rallonger relevaient exclusivement de la chirurgie. «Ces dernières années, la rhinoplastie médicale a vu le jour. Pour compléter un geste chirurgical, mais aussi le remplacer.» Tout en précisant qu’en cas de déviation latéro-latérale ou de bosse trop importante, la médecine ne suffit pas, le docteur Cerrano confirme les atouts des injections – acide hyaluronique ou Radiesse®, un hydroxyapatite, produit résorbable, biocompatible et biodégradable – pour affiner un nez, combler un creux dans la partie haute en apportant un peu de volume, ou encore agir sur une bosse discrète. «Il y a une quinzaine d’années encore le souci n° 1 était de combler des rides. Puis on s’est concentré sur le visage dans sa globalité et on a parlé de liquid lifting ou de soft lifting, allusion au caractère non invasif de ces techniques. Grâce à une meilleure connaissance, on a appris à corriger un nez à l’aide d’injections, pour le rendre un peu plus étroit par exemple.» Acide hyaluronique bien réticulé (donc plus épais), au pouvoir liftant ou Radiesse® aux vertus lissantes très importantes, la variété des injectables a contribué à fournir les outils nécessaires. «La clientèle chinoise est très demandeuse. L’une de
Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
La maîtrise du geste
• Les peelings: du plus doux à l’acide glycolique ou à l’acide trichloracétique au plus profond au phénol, tous cherchent, à l’aide d’une substance chimique, à provoquer une destruction de l’épiderme ou des couches superficielles du derme. Cette destruction vise à obtenir une régénération des couches détruites et à stimuler la production de fibres élastiques et de collagène qui vont densifier la peau. Amélioration du teint et du grain de peau, diminution des taches brunes, atténuation des ridules et rides superficielles, les indications se valent. Toutefois les suites du peeling au phénol sont plus lourdes et la brûlure provoquée peut entraîner une indis-
ponibilité sociale pouvant durer jusqu’à deux semaines. • Le PRP (pour plasma riche en plaquettes) consiste à utiliser le propre sang de la patiente pour produire du plasma enrichi en plaquettes, facteurs de croissance de cellules-souches. Réinjecté sous la peau, ce traitement stimule la formation de collagène, la revascularisation et la réparation des tissus. Effet régénérant assuré! Y compris au niveau du décolleté. • Le thermage: utilisant la radiofréquence qui provoque un échauffement des structures profondes, ce traitement stimule les fibroblastes et entraîne une production massive de collagène et d’élastine. Conseillé sur toutes les zones qui se relâchent avec l’âge, il donne de très bons résultats dans les mois qui suivent. Et ses effets durent plusieurs années. • Le lipofilling: de la graisse autologue, en petites quantités quand il s’agit du visage, est prélevée sous anesthésie locale et réinjectée, après centrifugation, à l’endroit souhaité: pommettes, joues, sillons nasogéniens… Pour remodeler un visage, venir à bout d’une ride, ou apporter un coup d’éclat, c’est parfait! • Les fils crantés résorbables: constitués, majoritairement d’acide polyactique, implantés plus ou moins profondément sous la peau, ils lissent et tendent les tissus. En revanche, le docteur Varadi se montre réticent. «Ils sont susceptibles de créer une fibrose souscutanée qui peut être contre-productive si on choisit ensuite de faire un lifting sousmusculaire.» • La cryothérapie (lire ci-dessus): les cellules graisseuses étant ultrasensibles au froid, l’appareil (de préférence l’original, soit Zeltiq®, détenteur de l’agrément décerné par le très sévère FDA américain) promet, par l’intermédiaire d’une ventouse appliquée à l’endroit désigné, de se débarrasser, en six à huit semaines, d’un grand pourcentage d’adipocytes. Jugé très satisfaisant pour celles qui l’ont essayé, ce traitement est parfait pour venir à bout d’un petit ventre, d’un surplus graisseux au niveau des hanches ou des cuisses. Marie-France Longerstay * La beauté exactement, Docteur Michel Pfulg. Editions Image 22.
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CHEVELURE
50 nuances de gris Les cheveux gris ont le vent en poupe. Pour une transition en douceur et sans faute, le hair designer genevois Christophe Durand livre quelques précieux conseils. Par Alexandre Lanz
L
es femmes les abhorrent autant que les hommes les adorent. Pendant qu’elles préfèrent les cacher depuis des décennies, ils les voient comme un atout de séduction ravageur et la mode leur font les yeux doux. Les cheveux blancs. L’inéluctable altération de leur couleur – qui survient dès lors que les cellules de pigmentation ne produisent plus de mélanine – assure le fonds de commerce des coloristes de celles et ceux désireux de retarder, un peu, le temps qui passe. Preuve visible du vieillissement de l’organisme, les premiers cheveux blancs sont souvent assimilés à un grand choc émotionnel ou psychologique. La légende veut d’ailleurs qu’avant de monter à l’échafaud, Marie-Antoinette ait subitement viré de couleur au blanc. Toujours dans le chapitre des célébrités, mais de notre époque, il y a ceux qui les accessoirisent pour les dresser en signe identitaire. Dans cette catégorie, Karl Lagerfeld se tient évidemment en tête de file. Jouant de sa personne comme d’un avatar déclinable sous des formes infinies, le directeur artistique de Chanel est conscient d’être reconnaissable au milieu d’une foule grâce à son immaculé catogan. Pour obtenir cet éclat unique, il n’est pas jaloux de son secret: un shampoing sec tous les matins. Dans la vie courante, comme dans l’industrie du spectacle, l’arrivée du poivre et sel booste le sex-appeal de la gent masculine. Une image véhiculée par les médias et la publicité, qui érigent l’homme aux tempes grisonnantes comme un personnage sûr de lui, fort de son expérience. En deux mots, un homme, un vrai. «Le cheveu blanc dévoile indirectement quelque chose qui s’arrête dans l’évolution du corps, une partie déjà «faite». Cet effet plaît beaucoup aux femmes, qui craquent facilement pour un homme grisonnant, car il est rassurant. C’est l’anti-teenager en somme», résume Christophe Durand, hair designer reconnu dans l’univers de la mode et de la coiffure et créateur de l’enseigne Le Bal des Créateurs à Genève. Symbole de virilité mature, le pouvoir du poivre et sel n’est pas à sous-estimer. On a même vu certaines carrières au point mort redémarrer grâce à l’arrivée des cheveux blancs. Dans ce registre, c’est George Clooney qui remporte la mise depuis ses débuts dans la série Urgences en 1994. En sacrifiant sa coupe eighties à la Antonio Banderas et en assumant sa couleur, il a crevé le petit écran en incarnant LE sex-symbol de la décennie, avant de devenir l’icône de pub que l’on sait. Le journaliste américain Anderson Cooper voit sa cote exploser depuis quelques années à la télévision. Il ne doit pas tout à ses cheveux blancs, ayant fait ses armes sur ABC News et CNN auparavant avant d’animer son propre talk-show produit par la Warner Bros Television depuis 2011, mais il leur doit son statut de superstar.
Défilé de gris
Dans la mode, la coqueluche des réseaux sociaux Nick Wooster et le mannequin Aiden Shaw raflent la
GALLOIS/LE FIGARO MAGAZINE/LAIF
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mise. Pendant que le premier fait la pluie et le beau temps en se pavanant en costume-bermuda de Fashion Week en Fashion Week, le second impose son élégante nonchalance sur les podiums. L’Américain originaire du Kensas et le so british modèle ont en commun de profiter de la gloire sur le tard, à respectivement 55 et 49 ans, leur chevelure n’est pas étrangère à leur succès soudain. Dans le cas d’Aiden Shaw, elle symbolise même une certaine idée du dandy contemporain: cet ex-acteur porno gay s’est mis à la poésie la même année qu’il a appris sa séropositivité, il y a une dizaine d’années, bien avant d’imposer sa chevelure ondulante en couverture de magazines comme GQ et Lui en 2012. La tendance est devenue un véritable phénomène et le gris est recherché, même par les impatients qui n’en ont pas encore sur la tête. La mode androgyne aidant, les femmes s’y mettent aussi, s’émancipant ainsi de la connotation de renonciation à la séduction. Christophe Durand
observe: «Aujourd’hui, on voit des shows de coiffure et de mode où les femmes s’affichent avec des cheveux gris, la dernière en date était Marie Seznec Martinez, qui avait un contrat d’exclusivité avec Christian Lacroix dans les années 80. A l’époque, c’était le seul à oser amener un mannequin aux cheveux gris sur scène», observe Christophe Durand. Bien porter le cheveu blanc exige un entretien particulier, il ne suffit pas de le laisser pousser à sa guise. Encore faut-il savoir le dompter. «La texture est souvent différente. Dans certains cas, le changement peut les rendre plus gainés, mais malheureusement, la plupart du temps ils deviennent plus freezy et moins lisses. Il y a également un effet d’optique, car ils attrapent plus la lumière, précise le hair designer. C’est pour cette raison que je conseille aux hommes frisés de les couper plus court.» Aux clients qui souhaitent être accompagnés dans cette transition, il rappelle régulièrement que si les tempes grisonnantes
«Surtout, ne pas laisser jaunir, il n’y a rien de pire.» Christophe Durand, hair designer
sont considérées comme un atout entre 20 et 40 ans, c’est grâce à la bonne mine et au joli teint que celles-ci mettent en valeur, car «on est encore trop jeune pour les avoir gris». Toutefois, en approchant de la cinquantaine, l’atout peut basculer sensiblement vers un aspect fatigué et vieilli. C’est souvent dans cette tranche d’âge que les hommes réalisent qu’avec des cheveux bruns ou platine, ils feraient plus jeunes. «Dans ces cas-là, on fait des teintures cachées, c’est-à-dire qu’on les
mélange avec les cheveux gris, explique le coiffeur. Les hommes n’aiment pas avoir des racines. Donc on fait ce qu’on appelle des «low lights», des mèches de leur couleur naturelle qu’on mélange dans le cheveu qui devient trop blanc. Il existe même une couleur spéciale qui a été créée pour cette mode-là, c’est le camo. Cette couleur ne couvre pas tous les cheveux blancs, il en reste par endroits. Ainsi, on diminue les taches blanches sur les côtés, qui sont inesthétiques.» Le secret pour rester fringant se joue entre la coupe et le reflet. «Surtout, ne pas laisser jaunir, il n’y a rien de pire. Les cheveux blancs sont beaux lorsqu’ils sont vraiment propres», selon le conseiller. En outre, jouer avec les contrastes pour homogénéiser la couleur et opter pour le court fait facilement gagner dix ans. Quant aux shampoings, qui ne sont pas tous efficaces, Christophe Durand conseille le Silver Charge de Redken et Le Masque de Christophe Robin, qui ne font jamais des cheveux mauves.
Beauté
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Le Temps l Samedi 27 février 2016
Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
PAILLETTES
Secrets de beauté sur tapis rouge Adir Abergel a imaginé la magnifique tresse haute que Rooney Mara portait aux derniers Golden Globes.
Par Isabelle Campone, Los Angeles
A
vant même la remise de la première statuette, les verdicts sans pitié claquent sur internet et sur les réseaux sociaux. Qui sont les mieux habillées, et, depuis quelques années, quels sont les «beauty looks» les plus réussis? On scrute les photos en gros plan, sous tous les angles. La pression est énorme pour ces actrices, voire acteurs, qui jouent leur image et, souvent, des contrats publicitaires mirifiques. Dès le début de la «Awards Season», des Emmys en septembre jusqu’à l’apothéose des Oscars, être belle c’est une vie de privations, de sacrifices et un gros travail d’équipe. Kilos en moins, silhouette tonifiée, peau radieuse, style remarquable et sans faille, alors que les journées de «campagne électorale» s’enchaînent: les gourous des stars nous disent comment briller sur le tapis rouge. Ou là où l’on voudra.
Le coach
2016 KEVORK DJANSEZIAN/NBC
Jason Walsh peut se vanter d’avoir sculpté les corps de Jessica Biel, Matt Damon, Bradley Cooper ou Hilary Duff. Les stars s’entraînent évidemment toute l’année, pourtant le coach souligne qu’il faut intensifier les efforts avant la cérémonie: «Idéalement plusieurs semaines, en réalité souvent les deux dernières.» Règle numéro un: remplacer l’alcool par du thé vert et limiter le sodium au maximum. Numéro deux: transpirer le plus possible. «J’adapte l’entraînement à chaque personne, car ce qui est efficace pour l’un ne l’est pas forcément pour l’autre», répond-il à la question de ses exercices favoris. Tant pis pour le remède miracle. Quoique… «Le meilleur moyen pour rayonner? La confiance en soi, et pour ça rien de tel qu’une bonne dose d’endorphines, c’est-à-dire beaucoup d’exercice le jour même. Sans oublier que ça fait circuler le sang, ce qui est excellent pour avoir l’air en pleine forme!»
2016 MICHAEL TRAN/FILMMAGIC
2016 JOHN SHEARER/GETTY IMAGES
L’esthéticienne
Avec Terri Lawton, l’appellation d’esthéticienne est un peu réductrice, on a plutôt envie de la qualifier de psychologue de la peau tant elle lie la beauté de celle-ci au bien-être de ses clientes, Rachel Weisz ou Michelle Williams notamment. «Elles n’ont généralement le temps de ne venir qu’une fois avant l’événement», nous dit l’experte, qui est pourtant réputée pour ses résultats spectaculaires sur l’éclat de la peau. «Je commence par les allonger sur une table infrarouge pour les plonger dans un état de relaxation presque méditatif, puis après avoir nettoyé la peau, j’utilise le masque Intraceuticals à l’oxygène, stimulé par un micro-courant et suivi de luminotérapie. Avant d’abreuver la peau de collagène et de sérum.» Selon elle, trouver une esthéticienne qui développe un programme sur mesure est la clé d’une belle
peau, avec une exfoliation douce deux fois par semaine suivie d’un masque, Purigenex ou Biologique Recherche. «La nutrition est fondamentale aussi: arrêtez le sucre et adoptez un régime alcalin et anti-inflammatoire. L’hydratation est essentielle, et la joie et le bonheur aident beaucoup à avoir une peau rayonnante!»
La styliste
Elizabeth Stewart figure à la première place du très sérieux classement établi par le Hollywood Reporter des stylistes les plus influents. Elle est derrière chacune des apparitions très remarquées de Cate Blanchett, habille Sandra Bullock, Viola Davis et Julia Roberts, comme les icônes de mode January Jones ou Amanda Seyfried. Elle précise d’emblée que si les décisions de style sont généralement déterminées par la robe, la collaboration entre tous les experts (cheveux, maquillage, bijoux) est impérative. «Il n’y a pas vraiment de processus pourtant, parfois on planifie la tenue longtemps à l’avance et parfois à la dernière minute, ce qui compte c’est d’être à l’aise avec la robe et surtout qu’elle s’adapte parfaitement au corps de celle qui la porte. Il faut toujours, toujours, une robe de secours, parce que le meilleur moyen d’en avoir besoin, c’est de ne pas en avoir prévu!» Elizabeth Stewart recommande aussi un kit de survie: «Des sous-vêtements invisibles, du fil et une aiguille bien sûr, du scotch double face et un spray antistatique!» La clé d’une tenue réussie: «La choisir en fonction de sa personnalité et non des critiques.»
«Le meilleur moyen pour rayonner? La confiance en soi, et pour ça rien de tel qu’une bonne dose d’endorphines.» Jason Walsh, coach sportif
Le coiffeur
Adir Abergel, styliste capillaire comme on dit à Hollywood, est adulé des actrices qui aiment arborer un style peu travaillé. Kristen Stewart, Rooney Mara, Sienna Miller, Jennifer Garner, Jessica Biel, Sandra Bullock ou Anne Hathaway ne jurent que par lui pour leurs grands moments. «Ma philosophie est très simple: je veux que mes clientes arrivent extrêmement confiantes
sur le tapis rouge, donc les rendre belles et non suivre une mode.» Il s’inspire essentiellement de leur propre style, tout en préparant des semaines à l’avance des tableaux d’inspiration fidèles à sa signature, une chevelure à la fois souple et volumineuse. «Si on ne peut passer les doigts dans ses cheveux, ça ne va pas! Mettez du spray ou de la mousse sur les racines seulement pour le volume et gonflez-les avec une bonne brosse ronde, comme la Ibiza Hair. La lotion Kusco, la mousse Oribe ou la poudre Schwarzkopf créent une texture parfaite et j’autorise à peine un voile de laque Fekkai.» Son secret: un excellent fer à friser pour créer de très légères vagues.
La maquilleuse
Lorsque l’on regarde les photos des clientes de Pati Dubroff sur tapis rouge, on rêve de se remettre entre ses mains au plus vite. Des maquillages les plus flashy de Kirsten Dunst au style léger et parfait de Natalie Portman, en passant par la radiance de Charlize Theron ou la beauté mutine de Julianne Moore, la make-up artist sait sublimer la beauté de ses clientes. «Nous décidons du thème aussitôt que la robe est choisie, le maquillage doit en rehausser les couleurs et le style. J’aime voir les bijoux, car le maquillage doit aussi s’adapter aux couleurs des pierres.» Pour beaucoup, la préparation commence par le bronzage avec un spray Vita Liberata. «La peau doit être extrêmement bien préparée, c’est essentiel. Après avoir appliqué un masque, j’utilise une base lissante, généralement Clarins. Je suis ensuite fidèle à mes marques préférées pour chaque étape du maquillage. Kanebo ou Clé de Peau pour le teint, Kevyn Aucoin ou Nars pour le blush, ombres à paupières de Tarte et Tom Ford, rouge à lèvres de Laura Mercier et Chanel, crayons à sourcils d’Anastasia et mascara de Benefit.» Et elle ne laisse pas ses actrices mettre les pieds sur le tapis rouge sans leur mini-kit de retouches: du rouge à lèvres, des papiers matifiants, quelques cotons-tiges et une houppette de poudre emballée dans un Kleenex. «On veut un teint mat qui ne cartonne pas, une radiance qui ne brille pas et un maquillage classique et moderne à la fois… N’oubliez jamais qu’un maquillage de soirée est un équilibre délicat.»
Elizabeth Stewart, la styliste la plus influente, est derrière chacune des apparitions très remarquées de Cate Blanchett.
2015 DAVID M. BENETT
MARC PIASECKI/GETTY IMAGES
Pati Dubroff a maquillé Natalie Portman pour la première de «Jane Got a Gun» cette semaine, Kirsten Dunst (à gauche) et Kate Bosworth (en bas à gauche) aux derniers Golden Globes.
Le 28 février à Hollywood, les stars défileront sur tapis rouge, inspirant dans le monde entier des millions de commentaires au sujet de leur apparence. En quête de perfection absolue, les actrices font appel à des équipes d’experts qui ont chacun leurs rituels. Conseils de ces gourous de stars.
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Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
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Le Temps l Samedi 27 février 2016
J’avais l’habitude installée De courir jadis chez l’épicier Accordée certes, mais plutôt excitée A l’idée de dévorer et fleurer Sans doser, ni créer Bouquets de roses et d’iris Caramels délicieux et rouleaux de réglisses Effluves de musc, ambre, patchoulis de Java Ô réel, réel comble de nirvana. Furieusement, bouche fine volatile Ce rituel gastrolâtre a duré bien des années dociles Et toutes mes sucreries, mes arômes préférés Ne m’ont pas épargnée, ô Galatée. A force d’être infusée, macérée Composition goulue aux pétales attentats Alambic passionnée, j’infuse avec faim Paradis olfactif où le sillage est roi Je deviens palette gourmande, parfum émotionnel.
MIAM
Comment les parfums sont devenus des gourmandises
© Carmen Campo Real – le 2 février, 2016 Ce poème a été composé pour «Le Temps» par la poétesse genevoise Carmen Campo Real, dont l’œuvre est publiée chez Slatkine.
La Vie est Belle, de Lancôme, caracole en tête des palmarès. Catégorie: parfums gourmands. Cette famille est née en 1992 avec la création Angel de Thierry Mugler. Des fragrances addictives et régressives qui font référence aux souvenirs d’enfance les plus doux. Et en plus, ça ne fait pas grossir. Mais comment expliquer cet engouement? Par Isabelle Cerboneschi monde aime le sucre. Quand on met du sucre dans un parfum, ça rend aussi les choses plus douces, relève le parfumeur Dominique Ropion, auteur de La Vie est Belle de Lancôme (lire interview p. 22). Mais si on le fait intelligemment, on peut l’utiliser d’une façon esthétique et avec une construction cohérente. Dans la Vie est Belle ou dans Angel, les notes sucrées ont été utilisées comme un élément de construction indéniable et indispensable, en vue d’un final esthétique voulu. Les gourmands sont une extension des semi-orientaux, des fleuris semi-orientaux, ça commence par Shalimar, Must, Obsession, souligne Dominique Ropion. Mais avec Angel, on est allé beaucoup plus loin avec les notes Veltol, ces fameuses notes caramel.» Ces gourmandises parfumées font aussi appel à la mémoire olfactive: les adolescentes des années 70 portaient les eaux de toilette Village, premières senteurs autorisées. Des jus ludiques et colorés qui sentaient la pomme verte, la fraise, le bubble gum et avaient des odeurs de bonbons acidulés. Passer de ces senteurs régressives à Angel leur fut facile. Leurs filles, nées dans les années 90, ont grandi avec le nez dans le cou de leur mère qui sentait le patchouli et le caramel d’Angel. L’odeur gourmande devenait symbolique de l’amour maternel (du manque d’amour, aussi parfois). Ces enfants ont désormais 24 ans, sont devenues de jeunes adultes qui achètent leur parfum, et se tournent naturellement vers ces senteurs-là, pour la douceur du souvenir. Les parfums gourmands parlent au cœur. On s’y emmitoufle comme dans une couverture douce, ils font baisser le taux d’anxiété et remontent le moral. Des doudous invisibles, rassurants, que l’on peut emporter partout avec soi.
Le jour où Angel est apparu… Lorsque le parfum Angel de Thierry Mugler fut lancé en 1992, une nouvelle famille de parfums est née: les gourmands. Son créateur, Olivier Cresp, raconte cette naissance.
Bulgari, Omnia Paraiba, (cacao, fruits de la passion).
Yves Saint Laurent, Black Opium (café, vanille).
Christian Dior Parfums, Poison Girl, (fève tonka, vanille).
Viktor & Rolf, Flowerbomb, (caramel, vanille).
Lancôme, La Vie est Belle (Florale, fève tonka, praline, vanille).
Roger & Gaillet, Fleur de figuier, (figue confite).
Jimmy Choo Parfums, ILLICIT, (accord miel ambre).
Le Temps: comment est née cette idée de note gourmande? Olivier Cresp: J’ai commencé à travailler sur ce projet en 1989 déjà, avec Véra Strubi. Elle venait de quitter Montana pour entrer chez Thierry Mugler dont elle est devenue la présidente, engagée par le groupe Clarins. A l’époque, elle était seule dans le service. C’est formidable d’imaginer que petit à petit elle a monté un empire, créé une success story, et réalisé un chiffre d’affaires phénoménal. Elle avait demandé à cinq ou six parfumeurs de chez Quest, dont moi, de lui présenter notre meilleure idée, notre plus beau joyau caché dans le tiroir. Elle ne nous a pas donné de projet spécifique. Je lui ai donc montré une jolie note que je travaillais qui s’appelait «Patchou», une espèce de patchouli très vanillé. C’est le projet sur lequel elle a voulu se concentrer: le Patchou OJC (mes initiales : Olivier Jacques Crest). Et on a travaillé main dans la main, ensemble, pendant plusieurs mois, à développer le parfum. Je n’avais pas vu le flacon, elle ne m’avait pas parlé du nom, ni de quoi que ce soit, elle voulait simplement développer un très grand jus féminin. Je savais que c’était pour Thierry Mugler, mais c’était tout. Elle trouvait mon parfum extraordinaire, parce que très puissant, mais qu’il manquait de féminité, qu’il était très androgyne et qu’il faudrait quand même lui apporter des fleurs. Ajouter des fleurs, c’est ce que j’ai essayé de faire entre la note 50-52 et la note 120-130... La note 52, qu’est-ce que c’est ? La modification: chaque fois que je fais une formule, je lui donne un numéro différent. Pour Angel, j’ai fait 620 essais, 620 formules différentes.
C’est beaucoup pour un parfum ? Oui. Parfois, il m’arrive de faire 40, 50 modifications sur le thème, mais d’autres fois je peux en faire 1000 ou 2000, ça dépend. Aujourd’hui, on travaille beaucoup plus vite qu’il y a 20 ans parce qu’on a des robots qui pèsent nos formules. Mais le processus est le même. Entre l’essai 50, celui qui avait plu à Véra Strubi, et l’essai 120, elle me disait «rajoutez de la féminité ». Elle voulait que j’ajoute de la rose, du jasmin, de la pivoine, etc., mais chaque fois que j’essayais ces accords fleuris dans mon parfum, ça ne marchait pas. On était au pied du mur. Comment le projet est-il reparti? Elle a eu l’idée de me faire rencontrer Thierry Mugler! Il est venu dans mon bureau un après-midi, il est resté quatre heures, et il m’a parlé de lui, de sa vie, de ses grands-parents, de ses parents, de ses voyages. Il m’a raconté qu’il aimait les fêtes foraines, qu’il était Alsacien. A un certain moment, il m’a confié qu’il était gourmand et que quand il était gamin, il buvait des chocolats chauds que sa grand-mère lui préparait, dans lesquels il trempait des gâteaux aux raisins. On a beaucoup parlé de Russie, il m’a montré qu’il photographiait beaucoup de toits avec des étoiles, parce qu’il adore les étoiles. Je lui ai fait sentir mes essais et quand il est parti, je me suis dit que j’allais créer un accord qui soit sa madeleine de Proust autour du chocolat de son enfance. Comment crée-t-on une note de chocolat? Quand j’habitais aux Etats-Unis, j’avais fait un stage dans les arômes alimentaires et j’avais créé un tas d’accords à base de caramel, de miel, de chocolat. En France, à l’époque, aucun parfumeur n’avait osé penser à travailler sur des accords caramel, chocolat, miellés, amandés, de façon à les incorporer en parfumerie. Aujourd’hui, c’est monnaie courante. Je savais que
Olivier Cresp, le «père» d’Angel.
BLAISE LAVIGNE
tomber quelques gouttes d’eau de rose et intrigant avec ses notes de poivre et de bois de gaiac. La même année, on faisait des orgies olfactives d’amande amère découverte dans Rahat Loukoum de Serge Lutens pour les Jardins du Palais Royal. En 2005, Boum! Une explosion de fleurs et de gourmandises avec le lancement de Flowerbomb de Viktor & Rolf. Les parfumeurs Carlos Banaïm, Domicile Berthier, et Olivier Polge voulaient «une profusion de fleurs, qui ne soit pas seulement olfactive, mais aussi gustative, un délice pour tous les sens». D’où l’accord autour de la rose, du jasmin, du patchouli, du caramel, de la vanille et des muscs blancs de ce «floriental gourmand». La vapeur de riz dans Kenzo Amour en 2006 opposait sa douceur à un monde en mutation. Et que dire de cet étonnant accord de caviar lactescent et de figue découvert dans Womanity de Thierry Mugler, lancé en 2010? Il fallait oser… Sans oublier La Vie est Belle de Lancôme, lancé en 2012 qui caracole en tête des palmarès. Avec ses notes gourmandes de fleurs d’oranger, de jasmin, d’amande amère, de fève tonka, de praline et de vanille, ce dessert olfactif est le parfum préféré des Suissesses pour la seconde année consécutive: plus de 409 parfums sont vendus dans notre pays par jour et plus de 365 000 flacons depuis le lancement. Comment expliquer cet engouement pour les gourmands? De la même manière que l’on explique la passion des enfants pour les bonbons. Une attirance génétique pour commencer: le sucre générant de l’énergie, l’organisme en est friand. Un attrait culturel ensuite: le bonbon, c’est la gourmandise, mais aussi la récompense. Les parfums gourmands sont des odeurs régressives et rassurantes. «Tout le
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uand Angel est sorti, ce fut comme un tremblement d’air dans le monde de la parfumerie. Une rupture. Personne n’avait osé cet accord-là, adjoindre au patchouli des notes utilisées dans l’industrie non pas des parfums, mais des arômes. Une sorte de caramel chocolaté. C’est Olivier Cresp qui en a eu l’idée (lire interview ciaprès) et qui a créé, sans le savoir et sans le vouloir, une nouvelle famille de parfums: les gourmands. Depuis, ces douceurs olfactives caracolent au sommet des sondages, La Vie est Belle de Lancôme en tête. Cela fait donc vingtquatre ans – rien à l’aune de l’histoire de la parfumerie – que les parfumeurs font leur petite cuisine olfactive, maniant les arômes, parfois avec dextérité, parfois avec la main un peu trop lourde. Ne devient pas chef pâtissier qui veut. Tous les ingrédients y sont passés. Au fil des années et des coups de cœur, on a adoré trouver de la fève tonka dans Le Mâle de Jean Paul Gaultier, créé par Francis Kurkdjian et lancé en 1995, même si ce parfum fait officiellement partie de la famille des orientaux-fougère, et cette note de café si prégnante dans A Men de Thierry Mugler lancé en 1996. L’apparition de la réglisse à la vanille dans Lolita de Lempicka en 1997 fut une jolie manière de laisser émerger de doux souvenirs: ces fins d’après-midi, à la sortie de l’école, où l’on se ruait dans le bureau de tabac du coin pour acheter un rouleau de réglisse avec un bonbon en son centre. Les premières notes lactées, si régressives, sont apparues dans l’extraordinaire Feu d’Issey Miyaké, écrit par Jacques Cavaillé, lancé en 1998 et hélas disparu. Ce parfum était à la fois réconfortant comme un lait chaud dans lequel on aurait fait
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j’avais un très bon jus et je me suis dit que j’allais ressortir mes petites recettes d’accords que je travaillais aux USA pour voir si ces facettes allaient fonctionner sur mon patchouli vanillé. Je les ai montrées à Véra. Elle voulait un jus confidentiel. Elle ne voulait pas le lancer dans les parfumeries du monde entier, juste dans les meilleurs points de vente. J’avais l’impression de faire un parfum de niche avant même que ceux-ci n’existent. Elle voulait un jus bleu, parce que Thierry Mugler adore le bleu, mais pas une odeur marine. Elle aimait l’idée du contraste entre le bleu et la note gourmande. Avec un nom comme Angel, on s’attend à quelque chose de gentil et de romantique alors qu’en fait, c’est un parfum sensuel, chaud, torride, à double lecture. Avez-vous imaginé alors qu’Angel donnerait naissance à une nouvelle famille olfactive? On savait que le jus était très bon, tout le monde se retournait sur ma femme qui le portait pour le tester et lui demandait «qu’est-ce que vous portez, est-ce qu’il est en vente?» Je savais que j’avais une pépite, mais je ne me doutais pas que ça allait être une nouvelle famille olfactive puisque c’est involontairement que j’ai créé la famille des gourmands. Ces notes Veltol, qui sentent le caramel, qu’on trouve maintenant dans de nombreux parfums, étaient-elles déjà utilisées dans la parfumerie avant Angel ? Non, vous n’en trouvez dans aucun parfum avant 1992. Les parfumeurs la connaissaient, mais ne l’utilisaient pas. Comment définissez-vous les parfums gourmands? Ils sont appétants, on a envie de les manger, ils donnent envie de croquer. Ils sont gourmands parce qu’ils sont sucrés, vanillés, opulents. Prenez par exemple Loverdose de Diesel: il est gourmand parce qu’il sent
la réglisse. Et puis c’est un genre régressif. J’aime bien puiser ma parfumerie dans des souvenirs d’enfance liés aux recettes de cuisine. J’avais fait un parfum pour Kenzo, Kenzoki, qui sentait la vapeur de riz. Je m’étais rendu à Genève, chez Firmenich, pour chercher des idées au département des arômes alimentaires et j’avais demandé à un aromaticien comment il faisait le muesli. Je suis reparti à Paris, j’ai écrit ma formule en mettant justement des notes vanillées, lactées, laiteuses, un peu musquées, avec des départs un peu noisette, un peu de pomme et du riz, j’ai rajouté un nature-print de riz basmati. Un nature-print? C’est un petit appareil qui nous permet de capter les odeurs et de les restituer. C’est comme un «head space». Ce qui est important en parfumerie, c’est d’avoir des idées et de les réaliser. Etes-vous gourmand ? Oui, mais je fais très attention à ce que je mange. Ça m’évite d’être gros. Comment expliquez-vous que la famille des gourmands soit en tête de tous les classements? Parce qu’ils sont régressifs. Ils font appel à la petite enfance, une période où l’on a tous été heureux, c’était un monde protégé, où l’on connaissait nos grands-mères, nos mamans qui nous fabriquaient des gâteaux et des plats succulents. Et chaque fois qu’on respire ce genre de notes, on se sent bien. Les odeurs qu’on a connues dans le passé et qui resurgissent, c’est comme entendre une musique ancienne qui donne envie d’acheter le CD. Pareil avec les odeurs lactées, crémeuses, celles qui sentent la peau, une peau charnelle… Un sociologue ou un psychiatre pourrait l’expliquer mieux que moi. Propos recueillis par Isabelle Cerboneschi
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Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
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MISE EN BEAUTÉ
Le Sacre du printemps
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Du bleu aux yeux et du rose aux joues. Les palettes printanières rendent grâce à une nature éblouissante, lumineuse et tendre à la fois. Par Estelle Lucien
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SYLVIE ROCHE
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En backstage du défilé Atelier Versace automne-hiver 2015-2016. Un maquillage comme un hymne au printemps.
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es cieux plus bleus, des gazons qui verdissent, des champs qui fleurissent et un soleil qui reprend force: c’est la promesse d’une saison qui sonne la levée de la dormance hivernale. C’est le printemps. Et il s’est glissé dans les palettes, vernis, blush et autres merveilles des artistes du maquillage. Chez Dior, c’est côté jardin qu’on est allé cueillir une brassée de couleurs. Deux délicates boîtes, Glowing Gardens, dévoilent chacune cinq couleurs et s’inspirent du jardin de la villa Les Rhumbs à Granville, maison d’enfance de Christian Dior qui, aujourd’hui, abrite son musée. L’une, «Blue Garden», fait vibrer la douce lumière des ciels normands, où le bleu est toujours teinté d’un gris mélancolique. Quant à la
palette «Rose Garden», elle offre, autour du rose tendre, une variation de nuances allant du vert au jaune, du brun au pêche. Côtés teint, Dior nous joue encore un air floral avec Diorskin Nude Air Glowing Gardens, une poudre frappée d’un motif pétale, en deux tons, soit beige irisé, soit rose pâle, à la texture fine et légère, comme une caresse qui vient nous sortir du long somme hivernal. C’est aussi sous le signe du rose, dans une version plus opale, qu’Yves Saint Laurent Beauté fête le réveil de la nature, avec Gypsy Opale, une palette précieuse, pièce de collection dont Lloyd Simmonds, directeur artistique Maquillage de la maison déclare: «C’est une manière belle et rafraîchissante de donner au visage un éclat rosé et printanier.»
Du rose, encore et toujours, «pétale doux comme un bourgeon de fleur et praline tendre et gourmand» pour Clarins qui le pose sur nos lèvres. Alors que son Multi-Blush fouette joues et pommettes, tout en les protégeant grâce à des cires d’origine végétale: de rose, de jojoba, de mimosa et de tournesol. Guerlain aussi nous rafraîchit et rosit le teint avec les microperles de Météorites Voyage produites à partir de nacres précieuses. Pour Chanel, le printemps se vit à l’heure et à l’aube des cieux californiens: vibrant et euphorisant. Son blush Sunkiss Ribbon dessine des dégradés de rose fuchsia, corail doux, rouge intense, beige cuivré et rose frais, à appliquer en finition sur tout le visage, en blush au creux de la pommette
ou en voile de couleur pour marquer les tempes, le front et l’ovale. Quant aux yeux, ils voient bleus, notamment avec Illusion d’Ombre, et sa teinte envoûtante Ocean Light, aux pigments puissants. Avec la palette Les 4 Ombres Tissé Beverly Hills, le regard s’habille de turquoise, de violet, de beige et de mauve, et évoque aussi les profondeurs chromatiques d’un océan revitalisé par un soleil généreux. A moins que ce ne soit un champs d’iris sauvages. C’est le printemps, tout est permis, même de porter du vert au bout des doigts, mais aussi du bleu. Entre le doux Garden 302 de Dior, l’évanescent Peace Green 70 d’Yves Saint Laurent, ou le 153 Bleu Ciel Parisien de Lancôme, il faut choisir. Ou pas.
1. Palette Gypsy Opal, Yves Saint Laurent 2. 5 couleurs Glowing Gardens, bleu, Dior 3. Les 4 Ombres, Tissé Beverly Hills, Chanel 4. 5 couleurs Glowing Gardens, rose, Dior 5. Multi-Blush, 05 Rose, Clarins 6. Huile à lèvres bi-phasée, Juicy Schaker, Lancôme 7. Laque Couture, 70 Peace Green, Yves Saint Laurent 8. Vernis 302 Garden, Dior 9. Vernis, 153 Bleu Ciel Parisien, Lancôme 10. Baume embellisseur lèvres, Eclat Minute, toffee pink shimmer, Clarins 11. Météorites Voyage, perles de poudre d’exception compactée, Guerlain
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Beauté
Le Temps l Samedi 27 février 2016
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INTERVIEW SECRÈTE
Dominique Ropion, qu’avez-vous fait de vos rêves d’enfant?
Dans chaque numéro, Isabelle Cerboneschi demande à une personnalité de lui parler de l’enfant qu’elle a été, et de ses rêves. Une manière de mieux comprendre l’adulte qu’il ou elle est devenu(e). Plongée dans le monde de l’imaginaire
«Les formes esthétiques en parfumerie, c’est comme de la sculpture» pas novateur, au sens qu’il n’est pas une révolution dans la parfumerie, il se démarque, tout en étant largement accepté. Et c’est la grande difficulté d’ailleurs de ce genre de projet.» A l’écouter raconter sa carrière, on a le sentiment que tout cela lui est arrivé par hasard. Comme si le talent n’avait pas besoin d’un beau terreau fertile pour émerger. Le succès, Dominique se cache un peu derrière. Il se verrait bien homme de l’ombre, homme invisible, plutôt. Sauf que la vie, qui sait parfois être belle, l’a justement placé là, juste sous la lumière. Le Temps: quel était votre plus grand rêve d’enfant?
Dominique Ropion: Oh la! Est-ce que j’ai eu un rêve d’enfant? Je n’en suis même pas sûr, c’est ça le pire. Vous ne vous projetiez pas? Même si j’avais une inclination pour beaucoup de choses, je ne me disais pas: «Tiens, quand je serai grand, je serai pilote de ligne ou parfumeur ou quelque chose comme ça.» Je connaissais le métier de parfumeur depuis ma plus tendre enfance, ma mère travaillait chez Roure, mon grand-père avait été directeur financier chez Roure, et quand j’étais jeune étudiant, je faisais des jobs d’été chez Roure. Les odeurs étaient très importantes pour moi, c’est quelque chose qui m’a toujours intrigué. Quand j’étais tout petit je respirais tout, je sentais toutes les choses. J’adorais les odeurs, mais je n’envisageais pas d’en faire un métier parce que j’étais plutôt scientifique, en fait. Et puis, la parfumerie, surtout à cette époque, c’était un monde un peu à part, très idéalisé, un peu inaccessible. Vers quel âge tout a vraiment commencé? J’avais 22 ans. J’avais fait un stage au service de recherche chez Roure, or un étudiant qui devait suivre l’école de parfumerie de Roure à Grasse s’est désisté au dernier moment et une place s’est trouvée vacante. J’étais là, on m’en a parlé, j’ai dit oui. Une des questions que j’aurais dû vous poser est celle-ci: «Quel métier vouliez-vous faire une fois devenu grand?» mais apparemment vous ne saviez pas… Je m’orientais plutôt vers un métier scientifique. Mais j’aimais beaucoup l’art. Vous voulez dire peindre ou créer? J’avais fait un peu de peinture, à un niveau amateur. De la musique aussi. J’ai un peu touché à tout en dilettante, mais c’est une chose que je n’aime pas trop, le dilettantisme. C’est pour ça que quand on me demande si j’ai des hobbys artistiques, je réponds non, parce que la parfumerie me suffit largement. Les problèmes esthétiques que l’on essaie de résoudre en parfumerie, on aurait à les résoudre aussi en musique, ou en peinture, ou dans n’importe quelle autre forme artistique. Les formes esthétiques en parfumerie, c’est comme de la sculpture. Le parfum est-il un art? Je pense, oui. Ça dépend quelle définition on donne de l’art mais si on dit que, par exemple, la musique c’est l’art d’assem-
bler des sons, eh bien la parfumerie c’est l’art d’assembler des odeurs pour en créer une forme identifiable. C’est la définition que je donne d’un bon parfum: on le reconnaît parmi 10 ou parmi 100. Après, on aime ou on n’aime pas, mais on a quand même créé quelque chose qui se démarque de ce qui existait précédemment. C’est très important aussi de savoir ce qui s’est fait avant. Quel était votre jouet préféré? J’avais des ours en peluche. J’aimais bien les petites voitures… C’était très banal en fait. Est-ce que vous avez gardé vos ours en peluche ? Non, à vrai dire je ne suis pas très nostalgique. Ma mère avait retrouvé des jouets qui m’avaient appartenu et que j’ai donnés à mes enfants. Je me suis dit que cela me rappellerait mon enfance, mais ça s’arrête là. Je ne suis pas tellement tourné vers le passé. Ce qui ne veut pas dire que je n’étudie pas les œuvres du passé, au contraire! J’étudie, j’ai étudié à fond – enfin, c’est peut-être prétentieux de dire ça – toutes les œuvres classiques. En parfumerie, en tout cas. A quels jeux jouiez-vous à la récréation ? Je jouais aux billes. Aux osselets, aussi. Vous savez jouer aux osselets? J’adorais ça. J’étais très adroit. Je jouais à «chat», des trucs comme ça… Grimpiez-vous dans les arbres ? Oui, mais pas pendant la récréation parce que, étant Parisien, c’était interdit. Et puis grimper sur un platane ou un marronnier, ce n’est pas facile. Je grimpais quand j’allais en vacances. Et qu’est-ce que vous ressentiez une fois là-haut ? J’avais peur de redescendre mais à part ça, je ne ressentais rien de particulier. Je faisais très attention en redescendant. Ce n’est pas une réponse très héroïque. Quelle était la couleur de votre premier vélo? Alors là, je ne m’en souviens absolument pas! J’en ai eu plusieurs… Je me souviens de la couleur du dernier! Noir. Vous l’avez eu à quel âge ? Je devais avoir 18 ans. Quel superhéros rêviez-vous de devenir ? Zorro. Pourquoi ? Je ne sais pas, j’aimais beaucoup
Zorro. L’idée qu’il agissait masqué, dans l’ombre, mais toujours avec panache et justice ! De quels superpouvoirs vouliez-vous être dotés ? L’invisibilité. Vous êtes un homme de l’ombre! Oui, c’est vrai. Pour faire quoi, l’invisibilité? Ah oui! Pour faire quoi?… C’est terrible ces réponses, parce qu’après faut développer… (rires) Je ne sais pas, pour faire quoi? Pour me retrouver là où je veux, quand je veux. Il y a un désir de liberté quand même derrière tout ça. Rêviez-vous en couloir ou en noir et blanc ? Alors ça, je ne m’en souviens pas du tout! Je ne me souviens pas des rêves. Quel était votre livre préféré ? Quand j’étais tout petit? C’était Eloïse, un livre illustré, pas vraiment une bande dessinée mais un peu quand même, vous voyez? Pas du tout. C’était un peu comme «Bécassine»? Non, c’était un livre qui avait été écrit par une Américaine, dans les années 50. Il y en a eu plusieurs. Il faudrait que je les retrouve… C’était vraiment passionnant ! Et qu’est-ce qu’elle faisait cette Eloïse? C’était une petite fille insupportable qui vivait au Plazza à New York. Elle faisait les 400 coups. Visiblement ses parents n’étaient pas là parce qu’elle vivait avec sa gouvernante, sa tortue et son chien qu’elle traînait en laisse, enfin elle traînait les deux en laisse, d’ailleurs… La gouvernante aussi? Plus ou moins: elle la menait par le bout du nez. Elle était connue de tous les serveurs du Plazza, tous les garçons d’ascenseur, le directeur… C’était une figure! Elle était très drôle. Vous l’avez relu depuis ? Je ne l’ai pas relu, mais je me suis rendu au Plazza il y a quelques années et ce qui est drôle, c’est que dans le livre d’Eloïse, tout était en noir et blanc avec un peu de couleur, un peu de rose fuchsia, si mes souvenirs sont bons, mais tout était tellement bien représenté, les ascenseurs, qui sont quand même très particuliers, les restaurants, le Palm Court, la façon dont les couloirs étaient disposés. Et quand je suis allé au Plazza, je reconnaissais exactement tout
ce qui était dans le livre. C’est amusant. Quel goût avait votre enfance ? Le goût que je voulais bien lui donner… Je m’adaptais. Et si cette enfance était un parfum, ce serait ? Il y a toujours une odeur d’eau de Cologne qui traîne chez moi, qui a toujours traîné depuis mon enfance et qui m’a toujours poursuivi. Elle appartenait à quelqu’un cette eau de Cologne ? Je pense que c’était celle de ma grand-mère, mais beaucoup de gens la portaient dans la famille. Pendant les grandes vacances, vous alliez voir la mer ? Oui, j’allais à la mer, j’allais à la montagne, j’allais un peu partout. Mais j’étais plutôt amoureux de la campagne, des Landes. En fait, l’amour de la mer m’a pris vers une vingtaine d’années. J’aime cette immensité. Quand vous êtes en Bretagne, sur cette côte entre Saint-Malo et le Mont Saint-Michel, c’est magnifique! Vous avez des cieux qui changent toutes les cinq minutes, ce sont des tableaux qui se créent devant vos yeux. Plus les odeurs! Vous en avez de fantastiques. Et pas que des notes marines, – il y en a, évidemment, c’est la moindre des choses – mais il y a des senteurs que je retrouve dans les jasmones, vous voyez? Le côté très typique de cette note que l’on trouve dans le jasmin, c’est assez bizarre. Savez-vous faire des avions en papier? Ah oui, même plus que ça, je sais même faire des petits origamis, des petits oiseaux en papier, des cocottes… J’avais appris avec un ami japonais. Aviez-vous peur du noir ? Non… Oui… Peut-être, comme tous les enfants mais ça ne m’a jamais traumatisé. Ce n’était pas une phobie. Vous souvenez-vous du prénom de votre premier amour? J’ai bien peur que non. Ce n’est pas glorieux, hein? C’est même scandaleux… Vous souvenez-vous de l’enfant que vous avez été ? Oui. Ni bien ni mal… J’étais relativement sage. Enfin j’étais, j’avais un monde à part. Cet enfant vous accompagne encore ? Oui, sûrement.
HAJIME WATANABE FOR IFF
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l a un faux air de David Niven, mais sans les moustaches. Ce Philéas Fogg de la parfumerie crée comme on voyage, avec des prises de risques et une immense liberté. A condition bien sûr que le client la lui laisse, cette liberté. Il a créé de beaux parfums rassembleurs (impossible de les citer tous) comme le merveilleux Ysatis de Givenchy en 1984, Dune de Christian Dior (1991), Alien de Thierry Mugler (2005), Acqua di Gioia d’Armani (2010), et surtout La Vie est Belle de Lancôme qui, depuis son lancement en 2012, caracole en tête des palmarès. On lui doit aussi quelques chefs-d’œuvre olfactifs plus confidentiels. Il faudrait lui élever une statue pour tous les opus qu’il a signés pour Frédéric Malle, et notamment pour Portrait of a Lady, Une Fleur de Cassie, Vetiver extraordinaire et Carnal Flower, cette tubéreuse carnassière, lactescente et animale à la fois. Un piège olfactif. La rencontre avec Dominique Ropion s’est faite à l’occasion de la présentation de La Vie est Belle, l’eau de toilette florale, une déclinaison de l’opus superstar de la maison Lancôme. Quand on lui demande s’il s’attendait à un tel succès pour son parfum La Vie est Belle, le parfum préféré des Suissesses, Dominique Ropion répond: «Non, non je n’en avais aucune idée. Franchement, je ne m’y attendais pas à ce point. Les gens espèrent des choses qui sortent de l’ordinaire, qui aient une identité et qui ne soient pas la énième version de quelque chose qui existait déjà. Même si la Vie est Belle n’est